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Essai dune nouvelle determination des responsabilites
des constructeurs en matiere de risques du sol :
linfluence technique
Cecile Ripert
To cite this version:
Cecile Ripert. Essai dune nouvelle determination des
responsabilites des constructeurs enmatiere de risques du sol :
linfluence technique. Droit. Universite du Sud Toulon Var,
2008.Francais.
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https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00350449
Submitted on 6 Jan 2009
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UNIVERSITE DU SUD TOULON VAR
ESSAI DUNE NOUVELLE DETERMINATION DES RESPONSABILITES DES
CONSTRUCTEURS EN MATIERE DE RISQUES DU SOL : LINFLUENCE DE LA
TECHNIQUE
THESE POUR LE DOCTORAT DETAT EN DROIT PRIVE prsente et soutenue
publiquement devant la Facult de Droit par
Ccile RIPERT
Directrice de recherches :
Madame Vronique NICOLAS, Professeur agrg lUniversit de
Nantes
Jury :
Monsieur Jean-Louis BERGEL, Professeur agrg lUniversit Paul
Czanne dAix-en-Provence
Monsieur Dominique GARBAN, Conseiller la Cour de cassation
Monsieur Alain GUILLOTIN, Matre de confrences lUniversit du Sud
Toulon Var
Madame Vronique NICOLAS, Professeur agrg lUniversit de
Nantes
Madame Corinne SAINT-ALARY-HOUIN, Professeur agrg lUniversit des
Sciences sociales de Toulouse I
- 24 novembre 2008 -
-
2
LUniversit nentend donner aucune approbation ou improbation
aux
opinions mises dans les thses ; ces opinions doivent tre
considres comme propres leurs auteurs.
-
3
A mon pre.
-
4
Le pass est comme la distance ; notre vue y
dcrot, et sy perdroit de mme, si lhistoire et la chronologie
neussent plac des fanaux, des flambeaux aux points les plus obscurs
: mais, malgr ces lumires de la tradition crite, si lon remonte
quelques sicles, que dincertitudes dans les faits ! que derreurs
sur les causes des vnements ! et quelle obscurit profonde
nenvironne pas les temps antrieurs cette tradition ! 1.
1 G. L. Le Clerc, comte de Buffon, uvre compltes de Buffon, par
M. A. Richard, tome I, Dufour, Mulat, Boulanger libraires diteurs,
Paris, 1856, p.479.
-
5
SOMMAIRE
Rsum.... p.7
Introduction... p.8 PREMIERE PARTIE - DES IMPUTATIONS DE
RESPONSABILITES INSATISFAISANTES... p.23 TITRE I - UNE
INSATISFAISANTE REPARTITION DES
RESPONSABILITES CONTRACTUELLES EN MATIERE DE RISQUES DU SOL..
p.25
SOUS-TITRE I - LIMPRECISION DES ROLES DES
INTERVENANTS, PARFOIS SOURCE DINIQUITE... p.31 CHAPITRE I LE
ROLE PRECIS DE LENTREPRENEUR, SOURCE
DEQUILIBRE . p.33 CHAPITRE II LABSENCE DE PRECISION DES
ATTRIBUTIONS
DES TECHNICIEN ET MAITRE DUVRE, SOURCE DE CRITIQUES.. .. .
p.53
SOUS-TITRE II LA RIGIDITE LEGALE EN MATIERE DE
CONTRATS A PRIX FORFAITAIRE, PARFOIS SOURCE DINIQUITE.. p.95
CHAPITRE I LE CONTRAT DETUDE PREALABLE, SOURCE DE
REDUCTION DES RISQUES DU SOL DANS LE MARCHE A FORFAIT GENERAL..
p.97
CHAPITRE II LAMELIORATION DU CONTRAT DE
CONSTRUCTION DE MAISON INDIVIDUELLE, SOURCE DE MINORATION DES
RISQUES DU SOL..... p.112
TITRE II UNE INSATISFAISANTE ATTRIBUTION DES
RESPONSABILITES DELICTUELLES EN MATIERE DE RISQUES DU SOL.
p.133
CHAPITRE I UNE JURISPRUDENCE SATISFAISANTE
RELATIVE AU FAIT PERSONNEL ET LA GARDE DE LA CHOSE. p.138
CHAPITRE II CRITIQUE DE LA JURISPRUDENCE FONDEES SUR
LES TROUBLES ANORMAUX DE VOISINAGE. p.171
-
6
DEUXIEME PARTIE LE DEFICIT DINFORMATION
TECHNIQUE, SOURCE DINIQUITE.. p.216
TITRE I LAPPRECIATION DES RESPONSABILITES POSTERIEURES A LA
RECEPTION CONDITIONNEE PAR LA PRECISION TECHNIQUE.... p.217
CHAPITRE I LINFORMATION TECHNIQUE ESSENTIELLE POUR
LA MISE EN UVRE DE LA RESPONSABILITE DECENNALE.. p.222
CHAPITRE II LA TECHNIQUE A LAIDE DE LENCHEVETREMENT DES
RESPONSABILITES APRES LA RECEPTION p.277
TITRE II LAPPRECIATION DES CAUSES DEXONERATION
PARFOIS ALTEREE PAR UNE ABSENCE DE RIGUEUR TECHNIQUE...
p.310
CHAPITRE I UNE INFORMATION TECHNIQUE DETERMINANTE... p.312
CHAPITRE II LAPPROCHE TECHNIQUE INEVITABLE DE LA
FORCE MAJEURE.. p.340
Conclusion... p.389 Principales abrviations utilises.. p.396
Rfrences bibliographiques.. p.399
Index... p.440
Table des matires. p.443
-
7
Rsum
Lanalyse des responsabilits des constructeurs en matire de
risques du sol amne deux constats.
Dune part, lattribution des responsabilits est parfois
insatisfaisante, ceci est remarquable en responsabilits
contractuelle et dlictuelle : une plus grande rigueur dans les rles
dvolus certains constructeurs est ncessaire.
Dautre part, le dficit de communication entre le technicien et
le juge est patent ; cet aspect intresse avant tout la
responsabilit dcennale et les causes dexonration de responsabilit :
la qualit de linformation dlivre par le technicien est
amliorer.
En matire contractuelle, la mission VISA de larchitecte ncessite
une
rvaluation. Les missions L et Av du contrleur technique
devraient tre indissociables en secteur urbain. Le contrat de
construction de maison individuelle serait amlior par lauto
information du constructeur (consultation des documents gologiques
disponibles), outre une assurance risques du sol.
En matire dlictuelle, le fondement rel retenu pour lapplication
de la
thorie des troubles anormaux de voisinage aboutit parfois des
dcisions iniques. Les causes dexonration posent difficult travers
la force majeure ; une
dmarche progressive intressant lextriorit, limprvisibilit,
lirrsistibilit pourrait constituer une voie de rationalisation.
Concernant les responsabilits en jeu aprs la rception, il est
souhaitable
de se rfrer aux fonctions stabilit, protection, usage pour
rationaliser les approches de louvrage et de llment dquipement,
outre lextension de la notion dindissociabilit.
-
8
1. Et sept sacrificateurs porteront sept cors de bliers devant
larche ; mais
au septime jour vous ferez le tour de la ville sept fois, et les
sacrificateurs sonneront les cors ; et quand ils sonneront avec
force avec le cor de blier, aussitt que vous entendrez le son du
cor, tout le peuple jettera un grand cri de joie, et la muraille de
la ville tombera sous soi () 2. La destruction des murailles de
Jricho en Palestine par les Hbreux conduits par Josu vers 1225
avant Jsus-Christ savre tre un exemple de lintrt que lhomme a
toujours port la stabilit des difices sur leur assise : le sol. En
effet, en 1931, le major Toulok entreprit des investigations
lemplacement de ces murs et constata quils reposaient sur une
fondation constitue par une couche de pierres. Cette dernire
paraissait stre dplace latralement vers lextrieur et avoir gliss
comme si une tranche avait t creuse le long de sa base. Le major
Toulok croit avoir expliqu ainsi dune manire rationnelle une trs
vieille nigme ; cela prouverait en tout cas que les Hbreux avaient
une certaine connaissance des phnomnes intervenant dans la stabilit
des fondations 3. Plus proche de nous, la tour de Pise, difie de
1173 1272, constitue lexemple universellement connu de tassements
diffrentiels imputables lhtrognit des couches sous-jacentes du sol.
Plus prcisment, est en cause une couche dargile situe huit mtres
sous les fondations4. Si la tour de Pise est illustre, cela ne
tient pas son architecture, mais ce que certains qualifient
improprement de vice : le vice du sol.
2. Depuis des temps immmoriaux, lhomme se proccupe de la prennit
des
constructions quil difie, et cela dans un but civil ou
militaire, comme dans lexemple prcit. Hormis quelques rares
incursions, le plus souvent aides, dans leau et lair, ltre humain
se limite son lment de prdilection : la terre. Ce souci de prennit
est dict par la recherche dune protection de son habitat et de son
activit. Ainsi, pour lhomme, le sol donne limage mme de la
stabilit. Ni les modifications locales par rosion ou sdimentation,
ni les sismes ne mettent en cause cette rfrence. Alors, quand le
sol se drobe, lhomme est dsempar () Aux phnomnes naturels sajoutent
ceux que lactivit humaine induit ou acclre par le creusement de
cavits en tout genre et par lextraction des fluides du terrain
5.
2 Josu chapitre VI, Prise miraculeuse de Jerico Rabah sauve, La
Bible. 3 J. Costet, G. Sanglerat, Cours pratique de mcanique des
sols tome II, Dunod, 2e d., 1977, p.330. 4 J. Costet, G. Sanglerat,
Cours pratique de mcanique des sols tome II, Dunod, 2e d., 1977,
p.331. 5 P. Duffaut, Affaissements de sol , Encyclopdia
universalis, 2002.
-
9
3. Le sol est la partie superficielle de la crote terrestre,
ltat naturel ou
amnage pour le sjour de lhomme 6. Il se dduit de cette dfinition
que les sols prsentent deux facettes : celle inhrente aux sols
naturels, ventuellement altrs par lhomme, et celle relative aux
sols artificiels. Dans le premier cas, va se poser le problme des
mouvements de terrain, terme regroupant divers phnomnes, naturels
ou induits par laction de lhomme. Selon quils sont profonds et plus
ou moins brutaux, on parle daffaissement, tassement ou
effondrement. Selon quils sont superficiels et gravitaires ou lis
leau, on voque les glissements de terrain, les croulements de
blocs, le phnomne de retrait-gonflement, les coules boueuses,
lrosion littorale7. Ces phnomnes affectent, le plus souvent, la
stabilit de lensemble de la construction. Dans le deuxime cas, seul
le plan horizontal o est exerce une activit est concern8, lampleur
est donc moindre, au regard de ldifice tout entier, si lon raisonne
en terme de btiment.
4. Avant de se consacrer laspect juridique, il nest pas inutile
de prciser
certaines notions techniques. Tout dabord, la reconnaissance des
sols poursuit deux objectifs : dune part, la localisation des
diffrentes couches du terrain, dautre part, leurs caractristiques.
Il est bien vident quun programme de reconnaissance de sols est
fonction des caractristiques de louvrage raliser et de la nature
gologique de la zone tudie () Lhtrognit des sols est telle, en
effet, que mme dans une zone suppose bien connue et dite homogne ,
des anomalies locales sont toujours craindre 9. Ensuite, les lois
physiques de comportement des sols fins ne sont pas, encore
aujourdhui, cernes avec prcision10 et les modles mathmatiques les
concernant sont sujets erreur, ce qui induit des imprcisions
lorigine de certains dsordres11. Enfin, les fondations sont les
parties enterres dun ouvrage qui lui servent de base par
lintermdiaire dappuis ; elles transmettent au gomatriau les charges
que supportent ces appuis 12. Il sen dduit un constat technique13,
qui est
6Le Grand Robert de la langue franaise, 1992. 7 Affaissement :
volution de cavits souterraines dont leffondrement est amorti par
le comportement souple des terrains superficiels . Tassement :
diminution de volume de certains sols, sous leffet des charges
appliques et de labaissement du niveau des nappes aquifres par
surexploitation . Effondrements : dplacement verticaux instantans
de la surface du sol par rupture brutale de cavits souterraines .
Glissement : dplacement par gravit dun versant instable .
Ecroulement et chutes de blocs : rsultent de lvolution de falaises
. Phnomnes de retrait-gonflement : lis aux changements dhumidit des
sols trs argileux . Coules boueuses : transport de matriaux sous
forme plus ou moins fluide . Erosion littorale : recul de la zone
littorale. X. Larrouy Castera, J. P. Ourlac, Risques et urbanisme,
Le Moniteur, 2004, n2. 1.2, p.29. 8 Il sagit par exemples de la
voirie, des planchers, des revtements de sol, des sols sportifs. 9
J. Costet, G. Sanglerat, Cours pratique de mcanique des sols tome
II, Dunod, 2e d., 1977, p.293 10 Devant les insuffisances actuelles
des modles prvisionnels de comportement des sols notamment dans les
zones complexes comme les environnements urbains, une solution
intressante consiste piloter lexcution des travaux en fonction de
mesures faites en continu sur le chantier , cest ce qui est appele
la mthode observationnelle laquelle se heurte laspect contractuel.
J. Beideler, Creuser la connaissance des sols , Le Moniteur du 8
juin 2007. 11 J. Beideler, Creuser la connaissance des sols , Le
Moniteur du 8 juin 2007. 12 P. Martin, Gomcanique applique au BTP,
Eyrolles, 2e d. , 2005, p.223. 13En cas de dommage louvrage, sauf
erreur gotechnique grossire, on doit poser en principe que le sol
nest pas vicieux comme disent les juristes, mais que louvrage a t
mal
-
10
peu peu admis par la doctrine : un sol nest pas vicieux en
lui-mme, il ne lest que par rapport louvrage auquel il sert de
support 14.
5. Corollaire de la difficult technique15 que prsente le sol
naturel, limpact
financier, inhrent ladaptation au sol des fondations de la
construction dj en place en cas de sinistre, est, la plupart du
temps, considrable. Pour les seuls sinistres affectant les
fondations des maisons individuelles sous garantie dcennale, le cot
annuel des rparations tait en 2003 de 25 millions deuros pour
environ 1500 sinistres16. Si lon sattache au phnomne de
scheresse17, en dix ans ce risque naturel (la scheresse) est devenu
en France par les montants engags, la deuxime cause dindemnisation
aprs les inondations dans le cadre du rgime des catastrophes
naturelles () la Caisse centrale de rassurance estime plus de 3
milliards deuros le montant total des remboursements pour la seule
priode 1989-2002, sans compter les sinistres pris en charge par la
garantie dcennale dans le cas de maisons rcentes () aprs lt 2003,
elles (les communes) taient 7000 demander leur classement en tat de
catastrophe naturelle 18. Si les sinistres affectant les fondations
ne sont pas les plus frquents, ils sont dun montant unitaire lev19
et ils constituent une cause
implant, mal tudi, mal construit et/ ou mal entretenu. Les
vhicules terrestres, aquatiques ou ariens sont soumis des
mouvements quasi permanents gnralement violents et durables ; leurs
structures sont adaptes aux contraintes qui en rsultent ; si lun
deux est endommag on accuse sa construction, son tat ou sa manuvre,
pas son support . P. Martin, Gomcanique applique au BTP, Eyrolles,
2e d. , 2005, p.75. 14 F. Moderne, Les vices du sol et la
responsabilit dcennale des constructeurs dans la jurisprudence
administrative , Cahiers juridiques de llectricit et du gaz, 1974,
Chron., p.1. 15 On sait que le sol est un milieu dont lexploration
est particulirement difficile et ncessairement limite. Les moyens
dinvestigation dont on dispose sont ponctuels et leur prcision
toute relative. Linterprtation et lextrapolation des rsultats dune
campagne de sondage gotechnique comporte toujours des risques
derreurs, notamment dans les sites trs htrognes () Dans ce domaine,
comme dans dautres, la mise au point dappareils et de mthodes
dinvestigations de plus en plus sophistiques ne doit pas crer
lillusion de la prcision et de lexactitude . Toute exploration
souterraine a un caractre fondamentalement incomplet et
approximatif : on ne peut rduire le sol des quations ou une srie de
coefficient . Socotec, Les dsordres dans le btiment, Le Moniteur,
1999, p. 15. 16 F. Valle, G. Codina, Mouvement de fondations en
maisons individuelles , Sycods, n76, janvier fvrier 2003, p.53. 17
Les forces de la nature se partagent entre deux grandes catgories.
Elles sont soit goclimatiques, soit gomorphologiques, mais en
nombre de circonstances les faits gnrateurs peuvent entrer en
synergie, ce qui est le cas de certains mouvements de terrains
dclenchs ou intensifis la suite dune importante pluviosit () Le cas
le plus vident, en France, est la monte en puissance dun phnomne,
nagure rarement pris en compte, les mouvements de terrain
diffrentiels, conscutifs la scheresse puis la rhydratation des
sols, avec des effets de fragilisation et de dsordres dans le gros
uvre et le second uvre des btiments . J. Dubois- Maury, C. Chaline,
Les risques urbains, A. Colin, 2002, p.36. En 1976, 1989 et 1990 la
scheresse posait des problmes dalimentation en eau, mais pas
seulement, car depuis deux ans lasschement des sols a pour
consquence dimportants dsordres dans les constructions et plus
prcisment dans les fondations . B. Aldebert, Fondations alerte la
scheresse , Le Moniteur du 16 aot 1991. 18 I. Duffaure-Gallais,
Scheresse attention aux constructions sur sol argileux , Le
Moniteur du 5 aot 2005. 19 Inspections gnrales des Finances, des
Ponts et Chausses et de lEquipement, Lassurance construction en
France Recommandations en vue damliorer les dispositifs de
responsabilit et dassurance construction , Le Moniteur du 4 mai
2007.
-
11
rcurrente de proccupation pour les compagnies dassurance20. On
le voit, les risques lis au sol, auxquels une construction sexpose,
peuvent se rvler dune extrme gravit, tant du point de vue
financier, travers, par exemples, le cot de confortement des
fondations ou les frais de relogement, que du point de vue humain,
travers le prjudice corporel.
6. Le sol prsente donc des risques : le risque technique pouvant
aller jusqu
la ruine totale de ldifice, et toutes les autres consquences que
cela peut entraner, y compris en matire corporelle, sans compter le
risque financier. La doctrine qualifie de risque21 naturel la
conjonction dun phnomne naturel et de lexistence de biens et
activits pouvant subir des dommages, et de personnes pouvant subir
des prjudices 22. Cette dfinition sapplique au risque du sol23 ou,
plus exactement, aux risques du sol, tant les cas de figure sont
nombreux. Les risques inhrents au sol naturel concernent donc tant
sa substance, que ce quil contient, ou encore ce quil vhicule ; il
sagit des mouvements des couches superficielles et des crues24,
ainsi que des mouvements des couches profondes, y compris altres
par lactivit humaine, les mines25 en sont un exemple, et les nappes
phratiques26. Dailleurs, les plans de prventions des risques, dits
P.P.R., regroupent cinq risques naturels lis la terre - mouvement
de terrain27, sisme, ruptions volcaniques -, et leau -
inondation,
20 Les assureurs veillent prserver un quilibre (celui de la
branche construction) comptable encore fragile. Mais plusieurs
points les proccupent () Un autre concerne les risques du sol : la
plupart des sinistres importants ont en effet pour origine un vice
du sol G. Defrance, Lquilibre de la branche construction est
fragile , Largus de lassurance du 19 octobre 2007, p.28. La MAAF,
dans le cadre dun partenariat MAAF/CAPEB, a propos depuis fin 2006,
une rduction de moiti du prix dune assurance Dommages Ouvrage si
une tude de sol a t faite en pralable ldification de la villa. S.
Deluz, Maison individuelle Quand lassurance promeut les tudes de
sol , Le Moniteur du 11 janvier 2008. 21 Un vnement potentiellement
dangereux appel ala - ne devient un risque que sil sapplique une
zone o des enjeux humains, conomiques ou environnementaux sont
prsents . X. Larrouy Castera, J. P. Ourlac, Risques et urbanisme,
Le Moniteur, 2004, n 1.1 22 Risques technologiques et naturels,
2005, Dictionnaire permanent Construction urbanisme, Ed.
Lgislatives, p.4893, n61. 23 Le risque du sol en matire de
construction peut tre dfini comme lensemble des consquences
dfavorables pouvant rsulter de la nature du sol, tant au cours des
travaux quaprs leur achvement, mettant en cause louvrage mme ou son
environnement, et imputables aux divers participants lacte de
construire : matres douvrage, matres duvre, techniciens dont ils se
sont assurs la collaboration et entrepreneurs . J. Catz, Le matre
duvre et le risque du sol , Cahiers juridiques de llectricit et du
gaz, septembre 1981, p.59. 24 Au sujet de la loi du 30 juillet 2003
: B. Magois, Zone inondable , J.C.P., Ed. N, 14 mai 2004, 1238. 25
En dpit de multiples tudes, nul nest en mesure aujourdhui daffirmer
la cause de ces effondrements ( miniers) . P. Braun, La Lorraine
panse les cicatrices de laprs mine , La Gazette des communes du 4
septembre 2006. 26 J. J. Guillermain, Les problmes techniques lis
la remonte de la nappe phratique dans le cadre de la sauvegarde et
de la gestion des parkings , Administrer, janvier 1990, p.22.
27Concernant le retrait-gonflement des argiles, le BRGM a tabli une
cartographie de cet alas . Une cinquantaine de dpartements les plus
touchs est concerne. Les PPR retrait-gonflement des argiles sont
prescrits par arrt prfectoral au vu des cartes dala tablies par le
BRGM () ils nentranent pas dinconstructibilit mais imposent
certaines exigences constructives.
-
12
avalanche - outre ceux relatifs au feu - incendie -, et aux
intempries - tempte, cyclones. Il faut rappeler cette occasion qu
travers larticle L.110 de Code de lurbanisme, les collectivits
publiques ont lobligation dassurer la scurit et la salubrit
publiques . Cette obligation se traduit travers les schmas de
cohrence territoriale et les plans locaux durbanisme. Ceux-ci
doivent en particulier assurer la prvention des risques naturels
prvisibles 28. Les plans de prvention des risques naturels29
constituent des servitudes dutilit publique et sont annexs aux
plans locaux durbanisme.
7. En cas de dommages affectant la construction, en cours
ddification ou
aprs rception, le matre douvrage va bien sr rechercher la
responsabilit des constructeurs. A cot des responsabilits
contractuelle et dlictuelle de droit commun30, le droit spcial de
la construction, travers les articles 1792 et suivants du Code
civil, a pris une place majeure. En effet, avec le recul du temps,
il apparat un double mouvement : dune part, une extension
progressive, mais considrable, du domaine du droit spcial ; dautre
part, une extension au droit commun du rgime du droit spcial 31.
Limportance du droit spcial est particulirement vraie en risques du
sol puisque, ds llaboration du Code civil de 1804, le vice du sol
fait partie des proccupations du lgislateur.
8. En effet, les travaux prparatoires du Code civil, ayant
abouti au dcret du
26 ventse de lan XII (17 mars 1804) et larticle 1792 de ce Code,
ont t lobjet de dbats ayant trait au sujet, certains stonnant de la
responsabilit du constructeur inhrente au vice du sol. Il leur a
alors t rpondu : larchitecte est oblig ou de remdier au vice du
sol, ou davertir le propritaire que la construction naura pas de
solidit () on a toujours suivi cette rgle () si ldifice donn prix
fait prit par le vice du sol, larchitecte en est responsable, moins
quil ne prouve avoir fait au matre les reprsentations convenables
pour le dissuader dy btir () le propritaire ne connat pas les rgles
de la construction, cest larchitecte de len instruire et de ne pas
sen carter par une complaisance condamnable32. Ces dbats, toujours
minemment dactualit, ont abouti la premire version de larticle 1792
du Code civil, reflet de ces discussions sur les risques du sol :
si ldifice construit prix faits prit en tout ou partie par le vice
de la construction, mme par le vice du sol, les architectes et
entrepreneurs en sont responsables pendant dix ans .
9. Limportance du sol en matire de garantie due au matre
douvrage ne se
dment pas, puisque la loi du 3 janvier 1967 continue le
mentionner nommment : si ldifice prit en tout ou partie par le vice
de la construction, mme par le vice du
I. Duffaure-Gallais, Scheresse attention aux constructions sur
sol argileux , Le Moniteur du 5 aot 2005. 28 Article L.121-1 du
Code de lurbanisme. 29 B. Magois, Plan de prvention des risques
naturels , J.C.P., Ed. N, 4 juin 2004, 1263. 30 Soulignons tout
dabord que ce sujet (la responsabilit des dommages louvrage en
cours de construction) na pas fait lobjet de dveloppements
abondants tant en doctrine quen jurisprudence . J. Catz, Les
constructeurs et le risque du sol, Le Moniteur,1985, p.142, n517.
31 Mlanges la mmoire du professeur Roger Saint-Alary, P. Malinvaud,
Bilan et perspectives de la responsabilit des constructeurs.
1967-2004 , Presses de luniversit des sciences sociales Toulouse,
2006, p.358. 32 Cit dans J. M. Berly, Labsence douvrage (qui doit
supporter la cration de louvrage dont labsence est lorigine des
dsordres ? ) , Gaz. Pal. du 12 avril 1994, Doctrine, p.403.
-
13
sol, les architectes, entrepreneurs et autres personnes lies au
matre de louvrage par un contrat de louage douvrage en sont
responsables pendant dix ans . Il en est de mme avec la loi du 4
janvier 1978 : Tout constructeur dun ouvrage est responsable de
plein droit, envers le matre ou lacqureur de louvrage, des
dommages, mme rsultant dun vice du sol, qui compromettent la
solidit de louvrage, ou qui, laffectant dans lun de ses lments
constitutifs ou lun de ses lments dquipement, le rendent impropre
sa destination. Une telle responsabilit na point lieu si le
constructeur prouve que les dommages proviennent dune cause trangre
. Cette dernire version est significative de la prpondrance du sol
dans la garantie : la notion de dommage prend une place centrale
dans le texte, son origine est indiffrente, malgr ce, la loi
insiste sur le sujet en prcisant mme rsultant dun vice du sol .
10. Il ne sagit donc pas dun hasard si la protection du matre
douvrage qui
entreprend une construction, passe par la garantie dun sol apte
la recevoir et dune assise prenne33. Llment gologique est le seul
aspect environnemental qui suscite de pareilles craintes, mritant
quil soit mentionn dans la loi. Llment climatique, travers, par
exemple, les temptes, nest nullement voqu, car probablement
incorpor dans la globalisation opre par le respect des rgles de
lart. Sil en est ainsi, cela tient trs certainement au risque
financier qui peut savrer colossal en cas de ruine totale de
ldifice, risque commun en cas de sol inapte recevoir la
construction, car permanent, linverse des vnements climatiques
violents, hormis ceux ayant une influence sur le sol, moins
destructeurs en nos rgions tempres et, de plus, occasionnels.
11. La doctrine saccorde estimer, outre les difficults
terminologiques34, et
elle ne peut tre contredite, que les problmes de responsabilit
des constructeurs ont la rputation mrite dtre inextricables. Les
intervenants sur le chantier sont souvent nombreux et leur mission
nest pas toujours dlimite avec la prcision
33 Le droit de la construction est dabord un droit de la terre,
non point de cette terre nourricire quest la terre agricole, mais
de ce sol qui est destin supporter o contenir les constructions et
quon appelle terrain btir . R. Saint-Alary, Le droit de la
construction,Presses universitaires de France, Que sais-je ?, 2e
d., 1981, p.11. 34 Non-conformit, dommage, dsordre, prjudice,
dfaut, vice, jen oublie Il aurait fallu la plume de Lopold Fargue
qui vous aurait dcrit les mots prenant le pouvoir et agressant, le
pauvre avocat, le pauvre expert, le pauvre juge ; ou alors la plume
dAristophane qui, remplaant des gupes par des araignes, aurait
montr les juristes emberlificots dans des mots plus forts queux.
Mais jai compris que les meilleurs sont l : il ny a donc que moi
qui suis perdu Il nen est pas moins que, si le droit doit tre avant
tout une langue bien faite, jai des doutes sur lexistence du droit
de la construction. La terminologie relative aux anomalies qui
suscite la mise en uvre de ses rgles et leurs consquences est
extrmement diverse. Les spcialistes, les juges et le lgislateur
voquent des non-conformits, des dommages, des dsordres, des
prjudices, voire des vices. Il pourrait sembler que cette varit des
termes manifeste un double souci de ralisme et de rigueur ; elle
pourrait correspondre la multiplicit des dfauts de construction, la
ncessit de les distinguer clairement et, plus encore, de sparer les
causes, des effets, les dsordres de dommages. Pourtant, la
terminologie parat en ralit assez imprcise. Les mots sont souvent
utiliss comme sils taient interchangeables. Les catgories des
causes du contentieux de la construction sont souvent confondues et
les causes se mlent aux consquences . C. Atias, Dsordre, non
conformit, dommage, prjudice,(malfaon, dfaut, vice) , 14e
rencontres Droit et construction de la cour dappel dAix en
Provence, Barreau dAix en Provence, GRECA,29 septembre 2006,
p.64.
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14
souhaitable. En admettant mme dailleurs quelle le fut, des
difficults subsisteraient en raison de limbrication invitable des
diffrents travaux 35. En effet, autant les dommages survenant lors,
ou la suite, dun chantier de construction se traitent souvent de
manire assez simple quand ils ont trait la superstructure, autant
la chose est plus dlicate quand ceux-ci concernent linfrastructure.
Ldification des lments porteurs verticaux ou horizontaux implique
en gnral un bureau dtudes structures, une entreprise de gros uvre -
le plus souvent lentreprise gnrale - et un bureau de contrle, soit
quatre intervenants si lon ajoute la matrise duvre. Ce nombre
pourra atteindre cinq si lon sintresse, llment dquipement que
constitue, par exemple, le chauffage, car, aux cots du bureau
dtudes thermiques, et quelque fois du bureau de contrle, intervient
en tant que sous-traitant de lentreprise gnrale, le chauffagiste,
outre larchitecte.
12. Ce nombre volue sensiblement ds que lon aborde les
infrastructures.
Llaboration de celles-ci implique, tout dabord, lintervention
dun gotechnicien qui ralise ltude de sol, puis dun bureau dtudes
structures qui dimensionne les fondations, selon le projet de
larchitecte. Pour peu que le chantier revte une certaine
importance, ou se situe en secteur urbain, lentreprise gnrale de
gros uvre ne matrise pas la technicit de celles-ci - il suffit de
prendre lexemple de la paroi berlinoise36 frquemment mise en uvre
en ville - et sous-traite la ralisation des fondations spciales,
tout en sous-traitant les terrassements. Le tout ncessite la
surveillance dun bureau de contrle. Cest au total un nombre de sept
professionnels qui se trouvent concerns par la ralisation des
fondations, et ceci sans voquer la coordination de chantier, objet
dun acteur supplmentaire, si larchitecte sest limit la
conception.
13. Ces considrations techniques illustrent quel point la
dtermination des
responsabilits peut tre complexe quand les dommages sont la
consquence du sol naturel. Il convient de remarquer, en outre, que
les rles de chacun, ainsi que les limites de prestation, ne font
pas toujours lobjet de la prcision souhaitable. Il faut ajouter, et
cela est particulirement vrai en matire de risques du sol37, que le
droit est contraint de sadapter aux volutions techniques, et que,
par exemple, un phnomne qui tait imprvisible il y a cinquante ans
ne le sera plus aujourdhui. Il sagit dun droit plus que tout autre
en construction 38, et il est manifeste que, plusieurs sicles aprs
la rdaction des textes fondateurs du Code civil, le droit spcial de
la
35 H. Perinet-Marquet , Remarques sur la force de la garantie
des constructeurs (Depuis la loi de 1978), J.C.P., Ed. G., 1982, I
Doctrine, n3553, p.47. 36 Paroi berlinoise : ouvrage de soutnement
et de blindage de fouille ralis avec des raidisseurs mtalliques
verticaux butonns ou maintenus () par des voiles en bton arm
prfabriqu ou projet, la paroi ayant alors une fonction dfinitive de
fondation . J. P. Roy, J. L. Blin-Lacroix, Le dictionnaire
professionnel du BTP, Eyrolles, 1998. 37 La gestion juridique du
risque souterrain emprunte pour une large part les mmes techniques
que la gestion des autres risques naturels. Mais la difficult y est
plus grande. En effet, les causes dun effondrement ou dun
glissement du sol sont souvent multiples. Ces phnomnes sont le
rsultat de la conjonction de mouvements purement naturels et de
lactivit humaine qui au cours des sicles a laiss subsister derrire
elle des mines, carrires, caves, tunnels, gouts, galerie,
constructions, mais, ni leur souvenir, ni leur localisation prcise
. B. Jorion, Les risques souterrains , Droit administratif, mai
1997, p. 4. 38 J. Fossereau, Le clair-obscur de la responsabilit
des constructeurs , D., 1977, Chron. , p.13.
-
15
construction nest toujours pas abouti39. Il en rsulte une
jurisprudence irrgulire et de dcisions parfois insatisfaisantes
intressant un domaine aux enjeux financiers et humains importants :
celui des risques du sol.
14. Aux cots du droit commun, le droit spcial tient donc une
place
exorbitante. Celui-ci aurait pu tre un outil de simplification.
Tel nest malheureusement pas le cas, car la matire est difficile.
Non seulement le domaine de la construction est trs technique,
mais, de plus, comme sa technicit ly incline, il est en perptuelle
volution, ce qui ne facilite pas, et probablement empchera tout
jamais, une approche aise de ce droit. Comment, ds lors, tre
surpris que certaines anomalies apparaissent de faon rcurrente en
cette matire ?
15. Labord rigoureux et logique de ce droit savre, si lon entre
dans son
dtail, laborieux. Les considrations ci-dessus ne peuvent
quincliner au pessimisme quant une stabilisation jurisprudentielle
de cette matire juridique. Nanmoins, et ce travail en est lobjet,
la rflexion du juriste amen apprcier les conflits issus des risques
du sol pourrait peut-tre se trouver facilite dune part, grce une
plus grande rigueur dans lattribution des rles aux diffrents
acteurs. Ceci concerne tant le rle conventionnel que lgal, voire
jurisprudentiel. Limputation des responsabilits pourrait sen
trouver amliore. Ce constat est particulirement remarquable en ce
qui concerne les responsabilits contractuelle et dlictuelle. Dautre
part, le dficit de communication entre les techniciens - ici les
experts - et les juristes est patent. Une amlioration de
linformation fournie par les premiers en direction des seconds est
ncessaire, comme lest tout autant la formulation prcise des besoins
des seconds vers les premiers. Lanalyse de la jurisprudence montre
que cet aspect intresse avant tout la responsabilit dcennale et les
causes dexonration de responsabilit.
16. Les particularits affrentes aux contentieux procdant de la
responsabilit
contractuelle des constructeurs en matire de risques du sol
appellent plusieurs sries de remarques. Tout dabord quant au poids
des obligations pesant sur certains intervenants. Larchitecte est
devenu le bouc missaire de tous les maux affectant la construction,
en particulier en matire de risques du sol. Le temps est rvolu o
lon peinait distinguer les rles de lentrepreneur et de larchitecte,
la charte des architectes du 31 dcembre 1940 a nettement diffrenci
ces deux professions. Faudra t-il une nouvelle charte qui serait
destine scinder la profession darchitecte de celle dingnieur ?
Larchitecte, qui, par le pass, cumulait la conception, les calculs
et la ralisation dun btiment ne peut plus aujourdhui matriser dans
leur dtail des techniques aussi diverses que celles inhrentes aux
tudes de sol, au calcul des structures, aux tudes thermique ou
acoustique. La complexit des techniques susceptibles dtre mises en
uvre ne peut plus tre embrasse par un seul professionnel. Le
mdecin, gnraliste, des sicles derniers a d faire une place aux
radiologues, cardiologues et autres anesthsistes. Il en est de mme
pour larchitecte.
17. Pour en revenir au sujet, nest-il pas temps de nimpliquer
larchitecte qu
hauteur de ses comptences et de cesser de lui imposer
lapprobation des plans de
39 Droit fondamentalement htrogne, droit nouveau et encore en
formation, tels sont sans nul doute les caractres les plus
saillants du droit de la construction . R. Saint-Alary, Le droit de
la construction, Presses universitaires de France, Que sais-je ?,
2e d., 1981, p.8.
-
16
fondations ? En cas de contrats de louage douvrage distincts
concernant la conception architecturale dune part, les tudes
techniques de lautre, larchitecte ne devrait tre tenu que de sa
production intellectuelle propre. Il nen va pas de mme en cas de
contrat de matrise duvre globale, auquel cas larchitecte - matre
duvre doit assumer la responsabilit de lensemble des tudes. Il
sagit donc de la mission VISA40 qui pose problme. Rappelons que
celle-ci est dfinie de la faon suivante par lordre des architectes
lui-mme : Lorsque les tudes dexcution sont partiellement ou
intgralement ralises par les entreprises ou par dautres
intervenants, dont les partenaires de la matrise duvre, larchitecte
en examine la conformit au projet de conception gnrale quil a
tabli, et appose son visa sur les documents (plans et
spcifications) si les dispositions de son projet sont respectes. Le
visa ne comprend notamment pas la vrification technique des
documents tablis par les entreprises. La dlivrance du visa ne dgage
pas lentreprise de sa propre responsabilit .
18. Malgr les rserves exprimes dans les deux dernires phrases
quant aux
limites de responsabilit de larchitecte, il nen demeure pas
moins que celui-ci approuve, tel est le sens du mot viser, les
plans techniques. Cest bien dans cette optique que le magistrat
sanctionne larchitecte en cas de dfaillance des plans de fondation.
La mission VISA mrite trs certainement un claircissement approfondi
et dtaill de la part des architectes eux-mmes, voire une
modification de son intitul. Pourquoi ne pas le modifier en
CONFORM41, en laccompagnant dun libell un peu diffrent : Lorsque
les tudes dexcution sont partiellement ou intgralement ralises par
les entreprises ou par dautres intervenants, dont les partenaires
de la matrise duvre, larchitecte en examine la conformit au projet
de conception gnrale quil a tabli, en particulier des points de vue
architecturaux et fonctionnels, mais ne procde en aucun cas une
quelconque vrification technique de ces documents (plans et
spcifications), sur lesquels il appose sa signature et son cachet,
si les dispositions architecturales et fonctionnelles de son projet
sont respectes. Les signature et cachet ne dgagent pas lentreprise
de sa propre responsabilit ? La responsabilit de larchitecte serait
certainement mieux cerne et moins ambigu.
19. Dans le cadre de la responsabilit contractuelle du contrleur
technique,
lincohrence ayant trait aux missions L et Av42 est frappante. En
effet, la mission L, qui concerne la solidit de la nouvelle
construction, est obligatoire selon louvrage, alors que tel nest
pas le cas de la mission Av, relative la solidit des btiments
avoisinants. La loi du 4 janvier 1978, qui vise la prvention des
risques et le respect de la rglementation, mrite probablement un
ajustement concernant la mission Av. Il apparat en effet curieux,
dune part, de veiller la solidit du nouvel difice et, dautre part,
de ngliger de vrifier que cette mme stabilit des btiments
environnants ne va pas se trouver altre, voire compromise par le
fait du chantier. Ce constat est particulirement remarquable en
secteur urbain, o la construction ctoie le plus souvent au plus prs
les difices voisins. Par consquent, il nous semble que
40 Rappelons que les missions de larchitecte sont codifies,
selon le cahier de clauses gnrales du contrat darchitecte adopt par
lOrdre des architectes, en divers paliers allant des tudes
prliminaires (PRE) au dossier des ouvrages excuts (DOE). La mission
VISA se situe la charnire des missions de conception et dexcution.
41 Cette mission CONFORM pourrait remplacer la mission VISA. 42 Les
missions de contrle technique sont normalises par la norme NF P
03-100 de septembre 1995. La mission L , obligatoire selon le type
douvrage, est relative la solidit des ouvrages. Parmi les missions
facultatives, la mission Av concerne la stabilit des ouvrages
avoisinants.
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17
les missions L et Av sont totalement indissociables en secteur
urbain. Une rvision de la loi du 4 janvier 1978 en ce sens serait
probablement bnfique en terme de volume contentieux intressant le
contrleur technique.
20. Le contrat de construction de maison individuelle mrite,
quant lui,
quelques modifications, dfaut de profonds remaniements refuss,
ce jour, par le lgislateur. La difficult de ce contrat est le fruit
de la confrontation de son caractre forfaitaire et de
limpossibilit, qui en dcoule, dun contrat dtudes prliminaires en
matire dinvestigations gotechniques43. Autant concernant la
structure, le constructeur peut se rfrer, par exemple, aux rgles
neige et vent pour connatre, selon le lieu dimplantation de la
construction, le classement de la zone et les efforts prendre en
considration en ces domaines, autant il est nettement plus dmuni
pour ce qui est de la capacit du sol. Lors de son engagement
contractuel, le constructeur en est rduit des supputations sur la
nature du sol relevant de lart divinatoire. La rdaction du march et
lengagement financier qui y est attach, en viennent sapparenter
llaboration dun contrat alatoire. Il en rsulte des situations
potentiellement prjudiciables tant pour le constructeur, que pour
lassureur Dommages Ouvrage ou le matre douvrage. Cest en effet lui
qui subira sur site les nuisances inhrentes un confortement de
fondations.
21. Une lgre modification de la loi du 19 dcembre 1990, ne
portant pas
atteinte au bloc forfaitaire nest-elle pas envisageable ?
Celle-ci passe peut-tre par lauto information que le constructeur
sengagerait avoir fait, par le biais de la consultation de tous les
documents gologiques disponibles - le Rfrentiel gologique de la
France dpartemental, la cartographie de lala retrait-gonflement, le
plan de prvention des risques, ou encore lventuel dossier de
demande de classement de la commune en catastrophe naturelle dj
constitu par le pass par la commune - et lnonciation des mesures
proposes pour adapter le projet en consquence. Cependant, force est
dadmettre que la prcision de la connaissance de la nature du sol
natteindra probablement pas avant longtemps - voire jamais -, celle
relative aux vnements climatiques ou sismiques. Ltude de sol doit,
de toute vidence, tre prvue dans la prestation du constructeur.
22. Les individus sont parvenus peu peu quantifier certains
phnomnes
naturels et en ont dduit les efforts prendre en compte pour
dimensionner de faon prenne une construction. Une fois encore, cest
le cas de la neige, du vent, mais aussi des sismes travers les
rgles neige et vent, ainsi que les rgles parasismiques. Bien que la
remarque soit sans doute excessive, il est tentant dcrire que
lhomme a commenc par le plus facile, cest--dire par les phnomnes de
grande ampleur et se reproduisant de manire assez similaire de par
le globe. Par exemple, le territoire mtropolitain a t dcoup en
quatre zones de vent selon sa vitesse extrme. Concernant le sol, la
dmarche est bien plus difficile quand on sait que le potentiel de
retrait dun sol argileux peut varier de faon importante dune
extrmit lautre
43 En maisons individuelles, 15,6% du nombre des sinistres
concernent, pour la priode 2002-2004, le dfaut de stabilit ( et
10,8% les ouvrages enterrs). En logements collectifs, ces
pourcentages passent 4,1% et 5%. Ces carts allant du simple au
triple sont significatifs du vice que porte en lui le march forfait
de construction de maison individuelle : limpossibilit dtudes
pralables. Qualit, progressons ensemble , Observatoire de la qualit
de la construction, Sycods , fvrier 2006, p.47 et suivantes.
-
18
dune villa en fonction de son indice de plasticit. Les cartes de
lala retrait- gonflement ou les plans de prvention de risques
constituent une avance dans la connaissance des risques lis au sol,
de nature les encadrer. Ces investigations ne sont pas suffisantes
en terme dchelle. Rien ne pourra jamais remplacer une tude de sol
ralise une fois le projet de construction fig et implant prcisment
sur la parcelle.
23. Par consquent, lamlioration ne pourrait-elle pas non plus
passer par un
contrat dassurance risques du sol souscrit par le constructeur
qui mutualiserait le risque rsiduel ? Ce contrat dassurance,
souscrit par le constructeur, en complment lassurance dcennale,
permettrait la prise en charge du surcot des fondations rvl par
ltude de sol, obligatoire, si les hypothses retenues par le
constructeur en la matire devaient se rvler dfaillantes, au vu des
documents dont il disposait lors de la rdaction du march de
construction - une franchise pourrait le dissuader dtre trop
optimiste dans ses prvisions. La souscription de cette police ne
soulagerait-elle pas la charge due aux sinistres imputables au sol
et ne pourrait-elle permettre de minorer la prime de lassurance
Dommages Ouvrage ? Il semble tout au moins que le cot dune
amlioration des fondations en pralable leur construction est
infrieur celui dune reprise en sous uvre, intervenant aprs
achvement de louvrage.
24. Par ailleurs, si les attributions de responsabilits sont
parfois
insatisfaisantes en matire contractuelle, elles le sont aussi en
matire dlictuelle. Les dcisions intressant les actions fondes sur
le fait personnel et la garde ne posent aujourdhui plus gure de
difficults en raison, pour lessentiel, du respect des constructions
prtoriennes ; en revanche, tel nest pas le cas de celles relatives
la thorie des troubles anormaux de voisinage. En ce domaine, et en
mconnaissance des termes du principe prtorien : nul ne doit causer
autrui un trouble anormal de voisinage , la Cour de cassation
persiste privilgier un fondement rel44 au lieu dun fondement
personnel. Il en rsulte des dcisions parfois iniques concernant les
propritaires ultrieurs de la construction lorigine des dommages. Un
retour au fondement personnel contenu dans les termes de ce
principe ne serait-il pas envisageable ?
25. Les recours successifs constituent une autre source
diniquit, en raison
du refus de la Cour de cassation daccepter la transmission du
fondement contractuel au profit du matre douvrage lencontre du
sous-traitant, en cas de chane homogne de contrats non translative
de proprit. Il peut en rsulter, selon les circonstances, une
interruption du recours au niveau du matre douvrage, alors que
lauteur du fait gnrateur dommageable est tout autre. Ceci est
dautant plus choquant, que le responsable extrme peut facilement,
et directement, tre recherch par le voisin ls. En effet, la thorie
des troubles anormaux de voisinage ne ncessite pas la preuve de la
faute, laction du tiers ls en direction du sous-traitant
responsable est donc simple. Tel nest pas forcement le cas pour le
matre douvrage45. Laction subrogatoire fonde sur la thorie des
troubles anormaux de voisinage ne peut prosprer que si le matre
douvrage a indemnis le voisin, encore
44 A savoir, qui porte directement sur la chose. G. Cornu,
Vocabulaire juridique, Presses universitaires de France, 7e d.,
2006. 45 Ce dernier, si lintermdiaire que constitue lentrepreneur
avec lequel il est contractuellement li a disparu et nest pas
assur, ne peut agir que sur le fondement dlictuel contre le
sous-traitant, lequel implique la preuve de la faute.
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19
faut-il quil en ait les moyens. La solution ne passe t-elle pas
par ladmission par la juridiction suprme de la transmission de
laction contractuelle au profit du matre douvrage vers le
sous-traitant ? En revanche, lobligation de rsultat pesant sur
lentrepreneur, en cas de dommage au voisin et au profit du matre
douvrage ne peut qutre approuve. Il faut esprer que la Cour de
cassation poursuivra dans la voie de la cour dappel de Paris.
26. Le mme constat diniquit semble pouvoir tre effectu pour
les
dcisions ayant trait directement la technique. Lapprciation
technique est souvent un pralable lattribution des responsabilits.
Cependant, lanalyse des dcisions jurisprudentielles montre que le
dfaut de communication technique entre lexpert et le juge est
particulirement notable en ce qui concerne les causes dexonration
de responsabilit et les garanties lgales. En ce dernier domaine, le
sol artificiel permet de complter lanalyse qui aboutit au constat
de sanctions insatisfaisantes. Celles-ci sont parfois le rsultat
dun dficit dinformation entre le technicien et le magistrat,
lui-mme fruit dune approche manquant de rigueur, voire de confusion
terminologique.
27. La cause primordiale dexonration de responsabilit invoque
par les
constructeurs en matire de risques du sol est la force majeure.
Celle-ci fait lobjet dabondants dveloppements doctrinaux et la
jurisprudence rpugne adhrer aux propositions qui lui sont faites.
Celle-ci sen tient aux critres classiques que sont lextriorit,
limprvisibilit, lirrsistibilit, en les appliquant de faon partielle
et parfois dsordonne. Il faut convenir que la tche dapprhender les
phnomnes naturels avec rigueur est difficile, tant leur diversit
complique le classement. Peut-tre est-il possible de contourner la
difficult en sattachant au caractre troit du prsent sujet. En droit
de la construction appliqu aux risques du sol, les critres
classiques que sont lextriorit, limprvisibilit, lirrsistibilit sont
parfois interdpendants. Lextriorit peut impliquer limprvisibilit et
lirrsistibilt ; laquelle peut aussi tre issue de la seule
imprvisibilit. En consquence, une dmarche progressive pourrait,
peut-tre, constituer une voie la rationalisation de lapproche du
cas de force majeure dans le domaine bien prcis du sol.
28. Nest-il pas envisageable dans le cas qui nous occupe de
procder par
gradation, en approchant la sphre dintervention humaine travers
la profondeur du phnomne et la zone dinfluence des efforts issus de
louvrage, do dcoulera une ventuelle extriorit, puis travers
limprvisibilit, apprcie au regard de la technique, mais galement de
son opportunit conomique, enfin travers lirrsistibilit, value par
rfrence lampleur du phnomne ou sa violence ? Un seul de ces trois
critres directs pouvant tre suffisant caractriser la force majeure,
laquelle procde du constat que lhomme est parfois impuissant face
la nature. Au cumul des lments du triptyque ou une estimation selon
les diffrents paliers du droulement du phnomne, nous prfrons dans
le domaine spcifique qui nous occupe une valuation progressive et
technique, o un seul critre direct peut suffire aux diffrents
stades de la dmarche. Cette approche technique est souhaitable pour
amliorer lapprciation des causes dexonration.
29. Le mme type de constat ne peut-il pas tre ralis lorsque lon
examine
les responsabilits en jeu aprs la rception, et plus
particulirement, les garanties lgales, au nombre desquelles la
garantie dcennale ? Tout dabord, quant au
-
20
qualificatif douvrage : les ttonnements persistent. Parfois,
ldifice tout entier est ainsi qualifi, parfois une partie
seulement, parfois encore un simple lment constitutif ou dquipement
qui remplit une fonction. Il en dcoule une inscurit juridique au
niveau de la mise en uvre des critres de gravit. Ne serait-il pas
souhaitable de se rfrer la fonction pour rationaliser lapproche,
ainsi quaux fondamentaux du rapport Spinetta que constituent la
structure, le clos, le couvert et les infrastructures ? Le terme
douvrage serait ainsi limit, par rfrence aux fonctions stabilit -
structure - et protection - clos et couvert -, outre les
infrastructures. Inversement, il serait tendu des parties de
ldifice, allant ainsi au-del de ldifice dans sa globalit. Les
fondations, participant la fonction stabilit seraient qualifies
douvrage, de mme que les enrochements. La notion de techniques de
travaux de btiment , dorigine prtorienne, et difficile cerner pour
un technicien, devrait notre sens pouvoir tre abandonne.
30. La frontire pourrait tre trace entre louvrage et llment
dquipement
grce la fonction. Cest la fonction usage qui permettrait ces
derniers dtre diffrentis. Concernant les lments dquipement
intressant le sol, la rfrence aux lments rapports sur un lment
structurel ou naturel permettant la dambulation, pourrait
constituer une dfinition de llment dquipement sol artificiel .
Cette rfrence la notion dusage aurait le mrite dancrer
dfinitivement les revtements de sol du cot des lments dquipement,
un carrelage ou une rsine de sol ne devant pas notre avis bnficier
du qualificatif douvrage.
31. Dautre part, il est une autre notion technique contenue dans
la loi Spinetta
qui pose difficult : il sagit de la dissociabilit. Le critre de
dissociabilit, ayant trait par exemple aux sols artificiels,
constitue lexemple de la ncessit pour lexpert de faire uvre de
pdagogie en direction du magistrat. Il convient, dans ce cas prcis,
dattirer lattention des juges sur la confusion qui peut rsulter de
lusage terminologique commun appliqu aux techniques de pose dun
revtement de sol. Ici, le terme scell nest pas synonyme dattach
perptuelle demeure - donc dindissociabilit, en cas, par exemple, de
pose dsolidarise - et inversement le terme coll peut impliquer un
enlvement de matire du support en cas de pose directe - do une
absence de dissociabilit. Linformation prcise fournie par le
technicien au juge est donc dterminante en lespce. Inversement, la
demande formule par le magistrat au technicien doit tre toute aussi
prcise afin dorienter les investigations de celui-ci et la qualit
de linformation quil dlivre. Plus gnralement, dans lvaluation du
critre de dissociabilit, la prise en compte non pas du seul
enlvement de matire de louvrage, mais galement du bris dun
quipement, nentranerait quun faible basculement de sinistres vers
la garantie dcennale - intressant les cloisons et plafonds outre
les carrelages - et aurait le mrite de figer certaines approches,
en particulier en matire de carrelage.
32. Enfin, lencadrement temporel de la garantie dcennale, hormis
les
dommages volutifs ou futurs, ne fait que peu dbat. Cependant une
question mrite dtre pose et une remarque formule. Pendant combien
de temps les dommages futurs vont-ils persister dans le paysage
juridique ? Une rponse est tentante : le moins longtemps possible,
tant la notion semble aujourdhui inutile. Les dsordres volutifs,
quant eux, ncessitent peut-tre une approche en amont, ds les
premiers symptmes de dommages, afin de cerner les aggravations
venir, cet gard un suivi qualit et une traabilit sans faille des
produits mis en uvre sur le chantier est
-
21
indispensable. Afin de prvenir certains errements en matire de
dure de prise en charge, peut-tre serait-il pertinent de complter
la mission de lexpert en lui demandant de recenser les lments
similaires pouvant tre concerns lavenir et ceci loccasion dun
premier sinistre. Ainsi, pour rester dans le sujet qui nous occupe,
prenons lexemple de la dfectuosit dun revtement de sol entranant
une improprit destination dans un local professionnel, en liaison
avec le mode dexploitation intensif. Ce revtement pourrait bnficier
ultrieurement de la garantie dcoulant du qualificatif de dsordres
volutifs dans une autre partie des locaux, exploits moins
intensment, sil a t recens comme pouvant prsenter une pathologie
potentielle similaire par lexpert.
33. Les interrogations qui viennent dtre nonces aboutissent au
constat de
la ncessit dune approche technique rigoureuse et dune
transmission de linformation par lexpert en direction du magistrat
dnue de toute ambigut, en particulier terminologique. Cela est vrai
pour la responsabilit des constructeurs en risques du sol, cela
lest tout autant pour les autres facteurs de sinistres.
34. Deux problmes majeurs persistent donc : dune part,
lattribution des
responsabilits entre constructeurs, dautre part, la qualit de la
communication entre techniciens et juristes au sein dune matire en
perptuelle volution et complexification. Les tentatives de rponses
ces problmes passent par un examen minutieux de la jurisprudence,
laquelle est le reflet de la difficult de la matire. Mme si cette
thse est, avant tout, oriente vers la responsabilit des
constructeurs en droit civil en cas de risques lis au sol naturel,
les sols artificiels prsentent un volume contentieux tel, que la
part de la responsabilit des constructeurs les intressant sera
galement dveloppe. A linverse, le droit administratif ne sera cit
que de faon ponctuelle, et uniquement quand celui-ci rejoint le
droit civil. Laspect des risques du sol ayant trait au droit de
lenvironnement travers le risque pollution ne sera pas dvelopp au
regard de laspect assez rcent de la jurisprudence qui sy attache ;
rappelons nanmoins que larticle L.514-20 du Code de lenvironnement
a t modifi par la loi du 30 juillet 2003 portant sur les risques
technologiques et naturels majeurs, il en rsulte une obligation
dinformation pesant sur le vendeur, ayant exploit une installation
classe sur le site, en direction de lacqureur46. Cette obligation
dinformation pse galement en vertu de la loi du 30 mars 1999 sur le
vendeur du terrain dans le trfonds duquel une mine a t exploite47.
Cette loi instaure une responsabilit de plein droit de lexploitant
pour les dommages48.
46A. Gossement, Les conditions de laction directe en
responsabilit civile du vendeur dun sol pollu par son sous
acqureur, au terme dune chane de contrats de vente , LPA du 18 aot
2004, p. 6. C. Legrand, Sites et sols pollus : quelle rglementation
? , Techni.Cits, 8 et 23 septembre 2006. C. Legrand, M. Solerieu,
Sites et sols pollus : comment agir ? , Techni.Cits, 23 juillet
2006. 47 D. Boulanger, Lexploitant minier et le propritaire du
dessus propos de la loi n 99-245 du 30 mars 1999 , J.C.P., Ed. N.,
29 octobre 1999, 1555. D. Boulanger, Lindemnisation par ltat des
acqureurs victimes dun sinistre minier , J.C.P., Ed. N., 22
septembre 2000, 1348. 48 B. Wertenschlag, La responsabilit de
lexploitant pour dommages conscutifs lexploitation minire , J.C.P.,
Ed. N. , 22 dcembre 2000, 1831.
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35. Au risque dadopter un plan classique lexcs, cest dans un
souci de clart pdagogique que seront examins successivement la
responsabilit contractuelle, la responsabilit dlictuelle, puis le
droit spcial et les causes dexonration de responsabilit en matire
de risques du sol. En effet, les dveloppements qui vont suivre
procdent de deux observations fondamentales. Dune part, le droit
nest pas toujours en phase avec la technique, certaines
attributions de responsabilits doivent tre rvises pour aboutir des
dcisions satisfaisantes. Dautre part, le dfaut dune communication
technique de qualit entre les techniciens et les juristes est une
source diniquit jurisprudentielle. Pour mettre en vidence ces
anomalies, lanalyse des domaines o lattribution des responsabilits
est aboutie, ainsi que ceux o linformation transite correctement
est indispensable. Il en dcoule quen certains domaines luvre du
lgislateur ou de la jurisprudence est parvenue lobtention doutils
juridiques permettant des dcisions quilibres et justifies. Il sen
dduit aussi que dans dautres domaines cette dmarche est parfaire.
Il convient donc, dans un premier temps, de sattacher aux
imputations de responsabilits quil faut, peut- tre, reconsidrer en
risques du sol (1e partie), avant de dvelopper, dans un second
temps, la communication entre le droit et la technique, laquelle
apparat sclrose par un dficit dinformation (2e partie).
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PREMIERE PARTIE
DES IMPUTATIONS DE RESPONSABILITES INSATISFAISANTES
36. J. Fossereau tait peut-tre pessimiste, en 1977, quand elle
crivait, au
sujet des dcisions de la Cour de cassation concernant la
responsabilit de droit commun des constructeurs : ses dcisions,
nuances, complexes, se rvlent difficiles cerner. Procdant par
coups, selon les circonstances, souvent par quit, elle a engag une
responsabilit, tantt contractuelle, tantt dlictuelle, parfois dans
des situations semblables, aprs mme la priode dcennale, et sans
toujours prciser le fondement des rgles appliques. Les
responsabilits senchevtrent, dont la nature est souvent incertaine,
la rgle du non cumul est viole, les fautes changent de coloration
selon les victimes et actions, les contractants peuvent devenir
tiers entre eux, les dlais passent de deux dix et trente ans, leurs
points de dpart varient, et lobscurit spaissit 49.
Quen est-il des responsabilits contractuelle et dlictuelle des
constructeurs, applique aux risques du sol, trente ans plus tard ?
La jurisprudence sest-elle apaise en ce domaine spcifique, ou
est-elle autant tourmente que par le pass ? Comme nous allons le
voir, bien souvent, la rponse est nuance.
37. Il nen demeure pas moins que cette impression dincertitude
continue
prvaloir. Cela tient, semble t-il en matire contractuelle, dune
part des rles imprcis attribus certains intervenants. Dans ce cas,
sont en cause certains professionnels qui ont mis en place des
missions codifies avec une rigueur parfois insuffisante au regard
des volutions techniques permanentes du domaine de la construction.
Peut aussi tre incrimin le lgislateur lui-mme qui a mconnu, dans
son souci de prennit et scurit de louvrage construit,
lenvironnement immdiat. Le lgislateur, dans un objectif louable de
protection du matre douvrage - consommateur a labor, par ailleurs,
des textes encadrant la construction de maisons individuelles.
Ceux-ci, forts contraignants en matire financire pour le
constructeur, en arrivent presque, par leurs excs, faire
abstraction du cot engendr par un sol inapte supporter le btiment.
Il en rsulte des consquences conomiques qui peuvent tre dsastreuses
pour le constructeur, et des inadaptations techniques toutes aussi
nfastes pour le matre douvrage, cens tre protg.
38. En revanche, en matire dlictuelle, lanalyse doit tre plus
subtile pour la
simple raison que les responsabilits nentrent en gnral pas, vis
vis du tiers ls,
49 J. Fossereau, Le clair obscur de la responsabilit des
constructeurs , D. S., 1977, Chron. III, p.13.
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dans le canevas dune obligation excuter. Si en matire de risques
du sol, la jurisprudence intressant la responsabilit du fait
personnel est stabilise, tel est galement le cas, mais dans une
moindre mesure, de laction fonde sur la garde de la chose, encore
aujourdhui soumise quelques volutions. Au contraire, et malgr son
dj long pass, la thorie jurisprudentielle des troubles anormaux de
voisinage, peut-tre bientt en voie de conscration lgislative50,
peine trouver un cadre rigoureux dapplication, et les heurts avec
le droit commun ne sont pas rares, les risques du sol en sont un
exemple.
39. Les analyses qui vont suivre permettront de relever que les
rles de
certains acteurs aux oprations de construction sont
insuffisamment encadrs du point de vue technique, il en rsulte
parfois une injuste rpartition des responsabilits issue du contrat
(titre I). Paralllement, sur le plan dlictuel, le fondement rel
actuellement privilgi, au dtriment du fondement personnel, en
matire de troubles anormaux de voisinage, a pour consquence de
transfrer au propritaire ultrieur de la construction lorigine des
dommages la charge de ceux-ci, alors quil na jou aucun rle
technique. A linverse, le sous-traitant dont lintervention
technique est lorigine des dsordres ne peut voir sa responsabilit
recherche simplement par le matre douvrage, linverse du tiers. Il
dcoule de ces deux constats des attributions de responsabilits
parfaire (titre II). Lanalyse classique des difficults travers le
processus de la thse et de lantithse est volontairement carte, dans
un souci de clart pdagogique, au profit de la prsentation
traditionnelle de la matire. Nanmoins, cette dmarche se retrouve au
fil des chapitres, des sections, des paragraphes.
50 Cette thorie majeure est en voie de conscration lgislative
puisque lavant projet de rforme du droit des obligations dispose
dans son article 1361 : le propritaire, le dtenteur ou lexploitant
dun fonds, qui provoque un trouble excdant les inconvnients normaux
du voisinage, est de plein droit responsable des consquences de ce
trouble . P. Malinvaud, Vers un nouveau rgime prtorien de la
responsabilit des constructeurs pour troubles de voisinage , Revue
de Droit Immobilier, 2006, p.251.
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TITRE I
UNE INSATISFAISANTE REPARTITION DES RESPONSABILITES
CONTRACTUELLES EN MATIERE DE RISQUES DU SOL
40. Pour mieux parvenir au constat, en matire de risques du sol,
de linjuste
rpartition des responsabilits issues du contrat, il est
indispensable de rappeler les principes gnraux de la responsabilit
contractuelle51. Sans entrer dans le dtail, ce qui serait hors de
propos, il convient nanmoins dvoquer dune part, les sources du
droit commun de la responsabilit contractuelle, dautre part, le
contrat de louage douvrage. Rappelons, en prambule, que si, en ltat
actuel de notre droit, responsabilit contractuelle et responsabilit
dlictuelle ont des rgimes distincts, la doctrine souligne de plus
en plus souvent les liens qui unissent ces deux domaines52.
51La responsabilit contractuelle constitue lune des deux
branches de la responsabilit civile, la responsabilit dlictuelle
tant la seconde. H. et L. Mazeaud, J. Mazeaud, F. Chabas, Leons de
droit civil Tome II premier volume Obligations thorie gnrale,
Montchrestien, 8e d., 1991, p.340 : une personne est responsable
civilement quand elle est tenue de rparer un dommage subi par
autrui () Lorsque le prjudice rsulte de linexcution dune obligation
contractuelle, la responsabilit est contractuelle . La
responsabilit contractuelle se dfinit comme lobligation pour le
contractant qui ne remplit pas (en tout, en partie, ou temps) une
obligation que le contrat mettait sa charge, de rparer (en nature
si possible ou, dfaut, en argent) le dommage caus lautre partie (le
crancier), soit par linexcution totale ou partielle, soit par
lexcution tardive de lengagement contractuel . G. Cornu,
Vocabulaire juridique, Presses universitaires de France, 7e d.,
2006. 52Les auteurs nont pas manqu de relever lanalogie entre la
responsabilit contractuelle et la responsabilit dlictuelle: une
personne cause un dommage une autre quelle doit rparer, la
diffrence fondamentale tant la prsence du contrat. Le dbiteur a
lobligation de rparer le dommage quil a caus au crancier par
linexcution ( fautive ) du contrat, comme tout homme, en gnral, est
tenu de rparer le dommage quil a caus autrui par sa faute ( a.1382
- 1383 ) . J. Carbonnier, Droit civil 4 les obligations, 1990, 14e
d., Presses universitaires de France n 154 p.283. Il nexiste pas de
diffrence fondamentale entre les deux ordres de responsabilits . H.
et L. Mazeaud, J. Mazeaud, F. Chabas, Leons de droit civil Tome II
premier volume Obligations thorie gnrale, Montchrestien, 8e d.,
1991, p.365. Egalement, A. Bnabent, Les obligations, Montchrestien,
10e d., 2005, n403 p.278.
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Nanmoins, il demeure que si un contrat a t conclu53, la
responsabilit contractuelle sapplique, en vertu du principe de non
cumul des responsabilits contractuelle et dlictuelle54.
41. Lorsquun constructeur est soumis au droit de la
responsabilit
contractuelle55, il doit excuter ses obligations et ne peut se
librer que par la cause trangre56. La charge de la preuve varie
selon que lon se trouve en face dune obligation de moyens ou de
rsultat57. De faon gnrale, une prestation intellectuelle est plutt
de moyens, une prestation matrielle plutt de rsultat58. Ainsi, dans
le sujet qui nous occupe, les constructeurs sont soumis des
obligations de faire. Les obligations de faire peuvent, selon les
acteurs, tre de moyens : cest le cas de larchitecte, ou de
rsultat59 : cest le cas de lentrepreneur. Dans le premier cas,
la
La mise en jeu de la responsabilit contractuelle ncessite, comme
en responsabilit dlictuelle, la triple exigence de la faute ou plus
prcisment ici du manquement, du dommage et du lien de causalit
entre eux. La jurisprudence a tabli une classification des fautes
selon leur gravit allant de la faute dolosive, synonyme
dintentionnelle, la faute ordinaire ou lgre, en passant par la
faute lourde, traduisant un comportement grave, leur dtail, ne
prsentant pas dintrt particulier dans le prsent sujet, ne sera pas
approfondi. R. Cabrillac, Droit des obligations, Dalloz, 5e d.,
2002, n153 p.108. V. Toulet, Les obligations, Paradigme, 11e d.,
2006, p.174. C. Renault-Brahinsky, Les obligations, Gualino, 2e d.,
2002, p. 123. A. Bnabent, Les obligations, Montchrestien, 10e d.,
2005, n412 p.286. C. Larroumet, Les obligations le contrat tome
III, Economica, 5e d., 2003, n603 p.629. 53En outre, cette mise en
uvre comporte un pralable : le contrat doit tre rgulirement form.
V. Toulet, Les obligations, Paradigme, 11e d., 2006, p.160. H. et
L. Mazeaud, J. Mazeaud, F. Chabas, Leons de droit civil Tome II
premier volume Obligations thorie gnrale, Montchrestien, 8e d.,
1991, p 365. 54Sil existe un contrat valable entre lauteur du
dommage et la victime, et si le dommage rsulte de linexcution du
contrat, la victime ne peut engager une action que sur le terrain
de la responsabilit contractuelle. H. et L. Mazeaud, J. Mazeaud, F.
Chabas, Leons de droit civil Tome II premier volume Obligations
thorie gnrale , Montchrestien, 8e d., 1991, p366 et 384, n404.
Responsabilit (rgles gnrales), 2003, Dictionnaire permanent
Construction et Urbanisme, Ed. Lgislatives, n12 p. 4055.
Responsabilit contractuelle, 2003, Dictionnaire permanent
Construction et Urbanisme, Ed. Lgislatives, n22 p.4164. 55 Article
1147 du Code civil : Le dbiteur est condamn, sil y a lieu, au
payement de dommages et intrts, soit raison de linexcution de
lobligation, soit raison du retard dans lexcution, toutes les fois
quil ne justifie pas que linexcution provient dune cause trangre
qui ne peut lui tre impute, encore quil ny ait aucune mauvaise foi
de sa part . 56 Il sagit l dune obligation de rsultat. Inversement,
en matire dobligation de conserver larticle 1137 du Code civil
dispose : lobligation de veiller la conservation de la chose, soit
que la convention nait pour objet que lutilit de lune des parties,
soit quelle ait pour objet leur utilit commune, soumet celui qui en
est charg y apporter tous les soins dun bon pre de famille. Cette
obligation est plus ou moins tendue relativement certains contrats,
dont les effets, cet gard, sont expliqus sous les titres qui les
concernent . Le dbiteur est ici soumis une obligation de moyens. 57
R. Cabrillac, Droit des obligations, Dalloz, 5e d., 2002, n151
p.106. V. Toulet, Les obligations, Paradigme, 11e d., 2006, p.162.
C. Renault-Brahinsky, Les obligations, Gualino, 2e d., 2002, p.
122. A. Bnabent, Les obligations, Montchrestien, 10e d., 2005, n406
p.282. 58 A. Bnabent, Les contrats spciaux civils et commerciaux,
Montchrestien, 6e d., 2004, n534 p.347. P. Malaurie, L. Ayns, Les
contrats spciaux, Defrnois, 2e d., 2005, n741. 59Rappelons que les
obligations de donner ou de ne pas faire sont des obligations de
rsultat.
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faute doit tre prouve par le crancier60. Dans le second, la
faute est prsume, la seule dmonstration de linexcution suffit, et
seule la cause trangre est exonratoire pour le dbiteur61.
42. Le dbat, concernant la nature de lobligation, demeure
nanmoins
ouvert62 et certains auteurs qualifient de lancinante la
question de lintensit de lobligation inexcute 63. La rponse la
question : obligation de moyens ou de rsultat est cependant claire
en matire de construction immobilire, postrieurement la rception,
selon les termes de larticle 1792 du Code civil qui dispose : tout
constructeur dun ouvrage est responsable de plein droit, envers le
matre ou lacqureur de louvrage, des dommages, mme rsultant dun vice
du sol, qui compromettent la solidit de louvrage ou qui, laffectant
dans lun de ses lments constitutifs ou lun de ses lments
dquipement, le rendent impropre sa destination . Une telle
responsabilit na point lieu si le constructeur prouve que les
dommages proviennent dune cause trangre. Le constructeur est tenu
une obligation de rsultat pendant les dix ans suivant la
rception64.
43. Faut-il rappeler cette vidence que la responsabilit
contractuelle implique
lexistence dun contrat65, et, en droit de la construction, le
contrat le plus usit est celui du louage douvrage. Le contrat de
vente se limite, de faon quantitative, majoritairement aux
relations entre le constructeur et le vendeur de matriaux ou
dquipements, et ne donne lieu qu un contentieux limit compar celui
issu des relations entre le constructeur et le matre douvrage.
Avant de revtir les caractres spcifiques du contrat de louage
douvrage, ce dernier est avant tout un contrat66. Suivant larticle
1710 du Code civil : le louage douvrage est un contrat par lequel
lune des parties sengage faire quelque chose pour lautre, moyennant
un prix convenu entre elles 67. Le contrat de louage douvrage est
plus communment appel contrat dentreprise. Les conditions de
formation du contrat dentreprise ne drogent
60Le standard de comparaison est le comportement du bon pre de
famille, diligent et prudent. 61 Dans le premier cas, le dbiteur ne
promet rien de plus que de mettre au service du crancier les moyens
dont il dispose, dappliquer sa diligence laffaire, de faire de son
mieux ; dans le second cas, le dbiteur promet au crancier un
rsultat dfini . J. Carbonnier, Droit civil 4 les obligations, 1990,
14e d., Presses universitaires de France, n156 p.288. 62Certains
auteurs ont qualifi de tourmente la classification des obligations
en obligation de moyens ou de rsultat, et ont tent de dgager des
critres didentification, comme la recherche de la volont des
parties, lanalyse de lobjet de lobligation, la recherche de
lexistence dun ala, lexamen du comportement du crancier, voire la
prise en compte de lquit. V. Toulet, Les obligations, Paradigme,
11e d., 2006, p.164. 63P. H. Antonmatti, J. Raynard, Droit civil
Contrats spciaux, Litec, 3e d., 2002, n411 p.372. 64 A linverse, la
responsabilit contractuelle en droit de la construction relve du
droit commun, la rponse est donc nettement plus nuance la
concernant. 65P. Malinvaud, Droit des obligations, Litec, 10e d.,
2007, p. 35, n51. 66 Cest--dire selon larticle 1101 du Code civil :
le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs
personnes sobligent, envers une ou plusieurs autres, donner, faire
ou ne pas faire quelque chose . P. Delebecque, F. J. Pansier, Droit
des obligations contrat quasi- contrat, Litec, 4e d., 2006, p.3. 67
Selon larticle 1779 du Code civil, constitue une espce de louage
douvrage celui des architectes, entrepreneurs douvrage et
techniciens par suite dtudes, devis ou march .
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pas au droit commun et ne seront pas dveloppes, le contentieux
du droit de la construction appliqu aux risques du sol nayant que
trs rarement trait ce domaine.
44. Lon pourrait croire que le domaine de la responsabilit
contractuelle
gravite autour de la notion de contrat dentreprise. Cela
reviendrait mconnatre la prminence des articles 1792 et suivants du
Code civil. En droit de la construction, le champ dapplication de
la responsabilit contractuelle se dfinit ngativement, par rfrence
celui couvert par les articles 1792 1792-5 du Code civil : laction
ne peut se fonder sur la responsabilit contractuelle de droit
commun que dans les cas o la responsabilit des articles 1792 1792-5
ne peut trouver application68. Le domaine de la responsabilit
contractuelle concerne donc, pour lessentiel, la priode antrieure
la rception. Cependant, il est certains cas, postrieurs la
rception, o la responsabilit contractuelle persiste.
45. La responsabilit contractuelle en droit de la construction
appliqu aux
risques du sol a vu sa jurisprudence se stabiliser en certains
domaines linverse dune deuxime catgorie - intressant les
responsabilits des architectes et contrleurs techniques - o le
juriste demeure perplexe en face dune irrgularit rcurrente dans les
dcisions, sans doute le fruit de rles techniques aux contours
imprcis, attribus certains intervenants. De plus, il est un march
particulier, le march forfait qui gnre un contentieux abondant en
matire de risques du sol, travers principalement le contrat de
construction de maison individuelle. Ce contrat, initi par une
volont de protection du consommateur, fait peser de lourdes charges
en matire de risques du sol sur le constructeur.
46. Les dveloppements suivants intressent les attributions de
responsabilits
des constructeurs en matire de sols naturel ou artificiel. Par
consquent, la sanction de lexcution dfectueuse du contrat, ne
prsentant pas de spcificit, en droit de la construction appliqu aux
risques du sol, ne sera pas dveloppe69, pas plus que les risques du
sol en matire de pollution car la jurisprudence en est aux
balbutiements. Les risques en terme de non-respect des rgles
administratives, ne seront pas davantage voqus, sloignant trop de
lesprit du sujet ax sur les risques inhrents la nature du sol en
droit priv. De la mme manire, les articles 178870 et 178971 du Code
civil relatifs la perte de la chose dans le contrat de louage
douvrage72 ntant que peu voqus dans la jurisprudence inhrente aux
risques du sol ne seront pas plus dtaills. Eu gard leur frquence,
quelques digressions ne sont pas inutiles au sujet
68P. Malinvaud, Droit de la construction, Dalloz action, 2000,
n7803, p.1207. 69 Larticle 1142 du Code civil dispose : toute
obligation de faire ou de ne pas faire se rsout en dommages et
intrts en cas dinexcution de la part du dbiteur . 70 Article 1788
du Code civil : Si, dans le cas o louvrier fournit la matire, la
chose vient prir, de quelque manire que ce soit, avant dtre livre,
la perte en est pour louvrier, moins que le matre ne fut en demeure
de recevoir la chose . 71 Article 1789 : Dans le cas o louvrier
fournit seulement son travail ou son industrie, si la chose vient
prir, louvrier nest tenu que de sa faute . 72 Rappelons que les
articles 1788 et 1789 ne sont pas dordre public. En cas de
fourniture de la matire, lentrepreneur ne peut pas sexonrer par
labsence de faute ou la cause trangre. En revanche, si le matre
douvrage fournit la matire, lentrepreneur peut sexonrer par la
cause trangre, le vice de la matire et labsence de faute.
Entreprises du BTP, 2004, Dictionnaire permanent Construction et
Urbanisme, Ed. Lgislatives, n 104, p.1629.
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du respect des rgles civiles73 en matire dimplantation, et ce,
dautant, que ce sujet se situe la frontire entre la responsabilit
contractuelle et la responsabilit dcennale.
47. Il convient donc daxer tout dabord le propos sur la
violation des
obligations issues de la convention. Lanalyse de la
jurisprudence va ainsi permettre de constater que la responsabilit
contractuelle dun constructeur ayant un rle cern ou isol, comme par
exemple lentrepreneur, est apprcie assez facilement par les
juridictions. Il sensuit des dcisions constantes et peu
critiquables. En revanche, quand des chevauchements de comptences
surviennent entre constructeurs, - cest le cas entre larchitecte et
lingnieur - ou bien quand le devoir jurisprudentiel de conseil
empite sur le devoir contractuel de conseil - cest le cas pour le
contrleur technique -, lattribution de certaines responsabilits
savre insatisfaisante. Il sagit l de la consquence dvolutions
techniques que le cadre dintervention tabli par le pass nest plus
apte prendre en compte aujourdhui, ou dun reflet de la ngligence de
certaines ralits de terrain par le lgislateur.
48. Plus prcisment, les dveloppements suivants amnent au constat
dune
mission VISA74 de larchitecte devenue ambigu au regard des
volutions techniques, laquelle entrane une implication quasi
systmatique de sa responsabilit en cas de sinistre75. Il serait
peut-tre possible de remdier cette anomalie en modifiant le libell
de cette mission et en compltant son contenu. Concernant le rle du
contrleur technique, il est patent que le lgislateur a omis de se
proccuper du voisinage dans les missions obligatoires quil a impos
en certains cas. Il convient, selon nous, dassocier les missions L
et Av en secteur urbain pour prserver lintgrit des btiments
avoisinants et faire cesser les incertitudes jurisprudentielles
inhrentes la responsabilit du contrleur technique, consquences de
la confrontation entre la stricte mission et le devoir de conseil.
Il est ainsi manifeste que certains constructeurs ont des rles
inadapts, ce qui induit des attributions de responsabilits parfois
critiquables (sous-titre I).
49. De plus, il apparat choquant dincriminer de faon obligatoire
le
constructeur de maison individuelle en cas de survenance de
dommages issus des risques du sol. Est ici en cause le caractre
forfaitaire du contrat de construction de maison individuelle,
prohibant tout contrat prliminaire dtude du sol. En face de
lintransigeance du lgislateur ce sujet, une amlioration pourrait
consister en une auto-information impose au constructeur en matire
gologique partir des documents dj disponibles, une adaptation au
projet mentionne dans le contrat, et une mutualisation du risque
rsiduel travers une assurance risques du sol . La
73Delebecque P., Les risques du sol : les risques tenant aux
rgles civiles , Colloque CERCOL AFDC du 26 septembre 1997, Revue de
Droit Immobilier,1997, p.533. 74 Rappelons que la mission VISA est
dfinie de la faon suivante par lordre des architectes : Lorsque les
tudes dexcution sont partiellement ou intgralement ralises par les
entreprises ou par dautres intervenants, dont les partenaires de la
matrise duvre, larchitecte en examine la conformit au projet de
conception gnrale quil a tabli, et appose son visa sur les
documents (plans et spcifications) si les dispositions de son
projet sont respectes. Le visa ne comprend notamment pas la
vrification technique des documents tablis par les entreprises. La
dlivrance du visa ne dgage pas lentreprise de sa propre
responsabilit . 75 Pour plus dinformations sur ce point : Vronique
Nicolas dans Trait de droit des assurances Tome 3 Le contrat
dassurance, sous la direction de J.Bigot, LGDJ, 2002, p.972, n1314
et suivants.
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30
critique doit tre mesure en ce qui concerne le march forfait
gnral soumis larticle 1793 du Code civil, celui-ci nest pas dordre
public, et un contrat dtude prliminaire du sol peut toujours tre
propos au matre douvrage. Il nen est pas de mme en ce qui concerne
le contrat de construction de maison individuelle, dont la rigidit
est source de nombreux maux (sous-titre II). Mme si les
responsabilits en jeu en matire de march forfait peuvent intresser
les garanties lgales, le choix a t fait de traiter cet aspect du
sujet dans le titre consacr la responsabilit contractuelle car les
propositions formules ont trait au contrat, lequel pourrait tre
augment dinformations relatives au sol.
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31
SOUS-TITRE I
LIMPRECISION DES ROLES DES INTERVENANTS, PARFOIS SOURCE
DINIQUITE
50. Afin danalyser au mieux la jurisprudence en matire de
responsabilit
contractuelle, il est ncessaire de savoir quelles sont les
obligations de chacun, pour apprcier celles qui nont pas t
satisfaites. Ainsi, le rle de chaque constructeur va tre rappel en
pralable aux dveloppements qui vont suivre. De mme, lanalyse des
rles permet, travers les anomalies releves dans la jurisprudence,
daboutir au constat dune prcision insatisfaisante des missions
confies certains intervenants lacte de construire. En effet, la
mise en uvre de la responsabilit contractuelle implique deux
analyses : lune, spatiale, est issue de lobjet de la convention -
quest-ce qui devait tre fait et par qui? - lautre, temporelle, par
rfrence au droit spcial - quand le lien contractuel a t-il pris
fin? La responsabilit contractuelle procde directement de
linobservation de la convention76. Le dommage doit rsulter de
linexcution par le dbiteur dune obligation quil a assume en
concluant le contrat 77. Ce domaine est celui de lobligation
principale, celle que les contractants ont eu pour but essentiel de
crer 78. Encore faut-il que lobligation soit adapte la
qualification du constructeur : cest la question qui se pose pour
la mission VISA de larchitecte qui interfre avec le domaine de
lingnieur. Encore faut-il aussi que le rle contractuel ne soit pas
perturb par linterfrence dune obligation dorigine prtorienne : il
sagit l de la confrontation du devoir de conseil inhrent la mission
du contrleur technique et du devoir gnral de conseil des
constructeurs. Rappelons, de plus, quen matire de droit de la
construction, la rception constitue une frontire entre la
responsabilit contractuelle, situe avant, et les responsabilits
lgales situes aprs79. Cette frontire nest cependant pas tout
76 Article 1134 du Code civil : les conventions lgalement formes
tiennent lieu de loi ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent tre
rvoques que par leur consentement mutuel, ou pour les causes que la
loi autorise. Elles doivent tre excutes de bonne foi . 77 H. et L.
Mazeaud, J. Mazeaud ,F. Chabas, Leons de droit civil tome II
premier volume Obligations thorie gnrale, Montchrestien, 8e d.,
1991, n 401, p.379. 78H. et L. Mazeaud, J. Mazeaud, F. Chabas,
Leons de droit civil tome II premier volume Obligations thorie
gnrale, Montchrestien, 8e d., 1991, n402, p.380. 79J. Chapron,
Observations sur la rception des travaux , Revue de Droit
Immobilier, 1995, p .7.
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fait tanche, la responsabilit contractuelle trouvant parfois
application postrieurement la rception des travaux80.
51. Plusieurs constats vont simposer. Tout dabord, le rle dfini
de
lentrepreneur et le devoir de conseil universel - issu des
prtoires pour lentrepreneur - vite la confusion prjudiciable et
parfois chaotique des dcisions. En effet, lencadrement technique du
rle de lentrepreneur permet une apprciation le plus souvent aise de
sa responsabilit. A linverse, les enchevtrements de comptences
peuvent aboutir une iniquit des dcisions. Il sagit, en loccurrence,
des comptences croises des architectes et techniciens, et ceci
travers la mission VISA. Ensuite, le devoir de conseil, selon quil
a une origine conventionnelle, jurisprudentielle ou lgale est
apprci diffremment, ce qui peut avoir une incidence nfaste sur la
stabilit de la jurisprudence et des attributions de responsabilits
insatisfaisantes. Cet aspect de la responsabilit contractuelle en
risques du sol concerne le contrleur technique et plus prcisment
linterfrence du devoir de conseil sur la mission dvolue en labsence
de la mission Av. La clart et ladaptation des rles est donc
synonyme de fluidit jurisprudentielle, cest le cas de lentrepreneur
(chapitre I). A linverse, certains croisements sont source
dembarras : tel est le cas des comptences croises des architecte et
ingnieur, tel est aussi le cas des devoirs de conseil conventionnel
et prtorien du contrleur technique (chapitre II). Ainsi, pour
mettre en relief liniquit de dcisions jurisprudentielles issue du
rle imprcis d