UNIVERSITE MONTPELLIER 2 – SCIENCES ET TECHNIQUES DU LANGUEDOC THESE Présentée par Aurélie MERCEILLE pour obtenir le titre de DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE MONTPELLIER II Ecole Doctorale : « Sciences Chimiques » Spécialité : Chimie séparative matériaux et procédés Le 26 janvier 2012 ETUDE D’ECHANGEURS D’IONS MINERAUX POUR LA DECONTAMINATION LIQUIDE EN STRONTIUM Devant la Commission d’Examen composée de : M. Jerzy ZAJAC Professeur, Université de Montpellier Président du Jury M. Pierre TURQ Professeur, Université Paris VI Rapporteur M. Michel DIRAND Professeur, Université de Lorraine Rapporteur M me Agnès GRANDJEAN Docteur-ingénieur, CEA Directrice de thèse M. Yves BARRE Docteur-ingénieur, CEA Co encadrant M. Bruno FOURNEL Responsable projet, CEA Examinateur M me Anne GALARNEAU Directrice de Recherche, CNRS, Montpellier Examinateur M. Jean-François VALERY Manager projet R&D, AREVA NC Membre invité Thése préparée au Laboratoire des Procédés Avancés de Décontamination, Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives, Département de Traitement et de Conditionnement des Déchets, Service des Procédés de Décontamination et d’Enrobage ; au Laboratoire des Nanomatériaux pour l’Energie et le Recyclage, Institut de Chimie Séparative de Marcoule UMR 5257 (CEA-CNRS-UM2-ENSCM), et cofinancée par AREVA NC
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UNIVERSITE MONTPELLIER 2 – SCIENCES ET TECHNIQUES DU LANGUEDOC
M. Jerzy ZAJAC Professeur, Université de Montpellier Président du Jury
M. Pierre TURQ Professeur, Université Paris VI Rapporteur
M. Michel DIRAND Professeur, Université de Lorraine Rapporteur
Mme Agnès GRANDJEAN Docteur-ingénieur, CEA Directrice de thèse
M. Yves BARRE Docteur-ingénieur, CEA Co encadrant
M. Bruno FOURNEL Responsable projet, CEA Examinateur
Mme Anne GALARNEAU Directrice de Recherche, CNRS, Montpellier Examinateur
M. Jean-François VALERY Manager projet R&D, AREVA NC Membre invité
Thése préparée au Laboratoire des Procédés Avancés de Décontamination, Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives, Département de Traitement et de Conditionnement des Déchets, Service des Procédés de
Décontamination et d’Enrobage ; au Laboratoire des Nanomatériaux pour l’Energie et le Recyclage, Institut de Chimie Séparative de Marcoule UMR 5257 (CEA-CNRS-UM2-ENSCM), et cofinancée par AREVA NC
Etude d’échangeurs d’ions minéraux pour la décontamination liquide en strontium
Résumé
Les problèmes de pollution chimique de l’eau sont devenus une source de préoccupation importante et un enjeu prioritaire pour les industriels du nucléaire.
L’objectif principal de cette thèse est d’étudier certains minéraux échangeurs ioniques utilisables pour une décontamination liquide en strontium (radioisotope toxique pour l’homme). Mais également de relier les propriétés physico-chimiques de ces matériaux avec leurs propriétés de rétention du radioisotope. Ce mémoire présente donc la synthèse de deux matériaux choisis pour leurs propriétés de sorption spécifique et quantitative du strontium : le nonatitanate de sodium et la zéolithe A. Une seconde partie du travail est dédiée à l’étude des capacités d’échange spécifique de ces matériaux vis-à-vis du strontium en présence d’autres éléments comme le sodium et le calcium. Le nonatitanate de sodium et la zéolithe A ont également été testés sur des effluents réels.
Les performances d’un monolithe de zéolithe A ont été évaluées pour un procédé de traitement en colonne. Ce matériau semble prometteur pour la décontamination d’effluents car il permet de cumuler les avantages de la poudre de zéolithe A avec ceux d’un transfert de matière sans perte de charge du solide.
Mots clefs
échangeurs d’ions/ nonatitanate de sodium/ zéolithe A/ strontium/ décontamination/ sorption
Study of mineral ion exchangers for strontium removal from nuclear waste waters
Abstract
The problems of chemical pollution of water have become a major concern and a priority for the nuclear industry.
The aim of this work is to study some ion exchangers used for the removal of strontium ions because 90Sr is one of a major pollutant in nuclear liquid wastes. This study allows linking the physical and chemical properties of these materials and their sorption properties. This work presents therefore the synthesis of two materials - sodium nonatitanate and zeolite A - selected for their specific sorption properties of strontium:
A second part of this work is dedicated to the study of specific exchange capacities of these materials for the strontium in presence of other elements such as sodium and calcium. Batch experiments were performed and kinetic and ion exchange models have been applied to understand the selectivity of the materials for strontium removal. Sodium nonatitanate and zeolite A are also studied in actual effluents.
Monoliths of zeolite A have been also tested in dynamic ion exchange process. This material is promising for the treatment of radioactive effluents in continuous flow because it joins the sorption properties of the zeolite powder with the advantage of a solid with a macroporous network.
Keywords
ion exchange/ sodium nonatitanate/ zeolite A/ strontium removal/ sorption
A mes parents, Evelyne & Jean-Bernard,
A ma grand-mère, Germaine,
REMERCIEMENTS
Il est évident que ces remerciements ne pouvaient commencer sans un énorme merci à Agnès
Grandjean, d’avoir accepté d’être directrice de cette thèse. Merci pour ton dynamisme et ton
investissement. Je remercie également Yves Barré pour m’avoir permis d’être autonome sur la gestion de
mon projet et d’avoir partagé avec moi une partie de ses connaissances en décontamination des liquides.
Merci à vous deux pour votre disponibilité de tous les instants. Je ressors de ses 3 années, bien évidement
grandie et cela n’aurait pu se faire sans votre contribution à tous les deux. Je suis contente d’avoir travaillé
dans vos deux laboratoires. J’en profite pour remercier les deux équipes : celle du LNER et celle du
LPAD, ainsi que l’ensemble du personnel du Laboratoire AREVA pour m’avoir intégrée parmi eux
pendant mes derniers mois d’expériences. Je remercie Monsieur Stéphane Sarrade puis Monsieur Vincent
Blet ainsi que Monsieur Thomas Zemb de m’avoir accueillie au sein de leur service et institut respectifs.
J’exprime une très grande reconnaissance à Messieurs Pierre Turq et Michel Dirand d’avoir
accepté de juger ce travail en tant que rapporteurs, ainsi qu’à Monsieur Jerzy Jazac d’avoir bien voulu être
Président du jury. J’exprime également ma gratitude à Madame Anne Galarneau qui a collaboré activement
à une partie de ce travail et a accepté d’examiner celui-ci. Je remercie également Messieurs Bruno Fournel
et Jean-François Valéry d’avoir rejoint ce jury, et d’avoir suivi de façon régulière mon travail.
Je tiens à remercier les personnes ayant collaboré avec moi, Valérie Magnin puis Bruno Corso
pour la DRX, Johann Ravaux pour les jolis clichés MEB, Carole Delchet pour ces nombreuses aides à
distance, Elsa Brauer pour les analyses de composition chimique. Philippe Zorz puis Guillaume Serve
pour leurs aides techniques au L871, Célia Lepeytre, Jérémy Causse, et Sylvain Faure pour m’avoir donné
leurs points de vue d’ingénieur lors de mes réunions. Je remercie les personnes que j’ai croisées en 2006 au
LDMC (Lionel Campayo, Myriam Chartier, Bruno Peynelon, Nicolas Massoni et Isabelle Giboire), à une
époque où l’idée d’une thèse n’était même pas présente à mon esprit.
Enfin mon naturel reprenant le dessus, je ne peux terminer ces remerciements sans une petite
note de fantaisie. Je remercie l’ ensemble des personnes que j’ai pu côtoyer lors
de ses trois années. Je remercie très chaleureusement les membres de mes deux laboratoires pour
l’ambiance qui peut y régner.
Un grand merci à Cyril et Seïf pour leurs anecdotes toujours plus étonnantes les unes que les
autres et grâce à qui il serait possible d’écrire plusieurs tomes d’un roman intitulé :Les fabuleuses histoires des
thésards du feu-LPAD. La palme revient quand même à Cyril pour l’ amende de poubelle !
Un grand merci aux miss ENSIC du 438 pour leur bonne humeur et pour nous attendre à midi
et me permettre de faire le vide de temps en temps.
Je remercie également chaleureusement les plus tardivement arrivées, mais non des moindres,
Myriam « la moche » et Virginie « la vieille », qui en tant que très bonnes voisines de bureau, m’ont évité
certaines crises d’énervement lors de ma période de rédaction grâce à leur bonne humeur. Message de la
résistante Catherinette : « Le chat Popie regarde Météociel avant son séjour au Viet nem ! »
Egalement un grand merci à Evy pour m’avoir suppléé dans les manips pendant 6 mois. Au
delà de ton sérieux et de ton excellent travail, merci beaucoup pour ta bonne humeur et ton entrain !
Merci à Aurore pour les pauses et pour m’avoir aidé dans mes manips.
Doc Tchoupi remercie ses amis thésards des autres départements, Doc Chesnut, Doc
Pilou, Doc Clément et future Doc Delphine. Je remercie Audrey pour son soutien dans les
moments durs et pour les repas entres filles avec Nadège et Cathy.
A vous tous, qui avez compté pour moi, au bonheur que nos chemins se recroisent à nouveau !
Un grand merci au binôme de choc pour nos petites péripéties un peu partout en France et
surtout d’avoir fait le déplacement pour ma soutenance, cela me fait chaud au cœur.
Un petit coup de plume également aux badistes (Jean-Marc, Papatte, Emilie,…) qui
m’ont permis de me défouler les soirs de semaine et pour la bonne ambiance lors des tournois…
Les dernières lignes sont naturellement dédiées à ma famille qui m’a soutenue (ou poussée à
l’occasion) au cours de ces nombreuses années d’études. Cela n’aurait pu se faire sans mes parents, que je
ne remercierai jamais assez. J’ai été très touchée que mon frère soit venu m’encourager le jour de ma
soutenance, ainsi que par la présence de ma belle-famille.
Un dernier clin d’œil à celui qui occupe une place toute particulière dans mon �. Merci pour ton calme,
ton aide, ta douceur et ton écoute qui m’ont permis de vivre cette thèse plus sereinement.
Figure 9 :Réseau de K1,9Mn0,95Sn2,05S6 vue suivant l’axe c et vue de la structure, avec les ions
potassiums entre les couches ....................................................................................................................32
Figure 10 : Montage de type Bragg Brentano.........................................................................................40
Figure 11 : Schéma du module d’analyse cations de la chromatographie ionique............................43
Figure 12 : Bombe de minéralisation de type Paar ................................................................................45
Figure 13 : Diffraction des rayons X de nonatitanate de sodium en fonction de leur température
de synthèse ..................................................................................................................................................46
Figure 14 : Spectre infrarouge en fonction de la température de synthèse des nonatitanates de
Figure 15 : Clichés MEB de nonatitanate de sodium synthétisés à différentes températures.........48
Figure 16 : analyses thermogravimétriques de 2 nonatitanates de sodium ........................................50
Figure 17 : Diffractogrammes des rayons X obtenus sur les résidus ATD-DSC des nonatitanates
de sodium synthétisés à 170°C (a) et 200°C (b).....................................................................................51
Figure 18 : Isotherme d’adsorption d’azote par méthode BET sur le nonatitanate de sodium
synthétisé à 160°C ......................................................................................................................................53
Figure 19 : Effet de la durée de synthèse sur le nonatitanate de sodium synthétisés à 100°C
Figure 20 : Diffractogrammes de rayons X Effet de la durée de synthèse sur le nonatitanate de
sodium synthétisés à 100°C ......................................................................................................................56
Figure 21 : Diffraction des rayons X sur poudre de zéolithe A synthétisée suivant le protocole de
Abd El Rahman [45] ..................................................................................................................................58
Figure 22 : Cliché MEB de la zéolithe A.................................................................................................58
Figure 23 : Spectre infrarouge de la zéolithe A......................................................................................59
Figure 24 : Caractérisation par DRX et MEB de la poudre obtenue suivant le protocole de Manos
et al. [61].......................................................................................................................................................61
Figure 25 : Phénomène de sorption (schéma adapté de Manceau et al. [78]) ...................................67
Figure 26 : caractéristiques et interactions à prendre en compte dans un système ternaire
adsorbant/adsorbat/solvant, d’après Badot et al.[79]...........................................................................69
Figure 27 : Polarisation des liaisons OH, caractère dipolaire de la molécule d’eau, et sphère
d’hydratation d’un cation mono ou divalent. .........................................................................................70
Figure 28 : Courbe de titration de Sr2+ par NaOH d’après la base thermodynamique de CHESS71
Figure 29 : Etapes de l’échange ionique..................................................................................................74
Figure 30 : Isotherme de sélectivité dans le cas d’un échange d’ions monovalent/divalent [86] ...80
Figure 31 : dispositif de sorption de type « batch » ...............................................................................87
Figure 32 : taux d’échange sodium/strontium en fonction du temps ................................................89
Figure 33 : Modèle de Ho et Mc Kay, modèle de pseudo ordre 2......................................................90
Figure 34 : modèle diffusif de Weber et Morris.....................................................................................92
Figure 35 : taux d’échange du sodium du solide par le strontium en solution, en fonction de la
concentration initiale de sodium en solution .........................................................................................94
Figure 36 : mesure du potentiel zéta en fonction du pH......................................................................95
Figure 37 : évolution du pH en fonction du temps...............................................................................96
Figure 38 : taux d’échange sodium/strontium en fonction du pH de la solution mère. .................97
Figure 39 : isotherme de sélectivité pour un mélange sodium/strontium .........................................99
Figure 40 : coefficient de sélectivité en fonction de la fraction équivalente en strontium dans le
Figure 54 : énergie libre d’échange pour un échange Na/Sr en fonction de la concentration en
sodium en solution...................................................................................................................................119
Figure 55 : effet de la concentration en calcium en solution sur le coefficient de distribution du
Figure 60 : a-photo d’un monolithe de silice et b- image MEB avant traitement basique ............139
Figure 61 : a- isotherme d’adsorption d’azote (�) avant et (�) après le traitement basique b-
porosité au mercure..................................................................................................................................140
Figure 62 : Cliché MEB du monolithe silicique (a-c) et du monolithe zéolithique équivalent (b-d)
Figure 74 : facteur de décontamination cumulé en fonction du volume de lit de solution passé 154
NOMENCLATURE
Notation Désignation Unité atNa Nombre d’atome de sodium / A Activité de 90Sr à l’équilibre en solution Bq/L A0 Activité initiale de 90Sr en solution Bq/L
A , B , B& Coefficient de Debye Hückel pour le model B-dot / , Å-1 , /
ai Activité chimique de l’ion i en solution mol/L *
ia Activité chimique de l’ion i dans le solide mol/g *
C Concentration en strontium à l’équilibre en solution mol/L * C0 Concentration initiale en strontium dans la solution mol/L * Cc Concentration des fractions cumulées mol/L * CEC Capacité d’échange cationique méq/g * d Distance entre les plans diffractés Å Dk Nombre de Damköhler /
DzD EzE Ion dans le liquide mol/L * DzD Ez
E Ion dans le solide mol/g *
δ ε Ordre partiel de réaction / SrNa2
échangeG∆ → Enthalpie libre d’échange (par mole de cation) kJ/mol
SrNa2atetantiG∆ → Différence d’ enthalpie libre entre titanate au sodium et titanate
au strontium kJ/mol
SrNa2aqG∆ → Différence d’enthalpie libre d’hydratation entre sodium et
strontium kJ/mol
∆GL Energie libre de réaction approximée à partir du modèle de Langmuir
kJ/mol
∆H Enthalpie de réaction kJ/mol ∆S Entropie de réaction kJ/mol.K ε Porosité géométrique / F Débit de solution en dynamique mL/min FD Facteur de décontamination / FDc Facteur de décontamination par cumul des fractions
d’échantillonnage /
γi Coefficient d’activité de l’ion i dans le liquide /
iγ Coefficient d’activité de l’ion i dans le solide /
h Hauteur du monolithe cm [i] Concentration de l’ion i en solution mg/L *
][ i Concentration de l’ion i dans le solide mg/g *
I Force ionique méq/L * k Constante de vitesse de réaction mg/g/ min1/2 * kdiff Constante de vitesse de diffusion méq/g/min1/2 * Kd Coefficient de distribution mL/g KTh Coefficient cinétique de Thomas mL/mg/min
EDK Constante d’équilibre de la réaction d’échange ionique D/E /
ED
SK Coefficient de sélectivité de la réaction d’échange ionique D/E /
L Constante de stabilité conditionnelle / Lc Longueur caractéristique du transport par convection m λ Longueur d’onde Å
m Masse d’adsorbant mg mlit Masse d’adsorbant dans le lit g Mads Masse molaire de l’adsorbant g/mol
θb Demi angle de diffraction Å φ Phase aqueuse / q Débit volumique mL/min Qbed Capacité maximale du lit méq/g * Qdyn Capacité utile d’un monolithe méq/g * Qmax Quantité maximale adsorbée par le solide à l’équilibre méq/g * Qt Quantité adsorbée par le solide à l’instant t mg/g * Qtot Capacité totale d’un monolithe méq/g * r Vitesse de réaction / r i Rayon ionique de l’ion i Å R Constante des gaz parfaits J/mol/K T Température °C Ts Temps de séjour dans une colonne min Tréac Temps de réaction d’échange min [T] Concentration totale en ions en solution méq/L * v Vitesse convective/vitesse de pore m/s V Volume de solution mL Vlit Volume d’adsorbant dans la colonne mL Vmacro Volume des macropores du monolithe mL VSM Volume solution mère mL Xi Fraction équivalente de l’ion i dans le liquide /
iX Fraction équivalente de l’ion i dans le solide /
zi Charge ionique de l’ion i /
* Ces unités sont les plus couramment utilisées dans ce mémoire. Il est cependant
possible de passer des grammes en moles en divisant par la masse molaire de l’élément. Et de
passer en milliéquivalent en multipliant ensuite par la charge de l’élément. Les analyses par
chromatographie ionique nous donnent des concentrations en mg/L, afin de comparer les
résultats entre eux, il est souvent intéressant de tenir compte de l’élément (masse molaire et
charge) et donc d’exprimer les concentrations en méq/L.
1
INTRODUCTION
0 INTRODUCTION
Introduction
3
L’industrie nucléaire produit différents types d’effluents radioactifs pour lesquels des
traitements adéquats sont nécessaires afin d’en extraire les éléments radioactifs qui les
contaminent (césium 137 et strontium 90 principalement). Différentes techniques peuvent être
utilisées pour traiter ces effluents mais la difficulté majeure provient essentiellement de leur
composition souvent complexe, caractérisée par une force ionique élevée, comportant de
nombreux ions (essentiellement alcalins et alcalino-terreux) et une grande variabilité de pH. C’est
pourquoi peu de techniques sont mises en œuvre à l’échelle industrielle. Parmi elles, les procédés
utilisant des particules solides capables de fixer les radioéléments sont les plus simples à mettre en
place et les plus robustes. Ces particules peuvent être soit introduites préformées dans l’effluent
ou formées in situ. Actuellement, le procédé industriel utilisé, correspond au second cas. Le
strontium des effluents est récupéré par co-précipitation de l’ion strontium à l’aide de sulfate de
baryum. Les boues obtenues sont ensuite conditionnées par enrobage dans une matrice bitume.
L’arrêt de cette filière et l’absence aujourd’hui de matrices cimentaires ou verres
permettant l’incorporation d’une grande quantité de sulfate, ainsi que la chute importante du
facteur de décontamination du traitement chimique avec la salinité de l’effluent, nécessite une
R&D importante sur une alternative à ces procédés.
Une des alternatives possible consiste à extraire les radioéléments par échange ionique sur
un adsorbant sélectif. La décontamination par une phase solide est basée sur un mécanisme de
sorption qui est un phénomène complexe dépendant non seulement des caractéristiques du
matériau (composition chimique, structure, porosité), mais aussi des propriétés chimiques du
radioélément (spéciation, hydratation) et des paramètres de la solution (pH, température,
concentration, force ionique, complexant organique et inorganique).
Compte tenu de ces interactions entre le solide, la solution et le polluant, l’objectif de
cette thèse est donc de choisir un ou plusieurs adsorbants capables de retenir le strontium des
effluents de manière sélective et quantitative. La synthèse de ces adsorbants doit être
reproductible et industrialisable. Et, au-delà de leurs propriétés de sélectivité du strontium, les
matériaux choisis doivent être compatibles avec les filières de déchets existantes.
La première partie de ce mémoire présente le contexte de la décontamination d’effluents
chimiques radioactifs, ainsi que les objectifs du présent travail. La deuxième partie correspond au
bilan de la recherche bibliographique sur les échangeurs ioniques potentiels pour la
décontamination du strontium en solution. Trois familles de matériaux sont alors décrites : les
titanates de sodium, les zéolithes et les sulfures.
Le chapitre III s’attache à la synthèse et la caractérisation de ces matériaux pour
déterminer leurs propriétés physico-chimiques.
Introduction
4
Les deux chapitres suivants sont dédiés à la compréhension des mécanismes de rétention
du strontium par ces matériaux : dans le chapitre IV, nous nous sommes attachés à exposer
précisément les modèles de cinétique et de thermodynamique. Ceux-ci seront appliqués dans le
chapitre V afin de montrer la sélectivité de nos matériaux pour le strontium ainsi que les effets de
certains paramètres sur cette sélectivité, comme le pH, la présence de sodium ou de calcium.
Cette partie majeure du mémoire reprend également les résultats obtenus sur des solutions
radioactives classiques (de type effluents de stations de traitement des effluents liquides) ou plus
atypique (de type eau de mer contaminée).
Le chapitre VI présente les premiers résultats de décontamination en continu obtenus en
faisant circuler un effluent sur un monolithe de zéolithe A. Cette partie explicite l’impact du débit
de traitement sur la rétention du strontium sur ce solide.
Enfin, une conclusion générale est faite sur ce travail et les perspectives de la suite de
cette thèse sont présentées.
5
CHAPITRE I
GENERALITES SUR LA
GESTION DES DECHETS
NUCLEAIRES
1 CHAPITRE I
GENERALITES SUR LA GESTION DES DECHETS NUCLEAIRES
Généralités sur la gestion des déchets nucléaires
7
1.1 RETRAITEMENT DU COMBUSTIBLE NUCLEAIRE USE
Figure 1 : Cycle du combustible nucléaire en France en 2008 [1]
Après son utilisation en réacteur, le combustible usé contient 95% d’uranium, 1% de
plutonium et 4% de produits de fission et d’actinides mineurs. L’objectif du retraitement du
combustible est de récupérer les matières valorisables d’un point de vue énergétique (uranium et
plutonium) et de séparer, conditionner et entreposer les déchets ultimes (produits de fission,
actinides mineurs et éléments de structure des combustibles usés).
La France a fait le choix du retraitement afin d’une part d’utiliser au maximum le pouvoir
énergétique du combustible nucléaire mais également de garantir une bonne gestion des déchets
générés par cette industrie. Ainsi, à sa sortie du réacteur, le combustible est refroidi en piscine,
d’abord à proximité du réacteur, puis à l’usine de la Hague, en Normandie. C’est là que l’uranium
et le plutonium sont extraits du combustible par un procédé industriel appelé PUREX. Par
exemple, au cours de l’année 2008, 1 200 tonnes de combustibles usés ont été déchargées des
Chapitre I
8
réacteurs, dont 850 tonnes traitées à la Hague. 810 tonnes d’uranium et 8,5 tonnes de plutonium
ont ainsi été récupérés. Depuis son entrée en service en 1966, l’usine AREVA La Hague a traité
plus de 25 000 tonnes de combustibles nucléaires usés [2].
Pour réutiliser cet uranium en réacteur, il est nécessaire de le ré-enrichir en uranium 235,
seul isotope de l’uranium à posséder un pouvoir fissile. Environ le tiers de l’uranium récupéré par
le procédé PUREX est ré-enrichi dans l’usine Tomsk 7 en Sibérie, pour produire les combustibles
à l’uranium de retraitement enrichi. Ils sont utilisés dans les réacteurs de la centrale de Cruas
(Ardèche). Les deux tiers d’uranium restants sont entreposés sur le site de Pierrelatte, en attente
de recyclage en réacteur à eau, ou, plus tard, dans les réacteurs de quatrième génération [1].
L’intégralité du plutonium extrait des combustibles usés est recyclée sous forme de
combustible MOX (oxyde mixte d’uranium et de plutonium) dans l’installation nucléaire de base
Melox sur le site de Marcoule. Sur les 58 réacteurs français, 22 peuvent utiliser du combustible
MOX, à hauteur de 30%. Dans un EPR (réacteur de troisième génération, dont un est en cours
de construction en France, à Flamanville dans la Manche), cette proportion pourrait monter à
100%. Aujourd’hui, le MOX usé n’est pas retraité. Il est entreposé dans l’optique d’un
retraitement futur. Les matières valorisables pourraient alimenter le parc de réacteurs de
quatrième génération, prévu à partir de 2040.
1.2 GESTION DES DECHETS
En France, les matières et déchets radioactifs produits depuis le début du XXe siècle sont
principalement issus de cinq secteurs économiques [3] :
℘ le secteur électronucléaire : principalement les centrales nucléaires de production
d'électricité, les usines de l'amont du cycle du combustible (extraction et traitement du
minerai d'uranium, conversion chimique des concentrés d'uranium, puis enrichissement et
fabrication du combustible) et les usines de l'aval du cycle (traitement du combustible usé
et recyclage) ;
℘ le secteur défense : principalement les activités liées à la force de dissuasion et à la
propulsion nucléaire de certains bâtiments, ainsi que des activités de recherche associées;
℘ le secteur recherche : les activités de recherche dans le domaine du nucléaire civil ;
℘ le secteur industrie non électronucléaire : notamment l'extraction de terres rares, la
fabrication et l’utilisation de sources scellées ;
℘ le secteur médical : activités thérapeutiques, de diagnostic et de recherche.
Généralités sur la gestion des déchets nucléaires
9
1.2.1 Déchets solides
Les déchets solides sont classés en 3 catégories (A, B ou C) en fonction de leur période
radioactive, vie courte (période radioactive < 30 ans) et ou vie longue (période radioactive >
30 ans), et en fonction de leur activité. Il existe les déchets de très faible, faible, moyenne ou forte
activité (TFA,FA, MA, HA) suivant la nature et l’intensité des rayonnements ionisants qu’ils
émettent. Suivants leurs caractéristiques, leur gestion est différente.
Pour exemple, dans l’usine de retraitement, les produits de fission et les actinides mineurs
sont vitrifiés et entreposés sur le site de La Hague, en attendant une solution de stockage. Les
études des scenarii de stockage en formation géologique profonde sont définies par la loi de 2006.
Les gaines métalliques de structures des combustibles, qui constituent aussi des déchets, sont
compactées et entreposées à La Hague en attendant des solutions de stockage pertinentes.
L’ensemble des filières de gestions actuelles est repris dans le Tableau 1 ci après :
Chapitre I
10
Vie courte (VC) Vie longue (VL)
Très faible activité (TFA)
<100 Bq/g
Déchets TFA
Origine : démantèlement des installations nucléaires ou d’industries classiques utilisant des matériaux naturellement radioactifs.
déchets inertes (béton, gravats, terres)
Gestion : Alvéole de stockage de surface de Soulaines (Aube)
Faible activité (FA)
100 à 105 Bq/g
Déchets FA-VL Catégorie B
Origine : déchets radifères et graphite
Gestion actuelle : entreposage, en attente d’un site de stockage,
essentiellement sur les sites de La Hague et Marcoule
Possibilité future : Stockage à faible profondeur (15-
300 mètres)
Moyenne activité (MA)
105 à 108 Bq/g
Déchets FMA-VC Catégorie A
Origine : exploitations, maintenance, et démantèlement des installations
nucléaires
Gestion : Stockage de surface de Soulaines (Aube)
Déchets MA-VL Catégorie B
Origine : Coques, embouts, boues de traitement des effluents.
Gestion actuelle : Compactage, Cimentation
Entreposage en surface à La Hague ou Marcoule
Stockage à l’étude : Centre de stockage profond (500 mètres)
Haute activité (HA)
>108 Bq/g
Déchets HA Catégorie C
Origine : Produits de fission et actinides mineurs
Gestion actuelle : Vitrification et stockage sur le lieu de production
Stockage à l’étude : Centre de stockage profond (500 mètres)
Tableau 1 : Classification des déchets solides [4]
Généralités sur la gestion des déchets nucléaires
11
1.2.2 Gestions des déchets liquides
Les effluents radioactifs à traiter ont plusieurs origines. Dans le cadre d’une centrale
nucléaire classique de type REP (Réacteur à Eau sous Pression), les effluents à décontaminer
avant un rejet ultime dans l’environnement contiennent essentiellement:
℘ des produits de fission engendrés par la réaction nucléaire au sein du combustible
Dans le cadre du traitement d’effluents radioactifs, les effluents liquides de très faible
activité, peuvent être directement rejetés dans l’hydrosphère pour bénéficier de l’effet dilution-
dispersion. Ces rejets sont strictement réglementés par des normes, des autorisations de rejets,
des études d’impact environnemental. Le volume annuel moyen des effluents liquides radioactifs
rejetés en mer , de 1987 à 2000, est d’environ 156 000 m3 [17].
Les effluents de forte activité sont évaporés. Le chauffage de l’effluent jusqu’à sa
température d’ébullition permet de concentrer l’activité radiologique dans un volume réduit. Le
résidu sec obtenu est alors conditionné dans une matrice vitreuse.
Pour les effluents de faible et moyenne activité, plusieurs traitements sont possibles :
l’évaporation, la précipitation, les échangeurs d’ions, les procédés membranaires et les procédés
électriques. Les trois premières techniques sont les plus utilisées, notamment pour le traitement
de volume important.
Chapitre I
16
En effet, une grande partie des effluents de faible et moyenne activité (FA-MA) sont
évaporables, ce qui permet de traiter le concentrât comme un déchet solide. Il rejoint ainsi le
cycle de traitement des déchets solides radioactifs, et sera selon son niveau de radioactivité,
incinéré, compacté et, cimenté ou bien vitrifié.
Cependant, ce procédé reste particulièrement coûteux (forte consommation d’énergie) et
certaines compositions d’effluents sont incompatibles avec un traitement par évaporation,
notamment les effluents de forte salinité (entartrage), les effluents contenant des composés
organiques (formation de mousse et réaction violente à haute température avec les nitrates), les
effluents contenants des espèces telles que les chlorures, les sulfates et les phosphates (corrosion
haute température).
Le traitement chimique, présenté Figure 3, est souvent la seule technique permettant de
traiter les effluents qui ne peuvent être traités par évaporation.
Le traitement chimique consiste à introduire ou former des particules solides dans
l’effluent liquide afin de transférer les radioéléments de la phase liquide vers la phase solide. Ces
particules sont ensuite séparées au cours d’une seconde étape généralement par filtration ou
décantation. A l’issue du traitement chimique, on obtient une phase aqueuse décontaminée et une
phase riche en particules solides contenant les radioéléments qui sera conditionnée de manière
appropriée en fonction de sa radiotoxicité et de son caractère confinant ou non.
Actuellement, le 137Cs des effluents radioactifs est récupéré grâce à un échangeur ionique,
le précipité préformé de ferrocyanure mixte nickel/potassium K2NiFe(CN)6. Si l’on considère
cette formule, l’échange devrait être de un atome de césium par atome de potassium. Cependant
la capacité d’échange expérimentale n’est pas totale (difficultés à atteindre les sites cationiques au
cœur des précipités) [18]. Une thèse est actuellement en cours à l’Institut de Chimie Séparative de
Marcoule, afin d’étudier d’autres voies de récupération du césium. Par exemple, par greffage du
ppFeNi sur des billes de verre.
Le strontium des effluents de faible activité est récupéré par co-précipitation avec du
fer (III) à pH 10,5 et le strontium des effluents non évaporables d’activité moyenne par
co-précipitation avec du sulfate de baryum à pH basique (pH = 9).
Généralités sur la gestion des déchets nucléaires
17
Figure 3 : Gestion actuelle des liquides à la station de traitement des effluents liquides
Le sulfate de baryum est très sensible à la composition chimique et à la force ionique de
l’effluent, ce qui le rend moins sélectif vis-à-vis du strontium. De plus, la gestion du sulfate de
baryum par les filières de conditionnement des déchets actuelles nécessite une R&D importante,
du fait d’une part de l’arrêt progressif de la filière bitume, et d’autre part, de l’absence aujourd’hui
de matrices cimentaires ou verres permettant l’incorporation d’une grande quantité de sulfates.
1.5 PROCEDE ALTERNATIF
Le procédé développé dans le cadre de cette thèse, consiste à remplacer le traitement
chimique, par cuves successives, par un traitement dynamique en colonne utilisant les propriétés
de sorption de certains matériaux à l’égard des radioéléments concernés. Dans le cadre de cette
thèse, il s’agit d’adsorbants minéraux spécifiques du strontium. La méthodologie d’étude étant
Chapitre I
18
basée sur deux axes, une thèse est réalisée en parallèle par Carole Delchet (ICSM) sur la
décontamination en césium « Nano-composites pour la séparation et le confinement d’éléments
mobiles ».
En plaçant le matériau adsorbant sélectif du radioélément dans une colonne et en faisant
circuler l’effluent à travers celui-ci, nous aurions alors un système compact de décontamination
pour le strontium, comme schématisé sur la Figure 4.
Figure 4 : Colonne de rétention de radioéléments
Le procédé alternatif a pour vocation première d’accroître l’efficacité de décontamination
pour les effluents complexes, c'est-à-dire les effluents non évaporables pour lesquels un
traitement chimique n’est pas optimal. La mise en place d’un tel système permettrait également de
minimiser les volumes de boues et donc de déchets secondaires, mais aussi d’éviter la présence de
sulfates, incompatibles avec les filières de déchets actuels.
Généralités sur la gestion des déchets nucléaires
19
Il serait possible de mettre en série plusieurs colonnes contenant chacune un adsorbant
spécifique de chacun des radioéléments (Sr, Cs,…) à capturer ou bien de réaliser une colonne
contenant plusieurs adsorbants ensemble.
Ce changement de procédés permettrait également la décontamination en strontium de
chaque effluent indépendamment les uns des autres, par exemple en plaçant une colonne de
rétention en sortie de chaque installation.
Avant de travailler à la mise en forme de l’adsorbant sélectif du strontium pour un
procédé en colonne, il est nécessaire de définir les meilleurs sorbants inorganiques sélectifs du
strontium. L’objectif premier de cette première thèse sur ce sujet au CEA/Marcoule a donc été
de tester plusieurs adsorbants potentiels en mode « batch », puis d’en déterminer leurs propriétés
intrinsèques de sorption. L’étude de la cinétique de sorption, puis des isothermes de sorption
pour en déduire certaines données thermodynamiques est le cœur de cette thèse. Ce travail a été
réalisé en faisant varier les paramètres expérimentaux comme le pH, la concentration initiale
d’ions en solution ainsi que la présence d’ions compétiteurs tels que le calcium. En dernier lieu,
quelques essais en mode dynamique ont été réalisés afin d’évaluer la potentialité de ce procédé
alternatif.
21
CHAPITRE II
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE:
CHOIX DES MATERIAUX
2 CHAPITRE II
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE:
CHOIX DES MATERIAUX
Etude bibliographique : choix des matériaux
23
Lors de la recherche bibliographique sur les adsorbants potentiels du strontium, trois
familles de matériaux se sont distinguées par des propriétés intéressantes pour la décontamination
en strontium : forte capacité d’échange cationique, sélectivité pour le strontium vis-à-vis d’autres
cations comme le calcium. La littérature très succincte concernant la famille des sulfures montre
que ces matériaux auraient des propriétés de sorption sur l’ensemble de la gamme de pH. La
famille des zéolithes est beaucoup utilisée comme échangeurs ioniques pour d’autres applications
(adoucisseurs d’eau, rétention de métaux lourds, dépollution,…) et la zéolithe de type A serait
adaptée pour la sorption du strontium. Quant à la famille des titanates de sodium, il s’agit d’une
famille déjà connue pour ses propriétés de sorption du strontium ou du césium, l’une de ses
structures est notamment utilisée de manière industrielle pour la rétention de ces éléments
(SrTreat®, entreprise finlandaise Selion Oy). Ce sont ces trois familles qui vont être décrites dans
ce paragraphe.
2.1 LE NONATITANATE DE SODIUM : NA4TI9O20.XH2O
Les titanates présentent une forte capacité à retenir les cations monovalents et
divalents [19-38]. Les titanates d’alcalins, et particulièrement de sodium, sont étudiés et utilisés
pour la sorption du strontium en raison de leurs structures qui leurs confèrent une capacité
supérieure à celle des structures de type zéolithe et argile [39].
Dans cette famille, il existe différents types de composés :
℘ Le silicotitanate de sodium ou titanosilicate de sodium, de formule théorique
Na2Ti2O3(SiO4).2H2O [19-23]
℘ Le titanate de monosodium NaTi2O5.xH2O [24, 25]
℘ Le peroxotitanate de sodium (amorphe) de formule générale HvNawTi2O5.(xH2O)[yHzO2]
avec v+w=2 et 0<z<2 [25, 40]
℘ Le titanate de sodium cristallisé de type Na2Ti6O13, Na2Ti3O7 et Na16Ti10O28 [26-29]
℘ Le titanate de sodium commercial, SrTreat® [41]
℘ Le nonatitanate de sodium, de formule théorique Na4Ti9O20,xH2O [22, 23, 30-38]
℘ Le nonatitanate de sodium dopé au fer, pour la récupération du nickel [42]
Nous avons décidé d’étudier uniquement le nonatitanate de sodium Na4Ti9O20.xH2O car
ses propriétés de sorption semblent supérieures aux autres matériaux de la famille. De plus, le
nonatitanate de sodium semble le plus sélectif du strontium en milieu alcalin [19, 32, 37]. Lorsque
Chapitre II
24
le pH diminue, les titanates de sodium ont, d’une manière générale, tendance à se transformer en
titanate d’hydrogène, dont les performances de sorption pour le strontium sont beaucoup plus
faibles [34].
La grande majorité des titanates est synthétisée par voie solide à haute température [32].
De nombreux titanates sont préparés par voie solide, à partir de carbonates de sodium et de
dioxyde de titane. Il s’agit d’une réaction en phase solide à haute température (de l’ordre de
900°C). Clearfield et Lehto [32] ont montré dès 1988 qu’il était possible d’élaborer des titanates
de sodium par voie sol-gel, simplifiant ainsi la méthode de synthèse. Cette voie de synthèse se
réalise en plusieurs étapes :
- mélange des précurseurs de titane et de sodium. Dans tous les cas le précurseur de
sodium est de la soude. Selon les différents auteurs, plusieurs précurseurs de titane peuvent être
utilisés. Dans la synthèse originelle, Clearfield et Lehto utilisent de l’isopropoxide de titane (TiIP)
et de la soude en solution méthanolique avec différents rapports Na/Ti. D’après ces auteurs, le
titanate de sodium se forme par gélification au cours de l’oxydation en présence d’air. De plus, il
semble qu’un excès de sodium soit nécessaire pour former Na4Ti9O20 [32]. Tous les auteurs qui
étudieront le nonatitanate utiliseront le même type de voie de synthèse que celle décrite en 1988
par Clearfield et Lehto [22, 30, 36]. Behrens et al.[30] ont légèrement simplifié la synthèse en
mélangeant directement l’isopropoxyde de titane à de la soude en excès (rapport molaire Na/Ti
d’environ 4) en milieu aqueux et non en milieu méthanolique.
- L’obtention du gel après le mélange des précurseurs de titane et de sodium est réalisée
soit par augmentation de la température, 3h à 108°C pour la synthèse « aqueuse » développée par
Behrens et al. [30], ou alors par réaction à l’air.
- Dans la plupart des cas, après la gélification, un traitement hydrothermal est effectué
dans le but d’obtenir une phase plus cristallisée. Il semble néanmoins qu’en absence de
cristallinité et donc sans traitement hydrothermal, le titanate de sodium amorphe ainsi obtenu soit
plus efficace pour les essais de sorption [30, 37]. La température de traitement, ainsi que le temps
de traitement influent directement sur la cristallinité du nonatitanate obtenu. Ce point sera
d’ailleurs étudié dans la première partie expérimentale de ce manuscrit. En faisant varier le temps
et la température de synthèse, on obtient des nonatitanates de sodium de cristallinité différente et
de capacité variable [30]. Plus les nonatitanates sont amorphes, plus la capacité du matériau pour
le strontium augmente. En effet, une forte cristallinité serait défavorable à la diffusion des ions
entre les couches et donc à l’échange ionique sodium/strontium [31, 33, 34, 43]. Lorsque
Etude bibliographique : choix des matériaux
25
l’échantillon reste longtemps à température élevée, la cristallisation augmente et la capacité de
sorption diminue [34, 37]. Ce point sera étudié et développé au cours de cette thèse.
D’après la bibliographie, il n’y a pas de description précise de la structure du nonatitanate
de sodium. Néanmoins, le nonatitanate de sodium aurait une structure en feuillet avec des
couches d’oxyde de titane et des ions sodium hydratés intercalés entre ces feuillets (Figure 5). Le
titane possède une charge 4+. Il existe donc dans les couches d’octaèdre de TiO2 une
surstœchiométrie en oxygène, induisant une charge négative en surface de ces couches. Cette
charge portée par les feuillets est alors compensée par le sodium de charge positive dans les
interfeuillets. Par diffraction des rayons X, on observe quatre pics très larges pour des angles 2θ
d’environ 10°, 24°, 28° et 48° [32].
La distance entre les couches de TiO6 dépendrait de la quantité d’eau dans le produit et
donc des conditions de synthèse. D’après Clearfield, l’espace peut varier de 6,9 Å pour une
poudre sèche à 10 Å pour une poudre hydratée [32]. D’après Cahill, l’espace entre les feuillets
peut mesurer entre 8 et 9,9 Å [31].
Figure 5 : Structure cristallographique du nonatitanate de sodium [37]
Si la structure du nonatitanate de sodium n’est pas clairement résolue, en revanche la
structure du silicotitanate de sodium, représentée Figure 6, a pu être déterminée par Clearfield,
Tripathi et al. [19]. D’après ces auteurs la moitié des ions sodium sont sur des sites de la structure
alors que l’autre moitié est dans les « tunnels » avec des molécules d’eau dans un arrangement
désordonné (sodium avec leur sphère d’hydratation). Il est d’ailleurs possible d’échanger des ions
sodium par des protons en lavant la poudre à l’acide chlorhydrique HCl 0,1M. Clearfield, Tripathi
et al. ont ensuite réalisé ces mesures en présence de césium dans cette structure.
Na Na Na Na
Chapitre II
26
Figure 6 : Structure de titanosilicate de sodium [19]
Vue d'en haut (suivant l'axe c) de titanosilicate de sodium présentant les quatre octaèdres TiO6 (jaune) liés aux octaèdres de silicates (orange) par des ions oxygènes (rouge). Dans les tunnels se situent les cations Na+ (vert) et les molécules d'eau (rouge). La molécule de Na+ (verte) sur le
dessus des silicates (orange) correspond à l’ion sodium bloqué dans la structure.
Dans le cas d’une sorption de césium dans ces matériaux, il semble que les cations se
fixent plus facilement dans les sites « tunnels » plutôt que dans les sites du réseau, occupés
préalablement par le sodium. Les ions sodium présents dans les sites tunnels sont plus mobiles et
s’échangent plus facilement avec le césium de la solution, conférant ainsi au matériau ses
propriétés de sorbant.
Les nonatitanates de sodium présenteraient des caractéristiques d’échangeurs ioniques en
raison de la présence de sodium mobile entre les couches d’octaèdre d’oxyde de titane [37].
De plus, le nonatitanate de sodium serait meilleur pour récupérer le strontium que les
silicotitanates, notamment en présence de complexant comme l’EDTA mais il serait plus sensible
à la présence de calcium comme ion compétiteur [22, 34].
La capacité d’échange cationique théorique, c'est-à-dire le nombre de sodium échangeable
dans le solide peut se calculer à partir de la masse molaire d’un nonatitanate non hydraté
Na4Ti9O20 (842,86 g/mol) et en considérant que l’on peut échanger tous les cations sodium Na+
présents dans la structure. Ce calcul donne une capacité théorique pour le nonatitanate de sodium
de 4,74 méq/g.
S’il y a un réel échange ionique de 2 sodium pour 1 strontium, alors les essais d’extraction
doivent s’accompagner d’un départ d’ions sodium du solide vers la solution aqueuse.
Lehto et al. [35] aboutissent à cette conclusion en mesurant la quantité de sodium relarguée lors
d’essais d’extraction de cation Sr2+ à pH 5,8 (sans sel de fond). Ils mesurent une quantité de
Etude bibliographique : choix des matériaux
27
sodium en solution de 4,54 méq/g qui est proche de la capacité d’échange théorique de
4,74 méq/g [32, 43].
D’après Lehto et al., la composition du nonatitanate de sodium après sorption dépend du
pH de la solution. Pour un pH de 5,8 le nonatitanate de sodium hydraté, en présence de
strontium, se transforme en titanate de strontium selon la réaction suivante :
Tableau 10 : Détermination de la quantité maximale adsorbée en strontium et de la constante de vitesse initiale de sorption à partir du modèle de Ho et Mc Kay.
Grâce à la Figure 32 et à la Figure 33, ainsi qu’aux valeurs du Tableau 10, on peut dire que
l’échange est quasiment total (>91%) pour les nonatitanates de sodium synthétisés à une
température comprise entre 100°C et 170°C. Pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 60°C
l’équilibre n’est pas atteint. Pour le nonatitanate de sodium à 200°C, le matériau n’échange pas la
totalité des ions sodium de la structure. Une partie des ions sodium du matériau serait bloquée
Adsorption sur poudre
91
dans celle-ci. Sylvester et al.[37] ont aussi observé que les nonatitanates de sodium synthétisés à
200°C étaient moins favorables à la rétention du strontium que les échantillons synthétisés à
170°C et expliquaient ces résultats par la différence de cristallinité entre les échantillons
synthétisés à « basse » et « haute » température. Nous confirmons ce résultat ici et l’expliquons
par la présence d’une seconde phase de titanate dans laquelle les ions sodium ne seraient pas
échangeables par du strontium.
Quant à la zéolithe A, elle échange la totalité des ions sodium qu’elle contient.
Il existe différentes hypothèses au fait que l’échange ne soit pas de 100% mais seulement
de 91-94% pour les nonatitanates de sodium synthétisés à basse température : soit une partie des
ions sodium est bloquée dans la structure et ainsi ne peut être échangée, soit une partie des ions
sodium s’échange avec des protons présents en solution. La bibliographie propose l’hypothèse
d’une possibilité d’échange sodium/protons qui impliquerait un échange non total à cause de
cette compétition avec les protons [91].
5.1.1.2 Modèle diffusif
L’utilisation du modèle diffusif détaillé au paragraphe 4.3.1.2 (page 74) va nous permettre
de déterminer les étapes limitant la réaction. Suivant les hypothèses développées au paragraphe
4.3.1.2, la réaction peut être limitée par la diffusion des ions dans la couche limite solution/solide
ou bien par la diffusion des ions dans le solide. Lorsque l’on applique le modèle diffusif de Weber
et Morris aux données expérimentales, on obtient le graphique représenté Figure 34. Pour des
raisons de clarté, les échantillons à température inférieure à 170°C ayant un comportement
similaire, seul le nonatitanate à 160°C est représenté.
Chapitre V
92
0 1 2 3 4 5 6 70,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
τ
temps1/2 (heure
1/2)
Figure 34 : modèle diffusif de Weber et Morris
nonatitanate de sodium à (����)160°C, (����)200°C et (����) zéolithe A
Les courbes en t mettent en évidence deux comportements différents suivant la
température d’élaboration du nonatitanate de sodium et suivant le matériau. Pour les
nonatitanates de sodium synthétisées à température inférieures à 170°C, on observe deux
portions linéaires, avant d’atteindre l’équilibre. La première partie linéaire est due à la diffusion
des ions dans la couche limite et la deuxième correspond à la diffusion des ions dans les
particules.
Pour les poudres synthétisées à une température supérieure à 170°C, on observe une seule
portion linéaire qui semble passer par l’origine. Il n’y a alors qu’une seule étape de diffusion
limitante. D’après Crini et al. [79] celle-ci correspond à la diffusion des ions dans les particules.
Le comportement de la zéolithe est similaire à celui d’un nonatitanate de sodium
synthétisé à une température inférieure à 170°C, c’est-à-dire que la réaction d’échange est limitée
par deux phénomènes de diffusion : la diffusion des ions dans la couche limite et celle dans les
particules.
Il est possible de déterminer des valeurs de constantes de vitesse dans la couche limite et
au sein des particules à partir des pentes de régression linéaire. Ces valeurs sont reprises dans le
Tableau 11 : constante de vitesse de diffusion entre la solution et les 2 matériaux étudiés
Bien que les régressions linéaires soient réalisées sur un nombre limité de points, il est
possible de dégager une tendance à partir de ces résultats expérimentaux. La constante de vitesse
dans la couche limite est du même ordre de grandeur pour les échantillons synthétisés à une
température comprise entre 100°C et 170°C. Elle semble légèrement inférieure pour l’échantillon
synthétisé à 60°C.
La constante de vitesse intraparticulaire est sensiblement équivalente pour les matériaux
synthétisés à une température inférieure à 170°C alors qu’elle est beaucoup plus élevée pour le
nonatitanate de sodium synthétisé à 200°C. La diffusion intraparticulaire est donc plus rapide
pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 200°C. Il est possible que cette vitesse soit reliée à la
morphologie des grains de poudres.
La constante de vitesse intraparticulaire de la zéolithe A est faible et comparable à celle
obtenue pour les nonatitanates de sodium synthétisés à basse température.
Il est à souligner que les vitesses de diffusion dans la couche limite et entre les particules
semblent indépendantes de la surface spécifique de nos poudres.
5.1.2 Effet de la concentration en sodium en solution
La station de traitement des effluents recueille les effluents liquides de plusieurs
installations. La composition du mélange à traiter est donc variable, et dépend de la provenance,
des quantités et des concentrations de chaque installation. Par exemple, entre deux campagnes de
traitement, la concentration en sodium peut varier considérablement.
Nous avons étudié l’effet de la variation de la concentration en sodium sur la capacité de
sorption du strontium. Ainsi, en mode discontinu plusieurs tests ont été réalisés avec une
concentration constante en nitrate de strontium de 1,14 mmol/L et une concentration variable en
acétate de sodium de 0,1 M à 1 M sur un échantillon de chacune des familles étudiées, soit un
nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C et une zéolithe A (échantillon Z-e).
Chapitre V
94
La représentation du taux de sodium échangé par le strontium τ en fonction de la
concentration initiale de sodium en solution, est donnée sur la Figure 35 ci-dessous :
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,00,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
τ
[Na] (mol/L)
Figure 35 : taux d’échange du sodium du solide par le strontium en solution,
en fonction de la concentration initiale de sodium en solution (����) nonatitanate de sodium à 100°C,et (����) zéolithe A
D’après la Figure 35, la sorption du strontium par les deux matériaux étudiés,
nonatitanate de sodium à 100°C et zéolithe A, est affectée par la présence de sodium en solution.
En effet, l’augmentation de la concentration en sodium en solution de 0,1 M à 1 M, fait chuter le
taux d’échange sodium/strontium de 91% à 29% pour le nonatitanate de sodium synthétisé à
100°C et de 79% à 16% pour la zéolithe A. Le nonatitanate de sodium semble légèrement moins
affecté que la zéolithe A par la présence de sodium initialement en solution.
L’évolution du taux d’échange sodium/strontium en fonction de la teneur en sodium,
implique également de travailler à une concentration équivalente totale en cations constante ([T]
en méq/L défini par l’équation (E32) au paragraphe 4.4.1.1.1 page 78) lors de l’étude de sélectivité
des matériaux.
5.1.3 Effet du pH
Tout d’abord, comme décrit au paragraphe 4.2.2 (page 71), le pH a une influence sur la
charge de surface de nos matériaux. Une mesure de potentiel zéta est réalisée sur nos deux
matériaux grâce au système Zetasizer de Malvern et nous permet de déterminer le point
isoélectrique de nos matériaux. Une faible quantité de poudre est mise en suspension dans une
solution d’acétate de sodium de concentration 0,01 mol/L dont le pH est ajusté par ajout d’acide
Adsorption sur poudre
95
nitrique ou de soude. Les résultats obtenus pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C et
la zéolithe A (échantillon Z-a) sont représentés Figure 36.
2 4 6 8 10 12-60
-40
-20
0
20
40
60
ζ (m
V)
pH
Figure 36 : mesure du potentiel zéta en fonction du pH
(����) nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C et (����) zéolithe A
Les deux matériaux n’ont pas le même comportement. Le nonatitanate de sodium a un
point isoélectrique pour un pH compris entre 2 et 3, et la zéolithe A pour un pH de 7. Cela
signifie que la surface d’un nonatitanate de sodium est chargé négativement sur une large gamme
de pH (>2,5) alors que la zéolithe n’est chargé négativement qu’à pH basique (>7).
Puisqu’une surface chargée négativement a tendance à adsorber les cations en solution, le
nonatitanate de sodium devrait donc être meilleur que la zéolithe pour des pH compris
entre 3 et 7.
D’après la bibliographie [35, 61], le pH des effluents est un facteur très important sur les
propriétés de rétention des adsorbants, car les propriétés physico-chimiques des solutés et des
solides en solution varient avec le pH.
Afin de voir l’influence des protons au cours de l’échange sodium/strontium, 20 mL
d’une solution à 1,14 mmol/L en nitrate de strontium sans acétate de sodium est mise en contact
avec 10 mg de nonatitanate de sodium synthétisés à différentes températures et le pH est suivi en
ligne.
Chapitre V
96
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 507,0
7,5
8,0
8,5
9,0
9,5
10,0
pH
temps (h)
Figure 37 : évolution du pH en fonction du temps
nonatitanate de sodium à (--)100°C, (--)160°C et (--)200°C et (--) solution seule.
Lorsque les poudres sont mises en contact avec la solution mère, le pH du mélange atteint
un maximum avant de décroître plus ou moins rapidement vers un état d’équilibre (Figure 37).
Ces résultats permettent de faire des hypothèses sur ce qui pourrait se passer au niveau du
mécanisme de sorption. Un premier échange ionique peut avoir lieu entre le sodium de la
structure et les protons en solution selon ++++ +=+ H2Na2H2Na2 (1), d’où l’augmentation
de pH en début d’expérience à cause de la consommation des protons. Il y aurait ensuite
probablement un deuxième échange entre les protons du solide et le strontium
++++ +=+ 22 SrH2SrH2 (2), d’où la diminution du pH. Si les échanges se font autant l’un que
l’autre, on retrouve l’échange global ++++ +=+ 22 SrNa2SrNa2 .
La réaction d’échange ionique serait donc
++++ +=+ H2Na2H2Na2 (1) Augmentation du pH
++++ +=+ 22 SrH2SrH2 (2) Diminution du pH
-----------------------------------------
++++ +=+ 22 SrNa2SrNa2 (3)
On remarque que pour les nonatitanates synthétisés à 100 et 200°C, le pH d’équilibre est
supérieur à celui de la solution mère, ce qui signifierait que l’échange (2) se ferait moins bien que
l’échange (1). Alors que pour l’échantillon synthétisé à 160°C, le pH d’équilibre correspond au
pH de la solution mère, ce qui signifie que l’équilibre (3) est total. Cette conclusion corrobore les
résultats obtenus en cinétique (paragraphe 5.1.1.1 page 88) où l’échange sodium/strontium du
Adsorption sur poudre
97
nonatitanate de sodium n’était pas total et où l’hypothèse soulevée était un possible échange
sodium/protons.
Nous avons également suivi l’évolution du taux d’échange sodium/strontium de plusieurs
sorbants en fonction du pH initial de la solution mère. Pour cela, plusieurs solutions ont été
réalisées à partir d’une solution contenant uniquement 1,14 mmol/L de nitrate de strontium et
ajusté en pH par ajout d’acide nitrique ou de soude.
0 2 4 6 8 10 12 140,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
τ
pH
Figure 38 : taux d’échange sodium/strontium en fonction du pH de la solution mère. nonatitanate de sodium à (����)100°C, (����)160°C et (����)200°C et (����) zéolithe A (Z-a)
Sur la Figure 38, pour les échantillons de nonatitanates de sodium synthétisés à 100°C et
160°C, on peut constater que le taux d’échange sodium/strontium est total lorsque le pH de la
solution initiale est supérieur à 9. En solution acide, le nonatitanate de sodium échange les ions
sodium avec les protons en solution, entraînant une diminution de la sorption du strontium et
donc une perte d’efficacité. Pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 200°C, l’évolution est
similaire, le matériau adsorbe d’autant mieux le strontium que le pH est basique. A pH fortement
basique, le taux d’échange sodium/strontium n’est que de 73%, ce qui est en accord avec les
conclusions précédentes : une fraction des ions sodium contenus dans le matériau n’est pas
échangeable. Pour les autres matériaux on constate qu’à pH 10 le taux est supérieur à 1, cela
s’explique par la présence de (SrOH)+ à la place de Sr2+ (comme le montre l’équation (E2) page
27).
Pour la zéolithe A, il existe le même effet du pH sur les propriétés de rétention du
strontium. En effet, en milieu acide, le sodium de la structure est échangé avec les protons de la
Chapitre V
98
solution. De plus à pH inférieur à 3, la structure aluminosilicatée de la zéolithe est dissoute en
partie dans la solution.
Pour les deux matériaux, nonatitanate de sodium et zéolithe A, on observe après sorption
une augmentation du pH de 1 à 2 unités à pH acide. Cela s’explique par la sorption des protons
de la solution par le solide, conduisant à une élévation du pH.
Le pH des effluents en sortie de station de traitement des effluents est d’environ 9 [92].
Un procédé basé sur l’utilisation des nonatitanates synthétisés à une température supérieure à
170°C n’est pas envisageable, le taux d’échange n’étant que de 30% à pH 9. Par contre,
l’utilisation de nonatitanate synthétisé à plus basse température (<170°C) ou de la zéolithe A est
tout à fait envisageable et comparable dans cette gamme de pH.
Pour la suite de l’étude, afin de comparer les échantillons entre eux, le pH des solutions
sera fixé à pH proche de 8 par l’utilisation d’un tampon d’acétate de sodium [93]. L’utilisation de
ce tampon permet également de fixer la concentration en sodium en solution, afin d’obtenir une
concentration totale en ions de 10 méq/L.
5.2 ETUDE DE LA SELECTIVITE DES NONATITANATES
5.2.1 Isotherme d’échange d’ions
5.2.1.1 Effet de la température de synthèse
Différents nonatitanates de sodium ont été synthétisés en faisant varier les paramètres de
synthèse notamment la température. Dans ce paragraphe, nous allons étudier l’influence de ce
paramètre sur les propriétés de sorption du strontium par ce matériau.
L’isotherme de sélectivité, représentée Figure 39, permet d’obtenir deux grandes
informations sur les propriétés de sorption des adsorbants étudiés. A faible fraction équivalente
de strontium en solution XSr, la pente de la courbe est proportionnelle au coefficient de
distribution du strontium vis-à-vis du sodium. En première approximation, comme nous l’avons
détaillé dans le chapitre IV, ce coefficient de distribution est proportionnel à la constante de la
réaction d’échange sodium/strontium, qui est une bonne indication de l’affinité du matériau pour
le strontium. Ainsi plus la pente est forte, plus le matériau a une forte affinité pour l’ion étudié. A
forte fraction équivalente de strontium en solution, le matériau est alors saturé en ions à extraire
et on obtient une information sur la quantité maximale d’ions adsorbés.
Dans notre cas, la Figure 39 représente l’isotherme de sélectivité pour les nonatitanates de
sodium synthétisés à 100°C, 160°C et 200°C et mis en contact avec une solution contenant
Adsorption sur poudre
99
uniquement les ions sodium et strontium à une concentration totale de 10 méq/L (Annexe 1
page 163). Le rapport masse d’adsorbant sur volume de solution est toujours de 0,5 g/L. Cette
isotherme permet de connaître les propriétés de sorption du strontium vis-à-vis du sodium en
solution.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,00,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
X
Sr
XSr
Figure 39 : isotherme de sélectivité pour un mélange sodium/strontium
sur nonatitanate de sodium à (����)100°C, (����)160°C et (����)200°C
Pour les faibles fractions équivalentes de strontium en solution XSr, la pente des courbes
est très élevée pour les échantillons composés de nonatitanate de sodium pur (synthétisés à une
température inférieure à 170°C). Ces nonatitanates de sodium ont alors une forte affinité pour le
strontium. Cela signifie que le strontium peut être extrait même à l’état de trace en présence d’une
concentration en sodium conséquente, ce qui est prometteur pour une application en
décontamination.
Pour les fortes fractions équivalentes de strontium en solution, un palier est atteint à une
fraction équivalente de strontium dans le solide de respectivement 0,89 ; 0,83 et 0,35 pour les
nonatitanates de sodium synthétisés à 100°C, 160°C et 200°C. C'est-à-dire que 89% du sodium de
la structure du nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C est échangé par du strontium
provenant de la solution. Le matériau, en plus d’avoir une forte affinité pour le strontium,
échange également le sodium quantitativement. Les échantillons de nonatitanate de sodium
synthétisés à basse température (<170°C) sont donc plus intéressants pour l’extraction du
strontium que le nonatitanate de sodium synthétisé à 200°C, puisque ce dernier n’échange que
35% du sodium présent dans le solide.
Chapitre V
100
Il ne semble pas y avoir une grande différence de sorption entre les nonatitanates de
sodium synthétisés à 100°C et 160°C puisque les deux échangent plus de 80% du sodium de leur
structure. Par contre la capacité d’échange cationique (et donc la quantité de sodium
« échangeable ») pour l’échantillon à 100°C est légèrement plus grande que celle de l’échantillon à
160°C (4,5 méq/g contre 3,7 méq/g). Il faudra donc plus de nonatitanate de sodium synthétisé à
160°C que de nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C pour extraire la même quantité de
strontium.
Comme montré dans le paragraphe 4.4.1.1.1 (page 81), l’étude de la sélectivité consiste
également à déterminer le coefficient de sélectivité du matériau en fonction de sa teneur en
strontium. En effet, le coefficient de sélectivité peut être déterminé expérimentalement suivant
l’équation :
Sr2
SrSr
2Na
2SrSrSr
NaS
γCECX-1X
γTX-1XK
..).(
]..[).(= (E37)
Lorsque l’on représente ce coefficient en fonction de la teneur en strontium dans le
solide, on obtient pour les nonatitanates de sodium, la Figure 40 ci-dessous.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
100
101
102
103
104
105
Sr
Na
KS
XSr
Figure 40 : coefficient de sélectivité en fonction de la fraction équivalente en strontium dans le
nonatitanate de sodium synthétisé à (����)100°C, (����)160°C et (����)200°C
D’après ces résultats, on constate que le coefficient de sélectivité SrNa
SK varie avec la
teneur en strontium dans le solide. Il y a deux comportements différents selon le matériau utilisé.
Pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 200°C, le coefficient de sélectivité chute avec
Adsorption sur poudre
101
l’augmentation de la teneur en strontium dans le solide et celui-ci est quasiment nul lorsque le
matériaux contient 35% de strontium. Pour les nonatitanates de sodium synthétisés à 100°C et
160°C, le coefficient de sélectivité augmente progressivement jusqu’à atteindre un maximum pour
une teneur importante en strontium dans le solide puis chute rapidement. Cela signifie que la
sélectivité augmente avec la teneur en strontium dans le solide jusqu’à ce que celle-ci soit
importante et que le matériau soit saturé.
Il est important de souligner que ce coefficient de sélectivité n’est pas constant et reflète
la variation de l’énergie d’échange en fonction de la concentration des ions contenus dans
l’échangeur. Ce coefficient de sélectivité peut être approximé à la constante d’équilibre de la
réaction d’échange d’ions pour des teneurs en ions à extraire (ici le Sr ou le Ca) faibles par rapport
aux concentrations d’ions Na dans le solide.
5.2.1.2 Effet de l’effet du ratio Na/Ti
Lors de la synthèse de nonatitanate de sodium à partir du protocole de Behrens et al.[30],
une grande quantité de soude est utilisée. Le rapport Na/Ti entre les réactifs de synthèse est alors
de 4 soit un excès en sodium d’un facteur 10 par rapport à la stœchiométrie. Nous avons
également synthétisé un échantillon à partir d’un excès deux fois moins important (rapport
Na/Ti = 2) afin d’étudier l’impact de ce paramètre sur les propriétés de sorption du strontium
(les autres paramètres de synthèse restent invariants). L’étude du ratio ayant été menée en
parallèle de celle de la température, les conclusions précédentes sur l’effet de la température
n’étaient pas connues. L’hypothèse lors de l’étude de l’effet du ratio Na/Ti est que tous les
échantillons d’une même gamme de température se comportent de manière similaire. L’étude a
été menée sur des échantillons synthétisés à 170°C.
La poudre obtenue par synthèse hydrothermale est caractérisée par les mêmes techniques
que précédemment. L’attaque chimique sur poudre et l’analyse thermogravimétrique permettent
de déterminer la capacité d’échange cationique. La caractérisation du matériau par ces deux
techniques, couplée à une analyse par diffraction des rayons X, permet également de confirmer
l’obtention d’une phase de nonatitanate de sodium pur. L’ensemble des résultats est repris dans le
Tableau 12 ci-dessous :
Chapitre V
102
NaTi 170°C - a NaTi 170°C - b
Excès sodium 10 5 Rapport Na/Ti 4 2
Formule Na4,4Ti9O20,2.9H2O Na4,8Ti9O20,4.10,7H2O M (g/mol) 1017 1060 BET (m²/g) 200 82
CEC (méq/g) 4,3 4,5
Tableau 12 : caractérisation de nonatitanate de sodium synthétisé à 170°C avec excès de soude d’un facteur 10 et 5
Au premier abord, il ne semble pas y avoir de grandes différences entre les
2 formulations. Hormis une différence de surface spécifique, les deux échantillons sont mals
cristallisés, leurs formules chimiques sont très proches et donc la quantité de sodium dans les
solides est quasiment équivalente (4,3 et 4,5 méq/g).
L’isotherme de sélectivité du nonatitanate de sodium, représentée Figure 41, montre que
les propriétés de la poudre synthétisée avec deux fois moins de sodium sont similaires à celles
obtenues pour une synthèse avec excès de soude plus grand. La pente aux faibles fractions
équivalentes est très importante dans les deux cas et l’échange se fait en totalité.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,00,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
XSr
XSr
Figure 41 : isotherme de sélectivité pour un mélange sodium/strontium
sur nonatitanate de sodium à 170°C avec un rapport (����)Na/Ti=4 ou (����)Na/Ti=2
Un excès de sodium, deux fois moins important, ne semble pas impacter les propriétés de
rétention du strontium. Il serait donc intéressant de travailler par la suite dans ces conditions de
synthèse. La présence de soude en excès est tout de même nécessaire à la synthèse de
Adsorption sur poudre
103
nonatitanate de sodium. Car si l’on se place en condition stœchiométrique (rapport Na/Ti= 0,4),
on aboutit à la formation de dioxyde de titane anatase et d’une phase inconnue.
5.2.2 Etude de la présence de cations en compétition (Ca)
Jusqu’ici la solution à traiter avait été simplifiée en composition avec uniquement deux
cations, le sodium (à partir d’acétate de sodium) et le strontium (à partir de nitrate de strontium).
Mais dans les effluents réels, il existe beaucoup d’autres cations qui pourraient entrer
potentiellement en compétition avec le strontium. Notamment le calcium, dont les propriétés
physico-chimiques sont proches du strontium (charge, rayon ionique, …) et qui est un
composant naturel de l’eau.
Avant de tester les adsorbants sur une solution réelle complexe, nous nous sommes
intéressés à une solution contenant uniquement sodium et calcium mise en contact avec un
nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C. Sur la Figure 42 ci-dessous est représentée l’isotherme
de sélectivité pour le mélange sodium/calcium et l’isotherme de sélectivité pour le mélange
sodium/strontium pour comparer la sélectivité du matériau pour le strontium et le calcium.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
Xi
Xi
Figure 42 : isotherme de sélectivité sur nonatitanate de sodium à 100°C pour un mélange sodium/i où i=strontium(����) ou i=calcium(����)
On constate que l’isotherme pour le mélange sodium/calcium et celle du mélange
sodium/strontium sont fortement similaires. Le nonatitanate de sodium semble adsorber aussi
bien le strontium que le calcium vis-à-vis du sodium. En comparant les deux ions dans des
solutions différentes, il est difficile de savoir si le matériau a une préférence pour l’un des deux,
strontium ou calcium, au vue de leur isotherme, mais il est fort probable que les deux ions soient
Chapitre V
104
en compétition au vue de leurs propriétés similaires vis-à-vis du sodium. Une mesure en actif sur
une solution contenant les deux ions (strontium et calcium) permettra de conclure sur ce point.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,010
2
103
104
105
106
Xi
i Na
KS
Figure 43 : coefficient de sélectivité en fonction de la fraction équivalente
en cation i dans le solide où i=strontium(����) ou i=calcium(����)
Le calcul du coefficient de sélectivité à partir des isothermes présentées précédemment
permet de tracer les courbes représentées Figure 43. Ces courbes représentent la variation de ce
coefficient de sélectivité en fonction de la teneur en ion à extraire (Ca ou Sr) dans le matériau. Le
nonatitanate de sodium réagit de manière similaire pour un échange sodium/calcium et pour un
échange sodium/strontium. Lorsque la fraction équivalente en cation i dans le solide augmente, le
coefficient de sélectivité iNa
SK augmente jusqu’à atteindre un maximum pour une forte teneur en
cations i dans le matériau. Ensuite il chute relativement rapidement, avec la saturation du
matériau.
Bien que l’ordre de grandeur des coefficients de sélectivité sodium/strontium et
sodium/calcium soit proche, dans le cas du calcium ce coefficient semble être légèrement
inférieur au coefficient de sélectivité pour le strontium. Ceci laisse présager une légère préférence
pour le strontium vis-à-vis du calcium. Cela devra être confirmé par la suite avec une solution
contenant les 2 cations (strontium et calcium).
Adsorption sur poudre
105
5.2.3 Modèle de Langmuir et thermodynamique
Comme décrit dans le chapitre IV, pour les trois échantillons de nonatitanates de sodium
synthétisés à 100°C, 160°C et 200°C, il est possible, en utilisant le modèle de Langmuir
CQ
1
LQ
1
Q
C.+
.=
maxmax
représenté Figure 44 de calculer les valeurs de Qmax (quantité maximale
adsorbée) et L (constante de stabilité conditionnelle de Langmuir) reprises dans le Tableau 13.
0 50 100 150 200 250 300 3500.0
0.5
1.0
1.5
2.0
C/Q
(g/L)
C (mg/L)
Figure 44 : modèle de Langmuir pour un mélange sodium/strontium sur nonatitanate de sodium à (����)100°C, (����)160°C et (����)200°C
Tableau 13 : données thermodynamiques obtenues à partir du modèle de Langmuir appliqué aux isothermes de nonatitanate de sodium synthétisés à 100°C, 160°C et 200°C
On constate que la corrélation entre le modèle de Langmuir et les points expérimentaux
est très bonne pour les nonatitanates de sodium synthétisés à 100°C et 160°C mais semble un peu
moins appropriée pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 200°C. Il est fort possible que tous
les sites sodium de la structure ne soient pas rigoureusement identiques, et ainsi que l’hypothèse
de départ du modèle de Langmuir ne soit pas respectée. Le modèle de Langmuir semble donc
approprié pour modéliser l’adsorption du strontium par la structure solide uniquement lorsque la
Chapitre V
106
synthèse est réalisée à température inférieure à 170°C, et donc uniquement dans le cas de
nonatitanate de sodium pur.
Grâce à la relation (E24) reprise ci dessous, on peut obtenir les grandeurs qualitatives
d’enthalpie libre de Gibbs, calculées à partir de valeurs de capacité maximale obtenue par le
modèle de Langmuir notées dans le Tableau 13. Ce modèle décrit une adsorption d’ions (ou de
molécules) en surface d’un matériau. Pour les nonatitanates, cela représenterait l’énergie
d’interaction entre les feuillets d’oxyde de titane surstœchiométrique en oxygène et le strontium
hydraté en surface de ces feuillets. L’échange sodium/strontium n’est pas pris en compte ici.
).ln(.-= max LQRTG∆ L (E24)
avec R=8,31 J.mol-1.K-1 constante des gaz parfaits et T=298,15 K
L.Qmax correspondant alors au coefficient de sélectivité SrNa
SK .
La valeur positive de l’enthalpie libre de Gibbs ∆GL pour l’échantillon synthétisé à 200°C
montre que le processus de sorption du strontium sur cet échantillon n’est pas favorable mais il
ne faut pas oublier que le modèle de Langmuir n’est pas très adapté pour ce matériau et donc que
cette conclusion est à prendre avec précaution.
Lorsque ∆GL est calculé pour des expériences de sorption réalisées à différentes
températures, on peut alors grâce à l’équation S∆T-H∆G∆ = calculer les paramètres
thermodynamiques d’enthalpie de réaction et d’entropie relatifs à l’interaction entre le Sr et les
feuillets de titane [82, 94-96]. Pour cela, nous avons réalisé sur un échantillon de nonatitanate de
sodium, les isothermes de sélectivité dans des conditions thermostatées à 25°C, 45°C et 65°C,
grâce au montage expérimental schématisé sur la Figure 45.
Figure 45 : Montage cellule thermostatée de 30mL
Adsorption sur poudre
107
La solution utilisée est la même que pour les isothermes précédentes, c’est-à-dire qu’elle
contient uniquement de l’acétate de sodium et du nitrate de strontium avec une concentration
totale de 10 méq/L. Le rapport masse de poudre/volume de solution est de 0,5 g/L soit 20 mL
de cette solution est mise en contact avec 10 mg du meilleur nonatitanate de sodium c’est-à-dire
un échantillon synthétisé à 100°C.
On obtient ainsi les isothermes de sélectivité représentées sur la Figure 46 ci-dessous :
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,00,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
XSr
XSr
Figure 46 : isotherme de sélectivité pour un mélange sodium/strontium
sur nonatitanate de sodium à 100°C réalisée à (����)25°C, (����)45°C et (����)65°C
On constate qu’il n’y a aucune différence entre les isothermes de sélectivité quelle que soit
la température à laquelle elle est réalisée. La pente de la courbe aux faibles fractions équivalentes
en strontium est toujours très grande, le solide a toujours une très forte affinité pour les ions
strontium par rapport aux ions sodium. Et la quantité de sodium de la structure échangée par le
strontium de la solution est de 90%.
L’application du modèle de Langmuir, permet de calculer la quantité maximale adsorbée à
l’équilibre par le solide Qmax, et à la constante de stabilité conditionnelle de Langmuir L. On peut
ainsi déterminer les valeurs d’énergie libre de Gibbs en fonction de la température de sorption.
Tableau 15 : données thermodynamiques obtenues à partir du modèle de Langmuir appliqué aux isothermes réalisées à 25°C, 45°C et 65°C sur un échantillon de zéolithe A
Le modèle de Langmuir présente une bonne corrélation avec les isothermes (R>0,9997),
ce qui montre la présence de liaison faible, de type électrostatique, entre la zéolithe A et le soluté
(strontium).
La diminution de la capacité totale de sorption pourrait s’expliquer par une dégradation
de la structure zéolithique sous l’effet de la chaleur et du temps (24 heures à 65°C). Lors des tests,
nous avions constaté de manière visuelle un changement, le mélange devenant plus laiteux sous
l’effet de la température.
Pour la suite de l’étude, il devient difficile de faire des conclusions à partir de 2 points.
Mais cela peut nous donner une première idée de la thermodynamique. Avec les deux points à
25°C et 45°C, on obtient une valeur d’enthalpie de réaction ∆HL de -0,36 kJ/mol et une entropie
∆SL égale à 0,035 kJ/mol.K. Des valeurs négatives d’enthalpie libre de Gibbs ∆GL et d’enthalpie
de réaction ∆HL, confirment que le mécanisme de sorption est exothermique et spontanée. Une
valeur de ∆SL positive indique une réaction dans le sens de l’adsorption.
Adsorption sur poudre
115
5.3.4 Conclusion sur la comparaison zéolithe /nonatitanate de
sodium
Le meilleur nonatitanate de sodium pour la décontamination liquide en strontium est le
solide synthétisé à 100°C. L’étude de la sélectivité du strontium et du calcium vis-à-vis du sodium
sur ce matériau, montre que strontium et calcium ont un comportement similaire. Le nonatitanate
de sodium est très sélectif de ces deux ions vis-à-vis du sodium. Par contre, il est très difficile de
conclure sur une sélectivité de ce matériau pour le strontium par rapport au calcium. Il semblerait
néanmoins que le nonatitanate de sodium ait une très légère préférence pour le strontium. Cela
devra être précisé par les expériences avec du strontium à l’état de trace.
Bien que la zéolithe A semble plus affectée par le sodium et par le calcium en solution
que le nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C, ses propriétés de rétention du strontium en
solution et sa capacité d’échange cationique légèrement supérieure, en font également un bon
adsorbant potentiel pour la décontamination en strontium.
5.4 SORPTION A L’ETAT DE TRACE, EN MILIEU RADIOACTIF
5.4.1 Effet de la teneur en sodium, détermination de la stoechiométrie
de l’échange
Afin de déterminer la stœchiométrie de l’échange (cf. paragraphe 4.4.1.1.2 page 83), nous
avons suivi l’évolution du coefficient de distribution du 90Sr à l’état de trace en fonction de la
concentration initiale en sodium en solution. Développée dans le chapitre IV, l’expression du
coefficient de distribution qui prend en compte à la fois le volume de la solution V et la masse
d’adsorbant m utilisés, est rappelée ci-dessous :
m
V
A
AAKd 0 .
-= (E47)
avec A0 et A les activités initiale et à l’équilibre.
Cet essai a été effectué sur une solution contenant de l’acétate de sodium à différentes
concentrations entre 0,1 M et 1 M. A chacune de ces solutions est ajouté du strontium 90Sr
radioactif à 66 660 Bq/L soit 13 ng/L (Annexe 3) afin de se situer à l’état de trace. Comme pour
les tests réalisés en « batch » inactif, 10 mg d’adsorbant sont mis en contact avec 20 mL de
solution pendant 24 heures, la vitesse d’agitation est également conservée à 70 tours/minute afin
de limiter le nombre de paramètres variants. La concentration en strontium après sorption est
mesurée par scintillation.
Chapitre V
116
0,1 1
103
104
105
106
107
Kd (m
L/g)
[Na] (mol/L)
limite de détection 90Sr
Figure 52 : effet de la concentration initiale en sodium en solution
sur le coefficient de distribution du strontium (����) nonatitanate de sodium à 100°C, et (����) zéolithe A
La Figure 52 représente l’évolution du coefficient de distribution pour le nonatitanate de
sodium et pour la zéolithe A en fonction de la concentration en sodium dans la solution en
échelle logarithmique. Pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C, et pour une
concentration initiale en sodium en solution inférieure à 0,5 M, la quantité de strontium en
solution après traitement est inférieure à la limite de détection de la scintillation, ce qui veut dire
que le coefficient de distribution est supérieur à 1,7.106 mL/g. Dans un effluent contenant du
strontium à l’état de trace et du sodium à 0,5 M, il est donc possible en colonne avec un gramme
de nonatitanate de sodium de décontaminer 1 700 L de solution. En « batch », suivant la formule
(E4) (page 34) pour un FD de 100 et avec un gramme de nonatitanate de sodium, on peut traiter
17 L de solution.
Lorsque la concentration initiale en sodium est supérieure à 0,5 M, on constate, comme
prédit par les expériences en inactif, une diminution de l’efficacité du procédé avec
l’augmentation de la concentration en sodium dans la solution. Pour la zéolithe A, on constate
que même pour les faibles concentrations initiales en sodium, le coefficient de distribution est
inférieur à 105 mL/g, l’adsorbant zéolithe est donc moins efficace que le nonatitanate de sodium
en présence de sodium dans l’effluent. L’augmentation de la concentration initiale en sodium, a le
même effet sur le coefficient de distribution que pour le nonatitanate de sodium.
Lorsque l’on mesure la pente de la linéarisation du coefficient de distribution en fonction
de la concentration initiale en sodium en solution, on obtient une valeur de -1,9 pour la zéolithe
A et de -1,4 pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C. Comme expliqué dans le
Adsorption sur poudre
117
chapitre IV, lorsque la concentration en strontium est faible (à l’état de trace dans le cas présent)
la pente de la droite correspond à la stœchiométrie de l’échange.
Pour la zéolithe A, la pente de la linéarisation est proche de -2, le mécanisme mis en jeu
est donc bien un phénomène d’échange ionique entre 2 ions sodium de l’adsorbant et 1 ion
strontium en solution [20, 97]. Pour le nonatitanate de sodium, la stœchiométrie de la réaction
semble plus faible, mais cette conclusion est à prendre avec précaution car la linéarisation n’est
faite que sur 2 points. Il serait intéressant de faire d’autres mesures à des concentrations en
sodium plus élevées pour confirmer ou non ce résultat.
5.4.2 Energie libre et sélectivité
D’après Teppen et Miller [88] et Rotenberg [98] , la sélectivité des argiles pour les alcalins
ne serait pas dominée par la variation d’énergie libre dans l’argile lors du remplacement d’un ion
par un autre mais par la variation correspondante dans la phase aqueuse. En introduisant un cycle
thermodynamique complet utilisant des valeurs expérimentales de sélectivité et d’enthalpie libre
d’hydratation, ils ont montré que c’est l’ion le moins stable en phase aqueuse que l’on retrouve
préférentiellement dans l’argile. La sélectivité résulterait alors d’une « sélection négative » par la
phase aqueuse. Nous avons voulu appliquer ce modèle au cas de nos matériaux sous forme de
nonatitanate de sodium. Le cycle thermodynamique est alors schématisé sur la Figure 53 :
Ce cycle thermodynamique prend en compte plusieurs enthalpies libres :
℘ La différence d’enthalpie libre entre un titanate au sodium et un titanate au strontium
notée SrNa2esolidG∆ → que l’on cherche a déterminer à partir de la relation suivante :
SrNa2aq
SrNa2échange
SrNa2solide G∆G∆G∆ →→→ += (E48)
solide2
aq Na2Sr ++ +
SrNa2échangeG∆ →
SrNa2aqG∆ →
SrNa2
solideG∆ →
++ + aqsolide2 Na2Sr
++ + 2aqsolide
2 SrSr
Chapitre V
118
℘ La différence d’enthalpie libre d’hydratation entre le sodium et le strontium
SrNa2aqG∆ → que l’on peut déterminer à partir des valeurs d’enthalpie d’hydratation tabulées
des ions sodium et strontium suivant l’équation :
)=→ Nahydr
Srhydr
SrNa2aq 2.G-(GG∆ (E49)
D’après Marcus [99], l’énergie d’hydratation du sodium est de -375 kJ/mol et celle du
strontium est égale à -1 386 kJ/mol, d’où une différence d’enthalpie d’hydratation
SrNa2aqG∆ → de -636 kJ/mol. Cette différence d’enthalpie négative s’interprète comme une
énergie d’hydratation nettement plus élevée pour l’ion Sr2+ que pour l’ion sodium.
℘ L’enthalpie libre d’échange SrNa2
échangeG∆ → que l’on détermine expérimentalement aux faibles
concentrations en strontium dans la solution à partir de la relation classique :
SrNa
SrNa2échange KRT-G∆ ln=→ (E50)
Comme développé dans le paragraphe 4.4.1.1, il est possible de calculer la constante de
réaction à partir des cœfficients de sélectivité. Cette approximation n’est possible que pour de
faibles concentrations en strontium en solution et dans le solide. Lors d’expérimentations en actif
nous nous situons donc dans ce cas, et on peut écrire la constante de la réaction d’échange ainsi :
2
2SrNa
SSrNa CEC
NaKdKK
][.=≈
L’enthalpie libre d’échange peut être calculée aux faibles concentrations en strontium
dans la solution à partir de la relation :
)][
.ln(=→2
2SrNa2
échange CEC
NaKdRT-G∆ (E51)
Le raisonnement peut également être adapté à l’échange sodium/strontium dans la
zéolithe A. Sur la Figure 54 est représentée l’énergie libre d’échange en fonction de la
concentration en sodium en solution pour nos deux adsorbants.
Adsorption sur poudre
119
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0-50
-40
-30
-20
-10
∆Géchange
[Na] (mol/L)
2Na→
Sr
Figure 54 : énergie libre d’échange pour un échange Na/Sr en fonction de la concentration en sodium en solution (����) nonatitanate de sodium à 100°C, et (����) zéolithe A
On constate que l’énergie libre d’échange ne varie pas avec la concentration en sodium en
solution, ce qui confirme la validité de l’approximation. On obtient une valeur de SrNa2échangeG∆ → de
-42 kJ/mol pour le nonatitanate de sodium synthétisé à 100°C et une énergie libre d’échange de
-27 kJ/mol pour la zéolithe A. Le nonatitanate de sodium est donc plus sélectif du strontium que
la zéolithe A par rapport au Na.
Ces valeurs d’enthalpie libre d’échange SrNa2solideG∆ → ne peuvent être comparées aux valeurs
obtenues grâce au modèle de Langmuir car on ne se situe pas du tout dans la même gamme de
concentration. La détermination d’enthalpie libre d’échange est précise uniquement sur des
solutions contenant du strontium à l’état de trace. Le modèle de Langmuir est une approximation
et est déterminé pour des concentrations élevées à la fois dans la solution et dans le solide.
Langmuir n’a pas permis de déterminer précisément le coefficient de distribution à faible
Tableau 22 : résultats de sorption du strontium dans l’eau de mer dopée (A0= 34 533 Bq/L ou * A0=28 360 Bq/L)
Chapitre V
126
Lorsque l’on compare (Tableau 22) l’efficacité du traitement par le nonatitanate de
sodium aux autres adsorbants commerciaux (SrTreat®, CoTreat®, TiO2 Sachtopore), les facteurs
de décontamination sont du même ordre de grandeur, cependant les composés de la société
Selion OY (Finlande) semblent meilleurs.
Le nonatitanate de sodium n’est pas un adsorbant utilisable pour la décontamination dans
des effluents atypiques comme l’eau de mer, il reste cependant un traitement efficace pour des
effluents plus classiques (moins salins et moins complexes) comme les effluents de stations de
traitement des effluents liquides.
Cependant, à pH nettement plus élevé, on précipite le calcium sous forme hydroxyde et le
nonatitanate de sodium ne réagit plus avec les protons, ce qui entraîne une augmentation du
coefficient de distribution et donc un traitement plus efficace qu’à pH 8.
Adsorption sur poudre
127
CONCLUSION CHAPITRE V
L’ensemble de ce chapitre a pour but de connaître les propriétés de sorption et de
sélectivité de deux adsorbants potentiels pour la décontamination en strontium, le nonatitanate de
sodium et la zéolithe A.
Tout d’abord, l’étude du pH et de la composition des effluents, nous a montré les limites
d’utilisation de nos adsorbants inorganiques. Les meilleures propriétés de sorption du strontium
sont obtenues sur le nonatitanate synthétisé à 100°C et sur la zéolithe A et pour des pH basiques
et des effluents dont la concentration en sodium, mais surtout en calcium sont faibles. En effet,
les isothermes de sélectivité sur les mélanges binaires sodium/strontium ou sodium/calcium,
nous ont permis de constater que nos adsorbants sont sélectifs du strontium et du calcium vis-à-
vis du sodium. Mais les expériences en inactif ne nous ont pas permis de conclure sur la
sélectivité des deux adsorbants pour le strontium vis-à-vis du calcium. Le nonatitanate de sodium
est fortement affecté par la présence de calcium et moins par le sodium, quant à la zéolithe, elle
est plus affectée par le sodium et moins par le calcium.
Les expériences en actif, nous ont permis de confirmer le mécanisme de sorption :
nonatitanate de sodium et zéolithe adsorbent un ion strontium par échange ionique avec deux
ions sodium de leurs structures. Les expériences en présence de strontium à l’état de trace, nous
ont permis de calculer le coefficient de la réaction d’échange. L’étude thermodynamique semble
confirmer que les deux matériaux ont une forte affinité pour le strontium.
Les expériences sur effluents réels nous ont confirmé l’efficacité de ces matériaux pour la
décontamination en strontium. En effet, les deux adsorbants minéraux, nonatitanate de sodium
synthétisé à 100°C et zéolithe A, sont de bons adsorbants pour un traitement efficace d’effluents
peu salins comme les effluents de stations de traitement des effluents liquides. Leur facteur de
décontamination est meilleur que celui obtenu par le procédé actuel de coprécipitation par le
sulfate de baryum.
Cependant, leur utilisation est limitée aux effluents dont la quantité d’ions calcium et
potassium est faible et ne peut être appliqué à des effluents complexes de type « eau de mer ».
129
CHAPITRE VI
ADSORPTION DU STRONTIUM
SUR SOLIDE : MONOLITHE
6 CHAPITRE VI
ADSORPTION DU STRONTIUM SUR SOLIDE : MONOLITHE
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
131
6.1 THEORIE ET NOTIONS UTILES
6.1.1 Généralité
Le traitement d’un effluent peut être réalisé par une mise en œuvre simple qui consiste à
faire passer l’effluent dans une colonne ouverte contenant l’adsorbant sous forme de lit fixe
(Figure 56). Les radioéléments présents dans l’effluent sont éliminés par sorption (échange
ionique ou adsorption) sur le solide constitutif du lit.
Le montage peut également être réalisé en boucle afin de réaliser plusieurs passages de la
solution dans la colonne. Ainsi si le débit est trop élevé et qu’une partie des radioéléments sort de
la colonne, elle pourra être récupérée par la suite.
Figure 56 : schéma de principe d’un traitement de décontamination en colonne.
La colonne peut être composée d’adsorbant sous forme de billes ou d’un matériau solide
monolithique, mais ne peut être constituée de poudre trop fine. En effet, si la granulométrie n’est
pas adaptée, la poudre bouche progressivement la colonne et entraîne une augmentation de la
pression dans le système.
L’extraction d’ions par un procédé sur lit fixe est un procédé cyclique : le lit fixe les ions à
extraire présents dans la solution à décontaminer et se sature ainsi progressivement comme
schématisé Figure 57. Les couches supérieures se saturent progressivement mais la réaction
d’adsorption n’est pas instantanée. La cinétique d’échange en dynamique est différente de celle
réalisée en « batch ». Dans le cas d’un monolithe de zéolithe, la diffusion des ions doit se faire au
sein de la macroporosité puis de la microporosité pour réaliser l’échange ionique. Le front de
diffusion n’est donc pas plat, il existe une zone d’échange dans le monolithe, entre la partie
totalement saturée et la partie « vierge ». Cette zone d’échange est liée, en autre, au débit utilisé.
Chapitre VI
132
Lorsque celui-ci augmente, la zone d’échange s’allonge. La capacité utile est alors plus faible car
une fraction plus petite de la capacité totale peut être utilisée avant que la fuite n’apparaisse.
D’autres paramètres influent également sur la cinétique et donc sur la zone d’échange. Cette
cinétique dépend de la diffusion des ions dans le milieu poreux et dans les chemins que doivent
parcourir les ions à l’intérieur du monolithe avant l’échange d’ions.
Figure 57 : saturation d’un échangeur, zone d’échange (d’après Dardel [101])
Quand tous les sites actifs sont pris, ou lorsque tous les ions échangeables ont été
échangés, la phase de saturation est terminée. Le lit peut alors soit être régénéré (dans le cas d’un
procédé classique de purification d’eau) soit être mis au déchet (éventuellement dans le cas d’une
décontamination d’effluents radioactifs). Le volume de déchets secondaires produits dépend dans
ce cas de la capacité maximale d’adsorption du procédé utilisé et des capacités de régénération de
l’adsorbant.
D’un point de vue expérimental, la solution en sortie de colonne est récupérée et analysée.
On obtient, en fonction du temps, une courbe de percée comme représentée Figure 58.
Figure 58 : courbe de percée
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
133
Le point F correspond au point de percement ou point de fuite, l’élément commence à
sortir de la colonne. Le point M correspond à la fuite maximale autorisée par l’industriel. Si l’on
poursuit jusqu’au point S, la concentration en sortie de colonne est alors égale à celle de la
solution brute, l’adsorbant est saturé [86].
6.1.2 Définition des paramètres utiles
Nous allons définir dans les paragraphes suivants, certains paramètres spécifiques au
traitement en colonne.
Lors d’expérimentation en dynamique, le débit est souvent exprimé en volume de lit par
heure, en anglais «bed volum per hour » et noté BV/h. Cette valeur est importante car elle décrit
combien de fois le volume du réacteur est parcouru pendant une heure. Le volume de lit est
assimilé au volume de solide, dans notre cas, le volume du monolithe. Dans notre cas, le
monolithe étant un petit cylindre, son volume est déterminé géométriquement suivant la formule
ci-dessous :
hrπVlit ²..= (E52)
Avec r et h le rayon et la hauteur du monolithe
La capacité totale Qtot d’un échantillon du matériau utilisé pour le lit fixe est le nombre
de sites où l’échange ionique peut avoir lieu. Dans notre cas, cela correspond à la capacité
d’échange cationique (CEC) de l’adsorbant multiplié par la teneur réelle en adsorbant présent
dans l’échantillon.
La capacité utile Qutile correspond à la capacité du matériau à l’équilibre
thermodynamique dans les conditions d’utilisation. Cette capacité utile correspond à la capacité
en « batch » du monolithe en poudre dans les mêmes conditions que lors des essais en dynamique
(concentration initiale, pH, salinité,…).
La capacité dynamique Qdyn est également appelée capacité opératoire, ou capacité
travaillée. C’est le nombre de site où l’échange s’est effectivement produit pendant la phase de
séparation. C’est également le nombre (en éq) d’ions fixés réellement sur le lit fixe. Cette capacité
dynamique dépend des conditions opératoires comme le débit, la température, la hauteur et le
diamètre du lit, l’hydrodynamique au sein du lit influant sur les échanges ioniques effectifs, …
Chapitre VI
134
Elle peut donc être optimisée en faisant varier ces paramètres simples. Si les conditions
opératoires permettent d’être à l’équilibre thermodynamique dans la colonne, alors cette capacité
dynamique sera égale à la capacité utile.
Dans le cas d’une décontamination d’un effluent radioactif, la capacité dynamique est
généralement exprimée pour un facteur de décontamination donné (par exemple pour un FD
maximal de 10). En inactif, on donne généralement cette capacité dynamique au point de
percement. C’est un paramètre facile à mesurer qui permet de comparer les supports entre eux. Si
l’objectif est un FD de x, donc un rapport C/C0= x% la capacité dynamique à x% s’exprime en
méq/g (ou mmol/g) et s’obtient à partir d’une courbe de percée suivant l’équation:
( )( )
lit
.F.%=%
m
CxtxQ 0
dyn (E53)
Avec t(x%), le temps nécessaire (en min) pour atteindre une concentration C égale à 10%
de la concentration initiale C0 (en méq/L ou mmol/L), F le débit de la solution en mL/min, et mlit
la masse d’adsorbant dans le lit (en g). Cette grandeur est très utile d’un point de vue pratique car
elle nous renseigne sur le volume de solution qui pourra être traité par ce lit fixe pour un FD
donné. On peut rapporter cette valeur massique à une valeur volumique, en divisant par la masse
volumique (ou la densité). Dans le cas des monolithes, cette densité est proche de 1. Par exemple,
pour traiter une solution à 5.10-6 méq/L en strontium, soit 110 kBq/L, un monolithe de capacité
dynamique de 1 méq/L peut donc décontaminer 2.105 litres de solution soit 200 m3.
Le temps de séjour TS moyen dans le lit fixe qui, comparé à un temps caractéristique
global de transfert de masse, permet d’estimer la pertinence d’un traitement cinétique de la
réaction de sorption, et de savoir si l’équilibre thermodynamique est atteint ou non dans les essais
en dynamique. Le temps de séjour moyen peut s’exprimer ainsi :
F
VTs
ε= (E54)
F : débit de la solution en m3/h (ou mL/min) et V volume du monolithe, et ε porosité
géométrique. Si l’on connait le volume macroporeux Vmacro du matériau l’expression du temps de
séjour se simplifie [60] :
F
VTs
macro= (E55)
Pour des échanges dynamiques sur lit fixe, à l’interface solide-liquide il est important de prendre
en compte les limitations cinétiques dues aux processus physiques, comme la diffusion et la
convection. En effet quelle que soit la vitesse d’écoulement ou d’agitation, il existe à l’interface
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
135
solide-liquide une couche de fluide immobile à l’interface solide liquide (couche externe voir le
paragraphe 4.3.1.2 page 74). Pour réaliser l’échange ionique, le soluté doit traverser ce film par
diffusion, c’est ce qu’on appelle classiquement le transfert externe. A cette diffusion externe,
s’ajoute également la diffusion interne dans le solide vers les sites d’échanges (cf. 4.3.1.2 page 74).
Si le solide est méso-poreux et micro-poreux, le soluté doit migrer également à l’intérieur des
pores du solide par diffusion entre les pores avant d’atteindre la surface d’échange. A ces étapes
s’ajoute la mobilité des ions dans la macroporosité due à la convection du fluide au sein du lit
fixe. Il est alors courant définir un temps caractéristique de transfert de masse (tM) de la phase
liquide vers la phase solide qui résulte du couplage de l’ensemble des processus décrit ci-dessus :
transfert dans les pores, transfert externe, transfert interne, et réaction chimique. Il a été montré
que ce temps caractéristique de transfert de masse tM est égal à la somme des temps
caractéristiques de chacun des processus pris séparément [102]. La comparaison du temps de
séjour dans le monolithe avec le temps caractéristique global du transfert de masse permet
d’estimer la pertinence d’un traitement cinétique de la réaction de sorption et de savoir si
l’équilibre thermodynamique est atteint ou non dans les expériences. Il est courant d’utiliser le
nombre de Damköhler comme critère :
reac
c
reac
ck TF
εSL
Tv
LD
.
..=
.= (E56)
Avec Lc : la longueur caractéristique du transport par convection ( en m) qui doit tenir
compte de la tortuosité du milieu, v la vitesse de pore (qui s’exprime en fonction de la porosité ε,
du débit F et de la surface S), et Treac le temps caractéristique réaction d’échange ionique ( en s).
Jennings et al. [102] propose que l’équilibre thermodynamique soit vérifié si Dk est supérieur à
100. Nous n’aborderons pas ces considérations théoriques dans ce mémoire car le nombre des
essais réalisés sur les monolithes sont trop peu nombreux, mais une des perspectives de ce travail
est de modéliser le transport des ions dans ces milieux afin d’optimiser à la fois les
caractéristiques des monolithes et les conditions de leur utilisation.
6.1.3 Modélisation simple des courbes de percée
Comme il a été précisé précédemment la performance des colonnes d’adsorption sur lit
fixe est le plus souvent décrite par des courbes de percée. Il existe dans la littérature de très
nombreux modèles la plupart fondés sur la résolution numérique d’équations décrivant les bilans
de matière dans la colonne. Les modèles les plus simples (modèle d’Adams et Bohart [103],
modèle de Thomas [104]) permettent de traiter ces courbes de percée par des ajustements de
Chapitre VI
136
celles-ci sans l’aide de logiciel de calcul complexes. En revanche ces modèles ne prennent pas en
compte tous les phénomènes physiques liés à l’adsorption. Pour cela, il faut faire appel à des
modèles plus complexes qui prennent en compte l’ensemble des phénomènes que sont le
transport extra et intra particulaire (par l’intervention d’un coefficient de transfert de masse
externe liquide-solide et d’un coefficient de diffusion intraparticulaire), les isothermes, la
compétition éventuelle entre les différents cations en présence, …
Pour cette étude, s’agissant d’une étude préliminaire en mode dynamique, ce n’est pas
l’objet de développer ici un modèle prédictif complet tenant compte des nombreux paramètres
physico chimiques mis en jeu dans la colonne en fonctionnement. Cela pourrait être une
perspective de cette étude. Nous avons donc choisi de modéliser très simplement certaines
courbes de percées par le modèle simple de Thomas, qui est une modification du modèle original
d’Adams et Bohart [104, 105].
Les principales hypothèses de ce modèle sont les suivantes :
℘ L’adsorption d’un seul soluté a lieu (il n’y pas de compétition avec d’autres ions)
℘ La dispersion radiale du fluide lors de la traversée du monolithe est négligeable (nulle)
℘ La cinétique d’adsorption du soluté sur le solide se fait par une cinétique dite de Langmuir
℘ Il n’y pas de limitation cinétique par diffusion interne
℘ Le monolithe a une section constante et des propriétés structurales uniformes sur toute sa
longueur.
Le modèle de Thomas est l’un des plus couramment utilisé pour la modélisation des
courbes de percée. L’obtention de l’équation de Thomas ne sera pas développée dans ce mémoire
mais elle est basée sur une cinétique de réaction de second ordre [104, 105].
)....
exp(= bed tCK-F
mQK1-
C
C0Th
Th0 (E57)
Avec KTh le coefficient cinétique ou la vitesse de transfert de matière (en mL/mg/min),
Qbed la capacité de sorption maximale du lit (en mg/g), m la masse d’adsorbant dans la colonne
(en g), F le débit en mL/min, C0 et C respectivement les concentrations (en mg/mL) en strontium
initiale et au temps t (en min).
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
137
6.2 PRESENTATION DU MONOLITHE
6.2.1 Généralités
Les monolithes macroporeux, préalablement utilisés pour la catalyse en chimie fine, ont
des propriétés intéressantes pour une utilisation en dynamique pour la décontamination liquide
en strontium. Cette mise en forme permet de cumuler les avantages du minéral avec ceux d’un
transfert de matière sans perte de charge du monolithe. Contrairement aux zéolithes sous forme
de pastilles ou de billes utilisées en lit fixe, dont l’anisotropie entraîne des zones de stagnation et
des pertes de charge, une zéolithe monolithique permet de contrôler la dynamique du fluide qui
circule à travers elle. En effet, le monolithe développe de grands volumes grâce aux macropores
de circulations réguliers ou irréguliers. Un monolithe de zéolithe peut être obtenu par
transformation pseudomorphique à partir d’un monolithe silicique [59, 60]. Le pseudomorphisme
est un terme de cristallographie qui décrit la substitution d’une substance à une autre, avec
conservation de la forme du minéral originaire. Les échantillons de zéolithe monolithique utilisés
dans ce chapitre VI sont obtenus à partir de la transformation d’un monolithe silicique en phase
zéolithique tout en conservant la morphologie du monolithe de départ. Cette synthèse a été
réalisée au laboratoire MACS de l’Institut Charles Gerhardt (Montpellier) dans le cadre de la thèse
d’Alexander Sachse sous la direction d’Anne Galarneau.
Monolithe silicique :
D’après la thèse de A. Sachse [60], l’équipe de Nakanishi a été la première à obtenir des
monolithes siliciques à porosité hiérarchisée. La structure présente un système interconnecté de
macropores, homogènes et ajustables (5-10 µm) qui permettent un flux optimal à travers le
monolithe, et de mésopores dans le squelette (6-20 nm) qui permettent une diffusion efficace des
molécules. Ces monolithes ont commencé à être utilisés à partir des années 2000 pour des
applications en chromatographie. Merck commercialise d’ailleurs un monolithe silicique avec des
tailles de macropores et de squelettes de 1 à 2 µm pour des applications en chromatographie
haute performance (Chromolith®).
Les monolithes siliciques à porosité hiérarchique sont obtenus par la combinaison d’un
procédé sol-gel et d’une séparation de phase microscopique. Il est nécessaire d’avoir les deux
phénomènes (gélification et séparation de phase) pour obtenir une structure monolithique
macroporeuse.
La séparation de phase est induite par l’ajout d’un agent structurant, un polyoxyde
d’éthylène (PEO) créant l’interface entre l’eau et la silice, et par la mise en place d’une trempe
Chapitre VI
138
chimique (augmentation brutale de l’enthalpie du système due à l’interaction répulsive entre
polymère et solvant). Dans ce cas, la trempe chimique entraîne une augmentation de l’énergie
libre du système, à l’origine de cette décomposition spinodale. Il est possible de jouer sur la taille
des macropores et l’épaisseur du squelette du monolithe par augmentation de la masse molaire du
polymère PEO ou en modifiant les proportions d’alkoxyde de silicium/polymère.
La mésoporosité est obtenue par traitement basique des monolithes siliciques, celui-ci se
fait par immersion des bâtonnets dans une solution d’ammoniaque (0,1 M) à 40°C pendant 24
heures. La formation de la mésoporosité peut être expliquée par un processus de
dissolution/reprécipitation de la silice amorphe suivant un procédé de mûrissement d’Oswald.
Lorsque la silice précipite, elle est alors sous forme de nanoparticules dans le squelette du
monolithe. Le monolithe est ensuite calciné à 550°C, cette étape permet notamment de faire
disparaitre le polymère PEO du monolithe.
Il est possible d’obtenir des diamètres de mésopores plus grands par augmentation de la
température lors du traitement basique. L’augmentation de la température entraîne une
augmentation de la taille des nanoparticules de silice à l’intérieur du squelette. En parallèle on
observe la diminution de la surface spécifique.
La synthèse d’un monolithe de silice (10 cm de longueur et de 6 mm de diamètre ) est
obtenue dans le cadre de la thèse d’Alexander Sachse suivant le protocole décrit dans son
mémoire de thèse [60] ainsi que dans un article [59].
Monolithe zéolithique :
Un monolithe de zéolithe A peut alors être obtenu par transformation pseudomorphique
du monolithe de silice obtenu tel que décrit précédemment.
Un gel composé d’eau, de soude, de silice et d’un ammonium quaternaire (TPAOH) est d’abord
préparé. Après agitation pendant une heure à température ambiante, il est vieilli à 100°C pendant
16 heures. Une fraction de ce gel est dissoute de l’eau contenant de la soude et de l’aluminate de
sodium NaAlO2 pour obtenir un mélange de composition molaire
SiO2/NaOH/NaAlO2/H2O/TPAOH de 1/0,15/2,16/33/0,004. Le monolithe de silice préparé
précédemment est découpé et immergé dans cette solution. Le monolithe imprégné est ensuite
soumis à un traitement à 100°C pendant 18 heures en bombe hydrothermale. L’utilisation d’un
précurseur de silice sous forme monolithique permet d’avoir une vitesse de dissolution lente de la
silice et d’atteindre localement un rapport NaOH/SiO2 élevé [106]. La présence de tensioactif
influence la formation de petits cristaux de zéolithe et accélère la vitesse de cristallisation de la
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
139
zéolithe. Il est également utile à la stabilité mécanique du monolithe afin d’éviter la formation de
fissures ou de trous.
Suivant les propriétés du monolithe de silice de départ, on peut obtenir des monolithes de
zéolithe A de structure variable. Par exemple, en utilisant un monolithe de silice qui a une
épaisseur de squelette plus grande (6 µm au lieu de 2 µm), la silice se dissout plus lentement et on
obtient alors des cristaux de zéolithe plus cristallisés.
Le monolithe obtenu est ensuite maintenu à l’aide d’une gaine thermorétractable et de
deux embouts en verre. La Figure 59 représente un monolithe de LTA gainé.
Figure 59 : monolithe de zéolithe gainé (diamètre 0,6 cm)
6.2.2 Caractérisation
Avant traitement basique pour former la mésoporosité, un monolithe de silice synthétisé à
partir de PEO de masse molaire 20 kDa présente des macropores d’une taille de l’ordre de 5µm
(Figure 60)
a b
Figure 60 : a-photo d’un monolithe de silice et b- image MEB avant traitement basique
Sa caractérisation par des analyses d’isotherme d’adsorption d’azote (Figure 61a) et par
porosimètrie au mercure (Figure 61b) permet de connaître la micro et la méso porosité du
monolithe.
Chapitre VI
140
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,00
100
200
300
400
500
600
700
800
V
ads (cm
3 /g)
P/P0
a
100 10 1 0,1 0,01 1E-3
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
V (mL/g)
Diamètre (µm)
b
Figure 61 : a- isotherme d’adsorption d’azote (����) avant et (����) après le traitement basique b-porosité au mercure
(données obtenues par Alexander Sachse [60])
Ainsi il est possible de déterminer que le monolithe de silice (après traitement basique
mais avant la transformation pseudomorphique en monolithe de zéolithe) a une surface
spécifique de 580 m²/g et un volume macroporeux de 1,8 mL/g [60]. Le volume mésoporeux est
de 1,2 mL/g et la taille des mésopores est de l’ordre de 9 nm.
Lorsque l’on observe par microscopie électronique à balayage les monolithes avant et
après transformation pseudomorphique (Figure 62), on constate que la structure est conservée.
Figure 62 : Cliché MEB du monolithe silicique (a-c) et du monolithe zéolithique équivalent (b-d) (d’après Sachse [60])
Le squelette initial du monolithe silicique de surface lisse (Figure 62c) a été transformé en
une agglomération de cristaux sphériques de LTA (≈ 300 nm Figure 62d) reproduisant la
morphologie initiale du squelette et du réseau de macropores. La macroporosité bien définie de
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
141
ce monolithe de zéolithe (≈2 µm) et sa cristallisation homogène (Figure 62b), en font un matériau
intéressant pour des applications d’échange ionique sous flux.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
0
20
40
60
80
100
120
140
Vads (cm
3 /g)
P/P0
b
a
référence échantillon MACS: PT 1549C
1000 100 10 1 0,1 0,01 1E-30,0
0,2
0,4
0,6
0,8
volume (m
L/g)
Diamètres (µm)
référence MACS: lot PT 1490C
a b
Figure 63 : a- isotherme d’adsorption/désorption b- porosimètrie au mercure
(����) monolithe de zéolithe au sodium (����) monolithe de zéolithe au calcium [60]
La taille des macropores peut être déduite à partir de la porosimètrie au mercure
(Figure 63b référence laboratoire MACS : PT 1490). On obtient une taille moyenne d’environ
2,1 µm et un volume macroporeux de 0,85 mL/g.
Les isothermes d’adsorption/désorption d’azote (Figure 63a) sur un monolithe de
zéolithe préparé suivant le protocole décrit précédemment (�), sont caractéristiques d’un solide
macroporeux (isotherme BET de type III). Ce type d’isotherme n’est pas caractéristique d’un
matériau microporeux et peut être expliqué par le fait que les cations sodium occupent la totalité
des cages de la zéolithe, empêchant l’adsorption de l’azote. Un échange sodium/calcium de cette
zéolithe permet d’obtenir une isotherme BET de type I (�) caractéristique d’un solide
microporeux. En effet, une moitié de cations est nécessaire dans le cas du calcium pour
compenser la charge négative de la zéolithe, le volume des pores de la zéolithe est alors accessible
à l’azote.
D’après Sachse [60], à partir de la différence de volume poreux entre Na-LTA et Ca-LTA,
il est possible de remonter à la quantité du monolithe de sodium transformé en phase LTA. En
théorie, le volume microporeux pour des cristaux de Ca-LTA pure est de 0,26 mL/g. Le volume
microporeux de 0,12 mL/g dans le cas du monolithe de zéolithe au calcium permet à Alexander
Sachse de conclure que 70% du monolithe initial silicique est transformé en monolithe de
zéolithe A. Il explique cependant que les conditions de dégazage (250°C, 10 h sous vide primaire)
Chapitre VI
142
minimise peut être le volume microporeux. A partir de ces mesures, le volume poreux total
(macro et microporeux) est estimé à 0,97 mL/g.
La diffraction des rayons X, d’un monolithe de zéolithe broyé, est donnée Figure 64. Sur
ce diffractogramme on observe les pics caractéristiques de la zéolithe A, ainsi qu’une bosse
amorphe. Celle-ci correspond probablement à la silice non transformée en zéolithe A.
0 10 20 30 40 50
fiche 00-039-0222 (C)
intensité (U.A.)
2θ (degrés)
référence MACS: lot PT 1549C
Figure 64 : Diffraction des rayons X sur monolithe de zéolithe
L’analyse élémentaire sur un morceau de monolithe de zéolithe broyé nous donne 15%
massique en sodium et 15% massique en aluminium. Par contre, il est impossible de déterminer
une valeur pour le silicium car, selon la prise d’échantillon, l’analyse est différente. Cela s’explique
par la présence d’une phase amorphe de silice dans l’échantillon. Il est donc difficile de
déterminer une formule chimique exacte pour cet échantillon, ainsi que sa capacité d’échange
cationique (CEC). Une valeur de capacité utile Qutile sera déterminée dans l’étude préliminaire en
« batch » sur monolithe broyé ci après et comparée ensuite à la capacité dynamique Qdyn
déterminée par les expériences en dynamique.
6.3 MISE EN PLACE DU PROTOCOLE
6.3.1 Etude préliminaire sur un monolithe broyé
Une étude préliminaire consiste à broyer un monolithe de zéolithe A synthétisée suivant
le protocole de Sachse et al. [106] et de comparer ses propriétés intrinsèques de sorption avec
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
143
celles d’une zéolithe A sous forme de poudre synthétisée précédemment suivant le protocole de
Abd El-Rahman et al. [45]. Pour cette comparaison, nous avons réalisé une étude cinétique.
Cette cinétique se fait avec une solution contenant uniquement de l’acétate de sodium et
du nitrate de strontium avec une concentration totale en cations de 10 méq/L et une fraction
équivalente de strontium en solution égale à 0,9 soit une concentration de 400 mg/L.
0 20 40 60 80 1000,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
PT1527CPT1522C
τ
temps (heures)
référence MACS, lot:
Figure 65 : taux d’échange sodium/strontium en fonction du temps
(����) zéolithe A et poudre de monolithe obtenu avec PEO 20 kDa (����) ou PEO 35 kDa (����)
On observant la Figure 65, on peut dire que la cinétique de sorption est comparable pour
les deux voies de synthèse. L’application du modèle de pseudo second ordre de Ho et Mc Kay
permet d’obtenir les valeurs de Qmax reprises dans le Tableau 23 ci-dessous.
Tableau 23 : Détermination de la quantité maximale adsorbé en strontium et de la constante de vitesse initiale de sorption à partir du modèle de Ho et Mc Kay
Tout d’abord on constate que la quantité de strontium adsorbée par la poudre de
monolithe est inférieure à celle adsorbée par la zéolithe synthétisée suivant le protocole de
Abd El-Rahman. L’équilibre étant atteint, à partir de ces valeurs expérimentales de Qmax et par
comparaison avec l’échantillon Z-a composé à 100% de zéolithe A, on peut obtenir de manière
précise la teneur réelle en zéolithe A dans les échantillons broyés de monolithe. L’échantillon
Z-a PEO 20 kDa ( lot PT1527C)
PEO 35 kDa (lot PT1522C )
Qmax (méq/g) 5,4 4,6 3,4 Teneur en zéolithe A 100% 85% 63%
h (mg/g/min) 13,1 5,6 1,5 k (g/mg/min) 2,3.10-4 1,4.10-4 6,7.10-5
Chapitre VI
144
broyé de monolithe synthétisé à partir de polyoxyde d’éthylène de masse molaire 20 kDa serait
alors composé de 85% de zéolithe A et celui synthétisé à partir de PEO à 35 kDa de 63% de
zéolithe A.
Ces résultats montrent que la masse molaire de PEO joue sur la quantité de silice
amorphe et de zéolithe A.
Le monolithe synthétisé à partir de polymère PEO de masse 20 kDa ayant une capacité de
sorption vis-à-vis du strontium plus grande, les monolithes utilisés pour les expériences en
dynamique seront synthétisés à partir de PEO 20 kDa (références MACS : lot PT1549C).
Cette cinétique ayant été réalisée sur une solution contenant peu de sodium, il a été
possible de quantifier la concentration en sodium en fonction du temps par analyse
chromatographique. Lorsque l’on représente l’évolution des concentrations en sodium et en
strontium (Figure 66) en fonction du temps, on constate que quantitativement en tenant compte
de la différence de charge entre les deux ions, la quantité de strontium qui disparaît de la solution
est équivalente à la quantité de sodium qui apparaît. Ce résultat confirme que la sorption du
strontium se fait bien par une réaction d’échange d’ions entre le sodium de la structure et le
strontium de la solution.
0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5 4,00,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
3,0
quantité d'ions (méq)
temps (jours)
Na
Na+Sr
Sr
référence MACS: lot PT1527C
Figure 66 : suivi des variations de sodium et strontium en solution lors de la cinétique
Dans la suite de l’étude, il sera considéré que tous les monolithes d’un même lot et à plus
grande échelle, tous les monolithes synthétisés suivant le même mode opératoire (PEO, T°C,…),
ont les mêmes propriétés physico-chimiques (teneur en zéolithe A, porosité, …). Le monolithe de
zéolithe synthétisé à partir de PEO 20 kDa est donc supposé être composé à 85% de zéolithe A
quel que soit le lot.
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
145
6.3.2 Montage pour un procédé continu
La synthèse possible d’une zéolithe A sous une forme monolithique permet son utilisation
immédiate pour un procédé en continu. En effet, comme représenté Figure 67, grâce à une
pompe péristaltique, une solution de concentration connue, circule à travers le monolithe. La
solution en sortie de colonne est récupérée et analysée par chromatographie ionique ou par
scintillation lorsque la solution est dopée en strontium radioactif.
Figure 67 : schéma de montage du monolithe en dynamique
6.4 RESULTATS
Les résultats présentés dans cette section sont peu nombreux faute de temps et de
disponibilité de monolithes. Les conclusions apportées ne peuvent donc être que préliminaires.
Une des perspectives de cette thèse est de poursuivre dans cette voie.
Les résultats vont être présentés sur quatre monolithes dont les caractéristiques sont
Tableau 25 : Caractéristiques des monolithes 2 et 3
et mesure des capacités dynamiques Qdyn et maximales Qbed * à partir du modèle de Thomas et de l’ajustement de (C0/C-1) par une équation de type exp(A+Bt)
Avec un débit plus faible, on augmente le temps de séjour TS mais surtout on augmente
significativement la capacité dynamique à 10% qui est un paramètre simple permettant de
comparer les essais entre eux. Néanmoins, cette capacité à 10% est toujours beaucoup plus faible
Chapitre VI
150
que la capacité utile. Cette différence importante peut être attribuée à un échange ionique
fortement limité par la cinétique au sein du monolithe.
Lorsque la courbe de percée est représentée classiquement en fonction du temps (Figure
69) il est difficile de comparer directement deux essais réalisés avec des débits différents. De plus,
comme les monolithes n’ont pas la même longueur, le temps de sortie du strontium est
dépendant de l’essai. Pour comparer les deux monolithes, il est classique de représenter comme
sur la Figure 70 la concentration en fonction du nombre de lit percolé (BV). Cela permet de
présenter graphiquement l’évolution des valeurs observées dans le Tableau 25.
Lorsque la concentration normalisée est représentée en fonction du volume de lit
parcouru, on constate que la percée a lieu plus ou moins tôt en fonction du débit. Plus le débit est
élevé, plus le front de percée est étalé.
0 2000 4000 6000 8000 10000 120000,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,03
C/C
0
BV
2
Figure 70 : suivi de la concentration en strontium en sortie de monolithe débit : (����) 0,15mL/min soit 12 BV/h (����) 0,5mL/min soit 60 BV/h
Lorsque l’on compare (Tableau 25) la capacité dynamique à 10% et la capacité du
monolithe Qbed à partir du modèle de Thomas à la capacité utile (2,8 meq/g), on constate que
Qdyn(10%) et Qbed sont inférieures à Qutile. L’équilibre thermodynamique n’est donc pas atteint.
On constate que la diminution du débit entraîne une augmentation de la capacité du monolithe
d’un facteur 3. En jouant sur d’autres paramètres tels que la hauteur et/ou le diamètre du lit, nous
devrions augmenter les capacités du monolithe afin d’utiliser au mieux le monolithe en étant le
plus proche possible de la capacité utile.
Adsorption du strontium sur solide : monolithe
151
Lorsque l’on compare la capacité de lit obtenue à un débit de 0,15 mL/min, soit une
valeur Qbed égale à 1,4 méq/g, avec la capacité d’une zéolithe A au calcium recouverte d’
(Watanabe et al. [58]) Qbatch=0,8 méq/g, on constate que le monolithe de zéolithe est nettement
meilleur pour la décontamination en strontium. Il est cependant compliqué de comparer les deux
matériaux car les expériences sont réalisées dans deux systèmes différents (continu VS batch).
El-Kamash [50] optimise une colonne de zéolithe A en faisant varier la hauteur de la colonne, la
masse d’adsorbant et également le débit. Plus la hauteur de lit est importante, plus on retient de
strontium. Plus la concentration en strontium est élevée ou plus le débit est élevé, plus la fuite
apparaît rapidement. Son étude montre un Qbed égale à 60,5 mg/g soit 1,4 méq/g pour une
colonne de 6 cm contenant 140 mg de zéolithe A à travers laquelle percole une solution
contenant du Sr2+ à une concentration de 50 mg/L et à un débit de 3,12 mL/min.
a b c
Figure 71 : courbes de percée obtenue par El-Kamash [50]
a- effet de la hauteur de lit b- effet du débit
c- effet de la concentration en strontium
Pour chaque monolithe, en intégrant la courbe C=f(V), on obtient la concentration
cumulée à chaque volume. On peut ainsi calculer le facteur de décontamination cumulé FDc
c’est-à-dire le facteur de décontamination dans l’hypothèse ou l’on récupère la totalité de la
solution en sortie de monolithe dans la même cuve.
c
0c C
CFD = (E58)
Dans le cas des 2 essais, on obtient la Figure 72 ci-dessous.
Chapitre VI
152
0 2000 4000 6000 80000
200
400
600
800
1000
3
FD
c
BV
2
Figure 72 : facteur de décontamination en fonction de la quantité de solution passée
débit : (����)0,15mL/min soit 12 BV/h (����) 0,5mL/min soit 60 BV/h
On constate que le facteur de décontamination chute plus tôt, lorsque le débit est élevé.
Si l’on souhaite décontaminer un volume important avec un facteur de décontamination
élevé, il faut alors se placer à débit faible. Par contre, si le procédé de décontamination ne
nécessite pas un facteur de décontamination élevé, la fuite étant plus rapide avec la diminution du
débit, l’avantage d’être à petit débit n’est plus aussi évident. L’exemple est donné dans le Tableau
26, ou l’on constate que la différence de volume traité entre les deux débits pour un facteur de
décontamination de 10 n’est pas aussi conséquente que pour un FD de 250.
Tableau 27 : Volumes introduits de strontium/calcium et de sodium pour la thermodynamique
166
ANNEXE 2
Plusieurs modèles thermodynamiques permettent de décrire l’extraction d’ions en
solution par un échangeur ionique. Ces modèles sont tous basés sur les mesures des isothermes
de sorption. Une isotherme de sorption d’une espèce D représente la quantité de D adsorbée par
le solide en en fonction de la concentration de l’espèce D en solution à l’équilibre (en méq/L).
Il existe plusieurs types d’isothermes représentées sur la Erreur ! Source du renvoi
introuvable. :
Différents types d’isothermes
Isotherme de type C
L’isotherme de type C est linéaire. Le rapport entre la concentration en solution et la
concentration adsorbée est constant à toute concentration. Ce rapport est généralement appelé
« coefficient de distribution » Kd (défini dans le paragraphe 4.4.1.1) Cette isotherme de type C est
très souvent utilisée pour de très faibles concentrations. Si le solide possède une quantité limitée
de sites d’adsorption, alors l’isotherme n’est plus linéaire et on peut alors observer un plateau.
Isotherme de type L
Le rapport entre la concentration en phase solide et la concentration en solution décroît
quand la concentration augmente. La forme concave de la courbe suggère que le solide est
progressivement saturé. Il existe deux sous catégories d’isotherme de type L, la première
correspondant à un solide avec une capacité maximale bien définie (courbe avec plateau) et la
seconde correspondant à un solide ne présentant pas une capacité de sorption limitée, les sites de
sorption étant plus occupés, la sorption continue de se faire mais moins rapidement.
Isotherme de type H
167
L’isotherme de type H est une isotherme particulière de type L. La forte pente de début
de courbe laisse à penser que le cation sorbé a une affinité très forte pour le solide. La pente
semble infinie, même si d’un point de vue thermodynamique ce n’est pas possible.
Isotherme de type S
L’isotherme de type S est une courbe sigmoïdale c'est-à-dire qu’elle présente un point
d’inflexion. Ce type d’isotherme est le résultat d’au moins deux mécanismes de sorption opposés.
Ce phénomène a lieu, par exemple, lorsque les cations ont une faible affinité pour une surface
minérale chargée, ils ne se sorbent pas facilement. Mais plus la surface du solide est recouverte
d’ions, plus la sorption d’autres cations est facilitée.
168
ANNEXE 3
Correspondance Bq/L – mol/L pour le Strontium 90
L’activité de la solution est en Bq/L et s’exprime ainsi :
A=λ.N
Avec A l’activité en Bq/L et N la concentration en moles.
Avec λ constante radioactive ( en s-1) qui s’exprime
ln=
21T
2λ
Pour le 90Sr, la période de demi-vie, T1/2 est égale à 29 ans.
Donc la constante radioactive λ est égale à 7,5 10-10 s-1.
La concentration en strontium en mol/L s’exprime alors ainsi :
A1022λ
A
10026
1C 15-
23 .,=.,
=
La concentration en strontium en mg/L s’exprime :
A1091C 13-.,=
169
ANNEXE 4
Isotherme de sélectivité sodium/strontium sur une zéolithe A (échantillon Z-e)
Concentration totale en cations de 0,04 éq/L
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
X
Sr
XSr
Cf=10 mg/L
171
PUBLICATION
9 PUBLICATION
173
174
175
176
177
178
179
180
181
183
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