SAINTES FEMMESLES DES PLUS ILLUSTRES TEMPS A P O S T O L I Q U E
SQUI
I>AR L E U R VrK, PAR L E U R S DISCOURS E T LEURS ACTIONS OU
l'AH L E U R U N R K U X MARTYRK ONT R E N D U TMOIGNAGE A
JSUS-CHRIST
L E U R S MONOGRAPHIES
SONT PRCDES
DE
L'HISTOIRE
DEDU
LA
SAINTE
VIERGE
MRE
CIIhlST
Par M. l'Abb MAISTREChanoine honoraire, Doyen de Dampierrc, au
diocse de Troycs (Aube) ; prcdemment Professeur d'Ecriture-Sainte
et de nologie ; Examinateur gnral des Confrences ecclsiastiques
diocsaines, ulc.
La Femme immacule sera plus estime que tous les trsors.(EccJi. X
L , -10.)
Un grand nombre de femmes nobles embrassrent la foi. (Act. xvu.
A, -12.) Plusieurs saintes femmes suivaient le Christ et
l'assistaient. (S. Marc, xv, Al.) Beaucoup de monde croyait en lui,
sur le tmoignage que rendait la femme convertie. (S. Jean, iv, 59.)
Comme les autres Disciples, les ' femmes se laissaient traner en
prison plutt que de renoncer Jsus-Christ. (Act. vin, 3.)
PARISF. WATTELIER19,
ET
C ,
I E
LIBRAIRES19
BUE E SVRES,
1874
Biblio!que Saint Librehttp://www.liberius.net Bibliothque Saint
Libre 2008. Toute reproduction but non lucratif est autorise.
GRANDE CHMSTOLOGIE
SECONDE
PARTIE
L E S T E M O I N S DU C H R I S TSIXIME CLASSE DE TMOINS
LES
SAINTES
FEMMES
CONTEMPORAINES ET DISCIPLES DU CHRIST ET DES APOTRES.
CHAUMONT. IMPRIMERIE DE C. CA.VANIOL.
A MADAME
HENRIETTE-LISABETH-MA-RIE-JOSPHINE
M . . . DE L A BUSSIRE DE L FERTMADAME ET Tits-cnitE SOEUR,
Le souvenir de votre pit claire m'engage vous offrir comme un
public monument de parfaite estime et de respectueux attachement ce
nouvel ouvrage concernant les Saintes Femmes, qui furent les
contemporaines des Grands Aptres et les Disciples mmes du Messie.
J'ai la confiance que vous aurez pour agrable cet hommage, et que,
hritire de l'esprit chrtien et de la foi ardente de vos glorieux
anctres, vous accepterez volontiers ce Livre crit pour mettre en
lumire la gloire de la Souveraine du Ciel et de ses nobles
compagnes, composant sa Cour d'honneur. A quelle personne, plus
amie de ces premiers Tmoins du Christ, pouvais-je prsenter LES
FEMMES ILLUSTBES DE H PRIMITIVE EGLISE? Vous ne pourrez qu'aimer de
plus en plus Celles dont vous avez, ds vos jeunes annes, fidlement
retrac en en votre vicies beaux exemples. Vous vous rjouirez de
voir se rvler au grand jour ces Ames gnreuses et sublimes qui,
conjointement avec les Hommes Apostoliques, ont efficacement
contribu fonder les premires chrtients de la terre. Si l'excution
de l'entreprise est au-dessous de la grandeur du sujet, vous
accueillerez nanmoins ces laborieuses investigations, ces trsors
antiques de l'Eglise, demeurs longtemps enfouis, mais appels, je
l'espre, fructifier abondamment dans ces temps d'universelle anxit,
de transformation et de rnovation religieuse, o s'agite notre Socit
moderne. Veuillez, je vous prie, agrer, etc. Ce 2 fvrier 1874, jour
de la Chandeleur.1
LES SAINTES FEMMESQONTEMI'O HAINES HT M S C I P U S D E J S U S
KT D E S APOTRES
La femme peut et doit, comme l'homme, rendre tmoignage la vrit.
Si elle n'est pas appele le faire par la voie del prdication ou de
l'enseignement public, elle accomplit ce devoir par divers autres
moyens : par exemple, par une vie conforme la doctrine da Christ;
par un langage constamment chrtien; par une profession publique de
la foi; par l'enseignement de famille, et, au besoin, par le
tmoignage du sang, lequel parle plus haut que l'loquence mme des
grands prdicateurs, et plus efficacement que la sagesse des
docteurs et des philosophes. Les femmes illustres et saintes de la
primitive Eglise sont au nombre de plusieurs milliers; elles ont,
dans leur temps, rendu Jsus-Christ ces diffrentes sortes de
tmoignages, et trs-souvent le dernier. Celles dont les noms
figurent dans les Annales Ecclsiastiques, Historiques, et, en
particulier, dans ces Notices ont t remarquables par leur foi
ardente, par
leur force et par leur hrosme surhumains, par les plus pures
vertus. L e tmoignage qui rsulte de leur courageux, de leur
intrpide dvouemenl, a, consquemmenl, une valeur dmonstrative en
faveur de la vrit chrtienne.
La Sainte Vierge, Mre de Jsus, figure la premire la tte des
saintes vierges et des saintes femmes du sicle apostolique, comme
le Christ apparat la tte de ses Aptres et de tous les saints
hommes, ses disciples. Elle prsente au Fils de Dieu tout le sexe
qui s'est gnreusement consacr et dvou son service, comme le Christ
prsente son Pre cleste l'Eglise, son pouse hien-aime, qu'il s'est
acquise au prix de ses souffrances et de son sang. Nous placerons
ici le tableau des Femmes Illustres de
l'Evangile, qui furent les tmoins, soit des faits et des
circonstances de l'Incarnation, soit de la prdication et des
miracles do Jsus-Christ et des Aptres, et qui leur rendirent
tmoignage, de vive voix, par leur vie chrtienne, dvouement. par
leur
S ANNE Fille de PHANCEL,
l e
S " ANNE
PROPHTBSSl EN ISRAL. MARIE, fille de JACOB, . mre de SALOM, more
des AptresS. JACQUES et S. J E A N . S" MA RI 15, de CLOPHAS,
MARIELA VIERGE IMMACULELA GLORIEUSE
. MItK UE LA SAINTE VIERGE.SOB mre de S - ELISABETH, pouse de
ZACRARIB, mre du Prcurseur. MARIE S A L O M ,
mre des quatre frres, Jacques, Jude, Simon et Jos, appels LES
l'UKKBS DE JiiKIJS. S" SALOM, surnomme ESTIIEK, samr des quatre
frres prcdents. SVRONIQUE ou SRAPIIIA, pouse de SIRAC, dignitaire
de Jrusalem. S" J E A N N E CHTJSA, pouse de CHUSA, intendant du
roi Ilrode. S,E
tllO l'OllSTKTMX.fi' MA R I 15, fille de CLOPHAS. surnomme
TIIAMAR, parente de la SAINTE-VIERGE, et sur des quatre frres de
Jsus. S" SUZANNE, illustre dame de Jrusalem. (S.Luc, vin, 3.) S'"
MIRIAM, comme de la SAINTE-VIERGE, la fiance de Cana.L E S TROIS
SUIVANTES de la SAINTE-VIERGE.0
MRE D E DIEUPsaume prophtique X L I V , 12-18 ADDUCENTUR
(CHRISTO) R E G I VIRGINES POST EAM (Scilicet,
MARIE DE J R U S A L E M , mre de MARC.
S" B R N I C E ou l'IImorrosse de PEvangile. La vierge RHOD ou
ROSE, dont il est parl dans les Actes, xu, 13.La SAINTE MRE
post B .
V . MAHIAM.)
La chtelaine de Blhanie ou S" MARTHE, vierge, sur de LAZARE. La
chtelaine de Maerlalum ou S MAGDELEINE, sur des prcdents. S" MARIE
D'HLI. (Dans Brentano et dans Cazals. p. 335.)te
des disciples ALEXANDRE etRurus gui travailla beaucoup Rome pour
le service de l'Eglise. (Rom. xvi, 13.)Les SAINTES FEMMES
D'ISRAL
v 13. Ecoutez, Vierge, ma fille, dit le Roi Prophte, voyez et
prtez l'oreille : Oubliez votre peuple (d'Isral) et la maison de
votre pre. Donnez-vous au Seigneur. i 14. Alors le Roi (Messie)
sera pris de votre beaut spirituelle ; car il est le Seigneur votre
Dieu, qu'on adorera : et concupiscet Rex (Christus) decorem tuum ;
quoniam ipse est Dominus Deus tuus, et adorabunt eum.
LA
VEUVE
DE NAM,
qui suivaient et pleuraient Jsus montant au Calvaire. S"
PTRONILLE, vierge, fille de S. PIERRE. S " MARIANNE, sur de S.
PHILIPPE, aptre ; S " EOTYOHIA et S" HERM10NE , prophlesses el
thaumaturges, avec leur mre et une autre sur. PROCULA-CLAUDIA,
femme de PONTIUS-PILATUS.1
appele MARONI, (Dans certains auteurs ) S" PERPTUE, femme de S.
PIERRE, martyre, avec sa mre de Capharnaum.LES SAINTES VIERGES
D'EPIISE,
diriges et prsides par MARIE.LES SAINTES FEMMES ET FILLES
D'ISRAL,
15. Les filles de Tyr, de toute la Gentilit, viendront vous avec
des prsents, et tous les riches du peuple brigueront Venvi votre
faveur. t 16. Toute la gloire de cette fille du Roi (c'est--dire du
Roi Cleste, car il est le Seigneur notre Dieu) est au dedans; elle
est d'une beaut parfaite ; elle est pare de franges d'or, ses
vtements sont parsems d'or, sont enrichis de broderies, symbole de
ses vertus. v 17. Des Vierges nombreuses seront prsentes au Roi de
gloire aprs Bile ; et les compagnes de cette Vierge par excellence,
vous seront amenes avec Elle, Roi-Messie ! y 18. Elles seront
amenes (avec Elle) au milieu des transports de joie et des chants
d'allgresse ; elles seront introduites (avec Elle) dans le palais
du Roi Cleste. V 19. 0 Vierge, la place de vos Pres, les anciens
Patriarches, des fils vous natront, qui deviendront les Aptres ou
les nouveaux Patriarches du Peuple de Dieu ; vous les tablirez
Princes sur toute la terre (c'est--dire dans tout l'Univers.) y 20.
IU se souviendront de votre nom dans toutes les gnrations, pour en
clbrer les louanges. y 21. Et c'est pour cela que les peuples
vous'loueront dans tous les sicles et jamais.
exhortes elsanclifies par MARIE, dans la maison de Sion. S"
TABITHA, pieuse veuve de Palestine. 8- F L I C U L A , vierge
romaine, martyre. S" LYDIA, riche marchande de pourpre, plus riche
en vertus et en mrites. S THODORA, illustre dame romaine, martyre.
S" BALBINE, vierge et martyre.1
L E S QUATRE FILLES
du diacre S . PHILIPPE, prophlesses. S" CANDIDA, napolitaine,
disciple de S . PIERRE. S " PLATJTILLA, femme consulaire, disciple
de S . PAUL. S" E X U P K R E , dame chrtienne. S " PRISCILLA.
illustre matrone de Rome.
1 " sicle.S"BASILISSA et S" ANASTASIA, nobles dames romaines,
martyres, au milieu du premier sicle. Les S'" F L A VIA DOM1TILLA,
dames romaines, proches parentes de l'empereur DOMITIUN. S" PIL/EB,
diaconesse de l'glise de Cenchre. (Rom. xvi, 1.) S" M A R I E , qui
travailla beaucoup Rome pour les Chrtiens, (Rom. xvi.) S" T R Y P H
N A , qui travailla Rome pour le service du Seigneur. (Ibid., xu.)
S' P E R S I D E , qui se dvoua pareillement au service du
Seigneur. (Ibid., xu.) S" J U L I A . (Ibid., xv.)L'ILLUSTRE SOEUR
DE S. N R E .
V
sicle.
S THCLA, s vierge et martyre. S' IPHIGNIE, vierge, de race
royale, avec deux cents autres vierges, ses compagnes. La noble
dame S' APPTA, (t'i episl. ad Vhilemon, v. 2.) S" P R A X D E S et
S " PUDE1S TIENNE, nobles vierges romaines, filles du snateur
PUDENS, ami et disciple de S. PIERRE. S " PRICILLA, femme
CZ'AQUILA, coopraleurde S . PAUL.8
C'est ainsi que le prophte David avait annonc, dix sicles
d'avance, que sa noble fille, Marie, la Vierge des Vierges, se
prsenterait un jour devant le Messie, le Roi de gloire, accompagne
d'un nombreux cortge d'mes fidles, et principalement de Vierges au
front anglique, destines tre ternellement les Epouses du Fils de
Dieu.
(Rom. xvi. Act. 18. 2-26.) S" TRYPIIOSE, qui travailla Rome pour
le service de, l'Eglise. (Ibid., xu.) S" JUSTA, la Cananenne. S"
PHOTINA, la Samaritaine,ET SES TROIS SOEURS.
(Ibid., xv.) S" J U S T I N E , vierge et martyre. S'" SABINA et
S" SRAPIIIA, martyres sous l'empereur ADRIEN. Etc., etc.
Cette uvre a commenc dans Marie et par Marie. Elle a port
d'heureux fruits pendant dix-huit sicles. Elle se poursuit
encore aujourd'hui par Marie avec un progrs plus, clatant que
Aprs les Aptres, les autres ouvriers vangliques ont, de sicle en
sicle, prsent JsusChrist une infinit d'mes saintes et
particulirement de vierges dvoues Dieu, consacres au service du
Seigneur. jamais.
S" SYMPITOROSE, avec ses sept fils, martyrs. S CONSTANTIA-BARBA,
S POLIXNE, S - E V O D I E , S " ARTADN, S" E U P H M I A , S
DOROTHE, une autre S TI1CLE, S" ERASME, vierges martyres. S PRIFCA,
noble vierge romaine, martyre. Etc., etc.u K w
Ainsi s'accomplit de plus en plus, dans le cours des ges,
l'oracle prophtique du psaume 44 , relatif la grande Reine, la
Viergee
par excellence.
Chacun des prands Aptres tt des soixante-douze Disciples a amen
Jsus-Christ une multitude de vierges de la Gentilit.
HISTOIREDE LA TUES-SAINTE ET TRS-GLORIEUSE
VIERGEMRED I V I S E E N
MARIEDECINQ
DIEU P O Q U E S
La Naissance miraculeuse de Marie, sa Prsentation au temple, son
Mariage S . Joseph, la visite qu'elle fit St e
Elisabeth, pouse du grand-prtre Zacharie; son Enfante-
ment virginal Bethlem, sa Purification, son sjour en Egypte,
Nazareth, les diffrents traits de sa vie, son A s somption, sont
rapportes sommairement au second Livre de la Christologie et i
extenso dans plusieurs histoires particulires de la sainte Vierge,
crites par plusieurs auteurs, anciens et modernes. Bien que nous
puissions y renvoyer le lecteur, nous prfrons toutefois exposer ici
avec leurs preuves, les principaux faits de l'Histoire son1
de la sainte Vierge, parce que Marie est : fils;
Le premier tmoin des miracles et de la divinit de Jsus,
Voyez, dans la Christologie, t. n, c. 5, la tradition primitive,
touchant la naissance de Marie, son ducation dam le Temple, sou
Mariage avec S. Joseph, sa Virginit et son divin Enfantement, son
Voyage on Egypte et son Retour, les circonstances de sa vie pendant
les douze premires annes de VEnfance du Sauveur (Ibid. I. m, c.
14); Enfin sa glorieuse Assomption en corps et en me dans les cieux
(Ibid., I. ix, c. S ) .
G Le principal instrument dont s'est servi l'Homme-Dieu pour
l'uvre de la rdemption du genre humain; La plus fidle observatrice
des prceptes et des conseils cvangcliques ; Celle qui a le plus
souffert pour Jsus-Christ. Son tmoignage nous a t transmis par la
tradition : il explique et confirme admirablement tous les faits
cvangcliques. tlle fut consullo par tous les historiographes
primitifs du christianisme, et, en particulier, comme on le
rapporte, par S . Luc, sur divers dtails de sa famille, de sa
descendance de David, sur l'enfance de Jsus, et sur d'autres
points, qui concordaient parfaitement avec la tradition orale et
scripturale. Nous partageons cette Histoire de la Vierge en cinq
poques Figures
principales, de la manire suivante : I poque. Marie dans les
Oracles et dans les prophtiques de l'Ancien Testament. I I poque.
Conception immacule de Marie. S a nativit. Sa prsentation. Son
enfance. Son ducation dans le temple. 111 poque. Marie, depuis
l'Annonciation, jusqu' la Passion de Jsus-Christ, et Esprit. IV Ve
e e
la descente du Saint-
poque. Marie, aprs l'Ascension de Jsus-Christ. poque, finale et
dfinitive Rgne et gloire immor-
telle de Marie dans les cieux et sur la terre.
7
PREMIRE POQUEouMARIE DANS ANNONCE DURANT QUATRE CENTS A N S ,
l'HOl'IlKTIOUKS
L E S ORACLES DE
ET DANS L'ANCIEN
L E S EIGUIIES TESTAMENT.
Dieu, dans ses desseins ternels, avait prdestin Mario concourir
avec le Christ la rdemption du genre humain.
11 avait rsolu d'accomplir par Elle et par son Fils bien-aim,
ses volonts misricordieuses l'gard des hommes. C'est pourquoi, ds
l'origine, en annonant au monde la dlivrance universelle, il annona
en mme temps la Vierge excellente, qui devait tre un jour
l'instrument de notre salut. Il la prophtisa, il la figura h
l'avance, comme la rconciliatrice du ciel avec la terre, comme la
plus noble et la premire de toutes les cratures, commn le plus
parfait modelo do saintet qui put tre prsent l'univers, comme le
vase le plus clatant de la grce et de la gloire, comme la reine et
la souveraine de l'humanit reconquise. La sainte Mre du Messie a
donc t l'objet de prophties verbales ou proprement personnelles, ou
dites, et de prophties figuratives, symboliques.
I. PROPHTIES VERBALES. Prophties verbales. Aprs la chute
primordiale, Dieu, dans le Paradis terrestre, promit nos premiers
parents que un jour la Vierge, mre du Librateur, dtruirait du
Tentateur, et ruinerait l'uvre partout l'empire du Dmon. Cette
8
solennelle promesse fit natre l'esprance dans le
cur
d'Adam et d'Eve, et les consola dans leur profonde affliction.
L'attente de la Femme par excellence, qui devait craser la tte du
Serpent-sducteur, fut commune chez toutes les nations de la terre.
Mose la consigna au livre do la Gense (I *5.'i0 ans avant
Jsus-Christ). Les divers Prophtes, dans le cours des sicles, ont
annonc do diverses manires que l'incarnation du Messie serait
l'cllcl d'une opration surnalurcllo cl tonte cleste; que la
gnration temporelle du Christ ne serait point semblable celle des
autres hommes ; qu'une vierge devait l'enfanter par un prodige tout
nouveau et tout particulier. Le prophte Isae, vu, 1, reut l'ordre
du Seigneur d'aller re nouveler publiquement devant le roi Achaz et
sa cour la promesse relative la Vierge prdite, future mre du Dieu
Messie. Ecoutez, dit-il, maison de David : Voici que la Vierge
(VHalmah) concevra un fils, dont le nom sera Emmanuel, avec nous.
qui apparsera du le Prince sera un enfant ne' pour nous, et
enfantera Dieu c'est--dire, un
Il ajoute, un peu aprs, que cet Emmanuel, tient la terre de
Juda, appel l'Admirable, sicle futur, jamais. Ainsi, Yllalmah, du
Dieu avec nous. le Dieu fort et puissant,
et qu'il s'assira sur le trne de David tout n irapSsvos (selon
les Septante), c'est-Roi-Messie,
dire la jeune Vierge prdite, sera la mre mme du
2 . L e mme Isae, dpeint plus loin le Messie que les nations
attendent, sur lequel se reposera Y Esprit du Seigneur, qui du
glaive de sa parole frappera le Dmon, l'Impie par excellence, et
qui fera rgner sur la terre la paix universelle; puis il dit, en
parlant de son extraction temporelle : Il sortira un rejeton de la
racine de Jess, s'lvera une fleur. Suivant l'interprtation gnrale
des Pres, la racine, c'est et sur sa tige
9 Jess, chef de la race de David ; le rejeton, c'est Marie ; et
la fleur que produira la Vierge Marie, c'est le Christ, sauveur des
peuples. 3 . Au chap. 53, v. 2, le mme Prophte dit en parant de la
virginit de la Mre du Messie : Il s'lvera (le Messie), comme un
jeune arbrisseau qui sort d'une (erre strile. La virginit do sa Mro
est annonco par ces paroles, disent les docteurs. Sa Mre est
justement compare pour sa virginit une terre strile, improductive
par elle-mme, mais qui cependant produira le Juste par excellence,
parce qu'elle sera fconde par une rose cleste, miraculeuse. 4. Voil
pourquoi les patriarches, sachant que ce Juste devait natre
miraculeusement de la Vierge, s'criaient : Cieux, distillez d'en
haut votre rose, et que les nues fassent descendre le Juste; le
Sauveur, Seigneur germinet que la terre,qui est par elle-mme
Salvatorem... nubes pluant Jusstrile, s'ouvre sous cette influence
d'en Haut, et qu'elle germe turn; et que la Justice naisse en mme
temps; c'est moi le
qui l'ai cr, ce Sauveur. Les anciens, comme
on le voit, connaissaient que la semence ou le germe qui devait
produire le Sauveur, descendrait d'en Haut sur la terre. Si le
Messie eut d natre, non par l'opration du SaintEsprit, mais par un
commerce humain, ils n'eussent pas demand que le Juste-Sauveur
descendt du ciel, ni que les nues et que l'ombre du Trs-Haut
l'apportassent la terre. Ils rendaient hommage au trs-pur et
trs-sublime mystre de l'incarnation du Verbe dans le sein de la
Vierge prdite. 5. David, au psaume 74 , v. 6-7, exprimait la mme
attente, lorsque 300 ans auparavant, il disait : Le Roi (Messie)
qui apportera la paix et la justice nations, celui qui durera
autant que le soleil, avant la lune, dans les sicles des sicles,
descendra aux cl qui existe commee
une pluie sur une toison, et comme une rose qui descend
10 sur la terre; descendet sicut pluvia in vellus, et sicui
licidia stillantia stil-
super terram. Ainsi, le Messie devra des-
cendre d'en Haut, comme une douce rose qui fcondera le lieu o
elle descendra. Sa naissance sera l'uvre du TrsHaut, et non point
l'uvre de l'homme terrestre. 6. C'est dans le mme sens que
s'entendent communment ces paroles du Psaume '109 : Ex utero ante
te parviendra de mon sein avant l'toile du matin. Les Prophtes
admiraient, adoraient longtemps d'avance le mystre de la conception
du Messie dans le sein de la Vierge; ils le contemplaient comme un
prodige nouveau, e x traordinaire. L e Seigneur, dit Jrmie, x x x i
, 22, crera un son sein l'Homme par excellence, le tout puissant.
l'incarnation crature prodige dans nouveau sur la terre : La femme
par excellence portera Luciferum tibi ros nativitatis : c'est--dire
la rose de la naissance
Nos Pres, dit M . Drach, les Hbreux qui vivaient avant du fils
de Dieu, attendaient un Messie qui, devait venir d'ailleurs que les
autres nouvelle,
hommes. Sans pre sur la terre, il devait tre la rose qui descend
d'en haut. Une femme, unique, que les rabbins appellent nouveau, et
demeurer elle-mme la Mre cleste, devait l'envelopper par un miracle
dans ses chastes entrailles,
pure et intacte, jusqu' sa bienheureuse mort, comme le mem ferm
qui (commence et) termine son nom. 7. On entend communment de la
Vierge Marie, les paroles suivantes du Cantique des Cantiques1
: naissante, pi?gre-
Quelle est celle qui s'avance comme l'aurore comme une arme en
bataille? Quce est isla qum
belle comme la lune, clatante comme le soleil, et formidable
dilur quasi aurora consurgens, pulchra ut luna, electa ut sol,
terribilis ut\castrorum acies ordinala !' Cantic., v, a.
l l -
On attribue ces paroles aux Anges et aux Puissances clestes. Ces
princes du ciel, en voyant dans la lumire prophtique et divine, la
Vierge Marie paratre dans le monde, furent ravis de l'clat qu'elle
jetait au milieu des tnbres dont tait couverte la surface de la
terre. Frapps des rayons de grce dont clic tait environne, ils la
compareront l'auroro resplendissant, la lune remarquable par sa
blancheur, an soleil distingu par sa splendeur. Etonnes de la
grandeur de ses destines et de la magnifique puissance dont elle
disposerait un jour, ils la considrrent comme une arme range en
bataille, et formidable aux Puissances Infernales. Les esprits
clestes prouvrent des transports de jo'ie, lorsqu'ils connurent
parla, que l'empire des tnbres allait tre dtruit, et que
l'instrument de cetle grande merveille serait une fille d'Adam, qui
non-sculcmcnt naissait sans la tache originelle, mais qui effaait
toutes les cratures par sa saintet et parles autres grces dont elle
tait orne. Ils offrirent Dieu leurs actions de grces, et rendirent
un tribut de louanges la nouvelle humain. Eve que le Tout-Puissant
accordait au genre
II. PROPHTIES
F I G U R A T I V E S , PERSONNELLES.
Si Noire-Seigneur Jsus-Chris'l a t prophtiquement prfigur par
les Patriarches et les Prophtes, sa sainte Mre, la vierge Marie,
l'a t semblablement par quelques saintes femmes des sicles anciens.
Ces figures prophtiques peuvent tre prsentes comme preuves, parce
qu'elles sont des prophties d'une certitude absolue. Marie s'est
trouve reprsente en partie dans celles qui regardent le Messie ;
elle l'est, de plus, dans plusieurs autres qui la concernent tout
spcialement et personnellement. Nous les examinerons
succinctement.
12
4. Eve est la figure inverse de la sainte
Vierge.
Nous tablirons ici, l'exemple de S . Paul, un parallle
d'opposition entre l'Ancienne Eve et la Nouvelle E v e , comme il a
t tabli par l'Aptre entre Adam et Jsus-Christ, le nouvel Adam.
L'ouvrage do notre corruption commence ' par E v o ; l'ouvrage de
la Rparation par Marie. La parole de mort est porte Eve ; la parole
de vie la sainte Vierge. Eve tait vierge encore, et Marie tait
vierge. Eve, encore vierge, avait son poux, et Marie, la Vierge des
vierges, avait son poux. L a maldiction est donne Eve, la bndiction
Marie : vous tes bnie entre toutes les femmes 1 Un ange des tnbres
s'adresse Eve ; un ange de lumire parle Marie. L'Ange des tnbres
veut lever Eve une fausse grandeur, en lui faisant affecter la
divinit: vous serez comme des dieux 1 lui dit-il ; l'Ange de lumire
tablit Marie dans la vritable grandeur par une sainte socit avec
Dieu : Le Seigneur avec vous I lui dit Gabriel. L'Ange des tnbres,
parlant Eve, lui inspire un dessein de rbellion : Pourquoi est-ce
que dieu vous a dfendu de manger de ce fruit si beau ? L'Ange de
lumire parlant Marie, lui persuade l'obissance : N e craignez
point, lui-dil il, et : Rien n'est impossible Dieu. Eve croit au
Serpent, et Marie l'Ange : De cette sorte, dit Tertullien une foi
pieuse efface la cause d'une tm raire crdulit, et Marie rpare en
croyant en Dieu, ce qu'Eve a ruin en croyant au diable. ' Tort., de
Carne Clirisli, n. 17.
est
Marie,
13
Enfin, pour achever le mystre, Eve, sduite par le dmon, est
contrainte de fuir devant la face de Dieu ; Marie, instruite par
l'Ange, est rendue digne de porter Dieu. Eve, nous avant prsent le
fruit de mort, Marie nous prsente le fruit de yie, afiD, dit S.
Irne ft l'avocate de la vierge E v e . S . Chrysostme m e t en
opposition Adam avec Jsus-Christ, Eve avec Mario, le Serpent avec
Gabriel : Mors per Adam, vita per Cliristum ; vam Serpens se duxit,
Maria Gabrieli consentit ; sed seductio Evac atlulit mortem,
consensus Mariai peperit Saculo Salvatorem. R e s tauratur per
Mariam, quod per Evam perierat: per Christum redimitur, quod per
Adam fuerat caplivatum ; per Gabrie lem promittitur, quod per
Diabolum fuerat desperatum. Le mme S . Docteur, dans l'homlie de
Incrnatione, p. 422, dcouvre un rapport qui rhabilite la femme et
l'lve l'gal de l'homme : . Dans l'origine, dit-il, le Verbe a form
Adam d'une terre vierge, et d'Adam il a form la femme sans femme.
De mme qu'Adam a produit la femme sans femme, de mme aujourd'hui la
Vierge a enfant l'Homme par excellence sans homme. Comme donc
l'espce fminine tait redevable d'une grce aux hommes, parce qu'Adam
avait produit la femme sans la participation d'aucune femme : C'est
pour cela qu'aujourd'hui une vierge enfante sans avoir eu commerce
avec aucun homme, payant pour Eve aux hommes la dette de son espce.
Car, afin qu'Adam ne s'enorgueillisse pas d'avoir produit seul une
femme, la Vierge seule enfante un homme, pour montrer par un mme
prodige que son espce jouit du mme privilge. Dieu a priv Adam d'une
cte sans faire tort Adam ; ainsi il s'est form un temple vivant
dans le sein d'une Vierge sanss
que la Vierge Marie
S. lrn., adv. hier., I. v, c. 19. Bossuet, Sermon.8 N
. Clirys., iwm. de interdiclione Arboris, 1.1.
14
porter atteinte sa virginit. Adam est rest sain et entier mme
aprs qu'on l'eut priv d'une cte; la Vierge est reste pure et chaste
mme aprs avoir mis au monde un enfant. Aux rapports qui prcdent,
ajoutons les suivants : Le mauvais ange, dit le vnrable Bdc, vint
Eve pour perdre par elle le genre humain ; l'ange Gabriel vint
Marie pour sauver par elle le monde. Kvc, encore vierge, a dtach la
mort du bois, et, l'unissant son sang, elle a transmis, aussi bien
que son poux, le principe mortel toute sa prosprit. Une autre Eve
viendra, galement vierge, qui, tirant de son propre sang le salut
des hommes, l'attachera au bois, et toute sa race adoplive y
puisera la vie. La femme a commenc le pch, et son sexe dut se
courber sous un nouvel anathme ; au bannissement du paradis
terrestre se joignit pour elle une continuelle humiliation dans
l'ordre de la socit. Mais, lorsque dans la plnitude des temps, la
nouvelle Eve aura donn la terre Y Agneau sans tache qui efface les
pchs du monde, la femme, runie la communion des Saints, sera
rtablie dans la plnitude de ses droits comme compagne de l'homme.
Les enfants de l'glise du Rdempteur, tous membres de Jsus-Christ au
mme titre, ne serontplusdistingus en hommes-matres et en femmes
esclaves. Non est masculus, ncque fmina; omnes enim unum eslis in
Christo Jesu. (GA.L. m . 2 8 ) . Eve fut appele la mre des vivants,
c'est--dire de ceux qui vivent de la vie temporelle et mortelle, de
celle vie corporelle et corruptible (GEN. m . 20) ; Marie a t nomme
la nouvelle mre des vivants, c'est--dire, de tous ceux qui possdent
la vie surnaturelle de la grce, le principe de la glorieuse
immortalit de l'me. (S. Jean x i x , 27). La guerre du Serpent
contre les deux mres du genre humain prsente pareillement un
contraste remarquable. L'inimiti qui a t mise entre le serpent et
la femme, entre la race du serpent cl celle d'Eve, provient d'une
horreur toute
15
naturelle, qui porte l'homme har et craser ce funeste animal, et
le serpent se venger de l'homme par les piges adroits qu'il tend
son implacable ennemi. (GEN. m . 15). Aux justes de l'ancienne loi,
il est dit : Vous foulerez aux pieds [le serpent) l'aspic et le
basilic, vous broyerez le lion et le dragon : Super aspidem et
basiliscum ambulabis, et conculcabis leoncm et draconem (Ps. 9 0 )
. Jpsa content caput luum : Elle et sa race te briseront la t$tc.
Mais dans celle guerre naturelle du serpent contre la femme et sa
race, tait prophtiquement prfigure une autre lutte spirituelle,
plus formidable, la guerre de Satan contre Marie, la nouvelle Eve
et ses enfants. L'inimiti ternelle qui existe entre Satan, ses
anges des tnbres, et tous les impies, ses enfants, d'une part ; et
Marie, son fils Jsus-Christ, et tous les fidles, ses enfants,
d'autre part, consiste dans une haine surnaturelle, dans une lutte
acharne, incessante; force du ct de Marie et de ses enfants, qui
renverse le rgne de Satan ; et piges, ruse et mensonges, du ct du
dmon et de sa race,- qui tendent tuer les mes des fidles par le
secret poison de l'erreur et du pch. Aux enfants de Marie et du
Christ il a t dit : Je vous ai donne' le pouvoir de fouler aux
pieds les serpents et les scorpions, et toute la puissance de
l'Ennemi; rien ne pourra vous nuire... tes, et super scorpiones,
sub pedibus vestris1
et
Les esprits impurs vous seront inimici. Satanam
soumis : Ecce dedi vobis potcslatm calcandi super serpenet super
omnem virtulem ( S . L u c , x . 1 9 ; et Rom. xvi. 20) : Deus
conterai !
Qu'on ne soit pas tent avec les incrdules du dernier sicle et
notamment avec Dupuis, de ne voir dans cette inimiti de la femme
contre le serpent, qu'une antipathie naturelle, et dans le reste du
rcit qu'une fable purile ; les prtendus philosophes ont commis ici
une lourde erreur. L e dmon est manifeste1
Ita, S. Epiph., heodorel, S. Aug., ltuperl, Bede, etc.
-
16
ment figure sous le nom du serpent. On le sait: naturellement un
serpent n'et point parl Eve pour la tromper. Cet animal rus, dont
parle la Gense, n'est donc pas autre que Satan, qui sans cesse
dresse des piges l'homme. C'est ce mme Satan qui tenta J o b par de
si rudes preuves, et que ce saint homme appelle le Serpent ou la
Couleuvre Job le nomme encore Y Orgueilleux!
tortueuse,
chasse
du paradis par la main de Dieu, vers l'poque do la cration.
frapp par la Sagesse de Dieu (ou le Verbe de Dieu). Or, ce dmon,
dguis sous le nom et sous la forme du serpent, n'a point vu sa
force brise, ni son empire renvers, qu'au temps o la Vierge, la
femme par excellence, eut enfant le Sauveur. Ce fut alors seulement
que sa tte a t crase, sa puissance enchane, son culte dtruit,
lui-mme et ses anges impurs, chasss dehors. Ds lors, les
possessions devinrent plus rares, les magiciens et les oracles des
fausses divinits gardrent le silence, et, ce qui est plus
considrable, la porte do la foi et du salut fut ouverte tous les
peuples du monde. Les nations furent tires des tnbres et des chanes
de Satan, o elles avaient t jetes parla faute d'Adam et par la
jalousie du dmon cach sous la forme du Serpent. L'Ancien Testament
le dclare expressment. C'est par l'envie du diable que la mort est
entre dans le monde . C'est donc du jour et par suite de la
tentation de nos premiers parents par le dmon, quo la mort
atteignit Adam et Eve et toute leur postrit. Donc, la blessure
capitale, que, selon la promesse divine (Gcn. m , 15), la femme
devait porter au Serpent, signifie bien autre chose que
l'extermination naturelle de ce reptile. Elle figure et prophtise
la victoire importante de la Vierge sur Satan et la guerre
interminable de cet esprit immonde contre les enfants du Christ et
de la Vierge. L'histoire de ce combat est dcrite aux x u et x m
chapitres de l ' A e e J
' Job, xxvi, 13.1
Sap., H, 24.
17
pocalypse. On y voit la Femme par excellence, devant laquelle se
tient le grand dragon. Combattu et vaincu par Michel et ses anges,
puis chass, ce dragon, cet ancien Serpent qui s'appelle Diable, et
Satan, poursuit qui sduit tout l'univers, est prcipit sur des
nations, la terre et tous ses anges avec lui. S e voyant exclu du
ciel, il la femme qui a enfant le Dominateur v. 5., vomit contre
elle les flots de sa rage; la femme se drobe sa colre, et alors le
dragon irrit va faire la guerre ses autres enfants qui gardent les
commandements de Dieu et qui confessent Jsus-Christ: Iratus in
mulicrem, cere pmlium pent. Mais la Mre des fidles, des vritables
vivants, n'abandonne point ses eufants dans la lutte qu'ils ont
soutenir contre le dmon. Aprs avoir dtruit le pch originel par son
fils, elle continue de combattre Satan, elle renverse ses efforts,
djoue ses projets, confond surtout les hrsies qui sont comme les
ttes du Serpent infernal. C'est parce qu'Elle est de la sorte
Irs-fatale au dnaon, que l'glise aime lui appliquer ces paroles
prophtiques du cantique des cantiques, vi, 3 : Vous tes redoutable
comme une arme range en bataille cim reliquis de semine ejus, qui
abiit facustodiunt
Mandata Dei. Evidemment le dmon est figur dans le ser-
2 . Nomi, figure de Marie,
mre des
douleurs.
Ruth la Moabite, Ruth l'idoltre, qui ne veut plus se sparer de
Nomi, la mre de son poux dfunt, est une figure remarquable de
l'Eglise chrtienne, qui, compose de la Gentilit, a renonc
l'idoltrie, pour s'attacher insparablement au Messie, son chef et
son poux cleste. De son ct, Nomi,1
c'est--dire,
la belle, la pleine de
On peut voir plusieurs autres rapports 'figuratifs dans le Livre
des ligures prophtiques, dans celle d'Adam et de Jsus-Christ. 2
18
grce, la mre de l'poux bien-aim, la mre adoptive de Ruth la
Moabite, de l'Etrangre, pouse de son fils ; Nomi, l'afflige, la
femme abreuve d'amertume, l'occasion de la mort de son fils chri,
Nomi, vers qui se rfugie l'idoltre convertie, l'pouse de son fils,
c'est Marie, la vierge pleine do beaut et de grce, la mre de
Jsus-Christ, l'poux des mes ; c'est Marie, la mre adoptive de tous
les fidles, de tous les Gentils convertis Jsus-Christ; c'est Marie,
qui, lors do la mort de son Fils, fut abreuve de douleurs amres ;
c'est notre mre, pleine de tendresse, vers qui se rfugient toutes
les mes fidles, sorties de la Gentilil. , Nomi, l'illustre aeule du
Christ, retournant dans son pays, aprs avoir perdu son mari et ses
fils, disait aux femmes de Bethlem : Ne m'appelez plus Nomi, c'est-
dire la Belle ; mais appelez-moi Mara, c'est--dire Amre, parce que
le ToutPuissant m'inonde d'angoisses. Marie peut dire semblablement
: Ne m'appelez plus matresse, DOMINAM, ni mre du S e i gneur ; mais
appelez-moi mre des douleurs'
3. Marie,
sur de Mose, figure de la sainte
Vierge.
Marie, sur de Mose, est galement un type d'une ressemblance
frappante. M o s e , le Rdempteur de l'ancien Peuple, tait expos
sur les eaux du Nil, et devait prir, par les ordres d'un roi que la
crainte de perdre son trne rendait ombrageux et cruel. Marie, la
sur du futur Sauveur d'Isral, fut assez prudente et assez
courageuse, pour le soustraire la fureur du tyran. O r , une autre
vierge Marie, presque du mme ge, saura un jour soustraire
pareillement le futur Rdempteur des hommes au glaive d'un autre
tyran nomme Hrode, galement ombrageux et barbare, galement inquiet
pour son trne. Les deux rdempteurs devront leur salut, le
premier
19
Marie, fille d'Amram et de Jocabeth ; le second, Marie, fille de
Joachim et d'Anne. Plus tard, la sur de Mose, devenue la compagne
de ce frre bien-aim, runira autour d'elle les filles d'Isral, et
chantera un magnifique cantique la gloire de Dieu et en actions do
grces pour la rdemption de son peuple ; ollo mritera aussi le beau
titre de Prophctesse, et reprsentera par l la vritable Marie, mre
du Sauveur, prononant devant le grand-prtre Zachario le cantique
prophtique du Magnificat, et plus tard accompagnant le Rdempteur
dans ses courses vangliques. Toutefois, l'ombre demeurera, ici
comme ailleurs, de beaucoup infrieure la ralit. 4 . Dbora et Jahel,
figures de la Vierge
rdemptrice. Dbora a t choisie par Dieu pour tirer son peuple de
la servitude de Chanaan. A cette occasion, elle composa un chant
triomphal, un chant d'actions de grces, qui rappelle celui de
Marie, mre du Messie. Jahel, pouse de Habert-le-Cinen, tua Sisara,
gnral des armes de Jabin, roi de Chanaan, et ennemi dclar du peuple
de Dieu. Cette courageuse femme brisa la tte de ce chef des ennemis
d'Isral, et dlivra ainsi sa patrie. Sisara figurait l'antique
Serpent qui sans cesse se dchanait contre les serviteurs de Dieu,
et dont un jour la tte devait tre brise par la Nouvelle E v e . Or,
Marie, par le moyen de Jsus, son fils, a bris la tte de cet
irrconciliable Ennemi, et a, par ce grand coup, dlivre le genre
humain. Dans son cantique, la prophtesse Dbora dit Jahel :
Benedicta inter mulieres Jahel, uxor Haber Cinmi .'1
Elle la proclame bnie entre toutes les femmes.1
Judic, iv, v.
20 L a prophlesse sainte Elisabeth adresse les mmes flicitations
Marie, pouse de Joseph : Benedita tu in mulieribus! 5 . Anne, mre
de Samuel, mre de Jsus. figure de Marie,
Anne tait strile, cl elle conut miraculeusement. Marie tait
vierge, et elle conut par la miraculeuse opration du Saint-Esprit.
Anne devint mre de Samuel, le Nazaren, le Prophte fidle, consacr
Dieu avant sa naissance ; de Samuel, le Restaurateur du culte et de
la nation; le tuteur des rois, le fondateur des dynasties en Isral,
le Juste par excellence de son sicle, et par l mme l'Image
prophtique du Messie Jsus. Anne prsenta au Seigneur parles mains du
grand prtre Hcli son fils unique, Samuel, le huitime jour aprs sa
naiss a n c e ; Marie, le huitime jour aprs la naissance de son
Fils unique, le prsenta Dieu par les mains du grand-prtre Simon.
Le. fils d'Anne fut prophte, roi et pontife. Jsus, fils de Marie,
est le Prophte, le Roi, et le Pontife par excellence. Samuel n'tait
pas de la famille sacerdotale, il n'avait pas mme de gnalogie ; de
cette manire, il reprsentait JsusChrist, qui tait, non pas de la
famille d'Aaron, mais de la tribu de Juda, et qui se trouvait sans
gnalogie temporelle. La mre de Jsus a prononc en action de grces le
cantique Magnificat ; la mre de Samuel avait chant d'avance, aussi
en actions de grces, un hymne qui contient les mmes penses et les
mmes sentiments. 1. Mon cur, s'cria-t-elle, a tressailli
d'allgresse dans le Seigneur et le Seigneur a relev ma gloire. Ma
bouche s'est
21
ouverte pour rpondre mes ennemis, parce que j'ai sujet de me
rjouir dans votre salut, mon Dieu ! 2 . Nul n'est Saint, 3. Cessez
comme l'est le Seigneur, nul n'est semblable Vous, et nul n'est
puissant cessez votre ancien toute connaissance, force. 5. Ceux qui
taient auparavant de la faim ont t rassasis. mre de beaucoup
d'enfants, s'est trouve seule. 6. Le Seigneur 7. Le Seigneur lve. 8
. Il tire, quand il veut, le pauvre de la poussire et l'indigent du
fumier pour le faire asseoir parmi tiennent les fondements sur eux
le monde. 9. Il guidera les pas de ses Saints ; et les impies
seront rduits au silence dans leurs tnbres, parce que avec toute sa
force, ne sera que faiblesse devant lui. 1 0 . Les ennemis du
Seigneur nera sur eux du haut des deux. qu'aux nues l'empire de son
trembleront, lorsqu'il tonLe Seigneur jugera toute la l'homme, les
princes et qu'apparlui donner un trne de gloire. C'est au Seigneur
te et donne la vie, quand il lui plat ; il conduit au tombeau et il
en retire. fait le pauvre et le riche ; il abaisse et il combls de
biens, se sont faits esclaves pour avoir du pain, et ceux qui
taient presss Celle qui tait strile est devenue et la mre de
beaucoup d'enfants langage; comme notre Dieu. de
de vous glorifier avec des paroles le Seigneur
insolentes :
est le Dieu
il pntre les penses les plus secrtes.
i . L'arc des forts a cl bris et les faibles ont t arms de
de la terre, et c'est lui qui a pos
terre, il fera rgner celui qu'il a tabli roi, cl il lvera
jusChrist. Il est facile de remarquer les rapports de similitude
prophtique qui existent entre les deux cantiques d'Anne et de Marie
prononcs pour exprimer leurs sentiments de gratitude et
d'allgresse, l'occasion de leur maternit surnaturelle. On
22 voit que Anne (dont le nom veut dire Grce), tait, en effet,
pleine de grce, comme la mre de Jsus. 6. Judith, Judith figure de
Marie, triomphatrice du Dmon.
tait une veuve distingue par sa naissance et sa
beaut, et plus encore par ses vertus et sa pit. Elle vivait dans
l'humilit, dans la chastet, dans la simplicit. Ce fut elle quo Dieu
choisit pour dlivrer son peuple. Elle accomplit cette mission en
coupant la tte Holopherne, gnral de la formidable arme des
Chaldens, et dont le dessein, aprs avoir dj subjugu quantit de
rois, tait de soumettre son empire tout l'univers. Judith se dvoua
pour sauver le peuple de Dieu et le venger de son Ennemi.
Lorsqu'elle apparut devant Isral, portant dans ses mains le
monument de sa victoire, tous, d'une commune voix, la bnissaient,
en disant Vous tes la gloire de Jrusalem, est une action hroque,
serez bnie ternellement. vous tes la joie1
:
d'Ismle vous
ral, vous tes la gloire de notre peuple l car votre action votre
cur s'est anim d'un C'est pourquoi courage, et vous avez aim la
chastet...
Alors Judith chanta au Seigneur un cantique de reconnaissance,
pour le remercier de cette victoire. Marie, issue de la royale
famille de David, tait orne de toutes les vertus. Elle fut lue de
Dieu pour craser la tte de l'Ennemi des hommes, de ce Dragon
infernal, qui exerait son empire sur presque toutes les nations.
Arme de la puissance et de la grce du Christ, son fils, elle a
dlivr le genre humain, le nouveau peuple de Dieu, de la tyn^nique
domination de Satan. C'est pourquoi l'Eglise la reprsente foulant
ses pieds la tte du Serpent, et adresse notre nouvelle et vritable
Judith ces paroles : Tu gloria Jrusalem, Isral, tu
honorificentia1
tu Imlitia
populinostril
Judith., xv, 10,11.
23 7. Esther, figure de Marie, triomphatrice Dans une vision du
Dmon.
Mardoche contempla Esther sous l'emgrand aprs
blme d'une petite fontaine qui devint ensuite un fleuve, et
fconda la terre de ses eaux abondantes,
avoir dissipe la tempte formidable qui menaait la nation.
L'histoire prophtique de Marie renferme- une figure peu prs
semblable *. Esther, cetle vierge ravissante de beaut, trouva grce
aux yeux du roi ssuerus, et, lorsque l'impie Aman voulait excuter
le dessein qu'il avait form d'exterminer la nation sainte, elle
intercda auprs du roi, obtint la rvocation de l'dit de mort, et fit
attacher Aman au gibet, destin au juste Mardoche. C'est ainsi
qu'elle employa son titre de reine pour procurer le salut de son
peuple. La divine Marie avait trouv grce devant le Seigneur, qui se
nomme le Roi des rois : invenisti minum. enim gratiam apud DoElle
lui offrit ses prires pour nous ; elle mrita de
faire rvoquer la sentence de condamnation porte contre tous les
enfants d'Adam, el en mme temps de faire enchaner pour toujours
notre mortel ennemi au gibet de la Croix , o a t momentanment
attach Jsus-Christ, son fils. Mardoche n'a pas t attach rellement
la Croix, parce qu'il n'tait que la figure. Mais Jsus-Christ a t
crucifi rellement, parce qu'il tait la ralit. Pour bien entendre le
sens figuratif de cet vnement, il faut se rappeler que JsusChrist,
ayant revtu l'image de l'homme de pch, dinem camis peccati,
similituc'est cet homme de pch qui a t
attach la Croix pour que le pch fut dtruit. Et, en ralit, c'est
Satan, notre Ennemi, qui a t enchan et bris par la Croix, sur
laquelle il avait voulu faire prir le Fils de Marie.1
Esth. xi, 10.
" iv, Reg. xviii, -42.
24
En effet, dit S . Paul, lorsque vous tiez morts dans vos pchs,
Jsus-Christ tait contraire, vous a fait revivre avec lui, en vous
parnous il a entirement la croix, aboli le dcret de affigens illud
en triomphe, condamnaCruci. Et des la face de c'est-donnant tous
vos pchs : Il a effac la cdule qui tion en l'attachant
ayant par l dsarm les Principauts Enfers, // les n menes
hautement
et les Puissances
tout le monde, aprs les avoir vaincues en lui-mme, dire par le
triomphe de la Croix
I I I . S Y M B O L E S ou M Y S T R E S F I G U R A T I F S
PROPHTIQUES. 1. Le Buisson ardent, figure de la virginit de
Marie.
L e peuple d'Isral supportait, depuis quatre sicles, le joug de
la dure servitude d'Egypte. Dieu suscita enfin un rdempteur dans la
personne de Mose. Pendant que celui-ci paissait son troupeau sur le
mont Horeb, le Seigneur lui apparut au milieu d'un buisson tout
enflamm, qui ne se consumait point. A cette vue, Mose s'cria : Je
vais voir cette grande merveille, comment il se fait que le buisson
ardent. Or, l'appela dit : Mose, n'allez sainte. Je suis, pas plus
loin; tez la chaussure de vos pieds, parce que le lieu sur lequel
vous marchez est une terre ajouta-t-il, le Dieu de votre pre, le
Dieu Jacob. d'Abraham, gards vers le1
ne se consume le voyant du buisson
point
au milieu pour
du
feu
le Seigneur, du milieu
approcher
regarder,
o il se manifestait, et lui
le Dieu d'Isaac, le Dieu de Seigneur.
Alors Mose se voila le visage, n osant plus porter ses re-
Coloss., ii, 13-18.
Suivant le sentiment commun des anciens Pres de l'Eglise, et mme
des Docteurs de la Synagogue , le Seigneur qui se manifesta alors
au milieu de ce Buisson, qui brlait sans se consumer, sans subir
aucune altration, sans prouver aucune fltrissure ni de ses feuilles
ni de ses fleurs, est le Verbe ternel, le chef et le conducteur
cleste d'Isral, le mme qui devait un jour, dans le liul. de se
manifester ostensiblement Isral, s'incarner dans le sein d'une
Vierge, ilcvenuo mre sans prouver aucune fltrissure, en demeurant
intacte et immacule, et en conservant intgralement sa virginit.
Cette prophtie, cette Qgnre clatante de la virginit de Marie,
l'Eglise catholique la chante solennellement dans les termes
suivants : Rubum agnovimus quem viderat Moyses incombustum,
conservalam tuam laudabilem virginitalem, sancta Dci geni1
trix. Dans le Buisson trable virginit,
que Mose avait vu brler sans se \
consumer, nous avons reconnu la conservation de votre inalsainte
Mre de Dieu
2. La verge d'Aaron, virginit
autre figure prophtique de la fconde de Marie.
Au livre des Nombres, c. 17, il est rapport que de toutes les
verges des enfants d'Isral, celle d'Aaron fut la seule qui fleurit
et produisit des branches. La verge d'Aaron ayant pouss des
boutons, il en tait sorti des fleurs, d'o, aprs que ,les feuilles
s'taient ouvertes, il s'tait form des amandes. S. Justin, Kpol., 2;
Euseb., Hist., t. I , c. 2 ; S. Hilaire, de Trin., t. IV et v; S.
Basil., Contra Eunom., 1.1 et n; Theodor., 9, 5, in Exod.; Midrasch
Rabba ; 2 Lettre de M. Drach, p. 168 et Harmonie entre l'Eglise et
la Synag.; le protestant Michalis pense de mme. Voyez aussi Rupert,
S. Greg. de Nysse, Orat., deJ.-C. Nativ.; S. Bern., in c. xu, Apoc;
Corn, a Lapide, in h. locum; S. Lo, de Naliv. Christi, etc. Brev.
Rom., et sacra Liturgia, in circum. Dni.1 1
26 Sans avoir reu aucun suc extrieur de la terre, par la seule
puissance de Dieu, la verge d'Aaron a fleuri : elle a produit son
fruit, agrable et salutaire, sans racine, sans semence,
contrairement toutes les lois ordinaires de la nature. Ce beau
fruit a t form dans un bois strile et aride, et il est n par la
seule opration du Tout-Puissant. N'est-ce pas l, videmment, le
Christ, cet excellent fruit do l'humanit, qui nat d'une Vierge par
la seule vertu du Trs-Haut ? La Vierge Marie n'est-elle pas cette
verge mystrieuse d'Aaron? Elle est devenue mre de l'Homme-Dieu,
sans aucune alliance humaine, contrairement toutes les lois
ordinaires de la nature. Que si les Juifs nous demandent : comment
cela a-t-il pu se faire ainsi ? nous leur demanderons notre tour :
comment u s e verge, dessche et strile, a-t-elle pu concevoir,
fleurir et porter du fruit ? et comment Eve a-t-elle pu tre forme
et natre du ct d'Adam? S'ils nous rpondent que la fcondit de la
verge d'Aaron et que la formation d'Eve ont eu lieu par miracle,
nous leur ferons la mme rponse au sujet de la fcondit de la
virginit de Marie, et au sujet de la conception et de la formation
du Christ dans le sein d'une Vierge. La Toute-Puissance divine se
passe, quand elle veut, du secours et des lois de la nature L e
savant abb Rupert, aprs avoir rapport le rcit de l'Ecriture,
s'exprime ainsi : 1
C'est l la prophtie et l'image de la divine Marie, qui, seule,
et par l'effet de la seule puissance divine, a produit le fruit de
vie. Obombrc par la vertu du Trs-Haut, comme la verge d'Aaron
"devant l'Arche du Seigneur, ce noble Rejeton de la tige de Jess a
produit de lui-mme sa fleur et son fruit. Marie a t choisie entre
toutes les vierges par le Seigneur lui-mme, comme la tribu Lvitique
entrek
Sic S. Aug., Rupert, Galatinus, et alii, passim.
27 toutes les tribus, comme la famille d'Aaron entre toutes les
familles de la tribu Lvitique ; elle a t honore du mme privilge, de
la fcondit dans la virginit, comme la verge d'Aaron, de la
floraison dans l'aridit. Semblable cette verge merveilleuse qui fut
montre Isral, et replace ensuite dans l'Arche d'alliance, Marie a t
montre au monde, puis place par Dieu dans le Temple cleste, comme
un grand signe miraculeux comme l'Arche mme de noire Dieu et
Sauveur Jsus-Christ.
3. L'Arche d'alliance, figure da la divine ) de la sainte
Vierge.
maternit
L'Arche d'alliance tait un coffre de bois prcieux et
incorruptible, revtu de lames d'or au-dedans et au dehors. Le
couvercle, nomm Propitiatoire, tait aussi recouvert d'une table
d'or trs-pur, ayant tout autour un rebord travaill en forme de
couronne. Il tait surmont de deux chrubins d'or, tourns face face,
tendant leurs ailes de manire envelopper l'arche par derrire et
au-dessus. Lorsque le Seigneur parlait Mose, la voix se faisait
entendre sur le Propitiatoire entre les deux chrubins. L'arche
contenait les Tables de la Loi, le vase rempli de manne, et la
verge fleurie d'Aaron. Qu'annonait celte Arche sainte ? Outre le
Tabernacle sacr qui renferme dans la divine Eucharistie le Saint
des Saints, elle prfigurait encore Marie, qui est appele dans l ' A
pocalypse, x i , 19, l'Arche d'alliance; Marie, qui l'Eglise
adresse celte publique et solennelle invocation : Fderis arca,
Arche d'alliance, priez pour nous I Marie, vnre et assiste par les
Anges, qui forment autour d'elle un cortge d'honneur ; Marie, dont
la vertu fui toujours plus prcieuse et plus pure que l'or le plus
pur ; 1
A p o c , xi, 19, et xii, l .
28 Marie, dont ]a saintet surpasse toute autre saintet, comme
l'or surpasse en valeur tout autre mtal prcieux ; Marie, qui
renferma dans son sein virginal Celui qui est la Loi, la Grce, la
Puissance, le Pain de vie descendu des cieux ; Marie, qui fut
1'inlcrmcdiuirc vivante et volontaire de la vritable alliance entre
Dieu et les hommes. 4 . La Toison de Gdon, figure de la virginit et
de la divine maternit de Marie.
Il est ainsi parl de ce signe au vi livre des J u g e s , v. 36
et 40 ; Gdon dit Dieu : Si vous voulez vous servir de ma main pour
sauver Isral, comme vous me l'avez dit, permettez-moi de vous
demander un signe qui en assure mes frres et qui leur donne de la
confiance en moi. Voici quel est le signe que j e vous demande :
37. Je mettrai dans l'aire cette toison ; et, si toute la toison,
main, de ma Isral. terre demeurant sche, la rose ne tombe que sur
la je reconnatrai par l que vous vous servirez selon que vous me
l'avez promis, pour dlivrer 38. Ce que Gdon rose qui en sortit. 39.
Gdon s'allume dit encore Dieu : Que votre colre ne si je fais
encore une fois une Je de la avait un second signe dans la toison.
que toute la terre soit trempe pas contre moi,
avait propos arriva ; car s'tant lev
de grand matin, il pressa la toison, et remplit un vase de
la
preuve en demandant vous prie, Seigneur,
rose, et que la toison seule demeure sche. 40. Le Seigneur fit
cette nuit mme ce que Gdon demeura sche. demand. La rose tomba sur
toute la terre, et la toison seule Cette toison est un signe
figuratif et prophtique, comme le dmontrent les oracles suivants.
Le prophte David dit, en faisant allusion au signe miraculeux de
Gdon, que, au
29 temps o il viendra sur la terre, le Sauveur une rose sur la
toison, in vellus, et sicut stillicidia stillantia descendra
comme
P s . X L X I : Descendet sicut pluvia super terram. Isae,
(XLV, 8) rpte cette prophtie et dit dans le mme sens et presque
dans les mmes termes : Rorate, cli, desuper, et nubes pluant Juste,
Justum : que les nues fassent descendre le le Christ, comme une
rose... Que la terre, qui jus-
qu'alors a t strile, s'ouvre enfin par l'eiel de celte roso
cleste, et qu'elle germe et lasse natre le Sauveur, et germinet
Salvalorem. Le signe prcdent' regarde donc manifestement la
naissance toute surnaturelle du Messie. Cv, voici comment nous
expliquons ce symbole prophtique. 10
La rose du ciel a pntr doucement et sans bruit toute
la toison de Gdon, pendant que toute la terre l'entour tait
demeure sche : c'est un prodige qui annonce que dans toute la terre
il n'y a qu'une seule vierge fconde, la sainte mre du Sauveur, et
cela par une merveille, par une faveur toute spciale d'en Haut. 2
La rose a mouill ensuite toute la terre , tandis que la blanche
Toison seule demeurait sche. C'est un nouveau prodige contraire,
qui marque que, dans toute la terre, la seule mre du Sauveur
demeurera, malgr sa divine fcondit, toujours vierge, toujours pure,
toujours immacule, et cela par une faveur miraculeuse du ciel, par
un privilge absolument exceptionnel. Celte interprtation est celle
de S . Jrme, de Procope, de S . Jean Chrysostme, de S . Bernard, de
la plupart des Docteurs et de l'Eglise catholique elle-mme,
laquelle, dans sa es ineffabiliter ex Virgine, tune imut hturgie
sacre, adresse Jsus-Christ les paroles suivantes : Quando natus
plelai sunt1
Scriptur
: sicut pluvia in vellus descendisti,
C'est celle de l'Ancienne Synagogue elle-mme, comme on le voit
dans le Targum, v, i.
30 Salvum ter ,l
faceres genus
humanum les Ecritures la pluie
; te laudamus,
Dens nosvous
c'est--dire : Lorsque par un miracle ineffable,
tes n d'une vierge, tes descendu comme genre humain,
ont t accomplies : vous
sur la toison, pour sauver le
S. Autre figure prophtique
de la virginit
de Marie.
La Porte close dont parle Ezcliiel au chap. XLIV, 1-2, de ses
oracles, prfigure la virginit do la Mre du Christ. L'Ange, dit ce
Prophte, me fit ensuite retourner extrieur, laquelle ferme.
ouverte, Dieu figure ferme. vers le regar-
chemin de la porte du sanctuaire dait vers l'Orient : cl elle
tait Et le Seigneur et nul homme me dit : Celte porte demeurera
n'y
ferme; elle ne sera point parce que le Seigneur
passera,
d'Isral est entr par cette porte ; et elle demeurera
Dans la vision prophtique, cette porte tait une
mystique ; car il n'exista jamais de porte semblable : la porte
Orientale tait, elle surtout, ouverte aux prtres, aux lvites et
tout le peuple, dans les temps postrieurs Ezc h i e l * . D'o il
faut conclure, que cette porte prophtique doit ncessairement
s'entendre dans un sens allgorique et spirituel, comme
l'onfentendu, du reste, les anciens rdacteurs du Talmud . Le temple
marque donc l'Eglise catholique, noire sainte Mre et l'assemble de
ses prtres; et la sainte porte close reprsente prophtiquement la
virginit de Marie, cette Halma immacule, et par excellence, par
laquelle nul n'est entr, sinon le Seigneur, le Dieu de gloire,
revtu de notre humaBrev. Rom., et offle, in circum. Dni. - V. Jrme
de Sainte-Foi. Au trait de Sanhdrin, in cap. Col. Isral, et in
Sucha, cap. Lulaf Vaarba ; les ltahbins Abha et Salomon, de Lyra,
apud Hierom, de S. fide, 1.1, c. 49.3 1 a
31 nit. Celte virginit sacre sera inviolable clans la
conception, inviolable dans l'enfantement et aprs l'enfantement, et
demeurera inviolable dans tous les sicles, parce que par elle le
Seigneur est entr dans ce monde. Dicitur ter clausa porta hsec,
quaa matrem Messise Yirginem significabat, quia ipsa virgo ante
partum, in partu et post partum futura esset . Sunt illa verba de
gloriosa Maria? virginitate hoc modo intclligenda : Porta hc clausa
erit in conceptione, non aperietur in partu. Et vir non transibit
per eam post partum, quoniam Dominus Deus Israelis, Dei filius,
Patri coseternus, ingressus est per eam, et erit clausa usque in
finem saeculorum : quae quidem omnia satis sunt intelligentibus
clara, quod non nisi a cordis duritia languentibus et csecitate,
negari possunt \ S . Thomas d'Aquin , dans sa Somme Thologique,
vantes de S . Augustin : Quid est Porta in domo Domini Clausa,
semper erit intacta? Et quid est : Dominus solus intrat et
egreditur per eam, nisi quod Spirilus Sanctus imprsegnabit eam, et
Angelorum Dominus nascetur per eam ? Et quid est : Clausa tum * ?
0. Autre figure prophtique analogue. erit in lernum, nisi quod
Maria Virgo est ante partum, et Virgo in partu, et Virgo post
parnisi quod Maria3 l
con-
firme cette interprtation, et produit l'appui les paroles
sui-
La mme ide prophtique et la mme figure sont exprimes au livre
des Cantiques, v, 12, lorsque le Messie, s'adressant la Vierge
immacule, lui dit :1
Galatinus, t. vu, c. 17.
* Hicron., de S. fide, 1.1, c. 49. S. Thom., de Incarn. Qaast.,
28, art. 5.31
Cette figure prophtique
est frquemment
reprsente dans les
32 Ilorlus le..., conclusus, soror mea sponsa, la source Liban.
Hortus conclusus, scelqui
fons signatus... jaillissent
Vous tes le Jardin
ferme', la fontaine des eaux vives
la fontaine des jardins, avec imptuosit du
La plupart des Pres, ces paroles, ont reconnu la Vierge prdite,
et l'Eglise elle-mme lui en fait l'application dans ses offices. 7.
Diverses autres figures relatives Marie.
Les Interprtes ont galement vu la sainte Vierge prdite ou
prfigure: 1 Dans le petit nuage du Carmel, qui, d'abord semblable
l'empreinte d'un pied d'homme, devient ensuite une nue immense,
extrmement bienfaisante par la fcondit qu'elle procura la terre ; 2
dans le Temple Salomonique, qui, au jour de sa ddicace, fut tout
rempli de la prsence sensible du Verbe Divin, comme d'un nuage
resplendissant; 3 dans ce Trne d'ivoire, enrichi de l'or le
plus.pur, surmont d'une riche couronne de pierreries, entour de
deux lions et de douze lionceaux, destin recevoir le Roi pacifique,
le Sage par excellence, image du Christ ; 4 dans la Tour de David,
cette citadelle inexpugnable, o les enfants d'Isral trouvaient un
refuge assur; et dans plusieurs autres personnages et symboles
prophtiques, depuis la cration du monde jusque vers l'poque de
l'avnement du Messie. C'est ainsi que la divine Mre du Christ a t
prophtise, en mme temps que son fils. Dans le cours des quarante
sicles qui prcdrent son apparition dans le monde, elle a t glises
catholiques. (On la voit notamment reproduite dans les anciens
vitraux de la belle glise de Bar-sur-Seine, au diocse de Troyes.
Tous les Pres et Docteurs de l'Eglise l'ont reconnue comme une
prophtie de la Sainte Vierge. V. S. Hieronym., in Ezecli.; S. Aug.,
Serm. Il, de Nativ. J.-C; S. Epiph., de laud. B. M.; S. Chrys.,
hom. deB.Joan; Ambr., de Firg.,c.Q; Ruffin, de Symb.; S. Damasc, de
fie ortlwd., t. iv, c. 15 ; Orig., hom. 14. in Ezech.; S. Maxim.,
hom 2, de Nativ. Dom.; Hesych., de B. M.; etc.
33
montre aux Prophtes et aux justes, dans des figures, dans des
images, dans des ombres, devenues aujourd'hui transparentes et
lumineuses. Tracs l'avance par la main divine, les traits de notre
Rdemptrice sont dsormais manifestes tous les regards. Observons
que, si plusieurs saints personnages ont t sanctifis et appels ds
le sein de leur mre, Marie seule a l'honneur insigne non-seulement
d'avoir t lue cl sanctifie, mais encore d'avoir t prdite et
prfigure.
34
DEUXIME POQUECONCEPTION SA I M M A C U L E DK M M l l E . SON
ENFANCE. L E TEMPLE. SA. N A T I V I T . SON EDUCATION
PUSKNTATION.
DANS
CHAPITRE
PREMIER
Do l'Immacule Conception do ia Sainte Vierge.
La Mre du Christ, fils de Dieu, ne pouvait natre dans les
conditions ordinaires des autres enfants d'Adam. Celle que Dieu
avait prdestine et prpare dans ses conseils ternels pour tre le
tabernacle du Saint des Saints; celle qu'il avait prvue et prdite
comme l'aurore de la rdemption universelle des hommes; celle qui
devait donner au monde un DieuSauveur, et qui devait ne jamais
avoir de semblable ni d'gale, devait faire son entre dans le monde
d'une manire exceptionnelle. Elle ne pouvait tre assujettie la loi
gnrale du pch originel, se trouver, ft-ce un instant, dans la
disgrce du Pre qui la choisissait et du Fils qui l'acceptait pour
mre. C'est pourquoi la tradition catholique, fonde sur la parole
divine cl sur do fortes raisons de convenance, nous enseigne que
par une grce antrieure la naissance de Marie, accorde en prvision
divine des mrites du futur Rdempteur, cette et Vierge a t prserve
de toute tache originelle,
qu'ainsi elle a t immacule dans sa conception. Celte doctrine,
laisse l'tat d'opinion jusqu'en 1854, a t nanmoins, do tout lemps
ol partout, la croyance commune des pasteurs et des fidles.
35 Tous les dodours do l'Egliso, soil en Orient, soit eu
Occident, tous les conciles, toutes les liturgies, sans exception,
ont constamment qualifi Marie du nom 'illibata, exempte de toute
souillure. sainimmaabsolue, la demeure qui veut dire
Origne l'appelle un temple d'honneur, rempli d'une tet
surabondante, d'une justice cule de l'Epoux qui rgne dans les
deux;
et plus loin :
lu trs-digne Vierge, mre de celui qui est au-dessus de toute
dignit, la Mre immacule du Saint immacul, une de celui Telle tait
la foi qui est un, unique de Celui qui est unique.
primordiale de l'Eglise. L'honneur que nous devons .JsusChrist,
et noire respect pour Marie, portaient les fidles attribuer la
sainte Vierge un privilge que semble exiger sa puret sans tache. S
. Augustin l'exceptait, toutes les fois qu'il parlait, soit du pch
actuel, soit du pch originel : Lorsque nous parlons des pchs,
disait-il, nous ne voulons point qu'il soit mme question de la
sainte Vierge Marie; car il est de foi qu'elle a reu des grces
proportionnes sa mission sublime de mre du Rdempteur. Mais, la
Vierge excepte, les plus grands saints du pcheurs *. S. Ambroise, S
. Jrme, S . Proclus, el les docteurs contemporains tiennent un
langage analogue. S . Fulgence tranche la question qui fut
longtemps dbattue dans les coles de thologie, et dit que l'Ange, en
appelant Marie pleine de grce, fait bien voir que la sentence de
colre est suspendue pour elle . Au i xe 2
paradis avoueront qu'ils ont t
sicle, quelques doclcurs avanaient qu'elle avait
t sanctifie au sein de sa mre : ce qui supposait qu'elle n'tait
pas sainte originellement, puisqu'elle avait eu besoin
1
S. Aug., de nat. et gratia, 42.S. Fulgent., Serm. de laud. B.
M.
2
36 d'tre purifie. Mais, dans le mme sicle, d'autres proclamaient
la saine doctrine, qui prvalait partout : La grce divine vous a t
donne, Mre de Dieu ; toute crature vous adresse l'Ave anglique,
Nymphe divine; car vous tes seule pure, Mre prlue du Fils, disait
Thopliane, abb do Grand-Champ. Nous enseignons, nous, disait Jean
Scot, que Marie n'a c jamais t dans la haine de Dieu, pas plus
cause du poch originel que du pch actuel. La Sorbonno admit cet
enseignement, de mme que les universits des divers royaumes, les
ordres de S . Augustin, de Cluni, de Cteaux, de Prmontr, les
Franciscains, les Chartreux, les Carmes, etc., l'exception des
Dominicains. E n 1439, le concile de Ble, (sess. 36), dclare que la
croyance de l'Immacule Conception tait conforme la doctrine et la
dvotion de l'glise, la foi catholique, la droite raison, l'Ecriture
Sainte, et qu'elle devait tre tenue par tous les catholiques. En
1560, le concile de Trente, dans son dcret sur le pch originel,
dclara que son intention n'tait point de comprendre la Bienheureuse
et immacule Vierge Marie, et ordonna de suivre le dcret de Sixte I
V , sur ce point. Ce pape, en 1479, accorda des indulgences ceux
qui assisteraient l'office et la messe de la fte de la Conception
Immacule. Les papes Pie V , Paul V , Grgoire X V , Alexandre V I I
, etc., dfendirent de soutenir publiquement que Marie avait t conue
dans le pch originel. Ils favorisrent la'dvotion l'immacule
Conception. Parmi les docteurs, qui la plupart partageaient ce
sentiment, Bossuct fut l'un des premiers l'appuyer thologiquement :
Si le grand aptre, dit-il, ne veut pas qu'on excepte personne de la
loi commune du pch, la maternit glorieuso de Marie, cette alliance
ternelle qu'elle a contracte avec Dieu, la met dans un rang tout
singulier, qui ne souffre aucune compa-
37 raison. Montrez-moi une autre Mre de Dieu, une autre Vierge
fconde, faites-moi voir ailleurs cette plnitude de grces, cet
assemblage de vertus divines... E l puis, dites que l'exception que
j'apporte une loi gnrale en faveur d'une personne si extraordinaire
a des consquences fcheuses... ( I sur la Conception.) Enfin, le S
dcembre 18.')/i-, le souverain Pontife Pic I X , considrant que la
pieuso croyance tait universelle, que los mes dvoues Marie
dsiraient voir disparatre toute nouvelle discussion, toute
incertitude; el que d'ailleurs les plus importantes glises
demandaient tre autorises clbrer la fle de l'Immacule Conception,
consulta tous les prlats du monde chrtien, prescrivit des prires
publiques, et, aprs avoir reu de partout des rponses favorables,
tant environn d'une magnifique assemble d'vques, d'archevques, de
cardinaux et de pontifes de tous les points de la terre, promulgua
le dcret dogmatique de l'Immacule Conception de la Vierge Marie.
Dans l'expos des motifs qui prcdent celle solennelle dfinition, Pic
I X rsume toute la tradilion sur ce point, les oracles divins,
l'enseignement universel et constant de l'Eglise, celui des
souverains pontifes, ses prdcesseurs, celui des docteurs de
l'Eglise, des abbs, des voques, des conciles nationaux et des
conciles gnraux; celui des pres, des monuments sacrs de l'orient el
de l'occident, etc. La doctrine et les penses de cette plre
pontificale sont si belles, si leves, et en mme temps si prcises et
si lumineuses, que l'on aimera la lire el la relire pour
l'dification personnelle. La voici reproduite ici en grande
partie.e r
sermon
38 LETTRE APOSTOUQDE ET DCRET SOLENNEL D E NOTiiE S A I N T T R
E L E PAPE PIE I X
Sur l a dfinition dogmatique de l'Immacule Conception de la V i
e r g e , Mre de Dieu.
PTE,
V E O U E ,
Serviteur des sorvilours ; M. Lccanu, ibid.
466
gnant, comme ils l'ont fait, cette belle image du double
monogramme du Sauveur. Lorsque les diffrents portraits de Marie,
que l'on trouve dans les catacombes, el qui sont de la plus haute
antiquit, auront t compars avec les vritables tableaux de S . Luc
el avec leurs fidles copies, l'art chrtien se trouvera de plus en
plus fix sur l'eiligic relle do la Mre de Dieu.
C I I A H T l l E 11Les reliques de la Sainte Vierge.
La Vierge divine ayant l leve au ciel en corps et en me, les
reliques qu'elle a laisses aux fidles ne sont que des objets qui
lui ont appartenu, comme les vtements quotidiens et les habits de
solennits, les robes, les tuniques, les ceintures avec ou sans
franges, les diplodes ou les voiles, plus ou moins amples, les
lurbans ou coiffures, avec ou sans parures ; plusieurs autres
reliques sont provenues de sa maison de Nazareth, de son habitation
en Egypte, de son spulcre Gelhsmani, lequel renfermait diffrentes
pices linteamim; ncessaires l'ensevelissement comme les linceuls,
qui liaient les pieds et les mains, inslila; l'enveloppe,
syndonis.
le suaire qui enveloppait la tte, sudarium ; les bandelettes, et
par-dessus tout Ces vtements mortuaires et tous les
autres ont t distribus aux Disciples, puis laisss aux diffrentes
glises, qui ont constamment vnr et soigneusement conserv ces objets
sacrs. Elles avaient coutume, soil d'en dresser des mmoires
authentiques, soit d'en perptuer le souvenir traditionnel par des
monuments durables, soit de dsigner d'ge en ge chaque relique
particulire aux fidles et aux plerins qui, attirs par des miracles
frquents et perptuels, venaient continuellement demander la Mre de
Dieu de nouveaux bienfaits. Quel incrdule doutera d'une re-
167 lique qui tait perptuellement authentique par des miracles,
et vnre comme telle par les peuples et par le sacerdoce I Ainsi,
toute l'Eglise de Jrusalem tmoignait la plus grande vnration pour
une pice d'toffe ou de tapisserie qui passait pour tre un ouvrage
de la sainte Vierge, et o les douze Aptres et le Sauveur taient
reprsents de couleur naturelle sur un fond de couleur verte cl
ronge. Arcnlpho a vu cetlo relique et en a fait la description : In
quo linleo XII Apostolorum formulai habenlur inlcxlm, et ipsius
Domini viridis imago habetur. figurata. Una pars rubei coloris et
altra...
Un vtement du Seigneur, robe ou tunique, qui se trouvait dans
une ville de Galatie, fut transfr Jaffa, puis de l, aprs trois ans,
Jrusalem par les P . C . Grgoire d'Antioche, Thomas de Jrusalem et
Jean de Conslantinople. L e saint vlement, authentique par les
nombreux miracles que le Seigneur accordait ceux qui l'honoraient,
fut plac dans l'Eglise du Spulcre Jrusalem avec ,1a vraie Croix. L
a France et l'Europe retentirent de ces vnements \ fama per totos
Francorum divulgavit fines tunicam D. N. J . - C Au temps de
l'invasion des Perses et ensuite des Arabes mahomlans dans la Jude,
un grand nombre de prcieuses reliques avaient l transportes
Conslantinople et Home. Sainte Hlne avait transfr Constantinople
plusieurs fragments de la vraie Croix ; on sait comment elle fut
tire miraculeusement des mains des Perses par l'empereur Hraclius.
Le saint Berceau de Bethlem fut soustrait et envoy Rome. Le P. C .
Juvnal envoya Constantinople diverses reliques de Mario, pour
enrichir les glises des Blaquernes, des Fondeurs et des Guides. La
premire de ces glises possdait : 1 une robe de la sainte Vierge,
dpose dans une chsse de vermeil ; 2 une ceinture de Marie, qui fut
enferme dans uni Greg. Tuw, de gl. M. 1 , 8 ; Uist. I. 10, 24.
Sigebert, Chron. ad an. 750. Aymon, Gesta franc. 5, 78 ; Chron., ad
an. 393. Kredcg. in Chron.
16.8
prcieux reliquaire d
marbre, appel
la Sainte
Umc,
d'o
l'empereur Lon 1Q philosophe la fit retirer l'an 89Q, ppur
l'imposer l'impratrice Zo, possde dn dmon, laquelle fut dlivre et
gurie l'instant. Les dtails de l'acte authentique do cet vnement
sont conservs dans l'Histoire de l'Eglise d'Orient . " V Oinophorc
do Marie, espco de coiffure qui s'enroulait autour de la tte, el
dont les extrmits retombaient par-dessus les paules et sur le haut
de la poitrine. Les empereurs la tenaient la main dans les combats
contre les Infidles. Cette relique fut emporte Trves en 1207 par
Henri d'Aumaine, avec une ceinture conserve en l'Eglise de
Chalcoprate. Nivelonde Chrisy, vque de Sens, apporta de C . P . ,
en 1205, une couronne de la Sainte Vierge, dont il fit prsent
Helvide, sa nice, abbesse du monastre de Notre-Dame de Soissons. I
l en fut dress un acte authentique. Dans le mme temps, une portion
considrable d'un voile de Marie, avec des fragments de sa robe et
de son manteau, furent transfrs Venise. Une partie des vtements de
la Sainte Vierge et de la tunique sans couture, confectionne par la
Mre du Christ, fut donne en 1066, l'glise de Westminster par
Edouard le Confesseur ; ces reliques provenaient de la libralit des
papes Lon I V et Martin V , des princes anglais, et de
Charles-le-Chauve, roi de F r a n c e . Quant la tunique sans
couture, dont la tradition attribue gnralement la confection la
Sainte Vierge, elle se conserve, depuis un temps immmorial, dans
l'glise d'Argenteuil, prs Paris, comme le constate le procs-verbal
d'une visite solennelle faite en 1156 par l'archevque de Rouen,
Hugues d'Amiens, en compagnie des vques de Sens, de Chartres,1
5
c.2
Menolog., ad 2 Jutil U.
cl 3d Augusli.
Nipeph., Hist.
t. i',
Concilior Angl. 1.1, art. de
Westmonasl.
169 de Paris, d'Orlans, de Riez, d'Auxerro, do Chlons, d'E^ r e
u x , de Meaux, de Senlis; des abbs.de St-Denys, de SaintGermain,
de Lagny, de Ferrires, de Saint-Maur-des-Fosss, de Saint-Fargeau,
de Saint-Mesmin, de Saint Magloire, do Pontoise, de Marigny, et en
prsence du roi Louis VII et de toute la Cour. Des historiens
ajoutent que la sainte uniqu, cache jusipiti l, s'est rvle par des
prodiges ; cola est a r riv assez frquemment dans le cours dos
sicles, en pareille circonstance. Us disent que cette relique avait
l donne par Charlemagne au monastre d'Argenleuil, dont Thodrade, sa
GHe, tait abbesse, et Giselle, sa sur, une des religieuses ; et que
le grand Empereur l'avait reue des libralits de l'impratrice Irne;
mais, selon le vnrable Bde, Charlemagne l'aurait reue immdiatement,
non de Constantinople, mais du Trsor de St-Jcan de Latran, et des
mains du pape Adrien I , qui avait des raisons pour combler ce
prince de pieuses largesses . La chronique du Mont-Cassin, m, 29,
nous apprend sous l'an 1023, que le pape Benoit V I I I envoya,
pour la conscration d'une nouvelle glise dans ce monastre, des
reliques de son trsor du palais de Lalran, entre lesquelles une
parcelle du voile de la sainte Vierge. La Chronique de Bohme, sous
l'an 1070, porte que l'Tque Gbehard consacra une glise dans le
monastre de Sazoa le 28 juin de cette mme anne, et qu'il enferma
dans l'autel de nombreuses reliques, parmi lesquelles des parcelles
de la vraie croix et des vtements de la sainte Vierge. [Monach.
Sazaviensis in Chronic Bohem.) En la mme anne, le 22 novembre, le
vnrable Bennon, cvque d'Osnabruck, ddia la cathdrale de cette ville
el renferma dans l'autel des reliques de la vraie croix, du saint
Tombeau de Jsus-Christ, de la montagne des Oliviers, desGerberon,
de Caumont, Gudrin, Ilist. de la robe sa?is couture; M. Lecauu,
etc.1
e r
1
170 vlements de la sainte Vierge et du lit sur lequel elle avait
repos. (In vita Dennonis bcrto lburgensi). I I , episc. Osnabr.,
auctore Nort-
Il existait en 851, dans le trsor de l'glise de Verdun, un
vtement ou partie de vtement considr comme une tunique de la sainte
Vierge, qui fut mutil dans le cours des guerres de l'empereur
Lolhairc, et quel'vquc Ilallon restitua en son premier lieu.
(Chonic. Ifu/j. Flaviniac, l. i.) Il est fait mention de la chemise
de la Vierge, Chartres ds l'an 1129, dans la continuation de la
chronique de Sigebert par l'abh Anselme. Elle devint trs-clbre
cette poque, l'occasion du mal des Ardents, qui fit de si grands
ravages dans presque toute la France. Elle fut le moyen de miracles
nombreux et de bienfails signals en faveur d'une multitude
innombrable qui vint alors solliciter la protection de la mre de
Dieu... Carnolum innumera dixcrim, (Anselm., multiiudo ubi templnm
vbi camia habelur ejusdem sanala est... Quid habetur... etiam de
dotatum Virginis, Cameraco cjus.
de capillis
an. 1129). D'autres reliques de Marie, vnres
Notre-Dame de Cambrai, furent aussi l'objet d'une fervente
dvotion et la cause de beaucoup de grces. On conserve Aix-la
Chapelle un voile de Marie, de couleur blanche, tissu de lin et de
soie, long de deux aunes un tiers, large d'une aune deux tiers. On
croit qu'il fut envoy de Conslantinople Charlcmagne ; l'histoire de
sa translation est reprsente sur les vitraux de la cathdrale. On
l'expose publiquement tous les cinq ans. Chardin signale dans ses
Voyages, une tunique complte de Marie l'abbaye, autrefois vch de
Copis, en Mingrlie. Elle est enrichie, dit-il, de fleurs brodes sur
un fond de Nankin, mesure huit palmes de long sur quatre do
largeur. Le cou en est troit, el les manches larges d'une palme. On
l'enferme dans une cassette d'bne incruste de fleurs d'argent.
171 t
Telles sonl les principales reliques de Marie connues dans
santes de leur authenticit.
le monde chrtien. L a plupart sont munies des preuves suffi'
CHAPITRE
III
Lo cullo do Mitrio.
Le culte do Marie remonte l'origine de l'Egliso. Il esl aussi
ancien que la Mre du Fils de Dieu, que la Protectrice de lous les
serviteurs de Dieu et la Souveraine de la Terre et des Cieux. A
tous ces titres, ds le commencement, elle a reu les hommages des
fidles, -leurs invocations, leurs prires publiques et particulires.
Elle a agr les images, les statues, qui lui furent consacres, les
autels el les temples qui furent riges sous son vocable en
l'honneur de Dieu. A compter du jour o l'Archange, dput d'en Haut,
la salua mre du Messie, pleine de la grce cleste, et bnie au-dessus
de toutes et honore generales femmes , elle fut proclame
bienheureuse
comme telle, dans tous les ges et parmi toutes les nations de la
terre : ex hoc nunc Bcalam me diceni omnes tiones. Aprs un tel
honneur rendu Marie, de la part de la Cour cleste elle-mme, les
fidles du Christ n'hsitrent plus : ils lui rendirent avec
empressement un culte qui surpasse en excellence celui de tous les
Saints. Les Aptres el les Chrtiens de l'Eglise de Jrusalem, la
premire et la plus nombreuse des Eglises primitives, donnrent le
premier exemple qui fut perptuellement et universellement suivi.
D'aprs une ancienne tradition des Juifs Infidles euxmmes, consigne
dans leurs Toldos ', on voit que les pre1
Toldos, Huldric, p. 115.
172 micrs Disciples de Jsus-Christ, qui venaient prier autour en
pour du tombeau de la mre de Jsus, subirent une perscution violente
de la part des Princes de la Synagogue, et qu'il cota la vie cent
tombe. Suivant une histoire du Mont-Carmel, ce culte aurait t tabli
du vivant mme de la sainte Vierge; et les Carmes ont attribu au
disciple et prophte Agabus l'rection de la premire chapelle qu'on
ait ddie Notre-Dame. L'glise NotreDame d'El-Pilar, en Espagne,
rclame la priorit sur celle des Carmes; et celle de Lydda, qui,
d'aprs la tradition, a t fonde par les aptres S . Pierre et S .
Jean, revendique pour elle celle prrogative. Nous voyons, ds avant
l'poque de la glorieuse assomption de Marie, des tribus errantes du
Dsert mettre son image et celle de l'enfant Jsus au nombre des
divinits des Arabes. Bien plus, les Liturgies 5 . Matthieu, de S.
Jean Apostoliques de 5 . Jacques, premier voque de Jrusalem, de S.
Pierre, de S. Marc, de i'Evanglisle, renferment la preuve la plus
irrcusable de la surminence du culte adress Marie ds la naissance
du Christianisme. Exemple : La messe de S . Jacques de Jrusalem
fait quatre fois la le premier Mmento et aprs la Communion. lifie
Trs-sainte, Immacule, Trs-glorieuse, vierge. trs-sainte, pleine
Dame, Mre de Dieu et toujours Clbrons la mmoire immacule, bnie
au-dessus commmoraison aprs NotreMarie y est quaBnie, spciale de
Marie : Aprs la Collecte, aprs l'Offertoire, Chrtiens, parents de
Jsus-Christ, avoir lev un monument
(une espce d'oratoire) sur celte
Aprs la commmoraison du Mmento, le prtre dit : de la surminence,
de toutes, vierge, Marie. vritablement vNotre-Dame,
de gloire, mre de Dieu et toujours Les choristes rpondent :
Il est juste que nous vous proclamions bienheureuse, toujours
bienheureuse,
mre de Dieu,
173 riiablemcnt Sraphins, Dieu; de Dieu I Aprs une pause, ils
continuent : A vous, pleine de grce, les congratulations crature,
des churs des Anges, Temple saint, Paradis spirituel, el du genre
humain. Gloire des vierges, de toute Vous, Vous de immacule et mre
de notre Dieu, plus digne d'honneur que les Chrubins, plus
brillante de gloire que les vous qui avez conu dans la puret le
Verbe de nous vous glorifions donc de tout notre cur, mre
qui Dieu a emprunt sa chair, par le ministre s'est fait mi trne
de votre sein, la hauteur de grce, vous l La Liturgie des deux les
congratulations
de laquelle
notre Dieu, qui esl avant les sicles, s'est fait enfant; car il
il a galis vos entrailles pleine : gloire de toute crature et
au-del ; vous donc,
de S. Matthieu, suivie dans toute l'Ethiopie,
ne lient pas un langage moins lev ni moins accentu sur le culte
el sur l'invocation de la Vierge par excellence : Rjouissez-vous,
dit-elle, Noire-Dame, parce que ; plus c'est de vous que nous vient
le salut el la sanctification Vierge trs-pure et mre du Dieu
Christ, portez jusqu'au haut des deux votre Fils, chs.
Rjouissez-vous, Notre-Dame, Jsus-Christ parce que vous
Notre-Seigneur avez ; inenfant la vraie Lumire, notre prire,
jusqu'au sjour d'o nous attendons la rmission
des Elus de de nos p-
tercdez pour nous auprs de lui, afin qu'il ait piti de nos mes.
Dposez nos supplications Fils Jsus-Christ. immacule ;
rejouissez-vous, ritable mdiatrice au pied du trne de votre Reine
vritablement Rjouissez-vous,
Gloire des anctres, qui avez prdit. O vous, notre vJsus-Christ
;
donn aux descendants l'Emmanuel
auprs de Notre-Seigneur
nous vous supplions de vous souvenir de nous ! Priez pour nous,
afin que nos iniquits soient effaces.
174 Dans un autre endroit, la mme liturgie de S . Matthieu
s'exprime ainsi : Salut, Vierge Marie, Mre de Dieu, vous tes
l'encensoir d'or, qui avez port le charbon enflamm. Bni soit Celui
qui l'a pris dans le sanctuaire, parce qu'il est vritablement
lui-mme le Verbe de Dieu, qui remet les pchs et efface les fautes :
c'est par vous qu'il s'est fait Homme, el qu'il s'est offert au Pre
comme un vritable encens et comme un prcieux sacrifice. Plus loin :
Que ceux qui ri aiment pas Notre-Seigneur, anathme jusqu' son
avnement ! La Liturgie de S . Jean l'Evanglisle : Nous faisons de
tous les saints mmoire en votre prsence, Seigneur, Patriarainsi que
el qui ne croient pas sa Nativit ni la sainte Vierge, soient
ches, Prophtes, Aptres, Martyrs, et Confesseurs, de la Mre de
Dieu el de tous les Saints. Les Liturgies
de S . Pierre, de S . Marc, e l c , font plu-
sieurs fois mmoire de Marie, dans les termes qui prcdent. Toutes
les nations chrtiennes et loul le sacerdoce catholique, depuis les
temps apostoliques, ont constamment suivi celle forme primordiale
dans le culte et les invocations de Marie, en sorte que les
hrtiques modernes qui ont tent de dtruire cette pratique, se sont
trouvs compltement en dehors del tradition des Aplres et des
Docteurs primitifs de l'Eglise.
C H A P I T R E IVContinuation du mme sujet. Universalit et
perptuit du culte de Marie.
Si l'on entreprenait d'numrer les monuments
de tout
genre, qui, partir des premiers sicles du christianisme, ont t
rigs en loul temps el en loul lieu l'honneur de Marie, la Mre du
Christ, l'on ne parviendrait jamais compter tout
175
ce que la foi et la pit ont fait pour son culte. En effet, c'est
en nombre infini que des glises, des chapelles, des basiliques et
de superbes cathdrales, ont t bties sous le vocable de Notre-Dame ;
c'est en nombre vritablement infini, que des monastres et des
paroisses, des cits et des nations, se sont placs sous sa spciale
protection ; c'est en nombre infini, que des autels, des
sanctuaires, des congrgations lui ont t consacrs, mme dans les
autres temples qui taient ddis d'autres Saints. Il est impossible
de raconter combien de pratiques de pit ont t tablies dans toutes
les glises pour honorer Marie, el avec quelle ardeur des actes
innombrables de dvotion ont t accomplis depuis dix-huil sicles dans
la vue d'invoquer cette puissante Mdiatrice. Des bienfaits
ordinaires et des grces miraculeuses ont justifi la confiance des
fidles ; en sorte qu'elle a toujours t en augmentant. Les Pres
primitifs, les docteurs des divers sicles sont admirables dans les
louanges qu'ils lui donnent, dans les invocations qu'ils lui
adressent. Les vierges et les martyrs rclamaient le secours de
Marie dans les dangers et dans le feu des perscutions. Les anciens
pontifes lui consacraient des oratoires et les lieux des assembles
chrtiennes . Les peuples btissaient, ds l'origine, des sanctuaires
la Vierge Marie . Les images de la Mre de Dieu remplaaient les
talismans paens. Aprs la miraculeuse conversion de Constantin le
Grand, le culte de la Vierge prit son libre essor ; il fut adopt
avec enthousiasme dans l'Italie, Rome, Naples, dans les Gaules,
dans la Bretagne, chez les Belges, les Espagnols et les Celles. Les
bandits eux-mmes honoraient et invoquaient Notre-Dame.S. Irn.; S.
Eplirem ; S. Bern., etc. Sainte Justine, V. et M., invoque Marie
contre les incantations d'un magicien. (S. Grg. Naz., Orat. 18.)
Calixtc I " ddia Notre-Dame l'glise d'au-del du Tibre. (Baron., OR.
L'Espagne, la Syrie, la Palestine, la Grce, etc.! 3 1
1
2
i
4
m.)
1
476 Dans le danger de la tempte, l'incrdule lui-mme rclamait son
secours Les grands personnages, comme les; simples particuliers ;
les grandes cits, comme les simples bourgades, apporteront dsormais
des bommages et des offrandes la Reine du ciel. Effleurons les
faits qui se prsentent en foule. L'Empire d'Orient. Constantin
consacre sa nouvelle ca-
pitale Dieu, en mmoire de la sainte Vierge qu'il tenait en
singulire vnration ; ses successeurs immdiats aiment galement
l'honorer. Lon 1 , dit le Grand, fait btir en 460 une noble et
splendide basilique qu'il ddie Notre-Dame de la fontaine, en
reconnaissance de ce que, sur le bord d'une fontaine isole, elle
lui avait apparu avec bont et lui avait promis l'empire. La
princesse impriale, sainte Pulchrie, fille de Thodose I I , fit
construire, elle seule, trois glises sous l'invocation de la
Panagia (de la Vierge toute sainte), dans l'enceinte mme de
Constantinople. Ne pouvant les enrichir des reliques de la Mre de
Dieu (puisque le corps de Marie est au ciel), elle y supple par les
vtements qu'elle fit venir de Jrusalem. La belle glise des
Blaquernes eut sa robe, celle de Chalcoprate sa ceinture ; mais ce
fut celle des Guides qui obtint la meilleure part; on y p'aa, sur
un autel blouissant d'or et embelli de colonnes de jaspe, le
portrait de Marie, envoy d'Antioche, peint par S . Luc, du vivant
mme de la Vierge, et auquel la Mre du Sauveur avait attach sa grce.
C'tait le palladium de l'Empire ; les empereurs, entre autres Jean
Zimiscs et les Commnes l'emportaient l'arme, d'o il tait ramen sur
un char de triomphe attel de magnifiques chevaux blancs. Cette
image miraculeuse paraissait dans les grandes solennits, et le
peuple saluait sa prsence par des cris de joie et par des cantiques
de louange. L'impratrice Irne rpara les dsastres de l'hrsie, et
les1
er
M. do Volney, dans un naufrage sur l'Ocan, prs des ctes de
Bal-
timore, rcitait l'Ave Maria.
177
Orientaux honorrent Marie par tous les moyens qu'ils purent
imaginer. On lui dcerna des couronnes d'or; on ne la re prsenta
plus qu'avec la robe de pourpre, les bandeaux d perles et les
diadmes des impratrices ; on mit son effigie sur les monnaies, on
frappa des mdailles en son honneur, et l'on combattit sous ses
auspices. Romains, disait Narss au moment de livrer aux Golhs la
bataille de Taginas, Romains, battez-vous vaillamment, la Vierge
est pour nous ; ne manquez pas de l'invoquer pen dant la mle; car
elle regarde nos phalanges, et nous livrera ces impies qui lui
refusent le titre de Mre de Dieu. 1 dit, et les Grecs se battirent
comme des lions. Totila fut 1 tu ; son arme taille en pices, et
l'Italie dlivre au nom de Notre-Dame des Victoires, bnit hautement
la Vierge et Narss. Les Anglais et les Peuples Septentrionaux.
Aussitt
qu'ils furent convertis, les Germains et les Scandinaves se
montrrent sincrement dvots, et Marie fut leur patronne de
prdilection. Les Anglo-Saxons levrent, sur tous les points de
l'Angleterre, des chapelles et des ermitages la Reine des Anges.
Ces premires chapelles anglaises taient d'une extrme simplicit;
mais un peu plus lard, les voques Anglo-Saxons ayant fait venir de
Rome des constructeurs habiles, ils btirent sous l'invocation de
Marie et des Saints, ces grandes glises Anglo-Normandes, avec leurs
flches audacieuses, leurs splendides beffrois et leurs tours jetes
dans la nue ; dont l'architecture superbe et ferique contrastait
avec les constructions massives du pass. Guillaume le Conqurant,
les princes de sa race, les chevaliers Normands, avaient une
ardente pit envers NotreDame. Guillaume, avant la clbre bataille
d'IIaslings, invoqua hautement Marie, et fonda une chapelle en son
honneur. L a Gre chevalerie btit ses frais, sous l'invocation de la
sainte 12
178 Vierge, la belle cathdrale de Coulanccs qui arracha un cri
d'admiration Vauban lui-mme. Au milieu d'une tempte, l'impratrice
Mathilde, petite fille du Conqurant, fit. vu, avec les barons
anglais, alors bons catholiques, de btir la Vierge de Secourancc
une chapelle sur le rivage o ils aborderaient. Le vaisseau,
miraculeusement garanti du naufrage, jeta l'ancre dans la petite
bai