1
Aurélie Docteur
C.M.M.E. / Centre de Responsabilité Psychothérapies
Centre Hospitalier Sainte Anne
Plan
2
Les troubles bipolaires
Les résultats des études
Les programmes TCC des troubles bipolaires
Le modèle biopsychosocial des troubles
bipolaires
Les troubles bipolaires
Partie 1
3
4
Définition
• Le trouble bipolaire est une maladie chronique caractérisée par « la survenue généralement répétée d’épisodes dépressifs, maniaques, hypomanes ou mixtes séparés par des périodes au cours desquelles les sujets sont à priori indemnes de dysfonctionnement psychique majeur » (Henry, 2005, p. 9).
• Une maladie chronique au profil évolutif très variable donnant un spectre clinique très large
5
Les troubles bipolaires: différents sous-types
BPIII: épisodes maniaques ou hypomaniaques induits par le traitement
et EDM ou EDM et antécédent familial (1er degré) de bipolarité
BP I Episode maniaque + EDM
BP II EDM + hypomanie spontanée
Cyclothymie
6
Le patient en phase maniaque…
HUMEUR PENSEE COMPORTEMENTS
Euphorique
Gaie
Exaltée
Optimiste
Irritable
labile…
La pensée
s’emballe
Le patient parle
sans interruption
Jeux de mots,
plaisanteries
Hyper
expressivité…
Hyperactivité physique
Réduction du temps de sommeil
Réveils de plus en plus précoces
Moins de fatigue
Amaigrissement
Désinhibition
Excès de travail
Projets inadaptés
Achats inconsidérés
Surconsommation
d’alcool/tabac/drogues
Comportements agressifs…
7
L’état hypomaniaque
• Mêmes caractéristiques que l’état maniaque (humeur expansive
ou irritable), mais symptômes moins nombreux, moins intenses et
moins invalidants.
• Persistance des symptômes au moins 4 jours.
• Cassure par rapport à l’état antérieur, comportements et
propos inhabituels, changements de l’humeur
• Éléments d’orientation diagnostique: réduction temps de sommeil,
multiplication des projets, sociabilité inhabituelle, distractibilité,
surestimation de son image, surconsommation d’alcool et de
tabac,…
8
Le patient en phase dépressive…
HUMEUR PENSEE COMPORTEMENTS
Triste
Sans espoir
Sentiment de vide
Irritable
Pessimiste
Perte d’intérêt/de
plaisir
Culpabilité/dévalorisati
on
Idées suicidaires…
Ralentie
Difficulté de
concentration/compré
hension
Communication à
l’autre difficile, le
patient se sent
«décalé »…
Ralenti, tout est plus
« coûteux »
Fatigue, surtout le
matin
Perte de motivation
Perte
d’appétit/hyperphagie
Troubles du sommeil…
9
L’épisode mixte
• Intrication de symptômes maniaques et dépressifs
• CIM-10: présence de symptômes hypomaniaques, maniaques
ou dépressifs, intriqués ou alternant rapidement sur une durée
de 2 semaines.
• DSM-IV: durée limitée à 1 semaine minimum et présence
simultanée de critères cliniques d’épisodes dépressifs et
maniaques.
10
La cyclothymie
• Succession, sur une durée minimale de 2 ans, de périodes
d’hypomanie et de dépressions légères.
• États sub-syndromiques qui ne présentent ni les critères d’un
EDM ni ceux d’un épisode maniaque
11
Le trouble bipolaire…Un trouble fréquent
• 1,2% en population générale (Rouillon, 2008), soit près de 500 000 individus en France.
• entre 3,4 % (Hirshfeld et al., 2003) et 6,4 % (ECA) si inclusion des formes atténuées non reconnues dans les classifications internationales
• non modifiée par l’origine ethno-culturelle des patients (Rouillon, 2008)
• sex ratio de 1/1 mais femmes début plus tardif, fréquence plus élevée d’épisodes dépressifs et de cycles rapides
12
… récurrent
• 60% de récidives dans les 2 ans suivant un épisode aigu
• 75% de récidives dans les 5 ans (Gitlin et al., 1995)...même sous traitement
• symptômes subsyndromiques persistants entre les phases aigues (Fava, 1999)...dans 50 à 60% des cas (Goldberg et al., 1995; Keller et al., 1992)
• même si les patients ne rechutent pas sur une durée moyenne de 4,3 ans, 46% continuent à présenter des symptômes résiduels...
13
…Un âge de début souvent précoce…Un
diagnostic tardif
• Age de début principalement à la fin de l’adolescence et au début
de l’âge adulte
• 50% avant l’âge de 18 ans
Le diagnostic…
• en moyenne 8 ans après le début de la maladie (Hirschfeld et al,
2003).
• En moyenne 3 à 5 médecins avant bon diagnostic et bon traitement
• Diagnostic difficile quand phases d’excitation minimes
• Pas dû à une réticence des patients à consulter mais à la
complexité de la maladie
14
…Une maladie invalidante
• parmi les troubles psychiatriques les plus fréquents.
• Troubles de l’humeur = 3ème rang derrière les troubles
phobiques, l’abus de substances et l’alcoolisme.
• 6ème cause de handicap mondial (WHO, 1996).
• parmi les 10 maladies les plus coûteuses et invalidantes au
niveau mondial (OMS)
15
…D’importants retentissements sur la vie
sociale, familiale et professionnelle
• 50 à 75% divorcent (contre environ 33% en population générale)
• 1/3 de chômage (indépendamment d’une situation d’échec scolaire et d’une interruption de travail)
• + de 50% ont ou ont eu des difficultés financières
16
…Un taux de mortalité élevé
• Taux de mortalité deux à trois fois plus élevé qu’en population
générale...environ 15% (Rouillon, 2008) soit près de 2000
morts par an.
• Risque suicidaire majeur: 10 à 15% des patients non traités
(Gay, 2007)
17
Etiopathogénie
FACTEURS GENETIQUES
Risque de 10% si parent
1er degré a déjà un
trouble bipolaire
FACTEURS
PSYCHOLOGIQUES
ET ENVIRONNEMENTAUX
Évènements de la petite
enfance, Évènements de vie
pénibles,Stress à répétition,…
18
LES COMORBIDITES
19
Les comorbidités… Axe I
Les pathologies les plus fréquemment retrouvées sont :
- les troubles anxieux (42 % dans leur ensemble),
- l’abus de substances (42 % dans leur ensemble),
en particulier l’alcool (33 %),
la marijuana (16 %),
l’abus de cocaïne et de stimulants (9 %)
…et les sédatifs (8 %) ;
- les troubles des conduites alimentaires (6 %), en particulier la boulimie.
20
Les comorbidités… Axe II
• Trouble de la personnalité: traits de caractères et attitudes
rigides, inadaptés et responsables d’une altération significative
du fonctionnement social et professionnel
• - Fréquence comorbidité trouble bipolaire/ personnalité
borderline
• - Attention car caractéristiques communes
• - Attendre la stabilisation de l’humeur
21
Ces comorbidités…
• sont très fréquentes (50 à 70% des patients bipolaires traités)
• peuvent masquer la maladie
• peuvent constituer des facteurs de résistance ou d’aggravation
du pronostic (Gay, 2007)
22
Le diagnostic
SYMPTOMATIQUE
Critères DSM IV
CIM 10
CLINIQUE
Antécédents
familiaux
Histoire personnelle
de la bipolarité
23
L’entretien
• Polarité de l’épisode actuel
• Intensité syndromique
• Caractère pur ou mixte
• Présence éventuelle de symptômes d’allure psychotique
• Périodicité/récurrence des épisodes
• Existence éventuelle de comorbidités
• Antécédents familiaux
• Histoire de la maladie
• Âge de début
• Nombre d’épisodes( > ou = 4 par an cycles rapides)
• Nombre d’hospitalisations
• TS?
24
Entretien en vue du diagnostic d’hypomanie
Dans votre vie, avez-vous connu des périodes bien délimitées dans le temps au cours desquelles vous avez ressenti ou vécu les choses suivantes:
• Une jovialité excessive ou euphorie sans raison valable?
• Davantage d’énergie?
• Beaucoup plus d’activités?
• Moins besoin de sommeil, sans pour autant ressentir la fatigue?
• Davantage de projets sans rapport obligatoire les uns avec les autres et sans pour autant les mener à bien ou même à terme?
• Une grande facilité et un grand besoin de parler?
• Un besoin accru de contacts sociaux et amicaux en les recherchant activement?
• Des dépenses excessives et déraisonnables pouvant même vous mettre en
danger?
Ces changements ont-ils été observés par votre entourage familial,
amical ou professionnel au point de vous attirer des remarques
désobligeantes ou d’inspirer leur inquiétude?
25
• Episodes d’excitation du niveau maniaque ou hypomaniaque, ou lorsque tempérament et comportement étaient précédemment excités, exaltés, hyperactifs,
• Chez les parents de premier degré, existent des antécédents de pathologie bipolaire,
• Lorsque la réponse aux traitements antidépresseurs est négative avec des éléments d’irritation et de dysphorie induite par ces médicaments (Bourgeois, 2006)
Rechercher la bipolarité lorsque…
26
Le patient déprimé:
quelles
particularités à
l’entretien?
27
Présentation d’un cas clinique
• Mr B. est âgé de 23 ans
• En instance de divorce, il a démissionné d’un emploi de directeur
informatique (Angleterre) il y a 8 mois suite à une succession
d’évènements difficiles (séparation avec sa femme, suicide d’un ami
d’enfance).
• Actuellement sans emploi, il ne touche ni chômage (emploi précédent
non déclaré), ni RMI, vit actuellement seul
• Le patient se décrit comme un enfant turbulent et violent
(nombreuses bagarres dans la cour de récréation).
• Divorce des parents à l’âge de 4 ans.
• Le patient décrit un père absent et une mère dépressive.
• Après avoir suivi un BEP en électronique, il passe un BAC PRO.
• Le patient décrit durant cette période des problèmes de bégaiements
(jusqu’à l’âge de 19 ans) qui perturbent ses relations sociales.
28
• En février 2008, le patient consulte en vue d’un diagnostic de
TADAH.
• Confirmation du diagnostic et suspicion d’un trouble bipolaire.
• Diagnostic de bipolarité confirmé. Le patient n’accepte alors
aucune instauration de traitement thymorégulateur.
• Aucune TS dans le passé ni d’hospitalisation.
• Le patient est envoyé par son psychiatre en vue d’une inclusion à
un groupe de psychothérapie
Présentation d’un cas clinique…suite
29
A l’entretien…
• Le patient ne tient pas en place, est logorrhéique,
• Effectue des achats inconsidérés (13000 euros dépensés en 2
mois…alors sans aucun salaire) + 6000 euros d’impayés de loyer
• A des conduites à risque (brûle les feux rouges en scooter, a
provoqué un accident la veille, alcoolisme)
• Sommeil diminué de 50 à 75% (dort actuellement 2 h au lieu de
6/7 h de quota de sommeil habituel)
• Élabore des théories de « genèse biologique de la religion » (post
it sur les murs…)
• Contact inapproprié, clins d’œil à l’entretien
• A avalé ses barrettes de lexomil avec un St Emilion l’avant-veille
• Idéations suicidaires
• Pleurs à l’entretien
• Culpabilité +++
30
Quelle polarité de
l’épisode actuel?
Quelle conduite à
tenir?
Le modèle biopsychosocial des troubles
bipolaires
Partie 1
31
Un modèle d’intervention
intégrée
Stress
Vulnérabilité biologique
Apparition de prodromes
Stratégies de coping aux prodromes
inadaptées
Phase d’état
Altération des relations sociales
La vulnérabilité biologique
• Chaque patient présente un cyclicité saisonnière.
• Elle se présente sous forme:
– D’insomnie qualitative.
– D’une fatigabilité.
– D’une moindre appétence pour les activités plaisantes.
• Ou sous la forme:
– D’un sentiment de grande forme physique et psychique.
– D’une absence de sensation de fatigue.
Le stress ou les stresseurs
– Un ou plusieurs événements de vie
– Une rupture dans les routines biologiques
La vulnérabilité psychologique
• Interprétation de l’événement qui conduit à une réponse
comportementale.
Postulats silencieux – stratégies d’adaptation Schémas
Situation
Pensée automatique
Réaction émotionnelle
Réaction
comportementale et/ou
physiologique
Coping spontané face
aux prodromes dépressifs
• Consulter un médecin pour obtenir calmant et somnifères.
• Ne rien faire.
• Consommer des substances psycho actives.
• Rester au lit et espérer que cela ira mieux.
• Eviter les relations sociales.
Coping spontané
aux prodromes maniaques
• Poursuivre voire accroitre ses activités.
• Réduire sa durée de sommeil.
• Ne pas prendre le temps de se reposer.
• Dépenser de l’argent.
• Prendre des substances « pour tenir le coup ».
Déclenchement de l’épisode
• Résonnance entre un état du cycle biologique et
l’interprétation concordante d’un facteur de stress.
39
Les traitements pharmacologiques
• Le traitement médicamenteux de choix est la prescription de
thymorégulateurs (notamment lithium) qui ont
considérablement amélioré le pronostic de ce trouble, en
limitant le nombre de récidives
• sous lithium:
• 2 fois moins de TS
• 3 fois moins de suicides (Goodwin, 2003)
40
Leurs limites
- ¾ des patients sous thymorégulateurs rechuteront dans les 5 ans (Gitlin, 1995)
- 37% des patients suivant correctement leur traitement thymorégulateur connaitront des fluctuations de l’humeur (Gitlin, 1995)
• différentes raisons invoquées à cette non réponse ou réponse partielle :
- qualité de l’observance
- forme particulière, singulière de la maladie
- existence de facteurs de précipitation des troubles.
Les programmes TCC des troubles bipolaires
Partie 1
41
42
Définition des TCC
• « Les thérapies comportementales et cognitives sont des
psychothérapies verbales dont le but est d’apprendre au
patient certaines compétences psychologiques afin de l’aider
à mieux faire face à ces problèmes » (Mirabel-Sarron, 2007)
43
But de la TCC pour troubles bipolaires
• diminuer les rechutes dépressives et maniaques au côté des
traitements médicamenteux
Les programmes
• Depuis 1996, cinq programmes de TCC spécifiques aux
patients bipolaires ont été publiés.
• Ils comportent un tres grand nombre de points communs.
• Tous sont tres structurés et s’organisent en trois temps :
– une phase éducative (6 à 8 séances) ;
– une phase de techniques particulieres comportementales et
cognitives (12 séances) ;
– une phase de consolidation (2 séances puis suivi mensuel).
44
Les programmes TCC des troubles bipolaires
45
Le contenu des séances
• une évaluation des représentations mentales du patient concernant
sa maladie et son traitement ;
• une régulation des biologiques et sociaux;
• une identification précoce des prodromes dépressifs ou maniaques,
qui permettent au patient de réagir rapidement, de développer des
actions pour réduire les symptomes dépressifs ou maniaques ;
• un apprentissage des techniques cognitives : identification des
pensées dépressives ou des pensées liées à la manie qui amenent le
patient à des comportements extremes ;
• un apprentissage aux techniques de « décentration » qui va mener
le patient à définir des priorités, à hiérarchiser ses conduites, à
prendre des décisions plus argumentées ; et à prendre conscience
des différents facteurs de stress qui influencent les rechutes
dépressives ou maniaques 46
47
Les critères d’inclusion et d’exclusion
• Inclusion:
• hommes ou femmes entre 18 et 65 ans
• En rémission ou présentant des symptômes subsyndromiques persistants
• toutes comorbidités acceptées
• sous traitement thymorégulateur suivi et contrôlé
• Exclusion:
• addiction au premier plan du tableau clinique
• absence de compliance médicamenteuse
• refus de participation
• Troubles cognitifs
Les entretiens préliminaires et l’analyse
fonctionnelle
Questionnement ouvert
Création d’une relation thérapeutique
Discours éducatif: Parler de la thérapie :
– concrète,
– psycho-éducative, spécifique,
– orientée vers les problèmes engendrés par la dépression et la manie
L’analyse fonctionnelle
1. Les problèmes comportementaux ;
2. Hypothèses sur les différents schémas cognitifs « Je ne peux pas être aimé », « Je ne peux pas prendre soin de moi » , « Je ne peux pas être aidé » ;
3. Expériences de l’enfance ;
4. Mode de fonctionnement habituel du sujet (prise de décision,…)
48
Exemple de conceptualisation : Evelyne, 53 ans.
Bipolaire I
Schéma
inconditionne
l
Schémas conditionnels Cognitions Stratégies de coping
Je n’existe
pas
-Si j’attends on va m’oublier
Si je ne contrôle pas l’autre je
ne peux pas me contrôler.
Il s’en fiche de moi
Il va me quitter
Fuite dans les situations
d’attente.
Abandonne avant que l’autre ne
l’abandonne
Cherche à contrôler son
entourage
50
Damien, 33 ans,
étudiant en design.
BPI évoluant
depuis 15 ans.
Atcd fam de BP
(mère BPI).
Actuellement 6ème
EDM.
Quelles questions
poser pour
l’analyse
fonctionnelle?
51
Le déroulement de la thérapie
• en co-thérapie
• 20 séances hebdomadaires d’1h30.
• 10 participants en moyenne
Le repérage des symptômes
52
Humeur normale Phase dépressive Phase (hypo)maniaque
Humeur
Attitude envers soi
Confiance en soi
Activités habituelles
Vie sociale
Heures de sommeil
Appétit/habitudes alimentaires
Concentration
Rapidité de pensée
Créativité
Envie de s’amuser
Agitation
Sens de l’humour
Niveau d’énergie
Sensibilité au bruit
Projets
Prises de décision
Intérêt pour les autres
Pensées morbides
Notion du temps
Le contrat d’objectifs personnels
• Définition:
– un contrat qui définit une dizaine d’objectifs personnalisés
concrets et hiérarchisés du moins difficile au plus difficile
• Constats / difficultés:
– un outil compris par les patients
– son élaboration prend du temps
– l’avancée dans le contrat, objectif par objectif, est parfois
difficile
• patient trop pressé,
• changement constant d’objectif,
• définition d’un objectif trop élevé,
• non respect de la hiérarchie des objectifs,…
Les objectifs personnels de Marie
• Téléphoner au moins une fois par jour à une amie
• Traiter mon courrier une fois par mois
• Me remettre au vélo une fois par semaine
• Prendre des cours de yoga le samedi
• Prendre 30 min le midi pour déjeuner
• Éteindre mon téléphone le soir
• Inviter mes parents une fois par mois,…
54
Comment
définir un
objectif?
Comment
les
hiérarchiser
?
Le séquençage des tâches
• Définition:
– Définition de sous-étapes à la réalisation d’un objectif
• Constats / difficultés :
– 50% des patients le comprennent bien mais oublieront de le
réutiliser
– 50% des patients ne comprennent pas cet outil
Exemple d’Annie
• Annie a décidé de se lever à 7h00 une fois par semaine.
• La difficulté est qu’elle se leve actuellement à 12h00.
• Dans certains cas, le séquençage en sous-étapes ne permet pas de résoudre tous les problèmes. Il sert principalement en cas de blocage et d’inhibition. En revanche, certains problemes concrets nécessitent une prise de décision assez rapide et ne relèvent pas toujours de la démarche en sous-étapes. On utilise alors la technique de résolution de problème.
56
Quel
séquençage
possible?
Prescription d’activités agréables
• Définition: Auto-prescription d’une activité habituellement
agréable, de courte durée et choisie par le patient
• Constats / difficultés :
– Bien utilisée par les patients dans 50% des cas
– Les autres comprennent l’outil mais ne le réutilisent pas
Exemples de Nadine
• Me mettre du rouge à lèvre
• Me vernir les ongles
• Faire une partie de solitaire sur mon ordi
• Envoyer un texto
• Regarder le ciel
• …
58
Résolution de problème
• Définition: une démarche en 6 étapes
– Définition d’un problème cible (SMART)
– Recherche de solutions (au moins 10)
– Avantages et inconvénients de chaque solution, avec pourcentage
– Hiérarchisation des solutions, de la plus confortable à la plus inconfortable
– Mise en œuvre de la solution la plus confortable
– Constat
• Constats / difficultés :
– Un outil compris
– Un outil qui nécessite plusieurs répétitions
– Long et contraignant
– Entre 30% et 50% des patients l’utilisent avec un effet positif sur les
émotions et les pensées
Exemple de Nathalie
Étape 1 – Problème cible
•Reprendre la photographie
Étape 2 – Liste des solutions possibles
•Faire un safari-photo avec ma fille
•Prendre des photos dans la maison
•Toujours garder l’appareil photo sur moi
•Prendre l’appareil photo pour me rendre au travail
•Faire des photos dans les expositions et les musées
•Faire des photos dans le quartier
Étape 3 – Avantages et inconvénients de chaque solution
Safari-photo avec ma fille :
•Avantage : sortie avec ma fille (90 %)
•Inconvénient : coût (70 %)
Prendre des photos dans la maison (chats etc.) :
•Avantage : facile (100 %)
•Inconvénient : ennuyeux (80 %)
Toujours garder l’appareil photo sur moi :
•Avantage : occasion de faire des photos (70 %)
•Inconvénient : lourdeur de l’appareil (80 %)
Prendre l’appareil photo pour me rendre au travail :
•Avantage : beaucoup de sujets (90 %)
•Inconvénient : appareil lourd (80 %)
Faire des photos dans les expositions et les musées :
•Avantage : Nouvelles œuvres (70 %)
•Inconvénient : Loin du domicile (90 %)
Faire des photos dans le quartier :
•Avantage : facile (100 %)
•Inconvénient : vite limité (50 %)
Étape 4 – Hiérarchisation
•Faire des photos dans le quartier
•Prendre des photos dans la maison
•Faire un safari-photo avec ma fille
•Prendre l’appareil photo pour me rendre au travail
•Toujours garder l’appareil photo sur moi
•Faire des photos dans les expositions et les musées
Étape 5 – Choix de la solution la plus confortable
•Faire des photos dans le quartier
Étape 6 – Constat
•Plaisir de l’accomplissement. Elle décide finalement de procéder ainsi une fois par semaine, le samedi, durant 1 heure.
La life chart
• Définition: – « Histoire de la maladie bipolaire ».
– Constitution rétrospective des différents épisodes dépressifs et
maniaques, des dates d’apparition, de leur durée, des hospitalisations,
TS,…
• Constats / difficultés : – Un outil qui se construit tout au long des 18 premières séances de la
thérapie
– Récupération des informations difficile (dates, comptes rendus
d’hospitalisations,…)
– D’autant plus qu’il s’agit d’un trouble qui évolue depuis longtemps
(en moyenne 20 ans)
Exemple d'Evelyne
62
EM
EDM EDM EDM
EM
Suicide
conjoint
Rupture
amoureuse
Nouvelle
relation
déménagement
Diag BP ttt thymos
Le graphe de l’humeur
• Définition:
– Notation de l’humeur (Joie/tristesse) tous les jours à la même heure, sur une
échelle allant de -5 à +5
• Constats / difficultés :
– Contraignant à compléter au quotidien
– Les patients ne perçoivent pas l’intérêt dans l’immédiat
– L’intérêt est plus à moyen et long terme
– Quelques pièges:
• mettre une note qui moyenne la journée,
• ne mettre une note que si un évènement apparaît,
• noter chaque changement d’humeur sur la journée,
• minimiser sa note
0
+3
+5
+2
+4
+1
-3
-2
-5
-4
-1
Repas en famille
étendue
Questions sur ma
vie pro et perso
Ecriture dans mon
journal
exemple de Marie
L’identification des facteurs de stress
• Définition: – repérage des facteurs précipitants, internes et externes, ayant amené aux
différents épisodes.
• Constats / difficultés :
– Sous-entend que la life chart soit complétée
– Un travail sur du long terme, que les patients effectuent parfois
longtemps après la fin de la thérapie
– Un outil qui permet à 20-30% des participants d’identifier leurs
schémas
Exemple d'Evelyne
66
Facteurs
internes baisse
humeur
Facteurs
externes
baisse humeur
Facteurs
internes
hausse
humeur
Facteurs
externes hausse
humeur
Me sentir
abandonnée
Penser que l’on
ne me voit pas
Ruptures
sentimentales
décès
Sentiment de
contrôler
l’autre
Déménagements
Rencontres
amoureuses
L’identification des signes précurseurs
• Définition: – Repérage des signes précurseurs d’un épisode dépressif / maniaque
– Constitution d’un tableau en 3 étapes avec identification des signes
d’alerte précoces, intermédiaires et tardifs + des actions à mettre en
œuvre
• Constats / difficultés: – Un outil qui nécessite de sonder son entourage
– Certains restent perplexes quant à leur existence
– Certains confondent les signes précurseurs et les premiers signes de la
dépression
– 60% des patients ne les repèrent pas
Exemple de Katie
• Signes d’alerte de la manie:
– Tardifs
• Me lever plus tôt
• Rester 1 h au téléphone
– Intermédiaires
• Percevoir le rouge de manière plus intense
– Précoces
• Mettre des escarpins à tâlons
• Prendre un petit déjeuner le matin
68
Les techniques de décentration
• Définition:
– Recherche d’alternatives de pensée face à une situation émotionnellement insatisfaisante
– Etapes:
• Repérage situation-émotion-cognition-comportement
• Evaluation de l’intensité de l’émotion et du niveau de conviction à la pensée
• Recherche d’alternatives de pensées (questionnement socratique)
• Equilibre pensées positives / négatives
• Réévaluation de l’intensité de l’émotion et du niveau de conviction à la pensée
• Constats / difficultés:
– Long
– Contraignant
– 40% des patients les utilisent
– 20% des patients ne le comprennent pas
– 40% les utilisent dans le groupe mais pas chez eux
– Certains utilisent la technique « de tête »,
– Ne comprennent pas l’intérêt de rechercher des alternatives de pensée négatives
L’exemple de Florence
Situation Emotion Cognition Comportement
Ma fille me dit « tu ne
fais rien de la journée, tu
aurais ai moins pu
préparer un bon repas »
Tristesse
Intensité :
20/20
« Je ne rends
personne
heureux »
Conviction :
18/20
Je lui ai expliqué que
je ne pouvais pas.
Elle reproduit ensuite graphiquement la situation, en
remettant l’évenement en contexte (où elle était, avec qui, les
objets autour, sa pensée, son émotion…).
Florence, 58 ans, évoque une situation particulièrement pénible de la
semaine écoulée
• Florence liste ensuite tous éléments du dessin puis propose au
moins 2 pensées sur chacun des éléments. Par exemple:
– la machine à laver : « je ne l’aime pas, elle est toujours pleine » « j’ai
peur qu’elle me lâche »
– le four : « il ne sert pas tant que ça » « il faut le nettoyer de temps en
temps »
– le frigidaire : « il est peu rempli » « il est rempli de choses que les enfants
n’aiment pas »
– la table : « elle est en mélaminé » « elle est blanche »
– Florence : « elle porte un pantalon noir avec un sweatshirt bleu, «son
foulard bleu est assorti »
– La fille de Florence : « elle est toujours bien habillée » « elle est droite
comme un piquet »
– La pensée de Florence: « c’est fort ! »,« tout ca à la base pour un repas »
L’exemple de Florence
• Florence évalue ensuite la tonalité émotionnelle de chaque
pensée (tonalité positive ou négative) et rééquilibre en fonction
du rapport entre pensées émotionnellement positives et pensées
émotionnellement négatives.
• Par exemple, elle sera amener dans cet exemple à ajouter des
pensées émotionnellement agréables
• Attention, l’inverse est aussi possible. L’important est
d’équilibre la tonalité émotionnelle des pensées, pas de penser
exclusivement positif
• Enfin Florence est invité à relire l’ensemble de ses pensées et à
réévaluer:
– 1) l’intensité de son émotion tristesse
– 2) son niveau de conviction à la pensée « Je ne rends personne
heureux »
L’exemple de Florence
Au-delà des 20 séances…la consolidation
• A l’issue des 20 séances de TCC, proposition d’une
consolidation en groupe une fois par mois
• Reprise des outils à la demande des patients
• Abord de nouveaux outils (affirmation de soi, gestion du
temps)
• 70% des patients viennent au groupe consolidation la première
année suivant la fin du groupe
• Après 1 an suivant la fin du groupe, environ 30% des patients
viennent au groupe de consolidation:
– 10% très régulièrement
– 20% ponctuellement
Les résultats des études
• 6 RCT depuis 2000
– Diminution des symptômes dépressifs
– Augmentation de l’estime de soi
– Amélioration de la qualité de vie
Ball et al. J Clin Psychiatry 2006
Miklowitz et al. Arch Gen Psychiatry 2007
Gonzalez Isasi et al. Eur Psychiatry 2014
Lam et al. Arch Gen Psychiatry 2003
Scott et al. Br J Psychiatry 2006
Parikh et al. J Clin Psychiatry 2012
74
75
Bibliographie
• Mirabel-Sarron, C., & Leygnac-Solignac, I. (2012). Les troubles bipolaires : de la cyclothymie au syndrome maniaco-dépressif. Comprendre, traiter, prévenir les rechutes. Paris : Dunod.
• Basco MR, Rush AJ. Cognitive-Behavioral Therapy for bipolar disorder. New York : The Guilford Press;1996.
• Bauer MS, McBride L. Thérapie de groupe pour le trouble bipolaire : une approche structurée, le programme d’objectifs personnels. Paris : Médecine & Hygiène;2001.
• Colom, F, & Vieta E. Manuel de psychoéducation pour les troubles bipolaires. Marseille : Solal;2008.
• Lam DH, Jones SH, Hayward P, Bright JA. Cognitive therapy for bipolar
disorder: a therapist’s guide for concepts, methods and practice. Chichester:
Wiley & Sons;1999.
• Newman CF, Leahy RL, Beck AT, et al. Bipolar disorder: a cognitive
approach. Washington : American Psychological Association;2002.