Bases de la psychologie du développement et différentielle Raphaële MILJKOVITCH Françoise MORANGE-MAJOUX CHAPITRE A : HISTOIRE DE LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT Ce cours a pour objectif de fournir à l’étudiant les concepts de base de la psychologie du développement. Ainsi, seront successivement abordés l’histoire de la psychologie du développement (Chap. A), les principales théories et modèles proposés pour expliquer le développement (Chap. B), ainsi que les principales méthodes utilisées (Chap. C)
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Bases de la psychologie du développement et différentielle
Raphaële MILJKOVITCH
Françoise MORANGE-MAJOUX
CHAPITRE A : HISTOIRE DE LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT
Ce cours a pour objectif de fournir à l’étudiant les concepts de base de la psychologie du
développement. Ainsi, seront successivement abordés l’histoire de la psychologie du
développement (Chap. A), les principales théories et modèles proposés pour expliquer le
développement (Chap. B), ainsi que les principales méthodes utilisées (Chap. C)
TABLE DES MATIERES
CHAPITRE A- HISTOIRE DE LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT .................................................................. 3
A.1. L’ENFANT DANS LA SOCIETE AU COURS DE L’HISTOIRE ................................................................................ 3
A.1.1. L’ENFANT DANS L’ANTIQUITE GRECQUE ET ROMAINE ........................................................................ 4
A. 1.2. L’ENFANT DU MOYEN AGE AUX TEMPS MODERNES .......................................................................... 4
A. 1.3. L’ENFANT AU SIECLE DES LUMIERES (XVIIIE) ....................................................................................... 5
A.1. 4. L’ENFANT AU XIXE ET XXE SIECLE ........................................................................................................ 6
A.2. EMERGENCE DE LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT AU XIXEME SIECLE .............................................. 6
A.2.1. APPARITION DES THEORIES DE L’EVOLUTION DES ETRE VIVANTS (DARWIN 1809-1882) ................... 7
A.2.2. AVENEMENT DE LA PSYCHOLOGIE SCIENTIFIQUE ................................................................................ 8
A.3. CONCEPTS ET DEFINITIONS .......................................................................................................................... 9
A.4. LES PRINCIPALES ORIENTATIONS THEORIQUES ......................................................................................... 10
A.4.1. ORIENTATION PRE-FORMISTE OU MATURATIONNISTE : GESELL (1880-1961) .................................. 10
A.4.2. ORIENTATION INTERACTIONNISTE OU ASSOCIATIONNISTE ............................................................... 11
CHAPITRE A- HISTOIRE DE LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT
La psychologie du développement constitue un des champs majeur de la psychologie. Elle a
pour objet d’étude l’ontogenèse psychologique, c’est-à-dire l’évolution psychologique
individuelle tout au long de la vie « spanlife »). Son histoire est le fruit à la fois d’acquisitions
de connaissances et de techniques aux cours des siècles et également d’influences sociales
qui ont déterminé l’évolution des recherches en psychologie du développement et construit la
représentation que nous en avons aujourd’hui.
Nous allons, dans un premier temps, retracer les principales étapes qui ont abouti à ce champ
disciplinaire. Nous décrirons ensuite les principales théories qui constituent les fondements de
la psychologie du développement et qui alimentent les réflexions dans cette discipline. Enfin,
une discipline n’existant pas sans méthodes, nous verrons que la psychologie du
développement ne déroge pas à cette règle : l’apparition de nouvelles techniques est
intimement liée aux réflexions investies par la psychologie du développement.
A.1. L’ENFANT DANS LA SOCIETE AU COURS DE L’HISTOIRE
L’objectif de cette partie est de montrer comment les évènements sociaux et scientifiques
d’une époque ont construit la psychologie du développement1. L’objectif est aussi de montrer
1 On peut distinguer les différentes disciplines en fonction de leurs méthodes comme la psychologie expérimentale, développementale, la psychométrie, la psychopathologie, la psychologie cognitive… ou encore en fonction de leur terrain ou de leur contexte d’intervention : psychologue scolaire, du travail, du sport… ou en fonction de la finalité de leurs interventions : psychothérapie, éducationnelle…ou bien en fonction du positionnement théorique : psychanalyse.
comment d’un intérêt purement pratique (préoccupations éducatives), les recherches ont
évolué vers un intérêt plus théorique (préoccupation scientifique psychologique).
A.1.1. L’ENFANT DANS L’ANTIQUITE GRECQUE ET ROMAINE
Dans la Grèce antique, les enfants sont considérés comme des adultes en miniature. Ainsi
existe-t-il une sélection artificielle, les faibles et les mal formés étant
supprimés selon une éthique qui met en avant la force et
l’intégrité du corps au service de la gloire et de la défense de
la cité. Dans l’antiquité romaine, on retrouve la même
désinvolture à l’égard du nouveau-né, et le même souci
d’éducation civique : l’enfant est élevé dans le but de défendre sa
cité. Dans les deux sociétés antiques on retrouve le rôle prédominant du père, qui a droit de
vie ou de mort sur ses enfants. Ce droit qui existe jusqu’en 400 après JC, sera retiré par arrêté
légal, sous l’influence de la diffusion de l’Evangile. Pendant cette
époque prédominent donc les aspects éducatifs : l’essentiel étant de
former l’enfant aux valeurs et aspirations du groupe. Soulignons
toutefois que l’enfant suscite dans l’Antiquité un intérêt tout à fait
nouveau dans le domaine médical, avec le grand Hippocrate (450-
346 av. J.C.) et ses questions de pédiatrie.
A. 1.2. L’ENFANT DU MOYEN AGE AUX TEMPS MODERNES
Pendant la période moyenâgeuse, les enfants sont intégrés à la vie adulte dès le sevrage et il
n’y a pas de réelle distinction d’âges dans l’enfance, juste la dichotomie enfant/adulte. Cette
quasi-disparition de l’enfance (et donc de l’éducation) s’explique par les conditions d’existence
et par la brièveté de la vie. En effet, les enfants assurent précocement les charges et les
devoirs de l’adulte et il y a une grande mortalité infantile. Les enfants qui survivent sont intégrés
très tôt dans la société. L’enfance n’est donc pas étiquetée comme une période mais comme
la miniature de l’âge adulte.
Il faut attendre le XVIe et XVIIe siècle pour que l’enfant trouve enfin sa place en tant que telle
et que l’éducation revient au premier plan des représentations de
l’enfance sous l’influence des philosophes, avec le rétablissement
de la scolarité (les curés, mécènes et couvents contribuent
beaucoup à ces débuts de l’enseignement). Ainsi, l’humaniste
hollandais Erasme (1469-1536) par ses écrits, ses conseils
d’instruction, d’éducation civique et d’hygiène de vie a beaucoup
apporté à l’éducation des enfants. C’est à lui qu’on doit la célèbre
phrase « on ne naît pas homme, on le devient », qui
met l’accent sur le fait que le développement n’est pas le seul fruit de la
maturation physiologique et psychique mais est aussi et surtout le fruit de
la pédagogie. Un peu plus tard, Montaigne (1533-1592) axe son éducation
sur une pédagogie dite libérale qui refuse les châtiments corporels, et
donne toute son importance à l’affection et l’amour portés aux enfants.
http://www.polemia.com/pdf/Montaigne.pdf
Si la scolarité est essentielle, c’est aussi et surtout parce que l’enfance est vu comme le
symbole à la fois de la force du mal et du poids du péché originel (à cette époque la religion
est centrale et guide toutes décisions). Dans ce contexte l’enfance est comparée à un état
animal, et donc considérée comme un état inférieur. C’est l’éducation qui permettra à l’enfant
de dépasser cela et de devenir un homme (De Berulle et Bossuet).
A. 1.3. L’ENFANT AU SIECLE DES LUMIERES (XVIIIE)
Au XVIIIe siècle, un nouveau regard sur l’enfance est posé avec J.J. Rousseau (1712-1778)
et son Emile ou de l’éducation. Les préoccupations
éducatives reposent cette fois-ci sur le souci de
respecter les tendances naturelles de l’enfant
qui sont bonnes et de préserver l’enfant des
influences néfastes de la société adulte.
Ainsi, éduquer ce n’est pas socialiser mais
c’est laisser l’enfant s’exprimer selon sa nature
et dans la nature. « L’homme naît bon, c’est la
société qui le corrompt ».
Une émission passionnante sur l’éducation de Rousseau : http://www.franceinter.fr/emission-
facultés humaines (ontogenèse) est progressive, nécessite des adaptations et oriente in fine
la phylogenèse. Pour justifier sa conception, Darwin analyse lui-même le développement
humain en observant son fils Doddy de sa naissance jusqu’à l’âge de 3 ans (voir
http://www.darwinproject.ac.uk/observations-on-children ). Il porte une conception de
l’enfance dans laquelle l’analyse des processus d’adaptation fonctionnelle sera prédominante,
contrastant avec la vision purement descriptive du développement. Les observations de son
fils marquent le point de départ d’une étude de l’enfant en tant que spécificité du
développement.
Darwin s’oppose à l’hypothèse proposée par Lamarck sur l’hérédité des caractères acquis, qui
postule que l’environnement peut modifier durablement (c’est-à-dire sur plusieurs générations)
un comportement acquis2.
A.2.2. AVENEMENT DE LA PSYCHOLOGIE SCIENTIFIQUE
Jusqu’à la fin du 19ème siècle, la seule méthode utilisée pour étudier le
développement est l’introspection, hautement subjective. A la charnière
des XIXe et XXe siècle, la psychologie se dote de méthodes issues des
sciences exactes et se constitue discipline scientifique en se détachant de
la philosophie. Dans cette perspective, Wundt (1832-1920) fonde en
Allemagne en 1879, l’un des premiers laboratoires de psychologie. Stanley
Hall (USA, 1846-1924 ; 1er étudiant étranger stagiaire en Allemagne au labo
de Wundt) utilise pour la première fois une approche scientifique du développement de l’enfant
en choisissant la méthode du questionnaire pour l’exploration du contenu de l’esprit de l’enfant.
Hall, plus tard, dirigera la thèse de doctorat d’Arnold Gesell (1880-1961).
2 L’exemple du cou de la girafe est un bon exemple pour illustrer les deux théories : partant d’un fait avéré (les paléontologues ont montré que le cou de la girafe au cours des millénaires avait augmenté en taille), Lamarck postule que le cou de la girafe s’est « agrandi » sous l’impulsion de l’environnement : C’est parce que les arbres (acacias) de la savane étaient de plus en plus haut que la girafe a eu progressivement un cou de plus en plus long à force de tirer. Pour Darwin, les individus d'une espèce sont tous un peu différents. Les sujets ayant un cou plus long arriveront à manger les feuilles plus hautes et survivront. C’est le principe de la sélection naturelle qui sélectionne les individus les mieux adaptés. Pour Lamarck, il y a transmission de caractères acquis, pour Darwin, il y a transmission de caractères génétiques, sélectionnés naturellement. Si on a longtemps pensé que la proposition de Lamarck n’était pas la bonne, des données récentes relancent ce débat. A ce titre écoutez ces deux émissions de France inter passionnantes « sur les épaules de Darwin » : http://www.franceinter.fr/emission-sur-les-epaules-de-darwin-une-heredite-des-caracteres-acquis et http://www.franceinter.fr/emission-sur-les-epaules-de-darwin-une-heredite-des-caracteres-acquis-2