1 Tribunal administratif N° 25251 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 janvier 2009 3 e chambre Audience publique du 22 juillet 2009 Recours formé par Monsieur ... contre une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines en matière de comité mixte d’entreprise _____________________________________________________________________________________ Vu le recours inscrit sous le numéro 25251 du rôle et déposé au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2009 par Maître Romain Adam, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des Avocats à Luxembourg ; au nom de Monsieur ..., en sa qualité de secrétaire du groupe des représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du ..., demeurant à L-… ; sinon au nom du groupe des représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du ..., représenté par son secrétaire actuellement en fonctions, Monsieur ... ; tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines du 3 décembre 2008 par laquelle celui-ci a déclaré recevable mais non fondée une contestation introduite par le groupe des représentants du personnel au comité mixte d’entreprise du ... ; Vu l’exploit de l’huissier de justice Yves Tapella demeurant à Diekirch, du 9 février 2009, portant signification du recours au ..., établissement public, représenté par son conseil d’administration actuellement en fonctions, établi à L-… ; Vu le mémoire en réponse du délégué de gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 mars 2009 ; Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 2 avril 2009 par Maître Romain Adam aux noms des parties demanderesses ; Vu l’ordonnance du 5 mai 2009 du président du tribunal administratif prorogeant le délai légal pour déposer le mémoire en réponse ; Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 28 mai 2009 par Maître Louis Berns au nom de l’établissement public ... ; Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Paul Ketter, en remplacement de Maître Romain Adam, Maître Louis Berns et Madame le délégué du gouvernement Claudine Konsbrück en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 juin 2009.
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Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg … · 3e chambre Audience publique du ... Konsbrück en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 juin ...
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Tribunal administratif N° 25251 du rôle
du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 janvier 2009
3e chambre
Audience publique du 22 juillet 2009
Recours formé par
Monsieur ...
contre une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines
en matière de comité mixte d’entreprise _____________________________________________________________________________________
Vu le recours inscrit sous le numéro 25251 du rôle et déposé au greffe du tribunal
administratif le 9 janvier 2009 par Maître Romain Adam, avocat à la Cour, inscrit au tableau de
l’Ordre des Avocats à Luxembourg ;
au nom de Monsieur ..., en sa qualité de secrétaire du groupe des représentants du
personnel du comité mixte d’entreprise du ..., demeurant à L-… ;
sinon au nom du groupe des représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du
..., représenté par son secrétaire actuellement en fonctions, Monsieur ... ;
tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des
Mines du 3 décembre 2008 par laquelle celui-ci a déclaré recevable mais non fondée une
contestation introduite par le groupe des représentants du personnel au comité mixte d’entreprise
du ... ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Yves Tapella demeurant à Diekirch, du 9 février
2009, portant signification du recours au ..., établissement public, représenté par son conseil
d’administration actuellement en fonctions, établi à L-… ;
Vu le mémoire en réponse du délégué de gouvernement déposé au greffe du tribunal
administratif le 3 mars 2009 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 2 avril 2009 par
Maître Romain Adam aux noms des parties demanderesses ;
Vu l’ordonnance du 5 mai 2009 du président du tribunal administratif prorogeant le délai
légal pour déposer le mémoire en réponse ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 28 mai 2009 par
Maître Louis Berns au nom de l’établissement public ... ;
Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Paul Ketter, en remplacement de
Maître Romain Adam, Maître Louis Berns et Madame le délégué du gouvernement Claudine
Konsbrück en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 juin 2009.
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Par courrier du 6 novembre 2008, le groupe des représentants du personnel du comité
mixte d’entreprise du ... s’adressa, par l’intermédiaire de Monsieur ..., secrétaire du comité mixte
d’entreprise, au directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, ci-après le « directeur », en lui
soumettant une contestation les opposant à leur employeur en matière d’attributions du comité
mixte d’entreprise du ....
Dans ladite réclamation, le groupe des représentants du personnel du comité mixte
d’entreprise du ... fit valoir qu’en omettant de saisir préalablement le comité mixte sur
l’implantation d’une nouvelle version de l’instrument de mesure de la charge de travail des
professionnels de la santé dénommé « PRN 6.0 » et sur le lancement d’une enquête de
satisfaction des patients, le ... aurait violé les articles L. 423-1 et L. 423-2 du code du travail.
Le 3 décembre 2008, le directeur, après avoir reçu ladite contestation pour examen au
fond, prit une décision motivée comme suit :
« … Attendu que les réclamants reprochent à la direction du ... :
1) d'avoir modifié par l'introduction d'une nouvelle version 6.0 du Programme de
Recherche en Nursing (PRN), qui sert à mesurer la charge de travail des professionnels
de la santé pour déterminer le nombre en personnel nécessaire dans l'unité de soins, le
contrôle du comportement et des performances des travailleurs, sans avoir soumis cette
nouvelle version à la décision du comité mixte d'entreprise comme l'exige l'article L. 423-
1 point 1 du Code du Travail ;
2) d'avoir établi et lancé à partir du 29 septembre 2008 une enquête de satisfaction
nationale des patients visant à apprécier les travailleurs, sans avoir soumis cette enquête
à la décision du comité mixte d'entreprise comme l'exige l'article L. 423-1 point 4 du
Code du Travail ;
Attendu que l'article L. 423-1 du Code du travail transfère un certain nombre de
décisions sociales jusque-là de la seule compétence du chef d'entreprise à un organe de
cogestion de la société, à savoir le comité mixte d'entreprise,
qu'ainsi sont transférées dans ses points 1 et 4 les décisions relatives à
- l'introduction ou l'application d'installations techniques destinées à contrôler le
comportement et les performances du travailleur à son poste de travail ;
- l'établissement ou la modification de critères généraux d'appréciation des
travailleurs ;
Attendu qu'il résulte de la procédure que la contestation concerne l'introduction d'une
installation technique destinée à contrôler les performances du travailleur, donc l'article L.423-1
point I ainsi que l'établissement de critères généraux d'appréciation des travailleurs, donc
l'article L.423-1 point 4 ;
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Attendu que de leur côté les représentants de l'employeur ne contestent pas d'avoir
introduit une version actualisée PRN 6.0 permettant de mesurer la charge de travail des salariés
mais font valoir que ce changement a été décidé par les partenaires sociaux de la Commission
des normes, c'est-à-dire commission comportant des membres salariés,
qu'aucune objection n'a jamais été soulevée quant à l'utilisation de l'ancienne version
1987 du PRN,
que le secrétaire du comité mixte n'a pas intégré les contestations ci-avant reprochées à
l'ordre du jour d'une réunion du comité mixte alors que l'article L. 424-3 du Code du travail lui
permet de fixer conjointement avec l'employeur ce même ordre du jour,
que la version actualisée PRN 6.0, comme la version antérieure PRN 1987 selon leur
argumentation, ne sert pas à contrôler les performances des travailleurs mais permet de mesurer
la charge en travail qui est requise, tant en nature qu'en durée, par l'état du patient ;
que l'initiative de mettre en place une enquête de satisfaction nationale émane d'une
décision gouvernementale et que cette enquête a été établie par les partenaires sociaux de la
Commission d'évaluation, c'est-à-dire commission comportant des membres salariés, en
collaboration avec l'institut de recherche ...,
que cette enquête ne met pas en place des critères généraux d'appréciation des
travailleurs mais sert à mesurer le niveau de satisfaction des patients quant à la prestation de
services dans les hôpitaux,
que le choix de lancer une telle enquête reste de la compétence exclusive de l'employeur ;
Attendu qu'en l'espèce il n'est pas établi qu'une installation technique destinée à contrôler
le comportement et les performances du travailleur à son poste de travail a été introduite
moyennant la version actualisée RPN 6.0 et n'enfreint pas par cela la compétence du comité
mixte d'entreprise,
que l'enquête de satisfaction nationale ne met pas en place des critères généraux
d'appréciation des travailleurs, mais sert à améliorer les services à prester aux patients ;… ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2009, Monsieur ... en
sa qualité de secrétaire du groupe des représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du
..., sinon le groupe des représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du ..., représenté
par Monsieur ..., ont fait introduire un recours en réformation contre ladite décision devant le
tribunal administratif.
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Quant à la compétence du tribunal administratif
Concernant la compétence du tribunal administratif pour connaître du litige, les
demandeurs font valoir qu’en application des dispositions de l’article L. 614-4 du code du travail
le tribunal administratif serait compétent en la matière.
Le délégué du gouvernement et le ... ne présentent aucune observation à cet égard.
Il est constant qu’actuellement seul un recours devant le tribunal administratif est pendant
dans la présente affaire. En effet, par arrêt du 5 mars 2009 (n° du rôle 25258C), la Cour
administrative a constaté que la requête introduite par les mêmes demandeurs à l’encontre de la
même décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines est devenue sans objet et en a
ordonné la radiation du rôle.
L’obligation primaire d’une juridiction saisie consiste à vérifier sa compétence
d’attribution.
Par arrêt du 15 janvier 2009 (N° 24599C) dans lequel la Cour administrative a analysé sa
compétence pour connaître du recours introduit à l’encontre d’une décision du directeur de l’ITM
en matière de comité mixte d’entreprise, celle-ci a retenu ce qui suit :
« Force est de rappeler à ce stade qu’initialement, d’après les termes de l’article 37 (2) de
la loi modifiée du 6 mai 1974 instituant des comités mixtes d’entreprise dans les
entreprises du secteur privé et organisant la représentation des salariés dans les sociétés
anonymes, abrogée à travers la loi précitée du 31 juillet 2006, « les contestations résultant
de l’application des dispositions de la présente loi sont soumises à la décision du directeur
de l’Inspection du Travail et des Mines. Cette décision peut faire l’objet d’un recours
devant le Conseil d’Etat, statuant comme juge d’appel et au fond. »
La loi précitée du 7 novembre 1996, entrée en vigueur le 1er janvier 1997, est venue
préciser à travers son article 100 (1) que la référence au Conseil d’Etat « si la fonction
juridictionnelle du Conseil d’Etat est visée, s’entend comme référence au tribunal
administratif », de sorte que les décisions en matière de comités mixtes d’entreprise étaient
soumises à partir de ladite date du 1er janvier 1997 et jusqu’au 1er septembre 2006 à un
double degré de juridiction, à savoir un recours en première instance devant le tribunal
administratif avec appel possible devant la Cour administrative (voir en ce sens, après
consolidation de la jurisprudence, Cour adm. 12 février 2004, n° 17467C du rôle, Pas.
adm. 2008, V° Compétence , n° 77 et autres références y citées).
En vertu de l’article L.427-2 (2) du code du travail, tel que mis en place par la loi du 31
juillet 2006 portant introduction d’un code du travail, entrée en vigueur le 1er septembre
2006, et libellé comme suit « les contestations résultant de l’application des dispositions du
présent titre sont soumises à la décision du directeur de l’Inspection du travail et des
mines. Cette décision peut faire l’objet d’un recours devant la Cour administrative,
statuant comme juge d’appel et au fond », le contentieux visant les décisions du directeur
en matière de comités mixtes d’entreprise a de nouveau été soumis à un seul degré de
juridiction, précisément devant la Cour administrative.
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Finalement, d’après l’article L.614-14 du code du travail, tel que mis en place par la loi du
21 décembre 2007 portant réforme de l’Inspection du travail et des mines, « toutes les
décisions administratives prises sur base des dispositions de la présente loi sont soumises
au recours en réformation visé à l’article 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant
organisation des juridictions de l’ordre administratif », l’article 3 de la loi précitée du 7
novembre 1996 énonçant que « (1) le tribunal administratif connaît en outre comme juge
du fond des recours en réformation contre les lois spéciales attribuant connaissance au
tribunal administratif. (2) Sauf disposition contraire de la loi, appel peut être interjeté
devant la Cour administrative contre les décisions visées au paragraphe 1er ».
En l’espèce, s’il est exact que la contestation litigeuse des demandeurs a été introduite sur
base de l’article L.427-2 (2) du code du travail, la problématique soulevée, visant les
attributions du comité mixte d’entreprise de la société …, tombe également sous le champ
d’application et les attributions de l’Inspection du travail et des mines énoncés à l’article
L.612-1 (1) du Code de travail, tel qu’introduit par la loi précitée du 21 décembre 2007,
prévoyant que l’Inspection du travail et des mines est chargée notamment :
« a) de veiller et de faire veiller à l’application de la législation dont notamment les
conditions de travail et la protection des salariés ;
(…)
c) de mettre fin aux situations en contradiction avec les dispositions légales,
réglementaires, administratives et conventionnelles en matière de travail et de sécurité et
santé au travail (…) ».
Or, en présence de ce dédoublement de compétences du directeur, d’une part, et de
l’Inspection du travail et des mines, d’autre part, dont le directeur, en tant que chef
d’administration, assume l’autorité ainsi que la responsabilité administrative et
hiérarchique (article L.613-4 (2) du code du travail), et devant l’incompatibilité entre les
dispositions de l’article L.427-2 du code du travail par rapport à celles de l’article L.614-
14 dudit code, la Cour retient, à l’instar de sa jurisprudence du 20 mars 2008, que ledit
article L.427-2 est à considérer comme ayant été implicitement mais nécessairement
abrogé à travers la loi postérieure du 21 décembre 2007, précitée.
En effet, en présence de cette dualité de régimes au niveau des recours contentieux en la
présente matière et mue par un souci d’harmonisation, la Cour, constatant que le régime à
double degré de juridiction, tel que prévu par l’article L.614-14 du code du travail,
correspond au régime de droit commun en matière de recours contentieux administratifs,
tout comme il s’applique à la quasi-totalité des décisions prises au niveau de l’Inspection
du travail et de mines, juge inopportun que les domaines hautement sensibles des décisions
prises en matières de comités mixtes d’entreprise et de délégations du personnel restent
soumis à un régime avec une seule instance juridictionnelle présentant a priori moins de
garanties pour les parties en cause, et ceci d’autant plus qu’il est actuellement admis de
façon générale que le directeur ne fait pas fonction de juridiction administrative de premier
degré mais qu’il agit en tant qu’autorité administrative disposant d’un simple pouvoir de
décision administrative (voir Doc. parl. n° 5346, p.467 et Cour adm. 12 février 2004
précitée).
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La solution retenue ci-avant a partant encore l’avantage de consacrer en la matière le
principe du double degré de juridiction, tel que mis en avant par la recommandation n° R
(95) 5 du 7 février 1995 adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe sur
l’instauration de systèmes de procédures de recours en matière civile et commerciale et sur
l’amélioration de leur fonctionnement, ledit comité se déclarant convaincu que des
procédures de recours efficaces à double degré sont dans l’intérêt à la fois de tous les
justiciables et de l’administration de la justice.
Au vu de ce qui précède, la Cour est amenée à se déclarer incompétente eu égard au
contenu de l’article L.614-14 du code du travail. »
Au vu de cette solution dégagée et par analogie à la présente affaire, le tribunal
administratif est compétent pour connaître en tant que juge du fond du recours actuellement
déféré en application de l’article L. 614-14 du code du travail tel qu’introduit à travers la loi du
21 décembre 2007.
Quant à la recevabilité du recours
Le délégué du gouvernement fait valoir que le recours serait irrecevable dans le chef de
Monsieur ... alors qu’il agirait pour compte du comité mixte sans établir son intérêt personnel et
direct. Il ajoute que le recours serait également irrecevable dans le chef du groupe des
représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du ... au motif que ce groupe n’aurait pas
de personnalité juridique l’habilitant à agir en justice et qu’il ne serait par ailleurs pas investi en
vertu d’une disposition légale à ester en justice.
Le ... se rallie aux moyens d’irrecevabilité du recours soulevés par le délégué du
gouvernement.
Force est au tribunal de constater que le recours est introduit principalement au nom de
« Monsieur ..., en sa qualité de secrétaire du groupe des représentants du personnel du comité
mixte du ... », de sorte qu’il y a lieu de retenir que Monsieur ... agit en tant que personne physique
en sa qualité de membre du comité mixte et non pas pour le compte du comité mixte en tant que
représentant ou mandataire. En effet, en vertu de l’article L. 422-1 du code du travail le comité
mixte est composé paritairement par des représentants de l’employeur et des représentants du
personnel et en vertu de l’article L. 424-1 (2), le secrétaire du comité mixte est désigné parmi les
représentants du personnel au comité mixte. Le secrétaire du comité mixte est dès lors membre,
représentant du personnel, dudit comité.
L’intérêt à agir conditionnant la recevabilité d’un recours administratif ne doit pas
seulement être né et actuel, effectif et légitime, mais encore personnel et direct1.
En l’espèce, dans la mesure où la décision litigieuse a trait aux compétences d’attribution
du comité mixte du ..., Monsieur ... en tant que membre dudit comité et faisant partie du
personnel du ... a un intérêt suffisant pour agir en justice, de sorte que le moyen soulevé mettant
en cause son intérêt à agir est à écarter.
1 Cf. TA 22 octobre 2007, Pas. adm. 2008, V° Procédure contentieuse, n° 9.
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Le recours en réformation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les
formes et délai de la loi.
Etant donné que le recours est recevable dans le chef de Monsieur ... et que le recours
introduit au nom du groupe des représentants du personnel du comité mixte d’entreprise du ...,
représenté par son secrétaire actuellement en fonctions, n’a été introduit qu’en ordre subsidiaire,
il n’y a pas lieu d’analyser la question de savoir si le groupe des représentants du personnel a pu
valablement introduire un recours.
Quant au fond
1) Le PRN 6.0
L’article L. 422-1.1. du code du travail
Le demandeur fait valoir qu’il ignore les différences existant entre le PRN 87 et le PRN
6.0 et estime que la décision litigieuse violerait l’article L. 423-1.1. du code du travail en ce que
le comité mixte aurait dû être saisi, pour décision, sur l’implantation de la nouvelle version de
l’instrument de mesure de la charge de travail des professionnels de la santé, à savoir le PRN 6.0
dans la mesure où cet instrument de mesure serait destiné à contrôler le comportement et les
performances du salarié.
A ce titre il se réfère au site Internet de la société anonyme …, ci-après « ... », et
notamment aux rubriques « Bénéfices de l’informatisation de la méthode PRN de mesure des
charges en soins intensifs » et « Utilité de la mesure des charges en soins » sous lesquelles
figurerait clairement au point 2.7. « Benchmarking : évaluation relative de la performance ». En
effet, le but poursuivi du PRN 6.0 serait, à côté de la détermination de la charge de travail du
personnel soignant, aussi celui d’évaluer les performances du personnel.
Le délégué du gouvernement fait valoir que le PRN 6.0, tout comme la version antérieure
à savoir le PRN 87, ne servirait pas à évaluer ni à contrôler les performances individuelles du
personnel de l’établissement hospitalier, mais servirait à déterminer la charge de travail qui serait
requise, tant en nature qu’en durée, par l’état du patient. S’il est exact que ledit programme
permettrait d’effectuer des analyses plus détaillées, la licence acquise ne permettrait cependant
pas d’accéder à ces analyses, de sorte que la documentation et la description du programme
fournies en tant que preuve par le demandeur ne pourraient être prises à la lettre. Il estime que
dans la mesure où le catalogue des actes de soins n’aurait été modifié qu’en faveur du personnel,
aucune consultation du personnel n’aurait été nécessaire, d’autant plus que le PRN 6.0 aurait été
discuté au sein des groupes de travail de l’UCM dans lesquels siègeraient également des
représentants du personnel. Il donne encore à considérer que les établissements hospitaliers
auraient été en quelque sorte poussés à mettre en place la nouvelle version dudit instrument de
mesure en vue de satisfaire aux exigences de leur organe de contrôle, à savoir l’UCM,
respectivement la Caisse nationale de santé (CNS).
L’établissement hospitalier se livre d’abord à un historique en la matière, pour expliquer
ensuite l’utilité de l’outil de mesure mis en place et les différentes fonctionnalités.
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Pour le surplus, elle conteste que l’article L. 423-1.1. du code du travail serait applicable,
en l’espèce, aux motifs que la mise en place du PRN 6.0 ne répondrait ni à la condition de
« l’introduction ou l’application d’installations techniques » ni à celle que cette introduction ou
application soient destinées à contrôler le comportement et les performances du salarié à son
poste de travail.
L’article L. 423-1.1 du code du travail est libellé comme suit :
« Le comité mixte d’entreprise a compétence de décision en ce qui concerne :
1. l’introduction ou l’application d’installations techniques destinées à contrôler
le comportement et les performances du salarié à son poste de travail ».
Ainsi, l’article L. 423-1.1. du code du travail relatif au pouvoir de décision du comité
mixte prévoit deux conditions cumulatives, à savoir il faut qu’il s’agisse de l’introduction ou de
l’application d’installations techniques lesquelles sont destinées à contrôler le comportement et
les performances du salarié à son poste de travail.
Il y a d’abord lieu de définir brièvement le concept du PRN.
Le PRN (Projet de Recherche Nursing) est un outil de mesure de la charge en soins requis
par un patient, en milieu hospitalier, sur 24 heures.
Il ressort de la documentation de la société ... que le PRN est un outil qui a été développé
au Canada et plus précisément au Centre hospitalier universitaire de pédiatrie de l’Université de
Montréal en 1974. Le premier système prototype était limité à la pédiatrie et la gynéco-
obstétrique. Le système fut constamment adapté et en 1976 une collaboration entre l’Université
de Montréal, le ministère de la Santé au Canada et la société ... a permis la mise en place du
premier système opérationnel dans 5 hôpitaux universitaires. Le PRN couvrait à ce moment la
pédiatrie, la médecine et la chirurgie. Dans la suite le PRN a encore connu différentes révisions,
et en 1995, ledit système a été appliqué, dans sa version 87, au sein du secteur hospitalier
luxembourgeois.
La version 6.0 du PRN constitue une version actualisée de la version 87 laquelle a été
soumise à une adaptation en profondeur résultant de l’expérience acquise depuis la première
utilisation du PRN dans les années soixante-dix, de l’évolution des technologies de soins, des
nouvelles approches soignantes et de l’évolution pédagogique dans l’enseignement du patient.
Il y a ensuite lieu de vérifier, s’il s’agit, en l’espèce, de l’introduction ou de l’application
d’une installation technique.
Il est constant que la version PRN 87 est déjà utilisée au sein de l’établissement en cause.
La « convention visant l’octroi d’une licence non exclusive et non transférable
d’utilisation du système PRN 87 et du système PRN 6.0 pour l’année 2008, fixant les modalités
pour la formation des acteurs hospitaliers, du CRP-Santé et de l’EHL à l’utilisation du PRN 6.0,
ainsi que la validation en 2009 de l’audit réalisé en 2008 », ci-après « la convention PRN »
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conclue entre la société anonyme ..., l’Entente des hôpitaux luxembourgeois, ci-après « EHL » et
le Centre de Recherche public-Santé, fait état de l’utilisation de la méthodologie PRN 6.0 pour un
audit d’un semestre au cours de la période allant du 1er juillet 2008 au 31 décembre 2008 au sein
des établissements hospitaliers, membres de l’EHL.
Le ... ne conteste d’ailleurs pas que le PRN 6.0 a été utilisé au sein de son établissement
selon les modalités telles que décrites à l’article 6 de la convention PRN.
Au vu de ces considérations, il y a lieu de conclure que l’utilisation du PRN 6.0 au sein de
l’établissement hospitalier en cause constitue une introduction, respectivement une application
d’une installation technique.
Il y a dès lors lieu de vérifier, en deuxième lieu, si le PRN 6.0 est destiné à contrôler le
comportement et les performances des salariés.
Selon les explications de l’établissement hospitalier non autrement contestées par la partie
demanderesse lesquelles se recoupent d’ailleurs avec les informations recueillies à travers la
documentation provenant de la société ... et en grande partie avec les explications propres de la
partie demanderesse et du délégué du gouvernement, le PRN repose sur un catalogue de 249
actes de soins requis pour un malade hospitalisé où chaque acte ou « facteur » (p. ex. préparer
une injection, faire une injection, faire un pansement) possède un code, un but ou objectif, une
description, une situation clinique, des règles d'utilisation et une valeur en points où un point vaut
à un facteur temps. Ce facteur temps exprimé en minutes correspond au temps moyen établi de
manière empirique par rapport à un personnel soignant moyen dans des conditions moyennes
pour donner un soin de qualité et requis pour effectuer tel acte de soins.
En effet, le PRN permet d'obtenir trois composantes de la charge de travail du personnel
soignant :
- les soins directs et indirects (en fonction des besoins du patient : respiration,
alimentation, élimination, hygiène, mobilisation, communication, traitements et
méthodes diagnostiques),
- la communication au sujet du patient,
- les activités administratives, entretien et déplacements.
Il y a encore lieu de retenir que le PRN n'est pas mis en œuvre quotidiennement mais n'est
utilisé que par périodes d'audit qui sont normalement de 7 jours par semestre. Ceci ressort
d'ailleurs expressément de l’article 6 de la convention PRN libellée comme suit : « Cette licence
[licence non exclusive et non transférable d’utilisation du système PRN 87 et du système PRN 6.0
pour l’année 2008] vaut seulement pour l’utilisation du système PRN 87 et pour l’utilisation du
PRN 6.0 pour les besoins des établissements hospitaliers cités à l’article 4 dans le cadre d’un
audit étalé sur l’année 2008 des charges de soins pendant quatorze (14) jours. Pour cette
utilisation, l’EHL payera les « royalties » suivantes :
Royalties pour l’utilisation de PRN 87 (1 semaine sur 1400 lits lors du 1er semestre) : …€.
Royalties pour l’utilisation de PRN 6.0 (1 semaine sur 1400 lits lors du 2ième semestre) :
…€. ».
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Il ressort encore des explications de l’établissement hospitalier non autrement contestées
par le demandeur que pour les unités supérieures à 15 lits (hors unités de pédiatrie et unités de
soins intensifs), seuls les actes relatifs à environ 50 % des patients sont répertoriés. Chaque acte
de soins posé est enregistré et l'ensemble de ces actes enregistrés est ensuite validé et exploité par
les auditeurs. Ainsi, sur les dernières années un échantillon représentatif au plan national de
quelques 25.000 patients par an a pu être établi. Sur base de toutes ces données, il est possible
d’établir par chaque établissement hospitalier la charge de travail. Sur base de cette charge de
travail, les effectifs temps plein (ETP) en personnel normalement requis pour assurer le
fonctionnement normal de l'établissement hospitalier peuvent être déterminés. La détermination
des effectifs temps plein théoriques se fait ensuite sur base d'extrapolations qui, dans le cadre d'un
budget prévisionnel, combinent la moyenne des 3 dernières années de mesure de charge de travail
par le PRN, la prévision d'activité en nombre de journées d'hospitalisation et le nombre de
patients pour l'année budgétaire suivante.
Les points nouveaux de la version PRN 6.0 en comparaison avec la version PRN 87 sont
constitués par les éléments suivants, éléments qui ne sont pas contestés par la partie
demanderesse :
La version PRN 6.0. permet de mieux représenter l'actualité des soins de la profession
soignante. Ainsi de nouveaux facteurs comme par exemple « la ventilation mécanique non
invasive des poumons » ont été introduits au sein du PRN 6.0.
Dans la version PRN 87 certains facteurs qui étaient uniques (à considérer seulement 1
fois par tranche de 24 heures) ont été scindés en facteurs avec des intervalles d'administration des
soins. Ce mécanisme permet d'être au plus près des besoins du patient et de la charge des
soignants par rapport au nombre réel de soins effectués pour ce patient. A titre d'exemple on peut
citer la mesure de la saturation du sang en oxygène. Dans le PRN 87 il s'agissait d'un seul facteur
sans distinction suivant le nombre de fois que le personnel soignant procédait à cette mesure.
Dans la version PRN 6.0 les différents intervalles (1 à 4 fois, 5 à 12 fois, 13 fois et plus) peuvent
être choisis.
La version PRN 6.0 apporte des développements et précisions notamment au niveau de la
communication avec le patient en permettant en particulier de mieux identifier les différentes
approches de prise en charge des patients en fonction de leurs problèmes éventuels liés à leur
personne, à leur état psychiatrique ou social. Les nouvelles approches soignantes dans le cadre de
la prise en charge de ce type de patient ont été définies au niveau du PRN 6.0. et permettent ainsi
un inventaire plus approprié des soins réalisés par le personnel.
La version PRN 6.0. prend également en compte l'évolution des approches pédagogiques
dans l'enseignement au patient depuis les 20 dernières années. Cette évolution se traduit par la
création de nouveaux facteurs comme par exemple l'information du patient sur le plan de prise en
charge.
La version PRN 6.0 ne met plus à disposition du personnel soignant et/ou des auditeurs
les minutes de soins par acte. Cette non-communication des minutes de soins est liée au copyright
de la société ... sur le PRN 6.0 qui veut éviter que le PRN 6.0 soit utilisé respectivement
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transformé, sans son accord, en un instrument quotidien de mesure du temps dans le but d'en faire
un outil de gestion interne (mesurages quotidiens, hebdomadaires, heures supplémentaires...) du
personnel.
Au vu niveau de l’inventaire des différents actes de soins, il y a lieu de retenir que cet
inventaire se fait sur base de données objectives et exclusivement relatives au patient et à son
traitement en ce que le soignant indique la nature de l'acte posé parmi le catalogue des 249 actes
prédéfinis. Ensuite le PRN affecte à l'acte des unités de temps. La comptabilisation de ces
différentes unités de temps détermine ensuite la charge de travail engendrée par l'hospitalisation
du patient.
Il ne s'agit donc pas d'un système basé sur des données subjectives inhérentes à la
prestation des actes par le soignant, celui-ci n’indique en effet pas le temps nécessité pour prester
tel acte - temps qui pourrait effectivement permettre de vérifier le comportement et la
performance de celui-ci, mais d'un outil appliquant un facteur temps prédéfini selon des méthodes
scientifiques à la nature de l'acte posé par le soignant.
Ces données objectives relatives à la nature de l'acte et au temps mis en compte ne sont
pas influencées par des éléments subjectifs liés à la performance du soignant.
La partie demanderesse tire argument d'un passage de la documentation de la société ...
pour affirmer que le système PRN 6.0. servirait à contrôler les performances du personnel. Elle se
réfère au titre « Utilité de la mesure des charges en soins » et plus particulièrement au point 2.7.
« Benchmarking: évaluation relative de la performance ».
Force est de constater que l’élément invoqué par la partie demanderesse est tiré de son
contexte. En effet, ladite conclusion figure à la page 16 de la dite documentation, sous le point
2.7. « Comparaison avec des hôpitaux ou des unités de soins ayant une mission similaire au
niveau national ou international », de sorte qu’il y a lieu de retenir qu’il s’agit d'une évaluation
relative de la performance des établissements hospitaliers entre eux, d'où l’utilisation de
l’expression « évaluation relative » et non pas d’une évaluation individuelle du personnel
soignant au sein d’un établissement hospitalier en particulier.
Enfin, il y a encore lieu de se référer aux articles pertinents de la convention PRN qui
permettent également d’affirmer les conclusions retenues ci-avant. En effet, l’article 4 précise
que l’EHL s’engage à n’utiliser les systèmes PRN 87 et PRN 6.0 que dans le cadre du
financement des établissements membres de l’EHL, tandis que l’article 8 souligne que
l’utilisation du PRN 87 ou du PRN 6.0 informatisé n’est autorisée que dans le but décrit à
l’article 4, à savoir seulement dans le cadre du financement des établissements membres de
l’EHL et en aucun cas, individuellement ou en groupe, par les établissements à leurs propres fins
de gestion du personnel ou de leur clientèle, ou à toute autre fin.
Au vu des développements qui précèdent, il y a lieu de retenir que le PRN est un outil
destiné uniquement à mesurer la charge de travail en soins requise par l'état de santé du patient et
qu’il n’est pas destiné à contrôler, sous quelque forme que ce soit, ni le comportement du salarié,
ni ses performances à son poste de travail.
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Il s’ensuit que l’introduction de la nouvelle version du PRN 6.0 n’a pas été prise en
violation de l’article L. 423.1.1. du code du travail, de sorte que c’est à bon droit que le directeur
de l’ITM a retenu que la compétence de décision du comité mixte n’a pas été enfreinte. Le moyen
afférent est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.
L’article L. 423-3 du code du travail
Le demandeur soulève ensuite que la décision litigieuse violerait l’article L. 423-3 du
code du travail en ce que le comité mixte aurait dû être obligatoirement informé et consulté au
sujet de l’implantation de la nouvelle version PRN 6.0 au motif que le PRN 6.0 aurait une
incidence déterminante sur le niveau de l’emploi.
Il estime que dans la mesure où la charge de travail totale de l’établissement hospitalier
serait prise en considération pour déterminer le nombre des soignants attribués à celui-ci et qui
seraient financés par la CNS, il serait indéniable que le PRN aurait une incidence déterminante
sur le niveau de l’emploi.
Il ajoute que les résultats obtenus par la version PRN 87 n’auraient pas donné satisfaction
aux comités mixtes dans la mesure où pour une charge de travail mesurée à 100 % dans les
services de soins normaux, seulement 82 % d’effectifs temps plein auraient été financés par
l’Union des caisses de maladie. Cela signifierait qu’en moyenne, il manquerait en permanence
18 % de personnel pour assurer la totalité des actes auxquels le patient a droit.
Le délégué du gouvernement n’a pas pris position sur ce moyen, tandis que