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LES ANNONCES DE LA SEINE
JOURNAL OFFICIEL DANNONCES LGALES - INFORMATIONS GNRALES,
JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilit pour les
dpartements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis
et Val de Marne
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FONDATEUR EN 1919 : REN TANCRDE - DIRECTEUR : JEAN-REN
TANCRDE
Sylvie Moisson et Bruno Pireyre ont succd, la tte de la Cour
dappel de Lyon le 10 octobre 2014, respectivement Jacques Beaume et
Jean Trotel qui ont fait valoir leurs droits la retraite. Les
nouveaux Chefs de la juridiction lyonnaise, aprs avoir rendu un
hommage appuy leurs prdcesseurs qui ont marqu de leurs empreintes,
par leurs qualits de juristes, lhistoire du clbre Palais de Justice
historique des 24colonnes construit par larchitecte Louis-Pierre
Baltard de 1835 1847 et restaur de 2009 2013, ont voqu les
objectifs quils se sont fi xs. Pour Sylvie Moisson, la mission du
Parquet gnral consiste veiller au respect des devoirs essentiels
des hommes les uns envers les autres, ce qui impose de chercher en
permanence la voie de lquilibre entre rigueur et humanisme. Elle
sest notamment engage fdrer et adapter car elle estime que le
principe de lgalit des citoyens devant la loi pnale ne rend lgitime
que ce qui est cohrent et adapt. Quant Bruno Pireyre, il a articul
son propos autour de trois axes qui lui tiennent particulirement
cur : unifi cation du
droit, protection de lindpendance du juge et dveloppement des
changes europens entre professionnels de la Justice et enseignants
suprieurs du Droit.Sylvie Moisson et Bruno Pireyre ont prsid pour
la premire fois, en qualit de Chefs de Cour, lAudience Solennelle
de Rentre judiciaire de la Cour dappel de Lyon ce 13janvier 2015.
Aprs avoir dress le traditionnel bilan dactivit juridictionnelle,
le Premier Prsident a notamment appel de ses vux une rforme
dampleur de la procdure dans les matires civiles pour limiter le
rle de la Cour dappel au jugement de la rgularit et de la qualit de
la dcision de premire instance et pour instaurer des fi ltres
lentre des recours sous une forme analogue la procdure simplifi e
de non admission que connat la Cour de cassation. Sylvie Moisson a,
quant elle, centr son propos sur les rformes dorganisation
ncessaires la Justice du 21me sicle afin dapporter une rponse pnale
adapte chaque fait de dlinquance dans des dlais utiles. Jean-Ren
Tancrde
Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8 - 1,15 Euro - 96e anne
Cour dappel de LyonAudiences solennelles dInstallation et de
Rentre
10 octobre 2014 et 13 janvier 2015
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01.4
2.60
.36.
35
AUDIENCE SOLENNELLElCour dappel de Lyon- Servir la Justice par
Bruno
Pireyre...................................................................................................
2- Fdrer et adapter laction publique par Sylvie Moisson
............................................................... 3-
La prgnance de lexigence du Juge par Bruno Pireyre
.................................................................
4- Apporter une rponse pnale la dlinquance par Sylvie Moisson
............................................. 7lTribunal de
Commerce de Nanterre- Promouvoir le droit conomique par Yves
Lelivre
.....................................................................14-
Lutter contre la dlinquance conomique et fi nancire par Catherine
Denis ............................15- Dvelopper lattractivit du
droit par Franois Chassaing
...........................................................16
VEILLE JURISPRUDENTIELLElConseil dtat Projets damnagements lis
au Grand Stade de Lyon ..................................... 9
CHRONIQUElLa mdiation judiciaire et son processus : la pratique
suivie aux Chambres sociales de la Cour dappel de Paris
.............................10
VIE DU CHIFFRE lInstitut Messine
.........................................................................................................................13
VIE DU DROIT Cercle
Dalloz...............................................................................................
17 ANNONCES LGALES
...........................................................................................18TRIBUNE
Plutt un monde sans Dieu que sans fraternit par Christian
Charrire-Bournazel ...... 25VEILLE LGISLATIVElProjet de rforme du
droit des contrats
................................................................................26
DCORATION lJean-Louis Chambon Offi cier dans lOrdre National du
Mrite ................................................28lSophie
Robert Grand Offi cier dans lOrdre National du Mrite
.................................................32
PALMARS Prix Claude rignac 2015
.................................................................................30SOCIT
lCrdit dImpt pour la Comptitivit et lEmploi
..................................................................
29lTransmettre & Reprendre
........................................................................................................31
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2 Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8
Audience solennelleLES ANNONCES DE LA SEINESige social :
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BEHOUSTTlphone : 01 34 87 33 15l 1, place Paul-Verlaine, 92100
BOULOGNETlphone : 01 42 60 84 40l 7, place du 11 novembre 1918,
93000 BOBIGNYTlphone : 01 42 60 84 41l 1, place Charlemagne, 94290
VILLENEUVE-LE-ROITlphone : 01 45 97 42 05
Directeur de la rdaction :Jean-Ren Tancrde
Comit de rdaction :
Thierry Bernard, Avocat la Cour, Cabinet BernardsFranois-Henri
Briard, Avocat au Conseil dtatAgns Bricard, Prsidente de la
Fdration des Femmes AdministrateursAntoine Bullier, Professeur
lUniversit Paris I Panthon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur
agrg des Universits de droitAndr Damien, Membre de
lInstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit lUniversit Paris
I Panthon SorbonneBertrand Favreau, Prsident de lInstitut des
Droits de lHomme des Avocats Europens, ancien Btonnier de
BordeauxDominique de La Garanderie, Avocate la Cour, ancien
Btonnier de ParisBrigitte Gizardin, Magistrat honoraireRgis de
Gouttes, Premier avocat gnral honoraire la Cour de cassation Serge
Guinchard, Professeur de Droit lUniversit Paris II
Panthon-AssasGrard Haas, Avocat la Cour, Prsident de GesicaFranoise
Kamara, Conseiller la premire Chambre de la Cour de
cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat gnral honoraire la Cour
de cassation Bernard Lagarde, Avocat la Cour, Matre de confrence
H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit lUniversit
Paris II Panthon-AssasChristian Lefebvre, Prsident Honoraire de la
Chambre des Notaires de ParisDominique Lencou, Prsident dHonneur du
Conseil National des Compagnies dExperts de JusticeNolle Lenoir,
Avocate la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur
mrite lUniversit Paris II Panthon-AssasJean-Franois Pestureau,
Expert-Comptable, Commissaire aux comptesGrard Pluyette, Conseiller
Doyen la premire Chambre civile de la Cour de cassationJacqueline
Socquet-Clerc Lafont, Avocate la Cour, Prsidente dhonneur de
lUNAPLYves Repiquet, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisRen
Ricol, Ancien Prsident de lIFACFrancis Teitgen, Avocat la Cour,
ancien Btonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires
juridiques, Groupe Essilor International
Publicit lgale et judiciaire : Didier Chotard
Commission paritaire : n 0718 I 83461I.S.S.N. : 0994-3587Tirage
: 13 735 exemplairesPriodicit : bi-hebdomadaireImpression :
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dans les cas o elle est autorise expressment par la loi et les
conventions internationales, toute reproduction,totale ou partielle
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Le journal Les Annonces de la Seine a t dsign comme publicateur
offi ciel pour la priode du 1er janvier au 31 dcembre 2015, par
arrts de Messieurs les Prfets de Paris du 30 dcembre 2014, des
Yvelines du 16 dcembre 2014, des Hauts-de-Seine du 16 dcembre 2014,
de la Seine-Saint-Denis du 16 dcembre 2014 et du Val-de-Marne du 22
dcembre 2014, de toutes annonces judiciaires et lgales prescrites
par le Code Civil, les Codes de Procdure Civile et de Procdure
Pnale et de Commerce et les Lois spciales pour la publicit et la
validit des actes de procdure ou des contrats et des dcisions de
Justice pour les dpartements de Paris, des Yvelines, des
Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.N.B. :
Ladministration dcline toute responsabilit quant la teneur des
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5,49 Seine-Saint-Denis : 5,49 Yvelines : 5,24 Hauts-de-Seine : 5,49
Val-de-Marne : 5,49 B) Avis divers : 9,76 C) Avis fi nanciers :
10,86 D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,83 Hauts-de-Seine
: 3,83 Seine-Saint Denis : 3,83 Yvelines : 5,23 Val-de-Marne : 3,83
- Vente au numro : 1,15 - Abonnement annuel : 15 simple35 avec
supplments culturels95 avec supplments judiciaires et culturels
COMPOSITION DES ANNONCES LGALESNORMES TYPOGRAPHIQUES
Surfaces consacres aux titres, sous-titres, fi lets,
paragraphes, alinas
Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de
lannonce sera compose en capitales (ou majuscules grasses) ; elle
sera lquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit
arrondi 4,5 mm. Les blancs dinterlignes sparant les lignes de
titres nexcderont pas lquivalent dune ligne de corps 6 points
Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant
le sous-titre de lannonce sera compose en bas-de-casse (minuscules
grasses) ; elle sera lquivalent dune ligne de corps 9 points Didot
soit arrondi 3,40 mm. Les blancs dinterlignes sparant les
diffrentes lignes du sous-titre seront quivalents 4 points soit
1,50 mm.Filets : chaque annonce est spare de la prcdente et de la
suivante par un fi let 1/4 gras. Lespace blanc compris entre le fi
let et le dbut de lannonce sera lquivalent dune ligne de corps 6
points Didot soit 2,256 mm. Le mme principe rgira le blanc situ
entre la dernire ligne de lannonce et le fi let sparatif. Lensemble
du sous-titre est spar du titre et du corps de lannonce par des fi
lets maigres centrs. Le blanc plac avant et aprs le fi let sera gal
une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et
Alinas : le blanc sparatif ncessaire afi n de marquer le dbut dun
paragraphe o dun alina sera lquivalent dune ligne de corps 6 points
Didot, soit 2,256 mm. Ces dfi nitions typographiques ont t calcules
pour une composition effectue en corps 6 points Didot. Dans
lventualit o lditeur retiendrait un corps suprieur, il conviendrait
de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.
2014
P R E S S EPAYANTEDiffusion Certifi e
Servir la Justicepar Bruno Pireyre
Q(...)uand, mieux qu cet instant, derrire ces hautes colonnes
corinthiennes, si souvent traverses par une histoire aux accents
quelquefois tragiques, aurai-je mieux mesur lhonneur et la confi
ance qua choisi de me faire le Conseil Suprieur de la Magistrature
en minvestissant de la mission laube de lexercice de laquelle je
prends la parole, ce matin ? Lobligation den tre digne est mienne,
dsormais. (...)En un moment o je dcouvre ou presque cette
juridiction et ses acteurs, il serait bien prsomptueux de tracer
des objectifs. Au vrai, primus inter pares rien de plus, mais rien
de moins la mission qui mchoit se rsume, noubliant jamais que je
suis et demeure Juge parmi les juges, impulser, organiser et
fdrer.Je nen souhaite pas moins voquer troispistes dactions qui,
placs sur des plans bien distincts, me tiennent galement cur.
UNE COUR DAPPEL TRAVAILLANT LUNIFICATION DU DROIT Le droit du
milieu des annes 2010, en France comme ailleurs, ne puise plus sa
source unique ni mme principale, dans la loi. Le juge, bouche dune
loi crite par le seul lgislateur, obstinment voulu et faonn par le
constituant de 1789 pour faire barrire tout retour des Parlements
dAncien rgime, a vcu. La jurisprudence, europenne et nationale, en
dautres termes les dcisions des cours et tribunaux, est dsormais
une source de droit de premier rang dont limportance continue
crotre. Mieux, pour forger la rgle de droit, ce que lon nomme le
dialogue des juges, cest dire lexamen ouvert et critique, pour y
puiser inspiration, des solutions retenues, dans ces cas analogues,
par dautres ordres de juridiction, quelquefois mme par le Juge
tranger, opre chaque jour davantage.Dans le mme temps, la faveur
notamment dune crise de lautorit publique, la fonction rgulatrice
du Juge gagne en tendue et en profondeur. Lmergence de ce que lon a
pu appeler un tat de
justice suscite et cest naturel - autant dattentes que
dinquitudes.On comprend que dans ce paysage en mouvement sinon
mouvement, la prvisibilit du droit, la scurit juridique, revte une
importance centrale. Elle est pourtant bien imparfaite.lEn premier
lieu, lindispensable indpendance du juge, constitutionnellement
protge, porte en germe le risque dun dfaut dunit, dans lespace et
dans le temps, des solutions apportes des questions semblables.lIl
convient, par ailleurs, que le droit volue au fi l des
transformations de la socit, de la perception des enjeux, des
exigences des acteurs socio-conomiques. Sa souplesse, sa fl
exibilit, laissant toute leur place linnovation, au renouvellement
des points de vue du juge, sont ncessaires pour que le corpus
juridique reste en phase avec son temps.l Pour invitable et
contraste quelle soit, linscurit juridique qui en rsulte nen doit
pas moins tre rduite, dfaut dtre matrise.(...)
PROTGER LINDPENDANCE DU JUGE Au nombre de mes devoirs figure,
comme un impratif catgorique pour emprunter lexpression dun grand
philosophe- celui de veiller avec vigilance, avec les moyens
contraints qui sont malheureusement les ntres, ce que soient assurs
aux magistrats du Sige de cette cour et des tribunaux de son
ressort les pralables dun exercice indpendant de leurs
missions.Dissipons toute ambigut pour bien cerner ce qui est ici en
jeu.On ne peut, sans mconnatre la vrit, faire aujourdhui procs au
Juge de son irresponsabilit suppose. Les conditions objectives,
concrtes, de la mise en jeu de la responsabilit des magistrats (sur
un terrain disciplinaire) comme de celle du service public de la
justice (au plan de la rparation des dommages), quelles rsultent de
la loi, en particulier, constitutionnelle, ou de la jurisprudence
tant du Conseil Suprieur de la Magistrature que de la Cour de
cassation, se sont largies et transformes au fi l de cette dernire
dcennie.De mme, sur le terrain de la dontologie, laction
entreprise, depuis longtemps dj, des niveaux distincts, par ce mme
Conseil Suprieur de la Magistrature comme par lInspection gnrale
des services judiciaires, opre en profondeur et mriterait - combien
- dtre mieux souligne. Les chefs de cour sont, dailleurs, en ces
domaines, chargs dune mission de veille et dalerte et disposent de
quelques prrogatives que jaurai le devoir dinvestir pleinement.Pour
autant, cette vigilance lgard du comportement du Juge cest sur ce
point prcis que jentends insister trouve et doit trouver, en
quelque sorte et si lon me permet lexpression, sa contrepartie
dquilibre dans la protection jalouse de son indpendance. Parce que,
dans tous les pays dtat de droit, cette indpendance du juge,
constitue dans lintrt dune bonne justice et non dans celui de la
personne du magistrat, est rige en condition imprative de lexercice
impartial de son offi ce juridictionnel. Jaurai, avec lappui solide
et prcieux des chefs de juridiction du ressort - auxquels je
souhaite exprimer ici mes sentiments destime et de confi ance -
lardente obligation de veiller ce que soient assures en gnral et au
cas par cas les conditions de lexercice serein de cette indpendance
des juges.(...)
Installation du 10 octobre 2014Bruno Pireyre
D.R
.
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Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8 3
Audience solennelle
Fdrer et adapter laction publiquepar Sylvie Moisson
C(...)omme vous Monsieur le premier prsident, ce nest
naturellement pas en quelques jours de prsence que jai pu
apprhender lintgralit des enjeux propres la justice de la rgion
Rhne Alpes et de linter-rgion forme avec les 3 Cours dappel dj
cites pour la lutte contre la criminalit organise et la dlinquance
financire dans le cadre de la Juridiction Inter-Rgionale Spcialise
(JIRS). Aussi je me garderai bien aujourdhui de tenter de dfi nir
un programme dactions prcises qui ne serait ni clair ni
pertinent.Quelle que soit lampleur des attentes inhrentes la
nomination dun nouveau Procureur gnral, la dfinition dune feuille
de route dynamique ncessite un temps dcoute pralable et danalyse.Je
vais naturellement continuer rencontrer lensemble des acteurs du
monde judiciaire et les diffrents partenaires ou interlocuteurs
institutionnels de la Justice et la Cit ainsi que les lus de la
Nation pour agir au plus vite.Ce devoir dcoute et de concertation
demeurera une exigence permanente au long cours comme il la
toujours t pour moi de mme que son corollaire qui consiste rendre
compte des choix de priorits et des rsultats des actions engages.
(...)Je me suis attache toujours agir dans un strict respect de la
rigueur et de lhumanisme qui sont les deux composantes
indissociables mes yeux de laction du Ministre public.La mission
qui est la ntre de veiller au respect des devoirs essentiels des
hommes les uns envers les autres, cest dire ceux dont la violation
est une faute pnale, impose en effet de chercher en permanence la
voie de lquilibre entre rigueur et humanisme ncessaire une justice
impartiale et attentive aux problmatiques spcifiques du ressort o
elle est rendue.Cet quilibre dont la balance est notre symbole et
sans laquelle selon Aristote il n y a pas de vertu et donc pas de
justice. lLa dontologie qui manime : elle est une et indivisible et
a pour socle fondamental le respect et la dfense des liberts
individuelles et de 1Etat de droit dont les membres du Ministre
public sont
les gardiens vigilants en leur qualit premire de magistrats
garants des liberts individuelles.Cette dontologie bien prsente ne
se confond pas avec la ncessaire volution du statut des magistrats
du Ministre public qui doit conduire dissiper le soupon de manque
dindpendance lgard du politique qui pse illgitimement sur nous :
jattends comme vous tous ardemment, mes chers collgues, que la
rforme constitutionnelle de notre statut soit reprise et mene bien
conformment aux engagements ministriels.Ce statut rform permettra
aux jurisprudences -nationale comme europenne - de nous reconnatre
:lvritable garant dun premier niveau des liberts et donc comptent
pour ordonner certaines mesures qui y sont attentatoires notamment
dans lurgence en amont de la saisine du juge.lvritable garant de
premier niveau de la rgularit des enqutes sous le contrle
naturellement des magistrats du sige consacrs cette mission -car et
je cite le Procureur gnral JC Marin la dernire rentre de la Cour de
Cassation il y a quelques mois -le Parquet la Franaise nentend pas
confondre son rle avec la mission dun juge au sens de larticle5 de
la convention dont le considrant 123 de larrt Medvedyev dfi nit le
sens et la porte.
lLautre passion que jai rencontre, chemin faisant, est celle du
management des services et des projets- lchelle locale comme au
niveau national ou europen - mais surtout la direction des femmes
et des hommes qui y travaillent et qui en font la richesse.L encore
il sagit de trouver les points dquilibre entre les conditions
permettant quils donnent le meilleur deux-mmes dans lexercice de
leurs missions et celles propices au respect de leurs intrts et
leur panouissement individuel. (...)A mon niveau et aujourdhui, je
veux revivifier les relations entre nous Messieurs les Procureurs
de la Rpublique, les roxygner autour de 2 objectifs essentiels ;
fdrer et adapter.Fdrer lquipe rgionale des magistrats du Ministre
public- du Parquet gnral et des Parquets des Tribunaux de Grande
Instance - dans une forte cohsion qui impose que les lignes
directrices de la politique pnale rgionale soient clairement dfi
nies mon niveau aprs large dialogue et ample concertation, et
quelles soient ensuite dclines et adaptes localement en toute
loyaut.Le principe de lgalit du citoyen devant la loi pnale ne rend
lgitime que ce qui est cohrent et adapt. (...)Cest notamment laube
de la cration du Procureur national fi nancier par la loi du
6dcembre2013 quil nous faut dcliner les partages de comptence,
redfinir les complmentarits. Eliane Houlette, 1erProcureur occuper
ces fonctions nationales, votre prsence cette audience est
symbolique de limportance que vous attachez la dlinquance financire
et fiscale de linter-rgion de Lyon.Nous avons relever ensemble un
dfi essentiel ; viter que la spcialisation accrue des comptences ne
conduise un cloisonnement des actions risquant daffaiblir
lefficacit globale de la lutte contre la grande criminalit.Vous
lavez compris cest donc une vritable dynamique dimpulsion
danimation et de contrle de lapplication des politiques pnales dfi
nies par le garde des sceaux que je veux faire vivre dans cette
grande rgion dont la dimension de coopration transnationale dans la
lutte contre les phnomnes de criminalit organise communs ou partags
avec les pays voisins ne peut tre occulte.Votre prsence cette
audience, Monsieur le Procureur gnral du canton de Genve, dmontre
limportance de cette coopration. (...) 2015-093
FAIRE DE LYON UN LIEU DCHANGES EUROPENS ENTRE PROFESSIONNELS DE
LA JUSTICE ET ENSEIGNANTS SUPRIEURS DU DROIT La Cour dappel de Lyon
entretient, depuis de nombreuses annes, avec les facults de droit
et instituts dtudes judiciaires des universits Lyon III et Lyon II,
ainsi quavec la facult catholique de droit, des liens privilgis.
Cest ainsi que, ds mon premier contact avec le Doyen Marmoz de la
facult de droit de luniversit Lyon III, celui-ci a bien voulu me
faire savoir qu linstar de mes prdcesseurs, jaurais dsormais
lhonneur de prsider es qualits le conseil de cette facult. Etudiant
il y a prs de quarante ans au sein de ce dernier tablissement, nous
avions quune conscience diffuse de cette proximit et de ces liens
entre praticiens du droit et enseignants suprieurs des disciplines
juridiques. Au vrai, le temps les a considrablement resserrs et
organiss sur un mode souple et vivant.La voie prometteuse, ainsi
trace, nous parat mriter dtre prolonge. Elle pourrait bien faire
exemple une poque o dpres dbats sur les faiblesses de lenseignement
suprieur franais, mesures
laune des standards internationaux, pointent du doigt
linsuffisante interaction entre transmission universitaire des
savoirs et communication des savoirs faire
professionnels.(...)Avant de clore mon propos, je voudrais,
lintention particulire de mes collgues des deux degrs de
juridiction, du Parquet comme du Sige, dire que je peux ni ne veux
oublier ce que ces lieux - entendez cette ville et la rgion proche
qui lentoure - ont nous dire, savent nous inspirer.Que Lyon,
capitale de la Rsistance, rappelle encore, qui tend loreille ce
pass qui, dcidment, ne passe pas , quil y a trois gnrations peine,
des hommes et des femmes versrent ou sexposrent verser le prix le
plus lev qui soit pour suivre leur devoir et se sacrifi er au bien
commun.Que, parmi tant dautres, mais parce quil faut bien, pour
lillustrer, sarrter sur lune delles, lnergique silhouette de celui
qui tait alors le Procureur de la Rpublique de Nantua, dont une
galerie de ce palais porte aujourdhui le nom jai nomm Fernand
Davenas nous fait souvenir que des hommes de robe sengagrent aussi
dans ce combat du courage et de lhonneur.
Que, plus prs de nous, il y a vingtseptans, dans la salle mme o
nous nous tenons, des magistrats je songe, en particulier, la
grande fi gure de PierreTruche, brillamment second par
Jean-OlivierViout, comme celles du prsident Andr Cerdini et du Juge
dinstruction Christian Riss - surent, avec le concours de greffiers
et lactive collaboration de nombreux avocats, faire uvre minutieuse
de justice lendroit du tortionnaire de Jean Moulin, pauvre roi
supplici des ombres , en rservant, en un procs pour crimes contre
lhumanit entr dans lhistoire, les formes protectrices de la
procdure et les garanties du droit celui qui navait pour triste loi
que sa cruaut insatiable, appuye sur la force crasante de
loccupant.Puisse cette mmoire ravive, dans les instants de
difficults ou de doute - il est vrai plus humbles - auxquels nous
aff rontent si souvent nos fonctions de poursuivre, dinstruire et
de juger, nous donner pour guide, notre simple mesure, la devise
que Jeande Lattre de Tassigny avait faite celle de la 1reArme
franaise, dite encore Arme de la Libration, avanant sur les chemins
de lhonneur, enfi n retrouvs : servir, ne pas subir .
Sylvie Moisson
D.R
.
-
4 Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8
Audience solennelle
La prgnance de lexigence du Jugepar Bruno Pireyre
L(...)es vnements tragiques qui se sont enchans (puissions-nous
ne plus conjuguer, et de longtemps, ce verbe au prsent de
lindicatif) depuis le mercredi 7janvierdernier ensanglantent et
endeuillent lanne qui sest ouverte depuis un peu plus dune
semaine.Notre pays est prouv dans la vie et dans la chair de ses 17
fi lles et fi ls assassins, auxquels il simpose nous de rendre un
hommage mu, cet instant, et avant mme tout autre propos, comme lont
fait la France entire et de nombreuses nations trangres, solidaires
de notre drame, au cours de la si impressionnante journe
davant-hier.prouve, ce pays lest encore dans sa profondeur quand
les meurtriers que nous venons de voir luvre visent branler son
identit, cristallise autour de fortes valeurs partages, enracines
et faonnes, tout la fois, par une longue histoire parcourue sur les
chemins, parfois escarps, des liberts conquises de haute lutte,
mais luniverselle vocation. Pour les plus irrductibles dentre
elles, celles-ci touchent au respect de la vie et de lintgrit de la
personne, la libert dexpression, la tolrance, la libert de
conscience, comme la lacit.Depuis le 7 janvier, nous le voyons,
notre pays serre les rangs et ragit dans lunit, digne et dtermine.
Le sinistre dessein qui inspire les actes criminels que nous venons
de subir doit chouer. Nen doutons pas, il chouera.Le jour du deuil
national, jeudi 8 janvier dernier, la communaut judiciaire, mieux
juridictionnelle qui est, dans cette ville, tout particulirement,
une ralit bien vivante, laquelle notre attachement est grand - a
rpondu dans son ensemble et en nombre (magistrats des trois ordres
de juridiction, judiciaires, administratifs et fi nanciers /
avocats / auxiliaires de justice), dans la salle des pas perdus de
ce Palais, notamment, lappel du Chef de ltat signifi er, par une
minute de silence, lhommage aux victimes et notre attachement
solidaire la libert dexpression.La justice institutionnelle, prise
dans sa plus large acception, tant par la place minente quelle
occupe dans ltat que dans linterface singulire que, dans un tat de
droit comme le ntre, elle assure entre la puissance publique et la
socit civile, est, dans ses missions, aux avant-postes de la
protection, de la garde prfrerais-je dire, de ces liberts
fondamentales auxquelles les sinistres agissements de la semaine
dernire ont fait attentat.Cette libert dexpression, cette libert de
conscience comme, son corollaire, le principe fondamental reconnu
par les lois de la Rpublique de lacit, signifi cativement aussi
insupportables les uns et les autres ceux qui rpandent la terreur,
ont principalement t mris de et par la pense des philosophes et
publicistes europens, franais, souvent, des XVIIme et
XVIIImesicles.Ces liberts et principes ont - on le sait - arm leur
fondement et pris leur traduction dans des textes de haute porte
normative, selon le cas constituants, sinon vots ou approuvs par la
reprsentation nationale ou/et la communaut des nations europennes:
dclaration des DroitsdelHomme et
du citoyen du 26aot1789; loi du 9 dcembre1905 concernant la
sparation des glises et de ltat; Constitution du 4 octobre 1958 ;
Convention europenne de sauvegarde des DroitsdelHomme et des
liberts fondamentales du 4novembre1980.Pour autant, cest bien par
luvre du Juge, quil soit constitutionnel, administratif ou
judiciaire - en ce dernier cas, civil ou rpressif - ou encore
national ou europen, que ces liberts et principes ont t et
persistent tre prciss, dans leur contenu, tendus dans leur porte et
fi xs dans les limites que leur assigne la raison. Cest par votre
justice et devant ses conseils, ses cours et ses Tribunaux, quils
prennent corps et ralit et voient sanctionner leur effi cacit.Qui
mieux que le Juge de Strasbourg dirait ce qui est crucialement en
jeu, ce qui est si cruellement mis en tension depuis six jours
peine; je crois quil simpose de le citer en ce jour. La libert
dexpression constitue lun des fondements essentiels de la socit
dmocratique, lune des conditions primordiales de son progrs et de
lpanouissement de chacun. Elle vaut non seulement pour les
informations et les ides accueillies avec faveur ou considres comme
inoff ensives ou indiff rentes mais aussi pour celles qui heurtent,
choquent ou inquitent ltat ou une fraction quelconque de la
population. Ainsi le veulent le pluralisme, la tolrance et lesprit
douverture sans lesquels il nest pas de socit dmocratique . (Arrt
Cour europenne des DroitsdelHomme - formation plnire - Handyside /
Royaume Uni 7dcembre1972).Vos Juges, vos Procureurs, vos greffi
ers, de mme que les membres des Barreaux ici largement reprsents,
ont pleine conscience de leurs devoirs de gardiens de ces cls dor
du vivre ensemble. Ils regardent cette ardente obligation qui est
leur comme un exigeant honneur.Laudience solennelle de ce matin est
le cadre, de noir tendu, dans lequel il nous revient de vous le
raffi rmer.Quon veuille bien nous pardonner cette introduction,
plus longue que dusage. Il nous est, cependant, apparu que les
circonstances la rendaient ncessaire.
On comprendra, en revanche, que la suite des propos tenus cette
audience sera empreinte de plus de concision et de sobrit qu
lordinaire, par gard la gravit des moments que nous vivons.A
chacune et chacun de vous, vos familles, vos proches, celles et
ceux qui vous sont chers, comme aux institutions que vous
reprsentez, la Cour souhaite une anne 2015 plus apaise qu ses
dbuts, heureuse et favorable aux projets professionnels et
personnels qui vous tiennent cur.Au cours de lanne pleine coule, la
Cour dappel de Lyon a connu une activit dense et soutenue quelle a
accomplie dans des conditions de performance que je regarde comme
satisfaisantes et plus quhonorables.Les mesures en sont consignes
de faon succincte mais assez complte, me parat-il, dans la
brochure, voque il y a quelques instants par Madamela Procureure
gnrale, que vous avez trouve sur vos sige en y prenant place. Les
commentaires dont nous pourrions les assortir nauraient pas grande
valeur ajoute et alourdiraient, sans grand avantage, cette
audience. Je vous invite ds lors vous reporter ce document autant
que vous le jugerez ncessaire ou utile.Je crois indispensable, en
revanche, de souligner votre attention que ces rsultats ont t
obtenus en mettant en uvre des moyens insatisfaisants et, certains
gards, dfi cients.Les moyens humains, tout dabord. Deux chiff res
en rendent compte:l la fi n 2014, notre Cour dappel, dont leff
ectif localis (en dautres termes ltiage que notre administration
centrale regarde comme ncessaire au fonctionnement convenable de la
juridiction) est de 52, magistrats nen comptait que 49 (en prenant
en compte, comme de raison, les temps partiels);Les Vice-Prsidents
placs auprs de la premire prsidence qui sont les chevau-lgers mis
disposition dune Cour dappel pour lui permettre principalement de
combler les absences (postes non pourvus, congs-maternit ou
maladie) ou de renforcer momentanment les quipes des 5Tribunaux de
Grande Instance et des 11Tribunaux
D.R
.
Bruno Pireyre
Rentre du 13 janvier 2015
-
Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8 5
Audience solennelle
dinstance et de police du ressort, implants, vous ne lignorez
pas, sur trois dpartements, ne dpassaient pas le nombre de 8 pour
un effectif localis, parcimonieux, au demeurant, de 11;Les
fonctionnaires taient en nombre disponible moins de 80 en quivalent
temps plein la Cour dappel, et de 56 au service dadministration
inter-rgional pour des effectifs localiss respectivement de 87 et
de 66.lEn 2015, la situation, si elle se dtriore un peu pour les
fonctionnaires, samliore nettement pour les magistrats de la Cour
dappel qui se retrouvent plein effectif. Pour autant, cette
embellie ne vaut que pour les quatre premiers mois de lanne
seulement, puisque, ds dbut mai 2015, interviendront les cessations
dactivit pour dpart en retraite de nombreux collgues dont le
remplacement nest pas assur, du moins en ltat.Quant aux
Vice-Prsidents placs, leur nombre diminue encore puisquils ne sont
dsormais plus que 7 peine.Surtout, la situation est plus dgrade et
de beaucoup dans plusieurs des juridictions de premire instance de
notre ressort.Cest ainsi que -pour sen tenir aux cas qui
connaissent les insuffisances demplois les plus accentus- ce sont,
dores et dj, au Tribunal de Grande Instance de Lyon et au Tribunal
de Grande Instance de Saint-Etienne, respectivement 9 postes sur
106 et 2postes sur 34, qui ne sont pas pourvus, ces dficits allant,
de surcrot, saccentuant dans les mois qui nous sparent de la fin du
printemps prochain.Les ressources budgtaires, ensuite.En
fonctionnement courant (en faisant abstraction des ressources ddies
au financement des emplois), les crdits de paiement ouverts, en ce
dbut danne au titre de lexercice 2015 (ce quon dnomme
la dotation initiale) au budget oprationnel de programme Centre
Est, qui regroupe les moyens budgtaires des Cours dappel de Lyon,
de Grenoble, de Riom et de Chambry, stablissent un niveau de 14,2%
infrieur celui quils connaissaient trois ans auparavant, en
2012.Si, pour modifier la perspective, on considre la dotation
totale de crdits de paiement attribue sur lensemble de lanne la
seule Cour dappel de Lyon, elle se rvle, en 2014, de 16,9%
infrieure celle qui lui avait t alloue en 2012.Pour prendre la
porte concrte de ces chiffres et leur donner sens, on mentionnera
que si les toute dernires semaines de lanne 2014 ont permis la
distribution nos Cours dappel dun lger supplment de ressources, la
situation nen a pas moins t si dgrade au fil de lanne qu lhorizon
de septembre 2014, notre cour, linstar de ses semblables, ntait
plus en mesure dhonorer tous ses engagements et a du diffrer,
dautorit, le paiements de plusieurs de ses cranciers.Sagissant,
enfin, des crdits destins financer les frais de justice, la
situation est plus critique encore.Un constat en fournit la mesure
: au 31dcembre2013, les charges payer relatives aux frais de
justice, en dautres termes les dettes additionnes des quatre Cours
dappel prcites lgard de leurs prestataires impays (laboratoires
danalyse, traducteurs interprtes, experts intervenant en matire
pnale, pour men tenir quelques exemples, etc), a reprsent 42,7% de
la dotation initiale 2014 en crdits de paiements.Pour simplifier et
faire court, pendant les 5 premiers mois de lanne 2014, nos crdits
de frais de justice ont t gags, en quelque sorte, pour servir au
paiement de notre arrir de dettes constitu au prjudice dentreprises
et de particuliers qui se seront ainsi
trouvs contraints, avec les consquences quon imagine, de subir,
au prjudice de leur propre trsorerie, notre insuffisance de
disponibilits.En ce dbut danne 2015, la situation saggrave
sensiblement sur ce plan. En effet, la dotation initiale servie aux
quatre Cours dappel dont il sagit en autorisations dengagement et
en crdits de paiement destins financer leurs frais de justice se
rduit respectivement de -15,5% et de -6,7% par rapport 2014. De
mme, les charges payer de lexercice 2014 absorberont-elles plus de
47% a minima de la dotation initiale 2015 en crdits de paiement,
soit lquivalent de prs de 6mois dactivit.Quon ne msinterprte pas ce
qui vient dtre dit: notre administration centrale nest pas en cause
qui, par la direction des services judiciaires, gre, dans la
difficult, avec beaucoup de comptence et de dtermination, au mieux
de ses possibilits, la ressource mise sa disposition.De mme
serait-il vain, obtus, dignorer que chaque administration de ltat
(la justice en est une, aussi singulire soit-elle) subit,
solidaire, sa part de la crise des finances publiques, profonde et
durable, que connat notre pays.Il reste que les moyens des services
les plus rgaliens de ltat ne peuvent sans grands et durables
dommages ne pas tre maintenus sinon hisss au niveau adapt aux
exigences de leur bon fonctionnement. Ceux des pays occidentaux
qui, par un pass point si lointain, ont russi le redressement de
leurs comptes publics lont bien compris qui ont concentr leur
effort dconomies sur les dpenses dintervention.On ne peut, en
raison, attendre autant que ne le font nos concitoyens, le
lgislateur ou notre excutif, de la justice dont on vient de dire
combien les preuves que nous traversons renforcent encore la place
et
D.R
.
-
6 Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8
Audience solennelle
font ressortir les enjeux et ne pas se rsoudre adapter en
consquence les ressources publiques consacres ses missions. Il y a
l - sans procs dintention, on laura compris - une contradiction,
peut-tre une aporie.Quand il est si souvent de mise dvoquer dans
certains dbats cathodiques la ncessit de rduire le train de vie de
ltat , dont vos magistrats et greffiers auraient bien du mal
trouver ne serait-ce que son reflet dans leur vcu professionnel, on
aura ici cur, par souci dexactitude, de mettre en garde contre la
menace dun appauvrissement des moyens concrets de votre justice
rapport aux exigences prgnantes dictes par ses missions.Le risque
est dsormais bien rel il commence se concrtiser - de voir des
juridictions, en particulier de premire instance, ne plus tre en
mesure de faire face, dans des conditions satisfaisantes de qualit
et de dlais, au traitement de la totalit des contentieux qui leur
sont soumis, et doprer, leur corps dfendant, des priorits en faveur
des plus sensibles, des plus incontournables dentre eux.Mais
lexigut de nos moyens nest pas seule en cause!Participe aussi de la
situation combien proccupante que je viens de dcrire, pour en
amplifier singulirement les effets, lextension considrable du champ
dintervention du Juge, opre, au cours de ces dernires annes, la
faveur de multiples dispositions lgislatives et rglementaires.Cest
pour lensemble de ces raisons, que jai souhait vous prsenter, ce
matin, que la confrence nationale, des premiers Prsidents de Cour
dappel de notre pays, qui les regroupe tous, en a tout rcemment
appel (le 16 dcembre 2014) aux autorits de ltat aux fins tout la
fois quil soit dcid, dans lurgence, dune mobilisation des moyens
humains et matriels la hauteur des attentes des justiciables et que
soient sans attendre adoptes des rformes denvergure propres
recentrer le Juge sur ses missions essentielles, celles-l seules
qui sont au cur de la lgitimit de son action: trancher des litiges
essentiels, garantir et protger les liberts individuelles. Ces
souhaits sont pleinement ntres en ce dbut danne.En appel, ce
recentrage des attributions du Juge passera ncessairement,
croyons-nous, par une rforme dampleur de la procdure dans les
matires civiles laquelle rflchit activement notre Ministre et que
nous appelons, quant nous, de nos vux pour:l limiter le rle de la
Cour au jugement de la rgularit et de la qualit de la dcision de
premire instance, la sanction corrective du mal- jug vident, au
lieu, comme elle est appele le faire aujourdhui, de rejuger en son
ensemble ou presque le litige soumis au premier Juge;l instaurer,
sans doute, limage de ce que pratiquent de nombreux autres pays
dtat de droit, des filtres lentre des recours sous une forme
analogue la procdure simplifie de non admission que connat depuis
une dizaine dannes la Cour de cassation et qui a permis cette
dernire de retrouver des dlais de traitement des contentieux et des
stocks daffaires en attente de jugement de niveau raisonnable.Dans
les prochaines semaines, notre Cour dappel sengagera, dans le mme
temps que plusieurs Tribunaux de Grande Instance de son ressort et
en liens troits avec eux, dans deux catgories dexprimentations
proposes aux juridictions,
sous le signe du volontariat, par le Ministre de la justice,
dans la perspective des rformes dites de la justice du
XXImesicle.Cest ainsi, tout dabord, qu linstar de 15 de leurs
semblables, les Tribunaux de Grande Instance de Lyon et de Roanne
mettront en uvre le projet conseil de juridiction.Celui-ci
consiste, dans une stratgie douverture du service public de la
justice sur la socit, mettre les juridictions en mesure dexpliquer
leur fonctionnement, leurs contraintes comme leurs priorits.Il
servira, en particulier, de cadre structur dchanges en matire de
politiques locales daide juridictionnelle, daccs au droit, daide
aux victimes, de conciliation et de mdiation. Il aura vocation
concourir, en concertation avec les conseils de juridiction des
autres Tribunaux de Grande Instance du ressort, et le moment venu,
sous limpulsion et les orientations du Conseil de juridiction de la
Cour dappel, llaboration de politiques communes dans les domaines
que lon vient dvoquer.Les thmes de lactivit juridictionnelle et de
lorganisation de la juridiction seront, en revanche, exclus du
champ dattribution de ce Conseil en tant quils participent trop
troitement de lindpendance de la justice avec laquelle il ne
saurait tre compos.Le Conseil de juridiction, prsid par les Chefs
de juridiction, runira des magistrats du Sige et du Parquet, des
fonctionnaires de justice, de ladministration pnitentiaire et de la
protection judiciaire de la jeunesse, des lus, des reprsentants
dorganisations syndicales, de ltat, des professions du droit en
particulier des Barreaux ainsi que du monde associatif.Cest
galement ainsi que la Cour dappel de Lyon et le Tribunal de Grande
Instance de Saint-Etienne vont, limage de 9 autres Cours dappel et
de 14autres Tribunaux de Grande Instance, approfondir les voies dun
partenariat avec luniversit aux fins danalyser leur
jurisprudence.Sagissant de la Cour dappel de Lyon, il sagira de la
facult de droit et de linstitut dtudes judiciaires de luniversit
Lyon III, de la facult de droit de luniversit Lyon II, ainsi que de
la facult catholique de droit de Lyon.Pour sa part, le Tribunal de
Grande Instance de Saint-Etienne se rapprochera de la facult de
droit de luniversit Jean Monnet.Lobjectif de cette exprience est de
contribuer la proximit et lefficacit de la justice par le
renforcement de la lisibilit, de la prvisibilit et de la stabilit
de ses dcisions.Lide directrice est que, par la connaissance et
lanalyse mthodiques des arrts dune Cour et des jugements dun
Tribunal, ainsi que par leur large diffusion organise, on concourt
fortement amliorer la cohrence des dcisions, faciliter et clairer
la mission de conseil des avocats quant lvaluation des possibilits
de succs dune action en justice par leurs clients, ainsi qu
favoriser le rglement amiable des litiges.Pour y parvenir,
lexploration des contentieux de volume doit tre privilgie:len
matire civile, pension alimentaire et prestation compensatoire,
dans le champ des litiges de nature familiale; ou encore
indemnisation des prjudices corporels;l en matire pnale, peines
prononces en rpression dinfractions de mme nature (contentieux
routier, en particulier).
Pour autant, et parce quil nexcde pas les limites de la simple
information raisonne, lexercice prserve, comme il est de rigueur,
la libert dapprciation du Juge au regard de la singularit de chaque
affaire.Ce projet de vaste envergure et au dessein ambitieux
rejoint troitement deux des priorits pour les annes venir que
javais souhait prsenter loccasion de laudience de notre commune
installation, le 10octobre2014. Cest assez dire le prix que nous
lui attachons.Il sera mis en uvre de faon harmonise et, autant que
possible, articule, entre la Cour et la juridiction stphanoise.De
mme ne manquerons-nous pas de proposer aux deux Barreaux concerns
de les y associer autant quils le souhaiteront.On relvera, enfin,
que pour aborder ce projet, la Cour dappel de Lyon peut sappuyer
sur lexistant dun socle solide puisquen partenariat avec elle,
comme avec le Barreau de Lyon, une quipe de recherche de droit priv
de luniversit Jean Moulin LyonIII, a, ds janvier2011, labore une
revue lectronique destine promouvoir lactivit de notre cour travers
sa jurisprudence. Le premier numro de cette publication
semestrielle, intitule Bulletin des Arrts de la Cour dappel de Lyon
(enabrg Bacaly), a vu le jour en juillet2012; la 5melivraison est
intervenue en aot dernier.largissons, ce stade de mon propos, les
perspectives sur un mode, il est vrai, plus prospectif.La loi du 27
janvier 2014 de modernisation de laction publique territoriale et
daffirmation des mtropoles portant cration de la mtropole de Lyon ,
entre en vigueur, pour lessentiel de ses dispositions, le 1er
janvier dernier, dcline et enrichie par les ordonnances des
6novembre et 19dcembre2014, a profondment transform quel euphmisme!
la carte, les dispositifs de lorganisation territoriale et du
fonctionnement politique et administratif dans le primtre de ce qui
constituait, hier encore, le dpartement du Rhne et la communaut
urbaine dite du GrandLyon.En crant la collectivit territoriale ad
hoc de la mtropole de Lyon, en remodelant les contours du nouveau
dpartement du Rhne, en redistribuant les comptences entre ces deux
entits, ces textes, issus dune volont porte par des hommes publics
de notre dpartement, innovent en profondeur. Ni lopinion publique,
ni la presse qui en est le relais interactif, ne sy sont dailleurs
tromps.Dans le paysage territorial administratif redessin qui en
rsulte, et alors mme quen ltat, ni les textes prcits ni aucun
autre, ne prvoient rien cet gard, lorganisation judiciaire
territoriale devra-t-elle, devrait-elle, demeure inchange?Il
revient notre Ministre, au Gouvernement, au Parlement et eux seuls
den dcider; est-il besoin de le dire?Pour autant et puisque
laudience solennelle annuelle de rentre judiciaire est un vecteur
privilgi pour les Chefs de cour et de juridiction de satisfaire au
droit que larticle15 de la dclaration des DroitsdelHomme et des
citoyens du 26 aot 1789 reconnat la socit de demander compte tout
agent public de son administration , il est naturel que nous
fassions ici tat de ce que, dans la stricte continuit de nos
immdiats prdcesseurs, Madamela Procureure gnrale et moi, avons, sur
ce sujet, au cours de lautomne coul, dans le simple rle de
proposition qui nous choit, avanc, suggr, de conviction,
ladministration centrale du Ministre de la justice, sans omettre de
nous
-
Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8 7
Audience solennelle
en expliquer et den dbattre loyalement avec nos interlocuteurs
publics locaux.Nous croyons, en effet, que lorganisation de la
justice sur le territoire de ce qui tait jusqualors le dpartement
du Rhne gagnerait fortement sadapter utilement la nouvelle donne en
ajustant ses frontires et sans crainte dinnover son tour.Il
sagirait, dans le mme temps que seraient supprims les Tribunaux de
Grande Instance actuels de Lyon et de Villefranche-sur-Sane, de
donner naissance un unique Tribunal de Grande Instance de la
mtropole de Lyon et du nouveau dpartement du Rhne, implant sur deux
sites - Lyon et Villefranche-sur-Sane - runissant le ressort des
deux juridictions actuelles, et ayant comptence sur lensemble du
territoire form par les deux entits territoriales nouvelles.Entre
ces deux lieux de justice seraient distribus
des blocs de contentieux selon des critres qui, tout en donnant
toute leur place la cohrence et leffi cacit, assureraient une
valorisation quilibre des deuxsites de telle sorte que le site
caladois ne puisse en aucune faon tre regard comme le parent pauvre
de la juridiction nouvelle.Dans le ressort de ce nouveau Tribunal
de Grande Instance, les Tribunaux dinstance, les Conseils de
Prudhommes comme les Tribunaux de commerce seraient maintenus
inchangs dans leur existence et leurs ressorts respectifs.Les
fonctionnaires de justice, actuellement localiss aux Siges
respectifs des deux Tribunaux de Grande Instance existants, bien
que rattachs lunique juridiction nouvelle, disposeraient, comme il
est lgitime, de la garantie du maintien, sils le souhaitent, de
leur emploi sur leur site dorigine.Pour autant, le nouveau Tribunal
de Grande
Instance serait en mesure de mutualiser rationnellement et
efficacement les moyens matriels et humains (sagissant des seuls
magistrats, insistons-y), actuellement disperss entre les
deuxjuridictions, ainsi que de redployer les contentieux dont elles
traitent dans la logique qui vient dtre prsente. Il permettrait,
enfi n, une unifi cation de laction publique de son Parquet lchelle
du nouveau ressort tendu.Quoiquil en soit, notre contribution,
ainsi dcrite dans ses principales orientations, relve de notre
mission de simple proposition. L sarrte notre rle. (...)Puisse,
enfin, lanne nouvelle donner cette grande et belle Cour dappel
lnergie opinitre de persvrer sans cesser de se renouveler et la
hardiesse dexplorer de nouvelles pistes sans rien perdre de sa
forte identit. (...)
Apporter une rponse pnale la dlinquancepar Sylvie Moisson
C tait mieux avant.... avant quand le mot rvolution tait porteur
despoir. Cest par ces mots du philosophe psychanalyste et crivain
Jean BertrandPontalis dcd en 2013 que je souhaite prendre la parole
cette audience solennelle Monsieur le PremierPrsidentLa dmocratie
et notre socit -dans la richesse de toutes ses composantes humaines
et la diversit des hommes et des femmes de bonne volont qui la
composent -est toujours sous le choc de la barbarie perptre au Sige
du journal Charlie Hebdo le 7janvier dernier puis des fusillades de
Montrouge et de la porte de Vincennes les 8 et 9 janvier.La dfense
de nos valeurs fondamentales sest exprime dans un lan de cohsion
sociale et de fraternit universelle sans prcdent donnant raison
Ernst Junger quand il constatait que Les attentats dclenchent le
plus souvent de toutes autres forces que celles que leur auteur
avaient prvus; ils infl uent moins sur lorientation que sur le
rythme de lHistoire tantt lacclrant tantt le freinant.LHistoire
universelle des DroitsdelHomme le 10dcembre 1948 dans larticle3 de
la dclaration qui porte le mme nom a grav au fronton de lhumanit le
droit de tout individu la vie, la libert et la sret de sa
personne.17 citoyens viennent de mourir sur notre territoire parce
quils vivaient leur libert de pense, dexpression, de religion ou
quils avaient fait mtier de dfendre la sret des personnes.Lhommage
qui leur est d nous oblige tous la sobrit des comportements et des
motsTrois policiers sont morts au chemin de lhonneur dans lexercice
de leur mission.lMessieurs les Chefs de service et Chefs des units
de police et de gendarmerie ici prsents , avec vos quipes vous
uvrez jour et nuit pour assurer paix et scurit aux citoyens; vous
inspirez respect et encouragement.Vous savez avoir mon estime et
mon soutien se manifestera sans faille lgard de ceux qui ne vous
respecteraient pas.lMonsieur le prfet de rgion,La qualit de nos
relations oprationnelles -ainsi quentre les Procureurs du ressort
et vos quipes au tout 1errang desquels je veux saluer pour la
dernire
fois en Rhne Alpes le prfet dlgu et la dfense et la scurit,
Stphane Rouve , est le garant de la continuit et de la coordination
de nos actions respectives au service de lEffi cacit et nous avons
conscience quelle doit tre inlassablement renforce.La place minente
de la Justice dans la protection des liberts publiques nous oblige
- nous acteurs de la communaut judiciaire - la rfl exion et
ladaptation des actions dont nous avons la responsabilit.Face au
dfi du terrorisme quil nous faut aff ronter avec dtermination sang
froid et professionnalisme , cette audience solennelle ne peut tre
traditionnelle.Rduire - mme brivement- la focale au compte rendu de
lactivit judiciaire de lanne passe comme le code de lorganisation
judiciaire nous y invite ne nous semble pas de mise.Comment voquer
nos contingences matrielles bien relles et bloquantes , nos besoins
en eff ectifs - de greff e comme de magistrats - dans ce contexte o
lair du temps prsent est lourd de lobscurantisme qui frappe
aveuglement massacrant des vies et tentant de dchirer la
dmocratie.lMesdames et messieurs les reprsentants des autorits
civiles militaires et religieuses que je salue collectivement et
respectueusement en vous remerciant trs chaleureusement de votre
prsence,
le Premier Prsident comme moi- mme avons fait le choix dlibr de
sortir du cadre traditionnel et de ne pas commenter les chiffres de
lactivit judiciaire de lanne passe dont vous pourrez prendre
connaissance dans la plaquette mise votre disposition; elle en fait
un compte rendu fi dle et loyal? complet et synthtique.En revanche
lensemble des fonctionnaires et magistrats de la Cour et de son
ressort - juridictions civiles pnales commerciales sociales du
premier comme du second degr - qui par leur activit et leur
implication ont concouru au bon fonctionnement du service public de
la justice et la qualit du travail judiciaire de lanne coule doit
recevoir ici un vif tmoignage de reconnaissance.En exerant des
tches administratives de soutien ou des activits juridictionnelles,
vous contribuez au fonctionnement de notre institution et sa
modernisation dans des conditions souvent diffi ciles. Je ne vous
ai rejoint quen seconde partie danne et pourtant jen ai dj acquis
la forte conviction.De mme mon engagement est permanent et sera
sans faille au soutien des effectifs, des comblements de postes
vacants quelles que soient les circonstances.Lalourdissement des
enjeux et la gravit de la
D.R
.
Sylvie Moisson
-
8 Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8
Audience solennelle
situation exigent que la cohrence des actions soit servie par la
cohsion d quipes judiciaires fortes et au complet, aux missions
clairement dfinies et corrles aux moyens dont elles sont
dotes.Lquipe rgionale du Ministre public que je dirige depuis
septembre dernier, qui ne dispose que de lquivalent de 68
magistrats sur les 78 dont elle est thoriquement dote, assume
pleinement ses missions en tant contrainte den prioriser certaines
au dtriment dautres, ncessairement moins bien prises en charge.Cest
dautant plus insatisfaisant que des responsabilits nouvelles
sajoutent celles quil faut assumer; cest ainsi quen 2014 des
rformes pnales de fond ou dorganisation judiciaire sont intervenues
qui vont connatre un plein dploiement dans les mois
venir.lSagissant des rformes dorganisation ncessaires la Justice du
21mesicle , les juridictions de Lyon - le TGI et la Cour dappel -
dj en charge des affaires de grande criminalit pour linter-rgion
compose des Cours dappel de Chambry, Grenoble et Riom ont dsormais
une nouvelle comptence - exclusive cette fois - pour les affaires
pnales militaires de ce grand ressort dont les juridictions en sont
corrlativement dcharges.Lchelon inter-rgionale de la Juridiction
Inter-Rgionale Spcialise (JIRS) est donc confirm comme lchelon
pertinent pour traiter des contentieux spcialiss dont le traitement
doit tre regroup, criminalit organise comme grande dlinquance
conomique et financire et dsormais infractions militaires.Il faut
naturellement que chacune des 8juridictions JIRS du terroir
national soit pleinement dote des moyens oprationnels ncessaires au
niveau du TGI comme de la Cour mais bien plus encore ne faut-il pas
rflchir son extension dautres domaines?Certes le traitement des
accidents collectifs de grande ampleur - comme les crashs ariens -
vient dtre confi par le lgislateur 2 ples: le TGI Paris et celui de
Marseille.Certes la lutte contre la grande dlinquance financire
sest enrichie en 2014 de la cration du Parquet national financier
centralisateur des affaires les plus graves en complment des JIRS
et des juridictions de droit commun; nous nous sommes runis ici mme
Lyon, en dcembre, pour jeter les bases dune complmentarit fconde et
je tiens saluer le vice Procureur prsent notre audience pour
reprsenter Madamela Procureur national.Mais ne faut-il pas pousser
la rflexion sur le dveloppement dune organisation judiciaire
inter-rgionale dans le domaine de la lutte antiterroriste en
complment du ple national antiterroriste de Paris.Les 3 jours de
terreur que nous venons de connatre nous obligent- acteurs du
traitement pnal du terrorisme - une rflexion dadaptation lvolution
de la menace terroriste irrigue par lislamisme radical.Notre
organisation judiciaire antiterroriste repose sur un traitement
centralis des infractions terroristes par le TGI de Paris, la
direction des enqutes et lexercice des poursuites relve du service
central de lutte anti- terroriste (section C1) du Parquet de Paris
comptent sur lensemble du territoire , comme linstruction ou le
jugement des affaires correctionnelles ou criminelles par une Cour
dassises spcialement compose de magistrats professionnels.Ce
dispositif spcifique de rpression du terrorisme issu de la loi du 9
septembre 1986 qui repose sur le partage et la circulation de
linformation entre le niveau local des 166 TGI et le niveau
spcialis du Parquet de Paris a t cre dans un contexte
dmergence de rseaux fortement structurs mme si la menace
terroriste a toujours t protiforme.Aujourdhui - ct de cette forte
structuration qui persiste - se multiplient des actions plus
individuelles lies lmergence de groupes islamistes radicaux et des
phnomnes dautoradicalisation via Internet; ces volutions ont
dailleurs conduit le lgislateur renforcer rcemment les dispositions
relatives la lutte contre le terrorisme; cest la loi du 13 novembre
2014 qui vient de crer une nouvelle infraction rprimant la
prparation individuelle de certains actes de terrorisme.De mme
certaines de ses dispositions visent mieux apprhender la
cybercriminalit et renforcer la rpression pnale des faits de
provocation aux actes de terrorisme et dapologie de ces actes.Ne
faut-il pas dsormais enrichir la rflexion sur le point de savoir si
la JIRS - et donc les Parquets et les Parquets gnraux de ces 8 ples
- ne doivent pas tre investis de responsabilits spcifiques
dexploitation et de coordination du renseignement judiciaire, voire
de regroupement de poursuites pnales actuellement disperses et peu
lisibles.Nest-il pas opportun que des stratgies judiciaires
inter-rgionales soient mises en uvre en complment de celles qui
reviennent lchelon national de mener et lui seul.La question me
semble mriter aujourdhui dtre pose et expertise sans a priori ni
exclusive.Par ailleurs il faut tre conscient que - dcrocheur des
valeurs de notre socit - le dlinquant prsente une grande fragilit
lasservissement fanatique.De mme la dlinquance contemporaine se
caractrise par une forte hybridation: il ny a pas dun ct le grand
banditisme des trafics en tout genre, les rglements de compte de
droit commun et de lautre la dlinquance conomique et financire puis
bien part - cloisonns de manire tanche - les faits de
terrorisme.Les domaines se recouvrent ,les rseaux sinterpntrent ,
les fruits illicites de la dlinquance alimentent une conomie
souterraine elle aussi protiforme; la lutte contre le blanchiment
de largent sale du trafic de stupfiants engage avec succs depuis
plusieurs annes par la saisie des avoirs criminels nous rvle des
investissements illicites sur le territoire national certes , mais
aussi ltranger.Face ces ralits, laction publique qui est exerce par
chacun dentre vous - Messieurs les Procureurs de la rpublique dans
vos ressorts respectifs - dont il me revient dassurer lanimation et
la coordination au niveau rgional doit tre issue dune politique
pnale la fois - ambitieuse pragmatique et globale, - qui doit
sintgrer dans une politique de juridiction - et qui doit sinscrire
dans une dmarche partenariale au cur des politiques publiques de
prvention de la dlinquance et de lutte contre linscurit.Lambition
rside dans la ncessit dapporter une rponse pnale adapte chaque fait
de dlinquance dans des dlais utiles.Le pragmatisme lui impose la
politique pnale de sappuyer sur la capacit de la juridiction et de
ses partenaires mobiliser les effectifs et les moyens permettant de
dployer tout lventail de la rponse pnale moderne.Cest ainsi que les
audiences de jugement doivent tre rserves aux faits qui ncessitent
un examen public parce quils sont contests ou quils sont graves
tandis que les faits de faible ou moyenne gravit doivent relever de
procdures simplifies sans audience de jugement comme la comparution
sur reconnaissance pralable de culpabilit ou lordonnance pnale sans
omettre les procdures alternatives aux poursuites qui conservent
toute leur pertinence pour davantage
duquer que rprimer. Cet objectif demeure aussi prioritaire dans
une socit dmocratique qui doit viter de verser dans un tout
rpressif.Nous examinerons ensemble Messieurs les Procureurs dans
les mois venir les axes dharmonisation dvelopper en ce sens dune
politique pnale diversifie et quilibre.Il est des domaines ou
laction publique doit tre exerce dans une cohrence globale sans
faille; je pense tout particulirement - ce jour - la lutte contre
les actes racistes antismites antimusulmans ou visant toute autre
religion ou communaut de pense ou de foi.Notre vigilance absolue
-que je veux raffirmer ici avec force -doit se traduire par des
rponses pnales claires lisibles qui donnent chacun la certitude que
ses droits fondamentaux sont effectivement dfendus et que sa libert
de pense de religion dopinion politique est concrtement assure par
la rpression de ceux qui y porterait atteinte de quelconque manire
et quel quen soit le mobile -amalgame ,conviction ou pure
btise.Nous dplorions rcemment ensemble dans le cadre de la cellule
rgionale de lutte contre les actes anti musulmans que jai runie en
dcembre avec les membres reprsentatifs de cette communaut que
nombre de ces actes ne donne pas lieu dpt de plainte ni mme
signalement la police.Je vais runir rapidement la cellule rgionale
de lutte contre les actes antismites et nous devrons de mme dans ce
cadre avec les reprsentants de la communaut juive - fortement
prouve - poser les bases dune mobilisation renouvele par la
confiance dans les suites judiciaires.La politique pnale mene doit
enfin tre globale cest dire intgrer un accompagnement effectif des
victimes tout au long de la procdure.Les progrs dj raliss dans leur
prise en charge grce laction des associations et la gnralisation
des bureaux daide aux victimes au sein de chaque TGI vont connatre
en 2015 un nouveau dveloppement puisque la France - comme les
autres tats membres ldoit transposer avant le 16 novembre prochain
la directive du parlement europen et du Conseil en date du
25.10.2012 tablissant des normes minimales concernant les droits le
soutien et la protection des victimes de la criminalit.La majorit
des droits consacrs par cette directive existent dj dans notre
lgislation Elle introduit toutefois de nouveaux droits dune porte
non ngligeable.Elle consacre, en particulier, dans son article22,
le droit de toutes les victimes de bnficier dune valuation de leurs
besoins de protection .Cette valuation a pour but didentifier les
victimes qui, en raison notamment de la nature de linfraction subie
ou de leurs caractristiques personnelles sont particulirement
exposes des risques de reprsailles ou dintimidation de la part de
lauteur des faits, ainsi que des risques de victimisation
secondaire.La victimisation secondaire sentend du fait pour la
victime de revivre nouveau son traumatisme suite un nouvel vnement
reli ou non au traumatisme initial (par exemple, ractivation du
traumatisme du fait des auditions multiples et rptes de la victime
au cours de la procdure pnale).La transposition de la directive
ncessitera de formaliser cette valuation. A lissue de lvaluation,
les victimes identifies comme ayant besoin de mesures de protection
bnficient de droits supplmentaires prvus aux articles23 et 24.Le
dveloppement dune politique de juridiction va tout particulirement
trouver sexprimer dans la mise en uvre de la loi du 15.08.2014
relative lindividualisation des peines et renforant lefficacit des
sanctions pnales.
-
Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8 9
Audience solennelle
Dans ce cadre il nous faut en effet - tout en prservant
lindpendance absolue des magistrats du Sige - dgager un diagnostic
partag et nous accorder sur les leviers daction mobiliser
pour:ldune part mieux individualiser les peines lors de leur
prononcldautre part construire un parcours dexcution des peines
efficace dans la prvention des risques de rcidive.Ce nest pas le
lieu ici de dvelopper le contenu technique de cette loi dense et
complexe.La mesure phare en est la nouvelle peine de la contrainte
pnale qui permet dimposer au condamn de faon plus efficace les
obligations quil est tenu de respecter dans le cadre dun programme
individualis dcid par le Juge de lapplication des peines sur
proposition du conseiller dinsertion et de probation, programme
volutif rvalu priodiquement.Madame la directrice inter-rgionale de
ladministration pnitentiaire ,Nous devons en arrter ensemble les
orientations locales concrtes ; quel public de condamns est
susceptible dtre concern , pour quelle nature de dlinquance, au
terme de quelles dmarches dvaluation, quels programmes individuels
peuvent tre dvelopps et par quelles structures; voil autant
de questions sur lesquelles nous allons prochainement nous
pencher ensemble avec les Juges de lapplication des peines et les
Parquets locaux.Monsieur le Premier Prsident, nous souhaitons
ensemble que lUniversit soit galement associe ces travaux dans le
cadre de lexprimentation dun partenariat renforc plus global que
vous allez voquer plus en dtail.Nul doute que nous devrons nous
inscrire dans la mme dmarche avec la direction inter-rgionale de la
protection judiciaire de la jeunesse et lUniversit dans le cadre de
la mise en uvre de la refonte annonce de lordonnance du 2fvrier1945
relative aux mineurs dlinquants dont les dbats seront certainement
nourris. Il y aurait encore beaucoup voquer tant les sujets de
rforme - souvent contests - se sont succds dernirement lgard des
juridictions consulaires, prudhommales et lendroit des
professionnels du droit, avocats, notaires, huissiers de justice,
greffiers des Tribunaux de commerce et mandataires judiciaires qui
ont manifest leur inquitude ; ils savent lattention que je leur
porte de mme que les magistrats de lordre administratif, des
juridictions financires, les professionnels du chiffre et de
lexpertise avec lesquels nous
avons dj nou des relations de travail qui se dvelopperont
davantage au cours de lanne.Mes derniers mots seront au soutien de
politiques actives de prvention et de scurit qui impliquent
lensemble des acteurs de la Cit.Monsieur le Prsident de la Mtropole
de LyonMadamela Prsidente du Conseil gnral du nouveau dpartement du
RhneMesdames et messieurs les maires des 3dpartements du ressort de
la Cour dappel ,Nous partageons - avec lautorit prfectorale - la
responsabilit de la prvention de la dlinquance au travers:ldes
conseils dpartementaux de prvention de la dlinquanceldes conseils
locaux de scurit et de prvention de la dlinquance et leurs
dispositifs dactions sur le territoire les contrats locaux de
scurit.Il me semble ncessaire que ces structures soient rapidement
mobilises pour un nouvel lan la recherche dune cohsion sociale
renforce.Le terrorisme se nourrit du dcrochage social des plus
fragiles. Aidons les avant quils ne basculent, Aidons les apprendre
que renoncer sa libert cest renoncer sa qualit dhomme. 2015-094
Veille jurisprudentielle
Pour ceux de ces projets qui ncessitaient des expropriations, le
prfet avait procd aux enqutes publiques prvues par la loi puis pris
des arrts dclarant ces projets dutilit publique ainsi que des arrts
dclarant cessibles les terrains ncessaires leur
ralisation.Lensemble de ces arrts avaient t attaqus. Par des arrts
de 2013 et 2014, la Cour administrative dappel de Lyon avait annul
lensemble de ces dcisions pour divers vices de procdures.Le
Ministre de lintrieur, la communaut urbaine de Lyon et le Syndicat
Mixte des Transports pour le Rhne et lAgglomration Lyonnaise
(SYTRAL) ont contest ces arrts de la Cour administrative dappel de
Lyon devant le Conseil dtat par la voie du pourvoi en cassation. Le
Conseil dtat leur a donn raison, a annul les arrts et a renvoy les
affaires devant cette cour pour quelles soient rejuges.Le Conseil
dtat sest dabord pench sur le fait que les actes douverture des
enqutes publiques ne mentionnaient pas que les tudes dimpact
ralises en vue des projets figuraient dans
les dossiers consultables pendant lenqute. Contrairement ce
quavait jug la Cour administrative dappel, il a jug que ce fait
nentranait pas lui seul lannulation des actes attaqus. Le Conseil
dtat a en effet relev que, malgr cette omission, les tudes dimpact
avait bien pu tre consultes par le public, qui avait fait de
nombreuses observations durant les enqutes. Le public avait donc pu
tre inform et participer effectivement lenqute publique.Le Conseil
dtat sest ensuite prononc sur le fait que lestimation des cots du
projet T3GS portait seulement sur les cots dextension de la ligne
de tramway T3, et non sur les cots des amnagements prvus pour trois
stations de cette ligne dj existantes. Contrairement la cour, le
Conseil dtat estim quil ny avait pas dirrgularit. En effet, ces
deux projets pouvaient bien faire lobjet de financements
indpendants.Par ailleurs, tait aussi conteste la dclaration dintrt
gnral de ce projet distinct damnagement de trois stations
existantes de
la ligne de tramway T3. La dclaration dintrt gnral, prvue par
larticleL.121-9 du code de lurbanisme, est galement prcde dune
enqute publique. Le Conseil dtat a estim que la notice explicative
du projet, qui doit figurer au dossier denqute publique, exposait
suffisamment les principales caractristiques du projet et ses
finalits propres. Ds lors, le seul fait que cette notice ne
mentionnait pas que ces amnagements permettraient aussi de mieux
assurer la desserte du futur Grand Stade ne viciait pas la
procdure.Le Conseil dtat a donc annul les arrts de la Cour
administrative dappel de Lyon: celle-ci devra se prononcer nouveau
sur la lgalit de lensemble des arrts lis aux procdures
dexpropriation et de la dclaration dintrt gnral du projet
damnagement des trois stations existantes de la ligne T3.Les arrts
sont disponibles sur le site du Conseil dtat www.conseil-etat.fr
2015-095
Source: communiqu du 27 fvrier 2015
Conseil dtat Projets damnagements lis au Grand Stade de Lyon
Le Conseil dtat a cass plusieurs arrts de la Cour administrative
dappel de Lyon relatifs aux projets damnagements en lien avec la
construction du futur Grand Stade (dit stade des lumires ) de Lyon
et a renvoy ces affaires la Cour pour quelles soient rejuges. Dans
la perspective de la construction du stade des lumires de Lyon,
plusieurs projets damnagement visant amliorer sa desserte ont t
conus, notamment: lamlioration de laccs sud du stade par la cration
dun service de transport en commun et des amnagements routiers;
lamnagement dun accs nord pour le stade; la cration de parcs de
stationnement; lamnagement de lchangeur n7 de la route nationale
346 (rocade est); lextension de la ligne de tramway T3, dit projet
T3GS .
-
10 Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8
Chronique
La mdiation judiciaire est lorigine issue dune pratique
prtorienne introduite et mise en uvre la Cour dappel de Paris dans
les confl its collectifs du travail en rfr, sous limpulsion du
Premier Prsident Pierre Drai.En labsence de cadre lgal et
rglementaire spcifi que, les articles808, 809 et 145 du (nouveau)
code de procdure civile ont pu initialement constituer le fondement
recherch de la mdiation judiciaire au titre des mesures prises par
le Juge des rfrs.La Cour dappel de Paris abandonna fi nalement
cette approche par un arrt du 29mars1989 (Dalloz, 1989, IR, p.125)
qui sinscrivait dans le prolongement dun arrt du 16 mai 1988
(Dalloz, 1988, IR, p.174) posant le principe que la mdiation
judiciaire devait tre conue comme une modalit du processus de
conciliation ressortissant de la mission gnrale du Juge en
application de larticle21 du code de procdure civile.Le
dveloppement de la mdiation au sein de la Cour dappel de Paris,
spcialement dans les confl its individuels du travail, aprs
ladoption de la loi n95-125 du 8 fvrier 1995 et de son dcret
dapplication n96-652 du 22 juillet 1996, est laboutissement dune
rfl exion commune mene depuis plusieurs annes qui a progressivement
abouti llaboration dun schma densemble visant amliorer la rponse
judiciaire dans le traitement des litiges lui tant soumis (Jacques
Clavire-Schiele: Rsurgences de la mdiation et pratique de la Cour
dappel de Paris, Semaine Sociale Lamy, 2 dcembre 2002, n1100, p.46;
Restitution dexprience des Chambres sociales la Cour dappel de
Paris, in rapport sous la direction de Jean-Claude Magendie, Clrit
et qualit de la justice, la mdiation, une autre voie,
octobre2008).La mdiation a tout dabord t introduite titre
exprimental dans quatre Chambres sociales qui runissaient leurs
demandes les parties avec leurs conseils afin de leur proposer dy
avoir recours, ds lanne 1999 on sorienta vers une pratique
consistant provoquer directement de la part des parties des
demandes dentre en mdiation tout en cherchant y associer lensemble
des Chambres sociales, enfi n dans le prolongement du rapport
Magendie doctobre 2008, prcisment depuis la fi n 2009, il a t dcid
de passer dune phase encore exprimentale un schma directeur
structur (Benot Holleaux: Mdiation prudhomale: renouveau de loffi
ce du Juge, Semaine Sociale Lamy, 14 mai 2012, n 1538 ; Mdiation
prudhomale: pratique suivie la Courdappel de Paris, Semaine Sociale
Lamy, 21 mai 2012, n1539).La difficult de lexercice est bien dans
lorganisation dun systme commun aux diffrentes Chambres sociales
traitant du
contentieux individuel, le travail principal du magistrat rfrent
tant de convaincre ses collgues - encore et toujours - de la
ncessit dadopter des mthodes standardises mais volutives et den
assurer la prennit, le contraire de pratiques individuelles
rductrices sans grand avenir.Le processus de mdiation prudhomale la
Cour dappel de Paris sorganise actuellement sous une double
approche (I) avec le systme dit de la double convocation avant les
audiences de fond et linstauration de permanences de mdiateurs ces
mmes audiences.Les mdiateurs judiciaires constituent bien le cur du
dispositif, ce qui suppose dinstaurer avec eux des liens troits en
veillant leur fi xer un cadre gnral dintervention (II).Au-del de la
mdiation dans ses aspects techniques, cest la question de loffi ce
du Juge au XXImesicle qui est pose et, plus gnralement, celle du
sens de la fonction de Juger (III).
I - LA DOUBLE APPROCHE PARISIENNE DE LA MDIATION a) Le processus
de mdiation avant les audiences de fond: la double
convocationLobjectif poursuivi : aprs la rception des dclarations
dappel au greff e de la cour, dans les aff aires qui auront t
pralablement slectionnes sur la base de critres prcis, tenter sous
le contrle du Juge un rglement ngoci du litige entre les parties
qui auront donn leur accord, avant la date daudience de fond, et en
suivant un processus norm.A la Cour dappel de Paris, cela concerne
les 9 Chambres sociales - sur les 12 - qui sont spcialises dans le
traitement du contentieux prudhomal.
Le schma propos sarticule en 4tapes, de la rception des
dclarations dappel par le greffe jusquau traitement finalis une
audience de la cour, tant prcis que ce processus sur double
convocation, supposer toutes les tapes franchies, dure en moyenne 6
7 mois - un temps incompressible.Mis en uvre la Cour dappel de
Paris depuismai2011, il et parfaitement transposable dans des Cours
dappel plus rduites sous rserve de certains amnagements, et prsente
un intrt particulier dans des juridictions qui ont prcisment des
dures daudiencement suprieures 7 mois.
Etape 1: La rception des dclarations dappel et leur traitement
par le greff e.Le service du greff e procde lenregistrement des
dclarations dappel qui lui arrivent avant toute aff ectation entre
les Chambres (traitement initial des procdures et dlai du greff e
pour mmoire).
Etape 2: Le passage par la cellule de mdiation / la slection
initiale des aff aires.Avant laffectation entre les Chambres par le
service de la distribution, tous les dossiers passent par la
cellule de mdiation qui est charge doprer un tri slectif en
fonction de critres prdtermins.Il est retenu le systme des critres
dits dexclusion - toutes les aff aires sont en principe
susceptibles dtre slectionnes sauf -, en ce que dune manire gnrale
seront cartes les aff aires dans lesquelles une solution de pur
droit est recherche une question de principe, lordre public de
protection sy oppose en raison de lindisponibilit des droits en
cause (exemples: la reconnaissance dun rgime protecteur li un
mandat lectif ou
La mdiation judiciaire et son processus : la pratique suivie aux
Chambres sociales de la Cour dappel de Paris
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Benot Holleaux
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Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8 11
Chronique
syndical, les rgles sur le transfert du contrat de travail ),
une procdure collective est ouverte, ou encore celles sinscrivant
dans une srie de plus de 7 dossiers.Cette cellule de mdiation, qui
est oprationnelle toute la semaine, comprend le magistrat rfrent et
un nombre variable dassistants de justice.Une fois le tri opr par
la cellule de mdiation, tous les dossiers, slectionns ou non,
partent au service de la distribution qui les rpartit ensuite entre
les Chambres, et cest ce mme service qui aura plus spcialement en
charge, sous le contrle du magistrat rfrent, la gestion centralise
des permanences dinformation gnrale sur la mdiation dans les
dossiers qui auront t slectionns (fixation dun nombre dtermin
daffaires par crneau de permanence) - voir tape3.Deux hypothses
peuvent ainsi se prsenter:l affaires dans lesquelles un processus
de mdiation nest pas envisageable et qui nont donc pas t
slectionnes: les parties sont convoques par le greffe une audience
de fond (procdure habituelle);laffaires dans lesquelles un
processus de mdiation est envisageable et qui ont t slectionnes
cette fin: le greffe envoie chacune des parties sur un seul et mme
document en deux volets distincts, dune part, une
convocation/invitation se rendre avant laudience de fond une
permanence dinformation sur la mdiation et, dautre part, une
convocation cette mme audience, sous la forme dune lettre simple
double dune lettre en recommand, avec une notice explicative.
Linformation est galement donne aux conseils des parties - avocats,
dfenseurs syndicaux - au moyen dun avis spar.
Etape 3: La permanence dinformation sur la mdiation /
linformation des parties.Cette permanence, qui est assure par des
mdiateurs tour de rle en dehors des audiences de la cour, se tient
en principe dans un dlai minimum de 6 semaines aprs la slection des
dossiers par la cellule de mdiation et leur traitement au sein du
greffe.A ce stade du processus, le mdiateur de permanence na pas en
principe connatre du fond de laffaire, linformation quil donne aux
parties tant de porte gnrale ( dossier ferm), sauf bien videmment
si celles-ci entendent dj lui faire part de certaines donnes se
rapportant au litige qui les oppose.Une fois sa permanence termine,
qui correspond le jour indiqu une Chambre en particulier, Le
mdiateur renseigne une feuille de liaison quil remet au greffe de
la Chambre concerne, sauf si une demande de dlai de rflexion est
formule devant lui par les parties ou leurs conseils (au maximum 8
jours), auquel cas il la garde provisoirement avant de la restituer
dans les meilleurs dlais.Au vu de ce document rempli par le
mdiateur, le greffe saura sil y a lieu de prparer une ordonnance
dsignant un mdiateur.Deux situations sont donc possibles lissue de
cette mme permanence:l les parties ne veulent pas sengager dans un
processus de mdiation: elles sont dores et dj convoques une
audience de fond (tape 2);l les parties acceptent de sengager dans
un processus de mdiation: le mdiateur recueille leur accord dans un
crit quil joint la feuille de liaison remettre au greffe de la
Chambre concerne qui prpare ensuite une ordonnance dsignant
un mdiateur - dure de la mission fixe dans la limite de 3mois
renouvelable une fois -, lequel nest pas obligatoirement celui qui
leur a donn linformation.
Etape 4: Le traitement finalis une audience de la cour.A
lexpiration dun dlai dun mois suivant le terme de la mission
impartie au mdiateur, laffaire revient une audience dite de suivi
qui sinscrit dans le circuit habituel des audiences de la Chambre
ayant procd sa dsignation.Les diffrents cas de figure
envisageables:lles parties ne sont pas parvenues une mdiation:
elles sont dj convoques (depuis ltape 2) une audience de fond;lles
parties sont parvenues une mdiation sous la forme dun protocole
dont elles demandent lhomologation la Cour qui rendra un arrt dans
le mois aprs transmission pour avis au Ministre Public - procdure
gracieuse, articles131-12, 798 et 953 du code de procdure
civile;lles parties sont parvenues une mdiation et ne demandent pas
spcialement une homologation la Cour: il sera rendu un arrt de
dsistement dappel emportant extinction de linstance.
b) Les permanences des mdiateurs aux audiences de
fondIndpendamment des affaires slectionnes dans le cadre de la
double convocation avant les audiences de fond, il est encore
possible de dclencher un processus de mdiation au cours de
celles-ci sous limpulsion directe des Juges devant lesquels les
parties au litige comparaissent ou sont reprsentes.Les Chambres
sociales de la Cour qui en ont exprim le souhait ont leurs
audiences (collgiale et rapporteur) un mdiateur sur la base dun
tableau de permanence dont il est assur la diffusion auprs des
Juges (Prsidents de Chambre, conseillers) le vendredi pour la
semaine suivante.Ce tableau est prpar par le mdiateur rfrent sous
le contrle et la responsabilit du magistrat rfrent mdiation avec
comme objectif de remplir tous les crneaux disponibles -
actuellement, 6Chambres sociales de la Cour dappel de Paris sur les
12 ont adhr ce systme collectif, ce qui reprsente 18 audiences
assurer chaque semaine-, tant prcis que les mdiateurs ont
lobligation de passer tour de rle dans les diffrentes Chambres.Avec
lexprience, on saperoit que les rsultats de ces permanences sont
directement fonction du degr dimplication des Juges et de la place
quils entendent donner aux mdiateurs qui les assistent dans cette
tche.La relation directe Juge-mdiateur laudience est primordiale,
et lon peut affirmer que de sa qualit dpend le succs de la mdiation
reposant sur un processus apais dans lequel les parties, chacune de
ses tapes, doivent tre dment informes de leurs droits respectifs.Il
est suggr le mode opratoire suivant: le Juge qui prside fait en
tout dbut daudience, gnralement avant lappel des causes, une
prsentation brve et concise sur la mdiation en indiquant aux
parties quil - ou la Cour - se rserve la possibilit, dans les
affaires qui seront retenues et aprs les plaidoiries, de les
orienter vers le mdiateur de permanence pour avoir une information
gnrale.Dexprience, il est recommand en effet de laisser tout dabord
les parties et leurs conseils sexprimer
pour ensuite, quand laffaire peut sy prter, les inviter - en
termes courtois mais fermes - recevoir du mdiateur une information
gnrale sur la mdiation - prvoir cette fin une salle ddie pouvant
tre la Chambre du Conseil .Plusieurs situations sont ainsi
susceptibles de se prsenter:lles affaires retenues dans lesquelles
il na pas t provoqu la diffusion aux parties dune information
gnrale sur la mdiation sont dbattues et mises en dlibr;lles
parties, assistes ou reprsentes, aprs avoir reu linformation, se
sont mises daccord sans plus attendre pour sengager dans un
processus de mdiation, le Juge dsigne alors sans dlai un mdiateur
par ordonnance - on ouvre une parenthse dans la procdure judiciaire
en dclenchant un processus de mdiation;lles parties, assistes ou
reprsentes et dment informes, sollicitent un dlai de rflexion
supplmentaire sur lopportunit douvrir un processus de mdiation, le
Juge peut renvoyer laffaire une audience ultrieure ou la mettre
directement en dlibr en leur demandant de lui adresser sous
huitaine une rponse crite - si rponse positive de toutes les
parties intresses: une ordonnance de dsignation dun mdiateur sera
prise ouvrant un processus de mdiation, si rponse positive
partielle ou ngative: laffaire est dj mise en dlibr;lles parties,
assistes ou reprsentes et dment informes, indiquent immdiatement ne
pas vouloir sengager dans un processus de mdiation, dans ce cas
leur affaire sera mise en dlibr.A lissue de laudience, il est
recommand de procder un dbriefing avec le mdiateur de permanence
pour changer et affiner sa pratique sur la question essentielle de
savoir comment dtecter les affaires ligibles la mdiation - le
mdiateur expriment tant gnralement de trs bon conseil si le Juge
est peu ou pas rompu lexercice.
II - LES MEDIATEURS DANS LE CADRE DE LA MEDIATION JUDICIAIRE Une
trentaine de mdiateurs exercent actuellement aux Chambres sociales
de la Cour dappel de Paris, le plus souvent sur propositions manant
dorganismes spcialiss dans le domaine de la mdiation dont ils sont
membres, organismes avec lesquels la Cour collabore depuis
plusieurs annes dans un rapport de confiance absolue:llAssociation
Nationale des Mdiateurs (ANM);l lAssociation des Mdiateurs Europens
(AME)/Barreau de Paris;lle Rseau des Mdiateurs en Entreprise
(RME);llInstitut dExpertise, dArbitrage et de Mdiation (IEAM) /
Tribunal de commerce de Paris;lle Centre de Mdiation et dArbitrage
de Paris (CMAP) / Chambre de commerce de Paris.Ce travail de
slection est en pratique effectu par le magistrat rfrent mdiation
qui demande aux candidats de lui adresser une lettre de motivation
avec un curriculum vitae, avant de les recevoir en entretien
individuel, puis de prendre une dcision en ayant sollicit si
ncessaire tout avis autoris.Les critres de slection portent sur
lexprience acquise et reconnue dans le domaine de la mdiation, les
connaissances minimales dans le type de contentieux concern, les
formations ayant t suivies (formation initiale et continue) ainsi
quune pratique dontologique irrprochable.Ces mdiateurs proviennent
de milieux divers: anciens magistrats la retraite, avocats
spcialiss en
-
12 Les Annonces de la Seine - Jeudi 5 mars 2015 - Numro 8
Chronique
droit social, directeurs et responsables des ressources
humaines, consultants en ressources humaines et techniques
dorganisation de lentreprise, cadres dirigeants, professionnels de
la mdiation exerant titre individuel. Ils font tous partie ce titre
dun rfrencement mis jour priodiquement et sur la base duquel sont
prpars les tableaux des permanences en double convocation et aux
audiences de fond.Il sagit dun document interne aux Chambres
sociales de la cour, purement indicatif, destin informer le Juge
qui est libre in fine de dsigner tout mdiateur de son choix. Afin
de disposer de mdiateurs expriments, il leur est demand par le
magistrat rfrent mdiation dassurer en moyenne deux permanences
mensuelles aux audiences de fond et en double convocation, cela
dans une dmarche de qualit inhrente au service public de la
justice.Pour tre admis parmi les mdiateurs au sein des Chambres
sociales de la cour, outre lexprience et la motivation, il est plus
particulirement exig ladhsion une organisation collective avec
certaines obligations inhrentes la mdiation judiciaire en gnral et
ce que lon attend deux aux Chambres sociales de la Cour en
particulier, sous le contrle - gnralement bienveillant - du
magistrat rfrent qui fait en sorte dentretenir avec eux des liens
les plu