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Amnesty InternationalInformations mensuelles internationales
Vol. VII, no 5 Mai 1977
1977Armee duprisonnierd'opinion
AI presente au Congres des Etats-Unis un temoignage sur
l'Ethiopie
Al a presente le 28 mars dernier A la sous-commission pour
l'Afrique du Congres desEtats-Unis, presidee par M. Charles
DIGGS,des informations prouvant que le DERG, leregime militaire
ethiopien, est coupable deviolations systematiques et tlagrantes
des droitsde l'homme.
Le dossier d'Al a et& presente par un me-decin suedois, le
Dr Arnt MEYER-LIE, ancienchef des services medicaux ethiopiens,
qui, audebut de 1976, agissant pour le compte d'uneorganisation
humanitaire suedoise, avait renduvisite a des prisonniers
politiques detenusAddis Abeba.
Al a exprime ses graves preoccupations ausujet des faits
suivants:- la detention sans jugement d'hommes, de
femmes et d'enfants dont on estime le nom-bre A 8 000, dans des
conditions sanitairesdeplorables et dans des locaux surpeuples,
EXECUTIONS EN REPUBLIQUEPOPULAIRE DE CHINE
Le 17 mars, des correspondants de presseetrangers a Pekin
(Republique populaire deChine) ont signale que la cour supreme
deChang-hai avait condamne a mort 26 « contre-revolutionnaires
actifs» et ordonne leur exe-cution immediate.
Parmi les 26 condamnes se trouveraient24 criminels accuses de «
meurtre, vol decorrespondance et pillage d'entrepeits decereales
appartenant A l'Etat » et deux pri-sonniers accuses de «crimes
politiques ». L'unde ceux-ci avait fait obstacle a la critique du«
gang des quatre » et l'autre se serait opposeA la politiqug des
pouvoirs publics consistant
envoyer la jeunesse instruite travailler dansles villages. Par «
jeunesse instruite» on entendles jeunes qui ont acheve leurs etudes
secon-daires et qui sont envoyes en grand nombredans les regions
rurales apres qu'ils ont obtenuleur
Le 21 mars, un journal chinois de Hong-kong citait un voyageur
revenu recemment dela capitate provinciale de Fou-tcheou qui
de-clarait que 18 militants du parti avaient eteexecutes dans la
province de Fou-kien. Desnouvelles parues en fevrier faisaient etat
dehuit executions a Wou-han, capitate de la pro-vince de Hou-pei.
Plus recemment, troisexecutions etaient signalees A Canton.
En Republique populaire de Chine, les nomsdes prisonniers
condamnes A de lourdes peinessont habituellement affiches stir les
murs desvilles. Des voyageurs qui se sont rendus dansplusieurs
vales ont signale un certain nombred'affiches de ce genre annoncant
des condam-nations A mort au cours des dernieres semaines.Dans
plusieurs cas, on a appris que lescondamnes avaient ete executes
sans delai.
Le 25 mars, Al a exprime son inquietudedevant le grand nombre de
condamnations A
sans soins medicaux. A/ a joint a son dossierune liste de 362
prisonniers politiquesconnus;des executions sommaires et le
massacre detres nombreuses personnes soupconnees de«crimes
antirevolutionnaires ». Au coursdu seul mois de mars, plus de 2 000
personnesauraient et& executees sommairement par lesforces de
securite et les «milices populaires
- l'usage de la torture.Al a instamment prie la
sous-commission
de prendre note de ces violations des droits del'homme commises
en Ethiopie, qui ne sontpas les seules, et present& des
recommanda-tions sur la maniere dont la situation pourraitetre
amelioree.
Aux termes de la loi n° 502B adopt& parle Congres des
Etats-Unis, la situation enmatiere de droits de l'homme doit etre
priseen consideration Jans toutes discussions rela-
mort immediatement suivies d'execution. Ala reaffirm& son
opposition A la peine capitaleet a instamment demand& que ces
peinessoient commuees pour des raisons huma-nitaires. Li
PREMIERES EXECUTIONS EN LIBYEDEPUIS 23 ANS
Les premieres executions depuis 23 ans onteu lieu en Libye au
mois d'avril. Un grouped'officiers accuses d'avoir tente de
renverserle gouvernement en aolit 1975 a ete passé parles armes le
2 avril. Le nombre exact de cesofficiers n'est pas connu. En
decembre 1976,75 personnes ont ete jugees par un tribunalmilitaire
et 23 d'entre elles ont ete condamnees
mort par contumace (Informations de mars).Apres recours en appel
aupres d'un deuxiemetribunal militaire, le nombre des condamnesmort
est passe A 45.
Le ler avril, les sections d'Al ont adressedes appels au Conseil
revolutionnaire, luidemandant de commuer ces condamnations.
Selon des informations de source officiellelibyenne, cinq civils
declares coupables de«sabotage terroriste » ont ete pendus
publi-quement A Benghazi le 7 avril. D'apres lesrenseignements
recus par AI, ces cinq personnesetaient:- deux etudiants — dont un
adopte par Al —
arretés en janvier 1973 pour avoir participeA des manifestations
A l'universite durantlesquelles un bAtiment public avait
eteincendie;
- un etudiant arrete en 1972 pour avoir parti-cipe a une
manifestation contre le gouver-nement au cours de laquelle une
statue dupresident Nasser avait ete endommagee. Lamanifestation
avait eu lieu apres que lescorps des personnes tuées dans l'avion
deligne libyen abattu au-dessus du Sinai parIsrad avaient ete
ramenes a Benghazi;
tives A des ventes ou A des dons d'armementsamericains a des
pays etrangers. En fevrierdernier, le gouvernement des Etats-Unis
aannule un don d'equipement militaire d'unmontant de 6 millions de
dollars, en raison deviolations des droits de l'homme, mais,
selonla presse, ii avait ete propose aussi de vendredes armes pour
un montant pouvant attein-dre 200 millions de dollars.• Executions
en Ethiopie: Le 4 avril dernier,AI a adresse au president du' DERG
un tele-gramme de protestation contre l'executionpublique, le 2
avril, par un peloton d'execu-tion, de six personnes pretendument
contre-revolutionnaires », qui auraient ete declareescoupables de
meurtre par un tribunal mili-taire. 11s'agissait du premier cas
d'executionpublique ordonnee par le DERG; elle a eu lieudevant une
foule de plusieurs milliers depersonnes. Li
- un Libyen et un Egyptien arretes en sep-tembre 1976
pretendument parce qu'ilsavaient place une bombe dans le port
deBenghazi.Ces personnes avaient ete jugees a huis clos
par un tribunal du peuple au mois de mars.Le droit de faire
appel leur avait ete refuse.
Le 12 avril, Al a envoye un telegrammeM. Muammar EL KHADAF1,
president dela Republique, lui exprimant sa profondeemotion A
l'annonce de ces executions et luidemandant d'y mettre fin.
Anterieurement, deux des 40 prisonniersadoptes par Al et detenus
depuis 1973 avaientete condamnes A mort. En janvier, un tribunaldu
peuple specialement constitue avaitcondamne ces 40 personnes pour
appartenanceA des partis politiques illegaux, et leurs
peiness'échelonnaient entre 4 et 15 ans de prison.Le 24 fevrier, le
Conseil revOlutionnaire avaitdecrete que ces condamnations devaient
etremodifiees, si bien que Al Mabruk AbdulMAWLA Al Zoul et Abdul
Ghani MuhammadKHANFAR, qui a l'origine avaient etécondamnés
respectivement a 15 ans et 10 ansde detention, furent condamnés a
mort. Maisil ne semble pas que ces peines aient ete appli-quees.
Toutes les autres condamnations ont eteaugmentees et transformees
en detention avie.
Le 24 mars, Al avait envoye un telegrammeau president Khadafi,
lui exprimant sa viveinquietude devant le mepris des lois
manifestepar le gouvernement. Al a ajoute que cesmesures
constituaient un danger pour leslibertes fondamentales et une
violation desdroits de l'homme et des garanties juridiquesinscrits
dans la constitution libyenne et qu'ellesportaient gravement
atteinte a l'independancedu pouvoir judiciaire libyen. Al a
demandeexpressement que les nouvelles condamnationsa mort soient
commuees. [7
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2
1977: ANNEE DU PRISONNIER D'OPINIONAl LANCE UN APPEL
Le Comité executif international (CEI) d'Al a reaffirmé,'lors
d'une reunion tenue le 3 avril, son engagement de faire'connaitre
dans le monde entier la multiplicité des emprison-nements,
tortures, disparitions et assassinats utilisés commemoyens de
repression politique, et a souligné qu'il devaitintensifier son
action pour venir en aide aux victimes de cesviolations des droits
de l'homme.
L'annee 1977 étant l'« Année du prisonnier d'opinion »,le CEI
lance un appel aux hommes et femmes de tous les payspour qu'ils
appuient financièrement l'oeuvre d'Al et signentla petition
internationale demandant la liberation immediatede tous les
prisonniers d'opinion.
AI PUBLIE UN DOCUMENTSUR LA TURQUIE
Dans un cahier d'information de 12 pagespublie le 20 avril, Al
declare que l'applicationdes articles 141, 142 et 163 du code penal
turcest d'une maniere generale incompatible avecles articles de la
Declaration universelle desdroits de l'homme des Nations Unies et
laConvention europeenne des droits de l'homme,qui garantissent la
liberte de pensée, deconscience et de religion, la liberté
d'opinionet d'expression et la liberte de reunion etd'association
pacifiques.
Critiquant une legislation qui sert a empri-sonner des opposants
politiques non violentsau regime, Al signale que, parmi les
personnescondamnees en vertu des articles 141 et 142 ducode penal,
figurent des journalistes, desuniversitaires, des écrivains et des
éditeurs.Le document cite notamment le cas de ServerTANILL I,
professeur a la faculté de droit del'universite d'Istamboul, qui a
eté accuse, envertu de l'article 142, de prdner le communismedans
son manuel d'histoire de la civilisation.
D'apres le document d'Al, la torture estdevenue pratique
courante dans au moinsdeux postes de police — Ankara EmniyetSarayi
et le premier bureau de la policed'Istamboul A Gayrettepe. Le
documentcontient un extrait du rapport d'un medecinqui corrobore
une allegation concernantl'emploi de la torture.
ll se refére aussi A des assassinats politiquesqui ont eu lieu
en Turquie depuis l'arrivee aupouvoir de l'actuelle coalition
gouvernemen-tale, dirigee par M. Suleyman DEMIREL.On lit dans le
document: « II semble certain-que les meurtres sont principalement
['oeuvrede commandos de droite allies au parti néo-fasciste du
mouvement national » et l'on y faitobserver que la plupart des
victimes ont etedes étudiants de gauche.
Amnesty International Briefing on Turkey,publie par Amnesty
International Publications,53 Theobald's Road, London WC1X 8SP;
Grande-Bretagne; peut etre obtenu aupres des sectionsnationales
d'A/. Prix: 40 pence (1 dollar des Etats-Unis), port et emballage
en sus. Abonnement annuel,port compris, a 10 cahiers consacres a
divers pays:6 livres (15 dollars des Etats-Unis). 1:1
LE NOUVEAU GOUVERNEMENT INDIENLIBCRE LES PRISONNIERS
POLITIQUES
A la suite des elections de mars pour lerenouvellement des
membres du Lok Sabha(chambre basse du parlement), auxquelles
leparti du peuple Janata a, dans l'ensemble,remporte la majorite,
le nouveau gouvernementde coalition a ordonne l'elargissement de
tousles prisonniers politiques qui etaient detenusen vertu de
reglements d'exception. II a entie-rement ley& l'etat d'urgence
et abrogé la loisur le maintien de la sécurite intérieure.
Le nouveau premier ministre de l'Inde,M. Morarji DESAI, et sept
autres ministresde son gouvernement avaient eux-memes etedetenus
pendant l'etat d'exception. Al lesavait adoptes comme prisonniers
d'opinion.
De meme, le nouveau gouvernement a dejAretabli certains droits
fondamentaux inscritsdans la constitution, qui avaient ete mis
enveilleuse par les mesures d'exception. II apromis de rapporter
prochainement les modi-fications aux lois et les amendements a
laconstitution imposes pendant l'etat d'excep-tion et qui
affectaient les droits fondamentauxdes citoyens indiens. Le
gouvernement a aussi
annul& l'interdiction qui avait frappe 27 partiset
organisations pendant cette même periode.
Le 25 mars, M. Martin ENNALS, secre-taire general d'Al, a envoye
un telegramme
au premier ministre Morarji Desai pour lefeliciter de sa
nomination et lui souhaiter dereussir le retablissement des droits
fondamen-taux des citoyens indiens. M. Desai a repondua A I par le
message suivant :
-
Campagne pour les prisonniers du moisII est rappeli aux,
participants a la campagne que les appels ne doivent etre
adressisqu'atix personnes nominees a la fin de ['expose de chaque
cas. II ne faut en aucun casadre4er de communication a un
prisonnier. II importe, dans l'intiret du prisonnier,que les
messages adressés aux autoritis soient rédigés avec soin et en
termes courtois
et qu'ils ne procident jamais d'un parti pris.
1977
Année du
prisonnier d'opinion
Roque ROMERO - ArgentineRoque ROMERO, secretaire du syndicat
des
ouvriers mécaniciens a Córdoba (Argentine),a ete arrete en
octobre 1975 en vertu des dis-positions legislatives sur l'etat de
siege. II n'aeté ni inculpe ni jug& et sa detention peut
seprolonger indéfiniment.
M. Romero est actuellement dans la prisonde Resistencia, dans le
nord de l'Argentine.SeIon une lettre du directeur de la prison
recuerecemment par AI, les autorités militairesresponsables de
cette region ont interdit « jus-qu'd nouvel ordre » toute visite
aux prison-niers politiques et tout échange de correspon-dance avec
eux.
D'apres des informations dignes de foi, lasante de M. Romero
s'est gravement déterio-ree du fait de la longue periode qu'il a
passéeau secret et des dures conditions d'emprison-nement qu'il a
subies. II est atteint de conjonc-tivite chronique et l'on craint
qu'il perde lavue. II est impossible de verifier les affirma-tions
du directeur de la prison, qui declarequ'il n'en est rien et que M.
Romero recoit untraitement medical. Al dispose d'informationsbien
étayees prouvant que, meme dans les casoti les prisonniers
recoivent un traitementmedical, ce traitement est souvent
insuffisant.
L'arrestation de M. Romero a probablementpour origine les
activites syndicales licites etpacifiques auxquelles ii
participait. Le gouver-nement argentin etudie actuellement la
possi-bilite de l'inculper de « possession d'armes etactes
d'intimidation du public en liaison avecson affiliation a des
organisations de gauche».
AI est persuadée que ces accusations sontsans fondement. On sait
qu'avant le coupd'Etat militaire de mars 1976, les syndicalistesen
vue portaient des armes a feu de petit calibreautorisées par la loi
pour se proteger contre lesattaques de groupes
d'extreme-droite.
Roque Romero est un des quelque 400 tra-vailleurs et
syndicalistes dont Al sait qu'ilsont été arrêtés, enlevés ou
assassinés pendantles 18 derniers mois.
Envoyer a l'adresse suivante des lettres entermes courtois
demandant la liberation deRoque Romero: Seflor Presidente de la
Repu-blica Argentina, General Jorge Rafael Videla,Casa Rosada,
Buenos Aires, Argentine.
Eliah MASIANE - RhodisieLe reverend Eliah MASIANE,- age de
40
ans, pasteur de l'Eglise lutherienne évangelique,a ete arreté a
son domicile sur les terres de lareserve tribale de Dibilishaba, en
Rhodesie,en juin 1975, apres s'etre enquis, au poste depolice de
Gwanda, du sort d'un pretre arret&en vertu des ordonnances
relatives a l'etatd'urgence (Emergency Powers Regulations).Apres
son arrestation, le reverend Masianea lui-même eté conduit au poste
de policede Gwanda, øü il a ete brutalement frappe etsoumis a des
chocs électriques pendant soninterrogatoire.
Vers le milieu de juillet de la meme année,le reverend Masiane a
ete accuse d'infractiona la loi rhodésienne sur le maintien de
l'ordrepublic et remis en detention pour supplementd'instruction A
la prison de Khami, établisse-ment au régime de securite maximum.
II aurait
pretendument aide a recruter des guérillerosnationalistes, délit
obligatoirement sanctionnepar la peine de mort en Rhodesie.
Le 30 septembre, toutes les accusationsretenues contre le
r&verend Masiane ont et&retirees. Mais, au lieu de le
relacher, on l'atransfere a la prison de Bulawayo. LA, il a
faitl'objet d'un mandat de detention signe par leministre de
l'ordre public, prevoyant sonmaintien en prison pour une période
indeter-minee. Le 16 octobre, le réverend Masianea ete transfére
dans la section des détenus dela prison de Wha Wha.
Marie et pere de six enfants, le reverendMasiane a egalement ses
vieux parents a charge.
Envoyer a l'adresse suivante des lettres entermes courtois pour
demander la liberationdu reverend Eliah Masiane: Hilary
Squires,Minister of Justice, Law and Order, Causeway,Salisbury,
Rhodesie.
Ljuben Georgiev et Anastasia HADJI-DIMITROV - Bulgarie
Ljuben Georgiev HADJI-DIMITROV, ar-chitecte, age de 55 ans,
demeurant a Vinica(Bulgarie), a ete arréte a son lieu de travail
le7 septembre 1976. Son arrestation a ete suivie,le 28 septembre,
par celle de sa femme Anas-tasia, qui avait, semble-t-il, ete mise
a piedsans preavis pres de deux mois plus tot.
Ils auraient tous deux éte accuses d'avoirprojete de quitter la
Bulgarie illegalement etd'avoir ete en possession de materiel de
pro-pagande hostile au regime. On pense qu'enfait de propagande, it
s'agissait de lettres deleurs trois enfants, qui ont obtenu l'asile
poli-tique en Suisse il y a deux ans.
Al ne connait pas le lieu oil M. et MmeHadji-Dimitrov sont
detenus, ni la date deleur procés. Mme Hadji-Dimitrov est
atteintede rhumatismes chroniques et de troubles car-diaques et
l'on eprouve des craintes serieusespour sa sante.
M. Hadji-Dimitrov ne parait pas avoir par-ticipe a des activités
politiques ni appartenua une organisation politique en
Bulgarie.Toutefois, selon les renseignements recus,apres que les
enfants eurent obtenu l'asilepolitique en Suisse, les parents ont
et& soumisa des harcelements de la part de la police.
Cettederniere aurait confisque les lettres des enfantsau cours
d'une perquisition effectuee au domi-cile du couple en son absence;
ces lettres ontete utilisees comme preuves a charge. La famillede
M. et Mme Hadji-Dimitrov pense qu'ilsont eté emprisonnés pour avoir
demande a serendre légalement en Suisse.
Envoyer aux adresses suivantes des lettresen termer courtois
pour demander la liberationde Ljuben-Georgiev et Anastasia
Hadji-Dimi-troy: Todor Jivkov, Président du Conseild'Etat, Sofia,
Bulgarie, et Svetla Daskalova,Ministre de la justice, Sofia,
Bulgarie.
Prisonniers Beres et cas nouveauxLe secretariat international a
appris enmars la mise en liberte de 176 prisonnierset a pris en
charge 290 cas nouveaux.
URSS: UN MEMBRE D'A/ EMPRISONNEEST SOIGNE DANS UN HOPITAL
SergueI KOVALYOV, membre du grouped'Al de Moscou, condamné et
emprisonné,vient d'être oper& d'un polype rectal a l'hôpi-tal
d'une prison de Leningrad. Au debut del'annee, les médecins de la
colonie de travailavaient diagnostique ce polype — sans doutelie
aux hemorroides dont souffre depuis desannees le Dr Kovalyov —
qu'ils consideraientcomme un symptOme possible de
cancer.L'operation a permis d'écarter cette hypothese.
Serguei Kovalyov purge actuellement unepeine de sept ans de
prison et de trois ansd'exil pour « agitation et propagande
anti-soviétique». Depuis un certain temps, Al sepreoccupait de ce
que le Dr Kovalyov ne rece-vait apparemment aucun traitement pour
leshémorrOides dont il souffrait. L'interventionchirurgicale
recommandée en 1974, avant sonarrestation, n'a &te autorisée
qu'en mars der-nier. Le regime alimentaire et les conditionsde
travail a la colonie ont sans doute aggravel'état du
prisonnier.
Quand les medecins de la colonie de travailont communique leur
diagnostic au Dr Kova-lyov, celui-ci a refuse de subir l'opération
surplace et a demande a etre transfer& au servicehospitalier
d'une priton de Leningrad ofi itpensait recevoir les soins
qu'exigeait son &tat.On lui aurait repondu par une fin de
non-recevoir, précisant qu'aucun prisonnier poli-tique n'avait
jamais été envoy& a Leningradpour y recevoir des soins
medicaux.
Dans une lettre adressee en fevrier auxautorites sovietiques, Al
demandait instam-ment que le Dr Kovalyov soit transfer&
al'hopital de la prison de Leningrad pour yetre soigne, puis libere
pour raisons de sante.Le 14 février, a l'occasion d'un voyage
enUnion soviétique, le sous-directeur de la sec-tion britannique
d'Al s'est rendu au ministerede l'interieur de l'URSS, a Moscou,
pourdemander personnellement le transfert duDr Kovalyov.
Le 2 mars, Ludmila BOiTSOVA, la femmedu Dr Kovalyov, apprenait
de source officielleque son mari serait transfer& a l'hôpital
de laprison de Leningrad pour y etre examine ettraite.
• Youri Orlov arriti a Moscou: M. YouryORLOV, president du
groupe d'assistance pourl'application des accords d'Helsinki en
URSS,a éte arrêté a Moscou le 10 février. Un autremembre du m8me
groupe de Moscou et deuxmembres d'un groupe « Helsinki »
d'Ukraineavaient deja eté arretCs au debut de février(Informations
de fevrier). Tous les quatresont encore détenus.
M. Orlov, physicien, est auteur ou coauteurd'au moins
vingt-quatre ouvrages scientifiqueset membre correspondant de
l'Academie dessciences de la RSS d'Armenie. Apres avoirmilite
pendant des annees a Moscou en faveurdes droits de l'homme, M.
Orlov est devenupresident du groupe «Helsinki» a la fondationde
celui-ci, en mai 1976.
En raison des activites du groupe «Helsinki »M. Orlov a igaintes
fois ete arrete et interrogeen 1976, en meme temps qu'on
perquisition-nait a son domicile. Apres une perquisition
-
4
()rho, suite de p. 3effectuee en janvier dernier, on lui a
annoncequ'une inculpation penale des membres dugroupe etait en
cours de preparation.
A l'epoque, Al a ecrit aux autorites sovie-tiques pour leur
demander de ne procéder aaucune inculpation penale en liaison avec
lesactivites du groupe.
Apres,l'arrestation, le 3 fevrier, d'un membredu groupe,
Alexandre GINZBURG, M. Orlovs'est absent& de Moscou pendant une
semaine,mais il a ete arrete des le lendemain de sonretour. On
ignore encore quelles sont exacte-ment les charges relevees contre
M. Orlov etles trois autres membres du groupe « Helsinki
»actuellement detenus.
Au moment de l'arrestation de M. Orlov,le groupe « Helsinki »
avait publie dix-septrapports relatant la violation en URSS
desdispositions de l'Acte final relatives aux droitsde l'homme.
Al DEMANDE A LA THAILANDEDE LIBERER
DES PRISONNIERS POLITIQUES
Le 5 avril, Al a adressé au premier ministrede Thailande, M.
Thanin KRAIVICHIEN, untelegramme pour lui exprimer son inquietudeau
sujet de la detention prolong& de prisonnierspolitiques qui ne
sont pas passes en jugement.Al a demande une amnistie immediate
enfaveur de tous les prisonniers politiques nonjuges, en faisant
observer que six mois se sontecoules depuis le coup d'Etat
d'octobre 1976.Al a aussi demande la, mise en liberte souscaution
de tous ceux qu'il est question de fairepasser en jugement.
D'apres des renseignements communiquésa AI, environ 8 000
personnes ont ete arreteesa Bangkok et en province a la suite du
coupd'Etat. La plupart ont ete relachees, maisplus de 1 500 sont
toujours en prison et aucuned'entre elks n'a encore ete jugee.
D
LES EXECUTIONS CAPITALESEN HONGRIE
Un citoyen hongrois, M. Imre MISKEI,aurait ete execute en
Hongrie, le 28 mars,apres rejet de son recours en grace. II
avaitete reconnu coupable du meurtre d'un enfant.
Le 2 janvier, Al avait adresse un appel aupremier secretaire du
parti socialiste ouvrierhongrois, M. Janos KADAR, lui demandantde
commuer la peine de mort que le tribunalmetropolitain de Budapest
avait prononc&contre M. Miskei en decembre 1976.
Peu apres l'appel d'Al, le quotidien hon-grois NEPSZABADSAG
publiait un articleindiquant que cet appel ne serait pas pris
enconsideration, la raison principale indiqu&etant que la loi
hongroise garantissait rind&pendance des tribunaux et que la
Cour supremeprendrait donc la decision finale nonobstanttoute
intervention. L'auteur de l'article s'eton-nait de l'intervention
d'Al en faveur d'unrepris de justice, estimant que l'oppositionsans
reserve d'Al a la peine de Mort ne pou-vait justifier sa
demarche.
Repondant a cet article, AI a explique queses statuts s'opposent
a la condamnationmort, quel que soit le crime commis, et quel'appel
d'Al ne portait que sur la questionde la peine capitale.
En Hongrie, les condamnatioas a mort nesont prononcees que dans
les cas d'homicide
avec premeditation. Selon les statistiques hon-groises, de 1973
a 1976, il y a eu dix executionspour de tels crimes. 0
PRISONNIERS POLITIQUES LIBERESEN HAITI
La mise en liberte de vingt et un prisonnierspolitiques apres
enquete menee par les pouvoirspublics a eté annonc& en Haiti le
2 mars.AI avait pris la defense de onze d'entre eux,presque tous
detenus sans jugement depuis1969.
Un enseignant arrete en 1976, M. Jean-Claude EXULLIEN, serait au
nombre desprisonniers libérés. Le 9 janvier, Al avaitdemande a M.
Jean-Claude DUVALIER, pre-sident de la Republique d'Haiti, des
precisionssur M. Exullien et un certain nombre d'autresprisonniers
(Informations de fevrier).
Un agriculteur, M. Dieudonne AUGUSTE,aurait aussi ete remis en
liberte. Lorsque laCommission interamericaine des droits del'homme
s'etait enquise de son sort, les auto-rites haitiennes avaient
declare qu'il etait
inconnu ».Al s'est felicitee de la liberation de ces pri-
sonniers politiques detenus sans jugement eta invite les
autorites haitiennes a etendre lebenefice de cette mesure aux
autres prisonniersdétenus dans les memes conditions. 0
LA ROUMANIE ACCUSEED'ABUS DE LA PSYCHIATRIE
Paul GOMA, romancier roumain dissi-dent, aurait affirm&
qu'un certain nombrede personnes sont detenues dans des
etablisse-ments psychiatriques en Roumanie pour desraisons
politiques.
Les allegations de M. Goma ont ete signa-lees a la fin du mois
de mars. II a affirm&connaltre quatre personnes qui ont passe
jus-qu'a six mois de suite dans de tels établisse-ments, parce
qu'elles auraient refuse de signerune declaration d'allegeance
envers le gouver-nement roumain rédigée en 1975. M. Gomaa donne le
nom de quatre hôpitaux psychiatri-ques utilises a cet effet, dont
deux se trouventa Bucarest.
Des informations recentes provenant d'autressources semblent
confirmer les affirmationsde M. Goma et Al s'efforce
actuellementd'obtenir des renseignements plus detaillés.
DISPARITION D'UN PROFESSEUREN IRAK
Al a reel' des informations signalant queM. Talib AL BAGHDADI,
professeur d'eco-nomie politique a l'universite, a disparu
deBaghdad depuis la fin de 1976.
Selon ces informations, M. Al Baghdadi adisparu apres avoir
critique un expose de lasituation Cconomique en Irak, dont
l'auteur,M. Saddam HUSSEIN, est vice-président duConseil superieur
revolutionnaire. M. AlBaghdadi, somme de se presenter devant
M.Hussein, n'a depuis lors plus donne signe devie.
La famille de M. Al Baghdadi avait recul'assurance qu'il
rentrerait chez lui dans unMai de trois jours mais elle Etait
encore sansnouvelles de lui au debut d'avril. Les groupesd'Al ont
etC pries d'ecrire au gouvernementirakien pour s'enquerir du sort
du professeur.
RAPPORT SUR LES PRISONNIERSAU PAKISTAN
Le 31 mars 1977, un rapport fondi wsur lesconclusions d'une
delegation d'Al qui asejourné au Pakistan d'avril a mai 1976 aete
communiqué pour observations au gouver-nement du Pakistan. Ce
rapport expose lasituation des prisonniers politiques auPakistan et
formule un certain nombre derecommandations. 0
LE SECRETAIRE GENERAL PRESENTEA/ AU GOUVERNEMENT DU LIBAN
Martin ENNALS, secretaire general d'Al,a presente Al au nouveau
gouvernement duLiban en fevrier. Au cours d'une reunion quia eu
lieu a Beyrouth le 28 fevrier, M. Ennalss'est entretenu avec le
nouveau ministre de lajustice, Farid RAPHAEL, et avec le
nouveauministre de l'interieur, Saleh SALMANE, ausujet des mesures
de securite visant a reins-taurer une situation normale dans le
paysapres 19 mois de combats.
Les entretiens ont egalement pone sur lesrapports selon lesquels
la force arabe de dis-suasion, constitu& en grande partie
d'élémentssyriens et chargee de maintenir la sécurite auLiban
depuis le cessez-le-feu d'octobre, auraitarrete et emprisonne en
Syrie plusieurs ressor-tissants libanais 15our leur pretendue
opposi-tion au gouvernement syrien et non parcequ'ils constituaient
une menace a la securitedu Liban. Parmi ces personnes, on comptedes
membres ou des allies de la branche liba-naise du parti Baas
irakien.
Les autorites libanaises n'onf pas confirmeces arrestations.
Elles ont explique que la secu-rite dans le pays primait tout et
passait avantles libertes individuelles. Elles ont ajoute que,dans
des circonstances aussi anormales, legouvernement etait oblige de
gouverner a coupde decrets, la presse etait strictement censuree,il
n'y avait pas de tribunaux, ni de prison,ni de police.
Le 27 fevrier, M. Ennals s'etait renduDamas (Syrie) pour
s'entretenir avec le direc-teur des relations internationales au
ministeresyrien des affaires etrangeres au sujet des droitsdes
personnes arretees au Liban et emprison-nées en Syrie et du
traitement qui leur estreserve.
L'eventualite de l'envoi en Syrie d'unemission d'enquete d'A /
de haut niveau a ega-lement ete évoquee.
TCHAD: APPEL D'Al A LA CLEMENCELe 31 mars, AI a adresse un appel
au general
Felix MALLOUM, chef de l'Etat du Tchad,le priant de commuer les
peines de mort pro-noncees contre Hassan Abakar ADEF,Djibrine
ABDERAMANE, Idriss DJARMAet Mahamat TAHER, impliques dans une
ten-tative d'assassinat du president, le 13 avril1976. Malgré cet
appel, les condamnés ontett executes le 4 avril dernier.
Les INFORMATIONS MENSUELLESINTERNATIONALES sont la
traductionfrancaise de la NEWSLETTER publioe parAMNESTY
INTERNATIONAL purLI-CATIONS, 53 Theobald's Road, LondresWC X 8SP,
Grande-Bretagne.
-
amnesty international
campagne pour l'abolition de la tortureVol. IV, n° 5 BULLETIN
MENSUEL Mai 1977
AI publie un rapport sur le premierproces des tortionnaires
grecs
Le 16 avril, Al a publie Torture in Greece:The First Torturers'
Trial 1975 (La torture enGrece — 1975: premier proces des
tortion-naires). Ce rapport de 96 pages est consacréau proces de 32
officiers et soldats de la policemilitaire grecque juges en aotlt
et en septembre1975 par le tribunal znilitaire permanentd'Athenes,
devant lequel ils etaient accusesd'avoir commis des actes
assimilables A la tor-ture au cours des sept années de dictature
dela junte des colonels, de 1967 a 1974. Lesofficiers qui
assuraient le commandementont ete condamnes A de lourdes peines
deprison.
Toutefois, a l'issue des nombreux procesqui ont suivi, les
condamnations ont eté bienloin d'être exernplaires. Encore en
fevrier 1977,quatre des cinq principaux tortionnaires de
lagendarmerie d'Athenes et quatre des cinq prin-cipaux
tortionnaires de la police de sfireted'Athenes ont eté relaxes ou
simplementcondamnes A des amendes apres s'etre pour-vus en appel
contre leur condamnationanterieure.
Le rapport d'A/ est centre sur le premierproces des
tortionnaires en Grece parce quece proces a montre que la torture
etait effec-tivement pratiquée par la police militaire de lajunte,
de facon systematique, en tant quemoyen d'imposer l'autorite
etablie et qu'il aprouvé que la torture peut faire l'objet
desanctions en application de la procedure penaleordinaire.
Apres le premier proces des tortionnaires,le gouvernement grec,
pour des raisons qu'ilest seul a connaitre, a permis aux
tortionnairesde s'en tirer A bon compte. Dans son rapport,Al
formule des critiques A l'egard du gouver-nement grec actuel parce
qu'il n'a pas pris demesures legislatives contre la torture, qu'il
n'apas fait passer en justice tous les tortionnairesde la junte ni
indemnise les victimes de latorture. Au lieu d'entreprendre une
enqueteapprofondie et coordonnee sur le systeme detorture pratique
par la junte, chose qui auraitété possible aux termes de la
legislation grecqueen vigueur, les autorites competentes se
sontcontentees de faire instruire les cas dont lesplaignants
avaient deja saisi les tribunauxcivils. Exception faite d'un cas
(juge par untribunal de la marine), il n'y aurait eu aucunproces de
tortionnaires si l'initiative avait etelaissee entierement aux
autorites responsablesdes poursuites agissant d'office ou sur
instruc-tions du gouvernement.
Ainsi, en raison de la methode qui a presideaux enquetes et
poursuites, certains tortion-naires ne seront pas juges parce que
leurs vic-times ont refuse d'intenter elles-memes uneaction,
estimant, pour des raisons de principe,qu'il incombait a l'Etat
d'engager des pour-suites sans qu'il soit nocessaire de faire
pressionpar des actions en justice intentees par des
particuliers. Certains tortionnaires, qui ontete accuses mais
n'ont pas fait l'objet de pour-suites, continuent a exercer des
fonctions dansles forces de securite grecques.
Le 14 mars dernier, le parquet a, sans douteavec l'accord du
ministre grec de la justice,fait appel des peines prononcees contre
lesofficiers de la police militaire reconnus cou-pables lors du
proces de 1975. Si le sort decet appel est conforme aux precedents
creespar les tribunaux et les procureurs, les peinesinfligees pour
torture seront fortement reduitesou commuees en amendes
legeres.
C'est pourquoi le premier proces des tor-tionnaires grecs, qui a
permis de determiner etde sanctionner le role joue par certains
indi-vidus dans l'application de la torture, consti-tue un modele
plus valable pour le jugementde tortionnaires inculpes que la serie
de procesqui ont suivi.
Al a entrepris l'elaboration de ce rapportsur le premier proces
vers la fin de l'annee1975, immediatement apres la fin du
proces.Les compte rendus officieux des debats duproces reproduits
dans les journaux grecs ontete soigneusement traduits. C'etait la
seulefacon de proceder, car les minutes officiellesdes tribunaux
grecs n'existent que sous formede notes. En raison du caractere
historiquede ce proces, la presse grecque en a renducompte dans les
moindres details et a reproduittextuellement les declarations des
temoinset les dialogues qui ont eu lieu dans la salle dutribunal.
C'est ce qui a permis de corroborerles dires de deux et parfois
trois sources diffe-rentes. Le proces a commence le 7 aoilt
1975,date A laquelle 14 officiers et 18 soldats ontcomparu devant
un tribunal militaire sous desinculpations comprenant « des abus
repétesd'autorite, la detention contraire A la constitu-tion, la
responsabilite morale de sevices ordi-naires ou graves ». Comme
dans le cas desproces de tortionnaires qui ont eu lieu
ulte-rieurement, les poursuites engagees resultaientde la pression
cumulative qu'exercaient lesactions en justice intentees par
plusieurs an-ciens prisonniers contre leurs tortionnaires,devant
l'inaction du ministere public.
Les accuses Ctaient tous membres de lapolice militaire de la
junte (Elliniki StratiotikiAstynomia - ESA), qui avaient servi dans
lasection speciale des interrogatoires a Athenes,au centre de
formation de cette police, danssa section du Piree ou dans la
prison militairede Boyati. Vers la fin de l'annee 1968,
l'ESAdetenait des pouvoirs quasi absolus en matiered'arrestation,
de detention et d'interrogatoire.
Ceux des accuses qui jouissaient de la plustriste notoriete
etaient le commandant Theo-doros THEOFILOYANNAKOS, qui etait
de-venu commandant de l'ESA en ao0t 1970,et son adjoint et
successeur, le commandantNikolaos HAJIZISIS. C'est sous
Theofiloyan-
nakos qu'a ete creé le système efficace defilature,
d'arrestation et d'interrogatoire, avecl'approbation sans reserve
du general de bri-gade Dimitrios IOANNIDIS, inspirateur
dusystème.
Les temoignages presentes devant le tri-bunal militaire etaient
constitues par les depo-sitions de pres de 130 personnes. Cette
mo-saique de souffrances individuelles composeun tableau d'ensemble
qui denote la pratiquesystematique des arrestations, des tortures
etdes interrogatoires a laquelle se livrait l'ESA.L'accumulation de
preuves d'une veritableroutine de la torture et de l'entrainement a
latorture a quelque chose de frappant. En fait,c'est cette
uniformite des temoignages quiconstituait l'aspect le plus
convaincant del'exposé du ministere public.
Les details relatifs a la torture qui sont brieve-ment resumes
dans le rapport confirmentdeux rapports anterieurs d'Al sur la
Grece,publies a l'epoque ou la junte etait au pouvoir.Les
depositions des temoins permettent de sefaire une idee de
l'experience psychologiquetant des tortionnaires que de leurs
victimes.Le sentiment profond d'impuissance eprouvepar les victimes
est particulierement notable.Elles ont relate leurs reactions aux
menacesdont elles etaient l'objet; c'est ainsi queloannidis a
declare a Anastasios MINIS:
Vous savez, il est possible que certainesparties de votre corps
soient detruites. »
Apres avoir ete forces a se tenir deboutdurant des journees
entieres, les prisonniersetaient victimes d'hallucinations et
avaient ledesir de mettre fin a leur existence. « Ils you-laient
nous donner l'impression que nous &ionsoublies », a declare Mme
Virginia TSOUDE-ROU (arretee en mars 1973), o et quepersonne ne
s'occupait de nous. »
D'un autre cOte, la formation poussee etl'allegeance personnelle
exigee des soldats del'ESA les placaient dans une situation qui
pre-sente des similitudes surprenantes avec celledes victimes. Afin
de les preparer a leur exis-tence de tortionnaires, on torturait
les recrueselles-memes et elles etaient battues dans lessalles de
conference et au cours des lecons.Meme lorsque les recrues
quittaient le centrede formation pour etre assignees au siege
del'ESA comme gardes ou dans un autre centrede torture de la police
militaire, on continuaita les battre. «Nous sommes une famille
pau-vre, mais respectable... », declara le pore (agri-culteur) d'un
des soldats accuses, o et main-tenant je le vois au banc des
accuses commetortionnaire. Le tribunal peut-il m'expliquercomment
il se fait qu'un garcon dont tout lemonde disait qu'il etait un
«joyau» est devenuun tortionnaire? Qui est-ce qui a detruit
mora-lement ma famille et mon foyer? »
(Suite p. 2, col. 2 Bulletin CAT)
-
Bulletin T 2
a ppe IGonzalo BARRON -Bolivie
Un groupe de pretres catholiques boliviensa protest&
publiquement contre l'arrestationet la detention arbitraire, au
debut du moisde mars, d'un etudiant nomme GonzaloBARRON. Dans une
declaration publiee le8 mars, les pretres ont dit que cet
etudiantetait détenu a Cochabamba par des fonction-naires de la
police de sarete (DOP — Direc-ción de Orden Pliblico).
La DOP a refuse de donner des renseigne-ments sur M. Barron et
d'autoriser ses prochesa lui rendre visite. Cette attitude, disent
lesprêtres, « nous porte a croire qu'il a ete porteatteinte a
l'integrite physique de cet etudiantdans les locaux de la
police».
Au moment de mettre sous presse, on nedisposait d'aucune
information officielle ausujet de l'endroit oil se trouve M. Barron
nid'indication sur les raisons de son arrestation.
Le 12 mars, quatre jours aprés la declara-tion des pretres, le
sous-secretaire bolivien al'interieur, M. Juan GAMARRA, a
declarepubliquement a Geneve que les accusationsde violation des
droits de l'homme en Bolivieetaient « denuées de fondement ». 11 a
dit quela Conference des éveques boliviens &mit auto-risee a
visiter les prisons et que le secretairede la Conference, Mgr
Alejandro MESTRE,avait reconnu que la torture n'y était pas
pra-tiquee. Le 17 mars, Mgr Mestre a dementi lesdeclarations du
ministre et a declare qu'ilexistait des « cas deplorables de
traitement in-humain de prisonniers » en Bolivie.
Veuillez ecrire des lettres en termes courtoisexprimant votre
inquietude devant la proce-dure employee lors de l'arrestation de
GonzaloBarran et demandant que le respect de sesdroits de citoyen
et des droits de l'hommesoit garanti et les adresser a: Seilor
Presidentede la Repüblica, General Hugo Banzer Suarez,Palacio
Quemado, La Paz, Bolivie et a:Señor Subsecretario del Interior, Dr
JuanGamarra, Ministerio del Interior, La Paz,Bolivie.Vous pouvez
adresser, pour information, descopies de vos lettres a la
Conference desevéques catholiques: Conferencia Episcopal,Casilla
205, Sucre, Bolivie.
AUX PHILIPPINES, DES MILITAIRESRECONNUS COUPABLES DE TORTURE
Aux Philippines, trois membres des forcesde securite auraient
et& reconnus coupables detortures. The Philippine News, qui
parait auxEtats-Unis, a signale le 12 mars qu'un tribunalmilitaire
avait condamne deux membres de lapolice des Philippines A six mois
de travauxforces pour avoir torture des prisonniers poll-tiques. Un
troisieme prevenu, le lieutenantClifford NOVERAS, reconnu
coupabled'avoir torture trois detenus en 1974, a etelimoge. Un
autre prevenu, le sergent JacintoGALICIA, comparaitra devant un
autre tri-bunal militaire ou il aura a repondre d'accu-sations
semblables.
Le proces de ces trois hommes est le seulexemple signale l'an
dernier de poursuites judi-ciaires engagees aux Philippines contre
desmembres des forces de sécurite accuses d'avoirtorture des
prisonniers politiques.
Au debut du proces, qui s'est ouvert en
septembre 1976, deux médecins militaires ontcertifie que les
trois prisonniers victimes demauvais traitements avaient subi des
lesions.L'un avait ete marque au fer rouge, un autreavait ete
contraint d'avaler une boule de metal,et une prisonniere avait subi
des outragessexuels.
Trois des quatre accuses &talent deja men-tionnes dans le
rapport d'une mission d'Alqui avait interroge des prisonniers aux
Philip-pines en novembre/decembre 1975. Le rapportde la mission
contenait une liste de 88 agentsdes services de securite que les
prisonniersavec lesquels les membres de la mission d'Als'etaient
entretenus avaient designes commeetant des tortionnaires. Dans son
rapport, lamission d'AI recommandait que les 88 cassoient examines
par des commissions d'en-quete ouvertes a tous et
independantes.
UN OUVRIER POLONAISFAIT LA GREVE DE LA FAIM
Un ouvrier polonais condamne a neuf ansde prison pour avoir
participe aux emeutes dejuin 1976 — motivees par la hausse des
prixdes produits alimentaires — aurait, selon lesrenseignements
recus, decide de faire la grevede la faim jusqu'a ce que tous les
travailleurscondamnes a la suite des evenements de juinsoient
liberes ou juges équitablement (Appel,Bulletin CAT de janvier).
Czeslaw CHOMICKI serait, d'apres desinformations de source
officieuse, tenu ausecret, sans contact avec les autres
prisonnierset prive d'exercice physique. 11 ne peserait plusque 47
kilos et serait au bord de la depressionnerveuse.
Dans les plaintes qu'ils ont adressees auxautorites polonaises,
M. Chomicki et d'autresouvriers &terms ont affirme que des
decla-rations confirmant la participation des ouvriersa de
violentes attaques contre le siege du particommuniste leur avaient
ete arrachees par laviolence. M. Chomicki aurait declare que
letribunal n'avait tenu aucun compte de cescirconstances. II
affirme aussi que les ouvriersont ete condamnes sur la base de
preuvesinsuffisantes.
Grice, suite de p. I Bulletin CAT
Les officiers inculpes etaient, dans l'en-semble, ceux qui
menaient les interrogatoireset qui ordonnaient et surveillaient la
tortureplutôt que des hommes ayant effectivementfait usage de
matraques et de cravaches.«Comment des officiers grecs ont-ils pu
tomberdans pareille decheance morale? Qui sont lesresponsables?»
demanda le procureur lors duproces. « S'agit-il d'etres aux
instincts crimi-nels innes ou d'une perversion
caracterielleresultant d'influences exterieures? Il est cer-tain,
messieurs les juges, que ceux qui sontmoralement responsables ne
sont pas presents.Ce sont eux qui se sont servis des accuses,
quileur ont inculque des idees fausses sur cequ'etait l'interet
national. Il s'agit de ceuxqui, des années durant, ont consacre des
mil-liers d'heures d'instruction a la propagandeanticommuniste,
sans meme reserver une seuleheure a la defense de la democratic.
o
Dans le rapport, on s'efforce de repondreces questions en
etudiant les elements histo-
riques, a partir de 1935, annee de l'epurationdu corps des
officiers, dont on a Climine tous
ceux qui n'etaient pas sympathisants du sys-teme monarchique, ce
qui a permis a l'ideologieet a la mentalite des tortionnaires
militairesde s'affirmer. En 1967, les deux group&
pre-ponderants dans le corps des officisrs del'armee &talent,
d'une part, des conspirateursextremistes de droite, dont sont issus
lesacolo-nels, et d'autre part les conservateurs (la plu-part
royalistes) qui occupaient les echelonsles plus eleves. Le coup
d'Etat a renverse cettecoalition, lorsque les colonels, elements
subal-ternes de cette alliance, ont affirm& leur supre-matie
sur leurs anciens officiers superieurs.Le rapport donne un aperçu
des relations his-toriques entre ces deux groupes, qui
furent,respectivement, les principaux officiers accuseset certains
des principaux temoins a charge auproces de 1975.
Le proces devait servir a determiner la res-ponsabilite
personnelle pour des actes detorture. La deposition et
l'interrogatoirecontradictoire du commandant SpyrosMOUSTAKLIS, qui
est venu temoignerdevant le tribunal bien que muet et
partielle-ment paralyse a la suite des tortures que luiavaient
infligees, deulc ans plus tot, des equipesde tortionnaires de
l'ESA, ont particuliere-ment retenu l'attention. Au cours du
proces,d'autres victimes de tortures ont egalementmentionné, dans
leurs depositions, les nomsde ceux qui avaient torture le
commandantMoustaklis. Malgre les faux-fuyants et les de-negations
de plusieurs accus&s, le tribunal aete en mesure d'attribuer la
responsabilit& destortures infligees au commandant Moustaklis—
que l'un des avocats a caracterisees commeconstituant «le crime le
plus grave dont cetribunal ait et& saisi » — au
commandantHajizisis, l'un des anciens chefs de l'ESA.
Comme lors des procès de Nuremberg, lesaccuses (a l'exception
d'un seul soldat) ontrejete toutes les accusations dont ils
etaientl'objet et presque tous ont fond& leur defense,comme
l'ont fait les accuses a Nuremberg,sur le fait qu'ils etaient tenus
d'ob&ir auxordres recus. Le commandant Hajizisis, aucontraire,
au cours de l'expose final qu'il afait durant cinq heures devant le
tribunalmilitaire, a soutenu que ses actes &talent legi-times :
« Nous &ions entierement couvertsjuridiquement et par tous les
echelons de lahierarchic. La hierarchic partait, au sommet,du
ministre de la defense nationale et descen-dait jusqu'a l'officier
charge du commande-ment... Je n'autoriserai personne a me
de-pouiller de ce que m'ont coute de peine et desueur ces sept
annees au service de l'EAT/ESA.Le sol en a ete impregne et dles
font un avecla terre et le goudron... C'est ce que je devaisaux
dirigeants des forces armees. »
En depit du fait que le gouvernement n'apas fait juger tous les
tortionnaires et les diversorganismes de securite de la junte, le
premierproces de la police militaire fournit l'exempled'un proces
et du châtiment de tortionnaires.On peut constater ici que la
decouverte, leproces et la condamnation sont applicables .a des
tortionnaires tout autant qu'a d'autrescriminels. 11 existe
maintenant un precedentcontemporain qui montre que la torture
poll-tique n'est pas un crime jouissant de l'immu-nite et echappant
a la loi.
Torture in Greece: The First Torturers' Trial 1975,96 pages —
publiC par Amnesty InternationalPublications, 53, Theobald's Road,
LondresWCI X 8SP, Grande-Bretagne. Disponible aupthdes sections
nationales d'A 1. Le texte francaisparaitra en juin.