Top Banner
18

Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Jun 21, 2022

Download

Documents

dariahiddleston
Welcome message from author
This document is posted to help you gain knowledge. Please leave a comment to let me know what you think about it! Share it to your friends and learn new things together.
Transcript
Page 1: Roger Guyot - Christophe Bonnaud
Page 2: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Roger Guyot - Christophe Bonnaud

C I T R O Ë N

0 r \ c L 1 T S

Q l y J e f u t u r

DLE-20031103-45452 2003-261121

Éditions ROGER REGIS

Page 3: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

A Simonne et Régis...

A l'orée d'un espoir renaissant, la lumière inonde de nouveau le futur.

A Philippine...

A ma petite Etoile, ivre de ciel clair, véritable hymne à la vie.

Page 4: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Sommaire

Page 5: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

-- (LAUDt SATINCT Directeur Général d'Automobiles Citroën

" U n e C i t r o ë n d o i t ê t r e a t t i r a n t e e t d i f f é r e n t e "

->FI' laude

oooo' chez Citroi laude Satinet avoue ses pêchés: "quand je suis entré

. chez Citroën, en 1973, je roulais en... Peugeot ! Mais,

s'empresse-t-il d'ajouter, j'ai immédiatement acheté une Citroën,

par loyauté vis-à-vis de la société et c'était une 2CV". A la tête de

l'entreprise automobile qui ne laisse personne indifférent, Claude

Satinet roule aujourd'hui en XM même s'il reconnaît que ce modè-

le "est en dehors de ce que j'imagine être la ligne Citroën. On ne

trouve pas en elle la simplicité, la pureté que l'on reconnaît par

exemple dans une Xantia ou une Xsara". Aujourd'hui, comment

peut-il convaincre les Citroënistes invétérés et séduire une clientè-

le à conquérir". Je ne sais pas si mon métier est plus difficile que

celui de mes confrères. Il est différent, voilà tout car chacun des

patrons automobiles a des situations bien diverses à gérer". Ce qui

est certain, c'est que le droit à l'erreur est désormais exclu. "C'est

vrai, nous n'avons pas le droit de nous tromper mais je ne voudrais

pas que tout ceci soit personnalisé. Aujourd'hui, ce n'est pas moi

qui choisi, c'est une équipe. Une des façons de réduire le risque,

c'est précisément que la décision ne soit pas individuelle, qu'elle

soit partagée. Certes, il n'y a pas cinquante personnes qui s'expri-

ment, nous sommes dans un groupe structuré et il existe plusieurs

avis. Les décisions de choix de produits sont des décisions collec-

tives". Et, face aux multiples propositions qui, en secret, étalent

leurs charmes devant les responsables de l'entreprise pour un choix

cornélien, Claude Satinet pense peut-être à cette époque où,

enfant, il observait l'agent Citroën qui faisait face à la maison de sa

grand-mère."Il démontait ses voitures à l'extérieur car en ce temps

là, il y a cinquante ans, les installations étaient relativement réduites

et modestes. C'était au départ un attrait pour la mécanique et il se

trouve que c'était un agent Citroën, pure coïncidence. J'étais fasci-

né de voir les voitures de l'intérieur, comment elles fonction-

naient..."

Aujourd'hui, poursuit Claude Satinet, "il existe deux aspects du

métier qui me passionnent, les hommes et le produit. Les hommes,

c'est finalement ce qu'il y a de plus constant quel que soient les

métiers. Et puis il y a le produit automobile. Là, nous touchons plu-

tôt un domaine dans lequel le style peut paraître comme une

récréation mais ce n'est pas un divertissement, surtout lorsqu'on

sait les investissements lourds engagés". Le style, le mot est lâché.

C'est avec lui que le patron de Citroën veut renforcer le futur de la

marque. "Pour moi, l'un des éléments les plus forts dans l'image

Page 6: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

d'une marque, c'est sa gamme de produits car c'est vraiment la pre-

mière communication qu'elle fait auprès du public, et l'image passe

donc immanquablement par le style extérieur de ses modèles.

Même lorsqu'on aura progressé en France à 15 ou 16 % du marché,

il restera plus de 80% des acheteurs qui ne connaîtront que l'exté-

rieur des Citroën ! Donc, le premier message que nous devons pas-

ser doit transiter d'abord par le style extérieur". Est-ce à dire que

l'innovation technologique sera oubliée ? "L'innovation, c'est

quand vous faites avant les autres ce que les autres font après. C'est

ce qui est copié, suivi, parfois amélioré et donc j'exclus toute hypo-

thèse qui conduirait à l'excentricité hors tendance. Par contre, je ne

peux pas exclure l'originalité précurseur d'une évolution". Et pas

question de faire dire à Claude Satinet que la clientèle Citroën est

plus à même que d'autres à accepter le risque de l'innovation ! "Je

ne suis pas sûr qu'il soit mieux accepté de la part de la clientèle ! Ce

risque n'est de toute façon pas un moyen de progresser en vente ce

qui reste, quand même, notre aboutissement final ! En fait, nous

devons plus simplement créer des modèles qui soient séduisants

pour les Citroënistes et qui soient aussi attirants pour les non-

Citroënistes. Il se trouve que la Xantia correspond très bien à cela.

Xsara Picasso et nos concepts-cars C3 et C6 répondent également

à ces exigences. Ils ont été accueillis comme de vraies Citroën. Ils sont suffisamment attirants et différents de la concurrence et en

même temps, conformes à ce que chacun considère être les carac-

téristiques Citroën.

Le siècle prochain confirmera cette tendance forte de la marque...

Page 7: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Un Homme, une Marque

0<- ^̂ "̂"̂visage ndré Citroën, c'est un

visage où s'impose un front très largement dégarni qui surplombe des binocles très légères. La fine tige de métal qui relie les verres, plantée juste au dessus de son nez, semble être un viseur. Pour toujours atteindre sa cible, sans doute... Derrière les binocles, des sourcils discrets surmontent un regard affûté. Le nez est long mais dans de justes proportions aqui- lines et la moustache, finement taillée, recouvre la tota- lité de sa lèvre supérieure. Aux commissures des lèvres, se dessine l'esquisse d'un sourire et pourtant, rares sont les documents photographiques dévoilant le Patron souriant... Le menton est carré et casse les volumes d'un visage plutôt rond. Une fossette scinde cette base solide. L'homme n'est pas un géant, pas un géant de l'espèce humaine avec ses moins de 1,70 mètre, mais il est devenu un géant de l'industrie automobile.

André Citroën, polytechnicien est ici coiffé de la frégate,

ancien nom donné au chapeau d'uniforme, le bicorne,

symbole de l'X et dont la forme

élégante rappelle de loin celle d'un navire à voile. La courbe

de la frégate ou du bicorne n'est pas due à un artiste habile mais à une courbe

géométrique représentée par une certaine équation

mathématique. Du côté droit, il

est orné d'une ganse dorée cousue avec bouton aux armes

de l'école et d'une cocarde

tricolore. L'X, symbole de l'école polytechnique provient

des canons entrecroisés barrant la cuirasse du blason de l'école et de la lettre " x "

des mathématiciens. Ce surnom date de 1810.

En 1794, est créée l'Ecole

centrale des travaux publics qui prendra définitivement le

nom d'Ecole Polytechnique en 1795.

Son neveu Louis Hugues et ses fils Maxime et Bernard

seront également polytechniciens.

André Citroën naît à Paris le 5 février 1878. Il est le dernier des

cinq enfants de Levie Citroën, diamantaire d'origine hollandai-

se et d'Amalia Kleimmann d'origine polonaise.

Son père meurt tragiquement le 14 septembre 1884 et il en res-

tera très marqué. Il n'a alors que six ans.

Le nom de Citroën vient de son trisaïeul qui exerçait dans la banlieue d'Amsterdam le métier de marchand saisonnier. Il

avait pour nom Limoenman qui signifiait tout simplement

"l'homme aux petits citrons". Le grand père d'André Citroën

devant l'insistance de son futur et riche beau père souhaitant un

autre nom plus "sérieux" choisit le nom de Citron (Citroen en hollandais). Sa mère décède en 1899, et son frère Bernard est tué

en 1914, lors de la guerre, au front où il servait.

André Citroën se marie le 27 mai 1914 avec Giorgina Bingen,

fille d'un banquier italien, Gustave Bingen, installé en France.

Quatre enfants naîtront de leur union : Jacqueline (1915),

Bernard (1917), Maxime (1919) et Solange (1925).

André Citroën meurt le 3 juillet 1935 à l'âge de 57 ans.

Son fils Bernard, seul survivant, est aujourd'hui âgé de 82 ans.

Page 8: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

André Citroën et son épouse Giorgina

jouant au backgammon (le jacquet).

André Citroën en tenue " d'études "

entouré de quelques camarades de classe de la

salle 21, dans la cour de

l'Ecole Polytechnique.

Page 9: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Histoire de la H i s t o i r e d e l a

Page 10: Roger Guyot - Christophe Bonnaud
Page 11: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

H I S T O I R E O U R O M A N ? R é u s s i t e , t o u t s i m p l e m e n t . . .

1919 Au mois de juin la Type A est la première automobile

construite en Europe en grande série.

ndré Ci t roën naît le 5

- février 1878 et dès l'âge de 20

ans, entre à Polytechnique (62ème au concours d'entrée) d 'où il

sort, deux ans plus tard, à une modeste 162ème place sur 192. En

1912, il fonde la société anonyme des engrenages Citroën. L'idée de

produire en série des engrenages à double chevron en acier n 'est

pas unique au monde puisqu 'une usine russe y est parvenue avant

lui. En scellant son n o m -et bientôt sa marque- avec cet engrenage

André Citroën a

commencé sa carrière

automobile chez Mors. Cette action du

constructeur porte la

première signature " automobile "

d'André Citroën.

La sortie des ouvriers de

l'usine Mors située 48 rue du Théâtre à Paris.

Elle abritera plus tard le "fameux" bureau d'études

de la marque

jusqu'en 1967.

caractéristique, Citroën annonce la couleur: s'il n'invente pas de

technologies révolutionnaires, il sait les flairer avant qu'elles ne le

deviennent et se fait un devoir de les porter au firmament de la

créativité industrielle. Plus tard, nous le verrons, il fera de même

avec les licences de la carrosserie tout acier ou du moteur flottant

tout droit importées des Etats Unis d'Amérique.

En 1913, à la veille de la première guerre mondiale, l'homme s'est

aussi illustré en tant qu'industriel et gestionnaire hors pair: la mai-

son Mors dont il a repris les commandes en 1908 multiplie par 10

sa production ! Gestionnaire, Citroën le devient également pendant

le premier conflit mondial. Il fabrique dans ses usines de Javel plus

de 50 000 obus chaque jour. Mais, en dehors de l'usine Mors, ses

liens avec l'automobile sont alors quelque peu ténus. Et lorsqu'en

1919 apparaît la première automobile Citroën -la Type A-, l'impact

ne concerne pas seulement le produit. Pour la première fois, un

constructeur automobile destine sa nouveauté au plus grand

nombre mais aussi la conçoit pour qu'elle soit facile à réparer, à

entretenir... En un mot, la Type A n'arrive pas seulement avec l'at-

trait de la nouveauté automobile, mais entraîne derrière elle un

panel d'organisation pré et post-production auquel personne

n'avait encore songé. Ainsi, pour répondre à cet étonnant cahier des

charges, la petite Citroën est produite en série à raison d'une cen-

taine d'exemplaires par jour, une année seulement après sa présen-

tation. Un seul modèle fabriqué à une telle cadence, voilà qui ne

s'est jamais vu en Europe. André Citroën applique ses convictions

dans le monde de l'industrie automobile comme il a opéré aupa-

ravant chez Mors ou dans son usine d'obus. André Citroën innove,

sans cesse, et fait acte de foi de cette course passionnante vers le

Ce document daté de 1874 montre le nouveau débarcadère des

bateaux-omnibus du quai de Javel.

Autre document daté de 1889. Les entrepôts du quai de Javel. La manufacture d'eau de Javel date de 1798. Elle est la première

manufacture de produits chimiques à Paris. Sur l'emplacement des futures usines Citroën il se trouve également une " guinguette " : le

Moulin de Javel où l'on s'y amuse.

Page 12: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Sur le terrain de Javel, la société parisienne de caoutchouc industriel

située au 151 quai de Javel fabriquait le Pneu " Lutetia ".

summum de la créativité. Quatre-vingt ans après, le débat a beau

s'instaurer, Citroën demeure attaché malgré moultes diversions, à

cette ligne de conduite et les récents Concept-car C3, C6 Lignage et Pluriel du récent salon de Francfort 99 concrétisent avec force

cette stratégie d'innovation.

Il est un fait qui n'est pas souvent rapporté : André Citroën n'a été

à la tête de sa société que seize années. Seize ans entre la première livraison d'une Citroën à monsieur Testemolle de Beaulieu sur

Dordogne le 4 juin 1919, et sa mort, le 3 juillet 1935 à la clinique

Georges-Bizet. Seize ans, qu'est-ce donc face à ses concurrents

français ? Une goutte d'eau? Non, un océan de créativité, une tra-

dition de recherche et de progrès. Alors que la famille Peugeot est

toujours présente dans l'organigramme du constructeur français et

que Louis Renault, de 1898 à 1945 est resté aux commandes de sa

firme plus de quarante sept ans, André Citroën n'a bénéficié que de

seize ans pour bâtir une marque automobile de renommée mon-

diale. Seize ans pour construire une légende...

Mais ces seize années de succès ont suffi pour insuffler un immen-

se sentiment de fierté qui a rayonné sur l'ensemble du personnel

jusqu'après la mort du Patron. Ce sentiment d'invincibilité a parfois

conduit les dirigeants et ses souteneurs sur des chemins menant

tout droit vers le chaos mais à chaque fois, le produit a réussi à sau-

Ce paysage était destiné à disparaître. C'est sur ces terrains de Javel

situés à l'Ouest de Paris (le 15ème arrondissement aujourd'hui) qu'André Citroën implantera son usine d'armement puis celles des Automobiles Citroën.

La type A est la première voiture construite par

André Citroën. Il applique

la stratégie de fabrication en grande série et sera le premier en Europe à l'utiliser.

ver la marque. Pourtant, par deux fois, l'entreprise Citroën a chan-

gé de direction.

Le 21 décembre 1934 tout d'abord, le Tribunal de Commerce pro-

nonce la mise en liquidation judiciaire de la société André Ciroën.

Puis, le 24 juin 1974, soit pratiquement quarante ans plus tard, le

président François Rollier annonce devant ses cadres qu'un accord

avec Peugeot vient d'être signé. Certes, les programmes d'investis-

sements sont alors énormes d'autant qu'ils tombent en pleine

guerre du Kippour, mais l'année 1973 a été excellente et 1974 s'an-

nonce sous les meilleures auspices avec l'arrivée du véhicule L, la

fameuse CX qui fête en 1999 ses 25 ans. Le 6 décembre de la même

année, les établissements Michelin et le groupe Peugeot concréti-

sent le rapprochement de Citroën et Peugeot afin de constituer un ensemble automobile de dimension internationale. Les deux socié-

tés doivent s'appuyer l'une sur l'autre, mais restent indépendantes

avec leur réseau propre et une image de marque spécifique. Facile à écrire...

La stupeur est totale: Peugeot, qui a déjà été un partenaire par l'ac-

cord de la SFA (société Auxiliaire de Fabrications Automobiles) en

Les voitures Le Zèbre ont été élaborées par l'ingénieur Jules

Salomon, c 'est lui qui étudiera la Type A pour André Citroën.

1922 André Citroën loue l'usine de

Levallois Clément Bayard

pour y fabriquer les 5 CV et les autochenilles.

Page 13: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

1 9 2 4

André Citroën pose les bases d'un réseau international avec la création de succursales à

Bruxelles, Amsterdam,

Cologne, Milan, Genève et

Copenhague.

1964 qui devait, dans l'esprit de Pierre Bercot, aboutir purement et

simplement à l'absorption de Peugeot, revient dans l'actualité de

Citroën, mais la donne est inversée. Il fallut attendre de longs mois

avant de comprendre que cette situation semblait la seule qui pou-

vait sauver la marque au double chevron. Il est un fait non démen-

ti aujourd'hui : après plus de 25 années de vie commune, la sages-

se de Peugeot a tempéré l'imagination de Citroën. Et quelle imagi- nation !

André Citroën impose de nombreuses évolutions, voire révolutions

dans le monde automobile. En France, il est le premier à produire

en série, c'est à dire en utilisant des moyens industriels lourds,

encore balbutiants en 1919. Il est le premier à croire à une traction

avant de grande série. Il est le seul dans les années 20 à prendre en considération son réseau en lui faisant bénéficier d'un véri-

André Citroën a fondé en 1901 une petite société située au 31 quai de Grenelle, elle était

spécialisée dans la fabrication d'engrenages à chevrons taillés. C'est de la forme de la denture qu'André Citroën tirera l'emblème de sa marque d'automobiles : le double

chevron. L'activité des Engrenages Citroën perdurera après la seconde guerre mondiale. A la place des engrenages Citroën, à la fin du XIXème siècle, une usine fabriquant des

voitures de chemin de fer y était installée.

Record de dimensions pour l'engrenage photographié ici et fourni à la compagnie des

Forges de Chatillon-Commentry en 1918. Quelques chiffres : la petite roue a un diamètre de 0,864 m et la grande un diamètre de 5,472 m. Elle pèse 48 tonnes et l'engrenage est

capable de transmettre une puissance de 2000 à 4000 ch à 30 tr/mn.

Fabrication des obus dans l'usine Citroën du quai de Javel. Ce sont des femmes qui travaillent, les hommes étant au front.

L'activité industrielle d'André Citroën a véritablement démarré

pendant la guerre de 1914-1918 par la construction d'une usine de fabrication d'obus. En date du 7 octobre 1915, présentation des obus finis en recette.

table service après vente, encore inconnu alors. Il est le pionnier de

la publicité et du marketing ! Dès 1919, André Citroën est le pre-

mier à implanter dans les annexes de ses usines des services médi-

caux, des crèches et même des salles de gymnastique réservées aux salariés.

En 1931, il ouvre la plus grande vitrine de représentation qu'un

constructeur ait jamais imaginé ! Cet endroit mythique a été loué

aux Chemins de Fer de l'Etat et est constitué d'un hall de message-

rie désaffecté, bâti juste au dessus des voies de la gare St-Lazare.

Les 15 000 m2 sont conformes à la démesure toujours voulue par le

Patron. Il était possible de passer de la place de l'Europe au boule-

vard des Batignolles à l'abri des intempéries. A cette époque, André

Citroën avait réussi tout ce qu'il avait entrepris et il avait donné à

l'industrie automobile française sa vitalité et son efficacité. Etait-ce

son prestige ou l'attraction qu'il exerçait sur les gens qui l'appro-

chaient ? On avait envie de travailler pour lui.

Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui, au sein de l'entreprise, vouent encore une admiration sans limite à l'âme du double che-

vron. Pourtant, elle a été et sera sans aucun doute encore chahutée,

l'âme du Patron. L'année 1998 a pourtant été importante dans l'his-

toire du futur de la marque et restera sans doute celle de la réhabi-

Page 14: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

Pour la première fois en Europe et en France on fabrique des voitures à la chaîne. Cette photo montre l 'assemblage des Citroën type A dans l'usine du quai de Javel.

litation des jours passés, heureux ou non, afin de bâtir un futur

encore meilleur. S'il était plutôt mal vu d'aborder les grandes

heures de la marque avant cette année là, le virement de bord est

total et d'une grande lucidité aujourd'hui, depuis l'arrivée de Jean-

Martin Folz à la tête...du groupe.

Citroën ne pouvait terminer ce millénaire sans ancrer ses visions

futuristes des riches acquis d'un glorieux passé. C'est la Tour Eiffel

qui nous mène par le chiffre égrené, vers ce fameux cap de l'an

2000... Cette même tour de fer et de rivets qui, à l'occasion de

l'Exposition des Arts Décoratifs de 1925, s'illumine du nom de

"Citroën". A l'époque, outre l'idée géniale d'utiliser ce support,

André Citroën eut le souci d'un travail exemplaire. Pensez qu'il fit

appel à l'ingénieur Jacopozzi, celui-là même, qui durant le premier

conflit mondial, avait créé de fausses gares de triages visibles de

nuit dans un endroit désert de la région parisienne pour tromper les

avions ennemis. Citroën voit grand, si grand qu'il tient à ce que

l'horloge qui seconde le nom de la marque sur la grande Tour soit

plus grande que la plus grande horloge du monde. La sienne a un

diamètre de vingt mètres, celle de Chicago, jusqu'alors la plus pré-

tentieuse, seulement quinze...

La grandeur. Elle irradie et aveugle ceux qui s'en gavent et peut

conduire aux plus funestes erreurs. La grandeur brûle les rétines,

Dès le début de sa production automobile André Citroën a proposé des petites camionnettes. Ici une série de B2 vendue à la société de papier à cigarettes " le Nil ".

La production des automobiles Citroën démarre au milieu de l'année 1919. La Type A

(10 HP) est la première, elle est construite en série mais sa conception demeure celle de l'époque. Châssis et armature bois sur laquelle sont fixées les tôles de carrosserie. On voit sur ce document l'atelier " bois " des carrosseries.

confine à l'euphorie et mène parfois à la décadence... La recons-

truction des usines de Javel d'avril à septembre 1933, sans inter-

rompre la production en cours en est l'expression la plus extraordi-

naire, au sens étymologique du terme ! 120 000 m2 d'ateliers

modernes sont ainsi bâtis, nécessitant pas moins de 12 500 tonnes

de charpentes métalliques... Le banquet qui suit, où plus de 6000

convives viennent fêter l'événement, ne peut masquer que tous ces

travaux reposent sur des crédits. Et la 7 01, dont la commercialisa-

Stockage des châssis Type A avant montage de la carrosserie. Ils ne

sont pour la plupart pas équipés de leurs pneumatiques.

1924 L'usine de Saint Ouen entre

en activité avec l'arrivée de la

B12 tout acier; elle est

spécialisée dans l'emboutissage.

Page 15: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

1 9 2 6

Spécialisation des usines

pour répondre à

l'augmentation des cadences de production.

tion fut très largement avancée, n'arriva pas à

temps pour éviter le pire.

André Citroën a pris la décision, dès le mois

de mars 1933, de produire 300 exemplaires

par jour dès la fin de l'année de cette

incroyable nouveauté... 1000 l'année suivante !

A cette époque, les prototypes qui circulent testent i

avec les plus grandes difficultés la boîte de vitesses

automatique Sansaud de Lavaud, qui ne sera finalement pas rete-

nue pour la grande série. La 7 CV, André Citroën l'a voulue révolu-

tionnaire. Une fois encore il n'est pas l'initiateur de la révolution

La façade de l'usine André Citroën du quai de Javel. Le bureau du Patron est

au dessus du porche d'entrée.

En janvier 1924, Citroën

publie le premier bulletin Citroën destiné à l'information

des concessionnaires, agents et stockistes de la marque. Au fil des numéros dont la

périodicité est mensuelle, il va devenir une véritable

revue.

technologique car d'autres avant lui, ont songé à ce mode

de transmission. Pourtant, il est le premier à largement

investir pour produire en masse cette technologie. Il est le

seul à laisser carte blanche à un ingénieur venu tout droit

de chez Voisin et Renault: André Lefèbvre qui possède sur lui toutes les bases de la dite révolution...

Le mode de transmission, la fameuse traction aux roues

avant, ne suffit pas à André Citroën. La carrosserie de la

7 CV sera monocoque et Flaminio Bertoni, l'artiste qui

habilla les plus étonnantes Citroën, profite de ces

techniques nouvelles pour esquisser, dessiner, modeler

un engin révolutionnaire.

Mais la sortie prématurée de la Traction Avant dont la mise au point

est, doux euphémisme, précaire, ne permet pas à la maison Citroën

d'en tirer immédiatement le profit financier auquel elle est en droit

d'espérer. Bien au contraire, la faillite pointe et contrairement à

toute attente, les banques ne suivent pas André Citroën, le lâchent

En 1922, les " Usines Citroën " s'attachent à

résoudre le problème de la signalisation des villes. Elles créent des plaques indicatrices sur le fond bleu foncé desquelles, à l'intérieur des

chevrons de la marque, on peut lire en caractères blancs une indication de ville ou une

recommandation de danger. Les premiers

panneaux sont de forme hexagonale et orangés.

au moment le plus terrible de la crise, sans lui per-

mettre de se ressaisir. "Le patron s'en était tiré tant

de fois..." entendait-on alors. Principaux créanciers, les

Michelin prennent alors les commandes. André Citroën est prié de se retirer...

Pendant quelques mois, le fils Michelin appelé à la tête de la firme

automobile du quai de Javel craint qu'André Citroën ne rebâtisse

ailleurs une marque concurrente qui eut été impitoyable. Ce scéna-

rio, incroyable aujourd'hui, est pourtant d'actualité en fin d'année

1934 mais, usé, fatigué, déchu, le Patron décède moins de huit mois

après son éviction de la tête de son entreprise. A quoi son cœur

pouvait-il servir loin de ce qui emplissait son corps de vie, loin de

son entreprise, de ses bureaux d'études, de ses usines ?

L'activité tracteur agricole a été un moment tentée par Citroën dont

le projet fut bien avancé. En septembre 1919 lors de la semaine d'automne à Senlis et à celle de la monoculture de Chartres en

octobre 1920 on put voir un petit tracteur d'origine Citroën. Baptisé " le B2 " ou parfois 12 HP, il aurait été construit à 500 exemplaires.

Mais trop occupé à mettre sur pied son réseau, André Citroën le délaissa et confia à la société Agricultural le soin d'écouler la petite

production. Il pesait 800 kg et était équipé d'un moteur de 12 ch dérivé de celui du type A.

Ceux qui pensèrent que les Michelin n'étaient que de bons ges-

tionnaires en furent pour leur frais: gestionnaires, certes, mais éga-

lement créatifs comme le fut le Patron puisque la 2 CV est née sous

leur coupe. Créatifs mais rigoureux sur le strict plan des finances. Le

Page 16: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

En septembre 1924, lors des démonstrations de Buc, des essais furent menés pour tester les aptitudes en travaux agricoles des chenillettes Kegresse.

côté auvergnat peut-être ?

Faut-il rappeler ici la naissance, la vie, la mort de la 2 CV ? Non, bien sûr.

Ce modèle, connu sous son nom de développement TPV (Très

Petite Voiture) doit être accessible à une clientèle qui n'a pas les

moyens de s'offrir jusqu'alors un moyen de transport individuel.

C'est la première réponse à la question de la mobilité individuelle,

pensée bien avant la seconde guerre mondiale puisque la 2 01,

dans sa première et spartiate version, fut

prête juste avant le conflit mondial.

Mais son cahier des charges possède

l une signature très Michelin : elle ne doit en aucun cas tenter les clients

des voitures classiques ! Transporter

4 personnes et 50 kg de bagages,

telles sont les caractéristiques

techniques du départ et les ambi-

Pour accompagner les touristes dans leur voyage, Citroën édite peu

après la mise en place de ses panneaux un petit ouvrage de poche donnant tous les plans des villes importantes de France. Publicité où comment joindre l'utile et Citroën toujours.

André Citroën passe un

accord avec Kégresse à qui l'on doit la chenille

souple en caoutchouc dès 1920. Il lui confie la

création du département des autos chenilles Citroën. Elles seront

fabriquées à Levallois et s'illustreront dans les

croisières que lancera André Citroën à travers les continents africain et

asiatique.

tions industrielles de ce modèle ne sont pas exceptionnelles mais

seulement "très" prudentes : la production est alors programmée

pour 50 exemplaires par jour. Les pères de la TPV ont pour nom

Pierre Michelin, le patron qui a voulu cette très petite voiture, Pierre

Jules Boulanger qui en fit ce drôle d'engin et le défendit face au

scepticisme de tous les techniciens et ingénieurs (ils le trouvaient

abominablement moche...) et André Lefèbvre qui le conçut.

Ajoutons bien sûr à ces trois hommes, Flaminio Bertoni, le styliste

de la marque (embauché par André Citroën) qui, trois décennies

durant, concrétisa l'avancée technologique des produits Citroën

grâce à ses dessins de carrosseries exceptionnels.

Au moment de la déclaration de la deuxième guerre mondiale,

l'usine a déjà produit 200 exemplaires de la TPV

cyclope (ces voitures ne possédaient qu'un seul phare

au centre d'où ce surnom de cyclope). Certains ont pu

dire qu'elles avaient été détruites avant l'arrivée des

Allemands. Il semble que ce soit faux. Les voitures

seraient restées à Levallois pendant une partie de la

guerre et ne furent détruites qu'au moment où

Citroën fut certain de modifier profondément le

modèle. Car le conflit mondial va indirectement per-

mettre de revoir de A à Z le projet de la TPV qui

deviendra, en 1948, la 2 CV que nous connaissons

tous. C'est effectivement un tout autre modèle qui

apparaît ainsi au Salon de Paris 1948. Par rapport au

modèle d'avant guerre, la TPV a gagné un style moins

austère et indéniablement, a été simplifiée sur le plan

des matériaux et du coût. Ainsi, les bras de suspension ne sont plus

en magnésium mais en tôle soudée alors que les vitres de portières

en rhodoïd sont remplacées par de vraies glaces. La TPV gagne

Afin de garantir une qualité optimale à ses automobiles, Citroën a

fabriqué ses propres roulements à billes.

Page 17: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

L e s p r é s i d e n t s d e C i t r o ë n

André Citroën

1924 (création de la société anonyme André Citroën)

Pierre Michelin 1935

Pierre Boulanger - 1938

Pierre Bercot 1958

1968 (PDG de Citroën SA)

Robert Puiseux 1950

Claude Alain Sarre 1968 (PDG d'Automobiles Citroën)

Page 18: Roger Guyot - Christophe Bonnaud

François Rollier 1971 (PDG de Citroën SA)

Raymond Ravenel 1971 (PDG d'Automobiles Citroën)

Georges Taylor 1974 (PDG du Directoire)

Jacques Lombard 1979 (PDG du Directoire)

Jean Baratte

1982 (PDG) Jacques Calvet 1983 (Président)

Jean-Martin Folz

1997 (Président)

Claude Satinet 1997 (Directeur Général)