UNIVERSITE CLAUDE BERNARD –LYON 1 FACULTE DE MEDECINE LYON EST Année 2014 N° ETHNOGRAPHIE D’UN CABINET DE MEDECINE GENERALE La question du sens dans la relation médecin-malade THESE Présentée A l’Université Claude Bernard Lyon 1 et soutenue publiquement le 20 novembre 2014 pour obtenir le grade de Docteur en Médecine par ASTYL Léa Née le 17/03/1982 à Al Khobar
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UNIVERSITE CLAUDE BERNARD –LYON 1
FACULTE DE MEDECINE LYON EST
Année 2014 N°
ETHNOGRAPHIE D’UN CABINET DE MEDECINE GENERALE
La question du sens dans la relation médecin-malade
THESE
Présentée
A l’Université Claude Bernard Lyon 1
et soutenue publiquement le 20 novembre 2014
pour obtenir le grade de Docteur en Médecine
par
ASTYL Léa
Née le 17/03/1982 à Al Khobar
UNIVERSITE CLAUDE BERNARD – LYON 1
. Président de l'Université François-Noël GILLY
. Président du Comité de Coordination François-Noël GILLY
des Etudes Médicales
. Secrétaire Général Alain HELLEU
SECTEUR SANTE
UFR DE MEDECINE LYON EST Doyen : Jérôme ETIENNE
UFR DE MEDECINE
LYON SUD – CHARLES MERIEUX Doyen : Carole BURILLON
INSTITUT DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES
ET BIOLOGIQUES (ISPB) Directrice : Christine VINCIGUERRA
UFR D'ODONTOLOGIE Directeur : Denis BOURGEOIS
INSTITUT DES SCIENCES ET TECHNIQUES DE
READAPTATION Directeur : Yves MATILLON
DEPARTEMENT DE FORMATION ET CENTRE
DE RECHERCHE EN BIOLOGIE HUMAINE Directeur : Pierre FARGE
SECTEUR SCIENCES ET TECHNOLOGIES
UFR DE SCIENCES ET TECHNOLOGIES Directeur : Fabien de MARCHI
UFR DE SCIENCES ET TECHNIQUES DES
ACTIVITES PHYSIQUES ET SPORTIVES Directeur :Claude COLLIGNON
(STAPS)
POLYTECH LYON Directeur : Pascal FOURNIER
I.U.T. Directeur : Christian COULET
INSTITUT DES SCIENCES FINANCIERES
ET ASSURANCES (ISFA) Directeur : Véronique MAUME-DESCHAMPS
I.U.F.M. Directeur : Régis BERNARD
CPE Directeur : Gérard PIGNAULT
Faculté de Médecine Lyon Est
Liste des enseignants 2014/2015
Professeurs des Universités – Praticiens Hospitaliers
Classe exceptionnelle Echelon 2
Cochat Pierre Pédiatrie Cordier Jean-François Pneumologie ; addictologie Etienne Jérôme Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Guérin Jean-François Biologie et médecine du développement
et de la reproduction ; gynécologie médicale Mauguière François Neurologie Ninet Jacques Médecine interne ; gériatrie et biologie du
brûlologie Breton Pierre Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie Chassard Dominique Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence Chevalier Philippe Cardiologie Claris Olivier Pédiatrie Colin Cyrille Epidémiologie, économie de la santé et prévention Colombel Marc Urologie Cottin Vincent Pneumologie ; addictologie D’Amato Thierry Psychiatrie d’adultes ; addictologie Delahaye François Cardiologie Disant François Oto-rhino-laryngologie Di Fillipo Sylvie Cardiologie Douek Philippe Radiologie et imagerie médicale Ducerf Christian Chirurgie digestive Dumontet Charles Hématologie ; transfusion Durieu Isabelle Médecine interne ; gériatrie et biologie du
vieillissement ; médecine générale ; addictologie Edery Charles Patrick Génétique Fauvel Jean-Pierre Thérapeutique ; médecine d’urgence ; addictologie
Gaucherand Pascal Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale Guenot Marc Neurochirurgie Gueyffier François Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie
clinique ; addictologie Guibaud Laurent Radiologie et imagerie médicale Herzberg Guillaume Chirurgie orthopédique et traumatologique Honnorat Jérôme Neurologie Lachaux Alain Pédiatrie Lermusiaux Patrick Chirurgie thoracique et cardiovasculaire Lina Bruno Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Lina Gérard Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Mabrut Jean-Yves Chirurgie générale Mertens Patrick Anatomie Mion François Physiologie Morel Yves Biochimie et biologie moléculaire Morelon Emmanuel Néphrologie Moulin Philippe Nutrition
Négrier Claude Hématologie ; transfusion Négrier Marie-Sylvie Cancérologie ; radiothérapie Neyret Philippe Chirurgie orthopédique et traumatologique Nicolino Marc Pédiatrie Nighoghossian Norbert Neurologie Ninet Jean Chirurgie thoracique et cardiovasculaire Obadia Jean-François Chirurgie thoracique et cardiovasculaire Ovize Michel Physiologie Picot Stéphane Parasitologie et mycologie Rode Gilles Médecine physique et de réadaptation Rousson Robert-Marc Biochimie et biologie moléculaire Roy Pascal Biostatistiques, informatique médicale et
technologies de communication Ruffion Alain Urologie Ryvlin Philippe Neurologie Scheiber Christian Biophysique et médecine nucléaire Schott-Pethelaz Anne-Marie Epidémiologie, économie de la santé et prévention Terra Jean-Louis Psychiatrie d’adultes ; addictologie Thivolet-Bejui Françoise Anatomie et cytologie pathologiques
Tilikete Caroline Physiologie Touraine Jean-Louis Néphrologie Truy Eric Oto-rhino-laryngologie Turjman Francis Radiologie et imagerie médicale Vallée Bernard Anatomie Vanhems Philippe Epidémiologie, économie de la santé et prévention
Professeurs des Universités – Praticiens Hospitaliers
Seconde Classe
Allaouchiche Bernard Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence Argaud Laurent Réanimation ; médecine d’urgence Aubrun Frédéric Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence Badet Lionel Urologie Bessereau Jean-Louis Biologie cellulaire Boussel Loïc Radiologie et imagerie médicale Calender Alain Génétique Charbotel Barbara Médecine et santé au travail Chapurlat Roland Rhumatologie Cotton François Radiologie et imagerie médicale Dalle Stéphane Dermato-vénéréologie Dargaud Yesim Hématologie ; transfusion Devouassoux Mojgan Anatomie et cytologie pathologiques Dubernard Gil Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale Dumortier Jérome Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie Fanton Laurent Médecine légale Faure Michel Dermato-vénéréologie Fellahi Jean-Luc Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence Ferry Tristan Maladie infectieuses ; maladies tropicales
Fourneret Pierre Pédopsychiatrie ; addictologie Gillet Yves Pédiatrie Girard Nicolas Pneumologie Gleizal Arnaud Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie Guyen Olivier Chirurgie orthopédique et traumatologique Henaine Roland Chirurgie thoracique et cardiovasculaire Hot Arnaud Médecine interne Huissoud Cyril Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
Jacquin-Courtois Sophie Médecine physique et de réadaptation Janier Marc Biophysique et médecine nucléaire Javouhey Etienne Pédiatrie Juillard Laurent Néphrologie Jullien Denis Dermato-vénéréologie Kodjikian Laurent Ophtalmologie Krolak Salmon Pierre Médecine interne ; gériatrie et biologie du
vieillissement ; médecine générale ; addictologie Lejeune Hervé Biologie et médecine du développement et de la
reproduction ; gynécologie médicale Merle Philippe Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie Michel Philippe Epidémiologie, économie de la santé et prévention Monneuse Olivier Chirurgie générale Mure Pierre-Yves Chirurgie infantile Nataf Serge Cytologie et histologie Pignat Jean-Christian Oto-rhino-laryngologie Poncet Gilles Chirurgie générale Raverot Gérald Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ;
Bérard Jérôme Chirurgie infantile Boulanger Pierre Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Bozio André Cardiologie Chayvialle Jean-Alain Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie Daligand Liliane Médecine légale et droit de la santé Descotes Jacques Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie Droz Jean-Pierre Cancérologie ; radiothérapie Floret Daniel Pédiatrie Gharib Claude Physiologie Itti Roland Biophysique et médecine nucléaire Kopp Nicolas Anatomie et cytologie pathologiques Neidhardt Jean-Pierre Anatomie Petit Paul Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence Rousset Bernard Biologie cellulaire Sindou Marc Neurochirurgie Trepo Christian Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie Trouillas Paul Neurologie Trouillas Jacqueline Cytologie et histologie Viale Jean-Paul Réanimation ; médecine d’urgence
Maîtres de Conférence – Praticiens Hospitaliers
Hors classe
Benchaib Mehdi Biologie et médecine du développement et de la
reproduction ; gynécologie médicale Bringuier Pierre-Paul Cytologie et histologie Davezies Philippe Médecine et santé au travail
Germain Michèle Physiologie Jarraud Sophie Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Jouvet Anne Anatomie et cytologie pathologiques Le Bars Didier Biophysique et médecine nucléaire Normand Jean-Claude Médecine et santé au travail Persat Florence Parasitologie et mycologie Pharaboz-Joly Marie-Odile Biochimie et biologie moléculaire
Piaton Eric Cytologie et histologie Rigal Dominique Hématologie ; transfusion Sappey-Marinier Dominique Biophysique et médecine nucléaire Streichenberger Nathalie Anatomie et cytologie pathologiques Timour-Chah Quadiri Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie
clinique ; addictologie
Maîtres de Conférence – Praticiens Hospitaliers
Première classe
Ader Florence Maladies infectieuses ; maladies tropicales Barnoud Raphaëlle Anatomie et cytologie pathologiques Bontemps Laurence Biophysique et médecine nucléaire Chalabreysse Lara Anatomie et cytologie pathologiques Charrière Sybil Nutrition Collardeau Frachon Sophie Anatomie et cytologie pathologiques Cozon Grégoire Immunologie Dubourg Laurence Physiologie Escuret Vanessa Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Hervieu Valérie Anatomie et cytologie pathologiques Kolopp-Sarda Marie Nathalie Immunologie Laurent Frédéric Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Lesca Gaëtan Génétique Maucort Boulch Delphine Biostatistiques, informatique médicale et
technologies de communication Meyronet David Anatomie et cytologie pathologiques Peretti Noel Nutrition Pina-Jomir Géraldine Biophysique et médecine nucléaire Plotton Ingrid Biochimie et biologie moléculaire Rabilloud Muriel Biostatistiques, informatique médicale et
technologies de communication Ritter Jacques Epidémiologie, économie de la santé et prévention Roman Sabine Physiologie Tardy Guidollet Véronique Biochimie et biologie moléculaire Tristan Anne Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Vlaeminck-Guillem Virginie Biochimie et biologie moléculaire Voiglio Eric Anatomie Wallon Martine Parasitologie et mycologie
Maîtres de Conférences – Praticiens Hospitaliers
Seconde classe
Casalegno Jean-Sébastien Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Chêne Gautier Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale Duclos Antoine Epidémiologie, économie de la santé et prévention Phan Alice Dermato-vénéréologie
Rheims Sylvain Neurologie Rimmele Thomas Anesthésiologie-réanimation ;
7.2 Annexe 2 : Entretien du Dr Marmotte, le 10/06/2014
Dr Marmotte s’assoit à son bureau, côté patient. Je m’assois du même côté sur la deuxième chaise.
Je pose l’enregistreur noir sur la table. L’entretien commence.
-On va reprendre votre parcours, si je peux juste avoir votre contexte familial pour quand même un
peu planter le décor?
-Tout à fait. (Grande inspiration) Bon, j’ai 57 ans. Je suis… installé ici depuis bientôt 30 ans, par choix,
c’est un quartier que j’ai choisi. Euh… J’avais fait des remplacements aux Minguettes, dans les années
80, au moment où ça allait très mal aux Minguettes, et j’avais beaucoup aimé la dimension à la fois
médicale, sociale et pluriculturelle. (Sourire) Et à l’époque, quand je me suis installé, c’était difficile
de créer son activité. J’ai trouvé un médecin, qui avait mis une annonce dans un cabinet, il se trouve
que ce médecin était un médecin juif, qui… avait créé son activité 5 ans auparavant et qui allait pour
des raisons religieuses à Jérusalem. On a tout de suite accroché, sur la conception du métier, sur la
façon de pratiquer la médecine générale (grande inspiration), on a conclu l’affaire et donc je me suis
installé le 1er juillet ici. (Silence). Alors la médecine générale, je l’ai choisi par choix, même si j’étais
plutôt programmé pour être un spécialiste, hein, du fait de mon milieu familial, qui était plutôt un
milieu d’intellectuel et puisque tous mes patrons me disaient, qu’ils pensaient tous que je ferais une
carrière universitaire (grande inspiration). J’ai tourné le dos à tout ça parce que, ce qui m’intéressait,
c’était de m’occuper des personnes, plus que des maladies et puis leur dimension globale, sur cette
dimension que j’évoquais tout à l’heure, donc je trouve, euh... que cette possibilité de m’installer est
venue au bon moment donc je me suis installé, le 1er juillet 1984, et j’avais juste 27 ans, voilà.
(Grande inspiration) (Sourire).
-Vous avez jamais travaillé avec ce fameux médecin ? Vous vous êtes suivis ?
-Non, non, je l’ai… remplacé deux, trois fois, j’suis allé voir plusieurs fois ses consultations, pour voir
comment il fonctionnait, c’était euh… Même approche globale de la personne, voilà.
-Vous le présentez comme un médecin juif, c’est important pour vous ? C’était quelque chose en
rapport avec le quartier ? Avec vous ?
Oui, non, euh, plusieurs significations, c’est-à-dire qu’il ne partait pas parce que ça ne marchait pas, il
partait pour des raisons religieuses, et que moi j’essayais aussi de vivre ma foi personnelle à
travers…dans mon métier, ça me semblait cohérent de… Voilà, il y avait une dimension, je veux dire,
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(grande inspiration) spirituelle dans l’engagement en tant que médecin généraliste, qui était chez
mon prédécesseur, qui était le mien.
-Pour en revenir un petit peu au début, je ne sais pas si vous allez vouloir l’aborder, quelle est votre
situation familiale? Avez-vous choisi d’avoir quelque chose d’autre que la médecine en parallèle?
-Euh, euh…
-L’idée c’est de savoir si vous êtes marié, si vous avez des enfants, etc… Ou, est-ce que la médecine
prend une part tellement importante dans votre vie, que finalement vous investissez peu les autres
domaines?
-La médecine, c’est quelque chose qui me passionne, d’accord, mais pour être bon médecin, il faut
être bien dans sa peau. Et pour être bien dans sa peau, il faut euh… Je vais dire, avoir autre chose en
dehors de la médecine. Parce que la médecine est un métier où on est…confronté, en tout cas la
médecine générale, en permanence à la souffrance, à toutes formes de souffrance, qui plus est, dans
un quartier comme celui-ci, donc il faut qu’on ait des lieux de ressourcement. Si je n’ai pas mes lieux
personnels de ressourcement où je…où je retrouve un équilibre et cet équilibre, bon, c’est ma vie
familiale. J’ai 4 filles (silence), hein, dont une finit… ses études de médecine, puisqu’elle est interne
en pédiatrie c’est-à-dire que j’ai réussi à ne pas la dégouter de la médecine (grande inspiration) en
tout cas, je ne l’ai pas forcée à faire médecine, c’est elle qui a deviné un jour, donc je me dis que
globalement l’investissement que j’ai eu dans mon métier n’a pas été négatif pour mes enfants, c’est
ma vision que j’ai. Même si à côté de l’investissement comme professionnel, j’ai eu un gros
investissement dans le syndicalisme (silence) puisque… rapidement après mon installation, je suis
entré au syndicat départemental, un an après, j’étais secrétaire général, un an après président du
syndicat départemental. Cinq ans après, j’étais président du syndicat régional et après je suis monté
au bureau national et j’ai été pendant 8 ans, membre du bureau national en tant que secrétaire
général pendant 4 ans et vice-président pendant 4 ans (grande inspiration). Et donc, ça me prenait
beaucoup de temps par rapport à mon activité. J’étais 2 jours complets par semaine absent (grande
inspiration). Mais, ça m’a permis aussi de voir toutes les dimensions de la médecine dans la société et
en particulier, si j’ai choisi un syndicat où on se battait pour l’égalité d’accès aux soins pour tous les
français. Cette dimension que je perçois dans mon activité quotidienne, puisqu’on voit bien, l’accès
aux soins compliqué, dans une métropole comme Lyon, où la très grande majorité des autres
médecins spécialistes sont en secteur 2. Donc, la seule possibilité que j’ai, c’est soit de travailler avec
des institutions hospitalières publiques ou mutualistes, pour avoir des correspondants secteur 1. Je
touche du doigt tous les jours, que ce n’est pas aussi simple que peuvent le dire certains, de trouver
un spécialiste, dans une grande ville comme Lyon, qui pratique les honoraires secteur 1.
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-Ce dernier sujet, c’est quelque chose d’important pour vous ?
-Oui, c’est une dimension humaine. Parce que (silence), j’aurais pu me satisfaire intellectuellement
de faire une spécialité, par mon cursus une famille d’intellectuels, grands-parents enseignants, père :
haut fonctionnaire, frère : haut fonctionnaire. Cette dimension de la médecine pointue, pour lequel
j’étais programmé dans ma famille, (inspiration buccale) et moi, j’ai refusé ça, parce que ce qui
m’intéresse c’est la personne justement globale, et puis, que toutes ces personnes soient… aient les
mêmes droits dans la société par rapport aux soins, parce que l’inégalité sociale produit de l’inégalité
de santé mais l’inégalité de santé produit de l’inégalité sociale. C’est-à-dire qu’un enfant qui n’est pas
bien soigné, il pourra moins avoir de lunettes, moins soigner ses problèmes d’otites à répétition, il
aura des problèmes éventuellement d’audition, donc tout ça peut contribuer à un retard scolaire qui
va aggraver le retard social, l’inégalité sociale. Pour moi, il y a une cohérence du point de vue humain,
et donc c’est là où ça touche mon problème de foi personnelle, hein, de travailler pour que toutes les
personnes soient au même niveau dans la société pour l’accès aux soins. Voilà. Donc, c’était à la fois,
le choix de l’installation dans ce quartier et mon engagement personnel dans le syndicalisme, le
syndicalisme social.
-Comment vous percevez-vous comme médecin, on va dire dans la pratique de tous les jours ?
(Le téléphone sonne 3 fois, il ne décroche pas)
C’est difficile de savoir (silence) qui l’on est parce que j’allais dire: on n’a aucun recul. Souvent, je me
dis qu’il faudrait que je me filme en consultation pour voir un peu comment je fonctionne. Je l’ai fait
plusieurs fois (silence), des jeux de rôles ou quand j’ai animé des bilans de compétences pour
l’association de formation continue où je me suis aussi investi, hein, je trouve que c’est extrêmement
intéressant de voir comment on fonctionne. J’essaye, moi, hein, d’être quand même un médecin qui
soit à l’écoute (silence), j’essaye aussi de prendre toutes les dimensions, hein, c’est-à-dire que la
personne vient pour un problème, et j’ai toujours d’autres questions, c’est : « Et à part ça, comment
ça va ? ». Voir un peu tout le reste, parce que je pense que quand une personne vient, elle n’est pas
malade par hasard, elle est malade parce qu’il y a un déséquilibre global dans son équilibre hein, ça
peut être une tension au travail, ça peut être une insomnie, ça peut être une tension familiale, ça
peut être un souci pour un enfant, des soucis financiers, quelque part, on comprend mieux la
personne quand on situe la maladie dans l’histoire de la personne, l’histoire à la fois diachronique et
synchronique. Hein. Voilà. Cette dimension m’intéresse maintenant. C’est ce que j’essaye de faire
maintenant, est-ce que je réussis ou pas ? (moue dubitative). Autre dimension qui m’intéresse, c’est
une dimension systémique. C’est pour ça, je trouve que la médecine générale, où on soigne plusieurs
générations, j’étais très tenté par la pédiatrie à un moment donné, mais quand on soigne les enfants,
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on ne soigne pas les parents, moi je soigne à la fois les enfants, les parents, les grands-parents et
même les arrières grands-parents, ce qui est une vision du fonctionnement familial et de tout ce qui
tourne autour des représentations, parce qu’on ne soigne pas des personnes sans essayer de
percevoir leurs représentations de la maladie, du soin, de tel hôpital… Quand je sais qu’une grand-
mère est morte à Grange-Blanche, à Edouard Herriot, parce que je sais que cet hôpital égal mort
pour eux, c’est des choses comme ça, qui sont extrêmement importantes pour moi d’aller chercher.
Voilà. J’essaye de faire une médecine que je veux dire globale, prendre la personne dans sa globalité.
Sa globalité personnelle mais inscrite dans un système, qui est son système de vie familiale, son
système de travail, hein, toutes les dimensions professionnelles, personnelles. Son système où elle
vit, c’est l’environnement c’est le quartier où on est ici, bien que j’ai un certain nombre de patients
qui viennent d’ailleurs que de ce quartier.
-Aviez-vous parfois l’impression d’être amené à utiliser plusieurs facettes de votre personnalité de
médecin pour arriver au soin ?
- Je crois que le soin c’est avant tout une relation. C’est-à-dire que c’est une personne, le patient qui
va questionner un médecin. C’est un sujet qui questionne un autre sujet. Donc, on est dans une
relation interpersonnelle. Le médecin que je suis à travers la demande que fait le patient, va utiliser
euh la science. A la fois, dans la technique d’interrogatoire, dans la technique de l’examen clinique,
quand je dis technique, c’est le côté rigoureux, en utilisant des examens paracliniques, en prescrivant
des thérapeutiques mais ça, ça n’a de sens que si le patient adhère à ce que le médecin va proposer,
et donc c’est quelqu’un qui me pose une question, et moi, je dois lui répondre de telle sorte qu’il me
comprenne. Si je plaque ma connaissance sur un patient, ça ne marchera pas. Et comme je dis
toujours aux internes quand ils arrivent, si quelqu’un me parle en zoulou, faut que je réponde en
zoulou, si je réponds anglais, il ne va pas comprendre. Parce qu’au fond, je suis persuadé que moi, je
ne soigne personne. La seule chose que je peux faire c’est aider les gens à se soigner. Quel que soit la
finalité du soin. Que ce soit la guérison, la stabilisation, ou la mort, c’est la même démarche. Mon
objectif, c’est de faire en sorte que le patient soit le sujet du soin. (Silence) Et donc, pour qu’il soit le
sujet du soin, il faut qu’il comprenne ce qu’il se passe, il faut qu’il comprenne ce qu’est sa maladie et
qu’il adhère à ce que je propose. Souvent, en fin de consultation, je dis aux gens, est ce que ça vous
convient ? lls me répondent : « C’est vous le docteur ». Moi, je réponds : « C’est vous le patient ».
(grande inspiration) Voilà. (Rire). Moi, je sais ce que j’ai envie de leur proposer mais si je sens qu’il y a
une réticence, les gens ça ne marchera pas. C’est symbolique. Je prends l’exemple du sirop
antitussif : quand vous donnez un antitussif, si c’est pas le sirop, ça ne marchera pas. Si je donne un
comprimé du même médicament, ça marchera beaucoup moins, sauf si je dis : « écoutez, je vous
donne du sirop en comprimé parce que comme vous êtes diabétique, le comprimé il n’est pas
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sucré ». Là, ça peut passer. Voilà. Tous les gens ont des représentations un petit peu. Donc, ces
représentations peuvent gêner l’acceptation de ce que je dis, donc il faut que je travaille dessus pour
que le patient adhère au projet thérapeutique, ce qu’on appelle l’alliance thérapeutique. Mais, je vais
beaucoup plus loin que l’alliance thérapeutique. En fait, c’est à moi de proposer quelque chose, pour
que le patient s’en empare. Pour que j’accompagne… On est plus dans l’alliance, on est dans la
guidance thérapeutique. Peut-être aller plus loin que l’alliance thérapeutique. C’est ce que j’essaye
de faire. Maintenant, est-ce que je réussis ? C’est autre chose. (Sourire)
-Cela fait plusieurs années que vous êtes dans le quartier dans le même local, c’est ça ?
-J’ai agrandi, et quand les filles sont arrivées, pour qu’elles soient plus près de la porte et du
secrétariat, je me suis mis tout au fond. (Ton humoristique)
-Comment gérez-vous votre association ? La pratique des autres, c’est quelque chose qui vous
importe ?
-C’est extrêmement important. Je voulais toujours travailler en groupe. Le problème c’est que j’avais
trop vu de cabinets de groupe qui ne fonctionnaient pas. Je préférais créer mon cabinet de groupe. Je
me suis installé tout seul. Quand l’activité s’est suffisamment développée, par rapport à ma norme à
moi, j’ai cherché un premier associé que j’avais connu dans un réseau ecclésial, donc je savais qu’il
partageait les mêmes valeurs. Comme 10 ans après, je cherchais un autre associé pour développer le
cabinet, j’ai pensé à une jeune femme médecin qui finissait ses études, qui était aussi dans un groupe
que j’accompagnais de réflexion spirituelle. Je lui ai proposé de venir comme je savais qu’elle
partageait les mêmes valeurs, et puis elle ne voulait pas venir travailler toute seule parce qu’elle ne
voulait pas trop travailler. Elle est venue avec une de ses amies, avec une de mes anciennes internes
mais qui était venue chez moi, sur les conseils de la première, donc c’était des gens que j’avais formé.
Donc, on partait sur une vision assez proche de la maladie, assez proche du rôle du médecin, assez
proche du rapport au malade, pour qu’on puisse être interchangeables. C’est-à-dire, on fait de la
médecine avec qui on est. Chaque médecin est différent. Quand mes associés voient mes patients, ils
font avec qui ils sont. Heureusement, ce ne sont pas des clones de qui je suis. Hein. Mais, il y a quand
même une cohérence globale dans la vision qu’ils ont. Pour moi, cette association elle était
intéressante à deux points de vue, dans la continuité qu’on offrait au soin aux patientes et dans le …
notre pouvoir échanger. C’est vrai qu’on prend un temps d’échange tous les jours, sur les patients, on
essaye de manger au moins une à deux fois par mois, tous ensemble. On fait le tour du cabinet et
puis on a des relations, je veux dire… duelles en fonction des besoins. Mais quand mes associés sont
arrivés, je faisais toujours extrêmement attention quand ils partaient. J’arrêtais mes consultations.
J’allais les saluer, pour vérifier que tout s’était bien passé. Qu’il n’y avait pas de difficultés, pas de
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tension. Je voulais vraiment que l’intégration se passe bien, d’abord pour Dr Léopard au début puis
après pour Dr Hérisson et Dr Zèbre, et se fasse dans de meilleures conditions. Etant le plus vieux,
j’étais la référence et je faisais attention à limiter les tensions. Il n’y a jamais eu de difficultés. Je ne
dis pas qu’il n’y a pas un peu de tensions sur quoique ce soit. Il y a eu des moments parfois tendus,
en fonction des itinéraires de vie, des uns et des autres mais bon, je crois que c’est une association
qui pour moi fonctionne bien. Dans tout ce que j’imaginais au départ. A la fois au service du patient
et une dynamique de groupe. Parce que je pense qu’on ne travaille bien qu’en équipe.
-De manière plus légère, ces murs sont loués, que pouvez-vous m’en dire?
-On est en location, on est en location parce qu’en HLM (note du chercheur : Hébergement à Loyer
Modéré), on ne peut que louer. Et puis, euh…moi je n’ai jamais cherché à faire de l’argent sur un
investissement immobilier. J’ai un rapport à l’argent qui n’est pas celui de capitaliser ou quoique ce
soit. Je voulais que mes enfants aient de quoi faire leurs études. Maintenant, elles ont quasiment
toutes fini. J’en ai une dernière qui est en faculté. Donc voilà. J’aurais ce qu’il faut pour ma retraite. Je
ne cherche pas beaucoup d’argent. La location ne m’a jamais posé de problèmes. Le fait d’exercer
dans le même lieu que là où habitent les patients, quand on travaille dans le social, c’est important.
On est le seul cabinet en logement social dans le quartier.
-C’est assez atypique d’être dans un logement HLM (note du chercheur : Hébergement à Loyer
Modéré)?
On exerce dans le même lieu que les gens habitent. Quand on va construire peut-être une maison de
santé pluridisciplinaire, ce sera l’office HLM, et on sera encore en location dans le quartier. (Note de
l’auteur : encore à l’état de projet)
-Dans le cadre de cette location, qui s’occupe de la décoration ?
-On essaye d’y mettre un peu de notre touche à nous. Il y a beaucoup de désordre, parce qu’il y a
beaucoup de choses dans ma tête On essaye euh quand même de mettre notre touche à nous. Il
faut qu’il y ait à la fois de la rigueur ; tout ce qu’il faut au niveau matériel, mais qu’il y ait aussi un
certain accueil de qualité. Ce n’est pas un lieu aseptisé comme à l’hôpital.
-Comme c’est un appartement bureau loué, il n’y a donc pas un côté « hôpital »? (note du chercheur:
moi-même, j’amalgame appartement et cabinet)
-On ne veut absolument pas. Absolument pas. On essaye de donner une dimension personnelle.
Apres euh… C’est aussi la façon dont on occupe les lieux. Il n’y a pas simplement l’environnement,
c’est comment on vit dans les lieux. La façon dont on est, humainement parlant. J’ai vu une patiente
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ce matin qui me dit : « j’ai vu ma sœur hier, elle me disait que son médecin était glacial et hautain
mais qu’elle aimait ça ». Tant mieux, il faut des médecins pour tout le monde. Nous ce n’est pas
comme ça qu’on essaye de fonctionner, dans le respect de la personne. On est dans le face à face et
non dans le je-sais-tout, donc je vais vous dire ce qu’il faut faire. De mettre de l’humanité dedans,
parce qu’on fait… La médecine c’est un rapport de sujet à sujet : un qui questionne et un qui répond.
Il faut que cette dimension humanitaire, elle paraisse aussi ailleurs.
-Vous avez votre bureau attitré, Dr Léopard aussi, mais Dr Hérisson et Dr Zèbre changent de bureau
parfois. Est-ce que chacun a apporté une touche à son bureau ou restez-vous neutres?
-Chacun a apporté sa touche un peu au bureau, je veux dire, voilà.
-Avez-vous l’impression que votre bureau vous ressemble ?
-Je ne sais pas s’il me ressemble, mais je m’y sens bien. (Rire) Sachant que je pourrais travailler un
peu n’ importe où. Le mieux… c’est… je me sens chez moi quand j’arrive ici. Je n’ai pas le sentiment
d’arriver au travail, dans un bureau aseptisé. (Sourire).
-Très bien. Avez-vous déjà eu des remarques sur la localisation du cabinet, de la part des patients?
Est-ce que c’est quelque chose qui parait les importer ?
-Je n’ai pas eu de remarques sur le lieu où je travaillais. Euh… j’en ai pas à la tête qui viennent. J’ai
des gens qui viennent de l’extérieur. J’ai même un professeur de faculté qui venait en salle d’attente,
à côté de tout le monde. Ça n’a jamais posé de problème. Un jour, j’avais deux patients en salle
d’attente, un qui était une patiente du cabinet, du quartier et un qui était policier. On discute un peu
avec la patiente : « mon mari s’est fait prendre par la police etc… » Je discute un peu avec . Et puis, la
personne d’après, le policier : « On a fait une super opération hier. On a arrêté des gens ». Donc en
salle d’attente, s’étaient côtoyés le monsieur qui avait arrêté le mari de la dame qui était à côté
d’elle. Ils ne l’ont pas su. Je crois que c’est ça la médecine aussi. C’est ça qui est extraordinaire dans la
médecine. Le jour où il y avait ce professeur avec un nœud papillon… avec des gens qui avait
l’équivalent de la CMU (note du chercheur : Couverture Médicale Universelle) à l’époque. C’est ça qui
est extraordinaire dans la médecine. C’est que vous avez deux genres de type de personnes qui
viennent de milieux complétement différents, des histoires complètement différentes, elles sont côte
à côte en salle d’attente. Elles ne le savent pas, sauf peut-être l’habillement. Mais, quand elles sont
face à moi, c’est pareil, il n’y en a pas une qui a plus de valeur que d’autres. Voilà. J’essaye de tout
donner. Ce que je peux donner. Pour les rendre acteurs de leurs soins. De faire en sorte, que la
demande qui est formulé au départ, trouve une réponse adéquate.
109
- J’ai remarqué qu’on sonne et qu’on vient nous ouvrir à la porte, au cabinet, pour quelles raisons ?
-Deux raisons. La première, c’est que j’avais lu (silence), que les agressions se faisaient toujours
quand il y avait marqué : « sonnez et entrez », parce qu’on ne régulait pas. Donc, je suis toujours allé
ouvrir pour faire de la régulation quand je n’avais pas de secrétaire, une fois que la personne est en
salle d’attente, c’est beaucoup plus difficile de lui dire que ce n’est pas possible de le prendre que
quand elle est sur le pas de la porte. La deuxième chose, je pense que l’accueil par la secrétaire fait
partie de l’accueil complet au cabinet. C’est un élément essentiel. Comment les gens sont accueillis
quand ils arrivent ici. Ils sont reconnus. C’est le début du soin. (Ça sonne justement). Il passe par la
qualité de l’accueil qu’on a.
-Parlez-moi de la porte de la salle d’attente, elle est souvent fermée…
La porte de la salle d’attente est souvent fermée. C’est pour laisser un peu d’autonomie aux
médecins. On a le droit de faire une pause sans que les gens disent : « il est parti ».Deuxièmement, il
y a une forme de confidentialité. Il m’arrive d’avoir plusieurs membres de la même famille qui
viennent la même journée. Ils n’ont pas besoin de savoir si l’autre est là. Donc sauf s’ils se croisent
dans la salle d’attente, c’est pour éviter de savoir qui était là. J’avais une personne qui me disait, c’est
marrant, certains jours vous me dites : « Au revoir Madame untel » et d’autres fois, vous me dites :
« Au revoir Madame ». « Oh, je ne fais pas attention… » je dis. En fait, je ne mettais pas son nom,
quand quelqu’un de sa famille, était en salle d’attente. Inconsciemment, je l’ai réalisé à ce moment-là
que je ne mettais pas son nom quand il y a avait quelqu’un. C’est aussi préserver le secret médical.
Ne pas savoir qui est en salle d’attente. Actuellement, la porte est ouverte, il fait très chaud, avec la
canicule. C’est aussi à cause de ça. On est obligé d’aérer à cause de la chaleur mais sinon je demande
aux secrétaires de fermer.
-Je vous remercie.
110
7.3 Annexe 3 : Entretien du Dr Zèbre, le 23/06/2014.
On s’installe chacune de part et d’autre du bureau. Moi côté patient, elle côté médecin.
-Quel est votre parcours de médecin généraliste ?
-C’est vrai que ce n’était pas ma première idée quand j’ai commencé médecine. Je voulais faire de la
chirurgie, ce qui était un peu à l’opposé. Dès que je suis allée au bloc, j’ai bien senti que ce n’était pas
pour moi. (Rire) Et puis, euh… au fil des stages, en discutant avec des amis. J’ai senti que c’était…
J’aimais bien l’idée d’avoir une activité variée, de ne pas faire tout le temps la même spécialité, de
revoir les gens sur la durée. C’était vraiment les deux arguments qui me tenaient à cœur. Et puis,
heu... je voulais m’installer assez vite. J’ai hésité un petit peu, entre la campagne et la ville. J’avais un
peu peur de la campagne avec les gardes et tout ça… et de trop travailler à la campagne. Et du coup,
j’ai choisi de m’installer sur Lyon. Comme je connaissais bien Dr Marmotte qui cherchait une
associée, voilà, je me suis installée 8 jours après ma thèse. Très rapide.
-En parallèle, avez-vous des enfants ? Quel est votre cadre familial ?
-J’ai 39 ans, je me suis installée en 2003, à 28 ans. J’ai 4 enfants. Quand je me suis installée, j’en avais
un et j’en ai eu trois après au cabinet.
-Au niveau de votre intégration au cabinet, votre arrivée ayant eu lieu après Dr Marmotte et Dr
Léopard, quelle a été l’organisation ? Avez-vous été à cheval sur deux bureaux ?
Alors, en fait, on est arrivées tout de suite à deux avec le Dr Hérisson. On a partagé tout de suite
notre bureau toutes les deux. Par contre, depuis le départ, il y a un jour où on travaille dans les
bureaux d’un des associés.
-C’est quelque chose qui vous pèse au quotidien ?
On en prend son partie. C’est vrai que les patients nous disent : « Ah, vous avez changé de
bureau ? ». Encore maintenant, on leur explique : « oui le jeudi, je travaille de l’autre côté ». Bon, ce
qui pèse un peu, c’est que de l’autre côté, il y a un tas de papiers qui s’accumulent, ça j’aime pas trop
… (Rire) Arriver, voir cette masse de papier, j’avoue que, voilà … Bon, je mets ça de côté, mais
l’exercice avec les autres médecins, on s’entend tellement bien. On travaille. On a le même état
d’esprit. On a une qualité de travail qui est importante vraiment, donc je fais abstraction du reste. Le
fait de tourner, ce n’est pas tellement gênant. En plus, maintenant, là-bas, je peux faire de la gynéco,
car il a changé de table d’examen, du coup il a des étriers. Ça, ça facilite pas mal la tâche. Avant, il
111
fallait demander aux gens : « les frottis, c’est que le lundi, mardi ». Ça, c’était un peu lourd.
Maintenant, je peux faire la même chose des deux côtés. J’ai mes papiers dans un coin. Non, ça va.
-Par rapport à l’exercice médical de vos collègues, vous avez la même façon de faire ?
On n’a pas la même façon d’exercer mais on a la même façon de voir la médecine. On n’a pas la
même façon d’exercer parce qu’on a des patientèles qui sont différentes. Ça se voit. Moi, je ne fais
pas beaucoup de suivi de psychiatrie. J’ai deux de mes collègues qui en font plus. Non, on n’a pas
forcément la même façon de travailler mais on a le même état d’esprit. Je ne sais pas si je suis claire.
On est bien attaché à la personne. Enfin, on a un peu la même idée de la médecine. On n’est pas
dans l’abattage. On trouve que le contact avec le patient, c’est important. La relation… Et puis, je
trouve qu’on est bien. Quand on a un souci, on s’en parle, on se pose des questions entre nous, on
mange régulièrement ensemble pour ça, du coup ça donne un peu… Même si on ne travaille pas de la
même façon.
-C’était important pour vous de travailler dans un quartier comme celui-ci ? Dans un immeuble de
l’office HLM (note du chercheur: Hébergement à Loyer Modéré)?
- (Rire) Oui, c’était important. Parce que le fait d’être installée dans un quartier populaire, pour moi,
ça a du sens et ça a toujours du sens d’ailleurs. C’est pour ça que je suis très contente d’être installée
ici. Après, oui, on rencontre des gens qui sont en difficultés sociales, dans la misère, quand même
pas négligeable... En fait, ils ont tous des problèmes. Mais aussi… Voilà… C’est ce qui m’intéressait.
Voilà.
-L’installation de deux femmes a-t-elle modifié la patientèle du cabinet?
-On a récupéré pas mal de suivi gynécologique, et on fait souvent le suivi gynécologique des
patientes de nos confrères hommes. De la pédiatrie. Mais ils font aussi de la pédiatrie. J’aime bien,
mais on ne fait pas que ça. On fait aussi le suivi de grossesse. C’est varié. On leur explique qu’on fait
tout ça. C’est vrai que ça ouvre l‘activité.
-Quel médecin pensez-vous être ? Vous êtes quel type de médecin ?
-(long silence) Euh… Qu’est-ce qu’il y a comme type de médecin ?
-Comment vous qualifieriez-vous en tant que médecin ?
-Plutôt sur ma façon d’être ou sur mon exercice… Médecin à temps partiel, femme euh… Souvent en
retard dans ses rendez-vous, ça, c’est sûr. Et en même temps, je pense être à l’écoute des patients,
en tout cas, j’essaye de l’être. (Silence). Voilà.
112
-Comment vos patients vous perçoivent-ils?
- Je ne sais pas. Je crois que ça dépend des patients, en fait. S’ils continuent de venir vers moi, c’est
qu’ils y trouvent leur compte. Je pense que je ne suis pas trop stressée. Pas trop speed. Ce matin, j’ai
un patient qui m’a dit : « C’est bien, on sent que vous êtes détendue… ». Je ne suis pas sûre qu’ils
ressentent tous ça. Après, ça dépend des moments. Je pense être plutôt souriante. Après, je pense
que des fois, comment dire, je suis un peu directe. Mais ça, je le suis tout le temps. Je ne sais pas s’ils
peuvent le ressentir. Je ne sais pas s’ils le disent…
-L’environnement du bureau, la décoration du cabinet, c’est quelque chose qui compte pour vous ?
-Je trouve quand même que ça compte. Que les gens se sentent bien. Je trouve quand même que
notre cabinet est un peu vieux. Et j’ai déjà des patients qui m’ont dit, enfin, ils ne m’ont pas
dit : « chez vous, c’est moche », mais presque. (Silence). Déjà, ce n’est pas accessible. Il y a des
marches en bas. Dès qu’on a une poussette, c’est compliqué. L’ascenseur ne marche pas toujours. Ça,
c’est un point négatif. Après, c’est tellement compliqué dans le quartier, de changer de locaux... Je
trouve quand même que ça manque, oui… En même temps, je trouve que … je trouve que c’est bien
d’être dans un immeuble de l’office HLM (note du chercheur: Hébergement à Loyer Modéré), parce
qu’on est euh… avec les gens du quartier quoi. On aurait un cabinet hyperluxueux, ça ne collerait pas
trop quoi. Donc, voilà. Entre l’hyperluxueux et des fois, la tapisserie qui se décolle, je trouve qu’il y a
un entre deux. Après, je ne suis pas sûre que ce soit le plus important pour les patients. Ou alors, ça
dépend des patients, il y en a qui vont s’attacher à des choses matérielles et d’autres pour qui, ce
n’est pas du tout ce qui est recherché quoi. Moi, je trouve que c’est important que ce soit au moins
propre, qu’il y ait de la place en salle d’attente. Voilà. Que ce soit un petit peu décoré. Qu’il y ait
quand même deux, trois petites choses. Montrer qu’il y a de la vie, que ce n’est pas complètement
décrépi.
- Avez-vous personnalisé les lieux ?
-Un peu oui, j’ai déjà des dessins des enfants. Voilà. Ça type un peu… Il y a un ou deux patients qui
ont remarqué. Surtout qu’il a signé avec son nom de famille. Il y a un patient qui m’a dit : « Ah, mais
c’est votre fils ». Il a eu l’œil. Les autres n’ont pas trop vu. Mais comme il l’avait fait ici, un matin et
qu’il voulait absolument que je l’accroche. Je l’ai fait. Oui, c’est un peu typé.
-L’horloge a-t-elle une utilité particulière en face du bureau ?
-L’horloge, c’est pour prendre le pouls car nous n’avions pas de trotteuse… (Note du chercheur: Dr
Hérisson et elle-même). Voilà. C’est uniquement pour ça.
113
-La porte de la salle d’attente fermée, est-ce que ça a un sens pour vous ?
-Certains patients ne veulent pas. Ça permet de contrôler les va-et-vient dans le cabinet, comme un
sas.
-J’ai recensé plusieurs affiches sur des incivilités, une porte d’entrée que vous ouvrez-vous-même,
avez-vous une politique particulière ?
-Oui, nous avons beaucoup d’incivilités et des problèmes de comportement. Ils ne s’en rendent pas
toujours compte. On essaye de les noter et de les signaler s’ils se répètent. Concernant la porte
d’entrée, on trouve que l’accueil, c’est important et ça permet de contrôler le passage. La secrétaire
va ouvrir la porte lorsque ça sonne et qu’elle est là. Le reste du temps, c’est nous. Son bureau a été
changé (note du chercheur: pour un bureau plus grand et une banque plus haute). Elle se sentait
envahie par les patients et trouvait que sur le plan de la confidentialité, ça n’était pas optimal. C’est
en changeant le bureau, qu’on s’est rendu compte que l’ancien était minuscule…
-Avez-vous remarqué que pour boire de l’eau vous allez systématiquement en salle de repos, alors
qu’un point d’eau existe dans votre bureau, et cela plusieurs fois par jour?
-Non, en effet, je n’avais pas fait attention... (Rires). Je n’ai pas envie de boire de l’eau dans mon
bureau.
-Vous êtes-vous déjà assise dans la salle d’attente? Pour regarder les affiches, par exemple?
-Non, jamais, à part quelques secondes avec des amis. J’affiche de temps en temps des papiers que je
reçois.
-Je vous remercie.
114
7.4 Annexe 4 : Entretien du Dr Hérisson, le 20/06/2014.
On s’installe chacune de part et d’autre du bureau. Moi, côté patient, elle, côté médecin.
- Présentez-vous en quelques mots ? Quel est votre parcours professionnel ?
- J’ai 39 ans, j’ai 3 enfants… qui grandissent maintenant, qui me laissent un petit peu plus de temps
pour voilà, mon activité professionnelle et… extra professionnelle d’ailleurs aussi… Euh, je me suis
installée très rapidement après la fin de l’internat parce que j’ai effectué mon stage chez le praticien
ici, chez le Dr Marmotte, qui cherchait une associée, donc euh j’ai voilà, réfléchi très rapidement et
j’ai dit oui, et… je me suis installée le même jour que Dr Zèbre, nous sommes installées toutes les
deux à temps partiel. Et les messieurs ont diminué leur temps de travail, donc on est arrivé à 3 jours
par semaine chacune, c’est un rythme de travail qui vraiment depuis le départ, me convient tout à
fait, me permet voilà d’être au cabinet 3 jours par semaine et d’en profiter, de suivre mes patients,
j’ai l’impression correctement, et de profiter de chez moi et bon voilà. D’être à mon avis quand
même assez présente, et ça m’a permis, voilà en tout cas une organisation familiale et
professionnelle tout à fait épanouissante pendant ces dix ans d’installation et progressivement je me
suis pas mal investie dans les organismes professionnels qui nous entourent. Et c’est pareil, je me fais
vraiment plaisir à rencontrer d’autres gens à rencontrer d’autres médecins ou d’autres euh ...
d’autres organismes qui prennent des décisions un peu pour nous. Ça m’a permis de comprendre
aussi le fonctionnement de la société, plein de choses. Et puis, parfois de faire comprendre à d’autres
ce qu’on peut nous, rencontrer dans des quartiers comme le nôtre et je pense que c’est important
que oui, qu’on puisse échanger, qu’on puisse apporter nos expériences de ce qui peut se passer dans
un cabinet situé en zone populaire, socialement difficile.
-C’est quelque chose d’important pour vous la situation géographique du cabinet ?
-Oui, même si au départ, y a… enfin voilà, quand j’ai fait mes études, je ne pensais pas du tout, à ce
moment-là, enfin, je pense que je ne connaissais pas d’ailleurs, et c’est vraiment pendant mon stage
chez le praticien, et puis en connaissant le Dr Marmotte que je me suis dit que ça me convenait bien
et que j’aimais ce genre de prise en charge, de relation où on a une dimension socio-médicale qui est
quand même très, très importante.
-Dans ce cadre-là, par rapport au patient, vous vous percevez comment en tant que médecin ?
-Comme étant euh… comme acceptant tout le monde, je pense ne pas trop juger les patients.
J’essaye en tout cas de ne pas le juger du tout, même s’ils sont sortants de prison ou d’autres
115
situations comme ça… qui parfois peuvent mettre un frein. Eh bien, j’essaye vraiment d’être le plus
ouverte possible, et j’ai l’impression que, voilà, que les patients le ressentent comme ça. Que ce soit
vis-à-vis de la toxicomanie, de l’alcoolisme, ou des sorties de prison, on en a quand même plusieurs,
voilà, j’ai l’impression que les gens arrivent même parfois à le dire quoi, que ils apprécient aussi
d’être considérés aussi comme… voilà, comme… quelqu’un de la société qui a droit à tout, euh aux
mêmes choses que les autres. Je pense que c’est important, je me dis que les gens, ils ont leur vie,
leurs difficultés, que ce n’est pas à moi de juger ça de toute façon, la justice est là pour ça. Et puis
moi, je suis là pour les soigner et puis les écouter.
-C’est une vision qui est partagée dans le cabinet ? Avez-vous tous la même ligne de pensée ?
-Ah oui, je crois vraiment que, en tout cas, tous les quatre, on a une dimension de l’accès au soin qui
est la même. Ça, ça me parait vraiment évident. On va recevoir tout le monde, quoi, je crois que c’est
vraiment euh… le mot d’ordre de chacun et on s’est rendu compte dès le départ qu’on avait la même
façon de fonctionner. Je pense qu’on a quand même une relation à l’argent aussi, qui est la même,
voilà. Il n’y a d’ailleurs jamais de conflit là-dessus. Jamais, jamais, jamais… On se rend compte qu’on
n’exerce pas de la même façon. On a chacun notre façon de faire (rire), voilà, on va même pouvoir se
critiquer par rapport à ça. Je veux dire forcément, euh on va voilà, pouvoir apporter notre point de
vue sur l’exercice de l’un ou de l’autre mais tout en se respectant. Je crois qu’il y a un respect mutuel
qui est vraiment complet depuis le départ et…c’est appréciable.
- Dr Zèbre et vous, partagez votre bureau et changez de bureau une fois par semaine, comment vivez-
vous cette situation ?
-Alors, moi, je le vis très bien, je ne sais pas comment Dr Zèbre le vit, ça nous oblige à ranger notre
bureau quand le vendredi soir, quand je sais que le lundi c’est Dr Zèbre qui arrive, mais ça fait partie
du respect de l’autre et elle fait pareil, je pense, quand j’arrive le bureau est propre. Donc, voilà. Ça
me parait être, voilà, non, finalement, ça ne me dérange pas, ça ne pèse pas plus que ça. Ce qui est
un petit peu pénible, c’est de ne pas avoir tout sur place quand on est dans un autre bureau, en fait,
plus que le fait de partager, partager le bureau, ça ne me dérange absolument pas, mais le fait d’aller
dans un autre bureau, fait qu’on n’a pas nos papiers sur place. Voilà. L’ordinateur n’est pas tout à fait
configuré comme moi je l’aurais fait. Bon, en pratique, j’ai l’impression que ça ne dérange pas du tout
les patients, à partir du moment, où ils savent quel médecin ils voient, qu’on les amène à droite ou à
gauche, ça n’a pas l’air d’être très important pour eux.
-Les locaux sont loués. La décoration, personnaliser les lieux, c’est quelque chose d’important pour
vous ?
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Alors, on n’a pas beaucoup personnalisé. Un petit peu notre propre cabinet à nous avec Dr Zèbre. On
avait refait les locaux quand on est arrivées, il y a 11 ans, euh…enfin, tapisserie et sol. C’est vétuste,
c’est sûr. Je pense qu’on sera quand même content, si on arrive à changer de locaux un jour, parce
qu’on se rend bien compte, voilà, qu’Il y a quand même des endroits qui deviennent sales et puis
difficilement, maintenant…nettoyables parce que, parce que c’est vieux parce que, voilà … voilà, y a
ce côté-là qui est quand même un petit peu gênant. Après non, euh, je n’attache pas une importance
vraiment, à personnaliser le cabinet, quoi. Non.
-Comment l’affichage de la salle d’attente est- il organisé?
-Non, c’est vraiment laissé à la… euh, c’est… on s’en occupe très peu de ça (sourire). Quand il y en a
un qui a une idée, il a le droit de la donner et de poser son affiche. On s’en occupe peu, c’est vrai, de
ça. On a refait par contre la salle d’attente, il n‘y a pas très longtemps, mais bon elle a déjà été, voilà,
la tapisserie a déjà été déchirée, bon tout ça, on a recollé comme on pouvait. C’est une pièce qui
s’abime vite. Donc… euh… La décoration non, c’est vrai, que ce n’est vraiment pas quelque chose qui
nous prend du temps (rire), ça, c’est sûr. Bon.
-La porte de la salle d’attente est souvent fermée, que souhaitez-vous signifier par-là?
-C’est pour des raisons de confidentialité parce qu’on trouve que sinon les gens entendent tout ce
qui se passe, notamment au secrétariat. Et puis, beaucoup de gens sont de la même famille, etc… des
patients euh peuvent consulter sans que les autres membres de la famille soient au courant. Donc,
c’est vrai que, bon, ça nous permet… Voilà. Il nous semble qu’il y a plus de confidentialité en fermant
la porte, voilà.
-Concernant l’entrée, elle est inhabituelle pour un cabinet médical, il existe une sonnette, puis on vient
nous ouvrir la porte, c’est du fait du hasard ?
-Non, c’est quelque chose qui restait important pour des raisons de sécurité, pour le coup, parce que,
bah, ça nous permet de filtrer plus les personnes qui arrivent, qui rentrent et une fois qu’elles sont
rentrées ou installées, pour leur dire qu’on ne peut pas les voir, accéder à leur demande parce que eh
bien : soit ils ne sont pas du cabinet, soit il y a des demandes de toxicomanie ou de je ne sais pas
quoi, qui sont, voilà, à laquelle on ne peut pas accéder et bien, s’ils sont sur le pas de la porte, c’est
plus facile de leur dire non. Ils s’en vont pas contents. Mais une fois qu’ils sont dedans, bah, c’est
quand même plus compliqué. Voilà. Et ça nous permet d’être plus en sécurité, à mon avis.
-Y a-t-il eu des cas d’agressions au cabinet médical?
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-Finalement assez peu, euh... une fois, moi, depuis mon installation, je suis allée à la police. Un
patient qui euh voilà, qui était très énervé, justement toxicomane, et qui est rentré alors que
j’examinais quelqu’un. Bon. Voilà. Du coup, j’étais allée porter plainte et dans le même coup, il avait
volé le téléphone portable du Dr Léopard, bon après, de la même façon, c’est quelqu’un que… je ne
le jugerai pas. C’est la justice d’ailleurs, qui a fait son travail, bon, voilà, malheureusement. C’est des
gens qui ont plein de difficultés par ailleurs. Voilà. Il avait volé le téléphone portable, mais répondu
au téléphone quand on avait appelé. Voilà. Donc, c’est pour dire que ce n’était pas du grand
méchant… c’était du grand perdu (sourire).
-Avez-vous la sensation par moment d’avoir recours à plusieurs rôles, lors de vos consultations, en
tant que médecin, pour améliorer votre alliance thérapeutique ?
-Des rôles sociaux, d’assistante sociale très, très, très fréquemment. Je crois qu’on est vraiment euh…
oui, un soutien pour certaines familles qu’on renvoie pourtant vers les services sociaux, mais qui
reviennent quand même très régulièrement, et dans les consultations on se rend bien compte qu’il y
a beaucoup de… voilà, de problèmes sociaux à régler, de conseils à donner, d’aller voir untel ou untel
pour s’en sortir. Ce n’est pas nous forcément qui réglons les problèmes, mais en tout cas de les
diriger vers les bonnes personnes, ça, c’est hyper fréquent que voilà, dans leur motifs de
consultation, quels qu’ils soient. C’est en fait des problèmes financiers ou autres, voilà, c’est là qu’on
peut quand même les diriger vers les bonnes personnes pour essayer de s’en sortir. Vers qui faire les
demandes de CMU (note du chercheur : couverture maladie universelle), vers qui, plein qui ne savent
pas… C’est après leur redire, voilà.
-Comment avez-vous acquis ce bagage d’aides sociales, d’orientation des patients ?
-Je pense qu’il faut qu’au départ ça intéresse, quand même. On se rend compte, en tant que maitre
de stage, il y a des étudiants qui sont intéressés et d’autres qui nous disent : « Non mais, on fait trop
de social ici, ça ne m’intéresse pas. » (Rire), par exemple. Donc, c’est là aussi que je me rends
compte, que sûrement effectivement, qu’on en fait beaucoup. Et puis… donc, il faut que ça intéresse.
Et après, bah du coup, dans le cadre du pôle santé (note de l’auteur : projet actuel de mise en
relation d’interlocuteurs d’un même quarter, médico-sociaux…), on a rencontré pas mal de
personnes, et maintenant bah, c’est vrai que, même eux n’hésitent pas à nous appeler, entre la PMI
(note du chercheur: protection maternelle et infantile), le médecin de la crèche, ils nous appellent
assez facilement, voilà… maintenant qu’on se connait physiquement aussi, c’est beaucoup plus facile.
J’imagine qu’on ne connait pas tous les leviers quand même parce qu’en fait, il existe tellement de
choses en parallèle, que je suis sûre qu’on passe à côté de plein de choses. Même les patients,
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passent à côté de plein d’aides, que ce soit physiques, sociales etc... Il existe trop de choses en
parallèle, je pense.
-Y a-t-il des choses importantes que nous n’avons pas évoquées dans votre personnage de médecin ou
sur votre exercice? Voulez-vous repréciser quelque chose ?
-Je crois que dans les réunions professionnelles, par exemple, qui sont à l’extérieur du cabinet, je me
rends vraiment compte, qu’en tant que médecin, on a des patientèles très différentes. Et que même
sans vouloir nier quoique ce soit, les médecins que je peux rencontrer à certaines réunions ne se
rendent pas compte de la réalité de ce que peuvent vivre certains patients. Et sont quand même
encore persuadés, encore dans le fait que certains patients profitent de… du système, que certains
patients sont demandeurs d’arrêts de travail très fréquemment, etc… dans nos populations, que c’est
hyper fréquent, qu’ils sont tous comme ça… et ça c’est vraiment ce message-là que j’essaye de faire
passer aussi, dans certaines réunions, où euh… voilà je donne mon point de vue et je suis… Il y a
sûrement 2% de la population qui profite du système, et on est d’accord, mais voilà, je préfère ne pas
avoir la CMU (note du chercheur: couverture médicale universelle) et être dans ma situation que
dans la leur, quoi. Je crois que les gens ne se rendent pas compte... Enfin, il y a un certain nombre de
médecins qui ne se rendent absolument pas compte de ça, quoi. Et ça, c’est… oui… vraiment, je m’en
rends compte dans certaines réunions où les gens ont des réflexions mais qui sont… voilà, qui moi,
me… quand je vois ce qu’on vit, ce que les patients vivent ici, pas moi hein! Mais je me dis, non! Ils
sont à dix milles lieux de comprendre et de voilà… Pourquoi les gens, pourquoi une femme enceinte
ne prend pas rendez-vous pour son échographie, dès le début de sa grossesse, tout de suite, tout de
suite etc… C’est incompréhensible que les gens ne s’inscrivent pas la sixième semaine de … et bien
voilà. Il y a encore plein de gynécologues que je peux rencontrer au conseil de l’Ordre (note du
chercheur: l’Ordre des médecins) notamment, qui ne peuvent pas comprendre que : c’est aux gens
de se prendre en charge, c’est à eux de vraiment, ils ont qu’à faire les choses, comme il faut,
correctement, et ils ont qu’à se prendre en charge. Je crois que ce n’est pas si simple que ça, quoi. Il y
a des difficultés réelles familiales et sociales qui font que, mais même les antécédents médicaux qui
font que, les gens ne vont pas forcément s’inscrire à la maternité à la sixième semaine de grossesse,
quoi…
-Ces notions vous importent donc?
-Oui, c’est quelque chose d’important, oui. Je suis persuadée que ça, … ça, ça m’a conforté dans mes
engagements professionnels autres en tout cas. Moi, je suis beaucoup moins engagée que d’autres
du syndicat dans les histoires politiques et tout ça, mais par contre faire comprendre aux autres de
119
ma profession (sourire), certaines réalités du terrain, eh bien, ça oui, ça, ça fait partie… des défis du
conseil de l’Ordre (note du chercheur: l’Ordre des médecins) notamment.
-Je vous remercie.
120
7.5 Annexe 5 : Entretien du Dr Gazelle, le 16/07/2014.
Il préfère qu’on fasse l’entretien dans la salle de repos/cuisine, c’est plus convivial pour parler. Je le
suis. Je pose l’enregistreur sur la table à manger.
-L’idée de départ c’est vraiment de se raconter un petit peu de par le parcours professionnel…
-D’accord… Wow! Y a du boulot! Mon parcours professionnel, ben il a commencé évidemment déjà
avec les premières années de médecine puisque c’est là que ça a commencé pour moi, et les
premières interrogations à partir de la 3ème ou 4ème année de médecine. Donc plantage en 1ére
année, normal… On ne passe pas du premier coup, ‘fin ça n’arrive pas à tout le monde. 2ème année et
3ème année pas de problème… Arrivé en 4ème année, je commence à faire autre chose que de la
médecine. J’ai toujours fait de la musique et puis je rencontre des gens qui me montrent… on va
dire… un autre visage du savoir médical. Un autre visage… et je vais le dire carrément – puisque de
toute façon c’est couvert par le secret médical - j’ai fréquenté un groupe de « spirits » qui a pignon
sur rue à Lyon depuis un siècle et … alors que l’on m’enseignait- en même temps je commence à
m’intéresser à l’énergétique chinoise - on m’enseigne que le cœur est un organe automatique sur
lequel on n’a pas de pouvoir. Moi, par le simple pouvoir de ma volonté et de mon désir, je ralentis
les battements de mon cœur et voilà, donc je fais une expérience très très forte en 4ème année de
médecine, et je plante ma 4ème année de médecine… Bon, ça peut arriver… Arrive la 5ème année. Fin
de 5eme année, à cause de la faculté où j’étais, extrêmement élitiste Alexis Carré, je n’avais droit
qu’à une seule dette pour passer de 5 en 6, j’en avais deux… Donc je plante ma 5ème année. C’est là
où je me dis qu’est-ce que je fais en médecine? Je me dis est-ce qu’il faut que je continue? Voilà,
retaper ma 5ème année ? Et là, on m’a dit qu’il fallait absolument que je continue parce que cette
sensibilité et la distance que j’avais par rapport à ce que l’on m’apprenait, il fallait absolument que je
les garde donc j’ai quand même réussi à finir. Alors qu’au départ, j’étais parti pour être interne et
pour moi, on m’avait appris que la véritable médecine c’était la médecine de spécialité, c’est la vision
très CHU (note du chercheur : Centre Hospitalier Universitaire) centrée… J’étais rentré là-dedans et je
me suis aperçu très très rapidement que l’internat ce n’était pas pour moi, j’en avais ras-le-bol de la
faculté et je n’allais pas encore me remettre à bosser pour faire quoi comme spécialité ? La seule
spécialité qui m’intéressait, c’était la pédiatrie, donc ce qui n’est pas une spécialité, qui est de la
médecine générale appliquée à l’enfant. Je me suis dit, me taper l’internat juste pour ça et pour en
plus voir tout le temps des enfants. Ce qui est bien mais c’est quand même restrictif, je n’aimais pas
que ça, j’aimais aussi le reste. C’est pour ça que j’ai abandonné l’idée de l’internat assez rapidement
quand j’ai vu le niveau de difficulté, et j’ai fait un semestre de pédiatrie… Ensuite, j’ai fait deux ans de
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remplacement, histoire de tâter le terrain puisqu’à cette époque-là on n’avait pas les SASPAS (note
du chercheur : Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée) et je me suis installé
donc avec des conditions d’installation anti-commerciales. Ce qui ne se faisait absolument pas à cette
époque-là. A cette époque-là, on négociait le droit de présentation de la clientèle, on ne peut pas
vendre une clientèle. On négociait le droit de présentation et le simple fait de t’asseoir aux côtés d’un
médecin qui était installé, tu payais un quart, un tiers, voire une moitié de son chiffre d’affaire.
-D’accord, on parle de quelle année à peu près ?
-1990, moi je me suis installé en 1993. Et le médecin que tu connais donc (note du chercheur : Dr
Marmotte) avec lequel je me suis installé, m’a dit : « Ecoute, je considère que je n’ai rien à te vendre.
Au contraire, tu me rends un service en venant t’installer à côté de moi il y a longtemps que je
cherche un associé. Tu viens t’asseoir à côté de moi, tu prends tous les nouveaux patients qui
arrivent et on partage les charges du cabinet, c’est normal ». Et encore au bout de quelques mois
d’installation, il est venu me voir en disant mais ce n’est pas normal que tu paies autant de charges
que moi alors que tu vois moins de patients que moi… On va proratiser. Et là je lui ai dit : « Ecoute, je
pense que si je m’étais installé tout seul, j’aurai payé plein pot le cabinet. C’est déjà pas mal que je
n’en paie que la moitié et je n’ai pas payé de droits de présentation ». C’est pour te dire que son
exigence éthique, son niveau qui me va tout à fait, je me suis tout à fait reconnu, son côté... reconnu
dans le milieu confessionnel. Et au bout de dix ans d’exercice, donc en 2003, en m’épuisant à suivre
quelqu’un qui avait un rythme épuisant, impossible à suivre, insensé, une bête du travail, c’est un
type exceptionnel, des capacités de synthèse de travail, d’abnégation, tout ce que tu voudras. C’est
un type exceptionnel ! Donc, je l’ai suivi un peu comme un modèle, comme on peut suivre quelqu’un
tu sais quand on ne sait pas, un Maître! Et en 2003 j’ai luxé le genou gauche, celui qui avait été opéré,
une première fois, je n’ai pas écouté, j’ai luxé le genou droit, normal, celui qui n’avait toujours pas
été opéré, et celui qui n’avait pas été opéré. Et comme je n’ai toujours pas écouté, j’ai luxé les
neurones. Je suis passé par la case Deroxat® (note de l’auteur : médicament antidépresseur). Et là, je
me suis dit ce n’était pas possible, je ne pouvais pas faire d’infarctus, parce que je fais du vélo, je ne
fume pas, je ne bois pas, je ne pouvais pas faire... n’importe. C’est le cerveau qui a … et ça a
correspondu au moment où les filles sont arrivées et on est tous passés en temps partiel. Depuis un
peu plus de dix ans, vu qu’elles sont là depuis 2003. Elles aussi donc, on les a recrutées par le milieu
confessionnel. Une, Dr Zèbre, Dr Marmotte la suivait depuis le début de ses études de médecine dans
un groupe de réflexion chrétien et il lui a proposé l’installation. Et elle est arrivée directement avec
Dr Hérisson, que Dr Marmotte avait eu comme interne. Et Dr Hérisson donc, était une collègue et
une amie du Dr Zèbre du coup la mayonnaise a pris tout de suite, parce que nous, on avait peur de
passer de deux à quatre. On se disait, ce n’est pas possible cela va faire de trop gros changements sur
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le cabinet. Mais de fait, on est passé de deux à trois en réalité. A nous quatre, on ne fait pas un temps
plein puisqu’on n’est pas là tous les jours et que elles deux partagent le cabinet qu’elles
s’entendaient super bien, ça a été complètement lisse, on est passé de deux à quatre, tout le monde
à temps partiel. Et depuis ce temps-là, cela fait onze ans, tous les jours je viens au travail avec plaisir
et il me reste quinze ans d’exercice. Et je ne considère pas que j’ai quinze ans à tirer, j’ai quinze ans
d’exercice avec un plaisir, pas renouvelé tous les jours, mais constant. Donc, la qualité d’exercice que
j’ai, la qualité d’association, je connais mes associés, leurs conjoints, conjointes, leurs enfants, leurs
dates de naissance, les prénoms, tout ça...ça, c’est assez exceptionnel… Avec ces conditions-là, avec
le temps partiel, je me vois travailler encore jusqu’à l’âge de 67 ans. Parce qu’il faut que je travaille
jusqu’à 67. J’en ai 52, il faut que je travaille jusqu’à 67.
-Ça ne vous fait plus peur ?
-Ça ne me fait plus peur, ça ne pose aucun problème…
-Et c’était quelque chose d’important d’être avec des gens qui avaient cette façon de fonctionner ?
-La même éthique, oui c’est important parce qu’on est dans un quartier où il y a énormément de
souffrance: souffrance sociale, souffrance psychologique et si on n’a pas un ancrage à la fois entre
nous-mêmes à pouvoir échanger quand il y a des cas difficiles. Quand on dit des «cas difficiles», ils
sont d’abord difficiles pour les patients. S’ils sont difficiles pour nous c’est qu’on est humain. S’ils ne
sont pas difficiles, il faut qu’on change de travail, ça veut dire qu’on est devenu des professionnels
froids, des machines qui appliquent des protocoles, etc… Donc, il faut changer de métier. Donc, on a
à la fois cette qualité d’association entre nous, mais il faut aussi un ancrage spirituel parce que c’est
ce qui permet de durer et peut-être pas de comprendre mais au moins d’admettre.
-Un mot peut-être de votre - on va dire - environnement familial…
-Effectivement ça aussi ça a compté beaucoup parce que mon épouse et moi avons six enfants, ça
occupe pas mal, et que les dix premières années de mon installation les enfants se sont succédés très
très rapidement puisqu’il y a 6 ans d’écart entre l’aîné et la 4ème, moins de 6 ans d’écart, et que c’était
le moment où je m’installais, c’était le moment où je bossais un maximum. Je n’étais absolument pas
disponible pour la maison. Donc ça a permis effectivement de financer la maison, ça a permis de faire
beaucoup de choses, un déménagement… et voilà, je ne voyais pas mes gosses et cela non plus ne
m’allait pas du tout et donc depuis que je suis passé en temps partiel, les deux suivants qui ont 13
ans et bientôt 6 ans, ceux-là ont bénéficié de mon rythme et voilà j’ai pu les apprécier beaucoup plus.
Donc ça c’est très important. En dehors de la formation initiale à la Faculté, qui est ce qu’elle est.
C’est sûr que la sélection était encore pire que maintenant. Elle ne se faisait que sur la mémoire
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exclusivement. Donc, comme je dis très souvent aux patients et aux gens qui disent : « Oh là là ! Il
faut être intelligent pour être médecin ! ». Pas du tout, ça se saurait, ça se saurait s’il fallait être
intelligent, il suffit juste d’avoir de la mémoire. Un ordinateur a de la mémoire, il n’est pas du tout
intelligent. Donc, j’ai fait beaucoup de formations après, en dehors du circuit classique. J’ai fait une
initiation à la médecine chinoise traditionnelle, j’ai fait des séminaires de thérapie comportementale,
j’ai fait une initiation à la PNL, Programmation Neurolinguistique. Après avoir fait l’initiation à la
médecine chinoise traditionnelle, j’ai fait à titre personnel une initiation au tai-chi ce qui me permet à
l’heure qu’il est de prescrire aussi bien de l’acupuncture que de l’ostéopathie, à certains patients qui
sont dans une impasse de la médecine occidentale classique. Il y en a beaucoup, beaucoup,
beaucoup… J’avais lu un article il y a quelque temps de ça, comme quoi 50% des patients qui
sortaient de l’hôpital malgré les plateaux techniques de l’hôpital, sortaient sans diagnostic. Des
impasses en médecine occidentale, on en a beaucoup.
-Comment vous vous décririez comme médecin ?
-Comment je me décris ? Ben, je ne suis incontestablement pas toujours dans les tuyaux de l’ANAES
(note du chercheur : Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé). C’est aussi la raison
pour laquelle je ne veux pas être maître de stage parce que j’ai à la fois un mode de fonctionnement
intuitif et aussi un mode de fonctionnement scientifique, heureusement… mais selon le moment il y
en a un qui l’emporte sur l’autre et il y a des décisions thérapeutiques que j’ai beaucoup de mal à
justifier et qui jusqu’à présent, je pense, sont bonnes, avec l’expérience que j’en ai. Là aussi, je me
méfie beaucoup de l’expérience. La plus belle définition de l’expérience que je connais c’est en
médecine chinoise : l’expérience, c’est une lanterne qu’on a dans le dos. C’est-à-dire que quand tu te
retournes tu vois clair, mais quand tu regardes devant toi elle te fait de l’ombre. C’est pour ça que
l’expérience on en a besoin, mais il faut s’en méfier. Pourquoi je parle de l’expérience ? Les patients
pour lesquels mon attitude, elle n’a pas collé, elle n’a pas relevé son parti, je ne les revois plus. Donc,
fatalement ça va alimenter mon délire vu que je ne revois que ceux qui sont contents de la façon
dont je fonctionne. Et c’est la même chose que les chirurgiens. Si tu vas voir deux chirurgiens qui ont
le même avis sur un problème difficile, il faut en voir trois parce que chacun va te donner son
expérience. Il va dire dans tel type de chirurgie du genou, j’utilise telle intervention et j’ai de bons
résultats. Evidemment, les mauvais résultats qu’il a eus, ils sont partis et l’autre intervention
technique qu’il n’a pas utilisée, il n’a pas d’expérience, donc comment veux-tu qu’il te donne un avis
éclairé ? Donc il faut en voir trois et il n’y a pas le choix… Je me définis comme, j’espère, comme un
médecin ouvert aux autres médecines, je ne suis pas incontestablement, un médecin qui va appliquer
à la règle les directives de l’HAS (note du chercheur : Haute Autorité de Santé). Les données de la
science varient comme toujours… Cela fait plaisir de voir évoluer les choses dont on était certains.
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Par exemple, l’hémoglobine glyquée, on était certains des résultats. Le dépistage du cancer du sein,
c’est fabuleux. Il n’y a qu’en France qu’on continue à le faire sans se poser de questions, dans les pays
nordiques c’est terminé, et ainsi de suite… Donc il faut quand même prendre vraiment une certaine
distance. Ceci dit, il faut quand même agir. Donc, voilà, je ne sais pas si ça suffit comme réponse…
-Très bien. Peut-être plus près des patients… Je pourrais vous demander comment ils vous perçoivent.
Pourriez-vous être qualifié de médecin atypique ?
-Je passe de plus en plus de temps à écouter mes patients et de moins en moins à les examiner. Ce
qui m’intéresse, c’est de plus en plus savoir comment ils vivent avec leur maladie plutôt que la
maladie elle-même, donc ce qui m’intéresse de plus en plus c’est le malade, ce n’est pas la maladie…
Et toute la partie que je qualifie de technique, le suivi de mes diabétiques… Par contre ces
médecines, elles m’apportent à moi beaucoup… et j’espère, apportent aussi aux patients puisqu’ils
reviennent.
-Qu’est-ce que ça vous apporte ?
-Arriver à comprendre comment les gens fonctionnent. La psychologie humaine c’est infini, la
personne qui est en face de toi c’est une boite noire, tu n’as jamais accès à ce qui est à l’intérieur,
jamais… Juste à partir de ce qu’il te dit, par certains moments, et encore parfois il faut décoder, cela
quand on est dans la même culture, mais comme on est ici dans d’autres cultures, alors la ça devient
mais … c’est là que ça fait une ouverture. J’avais tout à l’heure une patiente d’origine vietnamienne,
pareil avec les gens du Maghreb et encore ce n’est pas la même chose pour le Maroc, l’Algérie, la
Tunisie… Tout ça, euh c’est des choses… Il faut arriver à soigner ces gens-là, les faire rentrer dans les
tuyaux.
-Vous avez l’impression que vous avez besoin de jouer plusieurs rôles pour arriver à les soigner,
obtenir une alliance thérapeutique?
-En tous cas, j’ai besoin vraiment de tout ce qu’on m’a appris en dehors de la faculté. Ça, c’est
impératif. Si je n’avais pas les outils de PNL (note du chercheur : programme neurolinguistique), si je
n’avais pas les outils de la thérapie comportementale, c’est l’échec complet, ce n’est pas possible…
Ou alors, on reste dans la prescription, c’est tout et puis après le patient et voilà il se débrouille.
-J’en profite, j’ai vu qu’il y avait quelques petits objets, qui paraissent comme des petits cadeaux…
-Ce sont des patients qui me les ont ramenés et je les mets en fait plus pour leur faire plaisir, pour
qu’ils les revoient… Moi, je n’attache aucune importance à ce genre de choses, je ne me souviens
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même plus qui me les a donnés, ni pourquoi… J’en ai trop, je suis arrivé à la limite, je les amènerais
bien à la maison, mais ce n’est pas les mêmes goûts que mon épouse.
-Il y a des choses que vous mettez plus facilement dans votre bureau et d’autres peut être plus dans la
salle commune ?
-A un moment, il n’y a plus de place. Le dernier, c’est un tigre qui a été fait à la main par un artisan du
Soudan. J’ai un seul patient qui vient du Soudan. Je n’ai plus de place dans mon bureau, ni dans la
salle d’examen, donc voilà, je l’ai mis là… Dommage, il est super beau ! Je suis en plus très peu
sensible à l’art. Très peu.
-Avez-vous parfois des cadeaux plus sous forme de nourriture ?
-Souvent, c’est ceux que je préfère parce que ce n’est pas quelque chose qu’on garde, c’est sûrement
moins transactionnel… Pour moi, c’est beaucoup plus facile et d’ailleurs j’apprécie beaucoup plus que
la tunisienne m’amène un couscous, qu’on me ramène des dattes d’Algérie, du vin d’Algérie… Voilà,
j’apprécie beaucoup plus.
-Vous avez déjà eu de l’argent ?
-Jamais, jamais, parce que justement les patients qu’on a ici ont trop de problèmes d’argent. Et c’est
quelque chose réellement que je n’aurai pas pu faire. J’aurai beaucoup de mal, je ne vois pas
comment je pourrais l’accepter… Ce n’est pas envisageable.
-Vous parliez du quartier. C’était important de s’installer dans un quartier comme celui-ci ?
-Oui. J’ai beaucoup remplacé pendant deux ans. Je me suis baladé, j’ai vu beaucoup de types
d’exercice à la campagne, à la montagne, dans un quartier très favorisé sur le plan social de Lyon,
dans le 6ème arrondissement. Je me suis promené et en fait, je suis beaucoup plus à l’aise dans ce
quartier là avec des petites gens, avec des gens qui sont du côté des victimes, victimes de la société,
victimes du grand capital… Et euh, c’est vraiment avec ces gens-là avec lesquels je suis à l’aise. C’est
aussi mon histoire, parce que mon père a vécu à la ferme jusqu’à l’âge de 20 ans, ma mère était aussi
issue d’une fratrie nombreuse. Ma mère, à la force du poignet, elle est devenue institutrice
poursuivant ses études avec des cours du soir, etc… Mais mon père, c’est un paysan. Un paysan dans
l’âme, et ça reste toujours un paysan. Donc, voilà, je suis plus à l’aise avec ces gens-là qu’avec des
gens qui ne sont pas du même milieu que moi.
-Que pensez-vous du projet de maison médicale ?
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-C’est l’avenir. Je suis complètement à fond dedans. C’est la seule solution, si on veut attirer des
jeunes, si on veut avoir une offre de soins… Malheureusement, on appelle cela les soins primaires,
parce que c’est dérivé de l’anglais «primary care», moi j’appellerais ça les « soins premiers ». La seule
façon, si on veut faire des économies sur la santé c’est de limiter l’accès direct aux spécialistes et
c’est d’avoir des soins de premier recours de qualité et accessibles. Quand je dis maison de santé,
pour moi c’est 8h du matin - 20h et sans coupure entre 12h et 14h parce que les gens souvent sont
dispo en midi et 2h. Donc c’est 8h-20h et 5 jours sur sept plus le samedi matin 8h - midi jusqu’à ce
que la maison de garde ouvre, en attendant que les maisons médicales de garde soient ouvertes à 8h
du matin. Auquel cas, on pourra… effectivement, mais si on a abandonné le samedi matin, je
considère que ce n’est pas satisfaisant par rapport à l’offre de soins et de temps en temps je
réintroduis des samedis matins moi mais pas pour les gens qui poussent la porte parce qu’autrement
je ne m’en sortirais pas. La maison de santé, c’est la réponse à la fois à la demande de soins de
proximité avec des soins de qualité, avec une maison de santé pluridisciplinaire, pour moi c’est
évident ça : kiné, infirmière, orthophoniste, dentiste, ce serait super… et ensuite donc avec une
mutualisation et de toute façon un financement public, on ne s’en sortira pas sans financement
public. Ce n’est pas possible. C’est un projet qui va coûter très cher. Donc, moi si je fais ça, ce n’est
pas seulement dans une optique de réponse à mes quelques patients, je réponds à un bassin de
population, je suis en train de faire de la santé publique, je suis en train de faire de la médecine de
masse, donc il faut que la puissance publique me finance pour faire ça, sinon moi je mets dans un
coin, je fais ce que je veux, puis je dévisse ma plaque et je m’en vais quand je veux. Donc voilà, il y a
un moment où la médecine de premier recours, et là vraiment… Donc, il faut arrêter les beaux
discours et il va falloir investir dans la médecine de premier recours. On commence à y venir avec les
forfaits, avec… ici là, on est dans un équivalent de zone urbaine sensible, un financement lié à notre
activité et à notre chiffre d’affaires et ce n’est pas négligeable. Cette année pour la première fois, la
Caisse (note du chercheur : Caisse Primaire d’Assurance-Maladie) m’a versé l’équivalent de deux
mois d’activité. Donc, ce n’est pas négligeable et voilà je considère que c’est comme si on m’avait
passé le C (note du chercheur : cotation pour le prix de la consultation) à 25 ou à 27. Donc, c’est une
part de forfaitisation de mon activité.
-En parlant de votre activité, vous avez donc des pratiques médicales qui à priori sont un peu
différentes par rapport à celles des autres médecins. Vous avez de bonnes relations par rapport aux
pratiques de chacun dans la cabinet ?
-Je n’ai pas de difficulté avec mes collègues, c’est sûr. Ils savent que des fois je suis un peu à la limite
du hors-jeu, mais je pense qu’ils savent quand même que je sais ce que je fais. L’avantage en
médecine générale, c’est ce que je dis toujours que l’on peut faire ce que l’on veut à condition de
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savoir ce que l’on fait. Donc, je pense toujours savoir ce que je fais et là, fort heureusement que j’ai
cette formation scientifique qui me ramène un petit peu sur terre parce qu’autrement des fois ça
peut partir… Il y a des choses en énergétique chinoise qui sont proprement ahurissantes,
ahurissantes… Tu vois des choses qui n’ont aucune explication en médecine occidentale, aucune.
Simplement en énergétique chinoise, ça s’explique. Quand vous voyez quelqu’un mettre le doigt dans
de l’eau bouillante et qu’il ne se brûle pas… Il n’y a pas d’explication. Ce n’est pas possible, l’eau ça
brûle… sauf si on mobilise son énergie Yin et qu’on l’amène à cet endroit-là et on ne va pas se
cramer. Et ça, pour les chinois, ce n’est pas un problème, ce n’est pas donné à tout le monde. C’est
évident que s’il y a un type qui arrive avec une brûlure du 2ème degré, je ne vais pas lui dire : mobilisez
votre énergie Yin, etc… et je vais vous arranger ça… Non, voilà, ceci est un exemple parmi d’autres.
-J’ai cru comprendre, je ne suis pas certaine, que vous n’avez pas forcément suivi des innovations,
comme le changement de logiciel…
-Ca ce sont des choses que je suis vraiment à reculons… L’informatique, comme je ne l’aime pas... Elle
me le revaut bien… les emmerdes avec le logiciel… On dit toujours : Ça vient de la machine, ça vient
de… Ça fait vingt ans qu’on me tient ce discours, qu’avec le prochain ça marchera mieux, je n’y crois
pas…je n’y crois pas.
-J’avais remarqué que vous fermez souvent la porte d’entrée de la salle d’attente. Quelle explication
vous donnez à ce geste ?
-Parce que pour nous, la première chose, c’est la confidentialité. C’est-à-dire que le secret médical va
jusqu’au fait que quelqu’un qui passe dans le couloir n’est pas sensé savoir qui il y avait dans la salle
d’attente ou qui il y a. Un patient qu’on voit en consultation, il a quitté la salle d’attente, quelqu’un
d’autre va rentrer. Si la porte de la salle d’attente est ouverte, les patients qui sont dans la salle
d’attente vont voir celui qui passe. Cette notion de confidentialité pour moi ça va jusqu’au fait que,
quand je suis à la maison médicale de garde et qu’il y a cinq, dix, quinze patients dans la salle
d’attente, quand on me donne leur fiche, je vois leur nom… J’interpelle mon patient dans la salle
d’attente par son prénom… Et je leur dis : «le secret médical va jusque-là». Les gens n’ont pas à
savoir comment vous vous appelez. Ça pour nous c’est vraiment, je pense que c’est notre motivation
première. La salle d’attente, le cabinet médical, c’est un lieu de confidentialité.
-D’ailleurs vous franchissez assez facilement la porte de la salle d’attente pour voir les patients…
-Oui, les patients, on les connait, on les accueille. Très souvent, on rentre dans la salle d’attente. On
ne dit pas : «Au Suivant», «Monsieur untel»… Jamais, jamais, jamais, on ne dit dans la salle d’attente
le nom du patient. On les connait. Je m’approche de lui, je lui serre la main mais c’est dans la salle
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d’attente que je vais le chercher. C’est la même chose pour notre secrétaire. Elle ouvre la porte, il y a
un accueil, les gens sont accueillis, ce n’est pas une sonnette anonyme. Une porte qui s’ouvre c’est
une perte de temps considérable pour une secrétaire d’aller ouvrir la porte. Elle passe un temps fou,
mais on est dans l’accueil. Très, très à la marge, les seuls cabinets où il y a eu des problèmes de
violences, d’agressions, de vols, ce sont des cabinets où les gens poussent la porte et rentrent
comme ça sans savoir… Bon, c’est très à la marge, je ne sais même pas si c’est arrivé dans le cabinet
d’à côté où pourtant les gens poussent la porte mais où il y a une banque d’accueil toute suite en
face, et une secrétaire physiquement présente. Ce n’est vraiment pas notre motivation première, ce
n’est pas la peur…
-Je vous remercie.
L’entretien se poursuit oralement sans questions précises et se termine par une visite de son cabinet
avec l’écran sous le bureau et les affiches dont une de sa confession, dos au patient.
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132
9 ABRÉVIATIONS
ACP: Approche Centrée sur le Patient
ECN : Examen Classant National
HBM : Habitat Bon Marché
HLM : Habitation à Loyer Modéré
WONCA Europe : World Organization of Family Doctors, soit la société Européenne de Médecine
générale-Médecine de famille.
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ASTYL Léa : ETHNOGRAPHIE D’UN CABINET DE MEDECINE GENERALE.
La question du sens dans la relation médecin-malade.