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UNIVERSITE DE DAKAR
FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
LE LIVRE ET LA LECTURE PUBLIQUE
A DAKAR
1
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Mémoire de Maîtrise présenté par
Henri SENE
sous la direction de Monsieur
Boubacar LY
Maître-Assistant de Sociologie
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...Dakar, 197' J' \
L···f
i,:1
... __ ...:~ :y1~
Je tiens à. remeroier Monsieur Boubacar ]X,. ma:ttre-assistant de
sociologie au département de philosophie de la faculté des lettres et
sciences humaines de l'Université de Dakar, qui mla encouragé dans la
voie de la reaharche et a bien voulu aecepter de patrormer ce mémoire de
ma.!trlse.
Ma profonde gratitude èl Madame Francine KANE, sociologue et
professeur Ù 11 Institut de Béveloppement :Joonomique et de P1.anii'icatian
des Nations-Unies deDaJœ.r qui par ses remarques pertinentes et ses con
seils judic1eux::, m'a guidé dans la l'édaeotion de ce mémoire en acceptant
de -lire--'].e .manusor1.t de ce travail.
Enfin que le personnel et les -J.-esponsables des bibliothèques où
s'est déroulée l'enqu@te et ceux de l'EloIe des Bibliothécaires, Archivis
tes et Doc'lmlentalistes de l'Univers1té de Dakar veuillent bien trouver
ici l'expression de ma sincère reoonoa..i.Seance pour toute l'aide matérielle
et morale qu'ils m'ont apportée.
. . -- ~ 17
DAKAR, 1m
~-_ ..~ ............~--
l N T li 0 DUC TI 0 N
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Panni. les moyens d t1n:t'ormation, d'étude, d'appréhension de la pensée
humaine et dtacc~s à la connaissanoe en général, le livre a occupé et occupe
encore de nos jouxs 'lme place de oho1.x aussi bien dans les d1fj;érents prooessus
de cO!'t":un1cation et d'échanges que dans le domaine de l'éducation et de la forma
tion. L'objet lu1...m~me (le livre) et l'aote qui est sa finalité (la lecture) sont
au centre dlun cirouit oomplexe, qui va d'un émetteur, dans le cas d''tUl écrivain,
par exemple, jusqu'à un récepteur qui peut 3tre un lecteur, en passant par
l'éditeur, le libraire, le bibliothécaire qui chaO'lD'l en ce qui le ooncerne, dans
son domaine propre, a plus ou moins d'ini'J.uenoe sur l'objet-livre et sux celui
qui l'utilise, le lecteur. Ce média, au sens modexne du terme, dépasse donc sa
propre finalité, la lecture,qu'elle soit studieuse ou simplement oisive, pour
rev'êtir des aspects culturels, économ.1quea et soc1ologiques.
Il est oet objet que l'on vend, simple marchandise soumise à la 10& de
l'offre et de la demande, que l'on trouve aussi bien dans lee libxair1es et sur
l~s rayons des sup~que dans les éta1Bges des bouquinistes au coin des
"':'U~s. Il est aussi, cet amas de feuD.les reliées les unes aux: autres "et dont le
contenu peut 3tre à la source du savoir d'un individu. Il est encore oet objet
qUe l'on est fier d'avoir dans sa salle de séjour et qUi est le signe ~térieu.r
d'appartenance à la classe des lettrés mtme si ori ne l'a jamais ouvert. C'est dirü
combien le :t!vre est oomplexe et mult1.tozme, et combien "ftOmplexes lail motivatiol:s
qUi poussent les individus à emprunter, à acheter ou à s'approprter un livre.
Né avec l' écrit U a connu des formes multiples J' les -mblettes d f al"-
gile des Grecs et des Romains, en passant par les rouleaux:: de parchemin qui ser-
vi:ê'€Ilt de support à l'éor1.ture jusqu'au nllè siècle, et enfin le livre tel quer
~ nous le connaissons actuellement. Son utilisati.on néoessi ta:1 t et néoess1t~ encore
de nos jours de pouvoir déch1:ff'rer le message contenu dans, ses PBgQS, aussi.
r;::sta-t-il longtemps l'apanage d1lm.e minorité d1alphabét1.sés. avant que l'impri-
me~ie, à partir du XIVè siècle ne permette par une teohn:1que de reproduction
...
-2-
rapide et permettant de grands tirages, de toucher un public plus large, saCl8
pour autant atteindre toutes le8 couches sociales.
Jusqu'à la naissance du journal et de la presse, au XVllè siècle, le
/l'un des livre reste, en dehors de la oommunioation oI'ale,/moYElr.Spar lequel les hornJOes
pewent accéder au savoir. Cependant socialement et économiquement 11 restEra
encore longtemps sous le contr8le et l'influence de ceux qui détenant les mo;;re~lS
de le produire monopolisaient et monopolisent encore les circuits d'édition et
de diffusion et qui influenceront jusqu'aux messages contenus dans leB~livres.
L'apparition d'autres moyens d'information à partir du XIXè siècle,
communément appelés les mass-média tels que la :radio, le cinéma, la télévisiŒ1
et l'expansion de la presse écrite créa des concurrents sérieux au livre, mais
ne parvint ja.maj.s à entamer son audienoe. C'est a1nei "qu'entre 1950 et 1966 le.
radiodiffusion a triplé ses points d1impact dans le monde, mais, dans le rr.Êk:lc
temps le 1i~ a doublé sa production par titres et triplé ea production par
exemplaires" (1).
I.e. création des collections du "livre de poche ll chez les principaux
éditeurs à partir des armées 1950, se traduisit par une augmentation des tira:c~'-
lUle baisse du pr:l.x de revient du livre et la parution dans le livre de poche,
d'auteurs les plus divers depuis les textes des philosophes les plus connus,
jusqu1aux romans policiers. Le livre slétait popularisé. Ce fut après la décou-
verte de l'impr:i..merie, -')a deuxième révolution.
Dans le contexte historiQue et oulturel de l'Europe, la lecture est,
à l'origine, en étroite liaison avec le système scolaire et éducationnel, l'2.1ph".
bétisation se faisant avec les livres, de m'@me que la dif.fUsion et l' acquisition
des connaissanoes se fait par et à travers les livres. Avec le développement de
•••
(-1.) ESC.A.IŒIT (Robert).- Le littéraire et le sooial : Eléments pour une sociologie
de la littérature._ Paris r Flamnarion, 1970.- p. 24
,,
!
-3-
la soci~té industrielle, les fonctions du livre se diversifient et parallèlement
à son rele didactique et docunentaire, il devient un moyen dl évasion et de dé-
tente. Comme tout moyen d'information, le livre est aussi un puissant vecteur
d'idées, de valeurs, d'idéologiES et de croyances. A ce titre le contact entre
l:Europe et l'Afrique, durant la colonisation, a eu pout" effet majeur, l'intro-
ductlon des modèles de la civilisation occidentale par le biais de l'enseigne-
ment notamment, et le livre a joué un rele non négligeable. Les anciennes colo
nies dépendaient non seulement de la métropole du point de vue a.dmin1atratif,
mais constltuaient aussi une lIextension de leur marché culturel" (1) tant du
point de vue économique que du point de vue culturel.
EJ:. Afrique, le livre a été introduit par les colonisateurs arabes
d!abord, Européens ensuite. la mission civil1sattice dont slétaient i:rrvesti
ceux-ci, en abordant le continent africain, se traduis1..'t conorè'tement par la
négation systèmatique et organisée des valeurs de civilisation des peuples noiT'...
et en même temps par 11aftiEmat10n déclarée et imposée de la supériorité aG
l'occident chrétien sur les peuples colonisés, considérés jusqu1alors comme
ajrant été hors de 11~toire.
LI introduction des modèles de la civilisation occidentale se fit soit
d'une manîère coercitive soit par des moyens plus pac11'1ques., mais qui nten
€taient pas mo:1ns insidieux: du point de vue de leur finalité.
Ce fut le cas de l'enseignement. L1implantation progressive dans les
colonies, d'un système éducatif de type occidental, rentre dans le oadre de cet":;c
mission. Le développement de la scolax1satfu qui s'en suivit a oontribué à pro-
pager l'usage du livre dans un contexte culturel et social d1:fférent de celui
dans lequel il. était né. Cela ne devait pas se faire sans oonséquences sur le
plan culturel, social et psychologique, pour la simple raison que les livres
utilisés fUrent longtemps sans aucune relation avec l'univers mental et la vision
du monde de l'Africain. Tels furent les antécédents qui présidèrent à llintro_
•••
(1) ROBll'JE (Nicole).- :ra. lecture.- in : le littéraire et le sooial séléments pourune sociologie de la llttérature.- Paris 1 F1ammar1on, 1970.- p.326.
-4-
duct10n du livre en Afr.1que et qui devaient en fausser pour longtemps, l'utili-
satian et la oonoeption.
Aotuellement une des caro.ctéri.st1quee du problème de la lecture et c1u
livre en Afrtque en général repose sur le fait que, llapprentissage et I f babitu
de la lecture, ne peuvent 3tre dissociés du travail scolaire. loi, comme ai11eu
llacquisition des oonnaissanoes tant théoriques que p:rn.t1ques, le besoin irrLp4
rieux de formation et d1information pour tout dire, passent par la capacité de
pouvoir déoh1:ttrer les signes oontenus dans les livres. Savoir tiret Cl est non
seulement posséder une des clefs de la " cultu.re",.m:iD auas1 pouvoir améliorer
son statut social.
Alors que "dans un oontexte culturel différent c 1 est le développeo.ent
des lo:i.e1rs qui. a pennis et permet le développement de la lecture, dans les
masses, le soir, pendant le wee]o..end ou en vacances", (1) en Afrique, la situa-
tian est actuellement différente et la leoture reste largement tr:l.butaire des
préoccupations essentîellement didactiques des individus qui relèguent au seconl
plan la lecture faite dans un but de loisir et de délassement. Cependar::.t s 1 il
était bon de noter cette primauté de la lecture intéressée sur la lecture oisiv
il faut Boul:lgner que "dans un pays comme le Sénégal, qui effectue un passage
de liancienne société traditionnelle à une sooiété moderne en voie de ~OInk~tior
il ne faut pas slattendre à trouver d'une manière générale, des activités de
loisirs analogues à celles des sociétés d l occident, nî mthe un ensemble d'acti
vités de loi.sirs rigoureusement spéci.:fïées ll (2). Et ceci pour des ra1sona h1s1
tiques et sociales évidentes, le processus historique de la formation de ces
sociétés n'ayant pas été les robes et la colonisation ayant eu des conséquenc
que l'on ne retrouve; pas ailleurs, et dont la principale ma.n1.:t'estation est à
l'heure actuelle 1me situation de dépendance poli tique, économique et cultUX\"
~es ex-eolonies vis-à-vis de l'ancienne métropole. ...,UUlIiAZEDIEll (Joffre) lIASSmFORllER (Jean).- Eléments pour una sociologie ç
':'ée de la produotion, de :la di:ffu.sion et de l'utillsation du l1vre.- in1tbl1ographie de la France, nO 24, juin 1962.- p. 5.
VGEYROLIAS (I?1.erre).- Modemisation des hommes 1 l'exemple du Sénég~,I~s 1 Flammarion, 1969.- p. 6.
-5-
Les faoteU1'6 qui ont oontribué au développement de la lecture au
Sénégal sont multiples et sont les résultats plus ou moins direots du ~évelop-
pement de lléducation. En premier lieu l'alphabétisation progressive de la
population a créé che. les individus un besoin cro1.ssant d l intonnation, non
seulement pour améliorer et renouveler les oonnaiesanoes aoquises à l'école ou
à llUn1ve1'Sit~, clest le oas des professeurs, instituteurs et membres des pro-
fessions libérales fréquentant les bibliothèques, mais encore souvent pour
permettre de répondre à des exigenoes bien précises. Gomme ces étudiants, ces
élèves ou ces trava1.l1eUl"B qui s'inscrivent à une bibliothèque pour bénéficier
gratuitement du pr~t de livres "au programme" qui leur permettent de préparer
un examen ou un concours professioIUlel. la bibliothèque devenant ainsi le
prolongement de l'Eoole. Sur le piBn.eocial, l'urbanisation croissante, la
diversité des moyens d l1nf'ormation et de formation personnelles ont stimulé ce
besoin latent de lectures. Dnns des villes champignons oomme Dakar, qui à
l'instar des capitales de la plupart des pays sous-développés possèdent ln
majorité des infmetruotures socio-éducatives et drainent vers elles les oito-
yens en qu@te de promotion sooia1e, les mass-média jouent un re1e détermin~~t,
qu'ils soient contrelés par les autorités locales ou par des institutions
étrangè~s. Ln création de bibliothèque ou de centres d'information par presque
toutes les ambassades accréditées au Sénégal sont k'l preuve que l.e livre et .l'OB
autres médias audi~v1sue1s jouent un re1e plus pré,,1s que celui dont on parle
dans les programmes d 1 éOÎltln8es culturels. Il s'agit en effet dans certains cns
de continuer à d1:ffUser et de maintenir intact, par le biais de moyens d 1i.lJ.f0r~
mation, tels que : livres, ~ournaux:, radio, télévision, des schémas étrangers à
l'univvID culture~ de llAfricain et introduit durant 10. colonisation.
Nous abordons là un problème crucial, celui des incidences culturclles~
'''~ sociales , politiques et idéologiques du livre et des conséquences que la lcctur-J
~ut avoir sur les lectlrUI'S. Car un Uvre en 1u1....llme n'est jamais totalement
<':, ~. Cette sU1te de mots et de phrases qui conetituent un ouvrage sont la
-(2) FÛt, ..Pafrun auteur, qui 1ui-.e est en situation historiquement, soc~e.1emeJ.'lt
logiquement et qui suggère à travers son oeuvra consciemment ou incons-
•••
-6-
c1emment une Vision du monde ou une intention particulière. Fondamentalement
le livre est un projet auquel le lecteur, par l'acte de lecture qulil acooillpli~
est appelé à adhérer. "L'oeuvre littéraire, le livre, l'imprimé sont ce qU'e:cl
font le lecteur. Lire c'est oonstruirelt (1). Le livre n'atteint donc sa réelL
signification que lorsqu'il y a acte de leoture, lorsque le lecteur partant ch...
signit'iant pour découvrir le signifié partioipe au projet de l'auteur ou le
rejette par une démarche consciente, réfléchie et personnelle. Il arrive aussi
que llappareil idéologique et économique qui sous-tend la production et la
diffusion de l'oeuvre soit suffisamment fort pour détruire ou anihiler toutes
velleités de réflexion chez If1ndividu et imposer ainei tout tm système de
valeurs surtout dans les pays dont les structures éd1toriales sont peu dévelo1~
pées et qui dans le domaine de 11information en général sont tributaires de
l'étranger. L'exemple de la colleotion "NoUV'eaux Horizons" en provenance des
Etats-Unis d'Amérique, qui dans les années 70, anvD-..hit les kiosques, les biblio
thèques et les nwons des supe:rmachés dakarois sous f'onne de livres brochés et
essentiellement axés SUI" l'A.merican way of life, est le cas typique de la
littérature de propagande, a bon marohé, d'autant plus dangereuse qu'elle se
présente sous f'ome d'ouvrages d'actualité et faciles à lire.
Or, 11 est \.ID fait que dans les pays en voie de développement, et phD
précisément dans le cas qui nous intéresse, à savoir le Sénégal, nous nous
trouvons en situation de pénurie, tant au niveau de la conception que de ln
production du llv:re. Ici comme dans nombre de pays sous-développés, la quasi
totalité des ouvrages qu'ils soient scolaires ou de culture générale, sont
importés. C'est autant'.d1idées, de comportement, d'idéologies et de valeurs,
étrangères au leoteur atr.1.oain. D'où une certa1ne situation de dépendance
culturelle. On invoque le manque d'infrastructure 1 maison d1édition, libraires,.
impriml::lries, et aussi l'inexistence d'une littérature véritablement national,"
du point de vue des textes et aussi de la langue. S'il est vrai que toutes 18s•••-'-'-------------------
(1) ROBINE (N1cole).- op. C1t.- p. 227
-7-
conditions ne sont pas encore réunies pour créer une littérature et un circuit
littéraire réellement national, il reste "qu1en réalité cette "occultation"
du marché africain par l'ensemble des éditeurs français, témoigne d'un refus
de considérer le lecteur africain dans sa ,pécif1cité puisque la plus grande
partie des exportations consiste en livres destinés au public européenn (1).
Il ne s'agit évidemment pas pour nous d1enfermer le leoteur sénég8.l.uis
uniquement dans l'univers des contes d'Amadou Koumbn, ni de le couper des
grandes oeuvres de la littérature universelle, mais nous pensons que "l'essül1-
tie! de la nourriture intellectuelle d'un peuple doit a.voir été élaboré dans Sr'.
propre cOnBc1enoe tl (2), pour éviter le piège des l1vres-pro~ande et des
bibliothèques africaines transformées en centre d'information des ambassades
étrangères, par l'intemédiaire de généreuses dotations en livres, sous couvert
d'échanges culturele.
Il Y a donc, à l'heure actuelle, une véritable problèmatique du livre
et de la lecture en At'r:l..que. L'objet de ce présent tra.va.11 présente le cus du
Sénégal, à travers une enqu~te ef'fectuée dans les trois plus importantes biblio-
thèques de lecture publique de 1.a oapitale sénégalaise. Est-oe qu'on lit à
Dakar ? Qui est-ce qui :lit ? Que lit-on ? Que oherche-t-on en lisent 1 Que
trouve-t-on réellement en Usant ? Que pourrait-on lire, l.11Ed.s qu i on ne lit pus?
sont autant de questions que soulève llinsertion récente du livre dans l'univers
quotidien du citadin sénégalais à l'heure actuelle.
Question d'autant plus importantes, que le livre, comme les autreS
moyens audievlsuel.s, qu'ils soient d1in:fonnation ou de divertissement, peuvent
~tre source d'épanouissement, d'ouverture d'esprit, de culture mais aussi
d'aliénation et de déperaonalisation.
L'objet de oette présente étude n'est pas d'apporter des solutions
aux problèmes inhérent à 1'introduction du livre et de la lecture publique dallS
la société sénégalaise. Ce travail soulevera oertainement plus de problèmes
...(1) L'édition en Afrique.- in, le bulletin du livre, nO 230, nov. 1973.- p. 25
(2) ]BCARPIT (Robert).- 14ttéroture et développement.- in, le littéroire et lesooial : éléments pour une sociologie de la littérature.- Paris : F1aŒmariG~,
1970.- p. 248.
qu'il n'en résoudra .. Il veut ~tre plus simplement qu'une contribution, modeste
il est vrai, à l'étude des sciences de l'information, très peu développées en
Afrique et qui par leur importance, aussi bien c'IUturelle, économique que
sociale occupent l.me place de choiX dans le processus global du développer:lent.
Aussi cette étude se divise-t-elle en trois grandes parties ; dEJ.IJ.S
la première, j'ai essayé de voir quelle était la place du livre, de la lecture
et des bibliothèques au Sén~al du point de vue historique en essayant de mon
trer la place de ces trois éléments dans l'éducation au Sénégal depuis 11époque
coloniale. J 1ai ensuite exposé la situation des bibliothèques à Dakar. En lX:C1't~,:rd,
de la situation privilégiée de la région du Cap-Vert par rapport aua autres
régions du Sénégal du point de vue éducatif, économique et politique, j'8.i
montré qu'elle était la situation exaote du réseau de bibliothèques à Dakar,
leur importance et leur place actuelle dans les prévisions des planificateurs
sénégalais dans le domaine socio-éducatif. Cette première partie se terminerr.
pnr la présentation des trois bibliothèques enqu'êtées et de leur importance
dans le développement de la lecture dans le Cap-Vert. Le second chaJ>-!tre aborc',c
Itenqu~te elle-mtme, à tmvers les résultats obtenus après le dépoU111ement arc
lIeurs typologie des lecteurs, leurs lIlilieux 80C1.o- culturels,/types de lecture etc •••
nous permettront d'avoir une vue synoptique du lecteur dakaro1.s, sans pour
autant avoir la prétention de présenter à travers cett~ étude, dont nous SOhW18S
conscients de lacunes et des insuffisances, le prototype du lecteur daknrois,
qu!il soit afI'1cain ou européen. ra réalité étant plus complexe. J'achevemi
eni'in ce travail par 1'étude des conceptions que leB lecteurs sénégalais se
t'ont du livre et de la lecture. Qu'est-oe qU'un livre? pourquoi s'adonne-t-on
à la lecture? Quelles sont les finalités de l'acte de lecture? etc••• sont
autant de questions qui nous pezmettront de traiter de la problèmatique du l.iwre
et de la leoture chez les e4négalais dont nous parlions précédemment. Plus
précisément il s'agira dans ce chapitre de dépasser les donn~es brutes des
résultats de l'enqu~te, pour essayer de saisir la signification du livre et :;0
la lecture dans llunivers social, psychologique et culturel des lecteurs qui "~l!t
répondu à nos questionS.• ••
LES BIBLIOT~TJ.E5 ET LA. LECTURE AU SENmAL
fleur
-9-CHAPITRE l _ BIBLIOTHEQllES ET LECTURE PUllLIQUE AU S~lmAL
l - HISTORIQUE
Pour aborder l'étude du livre et de la lecture, c'est-à-dire de leuJ'
diffusion, de leur impact et de leur finalité, il semble qulil faudrai les
replaoer dans le contexte plus général de l'éduoation et de la fonration. toute
collectiTité, quelque soit son degré de développement, utilise des moyerw
techniques ou oulturels pour assurer l'éducation de ses membres. Dans le systèL:1€
scolaire et éducatif de type occidental, tel que nous le connaissons aujourd'hui
le livre et la leoture sont un des moyens privilégiés d'aocès au savoir.
Cependant il ni en fut pas toujours ainsi dans les sociétés af'ricaines
et le livxe n'est jamais réellement inte.r.venu jusqu1à une période relativement
récente dans 1 système éducationnel et ceci pour des raisons aussi bien m.s
tor:l..ques que sociales.
Néanmo1ns, il contient tout de mfune de mentionner le rele joué par le
Ooran, en tant que véhicule de ]a pensée et de la civilisation musul.ma.nes en
A:fr1que en général et plus parti.oul:1.èrement dans les sociétés 1Blamisées de
l'ouest africain.
Id.vre de référence de tout Musulman, il ne manqua. pas dl~tre lu,
étudié et transcrit par des savants et des religieux. Ll'arrivée des Ambes et
l'introduction de 11Islam en Urique Noire à partir du Xlè siècle devait voir
le dévelo.ppement d ' une civilisation florissante durant le moyen-âge africain,
comparable à celle de l'Europe à la m~me époque et dont l1un des moteurs essen
tiels fut llIslam et par voie de oonséquence, l'étude du livre saint.. Une des
meilleures illuat:œtions du développement de lléducation et de l l enseignement
à cet époque a été la. fameuse université de Tombouotou, où homme)de science
et clergé qu1ils soient Arabes ou autoohtones prodiguaient un enseignement fondé
sur les préceptes du Coran.
En oe sena, les "éorits de Khadima Diakhaté (savant de la cour de
,..
-10-
Iat-Dior vers 1858) d'Amadou Bamba, d'EI Hadji Malick Sy et Moussa Ka etc ••
ne sont que la continaation à notre époque de ce puissant mouvement intellcc-
tuel des siècles préoédents" (1).
On peut aff'1nner sans :r:1.sque d1erreur que llIslam a found la
première écriture aux: Sénégalais. To.utefois, si le Coran fut à 11 origine dl"Lll~_
enseignement et d'une éducation en Arabe, 11 ne le fut et, dans une certain",
mesure le reste encore de nos jours, que dans une perspective essentiello.rllœt
religieuse.
Certes le Coran a donné naissance à d'autres écrits lus et étudiés
par des lecteurs arabophones, et 11 existait dans l'Afrique Noire pré-coloLi~'_J.'-::
quelques bibliothèques, notamment à Tombouctou mais eelles-ci n'étaient réelL·
ment fréquentées que par une m1norité de lettrés, versés dans lfétude exég6tLlèlC
du livre samt. En ce sens, il y au.:.r:'t\it oertainement des recherches intéres-
santes à entreprendre sux la dif'fusion et l'ut1l:Lsat10n du livre arabe e.u
Sénégal. L'enseignement oomnique traditionnel n'a. pas _1l8Wtat.o1.s créer
des habitudes de leoture au niveau des enfants ou adolesoents et pour deux
raisons noua semble-"\-il. D'une part à oause de ses méthodes, oar 11 n'y 8.
pas réellement alphabétisation en Arabe, oe qui aooutit alors à un "arabisu,
sans arabisation" (2) et d1autre part à oause de ses finalités purement reli··
gieuses : la oonnaissanoe du livre suint.
On peut donc affinner que lié à l'écrit, le livre au niveau populc.i:. ..;
était quasiment inconnu dans des sooiétés oÙ la tranam1ss1on de l'expérience;
humaine se faisait uniquement par le biais de l'oralité. Ainsi) et toute 111:'J-'
portion gardée, on peut affinner que dans l'Afrique Noire pré-coloniale "du
fait de la quasi inexistence de l'écriture (en dehors de lfécr1ture arabe
monopolieée par les seuls marabouts) auoun autre moyen de transmission de
-----------------------_.~.,'-
(1) jD~IiOP~(~cijh~ejikhë~An~t~a~)~.i-;L~'A~f~r:l.3q~u~e~N~O~i~ree~pr~é-c:o~l~otlJ.~·ia~l;et.~ep.t~u~d~e~co~m~p~ar~é~e~d:e8~systèmes politiques et sociaux de ltEurope et de l'Afrique Noire del'Antiquité à la fonnation des Etas modernes.- Paris 1 Présence Africaine,1960.- 220 p. ; p. 1~5.
(2) SIIJA (Ousmane)... Lee Arabes et le Sénégal; arabisme sans arabiaation..in notee afrioaines, nO 121, 1969.- p. 25
-11-
11 expér::l.enoe hmnaine (individuelle, sociale J technique, scientifique) ni exisrr'ci-t
(document écrit en particulier) en dehors de ceux utilisés ~ar lléducation
africaine trad1t1onnellell (1). On peut donc affimer, mutatis mutandi, que
l'histoire du livre en Afrique est très jeune et ctue son apparition panni 1e3
moyens utilisés pour l'éducation en général ne date que de la colonisation.
En effet dans l'Afrique pré-coloniale, l'éducation et llenseignema:,t,
des hommes sont le fait de la société toute entière considérée dans sa toix'"lli"cé:':.
L f ind1vidu n'ayant d1 e%istence réelle que par rapport à celle-oi. Il n'y n y[~
de formation individuelle telle que les structures de l'école moderne le par-
mettent actuellement. Les anciens, gardiens de la tradition et aussi du saycü'
et de 11 expérience, qu'ils soient d'ordre pratique ou ésotérique, sont les lJOilltc
de références vera lesquels se tourne tout individu désireux de se former. Ir.
comparaison en Afrique d'un "vieillard 'lui meurt" à une lIbibliothèque qui br-'\L If
e3t bien connue.
Dans le oontexte économique et social de l'Afrique Noire pré-colGnL~2,la formation en général et l'aoquisition de eonnaissances pratiques se f8.is[èi:....::~-':;
d t1.me façon harmonieuse et dans des structures sooiales bien détenninées et
a}"fLYlt chacune un r81e bien précis t clan, famille, classe d'fige etc ••• et
l\école telle que nous la oonnaissons actuellement c'est-à-dire un organisD2
d'utilité publique mise en place par une autor:l.té publique ou privée, parall"J.c
c·~ parfois en marge de la vie sociale, n'existe pas. Education et société t'or.: ~jl-t
un tout indivisible. "L'Education a:fr1ca1ne traditionnelle ne séparait jCJ11"1ü,:;
l'éducation (au sens large et actuel du mot) de l'instruction ou de llenseitç18~'
r.::ent (au sens préois et restreint) : ces deux aspects de toute entreprise d8
for:mtion humaine sont consta.m:nent et intimement liés" (2).
Ainsi donc le oaractère oral de la société africaine traditionnelle,
l;:LYlexistence sur le plan social d'institutions permettant aUII 1ndividus d'no-•••
quérir une formation et une éducation dlune manière pemormelle et autonome, 10
stade enfin du développement technique de ces sooiétés excluaient bien sOr
I t ut11isation des médias au aetlS moderne du terme.
S1 l'on fait abstraction du Coran et des ouvrages auxquels il a donné
naissance g~e à l'expansion de ltIslam en Ai'rique Noire et dont llu:tilisntion
en milieu populaire répondait à des beso:ins très précis, le livre en tant que
média, c'est-à-dire mo~en d'information mais
sens général, ne sera que progressivement
11 enseignement de type occidental.
aussi d'éducation et de culture
répandu en Afrique et/le biais
Histor1queme:nt jusqu'au début du XIXè siècle, les Européens ne pénè-
trent pas profondément dans llintérieur du continent africain. ~:Ueurs oontacts
avec les africains eu lieu essentiellement dans les comptoirs disséminés le lŒ'-,#:
des oStes oÙ S1effectuait la traite, que celle-ci ooncerne les hormnes ou les
marchandises. Pendant deux: siècl~ 11actuel territoire du Sénégal, ne sern
qu'une t'concession rpyale" (1) exploitée depuis la métropole par des compagniGs
comneroiales, comme la Compagnie Normande ou la Compagnie des Ind~s et dont lc.s
établissements principaux se trouvaient à Fort-Saint-Louis du Sénégal, dans
l'Ile de Gorée, au Fort-SaiJlt......Joseph en Galam, à Rufisque, Joal, Portudal et
Albreda pour ne citer que les plus connus. Les marchands Dieppois ou Bordelai:::
de l'époque ne slinqtl.:i2ta1ent guère de lléducation des autochtones et meme lIdo.n.s
les groupements christianisés dès l'occupation portugaise, principalement à GorGe
et à Saint-Louis, il n1y a avait pas de traces dlun enseignement plus ou moins
organ1sé" (2).
A partir de 1800 commence la deuxième phase de la oolonisatian c' ~st-
à-dire oelle de llexpansion et de l'ocoupation progressive et systèmatique de
llintérieur du pays. Celle-ci supposait éviderrment une organisation administra-
tive dans la colonie m@me. Ce qui nl~tait auparavant qu1une tene inexplorée et
•••
(1) DIARRA (Mamadou).- Le Sénégal conceSsion royale, Histoire de la. oolonie.
Dakar J Nouvelles Editions Africaines, 1973.- 71 p.
(2) GAUCHER (Joseph).- Les débuts de l'enseignement en Afr.l.que francophone: Je[",-"].~~oet l'Ecole mutuelle de Saint-Louis.-Paris,Le 1i~africain, 1960.-199p.....
-13-
liVTée à Q.uelques marins et soldats se
taire dépendant de l'administration métropolitaine et gérée par ses représcnt8.r~ts
officiels. 1I Avec le traité de Paris du 30 Mai 1814, prit fin l'histoire du
Sénégal en tant que conoession royale sous llancien régime. A partir de cette
époque, C 1est une autre phas e des es :relatians avec la Frunce qui c ommencc :
cene pendant hqueIle on va i t se transfonuer très rapidement c e qui n' étti t,
selon Picard, qu'un simple établissen.ent d 1aventuriers , en un centre 1rnportm~t
de commerce et de civ11isationll (1).
la prise en lll,?.in et l'organisation officielle de la oolonie par 1<':1
nétropole s ara à 11 origine de l' instaum.tian à:' un eru3eignement occidental, d'uce
-.r~"""'~1 part au nom de la. prétendue mission civilisatrtce, et d1autre part/drOrdre pure~
ment politique et pratique. En effet, si au début les fonctionnaires e~ agento
coloniaux viennent de la métropole, progressivement la nécessité d'utiliser des
indigènes se fera sentir dans certaim3 domaines, notamment celui de l'ad=ii.rustrr,-
tian des servioes, aussi bien publics que privés.
"Devant la nécsssité d lun encadrement des indigènes par des auxilic.irfJB
autochtones dans les rouages de J.ladEJinistmtion coloniale se pose le prcbll';~:c
de leur formation et par voie de conséquence, celui de le. création d'un enseigno-
ment colonial"(2).
Llécole sénégalaise na!trn de ce besoin d'auxiliaires dans' l'aà.r:J..ilü.s-
tration coloni~e. le première institution scolaire de type occidental sera
ouverte le 7 Mars 1817 à Saint-louis par llinstituteur :français Jean DARD. A
partir de 1841 et jusqul~n 1903, l'::tnatruction publique au Sénégal, précisément\
à Saint-Louis, Gorée, Ru1b.sque et .Daknr sera exclusivement tenue par les frè:lres
et soeurs des congrégations religieuses : Frères de Plogr.mel et Soeurs de SQint-
Joseph de Cluny. Cependant il faudra attendre la mise sur pied et llorganisatic~'_
du Gouvernement Général en 1903 et les réformes de llense~ement qui sien SlU-
virent pour voir le l1vre, ~tre utilisé dans les écoles de la colonie et sor~ir
•••
J •
,-14-
du cadre strictement confessionnel dans lequel l'avait enfermé les instituteurs
et institutrices congréganistes, moins dans une perspective de f'onnat1on et
d'éducation que par esprit de proselytisme.
"Auparavant, lléoole maternelle bomait ses ambitions à llenseignec;wnt
de la lecture, de l'écriture et des quatre règles; il le faisait sans li'VZ"es et
ne nécessitait que des tableaux de lecture Il (1).
Après 1903 les d1ff'é~e8 réformes stattachèrlint à la'loiser l'er.s(ü-
gnement et les prog:rommes scolaires et ceci dans un esprit républicain. "Les
manuels visés étaient••• surtout des livres de lecture, car les frères slobsti-
naient à employer à cet usage des livres de piétél' (2) ..
On peut raisonnablement e.ff1m.er que c'est à partir de cette date, 1903,
que le livre, en tant que véhicule d'une idée et moyen d'accès à la culture et
\
à ]a réflexion :personnelle pénètre dans le milieu sénégalais, une minorité oerti;;!s,
par l'intermédiaire de la scolarisation. Cependant, nous avons bien souligné
le caractère utilitaire et ponctuel de cette scolarisation, et il serait illu-
so~_re de lui donner une dimension autre que celle que Itri ass1g:na1t ses proLlO-
tGU~. Il s'agissait essentiellement de former au niveau de l'enseignement
p::imaire, des oi'ricains capables de déchiffrer la langue française pour las
besoins de l'administration coloniale dans BBS relations avec 11 Qnsemble dG ses
rulm:!.nistrés. A ses débuts l'enseignement ne formait donc que des inteJlmédiaires,
et non des citoyens, qui gr€ce à l'enseignement auraient eu la possibilité de
s'épanouir intellectuellement. "L'école à ses débuts, alJant au plus pressé,
devait uniquement former des aUXiliaires a:fr1cains auxquels l'on demandait pou
en conséquence : savoir et pouvoir surtout distinguer un imparfait de 11 indic!"'.ti::' ,
dfun imparfait du subjonctif, pour la traduction exacte de la pensée du blanc.H
Une fois les éiiudes achevées, ils rangeaient les livres, que l'école ne leur
avait pas repris. Pas 1me seule oeuvre post-scolBire qui puisse inciter ~ J'
l' éi;ude" (3) •
(1) BOUCHE (Denise) • .,A.ll~.li!eto1s notre pays slappela1t la Gaule :-Rema.rqUcs S'LU'( lIadpatation de l'enseignement au Sénégal de 1817 à 1960. In Cahiers dlétu~~8.s
africaines, nO 29, vol. VIII.- Paris: Mouton et Co., 1968.- p. 110-112
(2) BOUCHE (Denise).- ibid.(3) DADIE(Berna.rd).-"M1sère de llEnseignement en AOF".In Prés..Afr.Déc.56-J2l1v 57,
pp.57-70.
./ -15-
Le livre n'était donc dans un tel contexte qu'un instrument scolaire
très sommaire conçu pour des populations considérées sans culture et sans passé
et auquel peu d'afriC3i.nS avaient accès. Tout au plus se réduisait-il à des
syllabaires et à des livres de lecture élémentaire, le niveau d'éducation ct dL
formation des quelques rares citadins alphabétisés ne leur permettant pas de
continuer à slinstruire,encore moins de leur donner le gant d'une lecture régu
lière. Pamllèlement à cet état de fait il faut noter à cette époque 1'1:Q.existerLC6
des auxiliaires sociaux-éducatifs de l'enseignement en particulier et de l'édu
cation en général tels que 1 bibliothèques, centres culturels, maisons des je1JD8S
etc ••• qù les Africains au sortir de l'école auraient pu développer leur capacité
intellectuelle et continuer à se oultiver. Cette carence était bien dans la
logique de la politique éducationnelle de lr adm1n1stration coloniale, malthusie'- 'C
et assimilationiste à souhait.. C'est dire que les quelques rares alphabétes n:-':;;_
baient très vite dans l'analphabétisme faute de livres qui leur permissent de
développer et d'enrichir les acquis reçus pendant leur intruct10n élémentaire.
Dans le domaine des bibliothèques la situation générale est identique.
En remontant dans le temps il semble que les premières bibliothèques
organisées et relevant dlune autorité qui furent créées au Sénégal l'ont été rlarn
le cadre de l'année coloniale. Le seul texte officiel que nous ayons retrouvé
et concernant l'organisation et la mise sur pied d'une bibliothèque durant la
colonisation est une instruction ministérielle "sur llorganimttion et le fonotion
nement des bibliothèques d'officiers aux colonies" qui date du 18 juin 1930 et
qui stipule que "les bibliothèques d'officiers sont instituées pour servir dE
centres d'études aux officiers et assimilés ~ant rang d'officier" (1).
L'année suivante un rapport de Paul Reynaud, m1n1stre des colonies et
André ]{JBgUlOt, m1niatre de la guerre, estime I1 que les résultats déjà obtenus •••
imposent de soutenir et favoriser ces organisations et à cet effet de leur dom~~~-
•••
(1) Bulletin Officiel du ministère des Colonies.- 1930.- p. 957
-16-
un caraotère offioiel en les transformant par arrtté ministériel en cercles
mili taires ou bibliothèques coloniales de garn1son" (1).
Le decret sur "l' organisation des cercles et bibliothèques mili taîres
aux coloniea ll (2) date du 11 septembre 1931 et llarr~té ministériel" portant
création dlun cercle militaire dans les ga:misons de HanoI, SaIgon et Fort-de-.
France et fi.xant la liste des bibliothèques coloniales de garnison aux co loniesJ (3
date du 18 novembre 1SJ2. Saint-wuis, Thiès, Rufisque et Kaolaok en ce qui 00:.--:
ceIne le Sénégnl figurent sur la liste, comme villes de garnison 8J"ant uni'
bibliothèque coloniale. Les deux premières seront classées comme principales
et les trois autres comme seoondaires.
Bien entendu en tant qulinstitution .militaires, il était exclu que 1,-:,
civils puissent y accéder, mais on notera cependant qu1elles étaient strtcteGG:':',
réservées aux "officiers et ass:l.milés ll ayant rang d.officiera lt et que les sol., .i;>
sénégalais qui formaient le gros des troupes n1avaient donc pas accès au liVE.
Les autres bibliothèques qui furent créées par la suite au Sénégel
furent des annexes dl établissements scientfiquea
tels que 11 Institut Français d llU'rique No~re crée
fondée en 1872 à Saint-Louis (4).
ou de propagande cultur8118~
en 1936 ou l'Alliance Frru:~;;,'.i:_~
Là, point de lecture publique. Ces quelques bibliothèques nravaient
pas . 'té mises sur pied pour servir les besoins de lecture des masses popul~dro~
de la. colonie, muis étaient destinées au personnel expatrié de l' admini.stmti:J':_
coloniale ou aux utilisateurs des centres de reoherche.
Cette carence est Mie non seulement à un système scolaire ne favorie'".:: -L
nullement le got1t de la lecture mais aussi et surtout à l' esprit dans lequel
avai t été institué un enseignement de type occidental au Sénégal r à sa"9oi1'
produire essentiellement du personnel apte à remplir des t~ches prattQ.w.as dBLS
..-Bulletin officiel du ministfaèdes colonies.- 1931.- p. 1645ibid.- 1931.- p. 1647ibid.- 1932ZIIOUEMBA (Dominique Hado).- Répertoire des bibliothèques et organismes (~,'documentation au Sénégal.- Dakar: Unesco, EBAD.- 1973.
-17-
l'adm1n1stxat1on. ''Rassurez-vous, dit le Gouverneur général William Ponty, drulS
son discours d'ouverture du Conseil du gouv-emement, en décembre 1908, 11 n'entre
pas dans ma. pensée de multiplier les établissements donnant autre chose qu'une
instruotion pr:lmaire très simple. Il faut, en effet, prendre nos populations nu
stade où elle en sont de leur évolution. Apprendre à llindigène notre langue, 8,
la lire, à l'écrire, lui inoulquer quelques rudiments de calcul avec quelques
notions de morale, c'est suffisant pour le moment. Ces dOlU1ées, 11 peut les
recevoir dans les éooles dirigées par des ma!tres indigènes. Une fois qu'il les
possède, llenae~ement doit, pour nos jeunes indigènes et en dehors d'une élite
d'tme culture plus élevée qu'il sera de notre devoir d1encournger, devenir et
rester pratiquelt (1). Cette longue citation résume clairement la philosophie qui, '
guida les promoteurs de l'ense1gnement en Afrique Noire en général, qui repos~it
sur un refus systèmatique et organisé de permettre à la majorité des ressortissC-.:.,--;;;::;
des colonies de pouvoir acoéder à Ifensetgnement par l'instauration d'une poli-
tique malthusienne en la ma.tière. En somme jusqu1à une période très récente et
encore postér:l.eure à 111ndépendance, il serait vain de chercher la trace quelcon
que d'tme politique systèmatique du livre au SéDégal et à plus forte raison d'un
réseau struoturé de bibliothèques.
"Ia situation des bibliothèques est à peu près la. m@me dans les dif-
férents pays. En général, il y a dans chacun d'eux une"grande bibliothèquell
territoriale qui était à llor:igine la bibliothèque administrative du gouvememe..'1t
local de la puissance coloniale. la gestion de ces bibliothèques a été confïée
ensuite à des organismes scientifiques tels que l'Institut Fondamental d'Afriqu8
Noire et Bes centres locaux, pour les pays de l'ouest af'r:1cain (y compris le
•••
(1) Gouvernement Général de IJAOF. Colonie du Sénégal.- Rapport d'ensemble sm lr~situation politique, administrative, f1nancière et économique et sur lefonctionnement des divers services pendant l'année 1905.- Saint-Louis: ir.:.p;.:'.du ~ouvemement, 1906. Cité par Denise Bouché, in Caltlers d'Etudes Afrio<:W".',:E.nO 29, vol. VIII, p. 115. -
-18-
et le Tog~ (1 ). Fn conséquenoe , hors du cadre élénentaire gt éphémère de 1 f éco18 j
où le livre avait un caractère acoessoire, les sénégalais n1eurent jamais les
moyens de parf'a.1re et de développer ses connaissances. On peut donc ai'finner
que s1 la colonisation a introdUit un ense1guanent de type oooidental fondé 8J."1
partie sur le livre, ce dernier par oontre n'a jamais pénétré dans le• .r::d.llGU
af'r1ca1n.
Le développement de 11 €IlBeignement .cra.- o.et.?OEl~-bi:en eth- pQ:a. .u:lC
amélioration progressive de la qualité des livres soolaires, cependant les leo-
tures des élèves resteront tributaires des programmee soolaires. De m3me les
résu1tats des recherohes lingUistiques sur les langues sénégalaises publiées [tu
cours du XIXè sièole sous fonne de traités ou de dictionnaires notamment ceux
de la congrégation des pères du Saint- Esprit à Saint-Joseph de Ngazobil, pour
méritoires et précieux qu'ils soient, en dépit de leur manque d'assise scienti
fique, n':tnte.l'lJSse:ront jamais qu'un oerole de 8péoialist~ou de ooloniaux désireux
des t 1n1t1er aux: langues afrieaines, non pas pour une étude précise et ob j eot!ve
de ces l...-..uguca. dans une perspeotive de reoheI'<'he scientifique, mais essentielle-
ment pour des mï.SOnB de prosé:Iytisme qtdil soit religieux: ou simplement profu1e,
mais aussi pour servir les ambitions académiques de certains ehe~heUXl" e1ID:)p6ec:.s.
Dans un paye vivant encore presque exolusivement selon l'ancienn~ société traùi-
tiormelle, le livre durant la colonisa"tLon ne concerne essentiellement que les
européens, pour des raisons à la :fois politiques et sociales qui relevent dG l?
poli t1que offioielle d t aaa1milatian des peuples colonisés. Sa pénétratian de!] s
les milieux autoohtoneS sera ruiné par le système éducat10nnel de l répoque mni:J
aussi par l'utilisation d'une J...angue étrangère dans un milieu quasiment a.nc.lp1:lr'.
béte. lit école des landemaln.a de llindépendance sera l'héri tière de cette situf'.. •• ,
tion •
(1) D.A1lZIE (Ennnanuel W. Kwakuvi).- "Les bibliothèques, la bibliographie et l2sarchives dans le pays d'Afrique dl expression française ll • In : Bulletin d,::l'Unesco à l'intention des bibliothèques.- vol. XV, n05, octobre 1961.- ;.2~5
-19-
Le passage à une soci$1I& de type industriel, oaractérisée par Ituti-
L~.sation de technologies modernes de développem~pourune société dont les
structures socio-économiques internes avaient été fortement bo~eversées durar,-t
la pétiode coloniale au prof!t de la puissance colonisatr1ce, eXigeait, au
lendemain de l'indépendance, de lutter contre les séquelles du colonialiSL1e \ll.t'.::
constituaient, la maladie, la faim et l'ignorance af'in de jeter les bases [lu
développement économique et Bocial. Cteat ainsi que le premier plan sénégalais
rr,-~_;:; l' a o:.c ent suit sur "1.es secteurs direetement produo tifs" soi t "aur la f 0 rr.a-
't~1_on des hommes et la recherche expérimentalell (1).
Cette orientation des premiers planificateurs répondait sans doute
à ':~':1 sa:..:.cl dt assurer un décollage économique rapide du pays, mais il l'es te
C\u l c11e s; :L~2crivait dans un contexte po11t1que, économique et s ooial qui
'R,e;?'.'c:'lait pour 11 essentiel, une politique héritée de la colonisatian, et qui .:.8
t.owt.") f>C'"da:r t FaS aw réalités d11 pays. Part- conséquent dans presque tous les
dŒ:2-lncm, les prévisions des pJ.anificateurs ne seront pas atteint à la fin ùu
En ce qui concerne le seoteur éducationnel par exemple, les orienta-
~. Cl~(r:; générales des dU'férents plans de développement économiques et aoolllux
G;!::-"10:;"~C:T~j :L3. pr-lorité à l'ense1gnement. Le premier plan (1961-1964) prévoyait
, c('r,:',2,.::·J.,sa17ton "de plus de 50 %des enfanta d'âge seolairetl et lien suivaYJ.t
.' 0 =-'3""'vbme ~.qU:.f_S pendant cette première période, il sera possible d'obtenir
.:>< t"L:clJ.e ln. r8ali-~é est en deça des prévisions initiales, puisque à la fin du
'~'~:J:..2 :,:_:.me pla'1, le taux descolarisation était ea timé à 35,2 %(3). Ce ohif'i're
r,,-,:'~~t:<,:C 8~:Ll en était besoin que l'enseignement et l'éducation en général tel
•••-- .-'.__.~----------------------------------
t-1} S1.NE.GAL.. Plan (1er). 1961-1964.- Premier plan quadriennal de développementr~ll~~iod~ 1961-1964.- Dakar, s.d••- p. 19
(~) ::'b::..d., pG 131 et 135
en S:::I1TEGAL. P:!.--9..n et Indu.strie(ministère).- Troisième plan quadriennal dedLvel0 pPp-J:l1ent économique et sooial 1969...1973.- Dakar, ministère du pla..'1. etde ~I mc1lt.3\;ne, 1969.- 346 p.
-20..
q'ct'il a été conçu et appl1qué au lendemain de l.'1ndépendance étaient inadapté
à la réalité sociale du pS\Vs et Be pouva1t donc que débouoher sur des échecs
Dans le domaine éducationnel toujours, en dehors des efforts faits
pour généraliser llenseignement à tous les niveaux, la création de maisons de
jeunes et de centres culturels ~urent jusqufau troisième plan, les principaux
au-xiliairea soc1auxo-o()ulturels de l'éducation en général. C'est ainsi que le
troisième plan prévoyait un investiasement de 52 millions de t'ranoe CFA pour
~!éducation populaire et culturelle (maisons et ~oyers de jeunes, oentres
(',ultul'els) sur un total de 8.665 millions réservés à lléducation en général
Certes des bibliothèques furent souvent 1n.13tallées à l'intérieur Ll.e
ces centres de loisir, maie elles ne S€l.'Q11t généralement que des embryons dG
b1blLothèques non organisées scientifiquement et souvent dirigées par un per-
sonnei ignorant les techn14J,uea de gestion des bibliothèques les plus élémen-
ta~_res, cu par;:'ois m&ne par des bénévoles, leur fond étant conati tué la plupert
d~~ temps par des dons venus de Ilétranger.
Ainsi aucune politique ne présida au développementei: à II organisation
de la lecture publique au Sénégal au. lendemain de l'Indépendance. "Les autorites
,'oihégalaises avaient davantage .m:1s l 1accent sur le développement de l'éducation
(j~ l~o:rgan~ationdes bibliothèques à souffert de nfavoir pas été incluse dons
:!02 plan de développement de l'éducation au sein du plan national de dévelop-
pament s0ientitique, éoonomique et social" (2).
En réalité le rele de la bibliothèque oomme moyen d'éduoation n'a
jamaj..s été perçu par les pouvoirs publics. L'importance du livre, en tant que
;"e::. et hors du secteur soolaire, fut toujours ignoré au profit d tautres moyens
d éducation tels qUe le sport, le oinéma et l'infonnation, e,erviita:.qu11..À lui
TTJSENEGAL.Plan et Industrie(ministère).-Troisième plan quadriennal de dévelop...v~t é'XltlOlll,j.que et a()Q.":J.l"Mn,,...ne"rrlll~Stè:t'e-<hL_plan et de l'in
il\b.~..~llt.)~~..... p. ~ et 262.
(2) BOUSSO (Aroado_u..--AJ.asaane)_ "Les bibliothèques au Sénégal l1 in Séminaire du-- l:1:vre-rs au 24 mare 1972_ supplément au nO 568 du Sole11.- p. 7
•••
-21-
.2",";' total1Bait 276,6 mjJ]i ons de franos CFA d.a.na le troisième pJ.1m, se l'épar'-
".,i.ssant entre la télévision éducative, la presse, la photo, les 1n1'ormatiol1S
:::'égionales, les fi tuaios, le œ:tér1el t eahnique ete... et ,',C 52 millions pour
:'.- ! éducation populaire et culturelle (maisons et t'oyers de jeune - centres
,:ulturels)1I (1). Aux yeux du planif'ioateur, investir le développement de la
lecture nIa jamais été un investissement rentable, du moins à court terme.
D1 autres priorités s'imposaient dont les résultats étaient censés ~tre plus
tangibles économiquement tels que les industries eu le COImnerce.
Quant aux: bibliothèques les établissements d'enseignement secondaire
ou prima.1re, elle n'ont jamais été intégrées dans lléconamie m&1e de 11école,
elles S~ résumaient et Be résœent encore de nos jours, lorsqu1elles existent,
à de simples Itannoire$ à livres" dont la olef est le plus aoUV'ent détenue par le
o-.u.ve:Ula.nt ,général ou l'intendant de l'établissement soucieux avant tout de
les soustra.i:re aux dépmdataure que Bont les élèves. OI' "la bibl10thèque sc<:>ol.&i t"B
paT ses livres, ses :revues, ses activités d 1a:c.1mation, par les moyens audio
Vi '3Uels , peut @tre l'instrument par axoel1en~a pour 11 éduaation de lladoles-
Le livre S901aire Mnstituera, d 1ailleurs dès apI'ès 1 1indépendanoe
,;:;''1e source de revenus 1mportante pour les éd!teurs français. LI enseignement
1~U.f ~14(,:.~ ,:10 fai.sant en fTançais et les etruetures éditol"iales n1existant pas',le Sénégal
:-:lIDlne 10. plupart ·des pays af.:t:1aains francophones, sera un grand importateur de
(I; ",A .,M.) (3), repréaentant les deux tiers d'a ma.;r.hé 1 ..e s ont dans 11 oIdre de
va.l.~1,.U;' pour 1964 1 la Oete d'Ivoue (18,3 %), le Sénégal (17,1 %), Madagasoar
(15,4 %) et le.lhmeroun (10 %). Les trois~ d'Afrique 1 Cete d.Ivoire,
Sénégal et Cameroun, re~sentent ensemble la. moitié du marché" (4).
Si en 1964 1e Sénégal a importé 625.725 livres scoJ..a1res pour une•••
4
(1; SENIDAL.. Plan et industrie (ministère).- Tl'QiSième plan quadriennal dedéveloppement économique et sooial,- p. 257, 260-261
(z) NDIAY.E (Théodore).- t1Misère des bibliothèques sénégalaises ou le paradoxede l'école sénégalaise" in BLIBAD : bulletin de liaison à l'intention desp.i?lint.héoaires z a.rchivis tes et documental1êtes af'ricains ",- n & 1, j a.nv.76 ,P.4
()·" ..:','_,f:;.l~~r..œ.ins et lJa~aohes 4
"~/,) In diffusion du livre fran 1 Marcomer, 1965.-Tome l : enqu tes auvrÈS des
-22-
population Boolaire de 202.500 cUèves (étudiants non compris) soit une moyer,ne
de 3,9 livres par enfant scolarisé et se plaçant en t~te des E.A.M. (1), ceci
répondait à des besoins bien précis et s'inscrivait dans ce vaste effort de
soolarisation qUi a été l'une des préoccupations majeures des planifioateurs
sénégalais au lendemain de llindép\Ulclance.
Cependant oet effort n'a pas créé des habitudes de leotures chez les
nouveaux scolarisés. Après llir~dépendance, la poUtique éducationnelle du
Sénégal a été centrée sur l'alphabétisation au détriment des autres moyens
d 1éducnt1on. Le livre a donc toujours été oonsidéré dans une perspective
didactique, et les jeunes alphabétisés, ni avaient pas les moyens, hors du ctl'::'re
scolaire, de développer leurs connaissances. Faute d tune véri. table politique
sociale du livre, les bibliothèques publiques et soolaires firent cruelleID81'lt
défaut. Pourtant, sans atteindre tous les Sénégalais, puisqu'en 1963, 35,3 ;~ ~_f:,~
Sé:2égalais seulement étaient sool.arisés, le livre avait déjà un public qui Ee
situait entre 1l110.000 et 150.000 lecteurs potentiels et 16 000 à 23 000 ache-
teurs potentiels pour l'ensemble du pays, dont le tiers se trouvaient dans la
région du Cap-Vert" (2).
L1augmentation de la population dea ~teure poteutt.e1D est dl1c,rlo'JS
semble-t-il,à la conjonction de deu:a: facteurs, le développement de la scolari-
sntion et par contre ooup l'augmentation re18.tive certes, m.ai.s notable.,;cu
nombre de lettrés, ofest-à-dire d t i...'1.dividUS cap.:.'1.bles d l aCcomplir des aotes c'.e
lectura autonam., d'une part, et dfnutre part l'insertion progressive des
:uédia modernes dw..s llenv1xOlUlement du Sénégalais moyen qui. dans le cas du
Ison livre se traduisit par /lntroduation progressive dans les milieux
les plua divers. En 1964...1965 en dehors des librairies cJ.assiques, Pr1ntanin
disposait de 7 suocu:rsales possédant un rayon "librairie", dont 3 à Dakar et 1
•••
((1) :ra d.i.Mll<tdl! du livr. ~o. en· Urtque-No:u.;;,..:Paris llarcomor, 1965.
fono'! ~tes auprès des éditeurs.- p. 24(2) le. diffusion du livre français an Af'rigue No1re.- Paris : Marcomer, 1965.
T. II ; Analyses dooumentaires.- p. 82.
-23-
dans ohaoune des villes sui.van:tes : Kaolack, Saint-Louis, Ziguinchor, Thi8S. ~----Il an est de m~e de la sooiété "chaine Avion" qui disposait de 60 points GO
vente de livres répartis sur tout le territaire ruitional (1) sans compter les
étalages des bouquinistes proposant à m0me le, rue, tout une gamme d'ouvrages
tlllant du livre de leoture élémentaire aux romans policiers. Pour les citadins,
le livre était devenu un objet courant, que l'on pouvait trouver aussi bien
dans las librairies que chez les .marchands de jOUIba:UX. Il faut cependant
préoiser que si le livre éta.,1t devenu plus access.ible, il n'atteignit pas
touteS les couohes sociales. stant un produit qui se vend, le nombre d 1aohe-
teurs potentiels était de loin ini'érieur à oelui des lecteurs potentiels. En
1960 sur l'ensemble de la popu.lStion capable de lire, seuls 14,6 %avaient
les moyens de s'acheter un livre pour des raisons éVidentes de pouvoir d'achc.t.
Ce besoin de lecture au niveau d'une oertaine t'range de la popuJ..ation sern
patiellement pris en charge, face à 11 inexistence d'infrastructures nationD.18s,
par certains pe.ys qui entretiennent des relations diplomatiques ou consu1Bi1"œ_
avec le Sénégal, en créant des établissements finanoés, organisés et contrôlés
par leurs gouvernements.
C' est ainsi que très t6t se créa, particullèrement à Daka.r, un résc:'-u
de bibliothèque dans le cndre des services culturels des ambassades installées
au Sénégal. la première a été ouverte er. 1954 pa.r le consulat des Etats-Unis
D'Amérique et, en 1962 la bibliothèque du centN culturel français devait,8110
aussi ouvrir ses portes.
Ces deux bi.bliothèques j les plus anciennes et les Iilieux structurée:z
en oe qui concerne lu leoture publique à Iakar ont précisément fait l'objet
de notre présente enqu@:te.
Elles furent et restent encore de nos jours les seuls établissements
qui g~ce aux moyens matériels et hunlains mis à leur disposition ont pu orga-
•••
(1) I.e. diffusion du livre .:çrançuis --en Afrique Noire.- Puria, I\brooner, 1965.Tooe II. Analyses docunentaires.- p. 83
-24-
C\1_se~ ~il1J,.ement un-système da leeture publique dM..s la région du Cap-Vert ett
~_rt1culier et dans les autres régions dlune manière/systèmatique. Elles ont
permis dlune certaine manière de pallier l'inexistenoe d1un réseau officiel dû
bibliothèques publiques au lendemain dG l'indépendance, mais leur action rest....
relativement l1mitée pour des raisons que nous verrons plus en ûétail dons le
dépouillement de 11enqu~te. En somme lice quî frappe C:,!? c'est à la fois
l'absence d'une politique d'ensemble ,t la situation privilégiée des intelleQ
tuels ou des spéoialistes. Seuls les centres culturels, et pas tüujours avec 18
souci q1i.'ils méritent, ont fait quelque effort pour s'adresser à un large
publicl! (1). Du point de vue di l'histoire de la lecture au Sénégal, l'époque
post-coloniale nia pas apporté de changements notoires par rapport à la situcc
tion antérieure. Le livre nia pas encore réellement pénétré dans tous les
oilleux. De m&1e que l'instruction, le livre ne concerne qutune minorité relO'
treinte. la lecture publique n1est pas encore une réalité populaire au SénéC':":.!.
Si le liVTe en tant que média a vu son audience s'accroitre il le doit non ras
à U 1 (' ~olit1que nationale systèmatiquc de la lecture à tous les niveaux qui.
serait intégrée dnna le plan général de l'éducation, mais au développement dG
lt 8nsGignement, à la diversifioation des poi.n:ts de diffusion, le livre devQl12..1l.t
ainsi progressivement accessible è un plus grand nombre de lecteurs potentiels,
et enf'in aux irlitiatives de Cluelquea organ1smes privés qui depuis Dakar et L,
région du Cap-Vert tentent d'organiser un réseau de lecture publique au Séno5:ü ..
...
'J.:HOMAS (Loui..s...-Y-inoent).- I1Les fonctione eulturelles" :tu Dakar en dcvenir.-
l'""BS~Mr:l.c., 1968 p. 165.
-25-
II! Les Bibliothèques de .Delœ.r
1) I.e région du Cap.Vert et Dakar
ra régicn du Cap-Vert, située dans la presq':lt!.le du m&1e nom 8St Ul".e
des huit régions adm1n:istratives du Sénégal. Elle constitue la pointe occidcn-
tale la plus avancée du continent a.fri.cain~ .celle à partir de laquelle la
~~vi1isation occidentale dès le XVè siècle pénétra, sur llactael territoiro du
S6négul par l'intermédiaire de la colonisation.
Ce ntest en t'ait qu'en 1857 que les Français S'installèrent sur CG
p:ro:n.ontoir rocheUlC qui. allait devenir la capitale du Sénégal au détr:iJnent de,
Gorée qui lui fut longtemps préférée. par les marins Hollandais, Français,
xor~U[;s'is et .Anglais à cause de sa bonne mde, llGood readn devenu Gorée, .. t (\,1
caractère fzci1ement défensif de son site.
L'histoire de la croissanoe de Dakar va de pair avec le dévelo~pt!:lG-~_'c
progressif de 11appareil politique et administratif de la colonisation. 189G,
OA~~ devient un point d'appui pour L..... marine française et voit son port pr8~lô.rl:
cle plus en plus d l importance. 1903, le siège du G"ouvernement (}énéral de 111..:Crique
o~~identale française est transférée de Gorée à Dakar, qui devient alors la
ç~pitale politique et économique de l'Afrique française dans cette partie du
continent. L'actuelle capitale du Sénégal voit converger vers elle h01IlL1es u"'.;
b~"ons, qui elle redistribue vers son i..ro.mence arrière pays. Capitale dl empire,
D~}rRr voit sa population augmenter S8_~S cesse, et clest ainsi que de 1921 ~
î961 sa population est passée de 32 500 à 374 000 habitants. Véritable "vill:3
c~nmpignonll selon l'expression de AssMe Seck. En 1957 le centre administmtif,
culturel, commercial et industriel de lfex A.O.F. devient ln. capitale du
Sénégal en supplantant Saint-Louis. "1..insi Dakar était devenu la t~te de t'ile t
Jn métropole incontestée, dont dépendait un ensemble régional beaucoup plus
veste que celui de Paris. Cette fonction de métropole qui siest affirmée dès le
construction du port de commerce, a précédé et conditionné à Dakn.r le dévolo:p-
pc.:nent de la ville" (1). • ••
(A) st.~(~.- De.kar.- in : Travaux du dépari;emeni;.cle~"\li!li" 9 ..éj.d. p. 12.- Université de w..kar 1 Facult6 des Lettres et Sciences Hu,.ra:_c;[:.
19.t1on essentlll.ement oonstituée d'africains,
•••
Le arand-Dakar, au nord-ouest de la Médina, z6ne d'extension relati-
Le Plateau, centre de la. oapitaJ.e, des affaires, du commerce et de
1
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Le Grand-Dakar constituant la lmite ex:t~e de la ville, la banlieue
et de nombreux espa.ces insalubres est un véritable bidonville, où vit une popu-
déguerpir les indigènes du plateau à la. suite d'une épidémie en 1915. Relative-
de la presqu'lie. C'est un quartier typiquement européen. le Médina, créé pour
mont étendu, 08 quartier par l'absenoe d'infrastructures urbames, l'existence
11adm1.nistrat1on qui siest bl\tie autour du port et occupe toute la pointe sud
Entre ra Médina et Grand-Dakar, se trouvent les quartiers résidentiels
1 J;',]:Jorvés aux haute t'onctiormaires, diplOmates et ministres 1 Fann-Résidenoe, 18
1 Q·,.w..1."'tier de l'Université et le Point El
1
1
d~ltaro1ae est constituée nord-nard-est soit par d1anoiens villages traditiotlllels1
1 d,!Vonus des quartiers: Yoff, Ngor, Cambérène, Thiaroye, Mbao,soit par de nou-
1 vulles agglomérations, véritables bidonvilles, 1aaus des déguexpissemenÏl suc-
1 c!ssi:fs opérée dans la ville m&1e J P11d.ne, Guedie~e, Grand-Yoff, Khar-Yalln,
IG-:ra.nd-Médina. Il Tous ceS quartiers où alentassent des gens aux: revenus faibles
-26-
Vérttab1.e pOle d'attmoti.on,la ville a-étend progressivement dan.s le
IYO::.~ :inexistants, essentiellement tournés vers Dalm.r. t'arment avec Rufisque et
1"'<-ugny-3::[agglomérati.on d.a.1œ.:r'ois e •
Du point de vue structl.U'ella eaP1tale ooncentre la quasi totalité de
IU ':3 :fonctions dans 1.e quartier du plateau, mise à part la zone industrielle ct1
Ile port.
1 ].ê.lS éqUipements oollectit's sont quasi 1ne:ld.stants. Le Grand-Dakar est le cas
1 ty;piqu8 Q'm1e o1té dortoir que ses bnbitants désertent chaque jour pour se
1 ~-endre lien tilleu•
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1 vement récente puisqu1en 1951 la ooromune de !ElJœ.r Bta~tait à la Médina. IE
1 Grand-\Dalœ.:r est constitué par divers quartiers, SICAP, H.L.M., Ouagou-Uiaye,
1 Derklé, Fann Rock, dont les fonctillnS sont essentiellement résidentielles et où
1 .':'ens sud-nord 'par la oréation de nouveaux quartiers.
-27-
Lee fonotions éduoat1ves et cultuJ!'ellos de Dakar nous se:rvirons
/ln ville d'exemple pour illustrer la plaoe prééminente de lQ.»égt.on;:.t&Vpar :rapport au
reste du Sénégal. Quelques chiffres pourront mieux nous aider à si tuer l'impor
tance de ce domaine d61113 oette partie du Sénégal. "Environ 30 %de la populatior:.
(23 %en 1960) vivent dans les zones urbaines dont les villes les plus impor--
tantes sont Dalœ.r t 570000 habitants••• le taux d l acoroissement démographique
(naturel et migratoire) de Dakar, qui groupe 14 %de la population est estimé
à6%"(1).
En oe qui conerns la struoture des ages, la population dakaroise est
relativement jeune, puisque 40 %de celle-ci a. moins de 15 %.
Sur le plan éduoationnel, De.kar et la région du Cap-Vert Bont le
centre nerreux du Sénégal. IlIe. région du Cap-Vert regroupe à elle seule plus du
tiers des olasses et élèves du Sénégal t 30 %pour les premiers ct 33 %pour les
secondes. Le nombre d'élèves par olasse y est plus élevé que dans les autrGs
régions et il y est m&1e plus important que la moyenne nationale" (2). Clest
ainsi qu'en 1970 1160,6 %des enfants de 6 à 14 ans allaient en classe dans JE.
région du cap-Vert pour tme moyenne nationale de 30,9 %(3).
Si depuis l'indépendance, des écoles, collèges et lJoées se sont ou-
verts dans d1autres régions 11 reste que Dakar est à Ilhel.U'e aotuelle le cGntre
intelleotuel et culturel du pays, par la richesse, comparntlvement au reste du
pays, de ses infrastructures tant du point de vue matériel qu1humain.
Malgré cela l 1augmentation de la population soolaire n'a pas développé,le gotlt de la leoture en milieu alphabétisé. Un sondage effectué parmi les
lycéeœ de Thùœ.r (4), montrent que chez les jeunes les loisirs à dominonte
"culturelletl oocupent une place restreinte. En effet, sur un éventail de lolsi:rs
•••
(1) SENEGAL. Plan et coopération (.min:istère)._ IVè plan de développement écono..mique et social. 197.3-19'n.- Dakar : Nouvelles Editions Afr.Loaines, 1974.p. 13.
(2) SENmAL. Finances et Affaires Eoonomiques (ministère). Statistique (direction) .-Situation économîque du Sénégal.1971 ... Dakar 1 m.1nistère des finances~t des affaires ~conam1ques, 1972•• p. 12
(34
) ibid. p. 14( ) FL!S-ZONABEND (Françoise)._ HYcéens de Dakar.- ParislMaspero,1968.-p.84 ~t
113.
-28-
qui leur était propOB~, seuls 9,7 %des sujets interrogés déclaraient pratiquer
la leoture comme loisir, et 3,5 %consacraient \IDe partie de leurs maigres res-
sources à l' aohat de livres. le leoture n'es t donc pas à prenière vue une occupa-
tian qUi tient beauooup de plaoe ohez les jeunes aénégaJ.a1.s. Ceci, pa.rce que
d ' me part le livre est encore resté éo.1nement scolaire et utilitaire et dlautre
part parce que les in:frastructurea doc'UD.lillta1res en généra.l nient pas suivi le
dévelop:pern.ent de la soolar1sation. S111 existe \ID réel besoin de lecture au niveau
de jeunes. c elui-ei n'a pas "besoin d t 8tre réveillé, LIais orienté" (1).
2) Le réseau dooU1l.enta1.re à fukar
En dehors de Saint-Louis, ex..capitale du Sénégal qui a eu quelques
b1bliothèf,lues durant la. 8oloniSation , oome celle de 11 ex-oentre IFAN, devenue
aujourd !hui l'unité de doementat1on du Oentre de Recherches et de Docw.entation
sur le Sénégal, rares sont les vU~es du Sénégal, à part Dakar, possédant aujourd 1
m.rl. une ou plus1eurs bibliothèques dignes de ce non ..
En 1973 il existait au Sénégal 124 organismes de dOCULlentation au sens
large du teme (b1bliothèllues, dépets d1archives et centres de docUI!lentation)
Cl est.à.-d1re des ~tabl1ssements publics ou privés plus ou LlO:ins autonomes et dont
le rOle est de mettre à la dispoe1tion dl un utilisateur dormé lIDe oertaine quan
tité d'infOImat1ona sous fonne imprimée (ouvrages, péI'1od1ques) ou sous t'orue-
audio-Visuelle (disques, filma, microfiches, miorofilms etc.) et ce pour satisf'aire
soit un besoin de loisir soit ln néeesaité d'une information et dlune fo~t10n
personnelle.
Sur !las 124 établissevents, 13 sont situés hors de Dakar, principalement
à Saint.LoUis et à Thiès, 54 possèdent une bibliothèque plus ou moins organisée
et seulement 20 organismes déclarent se consacrer à la lecture publique, dont
17 à Dakar et seulement 3 à.anS les autres régions du Sénégal: centre social de
.....
•• • • • •
MBour, foyer culturel de Podor, centre culturel africain de Thiès (1).
On poura.tj; croire, à la lecture de oes chiffres, que Dakar et la
région du Cap-Vert Bont bien dotées en bibliothèques de lecture publique, le
chiffre de 17 établlssements étant relativement important pour une ville du lB
dimension de Da,Jar, comparativement au nombre de personnes sachant lire et au.ss~
I p2U en regard des habitudes de lec~~Cependant il convient d'observer que sur c\..léveloppées
nombre moins de la moitiS peut se prévaloir de cette appelation, c'est-à-dire
d'établissements d'utilité publique dont la fonction principale est d'organis0r
un se:rvice de leoture en direotion du publlc, en mettant à SD. dispositien les
documents les plus divers 1 ouvrages, périodiques, brochures eto. Les biblio
thèques daJœ.ro1ses répondant réellement à ce critère ne dépassent pas le nombh;
de 3. Il slagit de la bibliothèque du centre culturel français, de celle de
l'Allianoe française et de celle du centre culturel américain.
Pour les autres, elles ne sont la plupart du temps qu'une annexe è;;2S
centres sociaux eu culturels, ne bénéficiant pas de budget ni du personnel
requis, dans lesquelles on a dressé an général quelques rayonnages ou des ar-
moires et que l'on approvis1orme au rythme des dons provenant des servic~s cu]_·-
turelB de telle ou telle ambassade. Comparativement aux autres moyens dont
dispose le public dans le domaine des loisirs : cinémas, dancing, terrains de
sport etc•• , la bibliothèque en tant qui ina ti tution fait figure de parent pa"L..""Vr_~,
IILes services récréatifs publics déclarés sont peu nombre_ à Dakar J il n'y c..
qu'une trentaine d'établissements déclarés se partageant en 2 groupes: les
dancing d'une part, les cinémas dJautre part" (2).
Cependant alil n'existe qu'un nombre très restreint de bibliothèques
publiques off1.ciellea aoient1:f1quement organisées, on peut noter tout un résec.u
de "bibliothèques parallèles" qui se créent et 1'leur.l.ssent dans 1e cadre d'asso-
ciations de jeunes au niveau des quartiers. Faute de moyens financiers et hum,n.L s
ces embzyons de bibliothèques paNi.erment à Si o;qganiser tant bien que mal grâce
,.. .~
(1) ef. Z!D01Jl!MBA (Domin:i.que Hade) .-op. eit.
(2) Les grandes villes d'Afrique Noire: Dakar.- ::Paris: la documentation
française, 1968. 120 p., p. 81
-30-
à 11 aide que leur apporte dans le domaine des acquisi tians les services culturols
des ambassades notaImnent l'ambassade de France, qui a mis au point un système (lu
valises de livres itinérantes qui desservent périodiquement ceS différentes
bibliothèques. Situées généràJ.ement dans les quartiers pér1phériques : Pl1dno,
Guediawaye, Grand-Yoff etc., elles sont tributaires du dyna.n1sme de quelques
individus qUi slint~ressent à la lecture et ne vivent qUe le temps ou existent
les struo"tures qui les ont BUSC!tées tels que les clubs, les amioales ou associo.
tions de quartier.
Ce réseau " parallèle" démontre, s l 11 en était besoin, qu'il existe un
réel besoin de lecture en milieu populaire, mais qUe faute d lune poli tique générc.l<-_
et officielle en la matière on assiste à un développement éphémère et non planifié
de !tcentres" de leoture. Une réalité s'impose lorsque l'on s'interroge sur le
problème de la lecture au Sénégal. Les quelques oitadins alphabétisés et "les
élèves semblant avi.des diorganiser leurs loisirs selon un mode préois (associn
tian) ou de diSposer de moyens de développement culturels (livres). Or, ni le
milieu familial ou soci.al, ni le lycée ne leur 'offrent un appui suffi.sant ou un
cadre approprié à leurs besoins ll (1).
Nous l'avons déjà dit précédenunent les bibliothèques soolaires nlont pCG
suivi. le développement de l'enseignement. A Da1œ.r, seuls les grands lycées (Val!.
Vollenhoven, Bla1se D1agne, Kennedy, Delafbsse) déclarent avoir une bibliothèqus
dont le .fond est relativement important, plus de :; 000 volum~s ~t possèdent uni..;
"salle de lecture" (2).
Cependant ces prétendues bibliothèques sont souvent _onfondues avec lu
local oô. Iton entrepose les ouvrages soolaires destinés à ~tre distribués aux
élèves durant llannée pour les besoins de llenseignemsnt et lorsqu1il existb
réellement un fond de lecture pour L~ détente, le loisir ou l'information per80:1-
neIle les premiers destï.nataJ.res ne sont pas toujours les élèves. A titre d'oxeripL j
•••
(1) FLI8-Z(l'IABEND (Françoise).- op. cit.- p. 128
(2) ZIDOUEMBA (Dom1nique lIado).- op. oit.
-31-
le lycée John F. Kennedy possédaient en 1973 dans sa bibliothèque 3862 ouvmgGs
d1v8m, dont 2875 sont réservés ~ lIItO professeurs et 987 nux élèves(1),
Les bibliothèques nr~ant jamais été considérées comme étant l~s
auxiliaires indispensables de li enseignement, leur développement eu à en souf:f:i:'i.::"'
même après l'Indépendance. L1état des bibliothèques scolaires au Sénégal en Gst
tUl exemple éloquent. Dans la logique d'un système éducatif assez sélectif, 18
problème de la lecture est ?ite apparu comme étant 11 apanage dl une petite é11 te.;
et les pouvoirs publics face aux nombreux problèmes, au lendemain de l'indépvn
dance, se sont attachés à maintenir et parfois à entretenir les infrastructures
léguées par le colonisateur, généralement des bibliothèques de reoherches, SŒlS
se préoccuper de oréer de nouvelles structures pour les masses qui aooèdaient
au savoir.
Cela explique que dans ce domaine l'on ait très peu évolué au Sénégs.l
depuis la oolonisation. Au niveau de Dakar ot du Cap-Vert, la région la plus
fnvor1sée dans oe domaine, au Sénégal, il n'y a pratiquement pas d'espoir de
vair la situation s'améliorer dans l'immédiat. ra lecture ne touche et ne tau"'"
ra qufune mino1'ité de lecteurs, parce cormne nous l'avons déjà dit
cette pénurie de lecture est une des conséquences du système éducatif, ellç
m~me conséquence du fuit que les planificateurs n'ont pas enoore perçu l'impor
tance du livre en généraJ. et des bibliothèques en particulier dans le secteur
de l'éducation. Un examen attentif" du IVè plan de développement économique et
social du Sénégal aotuellement en cours d'exécution est révélateur à cet égQrd~
Lorsque lion examine le IVè plan, une constatation saute aux youx.
Le chapitre 1nf'onnation ne oonoer.ne que la presse éorite et parlée. Ol~
actuellement llinformation ne ooncerne pas seulement les nouvelles transmises
par la radio, le8 journaux ou la télévision. Cette notion restrictive d'informa_
tion porte évidemment un coup sérieux à toutes les autres Bources auxquelles lèS
•••
(1) ZIDOUEMB! (DOm1r.ique Rado).- op. oit.
-32-
gens pewrent avoir reoours pour acquérir !es oonnaissances, telles les bibliothè
ques. Llenqu~te montrera à quel point le8 leoteurs dorment de l'importanoe à le
notion d1a.cqu:lsition de "culturelt dans les lectures qu'ils font tant il est vrai
que "l'hoJmD.€ cultivé est avant tout l.'hoome 1ntorm~, celui qui a pu et SU appre'l"""
qui a pu accumuler des oonnaissances aussi variées que possibles. Presse, radio,
télév1sion, bibliothèques, établ1Bsemsnts scolaires et univere1ta.1ree sont à oet
égard, les instrumente pr::l.vil~1és de la "culture" (1). Or, nous l'avons déjà vu,
1138 bibliothèques sont les parents pauvres de l'éduoa't1.on en général et les pers-
pect1ves au niveau du plan ne sont pas encoumgeantes.
Dana le seoteur de la culture, duquel dépendent les bibliothèques, 10s",
projets d'investissement du IVè plan se repart1ssent de cette façon.
Culture - Projets d'inves*1ssements ds IVè plan en mlllers de F. CFA (2)
1- _. ,-
i Ordre de Intitulé des projets TotaJ. Observation et1 priorité IVè plan localisation•1i 1 Musée d'art négro africa1n, 1ère t:ranch 400 Dalœ.r/Comichl: Ot.:~,,-
1, -•i 2 Maison des archives et bibliothèque 580 Dalmr,•1 nationale11
Ce tableau appelle quelques remarques intéressantes. En premier lieu,
08 qui frappe d1emblée, o'est llimportanoe du ohoix porté sur les romans dans
l'ensemble de la littérature proposée des usagers de la bibliothèque. 60,2 %des
•••
(1) llAVDlSOlI (Délix)._ BaPport de stM_ à la bibliothèque du oentre dl éobanges
culturels de langue française._ Dakar, EBAD, 1973.- 1néd.- 23 p.
-42-•
18cteurs qu'ils Boient Africains ou Européens ont emprunté des ranans, contre
14,9 %des ouvrages de littérature générale, que ce Boit des classiques africains
ou européens. Toujours en 013 qui concerne les ouvrages de 11ttérature, on peut
noter que la littérature africaine tient relativement peu de place dans le choix
des lecteurs africains 13,4 %des choix et est insignifiante chez les Europé~~,
moins de 2 %des choix de lecture.
Dés:l.ntér0t, ignorance, où dédain envers lUte llttérature trop 'eune
historiquement et qUi n'a pas acquis see "lettres de noblesse ll, la littéra.ture:
africaine, à quelques auteurs près comme, Sembène, Senghor, Césaire, Eirago Diop,
Cheick Amidou Kane, pour ne citer que les plus connus sou:ffre incontestablem8nt
de ]a concurrenoe de la littérature classique européenne, qui a été pour plUSii.Ou:;,'
générations d'africains et le reste encore partiellement de nos jours, l'unique
source d'accès à la littémture.
longtemps eI1f'ermée dans lE-s cerclee ét»o1ts dtune minorité d ' 1ntc.ù18c-
tuels afr:i.ca1nB expatriés ou d'africanistes européens, la littérature africeil'-0
ne fut vulgarisée que vers les années 70 grltce à la conjonction de deux év~nesent.~
Le premier relève de lléd1tion. Qlest en effet à pertir de 1968 que Présence
Af'r1caine prinoipal éditeur des écrivains africains francophones, crée une 001-
leotion de livres de poche où ont paru la plupart des écrivains africains, ce qu:
pennis de vulgariser toute une série d'auteurs qui étaient lldevenus classiques,
sana avoir été lue" (1). Le deuxième évènement, l'introduction progressive d1au-
teurs africains dans les programmes scolaires en Afrique, a permis aux élèves i:Ot
aux étudiants de se familiariser et. Bouvent de découvrir une littérature longta-.jJ2
réservée à une petite élite d'initiés. Ainsi que noua le verrons d'ailleurs dm1s
le dépouillement de 1'enqu'lhe, ceux qui fréqmmtent le plus les bibliothèques sun-t
les étudiants et les élèves. Cet état de fait se reflète évidemment d~JS les
choix des lectures des intéressés.
(1) HAUSSER (M.)._ L'enseignement de la littérature négro-africaine de languefrançaise en Afr1.QUfl.- in 1 .les littératures d'expression française : Négritt'.-~.
africaine et négritude caxaIbe.- Paris: oentre d'études francophones, 1973.-158 p. <>
-43-
C'est ainsi que, toujours en ce qui concerne le tableau précédent, les
ouvrages didaotiques r philosophie, sociologie, aciences pures et appliquées,
histoire et géographie··ret1ennent près de ]a moitié des choix des lecteurs
africains, 46 %contre 37,3 %pour les romans, contrairement aux Européens qui
n'empruntent pratiquement que de la littérature d'imagination; 76,8 %pour les
romans et moins de 10 %pour les ouvrages didactiques.
L1intérat des lecteurs africains en général pour des ouvrages qui relè
vent surtout de 11 enseignement et des programmes scolaires plut8t que de la
fiction, tels que les romans qu'ils Boient policiers ou non, utilisés dar~ une
perspective de détente et de loisir, est manifesté. Cet intér@t est fonction des
préoccupations profess101rnelles et didactiques des lecteurs et relègue au second
plan toute utilisation du livre non fonctionnelle. Celui-ci semble être consiûéré
avant tout comme un outil de travail.
Comme noua ]}avons dit, la plupart des lecteurs sont des élèves, des
étudiants ou des professeurs t ils ont donc tendance à axer leurs lectures sur " _""
ouvragea qui peuvent leur permettre d'augmenter leur capital de connaissances
théoriques et p:mtiques. Le livre n'est pas encore considéré, par beaucoup de
lecteurs africains, comme un moyen de détente et d'évasion, dont l'utilisation
serait purement gratui te. Par voie de conséquence, pratiquer l'acte de lecture,
c'est avoir un moyen d1accèder à la "culture l! et au savair. Par delà, son rBL,
principal qui est de véhiculer la pensée d'autrui, le livre devient dès lors
pour ses utilisateurs un moyen de promotion sociale et culturelle.Ceci se retrouvu
bien sOr chez tous les leoteurs interrogés, mais plus partioulièrement chez l'-.os
l!énégalaiB, pnur qui la lecture est avant tout 1nformation et les bibliothèqu<.os
des lieux de formation qui prolongent l'école. Ce qui ~l1que combien l'asDect
utilitaire et pratique du livre est prirooXÙial à leur niveau. D'où la relativù
importan$e des ouvrages didactiques, et des. documentaires dans le fonds des trois
bibliothèques où siest déroulée notre enquête. Dans l'étude du dépouill~~nt ddS
réponses des lecteurs, GC,t.-oopcqt pédagogique des servioes de lB. bibliothèque
...
-44-
appara1tre nettement, celle-ci n1est plus considérée DanIDe un teo.ple- polm oiDito,
.Qais se Ditue bien dans ~e prolongementd.t. \,I.t.o\~
L'enqu~te dont les résul-tats ont fait l'objet de la présente étude, a
pennis de mettre en exergue, à travers les trois plus importantes bibliothèques
Je Dakar, le rele inportant que ces dernières eurent à jouer dans le processus
de l'éduoation en général et dans ln fonnat1on persormelle des individus, OUÜ::
aussi d'appréhender les attitudes ot l.es réactions des leo~Jqu'ils soient
Afrioains ou Européens, face au livre et par delà ce demier, l'influence qu'il
peut avoir sur leur v:Lsion de la société.tant il est vraillqu'il est donc de ltl.
plus haute importance de définir à chaque étape de l'évolution d'une société,
le rele que jouent certains instruments par lesquels cette société se transforme
et sans nulle doute faudra-t-il priviJ.égier ceux qu1. sont directement liés ù la
ooou::nm1oat1on, à la transmission et à la diffUsion, car c'est par eux que pro....
gresse toute société" (1). Nous ajouterons que c'est par eux aussi que peut
regresser toute société, tant 11 est vrai qUe les moyens de communication
sooiale, communément appelés médias, sont de puissants vecteurs d'idées, d'idéo_
logies, de comportements, de références et ~u'une société ou une nation qui ne
ma!:trise pas ou ne contrale pas ses propres circuits de d1str:lbution dl infoma-
tian oourt à long teme, un danger sérieux, de se trolNer en état de dépendance
vis-à-vis de peuples ou de systèmes oulturelkl mieux: pourvus en la matière et de
déboucher a1nsi sur une situation d1aliénation culturelle, économique et sooiale.
(1) NDIAYE (Théodore).- op. oit. p. 3
ENQTJE:rE SUR IA LEXJTURE PUBLIQUE A DAKAR
-45-
CllAl'ITRE II - IA LECTURE PUBLIQUE A llAKAR
r) L'enqu3te et Bes résultats
A) Le questionnaire
Ce fut le moyen par lequel nous avons pu inteIToger 1e3 lecteurs des
trois bibliothèques dans lesquelles s'est déroulée l'enqu'ète, la mise au point
du questionnaire a été réalisée à partir d'une série de questions élaborées par
le personnel de ;ta bibliothèque du centre d'Echanges Culturels de langue ];'ran
çaise, pour effectuer un sondage à usage interne. Nous y avons apporté quelques
amendcmentf!l, soit pour parfaire la fo:rmula.t1on d'une question soit éliminer 0"..., ~'.
Ica qui qui nous ~emblait mutile ou en tout ca&!manqua1t de pertinBnce du point de vue
des réponses que lion souha11r.it obtenir.
Le questionnaire, oomporte premièrement des questions de type n:fermé!!,
portant sur la typologie des lecteurs : -âge, sexe, lieu de résidence, national!t8,
profession, temps de déplacement entre le domicile et la bibliothèque fréqu~htée,
rythme de fréquentation. Les réponses obtenues à ces questions nous ont penrds
d'lavoir 'lm profil assez précis des lecteurs des trois bibliothèques.
Deuxièmement, une série de questions de type "olWen", ayant trai t
au go-ù.t des lecteUI'S en matière de lecture, à la place de la leoture dans leurs
loisirs, à leur oonception du livre, à la finalité des actes de lectures qui ils
accomplissent, à l'importance qu'ils accordent au livre parmi les a~res moye~s
d'information. En d'autre terme cette seoonde série de questions tentaient
d'engager la personnalité m~e du lecteur dans sea rapports avev le livre •
.En schématisant on peut résumer ainsi l'objectif qti a guidé la Elise
au point de ce questionnaire. Il slagissait plus précisément de mettre en évid,L,CU
les rapporte des lecteurs avec la bibliothèque en tant qu'institution dlune part
et d'autre part de relever les diverses attitudes de ceux-ci faoe au documents
imprimés mis à leur disposition, essentiellement les livres et les périodiques.
Il conVient de préeiser e:niï.n que 11 enqu~te st est déroulée dans les
bibliothèques, elle ne concerne de ce fait que des lecteurs réels.
•••
-46-
En outre on nID. pas choisi une population bien préoise de leoteurs en
so fondant par exemple sur des ori tèrbs discriminatoires te\ que l'hge, 10 88::\:<,
ou la race. L'Gl1qu~te a été proposée à tous les leoteurs,qui pendant le mOB811t
oû. elle a eu lieu, quinze jours, sont venus dans l'une des bibliothèques pOUT illld
raison ou pour lW.e autre. Ceci a pennis de d1munuer les risques d'avoir plll.si0Urf:;
réponses par personne, et nous avons profiter d'un la.ps· de temps pendant 10qu01
llols lecteurs venaient rendre ou emprunter des oU'VI'ages, le durée du pr~t étroit d."
quinze jours dm1.s toutes les trois bibliothèques où s' t:st :léroulée 1 f enqu~t0.
Au niveau de l'enqu~te ell",-mbe oependant noua avoru3 introduit WlG
distindltion entre adultes et enfants. Alors que les questions de type femé Olit
été proposées aussi bien aux adultes qu'aux enfants, le questionnaire de t,E},o;
ouvert nia ~té distribué qui aux aduJ.teS. Ceci pour une raison qid 'semblait Si iQ
poser d'elle-m@me, puisqu'il slagissait dans oe cas, dfaborder des problèlli08 Q'~
di:;imandait de la part de l' enqu~t6 des prises de positions et éventuellement C!.(;S
avis personnel sur le livre et la l.Jcture.
B) Le Publio
Le dépouillement a révélé que 1756 lecteurs ont participé à ll0n~utt0
et ceci poUX' l'ensemble des trois bibliothèques dont 1122 a.dultes et 634 el:cen~'~tS.
Cependant après étude du dépouillement nous nous sommes rendu compt",
que trois groupes, du point de vue de la nationalité des individus avaient pree ti
cipé mass1vem~t à llenqu0te, il s'agit par ordre d ' importance t des Sénégn13is,
des Français et des Mbanais, suivi dG très loin par les Guinéens, l",s IY1aliens 1
les Marocains et Portugais, au sens où on l'entend à Dakar, c'est à dire les 'p0r
sonnes lusophones d f or1gine cap-verdienne ou guinéenne (Bissau), l;lnt'in d'un
ensemble assez hétérogène de leoteurs de diverses nationaJ.ités, 20 exacteme..'lt,
dont le pourcentage par rapport au nombre total de lecteurs ayant répondu f'.UX
questions s'élève à 1,1 %et dont la répartition entre adulteS et en:fants nu ::'tit,c;
paraissait pas signifioative. Il en est de m&1e du deuxième groupe de l<J.cteurs
qui ne représente que 3 %du total des leoteurs.
/f'.vec Pour t:raV'ailler/un corpus assez homogène. dans les deux catégori8s,
•••
-47-
adultes et entants, et USem intéressant quant1ta:t1vement, nous avons ohoisi de
fonder oette étude sur les réponses fournies par les Smégalaia, les Français. ct 2.(;,_
Libanais, Notons que oe8 trou groupes soo:t .. '''éga1 et dans l'ordre les
communautés les plus importantes.
Ceoi ~~e donc le nombre de lecte~ayant partioipé à l'enquete à
1649 personnes Ele rt:Spariasant ainei ,1 1031 ndultes et 618 eni'ants.
Tableau nO 1 f Répart1t1on des leoteurs par nationalité
NATIONALITE A.lJUIœES ENFANTS TeY.eAL Gl!NEPAL-
Nombre % Nombre % Nombre %I-i SENEGAUIS 763 74 483 78,9 1 246 75,3
"je crois y trouver Iles livres de droit de 1ère année" (Sénégalaise19 ans)
"j'avais trouvé que ce centre est un lieu de culture (Sénégalais 23 ru:s)
"Il y a des livres que je ne: peux pas acheterl! (Sénégalaise 20 ans)
Chez les Français llaspect utilitaire n'exclut nullement lIut1lisatiOJ:
('..u livre à des fins de distraction ou de loisir. L'habitude des livres, acquise
semble-i;...il très t8t dans la jeunesse, donne le gollt de la lecture et entretient
ohez llindividu le besoin de fréqu~nt8r régulièrement les bibliothèques.
Les misons invoquées par 108 Sénégalais sont nettement utilitaires et
pratiques. Nous retrouvons ic1 les m~mes motivations que chez les enfants. Il
s'agit essentielloment d'aocumuler un savoir, en utilisant les livres de la biblio-
ti'...èque. Rarement des références à des notions de goilt, d'habitude, dfévasion ou
de distraction. La bibliothèque est essentiellement le lieu où lion peut acquérir
une certaine Itculture", qui est à la fois ouverture d'esprit, cur.1osité int",llec-
tuelle, mais aussi synonyme dfune quantité de connaissances qui correspond souv~nt
à des programmes scolaires. Pour certains lecteurs par contre les motifs qui les
l'0ussent à fréquenter les bibliothèques sont d'ordre purement économique. EtE'nt
de.J.l.s 111mpossibilité d'acheter des livres eux-mfunes 1 OU étant obligé d.o ~er Ul1
prix forfaitaire lorsqu1ils empruntent un livre dans les bibliothèques scolaires,
certains lecteurs utilisent les services des bibliothèques de lecture publique où
•••
-65-
11 obtention de livres est gratuite ou alors revient moins cher. Nous sommes donc,
d<:J m~me qUe ohez les enfants, devant deux attitudeS qui sont cles oonséquences plus
ou moins directes de faits 60010 '.-oulturels qui parfois n'ont rien à voir avec 1",
livre lui-m~e. Vivant dans un~ sooiété qUi cmmbat encore llanalphabétisme, le
lecteur Sénégalais qui a la chanoe de pouvoir utiliser le livre, le fait en général
dans' uneperspeotive de promotion sociale et culturelle.
A Dakar oependant, si la lecture est un fait ~portant, bien qu'elle sci~
l'aPc~age d'une petite m1nor:i.té par rapport à la totalité de la population c~u 1'':'.2(8,
11 reste qu'elle est prisonnière dlun certain oircuit, qui. d'une part Qonditiof'...rw
plus ou moins les lectures des usagers des bibliothèques et d'autre part entr~t1unt
un clivage sensible entre les di.fférGIlts lecteurs à cause de 11 emplacement des
bibliothèques. Nous allons essayer de voir à travers les résultats de Ifenqu~te
comment se distribue le livre à partir des trois bibliothèques que nous avons
étudiées,autrement dit, si les bibliothèques arrivent à atteindre les lecteurs
cl_lune manière égale quelque soit leurs lieux d'habitation, leurs nationalités et
leurs milieux socio -culturels.
II - I.€ circuit du livre et de la lecture à Dakar
Nous ll avons vu dans les chapitr02s précédents, alors que les trois
bibliothèques Se situent à Dakar-vil18, les lecteurs qui fréquentent ces établiss8
ments viennent de toute la région du Cap-Vert. Autrement dit le rayon d1action d8
CGS trois inst1tutions El 1étend sur vi.r>..gt cinq 1d.lomètres, jusqu1à Rufisque très
exactement. Le public touché est non seuleoent étendu numériquement mais aussi
sl1ntialement. Cependant tous ne pro1'1 tent pas également des sGrVices :rendus pc.r
les biblj.o thèques.
Par rapport à la· tote'1.li té des usagers, les lecteurs du plateau ne sont
;as les plus nombreux, puisqu1ils nt.; représentent que 39,1 %des lecteurs réels
d~s trois bibliothèques. Etant pour la plupart d~s Français et des Libanais, ils
constituent cependant ce qUe Ilon pourrait appeler le Ilcirouit aisé" et bénéi'icient
du l'avantage d1avoir les bibliothèques dans leur quartier, tout au moins ll:ls d\3ux
'"
1 des Européens, elles sont :fermées au publio pour n 1 0uvrir de nouveau qu'au mois
•••
-66-
A Dakar le circuit du livre ntatteint pas la masee des lecteurs. Or pour
1
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procurer la matière première, c'est;...à-dir", le livra. Ayant géliéral0lIlent un niVI2UU
plus importantes. Ils éprouvent donc très peu de difficultés matérielles à se
plupart ne fréquentent les bibliothèques que pour emprunter des livres. I.e l<.;cture
Les bibliothèques, tout au moins O.UtlB situées sut' le plateau, tOlm1",~:..t
d", vic supéri t:ur à la moyerme du pays, b énéficiant dG oonditians matérielles cl e
sur place des ouvrages i::t dus périodiques ne les intéressent pratiquement pas. Cl:
èl. leur zytbme, puisque pendant llhivQ~"Igc qui oorrespond en général aux: VaC3l1CGS
vi~ aSSeZ conforiables, ils peuvent donc pratiquer la lec~ à damdcile et pour l~
sont eux surtout qui utilisent le livru comme moyen de distraotion.
1 d'octobre aU moment de leur retour. Autrement dit, le reste des lecteurs est privé
1 des services des bibliothèques pendant au moins trois mois chaque année. Ce que
1 l'on peut oonstater :finalement au niveau du Cap-Vert, c'est que dans le domnine
1 de JE. lecture et de l,lutilisation du livre, les services des bibliothèques profi
l tent à une minorité, constituée en majorité d'expatriés, au détriment de l~ ~~see
1 des lecteurs et oe à cause de leur implantation, de leur origine et de"leur cono(:[;··
1 tian étrangères.
1 Le;'autres lecteurs en majorité des Sénégalais qui constituent ce que
1 nous pourrions appeler "le oircuit populai.re" sont dépendants de ces trois biblio
1 thèques. Ils sont tenus pour satis:faire leur besoin de lecture, d1aller vexs 10
1 livre et ceci au priX d'efforts matériels et financiers, qui parlais ne sont llO,s
1
en rapport avec leur niveau de vie réel. Les bibliothèques et par voie de causa-
Iquenee les livres, ne faisant pas partie de leur envirormement cultuxel, ils ne S lé:
1
SG déplacent que dans un. but très préois, la plupart du temps !lour des motifs qui
1
n' 011t rien à voir avec la di8tractian ou l' évasion. Rabitant presque tous d.ms d \3S
1
quartiers populaires ou dans des zones d'habitation sans équipements eollectirs,l 'issus des classes moyennes ou pauvres ils sont tributaires de la ville aussi bien
1
pour leurs actiVités économiques que pour leurs activités culturelles na~~ent
1
dans le domaine du livre.1
1
1
1
1
1
1
1
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-67-
créer des habitudes de lecture et éviter le caractère striotaaent ponotuel et
utilitaire qu'en font la majorité des lecteurs Sénégalais, 11 ~audrait que ce soit
le livre qUi aille au lecteur et non le contraire.
En réalité le circuit du livre à Dakar est semblable aux autres cirotdts
qui ils soient économiques, éduoatifs ou sociaux. Tributaire de 10. "ville", gui
concentre en sein toutes les 1.n.f:rostructures, il ne dessert efficacement qu1une
toute petite minorité. Or 11Dalœr ne méritera l'lemement le titre de capitahJ culk:-
relIe du Sénégal et ne pourra esoompter un glorieux avenir, que 1e dour où n t iL....l)Ort8
quel enfant de la Médina, de Colobane, Oualœm ou Camb'rène pourra accéder snr.s
réscI'\I"e à l'esprit de la culture" (1), en ayant les moyens humains et matériels
<le pouvoir les développer dans son environnement social et géographique.
Or la s1tu.9.tion présente des bibliothèques et par oonséquent de la 180-
ture, augurent mal de cet avenir et perpétueront encoR pendant longtemps l'id88
q').", la culture est uniquement une somme de connaissances livresques emmagaa1.il.ées
par la g:r€ce de la lecture et à des moments bien précis de l'ei:1stence -ks 18cteurs~
Or "si li effort dû cléch:i..f':frer un livre ne se transfo:rme pas en une f~te de 11 espri t
nous savons qu1elle a de grandes chances de ne pas survivre au travail scoJ.z.ire l1 (2\
puisque paèsées_les obligations des :programmes scolaires ou UliI1v~rsita:ires, l'uti-
lisation du livre et la pratique de la lecture nlapparaissent plus comme nécessaires
au progrès de l'individu et de la société.
Nous allons tenter de vou pour termint'lr à trave:œ les réponses dGS
lecteurs Sénégalais, quelles sont les misons d'ordre social, économique, culturc.!l
.... t psychologique, qui maintiennent le livr8 et la lecturo, dans l'orbito:.; dL< 1'éoo1",
et l'Gllp@che de se dégager de ce que nous pourrions appeler "l l impasse scolaire".
Nous partirons pour ce faire des réponses fournies par les looteurs Sénégalais ,,\
une série de questions portant sur la signification du livre, sur le cont~mu ;li::
leurs lectures, sur la place du livre par rapport aux autres loisirs~ lin d leutres
termes, il s'agit~de voir au niveau du lecteur Sénégalais, quelle conception ib Be.±',CIlt du livre et de la leoture, et les conséquences qui en déooulent.
(1) THOMAS (Louis Vincent).- "Les fonotions culturelles de fu1œ.r" in Da.lœ.r en~Gvenir.- Paris: Prés. Afric., 1968.- p. 195
(2) DlllWEDIER (Joffre) llASSEl'IFORDER (Jean).- op. oit. p. 87
1.
LES SENEGALAIS ET :rA LECTURE
- - --------
_68-
CHAPITRE III _ LES SENIDAIAIS Rr lA LECTURE
Ce dernier ohapitre ne concerne que les lecteurs Sénégalais. Le questio_,-,·
naire qui leur était proposé et qui portait essentiellement sur des problèmes dG
I.'I.otivations, ne leur a été distribué que 10 dernier jour de llenqulhe. Deux raisor,-s
ont guidié cee ohoix. D'une part, les Sénégalais qui constituent la majorité d8S
lecteurs ayant participé à Itenqu~te,. ont fait preuve d'une attitude aSsez origi
nele par rapport au livre, qui méritait dl~tre app:rrofond1, d'autre part nous avOY"_s
0ssayé de saisir sur le vi.f et dans un laps de temps assez court, les réactions '" 8
lecteurs sur des questions engageant la personnalité des intéressés. Nous nvons
pu toucher ainsi 50 lecteurs dans les trois bibliothèques. Dans ce groupe d1adulbs.
les élèvEs et les étudiants sont les plus nombreux (37) suivi des pédagoguGS :
professeurs, instituteurs et institutrices.
Tous les leoteurs qui ont répondu &ce questionnaire déclarent aiffi0r ls
lecture et la majorité ajoutent qu'ils lisent büaucoup. CepBndant parmi leurs
loisirs préférés, la lecture ne vient qu'en 4è position avec 33 %des choix, avec
dans l'ordre d1importance : le cinéma : 57 %des chou
le sport : 55 % 11
la radio : 45 % Il
la lec ture : 33 % Il
la télévision : 24 % "
le thé~tre : 22,4 % 11
Toutefois pour les deux dernières rubriques, on peut émettre des réscrvc3
q'lk'U'ld à leur caractère populaire, si lion considère que la télévision est encaru
au Sénégal lU1 média relativement neuf, uniquement implantée dans la région du
Cap-Vert, dont llutilisatî. on requiert des moyens financiers qUi ne sont pas en
rapport avec le pouvoir d'aohat de la masse des Sénégalais, que le thé~tre (~st
loin dl avo ir atteint une dimension populaire non seulement par manque dl irtfrciJ
tructures dans les quartiers suburbains mais aussi et surtout par 11 inexist",nc",
duna l~s milieux populaires, d 'nctirttés théa.trales régulières. Les salles dlil
•••
-69-
théâtre réellement fonctionnelles à Dakar, situées dans le quartier du plateau ~v
sont fréquentées que par une minorité, soit à cause des prix. prohibitifs des repAÎ.
ftAta~nnt soit à cause des prog~~s qui ne répondent pas toujours a~~ Gaj~s
et aux besoins du grand public.
Si lion exclue donc la télévision et le théâtre, qui sont encore cu stc.è. .
embryonnaire du point de vue des loisirs à Dakar, la lecture occupe la derniènJ
place dans les loisirs des intéressés, comparativement au cinéma et au sport ct È.\
la radio. Ces derniers d'ailleurs bénéficient d 1inf'rastructures assez nombr0uses
aussi bien en ville que dans les quarti&rs périphériques. Il existe des 8a1188 dt
cinéma et des terrains de sport dans toute 11agglomératian dakaroise, les biblio
thèques et les salles de lecture publique ne fleurissent pas aussi vite que ces
dernières, E:t en dehors de celles qui font 11 0bjet de la présente étude, il nl(O)dsl:c..
qUIJ des embryons de bibliothèques non organisées. Les lecteurs potentiels Qui
l1'habitent pas le plateau sont donc réduits, pendant leurs moments de loisir"
utiliser les moyens de divertissem~nt qu1ils ont a porté de main. De ce fcit 18
livre comme nous l'avons dit précédemnent n'existant pas en permanence de.ns 11 0:n
vironnement culturel et social des Sénégalais. Il n'l::Jst qu'un objet marginal 0t __ ,'
surcroit réservé à une minorité qui en détient la clef principale, c'est-à-dire
cell€:, de pouvoir déchiffrer un livI'l!', pe.r l'acte de lecture. Ce qui. n'est pc.s 1",~
du cL"'1éma. ou du sport, qui n'exigent pas de l'amateur qui sfadorme à ces loisirS
d'avoiràproduire un effort pour déchiffrer un code précis, afin d'accéder à un
message ou satisfaire un besoin de délassement.
Ce caractère marginal du livre, ohez les Sénégalais se traduit per
une utilisation purement pratique du livre au détriment, corw:tle nous l'avons déjà
dit, de la distraction. A la question: pourquoi lisez-vous? les choix se sont
portés sur les rubriques sUivantes :
pour me cultiver 83,7 %des choix
pour m1in1'onner 61,2 % Il
pour me distraire 30,6 % Il
pour apprendre QeS cours 28,6 %des choix.
• ••
-70-
L'accent mis sur le c6té infonmat1on et acquisition de culture, corrobor~
08 que nous d1s~précédemment, à savoir que le livre fait généralement l'objet
d'une utilisation studieuse, que ce soit dlun point de vue scolaire (apprendre ses
cours, améliorer son niveau scolaire g~ce à des lect'Ul"Eit3 d'auteurs au progtt:;JJ1...D02
~tc ••• ) soit pour augmenter son capital de connaissances théoriques personn011~s
(ce que les lecteurs désignent par l 1 expression Il as cultiver"). La distraction,
l'évasion et le loisir par le livre ne venant que de façon subsidiaire, après qu~
lion ait satisfait la nécessité de s'informer sérieusement. L'idée de culture
acquise par le biais de la lecture est d'ailleurs une conséquence directe dlun
système socio-éducatif qui privilégie, ceux qui étant passé, par llécole, le lyCé8;
puis l 'université ont accumulé un oapital de savoir relativement important pour
8.ssurer leur promotion sur le plan social. Le liv:f'e n'est donc pas sorti du carcaL
scolaire, et il apparatt souvent comme un des moyens privilégié pour accèder à
cette culture gage de toute émancipation.
Or le livre ne peut seulement fitre considéré sur le plan de l'ini'oImP,tL,;'c
\lu'il peut apporter. La culture ntétant pas simplement la. somme d'oeuvres qu'ell""s
sotent littéraires ou techniques, qu1un individu aura accumulé au cours de SeS
différents stades d'apprentissage. Elle \Jst aussi ce moyen qui, hors de toutes
contraintes d'ordre scolaire peut pormottre à l'individu de dépasser son savoir
pratique et utilisable à court te:nue, en développamt son owerture d' esprit, sa·
capacité de réflexion, son sens or1t1qu~ ct toutes les facultés par lesquelles
l'homme réfléchi sur ses propres continglolIlO68 pour parvenir à la liberté.
A CI;;: titre les motivations qui poussent les lecteurs Sénégalais à lino,
se Jf'éf'lètent sur les genres de documents qu1ils lisent. A la question que "lise~
vous ll ? nous avons obtenu la répartition suivante r
livres de culture générale 75,5 %des réponses
revues-journaUX-IDag881nes 71,4 %
romana-littéraires 64,4 %
livres techniques de documentation 40,8 %
bandes dessinées .30,5 %
romans policiers 22,4 %. ...
-71-
photoromnns 20,4 %des réponses.
Ce qui frappe tout d 1abo1"d dans les lectures des Sénégalais c'est lrL~~)or··
t&llce de oe que l'on appelle co~-ment les concurrents du livres, clest-à-dir~,
les périodiques en général: revues, journaux, mo.gazines. Plus répandu que le livr_
àans tous les milieux, génémlement moins cher et d'une lectu.:l:\: plus aisée; li",
néoessitant pas de s'isoler pour une éventu~lle concentration ou féflexion, l~
journal est assurément plus maniable que le livra.
De plus son contenu informatif et d'actualité lui donne aux yeux du 1&0-
teuI1 désireux ù'8tre au courant de ce qui se passe, un caractère prioritaire, 'dt
attlX'.yant de par sa présentation. Cependant il ne supplante pas complètement le
livre, puisque les oUV'rages de oultu.rc générale et les romans littéraires vierJll(üt
en bonne position dans les choix des lectures des Sénégalais. Il y a, pourrc.it-(J~l
dir0, une _t2'1sation importante certes, mais parallèle des périOdiques. A part
quelques lecteurs Qui déclarent venir dans les bibliothèques pour lire des jOUXTU;~
la majorité de ceux qUi les f'réquentent y vont pour empnmter des livreS. ffi It:ctul~',
des joUInaUlC venant après. Il t'aut noter qu~ dans les bibliothèqut::s, les jounlauJ:
sont en lib"n: aocès et ne font pas llobjet de pr~t personnel comme dans lu cas dGS
livres.
Nous noterons la place ~lativcment importante des ouvrages didactiquos
tels que les livres de cours et les livres teclmiquds de documentation. Cela. réponè.
aux préoccupations de nos lecteure qui Bont en majorité des lycéens ou des étudis..-''lts,
Q",pendant slil8 conservent encore une curta1ne préém1nence, le caractère didactique
de leur contenu, n{; peut que réduire leur importance par rapport à l'ensemble d88
g~nres littéraires qui constituent ordinairement les lecturûs des Sénégalais.
Reste enf'in un troisième groupe qui cousti tue un ensemble ne représc--'"lta.nt
pas plus de 30 %des choix d86 lecteurs Sénégalais. Il s'agit de la littératurt!
généralement quali.fiée de "genre mineur" ~ const1 tuéG essentiellement par les bnnc:.2s
dt!SSll1ées, romana policiers et photoromans. D'après IGS réponses des lecteurs, il
86nble que ce soit les documents les moins lus dans les bibliothè'lues. Les romans
policiers, 'lui sont les plus faciles à acquérir, tant par l.-9. modicité relative d", IGUl.'
prix par rapport aux autrGs livres, que par le fait qu'ils sont largement acccssibl~~
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au publD hors des librairies tradi tionnclle6, occupent quand m&1e une pl2.c,-,
r01ativement importante, 22,4 %d0S choix des lecteurs f meme, si dans la classifi
cation des genres, ils sont toujours oités en dernier ]eu.
Snobisme qui se traduit par une propens:i.on à ne lire que des livres de
culture générale ou des romans littéraires? DésintérlH pour une littérature trr.:.di
tionnellement oonsidérée comme m1neuxc '? le roman policier, de même que lèS bt:.nd0s
dessinées et It.-'S photoramans relèvent seill.bl~de la litté.rnture de divortissV.L:-0:rrc
qUli l'on éprouve le besoin de lire après les lectures sérieuses, pour se délc,ssl.;r.
D'où le raIe marginal qu'il po.rait jouer chez les Sénégalais par rapport aux ::'~ix:;rec
livres.
D'ailleurs, cettû tendonoe à he lire pratiquement que des auteurs c1DGsi
qUt:s, qu'ils soient Africains ou Européerts, s'affirme nettement lorsque les lectecT(j
interrogés, citent leurs auteurs préférés. En réponse à la question "quels sont ves
nut8UI'S préféréa ll ? nous retrouvons presqu(> tous les noms con.firmés de la littérr,
ture afr.1caine ",n général et sénégalaise <:n particmlier, damênw que chez les
Européens des auteurs classiques en majorité Français.
Chez les Af'ricains les écrivains les plus ci tés sont dans l'ordr", décroiii
sant t Ousmane Sembène, Cheick Hamidou Kane, Birn.go Diop, Léopold Sédar Senghor,
CQll1.;'1.ID laye, Aimé Césaire, Ferdinand Oyono, David Diop, Frantz Fanon,Chinua Achéb0~
Abdoulaye Sadji puis toute une série de romanciers et de théoriciens africains t01;
que Nkrurr1c'lh.
Chez les Européens, les auteurs les plus lus sont les classiques do ln
littémture française ou étrangère: Victor Hugo, Emile Zola, Albert Camus, Joan
Peul Sartre, René Dumont, Emest Hem1nghwuy, Ricmrd Wright, SiI?ndhal, Gustav",
Flo.ubi::rt, Henri. Troyat, Jean Jacques Rousseau. la liste des auteurs européens cites
et nettement plus longue que celle des africains et plus variée. A cOté deS OGuvrl.:s
(~Iirnagination pure, on y trouve des philosophes comme Bachelard et Karl M3.r.x:, des
éconorrû.4tes comme Pierre Jalec, Samir Amin ou Gurumr Myrdal, 8ll passant par 1<;8
dX?4nutar8es tel que Shakespeare. Tant chez les A~r1cains que chez les Europée~Œ, si
lIon fait exception de G'l.\Y des Cars, dont la littérature s'apparente plus au rom""2l
1 retrncent parfois la propre expérience des lecteurs et "parl ent des rétdi tés ai'ri
1 cr::Îlws a1.DCquelles nous somme con:frontés et apportent des solutions adéquates à ces
1 problèmes ll •
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policierl, mais que l'on retrouve néanmoins parmi les auteurs les plus lus.
Chez los Afrioains, ln major1té des éorivains oités sont des romanc10rs,
très peu de poètes et quelques rares theoriciens colJllJle Frantz F'unon ou Nkrumah. 1i::)s
auteurs de la génération dite de la Négritude et leurs suco~sseurs viennent Cl'~ tet.:::.
Il s'e.git généralement de ceux que la or:l..tique a mis au :rang de classiques d8 ln
li ttérature afrioaine et pour la plupart des écrivains Sénégalais t Ousmane Sembèn0,
Diop etc••• Icrsque l'on derwmde dtailleurs aux lecteurs Sénégalais, les raisons
qui les poussent à lire ces écrivn.ins, leurs justifications varient du sentim,,;lc,lis-
me aux raisons objectives.
Les romanoiers Africains sont lus parce qu'on a consoience d1avatr affaire
à des compatriotes ou simplement paroe qu'on ép10uve 18 sentiment dif'fus dlapP8.r"t~-
nir Èt une vaste oommunauté raciale. Clest ainsi que Ou.amane Sembène "fascinL:<!1 t81
lecteur à cause de son "style sénégalaisll et qUe tel autre lit Eldridge Cleavur
et William Dubois t1parce que ceux-là traitent de sujets qui (m t ) intéressent: 186
problèmes des noirs aux USA, la disorimation raciale, le terrorisme di;> lloncle Sare.
dallS les prisons", ou Malcom X f1parce qUe (ce.luî-oi) décrit dn..~ ses bouquins le
r81c du Noir et il démystifie les Blancs ll•
Ete.nt issus du m~e milieu social, culturel et parfois géographiquG quo:;
les lecteurs, les écrivains choisis, plaisent parce qu'ils relatent des évèn8IiJ.<~.1ts
qu~ les lecteurs connaissent ou ont déjà vécu. le. connaissance du cadre et du
milieu donnent à leutS éorits un certain réalisme qu'apprécient les lecteurs qui ~~
sant donc pas dépaysés en lisant leurs oeuvres. Les distances psychologiques, sa...
ciales et culturelles sont éliminées, puisque ces écrivains traitent de sujets qui
Le penchant pdur certains éor1.va:i..ns afrioains peut parfois prendrB des
IÙllŒênSiOns sentimentales, qui n'ont rien à yoir aY~c le livro ou la lecture GD tant1
qUG tel, quand par exemple les auteurs Sénégalais sont appréciés "parce que ce sont1
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des écrivains de mon pays et aussi ils traitent toujoura de sujets qui sont très
,intéressants l1 • Les écrivains Européens, et surtout Français, sont lus pour des
misons tout à fait différentes et qui sont encore fortG.lIlent marquées par ll"p,!-
preinte de l'école. Tout d 1abord certains lecteurs avouent que n ce sont les plus
connus ll • Entendons par là. ceux dont on leur a parlé et exIp1iqué les textes duRc1lt
Ces éorivains qu'on leur a toujours présenté comme les meilleurs ùe lours
générations et de leurs pays, apparUssent donc comme des modèles dons l'utilisation
I/justifi.-- de la lo.ngue française. D'où îles / en général purement scolaires .. il, .cations
s'agit en lisont de découvrir le benu lungage, d'avoir du style tout d'abord [Lvan.t
de considérer le contenu de l'oeuvre "J;lo.roe qu'ils pnrl(1nt bien et aussi ils Bryent
suggérer ce qu'ils pensent aux gens ll • lIous retrouvons ici sous une autre fome,
ce désir d'aoquéri.r de lu 4ulturet qui f:lotivent beauooup de lecteurs. Les o.utcUT3
Français, sont appréciés par "ln. richesse de leur vocabul.aireu et par "leur siJ.flc
remarquable". Le message contenu df'..Ils If oeuvre, ne semble P~Q primordial. On aime
Victor Hugo "parce qu'il écrit bienl! et non pas fondamentalement pour ce qu'il dit.
Le livre et par voie de conséquence, la lecture t sont toujours tribu-
taires des schèmas dichotomiques inculqués à l'école : le fond et la forme. Le
lecteur a ici tendance à priviligier la forme au détriment du fond, et ses notes
de lecture sont lIf'onction d'un certain type de rapport avec 18 culture, notnmment
1.:.'l. culture occldenta1e, les modèles ocoidentaux qui existent en Af'rique et qui Bont
propagés par le système scolairell (1).
En étudiant la signii'ication du livre et de la lecture chez les lecteurs
Sénégalais on se retrouve en face de deux attitudes qUe lion pourrait formuler
80msi en shèmatisant:d'une part des aotes de leoture intéressés t qui recoupent
plus ou moins leur ilnaginaire et par lesques ils se sentent ooncernés, il sl8git
essentiellement des oe1.IV':r'es des écrivains africains et d'autre part des actes de•••
(1) FRANCE. Affaires Etrangères (secréta.riat d'état). Affaires culturelles ettechniques (dtTcction).- Journées d'études sur le développement de la lectur~dnns les états dIAf'rig.ue Noire d'express.ion française et à Madagoscar.- Vaucresson, 1960.- p. 15.
Il se dégage dono ici toute une problèmatique de la leoture en milieu
de lecture plus fonneIs, plus super.ficiels des auteurs français. Un des lectours
engngés et décrivent par conséquent les personnages et les choses sous leur véri-
retrouve dans oette définition du lecteur, les catéeories de l'analyse de texte
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contexte 1
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En réalité, cette<ooception dichotomique de la leoture est superfioi811e 1
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A ce titre, il faudrait dono replacer le livre dans Bon véritable
tmditi':mne11e 1 1e fond et 1.a fonne.
et erronée, oor 11 n'y .a pas d'un cthé des auteu:rs qui écrivent bien et de l'autre
table aspect, tandis que les autres sont bons stylistes et bons Ila:ITateuzs ll •
l..nterrogé sur les misons de Bes lectures, résune bien oes deux comportements
différents, faoe aux éorivains afrioains et européens en général". "Les tI.'1.8 sont
l'agenoement des mots qui permet d'y accéder foment un tout. Il semble que l'on
raisons historiques a dO. les subir plus qu'elle ne les a véritablement aocueillis.
à lIheure actuelle au Sénégal. Comme tous les produits de l'occident, le livre c.
teurs face au livre en tant qu'objet de communication.
des auteurs qui déorivent bien la réall té. Le message contenu dans un livre et
contribué à l'introduction des modèles occidentaux en Afrique. Celle-Ci pour des
Il ne s'agit pas dans ce travail de traiter du sytème culturel et éduca
Itiormel au S4n4sal. Cependant on pourra noter oOl:O.bien, les attitudes des lecteurs
1 gnement fut un des chevaux de bataUle de sa politique d ' ass1.m1lat1on sociale. Pour
1 tout individu originaire de la colome, il i'alla1t, pour €!tre recoIUlU par le sys-
1 tème en place, lhre instrutt, c'est-à-dire posséder la langue française ou 1'1118-
1 toire de ses institutions. L'enseignement et le livre,son principal out1l,devinre:r:t
prtr conséquent les moyens privilég1ée~ pour rétu38ir socialement et accédfilr Q la
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culture. Le mftme processus se perpétuera après l 1indépendance à peu de choses près,
Iltéducation et lIenseignement restant l'apanage d'une ndnorité, ie livre Sera
ItoujOUIE perçu comme étant le moyen par lequel l'on parvient à se hisser intellec
Ituellement puis socialement au niveau de cette élite.
1 A une époque où le colonisateur cherohnit à imposer ses propres modèles, l'ensei-
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1 a:fricain dont les OOlllposantes relèvent à la fois d'aspeots culturels, intellectuels, 1
scolaires et sociaux qUi influencent fortement les motivations profondes des 1eo-1
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Sénégalais en face du livre,' slinsèrent dans les schémas hérités de l'école colo
niale et d'un s,ystème éducationnel élaboré pour une petite élite et dans lequel
l'échelle des valeurs sociales, culturelles et intelleotuelles à. laquelle Be ref&
rent les indiVidus, relève de catégories souvent étrangères à leur propre sooiété
et introduites par le système éducationnel du colonisateur. Noua l'avons dit dans
le chapitre l, l'école des indépendances est l'héritière, du point de vue des
structures et des programmes de l'école coloniale dont la finalité était de créer
et d' entreterd.r une élite au détriment de la masse.
Or, le livre est 11.1nstrument par exoellence de ce système scolaire.
C'est "l'instrument d'un rite de passage: l'acquisition d'une somme donnée de
connaissances, peur accéder d'abord au travail, pUis à la réussite économique et
sociale" (1). Finalement, ceux: qui ont les moyens ou la chance de disposer de
bibliothèques, en généra.l les oitadins, mi choisissent pas de lire ou de ne pus
lire, mais Y sont presque contraints, pour sortir de leur propre condition et
acoéder à une sorte de pIUEl-~tre. Dl oÙ, semble-t-il, chez les lecteurs Sénégalc.io,
le caractère mzrginal de la lecture gratuite, pour le plaisir de se détendre. ':l'oute
lecture ne peut qu '3tre sérieuse et utilitaire.
Or, si lion pense qu'actuellement, les trois quarts des lectures propo
sées au lecteur Sénégalais, c'est-à-dire celles qui relatent des expériences,
t:rn.itent des problèmes ou simplement décrivent un imaginaire, sont étrangères ô.
l'univers culturel du lecteur, on peut aff'inner que livre peut ~tre, au m&1e titr8
que d'autres méd1Baculturels, un facteur supplémentaLre d'aliénation et d l 1.ruldapta
tian sociale. Il est vrai cependant que la lecture ne do:i. t pas ~tre rédUite à. le
connaissance dlune seule expérience humaine aussi or1ginale so:lt-ell.e et rejeter
celle des autres, et que les lecteurs Sénégalais doivent évidemment s'ouvrir aux
chef-d'oeuvres des littératures étrangères. Cependant nous pensons avec Robert
...
(1) Panorama sur le serv1.ce de bibli.othèque aux jeunes adultes.- Montréal, 1968.p. 6
-77-
Escurp1t que "llessentiel de ln nourriture intellectuelle a'un peuple doit avoir
été élaboré dans sa propre oonscienoe" (1), faute de quoi, le lecteur Sénégalais
tentem toujours d'atteindre, à travers ln lecture une "culture" qUi ne 8err:~ pas
toujour's en aooord avec ses propres valeurs.
Il nous reste maîntenant à voir, à travers les définitions données par
les lecteuxs, ce qu'est réellement pour eux, cet aBsemblage de feuilles imprimci€s
et reliées que l'on appelle livre et dont nous avons tout au 10ng de ce travail
étudié l'histoire et la d1.ffus1on au Sénégal et l'impaot sur les lecteurs de
Dakar. Qu'est-il pour un lecteur Sénégalais, l'utilisant plus ou moins régulière
ment? C'est la question que noua avons posée à nos enqu~tés en dernier lieu.
DIRprès l'étude de leurs réponses, nous aYOns pu élaborer une classification des
c1ifférents éléments d1indentifioation du livre, qui s'articule autour de deux
idées ma!"tressea, qui rev:l.ennent conatarmnent dans lem' défirdtion. D'une part le
livre est considéré comme un outil, un objet dont on se sert pour satisfaire un
besoin ou atteindre un objectif bien précis. Dans ce oaB la caraotéristique prin
cipale du livre, est la mono-:fonctionnali té dans 1.m perspect1.ve didactique, avec
des variantes dans II énoncé des éléments de caxa.ctérisation.
D'autre part le livre est vu à travers son auteur et devient donc la
voix ou la pltmLe dlun individu qUi s'adresse à quelqu'un d'autre. C'est ce que
nous poUITions appeler le livre-sujet, aUX caractéristiques mult1-fonctionnelles
et dont les éléments de caractérisation sont plus divera et plus subjectii's.
Pour les SénégalaiS, qu'est-dono qu'un livre?
•••
(1) ESCARPIT (Robert).- ldttérature et développement.- op. oit.- p. 248.
Id.vre-objet livre-sujet
Moyen d léduoation Compagnon, ami
de formation inter1.oouteur - oommunication - ~
d':l..n1'onnation logue
promotion socia~e engagement - prise de conscience
culture règles de morale - savoir vivre
détente - distraction - évasion
oonsoience d'un auteur
oivilisation
culture
moyen d'aotion - d'épanouissement
Dans la formulation de leurs réponses, les leoteurs n'établissent
évidemment pas une cloison étanche entre ces deux rubriques. De m&Le qu'il n'y a
pas d'me part des leoteurs ayant uniquement une canceptionllsubjective" du livre
et diautre part une oatégorie llutillsant dlune manière"objectiveflstrictematlt. :2.n
réalité, leur oonoeption du livre tient, en général, des deux à :la ':fois, avec
cependant une certaine prédominence pour le livre objet. Il t'aut aussi noter qUe
les dii'férentes rubriques de notre classif'icntion ne sont pas irréductibles et
sont souvent complément:tlres. Que par exemple, Ifil1:to:rma.tion par la lecture peut
déboucher sur une prise de conscience et un ellgaeJeIDent et qu'inversement ceux-ci
peuvent naitre d'une fonnation acquise à travers les livres. Quelques exer:lples de
défini tians données par les leoteurs pourront mieux penuetb de voir le caractère
multifonne du livre aux yeux du lecteur Sénégalaie.
- "pour moi le livre est la olef de la culture, un instrument de com:!luriccr
tion des idées à travers le temps. C'est auss~ un outil de txavail pour celui qui
veut se per.fectionner dans son domaine. Et le livre eét a.ussi un moyen de vulgari-
sation des différentes civilisations au delà de leurs frontières",
- "ctest un compagnon, un ami avec qui on passe les moments difficiles.
C'est aussi une source complémentaire de connaissanoes".
• ••
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_ 1Ile livre nous dévoile le monde et les hommes. Il permet à l'holIlIIl.€ de
sortir de la sphère restreinte dans 189.Ue11e il. a été oontraint de vivre par sa
condition sociale qui détermine son éduoation".
_1Iill'l livre, c'est llexpérienoe d'une vie humaine divtùguée à la maB8ell~
~~un livre) c'est tout sim.plement la conscience d'un auteur qui cherche
un interlocuteur; tme sorte Q.lobjet magique, un talismanu ,
-"un livre c'est le complément de l'homne seul, l'outil (théorique) de
l'homme qui veut ~tre un homme; c'est le remède de l'homme fatigué (bandes des-
Binées), GrAce à un livre un homme petit peut devenir lU1 honune grand".
~pour moi le livre est l'ambassadeur de l 1 inStruction, il nous permet
d'éviter certaines choses et il nous pennet aussi de conn.a1tre la vie et Ifactua-
lité dans d'autres pays sana jamais y avoir été. Il nous pennet aussi de parler
correëtement du Français, de l'Anglais et d'autres langues étrangères sans t'aire
de fautes ll ,
-"çà sert beaucoup à comprendre les réactions des divers types de carnc-
tères incarnés par différents personnages, suscités par le thème du livre. gà nous
montre souvent aussi oomment l'indifidu est formé par sa sooiété. Clest le moyen
de s'identifier à un personnage et de se voir peint objectivement. C'est le moyen
le plus complet pour vous de se situer dans l'ensemble de Ilhumanitéll •
_" c l es t quelqulun qui nous parlep qui nous fait découvrir des choses de
notre époque qUe lion ignore, c 1est quelqu'un qui nous fait r0ver, qui nous
éveille, nous distrait en nous racontant des histoires vraies ou de fiction, , C1est
un compagnon de toujours, il est là depuis des siècles et il ne fait que -
progresser'•
-"le livre est un message que son auteur veut délivrer, Veut faire sentir
'\ son lecteur. Pour partager les sentiments dont ll auteur nous fait part il faut
pénétrer dans le livre, pour éprouver le m&1e sent:lrnent qui a motivé l'fniw.~-\
traduire sa pensée, ses sentiments, dans quelques lignes qui sont à votre portée".
Ces dix dlfif'1nitions proposées par oertains leoteurs, à propos du livre,
ont été transcrites oomme nous les avons reçues. Nous avons simplement corrigé
purf'o1s quelques fauteS d'orthographe ou des maladresses de style qui auraient pu
•••
-so-
g/';iner la compréhension des textes tout en évitant d'altérer le fond de la pens,je
des lecteurs. Les réponses ayant été nombreuses, beaucoup se recoupaient. Nous
avons donc préféré choisir celles qui nous semblaient être les plus caractéristiques
et les plus :intéressantes pamti toutes celles que nous avons recueillies.
On peut tout d'abord oonstater à travers ceS définitions que le livre en
tant qu'objet n'est jamais considéré en lUi~~e. Il est toujours défini et situé
par référenoe à quelque chose (enseignement, information, éducation, savoir etc••• )
ou à quelqu'un (l'auteur, l'écrivain, l'homme eet.. ). Le livre pourrait-on dire es~
par déf'.1nition en situation, da.na l'esprit du lecteur SénégalaiS. M&1e lorsque l'Ui:~
d'eux part de la matière première pour définir le livre, il complète se dét'in1tiœl
par une référence d'ordre intellectuel: "un livre ctest du papier oultivéll•
Nous avons déoelé chez les lecteurs deux peles avons-nous dit .. Le PXBmirJJ:'
so refère au livre comme moyen dtétude, conune objet didactique. Presque tous les
J.ecteurs quî ont donné une défini. tian du livre y ont vu cet aspect. Nous avons
déjà parlé des conditions historiques, sociales et cultu~u1. maintiennent
encore le livre dans le giron de lrécole .. Objet essentielJ.ement scola1re et docu
mentaire, dont se sert le leoteur, son ut.11isatlon ne nécessite pas un enga.:;Œl9l1t
ou des prises de position intellectuelles de la part de celui-ci, ce Qui n'exclue
péLs éviden:m.ent qUe celUi-ci doive :faire preuve de ca.pacités de l'éf'lexion et d'a...'1a-
lySG, nécessaires à lB bOIllle compréhension de la lecture. Cependant cette lecture
se situe au niveau de la oonnaissanoe de 11 idée contenue da.'1s le texte et elle
dépasse rarement Ce stade .. Les livres teclmiquea de documentation, les manuels
scolaires et dans une oertaine mesure les revues, journaux et magazines relèvent de
ceG actes de leoture. "Il ne a1agit pas d'aboIÙ de savoir .s'ils plaistint ou déplai-
sent en eux:-m&1es, mais s'ila :indiquent oorrectement une oertaine chose du mondB ou
une notion" (1). "POUl" moi, d:1t un leoteur, le livre est l1ambassadeUl" de l'instruc-
tion, il nous pennet d' éviter certaines choses et il nous pennet aussi de col1lliÛtxe
1..1, vie et l'actualité dans d'autres pays sans jamais y avoir étéll • Dans les dét'ini-
tians de ce genre, le 'OU les auteurs du livre sont rarement pr:i.s en oonsid~ration.
Et le oontenu des ouvrages, le message en quelque sorte na pennet pas d'envisager
" .
-81 -
un dia.logue entre le leoteur et l'auteur par le biais de la lecture. L'utilisation
du livre comne moyen d'aocès à la connaissance telle que nous avons essayé de le
définir, s'explique pour des raisons d'ordre social, historique, ctù.turel, écono-
mique et intellectuel que nous avons essayé de montrer à travers le dépouillem.ent
de 11 enqu~te. Cependant si la leoture utilitaire .t :tonctionnelle occupe une pIao\;'
relativement importante dans les lectures des Sénégalais, elle n'en constitue qu f u.'1.
aspect et n'est pas: -chez eux: la seule façon d'aborder le livre.
En effet, dans la olassifïcation des éléments qui oaxactéri.se la lecture
chez les Sénégalais, nous avons dégagé une deuxième d:lJnension du livre que nous
avons désigné sous l'expression de "livre-sujettl • Il s'agit essentiellement ici
d'une utilisation du livre plus perso!ll1elle et plus subjeotive. Ici 11 s'agit moi.ns
du livre que de 11 auteur et de ses idées. Oelui-ci est personnalisé et nommé et
devient le "compagnontl,"1'ami", le livre n'est plus cet objet neutre et t'raid, !~lais~
représente "la conscience d'un auteurll , qui par le "dialogue et la communication"
traduit tme "expérience humaine ll • Au niveau du lecteur 11 acte de leoture devient lL'1
"engagement pour 11avenir" , une "prise de conscience" ,lIun moyen d'aotion et d'âpe.
nouissement" assortis de "règles de morale et de s8voi:r-viv:rcJJ •
Les livres de oulture générale, les :romans littéraires, les romans poli-
ci.ers sont les principatrx: genres littéraires qui permettent au leoteur de dépasser
le livre en tant que véhicule d'une idée, pour participer à liaotion décrite p8.r
11 auteur en acceptant ou en rejetant le massage contenu dans l'oemrre. C'est véritü-
blement une leoture active qui engage la liberté de l'individu, qui par son udhésion
ou par son refus du message de l'auteur, répond à l'appel de celui-ci, tant il est
vrai que toute " oeuvre littéraire est un appel" (2) qui ne trouve sa réalisation
complète que par l'acte de lecture.
Pour les lecteurs Sénégalais il semble tout d J abord que la lectut-e à Q6
niveau soit une expérience constamment renouvelée de libération et d'émancipation
•••
(1) SARTRE (Jean PalÙ).- Qu'est-ce Que la littérature ?- Paris: GaJ.J.:i.Inf>.rù, 1967.p. 26
(2) SARTRE (Jean Paul).- ibid. p.
- 82 -
personnelles". IlLe livre permet à l'homme de sortir de la sphère restreinte
dans laquelle il a été contraint de vivre par sa condition sociale qui détermine
son éducat1onll • En vivant par la lecture, une expérience dllférente de la
sienne, le lecteur transcende les contingences culturelles et sociales qui
pèsent sur lui pour mieux appréhender le monde et les hommes.
En outre, par rapport aux situations sociales dont ils prennent
connaissance à travers leurs lectures, certains lecteurs Sénégalais déclareni
que le livre "montre souvent œmmment l'individu est formé par sa société". Par
référence et par opposition à la situation sociale de celui qui le lit ,le .livr~
devient un révélateur. Cela n'est pas sana conséquence sur le plan individ.uel
et social, puisque fondamentalement, l'oeuvre littéraire est sollicitation ct
mise en question et pour certains lecteurs, la lecture pezmet de Ils 1identL'i,::I'
à un perso:tlllage et de se voir peint objectivement". Si cette approche de l' oeu-
vre littéraire peut effectivement ~tre un moyen de libération et d'éIDe:"UlcipQtio:1,
il peut aussi prendre des aspects néfastes et peut t3:tre motif dl alilhmtiŒl ,de
refus ou m&1e de rejet de 11 univers culturel et social d'origine pour une
société, un genre de vie, une vision du monde que l'on n'appréhende pas tota
lement et qui reste étrangère, car en tant que technique moderne, "il (le livre)
crée de nouveaux rapports entre les membres d'une société, entre l'homme et la
nature, en m~e temps qu'il transfonne la langue et suscite de nouvelles va
leurs, une nouvelle vision du monde".(1).
Nous touchons là à ce que les lecteurs interrogés désignent SOttS les
tû1!.l8D de "culturelletllcivilisationll. Il semble en effet que pour certains
lecteurs, avoir de la culture, c'est connaitre, posséder et pouvoir imiter
pŒr.f'ois des sohèmas propres à une autre civilisation et particulièrement 10.
civilisation ocoidentale. Schèmas. 'répandus et entretenus par tous les mo~r8ns
dl~BdBat1an 1 radio, presse, cinéma, télévision et livres. Or comme aes médias
sont en général contr81és par 1'étranger, il y a à craindre que l' éoancipatiœ,-
et la libération recherchées à travers ces moyens d'infomation en générol,...(1) NDIAYE (Théodore).- Le rale du livre dans les civilisations orales, LY!.
"le Soleil", supplément au nO 568.- p. 1
culturelle..
-83-
Car pouvoir déchif'frer un livre, Cl est-à-dire ~tre l;lapable de le
affiner leur jugement et développer leur sens critique .. Dans cette rechClJche
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en lisant le livre on s lapprop"rL.e' un certain pouvoir, et ce pouvoirlecture
D'où des défirûtians du livre assez innattendu : le livre devenant un "ob jù t
tirés du livre saint dans la confection de talisnans et gris-gris protecteurs.
nagique" un "to.lisman". Ces définitione sont sans doute à rapprocher du co.rac t 2-
part des p3.Y8 is1.an'iséa au sud du Sahara, réside non seulement dans le fo.i t
L1un des pouvoirs charisœtiques du Coran, au Sénégal et dans 12. p1u-
en sérère (2).
et la lecture au partioulier, ne se transfonnent inconsciemment en aliéna":;ion
re polysémique des termes qui désignent le livre dans certaines langues sénécu-
lire, ne sui'f'i t pas. Jmoore faut-il que la. lecture au delà des oonnaisssnces et
qu 1il Y a à 11 intérieur du livre se prend simplement en lisant le livrell (1).
COMpose possède de ce fait une certaine puissance. D'où l'utilisation des versets
laises • En wolof teere signifie à la fois, livre et gris-gris, de ofulle que séli'c
de la Oulture, il y a chez le. leotew Sénégalais un certain "fétichisn.e de le..
de l'expérienoe qu r elle peut apporter aux individus puisse fonner leur gaüt,
Ici l'efficacité temporelle et matérielle de l'écrit, telle qu'elle est conçue
en Occident, dans l' expression latine, verba vol (l1 t, scripta IllE.Ilent, devient
<w- 1il est le livre de la révélation, mais aussi que le texte matériel qui 112
un don efficace conf'éré par la grâce du texte et doué d'une certaine pui.s::;ancG.
Il Y a eu historiquement, seoble-t-11, une relation de cause à effet entre
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l'intraduction en Afrique d run enseignement religieux fondé sur la croyanc (: ep
un message transmis par le biais d 'ml texte écr:1.t et à la foi. toute nouvelle
des néophytes issus à 11 origine de société sans éontures et qui a.6si.milèrent la
puissance de ln lll.ouvelle religion à ce nouveau moyen de transmission d'une id80
que conatitulût 11 éonture. Il su:ff1sait donc de porter sur 80i des vers ets clu
livre saint pour ~tre avec Dieu.1 •••
, (1) FRANCE (~-ôt:rnn[)lret3 (S~~'rt ct ~ étuL.};4t..f;e~..-Lror~ -(X;l~ !Pt Teà::r1 niques (Direction) .. Journées dl études surJ.e dweloppement de ln lecture clona les1 états d'Afrique Noire d!expression franQaise et à Maùagascar.-Vaucresson,1Sl6S.p.1C.,(2) cf. NDI/l.YE (Théodore).- op .. oit. p. 5.
1
-.84-
Cependant ln comparaison par les lecteurs d'un livre à un talisman ne
relève pas selÙement de considérations religieUBes. Dans un domaine plus praI' ;ne,
le livre a été, à un moment donné de son histoire en Af'r.ique, une des cIers d8
la réussite sociale, de là ce pouvoir magique qui lui est attribué par certains
leoteurs, puisqu'il aufi'isai t de le posséder que ce soit intellectuelleI'lent ou
matériellement, pour changer sa candi ti.an d 'hollJDe.
S'11 était bon de noter cette conception assez singulière du livre,
il faut néanmoins préciser qutelle n' est le fait que de très peu de lecteurs. le
plupart en effet, le replace.t/anB sa finalité normale et naturelle, celle de le.
communication. Car le livre et llacte de lecture qui est son prolongement non,<::.l
ne se réalise réellement que dans le circuit auteur-lectelU'. Certes les canditiens
sociales, oulturelles et économiques influent aussi bien sur l'émetteur que le
récepteur, et l'auteur comme le lecteur ne sont jamais totalement libres de leUT3
pensées et de leurs aationa, mais il reste qu~elà ~es bruits pour reprendre
un terme de la sociologie de la lecture, qui entourent le Bessage littéraire j
celui-ci doit 0tre reçu et réinterprèté selon des propres sahèmas.
A oe propos il nous sem.ble que le lecteur Sénégalais éprouve des dif-
ficlÙtés à ce niveau. Non pes,qu'il ne soit pas oapable de réinterprèter les
messages contenus dans ses lectures, mais des facteurs socio-eulturels tro~i
longtemps accumlÙés oblitèrent quelque peu sa vision du livre. la colonisation,
et par la suite, l'introduction de la civilisation occidentale aves ses .Godèùes
et ses mythes, leur perpétuation par le système soolaire, llinBuf'fisance et b.
mauvaise répartition des bibliothèques, sont parmi les freina les plus ioportrl11tc
au dét'eloppement de la lecture en milieu sénégalais, tant il est vrai que le
livre, la lecture et les bibllot..lJ.èques, s'inscrivent au Sénégal dans un lontexte
bien particuJier qui n'est pa.s sans inf'luer sur leur utilisation. Il reste
cependant que, dans le processus de développement économique ct sooial du pays,
l'utilisation des moyens d'information soientifique et technique est indispensa-
ble. Que l'on ne saurait se passer du livre en tant que tel, aussi bien dons le
domaine de l'éducation qUe dans celui de l'infonnation en général, mais qulUl.'ID
rédéf1nition de la notion du livre s'impose tant au niveau ses structures de
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- 85 -
production (édition) de distribution (bibliothèques, librairies) qu1à celui dcs
leoteurs, pour une meilleure utilisation de l'objet littéraire.
CON a LUS ION-:-1-1-1-1-1-:-1-1-1-
·,
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Au tentl€ de cette étude sur le livre et la lecture publique à Dakar,
notre conclusion s'articulera sur quelques faits qui caractérisent le problène
de la lecture à Iakar. Ici comme dans toutes les grandes villes, le livre se
vulgarise de plus en plus en sortant de ses circuits traditiormels de dis tribu-
tien telles que les librairies, les bibliothèques et dans une certaine mesure
l'école et devient de ce fait plus familier et plus accessible à ceux qUi peuvent
lfutiliser, c'est .. 'tre les lecteurs potentiels. Or malgré ce phénomène qui ira
en se développant on oonstate que la lecture ne concerne réellement qu'une toute
petite ~orité concentrée essentiellement dans le quartier du plateau et ceci
pour des raisons sociales, politiques et économiques au détriment de la masse Les
lecteurs, dont les besoins en lecture Bont réels et évidents aussi bien chez les
o..dultes que chez les adolescents.
En outre nous avons constaté tout au long du dépouillement de l'enqu@te
que le livre était engagé, chez les Sénégalais notamment dans ce que nous avons
appelé "l'impasse scolaire". A savoir que les lecteurs dakarois ont tendance ,\
utiliser le livre dans une perspective scolaire et utilitaire, et ne lisent en
réali té que pendant la période de leur vie qui correspond sensiblement 0. celle
où ils vont en classe ou pendant laquelle ils ont besoin d'information pratique
et ponctuell~ en rapport avec des préoccupations professionnelles ou personnel~
les. Ce besoin de lecture s 1éteint au fur et à mesure que les lecteurs vieillis-
sent et sléloignent du monde scolaire. Un autre fait qui est notoire dans les
motivations des leotures des Sénégalais est cette espèce de mythe qui entoure
encore le livre :"i parfois inconsciemment et qui en fait un objet réservé :',- une
élite et que l'on doit nécessairement posséder, au sens propre comme au sens figurrL
pour faire partie de la minorité des privilégiés qui possèdent cette "culture"
dont les lecteurs ont si souvent parlé. Cette notion de culture G acquérir nous
ne l'avons retrouvée tout au long de l'enqu13te que dans les réponses fOu:r:T'..ies
...
-87-
par les lecteurs Sénégalais. Cr est l'une des différences fondamentales entre
ceux-ci et les lecteurs Français et Libanais. Si ces derniers font preuve de
•pragmatisme à l'égard du livre, il convient de retenir toutefois que les justi
:fications qu'ils apportent à leurs lectures s'arr@tent généralement à des consi-
dérations purement scolaires, les Français faisant pluttlt référence à dos
notions de goftt, d'habitude ou de plaisir personnel.
Pour les uns il n'y a pas de rupture entre le livre et leur proprG
réal1té sociale et cultu.relle. Ils peuvent donc par le biais de lectures Qui
retracent leur propre univers mental et intellectuel, participer à travers le
oontenu d'un texte, à une expérience qui ne leur est pas fondame.."1talement Str'C'_n-
gère. Nous avons awi constaté dans le dépouillement de llenqutte, le pw de,
place qu'occupait chez les Français, la lecture des oeuvres de la littér.2.turc
a:frioaine qtù appara!t en définitive comme étant pour eux une littératurl2 !"JarGi-
nale voie exotique.
Eour les autres par contre, lire c'est acquérir des idées, des valeurs,
dE:S comportements qui appartiennent à une autre civilisation qui dans d'autres
contextes : techonologique, éoonomique et social sont valorisés par rapport ~ux
valeurs de leur propre société. Savoir lire et pratiquer la lecture e' est :.l0uvoir
appréhender par le biais du livre cette autre situation qui. appara1t COr:iLle
l'idéal. Cela se tradUit concrètement pa,r un penchant très marqué pour tous 1· 'C.'
ouvrages qtù peuvent apporter une certaine promotion sociale (livres scolnires
ou documentaires) ou culturelle (livre classique de culture générale).
Cependant nous n'en concluerons pas que les lecteurs Sénégalais SOEt
tous aliénés. Leur attitude face au livre n'est, nous semble-t-il, qu'un aspuct
d'une situation sociale et culturelle plus générale où les individus subissent
quotidiennement les valeurs de l'Occident par l'entremise notamment des moyens
de "lommunication sooiale dont le livre. Par contre une fois qu'n.a retrouvent
dans leurs lec-tlires un monde, des préoooupations, des idées et des valeurs gui..
lem- sont propres, les juati.ficat1ons de leurs leat1u'es au nom de la "culture",
ne s'imposent plus, n'apparaissent plus explicitement dans leurs déclarations•
• ••
-sa,..
Llengouement des Sénégalais, pour la littérature afrioaine dl expression frnn-
çaise, relève moins d'un désir de découvrir une littérature, somme toute rela-
tivement neuve, que d'une communion avec des écrivains qui leur décrivent Wi.0
vision du monde à laquelle ils participent. A partir de ce moment, la lecture
n'exige pas dr~tre justifiée, elle devient le prolongement naturel de l'expé
rience quotidienne du lecteur. Et puisque cette littérature est composée "dloeu_
vres qui organisent I l tmaginaire selon des structures homologiques aux structures
sociales de la s1tua.~on historique" (1), il n'y a plus rupture entre le lecteur
et le monde décrit dans ses leotures, Nou.s retiendrons donc chez les lecteurs
Sénégalais llambiValence de leur comportement vis-à-vis du livre et de la leoture.
Certes, tout acta de lecture oomporte un aspect à la fois didactique et culturel,
mais 11 reste que par rapport à leurs homologues Français et Libanais, les Sén~-
galais sont les seuls à :faire une distinction très nette entre la lecture utili-
taire dans une perspeotive dlappnmt:issage dhme part et d1autre part des 100-
tures de culture générale en fondant cette distinction sU!' des types de lectur8.
Cette étude a permis aussi de mettre en évidence l'insuffisance des infraetl~c-
tures en matière de bibliothèques à Dakar d'une part et d1autre part leur r:"!.aU-
vaise localisation par rapport à la tlasse des lecte'UJ::'S. Le circuit du livre ~t
Dakar recoupe à peu de choses près d'autres circuits culturels, économ1.quuf] et
sociaux. Les lecteurs dakaro:i.s, de m'&1e que la plupart des travailleurs de 1."1
région du Cap-Vert,sont tributaires de la "Ville".
Nous retrouvons dans le domaine de l'1nfonnat1on en général une
situation caractéristique des p~s sous développés, où une nllo, 1a oapitale
en général, concentre en Bon sein la presque totalité des rouages 600io-
économiques au détriment du reste du pays. La distance qui existe entre le livre
et la majorité des lecteurs, pour la plupart africains, ne favorise en rien le
aéveloppement de la lecture; 11utilisation du livre restant de oe fait
ponctuelle, marginale vorre m&1e acc:i.dentelle"
(1) DUMAZEDIER (Joffre) HASSENl10RDER (Jean).- Eléments pour une sooiologie de le.production de la diffusion et de l'utilisation du livre.- in Bibliograp:u.ede la France, nO 24, juin 1962.- p. 60.
Or instaurer un circuit inverse de celui qui existe actuellement, en
organisant des structures de leoture en milieu populaire, c'est non seulement
créer les habitudes de leoture non fonctionnelles, mais aussi répondre aux
besoins spécifiques des lecteurs en matière de lecture. Nous avons constaté au
cours de lf'enqu~te que le rattachement de la plupart des bibliothèques de lecture
publique de Dakar, à des organismes étrangers, dont ils ne sont parfoiB que des
oentres de propagande culturelle, influe non seulement sur le choix des leotures
des usagers de oes bibliothèques, mais encore sur le oontenu de la littér'clture
qui leur est proposée.
Il Y a certes des comportements différents face aux livres entre les
lecteurs d'origine culturelle et sooiale différente, mais une démocratisation b:;
service des bibliothèques peut, aemble-t-il, diminuer considérablement ces dis
parités et leurs conséquences, en mettant le livre à la porté4 des lecteurs dans
les endroits où il vit habituellement. Car la bibliothèque nlest pas simplement
un ensemble d'annoires à livres ou de l'a\Y"0nnages richement garnie et régulière-
ment approvisionnés, elle doit fttre aussi et surtout cette institution dynnnique
qui par ses activités éducatives culturelles et de loisir, dépasse le cadre
étroit dlune minorité de privilégiés, pour Êltre au service du plus grand nor;br8.
A ce titre, les bibliothèques de lecture publique par leur organisntio~,
leur structure et leur t'iœlité doivent promouvoir le livre dana les masses
populaires. "6i elles veulent contribuer à résoudre au ma.x:1mum, l'écart qui
sépare la culture du grand public, des spécialistes et des créateurs, si elles
veulent @tre les agents dlune réelle démocratisation de la culture, elles doive~t
être animées d'un espr.tt social" (1).
Tel n l est pas le oos, pour ltheure, à Dakar. Le développement des bi-
bliothèques nl~t pae suiVi les progrès de llenaeignement, les infrastructures
léguées par le colonisateur n'ayant pas été renouvelées ou remplacées, les qmü-
ques rares instit1rt1ons organisées, sont de fait essentielle.ment tournées vers
•••
(,) DUMAZEIllJ;:R (Joffre). lIASSE'lFORDER (Jean).- Elémenta pour une sociologie clela production de la di:ffusion et de 1 1utilisation du livre.- in bib1iogr[;,-.
phie de la France, nO 24, juin 1961. p. 60
-90-
ce que nous avons appelé le circuit aisé du détriment de la masse des lecteurs.
Clest une des caraotéristiques des bibliothèques publiques de la capitale séné
galaise, que dl~tre, malgré elles peut-@tre nu service d'une minorité privil.é6'iG~
en dépit des efforts que déploient certaines d'entre elles pour dépasser leur
cadre géographique et atteindre d'autres lecteurs moins favorisés.
Cette discrimination de fuit qUi slinstaure entre les différents
lecteurs risque de subsister pendant un bon moment encore, faute de prévisions
à long tenne, au niveau des pouvoirs publics. Et les lecteurs de la Médina, r1u
Grand-Dakar et autres quartiers périphériques qui fonnent la majorité des lec
teurs potentiels et réels faute d'infrastructures au niveau de leurs zones
d'habitation seront toujours en situation de pénur:le en ce qui conceITl€ la
lecture. Cette situation, à notre seen, contribue à entretenir chez certains
lecteurs une v:ï.sion erronée du livre et de la lecttu'e, dans la mesure où ils sont
considérés connne subsidiaires, ma:rginaux et n i apparaissent pas comme facteurs
d'enrichissement intellectuel et culturel des individus et partant des sociétés
dans lesquelles ils v:f.vent et ag1.ssent, maiS simplement comme des moyens pemet
tant dtacquérir des connaissanoes pratiques à un moment précis de leur existence,
pour pouvoir accéder à une autre situation.
Cette utilisation partielle du livre, nia pas cependant éliminé conplè
tement chez les lecteurs un besoin latent de lecture et les efforts que déploient
les lecteurs pour sten procurer en est une preuve. IVàlgré le développement è.'au
tres ROYans d1infonnation ou de distraction, tels que le cinéma, la presse et la
mdio, le livre conserve une place assez ir.lportante comme moyen dl acquisi tion des
cor..na1ssances et dlaooès à ~9. culture. Le problème est surtout celui du développe
l!tent de l'1nf:œstructure de sa décentI"dlisation et de sa prise en charge par les
pouvoirs publics, pour une meilleure popular1eation du livre et de la lecture.
Cam aurait pour princ1püe conséquence de démysti:fier 11 objet-livre, apannge
d'une petite élite, en créant des habitudes de lecture dans tous les milieux.
Par delà, le livre se trouve donc poser le problème de l'introduction
de l'écrit et des moyensmodemes de transmission de l'ini'onnat1on dans des sociétés
encore largement dominées pax l'oralité. Parallèlement au développement des
.~
- 91 -
médias moderr!es, le oaractère oral de l'information au niveau des structures
traditionnelles afrioaines continue dl exister. Il y a doua ooexistence de deux
modes d f 1nf'ormation et parfois m@me utilisation de l'un par l'autre, dans le cu.,
par exemple de médias comme la radio ou la télévision.
Face aux moyens dont bénéficient les médias modernes, le oircuit de
llini'ormation risque dt€!tre unilatéral. Dana le cas des bibliothèques qUe nous
avons étudiées, il ressort qui elles sont les répliques exactes de celles qui
existent en Europe, tant du point de vue de leur conception technique que de le.
façon dont elles assurent le t.ronsfert de l'infoI'D.la.tion. Dans une perspective
plus nationale, les bibliothèques a:fricainea devmient 0tre pensées et créées
en fonction du milieu spéci:fique dans lequel elles sont implantées. Il s'agit
non seulement de démooratiser la. lecture en touchant le .maz:t.mum de lecteurs, ",o.ic
aussi par des actions faites à partir du livre: club de leoture, alphabétisa
tion et autres activités culturelles, de donner à l.'1nstitution bibliothèque "L'1'1
caractère plus social et plus engagé au service du développement de la nation.
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J.O.R.S.
J .O.R.S.
4228 du 3-VI-1972 p. 913
4263 du 2~II-1972 p. 1993
- Conseil sUEérieur du livre :
J.O.R.S. 4260 du ~-1972 p. 1910
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_ Prix de vente des liVTeS 1
J.a.R.S. 4223 du 6-V-1972 p. 734
- Pr1X de revient :
J.a.R.S. du l-VIII-1961 p. 473-474
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TABLE DES lIlATIERES-:-1-1-1-1-'-1-:-'-:-1-
INTRODUCTION ••••• o •••••••••••••••••••••••• o.' ••••••••••••••••• o ••••••• Page 1
Prem1ère Partie l 'Les Bibliothèques et la. lecture au Sénégal
a) Historique du livre et de la lecture au Sénégal•••••••••••• Page 9
b) Le. bibliothèque. de fulœ.r
La Région du Cap-Vert et Dakar•••••••••••••••••••••••
Le réseau documentaire à Dakar•••••••••••••••••••••••
Trois bibliothèques à Dakar •••••••••••••••••••••••••
- Lea leoteurs de oes trois bibliothèques ••••••••••••••
Deud.ème Partie 1 Enqu'lhe sur la Lecture Publique à Dakar
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25
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34
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a) ItEnqu@te et ses résultats ••••••••••••••••••••••••••••••••
- le questionnaire ••••••••••••••••••••••••••••••••••••
les leoteurs enfants ••••••••••••••••••••••••••••••••