CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES Le 16 juin 2000
DE PROVENCE-ALPES-COTE D'AZUR
REF.: Greffe/PP n° 1529
Lettre recommandée avec A.R n° 9288 524 40FR
OBJET : Lettre d'observations définitives relative à la gestion du service de l'eau du périmètre de
Marseille.
Monsieur le Maire,
La Chambre régionale des comptes a, dans sa séance du 30 mai 2000, arrêté ses observations
définitives au vu notamment des réponses adressées à ses observations provisoires.
Conformément à l'article L241-11 du Code des juridictions financières, ces observations devront
être communiquées par vos soins à l'assemblée délibérante dès sa plus proche réunion ; elles
feront l'objet d'une inscription à l'ordre du jour de cette assemblée et seront jointes à la
convocation adressée à chacun de ses membres.
Vous voudrez bien trouver ci-joint le texte intégral des observations définitives de la Chambre.
Je vous prie de croire, Monsieur le Maire, en l'assurance de ma considération distinguée.
Le Président,
Alain PICHON
Monsieur le Maire,
Hôtel de Ville
13233 MARSEILLE CEDEX 1
CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
DE PROVENCE-ALPES-COTE D'AZUR
OBSERVATIONS DEFINITIVES
SUR LA GESTION DU SERVICE
DE L'EAU DU PERIMETRE DE MARSEILLE
A COMPTER DE L'EXERCICE 1989
Rappel de procédure
La Chambre a inscrit à son programme l'examen de la gestion du service de l'eau du périmètre de
Marseille à partir de l'année 1989. qui a été attribué à Mme Tizon, MM. Heuga et Duchon-Doris
conseillers. Le président de la Chambre en a informé M. Gaudin, maire de la ville de Marseille, par
lettre en date du 2 octobre 1995.
Dans le cadre de cet examen, une enquête sur le contrat de délégation du service public de l'eau
existant entre la ville de Marseille et la Société des Eaux de Marseille (SEM) à compter de
l'exercice 1995, a été diligentée conformément aux dispositions de l'article L221-8 du Code de
juridictions financières. Le président de la Chambre en a informé le président de la SEM par
courrier du 21 août 1996.
Les entretiens de fin d'instruction ont eu lieu les 16 décembre 1996 et 18 septembre 1997 avec M.
Robert Vigouroux, et les 16 décembre 1996 et 11 juillet 1997 avec M. Jean-Claude Gaudin,
maires successifs de la commune, qui concernaient surtout le contrôle en cours du service
d'assainissement de la commune mais également, de façon marginale, le contrôle du service de
l'eau de la ville.
Par lettre du 1er avril 1999, le président de la Chambre a informé MM. Jean-Claude Gaudin, maire
de Marseille, et Loïc Fauchon, président de la SEM, de la désignation du nouveau rapporteur, M.
Besombes, chargé de poursuivre la vérification du service de l'eau de la ville de Marseille.
Ce contrôle a été étendu aux autres communes intégrées au périmètre de distribution d'eau de
Marseille. Les maires des communes, de La Penne sur Huveaune, d'Aubagne, de Septèmes les
Vallons est des Pennes Mirabeau (section dite des Cadeneaux), ont été informés de l'examen de
la gestion de leur service de l'eau, à compter de l'exercice 1992, par un courrier du président de la
Chambre du même jour.
Les entretiens de fin d'instruction ont eu lieu le 1er octobre 1999 avec M. Jean-Claude Gaudin, le
4 octobre 1999 avec Mme Geneviève Donadini, le 5 octobre 1999 avec M. Jean Tardito, le 15
octobre 1999 avec MM. Victor Mellan et Marc Ferrandi et le 19 octobre 1999 avec M. Robert
Vigouroux..
Dans sa séance des 29 octobre et 10 novembre 1999, la Chambre a arrêté ses observations
provisoires. En application des dispositions de l'article 114 du décret n° 95-945 du 23 août 1995,
ces observations ont été transmises dans leur intégralité à M Jean-Claude Gaudin, M.me
Geneviève Donadini, MM. Jean Tardito, Victor Mellan et Marc Ferrandi et, pour partie, à une
personne, aux ordonnateurs de sept communes et d'un syndicat intercommunal, aux
représentants légaux de deux sociétés et au directeur d'un établissement public national cités
dans le texte. Les réponses de douze organismes ont été enregistrées au greffe de la juridiction.
Enfin, le représentant de la société gestionnaire a été, sur sa demande, entendu par la Chambre.
Après avoir entendu le rapporteur et pris connaissance des conclusions du commissaire du
Gouvernement, la Chambre, a délibéré et adopté, le 30 mai 2000, ses observations définitives
dans la composition suivante : M. Alain Pichon, président, MM. Pierre Fabre et Pierre Giannini,
présidents de section, Mme Donnadieu, MM.Kovarcik et Bahuaud conseillers, et M. Christian
Besombes, rapporteur.
En application des dispositions de l'article L241-11 du code des juridictions financières, ces
observations devront être communiquées par le Maire à son assemblée délibérante lors de la plus
proche réunion suivant leur réception. Elles feront l'objet d'une inscription à l'ordre du jour et
seront jointes à la convocation adressée à chacun de ses membres.
Elles seront, après cette date, communicables à toute personne qui en ferait la demande en
application des dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
1ERE PARTIE : PRESENTATION GENERALE DU SERVICE
Marseille est située au centre d'un demi-cercle de collines calcaires arrosées de quelques cours
d'eau à caractère torrentiel qui disparaissent une bonne partie de l'année.
A la suite d'une sécheresse particulièrement sévère où un rationnement à un litre d'eau par jour
fut instauré pour chacun des 160 000 habitants, et à une épidémie de choléra qui fit plusieurs
milliers de victimes, le maire Maximilien Consolat, décida, en 1834, de construire un canal destiné
à amener l'eau de la Durance jusqu'à Marseille. Une loi autorisant la déviation de la Durance vers
Marseille est votée en 1838. Les travaux vont durer 11 ans et le 29 novembre 1849, l'eau du canal
arrive sur le plateau de Longchamp où un monument sera construit pour commémorer
l'événement.
Dès le début du XXe siècle, le réseau existant s'est avéré largement insuffisant pour faire face au
développement de la ville (la population de Marseille atteint 650 000 habitants en 1936). Il reste
cantonné dans un rôle de distribution d'eau de voirie doublé d'un réseau fournissant
parcimonieusement aux usagers domestiques une eau de piètre qualité. La situation calamiteuse
du service de l'eau a conduit le préfet nommé administrateur extraordinaire de la ville après
l'incendie des Nouvelles Galeries en 1938, à confier l'étude de sa modernisation à la Société
d'Etudes des Eaux de Marseille constituée à parts égales par la Compagnie Générale des Eaux et
la Lyonnaise des Eaux. Un traité conclu en juillet 1941 et approuvé par décret du 29 décembre
1942 confie l'exploitation du service d'adduction et de distribution d'eau dit "Régie du Canal" à une
société dénommée Société des Eaux de Marseille (SEM).
1. PRESENTATION MATERIELLE DU RESEAU
Le patrimoine relatif au service dit du "Canal de Marseille" se décompose en plusieurs entités
selon le fil de l'eau : de la ressource jusqu'au réseau de distribution en passant par les ouvrages
d'adduction et de production d'eau.
1.1. LES RESSOURCES EN EAU : Les ouvrages d'adduction dits du "Canal de Marseille".
Sur les 300 millions de m3 (292 893 804 en 1998) qui sont prélevés dans le milieu naturel pour
alimenter le réseau d'adduction, plus de 90 % viennent de la Durance, le reste provient du Verdon
(9,3 %) et, accessoirement, de 2 forages situés à Aubagne.
1.1.1. La Durance
Le canal de Marseille a une longueur de 94 km (dont 17 en souterrain), auxquels s'ajoutent 115
km de dérivations : soit un total de 209 km. Il dessert aujourd'hui 1,3 millions d'habitants répartis
sur une quarantaine de communes. La prise d'origine est située, depuis 1962, au niveau de la
chute EDF de Saint-Estève-Janson. 3 km plus loin, les eaux de la Durance arrivent dans le bassin
décanteur de Saint-Christophe, près de Rognes. Ce bassin a une superficie de 20 ha et une
capacité de 2 millions de m3, dont 500 000 mobilisables gravitairement.
Le bassin du Réaltor, situé à 60 km en aval du canal entre Aix-en-Provence et Marignane, a lui
une superficie de 70 ha. Etant en grande partie envasé, il n'a qu'une capacité de 1 million de m3.
La branche mère du canal se poursuit par la traversée de l'agglomération marseillaise par le nord,
puis l'est, où il se divise en 3 dérivations : Camoins/Aubagne, St Barnabé, Barasse/Montredon. La
ville de Marseille est autorisée à en rétrocéder une partie aux communes riveraines du canal
(actuellement moins de 2m3/s).
La convention EDF-Ville de Marseille fixe les droits d'eau du canal de Marseille sur la Durance de
15,118 m3/s à 10,118 m3/s selon la saison. Ces droits peuvent être portés à 18,942 m3/s. La
capacité de transit du canal est actuellement de
17 m3/s puis 15 m3/s à son entrée dans Marseille qui est donc en adéquation avec les droits
d'eau ouverts. Cette capacité, nécessaire à la satisfaction des besoins en eau sans cesse
croissants d'une agglomération en pleine expansion économique et démographique jusqu'en
1970, paraît maintenant surdimensionnée. En effet, la courbe de l'évolution des débits prélevés en
Durance montre une baisse constante depuis 1976 : de 14,6 m3/s à 9 m3/s en 1992. Ce chiffre
est relativement stable depuis. La ville de Marseille ne prélève dans la Durance, pour alimenter le
canal, que 60 % de ses droits d'eau et le canal n'est utilisé qu'à 50 % de sa capacité.
1.1.2. Le Verdon
L'eau prélevée dans le Verdon par la Société du Canal de Provence (SCP) est acheminée dans la
réserve de Vallon Dol (2,8 millions de m3) par 2 adductions dites "branche de l'étoile", réalisée en
1975, capable d'acheminer 2 m3/s et "Marseille Est" qui n'a que 15 ans et qui a une capacité de
11 m3/s.
Un contrat triparties conclu le 2 décembre 1971 entre la Ville de Marseille, la SCP et la SEM
définit les conditions de réalisation et d'exploitation de la réserve de Vallon Dol. La ville de
Marseille dispose des 29/31 du volume d'eau de cette réserve appartenant à SCP et alimentée
dans le cadre d'un échange réciproque canal de Provence/canal de Marseille, jusqu'à
concurrence d'un débit de 3,5 m3/s.
Les caractéristiques de cette ressource (capacité des canaux et du réservoir), sont comparables à
l'adduction principale du canal de Marseille, alors qu'elle n'est utilisée que de façon marginale son
objectif principal étant de sécuriser l'alimentation en eau du réseau.
Le 21 décembre 1979 le conseil d'administration de la SCP, malgré les réticences du maire de
Marseille, a décide de mener à bien les travaux de la branche Marseille-Est, en précisant toutefois
que le transfert de dotation en eau se fera dans la limite des demandes exprimées par la ville et
après épuisement des autres dotations de la SCP sur le Verdon réduisant de facto, compte tenu
des capacités actuelles du canal de Marseille, cet équipement important et coûteux à un simple
rôle de secours. Le 16 juin 1988 un protocole d'accord était signé entre les différentes collectivités
partenaires de la SCP décidant le versement d'avances afin de régler les charges intercalaires
nécessaires au financement de l'ouvrage Marseille-Est, la ville de Marseille devait en plus de sa
quote-part verser une somme de 5 MF TTC non indexée et limitée dans le temps. Jusqu'en 1994,
c'est un total de 24,6 MF dont s'acquittera la ville au titre de ce protocole, somme qui devrait
figurer non pas dans les comptes de la ville mais dans ceux de son service d'eau.
1.1.3. Les ressources complémentaires
1.1.3.1. Les forages d'Aubagne
Il s'agit de 2 forages réalisés au nord-est d'Aubagne qui produisent 200 l. Ils constituent un
secours notamment en période de chômage du canal. L'eau prélevée est injectée dans l'usine de
traitement d'Aubagne.
1.1.3.2. Le Puits Saint Joseph
Cette station de pompage a été réalisée par la SEM en 1955 et ne fonctionnait que lors des
périodes de chômage du canal. Cette ressource potentielle (possibilité de prélèvement de 600l/s)
n'est plus utilisée.
1.1.3.3. Les droits d'eau filtrée sur l'usine du SIOM aux Giraudets
Depuis 1989, la ville de Marseille dispose d'une dotation de 20 l/s sur la nouvelle usine de
traitement d'eau potable des Giraudets qui se substitue à celle dont elle disposait depuis 1933 sur
l'ancienne usine. Ce droit d'eau n'est activé que de façon très ponctuelle.
1.2. LES USINES DE TRAITEMENT : La production
Le périmètre de Marseille est alimenté en eau filtrée par 3 usines principalement, plus l'usine de
traitement d'Aubagne et le centre de traitement des Giraudets.
Voir Tableau
1.3. LE RESEAU DE DISTRIBUTION
1.3.1 Généralités
Le service des eaux du périmètre de Marseille couvre environ 20.000 ha, possède un réseau de
canalisations d'eau filtrée en service de plus de 2.200 km. Depuis 1996, seul le canal de Marseille
et ses dérivations fournissent de l'eau brute.
Le réseau primaire (200 km environ), appelés aussi feeders, véhicule l'eau des stations de
traitement vers les 51 réservoirs périphériques qui constituent une réserve supplémentaire de 172
305 m3d'eau filtrée.
Le réseau secondaire est composé principalement de tuyaux en fonte et dessert les 105 246
abonnés du périmètre. Les dénivelés importants (350 m) entre les points à desservir ont conduit à
la réalisation d'un réseau à 5 étages de distribution.
1.3.2 Les caractéristiques du réseau.
La caractéristique principale du service d'adduction et de distribution d'eau dit du Canal de
Marseille est la sûreté. C'est, en effet, la sûreté de l'approvisionnement en eau que la ville de
Marseille a privilégié dans toutes ses démarches : en se ménageant des possibilités de
ressources de secours et en améliorant la qualité du réseau de distribution et en portant ses
efforts sur la sécurité des ouvrages d'adduction, de production et de distribution eux-mêmes.
1.3.2.1. La sécurité de l'alimentation
1.3.2.1.1. En eau brute
La sécurité de l'alimentation est garantie par une ressource d'eau brute abondante et gratuite.
L'eau prélevée dans le milieu naturel est dérivée grâce à des ouvrages d'adduction dont la
capacité n'est utilisée qu'à 50 %.
Les réserves d'eau brute situées sur le parcours du canal et dans les bassins décanteurs des
usines de traitement représentent 6 295 000 m3soit 7,8 jours de couverture des besoins du
réseau de distribution. Cette sécurité est renforcée par l'existence de ressources de secours : la
nappe de la Galerie de la Mer, et les forages d'Aubagne sans compter celles pouvant provenir des
canaux dit de la "branche-Est" et de "Marseille-Etoile" de la SCP
1.3.2.1.2. En eau filtrée
Les stations de traitement sont capables d'assurer la potabilisation de 724.600 m3/j soit près de
200 millions de m3dans l'année. La charge des stations de potabilisation est actuellement de 360
000 m3/j soit seulement 50 % de leur capacité.
Les usines possèdent des réserves de 46 200 m3 d'eau filtrée qui, ajoutés à la capacité des
réservoirs d'extrémité réparties sur le réseau de distribution, constituent une réserve en eau filtrée
de 218 505 m3, de quoi pourvoir à 20 heures de distribution.
L'interconnexion des usines de traitement entre elles et des réserves d'extrémités, surveillées en
permanence, permet de pallier les manques d'eau éventuels par un système de compensation
automatique et de déceler les anomalies avant qu'elles n'affectent la distribution aux abonnés. Le
maillage des réseaux réalisé à ce jour assure une alimentation constante du réseau en réduisant
le risque de manque d'eau au compteur.
Les deux services de la SEM qui l'un exploite le réseau de distribution du périmètre de Marseille
et l'autre gère le Canal de Marseille ont reçu une certification ISO 9002 délivrée les 09/01/97 et
19/02/97.
1.3.2.2. La protection des ouvrages
Le système de contrôle centralisé de la SEM permet une surveillance en continu des sites et des
processus d'adduction, de production et de distribution. Il assure une réactivité et un temps
d'intervention optimal en cas de dysfonctionnement constaté.
La protection physique des ouvrages du canal contre les pollutions accidentelles, les risques
géophysiques et géotechniques ou contre l'imprudence des riverains sont de la compétence de la
collectivité publique.
Il apparaît, au vu des constations faites par la Chambre, que le programme de travaux
nécessaires à la sécurité des biens (ressource et ouvrages) et des personnes sur le canal connaît
des retards importants. A ce titre, il convient ici de signaler que l'obligation de mettre en place des
périmètres de protection des points de prélèvement, des ouvrages ou des réservoirs ne
bénéficiant pas d'une protection naturelle permettant efficacement d'assurer la qualité des eaux
mises à la charge des collectivités par divers textes législatifs et réglementaires n'est pas
respectée.
Si les procédures en cours aboutissent dans les délais prévus par la direction de l'eau et de
l'assainissement de la ville de Marseille, et sans compter les délais nécessaires à la réalisation
des travaux de mise en place des périmètres, la ville de Marseille, bien qu'alertée à de
nombreuses reprises par la SEM, aura dépassé de 3 ans le délai de 5 ans autorisé pour se mettre
en conformité avec les dispositions de la loi de 1992.
L'absence de périmètre de protection après le délai fixé par la loi engage la responsabilité de la
ville de Marseille en cas de pollution accidentelle pour ce qui concerne les ouvrages qui sont de
sa responsabilité ou de celle de la ville d'Aubagne pour les forages qui sont sur son territoire.
Dans leur réponse les maires concernés font remarquer d'une part qu'un plan d'alerte a été mis en
place qui permet d'isoler le canal avant que la pollution n'atteigne les prises placées sur la
Durance et d'autre part que cette pollution pourrait être arrêtée au niveau de l'usine de traitement.
2. PRESENTATION JURIDIQUE DU SERVICE
2.1 LE CONTRAT VILLE DE MARSEILLE-SEM, L'AVENANT N° 9
2.1.1 Le contexte
La ville de Marseille a confié, par une convention de délégation de service public en date du 29
juin 1960, à la SEM la gestion du service d'adduction et de distribution publique d'eau dit du
"Canal de Marseille". Ce contrat initial a été modifié par 8 avenants dont le dernier du 18
décembre 1987, en prolonge la durée jusqu'en 2013.
En 1990 la ville s'est trouvée dans une situation financière tendue qui ne lui permettait plus de
trouver des financements pour alimenter le compte RCI (Ressources et Charges
d'Investissements) qui conditionne la réalisation des travaux d'extension et de gros entretien, voire
de renouvellement des équipements à travers le compte Fonds de Travaux. En effet les crédits au
titre de ce compte sont à la baisse dans des proportions importantes passant de 114 MF en 1989
à
50 MF en 1990 entraînant par contrecoup des difficultés pour certaines entreprises. D'autre part,
la ville souhaitait voir baisser son taux d'endettement en faisant reprendre par la SEM la totalité
des emprunts (500 MF) concernant le service des eaux. Enfin la lisibilité tant juridique (remise en
cause par la préfecture du mécanisme des comptes RCI et Fonds de Travaux qui permettaient
d'échapper aux règles de la concurrence pour réaliser les travaux), que budgétaire (du fait de
l'absence de compte annexe pour le service de l'eau) devenait incertaine et conduisait
inéluctablement à une remise en cause du contrat en vigueur à l'époque.
Conscient de cet état de fait, le maire de Marseille, dès mars 1990, a désiré revoir les dispositions
du contrat sur les bases suivantes :
* pas de remise en cause de la durée et de l'économie générale du contrat ;
* reprise par la SEM de la dette du "service de l'eau" ;
* disparition du mécanisme "fond de travaux" ;
* clarification des relations entre la ville et la SEM sur le partage de responsabilité en matière de
travaux : renouvellement des canalisations, des branchements et des matériels électro-
mécaniques à la charge de la SEM ; entretien des installations et travaux neufs à la charge de la
ville ;
* financement par une augmentation minimale du prix de l'eau et par abandon du prélèvement sur
les bénéfices ;
* problématique des communes du périmètre ;
* délais : avenant à signer en juin/juillet 1991.
2.1.2 La préparation de l'avenant N° 9
Du 23 janvier 1991 au 4 octobre 1991 se sont tenues 14 réunions impliquant les services de la
SEM et ceux de la DSC pour préparer l'avenant n° 9. Les hypothèses de base à la négociation
sont les suivantes :
* Le volume global des travaux à prévoir est de 115 MF par an à compter de 1996, passant
progressivement de 87,5 MF en 1991 au montant définitif en cinq ans ;
* Les taches d'assistance au maître d'ouvrage seront incluses dans la part fermier à l'exception
des missions relatives aux travaux financés par la ville ;
* La dette du service de l'eau ferra l'objet de discussions in fine selon des instructions à recevoir
ultérieurement.
Dés la 3ème réunion est actée la prise en compte de la décroissance des volumes vendus dans la
formule d'actualisation des prix.
2.1.3 Les arbitrages finaux
Le 21 octobre 1991 la ville de Marseille adopte l'avenant n° 9, entérinant ainsi la nouvelle
répartition des compétences entre la SEM et la ville, la nouvelle structure des prix de l'eau,
l'augmentation de tous les tarifs, sauf celui des industriels, de 12,7 % HT et la prise en charge par
la SEM d'une partie de la dette du service de l'eau.
Il est à noter qu'à cette date ni les communes du périmètre ni celles ayant un droit de débit sur le
canal n'ont été associées aux discussions ou même averties. Dans un courrier du 18 juillet la SEM
alertait les services de la ville sur cette anomalie.
L'avenant a été signé le 21 octobre 1991 par le président de la SEM et le 30 octobre par le maire
de Marseille, soit après la transmission au contrôle de légalité de la délibération habilitant le maire
à le faire. Le préfet, après avoir consulté la DDCCRF, émet, le 23 décembre 1991, un certain
nombre de réserves et souligne le fait que cet avenant est en réalité un nouveau contrat, qu'en
l'état ce document n'est pas opposable aux autres communes du périmètre qui ne l'ont pas
approuvé, que les communes ayant des dotations sur le canal n'ont pas été informées de
l'augmentation des tarifs et enfin qu'il n'est pas précisé que le code des marchés publics doit
s'appliquer aux frais d'étude et de surveillance.
Le 26 mai 1992, le maire de Marseille adresse au contrôle de légalité, le protocole d'assistance
entre la ville et la SEM ainsi que les modifications du cahier des charges de l'avenant n° 9 tenant
compte, entre autres, des observations du préfet et de divers autres ajustements, ainsi que du
règlement des abonnements, mettant un terme aux discussions entamées depuis plus de deux
ans. Mais le 25 juin 1992 la DDCCRF émettait un nouvel avis portant sur ces modifications en
préconisant la nécessité de prendre une nouvelle délibération car il y avait de nouvelles clauses et
faisant des réserves sur le protocole d'accord signé entre la ville de Marseille et les autres
communes du périmètre (rétroactivité du document, nature de la part de la surtaxe reversée à la
ville de Marseille et délégation permanente de maîtrise d'ouvrage pour la réalisation
d'équipements d'intérêt général qui seraient à effectuer sur le territoire d'une autre commune). Cet
avis restera sans suite.
2.1.4 Analyse de l'avenant N° 9
2.1.4.1 Le partage des responsabilités en matière d'investissements.
L'analyse qui sera faite ici ne portera que sur des points qui ne seront pas évoqués de façon plus
détaillée plus avant, comme la tarification ou les abonnements.
En dehors du fait que cet avenant apporte une bouffée d'oxygène aux finances de la ville de
Marseille par la prise en compte de 230 MF d'emprunts, ce qui était encore possible à l'époque, il
a permis de clarifier les relations entre le délégant et le délégataire en précisant les domaines
d'intervention de chacun et en fixant les objectifs à atteindre.
Ainsi, en matière d'entretien, le délégataire à l'obligation de réaliser 22 MF de travaux par an
(valeur 1991) En ce qui concerne le renouvellement des objectifs quantitatifs sont retenus : 17 km
de feeders sur la durée du contrat, 2 050 branchements vétustes par an en moyenne à l'occasion
d'opérations de renouvellement, 900 branchements vétustes par an sans jumelage avec une
opération de renouvellement et 900 branchements par an à l'occasion de réparations de fuite.
Pour ce qui concerne le réseau secondaire il est indiqué que l'objectif est de transférer le réseau
d'eau brute sur le réseau d'eau filtrée et de renouveler ce dernier de façon à ce qu'en fin de
contrat l'âge statistique moyen du réseau soit inférieur ou égal à 100 ans. Pour les autres
équipements (robinets-vannes, matériels tournants, équipements électromécaniques, pompes,
accessoires hydrauliques, appareils de stérilisation et de filtration, équipements électroniques et
logiciels) les dispositions sont plus générales. Il est à noter toutefois que, contrairement aux
canalisations, le renforcement des moyens de pompage ainsi que l'amélioration des systèmes
d'automatisme et de télégestion sont à la charge du délégataire en cas de renouvellement.
Pour ce qui concerne le renouvellement des bâtiments, réservoirs, stations de traitement, canaux
(branche-mère et ses dérivations), il est à la charge de la ville mais aucun chiffrage n'a été fait. Il
est seulement prévu, dans les travaux préparatoires à la conclusion de l'avenant n° 9, un total de
33 MF/an pour 1992 et 50 MF/an (valeur 1991) à partir de 1996, sans prise en compte des frais
relatifs à la maîtrise d'oeuvre.
2.1.4.2. Des clauses singulières.
L'avenant comprend un certain nombre de clauses qui ne sont pas en faveur de l'usager, voire
introduisent des dispositions qui font apparaître un mélange des pratiques du privé et du public.
Ainsi, si la commune de Marseille a, à bon droit, abandonné la clause qui voulait qu'elle perçoive
une partie des bénéfices de la SEM, toutes activités confondues, elle a maintenu l'article 7 de la
convention initiale qui prévoit que la nomination du Président Directeur Général sera soumise à
l'agrément du Maire de la ville de Marseille qui pourra le refuser.....
Cette disposition, certes inspirée par une vision régalienne de l'autorité municipale, permet une
incursion publique dans une société de droit entièrement privé. La société a certes comme
principal contrat celui de la gestion du service de l'eau du "périmètre de Marseille" qui regroupe
d'autres villes que Marseille, mais il ne représente que 60 % de son activité. En outre cette société
à de nombreuses filiales dont les contrats ne concernent pas de façon prépondérante la ville de
Marseille. Aussi les dispositions de cet article donnent d'une part au Maire de Marseille un pouvoir
d'intervention, par personne interposée, sur un ensemble qui, selon les critères du chiffre d'affaire,
n'a pas la commune de Marseille comme client exclusif et sont d'autre part de nature à ne pas
permettre le libre jeu de la concurrence de s'exercer quand un contrat doit être passé entre la ville
et une entité du groupe SEM.
Une autre disposition exorbitante du droit commun est celle qui impose au délégataire de faire
bénéficier son personnel de conditions de rémunération et d'avancement équivalentes à celles du
personnel municipal. Les employés de la SEM bénéficient ainsi des avantages du secteur privé,
comme par exemple l'intéressement aux bénéfices et du secteur public, comme les conditions
d'avancement, ce qui renchérit d'autant les charges de personnel du délégataire, donc ses coûts
qui se répercutent directement sur le prix de l'eau entre autre par son indexation. En outre elle
rend la société moins compétitive pour remporter d'autres contrats dans un contexte qui lui
impose de se diversifier.
2.1.4.3. Le patrimoine, sa connaissance, son suivi.
Le contrat comporte une annexe qui retrace la valeur du patrimoine du périmètre du canal de
Marseille et, très schématiquement, sa description quantitative. La valeur de ce patrimoine était
estimée à 8 617 MF (valeur 1991). Ce chiffre montre l'importance de ces équipements et la
Chambre ne peut que prendre acte de la volonté des deux parties d'indiquer dans un document
officiel le poids financier des équipements de ce service.
Toutefois, et bien que l'article 4 du cahier des charges de la convention précise que le délégataire
établira dans les deux ans qui suivent la prise d'effet du contrat un état des lieux contradictoire,
force est de constater qu'en 1999 il n'a été fourni aux services de la ville qu'une série de
documents correspondant aux exigences techniques requises pour les réservoirs et, en partie,
pour les stations de pompage. Le document relatif au canal de Marseille n'est pas suffisamment
complet pour lui permettre de l'utiliser de façon efficace. Quant aux plans concernant les réseaux,
ils permettent au mieux de les localiser et de connaître de façon très approximative la période de
leur mise en service.
Pour les autres équipements, comme les usines de potabilisation, près de huit ans après la
signature du contrat, aucun fait nouveau permet de penser que les clauses contractuelles seront
respectées. En effet aucune sanction pécuniaire n'est prévue en cas de non respect du contrat.
Dans sa réponse la ville indique que des progrès dans ce domaine ont été fait depuis 1992 mais
qu'une liaison informatique entre les services concernés de la ville et de la SEM serait nécessaire
car elle permettrait une utilisation en directe des données gérées par le délégataire.
Le contrôle effectué par la ville de Marseille est réalisé conformément aux dispositions de l'article
53 du cahier des charges. Il est effectif en ce qui concerne les comptes rendus annuels et le
compte d'exploitation. Cependant sur le plan technique la commune de Marseille ne s'est pas
donnée les moyens de vérifier que les services rendus par la SEM sont conformes à ses
engagements. En effet les services de la ville, jusqu'à une époque récente, n'ont fait que constater
que les opérations ont été réalisées sur le plan comptable par la SEM sans s'assurer sur le terrain
de la réalité des opérations. La ville précise dans sa réponse qu'elle met en place actuellement un
véritable contrôle technique qui agira de façon pragmatique alliant la nécessaire indépendance du
délégataire à ses obligations de surveillance.
2.1.4.4. La maîtrise d'oeuvre
En application des dispositions de l'article 6 du cahier des charges de l'avenant 9 "le
concessionnaire sera tenu d'apporter, sans rémunération particulière, et s'il est sollicité par la ville,
une assistance pour la maîtrise d'ouvrage des travaux définis à l'article 5", il a été passé un
"protocole d'assistance au maître d'ouvrage" le 26 mai 1992 qui lie les parties, en réalité non pas
pour la maîtrise d'ouvrage mais pour la quasi-totalité des prestations de maîtrise d'oeuvre, que ce
soit pour les études générales du service ou la réalisation d'équipements. L'importance du service
mis en place par la SEM (environ 65 personnes travaillant au moins à 60 % pour le contrat ville de
Marseille), sa connaissance de la quasi-totalité des dossiers concernant le domaine délégué, son
antériorité lui permettant de connaître la genèse de tous les équipements et l'absence de structure
et des moyens suffisants à la ville ont abouti à ce que le délégataire se trouve, pour ce qui
concerne la maîtrise d'oeuvre dans une situation privilégiée qui lui procurait en fait l'exclusivité des
travaux dans ce domaine.
Le caractère apparemment "gratuit" des travaux effectués par ce service de la SEM a encore
accentué l'impression de son omniprésence dans ce domaine. Dans les comptes de la ville
n'apparaît aucune facture à ce titre. Mais la SEM ne pouvant pas se permettre une prise en
charge de ces prestations sans contrepartie, elles sont répercutées sur la redevance demandée
aux usagers (dans la simulation financière effectuée par la ville au moment de la négociation de
l'avenant n° 9 figure un total de 10,9 MF). La SEM dans son compte rendu annuel chiffre, depuis
1996 le montant des travaux effectués sous l'emprise de ce protocole, à 10,7 MF (valeur 1991) en
1996, 16,8 MF en 1997 et 11,4 MF en 1998 ce qui aurait dû, normalement, donné lieu a appel à
concurrence et a marché. En outre, il résulte de la lettre du 22 mai 1991 adressée par le maire de
Marseille au PDG de la SEM, que pour les travaux refacturables ils seront chiffrés conformément
au "bordereau de prix", c'est à dire, pour ce qui concerne la ville, sans prise en compte des frais
de maîtrise d'oeuvre. Cette manière ambiguë de présenter les affaires, au moins pour la
prestation "assistance à maître d'ouvrage" permet à la SEM de conforter sa présence, d'être la
seule à avoir la connaissance des équipements du service des eaux de Marseille et d'être le point
de passage obligé non seulement quand il s'agit de faire une intervention sur un équipement du
service mais surtout pour programmer les projets a court, moyen et long terme.
Dans sa réponse la ville précise que la solution retenue à l'époque (négociation sur l'avenant n° 9)
était incontournable car elle n'avait aucun service spécialisé dans ce domaine et que la SEM avait
structuré ses services en conséquence. Cependant, en vue de préparer les prochaines
échéances, les compétences ont été constituées au sein de la ville et que dès maintenant elle
assure elle-même la maîtrise d'oeuvre de certains travaux et veille à diversifier ses interlocuteurs
dans ce domaine.
2.1.4.5. Les travaux confiés à la SEM à titre "exclusif"
La SEM effectue des travaux qui lui sont confiés à titre "exclusif". Profitant ainsi de sa situation,
elle devient le partenaire obligé de tous les acteurs locaux du périmètre de la délégation qui ont
besoin de ses services, soit comme demandeurs : les aménageurs, les administrations, les
entreprises de travaux publics, soit comme clients : les usagers quels qu'ils soient.
Les branchements sont établis ou modifiés et facturés aux particuliers par le délégataire, qui en a
l'exclusivité, en application des articles 16, 33 et 34 A du contrat. En outre, en cas d'extension du
réseau faite à la demande de riverains de voies publiques non encore desservies, les travaux
seront réalisés par le concessionnaire de façon exclusive si ces travaux sont à la charge des
demandeurs (articles 13 et 32 du contrat). Le total de ces prestations est chiffré à 24,45 MF en
1997 dans le compte de la délégation. Cette disposition ne permet pas aux demandeurs de
pouvoir faire appel à d'autres entreprises ce qui, compte tenu des tarifs figurant au bordereau de
prix, ne leur permet pas d'avoir une prestation au meilleur coût.
Il convient de noter également que les travaux d'installation, d'entretien -pour les installations
postérieures au 1er janvier 1992-, de déplacement ou de suppression des branchements et des
appareils de fontainerie seront effectués par le délégataire aux frais de la ville. Il en est de même
pour les réservoirs de chasse d'égouts, les bornes fontaines, les bouches de lavage et bouches
d'arrosage et les prises d'incendie (articles 20 à 23 du contrat). Par cette disposition le délégataire
échappe aux règles de la commande publique. En 1998 le montant total des poses de
branchements et appareils pour la ville de Marseille a été de 1,5 MF soit largement au-dessus du
seuil à partir duquel un marché est obligatoire. En outre tous les travaux concernant un
déplacement de canalisations placées sous la voie publique seront réalisés par le délégataire, le
plus souvent aux frais de la collectivité ou du demandeur. Pour les collectivités du périmètre, les
travaux ne sont refacturés que dans la limite de 900 000 F par opération ce qui permet d'échapper
aux règles de la commande publique.
Enfin, en application de l'article 27 du contrat, le délégataire percevra pour le compte des
communes, auprès des constructeurs, au titre de la participation aux équipements des services
publics, une participation dite de "contribution aux dépenses d'équipements publics" dont le
montant est fixé par une délibération du conseil municipal. La ville de Marseille a perçu à ce titre
17,3 MF en 1998. Cette clause, qui permet à la SEM de bénéficier d'une trésorerie
supplémentaire non négligeable, va donner au délégataire des informations sur les réalisations en
cours des constructeurs donc bien avant qu'ils ne demandent les raccordements au réseau.
Le bordereau de prix est une pièce annexée au contrat et engage les parties quant à son respect.
Il s'impose pour les particuliers qui doivent passer par la SEM pour réaliser des raccordements ou
pour toute autre intervention de la SEM à leur profit prévue par le contrat
Il ne permet une adaptation des variations de prix que par des coefficients d'actualisation, et a
donc un caractère par nature inflationniste car les baisses de prix des fournitures ou les gains de
productivité ne peuvent être répercutés dans les prix du bordereau.
La Chambre a constaté que, pour les prestations les plus courantes (pose et fourniture de tuyaux
de fonte de 100 mm qui représentent plus de 33 % du parc) des écarts significatifs (plus de 50 %)
pouvaient être constatés, avec les prix pratiqués dans d'autres structures, même en y intégrant les
frais d'études.
Le bordereau devait être revu après 5 ans d'application ce qui permettait à la ville, en cas de
désaccord, de réaliser elle-même certains travaux initialement prévus comme refacturables.
Cependant le 15 avril 1997 un protocole d'accord permettant la prolongation de ce document a été
ratifié par le maire. Le 8 janvier 1998 sa validité a été prorogée d'un an. Le 4 octobre 1999 un
nouveau bordereau de prix a été adopté par la ville de Marseille qui intègre les travaux à exécuter
en urgence sur le canal de Marseille et supprime le bordereau par coût complet. La formule
d'actualisation est identique et ne prend en compte que l'évolution du prix du tuyau de fonte qui
est parmi ceux qui évoluent le plus vite et non pas un panel d'indices plus représentatif de la
réalité des travaux effectués. Enfin ce bordereau très détaillé sera d'une mise en oeuvre difficile.
2.1.4.6 La nouvelle tarification.
L'augmentation du prix de l'eau de 12,6 % résultant de l'avenant n° 9 a été faite au vu d'un compte
prévisionnel qui ne prenait en compte qu'une simple variation des flux financiers supposés, sans
remettre en cause le prix antérieur et en minimisant pour la ville les coûts qu'elle aurait à
supporter.
Comme il sera vu plus loin, les différents types de tarifs n'ont pas été modifiés et leur lien avec le
coût de la prestation rendue n'est pas prouvé, par exemple pour la fourniture d'eau brute aux
communes qui ont un droit d'eau sur le canal ou pour le prix demandé aux municipalités du
périmètre pour leur propre consommation. Il est impossible de s'assurer que le prix demandé aux
usagers corresponde au juste prix, aucun compte prévisionnel ne figurant au contrat au moins
pour la redevance demandée par le délégataire.
Cette situation a trois conséquences :
* le contrôle de légalité ne pouvait se prononcer sur le prix demandé, ne connaissant pas les
charges que l'usager doit supporter en contrepartie du service rendu, ainsi qu'il peut le faire quand
l'assemblée délibérante arrête le montant de la surtaxe au vu du budget primitif du service de
l'eau. Certes dans ce cas, il y a vote chaque année, alors que la redevance perçue par le
délégataire a été fixée pour une période plus importante, ne recouvrant pas obligatoirement la
totalité de la durée du contrat, mais le principe est similaire ;
* la collectivité doit pouvoir suivre l'évolution financière du contrat et ne peut se prononcer en toute
connaissance de cause que par comparaison avec ce qui a été convenu entre les parties (le prix
qui résulte d'une prévision des ressources et des charges attendues traduites dans un compte
après qu'ait eu lieu la négociation) ce qui impose la permanence des méthodes permettant de
retracer, les produits et les dépenses. Cette "reddition de comptes" étant comparable à ce qui se
pratique concernant les comptes administratifs, à la différence qu'il n'y a pas affectation du résultat
qui revient de plein droit au délégataire ;
* enfin, pour pouvoir réviser les tarifs de base selon les dispositions de l'article 30 (en particulier
après cinq ans ou si le prix a varié de plus de 50 % ou encore dans un des sept autres cas prévus
au B de cet article) il est nécessaire d'avoir une bonne connaissance de la composition du prix de
l'eau et de son évolution dans les exercices précédents.
L'augmentation du prix de l'eau décidée lors de la signature de l'avenant n° 9, est de 12,7 % pour
tous les tarifs, à l'exception, dans un premier temps, de ceux appliqués aux industriels, ce qui
représente une forme d'aide économique déguisée d'environ 2,8 MF par an au bénéfice des
industriels du périmètre de la délégation qui ont souscrit des abonnements "compteurs
industriels".
Pour compenser les effets de la baisse régulière de la consommation constatée sur la zone du
canal de Marseille (-10 millions de m3 de 1989 à 1988, soit 7 %) et l'augmentation des
abonnements, le contrat prévoit une indexation tenant compte de cet état de fait qui sera
examinée dans un autre chapitre.
2.1.4.7. La redevance pour occupation du domaine public.
Selon les dispositions prévues au contrat, la SEM doit verser à la ville une redevance pour mise à
disposition des biens d'équipements appartenant à la ville de 25 MF. Cette somme est révisée
chaque année par un coefficient m2 qui tient compte d'une part de l'évolution du prix de l'eau et de
l'évolution de la consommation par abonné "tous usagers" du périmètre ramené au kilomètre de
réseau. La consommation servant de référence est celle de 1986. Il s'agit ici de minimiser ce
coefficient m2 et ce fut fait avec succès. En effet de janvier 1992 à janvier 1998 le tarif du
délégataire pour les abonnés "tous usages" a augmenté de 24,6 %, le m3passant de 7,0735 F à
8,8107 F alors que la redevance perçue par la ville rentrant dans le cadre de ce chapitre n'est
passé que de 25,7 MF en 1992 à 26,1 en 1998 soit une augmentation de 2,4 %. Si la formule
d'indexation de cette redevance avait été identique à celle du tarif des abonnés "tous usages", la
ville aurait perçu une somme supérieure de 5,7 MF environ pour le seul exercice 1998.
La SEM fait remarquer que cette redevance est en fait une surtaxe déguisée et qu'il convient donc
d'en tirer les conséquences. En fait la dénomination retenue est inexacte ; il s'agit d'une
redevance pour occupation du domaine public de la ville et de ce fait elle ne doit pas figurer au
budget annexe du service de l'eau mais être versée dans les budgets principaux des villes du
périmètre selon la tarification retenue par chacune de ces communes.
2.1.4.9. La perception de la surtaxe.
L'article 26-A-3 précise que le délégataire est tenu de percevoir gratuitement pour le compte du
délégant une surtaxe s'ajoutant au prix de l'eau. Ces sommes, déduction faite des non-valeurs,
seront versées par le délégataire au délégant dans les quatre mois suivant l'émission des
facturations.
Si le montant des non-valeurs est faible (0,8 MF pour 70,1 MF de surtaxe facturée soit 1,14 %) il
n'en demeure pas moins que c'est au seul conseil municipal de statuer sur les titres qui ont fait
l'objet de la part du comptable public d'une demande préalable d'admission en non-valeur. Le
délégataire dans le recouvrement de la "surtaxe" agit comme mandataire de la collectivité et de ce
fait les règles du mandant s'appliquent au mandataire.
La Chambre prend acte des engagements de la SEM de communiquer désormais à la ville des
comptes détaillés avec la liste nominative des non-valeurs et de ce que la ville (ce devrait être les
villes du périmètre) envisage de faire délibérer le conseil municipal sur les non-valeurs relatives à
la surtaxe.
2.2 LES AUTRES CONTRATS
2.2.1 Le contrat avec EDF
Les conditions d'alimentation en eau du Canal de Marseille à partir du Canal EDF à Saint-Estève-
Janson sont définies par la convention EDF-Ville de Marseille approuvée le 2 juillet 1962 et son
avenant n° 1 en date du 3 juillet 1964.
Les droits d'eau attribués à la ville sont fixés à cette occasion et il n'est indiqué aucune
contrepartie financière. Après abandon de la branche morte du canal entre la prise du pont de
Pertuis et la chute de Saint-Estève-Janson, un avenant n° 2 daté du 17 juin 1997, à la convention
initiale définit les dispositions pour l'alimentation du Canal de Marseille par la Durance en aval de
Saint-Estève durant les périodes d'interruption de fonctionnement normal ou accidentel des
installations industrielles d'EDF.
Un protocole a été signé le 19 mars 1998 pour définir les conditions techniques et financières de
l'essai de délimonage du bassin de Cadarache par EDF. En effet les limons sont rejetés dans la
Durance après transit par le canal usinier EDF, la prise du canal de Marseille est concernée car il
y a augmentation sensible des matières en suspension dans l'eau prélevée ce qui peut conduire à
une altération sensible de sa qualité.
2.2.2 La Galerie de la mer
La convention du 20 mai 1953 entre la SEM et les Houillières de Provence et ses avenants
successifs fixent les conditions de fourniture d'eau, d'utilisation de la Galerie de la mer et
d'exploitation de l'ensemble de captage et de pompage. Il est anormal que la ville n'ait pas été
associée à ce contrat.
2.2.3 L'usine du SIOM aux Giraudets
Depuis 1989, la ville de Marseille dispose d'une dotation de 20 l/s sur la nouvelle usine de
traitement d'eau potable du SIOM aux Giraudets, qui se substitue à celle dont elle disposait au
même endroit depuis 1933, sur l'usine Chabal techniquement dépassée.
2.2.4 Les contrats SCP
Le contrat de fourniture d'eau réciproque Canal de Provence/Canal de Marseille, de réalisation et
d'exploitation de la réserve de Vallon Dol, en date du 3 décembre 1971, avec ses avenants, régit
la mise à disposition réciproque et gratuite des ouvrages de chaque partie, jusqu'à concurrence
d'un débit instantané maximum de 3,5 m3/s prélevé en fonction des besoins de chacune sur les
ouvrages de l'autre. Ce contrat et complété par les documents suivants :
* convention de mise à disposition de la réserve de Vallon Dol conclue entre SCP et SEM le 27
juin 1974 et son avenant du 24 mai 1991 ;
* convention relative au transit par les ouvrages de SCP des eaux du Canal de Marseille jusqu'à
concurrence de 250 l/s.
Selon la SEM, qui a alerté la ville à plusieurs reprises sur ce point, le contrat est déséquilibré la
SCP pouvant s'alimenter en totalité par le canal EDF grâce à son bouclage de l'étang de Berre et
donc faire jouer la clause lui permettant de renégocier le contrat. Les échanges entre la ville et la
SCP n'ont jamais été équilibrés et depuis 1992 c'est la SCP qui livre moins d'eau à la ville de
Marseille qu'elle n'en reçoit (la différence varie entre 1,4 millions de m3 en 1995 et 8,2 millions de
m3 en 1997) ce qui infirme les propos de la SEM.
2.2.5 Les autres contrats d'alimentation
En accord avec l'administration, la ville de Marseille avait consenti aux communes situées le long
du Canal et qui en faisaient la demande, des fournitures d'eau prélevées sur sa dotation, dans la
limite des capacités disponibles de ses ouvrages mais sans garantie, se réservant toujours la
possibilité de satisfaire prioritairement ses propres besoins. De ce fait, aucun document
contractuel entre la ville de Marseille et les communes utilisatrices, autre qu'un échange de
correspondance et la facturation, n'a entériné ces livraisons.
La probabilité d'une pénurie est désormais faible compte tenu de la stagnation des besoins et
surtout des possibilités de secours dont s'est dotée la ville de Marseille. C'est pourquoi les
fournitures en l/s d'eau brute ou d'eau filtrée que la ville concède, en particulier aux collectivités,
font l'objet, à partir de 1993, de contrats triparties, conclus avec chacune d'elles, sur la base des
tarifs fixés dans le contrat de délégation du périmètre de Marseille. Il est prévu que toute
modification de la tarification qui s'imposerait à l'avenir fera l'objet d'une consultation préalable des
communes signataires, dans le cadre d'une commission technique consultative dont 9 membres
seront désignés et accrédités par les communes clientes et 9 membres par la ville de Marseille. Il
est à noter que la facturation se fait en fonction des dotations souscrites qui sont des débits
minimums. Si le débit prélevé pendant la semaine la plus chargée est supérieur au débit souscrit,
c'est ce débit prélevé qui est facturé et qui devient le débit garanti pour l'exercice suivant. Si les
modifications à la hausse sont automatiques, il n'en est pas de même pour les révisions à la
baisse.
Il est accordé des débits gratuits à la commune de la Roque d'Anthéron (2 l/s) en application d'une
délibération du conseil municipal de Marseille du 31 juillet 1896 concernant certaines communes
abonnées au canal, confirmée pour elle, par une délibération du 23 décembre 1930. Cet état de
fait étant considéré comme un droit acquis a été maintenu. La Chambre prend acte de la volonté
de la ville de Marseille de supprimer cette situation dérogatoire.
La commune de Plan de Cuques bénéficie d'un contrat spécifique lui permettant de ne pas se voir
appliquer le droit commun mais d'avoir une diminution des dotations par tranche de 3 l/s en cas de
baisse équivalente des prélèvements effectivement constatés, due à un effort de productivité
(modernisation du réseau de distribution ou réparation des fuites.) Toutefois cet engagement
n'étant pas respecté (la baisse des prélèvements est due à un apport extérieur d'eau brute-
forages) la SEM conteste l'application de cette clause. La ville de Marseille dans sa réponse s'est
engagée à supprimer cette situation dérogatoire.
La commune d'Allauch reçoit à la fois de l'eau brute, comme toute collectivité située sur le
passage du canal de Marseille, et de l'eau filtrée à un tarif fixé au l/s. Cette mesure vient d'une
autorisation du 10 juillet 1980 de la ville de Marseille qui a accepté de livrer de l'eau filtrée à cette
collectivité pendant la période estivale, ce qui lui permettait de répondre à la demande sans avoir
besoin de construire une nouvelle usine de potabilisation, ce qui est de saine gestion pour cette
commune. En 1989, la ville de Marseille acceptait la tarification au débit et la possibilité pour la
commune d'Allauch de s'alimenter, soit en eau brute soit en eau filtrée, dans la limite des débits
globaux souscrits, et sans pénalité si le débit total ne dépassait pas la somme des deux débits.
Deux conventions ont été signées dans ce sens, l'une en 1993 pour l'eau brute, l'autre en 1995
pour l'eau filtrée.
Dans le cas particulier du SIOM (Syndicat Intercommunal des Eaux de l'Ouest de Marseille) la
ville a accepté la coexistence d'un contrat avec le Syndicat, abonné unique pour la globalité des
dotations qu'il prélève sur le canal et de contrats avec chaque commune membre, garantissant les
dotations et les tarifs appliqués par le Syndicat aux fournitures d'eau brute. Le syndicat a entériné
le 20 juin 1997 le contrat de fourniture d'eau brute pour la globalité des dotations qu'il prélève.
Depuis 1964 les usines SCHELL et CABOT, bien qu'implantées à Berre, sont des abonnés
industriels de la ville de Marseille avec l'accord de la ville de Berre. Ils ont conclu pour ce faire une
convention puis un contrat d'abonnement.
L'approvisionnement en eau filtrée du Port Autonome de Marseille (PAM) est régi par une
convention du 24 septembre 1951 modifiée par 3 avenants passée entre la ville et la Chambre de
Commerce. La ville de Marseille, sans avertir son délégataire, a accordé la possibilité de facturer
au tarif ville la consommation d'eau du PAM destinée au centre d'entraînement des marins-
pompiers installé dans l'enceinte portuaire, par convention du 16 juin 1995 pour une période de
cinq ans. C'est à juste titre que la SEM demande une régularisation contractuelle. Le PAM
bénéficie en outre d'un abattement, prévu par la convention de 1951 actualisée, de 100 000 m3.
Cet avantage, dont la régularité est contestable en application de la règle de l'égalité devant le
service public, est très important compte tenu de la consommation constatée en 1998 (544.025
m3) ce qui fait un taux de remise de prés de 20 %. Le contrat venant à échéance bientôt il sera
réexaminé comme l'indique la ville dans sa réponse.
3. PRESENTATION ORGANISATIONNELLE DU SERVICE
Le service de l'eau du canal de Marseille est complexe et sans doute l'un des plus importants de
France tant par les volumes en jeu que par l'étendue de son périmètre. Après avoir décrit les
activités de ce service on examinera l'organisation du service mis en place respectivement par la
ville et par le délégataire.
3.1 LES ACTIVITES DU SERVICE
Le service assure les trois fonctions traditionnelles : la production, la potabilisation et la
distribution. A ces trois fonctions correspondent en fait deux périmètres différents le premier
incluant le second.
3.1.1 L'adduction
De la lecture des différents documents qui se rattachent à la convention de délégation, il ressort
que la ville de Marseille a obtenu la possibilité de prélever dans la Durance des débits qui pourront
servir par la suite à fournir en eau brute le "périmètre de Marseille" mais aussi d'autres communes
hors de "ce périmètre" à partir des installations du canal de Marseille.
Le contrat prévoit dans son annexe III les dotations sur le canal pour les collectivités et certains
particuliers comme le golf de Vernègues et le golf de Vaudrans. Le total des dotations se monte à
1 851,26 l/s d'eau brute. Il est également prévu une dotation en eau filtrée de 25 l/s au profit de la
commune d'Allauch. Le total des volumes facturés est de 56,9 millions de m3, en 1998, soit 43,5
% du total des volumes facturés par la SEM pour ce service. Il faut y adjoindre la vente d'eau
brute aux agriculteurs qui se fait à la vanne et provient donc directement du canal (6,7 millions de
m3).
Cette activité est actuellement bien circonscrite avec la disparition des réseaux d'eau brute pour
l'alimentation du périmètre de Marseille. Cette partie du service pourrait être parfaitement
autonome tant sur le plan technique que financier tout en étant rattaché à la ville de Marseille qui
en est historiquement à l'origine et qui est le seul propriétaire de l'ouvrage. Le coût réel du service
rendu dans ce cadre pourrait être déterminé en toute transparence et une nouvelle tarification,
établie conformément aux exigences de la jurisprudence tant du juge administratif que du juge
civil, serait dès lors envisageable.
3.1.2 La potabilisation et la distribution.
Sauf pour ce qui concerne le réseau d'eau brute, qui tend à disparaître, ces deux fonctions
peuvent être regroupées car elles correspondent toutes deux au périmètre de Marseille stricto
sensu. A l'exception de la commune d'Allauch, l'eau potabilisée n'est distribuée que dans le dit
périmètre à de rares exceptions près.
Ce "périmètre" recouvre, de façon historique et sans qu'actuellement les maires des communes
concernées n'y voient à redire, une anomalie importante. En effet, les communes d'Aubagne, la
Penne sur Huveaune, Septèmes les Vallons et Les Pennes Mirabeau (pour partie) ont
"abandonné" à la ville de Marseille leur compétence en matière d'eau. C'est la ville de Marseille
qui règle seule, sans mandat explicite des autres communes, toutes les questions relatives à la
potabilisation et la distribution de l'eau. Nous sommes en présence d'un "syndicat de fait" dont le
président est le maire de Marseille.
Il existe un protocole d'accord signé le 16 octobre 1992 entre les communes du périmètre après
que le préfet eut longuement insisté sur ce point. Ce document est postérieur à la signature du
contrat et il ne porte que sur les modalités de réalisation et de financement des travaux du service
de distribution de l'eau. On distingue les travaux d'intérêt général (production, potabilisation et
canalisations autres que celles de distribution au sens strict du terme) et les travaux d'intérêt local
qui sont financés par la collectivité bénéficiaire. Une part de la surtaxe, fixée dans le contrat sans
l'accord des communes concernées, sera reversée par la ville de Marseille à cet effet (15 % du
montant). Mais il vrai qu'en cas de besoin le budget de la commune a pu participer au
financement de ces équipements.
Les dispositions appliquées jusqu'à ce jour mériteraient qu'une importante clarification soit faite à
l'occasion de la mise en place de la communauté urbaine de Marseille. Les communes du
périmètre ont, dans leur réponse, été favorable à une évolution du dispositif en place.
3.2. PRESENTATION DU SERVICE DE LA VILLE DE MARSEILLE
La ville de Marseille n'a pas d'adjoint délégué au service de l'eau et les relations de haut niveau se
font uniquement entre le PDG de la SEM et le maire de la ville. Il arrive, pour les questions
financières, que l'adjoint délégué aux finances, intervienne.
En cas d'échanges de courrier avec la SEM, il est nécessaire que le maire désigne expressément
son adjoint, comme ayant reçu délégation pour traiter spécifiquement du dossier. Enfin c'est le
conseiller municipal délégué aux affaires de santé publique qui a en charge le contrôle de la
qualité de l'eau, et des problèmes d'hygiène liés à la consommation de l'eau par l'intermédiaire du
Service Communal d'Hygiène et de Santé (SCHS). Deux services interviennent principalement
dans le domaine de l'eau : la direction des services concédés et la direction de l'eau et de
l'assainissement
3.2.1 La direction des services concédés
La direction des services concédés (DSC) est l'une des 14 directions de la ville de Marseille. Elle
est composée d'une vingtaine d'agents, principalement des cadres. Elle se définit comme une
administration de mission qui assiste et contrôle, tant sur le plan administratif et juridique que
financier et technique, les organismes gérant un service public dans le cadre d'une convention de
délégation, soit plus d'une trentaine.
Consciente de la disproportion entre ses effectifs et les missions qui lui sont dévolues et
également de ses insuffisances, une politique de restructuration a été engagée concernant ce
service, mais toujours à moyens constants. Un contrat d'objectifs a été mis en place fin 1996.
Après la création de la Direction de l'Eau et de l'Assainissement (DEA), la DSC n'a conservé que
la gestion du contrat avec la SEM, avec son volet financier. Elle prépare et suit le budget annexe
de l'eau depuis son instauration (1997). Elle contrôle les relations contractuelles et reste
l'interlocuteur privilégié de la SEM au niveau de sa direction.
3.2.2 La direction de l'eau et de l'assainissement.
Afin de regrouper l'ensemble des moyens consacrés à l'eau dans une gestion plus cohérente, une
direction de l'eau et de l'assainissement a été créée en 1996. La DEA comprend le service de
l'assainissement et une cellule eau. Elle est rattachée à la Direction Générale des Services
Techniques (DGST), elle-même dépendant d'un secrétaire général adjoint différent de celui qui
coiffe la DSC. Elle comporte, pour la cellule Eau, 8 agents dont 2 ont été transférés de la DSC. La
DEA intervient pour les activités techniques opérationnelles, essentiellement en matière de
travaux. Une réunion mensuelle (DSC/DEA/SEM) permet une coordination entre les intervenants.
3.3 PRESENTATION DE L'ORGANISATION DE LA SEM
La SEM, pour assurer l'exécution de la mission qui lui est confiée, s'appuie d'une part sur des
services fonctionnels regroupés au siège (département comptable et financier, département
ressources humaines, moyens généraux et département commercial - accueil du public, gestion
des abonnés, facturation et recouvrement) et d'autre part sur des services spécifiques n'impliquant
que le contrat "Marseille Périmètre". Il s'agit du département Adduction Production Marseille pour
l'exploitation du canal de Marseille et des stations de potabilisation et du département Exploitation
Marseille pour l'exploitation du réseau de distribution. Enfin le département Etudes et Travaux
pour la réalisation des études et le suivi des travaux. Les chefs de département se tiennent en
relations directes et aussi fréquentes que nécessaire avec les responsables de la collectivité et les
services chargés des contrôles officiels.
2EME PARTIE : LE SERVICE RENDU AUX USAGERS
1. LES ABONNES DU RESEAU.
1.1. LES DIFFERENTS TYPES DE BRANCHEMENTS
L'article 3 du Règlement des abonnements en vigueur prévoit que la fourniture d'eau se fait
uniquement au moyen de branchements munis de compteurs sauf impossibilité technique
provisoire. En 1998 sur les 122 609 abonnements du périmètre de distribution, 105 246 sont
munis d'un compteur (86 %), 2 678 d'une jauge (2,2 %), 312 sont à la vanne et 14 996 au forfait.
1.1.1. L'alimentation à la jauge ou "pastille"
Ce type de branchement était le seul en usage au début du siècle pour ce qui concerne
l'alimentation domestique. Le parc de branchements à la jauge a augmenté jusqu'à atteindre 69
250 jauges en 1957. Ce type d'alimentation concerne encore, au 31/12/98 2 617 abonnements
domestiques et 56 abonnements communaux.
Ce système d'alimentation présente deux inconvénients majeurs, le premier concerne la quantité
d'eau consommée, le second concerne la qualité de l'eau.
En effet, il s'agit d'un système où les consommations réelles ne sont pas mesurées par un
compteur mais où des volumes forfaitaires sont souscrits avec le contrat d'abonnement.
Outre le gaspillage d'eau, ce système est souvent la cause de manque d'eau (volume de la caisse
insuffisant ou bouchage de la jauge), d'accidents graves (l'effondrement d'une citerne à eau d'une
trentaine de tonnes située sur le toit d'un immeuble et provoqué par une explosion due au gaz, a
fait 4 morts et 26 blessés le 20 juillet 1996 à Marseille), et de risques sanitaires liés à l'altération
de la qualité de l'eau stockée dans les citernes (provoquée par un défaut d'entretien de la cuve,
par contamination à travers la grille de protection de la citerne qui laisse passer poussières,
insectes ou par la présence de tuyauteries en plomb)
Consciente de la nécessité de trouver une solution définitive à ce problème d'hygiène publique, la
ville de Marseille a mené depuis 1957 mais surtout de 1967 à 1989 une importante campagne de
suppression systématique des distributions domestiques à la jauge à l'occasion de travaux de
renouvellement ou à la demande d'abonnés, et cela, aux frais de la collectivité. Cette opération a
permis de réduire le nombre de jauges qui passent de 54 460 en 1968 à 7 890 en 1989. A partir
de 1990, la cadence s'est ralentie. Entre 1990 et 1993, 2 490 jauges seulement ont été
supprimées.
Début 1990, la DSC et la SEM constatent qu'aucune base contractuelle ni aucune délibération du
conseil municipal, n'établit le mode de financement des passages de jauge à compteur. La ville de
Marseille a décidé, dans une délibération du 24 février 1992, de demander une contribution
financière de 9 400 F HT aux abonnés bénéficiaires d'une jauge montage compteur au cours
d'une opération de renouvellement ou de renforcement. Cette mesure fut un échec, 34 abonnés
seulement avaient payé le montant forfaitaire demandé alors que 246 suppressions de jauge
avaient été effectuées. Pour y remédier la ville décide en 1994 de lancer une campagne de
sensibilisation et d'ouvrir une procédure d'appel d'offre ouvert pour la réalisation des travaux (300
branchements à réaliser par an sur 7 ans). Cependant la SEM voulant réaliser la totalité de
l'opération fait une contre proposition soumise au conseil municipal le 19 décembre 1994 décidant
que :
* L'ensemble du programme restant (2 550 jauges) s'effectuera sur 3 ans de 1995 à 1997 ;
* L'ensemble des passages à la pression d'une même rue sera effectué simultanément afin
d'éviter des ouvertures successives de la chaussée. Ce qui implique la mise en place de jauges
montage compteurs pour les propriétaires n'ayant pas encore décidé des travaux ;
* Une convention à signer attribue à la SEM l'exclusivité des travaux et le versement d'une
participation de la SEM de 1 250F HT par branchement.
La convention établie pour 3 ans et reconductible jusqu'en 1999, est signée le 21 février 1995 par
le maire de Marseille. Le coût total de l'opération, qui porte sur 3.050 branchements est estimé à
37 077 325 F TTC, la SEM s'engage à verser 4 521 625 F TTC. Compte tenu de l'aide de
l'Agence de l'eau évaluée à 6,2 millions de F, il restait à la charge de la ville de Marseille plus de
26 millions. De 1994 à 1996, 1 475 branchements ont été facturés à la ville de Marseille.
Le caractère incitatif de la démarche entreprise par la ville de Marseille a donc échoué en partie
puisque les branchements réalisés permettent effectivement la pose d'un compteur, mais les
problèmes d'hygiène et de santé liés à l'installation interne des immeubles demeurent. La ville de
Marseille n'ayant pas opté pour une démarche obligatoire et contraignante, il lui reste donc à
trouver les moyens de convaincre les propriétaires et syndics de faire changer leurs installations.
La Chambre prend acte de la volonté de la ville d'accélérer le processus d'abandon des caisses à
eau.
1.1.2. L'alimentation au compteur
Le nombre d'abonnés, dont 100 239 sont des particuliers, est relativement stable depuis 1995. Or
la population desservie est, selon les critères retenus de 874 955 habitants (recensement de
1990). Il y a donc un abonnement pour 8,2 habitants ce qui est particulièrement élevé l'abonné
n'étant pas dans la plus part des cas l'usager du service, ce qui est contraire à la notion même de
service public. Cette option a été volontairement prise par le délégataire suivi en cela par le
délégant. Nombre de clauses dans le contrat incite à faire perdurer cet état de fait, la ville de
Marseille étant la plus concernée.
L'avantage qu'en retire la SEM est un moindre nombre de dossiers à gérer ce qui entraîne des
économies pour les relevés, la facturation et le recouvrement. En outre, le redevable étant le plus
souvent le propriétaire, en particulier pour le logement social ou la copropriété, il y a peu
d'impayés (généralement de l'ordre de 0,5 %).
En contrepartie, la SEM perd la relation directe avec l'usager final qui n'a pas accès aux
différentes informations contenues dans la facture qui sert de support, en application des textes
légaux, aux informations sur la qualité de l'eau fournie qui est l'image la plus positive de la SEM.
Le transfert de la charge de la gestion des abonnements individuels du délégataire au propriétaire
entraîne un coût que l'usager final assume (coût de gestion, relevé, prise en compte des impayés,
location du compteur) inégal d'un immeuble à un autre et plus élevé, du fait de l'absence de l'effet
de masse, que si le délégataire assumait directement cette partie du service. En outre, la gestion
des cas sociaux, pour ce qui concerne les factures relatives à l'eau, échappe à l'action sociale de
la collectivité.
Un projet de loi, en cours de discussion au Parlement à la date de l'adoption des observations
définitives, rendra nécessaire l'individualisation des compteurs d'eau dans les immeubles quand la
demande en sera faite.
2. LES DIFFERENTES CATEGORIES D'USAGERS
Sur les 161,11 millions de m3 d'eau consommés en 1998 sur le périmètre du canal de Marseille,
90 millions sont livrés directement aux usagers, 32,36 millions le sont à la SCP dans le cadre de
l'échange gratuit d'eau prévu contractuellement et 38,76 millions sont fournis à d'autres services
d'eau dans le cadre de contrats spécifiques. Quatre grandes catégories d'usagers peuvent se
distinguer parmi les abonnés de la SEM : les communes, les particuliers, les industriels et les
agriculteurs.
2.1 LES COMMUNES
2.1.1.Les consommations municipales.
Les communes du périmètre (Marseille, Aubagne, Les Pennes Mirabeau -2ème section dite des
Cadeneaux-, La Penne sur Huveaune et Septèmes-les-Vallons) consomment annuellement plus
de 20,8 millions de m3 d'eau pour les besoins de leurs services. Bien que leur consommation
annuelle ait beaucoup baissée depuis 1989 (elle était de 35,7 millions de m3), les 5 communes
restent structurellement, après les abonnés "tous usages", les plus gros consommateurs d'eau du
périmètre avec 13 % du total des volumes livrés par le canal.
L'eau consommée pour les besoins municipaux se distingue en 2 catégories : l'eau nécessaire
aux appareils publics situés sur la voie publique (60 % de la consommation des communes) et
l'eau consommée par les bâtiments et services communaux.
2.1.1.1.Les appareils publics
Cette catégorie, qui utilise plus de 12 millions de m3 d'eau par an, comprend : les bornes
fontaines (73), les réservoirs de chasses d'égouts (1 084) nécessaires au fonctionnement du
réseau d'assainissement, les bouches d'incendies (6 124), les boîtes de lavage et d'arrosage (7
347) nécessaires aux services de la voirie
Le régime contractuel appliqué aux appareils publics se résume en 3 points :
* L'installation et/ou l'entretien est réalisé par la SEM aux frais de la commune; * Leur
consommation d'eau n'est pas mesurée mais est évaluée forfaitairement ; * * L'eau utilisée par la
commune est gratuite.
Cette consommation a baissé de plus de la moitié du fait de l'application, depuis 1991, de
plusieurs paramètres :
* l'abaissement des forfaits journaliers de consommation par appareil
* L'application d'un coefficient de simultanéité fixé à 0,85 en 1992 puis à 0,60 à partir de 1996.
Ces modifications ont été introduites en 1991 par la SEM afin de rapprocher le forfait de la réalité
des volumes consommés. L'instruction a montré que le 2ème paramètre n'était pas pris en
compte par la SEM dans sa facture annuelle adressée aux communes.
2.1.1.2.Les bâtiments et services communaux
Les services communaux des 5 communes du périmètre totalisent près de 2900 abonnements
dont 95 % concernent la ville de Marseille. Les consommations des divers services sont mesurées
et non forfaitaires. En 1998, elles s'élèvent à 8 384 453 m3 dont 93 % pour la ville de Marseille
(7,8 millions de m3). Ces consommations sont, globalement, relativement stables. L'eau
d'arrosage des espaces verts constitue plus de la moitié de l'eau consommée par les services
municipaux (54 %).
2.2 LES PARTICULIERS
Avec 59 millions de m3facturés, les particuliers représentent 45 % des volumes du périmètre du
canal de Marseille en 1998 et 91 % des produits du délégataire pour ce contrat soit 512,5 millions
de francs d'où l'importance de cette catégorie d'usagers. Pour la ville la constatation est identique
même si elle est de moindre importance. En effet, le produit de la surtaxe perçue auprès de cette
catégorie d'usager est de 37 MF soit près de 53 % du produit de la surtaxe. Depuis 1989, les
volumes vendus à ce type d'usagers ont tendance à baisser de 1 à 2 % par an passant de prés de
68 millions de m3 en 1989 à 59,1 en 1998.
Les différentes catégories d'abonnés peuvent se classer en fonction du type d'eau utilisé (eau
brute, marginale, et eau filtrée), mais aussi en fonction des types de branchements qui entraînent
des catégories d'abonnements différents : à la jauge, dont il a déjà été question, forfaits "tous
usages", forfaits d'assainissement privé, au compteur, de loin les plus nombreux, dont les
compteurs pour espaces verts qui ont la particularité de ne pas supporter la redevance
assainissement...
Il faut enfin y rattacher les abonnements incendie dont l'eau est gratuite en cas d'utilisation dans le
cadre d'un incendie mais avec une tarification très lourde en cas d'utilisations autres (fuites, essais
etc..).
Enfin, il y a une forte concordance entre volumes consommés (59 216 072 m3) et volumes
facturés (59 118 876 m3). Encore faut-il noter que les installations de la SEM consomment 83 634
m3 alors que cette consommation n'est facturée que pour les taxes et redevances.
2.3. LES INDUSTRIELS
En 1998, avec 3 326 383 m3 représentant 2 % du total des volumes consommé, les industriels ne
sont pas une catégorie d'abonnés importante pour le service d'eau du périmètre Marseille. En
outre, il peut être constaté que de 1989 à 1998 l'évolution des consommations industrielles est
plus défavorable que pour l'ensemble des autres abonnés chutant de 41 % sur la période.
Cette baisse importante est due surtout à la réduction des consommations hors périmètre qui est
ramenée de 1 586 386 m3 à 397 376 m3 (-75 %) alors que sur le périmètre elle n'est que de -28
%. Il faut remarquer que parmi les abonnés industriels figure le PAM qui à lui seul a une
consommation voisine de 500 000 m3/an. Ainsi en 1998 les industriels hors PAM n'ont consommé
qu'un peu plus de 2,5 millions de m3.
De façon classique, il est distingué des abonnements d'eau brute et d'eau filtrée avec une
tendance à la disparition des abonnements d'eau brute, qui représentent en 1998 à peine 10 %
des volumes vendus à ce titre. Il est à noter que les abonnements comprennent une partie fixe et
une partie proportionnelle à la consommation. Les gros consommateurs sont moins sollicités, le
barème étant fixé par tranche de 10 000 m3.
En plus de la tarification prévue à l'article 28 du cahier des charges, ces abonnés doivent acquitter
une redevance de vérification et d'entretien des prises dont une part revient à la SEM et l'autre,
par le biais d'une surtaxe à la ville. Faire supporter une surtaxe pour des branchements, certes
propriété de la collectivité mais réalisés aux frais des abonnés, n'est pas logique. La ville a perçu
à ce titre la somme de 422 189 F en 1998.
2.4. LES AGRICULTEURS
En 1998, avec un peu plus de 7 millions de m3, les agriculteurs utilisent 4,35 % des volumes
consommés dans le périmètre. De 1989 à 1998 cette consommation a baissé de 36,6 % soit plus
du double que celle de la consommation totale (15 %). En 1998, les abonnés agriculteurs situés
hors du périmètre de distribution ont consommé 1,9 millions de m3, soit 27 % du total.
Ces abonnés sont alimentés majoritairement à la vanne (296 en 1998 contre 480 en 1989) et
donc en eau brute qui représente 94 % de leur consommation totale. Il faut leur ajouter ceux qui
ne font pas partie du périmètre de la distribution mais de celui du canal qui sont au nombre de 358
et qui sont en majorité des agriculteurs ayant une prise sur le canal. Seulement 382 811 m3d'eau
filtrée sont vendus à 205 abonnés de cette catégorie. Le reliquat résulte des forfaits.
2.5 LES CONCESSIONS D'EAU CONTINUE AUX COMMUNES ET ORGANISMES DIVERS OU
"LIVRAISONS EN GROS".
Ces abonnés, peu nombreux (32), ont passé, depuis une date récente des conventions avec la
ville de Marseille régularisant ainsi des situations très anciennes et qui ont été exposé plus avant
dans le rapport.
3. LA QUALITE DE L'EAU DISTRIBUEE
3.1. LES TYPES D'EAU DISTRIBUEE
3.1.1 Présentation : Eau brute ou eau filtrée
Historiquement, le réseau de distribution en eau brute a été mis en place en 1850 et il était le seul
existant jusqu'au début du siècle où commence alors la construction du réseau dit "double
canalisation" qui reprend toute l'alimentation du centre ville à partir de Ste Marthe. C'est vers 1950
que le réseau d'eau filtrée est généralisé, par la reprise des conduites du réseau double et par son
extension progressive à tout le périmètre.
3.1.2 L'abandon du réseau d'eau brute
Le 29 mars 1989, le service Etudes et Travaux de la SEM, proposait, dans une étude concernant
une esquisse de programme de renouvellement du réseau sur 15 ans, l'abandon du réseau d'eau
brute, au motif que cette solution réduirait le coût global de renouvellement du réseau de près de
43 %.
Le réseau d'eau brute en 1991 est constitué de 285 km de conduites vétustes, datant toutes du
début du siècle et dont le coût d'entretien est très élevé. La SEM a estimé le gain annuel à 71 800
F HT qui ne peut, à lui seul, justifier la proposition d'abandonner le réseau d'eau brute. L'argument
décisif porte sur la réduction du coût du renouvellement du réseau secondaire
Cette opération a été mise en oeuvre, semble-t-il, à la satisfaction de toutes les parties, la
commune, qui améliore la qualité de son réseau sans grever son budget, la SEM, qui limite ainsi
ses charges d'exploitation et ses investissements et les usagers qui ne supportent ainsi qu'une
augmentation limitée du prix de l'eau. De plus, l'opération s'est réalisée dans des délais très
réduits.
Ce satisfecit doit cependant être nuancé par deux constats :
* Les coûts prévisionnels calculés par la SEM en 1991 n'ont pas été confirmés (le coût final de
l'opération n'a pu être déterminé faute de bilan individualisé) ;
* La dépose des conduites d'eau brute abandonnées (notamment celles posées en galeries) et la
démolition d'ouvrages liés au réseau d'eau brute n'ont pas été chiffrées et ne sont pas, à ce jour,
réalisées.
3.2. LA QUALITE DE L'EAU
3.2.1 L'application de la réglementation
La qualité des eaux distribuées est mesurée selon un programme de prélèvements et d'analyses
effectué selon les modalités décrites dans le décret du 3 janvier 1989 modifié. Les textes
réglementaires définissent 3 niveaux de contrôle de la qualité physico-chimique et bactériologique
de l'eau distribuée qui doit répondre à quelques 63 critères de qualité sanitaire ou de confort
domestique.
Chaque paramètre fait l'objet de vérifications analytiques selon des fréquences qui varient en
fonction des lieux de prélèvements (ressource, production, distribution), de l'origine de l'eau
(superficielle ou souterraine), du débit prélevé et de l'importance de la population desservie. Les
obligations de chaque partie sont clairement précisées dans le décret ; la répartition des
compétences sur le périmètre de Marseille était claire.
La Chambre a constaté que :
1. Les prélèvements, conformes au décret du 03 janvier 1989, n'ont débuté qu'en septembre
1996. Jusque-là, les prélèvements, environ 300, ne correspondaient pas aux exigences imposées
par les textes. En effet le SCHS se contentait de vérifier la véracité des résultats des analyses
transmises par la SEM et effectuées par son laboratoire ;
2.Les prélèvements, qui étaient effectués par des inspecteurs de salubrité, et les frais d'analyses
étaient à la charge de la ville.
La situation actuelle, concernant l'analyse de la qualité de l'eau, est conforme aux exigences de la
réglementation. La DDASS adresse aux maires en fin d'année, une synthèse annuelle des
contrôles réalisés et à la SEM, une note destinée à être jointe aux factures d'eau. Les résultats
des analyses sont exploités localement par la DDASS et au niveau national, par le Ministère de la
santé qui est connecté directement à la base de données. Chaque bulletin d'analyse adressé à la
ville est vérifié au niveau de la conclusion puis comparé à la fiche de prélèvement.
3.2.2 Les prélèvements
Le contrôle de la qualité de l'eau occupe une place importante dans le rapport annuel de la SEM.
Ces éléments sont repris dans les rapports annuels présentés par les maires à leur conseil
municipal.
3.2.2.1 Contrôle de la ressource :
La SEM assure une surveillance permanente de la qualité de l'eau brute délivrée par le canal
(dans le cadre de la lutte contre les pollutions accidentelles). Des dispositions sont prévues pour
chaque cas de pollution accidentelle. Des contrôles de radioactivité sont réalisés.
La SEM effectue également une surveillance régulière de la qualité des eaux en différents points
du canal (hebdomadaire en ce qui concerne la station de Sainte Marthe) et la DDASS a réalisé en
1998, 60 analyses physico-chimiques complètes sur des points de prélèvements répartis le long
du canal (dont 6 sur Aubagne.)
3.2.2.2. Le contrôle de la production :
La qualité de l'eau produite par les stations de traitement est assurée en permanence par des
capteurs automatiques chargés de mesurer la turbidité de l'eau et la concentration en
désinfectants résiduels. En outre, la SEM effectue également des contrôles dans le cadre de
l'auto-surveillance. Ces contrôles bactériologiques réalisés à l'entrée et à la sortie des stations
sont complétés par ceux réalisés par la DDASS et par le SCHS pour la ville de Marseille.
En 1998, la SEM a réalisé 241 contrôles et la DDASS et le SCHS de la ville de Marseille 288 qui a
signalé 2 turbidités anormales à la sortie de l'usine de traitement de Saint-Barnabé qui n'ont pas
été confirmées.
3.2.2.3.Le contrôle de la distribution.
Depuis 1995, les anomalies décelées varient entre 0,1 et 0,3 % des analyses effectuées
(essentiellement des coliformes et des streptocoques fécaux). La liste de ces anomalies est
publiée chaque année dans le rapport de la SEM. La DDASS, qui a effectué en 1998 1 230
prélèvements en y incluant ceux du SCHS de la ville de Marseille, a bien confirmé que toutes les
analyses étaient en 1998, conformes aux normes en vigueur.
Les prélèvements qui sont réalisés par la SEM sur Marseille portent majoritairement sur les
réservoirs d'extrémité mais 10 % d'entre eux se font de façon aléatoire. Ceux réalisés par le
SCHS ne portent que sur des équipements ou bâtiments municipaux. Cette répartition fixe en
"secteurs de compétence" ainsi que l'éventail plutôt étroit de ces 2 secteurs, pourrait être revue
dans un souci de meilleure efficacité.
3.2.2.4 De la diffusion des résultats.
Outre la publication des résultats extraits du rapport annuel de la SEM et mis à la disposition du
public, d'autres moyens d'information sur la qualité de l'eau distribuée sont prévus par le décret du
26 septembre 1994 :
* L'affichage en mairie a été confirmé par les communes au moins en ce qui concerne la synthèse
commentée établie annuellement par la DDASS. Pour ce qui concerne Marseille, les bulletins
d'analyse sont tenus à la disposition du public au SCHS.
* Une note synthétique annuelle comportant des informations générales sur les critères des
analyses, des informations pratiques ainsi qu'un bilan des contrôles effectués sur la commune est
établi par la DDASS et adressée à la SEM pour être jointe aux factures des abonnés. Cette
formule a été mise en oeuvre sur les communes du périmètre, reste Marseille.
La diffusion de l'information est donc bien engagée par les divers intervenants. Il convient de
signaler toutefois que cette information ne rencontre guère d'écho chez les usagers. Une des
raisons en est que les éléments d'informations décrits dans la note jointe à la facture ne touchent
que les abonnés et non les usagers.
Les plaintes adressées par les usagers marseillais au SCHS ne portent pas sur la qualité de l'eau
mais seulement sur le mauvais état des réseaux intérieurs. Sur les 5 200 réclamations traitées
dans l'année 1998 par la SEM (qui concernent essentiellement des problèmes de facturation), 41
plaintes concernent la coloration rougeâtre de l'eau sur certaines conduites en extrémité de
réseau due au traitement au chlorure ferrique.
3.2.3. Les solutions à mettre encore en oeuvre :
3.2.3.1 Concernant le coût des contrôles
Dans un courrier du 5 avril 1996 adressé à la ville de Marseille, la SEM a accepté de prendre en
charge les frais supplémentaires, évalués à 2 MF, engagés au titre des contrôles supplémentaires
obligatoires imposés par le décret, en attendant de les répercuter sur le prix de l'eau dans une
régularisation contractuelle du tarif conformément à l'article 12 du contrat de délégation Ce
problème aurait pu être résolu en 1991 lors des négociations de l'avenant n° 9 car l'alinéa cité ne
tient pas compte des dispositions prévues par les textes (décret modifié 89-3 du 3 janvier 1989)
en vigueur au moment de la signature du contrat.
Les frais de prélèvement engagés par la DDASS et par le SCHS et récupérés auprès de la SEM
pour 1998 se montent à : 271 575 F. Aucun chiffre n'a été fourni lors de l'instruction sur le coût
des analyses. Cependant, on peut relever dans les charges du compte d'exploitation de la SEM
un poste "analyses" qui devrait recouvrir les frais de prélèvements et d'analyses obligatoires pris
en charge par la société : 369 000 F en 1996, 1 136 000 F en 1997 et 1 276 000 F en 1998. Ces
montants demeurent donc nettement inférieurs aux 2 MF cités dans la lettre du 5 avril 1996 mais
montrent que cette charge est désormais comptabilisée dans le compte rendu financier de la
délégation.
3.2.3.2 Concernant l'information des usagers
Il a déjà été noté les efforts qui ont été fait pour l'information des usagers ainsi que le peu de
curiosité de ceux-ci pour connaître la réalité de la qualité de leur eau.
3.3. LA QUALITE DU RESEAU
Les principaux indicateurs qui peuvent renseigner sur l'état général des installations, sont d'une
part l'état des lieux des installations fourni par la SEM et des travaux effectués (travaux d'entretien
et de renouvellement et travaux neufs et d'extension du réseau à la charge des 2 contractants),
d'autre part le rendement général du réseau.
3.3.1 Le rendement du réseau
En 1998, le total des volumes prélevés dans le milieu naturel était de 292,9 millions de m3. Les
volumes consommés ne sont que de 161,1 millions de m3 soit seulement 55 % des volumes
prélevés. Ces résultats se dégradent d'année en année, en effet, en 1995, cette proportion était
de 59 %.
La différence de 84,7 millions de m3 (soit 28,9 % du volume prélevé) entre le volume prélevé non
utilisé sur le parcours du canal et celui qui est mis en distribution est due au système retenu et à
des raisons techniques : le fonctionnement des usines et les besoins du canal. La Chambre prend
acte de la prise de conscience de cette situation anormale dans la maîtrise de la gestion de la
ressource et des efforts faits pour y remédier
Sur les 208,2 millions de m3 mis en distribution, soit 570 303 m3/j (avec une pointe en juillet de
744 813 m3/j), 161,1 millions sont consommés, dont 79,1 millions de m3 d'eau brute et 82 millions
de m3 d'eau filtrée. Les pertes du réseau de distribution d'eau filtrée sont de 14,2 millions de m3,
soit 14,5 % du volume mis en distribution. Le rendement est très stable depuis 1995. Par contre,
l'indice linéaire de perte s'est nettement amélioré depuis 1996, il est aujourd'hui de 13 m3/j/km.
Ces chiffres sont très satisfaisants puisqu'ils se situent dans la partie basse de la fourchette
nationale (entre 15 et 20 % de fuites). Il convient toutefois d'être prudent le nombre de fuite 1997
est de 937 fuites, le chiffre de 1998 (1 066) ne serait, selon la SEM, qu'un accident qui ne devrait
pas se renouveler.
Cependant les pertes sur le réseau de distribution d'eau brute sont relativement importantes en
1997 et 1998 mais les raisons peuvent être multiples, en particulier :
* Le vieillissement des canalisations ;
* Les volumes gaspillés en raison d'incidents d'exploitation ;
* Les volumes utilisés par des usagers clandestins ;
* Les erreurs dues au moment du comptage.
3.3.2 L'entretien des installations du canal et du périmètre de distribution
Le délégataire est chargé de l'entretien courant des équipements qui sont dans le champ de sa
compétence, et qu'il n'est pas possible d'identifier dans les comptes annuels produits par le
délégataire. L'expert comptable, missionné par la ville pour examiner en particulier le compte
rendu financier annuel produit par le délégataire, fait ressortir dans un "compte de résultat" de la
délégation une ligne "entretien" pour 49,9 MF en 1997 qui prend en compte les travaux d'entretien
faits sur demande de la SEM par des entreprises extérieures.
En outre le contrat impose au délégataire de réaliser des travaux de gros entretien et d'entretien
différé pour un montant minimum annuel moyen par périodes quinquennales de 22 MF indexé. En
1997 le montant de l'obligation de la SEM était de 26,4 MF. L'état des travaux exécutés s'est
établi à 41,8 MF. En 1998, la SEM n'a consacré que 37,4 MF pour remplir cette obligation alors
que, d'une façon générale, ce montant avait toujours dépassé 41 MF pour les exercices
antérieurs.
Dans ses comptes rendus annuels la SEM indique de façon détaillée les opérations réalisées au
titre de l'entretien normal ou du gros entretien des installations, tant en adduction (le canal de
Marseille) qu'en production et en distribution. Le délégant a toujours la possibilité de vérifier la
réalité des opérations et d'en contrôler les coûts.
3.3.3. Les travaux à réaliser
3.3.3.1 Les travaux à la charge de la ville de Marseille
L'avenant n° 9 laisse à la charge de la ville le renouvellement du canal et de ses dérivations, les
rigoles d'arrosage, les conduites d'adduction d'eau brute des stations de traitement, les circuits
hydrauliques de toute nature des stations de traitement, des stations de pompage et des
réservoirs. Au cours des discussions entre la SEM et la ville de Marseille, aucun renouvellement
systématique n'avait été évoqué, car beaucoup d'ouvrages avaient déjà fait l'objet
d'investissements importants. Un renouvellement au coup par coup paraissait préférable. De
même sont à la charge de la ville les travaux de modernisation, de renforcement et de
développement du réseau primaire. Une estimation faite au moment de l'approbation de l'avenant
n° 9 fait apparaître un montant de travaux à réaliser à ce titre, de 33 MF par an, valeur 1991, qui
passe dès 1996 à 58 MF, valeur 1996.
Une étude sur la protection contre la pollution du canal de Marseille a été réalisée en 1985 et a
servi d'élément de négociation pour l'avenant n° 9. Différentes mesures étaient préconisées pour
minimiser les principaux risques :
* protection du bassin Réaltor contre les eaux du bassin versant qui l'alimentent en cas de pluie et
les eaux du ruisseau Baume-Baragne. Il s'est développé sur ce bassin des cultures, un réseau
routier important, une agglomération urbaine (Cabriés), un centre commercial et divers
lotissements. Un contournement était envisagé, le rôle de ce bassin de régulation étant réduit
compte tenu de son envasement. A ce jour, il n'a pas été réalisé mais fait l'objet d'un projet en
cours (coût estimé 58 MF programmé pour 2001 jusqu'à 2003) ;
* la galerie de la Mûre et mise en buse de la dérivation de Saint Barnabé sur le tronçon Traverse
Courtrai-Usine de St Barnabé : ouvrages non réalisés ;
* le busage du canal -souterrain du Moulin- a été réalisé ;
* la dérivation des Camoins-Siphon des Accates, le terrain étant instable, l'ouvrage n'a pas été
réalisé mais un projet de confortement des terrains supportant le canal est en cours.
Sur le plan des réalisations la ville s'écarte donc de façon importante du plan qu'elle a pourtant
approuvé. Elle n'a réalisé sur les 4 premières années qu'environ 49 MF des 207 MF de travaux
prévus pour la période soit un taux de réalisation de 25 %. Encore faut-il remarquer que le
programme d'éradication des jauges a été appliqué, avec retard, mais de façon satisfaisante, ce
qui indique que d'autres investissements n'ont pas été réalisés. Depuis que le service possède un
budget annexe il est possible de connaître avec précision son taux de réalisation. Il est constaté
qu'il est très faible pour ce qui concerne les investissements. En 1998, sur 33,7 MF de crédits
votés il n'y a eu que 8,6 MF de consommés soit un taux de réalisation de 25 % ce qui confirme la
première approche. Consciente de ce retard du, selon elle par de nombreuses opérations
urgentes et de faible montant, la ville est décidée à le rattraper d'une part en mettant en place un
schéma directeur à horizon 2 010 destiné à définir les priorités de chaque plan d'autre part en
inscrivant au 12ème et 13ème plan des actions visant la sécurité, la sécurisation de l'alimentation
en eau et la protection de la ressource.
3.3.3.2 Les travaux à la charge des autres villes du périmètre
Les autres communes du périmètre, Aubagne, la Penne sur Huveaune, Septèmes-les-Vallons et
Les Pennes Mirabeau (2ème section) doivent financer les travaux relatifs aux installations d'intérêt
local selon les règles prévues au contrat de délégation. Le protocole d'accord passé entre les
communes du périmètre le 16 octobre 1992 précise les modalités d'application et les
financements résultant de ces obligations.
Ces communes ne tiennent pas de budget annexe pour leur service de l'eau considérant que la
ville de Marseille et la SEM sont chargées de satisfaire aux besoins de ce service. Toutefois
depuis le 1er janvier 1992, les ouvrages du périmètre de distribution sont répartis entre les
collectivités selon le critère d'ouvrages d'intérêt général et ouvrages d'intérêt local établi en
commun. Chaque commune a donc son propre patrimoine qu'elle doit entretenir, renforcer,
améliorer et, éventuellement étendre. Contrairement à ce qui est soutenu le contrat de délégation
publique, qui n'est une concession que pour les équipements qui doivent faire l'objet d'un
renouvellement pendant la durée de la convention, ne modifie pas cet état de fait.
On est donc en présence d'entités quasi indépendantes pour les installations qui sont leur
propriété mais qui se retrouvent liées par la gestion commune de la ressource en eau, par la
tarification et la présence d'un délégataire commun. Elles ont toutefois une marge de manoeuvre
pour ce qui concerne la programmation et la réalisation des travaux qui leur incombent. Ainsi
chaque année le délégataire leur propose des investissements à réaliser qui rentrent dans un
cadre quinquennal qui se rapproche du plan en application pour la ville de Marseille.
Cependant la complexité du contrat pour déterminer ce qui est de la compétence de chacune des
communes, l'absence d'un état des installations complet par commune du périmètre précisant les
ouvrages communs et ceux qui leur appartiennent et d'un service de l'eau et donc d'un budget
annexe ne permet pas de s'assurer du suivi des obligations de chacune des parties et du respect
des textes législatifs qui imposent une prise en charge par les recettes du seul service des
charges lui incombant.
3.3.3.3 Les travaux à la charge du délégataire
L'avenant n° 9 du contrat prévoit à l'article 9 de son cahier des charges les modalités de
renouvellement des installations. Pour cette catégorie de matériel, la SEM, dans son compte
rendu annuel, précise les interventions faites de façon très détaillée.
Il appartient à la ville de s'assurer de la réalité des prestations et de leur conformité avec la
nécessité du renouvellement ainsi effectué ainsi que de la conformité avec le plan de
renouvellement et sa programmation. L'état des lieux, complété par une mise à jour permanente,
devrait permettre de répondre à cette interrogation.
De même, sont à la charge du délégataire le renouvellement des feeders (canalisations
principales d'un diamètre supérieur à 400 mm), le réseau secondaire et les branchements. Le
cahier des charges fixe les objectifs de renouvellement de ces équipements. Pour ce qui concerne
les feeders l'objectif est de renouveler d'ici le terme du contrat tous ceux qui ont été posés avant
1905 soit 17 km de canalisations. Au 31 décembre 1998, 3 016 m/l ont été renouvelés soit une
moyenne sur la période 1992 - 1998 de 431 m/l par an alors qu'elle aurait du être de 773 m/l par
an. Il est cependant à signaler que 950 m/l ont été posé au cours de la seule année 1998. Comme
le fait observer la SEM c'est en fin de contrat que pourra être constaté le respect de cette
obligation mais il appartient à la ville de s'assurer au moment de son déroulement que le
délégataire ne prend aucun retard pour en tirer les conséquences.
L'objectif fixé pour le réseau secondaire consiste d'une part à abandonner le réseau d'eau brute et
d'autre part de renouveler un linéaire de conduites suffisantes pour qu'au terme du contrat, l'âge
statistique moyen du réseau d'eau filtrée (qui est de 1 787 km) soit inférieur ou égal à 100 ans.
Bien que non précisé dans le cahier des charges, il résulte des différents travaux préparatoires
que l'objectif annuel est de 21 km de conduites à renouveler par an. Jusqu'au 31 décembre 1998,
il a été renouvelé un peu plus de 117 km de canalisation soit une moyenne annuelle de 16,8 km.
Cependant en 1998, il a été traité 23,2 km de réseau ce qui permettra de rattraper le retard
constaté si cet effort est poursuivi.
L'objectif est de maintenir l'âge statistique moyen du parc des branchements inférieurs à 25 ans et
à 50 ans pour les appareils publics. Au total 3 850 branchements sont à renouveler en moyenne
par an. De 1992 à 1998 il a été renouvelé 19 559 branchements soit une moyenne de 2 794
branchements, donc 1 000 de moins que prévus au contrat. Toutefois en 1997 et 1998 la barre
des 3 000 a été franchi sans toutefois atteindre les objectifs initiaux et le retard s'accumule.
2.3.4 La mesure de la satisfaction de l'usager
A Marseille, pas plus que dans de nombreuses villes, la commission prévue par l'article L2143-4
du CGCL n'a pas été mise en place. L'exécutif communal ainsi que son délégataire ne disposent
donc pas de ce moyen pour savoir comment est perçu le service de l'eau : correspond-il aux
besoins des usagers, sont-ils satisfaits du service rendu, ont-ils de l'eau en quantité voulue et de
bonne qualité. Si les analyses répondent par l'affirmative est-ce que l'usager en a connaissance ?
Le prix payé est-il perçu comme la contrepartie d'un service rendu qui le justifie ? Est-il satisfait du
service "après vente" du délégataire ? En cas de problèmes sait-il où s'adresser ?
Autant de questions qui restent en suspens et qui, s'il n'y est pas répondu, peuvent conduire la
ville et son délégataire à mener des actions, voir à faire des investissements coûteux qui ne
répondront peut être pas aux attentes de l'usager. Une action de sensibilisation est nécessaire car
sur les 122 000 abonnés du périmètre et sans doute les quelques 300 000 usagers, aucun n'a
demandé à consulter les comptes rendus annuels d'exécution du service de l'eau qui sont à la
disposition du public à la DEA, boulevard Vernet depuis 1995 (article L1411-13 du CGCT.)
Les services de la ville ont envisagé de faire réaliser, avec le délégataire, une enquête de
satisfaction auprès des usagers mais ils ont essuyé un veto de sa part car il estime qu'une telle
enquête ne pouvait se faire en commun, chacun étant cependant libre, selon lui de la réaliser pour
son compte ce qu'il a fait.
Cette structure informelle a été créée le 3 juin 1998 au sein du Groupe des Eaux de Marseille, afin
de favoriser la concertation avec les marseillais, d'améliorer les services que le groupe leur fourni
et de satisfaire encore mieux leurs besoins. Cette structure rassemble autour des responsables du
Groupe une trentaine de personnalités représentant la ville de Marseille et sa population au
travers, notamment, des Comités d'Intérêt de Quartier (CIQ), des syndics de copropriétés, des
associations de consommateurs et des professionnels de la santé. Il peut être noté l'absence de
représentants de l'administration de la ville de Marseille (aucun représentant de la DEA et de la
DSC qui sont pourtant en relation directe avec la SEM) et de représentants des autres communes
du périmètre alors que le contrat de délégation porte sur le périmètre et est revendiqué comme tel
par la SEM.
Les réunions sont trimestrielles, la première a eu lieu le 3 juin 1998. Outil de communication de la
SEM (promotion pour le 150ème anniversaire de l'arrivée de l'eau à Marseille, mise en place d'un
centre Service Clients etc...) ce comité permet de faire remonter des demandes formulées par les
usagers : question des compteurs divisionnaires, vol des compteurs, coût des compteurs et des
branchements, caisses à eau, prix de l'eau, chantiers sur la voie publique, politique des
prélèvements de l'eau pour leur analyse, moyens de paiement, coupures d'eau pour non-
paiement. Incontestablement, certaines demandes des usagers intéressent les services de la ville
qui sont en outre les seuls à pouvoir y répondre. Ce comité a le mérite d'exister mais, dépend
exclusivement du délégataire.
3EME PARTIE : LES COUTS
Après une présentation physique du service, son importance et ses faiblesses, puis une
présentation juridique montrant sa complexité et ses imperfections, est analysé le coût du service
rendu en se prononçant sur le point de savoir s'il est en adéquation avec le prix effectivement
payé.
1. LA TARIFICATION, SES ANOMALIES ET SON EVOLUTION
La tarification, telle qu'elle est fixée dans le contrat, est complexe, et ne respecte pas, pour toutes
les catégories d'usagers, les dispositions de la loi sur l'eau qui veut qu'elle soit assise sur les
consommations réelles. Elle est source de nombreuses anomalies allant à l'encontre du principe
d'égalité des usagers devant le service public. Enfin, le prix de l'eau a évolué beaucoup plus
rapidement que l'inflation.
1.1. LES DIFFERENTES TARIFICATIONS PAR CATEGORIES D'ABONNES.
Dans cette partie seront décrites les différentes tarifications appliquées, sera donné le prix moyen
tel qu'il ressort de la formule -somme encaissée dans l'année pour chaque catégorie d'usagers sur
le volume qu'elle a consommé- et sera fait une évaluation des différents coûts de production (donc
en absence de toute marge au délégataire) estimés par la Chambre en fonction des éléments qui
lui ont été fournis pendant l'instruction et selon des hypothèses simplificatrices. Cependant les
coûts avancés par la Chambre sont conformes à la fois à ceux des comptes administratifs du
service de l'eau de Marseille et du compte rendu financier du délégataire.
1.1.1 Tarification pour la fourniture d'eau brute en gros
Cette tarification est réservée aux communes ayant obtenu une dotation sur le canal de Marseille.
La tarification se fait en fonction des débits souscrits en l/s et non en fonction des consommations
réelles comme l'impose la loi sur l'eau. Cette façon de procéder a pour conséquence que la base
de la facturation se fait sur des volumes supérieurs aux volumes consommés qui sont mesurés
par la SEM quand elle a posé des compteurs sur les prises sur le canal. Ainsi en 1998, la
consommation fut de 38,8 millions de m3, alors que la facture porte sur 57 millions de m3. Une
tarification avec une partie fixe, fonction des débits souscrits et une partie variable fonction de la
consommation réelle, aurait pour avantage de mieux lier la facturation à la consommation réelle.
La Chambre a constaté que les tarifs sont différents, selon que la dotation a été souscrite avant ou
après 1956. La différence est loin d'être négligeable. En effet, en 1991, le prix en l/s, redevance
du délégataire et surtaxe, est de 8 199,7 F pour les dotations antérieures au 1er janvier 1956 et
de 29 855,06 F pour les dotations souscrites après cette date, soit une différence de 364 %. Or
des communes comme Berre ou Ceyreste ont des dotations d'avant 1956 plus importantes que
celles souscrites après. A l'inverse, des communes n'ont souscrit des abonnements qu'après 1956
comme Cornillon ou St-Cyr. Il n'y a donc pas égalité des usagers placés dans les mêmes
conditions.
En réponse aux observations provisoires si certaines des communes intéressées souhaitent qu'il y
ait une modification de l'actuelle tarification d'autres estiment que ce système doit perdurer car la
redevance versée correspond à un péage. En effet à l'origine elle a été fixée en attendant que des
droits d'eau sur la Durance leur soit attribuée. Cependant d'une part la tarification n'est plus fixée
par un règlement d'administration publique mais par le contrat et d'autre part depuis la loi du 5
janvier 1955, relative à l'aménagement de la Durance seul, ont été pris en compte les droits d'eau
qui étaient déjà attribués à titre définitif.
Pour les deux chapitres à venir, la méthode de calcul des coûts d'adduction est identique à celle
développée par la SEM pour évaluer le coût de production du m3 d'eau vendu au compteur en
vue de déterminer le montant que doit adresser la société aux services fiscaux relatifs à "l'eau
dans les compteurs". Les chiffres retenus sont ceux figurant dans le rapport annuel du délégataire
1998, le compte administratif du service des eaux de la ville de Marseille et la fiche transmise aux
services fiscaux pour la prise en compte de l'eau dans les compteurs au 31 décembre 1998. Ce
document fait référence au "budget 1998 au 15 octobre 1998", cependant les chiffres sont très
proches de ceux figurant dans les comptes de la société comme le fait ressortir l'analyse de
l'expert-comptable nommé par la ville pour les auditer les comptes 1997.
Il faut d'abord connaître la part que représente l'adduction dans la masse des activités du contrat :
adduction, production, Marseille périmètre eau et exploitation Marseille section générale. Le
délégataire précise dans sa fiche que la redevance pour mise à disposition des ouvrages est
assise sur la valeur des ouvrages. Elle peut être répartie à raison de 40 % sur l'adduction et de 60
% sur production/distribution. Sauf indication contraire, quand une charge sera à répartir entre les
différentes activités du contrat, c'est ce pourcentage qui sera retenu. Ainsi pour les dettes de la
ville reprises par la SEM, c'est ce ratio qui sera utilisé. Ensuite il faut distinguer la part qui revient à
l'eau brute utilisée en potabilisation de celle qui est vendue sur le canal. Le volume d'eau brute
transformée en eau filtrée est de 98,5 millions de m3 (volume mis en distribution et besoins des
usines), le volume d'eau brute utilisé par les seuls usagers du canal donc hors SCP et avant les
pertes en distribution est de 79,8 millions de m3 soit 45,2 %.
Pour ce qui concerne la redevance, la SEM a perçu en 1998, au titre de la distribution de l'eau
brute aux communes branchées sur le canal, un total de 31,85 MF pour une fourniture de 38,8
millions de m3, soit un prix moyen de 0,82 F/ m3. La SEM, pour l'adduction concernant la
distribution à partir du canal, a dépensé 28,55 MF. Le prix de revient pour la SEM, sur l'ensemble
des volumes d'eau brute consommés, c'est à dire celle distribuée aux communes s'alimentant à
partir du canal -38,8 millions de m3-, aux communes du périmètre -environ 1 million de m3- et aux
agriculteurs -7 millions de m3- est donc de 0,61 F/m3.
La marge, par rapport aux prix pratiqués pour les communes concernés (0,82 F) est donc de 0,21
F/m3, soit pour la SEM un résultat brut pour cette catégorie d'usager de plus de 8 MF ce qui
permet de compenser d'une part la perte due à la gratuité de l'eau aux communes du périmètre
(600 000 F) et surtout aux agriculteurs (2,7 MF).
Pour la ville, le montant de la surtaxe perçue au cours de cette même période est de 25 MF, soit
un prix perçu par m3 de 0,65 F (25,2 MF/38,8 millions de m3). En regard, et en calculant les
charges au prorata comme pour la redevance, la ville a des frais réels de 14,94 MF ce qui fait un
prix de revient du m3 distribué d'eau brute de 0,32 F (14,94 MF/46,8 millions de m3), soit une
marge brute de 33 centimes par m3. La ville dégagerait ainsi un excédent de 12,8 MF. Cependant
pour les cinq prochaines années la ville a programmé pour le canal 21 MF de travaux liés à la
sécurité et 6,6 MF de travaux de grosses réparations et de renouvellement par an. Selon les
critères retenus la quote-part revenant à la distribution d'eau brute est de 12,6 MF soit un montant
quasi identique à l'excédent dégagé.
Le prix de l'eau brute payée par les communes desservies par le canal est de 1,47 F/m3 tel qu'il
résulte des sommes perçues et des cubages consommés pour un prix de revient estimé à 0,93
F/m3.
1.1.2 La livraison d'eau aux communes du périmètre
Les communes du périmètre, pour leur usage, bénéficient de la quasi-gratuité de l'eau. L'article 31
du cahier des charges du contrat précise que "L'eau d'arrosage pour le service de la voirie de
Marseille et des communes du périmètre sera fournie gratuitement par le concessionnaire, mais
seulement dans la limite de 30 m3 par an et par habitant dénombré au précédent recensement
général". La population permanente recensée en 1990 pour les cinq communes du périmètre est
de 874 955 habitants, l'avantage potentiel porte donc sur plus de 26 millions de m3. En réalité la
consommation estimée dans ce cadre en 1998 est de 12 millions de m3. Enfin les consommations
pour les besoins des divers services et établissements municipaux de Marseille et des communes
du périmètre seront assurées gratuitement par le concessionnaire, jusqu'à concurrence de 4 200
litres par an et par habitant dénombré au précédent recensement général. L'avantage consenti ici
porte donc sur près de 3,7 millions de m3, et dans le cas où la franchise est dépassée le tarif
appliqué à la collectivité est symbolique.
En effet pour les consommations laissées à leur charge, les communes concernées ne sont pas
redevables de la surtaxe. Les abonnements qui "ne correspondraient pas aux besoins d'un
service municipal au sens strict du terme" feront l'objet d'une concertation entre la ville et la SEM
afin de déterminer le plafond annuel au-delà duquel ne s'appliqueront pas les conditions
préférentielles prévues mais le tarif normal. A l'intérieur de cette catégorie, des abonnements
spécifiques existent : par exemple, la piscine Vallier, 45 616 m3 par an de consommation,
facturation 0. De plus, des cas particuliers de facturation, négociés dans des accords spécifiques,
correspondent à des équipements dont l'identification en tant que service municipal n'emporte pas
l'accord des parties eu égard à la nature de l'activité à caractère "commercial"qu'hébergent ces
sites. Pour ces abonnements dits "mixtes", seule la partie de leur consommation au-delà d'un
certain seuil négocié entre la ville et la SEM, est facturée au tarif normal à l'abonné, le reste étant
comptabilisé dans les consommations des services municipaux. Les rapports techniques et
financiers de la SEM de 1996 et 1997 font état de grandes difficultés de mise en oeuvre de la
facturation de certains abonnements municipaux
Les volumes consommés par les villes du périmètre sont, en 1998, de 20,8 millions de m3, se
répartissant en 19,9 millions de m3 d'eau filtrée et 914 790 m3 d'eau brute. Le produit perçu en
contrepartie de ce service est de 2 687 291 F, correspondant uniquement à la redevance due au
délégataire, soit 0,129 F/m3, ce qui est inférieur au prix de revient estimé de l'eau brute arrivant
aux usines de potabilisation qui est, comme indiqué plus haut, de 0,93 F/m3. Il y a donc transfert
de charge du contribuable à l'usager.
Dans leur réponse les communes du périmètre estiment que cette situation est normale et que si
elles étaient dans l'obligation de s'acquitter des factures d'eau le prix des services rendus s'en
trouveraient majorés d'autant. En outre elles affirment que la loi de 1838 autorisant la déviation de
la Durance vers Marseille leur accordait ce droit. La Chambre ne peut que maintenir cette
observation car d'une part les modifications successives apportées à cette loi ne permettent plus
une telle interprétation et d'autre part un récent arrêt du Conseil d'Etat qui réaffirme que "la
tarification est naturellement régie par le principe de l'égalité des usagers devant le service public
qui exige que pour un même service rendu le tarif réclamé aux usagers soit le même ; et ce tarif,
relatif à des redevances pour service rendu doit en outre respecté une certaine adéquation entre
le coût du service et les sommes réclamées."
1.1.3 La livraison d'eau aux agriculteurs
Les agriculteurs bénéficient d'une tarification particulière en eau brute ou en eau filtrée au
compteur ou encore à l'arrosage périodique. En 1998, 6,6 millions de m3 sur 7 millions ont été
consommés à la vanne. C'est donc ce dernier type de consommation qui sera examiné.
La SEM perçoit 1 363 432 F pour une consommation de 6 610 301 m3 soit un prix de 0,206 F le
m3. Pour mémoire, le prix de vente aux communes du canal est de 0,82 F, soit 4 fois plus alors
que la prestation est identique. Le prix de revient avait été évalué à 0,61 F, on est donc, pour les
agriculteurs, bien en deçà et la "perte" pour le délégataire est de 2,7 MF (0,41 F/m3 *6,6 millions
de m3).
Le même constat peut être fait pour ce qui concerne le montant de la surtaxe. Pour une
consommation de 6,6 millions de m3 la ville ne perçoit que 579 248 F soit 0,08 F par m3 pour un
prix de revient de 0,32 F et un prix payé par les villes du canal de 0,65 F. Le manque à gagner est
de 1,59 MF (0.24 F/ m3* 6,61millions de m3) .
Les agriculteurs, pour ceux qui utilisent l'eau à la vanne, ne paient le m3 que 0,29 F pour un prix
de revient de 0,93 F. Les autres usagers du service se substituent aux agriculteurs pour combler
la différence qui est loin d'être négligeable puisqu'elle se monte au total à 4,3 MF.
1.1.4 La livraison d'eau aux industriels
Les industriels ont une facturation qui comporte une part fixe et une part variable en fonction de
leur consommation avec une différenciation de leur tarif selon qu'ils sont livrés en eau brute ou en
eau filtrée et que leur consommation trimestrielle dépasse un certain cubage. Cette façon de
procéder est conforme aux principes d'égalité des usagers placés dans une situation identique et
aux textes régissant l'eau.
Les abonnements en eau brute ne représentent en 1998 environ 9 % des consommations totales.
Aussi on considèrera, par mesure de simplification sans pour autant introduire une marge d'erreur
importante, que l'eau filtrée et l'eau brute peuvent être confondues au niveau des prix. De plus la
différence de tarification est faible.
La SEM perçoit un total de 14,4 MF, incluant les abonnements, la facturation de l'eau mais
excluant l'entretien/location soit un prix au m3 de 4,33 F (14,4 MF/3 millions de m3). La ville, quant
à elle, reçoit de la SEM, au titre de la surtaxe, 5 MF, soit un prix au m3 de 1,51 F. Le prix payé par
m3 pour les abonnés "industriels" est donc de 5,84 F.
Comme pour les autres catégories d'abonnés déjà examinés, le prix de revient du m3 d'eau filtrée
tel qu'il ressort des déclarations faites par la SEM aux services fiscaux et des données figurant
dans les comptes rendus financiers produits ainsi que des coefficients de fuite est de 4,12 F/m3 ,
dans lequel ne sont pas compris les frais relatifs à la gestion et aux services des abonnements.
En effet, le nombre d'abonnés industriels est faible -161- par rapport aux volumes consommés -
plus de 3 millions de m3. La marge brute est donc pour la SEM de 0,21 F/m3 soit 5 %, ce qui
permet de dégager un résultat brut de 0,7 MF.
Pour la ville, en revanche, il en va autrement si on prend les données du compte administratif qui
fait apparaître des dépenses très en deçà des prévisions. En effet, les frais engagés par la ville ne
sont, pour la part relative à la fourniture d'eau filtrée mis en distribution, que de 18,35 MF pour le
fonctionnement (dépenses réelles, hors amortissements) et de 49,23 MF pour l'investissement (y
compris les emprunts soit un prix du m3 d'eau filtrée mis en distribution de 0,70 F (67,58/96).
Ce prix pourrait être majoré de 25 % pour tenir compte des fuites (pour rester cohérent avec les
données de la SEM qui sont, comme on l'a vu, très pessimistes puisque le coefficient de fuite n'est
que de 15 % sur le réseau de distribution) soit 0,88F/m3. La ville a donc une marge de 0,63 F/m3,
soit un total de 2,1 MF ce qui est important mais résulte principalement du fait que la ville ne
réalise pas tous les travaux qui sont programmés eux-mêmes certainement sous évalués par
rapport aux termes du contrat.
1.1.5 La livraison d'eau aux particuliers
C'est la plus importante tant en volume qu'en produits. Les particuliers ont consommé en 1998
59,2 millions de m3 d'eau, et payé 511,5 MF à la SEM et 35,2 millions au service de l'eau de la
ville de Marseille. L'usager paie donc, en moyenne 8,64 F/m3 au délégataire et 0,65 F/m3 à la
ville, ce qui est proche des tarifs contractuels retenus pour le calcul de la facture de référence sur
la base INSEE qui est de 8,71 F/m3 pour la SEM et 0,56 F/m3 pour la collectivité.
Comme calculé précédemment, le m3 d'eau coûte au service de l'eau de la ville 0,88 F. Il ressort
donc un manque à gagner de 0,23 F par m3, ce qui représente, compte tenu des cubages
consommés, un total de 13,6 MF. Une partie de cette somme trouve sa contrepartie dans le prix
demandé aux usagers du canal de Marseille. En effet, il est rappelé que la ville de Marseille
demandait une surtaxe qui couvrait les frais engagés par elle bien au-delà de ses stricts besoins
et ce à hauteur de 12,8 MF pour 1998. Il en était de même pour les industriels pour 2,1 MF.
Malgré le déficit de la tarification des fournitures d'eau aux agriculteurs (-1,59 MF) il y a un quasi
équilibre les excédents étant de 14,9 MF et les déficits de 15,19 MF, ce qui montre qu'il existe une
prise en charge par certaines catégories d'usagers des tarifications plus favorables faites à
d'autres, ici les abonnés industriels et surtout les communes desservis par le canal compensent
les pertes des "tous usages" et des agriculteurs. De plus si les villes du périmètre s'acquittaient de
leur dû au seul prix de revient, c'est une somme supplémentaire de 17,5 MF qu'il faudrait prendre
en compte.
Pour ce qui concerne le délégataire, le prix de revient de la distribution de l'eau filtrée a été calculé
pour les abonnés industriels (4,12 F), étant fait remarquer que n'étaient pas pris en compte les
frais de facturation avec les dispositions qui leur étaient liées (location et entretien de compteurs
et des branchements et les frais du département commercial), soit un total de 75,217 MF. Le
coefficient de pertes n'étant pas inclus, les cubages pris en considération au cas précis sont les
cubages réellement consommés (chiffres de 59,216 millions de m3 selon le compte rendu
technique) soit 1,27F/m3. Le prix de revient, pour la SEM, d'un m3 d'eau livré aux abonnés "tous
usages" est donc de 5,39 F (4,12 F + 1,27 F) en 1998 pour un prix moyen perçu de 8,64 F/m3
soit un résultat brut d'environ 192 MF. Ce chiffre est à mettre au regard des avantages consentis
aux autres catégories d'abonnés, dont les villes du périmètre, et du résultat brut, donc hors impôts
sur les sociétés et charges liés, affiché par le délégataire qui est de 98,4 MF en 1998.
Dans sa réponse le délégataire fait remarquer, à juste titre, que le système de tarification retenue
(absence de partie fixe) favorise le petit consommateur -sans toutefois préciser à partir de quel
seuil-qui se voit facturer un service en deçà de son prix de revient.
1.2. L'EVOLUTION DES PRIX
Une des causes des tarifs élevés demandés aux usagers vient de l'indexation des prix suivant une
formule complexe qui a abouti à une hausse sur 6 ans (1/1/92 au 1/1/98) de 24,56 % soit 4,09 %
par an, ce qui est nettement au-dessus de l'indice INSEE sur le coût de la vie à la même époque
qui était de 1,72 % par an , et ce malgré la mise en application d'une nouvelle formule de révision
des prix depuis le 1er juillet 1996 qui a eu pour effet en 1997 de limiter à 1,63 % la hausse du prix
de l'eau.
La formule est complexe et ne permet pas un contrôle aisé de son exacte application. Elle a, de
plus, un caractère inflationniste. En effet, la partie fixe est un élément qui permet d'intégrer les
gains de productivité du délégataire et doit être d'autant plus importante que le contrat a une
durée longue. Pour la ville de Marseille, la partie fixe n'est que de 5 % alors que le contrat est de
54 ans (contrat initial de 1960 prolongé jusqu'en 2013 par l'avenant n° 8). Le coefficient le plus
inflationniste est le coefficient correctif "Kv" qui permet, pour le délégataire, de pallier les effets
néfastes de la baisse des consommations et de la hausse du nombre des abonnés.
Cependant depuis 1996 une nouvelle formule d'indexation est prise en compte. Elle constitue un
progrès par rapport à la précédente même si l'on peut regretter le maintien de l'indice complexe S
prenant en compte les salaires tels qu'ils résultent du contrat indexant les salaires des personnels
du délégataire sur ceux de la fonction publique territoriale, excluant le coefficient Kv et intégrant
une partie fixe de 12 % mais le coefficient "Kc" disparaît étant un modérateur (prise en compte
des annuités d'emprunt qui lui étaient "transférés" à la SEM).
Cette nouvelle formule n'a pas fait l'objet d'un avenant au contrat et les autres collectivités du
périmètre n'ont pas été associées aux négociations. Elle s'applique donc sans base contractuelle
par simple entente tacite entre les parties.
2. LES REDEVANCES DIVERSES
2.1. GENERALITES
La facture de l'eau sert de support à de nombreuses redevances et taxes. La principale est la
redevance assainissement qui est perçue pour le compte de la ville de Marseille qui gère ce
service et qui a été examiné à cette occasion. La plus classique est la TVA, dont le taux est de 5,5
% et n'appelle pas de commentaire particulier.
Le fonds national pour le développement des adductions d'eau (FNDAE) constitue une redevance
modeste de 0,14 F par m3. C'est le ministère de l'agriculture qui est le bénéficiaire de cette
redevance dont la base est l'ensemble des volumes facturés d'eau potable avec un tarif dégressif
(0 à 6 000 m3, 6 001 à 21 000 m3, 21 001 à 48 000 m3 et au-delà de 48.000 m3) Les sommes
perçues à ce titre par la SEM sont de 8 184 851 F en 1998.
Deux autres redevances sont perçues selon des modalités spécifiques pour l'agence de l'eau : la
redevance prélèvement et la redevance pollution.
2.2 LA REDEVANCE PRELEVEMENT.
L'agence de l'eau perçoit auprès de la SEM une redevance pour prélèvement d'eau dans la
ressource et pour modification du régime des eaux. La redevance correspondante est constituée
de différents termes : captages, consommation et eau potable. Chacun de ces éléments est assis
sur une assiette annuelle constituée par le volume prélevé dans le milieu naturel (Durance et les
deux forages -Aubagne et les Houillères-) et à un taux fixé par l'agence. Cette redevance est
calculée pour chaque collectivité concernée et adressée chaque année à la SEM. Pour le
prélèvement dans le Verdon, la SEM reverse à la SCP la part qui lui est dû. Ainsi en 1998, la
facture émise par l'Agence de bassin s'élevait à 33 547 772 F auquel il faut ajouter 4 052 913 F
dus à la SCP à ce titre, soit un total de 37 600 685 F.
C'est à la SEM de répercuter sur l'usager cette redevance et d'en fixer le montant. En 1997 elle a
perçu auprès des usagers la somme de 37,446 MF alors que sur le compte rendu financier produit
à la collectivité il est mentionné la somme de 35,666 MF. La SEM encaisse moins qu'elle ne verse
au titre de la redevance prélèvement ce qui ne pourra conduire, pour 2000, qu'à une
augmentation de la dite redevance de l'ordre de 6 % si la redevance prélèvement reste fixe.
L'article 28 de l'avenant n° 9 indique de façon non ambiguë que le délégataire est autorisé à
vendre l'eau aux tarifs de base indiqués au présent article auxquels s'ajouteront d'une part la
surtaxe et d'autre part les divers droits et taxes additionnels au prix de l'eau.
La redevance prélèvement et toute autre redevance due par la ville ou la commune concernée à
l'Agence de bassin et aux établissements spécialisés créés en application de la loi seront
facturées aux usagers sauf si la ville ou la commune concernée les prend en charge. La SEM,
dans sa tarification, pratique des prix différents selon qu'il s'agit d'eau brute ou filtrée et selon les
catégories d'usagers contrairement à ce qui se passe pour la redevance pollution. En 1999, pour
les abonnés "tous usages" en eau filtrée, la redevance prélèvement est de 0,4201 F/m3 alors que
pour l'eau brute elle n'est que de 0,3512 F/m3. Pour les industriels, cette redevance est de 0,2856
F/m3 en eau filtrée et 0,23 F/m3 en eau brute. Pour les agriculteurs, elle est de 0,2687 F/m3 pour
l'eau filtrée et 0,1999 F/m3 pour l'eau brute et 410,57 F par demi-litre seconde pour les arrosages
périodiques. En ce qui concerne la redevance prélèvement le montant, pour les abonnés les plus
nombreux c'est à dire "tous usages", est passé de 0,076 F/m3 en 1991 à 0,4201 F/m3 en 1998
soit un prix multiplié par 5,5.
Pour les abonnements municipaux, le volume retenu est celui de la redevance d'assainissement,
avec un calcul spécifique pour les jauges ce qui revient à ne soumettre à cette redevance que 2,7
millions de m3 en 1998 alors que les consommations sont d'environ 21 millions de m3 d'eau.
Cette situation revient à faire supporter une nouvelle fois des charges supplémentaires aux
usagers alors qu'elles incombent aux contribuables et ce pour un montant approximatif de l'ordre
de 7,6 MF, soit 20 % du total de cette redevance.
2.3 LA REDEVANCE POLLUTION
La loi du 16 décembre 1964 modifiée autorise l'Agence de bassin à percevoir des redevances
annuelles en fonction de la quantité de pollution produite par les personnes publiques ou privées.
Pour les collectivités locales, le montant de la redevance est fonction de la population permanente
et saisonnière, du coefficient d'agglomération, du coefficient de collecte et d'un taux par habitant.
L'agence de bassin peut ainsi calculer le montant de la redevance qui est due par chaque
collectivité et, en fonction du volume d'eau facturé et des moins-perçus des années antérieures,
en déduire une contre-valeur en F/m3 qui s'applique à tous les usagers soumis à cette redevance
contrairement à ce qui se pratique pour la redevance prélèvement ou c'est le service ou son
délégataire qui calcule le montant à percevoir auprès des usagers.
Tous les usagers ne sont pas soumis à cette redevance. Il en est ainsi de certains industriels qui
l'acquittent directement à l'agence de bassin, des agriculteurs qui utilisent l'eau pour des besoins
d'arrosage et donc, théoriquement, ne polluent pas, des abonnés pour espaces verts (depuis peu)
Par contre les abonnés "incendie" y sont soumis, sans justification réelle.
De 1991 à 1999 la redevance pollution a, pour la ville de Marseille, évolué dans des proportions
importantes passant de 0,54 F/m3 à 1,96 F/m3 soit un coefficient multiplicateur de 3,6. La période
de hausse la plus importante se situe entre 1992 et 1995 avec une stabilisation à partir de 1996.
La SEM a perçu en 1997 118,235 MF au titre de cette redevance pour le périmètre de Marseille et
a versé une somme de 118,9 MF à l'agence de bassin. Le contrat concerne plusieurs communes
qui ne sont pas regroupées en syndicat ce qui ne permet pas de profiter de la possibilité d'avoir un
tarif unique pour la redevance pollution. Il peut être ainsi constaté des disparités importantes entre
communes placées dans une même situation. Ainsi pour Marseille la contre-valeur est de 1,96
F/m3 en 1999, alors qu'elle n'est que de 1,38 F/m3 à Aubagne.
3. LA REMUNERATION DES COLLECTIVITES
3.1. GENERALITES
Le contrat de délégation de service public étant un contrat de type affermage, avec obligation pour
le délégataire de réaliser une partie seulement des équipements à savoir les renouvellements qui
s'imposent, c'est à bon droit que la collectivité, ici les communes du périmètre, perçoivent une
surtaxe sur les usagers pour financer les amortissements techniques des biens qui sont sa
propriété et ne sont pas à renouveler, autofinancer les équipements nouveaux à réaliser, effectuer
les opérations d'entretien qui sont à sa charge et pourvoir aux charges de fonctionnement
inhérentes à ce service. Un budget annexe de ce service s'impose donc permettant de retracer
ces opérations et mettant l'assemblée délibérante en mesure de fixer le montant de la surtaxe
nécessaire pour atteindre l'équilibre en fonction des objectifs qu'elle s'est fixée.
Le contrat est intitulé "concession". Cette appellation n'est pas neutre et elle est
systématiquement reprise par les différentes parties. Il ressort des comptes rendus de réunions
concernant en particulier l'avenant n° 9, que pour les participants, il était exclu que ce contrat
puisse être interprété autrement, ce qui permettait en particulier, de ne pas mettre en place un
budget "eau". Ainsi n'étaient pas pris en compte les amortissements à la charge de la collectivité
et leur nécessaire financement. Le montant de la surtaxe n'avait donc pas à être soumis au vote
de l'assemblée délibérante et le service de l'eau pouvait rester embryonnaire, ce qui permettait,
entre autre, au service financier de la ville de répartir les enveloppes budgétaires indispensables
au fonctionnement a minima de ce "service". En effet, la M49 précise que lorsqu'il y a concession
il ne doit pas y avoir budget de ce service.
Le contrat est en fait un contrat de type "affermage" avec des îlots "concessifs".
Incontestablement le délégataire doit réaliser, financer, entretenir et remettre à l'issue du contrat
un certain nombre d'équipements comme, par exemple, les compteurs des abonnés "tous
usages" les plus nombreux, les turbines etc...L'usage considère que les équipements qui doivent
faire l'objet d'un renouvellement en cours de contrat et qui ne l'ont pas encore été font partie du
domaine concédé c'est le cas pour les réseaux de distribution d'eau filtrée qui auront plus de cent
ans en 2013 et de certains branchements.
En revanche le renouvellement d'autres équipements est de l'entière responsabilité de la
collectivité comme par exemple les réservoirs de toute sorte, le canal de Marseille, le gros oeuvre
des bâtiments, les usines de potabilisation et les canalisations et branchements ne rentrant pas
dans le champ de compétence du délégataire, la réalisation des équipements nouveaux etc...
Les collectivités du périmètre auraient dû en tirer les conséquences et établir un budget annexe,
qui est obligatoire, permettant d'intégrer à leur bilan les équipements dont elles ont la
responsabilité, de suivre comptablement les opérations effectuées directement ou non par ce
service, de fixer le montant de la surtaxe qui leur est nécessaire pour atteindre l'équilibre financier.
3.1.2 L'autorité délégante.
La délégation concerne, pour l'alimentation en eau, le canal de Marseille qui est propriété de la
seule ville de Marseille et dans ce cadre c'est elle qui est l'autorité délégante. Pour la
potabilisation et la distribution de l'eau, ce sont les villes du périmètre qui sont concernées. Mais il
est impossible de déterminer l'autorité délégante d'autant plus que , si la ville de Marseille a en
charge -de facto-les installations d'intérêt général et ses propres installations d'intérêt local, les
autres communes ont leur propre patrimoine en matière de distribution d'eau comme le précise le
protocole signé entre les collectivités du périmètre. Cependant, et sans aucune base juridique, la
ville de Marseille se comporte comme étant le délégant.
3.2. LES COMMUNES DU PERIMETRE AUTRE QUE MARSEILLE.
Les observations faites à chacune des communes peuvent, pour la plus part d'entre-elles, être
généralisées aux autres.
3.2.1 Commune des Pennes-Mirabeau
Il n'existe aucun budget du service de l'eau retraçant les opérations des deux sections du service
comme pour les autres communes du périmètre. Des opérations en propre sont effectuées pour la
deuxième section dont le montant n'est pas connu car elles sont retracées dans le budget
principal de la commune. Toutefois, cette commune a reçu du délégataire une surtaxe de 59
857,13 F en 1995, 63 517,8 F en 1996, 66 882,28 F en 1997 et 69 617,42 F en 1998 qui a été
fixée conformément aux dispositions du contrat. Le pourcentage du montant de la surtaxe perçue
sur les volumes consommés par les usagers de la commune n'a pas varié durant cette période
alors que le contrat prévoyait qu'à partir de 1995 il pouvait y avoir réajustement fixé par simple
accord.
Un autre financement existe, c'est le reversement des contributions aux dépenses d'équipements
publics que perçoit la SEM pour le compte des communes. A ce titre la ville des Pennes-Mirabeau
a perçu : 368 650 F pour l'année 1995, 106 787 F pour 1996, 188 460 F en 1997 et 92 879 F pour
1998. Par contre, il n'est pas possible de connaître le montant de la TVA reversée par le
délégataire à la commune.
Faute de budget du service de l'eau, il est impossible de savoir s'il existe un transfert de charge
entre le service de l'eau et le budget principal, s'il y a eu transfert d'actif et si les amortissements
techniques ont bien été pratiqués. En effet, au moins les équipements d'intérêt local qui ne sont
pas ou plus renouvelables avant la fin du contrat doivent figurer à l'actif du service de l'eau et être
amortis selon les règles usuelles en la matière. Selon les comptes rendus du délégataire, il y a eu
des travaux d'extension du réseau (300 ml de conduites de diamètre 150 mm en 1996) et il est
prévu, au titre des travaux d'intérêts locaux, des montants de l'ordre de 350 à 400 000 F par an. Si
ces travaux sont effectivement réalisés, il faudra constater une absence d'équilibre (203 330 F de
ressources en moyenne sur les cinq derniers exercices pour 354 000 F de dépenses prévues en
moyenne). Outre un transfert de charge probable, il y a absence d'information du conseil
municipal qui ne peut faire de lien entre le compte rendu de l'exécution du service qui propose un
programme de travaux à réaliser et le document budgétaire qui lui permet de savoir si les
réalisations sont conformes aux prévisions et comment sont couvertes les dépenses.
Autre anomalie, l'assemblée délibérante n'a aucune information sur la façon dont les travaux qui
doivent être exécutés au titre des travaux dits d'intérêt général, prévus dans la programmation
établie par le délégataire, portés dans le compte rendu et financés en partie par les 85 % de la
surtaxe payée par les usagers de la commune des Pennes-Mirabeau, sont effectivement réalisés.
En effet la ville de Marseille est seule compétente en la matière et ils sont portés dans son budget
sans distinction d'intérêt local ou général.
Enfin, comme pour toutes les communes du périmètre, la commission consultative prévue par
l'article L2143-4 du Code Général des Collectivités territoriales, n'a pas été mise en place, car "le
service public local de l'eau n'est ni exploité en régie, ni dans le cadre d'une convention de gestion
déléguée.
3.2.2 Commune de Septèmes-les-vallons
Les mêmes observations peuvent être faites pour cette commune, les réponses étant identiques
sur la plupart des points (état du patrimoine, amortissements, manque d'information sur la
réalisation des travaux d'intérêt général etc...). L'équilibre d'un compte reconstitué de ce service,
qui fait apparaître, à juste titre des dépenses de fonctionnement, est, à priori, structurellement
excédentaire si la participation au titre de travaux d'intérêt "mixte" (1 242 533 F en 1995) n'est pas
prise en compte. Cependant il est artificiel car il provient de la prise en compte par le délégataire,
et donc par l'ensemble des usagers, des remboursements d'emprunts que la collectivité avait
souscrits pour son service d'eau. Les annuités s'élevaient à 340 058 F dont 75 713 F pris en
charge par le Conseil Général en 1993 et du même ordre de grandeur pour les autres années.
Cette commune fait apparaître une récupération de TVA. Ce service est effectivement soumis à
TVA, ce qui nécessite la tenue d'une comptabilité spécifique permettant de s'assurer que les
opérations soumises à remboursement de TVA peuvent effectivement y être. Ce remboursement
de TVA se fait par l'intermédiaire du délégataire ce qui est prévu par le contrat à l'article 43 -6°
alinéa et suivants-. Cependant il n'y en a pas trace sur le compte de la délégation alors que des
délais stricts, qui peuvent être sanctionnés en cas de non-exécution, sont imposés.
En 1994, des travaux ont été réalisés visant à renforcer une station de pompage qui se trouvait
sur la commune ainsi que la canalisation d'aspiration. Ces travaux ne sont pas en totalité d'intérêt
local ni entièrement d'intérêt général. Ils entrent dans la catégorie des "travaux concernant des
ouvrages d'intérêt général et qui sont d'intérêt local ou mixte". Ils sont programmés d'un commun
accord et le financement se fait en partie par la ville de Marseille et pour le reliquat par la
commune concernée sous forme de fonds de concours dans la limite d'une enveloppe égale au
montant des produits des contributions fixées par chacune des communes concernées au titre des
dépenses d'équipements publics. La réunion du 17 février 1994 a fixé la participation de la
commune de Septèmes à 1 235 000 F, somme effectivement réclamée (1 242 533 F) en avril et
juin 1995 pour le solde des marchés. Or il n'a été perçu que 47 776 F en 1996 et 13 412 F en
1995 au titre de la contribution aux dépenses d'équipements publics et la moyenne annuelle sur
les 6 dernières années n'est que de 49 000 F. Force est donc de constater que le protocole n'est
pas respecté ce qui ne fait que mettre en valeur le fait que ce document de circonstance, permet,
du fait de sa rédaction imprécise et de la difficile frontière entre l'intérêt local et l'intérêt général, de
faire supporter par les communes du périmètre des charges indues qui devraient l'être par la ville
de Marseille.
3.2.3.Commune de la Penne-sur-Huveaune
Des remarques identiques à celles déjà faites pour les deux autres sont à formuler pour cette
commune.
3.2.4 Commune d'Aubagne
Cette collectivité est la plus importante du périmètre hors Marseille avec 41 187 habitants
(recensement 1990) et 5 175 356 m3 d'eau vendus en 1997 dont 3 168 768 à usage domestique.
Les recettes de ce service ont été de 663 654 F en 1996 et 990 907 F en 1997, la part provenant
de la surtaxe est de l'ordre de 410 000 F (moyenne des deux années en cause), et les dépenses,
uniquement pour l'investissement, de 881 886 F HT en 1996 et 885 000 F HT en 1997 (prévision).
Les charges d'investissement semblent être équilibrées par les recettes.
Les communes du périmètre auraient du, dans leurs comptes, intégrer le patrimoine
correspondant. En 1997, le trésorier de la ville d'Aubagne n'a d'ailleurs pas hésité à abonder le
compte 21531 -réseau d'adduction d'eau- d'une somme de
83 979,97 F correspondant à des travaux d'extension du réseau d'eau financés par la commune
bien que cette ligne soit vierge de toute inscription en balance d'entrée. Les réseaux dits "d'intérêt
local", que ce soit pour la ville de Marseille ou pour les autres communes, ne figurent à aucun
bilan alors qu'ils sont propriété des villes du périmètre. Ils doivent figurer au compte 24 pour ceux
qui doivent faire l'objet d'un renouvellement avant la fin du contrat comme le prévoit l'instruction
M14 applicable au cas présent par défaut de budget annexe et au compte 21 pour ceux qui ne
doivent pas être renouvelés au cours de cette période ou qui ont déjà été renouvelés depuis 1992
(année de début de cette obligation par la SEM). Ainsi n'est pas prise en compte la question des
amortissements techniques du réseau. Mais n'est pas évoqué non plus la prise en charge de la
TVA qui est récupérée ni des frais de fonctionnement du service, certes minimes, mais réels.
L'absence de budget du service de l'eau ne permet pas de connaître la réalité des mouvements
financiers et donc de l'exact montant de la surtaxe.
Le rapport annuel 1997 sur le prix et la qualité du service public de l'eau ne correspond pas aux
termes du décret 95-635 car les communes n'agissent ni comme communes gérant directement
ou en le délégant un service de l'eau ni comme faisant partie d'une structure intercommunale alors
qu'elles sont tenues d'assurer certaines prestations (les renforcements, les extensions de réseau
etc..). De plus, au cas particulier, si les travaux effectués en 1997 apparaissent bien il n'y est pas
indiqué de montant correspondant.
3.2.5 La prise en compte des emprunts
L'article 3 de l'avenant n° 9 précise que : "Le concessionnaire gardera à sa charge le
remboursement aux communes appartenant au périmètre des annuités correspondant aux
emprunts qu'elles ont contractés par le passé, pour le service de l'eau, selon les échéanciers
récapitulés à l'annexe V du cahier des charges ci-après." Chaque année, il figure dans les
comptes de la SEM une ligne qui retrace ce remboursement d'annuités.
Cependant les sommes y figurant ne correspondent pas avec les échéanciers de l'annexe V pour
deux raisons, la première est qu'il n'est pas prévu le remboursement du prêt de 3 MF souscrit par
la commune des Pennes-Mirabeau en 1991 et dont l'annuité est de 398 935 F (plus du dixième de
la somme totale) et la seconde est que certains prêts bénéficient de subventions du département
ce qui renchérit d'autant les charges du service. Ainsi pour la commune de Septèmes-les-Vallons
en 1992, le conseil général a versé 75 229 F de subventions pour un total d'annuités de 354 110 F
et dont il n'est pas tenu compte dans le calcul de la SEM.
3.3 LA VILLE DE MARSEILLE
3.3.1 Généralités
La ville de Marseille n'a mis en place un budget annexe pour le service de l'eau que depuis 1997.
La situation antérieure permettait à la ville de récupérer l'excédent des comptes relatifs à l'eau au
profit du budget principal. La DSC a toujours voulu que le patrimoine du service soit évalué à
minima ainsi que les amortissements. En effet, dans la mesure où les surtaxes et contributions ont
été fixées à un niveau suffisant pour couvrir les charges de remboursement d'emprunts et le
financement de quelques ouvrages neufs, une dotation aux amortissements dépassant les stricts
besoins nécessaires à la couverture des remboursements de la dette semblait inopportune.
3.3.2 Les comptes du service de l'eau
Il n'y a de comptes qu'à partir de l'exercice 1997, et pendant l'instruction, le compte de gestion du
comptable pour 1998 n'avait pas encore été produit et seul le budget primitif pour l'année 1999 a
pu être fourni. Malgré l'indigence des documents, il peut être fait une esquisse d'analyse qui
portera sur les grandes masses financières en jeu, une comparaison entre le prévu et le réalisé, le
patrimoine et la prise en compte de la TVA.
Le premier exercice, 1997, a été une année de mise en place du budget annexe avec les
mouvements d'ordre qui s'imposaient en particulier en investissement. En outre il y a eu des
réaménagements de dettes ce qui ne facilite pas la nécessaire synthèse de ces documents
budgétaires qui ne doivent pas faire apparaître les mouvements d'ordre.
3.3.2.1 Les grandes masses du budget.
En ne prenant que le compte administratif de 1998, le total des dépenses réelles a été de 86,5
MF, dont 64 en investissement et 22,5 en fonctionnement. Le total des recettes réelles, de 125 MF
dont 113,3 de produits venant directement de la vente de l'eau (surtaxe, participation aux
dépenses d'équipements et redevance d'occupation du domaine). L'excédent de cet exercice est
de 43,2 MF, celui de l'année 1997 était de 19,3 MF. Celui ci provient, d'une part de la prise en
charge par la SEM d'une bonne partie des emprunts du service (annuité estimée à 27 MF selon le
compte de la délégation) et à la non-réalisation des investissements programmés (59,7 MF en
1997 et 61,5 MF en 1998 hors études). Les charges financières sont de 72 MF en 1998 soit 83 %
des dépenses, les investissements réels n'en représentent que de 10 %.
3.3.2.2 Comparaison entre le prévu et le réalisé.
La section de fonctionnement a été largement surévaluée sur pratiquement tous les postes de
dépenses ce qui témoigne du manque de maîtrise des prévisions budgétaires de ce service et
montre qu'auparavant il n'y avait pas d'évaluation de son coût. Par contre il n'en est pas de même
pour les recettes, en effet si sur le compte 70 (ventes de produits fabriqués, prestations de
service, marchandises), l'écart constaté est de 5 MF il provient de l'article 704 "contributions aux
dépenses d'équipements publics", les recettes provenant de la SEM sont mieux connues.
En ce qui concerne la section d'investissement, qui figurait, au moins en 1997 en HT, si les
dépenses au compte 16 "emprunts et dettes assimilées" sont conformes aux prévisions, il n'en est
pas de même pour le compte 23 "immobilisations en cours" où il n'y a eu que 8,6 MF de réalisés
pour 33,7 MF de prévus. On ne peut que constater un retard préjudiciable dans la réalisation des
travaux pouvant nuire à terme à la qualité du service.
3.3.2.3 Le patrimoine.
La balance de sortie du compte de gestion 1997 fait apparaître au compte 21 "immobilisations
corporelles" un total de 1 357,4 MF. Or le contrat de délégation dans son annexe VI indique que le
total du patrimoine du périmètre du canal de Marseille est de 8 617 MF (valeur TTC 1991). Il sera
noté que ne figurent pas les réservoirs. La différence de 7 260 MF, à supposer comme cela doit
être le cas, que les deux montants soient TTC, et en étant conscients du fait qu'une partie du
patrimoine appartient aux autres communes du périmètre (ouvrages d'intérêt local) provient d'une
part du fait que la ville n'a pas voulu transférer la totalité des immobilisations du service de l'eau
pour minimiser le montant des amortissements techniques afin de ne pas augmenter ses charges
et d'autre part de la non prise en compte des immobilisations devant être renouvelées au cours du
contrat, l'instruction M49 qui s'applique au budget annexe de l'eau ne prévoyant pas,
contrairement a ce qui se passe pour la M14, de chapitre pour les immobilisations concédées.
En 1998, les équipements soumis à amortissements avaient une valeur de 356,87 MF et le
montant des amortissements de l'exercice n'était que de 8,3 MF, ce qui était néanmoins un
progrès par rapport à l'exercice 1997 où le montant des équipements soumis à amortissements
n'était que de 305,44 MF et le montant des amortissements techniques de 7,1 MF. Ces
amortissements ne couvrent pas, et de loin, le montant en capital des annuités d'emprunt qui sont
de 55,5 MF, le délégataire prenant en outre en compte 230 MF d'emprunts de la ville et des
emprunts contractés par la SEM pour le compte des villes de Marseille et d'Aubagne (34,6 MF)
soit une charge supplémentaire en capital et intérêts de 31,6 MF telle que comptabilisée par la
SEM.
Enfin il convient de signaler que la logique des dépenses de renouvellement telles qu'elles ont été
définies dans le cadre des concessions veut qu'elles soient financées d'une part par les
amortissements techniques pratiqués et d'autre part par les provisions pour renouvellement qui
sont effectuées. La notion de renouvellement consiste dans l'engagement de procéder au
remplacement du bien à l'identique afin de permettre la continuité de l'exploitation ou le maintien
d'un niveau de production donné. Dans la pratique il s'agit de remplacer les équipements qui ont
atteint leur durée de vie technique. Il convient de signaler que la durée de vie réelle peut être plus
grande que prévue ou au contraire plus courte du fait de la qualité des matériaux utilisés, de
l'agressivité ou non de l'eau et du sous-sol. De ce fait l'exécution d'un plan de renouvellement est
délicate.
Pour le service de l'eau de Marseille le délégataire a, contractuellement, des obligations de
renouvellement de certains équipements -réseau de distribution et les branchements qui
atteindront avant la fin du contrat leur durée de vie présumée-, il se comporte dans ce cadre
comme un concessionnaire. Il est tenu, selon les pratiques en vigueur et généralement admises
en particulier par les services fiscaux, de faire des provisions dont le montant est calculé, pour les
biens renouvelables pendant le contrat, à partir du coût estimé des travaux à réaliser. Il résulte de
ce qui vient d'être dit que tous les équipements, qui ne sont pas compris dans les îlots concessifs
y compris les réseaux et branchements dont le renouvellement n'est pas prévu au terme du
contrat ou qui a été réalisé, doivent faire l'objet d'une prise en compte dans le compte 21 de la
comptabilité du service et donc faire l'objet d'amortissements selon les règles habituelles.
La mise en place des plans quinquennaux de travaux, certes indispensables, ne peuvent pallier la
carence d'un plan de renouvellement à l'identique de celui fait par le délégataire permettant de
prendre en compte tous les équipements qui ne font pas partie de l'obligation contractuelle par
nature ou parce que devant s'effectuer après la fin du contrat. Il pourrait ainsi être chiffré le
montant des éventuelles provisions à faire pour compléter le montant des amortissements
techniques afin de répondre aux exigences de la continuité du service public.
Dans sa réponse la ville de Marseille confirme les observations faites et indique qu'il convient
encore de régulariser la prise en compte du patrimoine. Elle précise que le budget doit prendre en
compte les investissements figurant dans les plans prévisionnels ainsi que le tableau d'extinction
de la dette ce qui permettra d'envisager le niveau de la surtaxe. La Chambre a pris acte de ces
intentions.
3.3.2.4 La TVA
La mise en place du budget annexe de l'eau s'est accompagnée d'une hésitation concernant la
façon de prendre en compte la TVA. En 1997, au motif que ce service est soumis à la TVA, le
budget est établi HT. Le comptable a enregistré les mouvements financiers respectant la décision
de la collectivité, c'est à dire en ouvrant un compte de la classe 4 qui enregistre les mouvements
de TVA. A ce jour une somme de 3,26 MF figure toujours dans les comptes du comptable, ce qui
représente un manque à gagner pour la collectivité.
C'est la SEM, selon le contrat qui est assujettie et qui est l'intermédiaire obligée des services
fiscaux permettant la récupération de cette taxe pour les travaux. Aussi la ville a, depuis 1999
seulement, pris conscience de cet état de fait et est en train de régulariser cette situation.
4. LA REMUNERATION DU DELEGATAIRE
La rémunération du délégataire a été fixée sur des critères non connus par la ville, la négociation
qui a conduit à l'avenant n° 9 n'ayant à aucun moment porté sur ce point, l'ancien prix étant
considéré comme acquis et devait correspondre selon la ville de Marseille à une juste contrepartie
des services du délégataire, il s'agissait seulement de l'actualiser. Depuis, il n' a pas été remis en
cause, faisant observer toutefois que, par accord tacite entre le maire de Marseille et le PDG de la
SEM, la formule de révision des prix a été modifiée de façon substantielle au bénéfice des
usagers depuis 1997 comme cela a déjà été dit.
Le législateur a voulu que l'usager, certes indirectement, puisse se faire une opinion sur le coût du
service rendu. Cette information doit lui permettre d'agir auprès des personnes qu'il a élues afin
d'obtenir les explications qui s'imposent et éventuellement les mesures qui seraient à prendre
pour remédier à ce qu'il pourrait considérer comme étant anormal. Dans cet esprit, et en
application des dispositions contenues à l'article L1411-3 du CGCT, la SEM produit chaque année
depuis 1995 un compte rendu technique et financier du "service d'adduction et de distribution
d'eau dit du canal de Marseille". Conformément aux dispositions de l'article précité, les documents
relatifs à l'exploitation du service de l'eau sont mis à la disposition du public dans les locaux de la
Direction de l'Eau et de l'Assainissement (DEA).
Mais la ville n'a pas pour autant, et contrairement à ce qui se pratique habituellement, accepté
sans contrôle les documents produits (1) car le compte rendu financier, faute de précision dans le
contrat, n'est pas, dans sa forme, exempt de critiques (2) ; et l'examen des comptes, tant en
recettes qu'en dépenses, fait apparaître un certain nombre d'anomalies qui seront détaillées ci-
après (3).
4.1. L'EXAMEN DES COMPTES PAR LA VILLE DE MARSEILLE
La ville a, bien avant l'obligation légale de 1995, demandé à un expert comptable de lui faire un
rapport sur les comptes de la SEM. Jusqu'à l'exercice 1994 un cabinet d'expertise comptable
marseillais avait reçu mission d'examiner les comptes de la SEM dans le cadre de l'article 2 du
décret-loi de 1935 (articles R324-2 et suivants du code des communes) et de l'article 45 du cahier
des charges annexé au contrat de 1960.
Ce contrôle était nécessaire car il permettait à la ville de s'assurer que les sommes que devait lui
verser la SEM étaient conformes à la réalité en particulier sa quote-part sur les bénéfices. Puis à
partir de 1992 il sera fait référence à l'article 53 du cahier des charges résultant de l'avenant n° 9,
qui précise que seuls les comptes rendus annuels et compte d'exploitation que doit produire le
délégataire selon les termes du contrat pourront faire l'objet d'un contrôle de la part du délégant.
La lettre de mission de l'expert-comptable précise ce que la ville entend faire examiner à savoir la
vérification des comptes dans le cadre du contrat de concession Ville/SEM et la détermination de
la "vérité du prix" de l'eau à partir de l'approfondissement et de la vérification des comptes de la
SEM (notamment dans sa comptabilité analytique). Après 1994 cette mission sera confié à un
autre cabinet.
Les rapports produits par ces cabinets à la ville sont complets et sans complaisance vis à vis de la
SEM. Ils donnent à la ville une bonne vision sur la santé économique du "groupe SEM" et de
l'impact de la délégation de la ville de Marseille dans les comptes de cette société. La qualité des
documents produits et la continuité de ces rapports malgré un changement de cabinet font qu'ils
peuvent servir de base à une analyse du compte rendu financier produit par le délégataire. Il faut
noter en outre que la connaissance des comptes de la société a permis aux experts désignés par
la ville de pouvoir étudier la façon dont le rattachement à la comptabilité générale des données
figurant dans le compte financier de la délégation pouvait se faire ou non et comment se faisait la
répartition des charges entre les différents contrats du même type gérés par la SEM.
Dans sa réponse la ville produit les travaux faits par son expert sur les comptes de la délégation
pour 1998 qui font apparaître les mêmes anomalies que celles déjà signalées. Une étude
spécifique sur le renouvellement des installations a été faite permettant en particulier de faire une
simulation bilantielle en fin de contrat. Une telle démarche, peu courante, ne pourra que profiter
aux usagers et doit être encouragée.
4.2. LES COMPTES D'EXPLOITATION DE LA DELEGATION
L'article 49 du cahier des charges résultant de l'avenant n° 9 impose au délégataire de produire
chaque année avant la fin du premier semestre un compte rendu technique et un compte rendu
financier qui suit l'exercice considéré. La non-production de ces documents entraîne une sanction
financière. En 1992 et 1993 un compte rendu technique a bien été produit mais aucun compte
rendu financier. Certes la ville a pu procéder au contrôle des comptes de la SEM et des éléments
étaient produits concernant les comptes de la délégation mais de façon éparse. Il est regrettable
que la ville n'ait pas insisté auprès du délégataire pour obtenir ce document, voire en le
sanctionnant (1 % des recettes du concessionnaire soit 4,96 MF pour 1993.) La loi l'imposera à
partir de 1994 et il sera alors produit.
Le compte de l'exploitation produit par le délégataire est du modèle imposé par le Syndicat
Professionnel des Distributeurs d'Eau (SPDE) que la Chambre a dénoncé à de nombreuses
reprises tant dans la forme que dans le fond. Le contrat étant muet sur le type de compte à
produire et ne faisant pas référence à un compte prévisionnel qui aurait eu pour mérite de pouvoir
faire des comparaisons entre le prévisionnel et le réalisé, il a pour seul objectif le compte rendu
financier retraçant la façon dont le contrat se déroule selon le délégataire.
Les comptes de la délégation s'inscrivent dans les obligations comptables que doivent respecter
toute société commerciale telles que prévues par les articles 8 à 17 du code du commerce et être
conformes au plan comptable général de 1982. L'instruction M49 précise même que : "Pour les
services affermés, les opérations de recettes et de dépenses sont décrites par le fermier dans des
comptabilités annexes à sa propre comptabilité." Or tel n'est pas le cas car il existe des charges
dites "économiques", sans qu'une définition ait été donnée à ce sigle, qui ne peuvent être
rattachées directement aux comptes sociaux de l'entreprise comme les "garanties pour
renouvellement", les annuités des emprunts repris aux collectivités et les charges relatives aux
investissements contractuels (versement de 230 MF au début de contrat). Cette pratique, d'après
le délégataire, a pour but de lisser sur la durée du contrat des charges à caractère variable évitant
ainsi de faire apparaître des variations de résultat trop importantes d'une année sur l'autre mais
présente l'inconvénient majeur de ne pouvoir les rapprochées de la comptabilité de l'entreprise.
Chacune de ses charges sera analysée en son temps. De plus les méthodes de leur prise en
compte varient d'un exercice à l'autre ne respectant pas le principe comptable de la continuité des
méthodes.
La répartition des frais communs entre plusieurs contrats peut se faire selon plusieurs méthodes.
La clef de répartition utilisée varie dans le temps (permanence des méthodes) et selon la nature
des frais à répartir. Ces points seront également traités ultérieurement.
Le délégataire indique dans sa réponse qu'aucun texte n'est venu préciser le contenu de ce type
de compte et que dans l'annexe du plan comptable général il était rendu possible des différences
d'incorporation entre comptabilité générale et comptabilité économique en particulier pour que les
calculs de coûts et des résultats fournissent des valeurs correctes du point de vue économique.
La Chambre fait remarquer que cette possibilité est offerte en comptabilité prévisionnelle pour
déterminer un coût et que cette méthode pourrait être reprise dans un compte prévisionnel
contractuellement défini et qui pourrait servir de base au compte du délégataire.
Pour le délégataire le résultat courant est confortable et en progression constante au cours des 4
années sous revue, passant de 53,434 MF en 1995 à
98,362 MF en 1998 soit 84 % de hausse alors que les produits revenant au délégataire passent
pendant la même période de 537,365 MF à 574,216 MF soit un peu moins que 7 %. La marge
brute donc hors impôt sur les sociétés et participation des salariés, passe ainsi de 9,9 % à 17 %
en ne reprenant que les chiffres produits par le délégataire et avant toute analyse des postes de
ce compte. Ce contrat est donc, de l'aveu tacite du délégataire, profitable au groupe SEM.
Le compte retrace la totalité des produits et des charges liés au contrat. Cette façon de procéder
permet certes de suivre la bonne exécution du contrat mais ne permet pas à l'usager de se faire
une opinion sur le coût du service rendu à savoir le coût de la seule fourniture de l'eau à la charge
du délégataire. La SEM encaisse pour le service dont elle a la charge une somme de 574 MF en
1998 alors que le total du produit de l'exploitation est de 1 078 MF. Une annexe au compte
permettrait de s'assurer de la bonne exécution du contrat pour les charges autres que celles
relatives à la seule fourniture de l'eau.
La ville, lors de la présentation du premier compte de la délégation en 1994, demandait à la SEM,
par un courrier du 21 août 1996, de prendre en compte un certain nombre d'observations pour le
rendre sincère. Ces remarques de principe ou d'ordre méthodologique semblent être restées lettre
morte, ce qui est regrettable. Il s'agit de :
1. La nécessité de disposer de comptes clairement distincts pour la délégation de Marseille-
périmètre ;
2. le suivi des imputations de charges indirectes qui ne peut se faire facilement du fait de
l'utilisation de doubles clefs de répartition ;
3. l'imputation de certaines charges (documentation, communication externe, représentation du
personnel) en totalité sur la délégation de Marseille devrait être réexaminée ;
4. le choix de la valeur ajoutée comme critère de répartition pour les coûts indirects qui a pour
conséquence de faire supporter une part plus importante aux contrats à forte valeur ajoutée. La
prise en compte d'unités d'oeuvre plus représentatives de l'activité de sections étudiées aurait
sans doute conduit à des différences notables au niveau de la répartition des charges ;
5. le fait que les charges de structure et de formation du département études et travaux soient
imputées totalement sur la délégation de Marseille périmètre sans justification.
4.3 LE COMPTE DE LA DELEGATION EXAMEN DES CHARGES ET DES PRODUITS. (exercice
1997)
Le compte de la délégation présenté par la SEM est standardisé et très succinct. Cependant dans
le compte rendu produit, si ne figure pas d'annexe, chaque rubrique est commentée. La lecture de
ce document s'en trouve facilitée. C'est le compte 1997 qui sera étudié et qui a fait l'objet du
dernier rapport de l'expert nommé par la ville de Marseille.
4.3.1 Les produits.
Trois rubriques y sont portées : les produits d'exploitation (1 070,36 MF), les produits des travaux
(réalisés par la SEM à titre exclusif pour 24,46 MF) et les produits accessoires (2,215 MF). La
méthode d'affectation directe peut être retenue pour la plupart des produits, la classification de la
comptabilité générale le permettant.
Toutefois le compte du délégataire ne fait pas apparaître les reprises pour provisions concernant
les créances clients, les dégâts des eaux, les frais de facturation-recouvrement et les primes,
indemnités et intéressement, le tout pour un total de 11,760 MF. Certes, le résultat n'en est pas
affecté car, pour les charges prises en compte, elles sont nettes de provisions de ce type, ce qui
éloigne le compte de la délégation de la comptabilité de l'entreprise et rend les rapprochements
difficiles. Il en est de même pour les reprises des amortissements et des provisions passées pour
le domaine concédé, les compteurs et les biens du délégataire mis à la disposition du contrat ainsi
que des provisions de renouvellement pour 62,912 MF. Mais les charges liées au renouvellement
figurent en valeur nette et sont calculées avec une approche "économique" s'éloignant de la
comptabilité générale. Il est à remarquer en outre que dans les produits du délégataire
proprement dits qui sont de 600,752 MF est incluse la redevance prélèvement pour 35,66 MF,
cette redevance le concernant directement, à charge pour lui de la répartir selon des modalités
qu'il déterminera, ce n'est pas, contrairement aux autres redevances, une perception d'un produit
pour compte de tiers (469,6 MF). Cette dernière somme n'est qu'un jeu d'écriture qui gonfle
inutilement les produits et qui ne devrait apparaître que dans une annexe.
Ne figurent pas les produits relatifs à la vente de l'électricité fournie par les turbines des chutes
Ste Marthe et de la Baratelle. La SEM a, avec l'autorisation du délégant, installé deux turbines
électriques pour diminuer la pression de l'eau.). Dans les comptes de la SEM figurent, dans les
installations du domaine concédé, les deux turbines pour une valeur de 3 206 762 F. Elles sont
amorties sur la durée du contrat à raison de 32 653 F par an. Le produit de la vente d'énergie est
de 1 567 000 F en 1997. Ces installations, qui font partie du domaine concédé, devraient
apparaître, en charge et en produit, au compte d'exploitation de la délégation car elles participent
à l'équilibre du contrat. En ne faisant pas apparaître ces mouvements financiers, le délégataire
conserve à son seul profit la vente de l'énergie produite sur le réseau d'alimentation en eau du
délégant et sans autre contrepartie que d'avoir évité la mise en place d'un matériel qui aurait
permis la dissipation de l'énergie en pure perte.
Enfin, les produits pour les travaux exclusifs au profit de tiers apparaissent
-24,455 MF alors que n'est pas individualisé la contrepartie en dépenses ce qui ne permet pas de
s'assurer que cette recette vient bien en compensation de toutes les charges engagées par le
délégataire à ce titre évitant ainsi de faire supporter par l'usager des charges indues.
4.3.2 Les charges.
Il peut être distingué quatre types de charges : les charges directes (les charges qui ne
concernent que le périmètre de Marseille et qui ressortent directement de la comptabilité
générale), les charges rattachables en totalité au contrat comprenant des charges directes ou des
charges indirectes, les charges non rattachables en totalité au contrat comme les frais de siège, et
les charges à caractère "économique".
4.3.2.1 Les charges directes
Ce sont tout d'abord les redevances et autres taxes que la SEM encaisse au nom et pour le
compte de tiers (ville, agence de l'eau, Etat). Leur total en 1997 était de 469,6 MF. Puis figurent
au compte les sommes qui sont relatives au remboursement de frais payés concernant
directement l'usager comme la redevance prélèvement pour 35,66 MF, des versements effectués
sur la base d'un document contractuel comme la redevance de mise à disposition des ouvrages
(26,069 MF) ou la participation à la couverture du canal de Marseille (0,992 MF) et enfin des
impôts divers et autres que ceux relatifs aux salaires et aux impôts sur les sociétés. Le total de
ces charges, qui ne dépendent pas de l'action directe du délégataire, se monte à 541,711 MF soit
53 % du total des charges des comptes de la délégation.
4.3.2.2. Les charges directement liées au contrat
La comptabilité budgétaire plus qu'analytique de la SEM permet de répartir les charges entre 30
sections auxiliaires ou centres de coût. Six sections ne font l'objet d'aucune imputation sur le
contrat de délégation Marseille périmètre car sans lien direct. A contrario, 8 sections sont
concernées exclusivement par cette délégation de service public.
Cinq le sont à juste titre, il s'agit des moyens généraux de l'adduction du périmètre de Marseille
pour 3,892 MF (chiffre stable par rapport à 1996), le service d'adduction Marseille pour 44,621
MF, le service production Marseille pour 29,209 MF, la section distribution moyens généraux
(64,733 MF) et Marseille périmètre Eau pour un total de 22,959 MF. Ces 5 sections représentent
un total de 165,414 MF dont 10,575 MF de charges indirectes, chacune des sections se voyant
comptabiliser une partie des frais directs des autres sections quand elles font appel.à leur service
(service du personnel, garage, informatique etc...) ou pour se voir taxer une participation pour les
provisions ou amortissements ou bien encore certaines taxes. Les clefs de répartition se font
généralement en fonction de la prestation. Par exemple les charges des départements "service du
personnel" ne sont pas affectées à un contrat mais elles sont réparties sur les sections en fonction
du montant des salaires. Pour le garage il en est de même et la répartition se fait en fonction du
nombre de Kms parcourus.
Deux sections sont rattachées en totalité et depuis l'origine de la présentation, au contrat de
Marseille périmètre sans raison apparente car les autres contrats en profitent. Il s'agit de la
section "représentant du personnel", de la section "documentation". Pour les deux premières elles
pourraient être réparties selon la clef de répartition dite "normale" (en fonction de la valeur
ajoutée) qui était de 67,7 % en 1997, ce qui, compte tenu du montant de ces charges (5,528 MF),
permettrait de diminuer les charges du contrat de 1,785 MF. La troisième section dite de
"communication" sert à imputer des charges qui concernent en propre le développement de la
société et qui devraient donc être financées uniquement par ses marges. En effet, on y trouve des
actions de mécénat pour 200 000 F en 1997 ce qui n'intéresse pas l'usager de l'eau, des
cotisations et des parrainages divers, des frais de publicité, des cadeaux (67 000 F), des frais de
congrès (participation à des congrès pour 125 000 F). Que la SEM participe à de telles actions
relève de ses choix mais elle ne doit pas les faire supporter directement à l'usager qui ne doit
payer que le service qui lui est rendu, ce qui n'est pas le cas car ces charges figurent au compte
rendu financier de la délégation. Il devrait donc être retiré du compte de la délégation la somme de
9,172 MF, ce qui est loin d'être négligeable.
4.3.2.3 Les charges non directement rattachables.
Sept sections font l'objet d'une répartition par la clef dite "standard", c'est à dire par le critère de la
valeur ajoutée. Elle affecte un total de 89 MF en 1997, soit 9 % de l'ensemble des charges nettes.
Elle présente l'avantage de la simplicité et de permettre aux professionnels du chiffre de vérifier
rapidement que les mêmes charges ne sont pas comptabilisées dans plusieurs contrats à la fois,
encore faut-il avoir accès à la comptabilité générale et vérifier que cette clef s'applique à tous les
contrats. Tel est le cas. Cependant elle pénalise les contrats à forte valeur ajoutée et fait supporter
aux contrats les risques commerciaux, ce qui est anormal dans un dispositif où le délégataire
assume la gestion du service à ses risques et périls. Au cas particulier de Marseille périmètre, la
valeur ajoutée est passée de 69,1 % en 1994 à 67,7 % en 1997 ce qui, si cette tendance se
confirme, ne peut que majorer à terme les résultats de cette délégation.
Sept autres sections font l'objet d'une répartition en fonction de pourcentages spécifiques. Il en est
ainsi des charges de structure du siège et du département financier qui, les années précédentes,
étaient soumises à la clef de répartition "standard" et qui, en 1997, ont connu une répartition à 80
%, ce qui, compte tenu des montants en jeu, représente un surcoût pour le contrat de Marseille de
7,2 MF. La SEM se justifie en estimant que ce pourcentage est plus représentatif compte tenu du
temps passé par la SEM sur le contrat de Marseille périmètre en raison de nombreuses
interventions suite au contrôle de la CRC et à de nombreuses relations avec les élus. Ce taux est
élevé compte tenu du fait que les charges directes, pour ce qui concerne les seuls frais de
structure, ont baissé de 4 % entre 1996 et 1997.
Pour les cinq autres sections les imputations retenues se font sur des critères spécifiques (pour
les études et travaux, en fonction du temps passé, le nombre de compteurs pour le service de
vente ou le nombre de factures pour la facturation et le recouvrement...). Une anomalie est
apparue pour la section études et travaux, en effet elle est imputée à 100 % au contrat de
Marseille pour ce qui concerne le temps de formation de cette section (1 325 heures en 1997), en
forte diminution par rapport à 1996 et en frais de structure (10 888 heures). Cette anomalie, dont
les conséquences financières n'ont pu être chiffrées, serait à corriger.
4.3.2.4 Les charges à caractère "économique."
Ce poste important a la particularité de ne pas apparaître dans les comptes de la société et de ne
se justifier que par le lissage de certaines charges sur la durée du contrat à des conditions dites
"économiques" ne trouvant leur justification que dans l'optimisation des gains du délégataire au
détriment de l'usager, tout en lui faisant admettre qu'il paie un juste prix, c'est à dire que la marge
nette qui apparaît est "moralement" acceptable. Mais nous y reviendrons quand nous
examinerons les marges. Dans ces charges figureront essentiellement les "garanties" de
renouvellement, la redevance d'usage sur versements des communes, la redevance d'usage du
domaine concédé, la redevance d'usage des compteurs, la redevance d'usage du domaine privé
du délégataire, les loyers internes et les annuités d'emprunt repris aux collectivités.
4.3.2.4.1 Les charges qui ne peuvent apparaître dans la comptabilité car dépendantes de la durée
du contrat.
Ce sont des charges que le délégataire a du prendre en compte au moment de la négociation
comme la reprise d'emprunts ou le versement de droits d'entrée, maintenant interdit pour ce type
de délégation. En particulier quand il y a substitution du délégant par le délégataire, celui-ci prend
en charge les annuités restant à courir ou verse aux collectivités le montant correspondant aux
annuités.
Cette charge évolue dans le temps et il n'y a pas concordance avec le contrat, mais pour établir le
prix de la redevance due au délégataire, il a été nécessaire de la lisser dans le temps. Il est
regrettable que le contrat n'ait pas prévu les modalités de ce lissage, le type et le montant du taux
d'intérêt pris par la SEM.
4.3.2.4.1.1 Les annuités des emprunts repris
Ils sont assimilés à une mise de fonds à l'origine du contrat, par actualisation valeur 1992. De
1995 à 1997 cette mise de fonds fait l'objet d'un remboursement à annuité constante avec un taux
d'intérêt de 11 %, soit une annuité de 3,433 MF qui correspond à l'amortissement d'un capital de
28 MF alors que le capital restant du au 1/1/92 à ce titre n'est que de 23,773 MF. A compter de
1998 il est fait application du TME de 1992 majoré de 0,5 point soit 9,1 % avec une progressivité
annuelle de l'annuité de 1,5 %. Pour 1998 l'annuité est de 2,572 MF ce qui correspond à
l'amortissement d'un capital de 20,94 MF dont il est vain de chercher l'origine. Dans le premier cas
la valeur retenue était, pour les premières années, proche des annuités remboursées (3 447 561
F en 1997) mais, la différence ne fait que croître au fil du temps, les emprunts arrivant à échéance
-en 2012 il ne reste qu'une annuité de 88 513 F- mais faute d'éléments précis figurant dans la
négociation le surcoût engendré sur le prix de l'eau ne peut être chiffré avec exactitude. Le
nouveau mode de calcul est un exercice de style, certes louable pour la vérité des coûts, mais ne
débouchant pas sur un nouveau calcul de la redevance du délégataire. En se basant sur les
hypothèses retenues pour 1995 qui resterait en vigueur sur toute la durée du contrat c'est un total
de 66,725 MF qui sera inscrit à ce titre dans les comptes de la délégation, alors que si les
communes ne s'étaient pas fait rembourser ces annuités ne serait apparue dans les comptes du
service de l'eau que la somme de 42,754 MF, soit une différence de 23,97 MF représentant 56 %
du total initial. Au moment de la fixation du prix de la redevance destinée au délégataire c'est ce
calcul qui a du le conduire à demander les sommes prévues au contrat.
4.3.2.4.1.2.Pour la redevance relative au versement de 230 MF à la ville de Marseille et à la prise
en charge des emprunts de la ville et de la commune d'Aubagne pour un capital restant dû de
28,382 MF.
Elle est calculée suivant la même méthode. La SEM se comporte en fait comme le banquier de
ces collectivités avec un taux qu'elle définit elle-même. La ville n'a pas la possibilité de négocier
ou renégocier ce "quasi-prêt". Notons que dés 1994 le PIBOR 3 mois était de 5,85 % et n'a fait
que baisser depuis. En outre, le délégataire a dès 1994 procédé au remboursement anticipé des
emprunts GOBTP et CFCM ce qui a l'avantage pour les collectivités concernées de voir leur
garantie levée ce qui doit être signalé. Par le même artifice, et avec les mêmes conséquences,
c'est à dire concrètement aucune pour l'usager, l'annuité de ce "quasi-prêt" va passer en 1998 de
31,604 MF à 25,921 MF. Cette baisse importante s'explique par le fait qu'est pris en compte d'une
part le remboursement normal d'une partie du capital et d'autre part les emprunts repris aux villes
de Marseille et d'Aubagne qui ne sont plus que de 6,735 MF au lieu de 28,382 MF (qui sera nul en
2001). Il en résulte que le capital restant du en 1998 à ce titre n'est plus que de 211,56 MF, ce qui
fait une annuité, sur 16 ans avec un taux de 9,1 %, de 25,61 MF. Il faut cependant ajouter un taux
de progressivité de 1,5 % pour la rémunération de la mise de fonds ainsi consentie aux villes de
Marseille et d'Aubagne ce qui la porte pour 1998 à 25,921 MF, ce sera 26,11 MF en 1999 et 26,49
MF en 2000 etc...
La première remarque est que cette baisse de l'annuité de près de 5 MF n'a aucune répercussion
sur le prix de l'eau car non actée contractuellement et elle n'a pour objet qu'une approche plus
réaliste ou qui se veut telle, des comptes de la délégation. En second lieu, le délégataire se
comporte comme un banquier et prend des marges non négligeables (taux élevé car ancien,
marge supplémentaire de +0,5 % à laquelle on rajoute un taux de progressivité annuelle de 1,5
%).
4.3.2.4.2 Les charges "économiques" mais pouvant se retrouver dans la comptabilité de
l'entreprise.
Un certain nombre de charges ont été rangées dans le cadre des charges à "caractère
économique", ce qui ne permet pas de faire le rapprochement avec la comptabilité de l'entreprise
et introduit des notions, non contractuelles, de garantie dite "de bonne exécution du service". Il
s'agit principalement des provisions de renouvellement mais aussi de diverses charges relatives
aux investissements.
4.3.2.4.2.1 Les provisions pour renouvellement.
En comptabilité les faits sont simples et ont le mérite d'être fiscalement corrects. En effet les
provisions sont calculées en 1997 pour 101,555 MF dans les comptes de l'entreprise et auraient
du figurer en dépenses pour ce montant. En réalité les dépenses de renouvellement n'ont été que
de 61,901 MF. Pour traduire le fait que des travaux de renouvellement ont été faits pour un total
moindre que celui qui est prévu, mais non négligeable par rapport à d'autres contrats examinés
par la Chambre, aurait du figurer en charges le montant des travaux réalisés à ce titre en
précisant la part effectuée directement par la SEM ce qui permettait de vérifier qu'il n'y avait pas
double comptabilisation avec les autres charges prises en compte dans le compte-rendu financier
(il figure dans la section "études et travaux" une charge de 8 370 heures -18,54 % de l'activité de
ce service- au profit du renouvellement canalisations et branchements).
La dotation sur provisions de renouvellement reprise en recettes en 1997 est de 62,912 MF. Il en
résulte qu'à fin 1997 le total de la provision pour renouvellement est de 100,544 MF (provisions
calculées de 101,555 MF, travaux de renouvellement de 61,901 MF, reprise de 62,912 MF de
provisions en recettes). Les faits présentés ainsi sont clairs et donnent une image sincère de la
situation qui fait apparaître une charge pour le contrat de plus de 100 MF.
Par un système complexe mais qui permet au délégataire de présenter un compte lui ouvrant droit
aux avantages fiscaux liés à la provision, elle est remplacée par la notion de "garantie de
renouvellement". La SEM a déterminé, selon une méthode de lissage, une annuité de croisière
sur une période glissante prévisionnelle de dix années de travaux de biens à renouveler bien par
bien conformément à ses obligations. Il en résulte pour 1997 un montant de 79,348 MF, somme
qui figure au compte de la délégation. La volonté de ne pas utiliser les instruments comptables
adéquats, a conduit à mettre en place un dispositif dont le principe de fonctionnement repose sur
une erreur de raisonnement consistant non pas à répartir les charges globalement sur le contrat
mais à les individualiser par exercice, ce qui est effectivement nécessaire pour la programmation
des travaux. A quelques différences près, la provision d'une année doit correspondre au montant
des travaux exécutés en particulier lorsque le périmètre de la délégation est important tant en
terme patrimonial que financier.
En juin 1999, dans son rapport au délégant, la SEM utilise une autre méthode, sans pour autant
mentionner les deux modes de calcul, qui consiste à dire que : "La garantie de renouvellement
que le délégataire doit ainsi assumer est déterminée en additionnant :
* d'une part, le montant actualisé en fonction de l'indice TP01 à la fin de l'exercice considéré, des
renouvellements déjà réalisés depuis le début de la période contractuelle en cour ;
* d'autre part, le montant des renouvellements prévus jusqu'à la fin du contrat, tel qu'il résulte de
l'inventaire des biens du service à jour à la date d'établissement des comptes rendus financiers ;
* puis en divisant le total ainsi obtenu par la durée de la période contractuelle en cours.
Ce calcul, comparable à ceux retenus pour la détermination des "réserves techniques" des
compagnies d'assurance, permet d'évaluer le risque du délégataire. La garantie de
renouvellement couvre la totalité de l'obligation contractuelle du délégataire, y compris les
renouvellements anticipés ou imprévus."
La somme portée au compte de la délégation à ce titre est de 71,356 MF en 1998. Une annexe
explicitant la méthode de calcul et reprenant les chiffres utilisés pour arriver à ce résultat serait
souhaitable.
Cependant la notion de "garantie de renouvellement" ne peut trouver à s'appliquer car, comme
cela ressort des commentaires, le délégataire se comporte comme un assureur ou fera appel à un
assureur pour gérer ce risque, ce qui n'est pas contractuellement prévu. En outre si des imprévus
se produisent c'est au délégataire de l'assumer, sans charge supplémentaire pour l'usager. En
effet, les contrats de délégation sont des contrats aux risques et périls du délégataire. En prenant
en charge le service, il devait estimer les risques encourus et, à défaut, les faire prendre
contractuellement en compte en majorant sa marge ou en étendant ses obligations de
renouvellement, le délégant au contraire doit agir en sens inverse.
L'équilibre entre ces deux extrêmes justifie celui du contrat et de la juste rémunération. De plus, la
notion d'intuitu personae, avec les avantages y afférant en particulier dans la procédure
d'attribution de la délégation, contrebalance la prise de risques du délégataire. En outre,
l'obligation de renouvellement fait que le contrat est, pour les équipements à renouveler, de type
concessif. Ils doivent donc figurer dans les comptes du délégant (compte 241 en M14) et, au fur et
à mesure des réalisations, être pris en compte au compte 21 pour la valeur de la réalisation et
donc être amortis. Si la logique de la "garantie" prévalait ce serait aussi celle de l'affermage avec
pour conséquence l'obligation d'amortir tous les équipements y compris ceux qui sont soumis à la
"garantie de renouvellement".
4.3.2.4.2.2 Les redevances d'usage des compteurs.
Les compteurs appartiennent au délégataire (article 17 du cahier des charges du contrat) et sont
en concession. C'est à juste titre que la SEM, dans sa comptabilité et son compte rendu financier
fait figurer un amortissement de caducité, un amortissement technique et une provision pour
renouvellement. Jusqu'en 1997, la redevance d'usage du parc des compteurs est évaluée par
cumul de la valeur résiduelle de l'amortissement de la valeur de remplacement (amortissement
technique et provision de renouvellement) et de son coût de financement (amortissement de
caducité) auquel est appliqué un taux de base bancaire majoré de 1,55 points, en 1996 le "taux de
financement" était de 9,05 % et en 1997 il n'était plus que de 7,85 %, le montant retenu était de
2,731 MF.
En 1998 un nouveau mode de calcul est apparu. La redevance est égale à l'annuité d'un emprunt
au TME de l'année d'acquisition des compteurs majoré de 0,5 point dont la progressivité annuelle
est de 1,5 %. En 1998 la redevance est de 2,752 MF.
Ainsi le lien avec la comptabilité de l'entreprise disparaît. La marge du contrat devient donc une
marge nette de tout risque financier puisque prise en fait dans les "charges économiques".
3.2.4.2.3 Les redevances d'usage du domaine concédé et du domaine privé (transport,
informatique, agencement et autres).
Le délégataire est amené à réaliser des investissements lui permettant de mener à bien le service
pris en charge. Cette charge, prise en compte pour le calcul de sa redevance, doit être lissée sur
la durée du contrat. L'amortissement pratiqué en comptabilité sur les biens devrait être le seul
critère à retenir. Or le compte de la délégation institue une redevance où sont pris en compte le
coût de remplacement et le coût de financement du bien auxquels sont appliqués un coefficient
d'actualisation et un taux de financement. En 1997 le taux retenu est le TBB au 01/01/97 majoré
de 1,55 % soit 7,85 % au lieu de 9,05 % en 1996 et 9,8 % en 1995. Le montant retenu à ce titre
est de 8,636 MF.
Il faut noter, en dehors de la critique déjà faite de la non-conformité avec les chiffres figurant dans
les comptes de l'entreprise et la mise à la charge du compte de la délégation de frais financiers
qui ne concernent que la SEM et qui sont à prendre en compte dans sa marge, que dans le calcul
de la répartition des frais entre les différentes sections par le système de répartition des charges
indirectes figurent déjà pour 2,930 MF des frais intitulés "amortissement/redevance d'usage". Ni
l'expert missionné par la ville ni la Chambre n'ont pu mettre en évidence une double prise en
charge mais la question mérite attention.
De même que dans les sections garages (coûts indirects) et laboratoire (coûts indirects) dont les
charges sont réparties au prorata de la valeur ajoutée dans les différents contrats ne figurent pas
l'amortissement des matériels du domaine privé. Enfin aucune certitude ne peut être apportée
quant aux modalités de répartition entre les contrats de ces redevances d'usage dans la mesure
où elles doivent être prises en charge. Pour la redevance du domaine concédé il a été retenu à la
fois un coefficient d'indexation de 1,14 et un taux de financement de 8 %, le montant retenu est de
0,111 MF.
Pour ce qui concerne les biens immobiliers dont la SEM est propriétaire, un loyer indexé sur
l'indice de la construction a été calculé à partir de la date d'acquisition, en ajoutant un taux de
capitalisation de 7 %. Le montant retenu à ce titre est de 0,111 MF.
4.3.2.5 Les autres charges
En déduction du résultat brut, vient la participation des salariés et l'impôt sur les sociétés.
4.3.2.5.1 La participation des salariés aux fruits de l'expansion.
En 1997 elle est prise à hauteur de 10,052 MF. Cette participation relève des articles L442-1 et
suivants du code du travail qui indiquent qu'elle est affectée à une réserve spéciale après la
clôture des comptes de l'exercice et calculée sur le bénéfice. Il s'agit bien d'une charge de
l'entreprise qui n'a aucun lien avec le service et doit donc être exclue de ce compte rendu
financier. En outre la somme représente 86 % du total retenu dans la comptabilité de l'entreprise
ce qui est surévalué par rapport au poids financier du contrat.
4.3.2.5.2 L'impôt sur les sociétés.
C'est une charge étrangère au service et donc n'a pas à figurer dans le compte rendu financier. Il
a été relevé en outre que la somme portée en 1997 est de 27,665 MF alors que l'impôt versé par
la SEM n'était que de 10,051 MF.
4.3.3 conclusions
L'absence d'annexes ne permet pas, quand cela est possible, comme pour les charges de
personnel, de remonter au compte de la société. De plus les charges à caractère "économique"
n'ayant pas été établies dans une optique de compte prévisionnel annexé au contrat et servant de
référant, la sincérité de ce compte ne peut être prouvée ce qui est confirmé par les changements
de méthode constatées ces dernières années. Il est nécessaire d'avoir recours à un expert
comptable qui pourra, avec difficulté, s'assurer de la non double prise en charge de certains
postes ainsi que de leur juste affectation au contrat en fonction des clefs de répartition retenues et
de l'exacte relation entre les charges revenant au seul service et celles qui relèvent de la seule
entreprise comme ses frais de promotion et de relations publiques. Cette démarche est coûteuse
et se justifie surtout pour les contrats importants dans le but d'avoir des arguments pour une
éventuelle renégociation du contrat et de donner des éléments au maire quand il établira son
propre rapport annuel sur le service. C'est ainsi qu'un examen rapide de ce compte, avec d'autres
clefs que celles qui figurent au compte produit, fait apparaître que 19,724 MF y figurent indûment
portant le résulta brut de 74,22 MF à 93,94 MF en 1997.
La non permanence des méthodes est une constante d'une année sur l'autre de même que le
principe de non compensation est ignoré en particulier par l'institution de "charges économiques"
permettant ainsi de passer aux charges ou aux produits nets directement. Il en est ainsi des
"garanties pour renouvellement" mais aussi des redevances du domaine concédé ou privé ou de
celle des compteurs, ainsi que des provisions pour dépréciation des créances clients, des dégâts
des eaux etc...qui sont repris sous la rubrique frais de siège (comprenant des dotations pour ces
postes moins des reprises sur provisions).
Enfin il manque un tableau avec des éléments bilantiels permettant de suivre les provisions pour
renouvellement, les dettes sur comptes de tiers (Agence de l'eau par exemple) et sur des
opérations ponctuelles, les découverts bancaires sur opérations ponctuelles, les biens de retour,
les biens de remise ou de reprise, les créances clients, la trésorerie disponible sur des opérations
ponctuelles.
SYNTHESE DES OBSERVATIONS SUR LA GESTION DU SERVICE DE L'EAU DU PERIMETRE
DE MARSEILLE
PRESENTATION GENERALE DU SERVICE
Les communes du périmètre de la "concession du canal de Marseille", c'est à dire Marseille,
Aubagne, La Penne-sur-Huveaune, Septèmes-les-Vallons et Les Pennes-Mirabeau disposent
d'une ressource en eau diversifiée, abondante et calibrée pour une population en constante
augmentation. Les équipements d'adduction ont été en effet conçus pour satisfaire une
consommation en eau deux fois plus importante que celle nécessaire à la satisfaction des besoins
actuels des usagers industriels, agricoles, institutionnels ou simples abonnés.
La priorité a été donnée à la sécurité afin d'être en mesure de pouvoir distribuer à l'usager, quelles
que soient les circonstances, de l'eau traitée nécessaire à ses besoins. Cependant toutes les
mesures de protection de la ressource prévues par la loi ne sont pas mises en place ce qui
pourrait engager la responsabilité de la ou des collectivités concernées en cas de pollution de ses
ressources en eau brute.
Par convention du 29 juin 1960, la ville de Marseille a délégué à la Société des Eaux de Marseille
(SEM) le service d'adduction et de distribution de l'eau pour une durée, du fait des avenants
successifs, de 53 ans. En 1990 les deux parties sont convenues de procéder à un nouveau
remaniement du contrat.
Faute d'avoir exigé la production d'un compte prévisionnel la ville n'a pas pu renégocier
l'augmentation du prix de l'eau sur des bases objectives qui auraient pu être, par la suite, vérifiées
annuellement au cours de l'exécution du contrat. Mais elle-même n'est pas en mesure de
procéder à cet exercice pour son propre compte (détermination de la surtaxe) n'ayant mis en
place ni un service de l'eau ni un budget annexe de l'eau, pourtant obligatoire. En effet l'avenant,
qui peut être analysé comme étant en fait une nouvelle convention, a transformé le contrat en
affermage avec îlots concessifs.
L'intervention du contrôle de légalité a cependant été effective et a permis, en particulier, que soit
pris en compte la problématique des autres communes du périmètre ce qui a débouché sur un
"protocole d'accord" entre la ville de Marseille et les autres communes.
Ce contrat répartit de façon claire le partage des investissements à réaliser entre le délégant et le
délégataire et indique les objectifs à réaliser par le délégataire. Cependant il contient des clauses
permettant à la ville de Marseille d'avoir un droit de regard sur la nomination du PDG de la SEM,
entreprise privée, et imposant de faire bénéficier au personnel de la SEM de conditions
avantageuses de rémunération et d'avancement équivalentes à celles du personnel municipal.
La SEM est omniprésente comme maître d'oeuvre pour tout ce qui concerne le service de l'eau
dans le périmètre du canal de Marseille. De plus il y a une situation de quasi-dépendance des
particuliers, y compris les villes du périmètre, vis à vis de la SEM qui réalise la quasi totalité des
travaux relatifs au service de l'eau pour des montants importants (plus de 24 MF par an pour les
seuls particuliers), comme le précise le contrat.
Le bordereau de prix, établi pour des durées importantes par contrat ou de fait comme c'est le
cas, a un caractère inflationniste. En outre il y a inégalité de traitement entre usagers (la ville et les
particuliers) pourtant placés dans les mêmes conditions(prise en compte dans un cas des frais
d'études et de surveillance et pas dans l'autre). Il est constaté des détournements des procédures
dans la commande publique, la SEM intervenant pour réaliser des travaux prévus par le contrat
dans des cas de plus en plus en plus nombreux (interventions sur le canal de Marseille, pour le
passage des montages de jauge au compteur). La Chambre a pris acte qu'un nouveau bordereau
de prix est désormais en vigueur prenant mieux en compte les intérêts de la ville.
Parmi les autres contrats passés par la ville de Marseille, ceux relatifs à la fourniture d'eau brute
sur le canal à des communes n'ont été contractualisés que depuis 1993. Pour modifier la
tarification, si besoin était, la ville de Marseille éprouvera les plus grandes difficultés du fait des
dispositions contractuelles. Il peut être noté en outre, que la tarification ne tient pas compte des
consommations réelles ce qui déroge aux dispositions de la loi sur l'eau.
L'actuelle organisation du service de l'eau du périmètre dépend de la ville de Marseille, les autres
communes étant bien souvent mise devant le fait accompli.
L'adduction est une activité parfaitement délimitée qui vend directement une partie de sa
production représentant près de la moitié des volumes facturés du service (57 millions de m3 pour
un total de 131 millions de m3). Cette activité pourrait être individualisée ce qui permettrait d'en
connaître le coût.
Si la ville a, sur le plan financier et juridique grâce à sa direction des services concédés, su
reprendre la maîtrise de ce service, progressivement il en va de même sur le plan technique.
LE SERVICE RENDU AUX USAGERS
Les abonnements à la jauge, du fait des risques sanitaires que fait courir aux personnes ce type
de montage et de son caractère peu économique en terme de consommation, sont en voie de
disparition. Après plusieurs tentatives infructueuses, la ville en 1994 s'est résolue à prendre en
charge les frais relatifs à ces transformations, la charge financière qu'elle aura à supporter est de
25 MF. L'exclusivité des travaux est accordée à la SEM qui l'avait revendiquée- moyennant une
participation aux frais qui seront engagés. Le caractère incitatif de la démarche entreprise par la
ville de Marseille a échoué en partie puisque, si les branchements réalisés permettent
effectivement la pose d'un compteur, les installations internes des immeubles n'ont généralement
pas été modifiées laissant de ce fait entier les problèmes d'hygiène.
Le nombre d'abonnés disposant d'un compteur, plus de 100 000, est, par rapport au nombre
d'habitants, peu élevé (un abonnement pour 8,2 habitants) car l'abonnement est consenti non pas
à l'usager mais au propriétaire ce qui est la conséquence du passé. Les prochaines dispositions
législatives devraient progressivement permettre de mettre un terme à cette situation.
Lors des négociations de l'avenant n° 9, la SEM et la ville de Marseille ont décidé de supprimer le
réseau d'eau brute pour ne laisser que le réseau d'eau filtrée. Cette opération a été mise en
oeuvre, semble-t-il, à la satisfaction de toutes les parties, la commune, qui améliore la qualité de
son réseau sans gréver son budget, la SEM, qui limite ainsi ses charges d'exploitation et ses
investissements et les usagers qui ne supportent ainsi qu'une augmentation limitée du prix de
l'eau. De plus, l'opération s'est réalisée dans des délais très réduits.
Les dispositions du décret du 3 janvier 1989 fixant les modalités de prélèvement et d'analyse de
l'eau de consommation humaine n'ont été appliquées à Marseille qu'en septembre 1996. Les
analyses faites font état de résultats satisfaisants (0,1 à 0,3 % d'anomalies).
En 1998 sur 292,9 millions de m3 prélevés, seulement 161,1 millions ont été consommés soit 55
%. Les pertes sur canal sont de 29,5 % et sont dues pour la plus grande à son mode de
fonctionnement. Par contre, elles ne sont que de 14,5 % pour le réseau d'eau filtrée (2 200 km) ce
qui est dans la moyenne basse sur le plan national.
Si la SEM respecte, et va même bien au-delà de ses obligations d'entretien des installations et,
actuellement, respecte ses obligations de renouvellement des réseaux et des branchements il
n'en va pas de même pour la ville. Les investissements concernés sont pourtant prévus dans un
plan adopté par le conseil municipal. Cependant les sommes inscrites au budget du service de
l'eau sont encore en deçà par rapport à ce plan et en outre la réalisation effective des travaux est
bien inférieure à ce qui est prévu, ce qui, si cette situation perdurait, pourrait nuire au bon état
général des installations.
La ville de Marseille et celles du périmètre pour ce qui concerne leurs investissements, auraient
dû avoir depuis l'origine les documents techniques indispensables au suivi technique et financier
de leurs équipements dont la valeur estimée en 1991 est de plus de 8 milliards de francs. Leur
production est seulement en cours de réalisation.
Malgré les dispositions prévues par la loi, les communes du périmètre n'ont pas créé les comités
consultatifs des usagers des services. Il est vrai que les usagers ne consultent pas les documents
pourtant mis à leur disposition (qualité de l'eau, comptes rendus techniques et financier du
service). Cependant la SEM, ressentant la nécessité d'avoir l'avis des usagers, a mis en place un
comité de consommateurs.
LES COUTS
La tarification de la fourniture d'eau brute en gros, dont la consommation est de 38,8 millions de
m3, ne respecte pas le principe de l'égalité des usagers placés dans les mêmes conditions car,
suivant la date à laquelle la dotation a été souscrite le tarif n'est pas le même, allant de la gratuité
pour de rares privilégiés à des écarts de prix de l'ordre de + 364 %.
La Chambre a constaté que le prix de l'eau brute payée dans ce cadre est de 1,47 F/m3 dont 0,82
F perçu par le délégataire alors que le prix de revient, estimé par la Chambre avec les documents
en sa possession, est, d'environ, 0,93 F/m3 dont 0,32 F pour la ville, soit un rapport de 1 à 1,6.
Les volumes consommés par les services des communes du périmètre sont de 20,8 millions de
m3 et le produit perçu, uniquement par le délégataire, en contrepartie de ce service n'est que de
2,7 MF soit 0,129 F/m3, inférieur au seul prix de revient de l'eau brute arrivant aux usines de
potabilisation (0,93 F/m3).
Les agriculteurs (7 millions de m3de consommation par an), pour ceux qui utilisent l'eau à la
vanne, ne paient le m3que 0,29 F/m3 pour un prix de revient de 0,93 F/ m3, les autres usagers du
service étant substitués aux agriculteurs pour combler la différence soit un total de 4,3 MF.
Les industriels, qui consomment 2,9 millions de m3 par an, paient en moyenne le m3 5,84 F alors
que, selon la Chambre et en fonction des hypothèses qu'elle a retenu et des documents en sa
possession le prix de revient pourrait être estimé à 5 F.
L'abonné tous usages, qui en 1998 a consommé 59,2 millions de m3 d'eau, soit 45 % des
volumes du périmètre, et payé 511,5 MF à la SEM, soit 91 % de ses produits, verse par m3 d'eau
9,29 F pour un service qui lui coûte, selon les estimations de la Chambre faites à partir des
documents qui lui ont été transmis et des hypothèses qu'elle a retenues, 6,27 F/m3. Cette
différence peut s'expliquer en partie par les avantages consentis à certaines catégories d'usagers.
Sur six ans, du 1/1/1992 au 1/1/1998 le prix de l'eau a augmenté de 4 % par an alors que pendant
la même période la hausse du prix de la vie n'était que de 1,72 %.La formule corrective du prix de
l'eau a été établie sur des bases particulièrement avantageuses pour le délégataire qui s'est
prémuni contre les aléas de l'exploitation d'un service qui ne connaîtrait plus de progression
significative de son chiffre d'affaire et qui prend en compte les clauses qui lui ont été imposées
(rémunération des personnels ou prise en charge des renouvellements d'un réseau âgé).
Conscient des dérives sur les prix dues à ces formules complexes et difficilement contrôlables, la
ville a entrepris de rectifier cette anomalie et a, en grande partie, réussi ce qui a eu pour effet de
limiter à 1,63 % la hausse du prix de l'eau en 1997.
La ville a laissé à son délégataire le soin d'établir la tarification de la redevance prélèvement alors
que les enjeux financiers ne sont pas négligeables. Après une augmentation en masse de plus de
450 % de 1991 à 1998, elle est de 0,4201 F/m3 en 1998 pour l'abonné "tous usages" La Chambre
a constaté la modulation tarifaire d'une charge qui instaure une discrimination entre usagers alors
qu'elle doit être répartie entre tous car elle représente une contribution liée à l'exploitation de la
ressource.
La redevance pollution a connu une forte évolution et il existe une grande disparité au sein des
communes du périmètre de la délégation de Marseille (1,96 F/m3 à Marseille et 1,38 F/m3 à
Aubagne).
Pour les communes du périmètre autres que Marseille, l'absence de budget annexe ne permet
pas une information du conseil municipal sur le résultat financier de ce service, les éventuels
transferts de charge, la prise en compte patrimonial et le respect du protocole passé entre les
communes. Enfin, le cadre du rapport annuel prévu par les textes n'est pas toujours respecté et la
qualification juridique du contrat ne facilite pas sa stricte application.
La ville de Marseille a mis en place tardivement un budget eau qui ne permet pas de connaître le
montant de la surtaxe dont a besoin ce service pour équilibrer ses comptes. Ce budget est mal
évalué et son exécution annuelle est très largement excédentaire (de 19,3 MF en 1996 -+18 %-,
de 43,2 MF en 1998 -+50 %- ) , de plus le taux de réalisation des travaux est très faible. Le
patrimoine qui n'est pas totalement intégré dans les comptes et, pour les ouvrages d'intérêts
locaux, n'est pas réparti entre les communes du périmètre. La Chambre a constaté que les
amortissements des équipements à la charge des collectivités ne sont pas effectués et ou le sont
à minima.
La Ville de Marseille a demandé à un expert comptable de lui faire rapport sur les comptes de la
SEM jusqu'à l'exercice 1992, puis de vérifier les comptes dans le cadre de la "concession" et de
déterminer la "vérité du prix" de l'eau. Rarement prise par les collectivités, cette initiative doit être
portée au crédit de la ville.
Le compte d'exploitation de la délégation n'a été établi que tardivement selon une norme du
Syndicat Professionnel des Distributeurs d'Eau (SPDE), difficilement rattachables aux comptes
sociaux de l'entreprise, ne respectant pas les principes comptables généraux, faisant apparaître
des comptes ne permettant pas de connaître le prix réel de l'eau, et ayant fait l'objet de
remarques, jusqu'à présent non prises en compte par le délégataire, de la part de l'expert nommé
par la ville.
Des produits figurent dans ce compte de façon discutable (produits de travaux à titre exclusif)
alors que certains autres y sont absents (reprises sur provisions et amortissements, ventes
d'électricité à EDF pour 1,5 MF).
Certaines charges ne sont pas toujours rattachables au service. Des charges sont réparties
suivant une clef contestable qui de plus n'est pas toujours respectée. Au total, ce sont 18,1 MF qui
sont ainsi portés à tort dans les comptes de la délégation.
La prise en charge des annuités d'emprunt par la SEM conduira à un coût supplémentaire de 18
MF, sur la durée du contrat. De même le versement de 230 MF à la ville de Marseille et la prise en
charge du capital restant dû des emprunts GOBTP et CFCM génère des annuités figurant dans
les comptes de la délégation. Elles sont calculées sur la base d'un taux de type bancaire avec une
marge et une progression annuelle -,5 %-. En 1998 ce taux est de 9,1 % l'"annuité" calculée sur
ces bases est de 25,9 MF.
C'est la notion de provisions de renouvellement, et non celle de "garantie de renouvellement",
terme utilisé seulement par les assureurs, qui doit être retenue dans le compte de la délégation
car il permet le rapprochement avec la comptabilité de l'entreprise, traduisant bien les obligations
contractuelles (prise de risque) et imposant de ce fait une réalisation physique au cours du contrat
car, à défaut il y aurait sanction sur le plan fiscal. En 1997 il est porté sur les comptes du
délégataire une somme de 79,4 MF à ce titre pour 61,9 MF de réalisation.
Seule la marge brute, au demeurant conséquente 91,8 MF en 1998, doit figurer dans le compte de
la délégation. Les charges comme les impôts sur les sociétés ne concernent que la vie de
l'entreprise et doivent être prises en charge sur résultat brut du contrat.
EN CONCLUSION
La chambre retient que ce service est globalement efficace bien que sur le plan du prélèvement
dans le milieu naturel cette efficacité reste toute relative du fait en grande partie des contraintes
techniques de type d'installation.
Pour certaines catégories d'usagers ce service est économe (les villes du périmètre, les
agriculteurs) . Il n'en est pas de même pour l'abonné "tous usages", catégorie la plus nombreuse.
Enfin ce service à une efficience relative (la prestation la meilleure possible au moindre coût) du
fait d'une part de son organisation administrative et technique, et d'autre part des clauses du
contrat de délégation de service public.
Le Président
A. PICHON