Master Pilotage des Politiques et
Actions en Santé Publique
Promotion : 2010 - 2011
Date du Jury : Juillet 2011
La protection juridique des majeurs et
les droits des usagers : un paradoxe ?
Suzanne MONCHAMBERT
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
R e m e r c i e m e n t s
Je tiens, tout d’abord, à remercier ma maitre de stage Madame Marie-Thérèse RIBIER,
Inspectrice principale à la DRJSCS Ile-de-France, pour ses précieux conseils, son
investissement et son soutien tout au long de mon stage et de la réalisation de ce
mémoire,
Je remercie également tout particulièrement Monsieur Benoit COSTA, inspecteur à la
DRJSCS Ile-de-France, pour l’aide et l’attention qu’il a bien voulu apporter à mon
travail,
Je souhaite remercier l’ex-service LCE de la DRASSIF pour leur accueil et leur
gentillesse durant mon stage d’exercice professionnel,
Enfin, je remercie vivement toutes les personnes rencontrées au cours de ces mois
pour leur disponibilité et le partage de leurs connaissances.
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
S o m m a i r e
Introduction ...................................... ............................................................................... 2
1 Le droit des usagers et ses conséquences sur la pro tection juridique des
majeurs : le cadre juridique et théorique. ........ ............................................................. 9
1.1 La loi du 2 janvier 2002 consacre un droit spécifique, le droit des usagers ......... 9
1.1.1 L’affirmation du droit des usagers au sein du secteur médico-social ............ 9
1.1.2 Le droit des usagers selon la loi du 2 janvier 2002 .....................................10
1.1.3 Les outils garants de la réalité du droit des usagers au sein des structures 13
1.2 La réforme de la protection juridique des majeurs du 5 mars 2007 constitue une
loi de liberté ..................................................................................................................16
1.2.1 La loi du 5 mars 2007, une réforme nécessaire ..........................................16
1.2.2 La modification de la prise en charge des majeurs vulnérables ..................18
1.2.3 Une nouvelle organisation du secteur tutélaire ...........................................21
1.2.4 La loi de 2007 qualifiée de loi des libertés ..................................................26
2 Le droit des usagers appliqué à la population des m ajeurs protégés ................29
2.1 La prise en compte des particularités de la population des majeurs protégés
dans l’exercice de leurs droits ......................................................................................29
2.1.1 Les majeurs protégés, une population spécifique .......................................29
2.1.2 Les majeurs protégés en tant qu’usager d’un établissement social et
médico-social ............................................................................................................31
2.2 Une difficile adaptabilité des outils de la loi du 2 janvier 2002 par les services de
mandataires judiciaires .................................................................................................33
2.2.1 Les causes des difficultés de mise en œuvre du droit des usagers au sein
des services de mandataires judiciaires ....................................................................33
2.2.2 Les outils de la loi du 2 janvier 2002 adaptés aux spécificités de la
population des majeurs protégés ..............................................................................36
2.3 Le constat d’une différence de droits, une inégalité dans la prise en charge des
majeurs protégés .........................................................................................................39
2.3.1 Une inégalité de droits entre les majeurs protégés .....................................39
2.3.2 Les conséquences de cette inégalité dans la prise en charge du majeur ....40
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
3 Préconisations pour la mise en œuvre et le respect du droit des usagers au
sein de la population des majeurs protégés ........ ....................................................... 41
3.1 La coopération des acteurs, un atout indéniable dans l’amélioration de
l’organisation du secteur tutélaire et de la prise en charge du majeur .......................... 41
3.1.1 La création d’un Groupement de Coopération Sociale et Médico-sociale ... 41
3.1.2 La mutualisation des compétences des mandataires judiciaires privés ...... 44
3.2 L’amélioration et l’adaptation des outils de la loi 2002-2, la création d’un
référentiel commun aux mandataires judiciaires .......................................................... 45
3.2.1 La mise en place d’un référentiel commun ................................................. 45
3.2.2 Une proposition de méthodologie de mise en place des outils de 2002-2 au
sein des services des mandataires judiciaires. ......................................................... 46
3.2.3 Des pistes d’amélioration des outils en tant que tels de la loi du 2 janvier
2002 47
3.3 La création d’un guide de bonnes pratiques, un outil d’harmonisation des
pratiques ...................................................................................................................... 48
3.3.1 Les avantages découlant de la création de cet outil ................................... 48
3.3.2 La méthodologie d’élaboration de ce référentiel ......................................... 49
3.3.3 Un exemple précis, le premier entretien avec le majeur protégé ................ 50
3.4 Le rôle de l’inspecteur dans l’amélioration de la prise en charge et dans le
respect des droits des majeurs protégés...................................................................... 51
3.4.1 Le rôle de l’IASS, un suivi des outils et un rôle d’accompagnement des
acteurs de la protection juridique des majeurs .......................................................... 51
3.4.2 Le rôle du pilotage du secteur de la protection juridique des majeurs par
l’inspecteur ............................................................................................................... 54
Conclusion ........................................ ............................................................................. 57
Bibliographie ..................................... ............................................................................ 59
Liste des annexes ................................. ........................................................................... I
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 1 -
L i s t e d e s s i g l e s u t i l i s é s
CASF: Code de l’action sociale et des familles
CNC: Certificat national de compétence
CPOM : Contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens
CVS: Conseil de la vie sociale
DDCS: Direction départementale de la cohésion sociale
DPF: Délégué aux prestations familiales
DRASS: Direction régionale des affaires sanitaires et sociales
DRJSCS: Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale
EHESP: Ecole des hautes études en santé publique
EHPAD: Etablissement hébergeant des personnes âgées dépendantes
ESMS: Etablissement social et médico-social
FNAT: Fédération nationale des associations tutélaires
GIE: Groupement d’intérêt économique
GIP: Groupement d’intérêt public
GCSMS: Groupement de coopération social et médico-social
HPST: Hôpital, patient, santé et territoire
IGAS: Inspection générale des affaires sociales
IASS: Inspecteur de l’action sanitaire et sociale
LCE: Lutte contre les exclusions
MAJ: Mesure d’accompagnement judiciaire
MASP: Mesure d’accompagnement social personnalisé
MJPM: Mandataire judiciaire à la protection des majeurs
OMS: Organisation mondiale de la santé
UDAF : Union départementale des associations familiales
UNAF: Union nationale des associations familiales
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Introduction
« Je remontais dans ma mémoire jusqu'à l'enfance, pour retrouver le sentiment d'une
protection souveraine. Il n'est point de protection pour les hommes. Une fois homme on
vous laisse aller. »
Antoine de Saint-Exupéry
Extrait de Pilote de guerre
La protection juridique des majeurs est cependant une notion ancienne. Dès 1804, le
code civil comporte une partie quant à l’incapacité du fait de l’altération des facultés
intellectuelles et organise deux régimes de protection de l’aliéné. L’ambition du code civil
est alors de protéger le patrimoine de ces personnes.
En 1808, une loi sur les aliénés est adoptée, elle définit le régime des aliénés placés dans
un établissement psychiatrique. Même si ce dispositif ne concerne que les « aliénés
internés » laissant hors de son champ d’application de nombreuses personnes, il va
perdurer jusqu’en 1968 date à laquelle intervient une réforme majeure.
« Le texte a le mérite d’affiner expressément le caractère protecteur de toutes les
mesures. Il était bon psychologiquement de proclamer que, dans l’interprétation de
l’ensemble du système doit toujours prédominer l’idée de protection de l’incapable »1
déclarait le député Monsieur Henri Pleven à propos de la loi du 3 janvier 19682 portant
réforme du droit des incapables majeurs.
Cependant, cette notion de protection a évolué : de la loi du 3 janvier 1968 de protection
du patrimoine de l’incapable, la loi du 5 mars 20073 est une loi de libertés affirmant les
droits fondamentaux des majeurs protégés, la protection se recentre autour de l’individu
et non plus du patrimoine.
Les changements de terminologie participent symboliquement à l’évolution de la
perception du majeur en tant qu’individu que l’on doit protéger.
Nous pouvons noter un premier changement de terminologie, les mots « aliénés » ou
« interdits » ne sont plus employés dans la loi du 3 janvier 1968.
Par la suite, le terme « incapable » sera également supprimé par la loi du 5 mars 2007,
ces anciennes terminologies considérées péjoratives ont été proscrites pour être
1 Rapport de M. Pleven au nom de la commission des lois (n°1891) », Travaux préparatoires à la loi n°68-5 du 3 janvier 1968, J.O., Documents de l’ Assemblée nationale, 7 sept. 1967, Annexe, n°1891 2Loi n°68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du dro it des incapables majeurs 3 Loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 3 -
remplacées par des expressions comme les majeurs protégés ou les personnes
vulnérables.
La notion de vulnérabilité renvoie à la fragilité de l’existence humaine. Dans le dictionnaire
« le petit Larousse », l’adjectif vulnérable se définit comme « faible, qui donne prise à une
attaque, qui est exposé aux atteintes »
L’OMS4 définit les personnes vulnérables comme « celles qui sont relativement (ou
totalement) incapables de protéger leurs propres intérêts. Plus précisément, leur pouvoir,
leur intelligence, leur degré d'instruction, leurs ressources, leur force ou autres attributs
nécessaires pour protéger leurs intérêts propres, peuvent être insuffisants »
Cette définition de l’OMS des personnes vulnérables est retenue ici comme définition
caractérisant les majeurs protégés.
La réforme du 5 mars 2007 est un symbole de la volonté législative de protéger les
majeurs vulnérables. Certes, cette protection existait, mais cette loi donne une dynamique
nouvelle à la protection qui impose de veiller particulièrement sur la personne en situation
de vulnérabilité.
Cela se traduit notamment par l’application à la population des majeurs protégés du droit
des usagers et des outils afférents issus de la loi du 2 janvier 20025.
Sans reprendre l’intégralité des fondements, la loi du 2 janvier 2002 vise la promotion
l’autonomie et de la protection des personnes, l’exercice de leur citoyenneté et la
prévention de leur exclusion. Cette loi a permis de mettre en évidence que les
bénéficiaires des établissements sociaux et médico-sociaux ont les mêmes droits que tout
autre citoyen et peuvent également en jouir.
Les droits proclamés et surtout les instruments prévus pour en assurer le respect sont des
mutations importantes dont les professionnels de la protection juridique doivent
dorénavant assurer l’application.
Questionnements et démarche
Le choix de ce thème de mémoire correspond à une préoccupation de mon terrain de
stage, l’ex- DRASS, actuellement DRJSCS, Ile de France, et du service « Lutte Contre les
Exclusions » (LCE) qui a piloté et réalisé le schéma régional des mandataires judiciaires à
la protection des majeurs et des délégués aux prestations familiales.
J’ai pu participer à la mise en place de ce schéma, ce qui m’a permis de prendre
conscience de l’importance de ces questions au sein du service et du rôle que
4 Rapport de l’OMS « Lignes directrices internationales d’éthique pour la recherche biomédicale impliquant des sujets humains », Genève 2003. 5 Loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action s ociale et médico-sociale
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
l’Inspecteur de l’Action Sanitaire et Sociale peut jouer dans la prise en charge des
majeurs protégés.
En effet, ce mémoire est universitaire, il sera cependant centré autour du métier
d’inspecteur et du rôle qu’il peut avoir dans le pilotage de la politique publique de
protection des majeurs vulnérables.
Le contexte de rédaction de ce mémoire est particulier, il s’inscrit dans le cadre d’une
double formation : la formation universitaire du master PPASP et la formation
professionnelle en tant qu’inspectrice.
Nous aborderons donc ce mémoire universitaire sous l’angle professionnel d’inspecteur.
La formation professionnelle initiale a pris fin au 1er avril 2011 avec une prise de poste au
sein de la Délégation Territoriale d’Eure-et-Loir, à l’ARS du Centre, au sein de l’unité offre
hospitalière. Ce début de pratique professionnelle, bien que dans un domaine
complètement différent, m’a permis d’acquérir une première vision concrète du métier
d’inspecteur.
Les inspecteurs de l’action sanitaire et sociale sont chargés de la mise en œuvre des
politiques sanitaires, médico-sociales et sociales de l’Etat au sein des Agences
Régionales de Santé ou des DRJSCS et DDCS.
A ce titre, ils assurent notamment des missions de pilotage, d’animation et de contrôle
des dispositifs en matière de politique de santé publique, d’intégration, d’insertion et de
développement social.
La loi HPST 6 a bouleversé le paysage institutionnel de l’action sanitaire et sociale avec la
création des ARS et des DRJSCS, elle met fin aux DRASS et aux DDASS.
Nous ne développerons pas l’organisation des Agences Régionales de Santé qui ont pour
mission d’assurer, à l’échelon régional, le pilotage d’ensemble de notre système de santé.
Elles sont responsables de la sécurité sanitaire, des actions de prévention menées dans
la région, de l’organisation de l’offre de soins en fonction des besoins de la population, y
compris dans les structures d’accueil des personnes âgées ou handicapées.
La DRJSCS, déclinée au niveau départemental avec les DDCS, a trois principaux
domaines d’intervention : les politiques sociales avec notamment la prévention et la lutte
contre les exclusions, la protection des populations vulnérables telles que les majeurs
protégés, les politiques de jeunesse, de vie associative et d’éducation et enfin, les
politiques sportives.
6 Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 5 -
La DRJSCS fédère les différents services de l’Etat dont l’objectif commun est de renforcer
le lien social. Elle regroupe ainsi les pôles sociaux de la DRASS et DDASS tournée vers
les publics vulnérables, des directions départementale et régionale de la jeunesse et des
sports (DRDJS) ayant vocation à faciliter l’accès de tous aux activités sportives et aux
loisirs éducatifs et de la direction régionale de l’Agence nationale pour la Cohésion
Sociale et l’Egalité des chances (ACSé) dont la mission recouvre la lutte contre les
discriminations et la cohésion territoriale dans les territoires de la politique de la ville.
L’étude réalisée au sein de ce mémoire a donc été effectuée au sein d’une institution en
pleine évolution qui doit prendre ses marques et trouver sa place dans un paysage
institutionnel bouleversé.
Afin de mener à bien ce mémoire, j’ai, tout d’abord, étudié en profondeur le dispositif de
protection des majeurs vulnérables avant et après la loi du 5 mars 2007 afin de pouvoir
saisir la volonté du législateur mais également les enjeux de cette réforme.
En parallèle, j’ai analysé la loi du 2 janvier 2002 qui énonce les droits des usagers au sein
du secteur social et médico-social. Une étude approfondie des outils que la loi a mis en
place afin de garantir l’effectivité des droits énoncés a été réalisée.
J’ai pu ainsi en déduire la problématique suivante :
Quel est l’impact de la loi du 2 janvier 2002 dans la protection des majeurs vulnérables et
notamment dans les droits qui sont reconnus aux personnes protégées ?
J’ai par la suite émis les questionnements suivants qui m’ont servis d’hypothèses de
travail:
� Les majeurs protégés sont une population vulnérable qui constitue un public
particulier. Comment les particularités de ce public sont-elles prises en compte
dans l’exercice de leurs droits ? Comment garantir l’effectivité de ces droits dans
la pratique ?
� Les services de mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) sont
devenus des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS), comment
mettent-ils en place les outils de la loi 2002-2 ? Comment les adaptent-ils afin
d’assurer le respect effectif du droit des usagers ?
� Les différents statuts des mandataires judiciaires entrainent une inégalité dans la
mise en œuvre des droits prévus par la loi, quelles sont les conséquences dans la
prise en charge des majeurs protégés ?
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
� Quels sont les leviers d’action à disposition de l’IASS afin d’améliorer la prise en
charge des majeurs protégés ? Les DRJSCS et les DDCS ont-elles un rôle à jouer
dans cette prise en charge ?
Ces questionnements ont délimité mon champ d’investigation, en effet, il a fallu renoncer
à traiter certains thèmes de la protection juridique des majeurs et notamment, la prise en
charge des majeurs protégés par les tuteurs familiaux. Mon mémoire est centré sur les
mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Les tuteurs familiaux, n’étant pas
financés par l’Etat, sont donc hors du champ d’action de l’inspecteur.
Méthodes mises en œuvre
Afin de pouvoir mener à bien mon étude, la première étape a été la lecture des lois,
décrets, circulaires et instructions ministérielles qui s’y rapportent et des données écrites
(rapports, articles et analyses) sur la question.
J’ai aussi effectué des recherches sur internet et auprès de la presse spécialisée.
J’ai également pu participer à deux colloques sur le thème de la protection juridique des
majeurs, le colloque organisé par l’EHESP, le 08 juin 2010 « comment les professionnels
se saisissent de la réforme du 5 mars 2007 ? » et celui organisé par la FNAT le 17 juin
2010 : « la protection de la personne : limites et contours ».
Cela m’a permis, d’une part, d’améliorer ma connaissance de la réforme et de ses enjeux,
et d’autre part, d’analyser la façon dont les différents acteurs de la prise en charge des
majeurs protégés perçoivent la réforme et les difficultés qui en découlent.
J’ai par ailleurs mené des entretiens semi-directifs avec les différents acteurs de la
protection juridique : des mandataires judiciaires de tous les statuts, des acteurs de la
Justice, des grandes fédérations, d’association d’usagers, des IASS.7
Afin de mener à bien ces entretiens, j’ai réalisé une grille reprenant les grands thèmes de
mon étude. Cette grille m’a permis de structurer les rencontres tout en laissant une large
place au dialogue.
Ces entretiens ont permis de confronter les points de vue des différents acteurs de la
protection juridique des majeurs et les problématiques principales engendrées par cette
réforme.
7 CF annexe 1 liste des personnes rencontrées
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 7 -
De plus, j’ai pu, durant mon stage professionnel, participer à la mise en place du schéma
régional des MJPM et des DPF.
Le service LCE a réalisé le schéma régional des mandataires judiciaires à la protection
des majeurs et des délégués aux prestations familiales pour la période 2010-2014.
Pouvoir réaliser mon stage au sein du service LCE m’a donc permis de suivre le
processus de réflexion et de réalisation du schéma.
J’ai ainsi pu m’interroger et échanger sur le rôle de l’IASS dans l’amélioration de la prise
en charge des majeurs protégés.
Plan du mémoire :
La première partie de ce mémoire sera consacrée au nouveau contexte juridique issu de
la loi du 5 mars 2007 dans lequel s’inscrivent la protection des majeurs et les droits des
usagers qui s’appliquent dorénavant à cette population (1)
Puis, nous développerons une analyse sur l’application du droit des usagers aux majeurs
protégés (2)
Enfin, dans une troisième partie, nous formulerons des préconisations permettant
d’assurer le respect effectif du droit des usagers aux majeurs protégés (3)
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 9 -
1 Le droit des usagers et ses conséquences sur la p rotection
juridique des majeurs : le cadre juridique et théor ique.
La loi du 2 janvier 2002 consacre le droit des usagers au sein du secteur social et médico-
social (1.1), cette loi s’articule avec le nouveau cadre juridique de la protection des
majeurs issu de la loi du 5 mars 2007 (1.2)
1.1 La loi du 2 janvier 2002 consacre un droit spéc ifique, le droit des
usagers
Après avoir étudié les différentes étapes qui ont mené à l’affirmation du droit des usagers
au sein des ESMS (1.1.1), nous verrons que le texte de loi du 2 janvier 2002 décline un
statut précis de l’usager, de ses droits (1.1.2) et il met en place des outils permettant d’en
garantir le respect (1.1.3)
1.1.1 L’affirmation du droit des usagers au sein du secteur médico-social
Le droit des usagers du secteur social et médico-social a connu de nombreuses
évolutions, deux dates clefs sont cependant à retenir : 1975 et 2002.
En effet, la loi du 30 juin 19758 relative aux institutions sociales et médico-sociales crée
spécifiquement un secteur social et médico-social distinct du secteur hospitalier et clarifie
le statut des établissements et des services qui en relèvent. Cette loi définit le cadre qui
met en place la planification, la création, le régime d’autorisation, de tarification, le
fonctionnement des ESMS qu’elle aura définis préalablement.
L’adoption de cette loi a permis de consacrer les spécificités de ce secteur et de créer un
cadre souple et cohérent pour ces établissements qui sont très hétérogènes.
Cette loi traite d’avantage des équipements que des usagers. En effet, elle n’aborde pas
les droits ni même les intérêts des usagers, il faudra attendre la loi du 3 janvier 1985 pour
que soit introduit une première instance participative à savoir le conseil d’établissement
où l’on associe les usagers, les familles et les personnels. Cela permet de s’impliquer et
de s’investir dans le fonctionnement de l’établissement.
A partir du milieu des années 1990, un mouvement axé sur le renforcement de la loi sur
son versant droit des usagers a amorcé la réforme de la loi de 1975. La parution d’un
8 Loi n°75-535 du 30 juin 1975 relative aux institut ions sociales et médico-sociales
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
rapport de l’IGAS9 dit le rapport JOIN- LAMBERT met en avant le constat d’une législation
inadaptée qui doit évoluer.
Jacques Barrot, ministre des affaires sociales de l’époque, confie le projet de loi à la
Direction de l’Action Sociale. La réforme de la loi du 30 juin 1975 doit répondre à 4
objectifs :
- Promouvoir le droit des bénéficiaires
- Elargir les missions de l’action sociale et médico-sociale
- Améliorer les procédures techniques de pilotage
- Coordonner l’action des décideurs en améliorant la concertation et le partenariat
Le but de cette réforme est vraiment de centrer le dispositif sur l’individu, il est nécessaire
que les structures soient organisées et la prise en charge mise en œuvre exclusivement
en fonction des personnes accueillies.
De nombreux débats et projets de lois se succèdent pour finalement arriver à l’adoption
de la loi n°2002-2 rénovant l’action sociale et méd ico-sociale par le Parlement en
décembre 2001 et à sa publication au journal officiel, le 2 janvier 2002.
Cette année 2002 constitue une année centrale dans la reconnaissance du droit des
usagers. En effet, on passe d’une période où, au regard des textes tout au moins, l’usager
avait peu d’avis à donner sur les prestations qu’il recevait à une nouvelle époque où
l’usager se situe réellement au cœur des dispositifs.
1.1.2 Le droit des usagers selon la loi du 2 janvie r 2002
La loi du 2 janvier 2002 reconnait les droits des usagers des établissements sociaux et
médico-sociaux, elle permet ainsi à l’usager de devenir un sujet de droit et non plus un
objet de droit. Les droits reconnus aux usagers peuvent être répartis en deux catégories :
la première est un rappel des droits fondamentaux tels que l’intimité, la dignité, le respect
de la vie privée… et la deuxième sont des droits reconnus spécifiquement aux usagers
des ESMS.
a) Des droits traditionnellement reconnus : les droits fondamentaux
L’article L311-3 du CASF ouvre la section « droits des usagers », il dispose que
« l’exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge
par des établissements et services sociaux et médico-sociaux ». Ainsi, les droits
fondamentaux doivent être respectés au sein des ESMS.
Définir cette notion est une tâche qui n’est pas aisée. En effet, son contour est très difficile
à établir notamment comme l’indique Montesquieu dans « L’esprit des lois » à propos de
9 Rapport de l’IGAS n°95-155, « Bilan d’application de la loi du 30 juin 1975 relative aux ISMS »
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 11 -
la liberté « il n’y a point de mot qui ait reçu plus de différentes significations que celui de
liberté »
Nous allons retenir qu’il s’agit des libertés et des droits reconnus par la Constitution et la
Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.
Ainsi, l’usager a le droit à sa dignité, la dignité se rapporte au respect, à la considération
que l’on doit à quelqu’un. Le respect pris au sens philosophique du terme, selon Kant,
définit un rapport à l’autre dans une reconnaissance de sa personne en tant qu’égal de
soi même.
Par déduction, « l’ensemble des mauvais traitements relève du non respect de la dignité
des personnes mais également les pratiques qui ne seraient plus acceptées du fait des
évolutions des normes sociales »10
De plus, les usagers ont droit au respect de leur vie privée, c’est un droit essentiel de la
personne, il est inscrit à l’article 9 du Code Civil : « chacun a le droit au respect de sa vie
privée », elle revêt plusieurs aspects tels que l’état civil, la religion, le patrimoine…
Enfin, l’établissement est garant de la sécurité de la personne et de ses biens. C’est
d’autant plus important que les personnes accueillies au sein des ESMS sont des
personnes fragilisées qui ne peuvent plus assurer elles-mêmes leur propre sécurité.
La loi du 2 janvier 2002 rappelle donc que les personnes accueillies au sein des ESMS
sont des personnes qui conservent leurs droits fondamentaux. En devenant usager, elles
acquièrent aussi des droits spécifiques.
b) Des droits spécifiques à la prise en charge au sein des ESMS
La loi du 2 janvier 2002 affirme des droits qui sont propres aux usagers des ESMS.
� Le libre choix et la participation afin de remettre l’usager au cœur du dispositif de
prise en charge
Un des principaux buts de la loi du 2 janvier 2002 est de redonner toute sa place à
l’usager au sein du dispositif. La loi affirme « le libre choix entre les prestations adaptées
qui lui sont offertes » ainsi que « sa participation directe ou avec l’aide de son
représentant légal à la réalisation et à la mise en œuvre du projet d’accueil et
d’accompagnement qui le concerne. »
Le libre choix revêt deux dimensions : tout d’abord, l’usager a le choix entre une prise en
charge à domicile ou une prise en charge au sein de l’établissement. Cependant, dans la
pratique, ce libre choix est difficile à mettre en œuvre étant donné le faible nombre de
services de prise en charge à domicile notamment pour les personnes âgées.
10 JM LHUILLIER, « le droit des usagers dans les ESMS », 3ème édition, Edition ENSP
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
La deuxième dimension est la liberté de choix dont l’usager dispose entre différentes
prestations offertes par l’établissement.
Cette loi affirme également la légitimité de l’usager à s’entretenir directement avec le
professionnel, il prend une part active à sa prise en charge et aux décisions qui y sont
associées.
Le législateur a considéré que l’usager sait ce qui est bon pour lui, le professionnel pourra
faire peser son expérience et son expertise dans la décision, mais au final, c’est à
l’usager que revient la décision finale dès lors qu’elle n’est pas de nature à mettre en
danger sa sécurité ou à entrainer la responsabilité de l’établissement.
� La personnalisation des prestations de l’établissement
L’article L311-3 du CASF assure à tout usager « une prise en charge et un
accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement, son autonomie
et son insertion, adaptés à son âge et à ses besoins, respectant son consentement
éclairé qui doit systématiquement être recherché lorsque la personne est apte à exprimer
sa volonté et à participer à la décision »
Ainsi, l’établissement doit répondre à un besoin individuel de l’usager, il doit proposer une
prise en charge personnalisée, c'est-à-dire adaptée aux spécificités de chacun.
� L’information sur ses droits fondamentaux et l’accès à toute information
concernant la personne prise en charge pour plus de transparence et de lisibilité
La loi dispose que l’usager doit avoir « accès à toute information ou document relatif à sa
prise en charge, sauf dispositions législatives contraires » ainsi qu’une « information sur
ses droits fondamentaux et les protections particulières légales et contractuelles dont il
bénéficie, ainsi que sur les voies de recours à sa disposition »11
L’information est un enjeu important pour favoriser la liberté de l’usager.
De plus, afin de pouvoir participer aux décisions concernant sa prise en charge, ou dans
le but d’exercer pleinement son libre choix, il est nécessaire que l’usager puisse disposer
de toutes les informations nécessaires à l’élaboration de sa décision, qu’il puisse faire son
choix en toute connaissance de cause.
� La confidentialité des informations concernant l’usager
La confidentialité des informations passe par le secret professionnel et l’obligation de
discrétion des professionnels. Un usager doit pouvoir être assuré que les informations
qu’il donne ne seront pas communiquées sauf dans le cadre d’obligations liées à sa prise
en charge.
11 Article L311-3 du CASF
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 13 -
Les droits des usagers affirmés par la loi du 2 janvier 2002 sont difficiles à mettre en
œuvre en tant que tels, leur respect passe par la mise en œuvre de différents outils au
sein des établissements. D’ailleurs, l’article L311-4 du CASF débute par « afin de garantir
l’exercice effectif des droits (…) »
1.1.3 Les outils garants de la réalité du droit des usagers au sein des structures
La mise en place de ces différents outils permet d’assurer le respect du droit des usagers,
ce qui constitue un des enjeux principaux de la loi du 2 janvier 2002.
a) Les différents outils de la loi du 2 janvier 2002
Sept outils doivent être mis en place au sein des établissements : Le livret d’accueil, la
charte des droits et libertés, le contrat de séjour ou Document Individuel de Prise en
Charge, le recours à une personne qualifiée, le règlement de fonctionnement de
l’établissement, le projet d’établissement ou de service, le conseil de la vie sociale (ou
autre forme de participation des usagers).
Tous ces outils ont pour vocation de faire respecter les droits des usagers. Nous en
dresserons les grandes lignes tout en nous attardant sur deux outils qui nous semblent
être primordiaux : le contrat de séjour ou document individuel de prise en charge et le
projet d’établissement.
� Des outils en faveur de la participation de l’usager
Le contrat de séjour, un instrument de participation individuel.
Le contrat de séjour doit être signé avec l’usager ou son représentant pour tout séjour
supérieur à deux mois, ce document est établi à l’admission ou au plus tard dans les
quinze jours, signé dans le mois qui suit l’admission et révisé tous les ans.
L’article L311-4 du CASF dispose qu’un contrat de séjour est conclu avec la participation
de la personne accueillie ou de son représentant légal. Si la personne accueillie refuse de
signer le contrat, un nouveau document est mis en place : le document individuel de prise
en charge. Le contenu ne diffère pas du contrat mais seul le directeur y appose sa
signature.
Le contrat de séjour doit a minima préciser :
- les objectifs de la prise en charge et les prestations adaptées à la personne
- la description des conditions de séjour et d'accueil,
- la participation financière, y compris en cas d'absence du résident ou
d'hospitalisation,
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
- la liste des prestations offertes (logement, restauration, surveillance médicale,
animations, ...)
Le décret d’application du 26 novembre 2004 fixe très précisément les conditions de
conclusion du contrat.
La contractualisation constitue surement un point d’innovation majeur de la loi du 2 janvier
2002, en effet, conclure un contrat, c’est admettre qu’il y a deux parties en jeu avec des
intérêts et des positions qui peuvent diverger.
Le contrat formalise une nouvelle relation avec l’usager, il permet de responsabiliser la
personne accueillie, elle devient en signant ce contrat un acteur à part entière de sa prise
en charge.
Le Conseil de Vie Sociale, un outil de participation à la vie collective
Le conseil est une instance collégiale composée de représentants des familles, des
usagers et du personnel. C’est un lieu d’échange sur toutes les questions intéressant le
fonctionnement de l’établissement dans lequel est accueilli l'usager. Il est également un
lieu d’écoute très important, ayant notamment pour vocation de favoriser la participation
des usagers.
� Des outils favorisant l’information des usagers
Le livret d’accueil
Le livret d’accueil est à la fois un outil d’information pour l’usager et un élément de
communication vers l’extérieur. La loi de 2002 n’impose pas de contenu particulier, mais
fait cependant obligation d’y annexer la charte des droits et libertés et le règlement de
fonctionnement. À titre indicatif, la circulaire du 24 mars 2004 donne quelques
recommandations : situation géographique, organisation générale de l’établissement.
Le directeur de l’établissement dispose donc d’une grande liberté tant sur la forme que
sur le fond.
La charte des droits et des libertés de la personne accueillie
La charte énonce les droits fondamentaux des usagers en les adaptant au contexte de
leur prise en charge, nous pouvons citer par exemple, le droit à l’information, le libre
choix, le droit à l’autonomie.
Le règlement de fonctionnement
Il définit autant les droits de la personne accueillie que ses obligations au sein de
l’établissement, il décrit l’organisation de l’établissement, l’affectation des locaux, sûreté
des personnes et des biens. Il met en place les règles qui sont nécessaires à la vie en
collectivité.
Le projet d’établissement
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 15 -
Le projet d’établissement est défini à l’article L311-8 du CASF qui dispose que « pour
chaque établissement ou service social ou médico-social, il est élaboré un projet
d’établissement ou de service qui définit des objectifs notamment en matière de
coordination, de coopération et d’évaluation des activités et de la qualité des prestations
ainsi que ses modalités d’organisation et de fonctionnement »
C’est la base institutionnelle de l’établissement, il met en avant la philosophie et les
principes qui régissent l’organisation de l’établissement. Le projet d’établissement doit
placer l’usager au cœur du dispositif d’accueil et d’accompagnement, il doit également
trouver une articulation avec les projets individualisés des usagers dans le but de donner
une cohérence globale à la prise en charge au sein de l’établissement.
De plus, le projet d’établissement est l’outil qui constitue la principale garantie de mise en
œuvre des droits des usagers, il définit les modalités de fonctionnement et de mise en
place des outils garantissant le respect effectif du droit des usagers.
� Un outil de protection, la personne qualifiée
Pour l’aider à résoudre un conflit individuel ou collectif et à faire valoir ses droits en tant
qu’usager d’un établissement, toute personne prise en charge, ou son représentant légal,
peut faire appel à une personne qualifiée. L’usager choisit ce médiateur (magistrat à la
retraite, élu à la retraite, agent des DDCS à la retraite…) sur une liste établie
conjointement par le préfet et le président du Conseil général.
Pour le législateur, cette personne qualifiée est une garantie supplémentaire en faveur de
l’usager.
b) Les enjeux des outils de la loi du 2 janvier 2002
Les outils de la loi du 2 janvier 2002 ont pour but principal de garantir le respect effectif du
droit des usagers au sein des ESMS. De plus, en assurant le respect des droits des
usagers au sein des structures, ils permettent une amélioration globale de la prise en
charge des personnes accueillies.
En effet, l’intérêt à mettre en place ces outils se ressent à plusieurs niveaux. Tout d’abord,
cela favorise la bientraitance, ou tout du moins réduit les risques de maltraitance.
La bientraitance est définie par l’ANESM12 comme une démarche collective pour identifier
l’accompagnement le meilleur possible pour l’usager, dans le respect de ses choix et
dans l’adaptation la plus juste à ses besoins. C’est une culture qui vise à promouvoir le
bien être des usagers. La mise en place des outils favorise cette bientraitance étant
donné qu’elle amène les professionnels à se questionner sur leur pratique, à se remettre
en question tout en cherchant des solutions qui permettent d’améliorer la prise en charge
12 ANESM, recommandations de bonnes pratiques professionnelles, « la bientraitance : définition et repères pour la mise en œuvre », Juin 2008
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
globale de l’usager. Cela passe par une communication et une information des
professionnels du droit des usagers.
De plus, cela permet à l’établissement de disposer d’un cadre clair, commun et
transparent. Cela assure plus de lisibilité, ce qui est un atout dans la prévention des
conflits. Les bases sont connues de tous, des usagers, des familles et du personnel.
La loi du 2 janvier 2002 affirme donc de nombreux droits qui sont rendus effectifs par la
mise en place des différents outils. Le droit des usagers affirmé par cette loi a un impact
sur la population des majeurs vulnérables.
1.2 La réforme de la protection juridique des majeu rs du 5 mars 2007
constitue une loi de liberté
Une réforme de la protection juridique des majeurs était devenue indispensable (1.2.1), la
loi du 5 mars 2007 refonde entièrement le dispositif en modifiant la prise en charge des
majeurs vulnérables (1.2.2), l’organisation du secteur tutélaire (1.2.3) et en accordant de
nombreuses garanties supplémentaires aux majeurs protégés (1.2.4).
1.2.1 La loi du 5 mars 2007, une réforme nécessaire
La loi du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs13est un texte
innovateur.
Cette loi définit d’abord la capacité comme la règle et l’incapacité comme l’exception, une
nouveauté face au système existant.
Une des idées principales de cette loi est le respect de l’autonomie des personnes
protégées : la protection judiciaire entrainant une restriction des libertés, elle doit être
nécessaire et subsidiaire. Ces principes ne sont pourtant énoncés explicitement dans le
texte de loi, ils ne sont que sous-entendus, mais ils restent perceptibles à sa lecture.
De plus, la loi procède à la distinction entre la gestion sur le plan civil de la personne et
des biens et la prise en charge médicale. Ainsi, lors d’un internement psychiatrique, la
personne internée ne se verra pas automatiquement mise sous administration.
La loi de 1968 prévoit un dispositif permettant de protéger un majeur souffrant « d’une
altération de ses facultés personnelles qui le met dans l’impossibilité de pourvoir seul à
ses intérêts » ainsi que celui qui souffre d’une altération corporelle l’empêchant d’exprimer
13Loi n°68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du dro it des incapables majeurs
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 17 -
sa volonté. Elle met en place 3 types de mesures : la tutelle, la curatelle et la sauvegarde
de justice.
Cependant, cette loi n’était plus adaptée pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, le dispositif de 1968 a été mis en place pour quelques milliers de
personnes, actuellement, 800 000 personnes, soit 1% de la population française sont
placées sous un régime de protection juridique14.
L’institut national d’études démographiques avait projeté qu’en l’absence de réforme, il y
aurait environ près d’un million de personnes placées sous protection juridique. Cette
augmentation s’explique par le vieillissement de la population et l’allongement de la durée
de vie : une personne sur dix avait 75 ans ou plus en 2004, soit deux fois plus qu’en 1962.
De plus, le rapport d’enquête « le fonctionnement du dispositif de protection des
majeurs » réalisé par l’inspection générale des finances, des services judiciaires et
l’IGAS, le 24 novembre 1998 met également en avant l’explosion du nombre de mesures :
Entre 1990 et 1996, le nombre de décisions judiciaires a augmenté de 45% pour atteindre
le nombre de 50 000.
Le rapport FAVARD15 souligne que si le système n’est pas modifié le nombre de majeurs
protégés pourrait atteindre 1 125 000 en 2010.
L’augmentation considérable du nombre de mesures justifiait la réforme du dispositif
initial.
Pourtant, le rapport FAVARD met en avant d’autres constats et fait évoluer le sujet de la
protection juridique des majeurs. Il est issu de la réflexion d’un groupe de travail mené par
Monsieur FAVARD, conseiller à la Cour de Cassation, il inspirera la réforme de mars
2007.
Le rapport met en avant l’évolution de la protection juridique des majeurs : de son but
initial vers un accompagnement social. En effet, de nombreuses mesures sont
prononcées pour des raisons sociales et non plus juridiques.
L’exposé des motifs de la loi du 5 mars 2007 explique que « les mesures de protection
juridique qui sont toujours restrictives de droits pour les personnes qui y sont soumises,
ne doivent pas être un palliatif des insuffisances des dispositifs sociaux »
Cette réforme permet donc de tracer la limite entre protection juridique des majeurs et les
dispositifs d’aide et d’action sociale.
De plus, la question du coût financier de la protection juridique des majeurs imposait une
réforme: en 2006, le coût de cette protection juridique est évalué à 402,7 millions d’euros
14 Exposé des motifs de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection
juridique des majeurs 15 RAPPORT FINAL du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs, Avril 2000
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
et il aurait du atteindre 644 millions d’euros en 2013, cependant avec la mise en place de
cette réforme, il devrait s’élever à 496 millions d’euros.
La réforme de la protection juridique des majeurs de mars 2007 est le résultat d’un long
processus.
De nombreux rapports ont dénoncés l’inadaptation du système en vigueur aux besoins
des majeurs protégés.
Le rapport d’enquête sur le fonctionnement du dispositif de protection des majeurs réalisé
par l’inspection générale des finances et l’IGAS, le 24 novembre 1998, est le premier à
dénoncer de façon catégorique les difficultés et les problèmes de la prise en charge. Puis,
le rapport FAVARD met le problème de la protection juridique en avant et rend le débat
public. Cependant, ce rapport, même s’il inspirera la réforme de 2007, reste sans
conséquence après sa parution : aucun projet concret ne voit le jour.
Le 23 février 1999, une recommandation du comité des ministres du conseil de l’Europe
est adoptée, celle-ci insiste sur le respect des droits et des libertés fondamentaux du
majeur protégé16.
Parallèlement, les associations de mandataires judiciaires, de familles de majeurs
protégés se saisissent du sujet et réclament cette réforme. Notamment « les assises
nationales de la tutelle » organisées par l’UNAF en 1999 permettent de rendre réellement
le débat public et de mettre en lumière toute la complexité du problème.
La réforme de mars 2007 de la protection juridique des majeurs est issue d’une réflexion
engagée par le ministère en associant de nombreux partenaires et notamment les acteurs
de la prise en charge des majeurs protégés.
Le texte définitif du projet de loi a été adopté par le Parlement le 22 février 2007, et
promulgué après saisine du conseil constitutionnel le 5 mars 2007.
1.2.2 La modification de la prise en charge des ma jeurs vulnérables
La loi du 5 mars 2007 cherche tout d’abord à limiter la mise en place de mesures de
protection aux situations où elles sont absolument nécessaires : la solution la plus légère
pour la personne ou pour la famille sera toujours privilégiée.
Une ligne de partage claire est tracée entre les mesures pour des personnes dont
l’altération des facultés est médicalement constatée et qui à ce titre peuvent bénéficier
d’une mesure de protection juridique entrainant une incapacité juridique (b) et les
mesures d’accompagnement social qui n’entrainent donc pas d’incapacité (a).
16 CF Annexe 2.
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 19 -
a) La mise en place d’un accompagnement social et judiciaire des majeurs
vulnérables.
C’est une des avancées principales de la loi du 5 mars 2007 : le département apporte au
bénéficiaire une aide à la gestion de ses prestations sociales ainsi qu’un
accompagnement social personnalisé : la Mesure d’Accompagnement Social
Personnalisé (MASP).
Cette mesure vise à éviter autant que possible le recours à une protection juridique quand
il est possible de remédier aux difficultés sociales du majeur.
En l’absence d’efficacité de la MASP, une Mesure d’Accompagnement Judiciaire (MAJ)
est mise en place. La réponse apportée est une réponse graduée afin de l’adapter au
mieux aux besoins du majeur.
L’article L271-1 CASF dispose que la MASP est ouverte à toute personne majeure qui
perçoit des prestations sociales et dont « la santé ou la sécurité est menacée par les
difficultés qu’elle éprouve à gérer ses ressources »
Cette mesure constitue une aide à la gestion des prestations sociales, la personne
bénéficie en plus d’un accompagnement social adapté à travers des actions de
réinsertion.
La MASP est composée de deux étapes : la première étape est contractuelle, elle
nécessite le consentement de l’intéressé.
Il y a une réelle volonté de contractualisation au sein de cette mesure, le contrat est établi
entre le majeur et le conseil général. Il prévoit des engagements réciproques qui doivent
permettre une réinsertion sociale du bénéficiaire à travers des actions pour son logement
ou l’accès aux soins. L’objectif est d’amener le majeur à une gestion autonome des
prestations sociales.
La MASP est une mesure graduée en différents niveaux, si les niveaux 1 et 2 décrits ci-
dessus échouent, dans le sens où la personne refuse cet accompagnement ou ne
respecte pas ses engagements, la MASP de niveau 3 peut être imposée de façon
contraignante.
Ainsi, la loi prévoit que les prestations sociales peuvent être affectées directement au
bailleur de la personne, cette mesure est mise en place dans le but d’éviter la perte du
logement.
En cas d’échec des MASP de différents niveaux et seulement en cas d’échec, une
transition vers l’accompagnement judiciaire peut être mise en œuvre. Son application est
subsidiaire.
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Le code civil énonce à l’article 495 alinéa 1 que la MAJ a pour mission de « rétablir
l’autonomie de l’intéressé dans la gestion de ses ressources »
Cette mesure s’étend également aux seules prestations sociales, elle est prononcée par
le juge des tutelles à la demande du procureur de la République. Elle peut être ouverte
sous quatre conditions cumulatives :
- L’échec de la MASP
- La présence d’un risque pour la santé ou la sécurité de l’intéressé
- L’impossibilité de confier la gestion des prestations sociales au conjoint
- L’absence d’une mesure juridique
La MAJ est également une mesure graduée, en effet, le juge des tutelles peut prononcer
une mesure en premier lieu sur certaines prestations sociales et si la situation le justifie, il
peut étendre le champ de la mesure à d’autres prestations.
b) Les différentes mesures de protection des majeurs pouvant être mises en œuvre
Parmi les nombreux changements induits par la réforme du 5 mars 2007, cette dernière
crée une nouvelle mesure conventionnelle : le mandat de protection futur. Cette mesure
est innovante : elle permet d’organiser par la personne elle-même la gestion de ses biens
dans l’avenir si elle se trouve un jour dans l’incapacité d’assumer cette gestion.
L’article 425 du Code Civil dispose que la personne que l’on veut protéger doit présenter
une altération de ses facultés personnelles qu’elles soient mentales ou physiques,
médicalement constatées, qui sont de nature à empêcher l’expression de sa volonté.
Trois types de mesures peuvent être prononcés par le juge des tutelles en fonction du
degré d’altération des facultés du majeur. Ces mesures ont vocation à compenser
l’altération des facultés personnelles qui empêche le majeur d’exprimer sa volonté et donc
de réaliser un certain nombre d’actes dans sa vie civile.
Tout d’abord, la sauvegarde de justice est une mesure à caractère provisoire qui cesse
quand le majeur a retrouvé ses pleines capacités ou quand une mesure plus
contraignante doit intervenir. Cette mesure permet au majeur de sauvegarder ses
capacités mais un régime de protection spécifique est instauré par rapport aux actes qu’il
effectue.
L’article 440 du Code Civil définit les mesures de protection juridique que constituent la
curatelle et la tutelle :
Ainsi, la curatelle a pour objet d’assister et de contrôler de façon continue et dans les
actes importants de la vie civile le majeur qui nécessite d’être assisté ou contrôlé.
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 21 -
La tutelle est une mesure d’un degré supérieur, elle vise à représenter de manière
continue et dans les actes de la vie courante, le majeur dont l’altération de ses facultés
rend la représentation obligatoire.
Il y a donc une distinction qui est mise en avant entre la représentation et l’assistance en
fonction du degré d’altération des facultés du majeur.
Le tuteur représente ainsi le majeur dans tous les actes de la vie civile sauf dans les cas
où la loi autorise les majeurs à agir seul. La loi du 5 mars 2007 prévoit qu’il doit apporter
des « soins prudents, diligentés et avisés dans le seul intérêt de la personne protégée »
En ce qui concerne la curatelle, le majeur ne peut pas sans l’assistance du curateur faire
un acte qui en cas de tutelle requerrait une autorisation du juge ou du conseil des
familles.
1.2.3 Une nouvelle organisation du secteur tutélair e
La loi du 5 mars 2007 modifie en profondeur l’organisation du secteur de la protection
juridique des majeurs : un nouveau statut pour les mandataires judiciaires est créé.
Elle institue un nouveau statut homogène des mandataires judiciaires à la protection des
majeurs. L’ensemble du secteur tutélaire est entièrement réorganisé depuis le 1 janvier
2009.
Le doyen Carbonnier déclarait que « la famille du malade fait souvent partie de sa
maladie », ainsi il est souvent préférable que les personnes vulnérables soient prises en
charge par des professionnels.
Cependant, la primauté de la famille a été réaffirmée dans la réforme de 2007. Le code
civil, article 415 alinéa 5 énonce que « la protection des majeurs est un devoir des
familles et de la collectivité publique » Le principe de subsidiarité s’applique et les tuteurs
familiaux sont privilégiés et bénéfiques pour le majeur.
Ainsi, la priorité est donnée à la personne avec laquelle le majeur vit ou bien un parent,
allié ou proche.
Pourtant, dans les faits, les mesures de protection sont très souvent exercées par des
intervenants extérieurs à la famille de la personne vulnérable, en effet, plus de 50% des
mesures judiciaires sont confiées à des tiers : les mandataires judiciaires à la protection
des majeurs (MJPM)
En effet, les MJPM exercent plus de 440 000 mesures sur les 800 000 existantes.
Cette appellation recouvre dorénavant l’ensemble des opérateurs tutélaires antérieurs.
L’article L 471-2 du CASF dispose que les mandataires judiciaires sont inscrits sur une
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
liste dressée et tenue à jour par le représentant de l’Etat dans le département. Ainsi
peuvent être inscrits sur cette liste :
� Les services mandataires soumis à autorisation : 450 services exercent près de
320 000 mesures de protection
� Les personnes physiques exerçant à titre individuel, soumises à agrément : Il y a
3 300 personnes inscrites sur les listes départementales des MJPM pour 36 000
mesures, soit une moyenne de 10 mesures par personne.
� Les personnes désignées par un établissement sanitaire, social ou médico-social
en qualité de préposé, soumises à déclaration. Ils exerceraient près de 120 000
mesures de protection.
L’article L471-1 du CASF dispose que les mandataires judiciaires à la protection des
majeurs exercent à titre habituel les mesures de protection des majeurs que le juge des
tutelles leur confie au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de
la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure
d'accompagnement judiciaire.
La mission du mandataire judiciaire consiste à assister, représenter ou accompagner les
personnes qui, du fait d'une altération de leurs facultés, ne peuvent défendre leurs intérêts
seules.
Les MJPM doivent exercer à titre habituel les mesures de protection des majeurs, le
mandataire ne peut pas gérer de mesure occasionnellement. Dans un rapport de
l’Assemblée Nationale17, il est défini que ce critère d’habitude doit « conjuguer une triple
exigence de continuité dans le temps, dans la nature de l’activité réalisée et dans les
éléments de rémunération qui en sont tirés »
Des conditions communes aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent
également être remplies pour permettre l’exercice de cette protection quelque soit le
statut du mandataire.
Tout d’abord, pour exercer leur mission, l’article L471-2 du CASF dispose que les
mandataires judiciaires sont inscrits sur une liste dressée et tenue à jour par le
représentant de l’Etat dans le département.
Dans le mois suivant leur inscription sur la liste, ils doivent prêter serment devant le
tribunal d’instance du chef lieu de leur département.
De plus, les mandataires doivent satisfaire à des conditions de moralité, d’âge, de
formation certifiée par l’Etat et d’expérience professionnelle18
17 Rapport Assemblée Nationale, n° 3557 18 Article L471-4 du CASF
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 23 -
La loi du 5 mars 2007 crée le Certificat National de Compétence (CNC), l’obtention de ce
dernier permet d’attester des compétences de la personne et détermine dorénavant
l’exercice des fonctions de mandataires judiciaires.
Ainsi, les intéressés doivent avoir suivi avec succès cette formation complémentaire
attestant des compétences nécessaires à l’exercice de la fonction et débouchant sur
l’obtention du CNC.
Des conditions d’âge et d’expérience sont exigées pour pouvoir accéder à la formation.
Le contenu de la formation, les conditions et les modalités de la délivrance sont fixés par
un arrêté du 2 janvier 2009. Ainsi, la formation alterne des enseignements théoriques
mais également une formation pratique sous la forme d’un stage d’exercice.
La loi du 5 mars 2007 met en place un délai de 3 ans pour que les MJPM se mettent en
conformité avec la loi et obtiennent le CNC, afin que tous les mandataires judiciaires
soient diplômés du CNC au 1er janvier 2012.
Les nouvelles conditions d’expérience, de diplôme et surtout la création du CNC
manifestent la volonté du législateur de professionnaliser les mandataires judiciaires.
L’obtention de ce diplôme est vécue comme une contrainte par les mandataires
judiciaires, cependant, c’est un vrai outil d’harmonisation des pratiques professionnelles
qui peut permettre une amélioration de la prise en charge des personnes vulnérables.
De plus, l’obtention de ce diplôme permet de faire des fonctions de mandataires
judiciaires un métier reconnu et unique. Le législateur avait pour but d’encadrer les
fonctions des mandataires mais également d’apporter plus de garanties aux majeurs.
Comme nous l’avons vu précédemment, les MJPM peuvent être de différents statuts,
nous nous attacherons à décrire les différents régimes de ces statuts.
� Les mandataires judiciaires, personne physique exerçant à titre individuel
Toute personne physique désirant exercer à titre individuel des mesures de protection
juridique doit obtenir un agrément délivré par les DDCS énoncé par l’article L472-1 du
CASF, cet agrément est délivré si la personne remplit les conditions d’âge, de moralité, de
formation professionnelle et d’expérience évoquées ci-dessus et s’il a souscrit une
garantie quant aux conséquences financières de sa responsabilité civile19.
Les DDCS, avant de délivrer tout nouvel agrément à une personne physique, doivent se
référer au schéma régional des MJPM élaboré par la DRJSCS. En effet, nous verrons ci-
dessous que le schéma a pour but d’évaluer l’offre et de fixer des objectifs sur l’évolution
19 Article L472-2 CASF
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
de l’activité des mandataires et leur organisation. L’obtention d’un agrément doit s’inscrire
dans les besoins fixés par le schéma.20
Une fois l’agrément accordé, le MJPM exerçant à titre individuel a différentes obligations,
il doit notamment adresser chaque semestre aux juges concernés des informations sur le
nombre total de mesures qu’il exerce, sur le nombre de personnes exerçant auprès de lui
la fonction de secrétaire spécialisé.
Ces obligations de transmission d’informations permettent à l’autorité judiciaire d’exercer
une certaine forme de contrôle sur l’exercice de la protection judiciaire par les
mandataires personnes physiques.
� Les mandataires judiciaires, personne physique ou service exerçant en qualité de
préposé d’établissement
Une personne physique peut aussi exercer son activité au sein d’un établissement
accueillant des majeurs protégés. En effet, selon l’article 437 alinéa 2 du CASF, le juge
des tutelles peut désigner une personne ou un service préposé d’un établissement de
santé, social ou médico-social inscrit sur la liste des MJPM
Cependant, la loi du 5 mars 2007 fixe une obligation de désignation d’un préposé pour
certains établissements. En effet, l’article L472-5 du CASF impose aux établissements
publics qui accueillent des personnes âgées ou des adultes handicapés, la désignation
d’un ou plusieurs agents comme MJPM à partir d’un certain seuil déterminé par l’article
D472-13 du CASF. Cet article fixe ce seuil à 80 places autorisées au titre de
l’hébergement permanent.
Ainsi, les autres établissements et notamment les établissements de droit privé ont
seulement la faculté de désigner un préposé et aucune obligation.
Des aménagements sont toutefois possibles : la loi prévoit que ces établissements
peuvent externaliser cette mission en faisant appel à un service de MJPM géré soit par
lui-même, soit par un syndicat inter-hospitalier, un GIP, un GCSMS. L’établissement peut
également recourir par convention aux prestations d’un autre établissement disposant soit
d’un service de MJPM, soit d’un ou plusieurs préposés.
La désignation d’un préposé est conditionnée par une déclaration préalable auprès du
représentant de l’Etat dans le département, soit la DDCS.
L’obligation de désigner un préposé pour certains établissements a déclenché de vifs
débats, de nombreux parlementaires demandaient la suppression pure et simple des
préposés d’établissement. En effet, la question de l’indépendance du mandataire
judiciaire par rapport à la direction de l’établissement se pose. Le CASF déclare pourtant
20 CF Annexe 4
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 25 -
que l’établissement doit assurer au préposé qu’il souhaite désigner un « exercice
indépendant des mesures de protection qui lui sont confiées par le juge ».
De nombreuses mesures sont prises et mises en place afin de pouvoir assurer la
protection effective du majeur sans que des conflits d’intérêt rentrent en jeu.
La remise en cause de l’impartialité du préposé d’établissement a été abordée lors d’un
entretien21 avec la préposée d’un hôpital gérontologique de 1100 lits. La préposée de
l’établissement affirme que l’impartialité entre la gestion des mesures et la direction de
l’hôpital est tout à fait possible, que la direction n’a qu’un droit de regard sur l’organisation
du service mais en aucun cas sur les dossiers.
Ainsi, le MJPM rend des comptes directement au juge des tutelles, le majeur protégé doit
pouvoir s’entretenir avec son mandataire sans la présence de la direction de
l’établissement. Toutes ces mesures permettent d’assurer l’impartialité dans la gestion
des mesures de protection juridique.
Il nous semble essentiel de souligner que confier une mesure de protection à un préposé
permet de répondre à une exigence de proximité. En effet, la personne protégée peut
rencontrer plus facilement son mandataire, la proximité avec le préposé permet une prise
en charge plus adaptée aux attentes des majeurs vulnérables.
De plus, l’article 459 du Code Civil impose une barrière qui permet de lutter contre les
conflits d’intérêt : l’établissement ne pourra décider seul les diligences ou les actes graves
prévus par le Code de la Santé Publique qui touchent la personne du majeur, ils devront
être autorisés par une décision spéciale du juge.
� Les services de mandataires judiciaires
Les services de mandataires judiciaires font leur entrée dans la nomenclature des
établissements et services sociaux et médico-sociaux, fixée par l’article L312-1 du CASF.
C’est un des changements majeurs de la loi du 5 mars 2007. Cette intégration au sein du
secteur médico-social a des conséquences à plusieurs niveaux : le régime des
autorisations, la visite de conformité, le financement, le contrôle et la fermeture des
services, l’application des outils de la loi 2002-2.
Ainsi, les services de mandataires judiciaires sont dorénavant soumis au régime des
autorisations, de transformation ou d’extension des ESMS.
L’autorisation est accordée par le représentant de l’Etat au niveau de la région pour une
durée de 15 ans. Avant le 1 juillet 2010, les organismes gestionnaires d’ESMS déposaient
une demande, la décision d’autorisation était alors rendue après consultation du Comité
Régionale de l’Organisation Sociale et Médico-sociale (CROSMS).
21 Entretien du 27 juillet 2010, Hôpital Gérontologique du département des Yvelines
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Depuis, la loi HPST met en place une procédure d’appel à projets lancée par l’autorité
compétente en charge du financement sur la base d’un cahier des charges pour autoriser
la création, la transformation, ou l’extension des ESMS. La décision d’autorisation est
rendue après classement des projets par une commission de sélection des appels à
projets placée auprès de chaque autorité.
Afin que cette autorisation soit valable, les services de MJPM devront se soumettre à une
visite de conformité22.
Le financement de ces services est dorénavant assuré par une dotation globale de
financement déterminée par la DRJSCS. En effet, c’est désormais le représentant de
l’Etat dans la région et non plus dans le département qui est chargé d’établir la tarification
des prestations fournies par les services MJPM.
La réforme du 5 mars 2007 a donc bouleversé l’organisation du secteur de la protection
juridique des majeurs. Elle améliore également la prise en compte de la personne et de
ses droits.
1.2.4 La loi de 2007 qualifiée de loi des libertés
� La réforme place l’individu au centre du dispositif.
Les régimes de protection juridique des majeurs sont avant tout des régimes de protection
du patrimoine, la loi du 3 janvier 1968 s’est construite autour de cette logique.
Cependant dès 1989, la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation déclare que « les
régimes civils d’incapacité ont pour objet, d’une façon générale, de pourvoir à la
protection des personnes et des biens de l’incapable »
Le conseil de l’Europe, dans une recommandation sur les principes concernant la
protection juridique des majeurs du 23 février 1999, préconisait que tout système de
protection des majeurs devait s’exercer notamment dans le respect de la personne et de
ses droits23.
Le mouvement visant la recentralisation du majeur et de sa volonté au cœur du dispositif
a donc été amorcé depuis plusieurs années et la reconnaissance des droits et libertés a
été matérialisée par la loi du 5 mars 2007 qui a été qualifiée de loi de libertés.
En effet, la réforme insiste sur une meilleure considération des droits du majeur protégé
non seulement en tant que personne mais également en tant qu’usager des structures.
Une des principales avancées de la loi est la prise en compte de la volonté de la
personne et de ses droits. Le mandat de protection futur évoqué ci-dessus est une des
22 Article L313-6 du CASF 23 CF Annexe 2
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 27 -
manifestations de cette prise en compte. La personne peut choisir et organiser sa
protection.
Le majeur voit donc son patrimoine mais également sa propre personne protégés.
La reconnaissance des droits et des libertés fondamentales est une tâche difficile dans le
cadre de la protection juridique des majeurs, en effet, la conciliation entre l’établissement
d’une sécurité juridique pour le majeur et la préservation de sa liberté est un exercice
complexe.
Les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité ont été renforcés par la
loi du 5 mars 2007. Ainsi, la loi énonce très clairement que la mesure de protection ne
peut être ordonnée par le juge qu’en cas de nécessité, que le choix de la mesure doit
dépendre du degré d’altération des facultés de la personne et son contenu doit être
individualisé en fonction de l’altération.
L’ouverture d’une mesure de protection se fonde ainsi autour de ces trois principes
renforcés par la réforme de 2007.
Le nouvel article 415 du Code Civil alinéa 2 issu de la loi du 5 mars 2007 énonce que « la
protection du majeur est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles et
des droits fondamentaux et de la dignité de la personne »
Elle a pour but l’intérêt de la personne tout en favorisant son autonomie.
� La réforme vise à assurer un meilleur respect des droits du majeur en les
renforçant notamment face aux mandataires judiciaires
Les droits des majeurs protégés ont été renforcés dans le but de protéger autant son
patrimoine que la personne elle-même.
Ainsi, nous pouvons citer l’article 426 qui impose au mandataire judiciaire l’obligation de
maintenir à disposition du majeur son logement et ses meubles aussi longtemps que
possible.
L’article 438 dispose que le majeur protégé choisit le lieu de sa résidence principale.
L’article 427 du Code Civil dispose que la personne protégée conserve les comptes ou les
livrets ouverts dans les établissements bancaires de son choix, le mandataire judiciaire
n’ayant pas la capacité d’en ouvrir.
La loi du 5 mars 2007 améliore également la prise en compte de la volonté du majeur
protégé par rapport aux décisions relatives à sa personne.
La loi, tout d’abord, améliore l’information du majeur, la personne protégée doit recevoir
du mandataire judiciaire toutes les informations sur sa situation personnelle, sur l’impact
des décisions et des actes envisagés. Cette information qui doit être adaptée en fonction
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
de la situation et de la capacité de compréhension du majeur se traduit notamment par la
remise de la notice d’information comme nous le verrons ci-dessous.
La loi instaure également un double statut en ce qui concerne les décisions du majeur :
tout d’abord, il existe les actes strictement personnels qui ne peuvent jamais donner lieu à
assistance ou représentation comme par exemple les actes relatifs à la filiation ou les
actes de l’autorité parentale.
En ce qui concerne les autres actes relatifs à sa personne, le code civil énonce une
obligation pour le mandataire de recueillir le consentement du majeur en fonction du
degré d’altération des facultés du majeur. Ainsi, si l’état du majeur le permet et qu’il est
apte à prendre « une décision personnelle éclairée », il prend seul les décisions, sinon le
mandataire peut assister ou représenter le majeur sur autorisation du juge ou du conseil
de famille.
De plus, les mesures de protection juridique des majeurs seront révisées obligatoirement
tous les cinq ans afin que le juge puisse s’assurer qu’elles sont toujours nécessaires et ne
privent pas inutilement de leurs libertés individuelles les personnes protégées.
La protection juridique des majeurs devait donc nécessairement être réformée, la loi de
2007 reconnait la personne protégée comme une personne qui doit être placée au cœur
du dispositif mis en place pour l’accompagner, pour lui apporter la protection dont il a
besoin sans le priver pour autant de ses droits et libertés.
Dorénavant, la population des majeurs protégés se trouve soumise au droit des majeurs
protégés.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 29 -
2 Le droit des usagers appliqué à la population des majeurs
protégés
La réforme du 5 mars 2007 a entrainé l’application à la population particulière des
majeurs protégés du droit des usagers et des outils afférents (2.1). De cette application,
de nombreuses difficultés d’adaptation sont apparues (2.2) et une inégalité de droits est
survenue (2.3).
2.1 La prise en compte des particularités de la pop ulation des
majeurs protégés dans l’exercice de leurs droits
Les majeurs protégés représentent une population particulière par leur diversité (2.1.1),
nombre d’entre eux sont des usagers d’ESMS auxquels le droit des usagers s’applique
(2.1.2)
2.1.1 Les majeurs protégés, une population spécifiq ue
Il est très difficile de dresser un « profil type » des majeurs protégés. En effet, deux
difficultés apparaissent : tout d’abord, les situations des majeurs sous protection juridique
sont diverses et variées. Les causes de la mesure de protection juridique sont
nombreuses: un majeur protégé peut être une personne âgée, handicapée moteur ou
mentale… Les situations sont très diverses, ce qui induit une prise en charge adaptée à
chaque situation.
De plus, nous ne disposons pas de données statistiques exhaustives concernant les
majeurs protégés. Nous savons qu’ils sont actuellement 800 000 en France24 cependant
des données plus précises ne sont pas disponibles. Ce chiffre est une estimation,
personne ne peut recenser de manière exhaustive et décrire cette population.
Il n’existe pas de recueil de données sur les raisons d’un placement sous protection
juridique.
Nous avons rencontré la présidente d’une des associations France Alzheimer d’un
département d’Ile-de-France25. Même cette association ne dispose pas de données en ce
qui concerne le nombre de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer placées sous
protection juridique.
24 Exposé des motifs de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs 25 Entretien du 12 juillet 2010, Association France Alzheimer
- 30 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
Même si les enquêtes sur l’identité des populations sont rares, il n’en demeure pas moins
que cette absence de données ne permet pas de dresser un profil global exhaustif de la
population des majeurs protégés, ce qui pourrait permettre d’adapter l’offre à la demande.
Malgré tout, des études existent, l’étude que nous allons citer a été réalisée par l’UNAF26,
elle ne concerne que les données recueillies par les UDAF, sans prétendre être
exhaustives, ces données nous permettent tout de même de définir un profil général de la
population des majeurs protégés27
Ainsi, selon une étude réalisée par l’Observatoire national des populations des majeurs
protégés en 2006, il apparait que les hommes constituent environ 55% de la population
des majeurs protégés alors qu’ils ne représentent que 47,9% de la population majeure
française.
En ce qui concerne l’âge, les 30-60 ans représentent 59% de la population des majeurs
protégés, les moins de 30 ans regroupent 9% de la population et les plus de 60 ans 33%
des personnes placées sous protection juridique.
Des données sur leur lieu de vie permettent d’affiner notre connaissance des majeurs
protégés : 61,3% des majeurs sont pris en charge à domicile, 26% en maison de retraite,
7% en établissement accueillant des personnes handicapées, 4,7% en hôpital ou clinique
psychiatrique, 0,7% sont sans domicile fixe et 0,3% sont en centre de détention.
Le public concerné par une mesure de protection juridique est très hétérogène, il
comprend à la fois des personnes âgées, des personnes en situation de très grande
précarité (surendettement, travailleurs pauvres…), les personnes souffrant d’une
addiction, les personnes en situation de handicap qu’il soit physique ou mental.
Lors de nos divers entretiens avec les mandataires judiciaires, il est apparu que les
personnes sous protection juridique sont des majeurs venant d’origine, de conditions, de
milieux sociaux et familiaux différents, encore une fois, on ne peut pas dresser un « profil
type » de la personne protégée tant les situations sont diverses et qu’elles ne peuvent
être comparées.
Le seul point commun qu’elles ont, est leur vulnérabilité et leur besoin de protection pour
faire face aux difficultés de la vie courante.
26 UNAF (Union National des Associations Familiales) est « une institution nationale chargée de promouvoir, défendre et représenter les intérêts de toutes les familles » 27 L’Observatoire National des Populations "Majeurs Protégés" (ONPMP) réalise chaque année une étude exhaustive de l’ensemble de la population majeure protégée dont la mesure de protection est assurée par une Union départementale des associations familiales (UDAF), soit près de 120 000 personnes
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 31 -
Les majeurs protégés constituent donc une population particulière par la diversité des
situations. Une prise en charge individualisée est nécessaire et même primordiale afin de
s’adapter à la spécificité des profils des personnes sous protection juridique.
2.1.2 Les majeurs protégés en tant qu’usager d’un é tablissement social et
médico-social
La personne accueillie en ESMS se voit confirmer avec la loi du 2 janvier 2002 dans son
statut de personne et dans ses droits tout en tenant compte de sa vulnérabilité.
Les ESMS ont pour mission d’adapter leur prise en charge aux spécificités du public
accueilli et des particularités au sein même de la population qu’ils reçoivent.
Les établissements ont dû adapter les outils de la loi de 2002 aux spécificités et aux
capacités de compréhension des usagers au sein même de la structure.
Ainsi, nous pouvons citer les résultats d’une enquête nationale menée par la fondation
Médéric Alzheimer en 2009, cette enquête est relative aux droits des personnes atteintes
de la maladie d’Alzheimer au sein des EHPAD28.
Ainsi, 48% des EHPAD déclarent adapter aux personnes âgées atteintes de la maladie
d’Alzheimer le droit à l’information dont elles doivent bénéficier : ils délivrent une
information sur le fonctionnement de l’établissement adaptée à leur capacité de
compréhension. Cette information se traduit à 26% sous forme simplifiée voire très
simplifiée, 59% procèdent à plusieurs entretiens individuels qui permettent de répéter et
de reformuler les informations que doit détenir la personne âgée.
Cependant, un nombre équivalent d’établissements (48%) déclare que l’information
délivrée à la personne âgée est identique à celle donnée à la famille ou à
l’accompagnement quelque soient le stade d’évolution de la maladie et le niveau de
compréhension de la personne malade.
Les personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer doivent recevoir une information
spécifique et adaptée afin de respecter leur droit à l’information.
La situation des majeurs protégés en tant qu’usagers des ESMS est identique : les outils
de la loi 2002-2 doivent être adaptés afin que le droit à l’information et le droit des usagers
en général soit respecté au sein de la structure.
28 Enquête national de la fondation Médéric Alzheimer relative aux droits des personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer auprès de tous les EHPAD ayant déclaré accueillir à l’entrée des personnes malades. 5690 EHPAD ont été contactés, 2662 établissements ont répondu, soit un taux de réponse de 47%.
- 32 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
� Une prise en charge spécifique pour les majeurs protégés au sein des ESMS
Nous nous sommes, tout d’abord, interrogés sur l’existence d’une prise en charge
particulière adaptée aux majeurs protégés accueillis au sein d’un ESMS. Il apparait
clairement que les établissements ne disposent pas d’outils spécifiques pour la population
des majeurs protégés au sein de la structure.
Etant donné que les établissements ne disposent pas d’outils spécifiques pour les
majeurs protégés, le problème qui apparait est la double application de la loi du 2 janvier
2002 : en tant que personne sous protection juridique assurée par un service de MJPM et
qu’usager de l’établissement.
� La double application de la loi du 2 janvier 2002
Toujours selon les résultats de l’enquête que nous avons cités ci-dessus, la fondation
Médéric Alzheimer a permis d’établir que 38% des usagers des EHPAD sont placés sous
protection juridique.
Ainsi, ces personnes âgées sous protection juridique reçoivent les documents de
l’EHPAD mais également ceux du service de mandataire judiciaire. Cette accumulation de
documents ne permet pas de garantir réellement le droit à l’information.
De plus, lors de notre entretien avec la Directrice de la Direction Gestion et Gouvernance
Associative de la FEGAPEI29, le problème de la confusion des outils a été longuement
abordé. En effet, si les établissements et les services de mandataires judiciaires ne
travaillent pas en coopération, le risque que les prises en charges se contredisent et
s’annulent est présent.
Les documents s’accumulent et les outils de la loi du 2 janvier 2002 ne sont plus
efficaces, ils ne permettent plus un respect effectif au sein des structures du droit des
usagers, la prise en charge de la personne n’est plus correctement mise en œuvre.
De plus, nous allons citer à nouveau les résultats de l’enquête Médéric Alzheimer qui
s’est intéressée aux personnes sous protection juridique au sein des EHPAD.
Cette enquête met également en avant les difficultés que les établissements en
l’occurrence les EHPAD rencontrent avec les majeurs sous protection juridique: 32% des
EHPAD trouvent que le délai est trop long et la lourdeur administrative trop importante
pour l’ouverture d’une mesure, 15% que le représentant légal est peu présent et qu’il
manque de disponibilité.
29 Entretien du 15 juillet 2010, la FEGAPEI est la Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées. Elle comprend parmi ses adhérents 470 associations, 3700 établissements et services qui comptent 120 000 professionnels au service des personnes handicapées.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 33 -
10% des établissements relèvent des difficultés dans la gestion par le mandataire
judiciaire de la vie quotidienne du majeur protégé comme par exemple lenteur pour l’achat
de fourniture ou de produit, manque de suivi.
Nous avons mis en avant l’exemple des EHPAD, mais cette problématique concerne tout
type d’ESMS accueillant des majeurs sous protection juridique.
Ainsi, les établissements tout comme les services de mandataires judiciaires sont donc
confrontés à ces difficultés, leur collaboration est primordiale.
Lors de notre entretien au sein de la FEGAPEI, nous avons pu nous rendre compte que
les grandes fédérations comme la FEGAPEI mais également la FNAT peuvent impulser
une collaboration rapprochée entre les différents acteurs, les mettre en relation afin
d’ouvrir le dialogue et permettre ainsi une prise en charge globale et cohérente de la
personne.
Cette collaboration est également nécessaire pour l’efficacité des outils de la loi du 2
janvier 2002. L’accumulation des documents ne s’avère d’aucune utilité. Des documents
communs, ou des remises de documents et des explications avec un intervalle de temps
suffisamment conséquent sont les solutions à privilégier mais pour cela, les différents
acteurs de la prise en charge du majeur doivent agir ensemble.
Les outils de la loi du 2 janvier 2002 s’appliquent donc au sein des ESMS mais
dorénavant, ils doivent également être mis en place au sein des services de mandataires
judiciaires qui ont rejoint cette nomenclature des ESMS.
2.2 Une difficile adaptabilité des outils de la loi du 2 janvier 2002 par
les services de mandataires judiciaires
Les services de mandataires judiciaires, afin de respecter le droit des usagers, ont du
mettre en place les outils de la loi 2002-2 adaptés aux particularités des majeurs protégés
(2.2.2). Cette mise en place ne s’est pas faite sans difficultés (2.2.1). Il n’en demeure pas
moins qu’une inégalité de droits subsiste au sein de la population des majeurs protégés
(2.2.3).
2.2.1 Les causes des difficultés de mise en œuvre d u droit des usagers au sein
des services de mandataires judiciaires
- 34 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
Après les divers entretiens menés avec des services de mandataires judiciaires, mais
également avec des fédérations telles que la FNAT30 ou la FEGAPEI et enfin, lors des
colloques auxquels nous avons pu participer31, nous avons remarqué des difficultés de
mise en place des outils de plusieurs dimensions.
a) Des obstacles techniques relatifs aux outils
Une des difficultés principales des services de mandataires judiciaires est la mise en
place techniquement parlant des outils de la loi. Même si depuis 2002, de nombreux
guides et des aides pour la mise en œuvre au sein des établissements de ces outils
existent32, les obstacles sont nombreux.
Les entretiens ont mis en avant une réelle difficulté des services avec certains outils et
notamment avec la mise en place du conseil de vie sociale ou de toute autre forme de
participation au fonctionnement du service. En effet, la population des majeurs protégés
comme nous l’avons vu ci-dessus est une population très spécifique accumulant des
difficultés importantes.
Les entretiens révèlent que même si leur état permet une participation quelconque au
fonctionnement de l’établissement, il est très difficile voir quasiment impossible d’arriver à
intéresser les majeurs protégés à ces questions.
Deux obstacles à la participation des usagers sont donc soulevés : quelle forme de
participation suffisamment simple et accessible, les services peuvent-ils mettre en place
pour qu’un maximum de majeurs soit en capacité d’y participer ?
Quelle forme de participation est possible pour pouvoir intéresser les majeurs protégés et
leur donner envie de participer ?
Il y a eu de nombreuses difficultés techniques, d’hésitations méthodologiques au sein des
services, nous avons soulevé et décrit uniquement celle concernant les modes de
participation, cependant tous les différents outils de la loi 2002-2 ont fait l’objet
d’interrogations similaires avec notamment comme question principale : comment rendre
30 Entretien avec le 15 juillet 2010, avec le juriste de la FNAT : Fédération Nationale des Associations Tutélaires. La FNAT a pour but de fédérer les associations ou les services qui exercent la protection juridique. Elle regroupe actuellement une soixantaine d’associations assurant la protection de plus de 50 000 majeurs. 31 Colloque EHESP, le 08 juin 2010 « comment les professionnels se saisissent de la réforme du 5 mars 2007 ? » et le Colloque FNAT, le 17 juin 2010 : « la protection de la personne : limites et contours » 32 Exemples de guides, sans pouvoir évidemment tous les citer: ANESM, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles : « élaboration, rédaction et animation du projet d’établissement ou de service » Mai 2010 FEGAPEI, Département gestion, organisation et qualité, Novembre 2002 Version 2, « associations gestionnaires, vos nouvelles obligations issues de la loi 2002-2 : guide pratique de mise en œuvre des droits des usagers »
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 35 -
ces documents accessibles à des personnes n’ayant pas toute leur capacité à des degrés
cependant différents ?
b) La gestion du temps
Les services de mandataires judiciaires ont jusqu’à la fin de la période transitoire, donc le
31 décembre 2011 pour permettre la réalisation et la mise en œuvre des outils de la loi,
pour autant, ceux qui ont déposé une demande d'autorisation auprès de la DDCS doivent
les avoir mis en place ou sont en train de les mettre en place.
Ce délai est considéré comme bien trop court par les services, en effet, il ne permet pas
la mise en place d’un temps de réflexion et de rédaction des outils suffisamment important
pour aboutir à un travail satisfaisant. De plus, l’équipe travaillant au sein du service ne
dispose pas d’assez de temps pour s’approprier les outils correctement.
c) Des difficultés culturelles, la réticence des mandataires judiciaires
Les mandataires judiciaires travaillant au sein des services ont été réticents à la mise en
place de ces outils. Tout d’abord, ils ont pris cette obligation légale comme une remise en
cause de leur travail, un manque de confiance dans leur capacité à prendre en charge les
majeurs.
De plus, tout ce formalisme entravait selon eux la proximité d’une relation humaine et
pouvait perturber la confiance qui s’instaure avec le majeur protégé.
Enfin, le fait que la mise en place de ces outils ne soit imposée qu’aux services de
mandataires judiciaires et non aux mandataires exerçant à titre individuel comme nous
allons le voir ci-dessous, a crée un sentiment d’injustice qui n’a pas permis de débuter un
travail de réflexion sereinement.
Ces difficultés ont cependant été surmontées dans la plupart des services. Un véritable
mouvement de réflexion a été initié afin d’adapter au mieux les outils aux besoins des
majeurs protégés.
La loi a permis d’impulser un travail sur ces outils, cela permet ainsi une remise en
question des pratiques professionnelles des mandataires au sein des services. Une réelle
volonté s’est manifestée de trouver la meilleure adaptation possible des outils aux
spécificités et aux besoins des majeurs protégés.
Des formations ont accompagné cette dynamique, les fédérations en proposent déjà
quasiment toutes une. De plus, ce mouvement de réflexion apparait s’inscrire dans la
continuité. Ainsi, nous pouvons citer comme exemple la participation à un groupe de
travail mis en place au sein de la commission juridique de la FEGAPEI33. Ce groupe de
33 Participation au groupe de travail de la Commission « Protection juridique des majeurs » au sein de la FEGAPEI, le 24 septembre 2010.
- 36 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
travail avait pour but de présenter et de valider des projets de questionnaires adressés
aux professionnels mais également aux majeurs protégés. Ces questionnaires ont pour
but de mesurer l’impact de la réforme du 5 mars 2007 dans une optique finale d’optimiser
le dispositif de protection des majeurs et de permettre d’identifier un ensemble de
recommandations de bonnes pratiques.
On a donc constaté des difficultés concrètes au sein des services qui ont tout de même
permis d’aboutir à un mouvement de réflexion sur la prise en charge des majeurs
protégés de façon générale et qui semble s’inscrire dans la continuité. Les outils
permettant d’assurer un respect effectif du droit des usagers ont ainsi été adaptés aux
besoins et aux capacités des personnes sous protection juridique.
2.2.2 Les outils de la loi du 2 janvier 2002 adapté s aux spécificités de la
population des majeurs protégés
Les services de mandataires judiciaires sont donc soumis à la loi du 2 janvier 2002 et ils
doivent ainsi mettre en place les outils imposés par cette loi dans le but d’un respect
effectif des droits des usagers.
Malgré toutes les difficultés auxquelles le secteur a été confronté, les services ont du
prendre en compte les particularités des majeurs protégés dans leur mise en place des
outils de la loi du 2 janvier 2002.
Pour les services de MJPM, les outils se déclinent sous une forme un peu différente que
ceux qui ont été mis en place par les ESMS. Ainsi, les services de mandataires judiciaires
doivent mettre en place une notice d’information, la charte des droits et libertés de la
personne majeure protégée, le document individuel de protection des majeurs (DIPM), la
personne qualifiée, le règlement de fonctionnement de l’établissement, le projet
d’établissement ou de service, et toute autre forme de participation des usagers pour
remplacer le CVS.
Nous remarquons donc que des outils sont identiques à tout le secteur médico-social tel
que la charte des droits et libertés, la personne qualifiée, le règlement de fonctionnement
ou le projet de service. Nous les avons décrits et explicités dans notre première partie,
nous ne développerons que les outils qui diffèrent des outils traditionnels et comment ils
ont été adaptés par les services de mandataires judiciaires aux capacités de
compréhension des majeurs.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 37 -
En effet, nous avons pu lors de nos recherches pour l’élaboration de ce mémoire
rassembler de nombreux outils dans différents services de mandataires judiciaires.
Cela nous a permis de les comparer et ainsi de constater que les services ont fait un réel
travail d’adaptation et de simplification.
Comme nous l’avions vu dans la partie précédente, les services ont cherché à mettre en
place des outils adaptés aux capacités de compréhension des majeurs.
Ainsi, les services ont réalisé des outils simples, colorés et illustrés de nombreux
pictogrammes pour permettre de rendre le document ludique et accessible aux personnes
sous protection.
Lors de notre entretien à la FNAT, il a été souligné la nécessité d’adapter
sémantiquement les termes, les illustrer avec des images notamment.
La FEGAPEI a entamé une réflexion afin d’imaginer une adaptation des outils sous une
autre forme que celle papier, et notamment la piste du multimédia est étudiée.
Nous avons déjà évoqué les résultats de l’enquête de la fondation Médéric Alzheimer
précédemment, un autre résultat intéressant montre que les documents devant être remis
à la personne accueillie au sein des ESMS afin de garantir un respect effectif de ses
droits, sont très majoritairement remis seulement à la famille ou à son représentant légal :
le contrat de séjour est remis à 69% seulement à la famille et le règlement de
fonctionnement à 65%.
L’adaptation des outils de la loi du 2 janvier 2002 aux spécificités des majeurs protégés à
leur capacité de compréhension devrait normalement permettre d’éviter cette dérive et de
garantir la remise effective des documents au majeur protégé.
Nous allons donc étudié les outils devant spécifiquement être mis en place par le secteur
des mandataires judiciaires.
Tout d’abord, la notice d’information est remise à la personne protégée ou si elle n’en
mesure pas la portée à un membre du Conseil de famille ou à défaut à un parent, un allié
ou une personne de son entourage dont l’existence est connue.
Des documents sont annexés à cette notice: la charte des droits et des libertés, le
règlement de fonctionnement.
La notice d’information doit comporter plusieurs types d’informations : tout d’abord, elle
doit présenter le dispositif de protection juridique des majeurs mais aussi des informations
sur le mandataire judiciaire. Elle doit notamment donner la forme et la date d’habilitation
du MJPM, ses qualifications, une présentation du service, de sa situation géographique,
de son organisation.
Enfin, la notice d’information contient une présentation des modalités de participation de
la personne, la charte des droits et des libertés, les numéros et le coût d’appel des
services d’accueil téléphonique spécialisés (écoute maltraitance, maison départementale
- 38 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
des personnes handicapées) les coordonnées du tribunal qui a ordonné la mesure de
protection juridique des majeurs dont bénéficie la personne, ainsi que celles du procureur
de la République compétent.
Toutes ces informations dont le majeur doit avoir connaissance peuvent s’avérer
complexes à comprendre. Ainsi, un service de mandataire judiciaire du nord de la
France34 a mis en place une notice d’information simplifiée et illustrée. Par exemple, la
mesure de protection qu’est la tutelle est expliquée de manière simplifiée et illustrée par
une image et des petits pictogrammes symbolisant la personne sous protection ou
l’association. De plus, pour les principaux documents à fournir à l’ouverture de la mesure,
chaque document est illustré par l’image qui correspond (par exemple, photographie de la
carte d’identité, de la carte vitale)
Le document individuel de protection des majeurs est établi par le mandataire judiciaire. Il
est rédigé en fonction d’une connaissance précise de la situation de la personne et d’une
évaluation de ses besoins. Dans le cadre de la réalisation de ce document, la personne
chargée de son élaboration recherche la participation et l’adhésion de la personne, dans
la mesure où son état lui permet d’en comprendre la portée.
Ce document est remis au majeur protégé avec une explication adaptée et ce dans les 3
mois de la date de notification du jugement.
Le document individuel de protection des majeurs doit contenir différentes informations et
notamment une information personnalisée sur les domaines d’intervention du mandataire,
un rappel de la nature et des objectifs de la mesure de protection juridique, une
description des modalités concrètes d’accueil et d’échange entre la personne et le
service.
Nous avons pu rencontrer la directrice d’un service de mandataires judiciaires des
Yvelines35. Le DIPM de cette association est un document qui est également illustré par
de nombreux pictogrammes afin de permettre de faciliter la compréhension des majeurs
protégés afin qu’ils puissent également s’approprier ce document qui constitue tout de
même le fil directeur de leur prise en charge.
En ce qui concerne la charte des droits et des libertés, des associations et des
fédérations en avaient déjà mises en place36, elles constituent des bases solides de
34 Cette association exerce dans le département du Nord. Elle est spécialisée dans l’exercice des mesures de protection pour personnes souffrant de handicap mental. 35 Entretien avec la directrice d’un service de mandataires judiciaires des Yvelines, Cette association a pour but d’assurer la protection de la personne et des biens des personnes handicapées mentales, le 2 septembre 2010. Cet entretien s’est déroulé en présence du directeur de l’ADAPEI d’un département d’Ile de France. 36 CF annexe 5, charte des droits et des libertés de l’UNAF
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 39 -
travail en amont. Elles peuvent permettre de servir de point de départ à la réflexion pour
l’élaboration de leur propre charte par les services.
La loi de 2002 est source de droits pour les majeurs protégés, afin de les rendre effectifs,
les services ont du adapter ces outils. Cependant, la réforme du 5 mars 2007 a crée une
inégalité dans l’étendue des droits applicables aux majeurs protégés.
2.3 Le constat d’une différence de droits, une inég alité dans la prise
en charge des majeurs protégés
La réforme du 5 mars 2007 a engendré une inégalité de droits entre les majeurs protégés
en fonction de leur mandataire judiciaire (2.3.1) qui n’est pas sans conséquence sur la
prise en charge (2.3.2).
2.3.1 Une inégalité de droits entre les majeurs pro tégés
La loi du 5 mars 2007 crée une inégalité de droits entre un majeur protégé dont le
mandataire judiciaire est une personne physique exerçant à titre individuel et un service
de mandataire judiciaire.
Le majeur dont le mandataire judiciaire est un service bénéficie de l’application des droits
de la loi du 2 janvier 2002, ce qui n’est pas le cas pour les autres majeurs sous
protections juridique.
La fiche n°12 du dossier DRASS-DDASS 37 met particulièrement bien en avant cette
différence concrète de droits qu’il existe : les majeurs protégés par une personne
physique exerçant à titre individuel se voient seulement remettre une notice d’information
et la charte des droits et des libertés tandis que nous avons vu précédemment tous les
outils que les services de mandataires judiciaires doivent remettre aux majeurs.
Pour donner un autre exemple de la différence de droits, le majeur protégé peut faire
appel à une personne qualifiée pour l’aider à faire valoir ses droits. Cette possibilité n’est
pas offerte à un majeur protégé par un mandataire personne physique.
37 Dossier DDASS-DRASS, mars 2008, « la réforme de la protection juridique des majeurs » par le ministère du travail, des relations sociales et des solidarités, ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, le secrétariat d’Etat à la solidarité, la DGAS.
- 40 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
2.3.2 Les conséquences de cette inégalité dans la p rise en charge du majeur
Cette inégalité de droits crée donc une différence concrète dans la prise en charge. Les
majeurs protégés ne sont pas soumis aux mêmes droits et ne reçoivent donc pas les
mêmes garanties dans le cadre de leur prise en charge.
En effet, des problèmes dans la prise en charge des majeurs par un mandataire judiciaire
exerçant à titre individuel peuvent exister et l’application des outils de la loi 2002-2
constitue une garantie contre une mauvaise prise en charge.
La profession de mandataire judiciaire à titre individuel est un exercice très isolé, la seule
présomption de bienveillance du mandataire n’est pas suffisante.
Nous pouvons tout de même tempérer ce constat. Il est important de souligner que la
professionnalisation des mandataires judiciaires notamment par l’obtention du CNC
constitue une garantie qui n’est pas négligeable. En effet, comme nous l’avons vu dans
notre première partie, tous les mandataires judiciaires sont soumis à l’obligation d’obtenir
le CNC, ce certificat permet ainsi une harmonisation des pratiques et une
professionnalisation du secteur qui est une garantie face à l’exercice isolé des
mandataires judiciaires personnes physiques et au fait qu’ils ne sont pas soumis à
l’obligation de mettre en place les outils de la loi du 2 janvier 2002.
Les grandes fédérations telles que la FNAT et l’UNAPEI ont également dénoncé la fin
d’un relatif encadrement des mandataires privés en attaquant deux décrets pris en
application de la loi du 5 mars 2007 devant le Conseil d’Etat : un des décrets supprime le
plafonnement de l’activité des mandataires judiciaires personnes physiques et la durée de
validité de leur agrément.
Le fait que la loi prévoit pour ces mandataires judiciaires une dérogation aux obligations et
notamment à la mise en place des outils de la loi 2002-2 constitue selon les fédérations
un manque de garanties certain dans la prise en charge des majeurs.
Nous observons donc une différence concrète dans l’étendue des droits des majeurs
protégés selon le mandataire judiciaire, cela a des conséquences directes sur la prise en
charge des majeurs.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 41 -
3 Préconisations pour la mise en œuvre et le respec t du droit
des usagers au sein de la population des majeurs pr otégés
Des actions peuvent être mises en place afin d’améliorer la prise en charge des majeurs
protégés et de palier aux difficultés qui ont été soulevées par les différentes réformes.
La coopération structurelle des acteurs (3.1) mais également intellectuelle à travers la
mise en place d’un référentiel commun (3.2) et d’un guide de bonnes pratiques (3.3) sont
des solutions permettant la mise en œuvre et le respect des droits des usagers au sein de
la population des majeurs protégés. L’inspecteur a un rôle d’impulsion et de conseil avec
des outils techniques à sa disposition (3.4)
3.1 La coopération des acteurs, un atout indéniable dans
l’amélioration de l’organisation du secteur tutélai re et de la prise
en charge du majeur
La coopération des mandataires judiciaires en fonction de leur statut permet d’améliorer la
prise en charge des majeurs protégés et de garantir un respect effectif de leurs droits.
Créer un Groupement de Coopération Sociale et Médico-sociale (3.1.1) mais également
mutualiser les compétences des mandataires judiciaires exerçant à titre individuel (3.1.2)
sont deux solutions à privilégier présentant de nombreux avantages.
3.1.1 La création d’un Groupement de Coopération So ciale et Médico-sociale
La loi du 5 mars 2007 rend le partenariat entre les acteurs de plus en plus indispensable.
Différents constats nous permettent d’émettre cette affirmation.
Tout d’abord, le manque de professionnels, de personnels et de moyens pour assurer une
prise en charge de qualité de la personne protégée rend la coopération entre les acteurs
préférable.
Les associations et les services de mandataires judiciaires sont introduits dans la
nomenclature des ESMS avec toutes les obligations légales qui en découlent. Ils ont des
difficultés à les appliquer comme nous l’avons vu ci-dessus.
Ainsi, une mutualisation des moyens, une coopération professionnelle, un échange
d’expérience permettront de faciliter la mise en œuvre de ces obligations.
- 42 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
Nous savons également que la loi impose aux établissements publics qui accueillent des
personnes âgées ou des adultes handicapés, la désignation d’un ou plusieurs agents
comme MJPM à partir de 80 places autorisées au titre de l’hébergement permanent. La
loi prévoit une alternative qui permet à l’établissement de créer un service ou de déléguer
les mesures de protection juridique à un autre établissement ou à une structure de
coopération.
Le contexte actuel incite donc fortement à la restructuration du secteur par le biais de la
coopération en privilégiant les GCSMS tant au niveau des services de mandataires
judiciaires que des préposés d’établissements accueillant des majeurs protégés.
De nombreuses formes de coopération sont à la disposition des établissements sociaux
et médico-sociaux: Les conventions, les Groupements d’Intérêt Public et les Groupements
d’Intérêt Economique. Ils n’offrent en réalité que des possibilités de partenariat limité qui
ne nous semblent pas adaptées au secteur de la protection juridique des majeurs.
La loi du 2 janvier 2002 offre un nouvel outil de partenariat et de coopération à travers la
création d’un GCSMS.
L’article L312-7 du CASF dispose qu’« afin de favoriser leur coordination, leur
complémentarité et garantir la continuité des prises en charge et de l'accompagnement,
notamment dans le cadre de réseaux sociaux ou médico-sociaux coordonnés, les ESMS
peuvent conclure des conventions, créer ou participer à des GIE, des GIP et enfin, créer
des GCSMS. »
La circulaire du 14 avril 1999 relative aux modalités d’intervention des structures
régionales d’informatique hospitalière prévoit que la coopération consiste pour un groupe
d’établissements à décider de faire ensemble ce que chacun pourrait faire séparément
mais décide de ne plus le faire par lui-même.
Cela s’inscrit dans une logique de rationalisation des structures avec notamment une
optimisation des moyens humains, matériels et financiers disponibles, ce qui conduit à
une amélioration de la prise en charge des usagers.
Le décret du 6 avril 2006, relatif aux groupements assurant la coordination des
interventions en matière d’action sociale et médico-sociale, fixe les modalités de mise en
œuvre en précisant les conditions de création et de fonctionnement des GCSMS.
Sans rentrer dans le détail de ces modalités, il est important de savoir que le régime
juridique des GCSMS est complexe tout en présentant de nombreux avantages.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 43 -
En effet, les GCSMS ont une palette d’actions assez large. Ils peuvent notamment créer
et gérer des équipements d’intérêt commun et exercer ensemble des activités dans les
domaines de l’action sociale ou médico-sociale
Ils peuvent également être porteurs d’autorisation, permettre des interventions communes
de professionnels des secteurs sociaux et médico-sociaux, procéder à des fusions ou à
des regroupements et enfin disposer de personnel et recruter.
La Fédération Hospitalière de France et l’Association Nationale des Gérants de Tutelles
sont favorables à la mise en œuvre de ces groupements de coopération, ils permettront
selon eux, d’établir un maillage du territoire et conjugueront « proximité, technicité et
efficacité »
Concrètement, l’optimisation des moyens humains peut permettre que chaque mandataire
judiciaire soit en capacité de rendre visite au majeur au moins une fois par mois, ce qui
pouvait être matériellement impossible avant la création d’un groupement.
Le GCSMS peut également permettre d’éviter la disparition de petits services de
mandataires judiciaires qui ne sont pas en capacité de répondre aux obligations légales.
L’exemple de Paris est révélateur, il y avait douze services de mandataires judiciaires, ils
ne sont plus que onze. En effet, un des services a du renoncer au maintien de son activité
en raison du trop grand nombre de contraintes administratives, législatives et budgétaires.
Le groupement permet de favoriser les mutualisations afin d’optimiser les moyens comme
les locaux, les véhicules. Enfin, cela permet de créer une solidarité inter-établissements et
interservices.
Un autre avantage consiste à pouvoir harmoniser les pratiques dans la prise en charge et
développer des outils communs. Ainsi, on peut envisager des outils de la loi 2002
communs à un groupement et donc à plusieurs services. Ces outils auront été élaborés
dans un cadre d’échanges de pratiques et d’expérience qui permettra le développement
d’une réflexion éthique. La mise en œuvre d’outils plus performants et une prise en
charge globale du majeur améliorée sont les résultats attendus d’un tel processus.
Sans pour autant parler ni de fusion, ni d’absorption, la coopération à travers le GCSMS
est une solution présentant de nombreux avantages. L’IASS peut jouer un rôle
d’impulsion et de conseil dans la constitution de tel groupement.
L’instruction ministérielle du 3 aout 200738 demande aux services de l’Etat de « s’engager
résolument dans une démarche de sensibilisation, d’accompagnement et de promotion »
et de « susciter l’adhésion et le volontariat » des acteurs.
38 Instruction ministérielle n°DGAS/5D/2007/309 du 03 aout 2007 relative à la mise en œuvre des GCSMS
- 44 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
L’IASS peut assurer un réel rôle pédagogique en accompagnant les services de
mandataires judiciaires vers un changement de culture et en les informant sur la
nécessité d’instaurer de nouveaux partenariats. Le GCSMS constitue une des alternatives
possibles à la restructuration du secteur des mandataires judiciaires. Le rôle d’impulsion
de l’IASS passe donc par un travail d’orientation vers la coopération en insistant sur les
avantages que représente un tel groupement tant pour les associations que pour les
majeurs protégés.
3.1.2 La mutualisation des compétences des mandatai res judiciaires privés
Nous avons pu observer lors de notre travail de recherche, différentes formes
d’organisation de travail des mandataires judiciaires, une organisation a retenu notre
attention.
Un cabinet regroupant différents profils de mandataires judiciaires permet une meilleure
prise en charge des majeurs protégés. La pluridisciplinarité permet d’ajuster le profil du
mandataire aux besoins du majeur protégé : la composition d’un cabinet par des profils
sociaux et juridiques est une solution intéressante.
En effet, les travailleurs sociaux auront une approche plus adaptée avec les personnes en
situation de dépendance (alcool, toxicomanie) par exemple alors que les juristes sont
d’avantage à l’aise avec les personnes âgées qui peuvent être plus aisées, et qui ont
donc des patrimoines mobiliers et immobiliers plus importants à gérer.
De plus, il est important d’avoir un spécialiste en droit pour prendre en charge les majeurs
rencontrant des difficultés juridiques : vente de biens immobiliers, rentes viagères,
divorces compliqués, succession…
La coopération entre des profils divers tels qu’un juriste et un travailleur social est une des
solutions qui permet d’adapter la prise en charge en fonction des difficultés des majeurs
protégés.
De plus, au sein du cabinet, cette pluridisciplinarité entraine un échange d’informations et
de pratiques qui permet une prise en charge globale de la personne et une coopération
empêchant un exercice trop isolé de cette profession.
La coopération des mandataires judiciaires quel que soit le statut du mandataire judiciaire
est une possibilité d’amélioration de la prise en charge des mandataires judiciaires.
Nous allons étudier ci-dessous différentes pistes d’amélioration des outils de la loi du 2
janvier 2002 qui permettraient d’accroitre leur efficacité dans la prise en charge des
majeurs protégés.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 45 -
3.2 L’amélioration et l’adaptation des outils de la loi 2002-2, la
création d’un référentiel commun aux mandataires ju diciaires
Nous avons souligné, dans notre deuxième partie, que les services de mandataires
judiciaires ont effectué un réel travail d’adaptation des outils aux majeurs protégés et aux
spécificités de ce public.
Nous préconisons la mise en place d’un référentiel commun aux services de mandataires
judiciaires (3.2.1) relatif à la mise en place (3.2.2) et la mise en œuvre de ces outils
(3.2.3)
3.2.1 La mise en place d’un référentiel commun
Il semble essentiel de mettre en place un groupe de travail en amont de l’élaboration de
ce guide. Il aura pour mission préalable de dresser un état des lieux de l’existant, de
l’avancement dans l’élaboration des outils.
En effet, même si tous les services de mandataires judiciaires doivent avoir mis en place
les outils de la loi 2002-2 pour le 31 décembre 2011, des services ont formulé des
difficultés et des inquiétudes.
Cette première étape de bilan dans la mise en place des outils doit nous permettre
ensuite d’amorcer une plus large réflexion sur l’ensemble des pratiques de mise en œuvre
des outils.
Cette démarche peut aboutir à la création d’un cahier de recommandations pour aider à la
mise en œuvre effective de ces outils, décliné en fiches-action relatives à chacun des
outils. Le guide de la FEGAPEI39 peut être une source d’inspiration.
En effet, il semble réellement pertinent de mettre en place un guide qui reprend tous les
outils de la loi 2002-2 en rappelle les enjeux, le but effectif auquel il doit aboutir et la forme
qu’il peut revêtir.
Ce cahier permettrait ainsi d’inciter les mandataires personnes privées à s’inspirer des
outils de 2002 pour améliorer leur prise en charge, garantir au mieux les droits des
majeurs protégés. De plus, ce cahier serait un moyen d’amélioration constant des outils
déjà mis en place.
Il pourrait également servir de base à la création des outils au niveau national, lors de la
création d’un nouveau service de mandataires judiciaires.
39 FEGAPEI, département gestion organisation et qualité, Novembre 2002 Version 2, « Associations gestionnaires, vos nouvelles obligations issues de la loi 2002-2 : guide pratique de mise en œuvre des droits des usagers »
- 46 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
3.2.2 Une proposition de méthodologie de mise en pl ace des outils de 2002-2 au
sein des services des mandataires judiciaires.
Lors de nos entretiens mais également sur la base des retours d’expérience des ESMS
soumis à cette réglementation depuis 2002, la conciliation et la concertation se dégagent
comme étant très importantes pour la mise en œuvre de ces outils.
La mise en place de groupes de travail travaillant spécifiquement sur chaque outil est la
bonne solution. Ils doivent associer des représentants du personnel de l’établissement, un
représentant de l’équipe de direction et des usagers ou des membres de famille
d’usagers.
Interroger les majeurs protégés sur la forme, le contenu d’un outil particulier permet de
confronter les idées, de mettre en avant des possibilités auxquelles le service n’avait pas
forcément pensé. De plus, il permet à l’usager de se sentir impliqué, que ses idées et ses
besoins sont pris en compte. Leur présence peut permettre d’améliorer la compréhension
de leurs situations et de leurs attentes.
Nous avons pu constater au sein des services que les majeurs protégés ont été peu
associés aux démarches d’élaboration de ces outils.
Certains avancent que c’est faire preuve de démagogie que de vouloir impliquer les
usagers dans la démarche d’élaboration des outils. Pourtant, ce sont les principaux
intéressés par ce qui se passe au sein des associations et il semble donc logique qu’ils
soient associés dans la mesure du possible et de leur volonté à cette démarche.
La création des outils doit s’élaborer selon nous en deux étapes.
Tout d’abord, il est nécessaire de commencer par un état des lieux au sein du service.
L’objectif est ainsi d’obtenir une appréciation détaillée des points forts et des axes de
progrès sur lesquels il doit travailler. Même si les outils en tant que tels de la loi de 2002
sont nouveaux dans ce secteur au niveau de la forme, la pratique avait pu en consacrer
certains sous d’autres formes.
L’expérience et le savoir-faire au sein des services sont de réels atouts pour avancer vers
la mise en place des outils de la loi.
La deuxième étape consiste dans la mise en place de groupes de travail pour chacun
des outils composés des différents acteurs de la prise en charge des majeurs.
Ces deux étapes sont primordiales pour réaliser des outils efficaces et adapter aux
besoins de tous.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 47 -
3.2.3 Des pistes d’amélioration des outils en tant que tels de la loi du 2 janvier
2002
Suite à cette étude et aux divers entretiens réalisés, voici des propositions d’amélioration
de quelques outils et des éléments qui nous semblent importants à intégrer afin de
garantir leur effectivité et leur utilité dans l’amélioration de la prise en charge des majeurs.
Tout d’abord, globalement et cela concerne tous les outils de la loi, il semble essentiel de
souligner à nouveau que les outils de la loi 2002-2 ne peuvent être utiles que s’ils sont
rendus compréhensibles et attractifs pour les majeurs protégés.
Les services ont un véritable intérêt à accentuer leurs efforts de simplification et
d’illustration.
Nous avons noté que le fait de pouvoir avoir des documents reliés, notamment dans le
cadre de tous les documents qui sont remis aux majeurs protégés au sein d’un ESMS,
permettrait de ne pas perdre les documents et de présenter un seul type de document.
Un document unique, illustré et simplifié rend les outils plus attractifs et permet ainsi de
s’assurer de la compréhension du majeur.
Des vecteurs d’amélioration de ces outils qui sont actuellement à l’étude au sein des
services et des fédérations sont le multimédia et la bande dessinée. Ils présentent de
nombreux avantages et notamment celui de la simplicité et de l’attractivité.
Nous avons également pu réfléchir sur les outils individuellement. Nous développerons
quelques pistes d’amélioration pour des outils bien précis.
� Le livret d’accueil
Une possibilité d’amélioration du livret d’accueil qui est intéressante et simple à réaliser
est la présentation de l’équipe avec une photographie. Cela permet aux usagers de
pouvoir se repérer et ils peuvent ainsi mettre facilement des noms et des missions sur les
visages.
� Le projet d’établissement.
L’étude des différents projets de services de mandataires judiciaires montre qu’ils
retracent l’historique de la structure, ce qui se fait au sein de l’établissement, mais peu de
projets d’établissement sont réellement tournés vers les orientations futures du service. Il
semble réellement intéressant d’envisager un projet d’établissement explicitant les projets
de l’association, les changements envisagés pour améliorer la prise en charge et les
moyens d’y aboutir.
Un système de fiche-action peut être mis en place, permettant de synthétiser et de mettre
en avant le « plan d’action » de la structure.
- 48 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
Il explicite et précise les objectifs, les moyens nécessaires pour y aboutir, les partenariats
envisagés et il peut également décliner les méthodes d’évaluation de ces actions.
� Le règlement de fonctionnement
Comme nous l’avons évoqué précédemment, la forme des documents remis aux majeurs
protégés a une grande importance.
R. Janvier et Y. Matho dans leur ouvrage « Mettre en œuvre le droit des usagers » ont
repéré trois éléments à prendre en considération : être concis, cohérent et juste.
La concision est primordiale, il faut cibler ce dont le majeur a besoin comme information.
Il est ensuite nécessaire de rendre le document cohérent afin que le majeur soit en
mesure de comprendre l’étendue de ses droits et de ses devoirs. Il doit pouvoir faire le
lien entre une interdiction énoncée et la raison de cette contrainte.
Le règlement de fonctionnement est donc de nature juridique mais il a tout de même une
portée pédagogique qui est intéressante dans la prise en charge des majeurs protégés
par le service. L’écrit émanant du règlement de fonctionnement doit permettre une plus
grande clarté dans la détermination des rôles de chacun et donc des responsabilités.
3.3 La création d’un guide de bonnes pratiques, un outil
d’harmonisation des pratiques
Nous avons évoqué ci-dessus des pistes d’adaptation et d’amélioration concrètes des
outils de la loi du 2 janvier 2002 à travers notamment la mise en place d’un référentiel
commun à tous les services de mandataires judiciaires, nous proposerons ici la création
d’un guide de bonnes pratiques spécifiques à la prise en charge des majeurs protégés
(3.3.2). L’objectif à terme présente de nombreux avantages (3.3.1), il est de construire un
outil approprié sous la forme d’un cahier de recommandations de bonnes pratiques pour
la prise en charge globale des majeurs protégés. Nous développerons un exemple d’une
étape précise dans la prise en charge du majeur protégé (3.3.3)
3.3.1 Les avantages découlant de la création de cet outil
Tout d’abord, afin de palier aux disparités dans la protection des majeurs en fonction du
statut de son mandataire judiciaire, une réflexion quant à la création d’un référentiel
commun de bonnes pratiques est une étape importante.
La formation des mandataires judiciaires et l’obtention du certificat constituaient un
premier élément comme nous l’avons évoqué précédemment.
Mais, la création d’un tel outil peut également permettre une harmonisation des pratiques.
Cela pourrait commencer à combler le fossé dans la différence des droits et les risques
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 49 -
d’abus qu’il existe pour un majeur protégé en fonction du statut de son mandataire
judiciaire.
Il est également important de pouvoir formaliser dans un outil les compétences, les
expériences afin de tendre vers une référence commune, et ainsi pouvoir permettre une
amélioration continue de la qualité de la prise en charge des majeurs protégés.
3.3.2 La méthodologie d’élaboration de ce référenti el
Il est nécessaire, tout d’abord, de mettre en place un groupe de travail composé des
différents acteurs de la prise en charge des majeurs protégés. Ce groupe de travail
constitue l’équipe-projet pour l’élaboration de ce guide. Ainsi, la composition la plus
optimale est d’associer un représentant des mandataires judiciaires de chaque statut, des
majeurs protégés, des fédérations les plus représentatives, un agent de l’Etat.
Ce groupe constitue la base de notre projet d’élaboration de ce guide, il devra se réunir
régulièrement sur une période définie selon un calendrier préalable.
Nous pouvons préconiser par la suite, l’aménagement de temps de rencontres pour
partager les expériences, les difficultés rencontrées, comparer et confronter différents
exemples à une plus grande échelle que celle du groupe de travail. Rassembler des
acteurs de la prise en charge des majeurs protégés afin de mutualiser les compétences et
les expériences permet de poser les premières bases des recommandations du guide.
Ce guide peut s’inspirer de référentiel et de guide existants. La FNAT a mis en place un
guide méthodologique OLIVE « outil interne vers l’évaluation », ce guide a pour but
d’aider les services dans la réalisation de l’obligation interne d’évaluation mise en place
par la loi du 2 janvier 2002. Ce guide est un modèle d’inspiration, en effet, il se présente
sous la forme de tableaux par thèmes déclinant les critères, les éléments d’explication et
les modes de preuves et d’indicateurs. La clarté et la précision de ce guide servent de
référence.
Le guide de bonnes pratiques peut se présenter sous la forme également de fiche actions
mettant en avant la procédure idéale qui servirait de base dans la pratique quotidienne
des mandataires judiciaires.
Une fiche-action est élaborée pour chaque étape importante dans la prise en charge des
majeurs : l’ouverture de la mesure avec le premier entretien, la fin de la mesure,
l’accompagnement du majeur, la gestion administrative et financière mais également les
procédures à entreprendre et les réactions à avoir en cas de problèmes tels que des
actes de violence et de maltraitance, d’hospitalisation.
- 50 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
3.3.3 Un exemple précis, le premier entretien avec le majeur protégé
Nous ne pouvons pas dans le cadre de ce mémoire développer toutes les étapes,
pourtant il nous semblait intéressant de développer une des étapes de la prise en charge
du majeur protégé.
Nous allons donc nous intéresser à la première étape de la prise en charge du majeur
protégé : le premier entretien. Nous mettrons en avant les enjeux de cet entretien,
l’importance qu’il revêt et les conséquences qui doivent en découler sur l’attitude du
mandataire judiciaire. C’est cette architecture qui est intéressante à retranscrire dans un
guide de bonnes pratiques.
� Importance du premier entretien entre le mandataire et le majeur
La loi du 5 mars 2007 crée une nouvelle dynamique de prise en charge des majeurs
protégés. Elle tente de prévenir les risques de mise sous dépendance. Il est nécessaire
de mettre en place une prise en charge globale prenant en compte tous les aspects de la
situation du majeur que ce soit au niveau de la santé, social, financier … Mais également
des évolutions de sa situation.
Ainsi, mis à part pour les majeurs où il a été médicalement constaté que l’altération des
facultés est irréversible, le mandataire judiciaire se doit de veiller et d’adapter sa prise en
charge à l’évolution de la situation du majeur.
Par exemple, cette attention doit être toute particulière pour les personnes mentalement
déficientes qui peuvent lors de certaine période être totalement apte à prendre des
décisions les concernant.
L’équilibre entre l’autonomie, la liberté et la protection est très difficile à trouver, il s’agit
pour le mandataire judiciaire de mettre en place un réel accompagnement de la personne
tout en la laissant suffisamment autonome.
Le mandataire judiciaire doit prendre le temps de définir les besoins et les attentes du
majeur protégé. Cette question est cruciale car elle détermine la suite de la prise en
charge, elle ne doit pas être trop interventionniste, ni trop ciblée, elle doit être globale.
� Les enjeux de cet entretien
La première prise de contact avec le majeur protégé est primordiale, elle permet de fixer
les grandes lignes de la prise en charge mais également de commencer à tisser une
relation de confiance avec le majeur. Les premiers contacts nécessitent un engagement
relationnel important de la part du mandataire judiciaire.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 51 -
Elle permet également d’ajuster la prise en charge aux besoins et aux attentes de la
personne.
Des pratiques à privilégier par le mandataire judiciaire sont à déterminer avec notamment
une réflexion à mener sur l’adaptation de l’information aux capacités de compréhension
du majeur, tisser des liens avec son entourage.
En complément des recommandations de bonnes pratiques, il est intéressant d’élaborer
une fiche-type du premier entretien avec le majeur.
Cette fiche servirait de trame de fond et d’appui pour le mandataire judiciaire, il est bien
évident que chaque situation étant différente, cette fiche constitue un guide qui doit être
adaptée aux besoins du majeur, de sa capacité de compréhension.
Elle peut cependant être une aide pour le mandataire, permettre ainsi d’amorcer un bon
début de prise en charge et de mettre également le majeur en confiance.
Un outil rappelant les enjeux de chaque étape de la prise en charge, des principes
fondamentaux devant guider le mandataire judiciaire mais également des outils pouvant
apporter une aide concrète aux professionnels est une formule qui peut apporter une plus
value certaine à la prise en charge des majeurs protégés.
3.4 Le rôle de l’inspecteur dans l’amélioration de la prise en charge et
dans le respect des droits des majeurs protégés
L’inspecteur dispose de leviers d’action au niveau du respect effectif du droit des usagers
au sein des services de mandataires judiciaires (3.4.1) mais également au niveau du
pilotage global du secteur (3.4.2)
3.4.1 Le rôle de l’IASS, un suivi des outils et un rôle d’accompagnement des
acteurs de la protection juridique des majeurs
L’inspecteur accompagne le secteur dans ce changement, il a un rôle à jouer que ce soit
au niveau des services, des préposés d’établissements ou des mandataires judiciaires
personnes exerçant à titre individuel.
a) Un accompagnement pédagogique
En effet, une évolution des mentalités est nécessaire, elle doit se faire de manière
progressive. Si les personnes chargées de mettre en œuvre ce droit le considèrent
- 52 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
comme un moyen d’avancer dans leurs démarches, de fixer un cadre pour faciliter leur
action, alors le droit des usagers a une chance de trouver sa place au sein du secteur des
mandataires judiciaires.
Les outils de la loi 2002-2 doivent être mis en place au sein des services de mandataires
judiciaires pour le 30 décembre 2011 et pour ceux qui ont déposé une demande
d'autorisation auprès de la DDCS, ils doivent déjà les avoir mis en place.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, un mouvement de prise de conscience de
l’importance d’une mise en place pertinente de ces outils a été lancé.
Les différents acteurs de cette nouvelle partie du secteur médico-social ont mené une
réflexion commune inter- institutionnelle sur l’intérêt de la loi et l’appropriation des outils.
C’est donc une véritable pédagogie qu’il a fallu développer : convaincre de l’intérêt des
outils, de leur faisabilité et faire adhérer les professionnels qui étaient pourtant réticents
au début.
Il semblerait intéressant que les services déconcentrés travaillent en partenariat avec les
services.
En effet, un regret peut être formulé. Les services déconcentrés ne se sont pas associés
et n’ont pas été associés à la démarche de mise en place des outils de la loi 2002-2 au
sein des services de mandataires judiciaires. Ils auraient pu être un appui dans l’aide à
l’analyse de l’état des lieux et apporter le recul nécessaire sur le quotidien des services.
L’IASS peut assurer un véritable rôle d’accompagnement et de conseil dans la mise en
place de ces outils.
De plus, les inspecteurs ont un rôle pivot à jouer au sein de ce secteur. En effet, de
nombreux acteurs sont associés à la prise en charge des majeurs, les IASS peuvent
assurer un rôle de coordination. Nous pensons tout particulièrement au secteur de la
justice. En effet, il est nécessaire de renforcer les liens avec la Justice afin de pouvoir
harmoniser les orientations nécessaires au secteur.
b) Le rôle de l’IASS dans le suivi des outils et l’effectivité de leur respect
L’IASS dispose de différents leviers d’action afin de s’assurer de l’effectivité de la mise en
place des outils au sein des services de mandataires judiciaires.
� L’inspection
L’information est un élément capital dans la mise en œuvre du droit des usagers. En effet,
reconnaître des droits est inutile si les personnes qui en bénéficient n’ont pas les moyens
de les connaître et de les comprendre.
Cela nous amène à formuler une proposition pour les inspections des inspecteurs des
DDCS : l’information délivrée aux usagers devrait faire l’objet d’un point particulier dans
les protocoles d’inspection. Ce point pourrait recenser toutes les problématiques liées à
l’information : son existence, sa qualité, son accessibilité…
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 53 -
De plus, tous les outils imposés par la loi du 2 janvier 2002 devront être contrôlés et
analysés afin de détecter d’éventuels problèmes avec le fonctionnement réel de
l’établissement.
� Le contrôle grâce aux documents remis aux DDCS et aux DRJSCS
La loi du 2 janvier 2002 augmente le nombre de documents devant être transmis. En
outre le rapport de la personne qualifiée permettra d’être tenu informé de problèmes
ponctuels qui ont pu surgir dans les services.
On peut imaginer la mise en place au sein des DDCS d’un logiciel informatique consacré
aux droits des usagers. Cela permettrait d’assurer un suivi sérieux de la mise en œuvre
des outils de la loi au sein des différents services et d’obtenir une vision globale de leur
fonctionnement.
� L’évaluation
La loi introduit l’obligation pour les services de procéder tous les 5 ans à une évaluation
interne de leurs activités et de la qualité des prestations qu’ils délivrent ainsi qu’à une
évaluation par un organisme externe40.
L’évaluation permet de fournir un point de repère pour l’amélioration de la qualité des
prestations. La transmission aux DDCS des résultats de l’évaluation sera intéressante
pour la connaissance des besoins et des attentes tant des usagers que des
professionnels mais également pour pouvoir mettre en place un suivi plus fin des
établissements.
Par exemple, nous pouvons imaginer la mise en place d’une grille qui déclinerait des
objectifs définissant des bonnes pratiques professionnelles.
En ce qui concerne la possibilité pour le majeur d’exprimer dans la mesure du possible
son point de vue, nous regarderons s’il peut donner son opinion sur son projet, la
fréquence de la participation des usagers aux instances de la structure …
Pour s’assurer qu’un suivi régulier du majeur est effectué, nous regarderons si le dossier
du majeur est actualisé, les informations sont datées, si un planning est mis en place.
Ainsi, nous pouvons imaginer la détermination de critères précis au sein des DDCS pour
s’assurer du respect effectif du droit des usagers au sein des structures.
Ces documents peuvent ainsi attester la qualité des prestations dispensées par la
structure, ce qui pourra servir de base pour négocier la légitimité des financements
engagés par la DDCS.
40 Article L312-8 CASF
- 54 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
3.4.2 Le rôle du pilotage du secteur de la protecti on juridique des majeurs par
l’inspecteur
L’IASS a un rôle de pilotage à jouer au sein du secteur de la protection juridique des
majeurs, il dispose de différents leviers d’action qui lui permettent d’agir sur l’organisation
et le fonctionnement du système.
a) L’impact de la planification sur l’organisation du secteur de la protection juridique
des majeurs, le levier d’action pour l’IASS : le schéma régional des mandataires
judiciaires
La loi du 5 mars 2007 a prévu la création de schémas régionaux des mandataires
judiciaires à la protection des majeurs et des délégués aux prestations familiales.
Ce schéma s’inscrit dans le champ de l’article L312-4 du CASF.
Le schéma doit :
- apprécier la nature, le niveau et l’évolution des besoins de la population en
matière de protection des majeurs.
- dresser le bilan quantitatif et qualitatif de l’offre.
- à partir de ces constats, déterminer les perspectives et les objectifs de
développement de l’offre.
- préciser le cadre de la coopération et de la coordination entre les services MJPM,
les services DPF et les autres établissements et services.
- définir les critères d’évaluation des actions prévues.
Le schéma a pour but d’assurer une certaine cohérence entre les situations effectives au
sein des départements. L’enjeu est d’améliorer les réponses du système de protection
juridique aux besoins de la population des majeurs vulnérables dans le but d’une
rationalisation du secteur. Cela permettra ainsi une meilleure répartition des acteurs.
Les services de mandataires judiciaires ont donc vocation à s’inscrire dans ce schéma
régional arrêté par le représentant de l'Etat dans la région41. Il en va de même des
personnes physiques exerçant à titre individuel et pour les préposés d’établissement.
Ce schéma est donc un outil de planification à la disposition de l’inspecteur mais c’est
également un outil d’aide à la décision.
En effet, le schéma régional a une portée juridique importante puisqu’il est opposable
dans le cadre de la procédure d’habilitation des mandataires judiciaires à la protection des
majeurs et des délégués aux prestations familiales. Ses dispositions sont prises en
compte lors de l’examen des demandes d’autorisation de création de services tutélaires,
d’agrément de personnes physiques exerçant à titre individuel.
41 Article L 312-5 d) du CASF.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 55 -
L’instruction des demandes s’appuie entre autres sur les objectifs et les besoins définis
dans le schéma.
Ce schéma permet ainsi d’adapter l’offre aux besoins régionaux et départementaux, il est
un support et un outil de travail important pour l’inspecteur.
b) L’impact de la nouvelle procédure de l’appel à projet
Comme nous l’avons vu dans notre première partie, dorénavant une procédure d’appels à
projets est instaurée pour autoriser la création, la transformation ou l’extension des
ESMS. Ce changement redonne l’initiative aux autorités publiques.
Cela permet d’organiser de façon plus efficace et pertinente l’offre de services sur le
territoire, en effet, la sélection des projets par les décideurs est plus efficiente étant donné
qu’elle répond à des besoins stratégiques définis au niveau régional pour le secteur des
services de mandataires judiciaires.
Les besoins et les priorités sont définis préalablement dans le schéma régional des MJPM
et des DPF que nous avons évoqué ci-dessus.
Une fois que ceux-ci ont été clairement identifiés, l’appel à projet est lancé par les DDCS,
un cahier des charges est établi, il rappelle et précise les besoins à satisfaire et le cadre
du projet auquel les opérateurs doivent répondre.
c) La contractualisation, un levier d’action dans l’amélioration de la prise en charge
et notamment avec l’introduction du CPOM
Les services mettant en œuvre les mesures de protection juridique, dès lors qu’ils
atteignent un certain seuil, devront, comme les autres établissements énoncés à l’article
L313-12-2 du CASF, faire l’objet pour leur financement d’un CPOM signé entre leur
personne morale gestionnaire et l’autorité de tarification, la DRJSCS. Cette généralisation
des CPOM par la loi HPST a un impact sur le travail des IASS en DRJSCS, l’inspecteur a
donc un réel levier d’action sur les associations de mandataires judiciaires au niveau de
l’amélioration de la qualité de la prise en charge des majeurs protégés, du respect des
droits des usagers, de l’harmonisation des pratiques professionnelles.
En effet, le CPOM définit des objectifs précis et formalise les engagements contractuels
de l’organisme gestionnaire et de l’autorité de tarification sur une période maximale de 5
ans. Le contrat peut ainsi fixer des objectifs en termes de qualité mais également
financiers. Et en complément de ces objectifs, le CPOM devra décrire les transformations
que l’organisme s’engage à opérer dans ses activités, son organisation, sa gestion et ses
modes de coopération.
Ainsi, les IASS ont la possibilité de contractualiser avec les services de mandataires
judiciaires. Cela permet de décider et de réfléchir avec les acteurs de la prise en charge
- 56 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
qui travaillent au sein des services aux meilleurs objectifs afin d’améliorer la qualité de la
prise en charge des majeurs protégés.
Les IASS ont différents outils à leur disposition au sein des services déconcentrés de
l’Etat pour impacter sur la prise en charge des majeurs protégés. Sans révolutionner le
système, cela leur permet de disposer de leviers d’action qui peuvent rationnaliser
l’organisation et le fonctionnement du secteur de la protection juridique et de mettre en
adéquation l’offre aux besoins de la population.
Suzanne MONCHAMBERT> - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 57 -
Conclusion
« Les conditions d’application et d’exercice d’un droit peuvent se négocier, car on ne
serait confondre l’universalité d’un droit et l’uniformité de sa mise en œuvre. Mais un droit
en tant que tel ne se négocie pas, il se respecte. »
Robert CASTEL
L’insécurité sociale : qu’est-ce qu’être protégé ?
Certaines personnes, du fait de l’altération d’une partie de leur faculté, dépendent des
autres pour accomplir les actes de la vie quotidienne. Les régimes de protection juridique
ont pour mission d’aider ces personnes les plus vulnérables parfois même à survivre.
La réforme du 5 mars 2007 est une loi de libertés qui permet au majeur protégé de se voir
reconnaitre au même titre que n’importe quel citoyen ses droits fondamentaux. L’objectif
final étant de parvenir à protéger tout en préservant la liberté et les droits de ces
personnes.
L’intégration du secteur de la protection juridique dans le champ de la loi du 2 janvier
2002 a engendré de nombreuses évolutions en mettant en place notamment le schéma
régional des mandataires judiciaires, en inscrivant les activités dans un processus
d’autorisation, d’évaluation mais surtout en appliquant les droits des usagers aux majeurs
protégés.
Les droits proclamés et surtout les instruments prévus pour en assurer le respect
engendrent des mutations importantes dont les professionnels doivent dorénavant se
saisir. Ces évolutions constituent un véritable défi pour le secteur des mandataires
judiciaires, un défi de taille mais qui n’est pas insurmontable.
Il semble évident que cette nouvelle prise en charge des personnes allait induire des
changements dans la perception que les professionnels ont des personnes protégées.
Leur reconnaitre des droits, c’est considérer qu’elles peuvent être acteurs et participer à la
mise en œuvre de leur projet de prise en charge.
Toutes les discussions sont possibles, tous les mouvements de réflexion et les groupes
de travail aussi, cependant il manque le recul que seul le temps pourra apporter.
Dans cinq ans, il sera encore plus intéressant d’étudier la mise en œuvre et
l’appropriation par les acteurs des outils de la loi du 5 mars 2007 et de pouvoir dresser le
bilan quant à une amélioration globale de la prise en charge des majeurs protégés.
L’IASS a un rôle certain à jouer et des outils à sa disposition pour permettre d’assurer un
meilleur respect du droit des usagers.
- 58 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
Son accompagnement, ses conseils et ses possibilités de contrôle et de pilotage du
secteur permettent une présence bienveillante et stimulante de l’inspecteur auprès des
acteurs. Le succès de cette réforme dépend surtout de la volonté des acteurs de la prise
en charge des majeurs protégés de travailler ensemble. C’est un des défis que
l’inspecteur a à relever.
Une nouvelle dynamique est lancée, la mise en œuvre du droit des usagers au sein du
secteur de la protection juridique des majeurs se fera progressivement à travers une
amélioration constante des possibilités offertes par la loi, du fait de l’action de tous les
acteurs et notamment de l’inspecteur.
« Peu de choses sont impossibles à qui est assidu et compétent... Les grandes œuvres
jaillissent non de la force mais de la persévérance. »
Samuel Johnson
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 59 -
Bibliographie
1. Lois, décrets et circulaires
Loi n°75-535 du 30 juin 1975 relative aux instituti ons sociales et médico-sociales
Loi n°68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du dro it des incapables majeurs
Loi n°2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs
Loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action so ciale et médico-sociale
Décret n°2008-1556 du 31 décembre 2008 relatif aux droits des usagers des mandataires
judicaires à la protection des majeurs et des délégués aux prestations familiales
Décret n° 2008-1553 du 31 décembre 2008 relatif à l ’exercice à titre individuel de l’activité
de mandataire judiciaire à la protection des majeurs et de l’activité de délégué aux
prestations familiales
Recommandation n°R99 du comité des ministres aux ét ats membres sur les principes
concernant la protection juridique des majeurs incapables, du 23 février 1999
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œuvre des GCSMS
2. Rapport et avis
CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL, Réformer les tutelles, 2006
GROUPE DE TRAVAIL INTERMINISTERIEL, le dispositif de protection des majeurs, dit
rapport FAVARD, Avril 2000
IGAS n°95-155, « Bilan d’application de la loi du 30 juin 1975 relative aux ISMS » dit
rapport JOIN- LAMBERT, 1995
- 60 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
IGAS, INSPECTION GENERAL DES FINANCES, Rapport d’enquête sur le
fonctionnement du dispositif de protection des majeurs, 24 novembre 1998
3. Ouvrages
BAUER M., FOSSIER T., Les tutelles, accompagnement et protection juridique des
majeurs, ESF Editeur, 2008
BORGETTO M., LAFORRE R., Droit de l’aide et de l’action sociale, Edition
Montchrestien, 2006
GACOIN D., Communiquer dans les institutions sociales et médico-sociales, Enjeux,
Stratégies et Méthodes, DUNOD, 2002
JANVIER R et MATHO Y Mettre en œuvre le droit des usagers dans les organisations
sociales et médico-sociales, DUNOD 3ème édition, juillet 2004
JOURDAIN A., BRECHAT P, La nouvelle planification sanitaire et sociale, Presse de
l’EHESP, 2008
LHUILLIER Jean-Marc, Le droit des usagers dans les établissements sociaux et médico-
sociaux, 3ème édition, ENSP, 2004
MOLIN O., La protection juridique des majeurs, SOFIAC, 2008
4. Guides et recommandations
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définition et repères pour la mise en œuvre, Juin 2008
ANESM, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles, Les attentes de la
personne et le projet personnalisé, décembre 2008.
ANESM, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles, Elaboration, rédaction
et animation du projet d’établissement ou de service, Mai 2010
CNSA, DGAS, Nouvelle procédure d’autorisation par appel à projet, Dossier de presse du
30 juillet 2010
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 - 61 -
FEGAPEI, département gestion organisation et qualité, associations gestionnaires, vos
nouvelles obligations issues de la loi 2002-2 : guide pratique de mise en œuvre des droits
des usagers Novembre 2002 Version 2
FNAT, Outil interne d’évaluation, Guide méthodologique OLIVE, 2007
MINISTERE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DES SOLIDARITES ,
MINSTERE DE LA SANTE, DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS, SECRETARIAT
D’ETAT A LA SOLIDARITE, DGAS, La réforme de la protection juridique des majeurs,
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URIOPSS Rhône Alpes, Guide pratique de la coopération, zoom sur les GCSMS,
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5. Articles, Revues
ASH, La protection des majeurs vulnérables, Cahier N°2652, 2 ème édition, mars 2010
ASH, L’urgence d’une rénovation, 21 janvier 2000
ASH, Premiers résultats en demi-teinte sur l’application du droit des usagers, avril 2005
LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE, Fondation Méderic Alzheimer, numéro 11, Respect
des droits des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, l’entrée en établissement,
octobre 2009
LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE, Fondation Méderic Alzheimer, numéro 13, Respect
des droits des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, la vie en établissement,
janvier 2010
LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE, Fondation Méderic Alzheimer, numéro 15, Respect
des droits des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, la protection juridique en
établissement et la sortie, juillet 2010
REVUE DE DROIT SANITAIRE ET SOCIAL, La réforme des tutelles, Dalloz, Septembre-
octobre 2008
- 62 - Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011
REVUE DE DROIT SANITAIRE ET SOCIAL, Le droit des tutelles après la réforme,
nouvelle branche du droit de l’action sociale ?, Dalloz, Juillet 2007
TSA, Les tutelles à l’épreuve du changement, TSA n°15, juin 2010
6. Colloques
EHESP, Comment les professionnels se saisissent de la réforme du 5 mars 2007 ? , le 08
juin 2010
FNAT, La protection de la personne : limites et contours, le 17 juin 2010
7. Schéma régional des MJPM et des DPF
DRASS, Schéma régional des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et des
délégués aux prestations familiales, Région Ile-de-France, 2010-2014
DRASS, Schéma régional des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et des
délégués aux prestations familiales, Région Centre, 2010-2014
8. Sites internet
- TSA: www.tsa-quotidien.fr
- UNAF: www.unaf.fr
- DRASSIF : www.ile-de-france.sante.gouv.fr/
- INSEE : www.insee.fr/
- Ministère de la Santé et du Travail : www.travail-emploi-sante.gouv.fr/
- Légifrance : www.legifrance.gouv.fr/
- Ministère de la justice : http://www.tutelles.justice.gouv.fr
- FNAT : www.fnat.fr
-ANDP : www.andp.fr
- FEGAPEI : www.fegapei.fr
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 I
Liste des annexes
Annexe 1 : Liste des personnes rencontrées et celles qui ont accordé un entretien
téléphonique
Annexe 2 : Recommandation n°R99 du comité des minis tres aux états membres sur les
principes concernant la protection juridique des majeurs incapables, du 23 février 1999.
Annexe 3 : Décret n°2008-1556 du 31 décembre 2008 r elatif aux droits des usagers des
mandataires judicaires à la protection des majeurs et des délégués aux prestations
familiales
Annexe 4 : Décret n° 2008-1553 du 31 décembre 2008 relatif à l’exercice à titre individuel
de l’activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs et de l’activité de délégué
aux prestations familiales
Annexe 5 : Charte des droits et libertés de la FNAT
II Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Annexe 1 : Liste des personnes rencontrées et celles qui ont accordé un entretien téléphonique
Personnes rencontrées
Fonction
Structure
Date
Mme O. Directrice Association France Alzheimer d’un département d’Ile de France
12 juillet 2010
Mme G. Mandataire judiciaire, préposé d’établissement
Hôpital gérontologique
27 juillet 2010
Mme R. Juge des tutelles Tribunal d’instance 22 juillet 2010
Mr C. Juriste FNAT 16 juillet 2010
Mme A Directrice de la gestion et de la gouvernance associative
FEGAPEI 15 juillet 2010 et le 24 septembre 2010
Mme C Directrice Service de mandataire judiciaire
2 septembre 2010
Mr R Directeur UDAPEI d’un département d’Ile de France
2 septembre 2010
Mme B Inspectrice hors classe
DDCS
5 octobre 2010
Mr G Mandataire judiciaire exerçant à titre individuel
Entretien téléphonique, le 9 novembre
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 III
Annexe 2 : Recommandation n° R 99 du comité des min istres aux états membres
IV Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 V
VI Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 VII
Annexe 3 : Décret n°2008-1556 du 31 décembre 2008 r elatif aux droits des usagers des
mandataires judicaires à la protection des majeurs et des délégués aux prestations
familiales
VIII Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 IX
X Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 XI
Annexe 4 : Décret n° 2008-1553 du 31 décembre 2008 relatif à l’exercice à titre individuel de l’activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs et de l’activité de délégué aux prestations familiales
XII Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 XIII
XIV Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 XV
Annexe 5 : Charte des droits et libertés de la FNAT
XVI Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
PREAMBULE La Charte de la FNAT présente un ensemble de principes que les membres de la Fédération Nationale des Associations Tutélaires s’engagent à respecter dans l’accomplissement de la mission tutélaire qui leur est confiée par l’autorité judiciaire et les pouvoirs publics. Forte de la richesse et de la diversité des nombreuses associations qui la composent, la FNAT affirme dans cette Charte les principes fondamentaux du bon exercice des mesures de protection telles que définies par les lois n° 66-774 du 18/10/1966 et n° 68-5 du 03/01/1968. La charte comprend également les règles essentielles de gestion que toutes les associations adhérentes doivent respecter tant dans leur fonctionnement démocratique que dans les relations avec les majeurs protégés dont leurs services ont la charge. TITRE I - PRINCIPES FONDAMENTAUX La FNAT assume une mission d’intérêt général, en privilégiant la Personne. La FNAT s’appuie sur un réseau solidaire constitué de bénévoles et de professionnels animés de la volonté commune de répondre, en fonction des moyens qui leur sont donnés, aux besoins des personnes protégées. Cette Charte représente aussi bien l’affirmation par la FNAT d’une philosophie de prise en charge de la personne protégée vis-à-vis de ses partenaires et des pouvoirs publics qu’un acte d’engagement souscrit par chaque association adhérente. LA FNAT affirme :
La volonté de s’engager au côté d’une population fragilisée par la maladie, les handicaps ou l’affaiblissement dû à l’âge. La volonté de combattre la solitude, l’exclusion, de réduire les effets de l’éloignement, de l’éclatement ou de la disparition de la famille de la personne protégée en s’inscrivant dans le cadre d’une politique de solidarité substitutive. La volonté de garantir pour toute personne protégée :
Le respect de ses convictions philosophiques, religieuses et politiques.
Le respect de sa vie privée, de ses choix de vie, de sa liberté d’aller et venir. La volonté d’exercer la mission tutélaire dans une totale transparence financière vis à vis aussi bien de la personne protégée que des autorités de contrôle. A PARTIR DE CES PRINCIPES FONDAMENTAUX La FNAT s’engage à promouvoir l’exercice des mesures de protection avec les objectifs suivants :
Assurer la protection, la représentation ou le conseil et l’assistance de la personne protégée. Accompagner, soutenir et assister la personne protégée en tenant compte de ses besoins et de ses aspirations. Défendre le droit de la personne protégée à rester, à redevenir ou à devenir acteur de son projet de vie.
Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2011 XVII
Sauvegarder les intérêts matériels de la personne protégée en assurant une saine gestion de son patrimoine et de ses revenus La FNAT s’engage à promouvoir :
La mise en place d’un projet institutionnel définissant et garantissant le respect des principes ci-dessus énoncés ainsi que la qualité du service rendu à la personne protégée. L’élaboration avec la personne protégée d’un projet individuel qui prévoit notamment : - l’établissement d’un bilan socio-économique régulier, - l’adaptation ou la modification de la mesure en fonction de l’évolution des capacités de la personne protégée, - l’information de la personne protégée de toutes les voies de recours. L’aide et le conseil aux tuteurs familiaux. Afin de permettre une application concrète des principes fondamentaux et des objectifs ci-dessus énoncés, la FNAT s’engage à mettre au service des associations, de leurs bénévoles et de leurs professionnels, l’aide nécessaire. TITRE II - GESTION DE L’ASSOCIATION ADHERENTE Les associations adhérentes à la FNAT s'engagent à : ARTICLE 1 : Avoir un bon fonctionnement démocratique de leurs organes statutaires (assemblée générale, conseil d’administration) avec tenue des différents registres de délibérations dûment signés, conformément aux textes en vigueur. Transmettre à la fédération les modifications intervenues dans leurs organes dirigeants, ainsi que leurs états financiers annuels, après leur assemblée générale. ARTICLE 2 : Mettre en place des organigrammes avec indication des délégations de pouvoir et de signature pour les administrateurs et les salariés. ARTICLE 3 : Mettre en place un manuel de procédures tenu à jour et des contrôles internes portant sur les opérations comptables, administratives et financières. Séparer strictement les tâches d’engagement et de paiement. ARTICLE 4 : Nommer un commissaire aux comptes, quelle que soit l’importance de l’association afin de vérifier la sincérité et la régularité des comptes et de garantir la situation financière et patrimoniale. ARTICLE 5 : Souscrire un contrat de responsabilité civile professionnelle et responsabilité civile des mandataires sociaux pour l’association, les contrats étant signés par le président. ARTICLE 6 :
XVIII Suzanne MONCHAMBERT - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique -2011
Présenter et faire valider leurs budgets prévisionnels N+1, et leurs comptes, résultat et bilan par leurs organes délibérants, conformément aux statuts, dans les délais prévus. ARTICLE 7 : Mettre en œuvre une gestion des ressources humaines volontariste afin de répondre aux missions confiées, notamment, en veillant au bon fonctionnement des instances représentatives de leur personnel, en appliquant un règlement intérieur. ARTICLE 8 : Répondre à toute sollicitation de la fédération sur un des articles ci-dessus, notamment toutes statistiques nécessaires à la connaissance des populations prises en charges. TITRE III - GESTION DES FONDS CONFIES ET DU PATRIMOINE DES MAJEURS Les associations adhérentes à la FNAT s’engagent à : ARTICLE 1 : Ce que leurs administrateurs ou /et salariés de l'association ne puissent bénéficier d’aucun don, legs et rémunération de la part des majeurs protégés, ni effectuer aucune transaction patrimoniale ou financière à titre personnel avec des majeurs protégés ou ayant été des majeurs protégés de l’association, dans les délais légaux de prescription en la matière (5 ans). Interdire l’inscription, aux administrateurs et aux salariés, sur les différentes listes tenues par les procureurs en matière de protection des incapables. Interdire aux administrateurs d’être délégués à la tutelle dans l’association qu’ils administrent ARTICLE 2: Individualiser obligatoirement les avoirs des majeurs et les produits financiers leur revenant sur des comptes personnels. Interdire les comptes pivots. ARTICLE 3 : Privilégier le maintien des comptes d’épargne et de placement des majeurs dans les organismes bancaires existants avant la mise en place de la mesure. La gestion des placements se fait en bon père de famille. ARTICLE 4 : Effectuer un inventaire complet des avoirs et biens mobiliers et immobiliers des majeurs en début de mesure en application du mandat et à le communiquer aux magistrats (Consultations des fichiers FICOBA, fiches hypothécaires). ARTICLE 5: Supprimer la circulation des espèces dans les services. ARTICLE 6 : Respecter la stricte séparation entre l'ordonnateur et le payeur. ARTICLE 7:
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Veiller à la mise en place de contrôles internes sur les procédures financières et au respect de la législation en matière d'acte de disposition et de placement des fonds. Étendre la mission du commissaire aux comptes à la vérification du bon fonctionnement des comptes des majeurs protégés. ARTICLE 8: Établir pour chaque majeur un budget individualisé qui prenne en compte ses besoins matériels et son projet de vie. Promouvoir l’autonomie des personnes dans la gestion de leur argent personnel. ARTICLE 9: Exiger pour chaque majeur la mise en place de contrats d’assurance responsabilité civile, multirisque habitation, véhicule s’il y a lieu, avec les garanties nécessaires et suffisantes. ARTICLE 10 : Communiquer régulièrement leurs comptes aux majeurs avec les précautions adaptées à leur compréhension. ARTICLE 11 : Conformément à l’article 471 du code civil, effectuer la reddition des comptes de gestion aux magistrats, et selon le cas aux majeurs, au nouveau tuteur, aux héritiers. Paris, le 4 Juin 2004
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MONCHAMBERT Suzanne Juin 2011
MASTER PPASP 2010-2011
La protection juridique des majeurs et les droits d es usagers, un paradoxe ?
Résumé : Actuellement, 800 000 personnes, soit 1% de la population française sont placées sous un régime de protection juridique. L’augmentation considérable du nombre de mesures justifiait une importante réforme du dispositif, celle du 5 mars 2007 est une loi d’envergure. Elle donne une force et une dynamique nouvelle à la protection juridique des majeurs. Cela se traduit notamment par l’application à la population des majeurs protégés du droit des usagers et des outils y afférents issus de la loi du 2 janvier 2002. Les droits proclamés et surtout les instruments prévus pour en assurer le respect sont des mutations importantes pour le secteur de la protection juridique des majeurs dont les professionnels doivent dorénavant se saisir. L’impact de la loi du 2 janvier 2002 sur la protection des majeurs vulnérables et notamment sur les droits qui leur sont reconnus se ressent à différents niveaux : au niveau des établissements sociaux et médico-sociaux, du secteur des mandataires judiciaires mais également de la prise en charge des majeurs protégés. L’IASS a un rôle majeur à jouer et des outils à sa disposition pour permettre d’assurer un meilleur respect du droit des usagers et ainsi une amélioration de la prise en charge globale des majeurs protégés.
Mots clés : Protection juridique, majeurs protégés, droit des usagers, loi du 2 janvier 2002, mandataires judiciaires
L'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique n'enten d donner aucune approbation ni improbation aux opin ions
émises dans les mémoires : ces opinions doivent êtr e considérées comme propres à leurs auteurs.