Chronicité de la consommation de médicaments psychotropes dans la main-d’œuvre canadienne: quelle est la contribution de la profession et des conditions de l’organisation du
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Article original
Chronicite de la consommation de medicaments psychotropes dans la
main-d’œuvre canadienne : quelle est la contribution de la profession
et des conditions de l’organisation du travail ?
Chronic psychotropic drugs use in the Canadian labor force: What are the contributions ofoccupation and work organization conditions?
A. Marchand a,*, M.-E. Blanc b
a Ecole de relations industrielles, universite de Montreal, C.P. 6128, succursale Centre-Ville, Montreal, Quebec, H3C 3J7 Canadab Groupe de recherche sur les aspects sociaux de la sante et de la prevention (GRASP), universite de Montreal,
Montreal, Quebec, H3C 3J7 Canada
Recu le 1 juin 2009 ; accepte le 19 octobre 2009
Abstract
Background. – This study aims to better understand the contributions of occupation and work organization conditions to the development of
chronic psychotropic drugs use among workers in Canada.
Methods. – The study is based on a secondary analysis of the longitudinal data of the National Population Health Survey (NPHS) of Statistics
Canada which includes five cycles from 1994–1995 to 2002–2003. A panel of 6585 people from 15 to 55 years old and employed at cycle 1 and
nested in 1413 neighbourhoods was selected. Multilevel models of regression were estimated on three levels: repeated measures (level
1 = 24,785 observations) were nested in the individuals (level 2 = 6585 individuals) and the individuals nested in the local communities (level
3 = 1413 neighborhoods).
Results. – The prevalence of multiple episodes (two episodes and more between cycle 1 and cycle 5) of psychotropic drugs use was 6.7%
(95%CI=6.0–7.4%). Only occupation and the number of working hours showed a significant contribution. Family and individual variables like
marital status and personality traits (locus of control and sense of coherence) had a significant contribution, in addition to time, gender, age,
physical health, number of cigarettes and stressful childhood events.
Conclusion. – Work contributes weakly to the risk of chronic psychotropic drugs use, whereas individual characteristics make a much more
important contribution to the phenomenon.
# 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Psychotropic drugs; Demographic factors; Longitudinal studies; Multilevel analysis; Chronic illness; Mental health; Occupational health
Resume
Position du probleme. – Cette etude a pour objectif de mieux comprendre le role specifique de la profession et des conditions de l’organisation
du travail sur la chronicite de la consommation de medicaments psychotropes chez les travailleurs et travailleuses du Canada.
Methodes. – L’etude s’appuie sur une analyse secondaire des donnees longitudinales de l’Enquete nationale sur la sante de la population
(ENSP) de Statistique Canada qui comprend cinq cycles s’etalant sur une periode comprise entre 1994–1995 et 2002–2003. Un panel de
6585 personnes de 15 a 55 ans en emploi au cycle 1 a ete selectionne. Des modeles multiniveaux de regression ont ete estimes sur trois niveaux : les
mesures repetees (niveau 1 = 24785 observations) sont nichees dans les individus (niveau 2 = 6585 individus) et les individus niches dans les
communautes locales (niveau 3 = 1413 communautes).
Resultats. – La prevalence des episodes multiples (deux episodes et plus entre le cycle 1 et le cycle 5) de la consommation de medicaments
psychotropes s’etablit a 6,7 % (95 %IC=6,0–7,4 %). Seules la profession et les heures travaillees montrent une contribution significative.
Les variables familiales et individuelles comme le statut marital et les traits de personnalite (centre de controle et sentiment de cohesion)
Revue d’Epidemiologie et de Sante Publique xxx (2010) xxx–xxx
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : alain.marchand@umontreal.ca (A. Marchand).
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la consommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions de l’organisation du travail ? Rev Epidemiol Sante Publique (2010),
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
0398-7620/$ – see front matter # 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
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ont une contribution significative, ainsi le temps, le genre, l’age, la sante physique, le nombre de cigarettes et les evenements stressants
dans l’enfance.
Conclusion. – Le travail a une contribution faible au risque chronique de consommation des medicaments psychotropes, alors que les
caracteristiques personnelles ont une contribution beaucoup plus importante sur le phenomene.
# 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.
Mots cles : Medicaments psychotropes ; Facteurs demographiques ; Etudes longitudinales ; Analyse multiniveaux ; Maladie chronique ; Sante mentale ; Sante
professionnelle
A. Marchand, M.-E. Blanc / Revue d’Epidemiologie et de Sante Publique xxx (2010) xxx–xxx2
1. Introduction
Depuis ces 20 dernieres annees, la consommation de
medicaments psychotropes dans la population canadienne a
pris une ampleur des plus preoccupantes et a entraıne des couts
sociaux et economiques substantiels. Le nombre total de
prescriptions pour des antidepresseurs a augmente de 353 %
entre 1980 et 2000 [1], et 1,1 milliard de dollars ont ete
depenses pour ces medicaments en 1998 [2]. Le cout du
traitement de la depression par les seuls antidepresseurs etait
estime a un total de 534,4 millions de dollars en 2000 [1]. Cette
tendance s’est maintenue jusqu’en 2004, ou on observa un pic
des recommandations de traitements avec des medicaments
antidepresseurs suivi par une stabilisation du niveau atteint [3].
La main-d’œuvre est a ce titre particulierement touchee par
ce probleme, puisque 8 % des personnes en emploi en 1994–
1995 au Canada rapportaient avoir utilise au cours du dernier
mois au moins un medicament de type tranquillisants,
antidepresseurs, codeine, Demerol1 (pethidine), morphine
ou pilules pour dormir [4] et 11 % auraient consomme au moins
un medicament psychotrope entre 1994–1995 et 1998–
1999 avec une tendance montrant un accroissement de la
consommation dans le temps [5].
Cependant, les connaissances sont limitees en ce qui a trait a
l’usage repete ou prolonge de ces medicaments, ainsi que sur le
role specifique de la profession et des conditions de
l’organisation du travail dans la production de cette consom-
mation. Cet article presente les resultats d’une recherche menee
sur un large echantillon de la main-d’œuvre canadienne visant a
identifier le role du travail sur la chronicite de la consommation
de medicaments pendant une periode de huit ans.
1.1. Contexte et modele d’analyse
L’usage a long terme de medicaments psychotropes vient a
la fois du fait que les problemes de sante mentale sont souvent
chroniques ou parce que la prise en charge therapeutique se fait
plus souvent selon le modele de soins de longue duree. Depuis
le debut des annees 2000, la depression est prise en charge
comme si elle etait une maladie chronique, car les medecins
constatent qu’ils enrayent plus facilement l’apparition de
nouveaux episodes depressifs et freinent par cette approche
therapeutique la recurrence de la depression [6–9]. Mais la
chronicite de la consommation de medicaments psychotropes
peut aussi venir des traitements prescrits. Par exemple, la
consommation de benzodiazepines engendre une accoutu-
mance et/ou une dependance, et necessite une periode plus ou
moins longue de sevrage avant d’etre completement inter-
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
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rompue [10,11]. Egalement, la definition d’une consommation
a long terme (chronicite de l’usage) ne fait pas consensus, car
celle-ci varie d’une duree depassant les 30 jours a une duree
depassant une annee chez les personnes agees [12,13] ou chez
les travailleurs, selon la recurrence d’un episode de consom-
mation d’une duree d’un mois sur une periode d’un an [14].
Selon cette derniere recherche, 4 % des travailleurs etaient
classifies comme usagers chroniques. Enfin, une etude
finlandaise montre que les raisons donnees par les hommes
et les femmes a l’usage prolonge et a la dependance aux
psychotropes ne seraient pas les memes. Les hommes
expliqueraient l’usage prolonge par rapport a un besoin
medical et pour contrer le stress au travail, alors que les
femmes le feraient seulement par rapport a leur besoin de
dormir [13].
En ce qui concerne le role specifique du travail sur la
consommation de medicaments, une recension des recherches
publiees au cours des dix dernieres annees permet d’identifier
31 etudes dont seulement neuf avaient un devis longitudinal,
cinq etudes utilisaient des echantillons representatifs de la
main-d’œuvre (quatre en devis transversal et une en devis
longitudinal), et seulement deux etudes portaient sur la
chronicite de l’usage de medicaments psychotropes et/ou sur
la dependance a ces medicaments [14,15]. En matiere de
chronicite, il en ressort que les cols bleus montraient des risques
plus eleves de chronicite[14], alors qu’un faible niveau
d’utilisation des competences, d’autorite decisionnelle et de
soutien social au travail, ainsi qu’un niveau eleve de demandes
psychologiques s’associaient a une plus forte chronicite [16].
De plus, l’usage chronique et la dependance apres un an etaient
fortement associes au desir d’augmenter la performance au
travail a l’aide des medicaments [14].
Les etudes portant sur la consommation de medicaments
psychotropes sans egard a la chronicite rapportent que les
professions les plus a risque de consommation de medicaments
psychotropes seraient les professions intellectuelles [17,18] et
de soutien administratif [15,19] ainsi que les travailleurs non
qualifies, dont ceux exposes a des dangers [20,21]. Les
agriculteurs representeraient quant a eux le groupe profession-
nel le moins a risque [17,22]. Cependant, d’autres etudes ont
aussi montre qu’il y a peu de variation entre les professions ou
que cette variation est non significative [23–26].
Sur le plan des conditions de travail, une demande
psychologique elevee [15,16,23], une tension elevee au travail
[4,15,27,28], et un stress percu eleve [29] augmenteraient le
risque de consommation de medicaments psychotropes chez les
travailleurs. De meme, un capital social faible [30] ou un
soutien social faible au travail [4,16,23,28,31] et l’insecurite
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
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d’emploi [4,23,29,32] augmenteraient ce risque. Egalement,
une faible satisfaction du travail [29,33], un desequilibre
efforts-recompenses chez les hommes [34] et des heures
travaillees elevees[23] s’associeraient a un risque de consom-
mation de medicaments psychotropes plus eleve chez les
travailleurs. Egalement, on note parmi d’autres etudes que la
violence ou l’intimidation au travail auraient aussi un effet sur
cette consommation [18,33].
Au-dela du travail, certaines etudes mettent en lumiere le
role des conditions hors travail et individuelles. Il semble
qu’une faible satisfaction hors travail et des problemes extra-
professionnels augmentent la consommation de medicaments
psychotropes chez les travailleurs [14,26,29,35]. Par ailleurs,
l’interference des demandes de la famille par rapport aux
demandes du travail augmenterait la consommation de
psychotropes chez les femmes travaillant a temps partiel
[36]. Un historique familial de depression serait aussi associe a
une plus grande consommation de psychotropes [21]. De
meme, le fait de vivre seul ou divorce augmenterait le risque de
consommer des medicaments [4,15,16,20,25,37]. Egalement,
un faible revenu du menage [20] et un faible soutien social hors
travail [23] auraient le meme impact.
Sur le plan des caracteristiques individuelles, le genre est la
plupart du temps controle, mais pas toujours teste. Cependant,
quelques etudes ont montre que les femmes avaient une plus
grande consommation que les hommes [4,14,20,23,26,29,35,
38], en particulier pour la categorie des antidepresseurs [19].
L’age serait aussi associe positivement a l’usage de medicaments
psychotropes chez les travailleurs [14–16,21,23,25,26,28].
Quant aux traits de personnalite, ils sont rarement testes, seul
le centre du controle serait associe negativement a la
consommation de psychotropes [4]. Egalement, des evenements
stressants dans les 12 derniers mois seraient un facteur aggravant
de la consommation de medicaments psychotropes [28]. Le fait
d’etre fumeur [14,18,20,21,29] ou de consommer de l’alcool
[18,21] serait associe a une plus forte consommation de
medicaments. De plus, un style de vie sedentaire est egalement
associe a une plus forte consommation de psychotropes chez les
travailleurs [28], mais aussi le manque de sommeil [37].
Globalement, la revue de la litterature fait ressortir
l’influence possible de la profession et des conditions de
l’organisation du travail sur la consommation de psychotropes,
mais la chronicite de la consommation a ete jusqu’a maintenant
tres peu etudiee. Par ailleurs, les limites des etudes relatives aux
echantillons et au devis des enquetes justifient des efforts
supplementaires de recherche pour bien saisir les articulations
complexes entre le travail, la famille, le reseau social, la
communaute locale et les caracteristiques personnelles qui
favorisent la chronicite de la consommation de medicaments
psychotropes chez les personnes en emploi.
Dans la presente etude qui utilise un devis longitudinal, nous
evaluons la contribution specifique de la profession et des
conditions de l’organisation du travail sur la consommation
chronique de psychotropes. La definition d’un usage chronique
de medicaments psychotropes ne faisant pas consensus dans la
litterature, notre recherche se fondera sur l’etude de la
recurrence et de la permanence d’episodes de consommation
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
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de ce type de medicament dans le temps. Nous examinerons
comment des travailleurs mesures tous les deux ans entre 1994–
1995 et 2002–2003 rapportent, selon la definition et la mesure
de Statistique Canada [39], des episodes de consommation dans
le mois precedant l’enquete. Cette definition a ete utilisee dans
une recherche anterieure [5] qui peut etre comparee a une etude
en milieu de travail qui definissait la chronicite comme etant la
recurrence de la consommation de medicaments psychotropes
d’une duree d’un mois sur une periode d’un an [14]. Puisque
nous etudions la consommation sur une periode de huit ans,
nous sommes en mesure de mieux saisir la prise repetee de
medicaments psychotropes sur une plus longue periode de
temps.
Le modele d’analyse s’appuie sur un modele theorique
valide multiniveaux des determinants de la sante mentale
[40–42]. Ce modele postule que les contraintes et les ressources
engagees simultanement par la personnalite des agents,
les structures du quotidien et les structures macrosociales
generent un stress pouvant provoquer des reactions non
desirees, d’ou un usage chronique de medicaments psycho-
tropes. Le modele propose une approche sociologique de
l’action sociale qui tient compte de la diversite des
environnements de vie de l’individu, comme le milieu de
travail, la famille, le reseau social et la communaute locale
(quartier ou municipalite), ainsi que des caracteristiques
personnelles, comme l’age, le genre, l’etat de sante physique,
les traits de la personnalite, les habitudes de vie et les
evenements stressants dans l’enfance. Pour bien comprendre le
role particulier de la profession et des conditions de
l’organisation du travail, il faut ainsi placer l’analyse dans
un contexte qui tient compte des relations multiples que la
personne entretient avec les dimensions de l’environnement
social qui peuvent etre sources de stress. Dans cette perspective,
le travail n’est qu’un des mecanismes sociaux parmi d’autres
pouvant expliquer la presence ou le developpement de la
consommation chronique de medicaments psychotropes.
2. Materiel et methodes
2.1. Donnees
Nous avons utilise les donnees des cinq premiers cycles de
l’Enquete nationale sur la sante de la population (ENSP) de
Statistique Canada (cycle 1 : 1994–1995, cycle 5 : 2002–2003)
qui fournit des donnees longitudinales sur un large pan de la
population canadienne suivie tous les deux ans depuis 1994–
1995. L’ENSP comporte 17 276 individus et les taux de reponse
varient selon les cycles (80,6 a 93,6 %). Nous avons selectionne
tous les repondants ages de 15 a 55 ans et en emploi au cycle 1,
soit 7338 individus. Apres suppression des valeurs manquantes,
l’ENSP permet de suivre une cohorte de 6585 personnes
nichees dans 1413 communautes locales.
2.1.1. Les communautes locales
Les communautes locales etaient constituees par le secteur
de recensement (SR) en zones urbaines et par la subdivision de
recensement (SDR) en zones rurales. Les SR sont de petites
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
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unites geographiques stables (de 2500 a 8000 habitants), dont
les caracteristiques socioeconomiques sont homogenes. Ils sont
crees au sein de regions metropolitaines de recensement et
d’agglomerations de recensement (RMR et AR) dont le noyau
urbain compte 50 000 habitants ou plus d’apres le recensement
precedent. Un comite de specialistes locaux (par exemple, des
planificateurs, des travailleurs sociaux, des travailleurs du
secteur de la sante et des educateurs) delimite initialement les
secteurs de recensement de concert avec Statistique Canada.
Quant aux SDR, ils correspondent aux petites villes et
municipalites et possedent, par consequent, une identite et
un sens sociologique propres. Nous avons utilise le logiciel de
codage geographique FCCP + (version 4H) de Statistique
Canada pour la conversion des codes postaux presents dans
la base de donnees de l’ENSP pour pallier l’absence des
categories geographiques dont nous avions besoin [43].
2.2. Mesures
2.2.1. La consommation de medicaments psychotropes
La consommation de medicaments psychotropes etait
mesuree en fonction de la consommation au cours des deux
derniers jours ou au cours du dernier mois[5]. Pour la
consommation de psychotropes au cours des deux derniers
jours, la classification anatomique, therapeutique et chimique
(ATC) de l’Organisation mondiale de la sante (OMS) [44] a ete
utilisee : anxiolytiques, hypnotiques et sedatifs, antidepres-
seurs, psychostimulants, psycholeptiques, psychoanalepti-
ques. Pour le dernier mois, l’ENSP documente la
consommation de tranquillisants, d’antidepresseurs et/ou de
somniferes. La consommation de medicaments psychotropes
est codee 1 pour les repondants ayant consomme, ou au cours
des deux derniers jours, ou au cours du dernier mois, et codee
0 pour les personnes n’ayant pas consomme. Cette mesure est
repetee a chaque cycle de l’enquete, ce qui permet de suivre
plus precisement la presence, la recurrence et la permanence de
la consommation des individus dans le temps et de saisir ainsi
le developpement d’un usage chronique sur une periode de
huit ans.
2.2.2. Les variables du travail : la profession
Pour les variables du travail, la profession etait decrite a
partir de la classification type des professions a quatre codes
(CTP-91) [45]. Les professions ont ete par la suite regroupees
en six categories : cadres superieurs, directeurs, superviseurs
professionnels, cols blancs, cols bleus. Les conditions de
l’organisation du travail etaient mesurees au moyen de
questions adaptees du Job Content Questionnaire (JCQ) [46],
incluant l’utilisation des competences (trois items, a = 0,53),
l’autorite decisionnelle (deux items, a = 0,65), les demandes
psychologiques (deux items, a = 0,35), les demandes physi-
ques (un item), le soutien social au travail (trois items, a = 0,42)
et l’insecurite au travail (un item). La fiabilite de ces echelles
calculees sur des mesures repetees variait entre 0,68 et 0,86, une
indication de la stabilite des concepts dans le temps [47]. Parmi
les variables du travail, etaient aussi mesure le nombre total
d’heures travaillees dans l’emploi principal et dans les autres
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
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emplois, ainsi que l’horaire de travail irregulier (0 = horaire
normal, 1 = horaire irregulier).
2.2.3. Les variables de la famille et du reseau social
Les variables de la famille et du reseau social incluaient le
statut marital (1 = couple, 0 = autres), le statut parental selon
les groupes d’age des enfants (zero a cinq ans, six a 11 ans, 12–
24 ans), le revenu du menage classe en cinq rangs de suffisance
economique, les tensions avec le conjoint (trois items) et les
tensions avec les enfants (deux items) [48]. Le « reseau social »
etait mesure a l’aide d’une echelle du soutien social en quatre
items ensuite dichotomisee (0 = faible, 1 = eleve). Les « carac-
teristiques individuelles » formant la personnalite de l’agent
etaient mesurees par le genre (0 = homme, 1 = femme), l’age
(en annees, mesure au cycle 1), l’etat de sante physique mesure
par le nombre de problemes de sante physique, l’estime de soi
en six items [49], le centre du controle en sept items [50], le
sentiment de cohesion en 13 items [51], l’usage du tabac
(nombre de cigarettes fumees par semaine), l’activite physique
(nombre de sequence superieur ou egal a 15 minutes par mois)
et les evenements stressants dans l’enfance en sept items [48].
Le Tableau 1 presente les statistiques descriptives de
l’echantillon selectionne au cycle 1 et suivi sur les cinq cycles.
2.3. Analyses
Les donnees ont une structure hierarchique dans laquelle les
mesures repetees (niveau 1 = 24 785) sont nichees dans les
travailleurs (niveau 2 = 6585), qui sont eux-memes niches dans
leurs communautes locales respectives (niveau 3 = 1413). Etant
donne que la variable dependante est dichotomique, des modeles
de regression logistique multiniveaux [52–54] ont ete utilises
pour analyser la probabilite (le risque) de voir se developper des
episodes repetes (multiples) de consommation de medicaments
psychotropes sur une periode de huit ans. Les modeles ont ete
estimes avec le logiciel MlwiN, version 2.02 [55]. Cela nous a
permis d’evaluer le pourcentage de la variation entre les
individus et la variation entre les communautes, mais aussi de
mesurer les contributions des conditions de travail, de la situation
familiale, du reseau social hors travail et des caracteristiques
individuelles pour la personnalite de l’agent. Dans les analyses,
toutes les variables independantes ont ete centrees a la moyenne
pour la periode a l’exception des variables dichotomiques. Les
conditions de travail et les professions ont ete analysees
separement et avec les trois autres blocs de variables (famille,
reseau social, individu) pour evaluer leurs effets directs et aussi
les effets indirects eventuels (effets de mediations et de
suppressions) [56,57]. Finalement, nous avons teste separement
les interactions du genre avec les conditions de travail et les
professions pour evaluer la presence d’effets moderateurs du
genre sur les relations des variables du travail avec la
consommation chronique de psychotropes.
3. Resultats
Pendant la periode etudiee, 16,8 % de travailleurs ont connu
au moins un episode de consommation de medicaments
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
de l’organisation du travail ? Rev Epidemiol Sante Publique (2010),
Tableau 1
Statistiques descriptives du panel etudie (episodes multiples), ENSP, du cycle 1 (1994–1995) au cycle 5 (2002–2003).
Cycle 1 Cycle 2 Cycle 3 Cycle 4 Cycle 5
Moyenne/
proportion
Ecart-
type
Moyenne/
proportion
Ecart-
type
Moyenne/
proportion
Ecart-
type
Moyenne/
proportion
Ecart-
type
Moyenne/
proportion
Ecart-
type
Sante mentale
Consommation de medicaments
psychotropes
0,04 – 0,05 – 0,07 – 0,09 – 0,11 –
Professions
Cadres superieurs (ref) 0,01 – 0,00 – 0,00 – 0,01 – 0,01 –
Directeurs 0,07 – 0,07 – 0,08 – 0,09 – 0,10 –
Superviseurs 0,04 – 0,05 – 0,05 – 0,06 – 0,06 –
Professionnels 0,16 – 0,17 – 0,17 – 0,20 – 0,22 –
Cols blancs 0,49 – 0,47 – 0,46 – 0,41 – 0,40 –
Cols bleus 0,24 – 0,24 – 0,24 – 0,23 – 0,21 –
Travail
Utilisation des competences 7,09 2,27 7,09 2,27 7,09 2,27 7,18 1,99 7,16 1,95
Autorite decisionnelle 5,38 1,81 5,38 1,81 5,38 1,81 5,42 1,47 5,45 1,45
Demandes psychologiques 4,53 1,77 4,53 1,77 4,53 1,77 4,25 1,57 4,18 1,57
Demandes physiques 2,07 1,28 2,07 1,28 2,07 1,28 1,86 1,12 1,81 1,12
Soutien social 7,98 1,98 7,98 1,98 7,98 1,98 7,93 1,61 7,91 1,63
Insecurite du travail 1,55 1,18 1,55 1,18 1,55 1,18 1,62 1,08 1,75 1,10
Heures travaillees (total) 43,35 20,73 44,22 19,57 45,12 18,21 42,48 14,04 42,29 14,21
Horaire de travail (irregulier) 0,23 – 0,21 – 0,21 – 0,19 – 0,20 –
Famille
Statut marital (couple) 0,67 – 0,67 – 0,69 – 0,71 – 0,73 –
Enfant de 0 a 5 ans 0,22 – 0,21 – 0,19 – 0,17 – 0,15 –
Enfant de 6 a 11 ans 0,23 – 0,23 – 0,22 – 0,22 – 0,21 –
Enfant de 12 a 24 ans 0,32 – 0,30 – 0,30 – 0,28 – 0,27 –
Revenu du menage 3,73 0,97 3,77 0,91 3,98 0,92 4,12 0,90 4,22 0,85
Tensions avec le conjoint 0,37 0,73 0,37 0,73 0,37 0,73 0,34 0,72 0,17 0,55
Tensions avec les enfants 0,25 0,55 0,25 0,55 0,25 0,55 0,27 0,56 0,27 0,56
Reseau social
Soutien social hors travail (eleve) 0,86 – 0,89 – 0,92 – 0,93 – 0,93 –
Individu
Genre (femme) 0,45 – 0,45 – 0,45 – 0,45 – 0,45 –
Age 35,56 10,29 37,58 10,26 39,54 10,24 41,79 10,24 43,82 10,16
Etat de sante physique 0,78 1,08 0,96 1,20 1,02 1,28 1,09 1,31 1,31 1,41
Estime de soi 20,41 2,89 20,41 2,89 20,41 2,89 19,79 2,69 19,79 2,69
Centre du controle 20,19 4,06 20,19 4,06 20,19 4,06 20,26 3,72 19,83 3,92
Sentiment de cohesion 58,75 11,43 58,75 11,43 62,09 10,66 62,09 10,66 62,09 10,66
Cigarettes 5,10 9,65 4,94 9,28 4,52 8,78 3,99 8,26 3,12 7,32
Activite physique 19,71 21,17 21,14 21,78 22,76 21,38 20,20 18,86 24,30 21,10
Evenements stressants dans l’enfance 0,87 1,16 0,87 1,16 0,87 1,16 0,87 1,16 0,87 1,16
A. Marchand, M.-E. Blanc / Revue d’Epidemiologie et de Sante Publique xxx (2010) xxx–xxx 5
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psychotropes, 6,7 % en ont connu plus d’un episode et 3,6 %,
trois episodes et plus. Plus precisement, 10,1 % ont eu un seul
episode, 2,9 % deux episodes, 2,0 % trois episodes, 1,3 %
quatre episodes et 0,6 % cinq episodes.
Le Tableau 2 presente les resultats des analyses de
regression logistique multiniveaux.
Le modele 1 montre que le logit des episodes multiples de
consommation de medicaments psychotropes varie significa-
tivement entre les communautes locales et entre les travailleurs.
Les correlations intraclasses ont ete estimees a respectivement
0116 et 0,529. Cela signifie que 11,6 % de la variation
des episodes multiples de consommation de medicaments
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
psychotropes se trouvent entre les communautes locales et
52,9 % entre les individus. Le modele 2 montre que le risque de
consommer des medicaments psychotropes chez les travailleurs
augmente avec le temps.
Le modele 3 estime les effets de la profession et des
caracteristiques du travail et montre que la profession, l’autorite
decisionnelle, les demandes psychologiques, le soutien social
au travail, l’insecurite au travail et les heures travaillees sont
significatifs. Les modeles 4 et 5 controlent pour la famille et le
reseau social, et, seule l’autorite decisionnelle n’est plus
significative lorsqu’on ajoute ces variables. Le modele
6 controle pour les caracteristiques de l’individu et fait
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
de l’organisation du travail ? Rev Epidemiol Sante Publique (2010),
Tableau 2
Modeles de regression pour la consommation de medicaments psychotropes (episodes multiples).
Modele 1 Modele 2 Modele 3 Modele 4 Modele 5 Modele 6 Modele 7
Constante �2,600** �3,019** �1,599** �1,349** �1,399** �1,365* �1,456*
Temps
Cycle 2 0,208* 0,233* 0,221* 0,241** 0,136 0,127
Cycle 3 0,392** 0,413** 0,399** 0,428** 0,355** 0,333**
Cycle 4 0,670** 0,711** 0,689** 0,726** 0,600** 0,574**
Cycle 5 0,921** 0,947** 0,913** 0,965** 0,739** 0,706**
Professions
Cadres superieurs (ref.)
Directeurs �0,640* �0,709* �0,638* �0,616* �0,626*
Superviseurs �1,181** �1,231** �1,176** �1,189** �1,201**
Professionnels �0,625* �0,673* �0,603* �0,668* �0,694*
Cols blancs �0,640* �0,723* �0,627* �0,759* �0,775**
Cols bleus �1,224** �1,285** �1,220** �1,162** �1,166**
Travail
Utilisation des competences 0,010 0,016 0,010 0,036 0,035
Autorite decisionnelle �0,040* �0,036 �0,037 �0,013 �0,013
Demandes psychologiques 0,062** 0,058** 0,062** 0,035 0,034
Demandes physiques 0,011 0,003 0,008 0,003 0,006
Soutien social �0,069** �0,064** �0,066** �0,029 �0,029
Insecurite du travail 0,090** 0,078* 0,087** 0,033 0,033
Heures travaillees (total) �0,011** �0,012** �0,011** �0,007** �0,008**
Horaire de travail (irregulier) �0,103 �0,108 �0,102 �0,091 �0,092
Famille
Statut marital (couple) �0,227* �0,204*
Enfant de 0 a 5 ans �0,403** �0,150
Enfant de 6 a 11 ans �0,036 0,135
Enfant de 12 a 24 ans �0,103 �0,036
Revenu du menage �0,020 0,040
Tensions avec le conjoint 0,219** 0,100
Tensions avec les enfants 0,239** 0,015
Reseau social
Soutien social hors travail (eleve) �0,291** 0,035
Individu
Genre (femme) 0,466** 0,453**
Age 0,033** 0,033**
Etat de sante physique 0,233** 0,233**
Estime de soi �0,021 �0,022
Centre du controle �0,047** �0,045**
Sentiment de cohesion �0,026** �0,025**
Cigarettes 0,021** 0,020**
Activite physique 0,002 0,001
Evenements stressants dans l’enfance 0,152** 0,150**
Partie aleatoire du modele
s2 Communaute 0,430** 0,459** 0,419** 0,427** 0,430** 0,461** 0,459**
s2 Individu 3,694** 3,647** 3,468** 3,333** 3,454** 2,763** 2,804**
Ajustement
x2 83,30** 147,30** 329,17** 394,91** 322,27** 905,14** 958,79**
(dl) (2) (4) (17) (24) (18) (26) (34)
Notes : *p < 0,05 ;**p < 0,01.
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disparaıtre les effets des variables du travail excepte ceux des
heures travaillees et les professions restent toutes significatives.
Le modele 7 tient compte de l’ensemble des variables et
montre que seules les heures travaillees et les professions sont
encore significatives. Egalement, il ne reste plus qu’un seul
effet des variables hors travail (famille et reseau social), celui
du statut marital, puisque la presence d’un enfant de moins de
six ans, les tensions avec le conjoint, les tensions avec les
enfants et le soutien social hors travail ne sont plus significatifs
en comparaison avec les modeles 4 et 5. Cependant, toutes les
variables de l’individu liees au genre, a l’age, a l’etat de sante
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
physique, au centre du controle, au sentiment de cohesion, au
fait de fumer et aux evenements stressants dans l’enfance
maintiennent leur contribution au modele final comme au
modele 6. La chronicite de la consommation de medicaments
psychotropes continue de varier entre les communautes locales
et les individus, pour 12,2 et 46,0 % respectivement.
Le Tableau 3 resume les resultats du modele 7 en exprimant
les coefficients de regression sous la forme de rapport de cotes.
En derniere analyse, les interactions entre la profession et le
genre, ainsi qu’entre les conditions de l’organisation du travail
et le genre ont ete evaluees. L’interaction genre et conditions de
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
de l’organisation du travail ? Rev Epidemiol Sante Publique (2010),
Tableau 3
Rapports de cotes et intervalles de confiance du modele 7 du Tableau 2.
OR 95 %CI
Cycle 2 1,14 0,94–1,37
Cycle 3 1,40** 1,17–1,66
Cycle 4 1,78** 1,45–2,17
Cycle 5 2,03** 1,63–2,52
Cadres superieurs (ref)
Directeurs 0,53* 0,30–0,94
Superviseurs 0,30** 0,16–0,55
Professionnels 0,50* 0,28–0,88
Cols blancs 0,46** 0,27–0,79
Cols bleus 0,31** 0,17–0,56
Utilisation des competences 1,04 1,00–1,08
Autorite decisionnelle 0,99 0,95–1,03
Demandes psychologiques 1,03 0,99–1,08
Demandes physiques 1,01 0,95–1,07
Soutien social 0,97 0,94–1,10
Insecurite du travail 1,03 0,97–1,10
Heures travaillees (total) 0,99** 0,99–1,00
Horaire de travail (irregulier) 0,91 0,77–1,08
Statut marital (couple) 0,82* 0,67–0,99
Enfant de 0 a 5 ans 0,86 0,69–1,07
Enfant de 6 a 11 ans 1,14 0,94–1,39
Enfant de 12 a 24 ans 0,96 0,80–1,16
Revenu du menage 1,04 0,96–1,13
Tensions avec le conjoint 1,11 0,98–1,24
Tensions avec les enfants 1,02 0,92–1,12
Soutien social hors travail (eleve) 1,04 0,85–1,27
Genre (feminin) 1,57** 1,28–1,93
Age 1,03** 1,02–1,04
Etat de sante physique 1,26** 1,20–1,33
Estime de soi 0,98 0,95–1,01
Centre du controle 0,96** 0,94–0,97
Sentiment de cohesion 0,98** 0,97–0,98
Cigarettes 1,02** 1,01–1,03
Activites physiques 1,00 0,99–1,01
Evenements stressants dans l’enfance 1,16** 1,09–1,24
Note : *p < 0,05 ;**p < 0,01.
Fig. 1. Risque d’un usage chronique de medicaments psychotropes selon la
profession et le genre. Note : Rapport de cotes. Categorie reference cadres
superieurs masculins.
A. Marchand, M.-E. Blanc / Revue d’Epidemiologie et de Sante Publique xxx (2010) xxx–xxx 7
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RESPE-313; No. of Pages 11
l’organisation du travail reste non significative
(x2 = 12,65 dl = 8 p = 0,13), alors que l’interaction genre et
profession est significative (x2 = 11,78 dl = 5 p = 0,04). La Fig. 1
presente les differences hommes–femmes selon la profession.
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
Les femmes dans les positions de directeurs ( p < 0,05),
superviseurs ( p < 0,05) et cols bleus ( p < 0,05) ont des risques
significativement plus eleves que les hommes.
4. Discussion
L’objectif de cette etude etait d’evaluer la contribution
specifique de la profession et des conditions de l’organisation
du travail sur l’usage chronique de medicaments psychotropes
dans la main-d’œuvre canadienne pendant une periode de huit
ans. Les resultats obtenus suggerent un role limite du travail sur
la chronicite de la consommation de ce type de medicaments,
alors que les facteurs hors travail et individuels montrent une
contribution plus importante. Les resultats soutiennent egale-
ment l’approche theorique et analytique qui tient compte de la
diversite des environnements de vie de l’individu pour
expliquer comment le travail en vient a favoriser la chronicite
de l’usage de medicaments psychotropes.
Pres de 7 % des travailleurs ont fait un usage repete de
medicaments psychotropes entre 1994–1995 et 2002–2003 et le
risque de consommer ces medicaments augmentait avec le
temps pour pratiquement doubler a la fin de la periode
d’observation. Ces resultats s’approchent des prevalences
obtenues par d’autres etudes, tout en soutenant celle rapportant
que la chronicite s’accroıt avec l’age [14,16]. La prevalence de
consommation repetee de medicaments psychotropes est
superieure de 2,5 % a celle obtenue par une etude longitudinale
qui mesurait la recurrence apres un an [14]. La consommation
de medicaments psychotropes risque davantage d’etre rappor-
tee par les individus, plus on allonge la periode d’observation.
Cependant, environ 17 % des travailleurs ont fait usage de ce
type de medicaments a un moment quelconque, ce qui suggere
que le recours aux medicaments psychotropes pourrait etre une
strategie deployee pour calmer ponctuellement la douleur
psychique, mais qui n’entraıne pas necessairement l’etablisse-
ment d’une dependance a la medication. La consommation fait
d’ailleurs preuve d’une grande variabilite individuelle puisque
46 % de la variation se retrouve entre les travailleurs. Il faudra
neanmoins etre vigilant dans un contexte de vieillissement de la
main-d’œuvre qui pourrait voir s’installer une plus grande
chronicite de cette consommation.
La profession a montre une contribution significative. Les
cadres superieurs se demarquent des autres groupes pro-
fessionnels par un risque plus eleve d’usage chronique de
medicaments psychotropes. Ce resultat ne corrobore pas une
etude francaise portant sur la chronicite de la consommation
[14], mais il soutient d’autres recherches qui ont trouve que les
cadres et les professions intellectuelles avaient une consomma-
tion de substances psychoactives superieure aux autres
categories professionnelles et se distinguaient aussi par leur
propension plus elevee a experimenter d’autres drogues illicites
comme le cannabis et autres amphetamines [17]. On peut faire
l’hypothese que cette pratique se fonde sur un besoin de
performance inherent a cette categorie professionnelle, ayant
plus de responsabilites au travail, se trouvant a gerer du
personnel et a faire de nombreuses heures de travail. Il serait
interessant de se pencher ulterieurement sur les cultures de
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
de l’organisation du travail ? Rev Epidemiol Sante Publique (2010),
A. Marchand, M.-E. Blanc / Revue d’Epidemiologie et de Sante Publique xxx (2010) xxx–xxx8
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RESPE-313; No. of Pages 11
consommation selon les professions et les milieux profession-
nels pour mieux comprendre les choix des substances
psychoactives. Toutefois, bien que les cadres superieurs ne
soient pas les plus a risque de developper un probleme de sante
mentale [58], leur absence du travail pour cause de depression
serait plus couteuse a l’entreprise en termes monetaires et en
perte de productivite [59]. On sait que la prescription
d’antidepresseurs se fait la plupart du temps sans veritable
diagnostic et souvent par un medecin generaliste [3]. Certains
travailleurs feraient possiblement pression sur les medecins et
s’automedicamenteraient pour prevenir l’apparition d’un etat
depressif qui pourrait menacer leur emploi.
Par ailleurs, la profession semble influencer differemment
les hommes et les femmes eu egard a la chronicite de leur
consommation de medicaments psychotropes. Les resultats
obtenus illustrent que les femmes occupant des postes de
directeur, superviseur et cols bleus vivent une chronicite plus
importante que les hommes au sein des memes groupes
professionnels. Ce resultat soutient une recherche rapportant
que les femmes occupant les professions de medecin et de
manager avaient des taux de prevalence de problemes de sante
mentale plus eleves que les hommes au sein des memes
professions [60]. Les femmes occupant ce type de profession
semblent ressentir plus fortement que les hommes le stress
entraıne par l’exposition a des conditions de l’organisation du
travail caracterisees par de longues heures de travail et de fortes
demandes psychologiques. On peut egalement faire l’hypo-
these que la conciliation travail–famille s’avere possiblement
plus difficile pour elles et favorise ainsi un stress plus important
qui affecte la sante mentale. Cependant, les differences dans
l’usage chronique de medicaments psychotropes entre les
hommes et les femmes cols bleus sont surprenantes. L’entree
relativement recente des femmes dans cette profession pose
assurement des problemes d’integration et d’identification
professionnelle qui s’ajoutent a des conditions de l’organisation
du travail marquees par de nombreux risques de nature
physique et toxicologique. Ces problemes favorisent possi-
blement une elevation du stress ressenti et les femmes y
repondent plus fortement que les hommes par une plus grande
regularite dans la consommation de medicaments psycho-
tropes.
Au regard des conditions de l’organisation du travail, seul le
nombre d’heures travaillees s’associe a l’usage chronique de
medicaments psychotropes en contribuant a en reduire le
risque. Chaque augmentation d’une heure de travail contribue a
diminuer de 1 % le risque de chronicite. Cela suggere qu’un
employe avec une bonne sante mentale occupe plus facilement
un emploi a temps plein. Les recompenses (meilleur revenu et
autres gratifications) sont plus fortes en regard des efforts de
l’employe et ces recompenses contribuent sans doute a
ameliorer les environnements de vie de l’individu. Ce resultat
va dans le meme sens que ceux d’autres etudes qui montrent
que les employes a temps partiel ou temporaires consomment
plus de medicaments psychotropes [61,62]. Cela s’observe
aussi dans la population generale ou les personnes sans emploi
sont trois fois plus a risque de consommer des psychotropes
[63]. Les autres variables du travail, comme une demande
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
psychologique elevee, un soutien social faible au travail et une
insecurite du travail ne s’associent pas avec le risque de
developper une consommation chronique de psychotropes
contrairement aux autres etudes portant sur la prevalence de
consommation de psychotropes [4,15,16,23,28,29,32] et qui
n’integrent pas a l’analyse les autres composantes de
l’environnement social des individus. Par ailleurs, les resultats
obtenus ici suggerent que les structures explicatives de la
prevalence et de la chronicite de l’usage de medicaments
psychotropes different fondamentalement.
Pour les variables hors travail associees a la situation
familiale, seul le statut marital est significativement associe a la
consommation chronique de psychotropes. Le fait d’etre marie
ou de vivre en couple protegerait d’une consommation
chronique. Cela confirme le resultat de nombreuses etudes
sur la prevalence de la consommation de psychotropes et
souleve le role important du conjoint comme soutien face aux
difficultes rencontrees au travail. Par ailleurs, la situation
familiale mediatise l’effet de l’autorite decisionnelle au travail,
ce qui implique la necessite de prendre en compte les facteurs
hors travail pour bien comprendre comment les conditions de
l’organisation du travail arrivent a affecter la consommation
chronique de medicaments psychotropes. Il serait ainsi
interessant dans une etude ulterieure d’examiner le role de la
conciliation travail–famille comme facteur de risque dans le
developpement d’une consommation chronique de psycho-
tropes chez les travailleurs.
Le risque de consommation chronique de medicaments
psychotropes varie egalement entre les communautes locales,
mais aussi entre les individus. Cela suggere que des recherches
devraient etre developpees pour mesurer l’impact des
contraintes et des ressources de la communaute dans laquelle
vit le travailleur [64,65]. Aussi, il se peut que la variation entre
les communautes soit liee a l’acces au medicament psychotrope
au travers des politiques d’assurance du medicament (publique
ou privee) selon les provinces. En effet, une etude a montre que
la presence d’une assurance publique augmente l’utilisation de
medicaments psychotropes pour les faibles utilisateurs, mais
pas pour les gros utilisateurs [66].
Au total, les caracteristiques individuelles relatives a la
demographie, l’etat de sante physique, les traits psychologi-
ques, les habitudes de vie et les evenements stressants de
l’enfance se presentent comme les facteurs les plus importants
pour expliquer la chronicite de l’usage de medicaments
psychotropes et elles mediatisent plusieurs effets des variables
du travail, comme les demandes psychologiques, le soutien
social au travail et l’insecurite du travail. Ces resultats
confirment ce qu’une precedente etude avait deja mis en
evidence pour la consommation chronique de psychotropes, a
savoir que le genre, l’age et l’usage de tabac y sont associes
positivement [14]. Les femmes ont en moyenne 57 % plus de
risques que les hommes de connaıtre un usage chronique des
medicaments psychotropes, mais le genre, comme nous l’avons
vu, modere la relation entre profession et chronicite de la
consommation. L’age et le tabagisme contribuent a accroıtre de
3 et 2 % respectivement le risque d’un usage chronique de
medicaments psychotropes.
onsommation de medicaments psychotropes dans la main-d’œuvre
de l’organisation du travail ? Rev Epidemiol Sante Publique (2010),
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RESPE-313; No. of Pages 11
Certains traits de personnalite etaient associes negativement
a l’usage chronique de medicaments psychotropes. Plus le
centre du controle interne et le sentiment de cohesion sont
eleves, moins le risque d’avoir une consommation chronique de
psychotropes est prononce. Ce resultat est tout a fait interessant,
car ces traits de la personnalite sont rarement testes dans les
populations en emploi par rapport a l’usage de psychotropes.
Un individu avec un centre du controle interne et un sentiment
de cohesion eleve est plus confiant et moins sujet au stress et
saura probablement mieux affronter un probleme de sante
mentale, en allant chercher de l’aide avant qu’il ne devienne
chronique.
L’etat de sante physique est egalement associe positivement a
l’usage chronique de medicaments psychotropes. Un risque plus
eleve de consommer des psychotropes en relation avec des
maladies douloureuses, des troubles musculosquelettiques et des
maladies somatiques chroniques fut d’ailleurs deja mis en
evidence par d’autres etudes dans la population generale [67,68].
Ce resultat n’a rien d’etonnant puisque les antidepresseurs
representent la partie essentielle de la strategie therapeutique de
la douleur chronique (nevralgies, migraines, maux du dos,
fibromyalgie, syndrome du colon irritable, douleur liee au
cancer), comme l’ont montre les auteurs d’une revue exhaustive
de la plupart des etudes consacrees aux problemes de douleur
chronique depuis 1991 [69]. Le recours aux antidepresseurs pour
traiter certaines formes d’arthrite et de rhumatisme douloureux
est aussi en augmentation et donnerait de bons resultats grace a
leurs proprietes analgesiques et relaxantes, tant dans le traitement
des douleurs rhumatismales que de la fibromyalgie, par exemple
[70,71]. Par ailleurs, on prescrit beaucoup d’antidepresseurs de la
categorie des inhibiteurs selectifs de la recapture de la serotonine
(SSRI) aux femmes qui souffrent d’un syndrome premenstruel
violent, mais a des doses inferieures a celles d’un traitement de la
depression, ce qui contribue a augmenter l’usage chronique chez
les femmes.
Enfin, les evenements stressants vecus dans l’enfance se sont
reveles comme positivement associes au risque de consomma-
tion chronique de medicaments psychotropes. Ce resultat est a
rapprocher de ceux de deux etudes qui montrent que le nombre
d’experiences traumatisantes dans l’enfance augmente le
nombre de prescriptions de psychotropes a l’age adulte dans
la population generale [72] de meme que des evenements
stressants recents dans une population de travailleurs [28].
Notre etude possede toutefois des limites qui pourraient
expliquer certaines associations trouvees non significatives. En
effet, les echelles de Karasek, adaptees pour l’ENSP, c’est-a-
dire les echelles d’utilisation des competences, de l’autorite
decisionnelle, des demandes psychologiques et de soutien
social au travail ont une tres faible consistance interne, ce qui a
pour effet d’attenuer les associations avec la chronicite de la
consommation de medicaments psychotropes. Bien que
l’echelle de demande psychologique ait une validite plus
limitee, l’echelle mesurant la latitude decisionnelle (utilisation
des competences et autorite decisionnelle) obtient une bonne
validite [73]. Aussi, une consistance interne moderee de la
version abregee du JCQ dans l’ENSP n’entraıne pas
necessairement un probleme important de sensibilite [74].
Pour citer cet article : Marchand A, Blanc M.-E. Chronicite de la c
canadienne : quelle est la contribution de la profession et des conditions
doi:10.1016/j.respe.2009.10.010
Par ailleurs, les periodes de deux annees qui separent chaque
cycle de l’ENSP creent un biais dans l’estimation des episodes
de consommation de medicaments psychotropes. Il se peut
qu’il y ait davantage d’evenements que nous ne saisissons pas
entre les cycles de l’enquete, d’ou une sous-estimation possible
du phenomene de chronicite. Par ailleurs, la mesure de la
consommation au cours du dernier mois ne permet pas d’etablir
clairement la duree de la prise de medicaments psychotropes au
cours du mois de reference. Nous savons seulement si ce type
de medicament a ete consomme ainsi que la recurrence de cette
consommation a travers les cycles de l’ENSP. L’ENSP ne
comporte pas certaines caracteristiques du travail pouvant
influencer la qualite de vie au travail, comme, par exemple,
l’environnement physique (bruit, poussiere, chaleur, pollu-
ants. . .), les styles de gestion et de supervision ou encore les
ressources en sante securite au travail. De plus, et bien que nous
ayons controle plusieurs facteurs hors travail (statut marital,
parentale et economique, tensions maritales et parentales,
problemes de sante physique, evenements stressants de
l’enfance, etc.), les evenements stressants hors travail qui
surviennent de facon ponctuelle (douleur recurrente, perte d’un
etre cher, difficultes financieres, etc.) ne sont pas pris en compte
et pourraient expliquer au fil du temps la prise repetee de
medicaments psychotropes.
En somme, cette etude suggere que si le travail joue un role
limite passant par la profession occupee et par le nombre
d’heures travaillees, les caracteristiques hors travail et
individuelles jouent un role plus important dans le risque de
consommation chronique de psychotropes. On doit voir ici une
contribution cruciale de l’experience de vie du travailleur, de
son experience face aux problemes de sante mentale et des
consequences de la medication psychotrope elle-meme. Par
ailleurs, le soutien empirique accorde au modele theorique
milite pour la prise en compte des composantes de
l’environnement social du travail, ainsi que des caracteristiques
personnelles, pour bien comprendre la contribution specifique
du travail a la consommation de medicaments psychotropes et
plus largement aux problemes de sante mentale au travail.
Conflit d’interet
Aucun.
Remerciements
Ce travail a beneficie d’un soutien financier du Conseil de
recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) (410–
2006–2067). Les auteurs sont aussi reconnaissants a Statisti-
ques Canada pour l’acces aux donnees grace au Centre de
donnees de recherches (CDR) du Centre interuniversitaire
quebecois en statistiques sociales (CIQSS) a l’universite de
Montreal.
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