UNIVERSITE PARIS XIII FACULTE DE MEDECINE DE BOBIGNY « Léonard de Vinci » ANNEE 2008 N° THESE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE (Diplôme d’état) Par Monsieur Mustapha YOUSSEF Né le 23 décembre 1978 à Villeneuve la Garenne _________________ Présentée et soutenue publiquement le 19 décembre 2008 _________________ EFFETS DE LA MANŒUVRE DE SELLICK SUR LA QUALITE DE L’INTUBATION TRACHEALE EN MEDECINE PREHOSPITALIERE ________________ Président de thèse: Professeur Gilles DHONNEUR, Directeur de thèse: Docteur Nicolas PICARD, Rapporteur de thèse: Professeur Christophe BAILLARD, Membres du jury: Professeur Frédéric ADNET, Docteur Xavier COMBES, Docteur Jean-Luc SEBBAH.
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UNIVERSITE PARIS XIII
FACULTE DE MEDECINE DE BOBIGNY « Léonard de Vinci »
ANNEE 2008 N°
THESE
POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE
(Diplôme d’état)
Par
Monsieur Mustapha YOUSSEF
Né le 23 décembre 1978 à Villeneuve la Garenne
_________________
Présentée et soutenue publiquement le 19 décembre 2008 _________________
EFFETS DE LA MANŒUVRE DE SELLICK
SUR LA QUALITE DE L’INTUBATION TRACHEALE EN MEDECINE PREHOSPITALIERE
________________
Président de thèse: Professeur Gilles DHONNEUR, Directeur de thèse: Docteur Nicolas PICARD, Rapporteur de thèse: Professeur Christophe BAILLARD, Membres du jury: Professeur Frédéric ADNET,
Docteur Xavier COMBES, Docteur Jean-Luc SEBBAH.
A Monsieur le Professeur Agrégé Gilles DHONNEUR
Professeur Universitaire-Praticien Hospitalier Chef de service du Département d’Anesthésie et de Réanimation
Hôpital Jean Verdier
Pour m’avoir fait l’honneur d’accepter la présidence de cette thèse, Pour m’avoir confié ce travail, et pour m’avoir guidé dans son accomplissement.
A Monsieur le Docteur Jean-Luc SEBBAH,
Praticien Hospitalier, Chef de service du SMUR de Gonesse,
Pour avoir accepté d’être membre du jury Pour son enseignement, sa disponibilité,
Et pour m’avoir fait partager son amour de la « médecine pour le malade ».
A Monsieur le Docteur Nicolas PICARD,
Praticien Hospitalier, SMUR de l’hôpital de Gonesse,
Pour avoir accepté de diriger cette thèse, pour son amitié, sa confiance et sa patience.
A Notre jury de Thèse
Que je remercie d’accepter et de juger ce travail.
A mes parents
Pour toutes les valeurs humaines qu’ils m’ont transmis.
A ma sœur, mes frères,
A mes grands-parents.
A tous mes collègues du SMUR de Gonesse
Médecins, étudiants, infirmiers, pompiers,
Que je remercie pour leur implication soutenue dans ce travail Mais également pour leur enseignement, Leur amitié et leur sens humain de la vie.
ACR Arrêt cardio-respiratoire
ACS Activité cardiaque spontanée
BURP Back, up and right pressure
EVA Echelle visuelle analogique
ET Ecart type
FC Fréquence cardiaque
FR Fréquence respiratoire
cm Centimètre
c.min-1 Cycle par minute
cmH20 Centimètre d’eau
IC 95% Intervalle de confiance à 95 %
IDS Intubation Difficult Scale
IMC Index de masse corporel
IRM Imagerie par résonance magnétique
ISR Induction en séquence rapide
Kg Kilogramme
ml Millilitre
MLE Manipulation laryngée externe
mmHg Millimètre de mercure
N Newton
PAD Pression artérielle diastolique
PAM Pression artérielle moyenne
PAS Pression artérielle systolique
PC Pression cricoïdienne
POGO Pourcentage d’ouverture de l’orifice glottique
SMUR Service mobile d’urgence et de Réanimation
SNG Sonde naso-gastrique
SIO Sphincter inférieur de l’œsophage
SSO Sphincter supérieur de l’œsophage
TDM Tomodensitométrie
VAS Voies aériennes supérieures
UMH Unité Mobile Hospitalière
SCL Score de Cormack et Lehane
SpO2 Saturation pulsée en oxygène
ABREVIATIONS
TABLE DES MATIERES
I. INTRODUCTION ........................................................................................ 1
II. INTUBATION ENDOTRACHEALE EN PREHOSPITALIER.................. 4
II.A GENERALITES.................................................................................................................4
- Durée de l’intubation trachéale...................................................................................41
- Mesure par une échelle visuelle analogique de l’influence du relâchement de la pression cricoïdienne sur la qualité de la visualisation glottique ............................41
- Mesure de la difficulté d’intubation trachéale par une échelle visuelle analogique .42
VI.G.1.1 Le score de Cormack et Lehane (SCL)...............................................................54
VI.G.1.1.a Qualité de la visualisation selon la classification de Cormack et Lehane .54
VI.G.1.1.b Evolution des SCL après relâchement de la manoeuvre de Sellick...........54
VI.G.1.2 Le pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO)..................................................................................................57
VI.G.1.2.a Qualité de la visualisation selon la classification POGO............................57
VI.G.1.2.b Evolution des Scores POGO après relâchement de la manoeuvre de Sellick.................................................................................................57
VI.G.1.2.c Valeur du pourcentage de l’ouverture de l’orifice glottique (score POGO) seuil associé à la levée de la manœuvre de Sellick .................................64
VI.G.2.1.b Durée de l’intubation et utilisation du mandrin de type Eschmann...........65
VI.G.2.2 Mesure par échelle visuelle analogique (EVA) de l’évolution..........................66
de la vision glottique ........................................................................................66
VI.G.2.3 Evaluation de la difficulté de l’intubation trachéale mesurée par échelle visuelle analogique ...........................................................................................66
VI.G.3.1 Réalisation de la manœuvre de Sellick ..............................................................67
VI.G.3.2 Evaluation de la difficulté de l’intubation trachéale calculée par l’Intubation Difficulty Scale (IDS) ......................................................................................67
VI.G.3.3 Description des paramètres du score d’intubation difficile (IDS) .....................70
VI.G.3.3.a La force de laryngoscopie .........................................................................70
VI.G.3.3.b Nombre de tentatives ................................................................................72
VII. DISCUSSION ............................................................................................ 75
VII.A LA NECESSITE DE LEVER LA MANŒUVRE DE SELLICK..............................75
VII.B LA LEVEE DE LA PRESSION CRICOIDIENNE AMELIORE L’EXPOSITION GLOTTIQUE ET FACILITE L’INTUBATION TRACHEALE ............................78
VII.C LA MANŒUVRE DE SELLICK ALLONGE LE DELAI DE SECURISATION
DES VOIES AERIENNES ...........................................................................................81
VII.D LE RELACHEMENT DE LA MANŒUVRE DE SELLICK N’ENTRAINE PAS DE REGURGITATION ...............................................................................................82
VII.E UN SEUIL QUANTITATIF DE VISION GLOTTIQUE JUSTIFIE DE
RELACHER LA MANŒUVRE DE SELLICK ........................................................85
VII.F LIMITES DE NOTRE TRAVAIL..............................................................................86
longitudinal de l’œsophage 15. Muscle circulaire interne de
l’œsophage
1
2
3
4
5
6
7
8
9
1 0
1 1
1 2
8
1 3
1 4
1 5
Muscle circulaire
Muscle longitudinal
Fibres en écharpe
Jonction squamocylindrique
Estomac
Portion costale
Portion crurale
Externe Interne
Sphincter
oesophagien inférieur
Ligament
phréno-oesophagien
Diaphragme
Figure 9. Le sphincter supérieur de l’œsophage [45]
Figure 10. Le sphincter inférieur de l’oesophage [46]
14
???.B PHYSIOPATHOLOGIE DE LA PROTECTION DES VOIES AERIENNES
Les moyens de protection de l'arbre trachéo-bronchique sont complexes. Ils impliquent le
système respiratoire et digestif qui sont sous la régulation des centres nerveux centraux mais
également médullaires. En présence de troubles de la conscience ou consécutivement à l’induction
d’une anesthésie générale, ces mécanismes protecteurs sont déprimés de sorte que les voies
aériennes supérieures sont particulièrement vulnérables vis-à-vis des régurgitations et des
vomissements [47].
???.B.1 Définitions [37]
- Reflux simple : passage du contenu gastrique dans l’œsophage.
- Régurgitation : mouvement passif du contenu gastrique dans l’oropharynx.
- Vomissement : passage du contenu gastrique dans l’oropharynx associé à un péristaltisme
oesophagien rétrograde et une contraction des muscles abdominaux.
- Inhalation : passage de matières dans l'arbre trachéo-bronchique du fait d'une régurgitation
passive ou d'un vomissement actif du contenu gastrique chez des patients ayant des réflexes
laryngés insuffisamment protecteurs.
???.B.2 Les déterminants de l’inhalation
???.B.2.1 Le contenu gastrique [48]
Par extrapolation des premières études sur les singes rhésus sur l’administration directe de
liquide dans les poumons, il est communément tenu que les malades sont à risque de pneumopathie
d'inhalation si un volume gastrique minimum de 0.4 ml/kg est présent. Le volume gastrique peut se
trouver majoré consécutivement à une diminution de la vidange gastrique ou par une
hypersécrétion de liquide gastrique. Ses deux phénomènes sont considérés comme présents chez
les patients pris en charge dans un contexte d’urgence avec comme principaux déterminants la
douleur et le stress. L’obésité et la gastroparésie du diabétique sont des facteurs de risque de
régurgitation discutés liés à un ralentissement de la vidange gastrique [37].
???.B.2.2 Le sphincter inférieur de l’œsophage
Le sphincter inférieur de l’œsophage comporte une structure musculaire mixte lisse et striée.
C’est une zone de haute pression s’étendant sur les 3-4 derniers centimètres de l’œsophage. Il est le
principal rempart contre la remontée des sécrétions gastriques, et donc, protège la muqueuse
oesophagienne. Physiologiquement, à l’état basal, ce sphincter est constamment contracté et il y
règne une pression de l’ordre de 15 à 35 mmHg [46]. Ce n’est qu’au cours de la phase
15
oesophagienne de la déglutition, lorsqu’une onde péristaltique parcourt l’oesophage que le
sphincter se relâche. Le reflux survient lorsque la pression intra-gastrique devient supérieure à la
pression du sphincter inférieur de l'oesophage permettant ainsi la formation d'une cavité commune
entre l'estomac et le pharynx. La pression intra-gastrique est normalement de l’ordre de 5 mmHg
(1 à 11) et des valeurs légèrement plus élevées 11 mmHg (4-19) sont observées chez les femmes
enceintes [49]. La pression intra-gastrique maximale chez un patient à jeun et en position allongée
est de l’ordre de 25 mm Hg et augmente jusqu’à 35 mmHg lorsqu’il existe une distension gastrique
[50].
Les fasciculations générées par la Succinylcholine entraînent une majoration de la pression
intra-gastrique jusqu'à 35 mmHg mais augmente également le tonus du SIO permettant une
relative protection contre l’inhalation [37, 48, 51].
???.B.2.3 L’oesophage Dans les conditions physiologiques, la survenue d’un reflux d’origine gastrique entraîne une
mise en action réflexe du péristaltisme du muscle lisse de œsophage aboutissant à la vidange du
contenu oesophagien. L’anesthésie générale facilite la remontée des reflux vers l’hypopharynx en
inhibant ce réflexe de clairance oesophagienne [50].
???.B.2.4 Le sphincter supérieur de l’œsophage
Le sphincter supérieur de l’oesophage joue un rôle déterminant dans la protection contre les
régurgitations. La pression de ce sphincter augmente progressivement durant l'inspiration, évitant
ainsi l’entrée de l'air dans l'oesophage et les régurgitations du contenu gastrique dans le pharynx
chez le patient éveillé [52]. Au repos la pression basale du SSO est de l’ordre de 40 mmHg, se
majorant lors d’un état de stress et diminuant aux alentours de 8 mmHg lors d’un sommeil
profond. Des pressions du SSO inférieures à 25 mmHg autorisent des régurgitations passives chez
des personnes conscientes et allongées. Une sédation par du midazolam ou une anesthésie par du
thiopenthal associée à un curare sont toutes deux responsables d’une diminution du tonus SSO de
40 à 10 mmHg et pourrait favoriser la survenue de régurgitations passives. A la suite de l'injection
de thiopenthal, la relaxation du SSO débute avant la perte de connaissance [53].
???.B.2.5 Les réflexes laryngés [47]
Différents réflexes laryngés protègent les voies aériennes supérieures de l’inhalation. Le
réflexe de déglutition est le réflexe de protection du poumon profond le plus complexe, déclenché
par la stimulation des récepteurs pharyngés. Il met en jeu une séquence de programmation très
précise des muscles de la face, du pharynx, du larynx (fermeture laryngée réflexe), de l'œsophage
16
(strié et lisse) ainsi que des muscles de la pompe respiratoire. L'étanchéité de la glotte est assurée
par l'adduction des cordes vocales, à laquelle se rajoute la fermeture des fausses cordes, la
couverture par les replis ary-épiglottiques jointifs et la bascule épiglottique. Il est démontré un
couplage temporel très fin entre la déglutition et la respiration. La déglutition réflexe survient le
plus souvent pendant l'expiration. Pendant la déglutition réflexe, l'activité inspiratoire cesse. Une
expiration fait suite à une déglutition réflexe.
Le réflexe d’apnée peut être déclenché à tous les niveaux des VAS mais le larynx constitue
une des zones les plus sensibles avec le naso-pharynx. Ce réflexe est caractérisé par un arrêt
respiratoire avec hypertonie des muscles expiratoires et une inhibition des muscles inspiratoires.
Le réflexe d’apnée est plus résistant à l’approfondissement de l’anesthésie que les réflexes
d’éternuement et de toux.
Le réflexe de fermeture laryngée fait partie intégrante des réflexes de déglutition et de toux.
Néanmoins, lorsque la stimulation de la muqueuse laryngée est insuffisante (ou déprimée) pour
initier un réflexe de toux ou une apnée, une fermeture laryngée est parfois déclenchée. Elle
consiste en une hypertonie brutale des muscles thyro-arythénoïdiens. L'expression clinique de ce
réflexe est celle du laryngospasme.
Le réflexe de toux est un effort expiratoire brutal précédé par une brève période d'inspiration.
Le larynx et la trachée sont des zones de stimulation privilégiées. Un grand nombre de muscles
respiratoires pariétaux thoraciques et des VAS sont impliqués dans la mise en jeu de ce réflexe.
Après stimulation laryngée, le volume d'air intrathoracique augmente par activation du diaphragme
et des muscles intercostaux. Lorsque la capacité pulmonaire totale est atteinte, une expiration
active à glotte fermée (réflexe de fermeture laryngée) est déclenchée. La pression mesurée dans la
région sous-glottique monte brutalement, parfois au-dessus de 100 cmH2O. L'ouverture brutale de
la glotte associée à la prolongation de l'expiration active, entraîne la propagation d'une onde de
pression qui permet l'expulsion des contenus trachéal et laryngé. La fermeture du larynx fait partie
intégrante du réflexe de toux, mais elle n'est pas toujours une condition nécessaire au
déclenchement d'un réflexe de toux.
L'expiration réflexe entraîne une expiration brève brutale (non précédée d'une inspiration)
déclenchée par une stimulation mécanique ou chimique des cordes vocales.
L'anesthésie générale déprime, de manière proportionnelle à la dose, la majorité des réflexes
de protection des VAS. Néanmoins, ces derniers n'ont pas tous la même sensibilité aux effets des
agents de l'anesthésie générale. Parmi les réflexes de protection résistants, celui de toux est
déprimé par l'approfondissement de l'anesthésie plus rapidement que ceux d'apnée ou d'expiration.
17
À l'opposé, certains sont très sensibles à l'altération du niveau de conscience. La déglutition réflexe
est altérée lors de la sédation et pendant le sommeil. Les réponses neurovégétatives, adrénergiques
et respiratoires (apnée, laryngospasme) peuvent être intactes voire exagérées, alors que les réflexes
d'amont, plus sensibles, sont abolis. Le laryngospasme est une illustration typique du caractère
exagéré de la réponse à une stimulation minime du larynx. L'absence de déglutition réflexe,
observée sous sédation légère, expose le larynx à une stimulation par des sécrétions ou
régurgitations. Le réflexe de fermeture laryngée est alors brutal, intense et prolongé, c'est le
laryngospasme. La profondeur de l'anesthésie est donc susceptible d'influencer la qualité de la
réponse réflexe des VAS. Sous anesthésie générale, un patient non intubé est exposé à l'inhalation
d'un éventuel contenu gastrique régurgité.
18
???.C LA MANŒUVRE DE SELLICK
???.C.1 Historique
La première description de la pression cricoïdienne revient à Monroe qui en 1770 l’utilisa
comme moyen pour prévenir la distension gastrique pendant la ventilation des personnes "noyées
et apparemment mortes" [54]. Une lettre de Dr W.Cullen datée de 1774 citait une manoeuvre
effectuée sur le cartilage cricoïde plutôt que sur l’ensemble du larynx pour une compression
adéquate de l’œsophage contre les vertèbres cervicales.
En 1946, Mendleson rend compte de 46 cas d’inhalation pulmonaire sur 44016 parturientes
qui ont eu une anesthésie inhalatoire administrée par le masque facial pour le travail obstétrical et
la délivrance [44]. Dans la continuité de ce travail, les enquêtes concernant la mortalité maternelle
au Royaume-uni au cours des années 50 et 60 identifièrent ce problème de santé publique, la
principale cause de morbidité et de mortalité maternelle étant l’inhalation pulmonaire [25]. Dans
ce contexte et à la suite des travaux de B. Sellick communiqués en 1961, la pression cricoïdienne
réapparaît comme un moyen de prévenir les conséquences des régurgitations ou des vomissements
survenant pendant l' induction anesthésique. Sellick suggéra également que l’utilisation de la
pression cricoïdienne préviendrait la distension gastrique durant la ventilation au masque facial
[11]. Ruben et al., au cours de la même année, ont décrit que l'application d'une force sur la face
antérieure du cartilage cricoïde permettait d’empêcher la distension gastrique lors de la ventilation
au masque facial [56]. Quelques années après la publication de B.Sellick, la pression cricoïdienne,
largement diffusée dans les pratiques anesthésiques, a été incorporée de manière empirique dans
une nouvelle technique anesthésique : « l'induction en séquence rapide » destinée aux patients dits
à estomac plein [57]. Un demi-siècle plus tard, cette manœuvre cricoïdienne dite de Sellick est
considérée comme un élément majeur de la protection contre l’inhalation pulmonaire au cours de
l’intubation trachéale réalisée en urgence bien qu’aucune étude randomisée prospective n’ait pu en
démontrer ses réels bénéfices [25, 28]. Son application est controversée depuis une décennie [13,
15, 16, 24].
???.C.2 Description originale [11]
Les observations de Sellick sur l’efficacité de la pression cricoïdienne pour le contrôle des
régurgitations en anesthésie sont basées sur des expérimentations réalisées sur un cadavre et
quelques patients dits à hauts risques de régurgitations. Ces travaux ont fait l’objet d’une simple
communication préliminaire. Depuis la description de la manœuvre en 1961, aucune étude
randomisée n’a été réalisée permettant de conforter la théorie de protection des voies aériennes par
19
la pression cricoïdienne au cours de l’intubation trachéale [28]. La manœuvre décrite se base sur
les rapports de contiguïté de l’anneau cricoïdien, de la lumière œsophagienne, et du mur vertébral
en regard de la cinquième et sixième vertèbre cervicale. Ainsi, Sellick a rapporté qu’une
compression ferme du cartilage cricoïde contre les corps des vertèbres cervicales réalise une
occlusion oesophagienne. Elle est sensée empêcher la survenue d’inhalation pulmonaire sans
obstruction des voies aériennes. Cette manœuvre permettrait une ventilation au masque sans risque
de distension gastrique et faciliterait l’intubation trachéale par le déplacement du larynx en arrière
(Figure 11, 12).
Comme le préconise B.Sellick, la PC doit être exercée par les 3 premiers doigts de la main
dominante d’un opérateur, qui n’est pas celui qui intube le malade. Le positionnement des doigts
débute par le repérage du cartilage cricoïde situé sous le cartilage thyroïde (Figure 11). Le pouce et
le majeur placés sur les faces latérales du cartilage cricoïde empêchent les mouvements de
latéralité ce dernier. L’index positionné au milieu de l'anneau exerce une force perpendiculaire à
l’axe du rachis cervical [11, 15].
???.C.3 Evolution de la pression cricoïdienne « de Sellick à nos jours »
???.C.3.1 Positionnement du patient
Le positionnement optimal pour l’intubation trachéale et la ventilation a considérablement
évolué depuis 1961 [11]. Le rapport original de Sellick contient une photographie montrant une
extension atlanto-occipitale avec la tête abaissée par rapport à la poitrine (Figure12). Ainsi, le
patient est placé en décubitus dorsal avec la tête légèrement inclinée vers le bas. La tête et la nuque
sont en extension complète. Selon Sellick, cette position a pour but d’augmenter la convexité
antérieure du rachis cervical, d’allonger l’œsophage et de prévenir le déplacement latéralisé de
Figure 11. Représentation schématique de la manœuvre de Sellick
Figure 12. Image radiologique de l’occlusion oesophagienne par la pression cricoïdienne [11]
20
l’œsophage lorsque la PC est appliquée. Cependant, ce positionnement, décrit comme responsable
d'une altération de la vision laryngoscopique, a été abandonné [15, 26]. La position optimale et
recommandée pour une laryngoscopie directe avec une lame de Macintosh nécessite une extension
de l’articulation atlanto-occipitale [58, 59]. Cette position peut être réalisée par une simple
extension de la tête contre une surface plane. Une utilisation systématique et de première intention
d’un coussin sous la nuque pour rechercher une flexion du cou (« Sniffing position ») ne semble
pas justifiée à l’exception des patients obèses ou atteints d’une limitation de l’amplitude des
mouvements du rachis cervical et probablement en cas d’antécédents de radiothérapie cervicale.
Malgré l'optimisation de la position de la tête pour améliorer la laryngoscopie, une
application incorrecte de la pression cricoïdienne avec une force augmentée pourrait mener à plus
de flexion de la nuque au niveau de l'articulation atlanto-occipitale rendant l'intubation trachéale
plus difficile.
En cas de suspicion de fracture du rachis cervical, il est conseillé de maintenir manuellement
le rachis supposé instable. Il faut relever la partie antérieure du collier cervical et maintenir l’axe
rachidien «tête-cou-tronc » [60]. La réalisation de la PC reste discutée en cas de traumatisme
cervical [61-64].
???.C.3.2 Manoeuvre de Sellick à une ou deux mains
La pression cricoïdienne comme décrite initialement par Sellick est effectuée à une seule
main avec une pression antéro-postérieure appliquée par l'index sur le cartilage cricoïde. Certains
auteurs conseillent de placer la deuxième main de façon à exercer une contre-pression sur le rachis
cervical [50]. Cette PC dite « bimanuelle » permettrait de prévenir une flexion de la tête et de
provoquer une intubation trachéale difficile. Des études comparant les deux méthodes ont montré
que la technique à deux mains maintenait les mêmes conditions d'intubation trachéale et qu’il n'y
avait aucun avantage clair d'une méthode sur l'autre [66, 67]. Par conséquent aucune technique
particulière ne peut être recommandée plus qu’une autre pour la réalisation d’une pression
cricoïdienne idéale.
D’autres modifications de la manœuvre de Sellick ont été suggérées. La PC est en général
réalisée par la main droite de l’opérateur [15]. Lorsqu’elle est appliquée avec la main gauche du
côté gauche du sujet anesthésié, les interférences avec l’insertion du laryngoscope sont évitées.
Une autre méthode à une seule main a été décrite par Cawling, la paume de la main est dans ce cas
placée sur le sternum du patient.
21
???.C.3.3 Durée d’application
En 1961, Sellick a décrit la force cricoïdienne comme devant être faible initialement,
augmentée lors de la perte de conscience et finalement relâchée une fois le ballonnet de la sonde
d’intubation gonflé [11].
De nombreux effets indésirables ont été rapportés au cours de la phase consciente de
l’application de la manoeuvre de Sellick lors de l'intubation trachéale. Parmi ces effets, des
vomissements responsables de rupture oesophagienne ou d'inhalation massive ont été rapportés
[68-70]. En 1982, considérant ces effets indésirables, Sellick suggéra alors de débuter la pression
cricoïdienne non pas simultanément à l'administration des anesthésiques mais lors de la survenue
de la relaxation musculaire et de la perte de conscience [70]. Ceci est en contradiction avec les
travaux de Vanner qui retrouve une diminution de la pression du sphincter supérieur de
l’oesophage survenant avant la perte de conscience et rendant nécessaire la pratique de la PC avant
la sédation des patients [53, 71]. Ce dernier préconise une force initiale de 10 Newtons (N) chez
les sujets éveillés et devant être lentement augmentée à 30 N (9.81 N=1 kg) lorsque le malade
perd conscience [16].
La manoeuvre de Sellick doit être relâchée uniquement lorsque l’auscultation des champs
pulmonaires et l’analyse du capnogramme permettent d’affirmer que le patient est intubé dans la
trachée et que le ballonnet de la sonde d’intubation est gonflé. La PC est difficile à maintenir plus
de 2 à 4 min sans devenir fatigante et douloureuse au risque d’être moins efficace [72]. La pression
exercée est diminuée significativement après 5 min d’application de la manoeuvre chez plus de 50
% des anesthésistes étudiés [73].
???.C.3.4 Pression d’application
Pour prévenir des régurgitations, la force à appliquer doit prendre en compte deux éléments :
la pression oesophagienne et l’efficacité de la transmission de la force à la lumière oesophagienne.
Initialement, Sellick stipulait que le patient conscient pouvait tolérer une pression modérée sans
trop d’inconfort mais aussitôt qu’il perd conscience une ferme pression devait être appliquée [11].
Cette pression cricoïdienne bien que ferme ne devait pas pour autant entraîner une obstruction des
voies aériennes. Il faudra attendre 20 ans plus tard pour avoir une approche quant itative de la force
à appliquer [74].
Une force de 44 Newtons a été évaluée chez 24 patients anesthésiés dits à risque de
régurgitation. De là, il a été suggéré que cette force protégerait la majorité des malades nécessitant
une anesthésie en urgence [74]. En 1992, c'est ce même niveau de force qui est retenu par Vanner
22
comme valeur de pression efficace [53]. Basée sur ces études, la force de 44 N a été acceptée
comme étant le « gold standard » pour la prévention des régurgitations [15]. Cependant, les
informations d’une étude réalisée sur dix cadavres tant à dire qu’une force de 30 N suffit à la
prévention des régurgitations provenant d’un œsophage avec une pression oesophagienne de 40
mmHg [75]. Au cours d’une anesthésie générale, la pression intragastrique est rarement supérieure
à 25 mmHg même lors des fasciculations consécutives à l’utilisation de succinylcholine ou lors de
césariennes réalisées en urgence [49].
Chez 22 volontaires non anesthésiés, une pression cricoïdienne exercée à 20 N a été qualifiée
de désagréable par 2/3 d’entre eux et a provoqué des nausées chez l’un d’entre eux. Une pression
supérieure à 40 N chez le malade inconscient peut provoquer une obstruction des voies aériennes
supérieures et des difficultés d’intubation trachéale [16].
Prenant en considération les effets indésirables causés par une force cricoïdienne élevée,
Vanner propose finalement en 1999, l'application d'une pression cricoïdienne qu'il considère
comme étant acceptable et sûre en l'absence d'étude randomisée contrôlée [16]. Il préconise alors
d'effectuer une force cricoïdienne initiale équivalente à 10 N chez le malade éveillé et d’augmenter
secondairement à 30 N lorsque l’anesthésie est assez profonde. La pression est maintenue jusqu'à
ce que l'intubation soit complétée avec le ballonnet de la sonde gonflé et la position de celle ci
confirmée. Si la vue laryngoscopique est altérée, entraînant alors une intubation difficile, la
pression pourrait être réduite jusqu'à ce que l'intubation soit complétée [16]. Ces mêmes
recommandations ont été adoptées par la Difficult Airway Society au Royaume-Uni [76]
(Annexe1). Ainsi une sensible diminution du niveau de force requis pour la manœuvre de Sellick a
été observée au cours de la dernière décennie et une réduction ou un relâchement de la PC permis
en cas de situation d’intubation trachéale jugée difficile.
???.C.3.5 Le joug cricoïdien
En 1986, Lawes met au point un outil dont le but est de quantifier et d’homogénéiser la force
à appliquer lors de la PC (Figure 13) [77]. Ce joug, d'utilisation simple, permet le maintien d'une
pression cricoïdienne constante mais également de garder les mains de l'assistant loin du champ du
laryngoscopiste.
Si l'utilisation du joug par des anesthésistes inexpérimentés permet d'obtenir des forces
cricoïdiennes similaires à celles effectuées traditionnellement par des opérateurs expérimentés
[78], les conditions d’intubation trachéale dites adéquates ou bonnes n’ont été obtenues que dans
93% des cas utilisant le joug versus les 100% des cas lors de l’application de la PC traditionnelle
[77]. En effet des déplacements latéraux et des compressions laryngées étaient associées à
23
l'utilisation de cet appareil. Le joug comme la pression cricoïdienne manuelle ont été de plus
responsables de douleurs, et de toux chez les volontaires.
La disponibilité, le coût et l'interférence dans le contrôle des voies aériennes sont les raisons
pour lesquelles l'utilisation du joug cricoïdien ne s'est pas généralisée.
???.C.3.6 Pratique et entraînement
B.Sellick affirmait dans son article original qu’un aide opératoire pouvait en quelques
secondes être formé à la bonne application de la PC [11]. Il a depuis été démontré que la force
cricoïdienne supposée efficace devait approcher, chez le sujet éveillé et chez le sujet inconscient,
respectivement 20 N et 40 N, entre les années 1980 et 2000 [15]. Les recommandations actuelles
sont de 10 N et 30 N [16].
En fait, plusieurs études évaluant des professionnels de santé experts de l’ISR, rendent
compte d’une grande méconnaissance des niveaux de forces théoriques de la PC [42, 65-68].
De plus, l’évaluation d’une population de médecins anesthésistes suédois et de personnels de
blocs opératoires britanniques objective que la force cricoïdienne devant être appliquée était
erronée dans 67 % à 83 % des cas [42, 79]. Un nombre considérable de personnes ne pouvait
quantifier l’intensité de la force et utilisait des qualificatifs approximatifs comme "assez fort",
"force qui casserait un oeuf", "force du pouce", "une force qui varie".
En pratique, un constat similaire a été démontré par différentes études internationales. Une
majorité de médecins, infirmières, et autre personnel de bloc opératoire ou des urgences étaient
incapables d'appliquer correctement la PC [17, 42, 43, 79-86]. Dans ces études la gamme de forces
appliquées aux modèles tests était très large (0-120 N).
Figure 13 : Le joug cricoïd ien
24
Appliquée incorrectement la pression cricoïdienne contribue à majorer la difficulté
d'intubation trachéale et peut rendre plus difficile une ventilation au masque [15, 25]. Un
entraînement régulier est nécessaire [50, 56].
Différents moyens d’entraînement sont décrits [17, 81, 82, 84, 86]. Le mannequin, la
balance de cuisine et la seringue de 50 ml ont prouvé leur efficacité [17, 42, 80, 81]. Il a été mis en
évidence qu’avec une dépression de 12, 17 et 20 ml sur le piston d’une seringue de 50 ml remplie
d’air, on obtenait respectivement un équivalent de pression de 20, 30 et 40 N [86]. Cette méthode
est reproductible quelle que soit la seringue utilisée [87]. Toutefois un apprentissage est nécessaire
pour reproduire les pressions de 10 N et 30 N. Selon les auteurs, la fréquence des entraînements
varie d'une semaine à 3 mois. Certains auteurs recommandent de s’entraîner juste avant de réaliser
une manoeuvre de Sellick grâce à un appareil présent dans chaque salle de bloc opératoire [17].
???.C.3.7 Présence d’une sonde naso-gastrique (SNG)
Dans son article original, Sellick en 1961 suggérait d’enlever la SNG avant l’induction d’une
anesthésie générale et l’application d’une pression cricoïdienne [11]. En effet, il était avancé
qu’une SNG empêchait d’occlure parfaitement l’œsophage lors de l’application de la PC et pouvait
majorer le risque de régurgitations en laissant en relation les sphincters oesophagiens supérieur et
inférieur.
Contrairement à Sellick, Vanner avança que l'efficacité de la pression cricoïdienne pouvait
être augmentée en présence d'une sonde naso-gastrique lorsque celle-ci occupe une partie de la
lumière oesophagienne non comprimée par le chaton cricoïdien [74, 88].
Des études expérimentales menées par Salem ont démontré qu’une sonde gastrique laissée en
place et ouverte à son extrémité distale permettait d’atténuer l’augmentation de la pression intra-
gastrique survenant lors de l’induction de l’anesthésie [89].
En anesthésie, une SNG posée chez un patient conscient et en l’absence de détresse vitale,
peut être laissée en place avant une ISR notamment dans le cadre de la prise en charge d’une
urgence chirurgicale digestive [65]. L’intubation trachéale sous ISR en médecine d’urgence exclue
la pose d’une SNG avant la sécurisation des voies aériennes du fait de la précarité clinique des
patients pouvant mener à des régurgitations et des vomissements.
25
???.C.4 Indications et contre-indications de la manoeuvre de Sellick
Si la PC est indiquée dans toutes les situations où il existe un risque de régurgitation et
d’inhalation de liquide gastrique ou oesophagien dans le pharynx et l’arbre trachéobronchique au
cours de l’induction d’une anesthésie générale [15, 42, 65, 90], elle est également préconisée dans
la prise en charge de l’arrêt cardiorespiratoire [91].
Les vomissements actifs et les traumatismes laryngés sont les principales contre- indications
à la réalisation de la manœuvre de Sellick [15, 65, 90]. Les traumatismes laryngés mêmes anciens
peuvent être responsables d’obstruction des voies aériennes supérieures [92, 93]. Les
vomissements survenant lors de l’induction sont généralement liés à une sédation inadéquate
responsable de la persistance des réflexes de protection des VAS.
D’autres contre-indications sont citées dans la littérature: corps étranger intra-trachéal,
trachéostomie, diverticule pharyngé [65]. L’application de la pression cricoïdienne sur un rachis
cervical traumatique est discutée [61-64].
III.C.5 Effets indésirables de la manoeuvre de Sellick
La pression cricoïdienne appliquée trop tôt et de façon trop forte peut provoquer une toux ou
des nausées [94]. Des vomissements pendant l'induction anesthésique peuvent être responsables
d'une inhalation pulmonaire ou d’une rupture oesophagienne [68, 69]. D'après Sellick, la rupture
oesophagienne peut se produire lorsque la perte de conscience, la relaxation musculaire et la PC ne
sont pas synchrones [71].
L'application de la manoeuvre de Sellick a été responsable de fractures du cartilage cricoïde
ayant mené à des obstructions complètes des voies aériennes [92, 93]. Ces fractures sont survenues
dans un conteste de traumatisme laryngé récent ou ancien.
Il a par ailleurs été observée une obstruction complète des voies aériennes chez une personne
présentant une hypertrophie de la thyroïde linguale. Une hémorragie sévère d'un goitre est
survenue à la suite de l’application d’une PC [95].
L'effet de la pression cricoïdienne sur le système neurovégétatif est discuté [96, 97].
Parmi trois études ayant examiné les effets de la pression cricoïdienne sur les mouvements
du rachis cervical, deux rapportent l’existence de mouvements "considérables" tandis que la
dernière atteste qu'il existe uniquement un déplacement minime [61-63]. Une quatrième étude
rétrospective n’a pas retrouvé de séquelles neurologiques consécutives à l'intubation de traumatisés
du rachis cervical intubés dans un service d'urgence américain [64].
26
???.D CONTROVERSES CONCERNANT LA MANŒUVRE DE SELLICK
???.D.1 Pression cricoïdienne et anatomie des voies aériennes supérieures
Des études radiologiques remettent en question la compression de l’œsophage entre le
cartilage et le rachis cervical lors de la PC. [11, 98, 99]. Il a été suggéré par Vanner, après analyse
d'une tomodensitométrie (TDM) cervicale sous PC, que les deux structures convexes du cartilage
cricoïde et du corps vertébral étaient effectivement bien comprimées [88]. Cependant, seule une
partie de la lumière oesophagienne était oblitérée. L’insertion d’une SNG était alors proposée pour
combler la partie de l'oesophage insuffisamment comprimée par la PC. Plus récemment, il a été
objectivé que la force appliquée sur le cartilage cricoïde agissait davantage sur le muscle crico-
pharyngien que sur l’œsophage comme précédemment cité [98].
Une évaluation rétrospective de 51 TDM cervicales et une analyse prospective de 21
imageries par résonance magnétique (IRM) ont montré que l'oesophage était déplacé latéralement
sur 49% des scanners et 53% des IRM [98, 99]. L'étude des images réalisées par IRM avait décelé
que l'application de la PC augmentait la fréquence et le degré du déplacement de l’œsophage dans
90% des cas. Avec une pression cricoïdienne de 20 à 30 N, l’oesophage était incomplètement
interposé entre le cartilage cricoïde et corps vertébral sur 71% des IRM (15/21). De fait, les
régurgitations du contenu gastrique peuvent survenir malgré l’application correcte de la PC (Figure
14).
Figure 14. IRM cervicale avant (A) et après (B) l’application d’une pression cricoïdienne [99]. Un déplacement de l’oesophage vers la gauche de 12,1 mm est mesuré.
C : cartilage cricoïde ; E : œsophage ; VB : corps vertébral.
27
???.D.2 Pression cricoïdienne et protection des voies aériennes supérieures
???.D.2.1 L’effet protecteur de la pression cricoïdienne
L’effet protecteur de la pression cricoïdienne a été souligné lors de la publication princeps de
B.Sellick [11]. D'autres études, utilisant la même méthodologie, ont conforté cette hypothèse [75,
89, 100]. Ces travaux ont indiqué que la pression cricoïdienne empêchait le reflux dans le pharynx
de solution saline portée à une pression oesophagienne supérieure à 50 cmH2O et quelquefois
jusqu'à plus de 100 cmH2O.
Une seule observation clinique relate une régurgitation survenue suite au relâchement de la
PC après intubation trachéale programmée d’un patient aux antécédents de reconstruction
oesophagienne [101].
???.D.2.2 L’inefficacité de la pression cricoïdienne
Dans le cadre de l’anesthésie, la survenue de régurgitations en dépit de l’application de la
pression cricoïdienne a été rapportée dans différentes observations cliniques [68, 82, 102, 103]. Un
registre médico- légal nord américain colligeant les plaintes, sur 30 ans, a mentionné 67 cas
d’inhalations. Dix sept de ces patients avaient bénéficié de l'application de la manoeuvre de Sellick
[104]. Une revue australienne concernant l'inhalation au bloc opératoire retrouvait 133 cas dont 4
survenus malgré la manoeuvre de Sellick [105]. Les enquêtes sur la mortalité maternelle au
Royaume-Uni retrouvent également des cas d'échec de la manoeuvre de Sellick chez des
parturientes. Le rapport Morgan concernant la mortalité maternelle de 1979 à 1981 montre que
l'inhalation s'était produite chez huit patientes, dont six sur lesquelles la manoeuvre de Sellick était
appliquée [26].
Dans le cadre de la médecine d’urgence, Schwartz et al. ont publié des données relatives à
297 intubations trachéales et ont retrouvé 12 cas d'inhalation pulmonaire [18]. Parmi ces cas, 9
intubations trachéales ont été réalisées en présence d’une manoeuvre de Sellick. La revue de
Thibodeau et al. concernant 133 intubations trachéales aux urgences objectivait 3 malades ayant
inhalé en dépit de l'application de la manoeuvre de Sellick [20].
Dans le cadre de la médecine préhospitalière française, Cantineau et al. relatent 3 cas de
régurgitations lors d’intubation dont une survenue alors que la manoeuvre de Sellick était réalisée
[1].
28
???.D.2.3 Hypothèse physiopathologique de l’inefficacité de la pression
cricoïdienne
Il est impossible de déterminer la cause exacte de ces échecs de la protection des VAS par la
manoeuvre de Sellick.
Si les régurgitations du contenu gastrique et oesophagien sont empêchées par les sphincters
oesophagiens supérieur et inférieur, l'anesthésie effondre le tonus du sphincter supérieur de
l’œsophage. Théoriquement, l'application de la PC permet de suppléer au rôle du SSO en évitant
les éventuels reflux gastro-oesophagien [53].
Des variations anatomiques interindividuelles, une application incorrecte de la force, des
modifications des rapports anatomiques voire une facilitation des régurgitations induites par la
manoeuvre de Sellick, peuvent être des élément s favorisant ces échecs.
De nombreuses études ont suggéré que la pression cricoïdienne présente des effets nuisibles
sur le sphincter oesophagien inférieur [106-108]. L'efficacité du SIO dépend de la différence entre
la pression de ce sphincter et la pression intra-gastrique connue sous le nom de pression de barrière
[46]. Il a été montré que la PC réduit la pression du SIO ainsi que la pression de barrière, chez des
patients sains non anesthésiés, sans toutefois entraîner de régurgitations gastro-oesophagiennes
[107, 109]. Un travail récent, sur des patients anesthésiés, confirme que la manœuvre de Sellick
entraîne une baisse considérable (29%) de la pression du sphincter inférieur de l’oesophage
associée à une baisse de 44% de la pression de barrière [108]. De telles réductions de pression du
sphincter oesophagien inférieure chez un patient anesthésié et considéré à estomac plein pourraient
favoriser un reflux, voire une régurgitation pharyngée en cas d’application incorrecte, ou
inexistante, de la manœuvre de Sellick.
???.D.3 Pression cricoïdienne et diminution de la distension gastrique
La distension gastrique provoquée par une ventilation en pression positive au masque facial
majore le risque de régurgitation pharyngée [25]. La réduction de la distension gastrique par la PC
avancée par Sellick a été vérifiée par plusieurs études [11, 110-113]. Des volumes courants et des
pressions d’insufflation moins importants que ceux utilisés dans ces études sont actuellement
recommandés [114]. Le bénéfice de la manoeuvre de Sellick décrit par ces travaux pourraient
finalement être moindres.
29
???.D.4 Pression cricoïdienne et contrôle des voies aériennes supérieures
???.D.4.1 Pression cricoïdienne et ventilation au masque facial
Une pression cricoïdienne appliquée au cours de la ventilation manuelle par masque facial,
entraîne des réductions des volumes courants, des augmentations des pressions de pic inspiratoire
ainsi que des ventilations jugées difficiles voire impossibles [111, 112, 115-117].
L’application de la pression cricoïdienne chez des patients conscients volontaires entraîne
des difficultés de ventilation dans plus de la moitié des cas pour une force de plus de 35 N.
L’obstruction complète des voies aériennes pour une force de 45 N a été observée [94]. La
difficulté ou l’impossibilité de la ventilation au masque sous PC a été rapportée au cours de 23
échecs d'intubation trachéale, dans respectivement 7 cas (30%) et 2 cas (9%) [118]. Une autre
étude montre que des forces cricoïdiennes supérieures à 44 N entraînent des difficultés de
ventilation chez 80 % des patients anesthésiés (24/30) [119]. L'échec de la ventilation était
diminué lors de l’application d’une force de 20 N.
De considérables distorsions de l'anatomie des voies aériennes supérieures, consécutives à
l’application de PC sont décrites et expliquent cette gêne à la ventilation au masque facial [119].
Les modifications des structures du larynx pendant l'application de la PC ont été évaluées à
différents niveaux de force (20, 30 et 44 N) chez 30 patients anesthésiés [119]. Quatre vingt dix
pourcents des malades avaient une déformation du cartilage cricoïde lors de l’application d’une
force de 44 N. Une occlusion du cartilage s'est produite chez 50, 43 et 23 % des malades à des
niveaux de force respectifs de 44, 30 et 20 N. La fermeture des cordes vocales a été observée à 30
N chez 50 % et à 20 N chez 40 % des 30 malades.
???.D.4.2 Pression cricoïdienne et vision laryngoscopique
Des résultats contradictoires ressortent des études évaluant les conséquences de la pression
cricoïdienne sur la vision laryngoscopique en anesthésie.
Turgeon et al. ont mené une large étude, randomisée, contrôlée, en double aveugle en
anesthésie programmée. Dans cette étude, une PC à 30 N était réalisée juste après un
échantillonnage de la force sur un simulateur. Il n'était pas objectivé d’effets adverses de la PC sur
le succès de l'intubation trachéale, la vue laryngée ou le temps d'intubation trachéale [13].
Une étude récente a enquêté sur l'effet de la PC en photographiant la vue laryngée grâce à un
endoscope rigide placé le long de la ligne de vision du laryngoscopiste [21]. La PC a entraîné
autant d’amélioration que de dégradation de la vue laryngoscopique. Toutefois, la PC a nécessité
30
une nette majoration de la force de traction sur le laryngoscope pour restaurer partiellement ou
complètement la vue laryngoscopique optimale.
Une étude prospective, incluant 181 patients, a été menée dans le but d’identifier la
manipulation laryngée externe offrant la meilleure vision glottique [22]. La pression sur le
cartilage cricoïde a amélioré la visualisation glottique chez seulement 11% des patients alors que la
pression exercée sur le cartilage thyroïde a optimisé la visualisation dans 88% de cas.
Une large étude comptant 1530 laryngoscopies réalisées sur 106 cadavres a comparé les
effets de la manoeuvre de Sellick, de la manœuvre BURP (Back, Up, Right Pressure) et de la
laryngoscopie bimanuelle sur la visualisation glottique [24]. Lors de la laryngoscopie bimanuelle,
l’opérateur réalisant la laryngoscopie directe optimise l’exposition laryngée par des manipulations
externes et demande à un aide de fixer cette position ce qui lui permet de saisir la sonde
d’intubation trachéale pour finaliser le geste. La manœuvre BURP consiste à réaliser sur le
cartilage thyroïde une pression selon 3 directions successives : postérieure, céphalique et vers la
droite du patient. Cette étude a principalement inclus des médecins urgentistes et l’application de
la PC n'était pas standardisée. La manipulation bimanuelle était considérablement plus efficace
pour améliorer la vision glottique que la pression cricoïdienne ou la manœuvre BURP. La
manoeuvre de Sellick a causé une détérioration de la vue laryngée dans 29% de cas. Une autre
étude réalisée en anesthésie réglée rapporte les mêmes effets de la pression cricoïdienne sur la
vision laryngée [23].
???.D.4.3 Pression cricoïdienne et mandrin long semi-rigide (type Eschmann)
Le guide de type Eschmann, aussi appelé mandrin long semi-rigide béquillé est une aide
importante au contrôle des voies aériennes dites difficiles [9, 10, 120, 121]. Il est utilisé pour des
patients présentant des scores de visualisation glottique II et III de la classification de Cormack et
Lehane [122].
En présence de la pression cricoïdienne, le mandrin de type Eschmann facilite davantage
l’intubation trachéale qu’un mandrin semi-rigide [23]. Cependant, avec la PC, il est observé une
fréquence plus importante de gêne à la cathéterisation de la glotte avec le mandrin de type
Eschmann en place [123]. Cette difficulté n’est que partiellement levée par l’application d’une
rotation de la sonde d’intubation sur le mandrin.
31
???.D.4.4 Pression cricoïdienne et masque laryngé
Le masque laryngé se positionne au niveau de la bouche oesophagienne, en regard des
sixième et septième vertèbres cervicales, juste en arrière du cartilage cricoïde. Ainsi, l’application
d’une force sur ce dernier entraîne une compression de l'espace hypopharyngé source de "conflit
anatomique" [124-128]. L’étude menée par Aoyama et al. rend compte d’un positionnement trop
proximal du masque laryngé en regard des 4ème ou 5ème vertèbres cervicales en présence d’une
PC [125]. Ce positionnement était responsable d’une obstruction partielle ou complète des VAS
par compression de l’orifice glottique lors du gonflement du masque laryngé.
Plusieurs études ont aussi montré que la pression cricoïdienne gênait la ventilation avec le
masque laryngé [125,126]. La ventilation était difficile chez 50% et 73% des malades avec des PC
appliquées à 20 et 30 N respectivement [119]. De plus, l’intubation trachéale à travers un masque
laryngé était plus souvent compromise en présence de la manœuvre de Sellick [127,128].
En cas de ventilation difficile au masque facial et d’échec d’insertion du masque laryngé,
certains auteurs recommandent de relâcher la pression cricoïdienne. [16, 76, 128].
32
IV. BUT DE L’ETUDE
Le dogme, imposé par les sociétés savantes, recommande de réaliser la manœuvre de Sellick
pour toute intubation trachéale en médecine d’urgence. Pour augmenter l’observance des praticiens
à pratiquer la manœuvre de Sellick, des modifications ont été proposées ces dix dernières années
pour réduire la gêne occasionnée par la PC sur le contrôle des voies aériennes lors de l’ intubation
trachéale ou lors de la ventilation au masque facial. La principale modification de la PC a porté sur
un abaissement significatif de l’intensité de la force exercée sur le chaton cricoïdien. Les règles de
l’apprentissage de la PC ont été également mieux définies [57]. Cependant, malgré ces efforts
d’éducation réalisés par les sociétés savantes, l’application de la manœuvre de Sellick est loin
d’être systématique en médecine préhospitalière. Les médecins urgentistes constatent des
inhalations pulmonaires bien que la manœuvre de Sellick soit appliquée. Ils estiment que la
ventilation au masque facial est plus difficile si l’on maintient la PC. Ils observent souvent que les
conditions d’intubation s’améliorent quand la PC est relâchée. Enfin, ils doutent de leur capacité à
réaliser correctement la PC.
Nous avons décidé de former l’ensemble du personnel médical et paramédical de notre
SMUR à la réalisation de la PC telle que recommandée dans les manuels d’anesthésie et de
réanimation. Après cet apprentissage et en se conformant aux recommandations émises par les
sociétés savantes pour le contrôle des VAS en médecine préhospitalière, nous avons évalué, en
présence de la pression cricoïdienne, la fréquence de survenue de difficultés d'intubation trachéale.
Une intubation trachéale jugée difficile autorisant une levée de la PC, nous avons secondairement
analysé l'impact de cette interruption de la manoeuvre sur les conditions d'intubation trachéale..
33
V. MATERIELS ET METHODE
V.A MATERIELS V.A.1 Conditions de réalisation de l’étude
Cette étude prospective, descriptive, monocentrique, s’est déroulée au SMUR du centre
hospitalier de Gonesse sur une période de 9 mois d’octobre 2007 à juin 2008.
Le SMUR de Gonesse comprend 2 Unités Mobiles Hospitalières (UMH) pouvant assurer la
prise en charge de patient durant la journée, et d’une UMH disponible la nuit. Chaque UMH
comprend une équipe formée de 3 à 4 intervenants au minimum avec un médecin transporteur, un
infirmier et un ou deux sapeurs pompiers. Un interne ou un externe est présent dans chaque UMH
mais pas systématiquement sur chaque intervention.
Tous les médecins participant à cette étude ont suivi au cours de leur cursus médical une
formation spécifique à l’intubation trachéale urgente (Diplôme universitaire: Contrôle des voies
aériennes supérieures. Université Paris XIII).
V.A.2 Matériels d’entraînement à la pression cricoïdienne
Un document rappelant les bases anatomiques et les éléments essentiels à la pratique correcte
de la pression cricoïdienne a été mis à la disposition de l’ensemble du personnel (Annexe 2). Une seringue de 50 ml montée sur un support a été choisie dans le cadre de la simulation de
la force nécessaire à la bonne réalisation de la manœuvre de Sellick. L’utilisation d’une balance de
cuisine était quand à elle plus occasionnelle (Figure15).
Figure 15. Seringue et balance d’entraînement à la pression cricoïdienne
34
V.A.3 Cahier de recueil de données
Un cahier de recueil de données a été conçu pour permettre d’enregistrer les caractéristiques
des patients ainsi que les paramètres de l’intubation. Des rappels concernant les scores de
visualisation glottique étaient par ailleurs consignés dans ce livret. Les cahiers étaient remplis par
le médecin ayant réalisé l’intubation une fois l’intervention terminée (Annexe 3).
V.A.4 Ethique
Ce travail a été réalisé en regard des recommandations des sociétés savantes concernant
l’intubation trachéale en médecine préhospitalière [9, 10].
Nous avons imposé à l’équipe du SMUR de Gonesse acceptant de participer à ce travail de
se remettre en question. Tous les intervenants du SMUR se sont formés à la réalisation pratique de
la manœuvre de Sellick. Puis l’ensemble des médecins seniors a accepté d’intuber les patients alors
que la manoeuvre de Sellick était appliquée sans réserve par un opérateur indépendant entraîné.
Ce n’est qu’en cas d’intubation difficile malgré l’application d’une procédure standardisée
d’intubation difficile, que la manœuvre de Sellick était abandonnée. Après l’abandon de la
manœuvre de Sellick, la procédure d’intubation trachéale reprenait selon un algorithme prédéfini et
validé par la littérature.
Dans la mesure où ce travail calquait la pratique de l’intubation trachéale en médecine
préhospitalière sur les recommandations des sociétés savantes, nous n’avons pas jugé nécessaire de
solliciter l’avis d’un comité d’éthique pour réaliser cette première étude qui nous l’espérons
permettra d’avoir un avis favorable d’un comité de protection des personnes pour évaluer de
manière randomisée l’intérêt de la manœuvre de Sellick lors de l’intubation trachéale en médecine
préhospitalière.
35
V.B METHODE
V.B.1 Définition de la population étudiée
V.B.1.1 Critères d’inclusion Tous les patients de plus de 18 ans nécessitant une intubation trachéale, y compris les
personnes en arrêt cardio-respiratoire, ont été inclus.
V.B.1.2 Critères d’exclusion Les patients âgés de moins de 18 ans ou présentant une contre indication à l’injection de
succinylcholine (Tableau 38) ou une contre-indication à la réalisation de la manœuvre de
Sellick (traumatisme laryngé) ont été exclus de l’étude.
V.B.2 Définition des intervenants
Les médecins et les internes formés au contrôle des voies aériennes ont été les seules
personnes autorisées à réaliser l’intubation trachéale. Après formation, l’ensemble du personnel
médical : médecins, internes et externes ainsi que le personnel infirmier pouvait être amené à
pratiquer la manœuvre de Sellick.
Au SMUR de Gonesse, l’équipe médicale comporte au minimum trois personnes. Un
opérateur réalise la laryngoscopie directe assisté par un aide responsable de la gestion de
l’ensemble du matériel d’intubation (aspiration mécanique et assistance permanente de l’opérateur
dans la préparation des différents matériels nécessaires au contrôle des VAS tel que mandrin de
type Eschmann, pince de Magill et Fastrach®). Un infirmier administre les drogues anesthésiques
et pratique la manœuvre de Sellick. Plus généralement, l’équipe comporte quatre personnes
• Antécédents personnels ou familiaux d'hyperthermie maligne,
• Allergie au Suxaméthonium,
• Atteinte du motoneurone étendue (hémiplégie, paraplégie,
tétraplégie ou lésion plexique)>72 H
• Maladie responsable d’une fragilité musculaire (myopathie)
• Brûlure grave et étendue en dehors de la phase initiale
• Déficit en pseudocholinestérases plasmatiques
Tableau 1. Contre-indications au Suxaméthonium [38]
36
(présence d’un externe ou d’un interne) permettant à un des intervenants d’être entièrement dédié à
la réalisation de la manœuvre de Sellick et au chronométrage de la durée de l’intubation trachéale.
V.B.3 Procédure d’intubation
En dehors de l’arrêt cardio-respiratoire, l’intubation trachéale a été réalisée sous ISR selon le
protocole du service et conformément aux recommandations récentes concernant le contrôle des
voies aériennes en médecine préhospitalière [9,10].
L’algorithme de l’intubation trachéale de notre étude s’est articulé autour du score de
visualisation glottique (Score de Cormack et Lehane) observé lors de la première laryngoscopie et
de l’échec du contrôle des VAS en présence de la pression cricoïdienne (Figure 16).
La pression cricoïdienne devait être systématiquement réalisée à tout patient nécessitant une
intubation trachéale et ne présentant pas les critères d’exclusion à l’étude. Dans les situations où le
repérage anatomique était difficile (patient obèse), l’opérateur pratiquant la PC pouvait solliciter
l’aide du médecin pour identifier le cartilage cricoïde avant le début de la procédure d’intubation
trachéale. La qualité de la PC devait correspondre aux normes définies pendant la formation
pratique avant le début de l’étude. Aucune diminution de la force de la pression cricoïdienne ou de
modification de la direction de cette dernière n’était permise. La PC n’était relâchée qu’après
gonflement du ballonnet de la sonde d’intubation.
Si lors de la première laryngoscopie réalisée avec une lame métallique à usage unique ou ré-
utilisable, avec exécution de la PC, le score de Cormack et Lehane était inférieur à IV, la
procédure d’intubation trachéale était poursuivie selon les recommandations des sociétés savantes.
Un maximum de deux tentatives d’intubation sous laryngoscopie directe était autorisé. Au cours de
ces deux tentatives, il était recommandé d’utiliser le mandrin de type Eschmann en cas de
difficulté d’accès à la trachée. En cas d’échec d’accès trachéal sous laryngoscopie directe avec ou
sans le mandrin type Eschmann, et en présence d’un matériel d’aspiration vérifié et fonctionnel, la
PC était relâchée. De là, un maximum de deux autres tentatives devenait possible. Le relâchement
de la PC autorisait l’application de manipulations laryngées externes.
Si lors de la première laryngoscopie, le larynx n’était pas visible ce qui correspondait à un
score de Cormack et Lehane égal à IV, alors la PC était relâchée. La procédure d’intubation
trachéale était poursuivie selon les recommandations des sociétés savantes.
En cas d’échec d’intubation trachéale sous laryngoscopie directe malgré l’assistance du
mandrin d’Eschmann alors que la PC était relâchée, il était recommandé de tenter une intubation
trachéale à l’aveugle avec le masque laryngé Fastrach®.
37
Les patients intubés avec une PC maintenue étaient inclus dans le Groupe A.
Les patients dont l’intubation trachéale nécessitait le relâchement de la PC étaient inclus
dans le Groupe B.
Les patients dont l’intubation trachéale nécessitait le relâchement de la PC étaient inclus
dans le Groupe B. Les caractéristiques des patients en présence et en l’absence de la PC sont
rapportées respectivement au sein des Groupes B1 et B2.
Les patients intubés sans que la PC ne soit appliquée d’emblée constituaient un écart au
protocole, ils étaient inclus dans le Groupe C.
Toute désaturation en oxygène, survenant lors du geste d’intubation des patients ayant une
ACS, définie par une diminution de la saturation pulsée en oxygène (SpO2) au delà de la valeur
seuil de 90 % ou une baisse d’au moins 5 % par rapport à la valeur initiale de SpO2 [39], rendait
obligatoire une rapide ventilation au masque facial. En cas de ventilation au masque facial très
difficile ou impossible, il était alors recommandé de ventiler les patients au travers du masque
laryngé Fastrach®.
Figure 16. Algorithme d’intubation trachéale
38
V.B.4 Entraînement à la manœuvre de Sellick
Une formation théorique et pratique à la réalisation de la manœuvre de Sellick a été réalisée
au début de l’étude. Tous les deux mois, des rappels théoriques et des réentraînements collectifs
ont été réalisés à l’occasion de réunions de service.
Un système d’entraînement comprenant une seringue de 50 ml montée sur un support a servi
de moyen de référence à la simulation de la force à appliquer pour effectuer correctement la
manœuvre de Sellick. Il était demandé aux différents intervenants de s’entraîner régulièrement sur
la seringue et idéalement avant les prises de garde. La mesure de la force appliquée pouvait
également être évaluée de façon autonome par les intervenants au moyen d’une balance de cuisine
(Figure 15).
V.B.5 Définition des paramètres recueillis
En dehors du relevé des constantes vitales et du chronométrage de la manœuvre d’intubation
trachéale, toutes les autres données étaient recueillies une fois l’intervention terminée.
V.B.5.1 Donnés Démographiques L’âge, le sexe, la taille et le poids ont été colligés précisément ou évalués par le médecin.
L’index de masse corporel (IMC) a été calculé à partir des chiffres de poids et de taille, réels ou
estimés.
V.B.5.2 Indications de l’intubation trachéale Les patients ont été regroupés selon sept cadres diagnostiques initiaux qui étaient le reflet des
motifs d’intubation trachéale les plus couramment rencontrés.
• ACR : il s’agit des patients en arrêt cardiorespiratoire à l’arrivée de l’équipe du SMUR.
• Détresse respiratoire : il s’agit des patients ayant une fréquence respiratoire inférieure à 10
c.min-1 ou supérieure à 29 c.min-1 mesurée lors de l’examen clinique initial.
• Détresse hémodynamique : il s’agit des patients ayant un état de choc septique, hémorragique
non traumatique ou cardiogénique.
• Détresse neurologique : il s’agit des patients ayant un coma avec un score de Glasgow inférieur
ou égal à 8 d’origine métabolique, neurologique (accident vasculaire cérébral ou épilepsie) ou
inconnu.
• Intoxication médicamenteuse : il s’agit de patients ayant un état clinique en rapport à la prise
de toxiques ou de médicaments
• Traumatisme grave : il s’agit de tous les patients traumatisés incluant les traumatismes
crâniens, les polytraumatisés.
39
• Brûlures, inhalation de fumées
• Autres : ont été classés dans cette catégorie les patients qui ne correspondaient pas aux autres
cadres diagnostiques.
V.B.5.3 Constantes vitales et environnement des patients La fréquence respiratoire (FR), la saturation pulsée en oxygène et les paramètres
hémodynamiques ont été notés systématiquement lors de l’examen initial du patient puis au cours
de la manoeuvre d’intubation trachéale (à l’induction et lors de l’intubation).
Du fait des conditions environnementales rencontrées en médecine préhospitalière, la
position des patients au moment de l’intubation trachéale était consignée.
V.B.5.4 Protocole de sédation
Le score de Glasgow recueilli correspond au score calculé lors de la prise en charge initiale.
L’analyse de la distribution du score de Glasgow au sein de la population étudiée a été réalisée
après fractionnement en 3 classes de score: de 3 à 7, de 8 à 11 et de 12 à 15.
Ont été collectées la nature et la dose totale des produits utilisés lors de l’induction de
l’anesthésie des patients présentant une activité cardiaque spontanée (ACS). La dose rapportée au
poids du patient (mg/Kg) a été calculée.
V.B.5.5 Complications de l’intubation trachéale
La présence d’un contenu pharyngé lors de la première laryngoscopie était recherchée.
Celui-ci correspondait à tout liquide régurgité et/ou localisé dans l’hypopharynx nécessitant ou pas
une aspiration mécanique.
Toutes les complications ou événements indésirables contemporains de l’intubation trachéale
ont été colligés. Ces complications ava ient un rapport direct avec la qualité de la sédation et/ou le
geste d’intubation trachéale.
Les éléments recueillis étaient :
• Les régurgitations, les efforts de vomissement et l’inhalation.
• La toux, les efforts ventilatoires, le laryngospasme et le bronchospasme
• Les troubles du rythme survenant lors de la manoeuvre d’intubation ou lors de l’administration
de médicaments anesthésiques.
• La bradycardie extrême (FC < 40 min-1) et l’arrêt cardiorespiratoire.
• L’intubation oesophagienne.
• Les traumatismes dentaires.
40
D’après les constantes recueillies, étaient déterminés :
• La survenue d’un collapsus défini par une pression artérielle systolique (PAS) inférieure à 90
mmHg chez les patients qui n’étaient pas en état de choc avant l’intubation. Si la PAS était
inférieure à 90 mmHg avant l’intubation, toute diminution de la PAS en dessous de la valeur de
référence était considérée comme un collapsus [39].
• La survenue d’une désaturation en oxygène [39].
V.B.5.6 Paramètres de l’intubation trachéale
V.B.5.6.a Paramètres évalués : les scores de visualisation glottique
Deux scores de visualisation glottique obtenus par laryngoscopie directe ont été utilisés dans ce
travail :
• Le score de Cormack et Lehane comportant quatre grades de visualisation glottique. Grade
I, glotte entièrement vue ; Grade II, cordes vocales partiellement vues ou visualisation des
aryténoïdes ; Grade III, épiglotte uniquement vue ; Grade IV, aucune structure laryngée vue
(Figure 17) [122].
• Le score POGO défini par le pourcentage d’ouverture de l’orifice glottique visible par
l’opérateur réalisant la laryngoscopie (Figure 18). L’ouverture de l’orifice glottique est définie
comme la distance séparant les commissures antérieure et postérieure de la glotte. Un score POGO
égal à 0 % signifie que l’ouverture glottique n’est pas visible. Un score POGO à 100% signifie que
la totalité de la fente glottique est visualisée. Un score POGO de 0 % correspond aux scores de
visualisation III ou IV de la classification de Cormack et Lehane. Un score POGO de 100 %
correspond au score de visualisation I de la classification de Cormack et Lehane. Comparé au
score de Cormack et Lehane, une plus grande fiabilité intra- et inter-observateur a été attribuée au
score POGO [129-130]
Figure 17. Représentation schématique du score de Cormack et Lehane [122]
41
Ces deux classifications ont fait l’objet de rappels auprès du personnel impliqué au moyen
d’images laryngoscopiques vidéo-projetées lors de la présentation de l’étude. Le cahier de recueil
de données comportait par ailleurs une section spécifique au rappel de ces scores.
Le scores de Cormack et Lehane et le score POGO étaient systématiquement évalués
pendant la laryngoscopie initiale et lors des laryngoscopies ultérieures si la PC était abandonnée.
Pour l’analyse des scores POGO, sept classes ont été individualisées. Les deux scores de POGO
extrêmes (0 et 100 %) formaient chacun une classe, les scores compris entre 1 et 99 % étaient
subdivisés en 5 classes par tranche de 20 % chacune (POGO 1-20%, POGO 21-40%, POGO 41-
60%, POGO 61-80%, POGO 81-99%).
V.B.5.6.b Paramètres mesurés
- La durée de l’intubation trachéale La durée de l’intubation, exprimée en secondes (s) correspondait au temps compris entre le
moment du passage de la pointe de lame du laryngoscope au travers des arcades dentaires jusqu’au
gonflement du ballonnet de la sonde d’intubation trachéale.
- Mesure par une échelle visuelle analogique (EVA) de l’influence du relâchement de la pression
cricoïdienne sur la qualité de la visualisation glottique
Une échelle visuelle analogique (EVA : -100% à 100 %) a été utilisée pour mesurer
l’influence du relâchement de la PC sur la qualité de la visualisation glottique qui pouvait
s’améliorer ou se dégrader (Figure 19).
Figure 18. Pourcentage d’ouverture de l’orifice glottique (POGO) observable lors d’une laryngoscopie. [129]
42
- Mesure de la difficulté d’intubation trachéale par une échelle visuelle analogique (EVA)
La difficulté globale du geste d’intubation trachéale a été mesurée au moyen d’une échelle
visuelle analogique. La limite gauche de l’échelle, notée zéro, reflète une intubation trachéale très
facile, à l’inverse la limite droite de l’échelle notée cent, une intubation impossible (Figure 20).
V.B.5.6.c Paramètres calculés
- La réalisation de la manœuvre de Sellick
Nous avons compté le nombre de manoeuvre de Sellick et son taux d’interruption pour
finaliser l’intubation trachéale.
- Le Score IDS
La difficulté d’intubation trachéale a été quantifiée par le score IDS (Intubation Difficulty
Scale (Tableau 2) [6]. L’IDS est la somme de 7 valeurs numériques attribuées à 7 items présentés
dans le Tableau 2. Un score égal à 0 signifie l’absence de difficultés tandis qu’un score compris
entre 1 et 5 indique une difficulté modérée. Un IDS > 5 définit une intubation trachéale difficile.
Figure 19. Echelle visuelle analogique permettant de mesurer l’influence du relâchement de la pression cricoïdienne sur la qualité de la vision glottique
Figure 20. Echelle visuelle analogique permettant la mesure de la difficulté de l’ intubation trachéale
43
Paramètres Score Nombre de tentatives > 1 N1 Nombre d’opérateurs > 1 N2 Nombre de techniques alternatives N3 Score de Cormack – 1 N4 Force de laryngoscopie Normale Augmentée
N5 = 0 N5 = 1
Manipulation laryngée externe Non appliquée Appliquée
N6 = 0 N6 = 1
Position des cordes vocales Abduction ou non vues Adduction
N7 = 0 N7 = 1
IDS = Somme des scores N1 - N7
Pour les patients intubés après relâchement de la manœuvre de Sellick, deux scores IDS ont
été calculés. Ces scores dits «IDS B1» et «IDS B2» différaient de par la qualité de la laryngoscopie
(visualisation, force appliquée) et le nombre de tentatives d’intubation avant et après relâchement
de la PC.
La réalisation de manipulations laryngées externes ne pouvant être effective en présence de
la manœuvre de Sellick, cet item n’était pas coté pour le score IDS B1. Cependant, nous avons
considéré que la levée de la PC était équivalente à l’adjonction d’une manœuvre alternative
menant à l’addition d’un point supplémentaire pour le score IDS B1. Un score IDS B1’ ne prenant
pas en compte le point supplémentaire relatif à l’arrêt de la PC a toutefois été calculé.
- Détails des paramètres du score IDS
En plus des scores de Cormack et Lehane, la position ouverte ou fermée des cordes vocales
était colligée. Le nombre de tentatives d’intubation trachéale et la force de la laryngoscopie ont été
relevés lors de la réalisation de la manœuvre de Sellick, mais également en l’absence de celle-ci.
En accord avec les définitions des items du score IDS, nous avons considéré qu’une tentative
d’intubation correspondait à tout essai d’accès à la trachée par une sonde et/ou un mandrin [6].
Le nombre d’opérateurs, les méthodes alternatives utilisées et l’utilisation de manipulations
laryngées externes étaient recueillis. Parmi les méthodes alternatives, une attention particulière a
été portée au mandrin de type Eschmann. Il était précisé si l’utilisation de celui-ci était effective
VI.G.1.1 Le score de Cormack et Lehane (SCL) VI.G.1.1.a Qualité de la visualisation selon la classification de Cormack et Lehane
Les scores de visualisation selon la classification de Cormack et Lehane (SCL) sont
rapportés dans le Tableau 13.Le Groupe B1 présente la plus grande proportion de SCL égal à IV et
aucun SCL égal à I par rapport aux autres groupes. Des différences significatives entre les Groupes
A et B1 intéressant les SCL égal à I, II et IV sont retrouvées (P < 0,001).
De même, des différences significatives sont observées entre les Groupes B1 et B2 (SCL égal
à I : P < 0,0001; SCL égal à II : P = 0,03 ; SCL égal à IV : P < 0,001).
VI.G.1.1.b Evolution des SCL après relâchement de la manoeuvre de Sellick
Après relâchement de la manœuvre de Sellick, 73 % soit 44 patients du Groupe B ont
présenté une amélioration de leur SCL. 16 patients ont gardé la même classe de SCL.
Parmi les patients présentant un SCL égal à IV, 3 patients ont conservé ce score tandis que
les 29 autres patients ont abaissé leur score de une, deux ou trois classes. Tous les patients ayant un
SCL égal à III ont vu leur score diminuer après le relâchement de la manoeuvre de Sellick. Seuls 9
patients ayant un SCL égal à II sur 22 ont évolué vers un SCL égal à I (Tableau 14; Figure 26).
55
Tableau 13. Score de Cormack et Lehane (SCL)
Pression cricoïdienne Réalisée
Pression cricoïdienne Relâchée Absente
Groupe A Groupe B1 Groupe B2 Groupe C n % IC 95 % n % IC 95 % n % IC 95 % n % IC 95 %
SCL égal à I 18 27 17-40 0 * 18** 30 19-43 2 20 2-56
SCL égal à II 45 68 56-79 22* 37 25-50 34** 57 43-69 5 50 19-81
SCL égal à III 3 5 1-13 6 10 4-21 5 8 3-18 0
SCL égal à IV 0 32* 53 40-66 3** 5 1-9 3 30 7-65
Total 66 100 60 100 60 100 10 100
n : nombre de patients. IC 95% : intervalle de confiance à 95 %. * P< 0,05 entre les Groupe A et B1. ** P<0,05 entre les Groupe B1 et B2.
Tableau 14. Evolution du score de Cormack et Lehane (SCL) au sein du Groupe B
Groupe B1 SCL égal à IV SCL égal à III SCL égal à II n 32 6 22
SCL égal à IV 3 0 0
SCL égal à III 5 0 0
SCL égal à II 17 4 13
Gro
upe
B2
n
SCL égal à I 7 2 9
n : nombre de patients. SCL inchangé
56
Figure 26.Evolution des scores de Cormack et Lehane (SCL) au sein du Groupe B
n : nombre de patients
57
VI.G.1.2 Le pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO)
VI.G.1.2.a Qualité de la visualisation selon la classification POGO
Les scores de visualisation POGO sont rapportés dans le Tableau 15. Le Groupe B1 présente
les plus mauvais scores de visualisation. Des différences significatives entre les Groupes A et B1
intéressant différentes catégories de scores POGO sont retrouvées (POGO 0%; POGO 61-80% et
POGO 100% : P < 0,0001; POGO 41-60%: P = 0,006; POGO 81-99% : P =0,03).
De même, des différences significatives sont observées entre les Groupes B1 et B2. (POGO
0% et POGO 100%: P < 0,0001 ; POGO 61-80%: P < 0,007). Par rapport au Groupe B2, le Groupe
C présente une différence significative de patients présentant des scores POGO 81-99% (P=
0,036).
VI.G.1.2.b Evolution des Scores POGO après relâchement de la manoeuvre de
Sellick
Selon la classification des scores POGO, 82 % des patients du Groupe B ont amélioré leur
score de vision glottique après levée de la manoeuvre de Sellick (49/60). La différence moyenne
des scores POGO entre les Groupes B1 et B2 s’élève à 47 %. Une détérioration de la vision a été
notée chez un patient ayant un score POGO passant de 60% à 30 % après relâchement de la
manoeuvre de Sellick. Chez 10 patients le score de visualisation est resté inchangé. Il s’agit de 8
patients présentant des scores POGO 0 %, et de 2 autres présentant un score POGO 30 % et 80 %
(Tableau 16, Figure 27).
Une amélioration de plus de 40 % du score POGO initial (31/60 patients) est objectivée chez
plus de 50 % des patients ayant bénéficié du relâchement de la PC (Tableau 28).
58
Tableau 15. Pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO)
n : nombre de patients. IC 95% : intervalle de confiance à 95 %. * P < 0,05 entre les Groupes A et B1. ** P < 0,05 entre les Groupes B1 et B2. † P < 0,05 entre les Groupes B2 et C.
Tableau 16. Evolution du pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une
laryngoscopie (Score POGO) au sein du Groupe B
n : nombre de patients.
Score POGO % Groupe B1 0 1-20 21-40 41-60 61-80
n 38 8 8 3 3
0 8 0 0 0 0
1-20 5 0 0 0 0
21-40 4 0 1 1 0
41-60 3 3 3 0 0
61-80 7 3 1 1 1
81-99 2 0 0 0 0 Scor
e P
OG
O %
G
roup
e B
2
n
100 9 2 3 1 2
Score POGO inchangé
60
Tableau 17.Quantification de l’amélioration du pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO) au sein du Groupe B ? POGO: Score POGO B2 – Score POGO B1.
Score POGO Nombre de patients %
Détérioration 1 1,7
Inchangé 10 16,7
Amélioration 49 81,6
=10 % 1 1,7
11-20% 5 8,3
21-30% 9 5,0
31-40% 3 5,0
41-50% 5 8,3
Amélioration : ? POGO
> 50% 26 43
Total 60 100
61
n : nombre de patients
Figure 27.Evolution du pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO) au sein du Groupe B
62
n : nombre de patients
63
n : nombre de patients
64
VI.G.1.2.c Valeur du pourcentage de l’ouverture de l’orifice glottique (score POGO) seuil
associé à la levée de la manœuvre de Sellick
L’analyse de la courbe ROC a permis d’identifier une valeur de score POGO seuil de 30 %
nécessitant de relâcher la PC pour réaliser l’intubation trachéale. Un score POGO = 30 % permet
de prédire la levée de la PC avec une sensibilité et une spécificité égales à 88% (Figure 28).
Figure 28. Courbe ROC : Pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO) et levée de la manœuvre de Sellick
Courbe ROC / POGO / AUC=0,922
0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
1
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
Fraction de faux positifs (1 - Spécificité)
Fra
ctio
n d
e vr
ais
posi
tifs
(Sen
sibilité
)
Sensibilité et spécificité / POGO
0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
1
0 20 40 60 80 100 120
POGO
Sen
sibilité
/ Spéc
ifici
té
Sensibilité Spécificité
65
VI.G.2 Paramètres mesurés
VI.G.2.1 Durée de l’intubation trachéale
VI.G.2.1.a Durée d’intubation globale
Le temps moyen d’intubation du Groupe A est inférieur à celui du Groupe B et C. Il existe
une différence significative entre les Groupes A et B (P< 0,0001) (Tableau 18).
Tableau 18. Durée de l’intubation trachéale selon les Groupes
ET : Ecart Type. IC 95% : intervalle de confiance à 95 % * P < 0,05 entre les Groupes A et B.
VI.G.2.1.b Durée de l’intubation trachéale et utilisation du mandrin de type Eschmann
Une durée d’intubation significativement plus importante est objectivée lors de l’utilisation du
mandrin de type Eschmann chez les patients du Groupe B (P =0,001) (Tableau 19).
Tableau 19.Groupe B : Durée de l’intubation trachéale en présence ou en l’absence du mandrin de type Eschmann
ET : Ecart Type. IC 95% : intervalle de confiance à 95%. * P< 0.05.
Groupe A Groupe B Groupe C
Moyenne +/-ET 25 +/-14 62 +/-50* 34 +/-23
IC 95% 21 - 28 49 - 74 19 - 48
Médiane 21 44 26
Minimum 8 10 15
Maximum 82 225 90
Mandrin + Mandrin -
Moyenne +/- ET 100 +/- 56 * 46 +/- 38
IC 95 % 73 -127 34-57
66
VI.G.2.2 Mesure par échelle visuelle analogique (EVA) de l’évolution
de la vision glottique
Chez 85 % des patients du Groupe B, l’évaluation des modifications de la vision glottique
par EVA objective une amélioration moyenne de 59 %. Le détail des taux d’amélioration de la
vision glottique issus des mesures par EVA est rapporté dans le Tableau 20. Une amélioration de
plus de 40 % de la vision est ressentie chez 72 % des patients.
Tableau 20. Modifications de la vision glottique mesurées par échelle visuelle analogique
Vison glottique Nombre de patients %
Détérioration 1 1,7
Inchangée 8 13,3
Amélioration 51 85,0
=10 % 2 3,3
11-20% 3 5,0
21--30% 1 1,7
31-40% 2 3,3
41-50% 6 10,0 Am
élio
ratio
n
> 50% 37 61,7
Total 60 100
VI.G.2.3 Evaluation de la difficulté de l’intubation trachéale mesurée par échelle visuelle analogique
Le Groupe B présente une difficulté d’intubation ressentie par les opérateurs
significativement supérieure au Groupe A (P <0,001) et au Groupe C (P = 0,004) (Tableau21).
Tableau 21.Difficulté d’intubation mesurée par échelle visuelle analogique
ET : Ecart Type. IC 95% : intervalle de confiance à 95.
Groupe A Groupe B Groupe C
Moyenne +/-ET 28 +/- 23 53 +/- 28* 32 +/- 27
IC 95% 22 - 33 45 - 60 15 - 48
Médiane 23 57 21
Minimum 0 3 5
Maximum 80 100 79
67
* P< 0,05 entre les Groupes A et B et les Groupes B et C.
VI.G.3 Paramètres calculés
VI.G.3.1 Réalisation de la manœuvre de Sellick La manoeuvre de Sellick a été appliquée chez 93 % des patients. Elle était majoritairement
effectuée par les infirmiers et les étudiants avec respectivement 72 % et 23 % des réalisations. Il
n’est pas retrouvé de différence significative entre les Groupes A et B concernant les opérateurs de
la PC (Tableau 22).
Tableau 22.Opérateurs de la manoeuvre de Sellick
Groupe A n % IC 95 %
Groupe B n % IC 95 %
Infirmier 44 67 54-78 47 78 60-84
Interne / Externe 18 27 17-40 11 18 9-30
Médecin 3 4 1-13 2 3 8-28
Ambulancier 1 2 0-8 0 8 3-18
n : nombre de patients. IC 95% : intervalle de confiance à 95 %.
VI.G.3.2 Evaluation de la difficulté de l’intubation trachéale calculée par l’Intubation Difficulty Scale (IDS)
Le Groupe B1 présente un score IDS moyen significativement supérieur aux Groupes A et
B2 (P< 0,0001) (Tableau 23). De même, une difficulté significativement plus importante est
observée entre les Groupes B1 et C (P= 0,013). Le score IDS B1’ (score IDS ne comptabilisant pas l’arrêt de la manœuvre de Sellick) est
significativement supérieure à celui du Groupe A et B2 (P< 0,0001).
Le Groupe C présente une difficulté d’intubation quantitativement plus importante que le
Groupe A, il n’est cependant pas objectivé de significativité entre ces deux groupes.
Le détail des scores IDS des différents groupes est rapporté dans le Tableau 24. La Figure 29
représente l’évolution des scores IDS des patients du Groupe B avant et après la levée de la PC.
68
Tableau 23. Scores d’intubation difficile (IDS)
ET : Ecart Type. IC 95% : intervalle de confiance à 95 %. * P< 0,05 entre les Groupes A et B1 et entre les Groupes A et B1’. ** P< 0,05 entre les Groupes B1 et B2 et entre les Groupes B1’ et B2. † P< 0,05 entre les Groupes B1 et C.
Tableau 24. Valeurs numériques des scores d’intubation difficile calculés (IDS)
Pression cricoïdienne Réalisée
Pression cricoïdienne Relâchée Absente
Score IDS
Groupe A n %
Groupe B1 n %
Groupe B1’ n %
Groupe B2 n %
Groupe C n %
0 15 23 0 * 0 0 ** 11 18+£ 1 10
1 29 44 0 * 5 8** 18 30+ 4 40
2 20 30 6 10* 8 13** 7 12£ 2 20
3 1 1,5 7 12* 10 17** 10 17 0 0
4 1 1,5 11 18* 20 33** 4 7£ 0 0
5 0 21 35* 10 17** 3 5+£ 1 10++
6 0 9 15* 3 5 2 3 1 10++
7 0 5 8* 4 7** 2 3 0
8 0 1 2 0 2 3 0
9 0 0 0 1 2 0
10 0 0 0 0 0
>10 0 0 0 0 1 10
n : nombre de patients. * P< 0,05 entre les Groupes A et B1. + P < 0,05 entre les Groupes B1 et B2. £ P < 0,05 entre les Groupes B1’ et B2. ** P< 0,05 entre les Groupes A et B1’. + + P < 0,05 entre les Groupes A et C.
70
Figure 29.Evolution des scores d’intubation difficile (IDS) au sein du Groupe B
VI.G.3.3 Description des paramètres du score d’intubation difficile (IDS) VI.G.3.3.a La force de laryngoscopie
Sur l’ensemble de la population étudiée, la force de la laryngoscopie est augmentée dans 57
% des cas. Concernant les patients ayant eu une manœuvre de Sellick, la force est majorée chez 49
% des patients (62/126 patients).
L’arrêt de la PC a mené à la normalisation de la force exercée chez 44 % des patients du
Groupe B1 (18/41 patients). La force de laryngoscopie du Groupe B1 est significativement
supérieure à celle exercée aux patients du Groupe A (P <0,0001) et à celle exercée aux patients du
Groupe B2 (P=0,001) (Tableau 25; Figure 30).
71
Tableau 25.Force de laryngoscopie
n : nombre de patients. IC 95% : intervalle de confiance à 95 † une donnée est manquante. * p< 0,05 entre les groupes A / B1 et entre les Groupes B1 / B2 (Calcul réalisé sur la base de 59 paires de patients).
Pression cricoïdienne
Réalisée Pression cricoïdienne
Relâchée Absente
Groupe A Groupe B1 † Groupe B2 Groupe C Force de Laryngoscopie n % IC 95 % n % IC 95 % n % IC 95 % n % IC 95 %
Figure 30. Evolution de la force de laryngoscopie au sein du Groupe B
72
VI.G.3.3.b Nombre de tentatives
Toutes les intubations trachéales du Groupe A ont été réalisées en une seule tentative. Un
patient du Groupe C a nécessité plusieurs tentatives en raison de scores de visualisation glottique
défavorables (SCL égal à IV, score POGO égal à 0%).
Le nombre de tentatives du Groupe B est décomposé en deux sous groupes. Les tentatives du
Groupe B1 correspondent aux essais d’intubation trachéale survenant avant l’arrêt de la PC. Les
tentatives du Groupe B2 représentent le nombre de tentatives couronnées de succès quand la PC est
relâchée (Tableau 26).
Tableau 26. Nombres de tentatives d’intubation trachéale du Groupe B
n : nombre de patients
Aucune intubation trachéale n’a été tentée chez 38 personnes du Groupe B1. Parmi ces 38
patients, il était retrouvé 30 patients avec un SCL égal à IV et 5 avec un SCL égal à III. Les 3
patients restants avaient lors de la première laryngoscopie un SCL égal à II avec un score POGO
compris entre 10 à 20 %.
Chez 12 patients du Groupe B1, une tentative d’intubation trachéale a été réalisée avant
d’abandonner la manœuvre de Sellick (Tableau 27). Il est dénombré deux patients ayant un SCL
égal à IV, un patient présentant un SCL égal à III et 9 autres caractérisés par des SCL égal à II.
Dans ce groupe de patient s ayant eu une tentative d’intubation trachéale, il est précisé que deux
patients avec des scores POGO de 20 %, un patient avec un score POGO de 75% et deux autres
avec des scores POGO de 80 % ont présenté des difficultés de passage de la sonde d’intubation
menant à la levée de la manœuvre de Sellick. Il est à noter l’utilisation du mandrin de type
Eschmann lors de la première tentative d’intubation trachéale de deux patients (SCL égal à IV, et
SCL égal à II avec un score POGO égal à 10 %).
Tentatives Groupe B1
n (%)
Groupe B2
n (%)
0 38 (63) 0
1 12 (20) 53 (88)
2 10 (17) 7 (12)
Total 60 (100) 60 (100)
73
Tableau 27. Pourcentage de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO) des patients du Groupe B1 n’ayant eu qu’une seule tentative d’intubation trachéale
Dix patients présentant un SCL égal à II (Score POGO compris entre 20 et 60 %) ont eu deux
essais d’intubation trachéale avant de relâcher la PC. Le mandrin de type Eschmann a été utilisé
chez six patients de ce sous groupe de patient B1 mais des difficultés d’accès trachéal et/ou de
passage de la sonde d’intubation sur le mandrin ont été rencontrées menant à la levée de la
manoeuvre de Sellick.
88 % des patients du Groupe B2 ont été intubés après une unique tentative alors que le reste
du groupe a nécessité au maximum deux tentatives. La levée de la manœuvre Sellick a permis à
elle seule l’intubation trachéale de 57 % des patients (34/60patients). Des manipulations laryngées
ou l’emploi de méthode alternative ont été nécessaires chez 26 patients pour la réussite de
l’intubation trachéale après l’arrêt de la PC
VI.G.3.3.c Manipulations laryngées externes (MLE)
Aucune MLE n’a été réalisée simultanément à la manœuvre de Sellick. Dans le Groupe C,
les manipulations laryngées externes ont été utilisées pour les 3 patients présentant un SCL
initialement égal à IV.
Dans le Groupe B2, dans 5 cas, l’arrêt de la manœuvre de Sellick et la réalisation d’une MLE
ont permis la réussite de l’intubation trachéale. Dans 10 cas, une manipulation laryngée externe a
été associée à une ou plusieurs méthodes alternatives pour la réussite de l’intubation trachéale.
VI.G.3.3.d Méthodes alternatives
Aucune méthode alternative n’a été pratiquée dans le Groupe A. Trois patients ayant un SCL
égal à IV du Groupe C ont nécessité l’utilisation du mandrin de type Eschmann.
Au sein du Groupe B1, la cathéterisation de la trachée par le mandrin de type Eschmann a
échoué chez 2 patients et a été réussie chez 6 autres. Chez ces derniers, une difficulté de passage de
la sonde d’intubation vers la trachée a mené à suspendre l’application de la PC.
Scores POGO
Nombre de patients
0 3 10 1 20 3 25 2 75 1 80 2
74
25 patients du Groupe B2 (42 %) ont nécessité l’emploi de méthodes alternatives. Le mandrin
seul ou associé à d’autres moyens accessoires a été utilisé 21 fois dans le Groupe B2. (Tableau 28)
Tableau 28.Méthodes alternatives utilisées dans le Groupe B2
Mandrin*: mandrin de type Eschmann
L’intubation trachéale avec mandrin de type Eschmann a été possible après une tentative
pour 17 patients et après 2 tentatives chez 4 patients. Il était ressenti 7 difficultés d’insertion de la
sonde dans la trachée sur les 21 utilisations du mandrin.
Les scores POGO moyens des patients du Groupe B2 intubés avec et sans mandrin de type
Eschmann étaient respectivement 36% et 70 % (P< 0.0001) (Tableau 29).
Tableau 29. Pourcentage moyen de l’orifice glottique observable lors d’une laryngoscopie (Score POGO moyen) des patients du Groupe B2
associé à l’utilisation du mandrin de type Eschmann
ET : Ecart Type IC 95% : intervalle de confiance à 95. * P< 0.05.
Méthodes alternatives Nombre de patients
1 Méthode 17
Mandrin* seul 13
Changement de lame 1
Repositionnement 3
2 Méthodes 8
Mandrin* + changement lame
5
Mandrin* + repositionnement
3
Mandrin + Mandrin -
Moyenne +/- ET 36+/- 37 * 70 +/-32
IC 95 % 18-53 60-79
75
VII. DISCUSSION
Nous avons analysé de manière prospective l’influence de la manœuvre de Sellick sur les
conditions d’intubation trachéale en médecine préhospitalière. Nous avons respecté les
recommandations sur l’intubation trachéale et appliqué un algorithme validé en cas de difficulté de
laryngoscopie [9, 10, 59, 76]. Nous avons systématiquement réalisé la manoeuvre de Sellick en
appliquant une pression cricoïdienne standardisée, exécutée par des opérateurs entraînés. Les
médecins pratiquant la laryngoscopie étaient exclusivement des seniors entraînés ayant validé un
diplôme spécialisé sur le contrôle des voies aériennes. Nous avons démontré, sur un échantillon de
patient prédéfini, que l’intubation trachéale en médecine préhospitalière nécessitait le relâchement
de la PC dans 48% des cas. Nous avons mis en évidence que le relâchement de la PC améliorait la
qualité d’exposition laryngée et glottique et diminuait objectivement la difficulté d’intubation.
Nous avons aussi prouvé que la manœuvre de Sellick, appliquée systématiquement, allongeait le
délai de sécurisation des voies aériennes. Dans les conditions de notre étude, nous avons identifié
un contenu pharyngé présent chez environ 30% des patients dès la laryngoscopie initiale et que le
relâchement de la PC n’entraînait aucune régurgitation supplémentaire. Nous avons pu identifier
un seuil quantitatif de visualisation glottique en laryngoscopie directe justifiant le relâchement de
la PC. Enfin, nous sommes conscients des limites de notre travail, nous en discuterons dans le
dernier paragraphe de ce chapitre.
VII.A LA NECESSITE DE LEVER LA MANŒUVRE DE SELLICK
De nombreux travaux anglo-saxons réalisés au bloc opératoire se sont intéressés à l’impact
des manipulations laryngées externes sur le contrôle des voies aériennes [13, 21-24, 66, 74, 77, 94,
115, 119, 123]. Ces études randomisées réalisées au bloc opératoire comparaient les conditions
d’intubation trachéale en présence et en l’absence de la manœuvre de Sellick. Certains de ces
travaux démontraient que la manœuvre de Sellick affectait peu la qualité de l’exposition glottique
et donc les conditions d’intubation [13, 21-24]. Ces travaux ont alimenté la réflexion des sociétés
savantes et servi de support aux recommandations sur l’intubation trachéale en médecine d’urgence
[9, 10]. Cependant, les conditions de réalisation de ces études menées au bloc opératoire sont très
éloignées de celles de la médecine préhospitalière. Il est difficile de comparer la situation du
malade allongé sur la table de bloc, anesthésié profondément et curarisé qui va être intubé avec ou
sans application d’une PC, réalisée dans des conditions d’aveugle possiblement discutables, avec
celles du malade en détresse, allongé le plus souvent au sol dans une ambiance qualifiée d’hostile,
76
qui vient de recevoir une induction en séquence rapide. L’étude de Turgeon et al. est un exemple
intéressant démontrant des différences majeures dans les conditions d’intubation entre l’anesthésie
réglée et la médecine préhospitalière [13]. Ce travail, mené au bloc opératoire, sur une population
sélectionnée de patients programmés, concluait à une absence d’altération de la vision glottique par
la PC. Malgré l’utilisation d’un outil identique de mesure de l’exposition laryngée sous
laryngoscopie directe, il existe une discordance majeure entre les scores de Cormack et Lehane
observés de cette étude et les nôtres. Ainsi, au bloc opératoire près de 68 % des patients
présentaient un SCL égal I alors que la PC était appliquée. Dans notre travail les patients ayant un
SCL égal à I ne représente que 14 % (18/126) de l’ensemble de l’effectif inclus. De manière
similaire, il était noté dans l’étude de Turgeon et al. que 3 % des patients présentaient un SCL égal
à III et aucun patient n’avait un SCL égal à IV bien que la PC était appliquée. Nous avons observé
que l’application systématique de la PC était responsable d’une incidence relativement importante
de patients ayant un SCL égal à III et IV soit 7 % (9/126) et 25 % (32/126), respectivement
(Tableau 13). Un précédent travail réalisé au SMUR de Gonesse à une période où la manœuvre de
Sellick n’était pas standardisée et donc moins souvent appliquée, retrouvait respectivement 20 % et
10 % des patients présentant un SCL égal à III et IV, sur une cohorte de 256 patients [3]. Une autre
étude évaluant l’intérêt du mandrin de type Eschmann au cours de l’intubation trachéale avec
réalisation de la PC au bloc opératoire indiquait une incidence de SCL élevée, comparable à celle
de notre travail [123]. Les scores de visualisation glottique obtenus après arrêt de la manœuvre de
Sellick tendent à se rapprocher des scores obtenus sans PC au bloc opératoire [39] avec une
moindre proportion de SCL égal à I au profit de SCL égal à II (Tableau 30).
Tableau 30.Scores de Cormack du Groupe B2 comparé aux données de bloc opératoire
Groupe B2 % Adnet et al [39] %
SCL égal à I 30 52 à 59
SCL égal à II 57 30 à 37
SCL égal à III 8 10 à 11
SCL égal à IV 5 1
Une différence dans la qualité des opérateurs réalisant l’intubation trachéale pourrait
expliquer les différences dans l’épidémiologie de la qualité d’exposition laryngée décrites entre les
études intra-hospitalières (où l’intubation est réalisée par des anesthésistes réanimateurs) et les
études extra-hospitalières (où l’intubation trachéale est pratiquée par des médecins urgentistes
77
moins expérimentés). Si cet argument était recevable dans les années 90, il ne l’est plus
actuellement et surtout il ne peut pas s’appliquer à ce travail. En effet, les médecins urgentistes,
impliqués dans cette étude, étaient tous aguerris à la pratique de l’intubation trachéale. Ils étaient
tous titulaires d’un diplôme universitaire attestant de leurs connaissances théoriques et pratiques
sur le contrôle des voies aériennes. Enfin, ils travaillent tous dans une équipe (SMUR de Gonesse)
qui a démontré de par ses travaux cliniques produits, l’investissement des praticiens dans la
recherche sur le domaine de l’intubation trachéale en médecine préhospitalière [3, 4, 8, 41, 131,
132, 133]. Il existe donc maintenant des preuves qui démontrent que les conditions d’intubation
trachéale en médecine préhospitalière sont difficilement simulables au bloc opératoire. Les travaux
réalisés au bloc opératoire ne peuvent pas servir de support unique aux recommandations pour les
pratiques de l’intubation trachéale en médecine préhospitalière. Tous les médecins urgentistes
reconnaissent l’intérêt des règles de sédation pour l’intubation trachéale. L’induction en séquence
rapide doit être pratiquée pour réduire le délai de sécurisation des voies aériennes. Le cocktail
anesthésique permet d’intuber une minute après son injection. Pourquoi imposer systématiquement
une manœuvre (de Sellick) qui induit à elle seule une difficulté d’intubation supplémentaire et
allonge la durée d’exposition critique des voies aériennes pour un bénéfice attendu (protection
contre le reflux œsophagien) vraiment discutable ? Et pourtant, il est recommandé de réaliser la
manœuvre de Sellick pour l’intubation en médecine préhospitalière, et l’application de la PC prime
sur toutes autres considérations malgré les effets indésirables qui lui sont imputés [9,10]. Il en
résulte que toute étude clinique qui randomiserait les malades sur l’application de la manœuvre de
Sellick serait de fait non éthique. De manière intéressante, les recommandations anglo-saxonnes
récentes autorisent maintenant le relâchement de la PC, mais uniquement lorsque la ventilation de
sauvetage est jugée difficile [76] (Annexe 1). Dans notre travail, l’intubation trachéale a nécessité
de relâcher la PC dans près de la moitié des cas, ce qui revient à dire que la manœuvre de Sellick a
gêné l’intubation trachéale de près de la moitié des patients (Figure 22). Néanmoins l’autre moitié
des patients a été intubée malgré la manœuvre de Sellick. Ce résultat contraste avec les conclusions
des travaux réalisés au bloc opératoire sur le même thème [13, 24], mais confirme notre hypothèse
de travail. L’impression des médecins de différents SMUR d’île de France et plus particulièrement
des médecins du SMUR de Gonesse, exprimée dans l’enquête qui nous a permis de dimensionner
l’étude, se trouve confortée par notre travail. Toutefois, tous les patients inclus dans notre étude
n’ont pas bénéficié d’une amélioration de la vision glottique lors du relâchement de la PC (Tableau
14, 16).
En se référant au score POGO, 80% des patients ont vu leur vision glottique s’améliorer lors
du relâchement de la PC. Le taux moyen d’augmentation du score POGO s’élève à 47 % et une
78
amélioration de plus de 40 % du score POGO est retrouvée chez 50% des patients (Tableau 17). Si
on utilise le score de Cormack et Lehane pour quantifier l’effet du relâchement de la PC sur la
vision laryngée, alors l’amélioration de l’exposition n’est identifiable que chez 73 % des patients
(44/ 60 patients) (Tableau 14). De manière surprenante, 1 patient minore son score POGO tout en
gardant un SCL égal à II lors du relâchement de la PC. L’étude de Levitan et al. a déjà démontré
que l’application d’une PC pouvait améliorer la vision glottique si aucune autre manipulation
laryngée externe était entreprise [24]. Ainsi, il est tout à fait possible de penser que la manœuvre de
Sellick ait pu améliorer le score de visualisation laryngée ou glottique chez quelques patients du
Groupe A. Cependant, nous ne pouvons conclure à un tel bénéfice du fait de l’absence
d’observation sous laryngoscopie directe des patients du Groupe A sans application de la PC. Une
étude randomisée comparant des patients avec et sans réalisation de la PC pourrait apporter une
réponse fiable à cette question.
Même si nous avions une hypothèse de travail, notre étude avait pour vocation de généraliser
la pratique systématique de la PC au sein d’une équipe d’un SMUR, et de promouvoir le recours au
mandrin de type Eschmann en cas de difficultés d’accès trachéal. Le fait d’autoriser la levée de la
PC en cas d’impossibilité d’intubation trachéale nous permettait d’analyser l’influence de la
manoeuvre de Sellick sur les conditions d’intubation tout en respectant les recommandations des
sociétés savantes. Notre travail confirme l’impression clinique de nombreux médecins urgentistes
qui intubent les patients en médecine préhospitalière. La manœuvre de Sellick semble altérer les
conditions d’intubation. Notre travail ne démontre pas qu’il faut abandonner la manœuvre de
Sellick mais propose plutôt une stratégie d’intubation permettant de pallier aux effets de la
manœuvre de Sellick sur les conditions d’accès aux voies aériennes en urgence.
VII.B LA LEVEE DE LA PRESSION CRICOIDIENNE AMELIORE L’EX-
POSITION GLOTTIQUE ET FACILITE L’INTUBATION TRACHEALE
Nous avons démontré grâce à des outils validés par la littérature que l’arrêt de la manœuvre
de Sellick facilitait l’intubation trachéale [6]. En effet, nous avons observé qu’après le relâchement
de la PC l’intubation trachéale était réussie dans 88% des cas en une seule tentative alors qu’une ou
plusieurs tentatives ont été ou auraient été nécessaires en présence de la manoeuvre de Sellick
(Tableau 26).
La difficulté d’intubation avec le laryngoscope de Macintosh est étroitement liée à la qualité
de l’exposition laryngée mesurée par le SCL. Les patients ayant un SCL égal à I sont facilement
intubés, alors que les SCL > à III sont pratiquement impossibles à intuber sans manipulations des
79
voies aériennes ou méthodes alternatives. Finalement, les patients avec un SCL égal à II qui
constituent la cohorte la plus importante dans notre travail présentent une difficulté d’accès
trachéal variable en fonction de la qualité de l’exposition glottique (Tableau 13). C’est l’intérêt du
score POGO qui mesure la fraction visible de la fente glottique, il permet donc d’affiner la qualité
de l’exposition laryngée pour le SCL égal à II [129, 130]. En combinant le SCL et le score POGO
nous nous sommes donnés les moyens de quantifier précisément l’effet de la PC sur la vision
laryngée. Les valeurs individuelles décrivant l’évolution du SCL et du score POGO avant et après
la levée de la PC, sont édifiantes avec par exemple une diminution des SCL égaux à IV de 53 % à
seulement 5% (Tableau 13, 14, 15, 16; Figures 26, 27). Elles démontrent que le relâchement de la
PC améliore dans une majorité des cas la qualité de l’exposition laryngée et glottique. La mesure
moyenne des scores POGO présentée dans nos résultats démontre que le relâchement de la PC
améliore de 47 % la qualité de l’exposition laryngée. Une amélioration moyenne, de la vision
laryngée mesurée par EVA, de près de 60% est ressentie par les médecins.
Nous avons mesuré la difficulté d’intubation trachéale en utilisant une mesure objective de
difficulté d’intubation avec le score IDS [6]. Nous avons aussi réalisé une mesure subjective de la
difficulté perçue par le médecin urgentiste réalisant le geste. Les résultats des deux mesures,
objective et subjective, sont strictement concordants, ils démontrent que l’intubation est plus
simple et plus donc plus facile quand la PC est relâchée (Tableau 21, 23, 24 ; Figure 29).
Dans notre analyse, nous avons envisagé deux stratégies de calcul de l’IDS. Dans la
première, nous avons considéré que la levée de la PC constituait une manipulation à part entière
des voies aériennes supérieures. Notre analyse statistique démontre que le relâchement de la PC
réduit très significativement l’IDS. Par souci d’exactitude, nous avons appliqué une seconde
stratégie de calcul de l’IDS ne considérant pas le relâchement de la PC comme une manipulation
des voies aériennes supérieures. Même en soustrayant systématiquement 1 point à l’IDS calculé
(IDS Groupe B1’), les statistiques persistent à démontrer que le relâchement de la PC réduit la
difficulté d’intubation trachéale (Tableau 23). Dans notre travail, l’incidence de l’intubation
trachéale difficile mesurée par l’IDS > 5 varie de 7 à 12 % en fonction de la stratégie de calcul de
l’IDS. Ces résultats concernant l’incidence de l’intubation difficile en médecine préhospitalière
sont tout à fait comparables à ceux mesurés dans d’autres études comparables [2, 6, 7, 8].
Les raisons de la plus grande facilité d’intubation mesurée après le relâchement de la PC sont
explicites. Dans notre travail, nous avons mis en évidence que l’intensité de la traction exercée par
l’intermédiaire du manche et de la lame du laryngoscope sur la paroi antérieure du pharynx
semblait moins importante après relâchement de la PC (Tableau 25 ; Figure 30). Avec la PC
appliquée, une traction anormalement forte est nécessaire chez de 50% des patients (62/126) afin
80
d’obtenir une exposition optimale du larynx. Après relâchement de la PC, cette force de traction
augmentée n’est plus requise que pour près de 35 % d’entre eux. L’intubation trachéale après
relâchement de la PC permet moins de traction sur le laryngoscope tout en offrant une vision
laryngée de meilleure qualité. Nos résultats confortent nos choix méthodologiques. En effet, si
nous analysons l’effet du relâchement de la PC sur le SCL, nous mettons en évidence que dans 73
% des cas, le SCL s’améliore (Tableau 14). Par contre, si nous considérons le score POGO, nous
constatons une amélioration du score POGO dans 82% des cas (Tableau 17). Le score POGO
pourrait être plus sensible que le SCL pour mesurer l’influence de la PC sur la qualité de la vision
laryngée sous laryngoscopie directe réalisée avec le laryngoscope de Macintosh. L’influence de la
PC sur le score POGO a déjà été étudiée. Dans leur travail réalisé sur des cadavres frais, passant
d’une laryngoscopie sans manipulations laryngées externes à une application d’une PC, Levitan et
al. [24] retrouvent une dégradation du score POGO dans 48 % des cas avec diminution moyenne
du score de 17%. Les auteurs démontrent que sous l’effet de la PC, 3% des patients présentant un
score POGO > 0% donc un SCL égal à II, passent à un score nul de POGO soit un SCL > 3.
L’étude de Turgeon et al. dans laquelle la PC était standardisée, retrouve une latéralisation
significative de l’orifice glottique [13]. Haslam et al. ont évalué sous laryngoscopie et endoscopie
l’effet d’une PC de force croissante sur les structures glottiques [21]. Ils observent une
détérioration de la vision glottique lors de l’application de la PC, mais surtout décrivent
l’importance des modifications de l’anatomie laryngée. Des chutes de l’épiglotte associées à une
distorsion de sa surface ventrale, une adduction des plis vestibulaires et un déplacement des tissus
mous pharyngés en direction de l’axe de visualisation glottique sont décrits dans ce travail. Par
ailleurs, sont remarqués des déplacements et des distorsions du larynx liés à l’intensification de la
PC. Le maintien d’une vision glottique initiale optimale n’était possible qu’au prix d’une
augmentation importante de la force de traction exercée sur la lame du laryngoscope.
Contrairement à l’étude de MacG et al., nous n’avons pas observé de fermeture des cordes vocales
en présence de la PC [119]. Démontrer que l’application de la PC entraîne une fermeture des
cordes vocales implique que les patients aient un SCL égal à I ou II. Or dans notre travail, la
majorité des patients ayant nécessité le relâchement de la PC présentaient un SCL > 3 (Tableau 13)
ne permettant pas l’évaluation de la position des cordes vocales alors que la PC était appliquée.
Nous avons démontré que le relâchement de la PC simplifiait et facilitait l’intubation
trachéale en SMUR. Bien que notre travail ne soit pas dimensionné pour démontrer une différence
dans le nombre de complications survenant au cours de l’intubation trachéale en médecine
hospitalière, les Groupes A et B diffèrent significativement quant à l’incidence des complications.
Nous mettons en évidence un taux significativement plus important de complications au sein du
81
Groupe B par rapport au Groupe A (Tableau 12) avec en particulier cinq complications mécaniques
(4 intubations oesophagiennes et 1 traumatisme dentaire) au sein du Groupe B alors qu’aucune
n’est rapportée au sein du Groupe A. L’incidence majorée des complications mécaniques
observées chez les patients intubés après relâchement de la PC pourrait être directement
proportionnelle au nombre de tentatives d’accès trachéal infructueux, entrepris avant l’abandon de
la PC. De manière similaire, Mort et al. retrouvent un taux de complications mécaniques égal à 5
% si le nombre de tentatives d’intubation est = 2, alors qu’il passe à 51 % si le nombre de
laryngoscopies devient supérieur à 3 [39].
VII.C LA MANŒUVRE DE SELLICK ALLONGE LE DELAI DE
SECURISATION DES VOIES AERIENNES
Nous avons mesuré la durée de l’intubation trachéale. Un des intervenants de l’équipe du
SMUR avait comme mission de mesurer le délai de sécurisation des voies aériennes. Ce délai est
fondamental pour la sécurité du patient, non seulement pour le risque d’inhalation pulmonaire d’un
éventuel contenu gastrique régurgité dans l’œsophage, mais aussi pour la ventilation et
l’oxygénation. En effet, l’étanchéité du système ventilatoire procurée par la sonde d’intubation
avec son ballonnet gonflé permet d’appliquer une ventilation mécanique. Bien que notre travail ne
démontre pas que la manœuvre de Sellick prolonge la durée d’intubation trachéale, nos résultats
suggèrent que le relâchement de la PC, appliquée systématiquement, entraîne un retard de
sécurisation des voies aériennes. Quand il est nécessaire de relâcher la PC pour intuber, la durée
d’intubation est multipliée par 3 environ par rapport aux patients intubés sans relâcher la PC
(Tableau 18). Cette observation est corroborée par les résultats du Groupe C. En effet, dans ce
groupe de patients qui n’ont pas eu la PC systématiquement appliquée avant la laryngoscopie
initiale, la durée d’intubation trachéale est divisée par 2 par rapport à celle des patients du Groupe
B (Tableau 18). Nous ne pouvons considérer le Groupe C comme un groupe contrôle, car il
représente les écarts au protocole, néanmoins la comparaison des différences intergroupes mérite
réflexion et discussion.
Les raisons qui expliquent l’allongement de la durée d’intubation trachéale après relâchement
de la PC sont multiples. La première, la plus évidente, est liée à l’échec de l’intubation trachéale
lorsque la PC est appliquée systématiquement. Le protocole d’intubation imposait de tenter
l’intubation trachéale selon les recommandations actuelles avant de décider de relâcher la PC. Les
échecs d’intubation trachéale sous PC sont responsables de l’allongement de la durée d’intubation.
82
Cependant, nous avons observé que les médecins réalisant l’intubation sous PC avaient parfois
raccourci la procédure recommandée en cas d’échec de l’accès trachéal sous laryngoscopie directe
(Tableau 26). En effet, certains médecins ont préféré ne pas tenter la procédure complète de
l’intubation trachéale, ne pas recourir systématiquement à 2 tentatives d’accès trachéal avec le
mandrin de type Eschmann ou décider de relâcher plus rapidement la PC après une unique
tentative chez quelques patients démontrant un SCL égal à III. Cette stratégie qui constitue un écart
au protocole n’est pas illogique en médecine d’urgence, elle constitue certainement un moyen pour
sécuriser plus rapidement les voies aériennes. Il est en effet classique de dire qu’en cas de SCL
égal à IV, le taux de succès du mandrin d’Eschmann est faible [60, 120, 121]. Dans notre travail, 9
patients du Groupe B1 sur les 12 qui n’ont eu qu’une seule tentative d’intubation trachéale avaient
tous des scores POGO inférieurs à 25 % (Tableau 27). Il est aisé de penser que ce nombre de
tentative aurait été largement supérieur au sein du Groupe B1 si le protocole de prise en charge des
VAS proposé avait été suivi plus rigoureusement. Néanmoins, sans cet écart au protocole, la
différence de durée d’intubation trachéale entre le Groupe A et le Groupe B aurait été encore plus
importante.
La réalisation de manipulations laryngées externes (MLE) pour optimiser la vue de la glotte
était possible après relâchement de la PC. Les opérateurs ont par conséquent réalisé des MLE pour
améliorer l’exposition glottique. Même si elles concernent un petit nombre de patient, les MLE ont
participé à l’allongement du délai de sécurisation des voies aériennes.
L’amélioration de la qualité de la vision glottique a permis l’utilisation de méthodes
alternatives chez 42 % des patients du Groupe B2. Le mandrin de type Eschmann était le seul
instrument utilisé (Tableau 28). Un score POGO moyen de l’ordre de 36 % était associé à
l’utilisation du mandrin de type Eschmann. Une durée d’intubation trachéale moyenne
significativement supérieure est retrouvée chez les patients ayant bénéficié du mandrin (Tableau
19).
VII.D LE RELACHEMENT DE LA MANŒUVRE DE SELLICK N’ENTRAINE
PAS DE REGURGITATION
Notre travail démontre que le relâchement de la pression cricoïdienne motivé par des
difficultés d’intubation n’a pas entraîné de régurgitation. Les opérateurs réalisant l’intubation
trachéale étaient en situation idéale pour identifier une régurgitation d’origine gastrique ou
duodénale. En effet, la PC était relâchée alors que le médecin maintenait la laryngoscopie. Il est
donc peu probable qu’une régurgitation soit survenue pendant les manœuvres d’intubation
83
trachéale. Nous n’avons pas analysé les conditions de jeun des patients en détresse ou en ACR qui
ont tous été considérés comme des « estomac plein ». Ce n’est pas parce que nous n’avons
objectivé aucune régurgitation lors du relâchement de la PC chez 60 patients intubés en
préhospitalier que cela nous autorise à remettre en cause l’intérêt de la manœuvre de Sellick pour
l’intubation trachéale en médecine d’urgence. Néanmoins, nos résultats suggèrent que l’application
dogmatique de la manœuvre de Sellick en médecine préhospitalière est discutable. L’analyse de la
littérature nous apprend que l’inhalation du contenu gastrique reste une des principales causes de
mortalité en anesthésie [134]. Les facteurs de risque de régurgitation et d’inhalation pulmonaire
sont connus [27]. Il s’agit bien sur des patients ayant une pathologie abdominale aiguë, les patients
anesthésiés dans les heures qui suivent un repas, et les patients présentant un ralentissement
fonctionnel ou organique de la vidange gastrique. Il est clair que pour ces types de patients à risque
de régurgitation intubés au bloc opératoire, où l’application de la PC semble moins affecter les
conditions d’intubation, la manœuvre de Sellick paraît indiscutable. Par contre, recommander
systématiquement la manœuvre de Sellick pour l’intubation trachéale des patients en arrêt
cardiaque, des malades en détresse cardiaque ou en défaillance respiratoire pourrait sembler
excessif au vu de nos résultats. Nous pensons que l’application de la PC pourrait être discutée en
médecine préhospitalière en fonction du contexte clinique et de la présence ou non de facteurs
prédictifs d’intubation ou de ventilation au masque facial difficile. Il faudrait envisager une balance
bénéfice/risque avant d’appliquer la manœuvre de Sellick en médecine préhospitalière. Le risque
lié à la manœuvre de Sellick réside principalement dans les difficultés d’intubation qu’elle
entraîne. Le bénéfice de la manoeuvre de Sellick est lié à la protection qu’elle semble conférer
contre les pneumopathies d’inhalation secondaires à une régurgitation. L’efficacité de la manœuvre
de Sellick pour la prévention des régurgitations au cours de l’induction en séquence rapide se base
sur des données d’études sur cadavres, réalisées notamment par Sellick, Salem et Vanner [11, 75,
88, 100]. Aucune étude prospective n’a été effectuée depuis ces publications. Récemment,
l’occlusion de l’œsophage crée par l’application de la PC a été remise en question par des études
basées sur des imageries cervicales [98-99]. Par ailleurs des cas suspects d’inhalation pulmonaire
ont été décrits malgré l’application rigoureuse de la manœuvre de Sellick [1, 18, 68, 82, 102-105].
Toutes ces notions laissent planer un doute sur la réelle protection conférée par la manœuvre de
Sellick et nous questionnent sur l’histoire naturelle de la pneumopathie d’inhalation. Il paraît
plausible que les inhalations surviennent avant le contrôle des voies aériennes réalisé par l’équipe
médicale. Dans notre travail, nous avons recherché la présence d’un contenu pharyngé lors de la
première laryngoscopie alors que la PC était appliquée. Nous avons observé que 30 % des patients
présentaient un contenu pharyngé. Ce contenu pharyngé était présent chez 41% des patients en
84
arrêt cardio-respiratoire, chez 17 % des patients présentant une activité cardiaque spontanée et
intubés une minute après l’induction en séquence rapide (Tableau 11). En considérant que la PC
réalisée était efficace pour empêcher la survenue d’une régurgitation pendant la laryngoscopie, le
reflux vers le pharynx du contenu gastrique s’est probablement produit avant d’entreprendre les
manœuvres d’intubation trachéale. Nos résultats concordent avec les observations d’échec de la
manœuvre de Sellick à prévenir les régurgitations mais aussi les pneumopathies d’inhalation. Dans
une étude préhospitalière, Cantineau et al. rapportent la survenue d’une régurgitation malgré la PC
[1]. En médecine d’urgence, Schwartz et al. décrivent également un échec de la manœuvre de
Sellick chez 9 patients sur 12 ayant eu une pneumopathie d’inhalation [18]. Près de 10 % des 139
anesthésistes, interrogés au cours d’une évaluation des pratiques, relataient la survenue de
régurgitations en dépit de la présence d’une manœuvre de Sellick [82].
La prévalence élevée d’un contenu pharyngé chez les patients en arrêt cardio-respiratoire
pourrait être favorisée par l’effondrement du tonus du SIO objectivé en cas de survenue d’un ACR
[135] mais aussi par les manœuvres de réanimation initiées par les premiers secours. En effet, la
ventilation au masque facial par les secouristes est parfois difficile. L’utilisation de pressions
d’insufflation trop importantes peut être à l’origine d’une distension gastrique et favorisent la
survenue de régurgitations [114]. L’application d’une PC efficace est préconisée par les
recommandations internationales de prise en charge de l’ACR [91]. En France, l’application de la
PC au cours de l’arrêt cardio-respiratoire se limite à la réanimation de la femme enceinte [136]. Il
est à noter qu’aucune formation théorique ou pratique de la PC n’est délivrée aux secouristes en
France. Un meilleur apprentissage de la technique de ventilation au masque facial et une formation
des effecteurs des premiers secours à la réalisation correcte de la manœuvre de Sellick serait
souhaitable pour prévenir les régurgitations gastriques et l’inhalation bronchique survenant avant
l’arrivée de l’équipe médicale. Une alternative à la ventilation au masque facial pratiquée par les
secouristes serait de leur enseigner la technique de pose d’un masque laryngé permettant
l’utilisation de faible volume d’insufflation [137].
Notre étude nuance nos croyances sur la manœuvre de Sellick. La manœuvre de Sellick avait
pour vocation principale de protéger les voies aériennes contre l’inhalation pulmonaire d’un
contenu gastrique régurgité lors de l’intubation trachéale après induction anesthésique en séquence
rapide. Nous remarquons que 30 % des patients présentent un contenu pharyngé lors de la première
laryngoscopie et qu’aucune régurgitation ne survient à la suite du relâchement de la PC.
85
VII.E UN SEUIL QUANTITATIF DE VISION GLOTTIQUE JUSTIFIE DE
RELACHER LA MANŒUVRE DE SELLICK
Notre analyse statistique nous a permis de construire la courbe ROC reliant la pertinence
(sensibilité et spécificité) de la levée de la PC pour réussir l’intubation trachéale en fonction du
score POGO (Figure 28). L’analyse de cette courbe ROC est édifiante car elle identifie une valeur
seuil du score POGO égale à 30% en deçà de laquelle la levée de la PC devient légitime pour
réussir l’intubation trachéale (une sensibilité et une spécificité à 88%). Nous démontrons que le
score POGO inférieur ou égal à 30% est fortement corrélé au relâchement de la PC pour réussir
l’intubation à la première tentative dans près de 90% des cas (Tableau 26). En d’autres termes, si
l’opérateur à l’impression que seul le tiers inférieur de la fente glottique est visible en
laryngoscopie directe, alors l’intubation trachéale est plus simple si l’on relâche la manœuvre de
Sellick. Ce résultat nous paraît fondamental, car il offre une réelle légitimité à la réalisation
systématique de la manœuvre de Sellick. Le score POGO seuil que nous avons identifié réconcilie
d’une part les partisans de l’application dogmatique de la PC pour l’intubation trachéale en
médecine préhospitalière et d’autre part, les sceptiques qui considèrent, à juste titre, que la
manœuvre de Sellick rend l’intubation trachéale beaucoup plus difficile. En effet, si nos résultats
étaient confirmés, nous pourrions imaginer un algorithme d’intubation trachéale en médecine
d’urgence et préhospitalière basé sur le score POGO. La manœuvre de Sellick serait appliquée « de
principe » systématiquement mais la PC serait relâchée pour les scores POGO inférieurs à 30%.
Malheureusement, contrairement au score de Cormack et Lehane qui est familier pour tous les
personnels médicaux et paramédicaux pratiquant l’intubation trachéale, le score POGO décrit par
R.Levitan reste peu connu des anesthésistes réanimateurs ou des médecins urgentistes. Pourtant, le
score POGO est plus simple d’apprentissage que le score de Cormack et Lehane et des travaux
démontrent une plus grande fiabilité des scores POGO observés par différents praticiens [129-130].
86
VII.F LIMITES DE NOTRE TRAVAIL
VII.F.1 Méthodologie
Contrairement aux travaux anglo-saxons réalisés au bloc opératoire [13, 21-24, 66, 74, 77,
94, 115, 119, 123], notre travail accompli en préhospitalier chez des patients dits à « estomac
plein » ne pouvait pas, pour des raisons d’éthique, comparer de façon randomisée les conditions
d’intubation trachéale en présence et en l’absence de manœuvre de Sellick. Une étude descriptive
évaluant les conditions d’intubation avant et après l’arrêt de la manœuvre Sellick, dans un contexte
d’accès aux voies aériennes jugé difficile, était permise selon des recommandations récentes des
sociétés savantes notamment anglo-saxonnes [76] (Annexe 1).
A l’opposé, des études menées sur la manœuvre de Sellick réalisées au bloc opératoire, il
était inconcevable en médecine préhospitalière de s’étalonner sur un simulateur immédiatement
avant l’intubation [13,17]. Nous avons ainsi opté pour une formation théorique et pratique initiale,
suivie de séances d’entraînements régulières, pour maintenir la compétence à réaliser la pression
cricoïdienne. En dehors des entraînements collectifs qui avaient lieu à l’occasion de réunions de
service, le simulateur était continuellement mis à disposition des équipes de garde. Cette stratégie
nous permet de limiter le risque qu’une disparité dans l’application de la PC affecte nos résultats.
De plus, concernant le positionnement des doigts sur le cartilage cricoïde, il était demandé aux
opérateurs réalisant la manoeuvre de Sellick d’identifier les repères anatomiques avant le début de
l’intubation. L’aide du médecin était possible en cas de difficultés d’identification du cartilage
cricoïde. Nous avons émis l’hypothèse que cette stratégie permettrait un positionnement optimal
des doigts pour réaliser la PC, mais le cas échéant il correspondrait à la « vraie vie » de la pratique
préhospitalière de la manœuvre de Sellick. Cette réalité correspondait à la réalisation de la PC sur
un patient au sol ou à hauteur d’un lit et plus rarement à une hauteur d’homme sur un brancard.
Cette réalité intégrait également une notion de stress important face à des patients présentant un
état de détresse chez qui il fallait débuter la PC avant la perte de connaissance.
VII.F.2 Ecarts majeurs au protocole
Le Groupe C est constitué des écarts au protocole dans la mesure où la manœuvre de Sellick
n’a pas été appliquée d’emblée avant la première laryngoscopie. Ces écarts au protocole
représentent 7 % des inclusions dans notre étude soit 10 malades sur 136. Les raisons qui sont à
l’origine du non-respect du protocole que nous avions proposé sont diverses. Après discussion avec
les médecins responsables des interventions, il semble que dans un certain nombre de cas, le
87
protocole n’a pas été respecté du fait de l’imminence pressentie de l’arrêt cardiorespiratoire. Le
médecin ayant décidé d’intuber le plus vite possible sans se soucier de la réalisation ou non de la
manœuvre de Sellick. En effet, l’analyse des situations où la PC n’a pas été appliquée avant la
première laryngoscopie est intéressante. Tout d’abord, les écarts au protocole sont des patients qui
avaient une activité cardiaque spontanée à l’arrivée de l’équipe du SMUR, mais ils présentent des
critères de gravité notamment une oxygénation périphérique plus altérée que celle des patients des
autres groupes (Tableau 8). Deux de ces patients vont présenter un arrêt cardiorespiratoire juste
avant l’induction de la sédation. De manière intéressante, la durée de l’intubation dans le Groupe C
est plus courte que celle du Groupe B, mais non différente du groupe A, malgré les conditions
périlleuses engendrées par l’intubation en position assise d’un polytraumatisé incarcéré par
exemple. Ce résultat illustre bien le fait que l’application systématique de la PC avant la première
laryngoscopie ralentit le processus de protection des voies aériennes.
VII.F.3 Ecarts mineurs à la procédure d’intubation difficile
Une des principales critiques de notre travail réside dans le fait que les médecins réalisant
l’intubation trachéale n’ont pas effectué toutes les étapes de la procédure d’intubation difficile alors
que la PC était appliquée. En effet, 28 patients démontrant un score de Cormack et Lehane < 3
(Tableau 13) auraient du avoir une procédure complète d’intubation incluant 2 tentatives
d’intubation sous laryngoscopie directe avec l’utilisation de la bougie d’Eschmann toujours sous
laryngoscopie. En fait, seuls 10 d’entre eux ont eu les 2 tentatives d’intubation trachéale, 10 autres
ont eu une tentative et les 8 derniers, aucun essai en présence de la PC. La majorité des tentatives
uniques d’accès trachéal avec ou sans le mandrin d’Eschmann ont échoué justifiant le relâchement
de la PC. Pour 6 malades du groupe B1, l’accès trachéal avec la bougie d’Eschmann était un succès
(butée distale entre 25 et 35 cm), mais la mise en place définitive de la sonde d’intubation trachéale
n’était possible qu’après un relâchement de la PC. Malgré les recommandations, les médecins
réalisant l’intubation n’ont pas hésité à raccourcir la procédure, probablement préoccupés par
l’échec des techniques et le temps qui s’écoulait. En ne s’acharnant pas à placer la sonde ou le
mandrin dans une trachée inaccessible, ils raccourcissaient le délai de sécurisation des voies
aériennes chez des patients présentant un score POGO bas alors que la PC était appliquée. Bien
que ces écarts mineurs au protocole affectent la qualité méthodologique de notre travail, ils
démontrent néanmoins la difficulté d’accès trachéal avec le mandrin de type Eschmann alors que la
PC est appliquée. Cette constatation corrobore les travaux réalisés par Haslam et al. qui décrivaient
une distorsion des structures anatomiques lors de l’application rigoureuse de la PC [21]. Par contre,
après relâchement de la PC, alors que persistait un échec de l’accès trachéal sous laryngoscopie
88
directe, la performance du mandrin de type Eschmann est maximale avec 100 % de succès, comme
seul élément additionnel à la laryngoscopie directe chez 13 patients et en association avec une
modification de la position de la tête ou un changement de lame du laryngoscope chez 8 autres
patients (Tableau 8). Parmi les patients du Groupe B2, 7 gênes d’introduction de la sonde
d’intubation trachéale placée sur le mandrin ont été retrouvées mais ont également été surmontées
avec succès. Les études réalisées au bloc opératoire sur l’intérêt du mandrin de type Eschmann en
cas de laryngoscopie directe difficile [120] sont confirmées par nos observations d’intubation
préhospitalières et confortent l’hypothèse que la PC affecte sérieusement l’anatomie laryngée.
VII.F.4 Mesure de la durée de sécurisation des VAS
L’analyse du temps d’intubation nous paraissait être une information importante pour évaluer
la difficulté d’intubation associée à l’application systématique de la manœuvre de Sellick en
préhospitalier. Nous avons démontré une différence significative dans les délais globaux de
sécurisation des VAS entre les Groupes A et B avec respectivement 24,5 +/- 14 s pour le premier et
61,5 +/-50 s pour le second groupe. Cependant, notre méthode ne nous permettait pas de dissocier
la part respective de la difficulté réelle d’intubation, de celle induite par la PC sur la prolongation
du délai de sécurisation des voies aériennes. Il nous aurait fallu un double chronométrage et surtout
un retrait de la lame du laryngoscope après la levée de la PC irréalisable dans les conditions de
notre étude. Cependant, le fait que l’intubation devienne possible à la levée de la PC suggère
fortement que cette dernière allonge la durée de sécurisation des voies aériennes et ce pour une
majorité des patients.
89
VIII. CONCLUSION
Conformément aux recommandations de prises en charge des voies aériennes supérieures en
médecine préhospitalière, l’application systématique de la manœuvre de Sellick s’est révélée
possible dans une grande majorité des situations, mais à quel prix pour le malade et le médecin
réalisant le geste d’intubation ? Notre travail a tenté de répondre à cette question. Quand la
manoeuvre de Sellick est appliquée avec une PC standardisée, réalisée par des opérateurs entraînés,
l’intubation trachéale n’est possible que chez la moitié des patients car l’exposition glottique est
moins bonne et l’outil d’assistance recommandé par les sociétés savantes, le mandrin type
Eschmann est moins efficace. Lorsque la PC est relâchée, les scores de visualisation glottique
s’améliorent et l’efficacité du mandrin de type Eschman est retrouvée, ce qui facilite grandement
l’intubation trachéale des patients. L’application systématique de la PC prolonge le délai de
sécurisation des voies aériennes sans bénéfice évident pour le malade car le relâchement de la PC
n’est pas associé à une augmentation du risque de régurgitation. Notre travail propose une attitude
pragmatique basée sur le score de visualisation glottique (score POGO). Si la manœuvre de Sellick
est réalisée systématiquement pour l’intubation trachéale en médecine préhospitalière, un score
POGO = 30% révélé lors de la laryngoscopie directe impose de relâcher immédiatement la PC pour
permettre la sécurisation des voies aériennes dans les plus brefs délais.
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99
X. RESUME
Des difficultés d’intubation trachéale ou de ventilation au masque facial sont rapportées lors de l’intubation trachéale en médecine d’urgence et mènent parfois à une interruption de la manoeuvre de Sellick, qui reste pourtant considérée comme un élément sécuritaire indispensable. Nous avons évalué les effets de la pression cricoïdienne, réalisée selon les règles de bonnes pratiques, sur la qualité de l’intubation trachéale en médecine préhospitalière.
Matériel et méthode :
Cette étude prospective, monocentrique, observationnelle, a été réalisée chez des patients nécessitant une intubation trachéale en préhospitalier. Après une formation initiale, la pression cricoïdienne, était appliquée systématiquement lors de la procédure d’intubation trachéale. Des conditions d’intubation jugée impossible avec un score de Cormack et Lehane égal à IV, ou une difficulté d’accès à la trachée définie par au mo ins 2 échecs d’intubation en cas de score de Cormack et Lehane < IV, autorisaient la levée de la PC. Les caractéristiques d’intubation trachéale: analyse des scores de visualisation laryngée (Cormack et Lehane) et glottique (pourcentage visible de la fente glottique), de la difficulté d’intubation (score d’intubation difficile et échelle visuelle analogique), et durée de l’intubation trachéale ont été étudiées avant et après levée de la pression cricoïdienne. Les complications associées à l’intubation trachéale ont par ailleurs été colligées.
Résultats :
Sur une durée de 9 mois, 136 patients ont été inclus parmi lesquels 126 ont bénéficié de l’application de la pression cricoïdienne. Un relâchement de la pression cricoïdienne a été nécessaire chez 48% des patients permettant une amélioration de la qualité des expositions laryngée et glottique dans respectivement 73 % et 80 % des cas. Un contenu pharyngé était présent chez environ 30% des patients dès la laryngoscopie initiale et le relâchement de la pression cricoïdienne n’a entraîné aucune régurgitation supplémentaire. Le relâchement de la pression cricoïdienne accélérait le processus de sécurisation des voies aériennes et facilitait l’intubation trachéale. Notre analyse statistique a démontré qu’un pourcentage visible de la fente glottique inférieur ou égal à 30% lors de la laryngoscopie était fortement corrélé au relâchement de la pression cricoïdienne pour réussir l’intubation à la première tentative dans près de 90% des cas.
Conclusion :
Lorsque la pression cricoïdienne est réalisée systématiquement en médecine préhospitalière par des opérateurs entraînés, elle est doit être relâchée chez près de 50 % des patients pour faciliter et accélérer le processus de sécurisation des voies aériennes sans majorer le risque de régurgitation. Lorsque la vue de fente glottique est partielle en laryngoscopie directe, lever la manœuvre de Sellick permet d’intuber rapidement dans 90% des cas.
Mots clefs:
Manoeuvre de Sellick,
Pression cricoïdienne,
Induction séquence rapide,
Score POGO,
Intubation difficile,
Préhospitalier.
100
XI. ANNEXES
XI.A ANNEXE 1 : RECOMMANDATIONS DE L’INTUBATION TRACHEALE SOUS ISR DE LA DIFFICULT AIRWAY SOCIETY
101
102
103
XI.B ANNEXE 2 : METHODE D’APPLICATION DE LA MANŒUVRE DE SELLICK
104
RAPPELS ET MOYENS D’ENTRAINEMENT A LA CORRECTE APPLICATION DE LA MANŒUVRE DE SELLICK.
ANATOMIE: Le cartilage cricoïde [1] est situé entre le
cartilage thyroïde [2] et le premier anneau
trachéal [3]
Le cartilage cricoïde (CC) est en forme de bague
à chaton, horizontal à sa portion postérieure
(chaton [4]), avec en avant la partie étroite de la
bague (voûte [5]). La surface supérieure de la
lame du cricoïde est surmontée par les deux
cartilages aryténoïdes [6], un sur chaque coté de
la partie inférieure de l'orifice laryngé.
Le cartilage cricoïde se trouve en regard du
niveau vertébral C5 et C6 chez les adultes.
L'oesophage se trouve en arrière et en rapport
direct avec le cartilage cricoïde.
La pression cricoïdienne (PC) ou manœuvre de
Sellick repose sur la compression directe de la
lumière oesophagienne par une force appliquée
sur le cartilage cricoïde. Le cricoïde étant une
bague complète, une pression exercée sur lui
comprimerait et occlurait l'oesophage contre le
corps vertébral de C5 ou C6 et préviendrait de
cette façon le passage de contenu gastrique
régurgité dans l'oropharynx.
La pression cricoïde est une force généralement
mesurée en Newtons (9.81 N = 1 kg).
105
Description de la Manœuvre Sellick : - Pression antéro-postérieure stricte appliquée sur le cartilage cricoïde par l'index. - Pouce et majeur sur l'une et l'autre partie latérale du cartilage prévenant ainsi le mouvement latéral du cricoide
PRESSIONS APPLIQUEES : Patient Eveillé 10 N = 1kg Patient Anesthésié 30 N = 3 kg
106
PRESSIONS APPLIQUEES : Patient Eveillé 10 N = 1kg Patient Anesthésié 30 N = 3 kg
107
PROCEDURE D’ENTRAINEMENT - Fréquence : Entraînement régulier: à chaque garde si possible. - Moyens de référence Seringue de 50 cc - Méthode 1/ Piston positionné à 50 cc. 2/ Appliquer une force principalement exercée par l’index permettant
d’abaisser le piston à la hauteur du niveau 33 cc. (Pouce et majeur étant positionnés sur les cotés)
Cette force est équivalente à 30 N (soit à 3 Kg) - Autres moyens Simulation de la force sur balance de cuisine (avec ou sans le système seringue) Appliquer une pression cricoïde permettant d’atteindre un poids de 3
Kg environs
Merci pour votre participation.
108
XI.C ANNEXE 3 : CAHIER DE RECUEIL DE DONNEES
109
N° INTERVENTION _ _ _ _ _ _ _ _ _ SMUR GONESSE 25 rue Pierre de Theilley N ° _ _ _ 95500 GONESSE
I S GUID
CAHIER DE RECUEIL DE DONNEES
Dr Jean Luc SEBBAH, Dr Nicolas PICARD, Mustapha YOUSSEF : SMUR CH Gonesse
Pr Gilles DHONNEUR : DAR CHU Jean Verdier (Bondy)
110
Date d’inclusion : _ _ / _ _ / 200 _ Patient Nom (3ères lettres) : _ _ _ Prénom : _ _ _ Sexe : M c F c Date de naissance : _ _ / _ _ / _ _ _ _ Age : _ _ _ ans Poids : _ _ _ kg Taille : _ _ _ cm Evalué : oui c non c
Critères d’exclusion
- Age < 18 ans
- Contre-indications à l’ISR :
Antécédents personnels ou familiaux d'hyperthermie maligne, Allergie à la succinylcholine,
Atteinte du motoneurone étendue (hémiplégie, paraplégie, tétraplégie ou lésion plexique)>72 H Maladie responsable d’une fragilité musculaire (myopathie) Brûlure grave et étendue en dehors de la phase initiale
- Contre-indication à la réalisation de la manœuvre de Sellick :
Traumatisme laryngé
Motif nécessitant l’intubation du patient :
Arrêt cardio-respiratoire : oui c non c
Détresse Respiratoire : oui c non c
Détresse Hémodynamique : oui c non c
Détresse neurologique : oui c non c
Intoxication médicamenteuse : oui c non c
Traumatisme grave : oui c non c
Brûlure, inhalation de fumées : oui c non c
Autre : _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _
111
Manœuvre d’IOT : Présence d’un contenu pharyngé régurgité lors de la première laryngoscopie : oui c non c Pendant la manœuvre :
Régurgitation oui c non c Effort de vomissement oui c non c Inhalation oui c non c Toux oui c non c Efforts ventilatoires oui c non c Laryngospasme oui c non c Bronchospasme oui c non c Troubles du rythme oui c non c Bradycardie extrême oui c non c ACR oui c non c Intubation Oesophagienne oui c non c
Produit : _______________ Dose : ________________ Produit : _______________ Dose : ________________ Produit : _______________ Dose : ________________
Autres types d'anesthésies : oui c non c Si oui, laquelle ?:_______________________________ Produit : _______ Dose : ________________ Produit : _______ Dose : ________________
Constantes durant l’intubation INDUCTION INTUBATION FC : _ _ _ / min FC : _ _ _ / min PAS : _ _ _ mmHg PAS : _ _ _ mmHg PAD : _ _ _ mmHg PAD : _ _ _ mmHg PAM : _ _ _ mmHg PAM :_ _ _ mmHg
Sp O2 la plus basse : _ _ _ %
112
113
MANŒUVRE de SELLICK
Réalisation ( « phase I du protocole » ) oui c non c Si non, justification : _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Opérateur Infirmier(e) oui c non c NOM de l’opérateur de la sellick : _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Interne oui c non c Médecin oui c non c EVA modification de la visualisation glottique après relâchement de la manœuvre de
Sellick
Dégradation Amélioration -100 % 0 + 100 %
UTILISATION MANDRIN TYPE ESCHMAN
Phase AVEC Sellick
Utilisation lors de la première tentative d’IOT oui c non c Utilisation lors de la deuxième tentative d’IOT oui c non c
Difficultés de passage de la sonde d’intubation oui c non c
Phase SANS Sellick
Utilisation lors de la première tentative d’IOT oui c non c
Utilisation lors de la deuxième tentative d’IOT oui c non c
Difficultés de passage de la sonde d’intubation oui c non c
114
CARACTERISTIQUES DE L’IOT
Durée de la manœuvre d'intubation : _ _ min _ _ sec [T fin – T début ]
T début = début de laryngoscopie = contact avec le malade T fin = ballonnet gonflé
EVA de difficulté de l’intubation trachéale (0 à 100) 0 100 Très facile Impossible Commentaires : facteurs de difficulté d’intubation (anatomiques, environnementaux…) ____________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________ ____________________________________________________________________________ POSITION du Patient : sol lit brancard autre :