Top Banner
11

VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

Apr 29, 2023

Download

Documents

Welcome message from author
This document is posted to help you gain knowledge. Please leave a comment to let me know what you think about it! Share it to your friends and learn new things together.
Transcript
Page 1: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.
Page 2: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

ANNALESDE LA SOCIÉTÉ

ARCHÉOLOGIQUEDE NAMUR

TOME QUATRE-VINGT-SIX

2012

Page 3: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

Publié avec l'aidedu Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles,du Service public de Wallonieet de la Ville de Namur

Dépôt légal : D/2013/0187/2Société archéologique de NamurRue J. Saintraint 3 - 5000 Namur

Page 4: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 111 —

Tombes mérovingiennes à Saint-DenisOlivier VrielynCK

Introduction

Au milieu du xixe siècle, Mr Artoisenet, alors conseiller communal, découvrit fortuitement un site funéraire mérovingien au lieu-dit Nausipont, sur l’entité de Saint-Denis (aujourd’hui rattaché à la commune de La Bruyère). La découverte fut rapportée par Auguste Limelette une douzaine d’année plus tard dans les Annales de la Société archéologique de Namur1.

[…] Vers 1848, voulant faire enlever d’une terre qu’il cultivait au lieu ci-dessus désigné, les pierres qui entravaient le cours de la charrue, il [Mr Artoisenet] découvrit à 0,75 m de profondeur, des ossements humains presqu’entièrement décomposés qui tombèrent en poussière lorsqu’on voulut les déplacer. À côté de ces ossements il trouva : deux urnes franques avec des caractères ou dessins sur leur pourtour […], - une boule de verre aplatie […], - une plaque en bronze de forme assez originale et munie au revers d’un fort tenon, - un beau disque en bronze portant huit boutons espacés sur son pourtour […], - une petite plaque-boucle en bronze étamé, - cinq beaux grains de collier ou de bracelet en pâte de verre émaillé, - enfin des armes en assez grand nombre, mais en si mauvais état qu’on en tint pas compte à l’époque de la découverte. L’une des urnes était brisée en plusieurs morceaux ; elle alla rejoindre les débris des armes.

Le mobilier, conservé au Musée archéologique de Namur, a été réétudié dans le cadre d’une exposition sur les découvertes archéologiques sur le territoire de la commune de la Bruyère2. Par rapport au signalement ci-dessus, notons qu’il manquait deux des cinq perles.

1. A. L(iMelette), Antiquités de l’époque franque découvertes à Saint-Denis, dans Annales de la Société archéologique de Namur (ASAN), n° 7, 1861, pp. 222-223.

2. Exposition Sous nos pieds, quelle histoire ! présentée à Rhisnes du 3 au 11 mars 2012, proposée par la Maison de la mémoire rurale et réalisée par la Direction de l’archéologie du Service public de Wallonie en collaboration avec la Société archéologique et le Musée archéologique de Namur.

Page 5: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 112 —

Mobilier de la tombe de Nausipont. Échelle : 1/2 (1 à 4), 1/1 (5), ¼ (6).

Dessin G. Lauwens © SPW, Division du Patrimoine.

1

2

3

4

5

6

Page 6: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 113 —

Photos du mobilier conservé au Musée archéologique de Namur1. Pot en céramique, 2. Anneau, 3. Plaquette à bélière, 4. Plaque-boucle,

5. Trois perles, 6. Lissoir (face sup. et inf.). Photographies L. Baty (sauf 4 : R. Gilles) © SPW, Division du Patrimoine.

1 2

3 4

5

6

5 5

6

Page 7: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 114 —

Le lieu-dit Nausipont ou Nocipont se situe 800 m au sud-est de l’église du village de Saint-Denis, non loin de la source de la Méhaigne, en rive droite de celle-ci (alt. 170 m). C’est le seul site mérovingien connu sur la commune de la Bruyère, mais de nombreux cimetières de cette époque ont été découverts sur les communes voisines3.

Le mobilier

1. Pot biconique en céramique assez élancé, à carène médiane, col haut et bord évasé. Décor à la molette de trois à quatre rangées d’impressions de motifs géométriques simples (croix de Saint-André, gaufrage). Surfaces gris foncé, quelques plages jaunâtres sur l’extérieur. Ht. 12 cm. Diam. ouv. 9,6 cm. Inv. A2782.

2. Anneau muni de huit bossettes. La distance entre les mamelons varie de 11 à 15 mm, mais il y a un espace de 4 cm sans bossette (et aucune trace d’arrachement). Alliage cuivreux. Diam. 5,4 cm. Ép. 5-6 mm. Inv. A2776.

3. Plaquette en forme de selle munie d’une attache en forme de demi-anneau de section rectangulaire. Alliage cuivreux. 38,5 x 39 mm. Ép. 23 mm. Inv. A2775.

4. Plaque-boucle (de ceinture ?). Plaque triangulaire trilobée, sans décor, percée de trois trous oblongs correspondant probablement à trois bossettes ou rivets disparus. Rainures transversales sur la boucle. Alliage cuivreux étamé. L. 4,8 cm. Inv. 1772.

5. Trois perles. Verre. Inv. A2777 à A2779.- Une grosse perle enroulée biconique rouge opaque, ornée de filets

irréguliers de verre blanc opaque et bleu translucide. Trois filets de verre jaune opaque en partie disparus surmontaient le décor précédent à l’équateur et sur les bords de la perle. Diam. 23/24 mm. L. 19 mm.

- Deux grosses perles enroulées annulaires rouges opaques, ornées (dans l’ordre de mise en place du décor) de cinq points blancs surmontés de points bleus translucides en fort relief sur l’équateur de la perle, d’entrelacs jaunes opaques contournant ces points, et de filets blancs circulaires entourant les bords (trou) de la perle. Diam. 21/22 mm. L. 13 mm.

3. Sur la commune de Gembloux : Gembloux et Beuzet ; sur la commune de Namur : Namur (La Plante, rue de l’Ange et Place St-Aubain), Vedrin (Le Tombois et Les Minières), Suarlée, Lives-sur-Meuse et Saint-Servais ; sur la commune de Jemeppes-sur-Sambre : Spy.

Page 8: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 115 —

6. Lissoir. Boule aplatie en verre massif présentant une face convexe, l’autre légèrement concave, avec l’empreinte du détachement du pontil au milieu de cette dernière. Verre d’apparence noire, très irisé sur la face convexe. Présence de craquelures surtout sur cette face convexe. Surface couverte de négatifs en forme de petits cercles ou d’arcs de cercles de 1 à 7 mm de diamètre. Diam. 7,6 cm. Ép. 3,8 cm. Inv. A2774.

Comparaisons

La plaque-boucle date du Viie siècle apr. J.-C., la céramique ornée à la molette et les perles sont caractéristiques de la fin du Vie et du Viie siècle (Mérovingien récent 1 et 2)4. L’anneau à bossettes est probablement un remploi. Des anneaux similaires de tailles diverses (bien que sans la zone vide de bossettes) sont attestés à l’époque romaine, par exemple dans les collections du musée de Vienne5. Quelques-uns ont été trouvés en contexte mérovingien, comme à Saint-Denis près de Paris (tombe 6, début du Vie siècle)6, à Eltville (tombe 459, 2e ¼ du Vie siècle)7 et à Caudebec-lès-Elbeuf8. L’anneau de Saint-Denis, muni de sept bossettes, présente également un espace vide entre deux protubérances.

Une plaquette en selle de cheval identique à celle de Nausipont a été découverte au vicus de Liberchies9, malheureusement hors contexte. Elle y est

4. Pour la datation de la plaque-boucle, voir r. legoux, p. périn et F. Vallet, Chronologie normalisée du mobilier funéraire mérovingien entre Manche et Lorraine, dans Bulletins de liaison de l’Association française d’Archéologie mérovingienne, n° hors série, 2004. Le cimetière de Bossut-Gottechain (commune de Grez-Doiceau) a livré une perle identique à la perle biconique, associée également à une céramique biconique ornée à la molette, au sein de la tombe 349 (1re moitié du Viie siècle). Quatre autres perles de ce même site ont une forme un peu différente (sphérique aplatie), mais un décor identique. Elles appartiennent à trois tombes (358, 413 et 434) du dernier tiers du Vie siècle et de la 1re moitié du Viie siècle.

5. s. BouCher, Vienne : Bronze antiques, dans Inventaire des collections publiques françaises, 17, 1971, Paris.

6. E. salin, Sépultures gallo-romaines et mérovingiennes dans la basilique de Saint-Denis, dans Monuments et Mémoires Piot, t. 49, 1957, p. 113, fig. 13.

7. Voir Die Franken : Wegbereiter Europas (catalogue d’exposition, Mayence, Reiss-Museum Mannheim), 1996, fig. 539.

8. M. CoChet, La Seine-Inférieure historique et archéologique, Paris, 1866, seconde édition, p. 225. Nous remercions chaleureusement F. Vallet pour ces renseignements. Dans r. legoux, p. périn et F. Vallet, Op. cit., l’anneau bouleté est repris sous le n° 348 et daté du proto-mérovingien et du Mérovingien Ancien 1 (440/50 – 520/530 apr. J.-C.).

9. r. Brulet, J.-P. deWert et F. VilVorder (dir.), Liberchies, Vicus gallo-romain, 5, dans Publications d’Histoire de l’Art et d’Archéologie de l’Université catholique de Louvain, n° 102, 2008, p. 155, ill. p. 157.

Page 9: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 116 —

interprétée comme un passe-guides fragmentaire. Une autre pièce identique provient de la villa romaine voisine de Nausipont10.

Le lissoir est l’objet qui pose le plus de questions. L’utilisation la plus communément admise de ce type d’objet est le lissage ou le lustrage de tissus ou de cuirs11. Ces objets sont assez abondants mais peu étudiés. Si quelques découvertes (anciennes) sont datées de l’époque romaine ou mérovingienne, la plupart proviennent de contextes datés entre le ixe et le xVe siècle, et il est généralement admis que les objets datés d’avant l’époque carolingienne sont mal attribués.

Conclusions

Les éléments mérovingiens classiques du mobilier sont la céramique, la plaque-boucle et les perles. Ces objets permettent de dater l’ensemble des deux premier tiers du Viie s.

Les autres pièces de mobilier ne datent vraisemblablement pas de l’époque mérovingienne. Les deux objets en alliage cuivreux sont sans doute romains, mais leur fonction n’a pu être déterminée. Le dépôt d’objets romains ou plus anciens dans les tombes mérovingiennes est assez fréquent et ne doit pas étonner12. Le lissoir en verre est un objet bien connu mais dont l’existence avant l’époque carolingienne est très douteuse. Une analyse du verre du lissoir a montré qu’il s’agit d’un verre calco-potassique, a priori inconnu avant le ixe siècle. On ne peut évidemment exclure une intrusion dans le matériel mérovingien vu l’ancienneté de la découverte, et le délai écoulé entre la mise au jour et le signalement. Une autre possibilité serait que cet objet provienne d’une tombe plus récente sur le même site. Plusieurs cas de lissoirs en verre au sein de tombes sans autre mobilier sont en effet connus, en France comme en Belgique13.

10. Voir, dans ce volume, F. hanut, C. polet et A. salaVert, L’occupation romaine du territoire de la commune de La Bruyère (province de Namur).

11. Voir, dans ce volume O. VrielynCK et Fr. Mathis, Les lissoirs en verre médiévaux : Analyse de quelques exemplaires découverts en Wallonie.

12. Un mémoire de fin d’étude a été réalisé sur le sujet : C. pion, La pratique du remploi dans les sépultures mérovingiennes de Belgique: Entre recyclage, esthétique et symbolique, dans Cahier des thèmes transversaux ArScAn, 10, 2012, pp. 47-55.

13. O. VrielynCK et Fr. Mathis, Les lissoirs en verre médiévaux, ce volume.

Page 10: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 117 —

Les pièces conservées au Musée archéologique de Namur ne constituent pas l’intégralité du mobilier initialement découvert puisqu’il manque au moins les armes, une céramique et deux perles. La présence d’armes indique un dépôt funéraire masculin, celle de perles plutôt une tombe féminine. Toutefois la présence de perles au sein d’une tombe d’homme n’est pas rare. Le plus souvent ces perles sont isolées, placées dans une aumônière ou déposées sur le côté du défunt, et ne font donc pas partie d’une parure, mais exceptionnellement une tombe peut associer armes et parure en perle14. Dans le cas présent, les perles sont peu nombreuses et assez grandes, ce qui tend à les attribuer à un bracelet. Il est donc plus plausible qu’il s’agisse ici d’un mélange de mobiliers associés à deux défunts au moins. Les tombes mérovingiennes sont d’ailleurs rarement isolées et il est vraisemblable que ce soit tout un cimetière qui dort à Nausipont.

Des informations fournies par la notice de 1862 nous pouvons encore retenir ceci : les pierres qui gênaient le passage de la charrue devaient être grandes, étant donné la profondeur atteinte pour les retirer (75 cm). Peut-être est-ce l’indice de l’existence d’un coffrage en pierre dans lequel le ou les défunts étaient inhumés.

14. Un cas est signalé dans le cimetière de Bossut-Gottechain : O. VrielynCK, La nécropole mérovingienne de Bossut-Gottechain, commune de Grez-Doiceau, Brabant wallon, catalogue d’exposition, 2007, p. 33.

Page 11: VRIELYNCK O., 2013. Tombes mérovingiennes à Saint-Denis (Belgique). Annales de la Société archéologique de Namur, 86, p. 111-117.

— 264 —

Mise en page par Aurore Carlier, SAN.Impression sur papier couché mat 135 g par Peeers, Herent.

Achevé d'imprimer en mai 2013.

Les articles engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. L’iconographie est publiée sous leur entière responsabilité.

Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, du texte ou de l’iconographie de cet ouvrage est soumise à l’autorisation écrite de l’éditeur. Une copie ou reproduction par quelque procédé que ce soit, photocopie, photographie, microfilm, bande magnétique, disque ou autre, constitue une contrefaçon passible des peines prévues par la loi.

Couverture : L'askos de Flavion

Namur, Musée archéologique de Namur. Coll. Société archéologique de Namur, inv. n° A04242.