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madagascar 2014/2015 - Petit Futé

Mar 06, 2023

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Khang Minh
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LA VERSION COMPLETE DE VOTRE GUIDE

MADAGASCAR 2014/2015en numérique ou en papier en 3 clics

à partir de

8.99€

Disponible sur

Page 3: madagascar 2014/2015 - Petit Futé

EDITIONDirecteurs de collection et auteurs : Dominique AUZIAS et Jean Paul LABOURDETTEAuteurs : Arnaud BONNEFOY, Nadyne BENSADOUN, Jean-Paul LABOURDETTE, Dominique AUZIAS et alterDirecteur Editorial : Stéphan SZEREMETARédaction France : François TOURNIE, Jeff BUCHE, Grégoire DECONIHOUT, Perrine GALAZKARédaction Monde : Patrick MARINGE, Caroline MICHELOT, Morgane VESLIN, Julien BERNARD, Pierre-Yves SOUCHET

FABRICATIONResponsable Studio : Sophie LECHERTIER assistée de Romain AUDRENMaquette et Montage : Julie BORDES, Élodie CLAVIER, Sandrine MECKING, Delphine PAGANO, Laurie PILLOISIconographie et Cartographie : Robin BEDDAR

WEB ET NUMERIQUEDirecteur technique : Lionel CAZAUMAYOUChef de projet et développeurs : Jean-Marc REYMUND assisté de Florian FAZER, Anthony GUYOT, Cédric MAILLOUX, Christophe PERREAUAnimatrice Web : Caroline LOLLIEROU

DIRECTION COMMERCIALEDirecteur commercial et web : Olivier AZPIROZ Responsable Régies locales : Michel GRANSEIGNEAdjoint : Victor CORREIARelation Clientèle : Nathalie GONCALVES et Vimla MEETTOO

REGIE NATIONALEResponsable Régie Nationale : Aurélien MILTENBERGER assisté de Sandra RUFFIEUXChefs de Publicité : Caroline AUBRY, Perrine DE CARNE MARCEIN, Caroline GENTELET, Sacha GOURAND, Alexandra GUILLAUME, Stéphanie MORRIS, Caroline PREAU, Virginie SMADJA Responsable Partenariats Editoriaux : Marlène TIR

REGIE INTERNATIONALEDirectrice : Karine VIROT assistée de Elise CADIOUChefs de Publicité : Romain COLLYER, Camille ESMIEU, Guillaume LABOUREURRégie MADAGASCAR: Arnaud BONNEFOY

DIFFUSION ET PROMOTIONDirecteur des Ventes : Eric MARTIN assisté d’Aissa-tou DIOP et Alicia FILANKEMBOResponsable de la diffusion : Bénédicte MOULETResponsable des ventes : Jean-Pierre GHEZRelations Presse-Partenariats : Jean-Mary MARCHAL

ADMINISTRATIONPrésident : Jean-Paul LABOURDETTEDirecteur Administratif et Financier : Gérard BRODINDirectrice des Ressources Humaines : Dina BOURDEAU assistée de Léa BENARD, Sandra MORAIS Responsable informatique : Pascal LE GOFFResponsable Comptabilité : Nicolas FESQUET assisté de Jeannine DEMIRDJIAN, Oumy DIOUF, Christelle MANEBARDRecouvrement : Fabien BONNAN assisté de Sandra BRIJLALLStandard : Jehanne AOUMEUR

PETIT FUTE MADAGASCAR 2014Petit Futé a été fondé par Dominique AUZIAS.Il est édité par Les Nouvelles Editions de l’Université18, rue des Volontaires - 75015 Paris.& 01 53 69 70 00 - Fax 01 42 73 15 24Internet : www.petitfute.comSAS au capital de 1 000 000 € - RC PARIS B 309 769 966Couverture : © Stephan SAVIGNARDISBN - 9782746969728 Imprimé en France par IMPRIMERIE CHIRAT - 42540 Saint-Just-la-PendueDépôt légal : décembre 2013Date d’achèvement : décembre 2013

Pour nous contacter par email, indiquez le nom de famille en minuscule suivi de @petitfute.comPour le courrier des lecteurs : [email protected]

Bienvenue à Madagascar !

Madagascar : « Grande Île » de l’océan Indien, « sanctuaire de la nature », « île-continent », « paradis inconnu », « carrefour culturel »… Les brochures touristiques encensent cette terre perdue au large de l’Afrique, et pourtant si proche, parfois, de l’Asie. Mais Tanindrazana, la « terre des ancêtres » ne se réduit pas à ces slogans rutilants ou à ces stéréotypes miroitants. Comment décrire les fascinants jeux de couleurs, ces camaïeux de pourpre, de vermillon, de cobalt, d’ébène, d’opale, d’émeraude et de jade, tant d’aquarelles vivantes qui enchantent le regard… ? Madagasikara est plus encore. Chaque voyage est différent, c’est pour cela que l’on revient sans cesse, comme affamé de beautés nouvelles, comme enivré d’arômes plus puissants encore que les encens des forêts mystérieuses. Il y a comme une urgence à découvrir ce merveilleux pays, où tout est possible en étant improbable. L’ère moderne, lentement, étend son ombre triste sur ces pétillements de vie. Les villes changent, l’argent y fait commerce, les portables remplacent les veillées au coin du feu... Mais l’âme malgache, si riche de croyances et de cérémonies, bat toujours avec la même vigueur, avec le même amour, sur les hautes terres ou le long des côtes. Ne nous leurrons pas : c’est l’un des pays les plus pauvres au monde. Pourtant, que de sourires partout offerts à l’étranger, le vazaha que tous les enfants saluent un peu partout, que de joies partagées sans retenue ni fausse pudeur ! Madagascar se donne et ne se reprend pas. Ne venez donc pas y chercher ce que vous ne pourrez y trouver : l’aventure est partout, à chaque instant. C’est ce qui fait le prix d’une rencontre insolite, d’un rendez-vous avec les morts et nos cousins les lémuriens. Ayez les yeux ouverts, la main tendue, l’esprit plein d’enchantement à partager. Partez libres et sans préjugés : ceux-ci nourrissent l’ignorance et perpétuent l’exclusion. Heureux comme celui qui rêve d’un long voyage – car les journées, ici, durent une éternité.

Arnaud Bonnefoy

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Sommaire�� INVITATION

AU VOYAGE �Les plus de Madagascar ........................9Fiche technique ....................................11Idées de séjour .....................................15

�� DÉCOUVERTE �Madagascar en 20 mots-clés ...............24Survol de Madagascar..........................29Histoire ..................................................49Politique et économie ...........................63Population et langues ...........................70Mode de vie ...........................................74Arts et culture .......................................86Festivités .............................................100Cuisine malgache ...............................101Jeux, loisirs et sports .........................108Enfants du pays ..................................112

�� TANA – ANTANANARIVO �Tana – Antananarivo ...........................116

Quartiers ............................................122Se déplacer .......................................123

L’arrivée ..........................................123En ville ............................................126

Pratique .............................................127Se loger .............................................139Se restaurer .......................................154Sortir .................................................162À voir – À faire ...................................164Shopping ...........................................169Sports – Détente – Loisirs ..................175Dans les environs ..............................176

Anjozorobe ......................................176Au cœur de l’Imerina ..........................178

Douze Collines Sacrées ......................178Andranoro .......................................178Ambodihady ....................................181Ambohidratrimo ..............................181Ambohidrabiby ................................182Antsahadinta ...................................182Ambohitrarahaba ............................183

Ilafy.................................................183Sabotsy Namenaha .........................183Ambohimanga .................................183

Ouest des Hautes Terres ....................186Ambatonapoaka ..............................186Ambatomirahavavy .........................186Katsoaka .........................................186Imerintsiatosika ..............................187Antongona ......................................187Mandrosoa ......................................187Vers le Lac Itasy ..............................188Lac Itasy .........................................188Ampefy ...........................................189Tsiroanomandidy ............................189

�� ROUTE DU SUD �Hautes Terres ......................................194

Ambatofotsy ....................................198Behenjy ...........................................199Ambatolampy ..................................199Antsirabe ........................................200Betafo .............................................210Ambositra .......................................210Pays Zafimaniry ..............................214Ambohimahasoa .............................215Fianarantsoa ...................................216Sahambavy .....................................224Soatanana.......................................224Ambalavao ......................................224Parc national de l’Andringitra ..........226

Route du Sud-Est ................................231Ranomafana ...................................231Parc national de Ranomafana ...............................234De Ranomafana à Mananjary ..........236Mananjary .......................................236Manakara .......................................242

De Manakara à Fort-Dauphin par la RN 12 ......................................246

Vohipeno .........................................247Farafangana ....................................249Entre Farafangana et Manantenina ..250

Isalo .....................................................251Ihosy ...............................................251Ranohira .........................................252Parc national de l’Isalo ....................256

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Ilakaka ............................................259Sakaraha ........................................260

Massif du Makay ................................261

�� CÔTE DU CAPRICORNE �Côte du Capricorne .............................264

Tuléar – Toliara ..................................264Saint-Augustin et ses environs ...........280

Miary ..............................................280Sarodrano .......................................283Anatsoano – Saint-Augustin ............284

Ifaty – Mangily ...................................285Côte Vezo ...........................................292

Ankasy ............................................293Tsiandamba ....................................294Salary .............................................294Ambatomilo ....................................296Andavadoaka ..................................296Morombe ........................................297Manja .............................................298

Route côtière vers Fort Dauphin .........298Anakao ...........................................299Befasy ............................................303Beheloka .........................................303Parc National de Tsimanampetsotsa .....................303

Ambola ...........................................304Itampolo ..........................................304Lavanono ........................................304Tanjona Vohimena – Cap Sainte-Marie ............................305Betanty – Faux Cap .........................305

Pays mahafaly et antandroy ...............306Betioky ...........................................307De Betioky à Ejeda ..........................308Ejeda ..............................................308Ampanihy ........................................309

D’Ampanihy à Tsihombe ....................309Tranoroa .........................................310Beloha ............................................310

Tsihombe ...........................................310Ambovombe ......................................311

�� CÔTE DES CONTRASTES �Côte des contrastes ............................314

Fort-Dauphin – Taolagnaro ..............314Evatraha et Baie de Lokaro .............326Mandena .........................................328Sainte-Luce – Manafiafy .................328Îlot des Portugais ............................329Ambinanibe .....................................329Manatantely ....................................330

Piscine naturelle d’Isalo.

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Parc National d’Andohahela ............330Amboasary ......................................332Réserve de Berenty .........................332

��MENABE �Menabe ...............................................338

Descente de la Tsiribihina ..................339Miandrivazo ....................................340Belo-sur-Tsiribihina .........................344

Descente de la Manambolo ................345Tsingy de Bemaraha ..........................346Morondava et sa région .....................352

Morondava ......................................352Belo-sur-Mer ..................................360Allée des Baobabs ...........................362Aire protégée Menabe-Antimena .....363Presqu’île de Bosy ..........................363Réserve de Kirindy ..........................363

�� CÔTE DU PALISSANDRE �Route de l’est ......................................366

Mantasoa ........................................366Marozevo ........................................368Moramanga ....................................369Ambatondrazaka .............................371Andasibe .........................................372

Côte Est ...............................................377Tamatave – Toamasina....................377

Canal des Pangalanes ........................389Brickaville .......................................390Manambato.....................................390Ankanin’ny Nofy ..............................390Ambila ............................................393Vatomandry ....................................393Mahanoro .......................................393

Côte Nord de Tamatave ......................394Mahavelona – Foulpointe ................394Mahambo .......................................395Fenerive Est ....................................396Soanierana-Ivongo ..........................396Manompana ....................................397Antanambe .....................................398Mananara .......................................399

�� SAINTE MARIE �Sainte Marie – Nosy Boraha ...............402

Les différentes zones .........................405Se déplacer .......................................405

Pratique .............................................407Se loger .............................................408Se restaurer .......................................419Sortir .................................................420À voir – À faire ...................................421Sports – Détente – Loisirs ..................423

Île aux Nattes ......................................426

�� CÔTE DE LA VANILLE �Côte de la vanille ................................430

Masoala .............................................432Maroantsetra ..................................432Navana ...........................................436Parc National Masoala.....................437

Triangle Vert .......................................441Sambava.........................................441Andapa ...........................................446Parc national de Marojejy ................447Antalaha .........................................448Vohimarina – Vohémar – Iharana.....451Daraina ...........................................451

�� ROUTE DU NORD �Boeny ..................................................454

Route des Manguiers .........................454Antanimbary ...................................454Maevatanana ..................................454Parc National d’Ankarafantsika........457Ambato Boeny ................................459Marovoay ........................................459Grottes d’Anjohibe ...........................459

Mahajanga et sa région ......................460Majunga – Mahajanga ....................460Katsepy ...........................................474

Sud-ouest de Mahajanga ...................475Mitsinjo ...........................................475Soalala ............................................475Parc National de Namoroka .............475Parc National de la Baie de Baly ......475Maintirano ......................................476

Côte des îles vierges ..........................477Antanimalandy ................................477Anjajavy ..........................................477Antsohihy ........................................478Analalava ........................................479Nosy Lava .......................................479

4 SOMMAIRE

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Nosy Saba .......................................479Archipel des Radama ......................480Ambanja .........................................480Ankify .............................................481

�� NOSY BE �Nosy Be ...............................................486

Hell-Ville – Andoany ........................490Baie d’Ambatoloaka ...........................498

Madirokely ......................................498Ambatoloaka ...................................502

Baie d’Ambondrona ...........................507Côte Ouest .........................................507

Dzamandzar ....................................508Ambaro / Bemoko ...........................510Andilana ..........................................512

Côte Nord ..........................................514Baie de Befotaka .............................514Amporaha .......................................515

Côte Est .............................................516Ambanoro .......................................516Parc National de Lokobe .................516

Nosy Raty ..........................................518Nosy Tanikely .....................................518Nosy Komba ......................................518Nosy Sakatia ......................................521Anjanojano .........................................522Nosy Fanihy .......................................522Archipel des Mitsio ............................522

Nosy Tsara Banjina .........................522Quatre Frères ..................................523Nosy Mitsio .....................................523Nosy Ankarea ..................................523

De Nosy Be à l’Archipel des Radama ..523Nosy Ankazoberavina ......................524Nosy Iranja ......................................524

�� CÔTE ÉMERAUDE �Côte Émeraude ....................................526

Ambilobe ........................................526Tsingy de l’Ankarana .......................527Lac Antanavo ..................................531Tsingy Rouges ................................532Diego-Suarez – Antsiranana ............532Montagne des Français ...................556Baie de Sakalava ............................558Ramena ..........................................559

Babaomby .......................................561Joffreville ........................................561Parc National de la montagne d’Ambre .................562Cap d’Ambre et les baies de Diego ..565

�� ORGANISER SON SÉJOUR �Pense futé ...........................................568

Argent ................................................568Bagages ............................................572Décalage horaire ................................574Électricité, poids et mesures ..............574Formalités, visa et douanes ................574Horaires d’ouverture ..........................575Internet ..............................................576Jours fériés ........................................576Langues parlées ................................576Photo .................................................576Poste .................................................577Quand partir ? ....................................577Santé .................................................578Sécurité et accessibilité .....................581Téléphone ..........................................582

S’informer ...........................................584À voir – À lire .....................................584Avant son départ ................................586Sur place ...........................................586Magazines et émissions .....................586

Comment partir ? ................................593Partir en voyage organisé ...................593Partir seul ..........................................604Séjourner ...........................................606

Rester ..................................................615

Index ...................................................617

Mise en gardeLe monde du tourisme est en perpétuelle évolution. Malgré notre vigilance, des établissements, des coordonnées et des prix peuvent faire l’objet de changements qui ne relèvent pas de notre responsabilité. Nous faisons appel à la compréhension des lecteurs et nous excusons auprès d’eux pour les erreurs qu’ils pourraient constater dans les rubriques pratiques de ce guide. Précisons toutefois que l’auteur de ce guide a voyagé à Mada entre mai et août 2013, et que tous les prix sont justes au 1er septembre 2013.

5SOMMAIRE

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INVITATION

AU VOYAGE

À Madagascar, tous les trajets sont possibles. L’étendue du pays est telle qu’un seul voyage ne peut suffire à qui tombe sous son charme. Au fil des années, nous avons parcouru l’île de bien des façons. Chacun des itinéraires que nous vous proposons est une « aventure » en soi, une découverte insolite et différente. Celui qui vient d’ailleurs, le vahiny (l’étranger), est accueilli chaleureusement : l’hospitalité malgache demeure l’une des « forces » tran-quilles de la Grande Terre. On revient rarement déçu d’un voyage au pays des lémuriens, même si certains voyageurs regrettent des tarifs parfois trop élevés, au regard des infras-tructures existantes, une pauvreté difficile à supporter (mais on devrait s’y attendre si l’on « potasse » un peu la destination !), un service défaillant, etc.Les itinéraires que nous vous présentons décrivent une série de sites et de régions mais ils ne sauraient être exhaustifs. C’est une sélection de parcours pour une première approche de Madagascar, plus ou moins clas-siques et plus ou moins proposés par toutes les agences de voyages. Il est toujours possible de voyager en indépendant, même si l’évolution du tourisme ici ne semble pas être conciliante pour l’aventurier. Attention, pour se rendre dans tous les lieux cités, il vous faudrait au minimum six mois.

Bien sûr, il n’est pas impossible de faire le tour de la Grande Île. Par la voie des airs, on peut, avec Air Madagascar, se rendre dans chacune des grandes régions en cabotage aérien. Mais comme la compagnie malgache a récemment supprimé plusieurs lignes intérieures entre régions, tout cela est assez hypothétique... On peut éventuellement aller de Morondava à Tuléar, de Fort-Dauphin à Tuléar (ou inverse-ment), de Sambava à Diego, de Diego à Majunga ou Nosy Be. D’autres transports plus lents, mora mora comme on dit ici, permettent des approches différentes : parcourir l’Imerina en 504 bâchée, se rendre à Morondava et Toliara en taxi-brousse... Nous avons aussi voyagé en train et en 4X4, en bateau, en taxi et à pied. En effet, il ne faut pas être économe de son temps pour s’installer dans l’ambiance de Madagascar. Chaque région est en elle-même un but de voyage. Au voyageur de déterminer ses priorités suivant ses affinités. Les inconditionnels de la végétation luxuriante, de la rainforest (forêt pluvieuse), de l’humidité tropicale, choisiront la côte est. Les amoureux des déserts et des grands espaces partiront loin, au sud. Les Robinson de tout poil trouveront à l’infini des plages paradisiaques sur la côte sud-ouest.Enfin, Madagascar est un pays qui peut se découvrir facilement en famille, même avec de très jeunes enfants.

Idées de séjour

Les immanquables de Madagascar w Dîner d’un excellent foie gras, d’un succulent filet de zébu au poivre vert, accompagnés

d’un bon vin sud-africain dans l’un des très bons restaurants d’Antananarivo.

w Découvrir les paysages grandioses et authentiques des Hautes Terres, sur la RN 7 vers le sud (cérémonies, architecture civile, rizières…).

w Visiter l’un des parcs nationaux les plus spectaculaires de l’île : Bemaraha à l’ouest, l’Isalo et l’Andringitra vers le sud, le parc Masoala (en saison) au nord-est, les sites naturels autour de Diego au nord.

w Observer les baleines en saison (juillet à septembre) à Sainte-Marie, Tuléar, Maroantsetra, Nosy Be ou Majunga.

w Admirer les lémuriens, notamment dans le parc Andasibe et la réserve de l’Indri Indri, au Palmarium au sud de Tamatave sur les Pangalanes, au Lemur’s Park près de Tana, et dans de nombreux autres parcs nationaux ou réserves privées.

w S’étendre sur une plage dans une crique perdue, que l’on atteint en voilier, en catamaran ou en pirogue (les plus proches des villes ne sont pas les plus belles).

w Se laisser bercer par l’ambiance surannée et traditionnelle de ce pays haut en couleur, toujours plus beau à mesure que l’on quitte les sentiers touristiques, rarement les plus intéressants. Mada, c’est un peu le pays du « réalisme magique » cher à Gabriel García Marquéz !

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IDÉES DE SÉJOUR16

SÉJOURS COURTSLes séjours courts sont d’une semaine ou moins. Ils valent surtout pour les hommes d’affaires ou les voyageurs de Mayotte, La Réunion ou Maurice, qui vivent à proximité. Depuis l’Europe ou a fortiori le Canada, ce pays est si éloigné qu’il paraît peu concevable de limiter son voyage à un aussi court laps de temps.

L’Imerina et AntananarivoPas vraiment de circuit organisé autour de Tana, boudée par les voyageurs. Pourtant, il existe de véritables merveilles historiques et naturelles en Imerina. Parole poème des opéras paysans hira gasy, beauté rouge, vert et bleu des paysages immenses, rizières infinies… Le lac Itasy, les petits villages de l’ouest, les collines sacrées ou les marchés animés de la capitale peuvent séduire ceux qui prennent le temps de découvrir la région.Passez grosso modo 2 jours dans la capitale (Palais de la Reine, balade dans la Haute Ville, à Isoraka, dans les marchés traditionnels ou d’artisanat), puis 2 jours à Antsirabe (fabrique d’artisans, thermes, lacs...), 2 jours à Ampefy au bord du lac Itasy (chutes d’eau, geysers...) et 1 nuit à Anjozorobe pour un premier aperçu de la forêt tropicale humide. Quelques opérateurs commencent à prendre la mesure du tourisme rural, dans une optique de développement durable et responsable. On peut ainsi dormir chez l’habitant, une expérience fascinante.Sinon, une escapade à Andasibe peut être envisagée pour observer l’indri indri.

La région Nord autour de DiegoAu nord, il est possible de visiter la région de Diego en une petite semaine ou un grand

weekend. Cette ville animée (et accessible directement de La Réunion ou Mayotte) constitue une excellente base pour rayonner. On peut revenir chaque soir à son point de départ. A voir : la plage de Ramena, les 3 baies, la mer d’Emeraude, la montagne des Francais, Joffreville et la montagne d’Ambre, les Tsingy rouges d’Irodo, les Tsingy de l’Ankarana, la baie du Courrier et le cap Ambre...La baie de Sakalava et le spot de Babaomby s’affirment aujourd’hui comme des destina-tions de classe mondiale pour les kitesurfeurs notamment.

La région de Fort-DauphinEn une semaine, vous pouvez visiter des parcs naturels ou des réserves tantôt luxuriantes, tantôt arides, converser avec les lémuriens, parcourir l’un des sites les plus merveilleux de Madagascar (le village d’Evatraha et la baie de Lokaro), assister à un coucher de soleil grandiose depuis Vinanibe, apprendre l’histoire des premiers colons français, et partager le quotidien d’une population très accueillante. Les surfeurs et kitesurfeurs seront aussi aux anges.

Le BoenyMajunga s’avère la meilleure base pour visiter ce coin apprécié des Tananariviens, tandis que les agences de voyages boudent un peu la destination. Une semaine suffit largement pour s’imprégner de l’atmosphère très agréable de la ville, découvrir les parcs et sites naturels avoisinants, et se laisser choir sur de vastes plages sauvages. Trois jours sont convenables pour en avoir un aperçu, si l’on est plus pressé.

SÉJOURS LONGS w Deux semaines est un minimum pour

commencer à découvrir ce pays. On peut envisager un circuit : nous en décrivons plusieurs d’ailleurs dans les pages « pratiques » de ce guide.Le grand classique est bien sûr la RN 7 ou Route du Sud, dont nous développons le parcours jour par jour dans la partie corres-pondante.Une nouveauté : la route du Nord de Tana à Diego. Compter 8 jours pour atteindre Ambanja (parcours décrit jour par jour dans

la rubrique correspondante) ; reste alors une petite semaine de voyage, soit à Nosy Be, soit à Diego... soit dans les deux sites. Retour en avion impératif, à moins d’aimer la brousse par-dessus tout !

w Trois semaines. Vous pouvez commencer à envisager une combinaison de circuits sans risquer d’être un peu juste sur les horaires. Vous aurez du temps pour flâner, rencontrer des gens, saisir l’ambiance si particulière de ce pays-continent. Cependant, ne croyez pas avoir

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Les coups de cœur du Petit Futé w Un séjour balnéaire paradisiaque aux

Terres Blanches au nord de Majunga ou à Ankasy Lodge, entre Tuléar et Andavadoaka au sud-ouest.

w Une randonnée dans dans le magnifique parc national de Marojejy au nord-est près de Sambava (trois jours).

w La découverte authentique d’un petit village égaré à l’ouest des Hautes Terres, en découvrant la vie traditionnelle des habitants.

w La descente en pirogue du canal des Pangalanes entre Manakara et Mananjary (trois ou quatre jours).

w Le formidable trek de plusieurs jours dans le massif du Makay (du nord au sud, compter bien 17 jours !).

w Une pause gastronomique au restaurant Mad Zébu à Belo-sur-Tsiribihina : ou comment déguster une cuisine gourmet au fin fond de la brousse.

w Une folle équipée nocturne dans les bars et discothèques de Diego (à consommer avec modération).

w Une croisière en pirogue ou en boutre d’Analalava à Nosy Be, en passant par l’archipel des Radama.

w La piste des baobabs en quad entre Tuléar et Morondava.

w Une session kitesurf au spot de Babaomby, près de Diego.

w Un tour en hélicoptère à Nosy Be.

IDÉES DE SÉJOUR IN

VITATION AU VOYAGE

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tout loisir de faire ce que bon vous semble : s’il est possible de faire le « tour » de la Grande Île en trois semaines (cabotage aérien), vous risquez bien d’aller de sites en sites, c’est tout, sans rien voir de ce qu’il y a entre, c’est-à-dire Madagascar et les Malgaches.L’Ouest et le Sud font un parfait ménage : descente de la Tsiribihina, visite des Tsingy de Bemaraha, de Morondava, piste des baobabs vers Tuléar avec pause balnéaire à Salary, Ankasy, Ifaty ou Anakao, remontée par la RN 7.Ou le sud et le sud-est : circuit RN 7 jusqu’à Tuléar – piste côtière vers Fort Dauphin puis remontée par Manakara et Ranomafana.Si vous voulez ainsi « en voir un maximum » (ce que nous ne recommandons pas), nous vous conseillons de suivre ce programme : descente de la Tsiribihina, visite des Tsingy de Bemaraha, puis vol de Morondava à Tuléar ; on profite alors des plages (Ankasy ou Salary pour la beauté, Ifaty pour l’ambiance ou Anakao pour les petits budgets). Ensuite, route du Sud (mais vers le nord !) ou vol de Tuléar à Fort Dauphin (3 ou 4 jours sur place). Puis revenir à Tana, voler pour Sainte-Marie, ou Diego, ou Nosy Be. Un peu la course, mais l’assurance de réaliser un voyage assez complet !

w Un mois. Les trajets en taxi-brousse deviennent aisément envisageables. Vous pouvez organiser votre périple selon vos centres d’intérêt, en essayant toutefois de toujours privilégier une région particulière. Restez lucides, et essayez de connaître « à fond » une zone donnée. Ne l’oubliez pas : trois jours dans un parc sont vite passés, tout comme trois jours au bord d’une plage, et combien d’heures dans les transports en commun !Pour des circuits plus traditionnels, on peut envisager une visite approfondie de plusieurs d’entre eux : Andasibe, Ranomafana, Isalo sont les plus fameux, mais nous vous conseillons également Ankarafantsika près de Majunga, Andohahela près de Fort Dauphin, le Masoala dans le Nord-Est, la montagne d’Ambre et l’Anka-rana au nord. Et bien d’autres encore (notamment près de Soalala, à l’ouest de Majunga sur la côte).

w Plus d’un mois. Madagascar est aussi vaste que la France et le Benelux réunis. Il ne viendrait à personne l’idée de parcourir de si grandes distances en aussi peu de temps. Il faut donc faire un choix. Ce choix est variable : soit vous désirez connaître plus de sites, plus de gens, soit vous préférez consacrer plus de temps à chaque site, à chaque rencontre.Deux mois permettent une approche plus concrète de la réalité malgache. Des séjours

en brousse sont possibles. On peut commencer à sillonner le pays du nord au sud (sans trop d’excès, et en comptant sur des vols aériens), ou d’est en ouest. On peut enfin savourer nos rencontres. Mais ne nous y trompons pas : c’est encore trop peu. Un tel pays ne se donne pas en quelques semaines. Certains murmurent même que plusieurs années ne sont pas suffi-santes pour pénétrer l’esprit malgache.Il n’est pas de paradis sinon artificiels peut-être, il ne sert à rien (et ce n’est pas une question d’utilité) de voir tout en blanc ou tout en noir, et moins encore de croire que tout doit être alors nécessairement gris. La vie est couleurs, et ce sont toutes ces nuances et ces arômes qui composent un voyage, des rencontres, des souvenirs, et, pour finir, une humanité.

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Sur une plage du sud-ouest malgache.

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La région sud-estCette boucle de 8 jours prend Fianarantsoa comme point de départ et d’arrivée, à travers jungle, rivières et plages solitaires. Vous visiterez Ranomafana, les petits villages côtiers authen-tiques de cette côte peu visitée, Mananjary, ses épices et son canal des Pangalanes, Manakara et son atmosphère langoureuse, sa piscine naturelle et ses belles plages bordées de filaos (attention, la mer est dangereuse), avant d’emprunter le train mythique qui vous emmène de Manakara à Fianarantsoa. Vous pouvez bien sûr combiner ce circuit original avec une visite de la route du Sud (notamment Ambositra et Antsirabe au nord, et Ambalavao et l’Isalo au sud). Ou alors gagner Mahanoro depuis Mananjary, en pirogue sur le canal des Pangalanes, avant de terminer à Tamatave. Deux semaines sont là encore nécessaires pour une très bonne approche. Mais en 10 jours on peut aisément tout faire… et même en une semaine pour les plus pressés.

Le pays Sakalava : entre Tsingy et baobabsL’itinéraire fétiche des voyageurs suit un parcours bien défini. Compter entre une semaine et dix jours maxi pour en profiter. Avec les vols et un passage obligé à Tana, deux petites semaines semblent un laps de temps adéquat.

w Jour 1 : départ de Tana pour Miandrivazo. Y passer la nuit.

w Jours 2-3-4 : croisière sur la Tsiribihina depuis Miandrivazo. Descente du fleuve et arrivée à Belo-sur-Tsiribihina, puis transfert (dans l’hypothèse d’un circuit organisé, car en indépendant la liaison est beaucoup plus incertaine) pour Bekopaka. Visite le matin des Petits Tsingy de Bemaraha, puis balade en pirogue l’après-midi sur la Manambolo.

w Jour 5 : visite des Grands Tsingy.

w Jour 6 : transfert pour Morondava en passant par la fameuse Allée des Baobabs. Nuit à Morondava.

w Jours 7-9 : Direction Belo-sur-Mer pour un repos bien mérité. Séjour « balnéaire » (attention, pas de cocotiers et marée conséquente) à Belo ou retour à Morondava pour un départ vers Tana.

w Jour 10 : retour à Morondava.

w Jour 11 : envol pour Tana, visite des marchés.

w Jour 12 : dernières visites à Tana et envol pour votre pays d’origine.

w On peut modifier ce parcours en descendant le Manambolo au lieu de la Tsiribihina (contacter Mad Caméléon dans ce cas).

Le canal des PangalanesAujourd’hui à la mode, même s’il ne faut surtout pas s’attendre à monts et merveilles (surtout si l’on connaît les forêts pluvieuses d’Amérique centrale par exemple). Il s’agit d’un circuit tranquille, au rythme mora mora ; vous ne verrez aucune splendeur incomparable, mais des petits villages blottis sur les rives, une vie traditionnelle marquée par le rythme lent et indolent de ce monde lacustre.

w On commence à Fianarantsoa, où l’on prend le train vers Manakara ; ensuite, on peut gagner Mananjary (4 jours/3 nuits sur le canal), d’où il est possible d’organiser une excursion de trois jours/deux nuits vers Mahanoro. Là, il faut reprendre la route vers Vatomandry puis Brickaville ; une nouvelle excursion est proposée pour gagner Manambato, où il est conseillé de se reposer (jolie plage, beau site), avant de se rendre à Tamatave ou à Tana.On peut aussi se rendre de Manakara à Mananjary par la route, puis sillonner le canal vers le nord. Mais la plus belle partie du canal est celle entre Manakara et Mananjary.On peut réaliser ce périple de manière assez confortable avec des prestataires locaux, ou alors dans des conditions très gasy (bateau-brousse, taxi-brousse, etc.). Compter deux semaines pour réaliser le circuit dans des conditions assez confortables.

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Le Triangle VertUn circuit peu prisé des voyageurs, mais sûrement l’un des plus fascinants à Madagascar (privilégier cependant les mois d’avril-mai et octobre à décembre si l’on ne veut pas être trempé en permanence) : le « must » des amoureux de la nature à Mada peut-être. Des marches de 3 à 7 jours ponctuent ce périple pas comme les autres.

w Le voyage débute à Tamatave ; on peut éventuellement gagner Sainte-Marie pour découvrir les charmes de cette île paisible, ou alors se rendre directement plein nord à Mananara et Maroantsetra. L’avion est le moyen de locomotion le plus adapté (attention, seulement pour rejoindre Mananara ou Maroantsetra), mais le parcours en 4X4 (compter trois jours) est fascinant ; ou alors c’est l’aventure en combinant taxi-brousse, charrette à zébus, marche à pied et pirogue.

À Maroantsetra, on partira à la découverte du Masoala, l’une des dernières forêts primaires de l’île. Les plus pressés se contenteront de jeter un œil ici ou là, les autres marcheront… pendant trois jours (itinéraire court) ou une semaine voire dix jours (itinéraire long). On parvient à Cap Est, d’où il est possible de se rendre à Antalaha.Ensuite, Sambava est un meilleur point de chute (hôtels plus confortables, ville plus animée), dans l’idée de visiter le magnifique parc de Marojejy et les paysages indonésiens sur la route de Vohémar. Bien sûr, la région étant la première productrice de vanille au monde, la découverte de cette étonnante orchidée est une expérience à ne pas manquer (mais attention, pas toute l’année, voir plus loin dans le guide). De Sambava, on peut continuer en avion vers Diego ou alors revenir sur.Compter bien 15 jours pour découvrir la région, davantage si vous décidez de marcher beaucoup.

SÉJOURS THÉMATIQUES

Les itinéraires plus insolitesSi vous recherchez des émotions nouvelles et désirez « bouffer » un peu de la piste, c’est possible ! Il faut être moins économe de son temps, et se préparer à tout. Les ronchons feraient mieux de s’abstenir !

w Pour les aventuriers, voici les meilleurs itinéraires : la descente de Morondava à Tuléar (entre deux et cinq jours, la plus belle côte de Madagascar peut-être), la « Grande Traversée » de Tuléar à Fort Dauphin par la côte ou la nouvelle piste de Fort-Dauphin à Manakara (ou inversement), la RN 5 de Tamatave à Maroantsetra et bien sûr une randonnée de six à dix-sept jours dans le sublime massif du Makay !Le boutre ou la pirogue sont des moyens de transport adéquats pour de nombreux aventuriers, entre Tuléar et Morondava par exemple (vent du sud en juillet-août).

w Pour les purs et durs, voici quelques propositions à l’écart des routes touristiques : la région centrale à l’ouest de Fianarantsoa se prête à toutes sortes de randonnées vers de petits villages traditionnels et coupés du monde. La côte ouest, entre Morondava et Majunga, est encore zona incognita : peu de chance que vous y croisiez votre voisin

de palier ! La piste de Vohémar à Ambilobe, au nord vers Diego, est à ce jour défoncée sur 80 km : l’une des expériences les plus baroques de la Grande-Terre.

w Enfin, beaucoup plus confortables, les séjours à Anjajavy, au Lodge des Terres Blanches sur la côte nord-ouest entre Nosy Be et Majunga ; à Tsarabanjina dans les Mitsio au large de Nosy Be ; ou à Ankasy, au nord de Tuléar sur la côte en direction d’Andavadoaka.

L’escaladeurParcourir les sommets peut être un choix de voyage. Vous découvrirez des paysages superbes s’étendant à perte de vue dans une nature vierge et vous rencontrerez des villageois chaleureux. Pour un parcours du sud au nord, de cime en cime :

w Point culminant du massif de Tsaratanana : 2 871 m (pic Maromokotra).

w Point culminant du massif de l’Andringitra : 2 658 m (pic Boby).

w Point culminant du massif de l’Ankaratra : 2 642 m (pic Tsiafajavona).

w On peut remonter la « cordillère » depuis le massif d’Isalo jusqu’à la montagne d’Ambre.

w Trekking dans les principales montagnes du Nord : Ambre, Ankarana, Manokigarivo.

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IDÉES DE SÉJOUR IN

VITATION AU VOYAGE

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Le plagisteSainte-Marie (accessible de La Réunion) ou Nosy Be (accessible de La Réunion et Mayotte) sont des destinations prisées. Farniente au programme, croisières, plongée, sans oublier la parade des baleines à bosse ou des requins baleine en saison...La côte nord de Tuléar s’affirme aujourd’hui comme une destination balnéaire idéale après avoir parcouru la RN 7 ou la piste des baobabs depuis Morondava. Ankasy et Salary notamment partagent un même lagon, l’un des plus beaux de l’Océan Indien, et leurs plages comptent parmi les plus belles du pays. Mangily/Ifaty exhibe sa belle baie flanquée de palmiers au cœur d’un village vezo. Au sud de Tuléar, Anakao est un site prisé des voyageurs à petit budget notamment, mais compte aussi la superbe structure de l’Anakao Ocean Lodge. La côte nord de Majunga est un autre choix de premier ordre : on apprécie particulièrement les sites d’Antsanitia, du lodge des Terres Blanches ou d’Anjajavy. Difficile aussi de ne pas évoquer Nosy Be et les plages d’Andilana ou celle du lodge de Tsarabanjina...Enfin, il existe de belles plages au sein même ou autour de certaines villes malgaches : Ramena près de Diego, ou à Majunga, Morondava et Fort Dauphin notamment.

Le botanisteLes amoureux des plantes et des fleurs seront comblés. Nous recommandons une croisière en pirogue sur le canal des Pangalanes (notamment entre Mananjary et Manakara), la visite des parcs Endémika à Sainte-Marie, Reniala à Mangily, Nahampoana ou Berenty à Fort-Dauphin, le superbe périple au pays des baoabs et des arbres pieuvres entre Tuléar et Morondava, la fameuse Allée des Baobabs près de Morondava, ainsi que la découverte des grandes plantations du nord, autour d’Ambanja notamment, à Nosy Be (ylang-ylang) ou dans la « triangle vert » autour de Sambava et Antalaha (vanille). Pour les plus aventuriers, un trek de plusieurs jours dans la forêt pluvieuse du Masoala est à ne pas manquer.

Le zoologueTous les voyageurs ont une image en tête en arrivant à Mada : celle d’un lémurien ! Ils sont un peu partout, mais certains sites permettent une approche optimale de nos joyeux cousins pro-simiesques : le Palmarium près de Tamatave, le Lemur’s Park près de Tana, les réserves de Nahampoana ou Berenty près de Fort-Dauphin, le parc de Mantadia à Andasibe, la forêt d’Anja au sud d’Ambalavao, ou le parc national de Lokobe à Nosy Be.

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Plage sauvage superbe (hôtel Antsara), à Sainte-Marie

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Le photographeMada est un pays rêvé pour les apprentis photographe ou les professionnels rompus à toutes sortes de voyages exotiques. Couleurs magiques, paysages grandioses, sourires permanents des habitants et une culture authentique qui vibre encore et se traduit par des scènes de vie inoubliables... Les destina-tions les plus recommandées ? La RN 7 de Tana à Tuléar bien sûr pour la grande variété des paysages traversés (villages typiques, parcs nationaux magnifiques comme celui de l’Isalo, le pays zafimaniry et son artisanat de grande qualité...), la côte vezo au nord de Tuléar pour le somptueux lagon d’Ambatomilo, le plus beau du pays, la piste des baobabs entre Tuléar et Morondava, le parc national des Tsingy de Bemaraha au nord de Morondava, l’Ankarana ou les Tsingy Rouges près de Diego Suarez, les archipels luminescents des Radama ou des Mitsio autour de Nosy Be, le canal des Pangalanes sur la côte est, toute la région de Fort-Dauphin, et les baleines bien sûr, à Sainte-Marie, Nosy Be, Tuléar ou dans la baie d’Antongil près de Maroantsetra ! Les photos les plus fameuses ? L’allée des Baobabs près de Morondava, l’indri indri dans la réserve d’Anda-sibe et la baleine à bosse à Sainte-Marie !

Le randonneurLes plus beaux treks à Mada selon nous (à la journée ou sur plusieurs jours) : l’Isalo et le pays zafimaniry sur la RN 7, le mythique massif du Makay, les Tsingy de Bemaraha, les villages traditionnels des hauts plateaux (ouest de Tana), la péninsule du Masoala dans le nord-est.

Le sportifActivités nautiques au programme, partout autour du pays ! Plongée, kitesurf, windsurf, surf notamment. Sans oublier la randonnée, le golf, la pêche (sportive ou non – la pêche sportive est d’après les spécialistes exceptionnelle dans le canal du Mozambique), la chasse (canards, pintades...) ou les parcours assez éprouvants en quad, à moto, à vélo (voire en 4x4, c’est parfois du sport aussi !) sur les pistes défoncées du sud-ouest, des hautes terres ou au nord de Tamatave. Un autre sport réputé dans tout le pays est le « lever de coude », au bistrot du coin ! A consommer avec modération...

Le culturologueMada ou la rencontre de peuples aux cultures traditionnelles authentiques et à l’histoire méconnue... Une visite au Palais de la Reine à Tana ou au Rova d’Ambohimanga, près de la capitale, est à recommander. Puis une balade

dans le pays zafimaniry, dans les villages de pêcheurs vezo de la côte sud-ouest, au pays des tombeaux mahafaly et antandroy dans le sud, dans l’Anosy près de Fort-Dauphin, ou chez les Antemoro au sud-est... Un voyage à Mada est forcément culturel. On peut dormir chez l’habitant dans de multiples endroits et partager leur quotidien.

Le noctambuleAmis fêtards, Mada attire son lot de joyeux lurons. Les médias, surtout francais, raillent le « tourisme sexuel » qui, selon eux, serait la gangrène du pays et l’explication de tous ses problèmes, mais les nuits malgaches peuvent être surtout animées, drôles, et très bon enfant ! Tuléar, Nosy Be, Diego-Suarez et Tana ont les faveurs des bons vivants.

Le gastronomeTous les voyageurs sont surpris quand ils débarquent : on produit du foie gras à Madagascar ! La cuisine malgache tradition-nelle, dont le romazava ou le ravitaoto sont deux exemples plus connus, a subi l’heureuse influence des gastronomies francaise et créole, et on ne compte plus les bonnes tables un peu partout, à des prix bien accessibles ! Plutôt que de recenser ici les meilleures adresses (qui figurent toutes dans le guide – si nous devions n’en garder qu’une, ne serait-ce pas le resto Mad Zébu dans le bled paumé de Belo-sur-Tsiribihina ?), évoquons plutôt les merveilles de la cuisine locale : le foie gras donc, les cuisses de nymphe (ou cuisses de grenouille), les langoustes, les crevettes, les oursins, les poissons comme le capitaine, le mérou, la marguerite ou la carangue, le filet de zébu bien sûr, ou encore les achards de mangue, les brèdes, les rougails, les épices (girofle, curcuma, poivre sauvage, le sakay (pimets rouges et verts) et... le riz (rouge sur la côte est), présent partout à toutes les sauces ! Enfin, impossible de ne pas évoquer le rhum arrangé, véritable étendard de l’île avec le punch coco !

L’humanisteMada compte un grand nombre d’ONG et d’associations oeuvrant pour l’amélioration des conditions de vie des habitants. Il serait fasti-dieux de toutes les évoquer ici. Sans forcément faire du volontariat longue durée, on peut aussi ramener des cahiers, stylos, etc. à remettre aux ONG sur place, ou des médicaments mais attention ! L’importation de ceux-ci à forte dose est interdite ! On peut aussi participer à des opérations de reboisement, avec Madagascar Mieux Vivre notamment.

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DÉCOUVERTE

Plage de Sainte-Marie.

© ARNAUD BONNEFOY

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BaleinesUne attraction magique et envoûtante : les baleines à bosse sillonnent les côtes malgaches de juillet à octobre environ. Sainte-Marie est aujourd’hui la destination la plus prisée pour observer ces paisibles cétacés, mais il faut savoir qu’il est possible de les admirer presque partout : à Tuléar, Fort Dauphin, Nosy Be, Maroantsetra, Sambava…

BaobabSymbole emblématique de la brousse africaine, le baobab est un arbre qui ne sert pas à grand-chose pour construire des maisons ou constituer du charbon de bois : c’est pour cette raison qu’il n’a pas été soumis à une déforestation intensive. Tant mieux ! Superbe, altier et délicieusement exotique, il séduira tous les voyageurs, notamment dans la région de Morondava. Et Madagascar peut se targuer d’un fameux record : on compte pas moins de six espèces sur la Grande Île, contre une seule pour tout le continent africain et une autre en Australie (soit huit espèces au monde) !

ColonisationOn sait que Madagascar fut colonisée par les Français pendant presque 70 ans. Dans les années 1970, une « malgachisation » de la société a été opérée. Ce retour à soi ne s’est pas réalisé sans problèmes, et les gouvernements des années 1980, puis des années 1990 ont dû faire marche arrière et ouvrir de nouveau leur pays, d’abord aux influences françaises, chinoises et indo-pakistanaises, mais aussi nord-américaines. Il serait regrettable de penser que Madagascar est un pays libre et indépendant.C’est en partie vrai sur le papier, mais dans le quotidien brut des Malgaches, on s’aperçoit qu’un néocolonialisme pervers s’infiltre dans toutes les couches de la société. Le monde du tourisme n’est pas épargné, et certains voyageurs peuvent s’effrayer de tel commen-taire, telle attitude, telle « philosophie »… Tout le Sud doit affronter aujourd’hui un nouveau redéploiement des politiques financières et commerciales du Nord. Essayons d’en être conscients.

DéforestationUn véritable drame écologique, social et culturel. La forêt malgache aura disparu dans quelques années si rien n’est fait pour endiguer la coupe massive pour le chauffage, la cuisine, la culture agricole… Madagascar pourrait devenir un désert pour la paix des zébus. Plusieurs ONG (nationales ou inter-nationales) tentent de politiser le débat, de le rendre public, et de responsabiliser les vrais coupables (ceux qui empêchent le développement durable d’une société, par exemple), mais le combat est souvent difficile, le chemin ardu et les perspectives peu encourageantes.Des projets ambitieux et réussis ravivent l’espoir dans certaines zones définies, mais qui a connu la Grande-Terre il y a 20 ans ne peut que s’épouvanter de l’évolution des choses au pays du palissandre : pas moins de 11 millions d’hectares de forêts auraient disparu depuis…

Madagascar en 20 mots-clés

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Au Palmarium d’Ankanin’Ny Nofy, paradis des lémuriens.

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DieuL’esprit religieux des Malgaches n’est pas facile à aborder pour un esprit cartésien, qu’il soit athée ou chrétien. On ne sait fina-lement pas vraiment s’ils sont monothéistes ou polythéistes, au sens où nous l’entendons. Toujours est-il que les peuples de la Grande Île croient en un Dieu tout-puissant, créateur du monde, qui porte le nom de Zanahary sur les côtes, Andrianahary (Seigneur créateur) ou Andriamanitra (Seigneur parfumé) à l’intérieur. Mais le Divin semble tout à fait immatériel, et finalement peu concerné par les affaires des hommes. Dans la hiérarchie du sacré, bien des intermédiaires occupent l’espace spirituel entre Lui et nous autres homoncules : Vazimba, êtres légendaires, anciens rois, ancêtres, génies (razana)… C’est à eux que la plupart des prières s’adressent. Autrefois, on disait : « Quand un individu meurt, il part pour être Dieu. »

FadyTout ce qui est tabou, sacré ou illégal. Ce qu’on ne peut faire, ce qu’on ne peut dire, ce qu’on ne peut manger. On ne plaisante pas avec ces codes rigoureux qui règlent la vie sociale, tant matérielle que spirituelle, de chaque village ou de chaque communauté : y contrevenir peut déclencher une ire populaire. Les fady étaient autrefois innombrables, et aujourd’hui, s’il en persiste un certain nombre, beaucoup commencent à s’en accommoder : même les guides touristiques qui y puisent des raisons de ne pas aller à tel endroit ou de ne pas visiter tel coin parce qu’ils sont fatigués !

LémuriensFaut-il encore les présenter ? Ces drôles de cousins sont presque endémiques à la Grande Île. C’est le symbole, l’emblème, l’armoirie du « royaume naturel » malgache. Facétieux ou indifférents, brailleurs ou sournois, ils n’arrê-teront pas de vous étonner. Qu’ils soient tout petits comme le microcèbe, ou bien en chair comme l’indri, de toute façon vous ne pourrez pas les manquer – et puis, avouons-le, c’est aussi un peu la raison d’un voyage ici, non ?

MarchésLes marchés de Madagascar sont hauts en couleur et regorgent de vie. Ils se tiennent au cœur des villes et regroupent les marchands des villages alentour. Ils ont lieu tous les jours, généralement le matin, avant que la chaleur ne devienne insupportable. Dans les plus grandes villes de l’île, le jour de marché est soit le

mardi, soit le jeudi. On y trouve des produits de base, pommes de terre, légumes, fruits, mais aussi viandes, poissons, et volailles encore vivantes ainsi que des épices (cannelle, vanille, safran…). L’économie malgache étant encore une économie de subsistance, les marchés ne sont pas organisés par métier ou par thème. Chacun y vend sa petite production et est prêt à négocier avec le client.

MétissageC’est dans les métissages qu’on fait les plus beaux bébés, dit-on… Et Madagascar en est un exemple frappant : sourires asiatiques, yeux cannelle, nez africain, sensualité indigène, port européen, élégance indienne… Les Malgaches présentent une étonnante singularité, née d’une pluralité d’origines. Pays baroque et bariolé, qui évoque les cinq continents en un seul pays. L’île rouge porte mal son nom : car il est bien fou celui qui a voulu circonscrire autant de couleurs nuancées dans un seul adjectif, forcément réducteur. Les photo-graphes s’en donnent à cœur joie.

Mora MoraTranquille ! Cool ! Pole Pole (en swahili) ! Zen ! On pourrait traduire à l’infini cette expression idoine, très caractéristique du caractère malgache, notamment sur les côtes (la chaleur engourdit-elle les esprits ?). Inutile de se presser, il y a bien le temps, et s’il n’y a plus d’argent, ce n’est pas grave, on trouvera toujours un moyen de s’arranger. Pas la peine de stresser, vous vous heurterez à une brume d’incompréhension. Ici, on avance à la vitesse du pas humain, et l’on ne connaît pas encore le RER… Quant aux bolides de course sur routes, celles-ci sont si peu accommodantes qu’il est bien difficile de dépasser les limitations de vitesse ! En toutes choses, et en toute occasion, avec n’importe qui, gardez votre sang-froid sans manifester outre mesure votre impatience : la précipitation n’arrange rien au pays des paisibles orchidées.

O.N.GDe très nombreuses organisations non gouverne-mentales, étrangères pour la plupart mais dans lesquelles les Malgaches sont très présents, essaient d’endiguer les fléaux de la malnutrition, de la famine, des problèmes de l’alphabétisation, de la déforestation… Accablé par tous les maux, le pays panse douloureusement ses plaies. Afin d’avoir un début d’information sur les organismes en question, et de partir éventuellement en mission humanitaire, connectez-vous au site : www.ong-madagascar.org

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PhotoLes amateurs de belles photographies trouve-ront une source inépuisable de joie numérique ou argentique dans les couleurs, les nuances, les paysages et les sujets malgaches. Jeunes enfants qui éclatent de rire, teintes rouges sur fond vert et bleu, lumière rasante et émouvante des fins d’après-midi, tout concourt à faire de superbes clichés. Peu de gens se soucient d’être pris en photo ici, au contraire, la majorité accourt pour poser, et la curiosité à l’égard de ces engins d’un autre âge n’a pas de limites. Il est encore assez rare qu’on vous demande de l’argent pour être pris dans la petite boîte, c’est donc une raison supplémentaire pour ne pas abuser et éviter à tout prix les comporte-ments scandaleux de certains touristes, qui fusillent un village entier depuis la fenêtre de leur 4X4 climatisé, sans même sortir le petit doigt dehors. Les gens ne sont pas des objets, les villages ne sont pas des zoos – et, jusqu’à preuve du contraire, nous ne sommes pas encore (totalement) des machines.

Pierres précieusesLe sol malgache fascine les géologues… et les amoureux des minéraux et pierres précieuses. L’engouement pour le saphir, par exemple (favorisé par un marché asiatique, et notamment indien, très important), explique l’essor brutal et démesuré de « villes champignons » au milieu du désert, comme Ilakaka au sud de Ranohira sur la RN7. Véritable cœur de la production de saphir, cette localité de type western n’existait pas il y a vingt ans. Quand on s’y promène (beaucoup de touristes préfèrent fuir cette ambiance délétère), on a l’impression de hanter

un film de Sergio Leone. Mais le saphir n’est pas tout : Mada est riche en émeraude, rubis, grenat, algue marine, tourmaline, améthyste, citrine, alexandrite… et même en diamants verts, comme on le sait depuis peu.

PlagesElles sont superbes, mais, curieusement, les plus connues ne sont pas forcément les plus belles. Ifaty, Anakao, Nosy Be… tout cela est apaisant, convenons-en : mais pour trouver de véritables plages de rêve, sauvages ou tropi-cales, il faut gagner la péninsule du Masoala, la côte nord-est entre Majunga et Nosy Be, les îlots au large de Maintirano, la côte nord de Tuléar (Ankasy, Salary, Ambatomilo) ou encore un petit village comme Mahambo, au nord de Tamatave, pourquoi pas… Il y en a pour tous les goûts, et vous êtes sûrs de ne pas marcher sur votre voisin ! Vous constaterez pourtant rapidement que les Malgaches ne sont pas des fanatiques de la baignade.

PrésidentsMadagascar a la particularité d’avoir quelques soucis à choisir ses présidents : en 1996 entre Ratsiraka et Zafy (déclaré… incompétent peu de temps auparavant, et pour cette même raison démissionnaire !), en 2002 entre Ratsiraka et Ravalomanana, en 2009 entre Ravalomanana et Raojelina, et en 2013... avec plus de 40 candidats à la clé pour des élections sans cesse repoussées ! Entre la peste ou le choléra… Madagascar virevolte de crise en crise ! A l’heure où nous imprimons ce guide, des élections étaient prévues pour fin 2013 : qui sortira du chapeau magique ?

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Hôtel de charme près du parc de l’Isalo : « le Relais de la Reine ».

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Rhum arrangéÀ ne pas confondre avec le punch (tout aussi bon, d’ailleurs) ! En effet, si ce dernier se consomme aussitôt préparé (c’est un mélange sucré de plusieurs fruits la plupart du temps), le rhum arrangé se laisse macérer pendant plusieurs mois (au moins trois à six en général). Cette boisson plus forte qu’il n’y paraît, a été importée de la Réunion. Aujourd’hui, on en trouve dans tous les bons locaux, aux litchis, au gingembre (pour des nuits câlines, paraît-il), à l’ananas, au combava, aux carottes, à banane, à la goyave… Il y en a pour tous les goûts. À consommer avec modération, bien sûr.

RizEn général, il faut se méfier des généralités. Mais certaines ont la vie dure : les Brésiliens jouent au football, les Portugais construisent des églises, les Français mangent du fromage, les Allemands aiment les bretzels… Partant de là, on pourrait dire que les Malgaches mangent du riz. Caractéristique réductrice, bien sûr, mais il n’empêche : c’est le pays au monde où les habitants ingèrent le plus de riz par année (entre 130 et 150 kg par habitant). Plus de 158 000 tonnes ont été importées en 2011, mais les autorités misent sur une auto-suffisance en 2018 avec une production de 12 millions de tonnes !

SexeSi certains fantasment là-bas sur un Occident opulent, d’autres spéculent chez nous sur des Tropiques lascifs et libertins. Il y a fort à parier que les relations entre les étrangers (d’un certain âge, parfois, voire d’un âge certain) et les jeunes demoiselles affriolantes vont en faire jaser plus d’un. Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, peu importe, en fait : ce qui

compte, c’est l’avenir de cette nation vouée à marchander ses plaisirs pour essayer de subsister et de profiter, un peu, des choses de la vie. Tentations néocolonialistes d’imposer une nouvelle forme de dépendance. Une plaisanterie un peu équivoque rappelle : « A Madagascar, il n’y a que le bois qui travaille, que le miroir qui réfléchit, que l’infirmier qui pa(e) nse, et que la forêt qui est encore vierge. » Sans commentaires…

TrainLa ligne qui relie Fianarantsoa à la paisible et alanguie Manakara, sur la côte est de l’océan Indien, est un parcours superbe et enivrant, qui fait aussi prendre conscience des dangers extrêmes de la déforestation. Une autre ligne régulière est celle qui mène de Moramanga à Tamatave (via Andasibe et son parc national). Pour le reste, les lignes de Tana à Antsirabe ou de Tana à Tamatave ne sont utilisées qu’une à trois ou quatre fois par mois : on emprunte alors une antique Micheline, véritable œuvre d’art ambulante ! Pensez à réserver au plus tôt.

VolLes Malgaches ne sont pas tout à fait des bandits de grand chemin… mais, dans le Sud ou dans l’Ouest (et encore aujourd’hui), ils aiment bien voler des zébus ! Un tel acte est un exploit, une marque de courage et d’audace (pour les femmes surtout, qui raffolent de ces prouesses). Ainsi, la donzelle aimera par-dessus tout que son prétendant lui offre une calebasse de graisse pour lustrer sa coiffure : mais si cette graisse provient d’un bœuf volé, alors le mariage est assuré ! Decary rapporte la formule réjouissante d’un indigène d’Antani-mora, alors que les premiers avions survolaient l’Androy : « Les Blancs vont maintenant dans le ciel et voient ce qui se passe sur terre : nous ne pourrons plus voler de bœufs ! » .

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Belle plage de Mangily au coucher du soleil.

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DÉCOUVERTE

Un cliché hérité de la période coloniale persiste : la plupart des textes écrits par les Européens (et surtout les Français) sur Madagascar distinguent géographiquement les « hauts plateaux » et les « côtes », et divisent la popu-lation entre « habitants des hauts plateaux » et « habitants des côtes ». Les géographes et historiens malgaches (mais aussi américains, allemands, japonais et français) contestent cette division sommaire et réductrice.

D’abord, il n’y a pas que des plateaux, mais aussi des pics, des collines, des sommets ; ce sont des Hautes Terres (les géographes américains emploient le terme de Highlands). Quant aux côtes, leur diversité n’est pas moins remarquable, entre les côtes couvertes de forêts, celles où commencent le désert, et les deltas fertiles qui s’achèvent dans l’océan. Quant aux habitants, nous y reviendrons plus loin…

GÉOGRAPHIESelon la théorie de la « dérive des conti-nents », les grandes mutations géologiques de l’ère secondaire (période du Crétacé) auraient fragmenté un très grand continent, le Gondwana, dont il demeurerait aujourd’hui l’Amérique du Sud, l’Afrique, l’Inde, l’Antarc-tique… et Madagascar qui, plus qu’une île, est presque un continent entouré d’un chapelet d’archipels : Comores, Seychelles, Mayotte, la Réunion, et île Maurice.D’un point de vue géologique, Madagascar est surtout constituée d’un socle de roches cristal-lines très anciennes dont certaines ont plus de deux milliards d’années. Ces roches affleurent régulièrement à la surface de cette sorte de grande « cordillère malgache », qui s’étend du sud au nord et atteint 2 886 m d’altitude au Tsaratanana. Il n’est guère étonnant que l’île soit une terre précieuse dont les sols regorgent d’immenses réserves minérales : mica, titane, chrome, graphite, grenat, onyx, quartz, rubis, émeraude…Aujourd’hui, plus aucun volcan n’est en activité sur « l’île Rouge » ; néanmoins, les sources chaudes de Ranomafana et d’innombrables cratères témoignent de ce riche passé tellu-rique. Les sols sont principalement composés de grès, d’argile, de granit et de calcaire. Mais une couleur domine, le rouge dans toutes ses variantes, de l’ocre au vermillon, du terre de Sienne au Shanghaï. Presque partout, pistes et collines sont recouvertes de sable, d’argile, de latérite dont toutes les gammes s’harmonisent avec le bleu inimitable du ciel

malgache et le vert des forêts tropicales où dominent les gracieux ravenalas, les baobabs et les banians aux formes mystérieuses. D’une manière générale, l’orientation des vents et le relief spécifique de l’île divisent celle-ci en deux versants bien distincts : l’Orient est exposé au vent tandis que l’Occident est sous le vent.

w Le Centre : Hautes Terres, pics et plateaux. Les Hautes Terres ne se limitent pas à des plateaux. On y trouve des volcans éteints, des pics, des collines, des vallons et des rivières. D’Antananarivo jusqu’à Fianarantsoa, les vallées sont sculptées de rizières en terrasses à l’infini comme en Indonésie, aux Philippines, au Viêt-Nam ou en Chine. Jadis boisées, ces étendues forment une vaste prairie, le bozaka. S’étendant du sud au nord, les Hautes Terres sont traversées par une longue chaîne rocheuse de 1 200 km. Leur altitude varie de 700 m (lac Alaotra) à 2 886 m (Tsaratanana), en passant par l’Ankaratra (2 643 m) et l’Andringita (2 658 m au pic Boby).Les sommets les plus hauts sont situés au nord. Cette « cordillère » prend fin dans le massif de l’Isalo, au sud. Les Hautes Terres sont aussi parsemées de grandes étendues d’eau. Près d’Ambatondrazaka, le lac Alaotra constitue le cœur du « grenier à riz » du pays. Avec une surface de 22 000 ha, c’est le plus grand de l’île ; c’était autrefois le site privilégié pour la nidification d’oiseaux aquatiques, qui ont bien disparu depuis. Le lac Mantasoa est entouré de grandes pinèdes, tandis que bananeraies et rizières bordent le lac Ihotry.

Survol de Madagascar

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w L’Est : forêts, falaises, océan Indien. À l’est, la côte bercée par le ressac de l’océan Indien abrite les vestiges de la grande forêt qui recouvrait toute l’île (savoka). Cette forêt s’étendait depuis Taolagnaro, au sud, jusqu’au nord de Sambava. Des rivières traversent les grands espaces verts. Plus loin, c’est un enchaînement de falaises. Il y pousse des ravenalas et des orchidées à foison.La plaine côtière est mince (en moyenne 55 km de large). De Toamasina à Manakara s’étend un prodige de communication fluviale : le canal des Pangalanes. Sur près de 700 km, des lacs ont été reliés à des rivières et à des estuaires. Entre mer et forêt, c’est un repaire d’oiseaux et de lémuriens, de sauriens et de poissons. Ce canal n’est pas partout aménagé, mais pirogues et bateaux légers à moteur y circulent sans problème sur la plus grande partie.La côte est le domaine des plantations de vanille, de girofle, de café, de cacao… On peut légitimement songer que ces cultures pourraient faire la richesse de l’île si les tarifs mondiaux imposés par l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) étaient plus équi-tables. On y cultive aussi les litchis. Sur la

côte est, les villes sont autant de symboles : Toamasina, premier port de Madagascar, Sambava, capitale de la vanille et des épices, Manakara, cœur du pays Antaimoro… Au large de Fenoarivo, le repaire de flibustiers de l’île de Nosy Bohara s’est transformé en « paradis pour touristes ». Partout, l’océan Indien est là, tumultueux, fascinant.

w L’Ouest : savane, mangrove et désert. De l’autre côté de l’île, de grandes terrasses et de longues plaines glissent jusqu’au canal du Mozambique. En face, il y a l’Afrique. Cette côte est extrêmement variée : les deltas des fleuves s’alignent en plaines fertiles, et les vallées des rivières Mahajamba, Mahavavy, Maevarano creusent de profonds sillons qui s’étendent jusqu’à la mer. Tandis qu’au nord-ouest se déploie la savane, le bush s’étend au sud-ouest. Fertile au nord, aride au sud, la côte ouest ne présente pas un ensemble homogène. On contemplera ici les majestueux baobabs, des palmiers à l’infini, une barrière de corail aux fonds marins superbes.Près de Mahajanga, le lac Kinkony d’une surface de 10 000 ha (15 000 ha en période de crue) est entouré d’une forêt sèche caducifoliée ; on peut y observer le

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1 - Diana2 - Sava3 - Itasy4 - Analamanga5 - Vakinankaratra6 - Bongolava7 - Sofia8 - Boeny9 - Betsiboka10 - Melaky11 - Alaotra-Mangoro12 - Atsinanana13 - Analanjirofo14 - Amoron'i Mania15 - Haute Matsiatra16 - Vatovavy-Fitovinany17 - Atsimo-Atsinanana18 - Ihorombe19 - Menabe20 - Atsimoi-Andrefana21 - Androy 22 - Anosy

Les régions administratives

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fameux pygargue de Madagascar. La zone marécageuse située entre Maintirano et Antsalova est un havre de nidification pour les oiseaux aquatiques de Madagascar : les lacs Manambolomaty, Befotaka, Soamalipo ou Ankerika sont également des observatoires privilégiés du pygargue de Madagascar. Les villes sont autant de points de départ pour des escapades en mer ou des explorations sur la terre ferme : Mahajanga, qui est aussi un grand port, Morondava entourée de fasci-nants baobabs, Toliara qui ouvre la porte du Grand Sud.

w Le Sud : bush, sécheresse et océan. Le Sud est la terre du bush et des grandes étendues semi-désertiques parsemées de baobabs, d’épineux, de cactées, de steppes aux herbes hautes. C’est la région du pays qui reçoit le moins de pluies. La sécheresse (Kere) y sévit parfois. Les routes sont surtout des pistes. Après Betioky commence le pays Mahafaly, ponctué de tombeaux légendaires surmontés d’aloalys sculptés. Ampanihy est connue pour ses tapis de laine mohair.Entre Toliara et Soalara, les fonds marins sont superbes tout le long de la longue barrière de

corail. Partout, en terre d’Androy comme en terre Mahafaly, les pasteurs mènent leurs immenses troupeaux de zébus de village en village ; les pirogues à balancier des pêcheurs vezos affrontent le ressac.

w Le Nord : sommets, ambre et fleuves. Au nord s’étend un grand massif volcanique, le Tsaratanana, qui atteint les plus hautes altitudes de Madagascar avec les 2 880 m du Maromokotra. Du Tsaratanana dévalent le Sambirano et la Mahavavy, deux rivières qui irriguent terres, champs et cultures depuis les plaines jusqu’aux deltas. Au nord-ouest, au large, l’île de Nosy Be est une plaque tournante du tourisme international, notamment italien. Ceux qui apprécient les plages dorées, les activités nautiques et les infrastructures hôtelières de luxe ne seront pas déçus. Principale ville du nord, Antsiranana et sa vie nocturne endiablée est ancrée au centre d’une grande baie qui fut de tout temps l’objet de bien des convoitises. L’extrême nord de Madagascar s’achève en beauté par une succession de cratères et de lacs, une montagne et un cap d’ambre, Tanjona Bobaomby.

CLIMATMadagascar est traversée au sud par le tropique du Capricorne… Mais les tropiques sont complexes, et l’influence du relief, de la végétation et des vents a une incidence sur le climat et les saisons. Ainsi, l’île est située entre les basses pressions équatoriales (au nord) et l’anticyclone de l’océan Indien (au sud-est).On distingue habituellement à Madagascar comme dans tout l’hémisphère austral deux saisons qui sont inversées par rapport à celles de l’hémisphère Nord.L’été austral dure de novembre à mars. On l’appelle aussi la « saison des pluies ». Un vent de mousson souffle alors du nord-ouest. Les précipitations sont très abondantes, surtout sur la côte est (soumise aux alizés du sud-est), mais le plus souvent elles sont brèves et le soleil reprend vite ses droits. De la fin décembre à la fin février, des cyclones peuvent atteindre la côte est de l’île et perturber l’en-semble du climat.L’hiver austral dure d’avril à octobre. C’est la « saison sèche ». Cependant, une pluie peut survenir de temps en temps, surtout sur la côte est (là-bas, c’est la « saison où il pleut ») !

w Centre. Du fait de l’altitude (de 700 m à 1 500 m), il fait généralement moins chaud sur les Hautes Terres que dans le reste du pays. Les nuits sont fraîches dès le mois de mars. Il peut y avoir de grands contrastes de température durant l’hiver austral (25 °C dans la journée et de 5 °C à 10 °C la nuit). La saison des pluies a lieu de novembre à avril. C’est la période où il fait le plus chaud. Températures moyennes. De janvier à février : 20 °C. De mars à mai : 25 °C. De juin à juillet : 20 °C. D’août à septembre : 20 °C. D’octobre à décembre : 25 °C.

w Est. Le climat est tropical et humide. Les pluies se succèdent toute l’année. Elles sont parfois très brèves (moins d’une heure par jour), mais il arrive aussi qu’elles durent plusieurs jours. La pluie peut être torrentielle ou au contraire très fine, mais il est rare que le ciel reste longtemps couvert ; cela donne une nature florissante, des orchidées merveilleuses, une belle forêt. Mai et septembre sont les mois les plus ensoleillés. Températures moyennes. De janvier à février : 25 °C. De mars à avril : 30 °C. De mai à juillet : de 20 à 25 °C. D’août à septembre : 15 °C. D’octobre à novembre : de 20 à 25 °C Décembre : 30 °C.

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w Ouest. Le climat est tropical et sec. Il pleut rarement.Températures moyennes. De janvier à février : 25 °C. De mars à avril : 30 °C. De mai à octobre : de 22 à 25 °C. De novembre à décembre : de 30 à 32 °C.

w Sud. Le climat est tropical, chaud et sec. Les Européens préfèrent y séjourner en juillet et en août, période la plus fraîche. C’est la région du pays où la sécheresse affecte régulièrement l’agriculture. Les pluies sont très rares (mais le cyclone Haruna a

frappé cette région de plein fouet en février 2013). Températures moyennes. Janvier : 20 °C. De février à mai : 30 °C. De juin à septembre : 25 °C. D’octobre à décembre : de 28 à 32 °C.

w Nord. Le climat est tropical. Durant la saison des pluies, les précipitations arrosent les grandes étendues du Nord, jusqu’à Nosy Be, qui bénéficie de ce fait d’une végétation superbe. Températures moyennes. De janvier à avril : 25 à 30 °C. De mai à juillet : de 20 à 25 °C. D’août à septembre : de 15 à 20 °C.

ENVIRONNEMENT / ÉCOLOGIEMadagascar a été occupée tardivement par l’homme et son isolement insulaire l’a protégée des incursions. La Grande Île demeure encore aujourd’hui un « labora-toire naturel » exemplaire. La faune et la flore malgaches constituent un patrimoine naturel mondial unique au monde. On pourra y observer une faune exceptionnelle, des espèces animales rarissimes et une flore endémique présentant de grandes variétés. Les savants et naturalistes de tous les pays, mais aussi les amoureux de la nature, les écologistes et les voyageurs avides de dépay-sement seront enchantés.Cependant à Madagascar comme en Amazonie, à Bornéo, en Afrique et ailleurs, le patrimoine est constamment menacé. La grande forêt

qui recouvrait l’île représente moins de 15 % des terres, et elle continue de disparaître à raison de 200 000 à 300 000 ha par an. Les aires protégées, bien que plus nombreuses aujourd’hui en raison de l’essor du tourisme, représentent à peine 2 % de l’ensemble du pays. Les menaces qui pèsent sur la forêt sont multiples : les paysans pratiquent l’agri-culture sur brûlis et sacrifient des hectares de forêt pour en faire temporairement des rizières ; les charbonniers transforment les arbres centenaires en charbon de bois et en font commerce toute l’année ; les trafiquants d’essences rares défient lois et gendarmes. En outre, l’exploitation industrielle intensive ou les feux de brousse volontairement déclenchés par les éleveurs sont néfastes.Quand la forêt disparaît, grandes pluies et cyclones ont des effets redoutables : des eaux torrentielles emportent les terres fertiles, la latérite apparaît, les sols deviennent arides, plus aucun arbre ne pousse. L’agriculture est alors impossible.Ce n’est pas tout. La croissance démographique importante (la population malgache double en fait tous les vingt ans) ne fait qu’aggraver cette situation précaire. Il semble bien délicat de demander à une population miséreuse de privilégier un projet rationnel et durable pour l’environnement, quand ses nécessités vitales quotidiennes lui commandent de gérer les choses à court terme. Il ne faut pas oublier que les hommes cherchent à avoir un toit et un foyer avant une belle forêt où se promener tranquillement en observant les oiseaux.Ici, comme en Afrique ou au Brésil, tout l’écosys-tème est affecté par la déforestation. Le climat devient plus sec et la sécheresse progresse. La désertification menace. Quant aux espèces animales rares (comme les tortues radiata), elles

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Baobabs près d’Andavadoaka.

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sont traquées par les collectionneurs et les trafi-quants malgré les interdictions d’exportation… Pour remédier à cela, des députés se mobilisent pour légiférer dans le domaine de la protection de la nature. Des chanteurs de renom – Rossy, Dama – et des troupes de théâtre populaire – les Mpihira Gasy – inscrivent à leur répertoire des chansons pour sensibiliser les populations. Les entreprises publiques reboisent avec le concours des Nations Unies, de la Banque mondiale, des organisations non gouvernementales (notamment le World Wild Fund et Madagasikara Environnement), du Japon et de l’Union euro-péenne, mais aussi de certaines associations comme Madagascar Mieux Vivre, qui milite pour un tourisme responsable contre les atteintes au patrimoine naturel. A Madagascar, l’écologie doit devenir une préoccupation majeure, une priorité économique, culturelle et sociale. En réalité, tout le monde doit prendre en compte la protection de l’environnement, l’un des facteurs essentiels du développement de la Grande Île. Depuis le 27 juin 2007, l’ensemble des forêts humides de l’Atsinanana de Madagascar compre-nant 6 parcs nationaux : Marojejy, Masoala, Zahamena, Ranomafana, Andringitra et Andohahela, a été déclaré patrimoine de l’Hu-manité par l’Unesco.En 2010 et 2011, des expéditions scienfitiques menées dans le massif du Makay (au sud-ouest du pays) ont permis de découvrir de nouvelles espèces animales et végétales, ainsi que des grottes ornées de peintures rupestres.

w Le problème des zones côtières et marines. Aujourd’hui encore, les biotopes sont très diversifiés, les écosystèmes marins complexes et productifs ; mais cette situation pourrait bien être mise en danger par d’imprudentes politiques. Les coraux, par exemple, sont d’une importance primordiale pour l’équilibre naturel de la mer et de la terre : ils protègent les côtes en brisant la houle et les vagues, favorisent l’installation d’établissements portuaires en eau calme, et font obstacle aux poissons pélagiques, diminuant substantiellement le risque de prédation. En outre, les phanérogames marines abondantes

jouent un rôle important dans la photosynthèse, qui est à l’origine du cycle du vivant et de la production de matières organiques dans le milieu océanique. Mais ce n’est pas tout : les coraux attirent aussi les touristes (plongée, pêche…), ils constituent une ressource nutritive pour la pêche locale à vocation artisanale, et ils peuvent même servir de matériaux de construction, comme aux Comores. Leur disparition serait une perte irréparable pour l’équilibre naturel de la planète. Aussi faut-il prendre conscience de leur importance et développer un tourisme écologique, en accord avec un milieu biologique remarquable pour sa diversité, sa richesse et sa beauté. En manifestant son respect pour le monde de la nature, le tourisme peut influer sur les choix des gouvernements et l’avenir du pays : le refus de tout dommage causé aux écosystèmes (même pour une plus grande capitalisation des ressources disponibles) peut modifier ces attitudes et responsabiliser tout type d’entrepreneur et de promoteur. C’est à ce prix, et à ce prix seulement, que les côtes ne ressembleront pas un jour à un gigantesque cimetière d’idéaux, une vaste concentration d’immeubles affreux ou un désert impitoyable.

� MADAGASCAR MIEUX VIVRELot IVL 180Anosivavaka Ambohimanarina& +33 6 43 11 52 12www.madagascar-mieux-vivre.cominfo@madagascar-mieux-vivre.comCette association a pour objectif de venir en aide aux populations malgaches souffrant de la déforestation et des problèmes qui en découlent, grâce à des missions de reboisement. En parti-cipant à leur voyage à vocation humanitaire, vous aurez le droit de déduire 60 % pour les particuliers et 66 % pour les entreprises du montant de ce voyage (billet d’avion compris) de votre impôt sur le revenu, dans la limite de 20 % du revenu imposable. Un beau geste, pratique et utile à la fois : du tourisme responsable.

Lot IVL 180 Anosivavaka Ambohimanarina

Tél. +33 6 43 11 52 12 � www.madagascar-mieux-vivre.com

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w Madagascar National Parks, raisons d’être. Particulièrement choyée par la nature, Madagascar est illustre pour la richesse de sa biodiversité, pour son taux très élevé d’endémicité (qui va de 80 % pour ses espèces animales à 90 % pour sa végétation), et par les enjeux de conservation en termes d’habitats rares et d’espèces phares. Cette position-phare fait de l’île un excellent terrain de recherches scientifiques mais aussi un filon porteur de l’écotourisme. Mais cette méga diversité est en péril et la dégradation de l’environnement tend à s’amplifier dans l’île. Si les contraintes naturelles n’épargnent pas l’écosystème malgache, les pressions exercées par l’homme sont aussi de plus en plus conséquentes : exploitations sauvages, feux de brousse, braconnages, autant de contraintes qui mettent à mal cet héritage naturel. A cela s’ajoute les réalités d’une démographie galopante et d’une pauvreté qui prend du terrain, pressions sociales et économiques non négligeables agissant directement sur l’équilibre des ressources naturelles. C’est dans ce contexte d’urgence que Madagascar National Parks est appelé à agir

et sa mission est quasiment multidisciplinaire. En effet, la conservation et la gestion des ressources naturelles sont aujourd’hui largement tributaires d’une volonté politique, de l’émergence d’un écotourisme solide et durable que d’une implication des populations. Dans l’exécution de son mandat, l’Association est reconnue comme « auxiliaire des pouvoirs publics en vue de promouvoir la politique de gestion de la biodiversité et de mettre en œuvre la stratégie de conservation et du développement au niveau des aires protégées ». Cette mission de conservation implique au quotidien la sensibilisation de toutes les parties prenantes par l’éducation environnementale, la valorisation de l’écotourisme et de la recherche scientifique et enfin, le partage équitable avec la population riveraine, des bénéfices générés par les aires protégées. Grâce au Comité Local du Parc qui défend la conservation des aires protégées et les intérêts de la communauté riveraine et le principe de cogestion avec un Comité d’Orientation et de Soutien aux Aires Protégées, l’Association accompagne le développement des régions et villages riverains des aires protégées.

Pratique

TarifsLes droits d’entrée dans tous les parcs nationaux de Madagascar sont les suivants. On peut acheter les tickets à l’entrée des parcs nationaux (guichet unique). Attention ! MNP annonce que ces tarifs pourraient augmenter en 2014.

w Pour les parcs suivants : Isalo, Andasibe/Mantadia, Ranomafana, Montagne d’Ambre, Ankarana, Bemaraha et Ankarafantsika : 25 000 Ar (1 jour), 37 000 Ar (2 jours), 40 000 Ar (3 jours), et 50 000 Ar (4 jours et +).

w Pour les autres parcs : 10 000 Ar (1 jour), 15 000 Ar (2 jours), 20 000 Ar (3 jours), et 25 000 Ar (4 jours et +).

w A cela, il convient d’ajouter des frais de guidage (évoqués plus en détail dans les rubriques de chaque parc mentionné dans le guide), pour quatre à six personnes maximum (si vous êtes plus nombreux, il faut payer un autre guide). Les tarifs dépendent de chaque parc, et de chaque circuit au sein d’un parc. La nourriture des guides (comme des porteurs et des pisteurs éventuels) est à la charge des touristes. Les passeports qui permettaient de visiter plusieurs parcs ont été supprimés.

w Enfants : 200 Ar par jour.

w Visiteurs nationaux : 1 000 Ar par jour.

w Guides sous contrat : 200 Ar par jour.

w Cinéaste pour 15 jours : droit d’entrée 200 000 Ar (par parc pour quinze jours) et droit de filmage : 5 000 000 Ar pour un film de série, 3 000 000 Ar pour un reportage ou un documentaire étranger, 400 000 Ar pour les besoins de familiarisation et de formation d’une ONG ou une association malgache.

w Chercheurs : 100 000 Ar par mois, ou 5 000 Ar par mois pour les nationaux.

w Groupe d’étudiants étrangers : 25 000 Ar par étudiant.

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FAUNE ET FLORELa flore : un paradis tropicalMadagascar ne manquera pas d’émerveiller le voyageur le plus exigeant, d’abord dans les grandes réserves fondées dans les différentes régions mais aussi partout dans l’île : les forêts et les cratères, les massifs coralliens et les cours des rivières apportent leur moisson de trésors naturels. Il reste plus de 60 000 km² de forêts, ce qui n’est pas rien ! En certains endroits (en particulier à Masoala, à l’est de Maroantsetra) subsiste une véritable jungle qui serait en partie inexplorée.

w Les plantes et les fleurs. Les naturalistes ont répertorié plus de dix-neuf mille espèces végétales, dont – c’est un record mondial – plus de mille variétés d’orchidées, aux formes et aux couleurs les plus variées. On observera aussi les hibiscus et les bougainvillées, l’ylang-ylang dont le parfum rend amoureux, les flamboyants et les jacarandas, les frangipaniers et les euphorbes, les nénuphars et les népenthès des marais, ces fleurs « carnivores » qui absorbent mouches et moustiques. La très jolie pervenche malgache, toute violette, rappelle que Madagascar dispose d’une richesse exceptionnelle en plantes médicinales. Les instituts de recherche et l’Organisation mondiale de la santé effectuent ici un travail de premier plan dans le domaine de la pharmacopée. Les ravenalas sont là aussi, dès l’aéroport d’Ivato et jusqu’aux forêts de la côte est (où ils fournissent un abondant matériau de construction), avec leur majesté inégalable, ainsi que les fromagers et les banians, les arbres à pain et les lauriers en fleurs, les cocotiers et les palmiers satrana, les bambous et le sisal…Le charme vert agit tout le long de la Grande Île ! Les fruits et épices tropicaux sont omni-présents le long des routes, sur les marchés et dans les plantations : litchis, mangues, vanille, cannelle, cacao, café, poivre et girofle…

w Les baobabs. Madagascar possède six variétés de baobabs, plus surprenantes les unes que les autres, alors qu’il n’y en a qu’une seule pour l’Afrique tout entière : l’Adansonia digitata (également présente sur le sol malgache). On comprend pourquoi les Malgaches le surnomment renala ou Mère de la forêt !Ces six espèces endémiques ont pour nom Adansonia fony (ou Rubrostipa, il croît jusqu’à 5 m de haut environ, près de Morondava),

l’Adansonia grandidieri (beaucoup plus imposant, il peut atteindre 30 m de haut, c’est celui de la fameuse Allée des Baobabs près de Morondava), l’Adansonia madagas-cariensis (dans l’extrême sud ou vers Diego, c’est aussi l’espèce présente au bord de mer à Majunga), l’Adansonia perrieri (plus rare, dans le Nord, en voie de disparition), l’Adansonia suarezensis (il peut culminer à 25 m, aussi en voie de disparition) et l’Adansonia za (entre 5 et 30 m de haut, espèce menacée). On utilise les baobabs de diverses manières : feuilles et fruits servent à l’élaboration d’une huile, l’écorce fournit un bon cordage et facilite la construction d’une maison, et la sève est précieuse pour la fabrication de papier. Quant aux fruits, akoussa, on les utilise dans la gastronomie, en jus de fruits ou en rhum arrangé, ainsi que dans la cosmétique.

Une histoire d’arbres w Frangipaniers. Que ce soit dans

les jardins qui entourent les palais royaux d’Antananarivo, dans les rues de Toamasina ou au bord de la mer, à Toliara, on est soudain envoûté par un parfum extrêmement sensuel, et l’on s’approche pour sentir de plus près ces fleurs blanches au cœur doré.

w Le poinsettia. Abondant sur les Hautes Terres notamment, il est ici appelé « Madagascar ». En effet, quand on plie la feuille, celle-ci évoque vraiment la forme géographique de la Grande Terre. En outre, les couleurs vert, rouge et blanc (la sève) sont celles du drapeau malgache !

w Ravinala (Ravenala). Majestueux compagnon du rêve, le ravinala, l’« arbre du voyageur », offre l’eau à qui a soif et s’étend à l’infini le long de la côte est, dans la forêt qui résiste au temps et aux hommes. Cet arbre est aussi un symbole national : les souverains en ont fait un ordre royal, une distinction honorifique… Aujourd’hui, le dessin du ravinala orne le logo d’Air Madagascar, l’insigne de la gendarmerie, une marque de traveller’s cheques et la nomenclature de classification des hôtels.

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w La flore océane. Enfin, tout autour de la Grande Île, il y a la merveilleuse flore océane. Il suffit d’un masque et d’un tuba pour s’immerger dans des paysages de rêve, tout le long des lagons et des barrières de corail. Les fonds marins sont superbes.Les principaux écosystèmes marins côtiers de Madagascar, incluant les mangroves, les récifs coralliens, les lagunes… sont menacés de destruction par les pêches sauvages, la pollution, l’érosion côtière, la déforestation abusive et même le tourisme. Leur beauté et

leur diversité sont pourtant des arguments de poids pour choisir de visiter l’île : la barrière de corail entre Itampolo et Morombe serait ainsi la deuxième plus grande au monde après celle de l’Australie.Ainsi, les mangroves occupent une superficie d’environ 330 000 ha, principalement sur la côte occidentale (près de 97 %). Implantées dans des bassins sédimentaires, elles forment de vastes forêts presque impénétrables, à l’ouest et au nord notamment.On recense huit petites espèces florales diffé-rentes, appartenant à six familles répandues sur les côtes d’Afrique de l’Est. De grands palétuviers se dressent dans les régions où la pluviométrie est importante, plantant leurs racines bien profondément pour lutter contre les marées. Enfin, d’autres essences peuplent ce biotope remarquable bien que limité, comme l’Acrostichum aureum, les Typha ou l’Hibiscus tuliaceus.

Un petit parcours régional

w Au centre. Dans la capitale, le parc zoologique de Tsimbazaza donne un premier aperçu des richesses que recèle Madagascar. Bien que d’une conception très séduisante, il ne restitue pourtant pas l’enchantement de l’environnement naturel.Au centre, la forêt d’Ambatolampy est très « highlands » : les arbres les plus répandus sont les conifères, ils abritent des oiseaux. Attention ! L’eau des lacs de cratères et des rivières est très fraîche durant l’hiver austral. Le lac de cratère Tritriva (près d’Antsirabe), magnifique, et très apprécié des oiseaux et batraciens. Miandrivazo est une bonne base de départ pour la descente de la rivière Tsiribihina en chaland (gorges et défilés, sauriens, végétation superbe). Le parcours se déroule entre cascades et geysers.Dans les massifs de l’Itremo et de l’Ibity, on admirera des plantes-cailloux (les fleurs jaillissent pour ainsi dire du sol) ou des baobabs nains, et d’une manière générale, sur le versant occidental des Hautes Terres, on s’intéressera à la végétation xérophile qui s’adapte merveilleusement à des climats difficiles, par un système d’accumulation d’eau (crassulescence ou succulence).

w A l’est. Le parc d’Andasibe-Mantadia est une très belle forêt plantée d’orchidées (comme le Cymbidiella rhodichila, dont les grappes jaunes sont tachetées de points verts, ou l’impressionnante aeranthes ). Parmi les nombreux animaux qui peuplent la

Plantes médicinales et huiles essentiellesDu fait de ses plantes aromatiques et médicinales endémiques, Madagascar est réputée mondialement pour sa pharmacopée traditionnelle et ses médecines douces. Depuis deux siècles, des techniques se perpétuent dans les villages. Savez-vous que le cyprès (Cupressus lusitanica ) peut être utilisé contre la mauvaise circulation, les varices, les jambes lourdes ou la toux sèche ? Que le géranium (Pelargonium roseum ) sert à soigner les surcharges graisseuses, la cellulite, ou l’ulcère gastrique ? Que le girofle (Eugenia caryophyllata ) est indiqué contre les digestions difficiles ou les névralgies dentaires ? Ou encore que le niaouli (Melaleuca viridiflora ) possède d’indéniables vertus pour soigner les rhumes, les affections respiratoires catarrhales, ou même les otites ? Bien sûr, nous parlons d’huiles essentielles. Madagascar pourrait bien être l’un des plus grands laboratoires naturels pharmaceutiques au monde ! D’ailleurs, Madagascar est considérée comme le premier pays d’Afrique en matière de médecine traditionnelle, devant le Burkina Faso : on compte plus de 5 000 tradipraticiens au sein d’une dizaine d’associations.L’établ issement pharmaceut ique agréé par Homéopharma fabrique et diffuse des produits d’homéopathie, d’aromathérapie ainsi que des plantes médicinales, des huiles essentielles et des éléments de pharmacopées traditionnelles. On pourra en outre y dénicher des livres spécialisés.

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réserve, on y rencontre parfois, à l’aube, un lémurien rare et célèbre, l’indri indri. Le canal des Pangalanes (depuis Toamasina jusqu’à Manakara) est un univers aquatique et tropical. Bordé de ravenalas et d’une forêt souvent très dense, il abrite oiseaux, lémuriens, sauriens, insectes et, bien sûr, poissons.

w A l’ouest. Près de Mahajanga, la réserve d’Ankarafantsika abrite ce qui reste des grandes forêts de l’Ouest ; elles sont peuplées de lémuriens.Dans les alentours de Morondava, on admirera sans se lasser les forêts de baobabs, les Dalbergia (bois de palissandre) ou les Commiphora. Au large, les îles coralliennes permettent la découverte, en toute sécurité, d’un univers marin exceptionnel dans des lagons superbes.

w Au sud. La végétation xérophile et épineuse abonde, c’est le bush. La famille la mieux représentée est celle des Didieracées : arbre pieuvre, Marnériana (superbes fleurs rouge carmin), Pachypodium (aux formes multiples) ou euphorbes s’en donnent à cœur joie.A Miary (près de Toliara) s’ouvre mystérieu-sement l’univers magique des banians, dont les immenses racines se perdent dans la ramure. Près de Taolagnaro, on pourra voir la curiosité locale, le népenthès (qu’on trouve aussi près de Sambava), une plante carnivore (elle engloutit les insectes qui ont le malheur de s’approcher d’un peu trop près), et le fameux trièdre, un palmier à trois ramifica-tions, unique au monde !

w Au nord. La réserve Lokobe à Nosy Be est à visiter pour sa superbe végétation. Près de Diego, la montagne d’Ambre et le parc national du même nom permettent de nouvelles rencontres avec les lémuriens et leur monde végétal.En outre, on découvrira un relief volcanique avec ses lacs de cratères, des orchidées magnifiques, de nombreuses plantes épiphytes et des cascades, et partout des oiseaux… La

baie d’Antongil, au nord-est, est bordée par la jungle tropicale la plus dense de Madagascar. Entre Vohémar et Maroantsetra, on visitera les plantations de girofle, vanille, cannelle, basilic, niaouli, etc.

Une faune d’exceptionDans le Nord-Ouest de l’île, des ossements de dinosaures vieux de cent cinquante millions d’années ont été découverts… Ils dateraient de l’époque où Madagascar s’est détachée du continent africain. Depuis cette période, des espèces aujourd’hui disparues partout ailleurs sur la planète ont continué à vivre et à se reproduire sur l’île Rouge. Même si l’absence de fauves a limité « l’impitoyable loi de la jungle », la faune malgache n’en a pas moins subi de grands bouleversements : l’oiseau géant vorompatrana (de la famille de l’autruche) a disparu, de même que l’hippopo-tame nain et le lémurien géant. Au fil du temps, toutes les espèces animales ont souffert de la dégradation de leur milieu naturel. Si cela peut vous rassurer, on ne trouve ici ni vipère, ni cobra, ni python. En revanche, de nombreuses autres espèces vous garantissent un séjour haut en couleur (et en cris de frayeur, bien qu’aucune ne soit dangereuse pour l’homme) !

L’ancêtre mangousteLa revue Nature a annoncé il y a quelque temps la possible résolution d’un casse-tête scientifique qui perdurait depuis longtemps : les sept espèces de mammifères carnivores présentes sur l’île proviendraient en fait d’un seul ancêtre, une mangouste africaine arrivée au petit bonheur la chance par le canal du Mozambique, il y a dix-huit ou vingt-quatre millions d’années, soit près de cent cinquante millions d’années après la séparation de Madagascar du continent. Il se pourrait donc que ces espèces ne soient pas nées chacune de leur côté sur le sol malgache.

La tête en basLors d’un gigantesque incendie qui ravagea la Grande Île, Dieu manda les oiseaux pour arrêter le sinistre. Tous échouèrent, à l’exception de la chauve-souris. Celle-ci, toutefois, décida de se reposer après un si coûteux effort. Profitant de l’aubaine, le drongo s’arrogea le triomphe et Dieu le sacra « Roi des animaux ». Depuis, la chauve-souris désappointée dort la tête en bas : dérision rageuse (mais pas forcément enragée) d’un postérieur toujours offert à la vue du Très-Haut !

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w Les lémuriens. Les plus célèbres de tous les animaux de Madagascar sont incontestablement les lémuriens. Ce groupe fascinant de primates fait l’objet d’une attention de tous les instants et déplacent les foules : scientifiques, équipes de télévision, touristes, écoliers… On les appelle babakoto (« petits grands-pères »), peut-être parce qu’ils représentent les plus proches descendants de nos ancêtres lointains. Pour peu qu’on les observe attentivement, on s’aperçoit que leurs comportements relationnels, leurs danses, leurs expressions et gestes sont empreints d’humanité !C’est à Madagascar que l’on rencontre les variétés les plus diverses de ce mammifère qui a disparu partout ailleurs, à quelques rares exceptions (Brésil et République démocratique du Congo). Le babakoto tient un peu du singe, un peu du panda, un peu du chat, un peu de l’écureuil, selon les familles… Il en existe de différentes couleurs, de différentes formes et de différentes tailles, depuis le « microcèbe », qui a la taille d’un écureuil (pas plus de 30 g), jusqu’à l’« indri indri », qui est grand comme un enfant (son poids peut dépasser 9 kg).On compte environ 105 espèces ou sous-espèces (autrement dit « populations ») de lémuriens sur la Grande Île, toutes endé-

miques, dont 15 sont déjà éteintes, 24 consi-dérées en danger critique, 49 en voie de disparition et 20 vulnérables (déforestation permanente, braconnage, changement clima-tique...) : le lémurien est ainsi le vertébré le plus menacé au monde aujourd’hui !Le 26 janvier 2013, des scientifiques allemands ont annoncé la découverte de deux nouvelles espèces de lémuriens, du genre Microcèbe : Microcebus tanosi à la tête rousse, et Microcebus marohita à la longue queue touffue et aux grands pieds. Le lémurien le plus rare est le Lépilémur septentrional : on ne compterait plus que 19 individus vivants à ce jour.Pour comprendre un peu d’où viennent ces drôles de bêtes, il faut savoir qu’après l’extinction définitive des dinosaures, à la fin du Secondaire (il y a environ 65 millions d’années), les primates se sont scindés en deux groupes : les Simiens, dont nous sommes les héritiers, et les Prosimiens, que repré-sentent aujourd’hui les lémuriens, les pottos ou les galagos. Curieusement, si les Simiens ont développé l’organe visuel au détriment de tous les autres, les Prosimiens ont préservé un odorat remarquable. Selon toute apparence (scientifique), les lémuriens n’ont pas suivi le grand voyage de Madagascar il y a 160 millions d’années, quand la Grande Île s’est séparée du

Une histoire de lémuriens« Certains lémuriens malgaches sont considérés comme des hommes qui, dans des temps fort reculés, se muèrent en singes… L’on dit même qu’après plusieurs générations, quelques lémuriens de grandes tailles sont redevenus hommes ! L’un de ces hommes, Itovo [… ] devint définitivement singe après des déboires matrimoniaux. Dans sa période humaine, il s’était uni avec une femme riche mais acariâtre. Le sorcier avait décrété une interdiction : Itovo ne devait pas toucher la louche de bois pour prendre le riz en même temps que sa femme, sinon un grand malheur arriverait… Ainsi préservé, le ménage ne devait connaître aucune difficulté et de nombreux mois s’écoulèrent [… ] dans un relatif bonheur… Puis vinrent les premières scènes conjugales, inévitables, brèves. Elles devinrent de plus en plus fréquentes, la femme ayant vraiment un mauvais caractère et humiliant Itovo par son argent, lui qui n’avait rien. Ce jour-là, sa femme, devant sa goinfrerie coutumière, le lui reprocha durement. Il rétorqua qu’il avait bêché et semé toute la matinée un champ entier de maïs, sans prendre le moindre repos. Le ton s’éleva. Séparés par la largeur de la natte, ils n’en vinrent pas aux mains, mais elle brandit la louche malencontreusement placée entre eux deux et le frappa au visage.Le grand malheur prit forme sur Itovo qui se transforma peu à peu en singe, sortant par la porte basse, montant sur le toit de la case… puis gagnant la forêt proche, heureux de sa nouvelle liberté, il ne se retourna même pas. Sa femme n’en fit pas un drame, ne larmoya pas. Seulement, depuis, tous les lémuriens issus d’Itovo ont conservé une haine tenace envers les femelles humaines et ne manquent pas de les poursuivre, de les pincer, chaque fois que dans la forêt elles s’aventurent. »(Extrait de Extrême-Sud malgache, par Louis Szumski.)

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continent. On ne sait pas très bien comment ils sont arrivés par la suite, et comment ils se sont autant développés : mais une chose est certaine, toutes les espèces rencontrées ici sont endémiques.Ces sympathiques cousins vivent majoritaire-ment dans les forêts originelles, mais d’autres se prélassent dans les cocotiers (comme l’aye-aye), et mangent des fruits exotiques, goyaves ou bananes par exemple. Cela dit, leur régime alimentaire est plutôt varié : les petites espèces (nocturnes) se contentent d’insectes, de feuilles (lépilémurs, avahis), de bambous (hapalémurs), tandis que les grandes espèces (diurnes) consomment des végétaux, notamment des feuilles (indri-indri). Des études ont mis au jour ce fait : la femelle, dont le cycle de reproduction est saisonnier (naissances – en général une seule pour les grandes espèces, parfois des jumeaux, et jusqu’à quatre pour les petites espèces – entre juillet et décembre principalement), domine les groupes, et il semble même qu’il faille parler de matriarcat à propos des lémurs varis.Nos connaissances sont cependant incertaines, et beaucoup de choses restent à apprendre de ces étranges parents. Parmi les espèces les plus répandues, ou en tout cas celles que vous aurez le plus de chance de rencontrer : le Lemur catta (on l’appelle aussi maki), et ses « airs de star » ne trompent personne : c’est le plus populaire de toute la bande ! On reconnaît aisément cette espèce diurne à sa queue blanche annelée de noir ou de gris, ou à ses yeux orangés cerclés de noir, ou encore, pourquoi pas, à sa fourrure grise. Il vit généra-lement en groupe d’une trentaine d’individus et la femelle domine l’ensemble : les mâles ne sont même admis qu’une seule fois par an dans la tribu ! Ce lémurien fait le choix des petits et des grands, puisqu’il adore les bananes, et n’hésite pas à s’agripper à vos épaules pour parvenir à ses fins. Le matin, il se met souvent en position zen pour capter les énergies solaires !Le Lemur macaco, qu’on rencontre surtout à Nosy Be, sur l’île de Nosy Komba, « squattée » de plus en plus par le tourisme international, est une espèce diurne qui se distingue par la fourrure rousse qu’arborent les femelles, tandis qu’elle est noire pour les mâles.L’Indri indri attire les foules dans la réserve du parc de Mantadia-Andasibe. On comprend bien pourquoi : « babakoto » est le plus grand des lémuriens. Il vit en groupe de cinq individus maximum en général. Sa belle fourrure blanche est diaprée de reflets roux sur le ventre.

Le Propithèque, ou Sifaka (en malgache), est très populaire. Il vit au grand jour en petits groupes (cinq individus en général) et mange les feuilles de tamariniers, de kapokiers ou de manguiers.Le Microcèbe (Microcebus murinus ), dont la fourrure grise ou rousse ne saurait faire oublier que c’est le plus petit de tous, est gourmand d’insectes, de petits vertébrés ou de fruits. Cette espèce nocturne hiberne l’hiver une fois qu’il a réalisé ses réserves de graisse.Enfin, l’Aye-aye (Daubentonia madagasca-riensis ), est une autre star… Car avec ses « dents de lapin, ses oreilles de chauve-souris, ses poils de sanglier, sa queue de renard et ses mains de singe » , on se demande bien d’où il peut bien sortir… ! Cette espèce nocturne est une énigme pour les scientifiques, et un suspect pour les villageois, qui ne le voient pas d’un très bon œil… Serein malgré tout, il déguste la chair des noix de coco ou les larves d’insecte qu’il peut extraire des troncs d’arbre, grâce à son troisième doigt fort long et à l’ongle spécialement recourbé !

w Insectivores et autres mammifères. A Madagascar, on ne trouve ni éléphants, ni lions, ni kangourous… Inutile donc de faire le voyage si l’on veut admirer les grands prédateurs des savanes africaines. Toutefois, il existe plus de 150 espèces, presque toutes endémiques.Un mammifère qu’il est impossible de ne pas voir est bien sûr le zébu, d’origine africaine.Les tenrecs (Tenrecidés) sont communs ; les plus gros s’apparentent à nos hérissons, même s’ils n’appartiennent pas du tout à la même famille ; certains, plus petits, notamment les tenrecs du riz (Oryzorictes) ou les musa-raignes, donneront peut-être des idées à certains : ils atteignent leur majorité sexuelle à l’âge de… deux ou trois mois ! En revanche, ils peuvent mettre au monde jusqu’à 32 petits à la fois, ce qui est plus douloureux. On les verra dans les grandes forêts de l’Est.Les rongeurs ne sont pas très répandus sur la Grande Île. La concurrence des autres mammi-fères insectivores a sans doute beaucoup nui à leur propagation. On compte une vingtaine d’espèces, appartenant à la sous-famille des Nesomyinés. Allez faire un tour du côté de Morondova, sur la côte ouest, en forêt sèche : vous croiserez peut-être le rat sauteur (Hypogeomys antimena ), de la taille d’un lapin. Enfin, les rats et les petites souris ont été importés et ils se montrent à l’occasion, au grand déplaisir des âmes sensibles.

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w Les carnivores. Les familles représentées sur le sol malgache sont les Viverridés et les Herpestidés. Le fosa (Cryptoprocta ferox ) est l’espèce la plus imposante ; il ressemble d’ailleurs à un félin, une sorte de petit puma. Ce bon grimpeur chasse les lémuriens. Il est très difficile de l’apercevoir dans son milieu naturel, et bien triste de le voir faire les cent pas dans une cage. Sinon, on peut aussi évoquer la mangouste à queue annelée (Galidia elegans ), facilement identifiable dans les forêts ou la mangouste Mungotictis decemlineata (zones arides de l’Ouest).

w La baleine à bosse (Megaptera novaeangliae). La baleine à bosse, que l’on appelle aussi jubarte (un terme évoquant sans doute ses superbes sauts qui lui confèrent, aux yeux des humains, un caractère joyeux), appartient au groupe des Mysticètes (baleines à fanons). C’est le naturaliste allemand Borowski qui l’a décrite pour la première fois lors d’observations en Nouvelle-Angleterre. Le nom Megaptera signifie « grandes ailes » et désigne ses grandes nageoires pectorales. Elle mesure entre 14 et 17 m de long (le plus grand spécimen identifié mesure 19 m) et pèse environ 40 tonnes : un beau bébé ! On la rencontre dans toutes les mers du monde (même dans le Sud patagon), et fait l’objet, comme à Sainte-Marie, d’une attention un peu plus « écologique » et touristique depuis quelques années : c’est le whale-watching (observation des baleines). On identifie la baleine à bosse à sa couleur noire sur le dessus, blanchâtre sur le dessous, mais l’une de ses caractéristiques principales reste les tubercules (petites protubérances, en fait des follicules pileux) sur sa tête. Les ondulations de la nageoire caudale, les cicatrices et les taches noires ou blanches sont propres à chaque individu. La baleine à bosse fait surface régulièrement et expulse alors l’air de ses poumons, formant une sorte de « geyser » pouvant atteindre 3 m de haut ! C’est à ce moment qu’elle montre sa fameuse « bosse », en fait son dos qu’elle fait rond avant de sonder (c’est-à-dire de plonger). Les femelles (reconnaissables à leur lobe d’environ 15 cm de diamètre dans la région génitale) mettent bas tous les deux ou trois ans ; la gestation dure environ onze mois. Mais il peut arriver que les femelles donnent naissance à un baleineau deux années de suite. Celui-ci mesure plus ou moins 4 m de long et pèse déjà 700 kg à sa naissance. Sa mère l’allaite les six premiers mois, et elle continue les six mois suivants, même s’il peut déjà commencer à chercher sa propre nourriture. Après un an, alors qu’il mesure environ 9 m de long, le baleineau quitte sa mère. Il atteint sa maturité sexuelle

à l’âge de cinq ans, peu avant d’atteindre sa taille adulte. La baleine à bosse vit entre 50 et 60 ans. Quant à son organisation sociale, elle est assez confuse : la plupart du temps, les individus vivent seuls ou se joignent à un groupe de fortune, mais certains groupes se maintiennent plus longtemps pour mieux rechercher de la nourriture : jusqu’à plusieurs années, mais cela est plutôt rare. Les parades sexuelles (sauts, dressements verticaux, frappements de l’eau avec les nageoires, esquives) ont lieu pendant l’hiver (austral... les mois de juin à septembre sont donc des moments propices pour les observer autour de Madagascar). A ce moment, les mâles entrent dans une sauvage compétition pour les doux yeux de leur belle. La joute peut durer plusieurs heures, de nouveaux prétendants peuvent remplacer les cavaliers éconduits par la dame : on a dénombré plus d’une vingtaine de mâles autour d’une seule femelle ! Il est à noter que ces manifestations artistiques ont aussi été observées en dehors de la période de reproduction, ce qui tendrait à signifier qu’elles ont aussi un rôle de communication. Les baleines à bosse chassent le krill, les harengs, les capelans, les lançons (petits poissons) et utilisent une technique de pêche originale : celle du « filet à bulles ». Plusieurs individus forment un groupe et entourent un banc de poissons en évacuant de l’air par leurs évents (le cercle peut atteindre 30 m de diamètre) : les bulles formées constituent une véritable barrière naturelle qui empêche les poissons de se repérer. Tout à coup, le groupe fonce sur sa proie sans que celle-ci ait eu le temps de réagir : des milliers de petits poissons sont alors ingurgités en une seule bouchée. Un bel exemple de communautarisme animal ! Evoquons encore l’autre particularité fameuse des baleines à bosse : le chant. Il peut arriver qu’elles entament la chansonnette pendant plusieurs jours. La mélodie, constituée par des nuances de notes graves, est extrêmement complexe, et des séquences sonores cohérentes se répètent. Comme les baleines à bosse ne chantent qu’à la saison des amours, on suppose qu’il s’agit d’un moyen de séduction. D’après les statistiques, la population des baleines à bosses est passée de 20 000 individus au moratoire de 1966 à environ 35 000 aujourd’hui. Depuis 2004, il est autorisé de chasser quelques animaux au large de Saint-Vincent et des Grenadines dans les Caraïbes. Un mot pour la fin : une baleine à bosse albinos, probablement née vers 1990 et appelée Migaloo (en langue aborigène australienne « le garçon blanc ») se balade régulièrement le long de la côte est d’Australie. C’est la star de toutes les baleines à bosse pour les spécialistes, en raison de sa couleur très rare.

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w Les caméléons. Il y a des caméléons à foison. En effet, les deux tiers des espèces existantes sur notre planète habitent Madagascar, comme Calumma (en forêt) ou Furcifer (zones plus sèches de l’ouest). Le plus petit des caméléons a été découvert en 2007 et décrit en 2012, et mesure 2 cm sans la queue (Brookesia micra, on peut le chercher dans le nord du pays, sur l’îlot de Nosy Hara), le plus grand pouvant atteindre plus de 60 cm (Chamaeleo oustaleti ). Changeant de couleur selon le cadre où il guette sa proie, le caméléon est partout. L’espèce la plus répandue est le caméléon panthère (Furcifer pardalis ).Parmi les cousins des caméléons, le gecko dont le chant surprend, l’uropate – qui a lui aussi des tenues de camouflage – et le margouillat ne sont que les plus connus des innombrables lézards qui élisent domicile dans les forêts et les murailles de pierre des maisons.

w Les serpents. Il y a 364 espèces de reptiles dans le pays, dont 332 strictement endémiques. 96 espèces de serpents – tous inoffensifs – ont été recensées. Le plus spectaculaire est le grand « do », un boa. Trois des quatre espèces de boa sont d’ailleurs représentées : il ne manque que le boa constrictor, présent en Amérique du Sud. Il y a aussi le Menarana (Leioheterodon madagascariensis ). Espèces rares, ces reptiles sont protégés. Ils ne peuvent être ni capturés ni vendus. À noter qu’ils ne sont pas dangereux pour l’homme, aucun serpent venimeux n’étant répandu sur cette bonne île malgache.

w Les sauriens. Très protégés, car en voie de disparition, les sauriens fréquentent les grands espaces aquatiques des Pangalanes où nous avons vu de beaux spécimens de crocodiles de plus de 3 m de long. Les plus secrets (jusqu’à 5 m) ont cherché refuge dans les rivières du Nord. Dans le lac sacré d’Anivorano, près d’Antsiranana, les crocodiles sont considérés comme les réincarnations des habitants d’un village englouti, et font l’objet d’un véritable culte. L’espèce présente à Madagascar est le crocodile du Nil (Crocodylus niloticus ). Jadis, il existait une espèce endémique, Crocodylus robutus, aujourd’hui disparu.

w Les tortues. Il y a en tout 16 espèces de tortues à Mada, dont 5 marines. La plus connue est la tortue radiée ou étoilée ou encore rayonnée (Astrochelys ou Geochelone radiata ). Elle est superbe avec sa carapace noire et ses décorations jaune vif. Bref, c’est une œuvre d’art ! Cette espèce magnifique est en danger critique d’extinction aujourd’hui.

w Les amphibiens. On se penchera avec curiosité sur l’abondance de grenouilles endémiques, qui, dans les marais, le long des lacs et des cours d’eau, composent de superbes ballets de couleurs sur les végétations flottantes. On compte aujourd’hui plus de 285 espèces différentes (dont 55 menacées d’extinction), divisées en cinq familles distinctes : les Mantellidae (200 espèces), les Microhylidés (72 espèces, dont la fameuse grenouille tomate : même couleur et même aspect !), les Hyperoliidés (11 espèces), les Discoglossidae (1 seule espèce) et les Ptychadenidae (1 seule espèce aussi).A noter : les espèces du genre Mantella produisent une substance chimique au niveau de la peau, en absorbant les fourmis, ce qui leur permet de se protéger des prédateurs ; on retrouve ces mêmes caractéristiques chez les Dendrobatidés d’Amérique latine, bien que les biotopes soient tout à fait différents. Illustration d’une vérité animale que les hommes semblent oublier, quand ils le veulent : en Amérique, Europe, Afrique ou Asie, mêmes résistances, mêmes combats !

w Les invertébrés. Les insectes sont de loin l’espèce la plus représentée sur notre planète : plus de 95 % de tous les animaux ! Il est très facile d’en observer à Madagascar, principalement dans les forêts à forte pluviométrie. Scorpions, scarabées, (dont le fameux Trachelophorus giraffa ou scarabée girafe), mille-pattes, iules, papillons (plus de 3 000 espèces dans le pays), sangsues (sans risques pour l’homme), crabes, blattes (dont la blatte géante ou Gromphadorhina portentosa qui peut atteindre presque 8 cm de long)… abondent également.Les régions forestières de l’Est sont la terre de prédilection des lépidoptères. C’est ici qu’habite le plus grand papillon du monde, l’Argema mittrei, dit « Comète de Madagascar », qui atteint 30 cm d’envergure. Parmi les plus beaux, on distinguera aussi le Chrysiridia madagascariensis, dont les ailes peuvent prendre toutes les couleurs du prisme de lumière.Il y a des araignées partout. Les très grandes néphiles (12 cm d’envergure), qui s’accrochent aux arbres, aux fenêtres, aux fils électriques, font sensation mais sont sans danger. Madagascar abrite quatre cents espèces d’arachnides, dont une variété de mygale. La seule vraiment dangereuse est la veuve noire. Petite, habitant les forêts profondes, elle se rencontre rarement.

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SURVOL DE MADAGASCAR48

w Une immense volière d’oiseaux. Mada compte environ 293 espèces, dont 108 endémiques à ce jour. Rouges comme le fody (appelé aussi cardinal) à la saison des amours, verts comme les perruches et les pigeons, noirs comme le drongo (une sorte de passereau), ils sont partout, piaillant, chantant, sifflant dans les jardins, les bosquets, et les forêts. Au gré des parcs nationaux, on admirera diverses variétés de grèbes (comme la grèbe castagneuse, ou Kiborano), de hérons (tel le héron garde-bœuf, ou Vorompotsy), d’aigrettes, des ibis huppés de Madagascar (Akohon’ala), des dendrocygnes veufs (Tsiriry), des aigles serpentaires (Fisarabe), des mésites unicolores (Roatelo), des râles de Madagascar (Kiky), des tourterelles peintes (Domohina), des pigeons verts (Fonimaitso), des grands perroquets Vasa (Boloky)… Et cette liste est bien loin d’être exhaustive !On découvrira aussi des coucales malgaches, des superbes couas bleus ou huppés (famille des Cuculidés, comme les coucous), des engoule-vents, des martinets de Grandidier, des guêpiers de Madagascar, des philéppites, des bergeron-nettes, des bulbuls, des zosterops, des artamies, des vangas (dont le plumage noir et blanc lui a donné son nom : pie, en malgache) ou d’autres Vangidés comme le bel eurycère de Prévost (parfois appelé Siketribe), des pygargues ou aigles-pêcheurs, des crabiers de Madagascar, des rolliers terrestres à longue-queue…Certaines espèces sont bien introduites, d’autres en voie de disparition, d’autres encore quasiment éteintes (comme le pygargue, précisément).Beaucoup d’oiseaux ont disparu de la Grande Île, à cause de la déforestation massive qui a asséché les sols, notamment sur le versant occidental : des râles, des vanneaux, des aigles, des ratites (le fameux Aepyornis)…

D’une manière assez générale, la gent ailée est beaucoup moins représentée à Madagascar qu’en Afrique tropicale.

w Des poissons comme dans un aquarium. La faune des mangroves est plus spectaculaire que la flore. On ne connaît pas encore très bien toutes les espèces endémiques qui foisonnent autour de l’île (certaines seulement ont été inventoriées), aucune étude sérieuse n’ayant été menée sur la microfaune ou la méiofaune. On sait cependant que l’ichtyofaune est particulièrement riche, autour de 160 espèces à ce jour.Un masque et un tuba suffisent pour pénétrer dans l’un des plus beaux jardins aquatiques tropicaux du monde, notamment en longeant les barrières de corail à Toliara ou les lagons à Mahavelona (Foulpointe). On découvrira au fil des chenaux de superbes poissons, poissons-clowns, poissons-papillons, poissons-anges, étoiles de mer et hippocampes, appartenant à diverses familles comme les Sélaciens, les Carangidés, les Mugilidés, les Sparidés…Les mollusques sont très présents également, notamment les huîtres (Crassostrea cuccullata ), les oursins, les palourdes, les littorines qui s’accrochent aux palétuviers, ou divers gasté-ropodes qu’on mange à l’occasion.En ce qui concerne les crustacés, abondent crevettes d’eau douce, les Acetes (Tsivakiny), crabes de mangroves (Scylla serrata), ou crabes de vasières. Nos informations à leur sujet sont plutôt médiocres, bien que leur rôle dans le recyclage de la matière organique soit essentiel.Pour terminer, notons que les perspectives d’élevage en zones côtières (aquicoles) sont prometteuses, surtout dans les bandes comprises entre les niveaux des marées les plus hautes et ceux des marées les plus basses (zones intertidales au sol de type argileux).

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La faune du grand sud malgache.

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DÉCOUVERTE

Mystère des originesLes visages des enfants des Hautes Terres pourront parfois rappeler ceux des enfants de Java ou de Sumatra. Quant aux sourires des Vezos et des Sakalavas, ils vous évoqueront par moments l’Afrique…Au musée de Mahajanga, des os de dinosaures de taille très respectable, des ossements de tortues, d’autruches, de crocodiles recueillis par les paléontologues témoignent du gigan-tisme de la faune malgache préhistorique. Mais les premiers habitants de la Grande Île, eux, ont gardé leurs secrets, et les découvertes qui les concernent restent limitées. Certes, on a trouvé des objets façonnés par les hommes dans des gisements de subfossiles ; des outils, en particulier une sorte de hache courbe, ont été découverts à Ambatomanoina. C’est peu.

Les recherches se poursuivent. Certains scien-tifiques continuent de croire à un peuplement préhistorique.La tradition populaire, les mythes et les légendes évoquent souvent une population aux origines inconnues qui aurait peuplé la Grande Île bien avant les premières colonisations. La langue malgache a été étudiée (même origine proto-malayo-polynésienne), les sites archéo-logiques ont été fouillés de fond en comble, l’anthropologie, l’ethnographie et la génétique ont été mises à contribution pour tenter d’élu-cider ce mystère des origines. Il en résulte une hypothèse presque certaine : les plus lointains ancêtres identifiés des Malgaches sont surtout originaires de l’archipel malayo-indonésien (peuples austronésiens), sans doute au début de notre ère, voire plusieurs siècles avant selon certains chercheurs.

Histoire

Figures historiques

Robert DruryRobert Drury, fils d’un tavernier de Londres, alors âgé de 14 ans, s’embarque en 1701 sur un bateau partant pour les Indes. Il fait naufrage au retour dans le canal du Mozambique (vers 1703), est fait prisonnier par les insulaires, puis devient leur « esclave blanc » pendant neuf ans, avant de se marier à une indigène et d’oublier sa propre culture. Après une existence plutôt riche en péripéties, il est fait de nouveau prisonnier par le roi Sakalava de Morondava, mais un capitaine anglais, bien que très circonspect devant la mine effroyable de son compatriote, négocie sa libération. Beaucoup plus tard, il se serait jeté aux genoux de son ancien maître, lui léchant les pieds l’un après l’autre, le droit en premier, pour lui porter chance.

RanavalonaTrois reines ont porté ce nom. Parmi elles, Ranavalona Ière affronta les grandes puissances européennes, et Ranavalona III, après avoir résisté militairement à la colonisation, fut déportée en Algérie et mourut en exil. Aujourd’hui, d’une femme volontaire on dit : « C’est une Ranavalona. » On rencontre des femmes chefs d’entreprise, responsables d’administration, chargées de projets de développement. Dans les villages et les familles paysannes, les femmes prennent part aux décisions. La société malgache donne toute leur place aux femmes… La loi fait de même. Mais les comportements « machistes » n’ont pas disparu pour autant.

Jean LabordeFigure indissociable du XIXe siècle à Madagascar, Jean Laborde, né à Auch en 1805 et mort à Tana en 1878, fut un aventurier, un industriel et ingénieur polyvalent (il construisit notamment des usines à Mantasoa), un architecte, un chimiste, le premier consul de France à Madagascar et un collaborateur apprécié de la monarchie Merina, notamment de la reine Ranavalona Ière. Napeoléon III s’en servit pour asseoir la domination française sur la Grande Terre. A sa mort, la reine Ranavalona II décréta des funérailles nationales.

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Chronologie w VIIe au XIe siècle > Première grande formation territoriale tout le long du versant

oriental de l’île.

w XVe siècle > Premiers grands royaumes.

w 1642-1674 > Premiers établissements français.

w XVIIIe-XIXe siècle > Début de l’unification du pays par le roi Andrianampoinimerina.

w 1810 à 1895 > Royaumes Merina. Structuration de l’Etat, relations internationales et ambassades en Angleterre, France, Etats-Unis, Allemagne, Italie.

w 1840 à 1878 > Influence de Jean Laborde.

w 1845 > Guerre franco-britannique contre Madagascar. Tentative d’invasion.

w 1885 > Au terme d’une guerre, Madagascar devient protectorat français.

w 1896 > Colonisation française.

w 1947 > Soulèvement général pour l’Indépendance.

w 1960 > Indépendance.

w 1960-1972 > Période dite de « néocolonialisme ».

w 1975 > Deuxième République.

w 1975-1991 > Présidence de Didier Ratsiraka : régime socialiste.

w 1992 > Troisième République.

w 1997 > Réélection de M. Didier Ratsiraka à la présidence de la République.

w 1998 > Réforme constitutionnelle.

w Décembre 2001 > Nouvelles élections présidentielles, aux résultats contestés.

w Janvier-juillet 2002 > Crise politique.

w 6 mai 2002 > Marc Ravalomanana accède officiellement à la présidence.

w Décembre 2006 > Ravalomanana est réélu président de la République.

w 4 avril 2007 > Référendum qui entérine davantage la politique du président : les 6 provinces deviennent 22 régions et perdent une partie de leur autonomie, l’anglais devient troisième langue officielle, les pouvoirs du président sont renforcés.

w Août 2008 > Début du bras-de-fer entre Ravalomanana et le maire de Tana, Andry Rajoelina.

w Janvier 2009 > Violentes émeutes.

w 7 février 2009 > Massacre devant le palais présidentiel : 28 morts et 212 blessés.

w 17 mars 2009 > Démission de Ravalomanana qui s’exile en Afrique du Sud.

w 21 mars 2009 > Rajoelina s’autoproclame président de la Haute Autorité de Transition (HAT).

w 17 novembre 2010 > Référendum constitutionnel. L’anglais n’est plus une langue officielle.

w 2009-2013 > Gouvernement de la HAT, nombreux sommets entre Ravalomanana, Rajoelina et Ratsiraka, sans accords définitifs.

w 25 octobre 2013 > 1er tour de l’élection présidentielle. Taux de participation de 61,7%. Les deux candidats en liste pour le second tour (fin décembre 2013) étaient Jean-Louis Robinson, soutenu par l’ex-président Marc Ravalomanana, et Hery Rajoanarimampianina, soutenu par Andry Rajoelina. Ce dernier était en position très favorable.

HISTOIRE50

La tradition orale malgache appelle ces premiers venus les Ntaolo (« premiers hommes » ou « hommes des origines »), et eux-mêmes se nommaient sans doute Vahoaka (va-waka ou « peuple de la mer », « peuple des canoés »).Les premières populations seraient donc les

Vahoaka Ntaolo. Suite aux échanges commer-ciaux qui affairaient l’océan Indien, ils ont proba-blement importé la culture du riz irrigué, de la banane, du taro, de la canne à sucre, la pirogue à balancier, certains instruments de musique (comme la valiha ) et même certaines danses.

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HISTOIRE D

ÉCOUVERTE51

Toutefois, compte tenu des techniques de navigation de l’époque, le trajet Indonésie-Madagascar semble des plus aventureux : 6 000 km de désert océanique sans possibilité d’escale… ! Le parcours par étapes semble plus probable. Dans ce cas de figure, il aurait suivi l’itinéraire Indonésie-Ceylan-Inde-Arabie-Somalie-Mozambique-Madagascar. Ainsi, les métissages et les emprunts linguistiques auront-ils ponctué la route jusqu’aux rivages d’Afrique. En effet, le continent noir n’est qu’à 400 km des côtes malgaches. Madagascar jouirait ainsi d’une double origine, tant africaine qu’asiatique. Et les premiers migrants africains (pêcheurs, paysans, éleveurs, descendants des esclaves vendus par les Arabes…) auraient développé la culture sur brûlis et importé diverses variétés d’arbres ou d’animaux (comme les zébus).En tout cas, d’après les spécialistes, les Ntaolo se divisèrent peu à peu en Vazimba (« ceux de la forêt », chasseurs/cueilleurs), au centre sur les hauts plateaux et à l’est, et en Vezo (« ceux de la côte », pêcheurs), à l’ouest et au sud.Certains chercheurs affirment cependant que les Vazimba seraient même antérieurs aux Ntaolo, et que ces « petits hommes de la forêt » peuplaient la Grande Ile des dizaines de milliers d’années avant la venue de cette immigration austronésienne.

Des hommes et des océansLieu de passage obligé entre l’Asie et le Moyen-Orient, plus tard sur la route des Indes, Madagascar est vite devenue le carrefour de tous les commerces. Une importante vague d’immigration s’ajouta aux Vazimba et aux Vezo. On appelait ces nouveaux venus les Vahiny (« ceux qui visitent ») ou les Vazaha (« ceux qui cherchent »). Perses, arabes, Bantous (influence du swahili dans la langue actuelle malgache), Juifs, Indiens ou Javanais virent s’installer et se mélanger.On a exhumé des outils, des poteries et des ustensiles de pêche qui remonteraient aux Xe et XIe siècles de notre ère ; près de Vangaindrano, au sud-est, les ruines d’un comptoir arabe du XIe ou XIIe siècle ont été mises au jour : elles témoignent de la très forte influence musulmane dans le commerce des épices, aromates et parfums autour de l’océan Indien, à partir de cette époque. Certaines plantes médicinales plutôt appréciées des Arabes, comme le cubèbe (espèce de poivre), provenaient de Madagascar.A partir du XVe siècle, navigateurs arabes mais aussi indiens, portugais, génois, vénitiens s’y

font concurrence. L’influence indonésienne faiblit peu à peu, malgré une nouvelle vague d’immigration austronésienne vers le VIIIe siècle (ce sont les Hova ).On dit que Diego Diaz, navigateur portugais, fut le premier Européen à toucher les côtes de l’île vers 1500.Les Portugais ne réussirent pas à convertir les populations autochtones au christianisme, pas plus qu’à s’emparer des comptoirs arabes ; ils décidèrent de consacrer leurs efforts au Mozambique. Les Hollandais tentèrent bien quelques incursions par la suite, mais eux aussi choisirent un autre lieu d’établissement : Le Cap, à la pointe méridionale de l’Afrique. Les Britanniques n’eurent guère plus de succès dans leurs tentatives de soumettre les Malgaches, avant que les Français ne s’entichent d’y mettre leur grain de sel, à leur tour.Quant au nom même de Madagascar, il résul-terait d’une erreur de Marco Polo qui, au XIIIe siècle, aurait confondu la Grande Île avec le port somalien de Mogadiscio, bien plus au nord, sur la corne de l’Afrique !

De multiples royaumesToutes ces multiples influences ont laissé des traces : fortins édifiés sur les caps les plus stratégiques, comptoirs, religions, expres-sions linguistiques… Madagascar a assimilé, intégré, métissé les apports pour en faire une création très particulière : l’identité malagasy.Les forêts et les savanes, les Hautes Terres et les plaines ont été les lieux d’édification des royaumes. La terre de Madagascar est marquée par le souvenir des souverains sakalava et mahafaly, merina et antandroy. Les reliquaires royaux et les sépultures sont entretenus et gardés avec ferveur. La tradition orale continue à transmettre la geste de ces monarchies locales, mais l’histoire générale des royaumes régionaux de Madagascar reste à écrire. En voici quelques jalons.

w Royaumes du Sud. Au XVIe siècle, le roi Olombetsitoto est à l’origine des royaumes Mahafaly, tandis que les souverains Zafimanara imposent l’unité aux Karimbola.Au XVIIe siècle, deux dynasties de l’Anosy (région de Taolagnaro) créent le royaume de Masikoro qui va rayonner et étendre son influence jusqu’au nord de Toliara.Les pasteurs Bara poursuivent leur progres-sion vers l’Ivakoava. Alliances et conflits se succèdent entre puissances locales pour le contrôle des terres fertiles, des cours d’eau et des voies de communication.

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HISTOIRE52

w Royaumes de l’Est. Manakara et ses environs témoignent encore de l’empreinte du royaume Antemoro, dont la légende raconte qu’il fut créé par le sultan Ramakararo, qui venait de La Mecque. L’organisation sociale, le contrôle du commerce, les écritures, la médecine et la diplomatie du royaume Antemoro attestent le dynamisme d’une féodalité qui a perduré du XIIIe au XIXe siècle.Plus au nord, au cours du XVIIIe siècle, les rois Ramananao, Ramahasarika puis Ratsimilaho vont tenter, chacun à leur tour de mettre fin aux divisions des Betsimisarakas. Les royaumes betsimisarakas connaîtront des heures de gloire ; ils s’étendront de la baie d’Antongil jusqu’à Mananjary.Cependant, l’importance stratégique de la côte est en fait l’objet de toutes les convoi-tises. Sur cette étendue bordée par l’océan Indien, Fénérive et Toamasina sont les points de passage obligés du commerce et de la traite des esclaves, les foyers de guerres entre les Malgaches, les pirates et les négriers.

w Royaumes de l’Ouest. À partir du XVe siècle, presque toute la côte ouest est soumise à l’influence des royaumes sakalavas qui s’étendent du sud de Toliara jusqu’au nord de Mahajanga. Installés dans les centres politico-religieux du Menabe (près de Morondava) et du Boeni (près de Mahajanga), les rois sakalavas font tout pour réunir, par les alliances ou par la conquête, les chefferies et les royaumes locaux.Parmi les souverains sakalavas, il faut souligner l’influence particulière d’Andriandahifotsy qui assure sa suprématie politique par des alliances en épousant les princesses des chefferies et des royaumes locaux ; en outre, il se dote d’une force de frappe en achetant armes à feu et munitions aux trafiquants européens.L’État Sakalava, extrêmement bien structuré, est dirigé par un conseil comprenant notamment les conseillers royaux (Ranitr’ampanjaka), les ministres royaux (Manan-tany), le ministre de la Guerre et des Relations extérieures, le ministre de l’Intérieur (le Fahatelo)… La cour rassemble princes, princesses, vassaux. Le roi consulte également les anciens (Ampiasa), le devin, le médecin. Son entourage comprend un héraut, un écrivain arabe, un barde et un bouffon.Les plus lointains raids des guerriers sakalavas les mènent jusque sur la côte est où ils affrontent les Betsimisarakas. Mais les royaumes sakalavas ne sont pas seulement préoccupés de conquêtes : une administration territoriale est instaurée jusque dans les régions les plus reculées du royaume.

w Royaumes du Centre. Lorsque l’on suit les routes qui entourent Fianarantsoa, les moindres vallées apparaissent sculptées en terrasses ; on y cultive le riz. Des systèmes d’irrigation complexes portent l’eau jusqu’à la moindre parcelle. Tout ici évoque l’Asie, rappelle d’autres rizières en gradins, d’autres montagnes verdoyantes : l’Indonésie, le Viêt-Nam, les Philippines, la Chine.Les royaumes betsileos ont été fondés au début du XVIIIe siècle. Quatre grands royaumes se sont ainsi constitués, tantôt alliés tantôt hostiles : Arindrano, Lalangina, Isandra, Manandriana. Les premiers rois betsileos étaient élus par le peuple un vendredi de pleine lune, lors d’une cérémonie religieuse dédiée aux ancêtres. Ces monarques ont édifié une organisation sociale. Ainsi, le roi Andriampianarana est à l’origine d’une législation. L’administration territoriale est confiée à des nobles et à des officiers, les Mahamasinandriana. Les propriétaires de rizières sont soumis à l’impôt royal, qui est proportionnel aux récoltes. Peu à peu, le commerce se développe, les conquêtes progressent. Andrianonindranarivo, succes-seur d’Andriampianarana, organise une armée équipée de fusils. Pourtant, sa devise fait plutôt l’éloge du riz : « Il n’est de meilleure poudre pour résister à nos ennemis qu’une bonne récolte de riz. » Les deux royaumes betsileos les plus structurés, l’Isandra et le Lalangina, s’affrontent régulièrement aux XVIIe et XVIIIe siècles. Mais à la fin du XVIIIe siècle, les royaumes de Manandriana, de Lalangina et d’Isandra deviennent vassaux de l’Imerina.

Monarchie Merina : conquêtes et unitéUn autre peuple venu d’Orient va s’installer dans les Hautes Terres. Riziculteurs, métho-diques, organisés, les Merinas s’établissent à Ampandrana au XVe siècle, puis se déplacent au XVIe siècle vers Merimanjaka où va régner la reine Rangita, fondatrice de la dynastie qui suscite le rayonnement de l’Imerina, les Hautes Terres sous le soleil. Son fils, le roi Andriamanelo, organise le commerce, étend l’agriculture par l’aménagement des marais et se dote d’une armée. Ses successeurs (son fils Ralambo et son petit-fils Andrianjaka) fondent une féodalité, l’Imerina, qu’ils dotent d’une organisation sociale structurée en quatre ordres : les nobles (Andriana, grande famille du souverain), les sujets libres (Folovohitra, dont un petit groupe, les Hovas, sont les descendants des plus anciennes dynasties javanaises), les serfs (Olomahery ou Angaralahy, Mainty à partir

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HISTOIRE D

ÉCOUVERTE53

d’Andrianampoinimerina) et les sujets privés dont certains sont des esclaves (Andevo ). Ralambo unifie les clans et pose les bases d’un Etat. Son fils, Andrianjaka, établit ses armées jusqu’à Analamanga (la « Forêt bleue »).Au début du XV I I e siècle, le roi Andriamasinavalona poursuit l’extension du royaume vers l’ouest et vers l’est. Monarque absolu – il a dit : « Vous pouvez manifester votre amour aux gens, mais dans l’Etat il faut agir sans faiblesse. » – Andriamasinavalona fait édifier de grandes digues et mène à terme d’importants travaux d’irrigation pour étendre la riziculture et lutter contre la famine. Mais il partage le royaume entre ses quatre fils qui vont aussitôt s’affronter.À la même époque environ (1642), les Français créent le port de Fort Dauphin (aujourd’hui Taolagnaro) au sud ; de fait, ils rebaptisent le territoire « île Dauphine ». Des résistances armées obligent pourtant quelque 63 survivants à abandonner la Grande Île pour la Réunion (alors appelée île Bourbon), le 27 août 1674.À la fin du XVIIIe siècle, un jeune roi, Andrianampoinimerina (« le seigneur cher au cœur de l’Imerina ») (1745-1810) réunifie l’Imerina par la diplomatie, les alliances et, en dernier recours, par les opérations militaires. Les royaumes locaux d’Ambohimanga (la « Colline bleue »), d’Ambohitrabiby (la « Colline des animaux ») et d’Ambatomanga (le « Rocher bleu ») se rallient. La capitale est installée à Antananarivo. Andrianampoinimerina organise durablement l’Etat : le système féodal institué sous son règne fonctionnera pendant plus d’un siècle, jusqu’à la fin de la monarchie malgache. Souverain charismatique, il sait prendre la tête des armées en campagne et s’adresser directement à la population.La sollicitude royale semble infinie. En effet, il déclare : « Pour que vous ayez de l’eau de riz, vous mes sujets. Je donnerai de l’eau de riz aux grands et j’en donnerai aussi aux petits car je veux que chacun fasse entrer l’eau chez lui, qu’il soit petit ou qu’il soit grand. » Un droit est établi ; une administration territoriale est instituée.La terre appartient à l’Etat, dont le représen-tant suprême est le roi. La vie villageoise est autogérée par les Fokonolona, les communautés de base. Un corps de fonctionnaires est créé avec des juges, administrateurs, collecteurs du Trésor… C’est aussi le temps des conquêtes. Andrianampoinimerina installe des garnisons merinas à tous les confins du royaume. Le souverain fera cette déclaration célèbre : « Ny riaka no valamparihiko » (La mer est la limite de ma rizière)… Dès lors, les expéditions militaires se multiplient.

« Radama, mon fils, fragment de ma vie, que ne puis-je te précéder au tombeau ! Comme tu es beau ! Tu es comme un dieu venu sur terre. Je ne meurs pas, moi qui ai un tel fils ! » Andrianampoinimerina murmura ces paroles à Radama avant de mourir. Le fils, choisi pour successeur, fera tout pour réaliser le rêve du père en portant jusqu’aux océans les limites du royaume.

w Essor et développement. Près de Nosy Be, en plein canal du Mozambique, les îles Radama rappellent que ce roi conquérant y a porté ses armées. À Mahajanga, sur la côte ouest et tout le long de la côte est, des vestiges de fortins témoignent d’une politique militaire résolue. Pour réaliser le rêve de son père, Radama Ier lève en effet une armée forte de plusieurs milliers d’hommes. Les armes et les munitions sont fournies dès 1820 par l’Angleterre, qui ne voit pas l’ingérence française sur l’île d’un bon œil. Le jeune roi entreprit une diplomatie internationale très active, obtenant l’aide de la Royal Navy pour ses opérations militaires sur la côte est. D’ailleurs, l’armée merina engage des conseillers militaires étrangers (anglais et français) et se modernise rapidement. Hiérarchie, discipline, entraînement, tactique, et le résultat ne se fait pas attendre. Campagne après campagne, Radama soumet les Betsileos, les Betsimisarakas, les Sakalavas ; il porte les limites de son royaume jusqu’aux rivages de l’océan Indien et du canal du Mozambique. Partout, des garnisons contrôlent les points stratégiques, les ports, les lieux de traite et de commerce. Parallèlement aux opérations militaires, en fin diplomate, Radama (dont l’un des plus proches conseillers, un certain Robin, est un ancien soldat de la Grande Armée de Napoléon) épouse une princesse sakalava pour s’allier au roi Ramitraho. Dès 1825, la langue malgache devient langue écrite. En 1827, près de quatre mille Malgaches savent lire et écrire ; les écoles se multiplient. Sous l’impulsion de l’Etat de plus en plus structuré, le commerce international est florissant. Les échanges avec l’Europe, et en particulier, l’Angleterre, prolifèrent. La London Missionary Society est autorisée à exercer à Madagascar. Radama s’habille à l’européenne : bottes, culotte, veste à galons, épaulettes et sabre. Il se déclare anglophile : « J’aime l’Angleterre, je l’ai regardée ; je la regarde comme mon pivot. » À sa mort, le 27 juillet 1828, la presse européenne évoque l’œuvre du souverain malgache, et les envoyés spéciaux rendent compte de ses grandioses funérailles. Le peuple, pourtant, se méfie de plus en plus de cette culture « blanche » qui s’insère partout dans la société traditionnelle.

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HISTOIRE54

XIXe siècle : méfiances et convoitisesPremière épouse de Radama, Ranavalona Manjaka est désignée pour succéder au roi et prend le titre de Ranavalona Ière. Elle déclare : « Je suis la protection des épouses, la protection des enfants et aussi celle de vos biens, et quand je dis « soyez confiants », soyez-le vraiment car je suis une reine qui ne trompe pas ! » .Méfiante envers l’Europe, très nationaliste, Ranavalona Ière dénonce dès 1828 (quelques mois après la mort de Radama) les traités anglo-malgaches signés en 1817 et en 1820. Ayant expulsé vers l’île Maurice les mission-naires britanniques, elle prend ses distances avec l’Angleterre dans de nombreux domaines. Ranavalona Ière poursuit cependant la moder-nisation de l’armée, facilite le commerce, et permet à un Français avec lequel elle entretient une relation privilégiée, Jean Laborde, de créer un centre industriel à Mantasoa, ainsi que son propre palais, le Rova de Manjakamiadana. Elle déclare : « De mes coutumes, je n’ai aucune

honte ni aucune crainte. Toute sagesse, toute connaissance pouvant faire le bien de ce pays, je les accepte. Mais toucher aux coutumes de mes ancêtres serait vain car je m’y opposerai. » Entre l’Europe et Ranavalona Ière, les relations ne cesseront d’être complexes : en 1836 et en 1837, des ambassadeurs sont envoyés en Angleterre et en France. Mais la France, malgré la résistance des bastions merinas, instaure une sorte de protectorat à Nosy Be et sur les îles alentour.En 1857, le fils protégé de la reine, Rakoto, organise un complot avec le soutien d’Euro-péens influents… Le coup d’Etat est déjoué. En représailles, Ranavalona Ière fait expulser tous les étrangers, y compris son ami Jean Laborde !Après la mort de Ranavalona Manjaka, le 16 août 1861, son successeur, Radama II, s’engage dans une politique radicalement diffé-rente. Il fait revenir Jean Laborde, proclame la liberté de pensée et de culte, autorise le retour des missionnaires de toutes confessions, supprime corvées et privilèges, et engage un rapprochement avec la France. En outre, le nouveau consul promu est Jean Laborde ! Cette

La nuit colonialeLa période coloniale va durer dans la pratique jusqu’à l’Indépendance (18 juin 1960), même si l’Union française de 1946 et la « loi cadre » de 1956 stipulent une autonomie interne aux territoires d’outre-mer. Le bilan de cette période coloniale est complexe. La colonisation répondait aux besoins des puissances européennes de nourrir leur révolution industrielle, d’acquérir des matières premières à bas prix, de disposer de terres cultivables, d’ouvrir des marchés et d’établir des bases militaires. Par conséquent, les grandes compagnies françaises reçoivent en concession plus de 600 000 ha de terres cultivables. Toutes les ressources agricoles, minérales et humaines de la Grande Île sont mises au service de l’économie et des besoins de la France. La population malgache, soumise à l’impôt et au travail forcé, ne dispose d’aucun droit civique et politique. La répression des foyers de résistance est extrêmement brutale (villages rasés, chefs exécutés).Pendant que les lobbies colonialistes, ceux de la Réunion et de Maurice en particulier, poussent à la « mise en coupe » de toutes les richesses de l’île, l’administration coloniale, pour assurer son contrôle, parachève le travail commencé par les monarchies merinas, en réunissant sous une administration territoriale unique tous les peuples malgaches. Il convient de noter que de nombreux fonctionnaires locaux formés pour l’encadrement des provinces sont d’origine Merina.Durant la Première Guerre mondiale, 45 863 Malgaches s’engagent dans l’armée française. Parmi eux, le bataillon des chasseurs malgaches se distinguera par son courage en Champagne, en 1918. Le prix du sang versé ne ralentit nullement la poursuite intensive de l’exploitation : produits agricoles, viande, graphite, mica partent vers l’Europe et font la richesse des intermédiaires et des colons. Entre 1919 et 1936, la colonisation économique atteint son apogée. L’administration coloniale fonde même la SMOTIG, une société chargée d’organiser le service du travail forcé non rétribué. Y sont assujettis quelque 12 000 Malgaches qui, malgré la dénonciation du Bureau international du travail de Genève, construisent routes, ponts, voies ferrées et hôpitaux. Le gouvernement du Front populaire supprime la SMOTIG en 1937. Le 7 avril 1938, le second gouvernement Blum facilite la naturalisation des officiers et diplômés malgaches.

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politique d’ouverture ne plaît toutefois pas à tout le monde : les institutions sont fragilisées, et la fin de son règne s’achève en guerre civile. Radama II est assassiné le 11 mai 1863 sur ordre du parti traditionnel Hova. Sa première épouse lui succède sous le nom de Rasoherina.Très vite, le pouvoir est partagé entre la reine et le ou plutôt les Premiers ministres, puisque Raharo et Rainilaiarivony se succèdent à ce poste. Epoux de Rasoherina, Rainilaiarivony (un Hova), à la mort de la reine en 1868, se marie avec la seconde femme de Radama II, qui devient la reine Ranavalona II.Ranavalona II délègue l’essentiel du pouvoir au Premier ministre, qui se consacre assidûment à la modernisation de l’Etat et s’avère un prudent politicien. Un Code civil de 305 articles est rédigé, et une administration territoriale très structurée est appliquée à l’Imerina et à tous les territoires conquis, jusqu’à Mahajanga, Toamasina, Fianarantsoa. Paradoxalement, les territoires conquis sont souvent moins mis à contribution que l’Imerina pour les impôts et corvées.Sur le plan extérieur, c’est l’heure de tous les dangers : la France et l’Angleterre doivent étayer leur révolution industrielle par des conquêtes coloniales, et les richesses de Madagascar attirent leurs convoitises. Les pressions sont de plus en plus insistantes. Des accords politiques et commerciaux sont signés avec l’Angleterre en 1863, et en 1868 avec la France. Le Premier ministre supprime la traite des esclaves et accepte l’activité commerciale des Européens. Mais déjà, la France étale au grand jour ses prétentions territoriales.En 1883, la première guerre franco-malgache éclate à la suite de la mainmise française sur le Sambirano. Le Premier ministre est très déçu, car la mission de son ambassadeur à Londres en 1882 s’avère un échec. En effet, l’Angleterre refuse catégoriquement d’intervenir militairement contre la France aux côtés du gouvernement malgache.La reine meurt en juillet 1883, alors que la guerre fait rage. Le Premier ministre choisit pour lui succéder Ranavalona III, qu’il épouse. Ainsi, Rainilaiarivony aura été successivement mari et Premier ministre de trois reines !La guerre se poursuit dans tous les ports de l’Est. Elle finit par tourner au désavantage de Madagascar malgré la résistance de Toamasina devant la flotte française. Le 17 décembre 1885, le Premier ministre, pour obtenir la paix, signe un « traité » très particulier, impliquant une certaine domination. Ce traité stipule que la

France représentera Madagascar dans toutes ses relations extérieures. L’Etat malgache est contraint à souscrire un emprunt de 10 millions de francs à une banque française pour rétribuer un résident général (français) mis en poste à Antananarivo. L’impôt et le Trésor malgache s’en trouvent ruinés.

w Une guerre de trop. En 1890, tout s’accélère : l’Angleterre accepte le protectorat de la France sur Madagascar. En contrepartie, la France laisse toute liberté à l’Angleterre pour prendre possession de Zanzibar. Le Premier ministre et la reine n’acceptent pas le fait accompli. La seconde guerre franco-malgache éclate en 1894. Malgré une résistance acharnée, l’armée malgache est défaite. Le 30 septembre 1895, le corps expéditionnaire français commandé par le général Duchesne atteint Antananarivo. Le Premier ministre est déporté en exil en Algérie, d’où il ne reviendra jamais.Le traité du 1er octobre 1895 stipule que : « Le gouvernement de Sa Majesté la reine de Madagascar reconnaît le protectorat de la France avec toutes ses conséquences. » En apparence, la monarchie demeure ; dans les faits, le résident général décide de tout.Mais l’essentiel réside dans un autre article du traité qui énumère les « dispositions destinées à assurer aux nationaux français le droit d’acquérir des propriétés dans l’île de Madagascar » . Deux semaines après la signature du traité, la résis-tance des Menalambos (les « toges rouges ») commence. Elle va s’étendre en 1896 jusqu’en Imerina, Alaotra, Betsileo et Mangoro. La révolte a comme objectif le rétablissement de la reine sur le trône et l’indépendance. Le 6 août 1896, en effet, la colonisation est totale.En France, l’Assemblée nationale vote les textes déclarant « colonie française » l’île de Madagascar et « abolissant la royauté en Imerina ». Le 16 septembre 1896, le général Gallieni arrive à Antananarivo pour mater la révolution. Le 15 octobre, il fait exécuter le général Rainandriamampahandry, commandant en chef de l’armée malgache, puis le prince Ratsimamanga, oncle de la reine. En février 1897, il ordonne la déportation de Ranavalona III à La Réunion, puis en Algérie, afin d’éloigner ce symbole de la nation malgache. La monarchie est définitivement abolie. Madagascar n’a plus d’autres frontières que la mer et une diplomatie humiliante pour la Grande Île : c’est l’heure de la « politique des races » décrétée par Gallieni, de l’imposition coloniale dans tous les domaines, tant économiques que culturels et sociaux.

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Le réveil malgacheParadoxalement, alors qu’elle n’est en rien une période libre, égale et fraternelle (sauf pour les colons), la colonisation contribue en partie à l’éveil des idées de liberté. La République apporte à Madagascar ses principes fonda-teurs. Les élites malgaches récupéreront la devise « Liberté, Égalité, Fraternité » dans leur combat pour l’indépendance.Le mouvement patriotique malgache se développe assez rapidement. Malgré tout son savoir-faire militaire, le général Gallieni dut mener campagne sur campagne entre 1896 à 1905 pour assurer la « pacification » face aux multiples résistances paysannes.Pendant la Première Guerre mondiale, un mouvement patriotique secret au nom poétique de « Vy vato sakelika », « Fer, Pierre, Ramification » (le VVS), s’est montré très actif, puis a été réprimé aussitôt découvert : le pasteur Ravelojaona qui en était l’un des dirigeants est arrêté en 1916. L’opposition a ensuite pris une forme républicaine en s’exprimant dans des journaux comme Le Réveil malgache, L’Aurore malgache, L’Opinion, Le Libéré, soutenus en France par les partis de gauche.Durant la Seconde Guerre mondiale, dès que l’armée britannique et les Forces françaises libres ont déposé l’administration coloniale vichyste (les Britanniques ont débarqué à Diego-Suarez en 1942 et n’en sont partis que sur l’insistance du général de Gaulle), Madagascar apporte une importante contri-bution à l’effort de guerre pour la libération

de l’Europe. Des militaires de carrière, des soldats malgaches partent combattre les armées nazies en France, ce qui entraînera les patriotes de la Grande Île à revendiquer de nouveau l’indépendance : « Nous apportons la liberté à ceux qui nous la refusent ! » Le 29 mars 1947, le Mouvement démocra-tique de la rénovation malgache (MDRM) de Joseph Ravoahangy déclenche une insurrec-tion générale qui s’étend dans toute l’île. Le mot de passe est « vorona » (oiseau). Cette guerre de guérilla va durer 21 mois. Le bilan est lourd. On dénombre 100 000 tués. Les cadres du MDRM sont exécutés sommaire-ment ; les députés Rabemanjara, Ravoahangy et Raseta sont condamnés à mort, puis graciés et déportés en France.Pourtant, le MDRM n’avait fait qu’exiger l’appli-cation de la Constitution française de 1946, qui stipulait : « La France entend conduire des peuples dont elle a pris la charge à la liberté de s’administrer eux-mêmes » .Au cours des douze années suivantes, les révoltes n’auront plus jamais cette ampleur puisque l’aile radicale du mouvement patrio-tique a été décimée. Les députés déportés sont considérés comme des symboles de résistance. Le député-poète Jacques Félicien Rabemananjara écrit en prison O liberté. Voici un extrait de ce poème célèbre : « Vaine l’étreinte des horizons. La voûte même du ciel éclatera. Madagascar ! Je te salue. Ile ! Des confins de mes tourments, je t’adore ! Ta beauté ! Ma droite la brandit jusqu’à hauteur des astres, Madagascar ! » .

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Architecture coloniale de Tamatave

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La vie politique se structure en employant les espaces de liberté existants et en s’appuyant sur chaque réforme, comme la « loi-cadre » élaborée par Gaston Defferre, ministre socialiste de la France d’outre-mer, en 1956. Toutefois, de réforme structurelle en changement institutionnel, il faudra attendre l’impulsion radicale donnée par le général de Gaulle à la politique française (« Demain, vous serez de nouveau un Etat » , discours d’Antananarivo du 22 août 1958) pour que Madagascar retrouve son indépendance. Pour le chef de la France libre, la colonisation était un anachronisme.Le 26 juin 1960, le choix radical est scellé par une déclaration franco-malgache : « La République malgache accède en plein accord et amitié avec la République française à la souveraineté internationale et à l’indépen-dance. » .

Bilan de la colonisationLes nostalgiques du colonialisme évoquent les 25 000 km de routes, l’équipement des ports de Toamasina et d’Antsiranana, l’amé-nagement des villes, le développement des voies ferrées, l’organisation territoriale… Les Malgaches qui ont vécu à cette époque nuancent ces faits indéniables en rappelant que ces ouvrages ont été construits par des autochtones qui n’étaient pas rétribués et qui travaillaient le plus souvent sous la contrainte, voire sous les coups. Quant aux aménagements et aux infrastructures, leur seule finalité était la mise en coupe du pays et le pillage de ses matières premières pour le bénéfice des affairistes, des colons et des spéculateurs, c’est-à-dire, en définitive, de la puissance coloniale. En revanche, en ce qui concerne l’éducation et la santé, le constat est unanime : la mortalité a diminué, la population a doublé – elle est rapidement passée de 3 à 6 millions d’habitants –, et en 1958, un enfant sur deux était scolarisé.

Ire République (1960-1972)Le 14 octobre 1960, c’est l’Indépendance. Dès lors, la vie politique connaît une effervescence sans pareille. De nombreux partis se créent. Une bipolarisation s’installe entre le Parti social démocrate (PSD) et le Parti du congrès de l’indépendance (AKFM). Revenus d’exil, les députés « rebelles » de 1947 prennent une part active aux débats.Philibert Tsiranana, leader du PSD, est élu président de la République en 1960 (il

sera réélu en 1965). Les institutions sont très proches de celles de la Ve République française. La Grande Île développe immé-diatement une diplomatie active : ouverture d’ambassades dans le monde entier, consti-tution de l’Organisation de la communauté africaine et malgache (OCAM), rôle actif dans l’Organisation de l’unité africaine (OUA).Sur le plan intérieur, malgré quelques initia-tives portant sur le développement agricole et l’essor de l’industrialisation, le régime stagne. L’opposition critique cet immobilisme faisant remarquer qu’en bien des domaines, l’indépen-dance n’est que formelle, et que la politique du président Tsiranana est « néocolonialiste ». En effet, les entreprises françaises et les colons réunionnais ont conservé l’essentiel de leurs privilèges et continuent de dominer l’économie. Les transports sont de plus en plus insuffisants, l’urbanisation devient anarchique. Enfin, l’installation au pouvoir de l’Etat PSD s’est accompagnée de détournements de biens publics, de corruption et de privilèges.L’opposition se cristallise autour de l’AKFM, dirigé par le pasteur Andriamanjato, et du Mouvement national pour l’indépendance de Madagascar (MONIMA), fondé par Monja Jaona. Seule la scolarisation est à mettre à l’actif du régime. Mais cet effort soutenu va précisément contribuer à sa chute…Au début des années 1970, les étudiants contestent de plus en plus la soumission du président aux lobbies d’affaires de l’ancienne puissance coloniale. Face à un « hit-parade » venu de France et d’Amérique, ils sont des dizaines de milliers à entonner en malgache les chansons politiques du groupe Mahaleo. C’est la période où la « malgachisation », un mouvement pour l’adaptation de l’éducation aux réalités culturelles et sociales du pays, s’étend à toutes les universités malgaches.En avril 1971, la brutale répression d’une révolte lancée par le MONIMA dans la région de Toliara provoque la mobilisation des étudiants. L’université d’Antananarivo ferme en mars 1971. Grèves, manifestations, révoltes se succèdent pendant plus d’un an. Le 13 mai 1972, la police tire sur la foule. Le 27 juillet, le général Gabriel Ramanantsoa, chef d’état-major de l’armée, propose un référendum sur un programme politique pour le changement… Le 8 octobre 1972, 3 millions de « oui » (contre 102 506 de « non ») entraînent la démission du président Tsiranana. De nouvelles institutions se mettent en place. Une constitution flambant neuve est adoptée le 7 novembre 1972.

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IIe République (1972-1992)Le gouvernement du général Ramanantsoa décide de prendre des mesures radicales. En effet, début 1973, Madagascar crée sa propre Banque centrale, sa monnaie, et se retire de la zone franc. En juin 1973, la France et Madagascar signent un accord d’évacuation des armées françaises basées à Ivato et à Antseranana.Indépendance totale, fin du « néocolonia-lisme », tels sont les objectifs exprimés par l’équipe dirigeante. Les résultats économiques ne vont malheureusement pas suivre. Les prix augmentent tandis que la notion de « malga-chisation » (« être libres, indépendants et créer une renaissance malgache ») est de plus en plus populaire parmi la jeunesse. La révolution, autre mot d’ordre, mobilise étudiants, ouvriers, paysans et soldats. En 1973, les révoltes se multiplient.Le 31 décembre 1974, des policiers s’in-surgent. En 1975, Madagascar connaît une instabilité permanente. Les affrontements poli-tiques s’accentuent… Quatre chefs d’Etat se succèdent : le général Ramanantsoa (démis-sionnaire en février), le colonel Ratsimandrava (assassiné une semaine après son accession au pouvoir), le général Andriamahazo (démis en juin 1975 par le Directoire militaire qui avait alors pris le pouvoir en proclamant la loi martiale) et le capitaine Ratsiraka, président du Conseil suprême de la révolution à partir de juin.En août 1975, la charte de la révolution socia-liste malgache est élaborée à l’initiative des partis politiques proches du président. Elle proclame solennellement : « Nous n’avons qu’une seule solution : être ou périr. Nous avons choisi d’être ! Indépendants, libres, fiers en justice et paix. Coûte que coûte. » En décembre 1975, cette charte est soumise à référendum. Le « oui » l’emporte : Madagascar devient une République démocratique. Didier Ratsiraka accède à la présidence de la République le 4 juillet 1976. L’Etat contrôle désormais les banques, les assurances, les trois quarts du commerce d’import-export ; la centralisation est extrême. L’autogestion ouvrière est instituée. Les entreprises fleurons de la période coloniale sont nationalisées (La Rochefortaise, La Marseillaise, La Lyonnaise). Le territoire est réaménagé avec un retour au « Fokonolona », association communautaire antérieure à la colonisation, et au Fokontany, association de plusieurs fokonolonas. Ces

entités administratives locales décentralisées ont des pouvoirs étendus : gestion des terres, développement rural, santé, sécurité… Les terres reprises aux grandes sociétés fran-çaises sont distribuées à 17 000 familles.La lutte contre l’analphabétisme est intense, les étudiants et l’armée sont mis à contribu-tion. Sur le plan international, Madagascar prend ses distances vis-à-vis de la France et entreprend une diplomatie très diversifiée : ouverture vers l’Asie (Indonésie, Inde, Japon), échanges avec les Etats-Unis, mobilisation pour l’Unité africaine, accords de coopération avec l’URSS, la Chine et la Corée du Nord. Les dirigeants ont l’ambition de « donner à Madagascar une voix qui s’entende dans le concert des nations » (selon leurs termes). Cette voix s’exprimera notamment contre l’apartheid et pour la libération de Nelson Mandela. La langue malgache, parlée dans tout le pays depuis deux mille ans, est remise à l’honneur dans le système éducatif et redevient langue officielle après sept décennies de répression linguistique. Enfin, les revendi-cations de « malgachisation » sont prises en compte. L’Etat investit dans les infrastructures, la santé, l’industrie.Mais, parallèlement, la démocratie régresse. Au sein de l’Assemblée nationale populaire élue en 1977, et au terme d’un scrutin contesté, l’Arema (Avant-garde de la révolu-tion malgache, le parti du président) obtient 81 % des sièges contre 11 % à l’AKFM et 8 % à des petites formations. Le gouvernement est organisé dans les mêmes proportions. L’« Etat Arema » s’installe comme l’avait fait l’« Etat PSD » durant les années 1960. La liberté de presse est de plus en plus réduite. La corruption revient au galop, les promesses de justice sociale et d’égalité sont vite oubliées. En outre, l’économie subit les contrecoups du choc pétrolier et ceux de l’effondrement du cours des matières premières. Malgré les réformes adoptées à la fin des années 1980, la crise économique mondiale achève de déstabiliser l’économie de la Grande Île. La pauvreté s’étend. La déception de la popula-tion est à la mesure des espoirs des années 1970. Ratsiraka est pourtant réélu en 1982 et 1989 sans opposition.En 1990, un Conseil national des forces vives se crée à l’initiative des principaux partis d’opposition et d’anciens alliés du président Ratsiraka. C’est le début d’une réflexion sur le « devenir de la nation ». En 1991, le

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mouvement pour le changement s’amplifie. Le jour de la fête du Travail, de grandes mani-festations ont lieu à Antananarivo et dans plusieurs villes de province. L’affrontement entre l’opposition qui demande une conférence nationale et le président qui la refuse prend une nouvelle dimension ; le 8 juillet, une grève générale illimitée se propage avec une participation massive. Les grévistes exigent le départ du président et un changement de la Constitution. La grève dure jusqu’en janvier 1992. Le 10 août, une marche pacifique d’un demi-million de personnes vers le palais prési-dentiel tourne au drame. On relève 50 corps.Une période confuse s’ensuit, au cours de laquelle des politiciens en mal de pouvoir tentent de faire éclater l’unité du pays en proclamant des « Etats fédérés » dans cinq régions. Ces Etats fédérés imaginaires ont, fort heureusement pour Madagascar, connu un destin éphémère !Le 19 août, face à la mobilisation populaire, le président accepte la création d’un gouverne-ment de consensus et de transition.

IIIe République (1992-1997)Le 19 août 1992, une nouvelle Constitution est adoptée et, avec elle, la IIIe République. Fondée sur le pluralisme politique et la démo-cratie, elle équilibre les pouvoirs entre un président élu au suffrage universel et une Assemblée nationale souveraine.Le 25 novembre, après le premier tour des élections présidentielles, le professeur Albert Zafy, l’un des leaders du soulève-ment populaire de 1991, arrive en tête. Le 16 août, les élections législatives donnent une majorité parlementaire confuse mais favorable au président Zafy.Sur le plan économique, le gouvernement suit les conseils du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale : désengagement de l’Etat, économie mixte laissant une part importante à l’initiative privée, réforme monétaire destinée à favoriser les investis-sements et à rendre à terme le franc malgache convertible. Cette réforme très contestée, entreprise début 1994 entraîne un « flotte-ment » du franc malgache, qui perd de sa valeur, laissant dans l’inquiétude autant les opérateurs économiques que la population.Pendant le même temps, les tensions entre le président Zafy et le Premier ministre Ravony éclatent au grand jour. Cette confronta-tion atteint son paroxysme avec la motion

de censure déposée par les partisans du président et rejetée par l’Assemblée nationale. Estimant ne pas avoir dit son dernier mot, le président Zafy soumet à référendum, le 17 septembre 1995, une modification consti-tutionnelle déléguant au président (et non plus à l’Assemblée nationale) le pouvoir de nommer et de révoquer le Premier ministre. Le « oui » l’emporte, le régime se présidentialise. Désormais le président et le gouvernement sont en principe unis, face à une Assemblée nationale où s’est recomposée une majorité qui leur est hostile.Dans le même temps, la majorité de la popu-lation, qui voit les difficultés s’accentuer, est irritée par les débats politiciens. Dans les villages (85 % des Malgaches tirent alors leurs ressources de la terre), les universités, les quartiers pauvres des villes, la population est lasse des routes défoncées, de la hausse des prix, de l’absence de protection sociale, de la corruption.Entre 1993 et 1997, l’Assemblée mène une guérilla systématique contre le président et les six gouvernements qui se succèdent. Parallèlement, l’inflation s’accroît dans des proportions jamais atteintes, le franc malgache « coulant » alors qu’il était supposé « flotter » selon la stratégie monétaire ultra-libérale adoptée.La classe politique s’enfonce dans des affaires. La corruption et les détournements de fonds publics se poursuivent. Au bout du compte, en cinq années, « l’homme au chapeau de paille » et les fondateurs de la IIIe République auront apporté au peuple malgache une déception à la mesure des espoirs et des rêves que portaient les mouve-ments populaires de 1991. Une petite élite s’enrichit, tandis que le peuple s’appauvrit encore plus.Au cours du second semestre 1996, la fin de règne est consommée, l’Assemblée nationale ayant voté l’empêchement (desti-tution) du président Zafy et provoqué des élections présidentielles anticipées. L’ancien président Ratsiraka est candidat. A son retour, il s’exclame : « Ce sont les mêmes qui deman-daient mon départ en 1991 qui appellent à mon retour ! » Au premier tour des élections, sous contrôle international, Ratsiraka arrive en tête avec 33 % des suffrages, puis est élu au second tour devant le président Zafy, tandis que le taux d’abstention battait tous les records de l’histoire du pays.

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La République humaniste écologique (1997-2001)Plus de vingt ans après la Charte de la révolution socialiste malgache, Ratsiraka persiste et signe, en proposant un projet de société inédit : la République humaniste écologique, selon laquelle l’économie doit être au service du développement social, en respectant l’environnement et la nature tout en résorbant la pauvreté et en préservant les systèmes de solidarité qui font le tissu de la société malgache. Qui ne souscrirait pas à un tel programme ?Cependant, entre le projet de société et sa réalisation, il y a une marge. En matière économique et sociale, la valeur de la monnaie resta stable (la chute libre fut stoppée) et l’inflation jugulée : la croissance était, pour la première fois depuis longtemps, supérieure à la poussée démographique. L’axe essentiel de la diplomatie malgache se tourna désormais vers l’Afrique du Sud où Ratsiraka s’était rendu à l’invitation de Nelson Mandela en vue de poser les bases d’une coopération régionale.En matière institutionnelle, des réformes furent engagées : le 15 mars 1998, un réfé-rendum adoptait des modifications constitu-tionnelles, dont une décentralisation accrue des pouvoirs politiques et économiques, afin de susciter une profonde régionalisa-tion des pôles de décision et de rapprocher les lieux de pouvoir des quartiers et des villages.Le référendum constitutionnel fut suivi d’élec-tions législatives.Une majorité de type « gauche plurielle vert-rose-rouge » sortit des urnes, face à une opposition très divisée et laminée par les terribles conséquences sociales (une paupérisation sans précédent) de la politique économique ultra-libérale menée de 1993 à 1997. Les élections communales de 1999 et les élections régionales de 2000 ne firent que confirmer la bonne forme de « l’équipe » Ratsiraka.Les indicateurs économiques étaient alors au beau fixe, le président pouvait s’enorgueillir d’une croissance du PIB sans égale aupa-ravant, la confiance des bailleurs de fonds revenait, le tourisme se développait rapide-ment : tout portait à croire que Madagascar était sortie d’une longue période de troubles et d’incertitudes pour entrer de plain-pied dans l’ère « moderne ».

Le 26 juin 2001, malgré ses discours précé-dents, où il affirmait ne briguer qu’un seul mandat, Ratsiraka annonça qu’il comptait bien s’assurer du bénéfice de la politique menée depuis près de cinq ans et donc qu’il se représenterait aux prochaines élections. Peu à peu, le vieux briscard entreprit de distribuer des millions de francs malgaches à tout va, ses qualités oratoires indéniables monopolisèrent l’espace public médiatique, il élit de nouveaux gouverneurs dans les six provinces et il changea même quelques juges à la Haute Cour constitutionnelle, histoire que rien ne puisse venir obstruer un nouveau sacre.Mais la Grande Île n’est pas une île comme les autres. Madagascar a ses raisons que la raison ne connaît pas.

La crise politique de 2002L’alternance démocratique à Madagascar n’est définitivement pas une chose acquise. La course à la présidentielle en 2001 opposa farouchement Ratsiraka au nouveau maire de Tana, Marc Ravolamanana. Cet homme, tout à fait inconnu à l’étranger, ne semblait pas a priori devoir poser problème à Ratsiraka : mais ce dernier est un « côtier », tandis que le maire est un Merina, qui en a terminé avec les habituels complexes de conscience de la tribu des Hautes Terres (elle gouverne en effet le pays depuis des siècles).C’est également un homme d’affaires, patron du groupe Tiko (produits laitiers), un battant, qui sait de quoi il parle. Jeune loup aux dents longues, Ravalomanana ne possède peut-être pas la gouaille de son adversaire, mais il a pour lui l’indéfinissable pouvoir de séduction que donne l’autorité économique et culturelle. En fait, cette campagne électorale ne fut rien d’autre qu’un duel entre deux hommes charismatiques éludant tout vrai projet de société, matraquant la population à coup de subventions monstrueuses et de promesses démentielles. Quand le show remplace les idées…La proclamation le 25 janvier 2002 par la Haute Cour constitutionnelle des résultats du premier tour (40 % pour Ratsiraka, 46 % pour Ravalomanana), contestés aussitôt par Ravalomanana (prétendant avoir déjà gagné) qui s’autoproclama président le 22 février avant d’être investi officiellement le 6 mai, entrainèrent des manifestations

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quotidiennes sur l’Avenue de l’Indépendance à Tana, rassemblant chaque fois près de 500 000 personnes, dans le calme le plus absolu.Ce furent six mois de disette économique (barrages partout, ponts sautés, pénurie de carburant, plus de vols aériens), de querelles politico-politiciennes, de tractations à Dakar (nouveau décompte par la Haute Cour donnant Ravalomanana gagnant dès le 1er tour, le 29 avril) d’incongruités loufoques et pathé-tiques (Mada eut deux présidents pendant quelques semaines, et la Communauté inter-nationale comme l’OUA ne reconnurent le nouveau président que très tardivement, à partir de fin juin), de conflits avec les bailleurs de fonds et la France. Cela dit, hormis quelques échauffourées ou règlements de compte, la crise de 2002 fut finalement bien pacifique, quoique cruelle dans sa durée. Il ne s’agit aucunement d’une guerre civile comme dans d’autres pays africains, ni d’un conflit ethnique ou religieux.

Ravalomanana au pouvoirCette crise permit de se poser quelques questions essentielles sur la « politique africaine », entendue par les puissances occidentales. L’OUA a montré ses limites, en ne s’avérant qu’un club pour « vieux dicta-teurs » grisonnants. Les nombreux imbroglios tant juridiques que politiques ont mis en lumière les intérêts financiers des pays du Nord, tandis que les pays du Sud ont paru condamnés à être « reconnus » par leurs pairs de l’hémisphère opulent pour prétendre exister.Parallèlement, les Malgaches ont donné une bonne leçon de démocratie et de philosophie à tous les apôtres des révolutions sanguinaires ou autres révoltes terroristes.Dès le début, le gouvernement entreprit de grands chantiers pour moderniser le pays : dans le domaine de la santé, l’éducation, la lutte contre la corruption, et la réhabilitation du réseau routier, l’un des principaux facteurs d’enclavement de régions misérables dans le pays. Les bailleurs de fonds revinrent et aidèrent au développement économique et social du pays. Le tourisme connut un essor sans précédent.Cependant, tout ne fut pas rose pour les Malgaches : dévaluation terrible du franc malgache avec le passage à l’ariary (et même à l’euro pour certains hôtels !), augmentation

du prix du riz (denrée de base de l’alimentation malgache), crise énergétique (électricité défaillante notamment)…Et peu à peu la personnalité même du président commença à faire grincer des dents : comme ses propos un jour à Nosy Be : « Mes ordres ne sauraient attendre un quelconque aval du Sénat ou de l’Assem-blée nationale. » D’aucuns appellaient le président « Mégalomanana », raillant l’oppor-tunisme de ce chef d’entreprise dynamique et intraitable.Marc Ravolomanana rempile pour un nouveau mandat lors des élections présidentielles de 2006, malgré des décisions de plus en plus controversées, dont l’expulsion sans préavis de journalistes ou d’hommes d’église francophones.Le 4 avril 2007, les électeurs malgaches furent appelés aux urnes, afin d’approuver ou non un nouveau changement de constitution. Les changements apportés sont nombreux : suppression du terme « état laïc », suppres-sion des six provinces autonomes au profit des vingt-deux régions, renforcement des pouvoirs du président qui peut légiférer comme bon lui semble en cas d’urgence… et institution de l’anglais comme troisième langue officielle ! L’intitulé de la question laisse songeur : « Acceptez-vous ce projet de révision de la Constitution pour le développe-ment rapide et durable de chaque région, afin d’améliorer le niveau de vie des Malgaches ? » … Plutôt tendancieux ! Le « oui » finit par l’emporter avec 75 % des suffrages… pour un taux de participation inférieur à 50 %.Le conseil des Ministres réuni le 24 juillet décida par décret la dissolution de l’Assemblée nationale. La Haute Cour Constitutionnelle (HCC) consultée donna son aval à cette décision du pouvoir exécutif. D’après les observateurs, cette dissolution contredit les articles 155 et 157 de la Constitution amendée qui stipulent que le président et l’Assemblée doivent rester en fonction jusqu’à la fin de leur mandat (soit en 2008 pour les députés).Ce nouveau coup de théâtre raviva le spectre d’une main mise absolue du chef de l’Etat, qui entendrait gouverner seul le pays à coups d’ordonnances. Ravalomanana s’était aussi emparé peu à peu de la plupart des grandes entreprises locales performantes (Savonnerie tropicale, Société Le Quartz…). Un peu trop gourmand sans doute… comme la suite allait le montrer.

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HISTOIRE62

La crise de 2009Vous entendrez sûrement les résidents réciter un bon mot attribué à De Gaulle (« Madagascar est un pays d’avenir, et qui le restera »). Il semble-rait que le général n’ait jamais rien dit de tel ; en vérité, il s’agit d’une variante de la célèbre phrase de Clémenceau : « Le Brésil est un pays d’avenir et qui le restera longtemps » . Mais peu importe qu’elle soit fondée ou non, cette sentence traduit une terrible réalité à laquelle Mada est sans cesse confrontée. Un pas en avant, deux pas en arrière !Dès le mois d’août 2008, la tension grandit entre le président et le nouveau maire de Tana, Andry Rajoelina, un jeunot (à peine 34 ans), surnommé TGV en raison de sa fulgurante ascension politique. Rajoelina a racheté une radio privée (VIVA) et dénoncé peu à peu les actes du TIM, le parti de Ravalo. Le 13 décembre 2008, VIVA diffuse une interview de Ratsiraka (en exil en France) ; en représailles, le président fait fermer la radio. Rajoelina s’insurge et demande à ses partisans de prendre la rue : ce qui est fait, le 17 janvier 2009. Par la même occasion, il dénonce un accord opaque signé par Ravalomanana en juillet 2008 avec la Corée du Sud (licence d’exploitation pour 1,3 million d’hec-tares de terres arables !). Peu à peu les manifes-tations s’amplifient, des pillages, des saccages sèment le trouble à Tana. Ce « mouvement orange » paralyse l’activité économique du pays, tandis que Rajoelina s’autoproclame « en charge » de la République de Madagascar le 31 janvier.

Le 7 février, c’est le drame : une manifestation devant le palais d’Etat est réprimée dans le sang, tuant 28 personnes et en blessant 212 autres. Rajoelina est destitué de son poste de maire et se réfugie dans une résidence diplomatique (l’Ambassade de France, paraît-il) sous la protec-tion de l’ONU. Le 16 mars, le palais d’Etat est occupé par l’armée qui a décidé de se mutiner et de suivre Rajoelina ; le lendemain, Ravalomanana démissionne et s’exile au Swaziland. Le directoire militaire, dirigé par le vice-amiral Ramaroson, cède le pouvoir à Rajoelina qui prête serment le 21 mars et devient président de la Haute Autorité de Transition (HAT). Des manifestations pro ou anti-TGV ne font qu’accroître le sentiment d’insécurité. Des référendums et des élections sont prévus mais sans cesse reportées. Des trac-tations diplomatiques sont engagées pour pallier la crise, mais sans succès. Plus tard, Ravalomana revient sur sa démission et nomme un Premier ministre « légal ». La communauté internationale reste divisée sur ce « coup d’Etat » des civils et des militaires conjointement. Tous les bailleurs de fonds s’éloignent, les aides internationales sont mises en attente. Le tourisme est en berne. Les actes de vandalisme (bombes artisanales, etc.) se multiplient. Et Madagascar s’enfonce une nouvelle fois dans la crise…Aujourd’hui, il est possible de voyager à Mada sans trop de problème : la situation est beaucoup plus calme en province qu’à Tana. D’ailleurs, en brousse, la plupart des Malgaches n’étaient même pas informés de ce qui se passait.Le référendum du 17 novembre 2010, visant à l’établissement d’une nouvelle constitution, a vu le « oui » l’emporter largement, mais le taux d’abstention (notamment dans la capitale) était très élevé. Pendant quatre ans, de déclarations d’intentions en sommets politiques superflus (à Maputo, Gaborone, Sandton...), rien n’a vraiment bougé au pays des lémuriens.Madagascar semble bel et bien dans une impasse politique, qui se traduit par un marasme écono-mique et un délitement de la société de plus en plus patent, d’où une insécurité grandissante dans les grandes villes et un appauvrissement inquiétant de la population (79 % la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté en 2012, contre 68 % en 2005 – soit avec moins de 1,25 US$ par jour).Fin 2013, des éléctions présidentielles étaient toutefois prévues, après avoir été deux fois repoussées en raison d’atermoiements poli-tiques de tous bords. Et la question se pose pour tous : à quelle sauce Madagascar va-t-elle être mangée en 2014 ?

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Détail d’un tombeau mahafaly

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DÉCOUVERTE

POLITIQUELa IIIe République instaurée par la Constitution du 19 août 1992 est de type présidentiel et plura-liste. Le président est élu pour une période cinq ans, il nomme un Premier ministre investi par une Assemblée populaire composée de 137 députés élus (à la représentation proportionnelle) pour cinq ans, et qui partage le pouvoir législatif avec un Sénat (système bicaméral). Les sénateurs sont élus pour quatre ans au suffrage indirect (2/3 par les élus des collectivités territoriales, 1/3 par des corps constitués, nommés par le président de la République lui-même). Le pouvoir judiciaire est indépendant (au moins officiellement) : il est séparé entre la Cour constitutionnelle et la Cour suprême.

Structure étatiqueMadagascar était composée de six Faritany (provinces) : Antananarivo, Antsiranana, Fianarantsoa, Mahajanga, Toamasina et Toliara. Celles-ci ont été remplacées par vingt-deux régions en avril 2007.Le Fokonolona est l’institution fondamentale du pays, elle représente « l’assemblée du peuple ». C’est une instance de proximité, présente dans les quartiers et les villages, une assemblée réellement démocratique à laquelle participe toute la population qui en élit directement les membres du conseil, et le président. Dans la vie quotidienne, il est bien plus présent que l’Etat, le Fanjaka, qui semble inaccessible.Pour les voyageurs futés, la visite au Fokonolona, formalité d’usage, facilite les échanges avec la population. Lorsque l’on visite un village, le président du Fokonolona apporte volontiers son soutien aux visiteurs.

Ainsi, ceux-ci sont vite familiarisés avec les légendes et la tradition orale. En pareil cas, selon les règles de la courtoisie et un protocole non écrit, les visiteurs doivent offrir à l’assem-blée un « fomba-gasy », acte cérémoniel durant lequel on partage le rhum rouge de Madagascar (et boissons non alcoolisées pour les dames) et quelques menus aliments. Les premiers servis seront alors les ancêtres, pour qui l’on versera un peu d’alcool sur le sol, à l’angle cardinal sacré (Nord-Est).Les Fokonolonas sont des institutions très anciennes : leur origine remonte antérieu-rement au XVe siècle. En Imerina, le roi Andrianampoinimerina en fit la base de l’administration du royaume de Madagascar à la fin du XVIIIe siècle.Après le Fokonolona, l’unité territoriale de base est le Fokontany, qui représente plusieurs villages. Les Fokontanys sont regroupés en Firaisanas qui sont eux-mêmes regroupés en Fivondronanas. Ces institutions décentralisées ont été mises en œuvre à partir du début de la IIe République, en 1975.

Enjeux actuelsLe référendum du 17 novembre 2010 prévoit l’établissement d’une nouvelle constitution... Affaire à suivre. Mais pour l’heure, l’enjeu majeur de Madagascar est de constituer un gouvernement reconnu par la Communauté Internationale, afin d’asseoir une autorité civile, politique et économique sur le pays, et d’attirer de nouveau les bailleurs de fonds... Les éléctions prévues pour fin 2013 vont-elles déboucher sur une situation stable et enfin bénéfique pour le pays tout entier ?

Politique et économie

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ÉCONOMIEMadagascar est un pays en voie de développe-ment. Essentiellement rural, son premier souci est d’assurer son autosuffisance alimentaire ; cette nécessité implique une certaine dépen-dance au niveau des équipements et des biens de consommation, comme un ajustement (souvent douloureux) aux fluctuations des prix des produits agricoles exportés (café, vanille, clous de girofle). La pauvreté est une évidence quotidienne, voire la pénurie et même la famine.Sept Malgaches sur dix qui vivent en milieu rural ont toujours les mêmes besoins : nourrir sa famille, avoir accès à l’eau potable, aux soins de santé primaire, scolariser ses enfants, reboiser les régions limitrophes des villages, ou améliorer la distribution et la vente de leurs produits.Dans le pays tout entier, les ruraux n’at-tendent rien du Fanjaka, de l’Etat, de la classe politique, ni des « opérateurs écono-miques ». D’ailleurs, ils ne leur demandent rien, sauf lorsque ceux-ci viennent solli-citer leurs suffrages avec force promesses lors des campagnes électorales. Travaillant

opiniâtrement avec constance et produisant l’essentiel des richesses du pays, paysans, éleveurs de zébus, pêcheurs, travailleurs de l’économie dite « informelle » des villes comptent d’abord sur eux-mêmes, s’appuyant sur l’éthique du fihavanana, sur la solida-rité familiale et sur l’entraide villageoise. Ils assument une production constante, qui n’est que peu valorisée dans les indicateurs du FMI ; pourtant, elle permet au pays d’assurer son autosuffisance alimentaire et d’affronter cyclones, crises politiques et fluctuations macroéconomiques. Or paradoxalement, ces Malgaches, sociologiquement les plus nombreux, ne sont presque pas représentés politiquement au-delà de l’échelon local du Fokonolona, et sont considérés avec distance par les nouvelles classes urbaines qui béné-ficient de l’embellie économique.Mais, la radio et ce lieu de forum interré-gional exceptionnel qu’est le taxi-brousse (les Malgaches voyagent énormément pour voir leur famille, commercer, se rendre à une cérémonie, présenter un nouveau-né, etc.) ont permis aux villageois de suivre les débats

Le nom des villesNombre de journalistes, de coopérants, et de visiteurs français appellent encore la plupart des grandes villes de Madagascar par leur dénomination coloniale, alors que le pays est indépendant depuis plus de 50 ans ; en outre, avant 1895 (l’invasion coloniale), les villes et lieux avaient des noms malgaches.Pour des raisons pratiques, nous avons désigné chaque ville par leur nom communément admis dans la communauté touristique (bien souvent le nom français), suivi de leur nom officiel. Le voyageur retrouvera en effet ces noms officiels malgaches partout, sur les indicateurs des transports et, a fortiori, sur les panneaux à la gare des taxis-brousse, à la poste, à la banque, à l’entrée des villes...On remarquera également sur les cartes ou dans les guides des variantes orthographiques des noms des villes. Tolanaro est parfois écrit Tolagnaro, et Toliara écrit Toliary… Nous avons adopté la transcription la plus en usage.

w Nom officiel > Nom français.

w Antananarivo > Tananarive.

w Antsiranana > Diego-Suarez.

w Iharana > Vohemar.

w Mahajanga > Majunga.

w Nosy Boraha > Sainte-Marie.

w Toamasina > Tamatave.

w Taolagnaro > Fort-Dauphin.

w Toliara > Tuléar.

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ÉCOUVERTE65

électoraux année après année. Impuissants devant le jeu d’influences et les tours de passe-passe financiers, ils essaient tant bien que mal de survivre et de continuer à chérir les ancêtres – en un temps où il est de plus en plus difficile de préserver son identité (ouverte sur l’autre), et de la revendiquer.

Principales ressourcesLe secteur primaire, dominé par l’agricul-ture, occupe 80 % de la population active de Madagascar en 2012 et représente 20% des exportations (crevetticulture et pêche surtout, riz, fruits tropicaux, cacao, café, sisal…) et près de 30 % du PIB. Plus de 9 millions d’hectares de terres vierges fertiles restent inutilisées : on ne cultive que 3,3 millions d’hectares en tout !Le secteur secondaire occupe 50 % des exportations et 16 % du PIB en 2012. Les activités exportatrices créatrices d’emplois ont poursuivi leur croissance : secteur minier surtout, industrie textile (l’un des moteurs de l’économie malgache)…Le secteur tertiaire se porte bien (seulement 16 % des emplois mais 55 % du PIB), surtout pour le BTP et les infrastructures (fin des travaux de construction des projets miniers de QMM et Sherritt cependant, mais l’exploi-tation des hydrocarbures devrait commencer). Suivent les télécoms et le transport.

Le secteur primaireLa Grande Ile est un pays agricole. La terre occupe huit Malgaches sur dix. Agriculture familiale, coopératives, grandes exploita-tions, sociétés publiques, mixtes ou privées...

A Madagascar, les modes de production sont multiples, mais ce secteur important est à la merci des catastrophes naturelles récurrentes, comme la sécheresse, les invasions de criquets ou les cyclones. Les principaux produits sont le paddy et le manioc en cultures vivrières ; le café, les clous de girofle, les litchis et la vanille comme produits agricoles d’exportation ; la canne à sucre et le coton comme produits industriels d’exportation.Mais d’abord, il y a le riz (près de 60 % des terres cultivées, soit environ 1,2 million d’hectares sur une quinzaine de bassins de production). En effet, Madagascar est le pays où l’on en consomme le plus au monde. Un repas sans riz est inconcevable, et chaque Malgache en mange presque un demi-kilo par jour. Le riz malgache est essentielle-ment destiné à la consommation nationale. Durant les années de crise, Madagascar a dû en importer. Dans ces conditions, toute surface qui s’y prête est transformée en rizière. En Imerina, chaque vallée est plantée de riz... qui pousse jusqu’à l’intérieur de la capitale ! Vers le sud, sur la route d’Antsirabe et de Fianarantsoa, le regard découvre des collines sculptées en terrasses, des systèmes d’irrigation très complexes (semblables à ceux des Philippines). Plus au nord, au-delà d’Ambatondrazaka, tout autour du lac Alaotra, se profilent rizières à l’infini. Cette région est appelée le « grenier » de Madagascar. Le long des côtes du versant est, Manakara abrite un centre de recherches expérimentales sur les semences où viennent travailler des chercheurs du monde entier. Le riz rouge de Madagascar est en effet fort célèbre...

Une histoire de pierresPartout, le long des pistes du bush et des savanes et dans les profondeurs des forêts, paysans et prospecteurs proposent au voyageur rubis, émeraudes, saphirs... Cet achat a tout le parfum de l’aventure, mais il est assez aléatoire si l’on n’est pas un fin connaisseur.Un parcours de pierre en pierre peut être un passionnant fil conducteur de voyage. Pour vous aider, l’Institut géographique national malgache (FTM) propose une carte du pays avec les formations du sous-sol.Voici quelques repères pour un tel itinéraire :

w Rubis : de Betioky à Ejeda.

w Cristaux : région de Fianarantsoa.

w Saphirs : Amboasary, Antsiranana, Ilakaka.

w Or : Maevatanana, Ejeda.

w Emeraudes : Toliara et Mananjary.

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Mais si le riz à Madagascar est cultivé traditionnellement en marais (hôraka ), il est également synonyme d’agriculture sur brûlis dans les régions forestières de la côte est. Ici la forêt disparaît lorsque naît la rizière, en terrasses et en plaine (tanimbary ).Il faut aussi savoir que les parcelles sont de très petites tailles (0,87 hectare en moyenne), et que les rendements moyens sont bien bas : en effet, le Système de riziculture intensif, qui permet de quadrupler le rendement, d’économiser 80 % des semences et de réduire de 30 % la consommation d’eau, n’est pratiqué que sur à peine 105 000 hectares ! Pourtant, là où ce système a été mis en place, les paysans gagnent bien mieux leur vie...Le manioc et la patate douce, mais aussi la pomme de terre et les fruits contribuent à la variété des repas.Madagascar est le premier producteur mondial de vanille. Un parcours dans la région de Sambava permet de mesurer les efforts nécessaires pour aboutir à ce record avec une plante qui nécessite un travail manuel long et précis.Un parfum un peu lourd, obsédant, flotte dans les alentours du port de Toamasina : Madagascar est le second producteur mondial de girofle. Au nord de Toamasina, vers Fénérive, la côte est bordée de caféiers.Au nord de Taolagnaro, les champs de sisal s’étendent à perte de vue.Au sud de Betioky, les arachides sont au cœur de l’activité villageoise. Ailleurs, c’est le coton, la canne à sucre, le pois du Cap, les épices...

A Madagascar, on trouvera des millions de zébus. Les pistes de l’Ouest et du Sud, régulièrement encombrées d’immenses troupeaux, donnent un petit aperçu de cet héritage insulaire : l’île compterait plus de 15 millions de têtes. Leur élevage constitue une richesse nationale. En effet, les zébus de Madagascar se retrouvent sous cellophane, en tranches, dans les supermarchés de l’Union européenne et d’Afrique du Sud.Porcs, chèvres et moutons sont également nombreux. L’élevage est adapté aux climats et aux sols. Quant aux poulets, ils sont partout, même au cœur des villes !La pêche représente une importante source de devises. La langouste de Madagascar est la vedette principale, mais le thon, les crevettes et les crabes s’exportent très bien aussi.

Le secteur secondaireDéjà au cours des siècles passés, le roi du Siam et la Compagnie des Indes venaient acheter or et pierres précieuses sur la Grande Ile. Flacourt et Grandidier en établirent des nomenclatures. A l’époque du royaume de Madagascar, au XIXe siècle, la terre était propriété de la nation. L’extraction de l’or et des gemmes donnait lieu à de grandes cérémonies avec spectacles de hira gasy et kabary.Le sous-sol malgache recèle de nombreux gisements inexploités. On y trouve or, rubis, saphirs, émeraudes, cristaux, améthystes, aigues-marines… et même des diamants selon les dernières études.Le secteur secondaire représente environ 15 % du PIB en 2012.

Silence et volupté dans la baie de Moromba, côte nord-ouest.

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w L’exploitation minière est l’un des axes de développement industriel envisagés par les autorités. En fait, la plupart des industries concernent les produits agricoles : rizeries, féculeries, huileries, sucreries en témoignent. D’autres sont destinées à la filature, au tissage (coton ou sisal), à la confection… Des industries extractives exportent graphite, mica, grenat et chromite d’Andriamena, tandis que la raffinerie de Toamasina, en transformant le pétrole importé, couvre les besoins intérieurs du pays.Les projets miniers d’ilménite à Fort Dauphin et de nickel et cobalt à Tamatave sont les deux plus importants des 20 dernières années. D’autres projets sont en cours : huile lourde de Tsimiroro (gisement de pétrole détenu par Madagascar Oil, production prévue de 150 000 barils par jour, début d’exploitation prévue pour 2019), pétrole de Bezaha (Pétromad, réserve chiffrée à 1 milliard de barrils), charbon de Sakoa (réserve de 3 milliards de tonnes), ilménite de Ranobe (gisement de 710 millions de tonnes, projet d’extraire 400 000 tonnes par an, production prévue fin 2015 pour 20 à 30 ans), fer de Soalala (détenu par société chinoise Wisco, 3e producteur de fer en Chine, réserve prouvée de 690 000 000 tonnes mais permis actuelle-ment suspendu en raison de non-conformité aux engagements pris).

Les secteurs dominantsLes activités exportatrices principales tournent ainsi autour de plusieurs secteurs : textile-habillement, aquaculture, pêche, tourisme, litchis, vanille et café. L’industrie textile est très dynamique, elle a produit près d’un tiers du PIB industriel et 30 % des exportations en 2012.

Les secteurs en devenirLe développement durable de Madagascar passe par son agriculture, ses mines et le tourisme. Le désenclavement de certaines régions par la construction de routes et pistes rurales ont favorisé une croissance prometteuse du secteur agricole, malgré la fermeture de certaines unités d’aquacul-ture. De nouveaux barrages et des réseaux hydro-agricoles bénéficient d’importants fonds octroyés par des bailleurs plus sereins. Toutefois, le travail à faire est encore immense.Le potentiel minier est important : gemmes, minerais industriels, métaux rares… Mais ce secteur pèche actuellement par l’absence de cadre réglementaire et d’autorité publique régulatrice : on assiste ainsi à la fois à une

sous-exploitation et à une mauvaise exploi-tation. Depuis les négociations du projet Ilménite à Fort Dauphin, un code minier est entré en vigueur. Quant aux secteurs des pierres et métaux précieux, il est aussi en passe d’être réglementé, notamment avec l’arrivée de consortiums sud-africains. Jusqu’à aujourd’hui, il est resté trop informel et n’a pas vraiment contribué au développement durable du pays. Enfin, dans le Sud du canal du Mozambique, des gisements de pétrole attisent les convoitises. Des forages d’ex-ploitations sont en projet à l’horizon, pour 2013/2014 dit-on.

Place du tourismeMadagascar pourrait être une destination majeure du tourisme international, tout le monde en est bien conscient. Elle bénéficie d’une nature superbe et de ressources permet-tant les formules les plus diverses : tourisme culturel, sportif, de loisirs, de découverte, ou encore d’« aventure ».Ce secteur fut l’un des plus dynamiques entre la crise de 2002 et celle de 2009. L’année 2009 a marqué une chute brutale du nombre d’arrivées, et depuis, si le nombre de visiteurs a augmenté, l’année 2012 a vu une arrivée d’environ 275 000 touristes non-résidents, soit environ le même chiffre que 2005, et bien moins qu’en 2008, année faste avec 375 000 arrivées environ (chiffres officiels, que d’aucuns contestent allègrement). L’ensemble des parcs nationaux a accueilli environ 158 000 voyageurs en 2012, le même chiffre qu’en 2011. L’année 2013 ne s’annonce pas très bonne, avec une chute claire et nette du nombre d’arrivées aux fron-tières et une baisse de la fréquentation des parcs nationaux : tout cela, à cause de la crise mondiale, de la crise politique malgache interminable, de l’augmentation de l’insécurité, et aussi du prix parfois prohibitif des billets d’avion (sans parler du faible nombre d’avions qui s’y rendent !).Les Français représentent tradition nellement environ 70 % des visiteurs non-résidents (en incluant les voyageurs de La Réunion et de Mayotte), mais en 2013, le nombre d’Italiens et d’Anglo-saxons était en progression, tandis que les Français ont clairement boudé cette destination (surtout ceux de la métropole).Le gouvernement malgache (longtemps réticent, pour des raisons idéologiques) favorise aujourd’hui un peu plus les inves-

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Le tourisme sexuel à MadagascarDans la plupart des hôtels de la Grande Ile, ou dans les établissements publics, vous remarquerez sans doute les affichent qui martèlent : « Les enfants ne sont pas un objet de souvenir » ou « Halte au tourisme sexuel »... Ce dernier est en effet de plus en plus répandu à Madagascar.Il n’est pas si commode de poser les « vraies » ou « bonnes » questions à ce propos. D’abord, il convient peut-être de clarifier les choses et de se demander ce qu’on entend vraiment par « tourisme sexuel » : s’il s’agit de pédophilie, la loi est claire et nette à ce sujet (on ne s’en plaindra pas !).Ensuite, nous pourrions peut-être distinguer deux types de touristes : ceux qui viennent découvrir le pays et sa culture, visiter les sites dits paradisiaques, et qui, par hasard (ou par ennui, ou par désir) rencontrent une jeune femme majeure, avec laquelle ils partagent quelques moments de vie, une nuit, une semaine, comme dix ans. Et ceux qui viennent expressément chercher des jeunes femmes ouvertement disponibles, parce qu’ils ne parviennent manifestement pas à trouver leur bonheur près de chez eux. Ce sont deux attitudes qui ne se recoupent pas totalement. On entendrait donc par « tourisme sexuel » tout commerce, tant privé que public (dans un pays de passage), des charmes féminins (ou masculins), quand ceux-ci n’ont pas d’autres sens que ce commerce même (physique, commercial ou financier).Il est vrai que certaines jeunes femmes sont assidues aux discothèques : certaines cherchent une relation sérieuse, d’autres veulent arrondir leurs fins de mois, d’autres encore ne cherchent qu’à piéger le « pigeon voyageur », avec la collaboration de la famille et même des gendarmes. A bon entendeur…Il est facile de critiquer un homme de 60 ans qui fréquente une jeune femme de quarante ans sa cadette. Ce genre de relations est moins courant dans nos pays. Mais il faut, là encore, se poser les bonnes questions : car il s’agit bien souvent plus d’un « contrat » tacite passé entre ces deux personnes ; grosso modo, l’homme de 60 ans échange sa solitude contre une certaine aisance financière, et la demoiselle est bien contente d’échapper à une vie de misère. Ça plait ou pas, mais le deal est clair.En revanche, ce qui choque, ce qui irrite ou ce qui scandalise, c’est la systématisation de ces rapports dans un pays, le néo-colonialisme et la confusion des perspectives d’avenir. On argumente que les Malgaches se marient traditionnellement à 12 ans, que les rapports sexuels sont beaucoup moins tabous que chez nous, que la prostitution n’est pas légalement interdite à Madagascar, qu’ici, donc, « ce n’est pas pareil », etc… Mais le « coup de foudre » malgache n’existe pas vraiment (c’est la philosophie du « je t’aime… jusqu’à l’aéroport »), et le commerce sexuel ici n’est qu’un grand bourbier d’intérêts, dans lequel chacun (filles et garçons réunis) essaye de tirer son épingle du jeu.Et vous ? Partisans des libertés individuelles permissives qui n’existent plus chez nous ? Ou du devoir de responsabilité morale envers la société (malgache en l’occurrence) ? Le débat n’est pas près d’être clos.

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tissements dans ce secteur. Si à ce jour un investisseur étranger ne peut pas être propriétaire d’un terrain (bail emphytéotique de 99 ans maximum), un projet de loi existe depuis début 2008 afin qu’il puisse accéder à la propriété. Ce projet a bien été voté par le Parlement, mais il attend toujours son décret d’application...A ce jour, chaque région de la Grande Ile dispose d’une autorité de tutelle de l’industrie touris-tique. Tana est le siège de l’Office national.Cependant, les infrastructures ne sont pas encore à la hauteur (santé, communica-

tions, coût du transport aérien). Aucune structure médicale digne de ce nom n’est prête à recevoir les blessés, en dehors de Tana, et les cas les plus problématiques sont immédiatement (comprenez : dans la mesure du possible) transférés vers La Réunion. Tout cela n’est pas fait pour rassurer les Occidentaux habitués à un certain confort sanitaire.On comprendra que le tourisme balnéaire préférera la Tunisie ou les Caraïbes, beaucoup plus accessibles ; que le tourisme « vert » choisira plutôt le Costa Rica…

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Posons-nous aussi la question : quel visage veut arborer Madagascar dans 20 ans ? Peut-on développer un tourisme de luxe dans un pays où plus de 70 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté ? Il est évident qu’un tourisme équilibré, conscient et responsable est un facteur de développement durable pour un pays ; mais, là où les fractures sont trop béantes, les nécessités trop criantes, il peut aussi produire des déséquilibres et des instabilités, instaurant de nouveaux besoins, imposant, de force (même inconsciente) un système complètement inadapté au quotidien, déracinant les croyances les plus tenaces et les plus ataviques et pulvérisant les liens communautaires.

Enjeux actuels w Les chiffres actuels. Madagascar est en

151e position sur l’indicateur de développement humain par le PNUD en 2012 (sur 181 pays). Le pays a connu 25 années de récession jusqu’en 1996 (45 % de baisse du niveau de vie par habitant entre 1971 et 1996), puis une moyenne de 5 % de croissance entre 1996 et 2008 (sauf en 2002). Les deux moteurs principaux ont été le développement des infrastructures (routières notamment) et les grands projets miniers à Andasibe/Tamatave (nickel/cobalt) et Fort Dauphin (ilménite). Le tourisme a connu un essor considérable. Entre 1980 et 2012, l’espérance de vie à la naissance a augmenté de 18,7 ans, et les années de scolarité ont augmenté de 2,4 ans.Toutefois, la crise de 2009 a cruellement frappé le pays : croissance négative en 2009 (- 0,4 %) et

très modérée depuis (1 % en 2011, 1,9 % en 2012). Aujourd’hui, le principal enjeu de Madagascar est le retour à un contexte politique stable et favorable.

w Le coût économique et social de la crise depuis 2009. Les chiffres sont clairs : si l’on se base sur la croissance moyenne de 5 % avant 2009, le PIB en 2013 aurait dû être de 20 % supérieur à son niveau actuel (soit 8 milliards de dollars en plus pour l’économie malgache). Le revenu par habitant a chuté, tandis que la croissance démographique ne s’arrête pas (+ 3 millions de personnes entre 2008 et 2013), pour revenir au même niveau de 2001.En 2013, on dit que 92 % de la population vit avec moins de 2 dollars américains par jour en PPA (parité de pouvoir d’achat). Le nombre d’enfants non scolarisés aurait augmenté de 600 000. La malnutrition frappe davantage encore. Presque aucun des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) fixés pour 2015 ne seront atteints ! Sans parler des finances publiques déliquescentes (fraude fiscale en hausse, baisse des recettes...), de la baisse de l’aide internationale (-30 % entre 2009 et 2013), de la défaillance progressive des infrastructures (routes, eau, électricité...), de l’insécurité grandissante, de la corruption généralisée, des trafics en tout genre (bois de rose, pierres précieuses...), de la détérioration de l’environnement et de l’invasion de criquets depuis quelques années qui, selon la Banque Mondiale, menace jusqu’à 60 % des récoltes de riz à court terme. Un bilan bien amer, mais il est inutile de mettre sa tête dans le sable !

Rizières.

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Les armées et administrations coloniales ont tenté d’asseoir leur domination en appliquant jusqu’à l’absurde le précepte « diviser pour régner ». Contrairement en Asie où le Viêt-Nam était divisé en « Cochinchine », « Annam » et « Tonkin », tout a été fait pour démanteler l’Etat malgache et détruire par des divisions aussi subtiles que redoutables toute velléité d’unité nationale. Plus tard, après l’indépendance, des politiciens malgaches en mal de pouvoir ont eux aussi essayé de fonder leur légitimité sur cette fausse division. Ils ont échoué ! Cette distinction entre habitants des Hautes Terres et habitants des côtes est fort simpliste. En fait, les régions de Madagascar sont bien plus diversifiées et fasci-nantes. On parle souvent d’ethnies à propos des peuples de Madagascar… C’est une terminologie aussi inadéquate que de parler d’ethnies pour les Bretons, les Bavarois, les Flamands, les Basques ou les Alsaciens ! La France s’est constituée au fil des siècles par l’association de peuples aux langues, origines et cultures différentes, et il en va de même pour Madagascar. Avant même l’arrivée d’Africains, d’Arabes et d’Européens, l’île a d’abord accueilli les Austronésiens ; puis

des immigrants indonésiens et bantous ont grossi les rangs de cette première population. Ainsi, contrairement à ce que « la politique des races » de Gallieni a voulu faire croire, on ne peut vraiment parler de « races » ou de « tribus », chacune isolée dans son petit monde à elle (et chaque tribu correspondant à une race). L’île offre un visage bigarré de toute beauté, entre les Betsileos (environ 12 % de la population) et les Merinas (environ 27 %) des hauts plateaux, les Sakalavas et les Mahafalys à l’ouest, les Antemoros, les Antaisakas, les Tanalas et les Tsimihetys à l’est, et les Antandroys et les Baras au sud. Chaque peuple de l’île a des traditions, une identité de groupe, mais tous se considèrent comme Malagasys et ont en commun une même langue parlée dans tout le pays.Le terme de « conflit ethnique », largement utilisé par les médias français lors de crises politiques passées, sert les intérêts de ceux qui, inconsciemment peut-être, fantasment sur une idéologie coloniale où le monde « civilisé » doit lutter contre les « barbares », quand il ne s’agit pas de les éduquer. Lyautey, dans une lettre d’octobre 1900, martelait ainsi : « L’indigène, dans sa conception rudimentaire, entrevoit certai-nement l’intérêt de faire prospérer son pays, mais il voudrait bien obtenir ce résultat en travaillant le moins possible. Le colon, avec cette endurance et cette ardeur au travail qui sont le noble privilège de notre race, ne peut pas ne pas avoir avant tout comme objectif, absolument légitime, la réussite la plus rapide de ses entreprises. » Jean-Aimé Rakotoarisoa rappelle, en une brillante formule : « Tout Malgache n’aura-t-il pas été, par définition, à un moment de son histoire, d’abord un côtier ? » Les tentatives pour fracturer le pays en micro-Etats fédérés ne correspondent pas du tout à une réalité malgache. Lyautey (toujours lui !) nous en apprend un peu plus sur la finalité d’une telle dissociation, « Côtier » et « Merina », « cheveux raides » ou « cheveux crépus », il y a un siècle tout juste : « S’il y a des mœurs et des coutumes à respecter, il y a aussi des haines et des rivalités qu’il faut démêler et utiliser à notre profit, en opposant les unes aux autres, en nous appuyant sur les unes pour mieux vaincre les autres. » Et Guilhelm Beauquier de rappeler en 2002 : « La vision de la France sur Madagascar n’a quasiment pas évolué depuis Gallieni : il y a

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Masque de beauté… pour se protéger aussi du soleil, Ramena, vers Antsiranana.

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d’un côté les Merinas des hauts plateaux, fourbes et arrogants qu’il faut mater et rabaisser, et de l’autre les Côtiers, exploités et humiliés qu’il faut défendre et promouvoir. Ce manichéisme n’est pas innocent : il a été forgé à dessein pour servir la colonie dans le passé, des intérêts stratégiques, politiques et financiers aujourd’hui. » Nous pouvons même aller plus loin : les 18 « tribus » dont tout le monde parle ont été établies par l’administration coloniale au début du XXe siècle. Elles ne recouvrent pas forcément des entités homogènes. En vérité, il serait peut-être plus habile d’évoquer des « cultures régionales », comme pour les Bretons, les Provençaux, les Alsaciens…, ou des « régions culturelles ». Chacun fait référence à Tanindrazana, « la terre des ancêtres ». Et il en est ainsi au cours de chaque cérémonie rassemblant des peuples venus de tous les coins de la Grande Île. Vous-même, au cours de votre voyage, entendrez probablement telle ou telle personne de la Côte (souvent déjà liée à un mode de vie occidental, ceci dit) railler les gens de Tana, ou les gens de Tana s’en prendre à tel ou tel Côtier. Mais ce clivage n’est nullement d’ordre ethnique : il concerne, comme souvent, davantage des questions politiques et socio-économiques. Un peu comme en France

les Provinciaux pestent contre les Parisiens, les Côtiers (terminologie impropre, rappelons-le) tempêtent contre les Merinas, parce que ceux-ci, politiquement et économiquement surtout, gouvernent le pays, à l’encontre peut-être des autres régions de Madagascar. Disons donc qu’une classe largement exploitée et opprimée, mais non « côtière » ou « Merina », s’oppose à une classe bourgeoise et dominante, vivant en grande majorité à Antananarivo (centre de décision de la Grande Île), sans être spéciale-ment Merina ou « Côtière ».Le conflit est économique plutôt que géogra-phique. On s’en prend aux « gouvernements de Tana », plutôt qu’aux gens qui habitent Tana. Viendrait-il à l’idée de quelqu’un en France de considérer que les oppositions entre Marseillais et Parisiens au cours des matchs de football sont d’origine ethnique ? Ile métisse, Madagascar est un mélange où il est presque possible de faire un « tour du monde » en un seul voyage. Et comme le soulignait la reine Ranava-lonamanjaka dans une lettre à son homologue britannique, la reine Victoria : « Mon pays ne fait pas partie de l’Europe, ni de l’Asie, ni de l’Afrique, c’est une île dans les mers et si on le laisse en paix, il continuera à progresser. »

Les différents peuples

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Les différents peuples w Antaifasy : « Ceux du sable ». Ils sont

groupés autour de la ville de Farafangana, au nord de Fort Dauphin. Loi tribale très stricte. Toujours plus ou moins indépendants des Merina, on ne connaît pas vraiment leurs origines. Ils étaient séparés en trois classes : les Randroy, Andrianseranana et Marofela.

w Antaimoro : « Ceux du rivage ». Ils habitent au sud des Betsimisaraka, autour de Vohipeno où sont conservés les restes des anciens rois. Ce sont des descendants d’Arabes, certains nobles conservant même l’écriture arabe ou sorabé ainsi que la pratique de divination par les graines ou sikidy. Leur technique de fabrication du papier a maintenant dépassé les frontières de la Grande Île.

w Antaisaka (ou Antaisakalava) : « Ceux qui viennent des Sakalava ». Ils vivent au sud des Antaifasy, près de Fort Dauphin, dans la région de Vangaindrano. L’influence de l’islam est très faible. C’est le prince sakalava Andriamandresy qui aurait quitté sa région pour venir fonder un nouveau royaume ici. Ils se révoltèrent en 1852 contre leurs occupants merina, qui durent établir un gouvernement plus souple.

w Antambahoaka : « Descendants de Rabeva-hoaka », « ceux de la communauté ». Ils vivent au sud des Betsimisaraka, jusqu’à Fort Dauphin. Leur capitale était Mananjary. Leur origine arabe est indiscutable : un « éléphant de pierre » qu’on peut encore admirer près du village d’Ambohitsara aurait été apporté de La Mecque par Raminia, fondateur du clan. Son fils Rabevahoaka donna son nom à tout le peuple.

w Antandroy : « Ceux du pays des épines ». Ainsi nommés en raison de l’abondance des cactées dans cette région du Sud-Est, près de Taolagnaro, utilisées comme moyen de protection contre les envahisseurs et comme nourriture pour les troupeaux. Une légende raconte que leur ancêtre, Raminia, est venu d’Arabie entre le Ve et le VIIe siècle de notre ère, on retrouve d’ailleurs des traits arabisants chez ce peuple épris de connaissances astrologiques et de divination. L’isolement conféré par cette région a priori inhospitalière a su préserver une identité culturelle profonde. Chasseurs, éleveurs, les Antandroy se séparent rarement de la sagaie (emblème du guerrier) et ils obéissent à des règles traditionnelles et spirituelles très strictes.

w Antankarana : « Ceux de l’Ankarana, du pays rocheux ». Ils vivent à l’extrême nord de l’île, du cap d’Ambre au fleuve Sambirano. C’est un mélange de Sakalava et de Betsimisaraka. Très forte influence de l’islam. Ils croient aux divinités naturelles (arbre, plante, montagne, eau...).

w Antanosy : « Ceux de l’île ». Ils occupent la région autour de Fort Dauphin. Leur nom provient d’une île de la rivière Fanjahira, d’où étaient issus les chefs primitifs. Cette puissante tribu fut soumise par les Merina, ce qui provoqua un exode massif vers les terres de l’Ouest entre 1830 et 1845. Ce nouveau groupement prit le nom de « Antanosy émigrés ». Ce sont de bons riziculteurs et éleveurs, mais aussi des forgerons et charpentiers.

w Bara. L’origine de ce nom n’est pas connue (bantoue peut-être ?). Ils vivent au sud des Betsileo, se divisent en clans, et ne subirent pas vraiment l’autorité des Merina. Leur tradition veut que les jeunes hommes doivent voler des zébus afin d’affirmer leur bravoure, avant leur mariage.

w Betsileo : « Les nombreux invincibles ». Leur capitale était Fianarantsoa et ils sont peut-être originaires d’Indonésie. Autrefois divisés en castes, ils ont fait le choix de se soumettre pacifiquement aux Merina. Excellents cultivateurs, on peut encore admirer leur patient travail des rizières en escaliers ou leurs longs canaux d’irrigation.

w Betsimisaraka : « Beaucoup qui ne se séparent pas ». C’est la plus grande peuplade de l’Est de l’île, étendue sur toute la façade littorale, entre les rivières Bemarivo et Mananjary. Bons marins (ils ont longtemps lancé des expéditions contre les Comores), leur apparence physique évoque l’Afrique. Ils furent très tôt les alliés et les sujets de la France.

w Bezanozano : « Beaucoup de petites tresses ». Leur coiffure explique bien sûr ce nom. Ils vivent dans la vallée du Mongoro, entre la grande forêt orientale et les pentes du plateau central, autour de Moramanga. Conquis par Radama Ier, ils furent pendant longtemps les gardiens de troupeaux des Merina.

w Mahafaly : « Ceux du pays fady, tabou ». L’origine de leur nom est évoquée par Raymond Decary : « Le grand fétiche du roi et du peuple, nommé Andriamaro, et qui était conservé sur une montagne boisée, ne permettait à aucun étranger, que celui-ci fût blanc ou même originaire d’une autre tribu, de pénétrer dans le pays qui devint fady (faly en dialecte côtier),

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c’est-à-dire inviolable, tabou. Mais, lorsqu’un des derniers rois, Refotaka, eut abandonné le pays, à la suite de la transgression d’interdits dont il s’était lui-même rendu coupable, le fétiche Andriamaro perdit sa puissance, et dès ce moment, disent les indigènes, le pays devint accessible aux gens de l’extérieur. » Trois royaumes se divisèrent à la fin du XIXe siècle : celui de Refotaka, celui de Tsiverengy, et celui de Tsiampondy. Ce sont d’excellents sculpteurs.

w Merina : « Ceux du pays où la vue est étendue ». Ils sont aussi appelés les Ambaniandro (« ceux qui sont sous le soleil »), à cause de l’aridité de leur pays. Ils vivent sur la partie centrale des hauts plateaux, l’Imerina, autour d’Antananarivo. Auparavant, ils étaient divisés en quatre clans : les Andriana ou nobles, descendants d’immigrés javanais ; les Hova, bourgeois ou hommes libres, d’origine probablement indigène (Vazimba) ; les Mainty, ou noirs, pas encore tout à fait asservis ; et les Ondovo, esclaves. L’histoire des Merina est bien connue : c’est d’ailleurs la source principale de nos connaissances sur l’île avant la colonisation.

w Makoa. Ils vivent sur la côte nord-ouest près du cap Saint-André. D’origine bantoue (leurs ancêtres furent emmenés en esclavage en Afrique par des Arabes négriers), leur type africain est assez marqué. On les regroupe parfois sous la dénomination générique « sakalava ».

w Sakalava : « Ceux des longues vallées ». Ils vivent le long de la côte occidentale (près d’un millier de kilomètres du nord au sud). Cet immense pays couvre environ le quart de la Grande Île. Cependant, au sud, ils se divisent

en Vezo (sur les côtes, d’excellents marins surnommés « nomades de la mer », notons que contrairement à la majeure partie des Malgaches, ils ne pratiquent pas la circoncision) et en Masikoro (à l’intérieur). De type africain, ils se séparent en plusieurs clans selon le lieu où ils se trouvent : Antimena dans le Menabé, Antimilanja dans le Milanja, etc. Une légende rapporte que le fondateur de cette peuplade était un étranger blanc, probablement un Arabe, venu de l’Isaka au XIVe siècle. Ils ne furent que partiellement soumis aux Merina. Leurs chefs, ou Mpanjaka, ont encore un rôle de premier ordre dans la communauté.

w Sihanaka : « Ceux des marais ». Leur territoire s’étend dans le Nord-Est, autour du lac Alaotra, jusqu’au fleuve Mangoro. Probables descendants des Antaisaka et soumis rapidement aux Merina, ils en ont aussi subi les influences, tant spirituelles que physiologiques. Ce sont de bons riziculteurs et pêcheurs.

w Tanala : « Ceux de la forêt ». Comme leur nom l’indique, ils vivent au cœur de la grande forêt orientale, près de Ranomafana. Ils pratiquent la culture du riz sur brûlis. Leurs anciens souverains étaient probablement d’origine arabe. Leur résistance contre l’armée de Radama Ier est fameuse dans le pays (notamment le siège qu’ils soutinrent dans le massif de l’Ikongo).

w Tsimihety : « Ceux qui ne se coupent pas les cheveux ». Ainsi nommés parce que, contrairement à l’usage commun, ils ne se rasaient pas la tête en signe de deuil. Ils vivent sur la partie nord des hauts plateaux.

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C’est dans les métissages qu’on fait les plus beaux bébés !

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La culture malgache s’est forgée dans les métissages et les apports successifs des peuples qui se sont réunis, au fil des siècles, sur la Grande Île. Tradition orale, littérature, musiques, danses, théâtre, le voyage malgache est aussi un parcours culturel.Ce métissage est déjà très perceptible dans la langue malgache, dont la majorité des mots et la syntaxe sont de la même famille que les langues parlées en Malaisie, Indonésie et Polynésie (langues austronésiennes), tout en intégrant des apports nouveaux. Si l’on observe l’écriture et que l’on écoute la prononciation de ce qui est écrit sur le calendrier des postes de Madagascar, une surprise nous attend ! Les jours de la semaine sont dérivés de l’arabe (exemple : zoma/ vendredi, alahady/ dimanche, etc.), tandis que les mois se prononcent comme en anglais (july, august, december, etc.). Jésus se prononce « djisas », comme en anglais. Les noms d’animaux domestiques sont d’origine bantoue. D’autres mots viennent du français (latabatra/ la table…). L’utilisation du français est d’ailleurs un problème puisque si la classe dominante le maîtrise, le peuple converse quotidiennement en une langue bien diffé-rente. Le voyageur pourra déceler d’après la prononciation l’origine géographique des mots.

Ces mots ont leur importance car Madagascar est un lieu de parole. Contes, récits, poésie, théâtre et proverbes occupent une place impor-tante. Les expressions varient, mais toutes les formes révèlent une identité unique, une façon de se situer dans la vie et la société, une psychologie spécifique à la Grande Île.« Le Malgache croit tout en ne croyant pas. » Cette affirmation, venant d’un Malgache lui-même, apporte un éclairage assez juste sur la mentalité et le caractère secret de ce peuple complexe. Pacifistes, souvent sur la réserve et à l’écoute, les Malgaches se donnent du temps, laissent mûrir. Ils sont toujours courtois, accueillants, souriants. Mais ils veillent à ce que certaines barrières ne soient pas franchies, et le voyageur se rend vite compte qu’un excès de familiarité ne mène à rien. Il est préférable de ne pas forcer la réserve et d’éviter d’élever la voix ou de s’énerver.« Vous avez peut-être raison » peut signifier la fin d’une discussion non désirée, ce qui n’exclut pas les jeux de mots, l’humour toujours sous-jacent et le plaisir de converser avec celui qui est venu d’ailleurs. Par ailleurs, un service rendu, même spontanément, suppose un retour, un jour ou l’autre. C’est une façon de créer un échange.

VIE SOCIALEUn habitat naturel et sacréEn général, l’habitat malgache traditionnel, que ce soit au nord ou au sud, sur les hauts plateaux ou sur les côtes, se compose d’une pièce rectangulaire unique : la case ronde africaine n’est pas connue. Le toit est tradition-nellement à deux pans. La demeure est orientée nord-sud pour se préserver des pluvieux alizés du sud-est. Seuls les matériaux de construction changent, en fonction de ce dont disposent les

habitants : un proverbe malgache dit d’ailleurs que : « L’oiseau fait son nid avec de la mousse, et l’abeille maçonne avec de la terre. » Dans le Nord, on préfère le raphia ; dans le Sud-Ouest, l’aloès et le sisal ; chez les Tanalas, le bambou fendu ; sur la côte est, le ravenala ; dans l’Androy, le bois des épineux (par exemple le fantsiholitra ou « peau épineuse », Alluaudia procera ) ; et chez les Vezos, le jonc ou ce qui est plus exact, le « vondro ».

Mode de vie

Clivage« Il est très difficile pour un Blanc de se faire une idée juste de la mentalité malgache. L’Européen juge l’indigène avec ses idées personnelles, il se base sur ses propres notions de morale qui souvent ne correspondent pas à celles de l’autochtone [...]. On a aussi parlé de « mentalité prélogique ». En réalité, cette mentalité et la nôtre partent de bases différentes ; on peut les comparer à deux arbres voisins appartenant à deux espèces distinctes et portant des fruits qui ne sont pas identiques. »(Extrait de Mœurs et coutumes des Malgaches, Raymond Decary.)

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Des coutumes pas comme les autresRaymond Decary évoque un fatidra pittoresque (et politique) entre le Résident blanc de Fianarantsoa et le roi des Tanala, Andriamanapaka ; cette union implique en effet une communauté de biens entre les deux contractants. Or le grand chef, venu rendre visite à son nouveau « frère », demanda à partager la nuit avec son épouse. Comment concilier cette coutume ancestrale et l’honneur d’un couple peu fait à ces idées ? En refusant, le Résident pourrait provoquer une révolte des Tanalas… Malgré les tensions, une solution fut trouvée au pied levé : on offrit un dîner à Andriamanapaka, en présence de l’épouse blanche, et les vins capiteux qui se succédèrent sur la table eurent bientôt raison de la clairvoyance du souverain convive. Puis on le mit promptement au lit… en compagnie d’une métisse qui, peut-être, s’en accommoda !

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Le bois était couramment utilisé sur les hauts plateaux jusqu’au début du siècle dernier pour construire les maisons. Le toit, extrêmement pointu, était le plus souvent constitué de chaume (bozaka ). Aujourd’hui, la brique crue ou la terre ont remplacé le bois, ainsi les tamboho ou murs épais de latérite qui entourent une propriété. On utilise la technique du torchis : le sol de latérite est humidifié, puis travaillé avec une bêche, piétiné, et mêlé à un liant comme de la paille de riz hachée ou des graminées sauvages. Pour se faire une idée de l’architecture première de l’Imerina, nous ne pouvons que conseiller un détour par la colline sacrée d’Antsahadinta, où l’on pourra observer une superbe maison tradi-tionnelle plus ou moins restaurée. Ambohimanga est une alternative séduisante.Ailleurs que sur les plateaux centraux, les matériaux utilisés sont d’origine végétale. Dans le Sud et le Sud-Ouest, par exemple, on utilise le « vondro » ou quenouille d’eau (Typha augustifolia, improprement appelé « jonc », car c’est une typhacée), qu’on trouve dans les marécages qui bordent les mangroves de l’Ouest. Les tiges sont coupées, séchées sur le sable, puis on retire les jeunes pousses. Le vondro est abondant, léger, maniable et résistant (des qualités intéres-santes), et il laisse passer l’air, ce qui est pratique dans des régions aussi chaudes. En revanche, il abrite beaucoup d’insectes et de parasites. On utilise également le roseau (comme support), le papyrus (près du lac Alaotra), les graminées (par exemple les herbes séchées sur pied) ou les palmes (les patioles sont alors utilisées comme les roseaux pour l’armature, et les feuilles pour les parois et la toiture), ainsi que le raphia, ou encore d’autres palmiers comme le vakoa ou vakona (Pandanus utilis ) pour les maisons sur pilotis. Sans oublier le bambou. Le ravenala est couramment utilisé, notamment dans l’Est. On peut citer trois types de construction. Celle du raty : les feuilles mortes sur pied sont ficelées en balles pour la couverture ; celle du rapaka : l’écorce du ravenala, divisée en deux parties, est utilisée pour le plancher ; et celle du falafa : les pétioles de ravenala sont fendus en deux sur la longueur pour édifier les murs. Cependant, il faut convenir que les parois de falafa sont peu étanches et qu’elles sont souvent doublées avec du rapaka, des bambous écrasés ou des tressages de pandanus. A Madagascar, on ne construit pas de maison (trano) sans consulter un devin : l’orientation de chaque pièce, chaque jour de la semaine a une importance capitale. Les douze mois de l’année correspondent ainsi à autant d’emplacements dans la maison. Comme l’ont écrit Christiane Ramanantsoa et Henri Ratsimiebo dans leur ouvrage Tableaux

de Madagascar (chez Arthaud) : « La maison malgache exprime beaucoup plus qu’une simple réponse à des impératifs matériels. Elle revêt une dimension spirituelle qui n’est pas irréductible aux seules capacités d’adaptation technique des sociétés rurales. » L’aménagement intérieur de la maison correspond au rythme quotidien des habitants. Les choses sont en adéquation avec les cycles cosmiques. Ainsi, les quatre coins de la maison reçoivent des destins majeurs : les angles de l’univers (zoron-tany) sont le nord-est, le sud-ouest, le nord-ouest, et le sud-est. Il existe aussi huit destins mineurs, deux par mur sur les quatre murs. L’ameublement de la demeure répond donc bien à des impératifs astrologiques, et l’ensemble est toujours construit pour être orienté vers l’ouest.A l’intérieur, le sol est divisé en trois zones : rouge (favorable), noire (neutre, ou peu sûre), et blanche (défavorable). Le chef de famille doit toujours dormir au nord-est (Alahamady), qui correspond aux ancêtres. Les nattes doivent y être toujours propres, les lamboany de soie. Au cours d’une fête, on verse un peu de rhum à cet endroit pour se concilier la bénédiction des anciens. En outre, ceux-ci peuvent ainsi participer aux réjouissances. Sinon, le coin sud-ouest, qui correspond au destin favorable d’Asombola, est réservé au silo et au mortier à riz.

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Un sentiment familial très puissantToute la vie sociale est fondée sur le lien indis-soluble (ou presque) de la famille, qui rattache l’enfant aux ancêtres.D’abord, les femmes ont traditionnellement beaucoup d’enfants. On rappelle souvent que Rainilaiarivony, Premier ministre, en eut 16 de sa première femme avant d’épouser la reine. En fait, la stérilité est considérée comme une punition divine. Rasanjy, gouverneur de l’Imerina, proclamait naguère : « Quelle calamité plus grande peut frapper nos ménages que celle de ne pas avoir d’enfants, qui sont le bâton sur lequel s’appuie notre vieillesse, et sans lesquels aucune main pieuse n’est là pour nous descendre dans la tombe. Ceux qui sont sans postérité sont aussi mal partagés que s’ils étaient amputés des mains et des pieds. » On consulte bien sûr un devin si l’enfant ne vient pas et celui-ci impose des prières et des sacrifices. Certaines pierres sacrées auraient aussi quelques vertus. Ou alors on absorbe des aliments épicés « pour réchauffer le ventre ». D’autres pratiques encore permettent de féconder la femme stérile (comme s’allonger sur la natte d’une femme venant d’accoucher).La grossesse est ensuite soumise à de nombreux fady, qu’il importe plus que tout de ne pas outrepasser : défense de boire du rhum, de franchir un fossé, de manger des crabes (sinon l’enfant aura des mains difformes)… L’alimentation est également primordiale, puisqu’elle modifie le comporte-ment de l’enfant : il convient par exemple de boire du bouillon de museau de bœuf au terme de la grossesse, pour diminuer les mucosités entourant le fœtus. Si l’accouchement est difficile, la mpampivelona, ou sage-femme, pratique l’alanenina, un charme rituel qui consiste à toucher légèrement le ventre de la patiente de façon répétée, avec un pilon à riz.Quand l’enfant naît, il faut se charger du cordon ombilical. Traditionnellement, les Merinas le coupent avec des ciseaux, les Sakalavas avec un bambou tranchant, les Antandroys avec un fragment de bois ou de verre, etc. On ne doit pas laver le corps du nourrisson, mais l’enduire d’un peu de graisse. Selon les peuples, on enterre le placenta (chez les Sakalavas), on le jette dans la rivière (dans le Sud-Est), ou on le donne à manger à un bœuf (Merinas).Il ne faut pas manifester une joie débordante à l’occasion de la naissance : l’exubérance pourrait porter malheur au nouveau-né.Autrefois existait la coutume rituelle de mise à mort de l’enfant venu au monde un jour

fady (chaque peuple a au moins un jour fady par semaine). Ce n’était pas un acte barbare et gratuit, mais un impératif cérémonial afin d’éviter les mauvaises influences du nouveau-né dans la communauté : l’instinct premier était donc bien la préservation sociale, inspirée par le vintana, ou destin (lui-même basé sur les signes astrologiques). Pour procéder à cette mise à mort, on exposait souvent le nourrisson sur le sol, devant un parc à bœufs, que l’on finissait par lâcher : si l’enfant survivait par miracle, on le laissait en vie. D’autres pratiques étaient toutefois suivies. Les Antaimoros, par exemple, procédaient au changement de jour, ou vadikandro, quand l’enfant naissait un jeudi, jour fady ; le bébé était lavé d’après une savante décoction établie par le sorcier, puis il recevait une autre date de naissance.Dès son plus jeune âge, l’enfant est porté à califourchon dans le dos (babena) ; on ne doit pas l’habiller car « il ne grandirait pas », ni lui couper les cheveux au cours des six premiers mois (fady), et on lui octroie un nom qu’il aura l’occasion de changer par la suite car l’imposi-tion précoce d’un nom définitif permettrait aux mauvais esprits de s’en emparer. De manière générale, d’ailleurs, l’enfant peut modifier son nom plusieurs fois dans sa vie, en fonction des circonstances. Cette pratique est aujourd’hui beaucoup moins répandue, évidemment. Le rejet de la famille est la punition la plus terrible à laquelle puisse s’exposer un enfant : il lui sera en effet interdit d’être inhumé dans le tombeau commun.

Le mariageLe mariage comporte une période d’essai sans engagement. On peut se marier à n’importe quel âge, mais d’une manière générale, les choses ont considérablement évolué depuis un siècle, car les garçons se mariaient alors à 14 ans, et les filles à 12 ans. L’accord se fait entre les parents des familles, et de grands discours sur les détails de la cérémonie et les conditions du mariage. Le jour dit, l’assemblée se rend au domicile de la jeune fille où se déroule le rituel du kabary : deux personnages représentent les parents des époux, le Mpangataka (rôle du fiancé) et le Mpanatitra (rôle de la jeune fille). Ce discours reproduit la demande en mariage et l’accession à celle-ci. Ensuite, on remet le vody-ondry, consécration de l’alliance, autrefois la cuisse droite d’un mouton avec la queue, aujourd’hui une petite somme d’argent, les temps changent ! Par la suite, seul le mari peut décider de briser le mariage ; la femme a le droit de s’en séparer, mais elle ne peut alors se remarier. Cette répudiation s’appelle fisaoram-

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bady (« remerciement de l’épouse »). Elle peut être provoquée par un adultère ou l’abandon du domicile conjugal, mais en vérité l’homme agit un peu selon son bon plaisir.

La fraternité : le fatidraLes Malgaches accordent une importance fondamentale aux liens sociaux, comme en témoignent les fokonolonas (assemblées popu-laires). Il est également possible d’entériner une alliance artificielle, en dehors des liens familiaux, sous trois formes différentes.La fraternité de sang, tout d’abord (fatidra, c’est-à-dire « incision sanglante »), union arti-ficielle consacrée par une divinité pour des raisons affectives ou intéressées.Il existe des variantes selon les peuples, mais généralement les deux contractants doivent boire quelques gouttes de sang d’une légère blessure faite à l’autre. Les deux nouveaux

« frères » doivent ensuite se porter une assis-tance matérielle et morale.Le lohateny (chez les Sakalavas par exemple), sorte de convention réciproque entre membres de différentes castes, qui les oblige à se secourir mutuellement.Le groupement de travail collectif, findramano-lona ou valin-tanana, par lequel les habitants d’un village prêtent leur secours à l’un des habitants pour l’exécution d’un travail pénible (préparation de rizières…).A noter que la paresse, contrairement à ce que certains peuvent penser (la plupart des peuples ne sentaient pas le besoin de s’échiner à la tâche pour des besoins qu’ils ne s’étaient pas eux-mêmes imposés) était plutôt mal perçue dans les communautés ; un proverbe rappelle d’ailleurs que « vivre dans la paresse quand on est jeune, c’est s’exposer à être couvert de haillons une fois vieux » .

MŒURS ET FAITS DE SOCIÉTÉHabillementLa base du vêtement malgache est le salaka ou sikiny, une étroite bande d’étoffe de deux mètres de long environ, que les hommes ceignent autour de leur rein en la faisant passer entre leurs jambes tout en laissant pendre l’un des bouts par-devant, et l’autre par-derrière.Chez la femme, le sikiny ou kitamby est une étoffe ceinte autour des reins également, qui évoque un court jupon. En s’allongeant, cet habit porte le nom de salovana. Cette pièce est davantage en usage actuellement dans les milieux ruraux, les femmes qui laissent leurs seins à découvert étant de plus en plus rares. Ces habits trouvent d’heureuses variantes dans chaque tribu de la Grande Île.L’habillement a bien sûr considérablement changé pendant le dernier siècle. Autrefois, les riches des hauts plateaux portaient le tsiantaha, littéralement « qu’on ne trouve pas dans la campagne » : c’était un gilet de soie fort coûteux. Aujourd’hui, l’influence européenne est patente dans les villes, et l’on s’habille un peu comme on peut dans la brousse, avec de vieux tee-shirts ou des jeans délavés.Le lamba est le vêtement traditionnel des Malgaches. Une sentence évoque bien toutes les utilisations qu’on peut en faire : « Le lamba, on s’en drape le jour, on s’en couvre la nuit, on s’en ceint la taille pour danser et on en est enveloppé après la mort. » Peu à peu abandonné au profit d’une mode plus européenne, le lamba est toutefois de nouveau recherché pour sa

beauté. Il est fait en soie grège, parfois associé au coton (Arindrano landihazo) ou au raphia (Arindrano jabo-landy). Jadis on fabriquait aussi du lamba fanto avec de l’écorce d’arbre pilée (comme le fanto lui-même, et le nonoka, qui est un ficus) : cette pratique n’est plus vraiment de mise aujourd’hui. Traditionnellement, le lamba est de couleur blanche orné de motifs aux nuances variées pour les femmes, et de couleur marron ou rouge entrecoupée de lignes blanches, noires ou brunes pour les hommes.On distingue trois types de lamba : le lambamène, de couleur rouge foncé surtout, utilisé comme linceul ; le lamba arindrano, ou vêtement cérémoniel pour les nobles, les riches ou les vieillards, orné de bandes noires et blanches sur le devant, et rouges sur les bords ; et le lamba telo soratra, dont les bandes représentent trois couleurs fondamentales.Le tabaké est davantage une coquetterie qu’un habit, et permet, aussi, de se protéger du soleil. Chez les Vezos et les Mahafalys notamment, cette singulière parure du visage ressemble à un dessin constitué de taches, de points ou de traits, la plupart du temps blancs ou jaunes. L’onguent qui permet cette délicieuse bigarrure est fait d’argile blanche ou tanifotsy mélangée à de l’eau, à des plantes aromatisées et à des racines tinctoriales comme le safran. Une fois appliquée sur la peau, cette crème artistique se dessèche et adhère. Il existe de nombreuses formes de tabaké, aux multiples arabesques, qui visent à adoucir et embellir la peau par exemple.

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Mœurs et coutumesSelon Raymond Decary : « Une grande liberté de mœurs a toujours existé chez le Malgache au tempérament sensuel et voluptueux, qui résume le plaisir de l’existence dans la phrase : douce est la vie. » (Mœurs et coutumes des Malgaches.) Ce n’est pas pour autant que Madagascar soit licencieuse ou immorale, comme l’ont parfois conté certains apôtres de la modernité. Patient, éveillé, volontiers sensible quand il évoque sa terre natale, très attaché aux liens familiaux et au respect de certains rites, de certaines coutumes, et même d’une certaine moralité, le Malgache est éminemment sociable : sa légendaire hospitalité n’est pas seulement un bon mot du ministère du Tourisme. Un proverbe dit d’ailleurs : « Ne pas partager sa nourriture avec autrui fait gercer la langue. » L’ancien administrateur en chef des colonies, qui avait bien compris qu’une morale diffé-rente n’est pas l’absence de toute morale, dépeint ensuite l’existence quotidienne de ces peuples qui vivent en bonne intel-ligence : « Dans leurs longues conversa-tions à bâtons rompus, à l’ombre d’un mur ou d’un tamarinier à l’épais feuillage, ils parlent avec volubilité, développant à perte de vue des arguments parfois tortueux mais le plus souvent frappés au coin du bon sens. » Ce sont les kabarys, où s’affrontent les interlocuteurs en de métaphoriques joutes verbales. Ces proverbes, naïfs, touchants, profonds, aussi limpides que l’eau claire, témoignent de leur grande sagesse : « Avoir la bouche comme une tabatière » : toujours emprunter.« Porter deux cruches sur la tête » : s’occuper de plusieurs affaires en même temps.« Être comme un coq qui chante la nuit » : parler sans modération.« Faire comme le sanglier qui avale les mous-tiques » : se contenter de peu.« Le toit de Dieu » : le ciel ; « la liane céleste » : la voie lactée ; « l’œil du jour » : le soleil ; « le prince de l’œil » : la prunelle ; « l’enfant de la montagne » : la colline ; « les branches de la main » : les doigts…L’amour aussi a droit à ses beaux mots ; un proverbe dit qu’il est « Comme le riz, il pousse là où on le sème. » ; d’autres rapportent que « les vrais amoureux ne voient pas la nuit arriver. »

AsaramanitraIl s’agit de festivités païennes célébrées jadis (avant le calendrier lunaire des Arabes et le calendrier solaire grégorien des Occidentaux), en connivence avec la Nature, les esprits et les choses, synonyme de nouvel an. Aujourd’hui encore, le peuple garde le souvenir du mythique Rapeto, l’ancêtre Vazimba qui pouvait communiquer avec l’essence du monde alentour. L’Asaramanitra concerne la communauté du Tahala Rarihasina (au centre d’Analakely) et permet à la fois un retour aux sources (respecter son environnement) et un éveil spirituel collectif (découvrir l’invisible derrière l’apparent).

Place de la femmeComme dans tant d’autres pays du Sud (c’est-à-dire du tiers-monde), la situation des femmes varie considérablement en fonction de la classe sociale. Les riches foyers mènent une existence assez semblable à celle des classes aisées d’Occident, et les tâches sont plus ou moins équitablement partagées avec l’époux ou le conjoint ; on engage presque toujours des femmes de ménage. En revanche, dans les familles pauvres, la femme doit se sacrifier aux tâches domestiques comme la lessive, la vente d’artisanat, quand il ne s’agit pas de mendicité…Au sud de Madagascar, dans une région essentiellement tournée vers la mer, l’homme travaille à ses pirogues, part à la pêche, tandis que la femme vend les produits de cette dernière. Parallèlement, pendant la journée, elle s’occupe du foyer.La scolarisation des filles a pris une impor-tance salutaire, et la société malgache n’est sûrement pas le pays le moins avancé en cette matière. Certes, les décisions à grande échelle sont souvent prises par les hommes, mais on trouve des femmes ministres, députés, sénateurs ! Elles abondent aussi dans les entreprises, dans les ONG, dans les admi-nistrations et les magistratures. De fait, depuis longtemps les femmes avaient le droit de faire partie des Fokonolonas, assem-blées communautaires et lieux de décisions publiques.Il est très rare de croiser une femme de bonne famille seule dans un bar ou un espace public. Il vaut mieux s’interroger sur les modalités et les finalités d’une relation quand cela arrive : il n’est pas sûr qu’elle soit vraiment fortuite.

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SantéLa situation sanitaire à Madagascar est assez délicate, pour ne pas dire défaillante. Les services de santé sont loin d’être optimaux et les médicaments manquent souvent. Malgré toutes les aides internationales, et notamment des Etats-Unis, et quelques nouveaux hôpitaux inaugurés en province, le secteur de la santé est perpétuellement en crise : problèmes de gestion administrative et financière, absence de planification, déficience des infrastruc-

tures... Quelques caractéristiques : taux de mortalité infantile élevé, faible taux de prévalence contraceptive, sous-alimenta-tion et malnutrition, présence endémique du paludisme, des maladies diarrhéiques, prévalence du VIH en hausse, pénurie d’eau potable parfois… On le voit : mieux vaut ne pas tomber malade à Mada... Mais que ces quelques remarques ne vous effraient pas. Les gens sont toujours aussi aimables et prévenants !

RELIGIONVenus de l’Asie, de l’Afrique, de la péninsule Arabique, par vagues successives, les Malgaches se sont unis au gré des migrations intérieures. Ce métissage a créé un tronc culturel commun, favorisé par l’insularité de Madagascar. Si chaque groupe a ses parti-cularismes, ses différences et ses modes de fonctionnement – perceptibles au cours d’un séjour prolongé – par lesquels il exprime son originalité, tous participent d’un ensemble culturel et sociolinguistique homogène : l’iden-tité malgache. Mais si Madagascar possède une cosmogonie spécifique, les formes de la religion traditionnelle varient selon les régions. Certains sites et éléments – terre, ciel, eau – sont sacralisés. Une religion ayant pour fondement le culte des ancêtres et, au-delà, d’un seigneur des ancêtres, moteur de toutes choses et fondateur de l’univers (Andriananahary), s’est largement répandue. Le culte des ancêtres est partout présent. Leur efficacité est admise par tous, souvent bien plus que les prières faites au Dieu des religions importées. La relation au monde s’exprime aussi par l’orientation et les points cardinaux. Cela a son importance lors de la construction d’une maison, car les points cardinaux sont porteurs de sens. L’est, par exemple, est la direction sacrée, celle du culte des ancêtres ; le nord (Voninahitra) est un lieu d’honneur. De nombreux lieux sacrés – lacs, grottes, forêts, banians – sont partout répartis sur l’île. Ils sont souvent marqués de certains interdits (fady). On y dépose des offrandes, des dons, des fleurs. Ce sont des lieux de prière et de sacrifices. Mais partout, les éléments – la terre, l’eau, la forêt – sont des intermédiaires entre les vivants et leurs ancêtres. Si la vie spirituelle a son importance, la vie terrestre reste la valeur essentielle pour la population de la Grande Île.

Le présent est vécu avec intensité. Le passé n’empiète pas trop sur la vie quotidienne. En ce sens, dans la pratique, les Malgaches sont très proches des préceptes de Lucrèce et de Démocrite ! Il faut aussi savoir que les actes comptent ici plus que les intentions, que l’individu perd son âme s’il s’isole et oublie le groupe, que la solidarité communautaire est totale, et que personne n’est jamais seul face à lui-même, s’agissant de sa vie et sa mort, à moins qu’il ne fasse le choix personnel de sa propre solitude.L’éthique qui guide les actes de chacun est basée sur des valeurs simples : être droit et honnête, faire le bien, partager son bien avec générosité, agir par amour et non par intérêt car personne n’oublie jamais les racines du temps : la famille, le groupe, le peuple, les ancêtres, la terre et le ciel, Madagasikara !

Origines« La parole du Christ a cinglé vers nos terres et bâillonné les dires de nos sages. [… ] L’oubli. Rien que l’oubli. Nous avons tant fermé les yeux sur nos origines que le fil des temps s’est rompu et nous a rendus aveugles. Qui maintenant peut se targuer de connaître nos véritables origines ? Nous avons perdu notre passé et notre temps est ainsi écorché. Notre présent boitille, notre avenir dépérit. [… ] Se perdre dans les eaux plutôt que dans la servitude, choisir le suicide plutôt que le martyre. Partir. Rejoindre les terres mythiques alliées au ciel. »(Extrait de Nour, 1947, Jean-Luc Raharimanana.)

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w Le dialogue avec les ancêtres. Tous les Malgaches, du pêcheur vezo au président, se retrouvent unis autour d’un culte commun, la croyance aux ancêtres à travers lesquels on est relié à un clan, à un groupe, à une communauté. À Madagascar, la notion de communauté prévaut sur celle d’individualité.Les ancêtres sont perçus comme des demi-dieux, plus proches des vivants que le fondateur de l’Univers, Andriananahary, le seigneur des ancêtres, d’où un culte fidèle qui imprègne la vie quotidienne des vivants et régit leur vie. La culture malgache ne peut être comprise sans cette constante référence. Les ancêtres sont respectés parce qu’ils représentent les racines de la vie, l’origine du peuple, les fondements de la famille. L’hommage qui leur est rendu est profond et quotidien. Pour la moindre fête, les ancêtres sont invoqués. Il en va de même pour le mariage, la naissance, l’inauguration d’une maison, l’écriture d’une chanson, l’anniversaire. Souvent, le rhum est partagé en l’honneur des ancêtres, mais on sacrifie aussi un poulet, un canard, ou un zébu. Danses, chansons et musique accom-pagnent la cérémonie. Les lieux consacrés, les fêtes, les cérémonies, l’art, la poésie, les proverbes, les liens du sang, et même la circoncision qui fait accéder le jeune garçon à la communauté des hommes, tout contribue à glorifier les ancêtres.

Chaque village a son site sacré. Lorsqu’un Malgache ouvre une bouteille, il n’oublie pas de verser au sol une petite goutte pour les ancêtres. Le coin nord-est de la maison leur est réservé. En de nombreuses régions, des cérémonies ont lieu en présence des reliques des ancêtres.De région en région, ce culte rendu aux ancêtres varie selon les cultures locales. Cette omniprésence des défunts peut paraître étonnante dans une société si jeune (60 % des Malgaches ont moins de vingt ans), où l’enfant est censé être roi. Mais pour les Malgaches, très enclins à la spiritualité, la mort n’est pas perçue sur le mode occidental, comme rupture et comme fin. Sublimation de la vie, elle donne accès à un état supérieur de connaissance, à la sagesse, et permet aux défunts de protéger ceux qui sont encore vivants, de les diriger sur leur chemin. Les ancêtres peuvent être priés d’apporter leur aide aux vivants en ce qui concerne l’amour, la santé, le travail, puis remerciés lorsque la requête a été exaucée.Pour entrer en communication avec les esprits des morts, les Malgaches se livrent à des céré-monies. Les vivants y instaurent un véritable dialogue avec les morts. On les invoque, on leur demande la fertilité ou le succès d’une récolte à l’occasion des tromba, cultes de possession au cours desquels des défunts parlent par l’intermédiaire des possédés.Les zoky olona, ou naoda, sont les doyens, les anciens. Dans les villages, ils disposent

Petit précis du « surnaturel » malgache w Les sorciers ou guérisseurs (ombiasy). Ils ont le pouvoir de rentrer en contact avec

les ancêtres pour connaître les maladies et les soigner. La connaissance des plantes médicinales leur assure un rôle fondamental dans la communauté. On les surnomme : Olona be hasina, c’est-à-dire : « personnes aux grandes vertus ». D’autres sorciers, les Mpamosavy, pratiquent la magie noire, jettent des sortilèges, ou envoûtent les personnes. Ils n’ont pas le droit de pénétrer dans le tombeau familial et ils sont mis à l’écart de la communauté.

w Les talismans (ody). Ces sortes d’amulettes, qui peuvent être du bois, une corne de zébu, un coquillage ou une pièce de monnaie, sont utilisées par le sorcier. Les pouvoirs que confèrent les talismans sont obtenus en échange de sacrifices.

w Les destinées (vintana). Véritables règles sociales, culturelles et spirituelles, elles orchestrent la vie en communauté des Malgaches. Il faut trouver leur origine dans l’astrologie arabe et leur calendrier lunaire. La position des astres dans le cosmos est une source majeure d’influence pour une quelconque activité quotidienne : on ne peut pas construire une maison ou se marier au hasard.

w Le devin (mpanandro). Tout comme les ombiasy, c’est un personnage important dans le village. Sa vocation d’astrologue lui permet de connaître les bonnes ascendances cosmiques, afin de déterminer les jours de mariage, d’exhumation, toutes sortes de cérémonies importantes. Ses avis sont particulièrement écoutés.

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d’un pouvoir moral et spirituel important. Ils sont conviés lors des réunions des collectivités territoriales (surtout les Fokontanys). On leur demande conseil lorsque des décisions impor-tantes engageant la collectivité doivent être prises. On leur témoigne affection et respect. Ce statut est dû à leur expérience accumulée au fil des années, à leur état d’ascendants immédiats, ainsi qu’à leur passage proche à l’état d’ancêtre.Les astrologues, prêtres de tromba et devins sont souvent des anciens. Rois et reines font figure d’ancêtres suprêmes. Une visite attentive au Rova d’Ambohimanga en témoigne. Le poteau central de la case royale d’Andria-nampoinimerina est maintenant protégé par un coffrage sur 2,75 m de haut parce que les visiteurs en faisant une prière au grand roi arrachaient des petits bouts de bois pour en faire des objets saints et des amulettes. Le poteau est donc extrêmement abîmé. Dans le même Rova, en ouvrant les tiroirs des meubles de la chambre de la reine, on découvre des centaines de messages envoyés par les visiteurs à cet illustre ancêtre. Les témoins des messages communiquent avec l’au-delà. On y lit : « Ranavalona, donne-moi une fiancée », « Ranavalona, guéris mon bébé », « Ranavalona, donne-moi de l’argent », etc. Devenir un jour un ancêtre est un élément psychologique important chez les vivants et pour devenir un ancêtre, il faut des enfants, des petits-enfants, une descendance, nombreuse si possible. De ce fait, les enfants sont choyés et protégés. Chaque naissance est une fête.

w La face cachée de la réalité. Pour les Malgaches tout est signification, et la nature est chargée d’enseignements et de symboles

cachés. Ainsi, on fera très attention aux phases de la Lune, astre dominant, symbole de fécondité et de féminité. Pour « vivre » cette relation avec les ancêtres, des intermédiaires sont parfois nécessaires : médiums, devins et ombiasy (sorciers ou guérisseurs). Ils aident à choisir les jours les plus fastes pour la date d’un mariage, d’un famadihana, ou de la construction d’un édifice. C’est ainsi encore que pour des tromba (transes), on choisira plus volontiers le moment de la nouvelle lune qui transmet le mouvement et la liberté.L’importance de l’occulte apparaît également dans le développement des sciences de divi-nation, comme la géomancie et l’astrologie héritées des Arabes. À l’aide de figures complexes et de graines, le mpisikidy (sorcier qui devine par le sikidy ) détermine le sort de la personne venue le consulter. On se soumet volontiers au vintana (destin) et à son caractère inéluctable qui se retrouve dans les fitenanana (les expressions consacrées) : « Le destin ne peut être changé par les hommes car c’est Andriananahary qui le fixe. » L’envoûtement et le désenvoûtement sont pratiqués dans différentes régions. La maladie est parfois attribuée à la colère des ancêtres ou à un voisin malveillant ; pour la soigner, on s’alloue les services d’un guérisseur ou devin (ombiasy) qui la fait disparaître à l’aide de remèdes (fanafody). Le guérisseur utilise soit les plantes médicinales dont il connaît les vertus curatives, soit des antidotes s’il considère que son client a été envoûté. À travers les tromba, il peut aussi invoquer les esprits qui l’aident à combattre le maléfice.

Tromba à Ambato-BoenyPar Emeline Raholiarisoa. « C’était en novembre 1992. Nous venions de chanter le hira gasy pour une famille sakalava qui nous avait fait venir à l’occasion du bain des reliques d’un de ses parents. Après le spectacle, une petite fille est entrée en transe. Elle était habillée avec un pantalon, une veste, elle fumait un cigare. Elle tremblait, haletait. Elle s’est jetée par terre. Un groupe de garçons s’est mis à jouer avec des kabosy une musique de tromba. Et elle tremblait sur le sol et roulait les yeux. Et puis, elle s’est calmée d’un seul coup, s’est relevée et a dit d’une grosse voix : « Salama, je suis Andrianampoinimerina, moi qui vous parle par cette enfant. » Et puis elle a fait un long discours de cette même voix pendant plus d’une demi-heure. Elle s’est arrêtée de parler, a roulé encore une fois les yeux, puis s’est calmée tout à fait. Et là, elle a demandé aux gens qui étaient là de lui raconter ce qu’Andrianampoinimerina avait dit par sa personne, parce qu’elle ne se souvenait de rien. Car cette fille portait en elle un tromba depuis longtemps. Et ce tromba demeura encore en elle. Cela s’est passé à Ambato-Boeny, en région Sakalava, à 140 km de Majahanga, sur la route d’Antananarivo. »

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w L’âme malgache et le surnaturel : les fady. Au-delà du monde tangible et concret que l’homme peut rationaliser, le Malgache reconnaît donc l’existence d’un autre monde, qui, avec ses lois, exerce sur lui à la fois peur et fascination. Il éprouve cependant le besoin de le neutraliser. Certains rites permettent ainsi de domestiquer cet univers obscur avec lequel certains élus ont le pouvoir d’entrer en contact : les fady en sont des exemples édifiants. Ce sont des interdits, ou tabous, qui régissent certains lieux, actes et situations de la vie. Tout le monde les respecte, et il est particulièrement grave de les enfreindre. On raconte à leur propos des légendes aussi belles qu’insolites. À la ville comme à la campagne, le voyageur est tenu de les respecter.Bien souvent dotés d’une valeur morale, ils ont pour fonction de maintenir la cohésion d’une collectivité, d’un peuple, d’une famille ou même d’une seule personne. Ils renforcent en outre le sentiment d’appartenance à un groupe en le différenciant des autres. Ainsi ceux des Vezos ne sont pas les mêmes que ceux des Betsileos. Chez les Zafimanirys, il est tabou, au risque de faire tomber la foudre, de s’appuyer au poteau central qui soutient le faîtage d’une maison. Les Betsileos, eux, ne s’assoient pas sur le pas de la porte par crainte de provoquer une pénurie de riz.Le fady s’applique à des lieux, des êtres, des objets, des animaux et des périodes précises. Ainsi, certaines espèces sont

interdites de consommation, comme les lémuriens, le serpent chez les Betsimisarakas, ou les anguilles à Bekily, dans la région de Taolagnaro.Ces interdits peuvent avoir plusieurs origines. Les fady qui touchent une seule personne peuvent lui être désignés par un devin ou un astrologue en fonction de sa carte du ciel. Plus souvent, ils ont pour origine les collectivités et sont rattachés aux ancêtres. Le jeudi et le mardi sont des jours fady pour le retournement des morts. En ce qui concerne le jeudi, l’interdiction vient de la crainte de ce qu’évoque ce mot : jeudi se disant alakamisy, les dernières syllabes « misy » signifient « il y aura ». Si on ouvre un tombeau ce jour-là, « il y aura d’autres personnes qui suivront ».Transgresser un interdit entraîne le déchaîne-ment de puissances mauvaises. Si on éveille la colère des ancêtres, toute la collectivité en subit les conséquences. Si une seule personne est en cause, elle attire la malchance sur elle. On relate ainsi des cas de noyade qui auraient suivi la non-application d’un interdit. Chez certains peuples, pour briser le déchaînement des forces du mal, un rituel sacrificiel doit avoir lieu, voire un sacrifice sanglant.Les fady collectifs sont héréditaires et se transmettent comme tels : lorsqu’une femme épouse un homme d’une autre région que la sienne, elle conserve ses propres interdits et n’observe ceux de son mari que si la vie en commun l’y oblige. L’origine du fady est souvent très ancienne, mais se retrouve généralement dans une histoire que l’on se transmet de génération en génération. Mais les fady ne sont pas tous destinés à la pérennité et la personne la plus âgée du clan, le devin, ou le mort lui-même, peuvent un jour décider de les lever.

w Les rois d’un jour : la circoncision. La circoncision (circoncision groupée, famorana ou sambatra ) est une cérémonie célébrée durant l’hiver austral de juillet à septembre et jusqu’à octobre dans l’Est (les plaies peuvent alors se cicatriser plus rapidement). C’est, littéralement, la fête du jeune garçon. Elle lui permet de devenir un homme au sein de la communauté. Ce rituel, s’il a perdu de sa force dans les grandes villes, donne lieu dans les campagnes à de grandes fêtes qui rassemblent les familles des jeunes gens et les amis des villages avoisinants pour des réjouissances qui durent plus de quarante-huit heures.Les rites présentent certaines différences, selon les peuples. Certaines festivités attirent

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Eglise de Moramanga.

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des milliers de personnes, comme chez les Antambahoakas de Mananjary, où le sambatra se tient tous les sept ans et dure un mois durant.Au coucher du soleil de la première journée, et après avoir tué les poulets, porcs ou zébus (selon les moyens du groupe), on se livre dans la liesse aux chants et aux danses. On partage un repas de viande et de riz. Dès lors tout est permis, sauf les rapports sexuels. La fête se poursuit jusqu’au surlendemain, jour de la circoncision. On prend particulièrement soin du jeune garçon souvent guère plus âgé que 4 ans. Il reçoit des cadeaux de son père ; sa mère lui prodigue des massages.Au chant du coq, les villageois partent en une procession dansante puiser l’eau « forte » d’une rivière ou d’un fleuve. Dans chaque village qu’ils traversent, les gens qu’ils rencontrent les aspergent d’eau. A leur retour, ils affrontent en une lutte traditionnelle les villageois qui tentent de renverser leurs récipients. Une fois les cruches sauvées du danger, elles sont portées à la maison où a lieu la cérémonie. La circoncision, pratiquée par le médecin de village ou l’astrologue, peut dès lors avoir lieu sur les jeunes garçons endormis, parés de leurs plus beaux vêtements et tenus par leurs pères. Puis, on lave les plaies à l’eau « forte » tandis que les pleurs sont assourdis par les tambours et les cris des femmes, scandant « que le nôtre soit un mâle ».Traditionnellement, selon les différentes tribus, le prépuce est soit avalé par le père dans un morceau de banane, soit tiré en l’air avec un fusil, soit enfilé sur un poteau rituel ; d’autres peuples encore, comme les Antandroys par exemple, se contentent de l’enterrer.

w Le zébu, animal emblématique. Le zébu est simultanément bétail destiné à l’alimentation, animal de prestige et bête de sacrifice. Un lien très étroit l’attache à son propriétaire. Autrefois, à la mort d’un éleveur, tout le troupeau était sacrifié et disparaissait avec lui. Les bucranes (cornes) sont plantés sur les tombeaux, symbolisant le prestige dont jouissait le défunt de son vivant. Le zébu est aussi régulièrement sacrifié lors des mariages et des accouchements. Certains sacrifices laissent d’ailleurs songeur : on raconte ainsi que la reine Ranavalona Ire, lors de ses séjours à Tsinjoarivo, près d’Ambatolampy, s’amusait à précipiter des zébus vivants du haut d’une cascade : plaisante distraction de les voir se fracasser en contrebas ! Les impressionnants troupeaux qui paissent en pays Sakalava

pourraient représenter de bonnes sources de revenus. Et pourtant ils sont là pour la parade ! C’est pourquoi il a été question d’élevage contemplatif dans le Sud, chez les Baras par exemple, où, pour se marier, le fiancé a tout intérêt à mettre dans la corbeille un troupeau de zébus. Sinon, il peut perdre celle qu’il convoite ! Mais ces traditions ont tendance à se perdre à cause des difficultés économiques.

w Religions importées. D’autres religions sont venues à Madagascar du bout du monde. Avec les commerçants arabes, l’islam s’est implanté à partir du VIIIe siècle sur la côte est, en Antaimoro, près de Manakara, et sur la côte ouest, à Mahajanga. Ici, le dimanche, dans la torpeur de la mi-journée qui s’achève, les fidèles psalmodient les sourates du Coran dans les grandes mosquées. Il y en a d’autres à Morondava, à Toliara et à Antananarivo. L’islam est ici la religion d’un petit nombre et il est empreint de tolérance. C’est un islam malagasy, à mille lieux du fanatisme des fous de Dieu et autres intégristes. L’intégrisme est inconcevable à Madagascar, pays où les femmes sont respectées et participent aux décisions. La tolérance est un fondement de l’identité culturelle malgache.Le christianisme s’est implanté à Madagascar en deux étapes. D’abord, les églises réformées britannique et norvégienne ont mis à profit « l’européanisme » relatif du roi Radama Ier. Mais c’est surtout des décennies plus tard que les choses sont devenues plus complexes, lorsque les liens entre missionnaires, services secrets français et commerçants européens inquiétèrent la reine Ranavalona II, qui redoutait les tentatives de subversion de l’Etat certainement à juste titre, puisque les empereurs du Viêt-Nam, à la même époque affrontaient l’invasion des armées fran-çaises venues sous le prétexte de défendre la liberté de culte et du commerce, dans un pays souverain situé aux antipodes de la France !L’influence du christianisme s’est accentuée lorsque la monarchie Merina s’est convertie au protestantisme, comme en témoigne un temple construit à l’intérieur de l’enceinte du Rova, la cité royale, à la demande de Sa Majesté la reine elle-même, en 1869. La religion catholique s’est surtout implantée à la suite de l’établissement de l’armée coloniale à partir de la fin du XIXe siècle. La bienveillance de l’administration coloniale pendant plusieurs décennies lui a permis d’exercer une influence notable dans toutes les régions du pays.

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Le patrimoine intangible de Madagascar fait l’objet d’une grande attention de la part des autorités culturelles nationales et interna-tionales : de nombreux projets de collecte, de conservation et de valorisation du patri-moine nous permettent de mieux connaître les arts traditionnels des Malgaches. Toutefois, ces heureuses initiatives sont actuellement freinées par les limites du budget pour la culture et les difficultés d’accès de certaines zones éloignées. Le pays a d’autres priorités (économiques) : espérons que le terreau artis-tique et culturel de la Grande Terre ne subisse pas pour autant les coups de la bêche affûtée de la croissance et de la mondialisation. Fortins merinas et palais royaux, bastions portugais et comptoirs arabes, on trouve des monuments historiques dans toutes les régions. Chaque province possède un riche patrimoine culturel. Près de la capitale se trouve Ambohimanga, la cité royale qui vit naître l’Etat malgache au XVIIIe siècle ; c’est une succession de palais, de

cases royales, de lieux sacrés. A Antananarivo même, l’imposant palais de la Reine, en cours de restauration, surplombe la ville. En outre, on pourra y découvrir tombeaux, cases royales et palais. Les douze collines sacrées de l’Imerina portent la mémoire des trois siècles passés. Dans les provinces, on découvrira de nombreux vestiges de l’histoire de Madagascar : reliquaires royaux sakalavas, fortins portugais, comptoirs arabes, bâtiments de style colonial français, citadelles merinas… Un inventaire exhaustif reste à faire, et, partout, l’usure du temps est visible. La restauration de ce patrimoine menacé de disparition est une urgence. Trois sites malgaches sont inscrits au Patrimoine de l’Humanité : les Tsingy de Bemaraha depuis 1990, le Palais royal d’Ambohimanga depuis 2001 et les six parcs naturels des Forêts humides de l’Antsinanana depuis 2007 (incluant le superbe massif de Marojejy près de Sambava).

ARCHITECTUREL’architecture malgache traditionnelle est bien différente de celle qu’on trouve partout en Afrique : pas de case rondes, mais des

huttes rectangulaires sur pilotis (toit pentu, grosse poutre au centre – andry, et des cornes décoratives – tandro trano ), un peu comme au sud de Bornéo. Autre ressemblance : les tombeaux des ancêtres avec leurs statues en bois sculpté, appelées aloalo à Madagascar et klirieng à Kalimantan, la partie sud de Bornéo. Les matériaux majoritairement utilisés sont le bambou, le jonc, les succulentes endé-miques, le papyrus, le palmier (notamment le ravinala ou arbre du voyageur) et le raphia. Le bois, jadis prédominant, a peu à peu disparu suite à la déforestation intensive, sauf chez les Zafimanirys des hauts plateaux ; chez les Merina, il a été réservé aux élites en raison de sa rareté, ainsi qu’aux tombeaux des ancêtres. Aujourd’hui, l’influence européenne et indienne est manifeste, avec l’utilisation du ciment, du fer et de la vitre, et l’abandon progressive de la signification de l’emplacement de la maison, ainsi que des objets à l’intérieur. Mais certains projets existent pour redonner vie à l’architecture d’autrefois, par exemple à Tana avec les belles demeures en briques, tout le confort moderne en plus (voir l’hôtel Tamboho au Tana Water Front notamment).

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Maison traditionnelle à Antananarivo.

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Que ramener de son voyage ? w Tissus : lamba (étoles finement brodées)

de soie, nappes brodées (magnifiques à Nosy Be, à Hell-Ville), tee-shirts sérigraphiés, peintures sur soie. w Bois sculptés : aloalo, statuettes, boîtes

de palissandre, fauteuils, meubles, maquettes de bateaux, instruments de musique (valiha, kabosy...), jeux traditionnels, chaises, coffres,. Aussi des reproductions de couverture d’albums de Tintin (dont l’un, à Madagascar, qui n’a jamais existé) ou Astérix. Surtout à Ambositra, sur la route du sud. w Vannerie : on fabrique sur l’île de multiples

objets en matière végétale : raphia, jonc, palmier, cocotier… À dénicher : de très beaux chapeaux, des paniers, des nattes… w Poivres, épices, vanille : amis

gourmands, vous êtes au paradis ! Poivre vert, blanc ou noir, baies roses, piment, curry, clou de girofle, coriandre, paprika, safran, cannelle, cumin, curcuma, combava, noix de muscade... Aussi des achards, et bien sûr de la vanille ! w Pierres taillées : il y en a de toutes les

formes et couleurs, depuis l’œuf de cristal jusqu’au jeu de solitaire dont chaque bille est une pierre rare de Madagascar : agate, onyx, rubis, émeraude, quartz… w Bijoux en or ou en argent : colliers,

bracelets (à voir, ceux des Antandroy dans le sud), boucles d’oreilles, perles. Très belles reproductions des bijoux que portaient les reines de Madagascar.

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ARTISANATL’artisanat malgache traditionnel connaît actuellement un essor lié au développement de l’industrie touristique. Parmi ses principales expressions, on signalera tout particulièrement les tissus, les bois et les bijoux. A Antananarivo, les artisans sont regroupés en plusieurs pôles. On apprécie le grand marché d’Andravoahangy. L’art de la récupération est exposé principale-ment place de l’Indépendance. Les bijoutiers les plus créatifs sont à Antaninarenina.

w Récupération : par la magie de l’habileté des artisans pauvres, des boîtes de Coke et de Flytox se transforment en Harley Davidson, en taxis-be ou en avions d’Air Madagascar. Des couleurs toujours gaies – bleu, vert, rouge, jaune – et un trésor d’invention. À l’origine, c’étaient des créations des sans-abri d’Antananarivo. Aujourd’hui leurs jouets sont célèbres. Le métier de ferblantier, disparu chez nous depuis longtemps, a encore ici de beaux jours devant lui.

w Le papier « antemoro ». Papier fabriqué selon d’anciens procédés, redécouverts par Pierre Mathieu au début du XXe siècle. L’entreprise qu’il avait fondée à Ambalavao fonctionne toujours. Ce papier, de couleur blanc écru, épais et granuleux, est entièrement réalisé à la main, puis séché. On l’utilise ensuite pour des reliures, des enveloppes, des abat-jour…

w L’art « Zafimaniry ». Il s’agit du travail du bois traditionnel d’une tribu des Hautes-Terres, près d’Ambositra : cette ethnie réalise des portes sculptées, des fauteuils à deux pans, des sarbacanes… La disparition progressive de la forêt menace sérieusement la pérennité de cet art magnifique qui a depuis longtemps dépassé les frontières du pays.

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Atelier de vannerie, Palmeraie de l’Ivondro.

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CINÉMADotée de peu de moyens économiques, l’industrie cinématographique malgache n’en est qu’à ses débuts. En fait, les premières œuvres furent des documentaires, comme celui de Raberono en 1947 à l’occasion du centenaire de la mort de Rasalama. Le premier moyen-métrage de fiction est L’Accident de Benoît Ramampy, en 1972 ; l’année suivante, Ignace-Solo Randrasana évoque l’exode rural dans le premier long métrage malgache, Le Retour. Voir des films malgaches reste difficile. Il est certain cependant que la Grande Île, avec ses décors naturels, son passé tumultueux et le talent de ses auteurs, devrait voir naître un cinéma vivant dans un avenir proche. En attendant, le film Taba Taba, de Raymond Rajaonarivelo, a fait un… tabac au Festival de Cannes 1988 ! C’est l’histoire de la révolte de 1947, revue dans son contexte culturel et spirituel. Cinéastes et interprètes se perfectionnent en attendant que le développement économique du pays ait aussi des conséquences sur la

production. Madagascar s’est retrouvée sur le devant de la scène cinématographique internationale pendant l’été 2005, lors de la sortie en salle du dessin animé Madagascar. Celui-ci rapporte l’histoire d’Alex, un lion qui est la star du zoo de New York, où il vit en compagnie de ses compères le zèbre Marty, la girafe Melman et l’hippopotame Gloria. Curieux, notre lion décide de s’échapper et de partir à l’aventure avec une bande de pingouins : les quatre amis finissent par échouer sur les côtés d’une île aux senteurs vanille : Madagascar. Dure, dure, la vraie jungle ! Bien sûr, ce film (suivi d’un second puis d’un troisième volet) n’est pas une production malgache.

� PRODUCTIONS DE LA LANTERNE8, avenue de la Porte-de-Montrouge, Paris (14e) & +33 1 45 34 47 39www.lalanterne.frPour se procurer des vidéos malgaches.

DANSEMariages, fêtes de la circoncision, hommages aux morts, funérailles, les occasions de danser sont multiples. Avant que les danseurs n’enva-hissent la piste, chaque bal est traditionnel-lement ouvert par l’afindrafindrao, une danse en couple où les partenaires se tiennent côte à côte.Chaque région – Tanala, Antandroy, Betsimisaraka – propose des figures et des rythmes particuliers. Certaines danses ont des gestuelles très proches de l’Afrique, d’autres rappellent les grâces de l’Asie. La tenue vestimentaire a, suivant la région, des expressions diverses : le lamba de satin ponctue les gestes des chanteuses des Hautes Terres, les pagnes rouges et bleus ornent les hanches des danseuses antandroys, tandis qu’en région Sakalava les drapés et les voiles évoquent les Comores et la Somalie. Partout, la pulsion de base est donnée par un tambour. Cette pulsion-là vient des profondeurs de l’Afrique.Les danses contemporaines les plus popu-laires dans toutes les régions s’apparentent à la « sono mondiale » : kwassa-kwassa,

soukouss, zouk, reggae sont dansés partout, et, dès la sortie de l’école primaire, garçons et filles se rassemblent près des transistors pour s’entraîner, souvent avec le plus grand sérieux. Ici, la devise du Zimbabwe « If you can walk, you can dance ; if you can talk, you can sing »(« Si vous savez marcher, vous savez danser ; si vous savez parler, vous savez chanter ») est appliquée dès que les bébés tiennent sur leurs pieds. Un rythme cadencé et des mélopées sensuelles annoncent le salegy, une musique et une danse spécifiques à Madagascar, jouée et dansée dans tous les night-clubs et les fêtes populaires.Le salegy, musique type de la région de Diego Suarez mais aussi de Nosy Be, se danse à deux, en se tenant par la taille, ou en groupe, en une procession d’avant en arrière au rythme du tempo. Rossy l’a fait découvrir aux Européens lors de ses tournées à Berlin et à Paris, mais Jaojoby reste son représentant malgache le plus fameux. Aujourd’hui, il donne souvent des concerts au Jao’s Pub, près de l’Université à Tana.

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LITTÉRATURE w Parole et kabary, hain-teny et poésie.

La parole tient un rôle essentiel. Une parole qui se mue en figure de style, en allégorie, en parabole et en poème. En de multiples occasions – arrivée d’un ami venu du bout du monde, fiançailles, inauguration d’un pont, naissance – un discours poétisé, où l’humour a toujours sa place, est préparé ou improvisé. Désiré Charnay disait déjà du Malgache en 1862 : « La conversation fait ses délices ; il aime, il adore l’éloquence comme une mélodie ; il causera longtemps de choses futiles, au besoin de non-sens, et l’orateur de quelque talent trouvera toujours des auditeurs charmés » .Les kabary sont des discours très organisés et mis en scène. Spectacles de la parole-poème, ils sont écrits et déclamés par des orateurs qui en font métier tout en étant, souvent, des paysans, riziculteurs. Ils ont lieu lors de grands événements de la vie, pour les famadihana, et aussi en des occasions plus prosaïques comme des campagnes électorales ! Les spectacles de théâtre hira gasy sont régulièrement ponctués de kabary.Alors que contes, paroles et kabary sont le plus souvent transmis par la tradition orale, il existe à Madagascar une forme de littéra-ture écrite qui remonte au XVIIIe siècle : les hain-teny. Ce sont des poèmes en prose qui évoquent souvent la vie et l’amour, la mort et les ancêtres. Joutes oratoires où rivalisent les beautés du verbe, ils sont nés en Imerina. Certains évoquent les pantoums malais. Leurs allégories ont été très prisées, en Europe, par les surréalistes.

On peut en trouver une très belle sélection effectuée par Jean Paulhan lors de son long séjour malgache au début du XXe siècle.En voici un extrait (un homme déclame sa flamme, une femme lui répond. Imaginez la scène devant une haute maison carmin à balustres et portiques sur fond de ciel bleu des Hautes Terres) :« Je vous aime.– Et comment m’aimez-vous ?– Je vous aime comme l’argent.– Vous ne m’aimez pas vraiment : si vous avez faim, vous m’échangerez contre ce qui se mange.– Je vous aime comme la porte.– Vous ne m’aimez pas : on l’aime et pourtant on la repousse sans cesse.– Je vous aime comme le lambamena.– Vous ne m’aimez pas : nous ne nous rencon-trerons que morts.– Je vous aime comme la voatavo : fraîche je vous mange.Sèche je fais de vous une tasse. Cassée je fais de vous un chevalet de valiha.– Je jouerai doucement au bord des routes. »(Extrait de Hain-Teny Merina, recueillis et traduits par Jean Paulhan, Mission française de coopération Alliance française/SME, Antananarivo,1991.)

w Poésie et littérature. La poésie est partout. Poésie vivante, littérature du peuple, puisque les paysans eux-mêmes écrivent des poèmes, mais aussi littérature des intellectuels. Madagascar compte une pléiade de poètes. Le début du XXe siècle a surtout été marqué par Jean-Joseph Rabearivelo et Flavien Ranaivo, qui écrivaient tous deux souvent dans notre langue.

La couleuvre et la grenouilleCitée par Désiré Charnay, « Madagascar à vol d’oiseaux », 1862« Une grenouille fut surprise en ses ébats par la couleuvre son ennemie ; la couleuvre la retenait par ses jambes de derrière.« Es-tu contente, demanda la grenouille ?– Contente, répondit la couleuvre en serrant les dents.– Mais quand on est contente on ouvre la bouche et l’on prononce ainsi : contente ! (en malgache kavo ).– Contente, » dit la couleuvre en ouvrant la bouche.« La grenouille se voyant dégagée lui donna des deux pattes sur le nez… et s’enfuit. »La morale est que l’on peut se tirer de danger avec de la présence d’esprit.

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« Salut, terre royale où mes aïeux reposent,Grands tombeaux écroulés sous l’injure du temps ;Et vous, coteaux fleuris, que deux fleuves arrosent,Avec leurs ondes d’or aux reflets éclatants. »(Extrait de Stances liminaires, Jean-Joseph Rabearivelo.)Durant les années qui ont précédé l’Indé-pendance, un poète, député, a symbolisé le combat pour la liberté. Arrêté en 1947, déporté en France, Jacques Rabemananjara a écrit en prison certaines de ses plus belles pages sur Madagascar. Né à Maroantsetra et apparenté aux familles royales betsimsaraka, il était aussi, d’après ce qu’il révéla dans son autobiographie en 1995, l’héritier de la dynastie royale merina.« Île,Île aux syllabes de flamme !Jamais ton nom cher à mon salut, cher à mon âme,Île,Ne fut plus doux à mon cœur !Île aux syllabes de flammeMadagascar ![… ]Mais ce soir, la mitrailleuseRacle le ventre du sommeil.La mort rôdeParmi les champs lunaires des lys.La grande nuit de la terreMadagascar ! »(Extrait de Ô Liberté, Jacques Rabemananjara.)En ce début de XXIe siècle, une nouvelle génération de poètes s’exprime en malgache

et prend une part active au développement culturel du pays.« Te raconterai-je un jour l’histoire de ces enfants qui du haut de la falaise s’élançaient pour franchir l’horizon ? Te raconterai-je leurs corps qui s’écrasaient contre les récifs et qui se déchiraient en sang sur les vagues tranchantes ?Te raconterai-je leurs yeux si brillants qu’ils brûlaient leurs âmes ? J’ai vu, mon amour, ces enfants insensés qui retraçaient dans leurs chutes les figures de l’abîme. Ils dispa-raissaient dans l’eau et plus rien ne semblait rappeler leur souvenir.Aujourd’hui, mon amour, sur ce rivage dévasté par l’ouragan, envahi par les eaux, je songe à ce que l’on avait perdu : l’espérance, toute l’espérance de la Terre.Je pleure.Cet enfant, je l’ai rencontré un soir alors qu’il pulvérisait des coquillages de toutes les couleurs. Il s’est levé, a marché, titubé vers la falaise.Chanter. Chanter. »( Ex trait de Nour, 1947, Jean-Luc Raharimanana.)Le roman malgache n’a pas encore connu l’essor de la poésie. Mais des talents s’ex-priment aussi en ce domaine. Pour ceux qui souhaiteraient emporter en voyage un roman malgache écrit en français, on conseil-lera tout particulièrement ceux de Michèle Rakotoson, et notamment Le Bain des reliques qui fascinera les voyageurs visitant la côte ouest (disponible aux éditions L’Harmattan, à Paris).

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La plage d’Ankasy.

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MÉDIAS

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� MADAGASCAR TRIBUNEwww.madagascar-tribune.comExcellent journal en ligne sur Madagascar, pour se tenir au courant de l’actualité.

� NEWS MADAhttp://newsmada.comSite intéressant d’informations, actualités...

� NO COMMENTwww.nocomment.mgCe petit mag mensuel au format de poche se trouve partout à Mada (diffusion à 25 000 exemplaires). On y trouve un paquet d’infos, de petits reportages, de photos, de contacts, etc. Tout le monde attend la nouvelle mouture chaque mois avec impa-tience. Et No Comment est dorénavant le distributeur exclusif de notre guide Petit Futé à Madagascar !

� OFFICE NATIONAL DU [email protected] de l’office national du tourisme, recensant les hôtels, les opérateurs locaux, etc. Bien pour recenser tous les contacts et en savoir un peu plus sur la destination.

� ONG MADAGASCARwww.ong-madagascar.orgPortail de toutes les Organisations non gouver-nementales à Madagascar.

� PARCS MADAGASCARwww.parcs-madagascar.comcontact@madagascar.national.parks.mgLe site officiel des parcs nationaux et réserves naturelles de Madagascar.

� SOBIKAwww.sobika.com – [email protected] d’infos sur Mada, reportages, petites annonces…

� TOUT MADA& 09 70 46 30 04 – www.toutmada.comAppels gratuits depuis un poste fixe en France tous les jours de la semaine de 8h à 18h.Excellent site détaillant divers itinéraires, donnant de bons conseils, des informations pratiques, et surtout permettant de réserver votre séjour (hôtels) en ligne.

MUSIQUELa musique fait partie intégrante de la vie populaire malgache. On en joue et on en écoute à toute occasion, lors de fêtes familiales et communautaires, de cérémonies religieuses et traditionnelles (comme celles d’invocation des ancêtres, ou joro ), de veillées mortuaires (tsimandrimandry ), etc. Partout présents,

tambours, flûtes et guitares prennent des formes différentes suivant les régions de l’île, où chaque événement est prétexte à la fête : naissance, circoncision, mariage, réussite aux examens, campagne électorale, funérailles, « retournement des morts » …Pourtant, cette musique a mis longtemps avant de franchir les océans et de se faire entendre en Occident, contrairement à d’autres mélodies traditionnelles, indiennes ou andines par exemple. À vrai dire, et c’est une règle générale sur la Grande Île, les harmonies musicales malgaches évoquent des influences asiatiques (on parle d’un ancien fond « malayo-polynésien »), arabes, africaines et européennes. Une sorte de métissage sonore fascinant qui a bien su résister aux « invasions » occidentales.

Citation« Prenez la kabosy, jouez de la valiha, donnez à nos vieilles chansons une nouvelle vie, faites-les de nouveau résonner en dansant pour qu’elles retentissent fièrement dans le chœur des chansons des peuples. »(Extrait du morceau Hira Gasy, de Rossy.)

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Les années 1960 furent toutefois marquées par le rock’n roll et la pop-musique. Il était alors à la mode de chanter en anglais ou en français. Le grand tournant de la chanson malgache date de 1972, de la révolution malgache. À cette époque, plusieurs groupes, dont Rossy et Mahaleo, contestaient l’ordre établi et prônaient la recherche d’une identité cultu-relle malgache par des textes écrits et chantés en langue malgache et des rythmes et sons issus du patrimoine culturel national. Plus de quarante ans plus tard, ces pionniers de la nouvelle chanson malgache attirent toujours les foules. Il suffit d’ouvrir la radio pour les entendre, de regarder la télévision le soir pour voir leurs derniers clips : Madagascar a ses pop-stars qui donnent des concerts. Pour en connaître les dates, parcourez les journaux, regardez les affiches apposées sur les murs des villes, écoutez la radio.Les rythmes les plus en vogue à Madagascar ont pour noms salegy (le grand maître est Jaojoby, mais on peut aussi citer Mily Clément, Tianjama, Ninie ou Bery-Kely…), un terme générique qui regroupe tuska au sud, basesa à l’est, ou malesa à l’ouest ; soukouss, kwassa-kwassa, reggae, zouk, sega, maloya, mbaqanga, benga. Ce sont des rythmes dansants, propices à la fête.Les textes des chansons à succès s’ins-pirent souvent de la vie quotidienne du pays ; nombre d’entre elles peuvent être étiquetées engagées, mais l’on célèbre aussi l’amour, la passion, l’absence et l’on reprend les thèmes majeurs de la tradition littéraire classique des hain-teny (tradition poétique malgache dont l’origine remonte au XVIIIe siècle). La chanson s’inspire également du traditionnel hira gasy.Les rythmes qui font danser tout Madagascar prennent leurs racines dans les fêtes popu-laires et les bals qui animent les villages et les quartiers. Les instruments venus des campagnes, comme le kabosy, les tambours et le valiha, sont associés à l’accordéon, aux batteries, aux guitares, aux basses et au synthétiseur.

w Les instruments de musique. Le kabosy et la valiha sont deux instruments de musique parmi des centaines d’autres que vous pourrez voir (et entendre) lors de vos balades à la campagne dans les Hautes Terres.Le kabosy est une sorte de guitare hawaïenne, un luth à manche court. Il fut probablement introduit à Madagascar par les Arabes. C’est l’instrument privilégié de la rue et de

la pauvreté. Le valiha est une variété de cithare (ou harpe tubulaire) faite d’un tuyau de bambou entouré de cordes (18 à 54 !), d’origine asiatique. Cet instrument utilisé par les nobles est encore présent à Bornéo, au Viêt-Nam, à Timor et aux Philippines.On ne saurait également oublier le gorodao, sorte d’accordéon diatonique popularisé à partir des années 1950, le lokanga (violon traditionnel à trois cordes), le marovany (harpe ou cithare sur caisse), le kabiry (hautbois) ou la sodina (flûte malgache traditionnelle).Les marchands de souvenirs du grand marché d’Analakely (qui ont leurs étals sur le trottoir et sous les arcades, à droite en descen-dant vers la gare d’Antananarivo) ou des autres marchés de la capitale, proposent aux mélomanes valiha, kabosy, rondro et différents autres instruments traditionnels. Vous trouverez aussi sur les étals une carte de Madagascar, taillée dans du bois et décorée des reproductions miniatures des principaux instruments traditionnels, localisés par région et identifiés par leur nom.

w Hira gasy, l’opéra du peuple malgache. Imaginez des hommes portant des tuniques rouges à galons et des chapeaux de paille. Une sorte d’armée en musique jouant tambours, violons et trompettes. Des femmes, yeux en amande et peau dorée dans de longues robes de satin rose, rouge, bleu. Le tout sur un sol de latérite, devant le vert tendre des rizières en terrasses. Deux mille paysans forment un cercle autour de cette scène naturelle. Les chants succèdent aux danses, les poèmes déclamés sont suivis de numéros de voltige… C’est le hira gasy, une forme d’expression artistique unique à Madagascar. Comment le définir ? Cela tient à la fois du théâtre et de l’opéra. L’une de ses particularités est d’être conçu, écrit, chanté et dansé par des paysans. Le public est aussi majoritairement composé de paysans, mais toutes les couches de la société adorent le hira gasy. Cet art est né en Imerina, mais les compagnies les plus célèbres, comme la Tarika Ramilison Fenoarivo, rassemblent aussi les foules sakavala, betsileo, betsimisaraka lors de leurs tournées dans les régions de Mahajanga, de Fianarantsoa et de Toamasina.Les Hira Gasy remontent à l’époque du roi Andrianampoinimerina, qui proposait ce spectacle au cours des grands travaux d’irrigation. Les chanteurs (Mphiria Gasy) s’appelaient alors « Mpihiran’Andriana » (chanteurs du roi).

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Aujourd’hui, le spectacle se divise en cinq parties : le Sasitehaka (prélude d’une dizaine de minutes, au son des tambours et des battements de mains ; les danseurs et les musiciens pénètrent alors sur la scène) ; le Kabary (discours d’un quart d’heure environ présentant le spectacle, les dames sont invitées à gagner la scène) ; le Renihira (chant principal évoquant le thème de la manifes-tation, comme l’amour, les problèmes de la jeunesse…) ; le Dihy (danse d’une vingtaine de minutes qu’achève un discours, pendant que la troupe s’accroupit autour) ; le Zanakira (dernière démonstration d’un quart d’heure, la troupe quitte la scène).Les troupes sont souvent composées d’une vingtaine de personnes. Chanteurs, danseurs, acrobates et musiciens s’installent en cercle. Le public les entoure.Chaque spectacle commence par un kabary déclamé par le doyen de la troupe, pour remercier les ancêtres, saluer le public, exprimer des vœux à tous. Ensuite, les chansons se succèdent, et l’envoûtement se produit. La grâce des gestes souligne une formule poétique, accentue une idée. Les textes évoquent la vie et les ancêtres, l’amour, la mort, le travail et aussi la protec-tion de la nature, le contrôle des naissances, la solidarité entre pauvres, la prévention du sida. En effet, le hira gasy allie à une forme artistique une vision du monde.Durant le spectacle, les danseurs se rapprochent du public afin que chaque spectateur puisse voir, écouter, apprécier le talent de chacun des membres de la troupe. Il arrive fréquemment

que plusieurs troupes se succèdent en un même lieu. Alors, les hira gasy rivalisent de talent par leur chant, leur éloquence et la beauté de leurs costumes. Les troupes se lancent des défis. Le public, seul juge, départage les troupes à « l’applaudimètre ».Les costumes sont riches en couleur : les danseuses sont habillées de robes inspirées des vêtements des reines de l’Imerina. Les hommes sont le plus souvent vêtus de rouge avec un lamba blanc, la tenue d’apparat des armées royales merinas du XIXe siècle. Tambours, violons, trompettes accompagnent les voix.Partout, lorsque la radio ou la télévision diffusent du hira gasy, le silence est immédiat. Où que l’on soit, les gens se concentrent, savourent, puis des sourires s’esquissent ; une exclamation approuve la qualité d’une rime ou d’une allégorie… Une attention toute parti-culière est accordée au texte : les messages sont profonds.Durant la saison sèche, de mai à octobre, les compagnies de hira gasy donnent spectacle sur spectacle.Les Mpihira Gasy sont pauvres, mais leur solidarité est sans limites. Une troupe de vingt acteurs Mpihira Gasy fait généralement vivre plus de cent vingt personnes ; parents sans emploi, personnes âgées, étudiants sont pris en charge par le groupe. Ces artistes paysans de Madagascar ont été à l’honneur dans l’une des plus anciennes universités du monde, la Sorbonne, où une thèse de doctorat leur a été consacrée, « Madagascar le théâtre du peuple, l’art hira gasy entre tradition et rébellion » .

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Processions traditionnelles des reliques royales, Mahajanga.

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PEINTURE ET ARTS GRAPHIQUES w Couleurs ciel et terre. Dans les quelques

galeries d’Antananarivo, on peut faire connaissance avec les peintres et sculpteurs malgaches. Certains hôtels organisent des expositions, ainsi que le Cercle germano-malgache et l’Alliance française.

w Les grands noms de la peinture malgache. L’un des plus grands peintres locaux est James Rainimaharosoa (1860-1926) ; il commit une toile présentant le général Gallieni et sa famille et participa à l’Exposition universelle de Paris en 1900.Vint ensuite Henri Ratavo (1881-1929), apprécié des colonisateurs de l’époque. Puis Joseph Ramanakomonjy qui participa à plusieurs expositions à Paris, l’île de la Réunion et l’île Maurice. Ou encore Georges Razanamaniraka (1900-1944), dont l’œuvre fut très appréciée à

l’époque. Ou enfin Roland Raparivo, « peintre conservateur classique » selon ses propres mots, chantre de l’art figuratif sur la vie quotidienne malgache.

w Parmi les artistes les plus en vogue actuellement, citons Belanto, dont les couleurs rappellent les terres de Madagascar et dont l’inspiration mêle surréalisme et sensibilité typiquement haïtienne. Quant aux titres de ses œuvres – Lambada au féminin, A life of bliss in your arms, La Sainte Nonne de Lémurie, Super intello – ils ne sont pas tristes… et sont assez évocateurs : Belanto est vraiment un artiste original. On peut le rencontrer au bar du Cercle germano-malgache.C i t ons aus s i F r anço is Roma in Rakotoarimanana, qui peint des scènes traditionnelles de la vie quotidienne malgache.

SCULPTUREDédié aux ancêtres, partout, l’art funéraire sacré occupe une place prépondérante. En cette terre malagasy plus qu’ailleurs, les morts sont vénérés. Ce respect des ancêtres s’exprime dans l’art funéraire, très artistique.Les amateurs d’art feront de nombreuses décou-vertes : tombeaux décorés en Imerina, aloalo (statues de bois sculpté et ajouré) et amoncel-lement de cornes de zébu en région Mahafaly, statues antandroys, stèles sculptées en région Vezo-Sakalava (statues érotiques réputées).La statuaire funéraire malgache est variée. Elle représente des personnages en uniformes de gendarme, des taxis-brousses, des zébus, des couples faisant l’amour… Hommage constant aux ancêtres, ce patrimoine est

en danger. En effet, un trafic d’objets rares est organisé par certains tour-opérateurs européens sans scrupules, pour alimenter les marchés d’art de Paris, de Londres ou de New York. Les statues volées sur les tombes près de Morondava et Morombe se retrouvent vendues pour plusieurs milliers d’euros dans les galeries d’Europe et d’Amérique.La statuaire funéraire a toujours un sens. L’aloalo en forme d’avion atteste que l’ancêtre a voyagé. Une statue funéraire en tenue militaire signale que la personne représentée est allée à la guerre. Quant aux désormais très rares statues érotiques (la plupart ont été volées), elles sont des évocations, des vœux de fécondité.

Le petit oiseau qui mange les yeuxPar Emeline Raholiarisoa. « Un jour, il y avait un petit garçon âgé de trois ans qui pleurait tout le temps. Sa maman pourtant le choyait beaucoup. Elle lui donnait des petits gâteaux et beaucoup de choses pour jouer. Mais cela n’y faisait rien. Il pleurait et pleurait encore.Excédée, sa maman lui dit : « Si tu ne cesses pas tes caprices, le petit oiseau qui mange les yeux viendra… si tu ne cesses pas de pleurer, il te mangera les yeux. Ce n’est pas une blague. »C’est la sœur de ma mère, ma tante Marie-Louise, de Fenoarivo, qui m’a raconté cette histoire un jour où elle m’avait demandé de faire ses courses, et où j’avais refusé par caprice… On raconte cette histoire aux enfants capricieux. Pour la rendre plus véridique, on ajoute qu’à la saison sèche, les petits oiseaux ont très faim parce qu’il n’y a rien à manger, et alors… »

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TRADITION ORALEExpression d’une relation avec le cosmos, la tradition orale a également une fonction philo-sophique et morale. Dans les campagnes et les collines, les forêts et toutes les îles, récits mythiques, légendes et contes se transmettent de génération en génération.Chaque région est un lieu de création et de transmission des récits légués par les anciens. D’année en année, de nouvelles histoires naissent de l’imagination populaire. Au cœur des récits, les ancêtres ont souvent un rôle déterminant. Des créatures fabuleuses se mêlent aux vivants ; l’aventure est là, imagi-naire. Les contes sont partout. À la campagne comme en ville, il convient d’écouter les anciens et les jeunes. Les histoires comme celle qui suit sont fort répandues.

Des exemples et des proverbes (ohabolana ), on en écoute les jours de mariage et d’anni-versaire, au début des spectacles de hira gasy ; on peut aussi les lire dans des livres ; certains sont même tagués sur les murs ! C’est une forme d’expression très prisée des Malgaches. Leur forme est poétique et leur contenu véhicule toujours une morale.

w Ny marina tsy mba maty. Jamais le juste ne meurt.

w Ny andriana no manjaka, ny vahoaka. Si le roi règne, c’est à cause du peuple.

w Aza manao kitapo hamelana lolompo. N’ayez pas de bourse pour y garder rancunes.

Les fitenenanaCe sont des proverbes, des maximes, des dictons, des préceptes, des adages. Ils assurent la conservation et la transmission de la culture traditionnelle, en évoquant les idéaux d’une société, une éthique, une vie communautaire, une vision du monde, de la mort, de l’amour…

w Raha tanora tsy ho jejo, dia aleo ho razana. Si un jeune ne cherche pas à s’amuser, autant qu’il devienne un ancêtre.

w Ny alahelo raki-malala ka tsy ambara raha tsy amin’ny olon-tiana. Les peines sont comme un trésor précieux qui ne se dévoile qu’à ses proches.

w Tsy manao, be fondro, manao be tsiny. Qui ne fait rien s’attire des blâmes, qui agit s’expose aux critiques.

w Hazo an’ala, ny mahitsy ihany no maty aloha. Tels les arbres de la forêt, ce sont ceux qui sont droits qu’on abat en premier.

w Tanora vady ka ratsy nahandro. Jeune épouse, mauvaise cuisine.

w Ny fihavanana toy ny raty : raha enjanina tapaka, raha ketrahina miboraka. L’amitié est comme l’écorce de bananier : tendue trop fort, elle se rompt, mais si on la relâche trop, ses fibres se séparent.

w Arahabao ny mpandalo fa tsy fantatra izay ho fara-rafozana. Saluez tous ceux que vous croisez en chemin car vous ne savez pas qui sera finalement votre belle-mère.

w Mahita ny akanga tsara soratra ka manary ny akoho taman-trano. Voir une pintade au plumage séduisant et délaisser la poule fidèle au foyer.

w Ny harena rano an-tami-bato ; tazanina, be ; andraofana, tsy ahazoana hoatrinona. La richesse est pareille à l’eau qui suinte des roches ; de loin elle paraît abondante, mais c’est à peine si on peut en puiser pour en boire.

w Ny mandalo mahita ny ravony, ny manontany mahita ny fotony. Celui qui passe ne voit que les feuilles, mais celui qui pose des questions voit les racines.

w Ny tsiny tahaka ny hady lalina ka itataova-mahafanina ianjeran-mahafaty. Le malheur est comme un fossé profond : si on se penche au-dessus, on perd connaissance et si on tombe dedans, la chute est mortelle.

w Te-hoderain’ny amboa ka mikiky taolana tsy misy hena. Qui veut mériter les louanges des chiens se met à ronger des os sans viande.

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Il est extrêmement complexe de donner un calendrier précis des manifestations tradi-tionnelles à Madagascar : en effet, celles-ci dépendent du calendrier lunaire, de l’humeur des devins, etc. Certaines seulement tombent à date fixe.

� SPECTACLES HIRA GASYAu Kianja Andavamamba, et au Kianja d’AnosybeTana – AntananarivoLes troupes se succèdent. Authenticité garantie.

Février

� ALAHAMADY BEGénéralement, du 3 au 5 février sur les côtes, en mars sur les Hauts Plateaux.Nouvel an malgache d’origine merina qui est surtout célébré dans les Hauts Plateaux. Grandes cérémonies avec offrandes, sacrifice de zébus, danses, chants et repas commu-nautaires.

Mars

� MARTYRS DE L’INSURRECTION DE 1947Tous les 29 mars.Commémoration des martyrs de l’insurrection du 29 mars 1947 contre l’armée coloniale française.

Avril

� SANTA BARYVers avril-mai sur la côte est.Fête du riz : offrandes aux ancêtres, sacrifices d’animaux...

Mai

� FESTIVAL DONIAwww.festival-donia.comEn mai/début juin sur l’île de Nosy Be.Chaque année, ce festival de musique et de danse attire environ 50 000 personnes. Artistes malgaches et des îles voisines,

tournois sportifs, carnaval, chants tradition-nels,... La 21e édition aura lieu en 2014.

Juin

� LA FETE NATIONALETana – AntananarivoLe 26 juin.Dans la nuit du 25 au 26 juin, dans tous les quartiers populaires d’Antananarivo, des processions parcourent les rues en portant des lampions dans lesquels une bougie brûle en symbole de la souveraineté retrouvée. Lorsque l’on monte au belvédère proche du Rova, on constate que la ville brille de mille feux mouvants. Depuis la table d’orientation, on peut voir les chemins entre les rizières, les placettes des villages les plus proches illumi-nées des mêmes lueurs rouges qui bougent et se déplacent.Deux jours avant, tous les édifices – écoles, gares, mairie – pavoisent aux couleurs (vert rouge et blanc) de Madagascar. Le 26, les cérémonies officielles donnent lieu à un défilé militaire, tandis que des spectacles d’opéra hira gasy sont organisés dans les différents quartiers. La nuit venue, l’heure est aux bals aux rythmes du tsapiky, du salegy, et de l’incontournable afindrafindrao. Dans les autres villes du pays et dans les campagnes, la fête est organisée en de multiples formes, la danse et la musique y ayant toujours une place essentielle. Ces festivités ont lieu dans toutes les villes de Madagascar : c’est l’occa-sion d’un véritable bain de foule populaire, de brochettes, de musique à tout rompre, de beuveries et d’échanges culturels.

Octobre

� FAMORANADu 1er au 31 octobre.Les cérémonies de circoncision se déroulent entre juin et septembre dans tout le pays ; chez les Antambahoakas de la région de Mananjary, elles prennent une ampleur considérable du 1er au 31 octobre... tous les 7 ans (prochaines en 2014).

Festivités

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DÉCOUVERTE

Pour mieux connaître la cuisine malgache, nous pouvons vous recommander deux ouvrages : Ma cuisine malgache (Karibo sakafo ), d’Angeline Espagne-Ravo (Edisud, 160 p.), excellent, simple et illustré pour préparer des merveilles

gastronomiques ; et La Cuisine de Madagascar, de G. Doyen (Ed. Orphie), qui présente les recettes de nombreuses spécialités. Précisons que le premier livre peut s’acheter dans les librairies à Madagascar.

PRODUITS CARACTÉRISTIQUES w Les deux plats nationaux les plus réputés

sont le ravitoto, mélange de filets de viande de bœuf ou de porc avec une purée de feuilles de manioc pilées et son lait de coco (sur la côte) ; et le romazava (« bouillon clair »), ragoût de viande et de brèdes accompagné de tomates, de manioc et d’épices. Les brèdes désignent les feuilles d’une plante potagère (comme le potiron par exemple) ; ce mot, d’origine créole, provient des îles Mascareignes.On distingue les brèdes mamy, feuilles douces, et les brèdes anamalaho, plus piquantes (également nommées brèdes mafana, ou brèdes chaudes).Les kihoza sont des tranches de viande fumée ou séchée au soleil, avant d’être consommées grillées. Les mosakily ou masikita sont des petites brochettes, servies avec des patates douces, du manioc cuit et une sauce pimentée. On vous proposera aussi – influences asia-tiques oblige – des nems et des sambos. La forme change, mais le contenu de ces deux types de pâtés est le plus souvent composé de viande, légumes et herbes aromatiques.

w Riz. Du riz (vary) et encore du riz ! C’est la nourriture par excellence des Malgaches. On lui attribue d’ailleurs une origine légendaire, qu’évoque Raymond Decary : « Un jour, la fille de Zanahary (Dieu), descendue du ciel, prit pied sur la montagne de l’Ankaratra. Elle avait apporté avec elle un coq et une poule qui tous deux étaient gavés de paddy (riz non décortiqué et pouvant germer). Arrivée à terre, elle mangea ces volailles, mais le paddy n’était qu’incomplètement digéré ; quelques grains tombèrent sur le sol ; ils germèrent et se reproduisirent. Telle est la provenance céleste du riz. » D’abord sous sa forme la plus simple, accompagné d’un bol de légumes et d’une coupelle de piment extra-fort, et ensuite sous toutes les variantes possibles : avec viande de zébu (Hen’omby sy vary ), avec poisson (Hazandrano vary ), en salade, cantonais

avec maïs, morceaux de poulet (Akoho sy vary ), viande de porc (Henankisoa sy vary ), petits bouts de fromage, herbes et épices. C’est l’aliment de base de la gastronomie malgache, et, c’est le cas de le dire, vous le mangerez à toutes les sauces. Comment pourrait-il en être autrement ? Les rizières forment les trois quarts des terres cultivées. Conséquence statistique : le Malgache est un fervent consommateur, selon certaines sources, près de 135 kg par an !Les Malgaches en général ne cuisent pas les aliments avec du sel, qu’ils rajoutent au moment de manger : mais il est à noter qu’on ne met jamais de sel dans le riz. À préciser : les Antandroys ne consomment jamais de sel (ni de poisson, pour la même raison) ; celui-ci est fady (tabou), car il est tiré de la mer et Dieu l’a réservé pour lui-même.

Cuisine malgache

Quelques spécialités w Tilapia nahandro gasy : poisson d’eau

douce, poireaux.

w Henakisoa sy amalona : viande de porc, anguilles, tomates et oignons.

w Crabe sy henakisoa : crabe et viande de porc.

w Henakisoa sy ravitoto : viande de porc et feuilles de manioc pilées.

w Henakisoa sy anamamy : viande de porc avec brèdes mixées.

w Hen’omby ritra : viande de zébu, sauce tomate et ail, cuite en sauce.

w Romazava sy hen’omby : brèdes mixées avec viande de zébu bouillie.

w Ron’akoho sy sakamalao : bouillon de poulet au gingembre.

w Riz au coco : à savourer partout dans l’île.

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w Zébu. Conformément aux accords économiques entre Madagascar et l’Union européenne, la viande de zébu est présente dans les supermarchés de France. Si vous n’en avez pas encore goûté, votre séjour à Madagascar vous en offre l’occasion. Le filet de zébu est tendre. On l’appréciera aussi en brochette (ah ! les fameuses mosakiky à l’apéro ou dans la rue !), en pavé, rosbif et ragoût. Le filet de zébu au poivre vert remplace avantageusement le steak sur la carte des menus européens proposés par les restaurants des villes.

w Produits de la mer. L’océan Indien et le canal du Mozambique bordent les côtes de Madagascar. Frêles barques à balancier des pêcheurs vezos et betsimsarakas, bateaux-usines des pêcheries, les moyens sont variés. La pêche l’est aussi. Sur les marchés, vous verrez de grands thons et des requins, des crabes et des langoustes. La consommation villageoise est importante. Le poisson est séché et acheminé vers les villes, et l’industrie procède à l’exportation.La langouste de Madagascar est aussi prisée que celle de Cuba. A la carte : langoustes, cigales de mer, crabes, crevettes, huîtres, oursins, moules, palourdes… Le poisson sera proposé en bord de mer et en rase campagne. Vous pourrez y déguster dorade, thon, mérou, requin, truite, carpe, brochet, capitaine, marguerite… Madagascar est l’île des mille lacs et rivières ; poissons d’eau douce et écrevisses y abondent.

w Poulet et foie gras. Le coq chanteur vous incitera à un réveil matinal, propice à toutes les escapades. Songez-y, et munissez-vous de boules Quiès si vous voulez faire la grasse matinée car le volatile est présent partout, à la campagne comme à la ville ! Moyennant quoi, dans votre assiette, vous trouverez un poulet assez musclé mais plus savoureux que ceux de l’élevage industriel, et aussi du canard, des cailles, du faisan, de la dinde.Pour les fins palais, le foie gras de Madagascar est plus que recommandable. On le dégustera tout particulièrement à Fianarantsoa, à Antsirabe et à Antananarivo.

w Fruits et légumes. Lorsque la terre arable n’a pas été arrachée par les pluies torrentielles, les campagnes se transforment en d’immenses vergers et potagers. La région d’Antsirabe est célèbre pour ses pommes, ses tomates et ses carottes ; Toamasina, pour ses lychees et ses bananes ; Mahajanga, pour ses mangues… Saison après saison, on les

trouve sur les étals des marchés et tout le long des routes. Ils sont aussi exportés frais, séchés ou en conserve. Donc, il convient de surveiller les marchés !Avis aux gourmets : les fruits, toujours abondants, varient selon les saisons. En décembre, c’est le mois des lychees (premier fruit d’exportation de Madagascar) ; en mars, les pommes cannelle sont à essayer abso-lument. Bananes et ananas sont présents toute l’année. Il y a également les kakis et les mangues, les pommes et les goyaves, les noix de coco et les fraises, sans oublier les pêches, les avocats et les oranges.

w Herbes, épices et condiments, vanille, cannelle... Madagascar compte sur eux pour améliorer son commerce international. On trouve des produits de qualité, parmi lesquels la vanille, dont la Grande Île est le premier exportateur mondial.Un voyage, c’est aussi l’occasion de faire connaissance avec des saveurs nouvelles, et de glisser dans sa valise quelques parfums des tropiques pour les respirer en Europe en hiver et assaisonner ses petits plats à la maison ! Depuis le XVe siècle, les bateaux venant d’Europe se dirigent vers la Grande Île pour s’y approvisionner en épices. À Madagascar, on les utilise dans la cuisine malgache, pour la fabrication des huiles essentielles et en médecine traditionnelle. Dans les bazars-be, vous pourrez acheter de la cannelle en bâton et en poudre, de la vanille Bourbon, en gousses ou en poudre, des clous de girofle frais, déshydratés ou en essence, du poivre vert, blanc ou noir. Sans oublier l’essence d’ylang-ylang qui rend amoureux !Les épices aromatiques sont cultivées dans toutes les régions de l’île. Antsiranana est bien connue pour les piments ; Sambava, pour la vanille ; Toamasina, pour la girofle ; Nosy Be, pour l’ylang-ylang.À Madagascar, les épices sont omniprésentes, et les amateurs pourront en acheter un assor-timent très complet au marché d’Analakely, à Antananarivo (en bas du marché, à droite en descendant vers la gare ferroviaire, près des étals des artisans et des marchands de souvenirs). Sur votre table, vous verrez différentes variétés de piments. Ils sont en général très parfumés et très chauds ! Les rougails à base de tomates et d’oignons sont présents partout. Selon le restaurant, on vous proposera fréquemment de la sauce de soja, des achards, du nuoc mam...

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w Goûters et petits déjeuners. Dans les villes, le pain, les croissants, les pains au chocolat et les pâtisseries sont croustillants à souhait. Le lait et les yoghourts sont de bonne qualité. Les amateurs de café testeront avec intérêt la production locale, bien qu’elle ne soit pas des plus remarquables (presque toute la production part à l’exportation).Vous remarquerez sûrement dans les marchés des gâteaux à l’allure tabulaire, enveloppés de feuilles de bananier : il s’agit des Koba ravina (prononcer « koubravine »). Ce mélange de farine de riz, de sucre roux et de cacahuètes pilées est très apprécié.Quant aux mokary, ce sont de petites galettes de riz cuites, dégustées le matin avec le café.

w Boissons. La boisson traditionnelle est l’eau. Attention, elle n’est pas potable, et même dans les endroits où l’on vous certifiera qu’il n’y a aucun problème, mieux vaut prendre ses précautions. Les Malgaches boivent ainsi fréquemment l’eau sous forme de ranonampango. On fait bouillir l’eau dans la marmite où l’on a déjà fait cuire le riz ; les grains plus ou moins brûlés qui sont restés collés au fond donnent alors à l’eau un goût un peu amer et une couleur brun clair. On boit la mixture tiède. Il paraît que c’est bon contre la diarrhée…« Eau vive » est une eau minérale de la source d’Andranovelona. Un excellent cru, en bouteilles de 1,5 l ou de 0,5 l. On trouve aussi la marque La Source. « Caprice », est une eau gazeuse, soda orange, soda goût bonbon anglais. Crystal et Rano Visy sont des eaux pétillantes qui rappellent le Perrier (excellentes avec du sirop à la menthe). « Fresh », un panaché très léger (moins de 2°) et « Tonic » une eau gazeuse très pétillante. Le « Bonbon anglais » est une limonade peu sucrée au goût de Malabar.

w On boit beaucoup de bière à Madagascar. « Three Horses Beer » présente aussi à Singapour, au Viêt Nam, en Indonésie. Elle est vendue en petite bouteille (PM) de 33 cl et en grande bouteille (GM) de 65 cl. Comptez en général entre 2 500 et 6 000 Ar le grand modèle selon l’endroit où vous vous trouvez. A noter que la THB a été revendue au groupe francais Catel en 2011.La Gold est un peu plus chère et selon certains moins grasse et plus goûteuse. Depuis peu se sont répandues la Skol (d’origine danoise et dont la brasserie est gérée par des Belges), et la Libertalia, très bonne en pression et selon certains la meilleure du pays à ce jour.

w Le terme toaka désigne tous les rhums, industriels ou artisanaux. On mélange généralement du jus de canne de nombreux fruits sauvages (sakoa, nato, seva). Pour ce faire, voilà comment on procède : on creuse un tronc d’arbre en forme d’auge pour fabriquer un alambic ; on y place soit un bambou aux cloisons intérieures percées, soit un vieux canon de fusil (manière traditionnelle) ; une des extrémités est raccordée avec un vase de terre rempli en partie de jus de canne, mélangé à des écorces et des feuilles aromatiques ; le lut (c’est-à-dire l’enduit) est constitué d’argile ou de boue mêlée de cendres. Le produit distillé s’écoule de l’autre extrémité du canon ou du bambou, dans un autre récipient.« Rhum Dzama » est un rhum brun local, à consommer avec modération en rhum arrangé ; planteur, il fait 52°. « Rhum Cazeneuve », un rhum blanc qui s’apprécie en punch avec deux glaçons.« Besabetsa » est une boisson est très prisée sur la côte nord-est et à Sainte-Marie, et d’une manière générale sur toute l’île. On mélange du jus de canne aromatisé avec une décoction de certaines écorces (belahy, katrafay, havozo) ou avec des fruits sauvages (angivy). Peu fermentée, elle n’excède pas 4 ou 5 degrés ; distillée, c’est un rhum qui décoiffe davantage : les noms des différentes marques ne mentent pas (Turbo 2, Boum Boum)…Bien sûr, à Mada on consomme beaucoup de rhums arrangés avec toutes sortes de fruits, même de baobabs ! Presque tous vos repas se termineront invariablement par la dégustation (bien souvent gratuite) d’une variété. Celle au gingembre fait l’unanimité !

w Madagascar est aussi un pays producteur de vins, depuis que les missionnaires ont cru bon de célébrer la messe. Les passionnés de viticulture ne résisteront pas à un parcours dans les coteaux de Fianarantsoa, d’Antsirabe ou Ambalavao, dans le pays Betsileo. Cela dit, la qualité des vins est très critiquable.Voici une sélection des principaux crus : Clos Malaza, Dom Remy (vins blancs, gris, rosés et rouges), Lazan’i Betsileo (vins blancs, rosés, rouges et des apéritifs, dont un madère), Domaine de Manamisoa (vins blancs, rosés et rouges, et un muscadet très fruité).Quant au trembo (tchemb’), c’est un vin de palme que l’on boit sur la côte : on recueille le liquide des jeunes fruits de cocotiers et on laisse fermenter. La chaleur ambiante augure d’un taux d’alcool supérieur à ce qu’il est légalement possible de posséder dans le sang sur les routes de France !

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HABITUDES ALIMENTAIRESTraditionnellement, et quand ils peuvent manger (rappelons que près de 70 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté), les Malgaches font trois repas par jour, l’un au réveil, le second au milieu de la journée, et le troisième peu après la nuit tombée, vers 19h. Parfois, bien sûr, les repas peuvent être un peu plus « corsés ». L’histoire évoque les noces de Ratelifera, fils du Premier ministre, en 1892 : le menu (essentiellement européen), ne comportait pas moins de 55 plats !Traditionnellement, les Merinas mangent en famille ; mais pour presque tous les autres peuples de la Grande Île, le père mange en premier, seul, accroupi sur une natte. Femmes et enfants suivent une fois qu’il a terminé. On a aussi coutume de jeter quelques grains de riz à terre avant de commencer le repas pour s’attirer les grâces des divinités tutélaires (les Indigènes d’Amérique latine le font aussi par respect pour la Pachamama, la Terre-mère nourricière). En général, on se tait pendant les repas. On ne boit qu’à la fin.La gastronomie traditionnelle est entourée de très nombreux fady. Beaucoup sont tombés en désuétude. Mais sachez que chanter en

mangeant fait allonger les dents, qu’enlever la peau d’une banane avec les dents rend pauvre, et que celui qui mange des bananes tombées risque de faire mourir son père ! Bien sûr, avec l’intrusion de plus en plus manifeste du mode de vie européen, les habitudes alimentaires sont en train d’évoluer.MacDonald et autres Burger King ne sont pas encore arrivés à Antananarivo… Faut-il s’en lamenter ? Chacun jugera… Mais dans la capitale malgache et dans presque toutes les villes, on trouvera des cuisines du monde entier ; en particulier, les spécialités fran-çaises, italiennes, chinoises, vietnamiennes et indiennes sont bien représentées.On trouve à Madagascar des restaurants pour toutes les bourses. Dans les petits hotely gasy bien tenus, vous mangerez un plat de riz accompagné de légumes, de viande, de poisson ou crustacés (selon la région) et de fruits… pour moins de 2 E. Un repas malgache plus consistant, un menu européen (steak-frites) ou asiatique vous reviendront souvent à 5 E dans des restaurants des plus convenables. Au-delà, c’est selon votre appétit, le choix du restaurant et vos finances…

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Assortiment de plats typiques malgaches (brochettes de zébus, poisson grillé, crevettes).

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RECETTES

Brochettes de zébu ou MosakikyPour une douzaine de brochettes.

Ingrédients

w 1kg de filet de zébu (ou de bœuf) bien tendre.

w 1 cs de vinaigre blanc.

w 2 cs de sauce soja.

w 2 cs de jus de papaye frais.

w 1 cc sel.

w 1/2 cc poivre noir moulu.

w 4 cs d’huile végétale.

w 4 gousses d’ail écrasé.

w 30 g de gingembre frais à écraser.

w Piques à brochettes en bois (bambou).

Préparation

w Mélanger tous les ingrédients de la marinade (jus de papaye, vinaigre, sauce soja, coca, huile, ail, gingembre, sel, poivre).

w Découper la viande en petits cubes d’1 cm tout au plus et mettre les cubes à mariner au moins 8h.

w Embrocher les cubes de viande marinée sur les piques et les faire griller au barbecue.

w A accompagner de banane verte ou de manioc frits ou d’une salade de papaye verte/carottes.

Punch Coco

Ingrédients

w 1 litre de rhum

w 1 noix de coco sèche très juteuse

w 20 cl de sirop de canne

w Plantes aromatiques (muscade, cannelle, gousse de vanille fendue, zeste de citron).

Préparation

w Cassez la noix de coco, décortiquez-la en ôtant la peau brune qui la recouvre

w Râpez la pulpe, mettez-la dans une cocotte et versez le rhum, qui doit la couvrir

w Laissez macérer pendant une nuit

w Le lendemain, récupérez la pulpe dans un torchon bien épais

w Pressez pour en extraire le lait

w Ajoutez ensuite le sirop de canne, la muscade, la cannelle, etc. Remuez bien

w Servir très frais la noix de coco décortiquée

RomazavaPréparation : 20 minCuisson : 1h40 à 2h

Ingrédients (pour 6 personnes)

w 1 kg de bœuf (dans le jarret c’est mieux)

w 500 g de porc dans l’échine

w 2 paquets ou 500 g de brèdes mafana (dans les épiceries exotiques)

w 1 tomate concassée

w 1 petit oignon émincé

w 3 à 4 lamelles de gingembre frais

w 1 gousse d’ail hachée

Préparation

w Triez les brèdes et rincez-les.

w Coupez la viande en gros dés.

w Faites revenir les viandes dans de l’huile végétale, puis rajoutez la tomate émincée, l’oignon, le gingembre et la gousse d’ail pilée avec une poignée de gros sel et de poivre en grains.

w Versez dans la marmite 1 ou 2 litres d’eau (suivant la quantité de bouillon que vous désirez) et faites cuire à feu vif.

w Après 10 min, baissez le feu et laissez mijoter pendant au moins 45 min.

w Rajoutez les brèdes et faites cuire à feu doux encore 25 min. Rajoutez de l’eau bouillante éventuellement.

w Servir avec du riz

Retrouvez le sommaire en début de guide

Page 109: madagascar 2014/2015 - Petit Futé

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Page 110: madagascar 2014/2015 - Petit Futé

DISCIPLINES NATIONALES w Le fanorona. Ce jeu de stratégie presque

« national », s’apparente en quelque sorte au jeu de dames. On joue sur un carton rectangulaire, divisé en carrés eux-mêmes partagés en triangles par des diagonales. Ce tracé s’appelle Lakam-panorona. Des cailloux servent de pion. Chaque joueur avance ses pions et « mange » ceux de son adversaire lorsqu’il en a l’occasion. Le but est d’éliminer les pions de l’adversaire ou de faire en sorte que ses pions ne puissent plus bouger. Le perdant est dit maty paika (« mort du coup »).L’histoire témoigne que ce divertissement est très prisé, même dans l’entourage des plus grands. Ainsi, le fameux roi Ralambo, malade et se voyant mourir, décida de désigner son successeur. Pour ce faire, il résolut de choisir celui qui arriverait le premier auprès de lui. Cependant, l’aîné, Andriantomponkoindrindra était justement en train de jouer une partie de fanorona ; indifférent à la requête des émissaires, il répondit cette formule aussi célèbre que laconique : « Avec trois (pions), j’en prendrai cinq. » Le second fils, au contraire, accourut aussitôt. C’est lui qui fut sacré roi.Le temps n’a toutefois pas effacé l’insou-ciance de l’aîné : l’expression « gagner avec trois contre cinq fait perdre le royaume » est encore répandue de nos jours, signifiant qu’en causant on finit par perdre du temps, et qu’on en oublie ses devoirs. Le fanorona était si répandu que, comme la toupie, ce jeu fut déclaré fady en saison des pluies pour que les paysans n’oublient pas de travailler aux champs.

w Le katra. Autrefois connu sous le nom de fifangha, ce jeu est d’origine africaine. Flacourt le comparait à un jeu de dames mâtiné de tric-trac. Raymond Decary en fait une description précise : « On joue sur une planche rectangulaire épaisse, montée sur quatre pieds bas et creusée de quatre rangées de huit godets ; à chaque extrémité, la planche est prolongée par une poignée, elle-même excavée pour servir de sébille. »

Chaque joueur possède 32 graines (grises et rondes) qu’il place en nombre pair dans chacun des godets. Il n’est pas très facile d’y jouer, mais le but est de « manger » toutes les graines de son adversaire ou de le mettre dans l’impossibilité de bouger.Traditionnellement, ce divertissement était réservé aux femmes, tandis que les hommes s’adonnaient de préférence au fanorona.

w Le moraingy (ou balahazo). Il s’agit de la « lutte » malgache à main plate, très prisée dans les villages côtiers, où elle est également l’occasion pour les habitants de se retrouver et de faire la fête.Chaque protagoniste s’affronte en combat individuel. Au début, plusieurs clans se font face, et des hommes se lèvent successive-ment, le poing levé et en dansant, pour lancer un défi aux autres clans.Pendant ce temps, les femmes chantent, tapent des pieds et claquent des mains. Quand l’atmosphère s’est bien échauffée, deux hommes finissent par s’empoigner ; toutes les prises sont permises, même les plus violentes.Le but du jeu est de faire toucher terre la nuque de son adversaire. Alors le clan du vainqueur retentit de cris d’allégresse et d’orgueil, et le champion est porté en triomphe.Le moraingy est plus ou moins violent selon les tribus où il se pratique. Chez les Betsimisarakas, par exemple, les adversaires ne doivent lutter qu’avec la main et la jambe droites ; c’est davantage un jeu d’habileté.

w Les Tanala jouent traditionnellement au samantsy, un véritable jeu d’échecs, importé par les Arabes ; curieusement, ce jeu n’existe que dans cette tribu où pourtant l’influence musulmane fut moins forte. Les pions sont des enfants, les tours sont des oiseaux, les fous sont des fusils, le roi est un Hova… Mais mis à part ces petits changements (de latitude !), les règles sont pratiquement identiques.

Jeux, loisirs et sports

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JEUX, LOISIRS ET SPORTS110

w Sur les plateaux surtout, on joue aux cartes. Ce divertissement n’est pas ancré dans les mœurs malgaches depuis des siècles, mais en général les gens y prennent beaucoup de plaisir.Les jeux classiques que nous connaissons sont pratiqués, mais ici on aime particulièrement le fangalatra, ou « voleur » ; on parie en général de l’argent.

w Les Antankara et les Sakalava pratiquent aussi le toranga, un sport de mains violent qui peut évoquer une boxe sauvage.

w Enfin, on peut encore mentionner les combats de coq, toujours appréciés. Pour les exciter, avant le combat, on leur fait ingérer une infusion de somorona. Les bêtes s’écharpent joyeusement, et chacune a un soigneur qui lui refait une beauté entre chaque round.

ACTIVITÉS À FAIRE SUR PLACEL’extrême variété des paysages de la Grande Île favorise la pratique de multiples activités sportives. Il existe certaines structures ou certains parcours plus ou moins établis, des randonnées à pied, des descentes en pirogue par exemple de plus en plus recherchées par les touristes, mais globalement tout reste à faire.Comme vous le constaterez vous-même, le grand problème, c’est la logistique : réseaux routiers secondaires effroyables notamment, difficultés d’accès nécessitant une complète autonomie parfois pendant plusieurs jours. Le prix de l’aventure et de l’authenticité, assurément… w Cabotage autour de l’île. Il est virtuellement

possible de faire tout le tour de Madagascar en bateau, cargo, boutre ou pirogue. Le long des côtes, un dense réseau de caboteurs permet d’acheminer des épices, de la vanille, des langoustes, des crevettes, du café, des litchis, etc. Le confort est bien sûr minimum, on y mange comme dans les tranchées, mais ce n’est pas cher, pratique, et l’aventure vaut le coup. En revanche (mise en garde plus importante), la mer peut être grosse sur la côte est notamment en hiver (juin à septembre), et ceux qui ne sont pas habitués à naviguer risquent de renvoyer leurs boyaux bel et bien. Les conditions de sécurité ne sont alors plus du tout assurées (elles ne sont déjà pas fameuses en temps favorable !).Au Sud, depuis Tuléar, il est possible d’emprunter une pirogue pour se rendre jusqu’à Faux Cap, près de Fort Dauphin, ou pour gagner le Nord, Morombe ou Morondava. Entre Tamatave et Diego, de nombreux cargos sillonnent la côte toute l’année. De Diego à Nosy Be, les départs sont fréquents. De Nosy Be à Majunga, il n’y a pas trop de problème non plus, que ce soit pour des croisières luxueuses ou pour des boutres en déliquescence. Et la ronde continue vers Morondava (transport d’hydrocarbures, etc.). Bref, à vous de jouer.Le mieux est de se rendre au port et de parler aux capitaines. Vous finirez bien par embarquer, avec un peu de patience et d’opportunisme…

w Canyoning. Les différents sites intéressants pour l’amateur sont les suivants : Massif de l’Isalo (uniquement en saison des pluies, et en dehors du parc national), le parc de Marojejy, difficile d’accès (notamment les falaises de l’est du Tsaratanana) ou la montagne d’Ambre : plusieurs vallées complètement retirées attendent les plus intrépides pour dévoiler leurs cascades, leurs vasques, et leurs toboggans. Si vous êtes motivé, renseignez-vous auprès de l’agence New Sea Roc à Diego ; il y a déjà un canyon opérationnel, pour tous niveaux (compter une journée). w Chasse. La saison s’étend à peu près du

1er mai au 5 octobre. Pour chasser, il faut obtenir un permis, et déclarer son fusil et ses cartouches à l’arrivée. w Cheval. Il est possible de vous promener

en compagnie de « la plus noble conquête de l’homme » en divers endroits de la Grande Île. Quatre régions sont particulièrement appréciées des voyageurs : Le Manja Ranch, à Ambatolampy, organise des balades très sympas. À Antsirabe, il est possible de prévoir de superbes randonnées avec logement dans des gîtes ruraux. À Isalo, le Relais de la Reine accommode des circuits fascinants dans le massif mystérieux. À Ifaty, enfin, près de Tuléar, un centre vous propose aussi des flâneries équestres. Bien d’autres opportunités existent, que vous aurez peut-être l’occasion de saisir en voyage. w Escalade. Les possibilités sont très

nombreuses. Le coin le plus fameux est le massif de l’Andringitra, au sud de Fianarantsoa, et plus exactement le massif du Tsaranoro. De grands noms de l’escalade y ont tracé des voies, mais combien d’autres restent à définir ! Le temps est généralement stable, les falaises sont accessibles à tous les niveaux, débutants ou confirmés, l’accès est aisé, et l’environnement majestueux. Le Camp Catta ou le Tsara Camp, à proximité, sont les lieux d’hébergement à recommander. Vous y dénicherez en outre toutes les informations que vous souhaitez. L’équipe

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JEUX, LOISIRS ET SPORTS D

ÉCOUVERTE111

saura vous conseiller un prestataire sérieux pour organiser l’expédition et l’aventure. Dans le Nord, la région de Diego possède également quelques sites d’escalade bien équipés, notamment à la Montagne des Français et aux petites îles de Nosy Hara, coin paradisiaque s’il en est, dans le canal du Mozambique. Renseignez-vous auprès de l’agence New Sea Roc à Diego. La meilleure saison s’étend de juin à novembre pour le premier site, tandis que le deuxième est accessible toute l’année (mais attention aux grosses chaleurs au plus fort de la saison des pluies, en janvier et février). w Golf. 4 parcours à Madagascar : à Tana, le

« Rova », un 18-trous de qualité internationale ; le « Malaza », un 9-trous. Aussi un 9-trous à Foulpointe et un 9-trous à Antsirabe : c’est le plus vieux club malgache, créé en 1935. L’un des plus beaux parcours de l’île (14 départs). w Parapente. Depuis quelques années,

plusieurs sites se prêtent à cette activité. Sur les Hautes Terres, les conditions climatiques parfois capricieuses rendent cette pratique un peu difficile. Le lac Itasy, et notamment la falaise d’Analavory, avec un aplomb de 250 m environ, peut être recommandée. Mais encore une fois, c’est l’Andringitra qui remportent la palme. Le Camp Catta met même à votre disposition un moniteur en saison, soit de septembre à décembre. Renseignez-vous auprès d’eux, ou contactez Mad Caméléon : cette agence, spécialiste de l’aventure (descente de la Tsiribihina…), est très sérieuse et souvent recommandée. w Plongée. La barrière de corail entre Morombe

et l’extrême-sud malgache est la deuxième plus grande au monde, après celle d’Australie. C’est dire que les poissons se pressent autour des côtes malgaches, pour le plus grand plaisir des plongeurs. Les infrastructures sont maintenant bien en place pour vous accueillir, que ce soit à Nosy Be, à Diego, à Sainte-Marie ou à Tuléar (Ifaty/Mangily). Le matériel est globablement récent, les moniteurs sont compétents, et les sites sont jolis sans atteinte à la splendeur des fonds polynésiens ou australiens. En outre, on ne se bouscule pas encore au portillon, et les spots à découvrir sont encore bien nombreux ! Dans chacune des régions où la plongée est pratiquée, nous avons recensé les principaux prestataires. Renseignez-vous pour connaître les différents tarifs, les meilleurs coins, les bonnes saisons, etc. Une précision : à Nosy Be, par exemple, les méduses urticantes sont particulièrement voraces, surtout le matin. w Quad. La location de quad s’est répandue dans

tout Madagascar. Le nombre de circuits proposés

est impressionnant. C’est en effet un engin pratique pour sillonner des pistes inaccessibles en 4x4 et parfois même en moto pour les non professionnels (gros sable, etc.). L’expédition de Tuléar à Morondava (ou inversement) est d’une puissante beauté ; idem pour celle de Tamatave à Maroantsetra. Sinon, le nord de Sainte-Marie, les alentours de Diego Suarez ou ceux de Tana (vers le lac Mantasoa par exemple) se prêtent volontiers à un parcours en quad. w Rafting. Les possibilités sont énormes partout

sur l’île. Des fleuves immenses et complètement retirés de tout accès routier n’attendent que les téméraires pour dévoiler leurs beautés. On veillera toutefois à prendre garde aux nombreux crocodiles qui peuplent les rives des rivières côtières ; ils ne sont peut-être pas (très) agressifs dans les endroits où la présence de l’homme ne les indispose plus, mais un saurien est un saurien, et en pleine jungle, il n’hésitera sûrement pas à déguster un bon civet d’humain ! Une fois de plus, l’agence Mad Caméléon pourra peut-être répondre à vos questions et vous donner de bons conseils. w Raid moto. C’est un moyen formidable

pour parcourir les étendues sauvages de la Grande Île. La moto permet d’accéder à des sites complètement perdus, si vous savez déjà bien conduire (un novice risque d’enliser rapidement son engin, la boue et le sable étant des compagnons toujours facétieux dans ce pays). Les parcours magnifiques ne manquent pas. Pour obtenir des informations, voyez avec l’agence Traces à Tana. w Randonnée. Il serait trop long d’évoquer

tous les sentiers que l’on peut emprunter à Madagascar. Les parcs naturels, gérés par Madagascar National Parks, sont des lieux privilégiés pour l’observation de la flore et de la faune. On est rapidement plongés dans des paysages somptueux, dans une nature qui semble encore vierge à nos regards accablés et mélancoliques. Les aventuriers peuvent gagner des régions encore plus isolées, où les infrastructures sont rares. Leur problème ne sera pas tant la nature, jamais hostile pour celui qui accepte ses règles et reconnaît sa puissance (d’autant que l’île compte fort peu d’animaux dangereux), que les moyens d’accès véritablement éprouvants. Autant dire qu’à moins de savoir se repérer tout seul en jungle et de pouvoir survivre des jours entiers sans nourriture donnée, les forêts impénétrables du Nord-Est ont encore de nombreux mystères à préserver.Toutes les agences de voyages mentionnées dans le guide pourront vous renseigner sur les balades possibles en divers endroits du pays.

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w Pasteur Andriamanjato. Député de la capitale, président de l’Assemblée nationale en 1993, le bouillant pasteur est entré très activement en politique dès 1956. Elu maire d’Antananarivo en 1959, allié puis adversaire du président Ratsiraka, sa formation, le parti du Congrès de l’indépendance (AKFM), qu’il a dirigé pendant quatre décennies, compte toujours plus de quarante mille électeurs dans la capitale. Malgré les changements d’alliances, le passage opportun du marxisme au libéralisme et de multiples virages, le pasteur a toujours une base politique. Il est décédé le 16 mai 2013, à 83 ans.

w Lieutenant Andriamaromanana. Officier malgache servant dans l’armée coloniale, il tenta d’armer les habitants d’Antananarivo durant l’insurrection de 1947 et fut fusillé le 28 avril 1948. C’est un symbole national.

w Sennen Andriamirado. Il fut l’un des plus dynamiques grands reporters malgaches. Rédacteur en chef adjoint de Jeune Afrique, il parcourut le monde jusqu’à sa mort prématurée, à la fin du XXe siècle. Ami de Thomas Sankara, il partagea les espoirs du fondateur du Burkina Faso qui fut assassiné le 15 octobre 1987. Il rêvait d’un monde fraternel et égalitaire. Son corps a été ramené à Madagascar, la terre de ses ancêtres.

w Dama. De son vrai nom Zafimahaleo Rasolofondraololo, il est l’un des fondateurs du groupe Mahaleo qui, dans les années 1970, opéra une révolution culturelle en chantant en malgache ! À l’époque, il était plutôt bien vu de chanter en français et en anglais sur la Grande Ile. Ses textes sont des chansons à thèmes. Dama chante la fraternité, l’unité nationale, la lutte contre les injustices et, bien entendu, l’amour. Extrêmement populaire, son répertoire colle aux aspirations de la société malgache.

w Rakoto Frah. Il figurait sur les billets de banque malgaches (de 1 000 FMG) et fréquentait le bar du Cercle germano-malgache. Ce doyen de la musique malgache traditionnelle, grand-père et arrière-grand-père, avait trouvé dans la flûte l’instrument d’une vie. Envoûtant et magique, il a joué pendant plus d’un demi-siècle. Des films lui ont été consacrés (dont L’Ile rouge de Jean-Michel Carré). Et pourtant, malgré la gloire,

il aimait à dire : « Ma musique est à tous, il ne saurait être question de la vendre ». Les deux albums Tsify rano et Souffles de vie sont à découvrir d’urgence. Le grand maître est mort le 2 octobre 2002 des suites d’une infection pulmonaire à Antananarivo.

w Monja Jaona. Leader du Mouvement national pour l’indépendance de Madagascar, emprisonné durant la colonisation, il fut un acteur passionné de la vie politique des quarante dernières années. De sa base de Toliara, il mobilisa étudiants et paysans pour l’indépendance, contre le néocolonialisme, pour la révolution de 1972, contre le président Ratsiraka (qu’il appelait néanmoins « mon fils »). C’était un homme d’action révolté contre l’injustice, même si ses choix n’étaient pas toujours des plus sages (notamment l’aventure fédéraliste). Après son décès en été 1994, toute la classe politique est venue lui rendre hommage, tandis que le gouvernement décrétait un deuil national.

w Jean-Joseph Rabearivelo. Poète de la terre des ancêtres et de l’identité malgache, le grand classique de la littérature malgache s’est suicidé en 1937, à l’âge de 36 ans. On ne peut aborder les lettres de la Grande Île sans évoquer cette figure mythique.

w Jacques Rabemananjara. Né en 1913 à Maroantsetra, il fut le poète militant des années d’après-guerre. Député, il participa à l’insurrection pour l’indépendance, en 1947, ce qui lui valut la prison et la déportation, d’où il écrivit certaines de ses plus belles pages, dont le poème O Liberté. Il était proche de Léopold S. Senghor et Alioune Diop, et participa avec eux à la création des « Éditions Africaines ». Il participa à la vie politique, après l’indépendance, mais ne recueillit qu’un pourcentage minime lors des premières élections présidentielles de la IIIe République. Il est mort à Paris le 2 avril 2005, et des funérailles nationales ont été célébrées en son honneur.

w Docteur Raphaël Raboto. Il fut l’un des fondateurs, en 1913, de l’un des premiers mouvements clandestins pour l’indépendance : Vy, Vato, Sakelika (Fer, Pierre, Ramification). Arrêté avec plus de trois cents membres de la VVS., il fut jugé et condamné le 24 décembre 1915.

Enfants du pays

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ENFANTS DU PAYS D

ÉCOUVERTE113

w Jean-Luc Raharimanana. Raharimanana exprime un monde conflictuel en un style imagé. Ses nouvelles regroupées dans Lucarne (Le Serpent à plumes, 1999) portent l’empreinte d’une vision urbaine pessimiste (corruption, pauvreté...). Son dernier ouvrage, Le Cauchemar du gecko a été édité par Vents d’ailleurs en 2010.

w Elie Rajaonarison. Il représente la nouvelle poésie malgache. Evoquant dans sa langue natale l’amour et la mort, l’histoire et les ancêtres, il s’inspire des collines de l’Imerina et du lac Alaotra. Il est avant tout poète (il participa à la fondation du cercle de poètes Faribolana), mais aussi auteur/réalisateur de films. Il est décédé le 27 novembre 2010.

w Raymond Rajaonarivelo. Si le cinéma malgache a franchi les frontières, c’est grâce à son film Taba Taba, sélectionné par le Festival de Cannes en 1988. Taba Taba est une évocation de l’insurrection de 1947 pour l’indépendance, et marque la naissance d’un talent. En 1996, il réalise Quand les étoiles rencontrent la mer, aussi sélectionné au Festival de Cannes et Mahaleo en 2005. En 2007, il crée une école de cinéma en ligne, Sekoly Sary.

w Mireille Rakotomalala. Musicienne, musicologue de renommée internationale, membre de l’Académie malgache, elle préside les associations des Amis du patrimoine, Gasyfary, et dirige l’Institut de civilisations du musée d’Art et d’Archéologie de l’université d’Antananarivo. Elle fut ministre de la Culture et députée dans les années 90, puis à nouveau en 2010 jusqu’en mars 2011. C’est aussi une artiste talentueuse (elle fait des merveilles au piano classique et fut Premier Prix du Conservatoire national supérieur de musique de Paris).

w Michèle Rakotoson. Journaliste à Radio France International pendant de longues années à Paris, elle est revenue au pays en 2010 et elle est aujourd’hui rédactrice en chef de la revue économique Challenger et présidente de l’association Opération Bokiko qui encourage l’édition à Madagascar.Elle est enfin auteur de pièces de théâtre (Sambany) et de romans, dont Le Bain des reliques et Dadabé, qui a obtenu le grand prix littéraire de Madagascar.

w Tsilavina Ralaindimby. C’est l’un des pionniers de la « malgachisation » et le plus créatif des grands reporters, Tsilavina est cinéaste, auteur de documentaires. Il fut ministre de la Culture et de la Communication au début de la IIIe République. Avec des moyens budgétaires très limités, il entreprit de valoriser

l’expression des cultures populaires – le Sambatra, le Fitampoha et l’Alahamandy –, de favoriser la décentralisation – projet de polythèques décentralisées dans tout le pays – et de lancer le programme de répertoire (classement et restauration du patrimoine historique), tout en s’occupant de moderniser la télévision malgache. Il dirige la télévision par satellite TVF et est l’un des fondateurs de Gasyfary, la cinémathèque malgache.

w Tarika Ramilison Fenoarivo. Président de la Fédération des compagnies de théâtre Hira Gasy Fimpimamad, commandeur de l’Ordre national malgache, le fondateur de la Tarika Ramilison Fenoarivo, un monument du théâtre traditionnel hira gasy, est décédé en 2009. Ses chansons, que l’on entend à la radio, sont reprises dans les taxis-be et dans les bazars, et on peut voir sa troupe à la télévision. Les textes transmettent une éthique. Les rythmes sont dansants ; les gestes, gracieux.Il faut savourer l’interprétation de Mbola ho avy izy et s’en faire traduire les paroles ! Dans son quartier d’Antohomadinika, l’un des plus sordides de la capitale, Ramilison a fondé une association de pauvres – Gasy Mirindra – qui répare les ponts et distribue des médicaments. Après cinquante ans de vie d’artiste-paysan, Ramilison était toujours pauvre, mais fier et intègre. Ramilison était un leader paysan charismatique. Il est aussi l’auteur de textes d’opéra hira gasy remarquables, qui ont été traduits pour la première fois en français, en 2000.

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ENFANTS DU PAYS114

w Harijaona Ranaivo. Il est le symbole de la jeune génération de peintres malgaches. Son talent est prodigieux. C’est le représentant le plus original des plasticiens du XXIe siècle.

w Henri Ratsimiebo. Les travaux d’Henri Ratsimiebo méritent d’être signalés. Cet architecte malgache de renom intègre la disposition cardinale liée à l’astrologie traditionnelle et la disposition sacrée à ses conceptions esthétiques des plus créatives.

w Amiral Didier Ratsiraka. Il fut président de la République de 1975 à 1993 et de 1997 à 2002. En juin 1975, lorsqu’il est élu à la présidence, à l’âge de 39 ans, Didier Ratsiraka porte l’espoir né de la révolution de 1972. Il veut « fonder une nouvelle société où régneront la justice et l’égalité sociale. » Il aura été l’un des acteurs d’un véritable changement dans tous les secteurs de la société malgache. La malgachisation permit à la population de retrouver son identité linguistique ; en outre, des réformes des collectivités territoriales mirent la gestion légalement à portée des villages. Parallèlement, la politique extérieure et l’économie furent dirigées avec le seul souci de la souveraineté nationale… Mais cela ne dura pas et bientôt de la révolution, il ne resta que les mots sur le fronton des édifices publics (comme en URSS et ailleurs Liberté, Egalité, Fraternité). La nouvelle classe dirigeante, oubliant promesses et idéaux, s’enrichissait tout en étouffant de plus en plus les libertés. En 1993, Didier Ratsiraka fut battu au second tour des élections présidentielles par le professeur Albert Zafy. Un tiers des électeurs votèrent néanmoins pour lui. Didier Ratsiraka fut réélu président en décembre 1996, mais il fut battu aux élections de décembre 2001, ce qui entraîna une crise politique majeure pendant six mois.

w Marc Ravalomanana. Né le 12 décembre 1949 à Imerikasinina, un village à l’est d’Antananarivo. Père de quatre enfants (une fille et trois garçons), il se définit comme un self-made man : ayant commencé dans la fabrication artisanale de yaourts (entreprise familiale), il créa la société Tiko qui devint un groupe dont il fut président directeur général. Tiko est aujourd’hui le plus important groupe agro-industriel malgache. De fait, Ravalomanana est sans aucun doute l’une des plus grosses fortunes du pays. En 1999, il gagna les élections municipales à Antananarivo. Fervent chrétien protestant, il surprend par son attitude autoritaire et rigoureuse (quasi autocratique) et son franc-parler. En 2002, après une crise politique

de six mois qui paralysa le pays, il devint président de la République malgache, et fut réélu en décembre 2006 pour un nouveau mandat. Il dut démissionner le 17 mars 2009 suite à un coup d’Etat.

w Philibert Tsiranana. Président de la République durant presque toute la Ire République (de 1960 à 1972), il sut cristalliser les espoirs en l’indépendance, puis les décevoir quand la population constata que « l’Etat-PSD » s’était installé au pouvoir, que l’indépendance avait fait place au « néocolonialisme », et que la corruption était devenue une pratique massive jusque dans les cercles proches du président. Il s’ensuivit la révolution de 1972. À sa mort, le 10 avril 1978, le président Ratsiraka et son gouvernement organisèrent des funérailles nationales.

w Andry Rajoelina. Né le 30 mai 1974 d’une famille noble des Merina (son père était un officier de l’armée française), il est élu maire de Tana le 12 décembre 2007 avec plus de 63 % des voix. Le 17 mars 2009, il s’empare du pouvoir par un coup d’Etat et s’autoproclame « président de la Haute Autorité de Transition ». Mais d’après la Constitution en vigueur, TGV (comme on le surnomme en raison de sa stupéfiante ascension… ou plutôt de l’association qu’il a créée, « Tanora malaGasy Vonona », ou « Jeunes Malgaches prêts ») ne saurait être éligible. De 1994 à 2000 il anima comme DJ les soirées « Live », très courues les samedis soir, avant de créer une société d’impression numérique et de gestion de panneaux publicitaires (Injet). Puis Rajoelina se fiança avec Sarah, la fille du président, avant de rompre et d’entrer en concurrence avec son ex-futur beau-père, qui venait de créer iMada. Ses affaires sont florissantes. Le rachat d’une télé et radio (Ravinala, qu’il rebaptise Viva) en 2007 va le propulser sur le devant de la scène politique.

w Rossy. Salegy et kwassa-kwassa, kabosy et synthétiseur… Rossy est à l’origine d’une révolution musicale. Ses arrangements consacrent l’union des instruments de musique traditionnels de Madagascar et des équipements électriques les plus modernes.Ses compositions prêtent à la danse ou au rêve en mêlant rythmes traditionnels et tempos des plus rock. Les concerts de Rossy, qui chante en malgache, déplacent des foules monstres. Portant tresses, bracelets et bandana rasta, Rossy évoque en musique l’égalité et la fraternité ainsi que la lutte contre les injus-tices sociales. Bal kabosy et Sira Sira sont à savourer en particulier.

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TANA – ANTANANARIVO

Colline de Faravohitra embrasée.

© ARNAUD BONNEFOY

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Antananarivo s’étend, tentaculaire, entre les collines et les rizières. Si « Tana » ne constitue pas une destination en soi pour la plupart des voyageurs, elle peut séduire ceux qui prennent le temps de la découvrir. Car la « Ville des mille » possède un charme bien à elle. En outre, elle compte aujourd’hui des hôtels de bon standing, des restaurants gastronomiques et des bars animés. Les environs se prêtent à toutes sortes d’excursions en connivence avec la vie rurale traditionnelle. Plusieurs jours sont vite passés, si l’on fait fi d’un chaos urbain et d’une certaine misère parfois déstabilisants.

HistoireAntananarivo est une ville historique. Lorsqu’au XVIIe siècle, le roi Merina Andrianjaka soumet la cité Vazimba d’Analamanga (« la forêt bleue »), il fait installer son palais sur le site stratégique le plus élevé – site de l’actuel Rova – et décide de faire de ce lieu sa capitale, qu’il nomme Antananarivo, « la Cité des mille guerriers ». À la fin du XVIIIe siècle, le roi Andrianampoinimerina, « le seigneur cher au cœur de l’Imerina », organise l’administration territoriale du royaume. La capitale y tient un rôle majeur. Elle est successivement le lieu du pouvoir de Radama Ier, de Ranavalona Ire, de Rasoherina, de Radama II, de Ranavalona II et de Ranavalona III, le siège des résidents de la période coloniale et, enfin, la capitale politique de la République.Aujourd’hui, Antananarivo est le centre écono-mique du pays, le siège des ministères et de l’administration, des principales entreprises et des banques ; en outre, c’est un centre de commerce très actif et le point de départ des communications vers toutes les régions du pays.

La ville aujourd’huiVille d’altitude (elle s’étage entre 1 240 et 1 470 m), capitale à dimension humaine (peu de gratte-ciel, de nombreuses maisons à un ou deux étages parmi lesquelles dominent les superbes constructions de brique typiques des hauts plateaux), cité secrète (ruelles – elakela trano –, terrasses, escaliers, gradins), Antananarivo est une métropole tout en relief.Cette ville en pleine croissance comptait moins de 50 000 habitants au début du siècle, 160 000 en 1948. Elle en compte plus de 2 millions aujourd’hui, et cette croissance urbaine démesurée ne va pas s’arrêter de sitôt. L’exode rural et le chômage poussent en effet de nombreux agriculteurs à y tenter leur chance. Par conséquent, les logements sociaux manquent, les infras-tructures sont souvent saturées ; la circula-tion automobile est de plus en plus difficile (aux heures de pointe, la conduite relève du grand art) et la pollution prend des propor-tions inquiétantes. La mendicité est très répandue...Mais cette cité ne se découvre qu’au fil des promenades, en flânant parmi les vestiges du passé : édifices à colonnades, lambris, vérandas foisonnent un peu partout. L’architecture coloniale donne à la ville un charme un peu suranné.Ceux qui ont connu « Tana » il y a quelques années peuvent témoigner que la « Cité des mille » est bien plus « présentable » aujourd’hui. Son magnifique patrimoine architectural reste néanmoins menacé par un modernisme obsédant et le chantier est immense.

Tana – Antananarivo

Les immanquables d’Antananarivo et sa région w Flâner dans l’un des marchés artisanaux de la ville.

w Visiter le site d’Ambohimanga, Patrimoine de l’Humanité.

w Dîner un filet de zébu dans l’un des très bons restaurants du centre.

w Arpenter l’ouest des Hautes Terres, ses petits villages traditionnels.

w Passer une nuit près du lac Itasy, tranquille et alangui dans un cadre volcanique.

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TANA

–AN

TANAN

ARIVO121La ville aujourd’hui - TANA – ANTANANARIVO

w Sécurité. La délinquance urbaine existe à Antananarivo comme dans certains quartiers de Paris ou de Marseille. Pour autant, Tana n’est pas Johannesburg. Lorsque vous vous promenez, n’emportez qu’un minimum d’argent sur vous, n’exposez pas vos bijoux ou montres, et surtout, ne portez pas votre appareil photo porté en bandoulière… Faites surtout attention aux gamins, notamment autour de l’Avenue de l’Indépendance, qui usent d’une technique savante (un chapeau retourné pour mendier, masquant une autre main qui fouille dans vos poches ou dans vos sacs). Madagascar est l’un des pays les plus pauvres au monde, et le moindre signe de richesse attise certaines convoitises. Mieux vaut faire profil bas. D’une manière générale, quand on ne connaît pas une ville et si l’on n’est pas habitué aux pays du tiers-monde, il vaut mieux sortir accompagnés ou en groupe. Le lac Anosy ou le quartier d’Isotry ne sont pas des endroits recommandés à la nuit tombée. Ailleurs, les précautions d’usage durant la journée valent surtout le soir (peu d’éclairage public, ruelles solitaires...). A noter qu’une forme de criminalité plus grave (vols à main armée, cambriolage, meurtre) a fait son apparition ces derniers temps : elle touche surtout les Malgaches eux-mêmes et les résidents. A priori, les touristes

ne sont pas spécialement touchés. Faites preuve de bon sens, et tout devrait bien se passer.

w Pauvreté. La pauvreté est une image douloureuse pour les voyageurs, mais il ne faut pas oublier qu’elle est une réalité de tout instant pour des millions de Malgaches. Nous ne voulons pas donner de leçons, mais évitez de vous comporter comme un « petit blanc bien nourri », en arguant que tant de malheurs vous font de la peine, et que vous préférez fuir la pauvreté plutôt que l’aborder. À ce propos, nous vous conseillons de ne jamais rien donner sinon cela se saura très vite, de véritables bandes sont aux aguets. Et puis, répétez-vous que donner de l’argent ne crée pas de richesses, mais seulement de nouveaux besoins, des attentes, des exigences. Il est bien plus sage de faire un don (argent, médicaments, vêtements, etc.) à des ONG qui sauront l’utiliser judicieusement. On désigne par « 4 Mi » les indigents (souvent de jeunes enfants) qui mendient dans les rues de la capitale malgache. On ne connaît pas vraiment l’origine de ce néologisme : peut-être désigne-t-il les anciens locataires des vieux bus qui portaient ce matricule ; ou alors il évoque les quatre verbes suivants : mifoka (fumer, du chanvre surtout), miloka (jouer, de l’argent), migoka (boire, de l’alcool), et mileli (baiser).

Le CarréLe Carré

Le Bretagne

Hôtel Moonlight

La Muraille de Chine

Palm HotelSakamanga

Sole HotelIndra

Le Grand MellisHotel & Spa

Hôtel de France

TanaPlaza

Blanche-Neige

Café de la Gare

Kass’Dall

Hôtel de ville

Tany MenaTours

La Jonquille

Corsair

Ambassade de France

Le Glacier Anakely

Marché d’Isotry

Mercure VoyagesMadagascar

PlaceAmbiky

GareSoarano

Antananarivo Lalana Rainandriamampandry

Lala na Razafindra

novon

a

Lalana Defotaka

L. Ihovana

R. P. Ca

mo

Rue Benily A

Rue Mabizo S

Lalana A

ndriantsila

vo

Lalana Radam

a

Avenue de L’Indépendance

Lalana In

dira G

andhi

Arabe Rahezavana

L. Rak Toto

L. A

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Ratianariv

o

Lalana Jean-Jaurès

Lala

na

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Arabe Rain

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ka

Arabe Lietna Andriamaromanana Albert

Le Bretagne

Hôtel Moonlight

La Muraille de Chine

Palm HotelSakamanga

Sole HotelIndra

Le Grand MellisHotel & Spa

Hôtel de France

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Blanche-Neige

Café de la Gare

Kass’Dall

Hôtel de ville

Tany MenaTours

La Jonquille

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Ambassade de France

Le Glacier Anakely

Marché d’Isotry

Mercure VoyagesMadagascar

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Antananarivo Lalana Rainandriamampandry

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Hôtels

Restaurants

Bar / discothèque

Divers

0 100 m

LacTsimbazaza

LacAnosy

LacTsimbazaza

LacAnosy

AnalakelyAnalakely

Analakely

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122 QUARTIERS

w Pollution. Plusieurs études d’ONG internationales indiquent que Tana compte parmi les villes les plus polluées au monde. Pour parvenir à de telles conclusions, on a mesuré l’insalubrité de l’air, due à la fumée d’échappement des véhicules passant dans les deux tunnels de la capitale. La

gestion des déchets y est en outre encore préoccupante, et l’extension démesurée de la ville dans les périphéries industrielles complique singulièrement la prévention de la contamination ambiante. Bref, il y a encore du pain sur la planche pour rendre le climat de la capitale suffisamment sain.

QUARTIERSAntananarivo est une ville profonde, une vraie capitale qui mérite qu’on lui consacre du temps. Vous y découvrirez une vallée entre deux collines, et partout des maisons s’échelon-nant à flanc de coteau. On sent (en la regardant s’étendre quartier après quartier), que la capitale malgache est née de la jonction de multiples villages. Les rizières affleurent en ville, tout près du Rova, composant un paysage pittoresque. Attention : se repérer en ville n’est pas simple. Ne demandez surtout pas votre chemin avec des noms de rue : personne ne les connaît ! Il vaut mieux connaître le nom exact de votre destination, ou alors un symbole, un site connu servant de point de repère. Par exemple : près de telle école, près de tel hôtel, de tel restaurant, de telle station essence… Vous apprendrez bien vite à vous y faire. Evidemment, connaître le nom du quartier en question est un minimum.

IvatoIvato est la ville de l’aéroport international. Ces dernières années, de nombreux hôtels et restaurants ont ouvert leurs portes, pour tous les budgets. Il y a moins de trafic qu’à Tana, c’est beaucoup plus calme et certains voyageurs préfèrent y loger, en transit (les formules Day use se sont multipliées), avant de quitter Mada ou même comme base pour visiter

la capitale : des taxis sont en effet disponibles à toute heure de la journée.

CentreLe centre est le cœur de Tana : administra-tions, grands et plus petits hôtels, restaurants, boutiques en tout genre... La circulation y est extrêmement pénible, sauf le samedi après-midi et le dimanche. Les solliciteurs, divers et variés, peuvent s’avérer un peu pénibles à la longue... Les quartiers principaux sont : Analakely, Ambohijatovo, Tsaralalana (quartier indo-pakistanais), Isoraka, Antaninarenina et Ambatonakanga. Nous incluons aussi le quartier chinois de Behoririka.

La ville hauteLa ville haute regroupe, pour nous dans ce guide, tous les quartiers situés sur les collines et qui entourent (on pourrait même dire : cein-turent) le « centre-ville » (puisqu’il faut bien en définir un par commodité). Ces quartiers sont parfois très proches et facilement accessibles, mais il faut toujours tenir compte des embou-teillages ! Nous voulons parler par exemple d’Antsakaviro, Ambondrona, Ankadifotsy, Faravohitra (pourtant accolé à l’avenue de l’Indépendance), Antanimena, ainsi que la Vieille Ville autour du Rova ou Palais de la Reine.

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Echoppe à Antananarivo.

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