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Dix ann ees de recherche dans une pseudo-steppe m editerran eenne : impacts des changements d’usage et restauration ecologique R esum e La plaine de Crau dans le d epartement des Bouches-du-Rh^ one entre les villes d’Arles, de Salon-de-Provence et de Fos-sur-Mer dans le Sud-Est de la France est consid er ee comme l’unique steppe m editerran eenne d’Europe occidentale. Au-del a d’un paysage domin e par une formation v eg etale herbac ee rase (les Coussouls de Crau), cet ecosyst eme abrite une exceptionnelle biodiversit e tant au niveau de la v eg etation (association v eg etale unique au monde) que de la faune (pr esence de nombreuses esp eces end emiques). R esultant de conditions climatiques et edaphiques particuli eres, mais aussi de la pratique multis eculaire du p^ aturage ovin de parcours, cet ecosyst eme original est donc consid er e comme un avant-poste des zones semi- arides nord-africaines. Il a cependant vu sa superficie se r eduire de plus de 80 % suite aux am enagements militaro-industriels et agricoles depuis le XVI e si ecle. Entre 2000 et 2010, d’importants programmes de recherche ont donc et e men es pour : i) identifier les impacts des changements d’usage du sol (intensification des pratiques agricoles) sur la biodiversit e ; ii), identifier le ou les ecosyst eme(s) originel et de r ef erence ; et iii) mettre en place des op erations de restauration ecologique. Nos r esultats montrent que, malgr e les progr es accomplis, il manque encore de nombreuses connaissances et techniques en ing enierie ecologique pour restaurer l’int egrit e des ecosyst emes d etruits. Les premiers r esultats sont cependant encourageants et transf erables en partie a la restauration des vastes steppes semi-arides d’Afrique du Nord. Mots cl es : biodiversit e, ecosyst eme, faune et flore, France, M editerran ee, occupation des sols, pal eo ecologie, restauration, steppe. Abstract Ten years of research in a Mediterranean pseudo-steppe: Impacts of land-use changes and ecological restoration The Crau plain in the department of the Bouches-du-Rh^ one between the cities of Arles, Salon-de-Provence and Fos-sur-Mer in southeastern France is the unique Mediterra- nean steppe of Western Europe. On a landscape covered by short herbaceous vegetation (Coussouls de Crau), this ecosystem accomodates an exceptional biodiversity for vegetation (presence of a unique plant association) and fauna (presence of numerous endemic species). Resulting from particular climatic and soil Thierry Dutoit Elise Buisson Sylvain Fadda Fr ed eric Henry Cl ementine Coiffait-Gombault Renaud Jaunatre Universit e d’Avignon IUT Institut m editerran een d’ ecologie et de pal eo ecologie, UMR CNRS/IRD IMEP, Site Agroparc BP 61207 84911 Avignon cedex 09 France <[email protected]> <[email protected]> <[email protected]> <[email protected]> <[email protected]> <[email protected]> Pour citer cet article : Dutoit T, Buisson E, Fadda S, Henry F, Coiffait-Gombault C, Jaunatre R, 2011. Dix ann ees de recherche dans une pseudo-steppe m editerran eenne : impacts des changements d’usage et restauration ecologique. S echeresse 22 : 75-85. doi : 10.1684/sec.2011.0299 Tir es a part : T. Dutoit doi: 10.1684/sec.2011.0299 S echeresse vol. 22, n8 2, avril-mai-juin 2011 75 Article de recherche S echeresse 2011 ; 22 : 7585
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Dix années de recherche dans une pseudo-steppe méditerranéenne: impacts des changements d’usage et restauration écologique

Apr 27, 2023

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Page 1: Dix années de recherche dans une pseudo-steppe méditerranéenne: impacts des changements d’usage et restauration écologique

Dix ann�ees de recherchedans une pseudo-steppem�editerran�eenne :impacts des changements d’usageet restauration �ecologique

R�esum�e

La plaine de Crau dans le d�epartement des Bouches-du-Rhone entre les villes d’Arles,de Salon-de-Provence et de Fos-sur-Mer dans le Sud-Est de la France est consid�er�eecomme l’unique steppe m�editerran�eenne d’Europe occidentale. Au-del�a d’unpaysage domin�e par une formation v�eg�etale herbac�ee rase (les Coussouls deCrau), cet �ecosyst�eme abrite une exceptionnelle biodiversit�e tant au niveau de lav�eg�etation (association v�eg�etale unique au monde) que de la faune (pr�esence denombreuses esp�eces end�emiques). R�esultant de conditions climatiques et �edaphiquesparticuli�eres, mais aussi de la pratique multis�eculaire du paturage ovin de parcours,cet �ecosyst�eme original est donc consid�er�e comme un avant-poste des zones semi-arides nord-africaines. Il a cependant vu sa superficie se r�eduire de plus de 80 % suiteaux am�enagements militaro-industriels et agricoles depuis le XVI

e si�ecle. Entre 2000 et2010, d’importants programmes de recherche ont donc �et�e men�es pour : i) identifierles impacts des changements d’usage du sol (intensification des pratiques agricoles)sur la biodiversit�e ; ii), identifier le ou les �ecosyst�eme(s) originel et de r�ef�erence ; et iii)mettre en place des op�erations de restauration �ecologique. Nos r�esultats montrentque, malgr�e les progr�es accomplis, il manque encore de nombreuses connaissanceset techniques en ing�enierie �ecologique pour restaurer l’int�egrit�e des �ecosyst�emesd�etruits. Les premiers r�esultats sont cependant encourageants et transf�erables enpartie �a la restauration des vastes steppes semi-arides d’Afrique du Nord.

Mots cl�es : biodiversit�e, �ecosyst�eme, faune et flore, France, M�editerran�ee, occupationdes sols, pal�eo�ecologie, restauration, steppe.

AbstractTen years of research in a Mediterranean pseudo-steppe: Impacts of land-use changes andecological restoration

The Crau plain in the department of the Bouches-du-Rhone between the cities of Arles,Salon-de-Provence and Fos-sur-Mer in southeastern France is the unique Mediterra-nean steppe of Western Europe. On a landscape covered by short herbaceousvegetation (Coussouls de Crau), this ecosystem accomodates an exceptionalbiodiversity for vegetation (presence of a unique plant association) and fauna(presence of numerous endemic species). Resulting from particular climatic and soil

Thierry DutoitElise BuissonSylvain FaddaFr�ed�eric HenryCl�ementine Coiffait-GombaultRenaud Jaunatre

Universit�e d’AvignonIUTInstitut m�editerran�een d’�ecologieet de pal�eo�ecologie,UMR CNRS/IRD IMEP,Site AgroparcBP 6120784911 Avignon cedex 09France<[email protected]><[email protected]><[email protected]><[email protected]><[email protected]><[email protected]>

Pour citer cet article : Dutoit T, Buisson E, Fadda S, Henry F, Coiffait-Gombault C, Jaunatre R, 2011.Dix ann�ees de recherche dans une pseudo-steppe m�editerran�eenne : impacts des changementsd’usage et restauration �ecologique. S�echeresse 22 : 75-85. doi : 10.1684/sec.2011.0299Tir�es �a part : T. Dutoitd

oi:10.1684/sec.2011.0299

S�echeresse vol. 22, n8 2, avril-mai-juin 2011 75

Article de recherche

S�echeresse 2011 ; 22 : 75–85

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L e Bassin m�editerran�een est identifi�ecomme un des 34 « points chauds »de biodiversit�e dans le monde

(M�edail andQu�ezel,1997).Cette impor-tante biodiversit�e peut etre corr�el�ee avecune mise en place particuli�ere des floreset faunes m�editerran�eennes, mais ladiversit�e des paysages et des �ecosys-t�emes rencontr�es ne peut s’expliquersans les mill�enaires d’interaction avecl’homme.Eneffet, ces interactionsont �a lafois g�en�er�e d’importantes d�egradationsen termes de pertes de biodiversit�e et defonctions des �ecosyst�emes mais elles ont�egalement �et�e �a l’origine de la cr�eationet du maintien d’�ecosyst�emes tr�es origi-naux (Grove and Rackham, 2001) dontle capital naturel a �et�e, dans certainscas, plus ou moins maintenu par desmill�enaires de pratiques agricoles dura-bles (Blondel et al., 2010).C’est notamment le cas de la plaine deCrau dans le d�epartement des Bouches-du-Rhone en Provence, dans le Sud-Est dela France (Buisson et al., 2009). Cetteplaine, d’une superficie de 600 km2,forme un triangle isoc�ele de 30 km decot�e entre les villes d’Arles, de Salon-de-Provence et de Fos-sur-Mer. Au niveaug�eographique, elle se trouve entre lachaıne des Alpilles au nord, l’�etang deBerre �a l’est, la Camargue �a l’ouest et lamer M�editerran�ee au sud (figure 1). Lav�eg�etation qui la caract�erise sur encoreplus de 100 km2 est une v�eg�etationherbac�ee rase, laissant apparaıtre denombreux espaces de sols nus, sansaucun arbre ou arbuste (Dutoit, 2010).Appel�ee Coussouls ou Coussous (du lat.cursorium, l’endroit que l’on foule dupied), cette v�eg�etation est compos�ee deplus de 50 % d’esp�eces annuelles et ellepeut etre apparent�ee, toutes proportionsgard�ees, �a la v�eg�etation des steppessemi-arides d’Afrique du Nord dont elleconstituerait un « avant-poste » isol�e surla rive nord de laM�editerran�ee (figure 2).Le Coussoul abrite non seulement une

flore qui n’existe nulle part ailleurs enEurope mais aussi une avifaune tout �afait remarquable (outarde canepeti�ere,ganga cata, faucon cr�ecerellette, etc.)ainsi quedenombreuses esp�ecesd’insec-tes dont certaines sont end�emiquescomme le criquet rhodanien (Prionotropishystrix rhodanica Uvarov) ou le buprestede Crau (Acmaeoderella cyanepennisperroti Schaefer).Le spectre biologique de cette v�eg�etationse rapproche �egalement des formationsv�eg�etales des « dehesas » en Espagne(3 millions d’hectares) ou de « mon-tado » au Portugal (700 000 hectares)avec cependant des diff�erences dans la

composition floristique (Dutoit et al.,2008). L’absence d’arbres dans tout lecentre de la plaine, le maintien d’unev�eg�etationherbac�ee laissant desespacesdesols nuset l’omnipr�esencedupaturageovin depuis au moins 2000 ans (Badanet al., 1995) ont entraın�e la d�enomina-tion de cette v�eg�etation sous le termede « steppe » (Devaux et al., 1983).Nous lui pr�ef�ererons cependant celui de« pseudo-steppe » car, au sens phyto-g�eographique, les conditions climatiqueset notamment la pluviom�etrie moyenne(545 mm/an) ne sont pas r�eunies pourranger cette v�eg�etation de pelousess�eches dans la meme cat�egorie que les

conditions, but also from the multi-secular practice of itinerant sheep grazing, thisoriginal ecosystem is also considered as an outpost of North African semi-arid steppesin the northern part of the Mediterranean Basin. Nevertheless, its area has beenreduced by more than 80% since the 16th century due to military, industrial andintensive agricultural land use. Between 2000 and 2010, important researchprograms were led to (i) identify the impacts of land-use changes (intensification ofagricultural practices) on biodiversity, (ii) identify the original and referenceecosystems, (iii) set up operations of ecological restoration. Our results show thatdespite the progress made in ecological rehabilitation, the existing knowledge andtechniques in ecological engineering are still inadequate to restore the integrity of thedestroyed ecosystems. However, results are encouraging and some of them seem tobe useful for the restoration of vast semi-arid steppes in North Africa.

Key words: biodiversity, ecosystme, fauna and flora, France, land use, paleoecology,restoration, steppe, the Mediterranean.

FRANCE

3 km

Fos-sur-Mer

lstres

Étang de Berre

Arles

St. Martinde Crau

Gra

nd R

hône

Salon-de-Provence

Crau

Figure 1. Localisation de la plaine de Crau en France. La v�eg�etation pseudo-steppiques’inscrit �a l’int�erieur des pointill�es.

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steppes semi-arides d’Afrique du Nord,plutot caract�eris�ees par des pluviom�etriescomprises entre 100 et 400 mm/an (LeHou�erou, 1995).C’est seulement depuis une trentained’ann�ees qu’a eu lieu la prise en comptede l’exceptionnelle biodiversit�e de cetespace et des menaces qui p�esent sur luisuite �a la conversion depuis le milieu duXVI

e si�ecle de sa v�eg�etation de typesteppique en prairies de fauche, culturesmaraıch�eres, c�er�eali�eres et vergers apr�esla mise en place de r�eseaux d’irrigationpar submersion. �A ces changementsd’usage agricole se sont rajout�ees desinstallations militaires et industrielles enlien avec la faible d�emographie de cetespace. L’ensemble de ces am�enage-ments sera �a l’origine de la destruction deplus de 80 % de la pseudo-steppe enquatre si�ecles, avec une acc�el�erationmarqu�ee aux XIX

e et XXe si�ecles (Buisson

and Dutoit, 2006).Si des recherches existaient sur la Craudepuis le d�ebut du XIX

e si�ecle, celles-ci onttout d’abord �et�e �a caract�ere naturaliste,puis agronomique, et ce n’est qu’�apartir de 1975 qu’elles s’appliquent �ala conservation des esp�eces et aux�ecosyst�emes en parall�ele avec la miseen place de diff�erents niveaux de protec-tion.C’est d’ailleurs seulement lorsque lesderniers morceaux issus de la pseudo-steppe fragment�ee seront prot�eg�es en2001 (74 km2), que se mettront en placeles premi�eres recherches pour r�ehabiliter

et/ou restaurer cet �ecosyst�eme, bien queles cons�equences des changementsd’usage sur la flore et la faune aient faitl’objet de recherches d�es le d�ebut desann�ees 1980 [(Devaux et al., 1983)).Depuis 2001, les espaces relictuelspseudo-steppiques de la plaine de Crauet les zones d�egrad�ees sont donc deve-nus un v�eritable site atelier pour desrecherches en �ecologie de la restauration(Dutoit, 2004). R�ealis�ee dans un premiertemps �a des �echelles spatiales et des pasde temps exp�erimentaux, l’acquisitionde connaissances et de techniques ening�enierie �ecologique (Dutoit et Rey,2009) a ensuite permis la mise en placed’une restauration �ecologique op�eration-nelle concernant notamment plusieurscentainesd’hectaresavecdessuivisscienti-fiques pr�evus sur une p�eriode d’au moins30 ann�ees (Dutoit and Sabatier, 2010).La synth�ese de nos r�esultats sera doncpr�esent�ee ici selon les trois axes qui ontstructur�e nos recherches dans cet espacedepuis 10 ans : i) l’identification desd�egradations humaines sur la biodi-versit�e et la dynamique de la pseudo-steppe ; ii) la recherche du ou des�ecosyst�emes originel et de r�ef�erence envue de iii), la mise en place d’op�erationsvisant �a la r�ehabilitation de certainesfonctions de l’�ecosyst�eme ou sa mise surune trajectoire lui permettant �a plus oumoins long terme de retrouver sonint�egrit�e d’avant les perturbations et saplace dans la fili�ere ovine traditionnelle.

Mat�eriel et m�ethode

Depuis le d�ebut du XXIe si�ecle, nos

recherches ont �et�e men�ees essentielle-ment sur les morceaux de pseudo-steppeset les espaces d�egrad�es proches maisdont le niveau de perturbation n’a pasentraın�e le franchissement par l’�eco-syst�eme de seuils d’irr�eversibilit�e nepermettant plus la r�ehabilitation et/ourestauration de l’�ecosyst�eme de r�ef�e-rence pr�eexistant. En effet, si de nom-breux seuils ont �et�e franchis, il ne devientplus pertinent au niveau biologique etsocio-�economique de chercher �a revenir�a un �ecosyst�eme ant�erieur par rapport �ala n�eoformation d’un nouvel �ecosyst�eme,encore appel�ee « op�eration de r�eaffec-tation » (Muller et al., 1998).

Identification de l’impactdes d�egradations sur la biodiversit�ede la pseudo-steppe

La consultationdes campagnesdephotosa�eriennes disponibles depuis 1944 ontpermis de confirmer le maintien en l’�etatde plus de 10 000 hectares sur les55 000 hectares existant potentielle-ment �a l’origine mais �egalement l’exi-stence de plus de 1 500 hectares defriches r�esultant de l’abandon de culturesmaraıch�eres entre les ann�ees 1960 et1980. Ces friches ont �et�e alors choisiespour la restauration de la pseudo-steppecar elles ne pr�esentaient pas de change-ments majeurs au niveau du substratum(pr�eservation de la couche de poudinguecompos�ee de galets pris dans unematrice de carbonates de calcium situ�ee�a 40 cm de profondeur en moyenne) et�etaient toutes plus ou moins imbriqu�eesdans unematrice paysag�ere comprenantencore des morceaux de pseudo-steppenon d�etruits par des mises en culture.Sur six sites r�epartis al�eatoirement dansla plaine, des analyses de sols (granu-lom�etrie, �el�ements chimiques majeurs,mati�ere organique, pH, etc.), desrelev�es de v�eg�etation (10 quadrats de4 m2 relev�es en pr�esence-absence dans25 sous-quadrats de 40 � 40 cm) et dupi�egeage des col�eopt�eres (trois pi�eges �afosse dispos�es en triangle de 1 m decot�e et al�eatoirement dans la friche avectrois r�ep�etitionsdanstrois friches repr�esen-tatives, pi�eges relev�es tous les 15 joursentre avril et novembre) ont �et�e effectu�espour mesurer les impacts des phasesculturales anciennes sur la compositionet la richesse des communaut�es v�eg�etaleset des assemblages de col�eopt�eres terri-coles par rapport �a des morceaux depseudo-steppe voisins mais non d�etruits.Ce type de suivi a �egalement �et�e r�ealis�e

Figure 2. La v�eg�etation pseudo-steppique des Coussouls de la Crau.Notez l’abondance de la couverture de galets et la structuration de la v�eg�etation par les touffes deBrachypodium retusum (clich�e Renaud Jaunatre, IMEP).

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tous les m�etres sur des transects de 10 mplac�es perpendiculairement (3 transectsr�epliqu�es au sein de chaque parcelleavec un espace de 10 m entre chaquetransect sur trois parcelles de frichesdiff�erentes �a histoires culturales contrast�ees)�a la bordure des friches avec des morce-aux de pseudo-steppe afin de mesurerd’�eventuels effets de lisi�ere (Buisson andDutoit, 2004).

Identification de l’�ecosyst�emeoriginel et de r�ef�erence

Si le choix de la pseudo-steppe comme�ecosyst�eme de r�ef�erence a fait l’objetd’un consensus en lien avec les r�ef�erentssocioculturels forts li�es �a l’�elevage ovintranshumant, au maintien de la racelocale (le m�erinos d’Arles) et �a l’attraittouristique de cet espace, la connais-sance de l’�ecosyst�eme originel (avant lespremiers impacts humains significatifs)n’�etait pas suffisante pour d�eterminer sila restauration devait etre passive (via lareconstitution naturelle, encore appel�eer�esilience naturelle) ou si elle devait etreactive (avec interventions humaines)((Etienne et al., 1998) ; (Molinier andTallon, 1950)).Afin d’avoir une r�eponse �a une �echellecompatible avec l’existence de la v�eg�e-tation steppique, nous avons choisi parmiles techniques d’investigation disponi-

bles en pal�eo�ecologie, de focaliser etd’�echantillonner les charbons de boiscontenus dans les sols (p�edoanthra-cologie) car les charbons de grandetaille se diffusent sur de petites surfacesseulement lors des incendies et ceux-cisont bien pr�esents meme dans les solssecs et superficiels contrairement auxpollens (Thinon, 1992). Afin d’accroıtrenos chances de trouver des charbonsdans des sols ayant subi au moins 2 000ans de paturage ovin et, une �erosion ennappe et �eolienne importante, nousavons donc �echantillonn�e au sein de lav�eg�etation steppique non perturb�ee maisaussi sous les fondations identifi�ees debergeries antiques afin d’avoir la certi-tude d’�echantillonner des sols en place(figure 3). Au total, 14 fosses ont �et�er�ealis�ees, permettant l’�echantillonnagede 60 horizons de sol entre 0 et 40 cmde profondeur, soit 900 litres de solpr�elev�es au total, desquels ont �et�e extraits597 charbons de bois dont 23 seulementont pu etre identifi�es et dat�es au carbone14. L’identification des charbons n�eces-site un microscope optique �episcopique.Elle s’effectue �a l’aide d’ouvrages d’ana-tomie de bois et par comparaison avecles �echantillons carbonis�es de la collec-tion de r�ef�erence. La s�election descharbons �a dater par spectrom�etrie demasse par acc�el�erateur (SMA) estcontrainte par la taille des fragments.

La plupart des charbons extraits, issus dela classe de taille comprise entre 800 mmet 1,25 mm, ont une masse inf�erieure �a1 mg, qui correspond �a la masse mini-male requise par la plupart des labora-toires de datation (Henry et al., 2008).

Impacts des op�erationsde restauration

Apr�es identification des principauxfiltres empechant la r�esilience naturellede la v�eg�etation et des assemblages decol�eopt�eres sur le long terme, il s’av�ereque ces filtres consistent en de faiblescapacit�es de dispersion de la majorit�edes esp�eces composant la v�eg�etation delapseudo-steppeet d’unpouvoir comp�eti-tif plus grand des esp�eces adventiceslorsqu’elles sont en forte densit�e (Coiffaitet al., 2008). Les modifications del’habitat induites par les phases culturales(augmentation du niveau trophique,changement de la composition granu-lom�etrique et de la structure du sol)expliquent alors seulement une partiede l’absence de recrutement des esp�ecesv�eg�etales les plus typiques de la pseudo-steppe. Cette action est donc plutotindirecte, via la pr�esence d’esp�ecesadventices tr�es communes, que directevia l’augmentation du niveau trophiqueauxquelles les esp�eces typiques de lapseudo-steppe pourraient s’adapter. Cesesp�eces adventices ubiquistes devraientainsi disparaıtre quand le niveau trophi-que de la friche �a restaurer est semblable�a celui de la pseudo-steppe de r�ef�erence.Cette hypoth�ese devrait cependant etretest�ee enmesurant leur survie apr�es semisdans la matrice d’une pseudo-steppe.En cons�equence, les op�erations derestauration ont consist�e au forcage desprocessus de dispersion par transfert defoins aspir�es dans des exclos (zonesgrillag�ees pour empecher le paturagedes ovins) install�es dans desmorceaux depseudo-steppe sans destruction afin demaximiser la r�ecolte des graines produi-tes (Coiffait et al., 2008). En raison de lapr�esence en surface de gros galets, cetter�ecoltede foinest effectu�eeparaspirationet le foin ainsi r�ecolt�e a �et�e �epandu surle sol �a raison de 700 g/m2 dans desquadrats (3 r�ep�etitions de 4 pseudo-r�ep�etitions de 40 � 40 cm) en pr�esencedepaturage ouen sonabsence. �A titre decontrole, cette op�eration est �egalementr�ealis�ee dans la v�eg�etation pseudo-steppique. Au total, ce sont donc48 quadrats avec �epandage de foins et48 quadrats sans �epandage qui ont�et�e suivis pendant trois ann�ees (2007-2009). Comme les graines des esp�e-ces p�erennes qui dominent la steppe(Brachypodium retusum & Thymus

Figure 3. �Echantillonnage des charbons de bois sous les fondations d’une bergerie romaineen Crau(clich�e M. Reuche, IUT d’Avignon).

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vulgaris) sont tr�es peu produites et donctr�es peu pr�esentes dans les foins, ellesont �et�e sem�ees directement en m�elangeavec Trifolium subterraneum dont lerole couvrant du sol est bien connu. Lem�elange est compos�e de 73 % debrachypode (47 kg/ha), 20 % de tr�eflesouterrain (13 kg/ha) et 7 % de thym(4 kg/ha). Il est attendu du semis de cesesp�eces une baisse de la densit�e desadventices et un accroissement des sitesfavorables (« safe sites ») �a l’installationdes esp�eces typiquesde lapseudo-steppelorsque ce m�elange est patur�e. Douzer�ep�etitions de 12,5 � 25 m ont �et�esem�ees avec ce m�elange, dont la moiti�eest accessible au paturage et l’autre non(figure 4). Les suivis ont �et�e effectu�espendant deux ann�ees (2008-2009) �al’aide de 3 quadrats (1 m2) pseudo-r�epliqu�es dans chaque traitement, soitau total 72 quadrats par an, sans oublierles comparaisons avec trois quadratsdans la pseudo-steppe t�emoin et troisquadrats dans la friche sans traitement,mais avec du paturage traditionnel pources deux derni�eres parcelles.

Pour la restauration des assemblages decol�eopt�eres, ce sont de petites surfaces(1,5 � 3 m) r�eparties de mani�ereal�eatoire qui ont de nouveau �et�e cou-vertes de galets avec ou non exclusiondu paturage pour mesurer l’importancede ces derniers sur la distribution descol�eopt�eres dans une friche (12r�ep�etitions de chaque traitement). Len�egatif de ce protocole a �et�e effectu�edans la pseudo-steppe relique pourmesurer l’impact du retrait des galets etdu paturage (12 r�ep�etitions de chaquetraitement, �egalement). Au total, plus de96 quadrats ont �et�e suivis quatre ansapr�es la r�ealisation du protocole der�ehabilitation pour �eviter l’impact n�egatifde laperturbationdue �a samise enplace.Les col�eopt�eres ont �et�e pi�eg�es selon lameme m�ethodologie que celle d�ecritepour mesurer l’impact des d�egradations.Enfin, dans le cadre d’une op�eration desauvegarde suite �a la construction d’uneplate-forme logistique, la v�eg�etationsteppique et son sol ont �et�e retir�es ensurface (�etr�epage) sur une profondeurcomprise entre 10 et 20 cm selon les

possibilit�es techniques de la pelleteuse auprintemps 2009 puis transport�es pouretre �epandus dans la meme journ�ee surun sol de friche r�esultant de l’arrachaged’un verger intensif abandonn�e en2006.Au total, 3 000 m2 ont �et�e �etr�ep�es sur lesite donneur pour etre �epandus sur9 000 m2 sur le site receveur ; au total,600 m3 de sol ont �et�e �epandus, soit unrapport de un pour trois qui correspond �acequi est g�en�eralementpr�econis�epour larestauration de pelouses s�eches par�epandage de sol (Kiehl et al., 2010).Les r�esultats ont �et�e suivis pendant un anapr�es l’�epandage en utilisant 3 quadratspseudo-r�epliqu�es de 4 m2 relev�es enpr�esence/absence avec attribution d’uncoefficient de recouvrement pour chaqueesp�ece et compar�es �a 18 quadrats posi-tionn�es dans lapseudo-steppe t�emoinet �a18 quadrats positionn�es dans la frichesans �epandage de sol.Tous les r�esultats sont analys�es pardes tests Anova (Analysis of variance)apr�es v�erification de la normalit�e desdonn�ees (test de Shapiro-Wilk) ethomog�en�eit�e des variances (test deLevene) (version statistique de calcul R3.0.1.2005).

R�esultats

Identification de l’impactdes d�egradations sur la biodiversit�ede la pseudo-steppe

Nos r�esultats montrent clairement quememe apr�es 30 ann�ees d’abandon descultures, celles-ci ont encore un impactsignificatif sur la composition, la struc-ture, mais aussi la richesse sp�ecifiquedes friches en esp�eces v�eg�etales parrapport �a la pseudo-steppe (figure 5).On mesure notamment une baissesignificative de la richesse en esp�ecesdes friches, qu’elles aient �et�e cultiv�eespour la production de melons ou dec�er�eales, mais �egalement un change-ment drastique de la composition floris-tique qui se banalise par rapport �al’h�et�erog�en�eit�e de la v�eg�etation step-pique en lien avec un gradient clima-tique nord-sud (R€omermann et al.,2005). Les esp�eces les plus typiquesde la pseudo-steppe (esp�eces dominan-tes et esp�eces caract�eristiques) dispa-raissent au profit d’une flore compos�eed’adventices des cultures (R€omermannet al., 2005) qui se maintiennent grace�a leur forte capacit�e de dispersion ou�a la viabilit�e de leurs graines dans lesol. Cette forte r�emanence des effetsdes cultures est d’autant plus marqu�ee

Figure 4. Protocole de restauration d’une ancienne friche agricole dans la plaine de Craupar semis d’esp�eces structurantes (brachypode rameux � tr�efle souterrain � thym commun)avec ou sans paturage.Notez l’effet de la mise en place des 6 exclos sur la biomasse herbac�ee un an seulement apr�es leur installation(image : Google Earth, 2008).

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que la phase culturale a �et�e longue, maisl’age d’abandon de la friche influencepeu la composition floristique actuelle(R€omermann et al., 2005). Cette influ-ence sur la v�eg�etation peut s’expliquer�egalement par des changements dansla chimie des sols des anciennes culturesqui poss�edent toujours des teneurs totalesen phosphore, potassium, calcium etcarbonates de calcium significativementsup�erieures �a celles des sols de pseudo-steppe (R€omermann et al., 2005). Cesmodificationssont �arelieravec les impactsdes pratiques culturales, dont la pr�esencede reliquats de fumure (phosphore, potas-sium notamment) et des remont�ees decarbonates dues aux labours profondsqui ont �egalement entraın�e une aug-mentation du pH, certes de 0,5 unit�eseulement, mais qui a fait passer le pH dela pseudo-steppe d’une l�eg�ere acidit�e�a la neutralit�e. L’�echantillonnage de la

pluie de graines et de la banque degraines permanentes et transitoires du solmontre en compl�ement que les grainesdes esp�eces typiquesde lapseudo-steppese dispersent tr�es peu par le vent et ont defaibles viabilit�es dans le sol �a l’oppos�edes r�esultats obtenus pour les grainesdes esp�eces adventices (Buisson et al.,2006).Au niveau des col�eopt�eres, les r�esultatsobtenus sont inverses et montrent uneplus grande richesse de col�eopt�eresdans les anciennes cultures aban-donn�ees par rapport �a la pseudo-stepperelictuelle (Fadda et al., 2007). Cepen-dant, comme pour la flore, la composi-tion des assemblages de col�eopt�eresterricoles reste tr�es diff�erente de celle dela pseudo-steppe qui pr�esente, malgr�eune richesse moindre, le plus grandnombre d’esp�eces �a forte valeur patri-moniale en liaison avec la raret�e de leur

distribution dans le Sud-Est de la France((Fadda et al., 2007) ; (Fadda et al.,2008)).Au niveau des lisi�eres, nous n’avonspas mesur�e d’augmentation significativede la richesse de la v�eg�etation et desassemblages de col�eopt�eres terricolesle long du transect en fonction de ladistance �a la bordure ((Buisson andDutoit, 2004) ; (Fadda et al., 2008)).Pour la v�eg�etation, un effet de lisi�ere sefait seulement ressentir dans les troispremiers m�etres du transect �a partir de labordure avec la pseudo-steppe o�u 60 %des esp�eces de la steppe ont colonis�e cetespace, mais en 30 ans !

� Identification de l’�ecosyst�emede r�ef�erence

Sur les 23 charbons identifi�es, aucun necorrespond clairement �a l’esp�ece domi-nante des vieilles forets (> 200 ans)en climat m�editerran�een (Quercus ilex)dans les situations sans traces d’occupa-tion humaine. �A la fin du N�eolithique,on peut constater un accroissement dur�egime des incendies vraisemblablementcorr�el�e avec une exploitation humaineplus importante. Les esp�eces brul�eescorrespondent aux esp�eces de garriguesavec Phillyrea sp. et Prunus sp. D�esl’�epoque antique et jusqu’�a la p�eriodemoderne, la pr�esence de charbonsde bois d’arbres est corr�el�ee avec leurutilisation pour la construction de berge-ries et de cabanes (Henry et al., 2010).En revanche, les emplacements sanstracesd’occupationhumainesontcaract�e-ris�es par des esp�eces de milieux tr�esouverts (Lavandula sp. Thymus sp.).En conclusion, au N�eolithique, l’hommes’installe dans une v�eg�etation de type« steppe arbor�ee » ou de matorral etl’impact de sesbrulis et de la cr�eationd’unpaturageitin�erantaurapourcons�equenceun fort d�efrichement des esp�eces arbusti-ves et la mise en place de la v�eg�etationherbac�ee qui perdure encore jusqu’�a nosjours. Les rares traces de ligneux pr�esentssemblent plus etre corr�el�ees avec lesconstructions humaines et l’utilisationpour le bois de chauffage. Ce bois auraitainsi une origine exog�ene �a la plaine d�esl’Antiquit�e (figure 6). La v�eg�etationpseudo-steppique de la plaine de Craun’est donc pas un �ecosyst�eme originelet stable au sens de (Clements, 1917),il n’est cependant pas issu non plusd’une antique vieille foret qui aurait�et�e d�efrich�ee par l’homme au N�eolithi-que. Depuis plusieurs mill�enaires lesinteractions entre le paturage ovinr�ecurrent, le sol oligotrophe et le climatm�editerran�een ont ainsi permis laconstitution actuelle de la v�eg�etation

Friche melonnière Friche céréalière Pseudo-steppe

4030

2010

0Richesse spécifique/4 m2

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Figure 5. Richesse sp�ecifique de la pseudo-steppe, des anciennes cultures c�er�eali�eres etmelonni�eres ([(R€omermann et al., 2005)] modifi�e).Des lettres diff�erentes indiquent une diff�erence significative au seuil p < 0,001 (n = 60).

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de la pseudo-steppe. Cette dynamiquesur le tr�es long terme pourrait ainsiexpliquer la tr�es faible r�esilience de lav�eg�etation steppique apr�es une perturba-

tion de type cultural. Les « coussouls » deCrau seraient donc le pendant au niveauherbac�e des forets matures au niveauforestier.

� Impacts des op�erations de restauration

D�es la premi�ere ann�ee de suivi, nosr�esultats ont montr�e une augmentationsignificative de la richesse en esp�ecesdes quadrats (Coiffait et al., 2011a) o�uavait �et�e �epandu le foin de meme qu’unchangement de composition permettantl’installation de nombreuses esp�eces dela pseudo-steppe (figure 7). Cependant,si ces r�esultats sont particuli�erementencourageants pour les esp�eces annuel-les, ce n’est pas le cas des esp�ecesp�erennes dominantes (Brachypodiumretusum, Thymus vulgaris notamment)qui n’ont pas �et�e transplant�ees par cettem�ethode faute d’une production degraines suffisante et accessible lors dupassage des aspirateurs (d�ebut juillet2006, lors du pic de fructification desesp�eces steppiques).En cons�equence, ces deux esp�eces domi-nantes ont �et�e sem�ees enm�elangeavec letr�efle souterrain dont les propri�et�es pourcouvrir le sol et capter l’azote atmo-sph�erique de l’air sont bien connues.Entre 2008 et 2009, nos r�esultats ontmontr�e que ces esp�eces sem�ees se sontbien implant�ees dans les friches. De plus,le paturage a eu une action favorable surle brachypode qui couvre plus le sol parrapport aux exclos non patur�es (figure 8).L’action du semis du m�elange sur larichesse en esp�eces pr�esentes spontan�e-ment dans la friche ne montre pas dediff�erences significatives avec le traite-ment labour�e sans semis. Mais uneaugmentation significative de la richesseen esp�eces v�eg�etales est cependantmesur�ee avec ce traitement par rapport�a la zone de friche patur�ee sans aucuntraitement qui sert de t�emoin.Au niveau de la composition, les zonessem�ees et patur�ees avec le m�elange sontdiff�erentes des autres zones trait�ees avecnotamment des plantes de la familledes Poac�ees pr�esentes �egalement dansla pseudo-steppe (Lolium perenne, Cata-podium rigidum, Bromus hordeaceus,Taeniatherum caput-medusae) et donccapables de coloniser spontan�ement cetespace sous l’action des esp�eces struc-turantes sem�ees et du paturage.Au niveau des col�eopt�eres, la remiseen place de la couverture de galets etl’exclusion du paturage dans la friche ontpermis une augmentation significativede la densit�e des col�eopt�eres (figure 9)mais non de leur richesse (Blight et al.,2011).Ces r�esultats confirment une�etudepr�ec�edente qui montrait une forte inertiedes changements de la richesse desassemblagesde col�eopt�eres en l’absencede paturage (Fadda et al., 2008).Pour le transfert de sol effectu�e auprintemps 2009, les relev�es effectu�es

Écart typ

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5 000 4 000 3 000 2 000 1 000 0

Âge C14 calibré BP

Fin du NéolithiqueÂge du Bronze

Antiquité

Moyen-ÂgeÉpoque moderne

Figure 6. Distribution temporelle des datations des 23 charbons �echantillonn�es dans lapseudo-steppe de Crau ([(Henry et al., 2008)] modifi�e).

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Friche témoin Pseudo-steppe Friche avec épandagede foins

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Figure 7. Richesse sp�ecifique moyenne une ann�ee apr�es l’�epandage de foins de pseudo-steppe sur la friche avec paturage ([(Coiffait et al., 2008)] modifi�e).Des lettres diff�erentes indiquent une diff�erence significative au seuil p < 0,001 (n = 12).

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un an apr�es montrent une augmentationsignificativede la richesse enesp�ecesparrapport �a la friche t�emoin sans �epandagemais aussi par rapport �a la steppe t�emoin(figure 10). Cette augmentation corres-pond �a la pr�esence non seulement denombreuses esp�eces annuelles conte-nues dans la banque de graines du solinitial de la steppe qui germent suite �a laperturbation intense r�esultant de l’�epand-age mais aussi et encore des esp�ecesadventices pr�esentes dans la banquede graines du verger abandonn�e. Celaexplique donc la richesse sup�erieure dutraitement avec �epandage du sol parrapport �a la pseudo-steppe t�emoin o�u cesesp�eces ne sont pas pr�esentes et dont lav�eg�etation demeure domin�ee par certai-nes p�erennes comme le brachypoderameux. Il est �a noter que, comme pourle transfert de foin, ces esp�eces n’ont pasrepris ni �a partir de germinations, ni �apartir de multiplications v�eg�etatives bienque l’�epandage de sol ait �et�e r�ealis�eimm�ediatement apr�es la suppression dela couche sup�erieure de sol du sitedonneur.

Discussion g�en�erale

Des impacts contrast�esdes phases culturalessur la biodiversit�ede la pseudo-steppe

Nos r�esultats ont montr�e un impactind�eniable des phases culturales nonseulement sur la richesse en esp�eces dela v�eg�etation steppique mais �egalementsur sa composition. Trente ans apr�esl’abandon des cultures et meme apr�esune reprise imm�ediate du paturagetraditionnel, la v�eg�etation des anciennescultures reste plus pauvre et plus banaleque celle de la pseudo-steppe. Lesassemblages de col�eopt�eres terricolesmontrent un r�esultat inverse pour larichesse, mais, dans les deux cas, lesesp�eces les plus rares et les plustypiques de la pseudo-steppe disparais-sent au profit de peuplements pluscosmopolites. Ces r�esultats montrentl’int�eret de suivre plusieurs comparti-ments de la biodiversit�e pour une

meilleure estimation des r�eponses duvivant aux perturbations.

Une tr�es faible r�esiliencede la v�eg�etation pseudo-steppiqueface aux perturbations exog�enes

Ces r�esultats montrent �egalement la tr�esfaible r�esiliencenaturellede lav�eg�etationsteppique apr�es une phase culturale.Meme si celle-ci a entraın�e une augmen-tation de la fertilit�e du sol encoreperceptible 30 ans apr�es l’abandon(teneurs en phosphore et potassiumnotamment), les changements d’habitatsne sont cependant pas les seuls en causepour expliquer l’absence de r�eg�en�era-tion spontan�ee de la v�eg�etation pseudo-steppique. Cette faible r�esilience pourraitainsi etre expliqu�ee par les strat�egies desesp�eces qui composent la v�eg�etationsteppique. En effet, nous �emettons icil’hypoth�ese que ce sont les esp�ecestol�erantes, adapt�ees aux stress (d�eficithydrique) et aux perturbations inter-m�ediaires r�ecurrentes (paturage ovin deparcours) mais peu productives qui ontdesgrainesqui restentpeuviablesdans lesol et sont peu transport�ees par le vent.Cette hypoth�ese demande cependantmaintenant �a etre test�ee par des exp�eri-ences d’enfouissement et de pi�egeagesa�eriens des graines. La pr�esence d’unematrice de v�eg�etation pseudo-steppiqueet/ou de morceaux de pseudo-steppesreliques est donc de peu d’utilit�e pouracc�el�erer la r�eg�en�eration de la v�eg�eta-tion steppique et de son entomofaune. Ilfaut ainsi au minimum plusieurs dizainesd’ann�ees pour que plus de la moiti�eseulement des esp�eces steppiques colo-nise uniquement la bordure des ancien-nes cultures ((Buisson andDutoit, 2004) ;(Buisson et al., 2006)).

La pseudo-steppe de Crau :un vieil �ecosyst�eme model�epar l’homme

La tr�es faible r�esilience de certainescommunaut�es v�eg�etales a cependantd�ej�a �et�e identifi�ee pour les communaut�esforesti�eres (Plue et al., 2008) mais �egale-ment pour la pseudo-steppe de Crau o�ules impacts des pratiques d’�elevage lorsde la p�eriode antique et notamment de laconcentration des troupeaux dans lesbergeries sont encore perceptibles dansla composition chimique du sol, sa ban-que de graines et la v�eg�etation exprim�ee1 500 �a 2 000 ans apr�es leur abandon(Henry, 2009). Nos investigations enpal�eo�ecologie confirment l’anciennet�ede la v�eg�etation herbac�ee de type

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Frichetémoin

Friche seméenon pâturée

Friche seméeet pâturée

Pseudo-steppe

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Figure 8. Recouvrement moyen du brachypode un an apr�es son semis dans la friche avecpaturage ([Coiffait et al., 2001b] modifi�e).Des lettres diff�erentes indiquent une diff�erence significative au seuil p < 0,001 (n = 30).

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pseudo-steppique qui peut au moins etredat�ee de 5 000 �a 6 000 ans BP etr�esulterait de l’exploitation d’une v�eg�e-tation de type matorral �a la fin duN�eolithique. Cette anciennet�e renforcela fragilit�e de la v�eg�etation par rapport �atoute autre perturbation que celle aveclaquelle elle a « co�evolu�e » (le paturageovin depuis au moins 2 000 ans). Eneffet, bien que la physionomie de cettev�eg�etation soit rest�ee herbac�ee au fil dessi�ecles, sa composition a vraisemblable-ment chang�e permettant la constitutionde vieilles prairies ou prairies matures.Celles-ci sont compos�ees de nombreusesesp�eces annuelles mais domin�ees parune esp�ece p�erenne, le brachypoderameux, qui prendrait ici la place en�ecosyst�eme prairial des ligneux dits« climaciques » (Q. ilex, Quercus pubes-

cens) pour les �ecosyst�emes forestiersm�editerran�eens (Gaillard et al., 2009).

Comment restaurer un �ecosyst�emeculturel ?�A l’image de nombreuses steppes semi-arides d’Afrique du Nord (Le Hou�erou,1995), la v�eg�etationde laplainedeCraun’est pas un �ecosyst�eme originel ou« climacique », ce qui explique d’autantplus sa faible r�esilience naturelle qui neconduira pas spontan�ement �a l’�ecosy-st�eme de r�ef�erence choisi. Celui-ci cor-respond plutot �a un vieil agro-�ecosyst�emequi a �evolu�e sous la r�ecurrence de prati-ques pastorales traditionnelles durablespuisque la pression de paturage actuelleest comparable �a celle qui �etait pratiqu�eepar les bergers romains il y a deux

mill�enaires (Badan et Brun, 1995). Lapseudo-steppe de Crau constitue �egale-ment un �ecosyst�eme culturel au sens de(Clewell et Aronson, 2010) qui n�ecessitedonc la mise en place d’op�erationsde r�ehabilitation et/ou de restaurationactive pour le remettre sur la trajectoire luipermettant de retrouver son int�egrit�e�ecologique pass�ee malgr�e les incertitu-des qui p�esent encore sur la faisabilit�e detelles op�erations tant en termes deconnaissances scientifiques que de tech-niques en ing�enierie �ecologique (Dutoitet al., 2008).Les principaux seuils d’irr�eversibilit�e �a lar�esilience spontan�ee de la v�eg�etationsteppique apr�es des phases culturalesconsistent en la destruction de cettev�eg�etation sur de grands espaces(1 500 hectares au total), une augmen-tation de la fertilit�e chimique des parcel-les, mais aussi la colonisation de cesespaces par de nombreuses esp�ecesadventices cosmopolites. La restaurationde la v�eg�etation pseudo-steppique, voiredes assemblages de col�eopt�eres, passedonc par le forcage des processus dedispersion afin d’amener les graines etles clones des esp�eces steppiques sur lesanciennes cultures (transfert de foin oude sol) mais �egalement de limiter lacouverture des esp�eces adventices surles anciennes cultures par des semisd‘esp�eces couvrantes. Le transfert de solet le transfert de foin montrent de tr�esbons r�esultats pour restaurer une partiede la composition v�eg�etale typique de lapseudo-steppe, notamment pour lesesp�eces annuelles. Ces r�esultats ontcependant �et�e obtenus sur le tr�es courtterme et des bilans r�eguliers devrontdonc maintenant etre effectu�es au moinstous les 5 ans.Le transfert de sol n’est cependant pas ensoi uneop�eration de restaurationpuisquela pseudo-steppe du site donneur estd�etruite. Il reste donc maintenant �a�etudier la possibilit�e de transf�erer desplaques ou « carpettes » de tailles etd’espacements diff�erents afin de testernon seulement leur role de « greffon » oude « nucleus » via la colonisationspontan�ee �a partir des bordures descarpettes transplant�ees. Mais il faudraaussi �etudier la « cicatrisation » l�a o�u lescarpettes de pseudo-steppe auront �et�epr�elev�ees. Cette technique reprend ainsiles r�esultats de la remise en place depetites surfaces couvertes de galets, l�a o�uils avaient �et�e initialement �epierr�es pourles cultures, et qui montraient une aug-mentation de la densit�e des col�eopt�eresd�es la quatri�eme ann�ee apr�es la mise enplace du protocole exp�erimental. Il estdonc possible d’envisager des op�era-tions de restauration sur de petites

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Galets Galets

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Figure 9. Abondance moyenne des col�eopt�eres avec ou sans remise en place des galets etavec ou sans paturage dans la friche ([Fadda et al., 2007] modifi�e).Des lettres diff�erentes indiquent une diff�erence significative au seuil p < 0,05 (n = 12).

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surfaces spatialement fonctionnellespour r�eduire les couts de telles inter-ventions.

Quel transfert des r�esultatspour les steppes d’Afriquedu Nord ?

Les op�erations de transfert de sol ou decarpettes de steppe repr�esentent bien�evidemment un cout �economique �elev�eet ne doivent etre envisag�ees que dansle cadre d’une restauration sur de petitessurfaces d’un agro-�ecosyst�eme �a hautevaleur patrimoniale, comme dans le casd’un accident technologique, suite �ala fuite d’un ol�eoduc par exemple. Cesop�erations ne sont bien �evidemment pastransposables pour la restauration desvastes espaces de steppe semi-aridesnord-africaines ((Aronson et al., 1993) ;(Pontanier et al., 1995)) o�u devront etreprivil�egi�es �a l’image de nos r�esultats, destransferts de foin �a partir de zones nond�egrad�ees et des semis d’esp�eces cou-vrantes, si possible les esp�eces p�erennesdominant les steppes non d�egrad�ees.Enfin, il semble que ce soit la combinai-

son de ces deux pratiques qui offriraitles meilleurs r�esultats au niveau �a la foisde la r�ehabilitation d’une partie de lacomposition sp�ecifique de la v�eg�etationsteppique (esp�eces annuelles notam-ment) mais �egalement de sa structurationpar l’implantation d’esp�eces dominantesqui structureront la communaut�e et seronten mesure de cr�eer des microsites favor-ables �a l’installation d’autres esp�ecessteppiques via leur transport dans latoison ou le syst�eme digestif des herbivo-res domestiques utilis�es pour le paturagede parcours. Nos premiers r�esultats desemis de brachypodes confirment ainsi lafaisabilit�e de son implantation par desmoyens m�ecaniques, mais son action surune acc�el�eration de la colonisation desfriches par les esp�eces typiques de lapseudo-steppe semble n�ecessiter plu-sieurs ann�ees. Pour acc�el�erer ce proces-sus, des op�erations d’�etr�epage du sol(pour r�eduire la fertilit�e du sol et le stockde graines d’esp�eces adventices) ont �et�eeffectu�ees en 2009 ainsi que desop�erations de transfert de foin l�a o�u lesbrachypodes sem�es �etaient d�ej�a bienimplant�es. Nos premiers r�esultats mon-trent une action ind�eniable de l’�etr�epage

sur la r�eduction du nombre d’esp�ecesd’adventices issues de la banque degraines du sol (comme sur le ch�enopodeblanc par exemple) mais le role facilitantdu brachypode sur l’implantation desgraines transf�er�ees par le foin demandeencore �a etre confirm�e sur lemoyen terme(Coiffait et al., 2011b).

Conclusion

Dix ann�ees de recherche sur la v�eg�e-tation pseudo-steppique de la plaine deCrau ont permis d’identifier les princi-paux impacts de sa d�egradation par desphases culturales, l’origine de la mise enplace de cet �ecosyst�eme et des r�esultatsencourageants en mati�ere de restaura-tion. Outre de nombreuses �etudescompl�ementaires, notamment sur le roledes aspects paysagers dans la dyna-mique spontan�ee de la v�eg�etation desanciennes cultures et du mixage decertaines pratiques de restauration (semisdes esp�eces p�erennes dominantes puis�epandage du foin quelques ann�eesapr�es), la validation des r�esultats passeencore par le suivi �a long terme desprotocoles test�es et leur transfert lorsd’op�erations de r�ehabilitation ou derestauration sur de grandes surfaces avecdes moyens d’ing�enierie �ecologiqueadapt�es aux pays en d�eveloppement.C’est ce role qui devrait etre jou�e autravers de la mise en place d’un siteatelier dans la plaine de Crau, v�eritable« plate-forme exp�erimentale » pour desrecherches sur la r�ehabilitation et/ourestauration des espaces de parcourssteppique. &

Remerciements

Nous remercions particuli�erement leCEEP-Ecomus�ee de Crau et la R�eservenaturelle des Coussouls de la Craupour leur autorisation d’acc�es aux sitesd’�etudes ainsi que les bergers, �eleveurs etpropri�etaires priv�es. Nos remerciementsvont �egalement aux soci�et�es GRT/GAZ,SAGESS, Gagneraud Constructions etCDC-Biodiversit�e pour le financementd’une partie des exp�erimentations. Nostravaux ont �egalement pu etre r�ealis�esdans le cadre de diff�erents programmesdu minist�ere de l’�Ecologie, de l’�Energie,du D�eveloppement durable et de laMer, programme « Espaces prot�eg�es »(2001-2006) ainsi que de l’INstitutd’Ecologie et Environnement du CNRS(INEE), programmes « Ing�eco » (2007-2009) et Ing�ecotech (2010-2011).

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Friche témoin Pseudo-steppe Épandage de sol

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Figure 10. Richesse sp�ecifique moyenne une ann�ee apr�es l’�epandage de sol de pseudo-steppe sur la friche avec paturage.Des lettres diff�erentes indiquent une diff�erence significative au seuil p < 0,001 (n = 18).

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