THESE PROFESSIONNELLE DE MASTERE SPECIALISE CREATION ET PRODUCTION MULITMEDIA Marion BARRAL Maître de stage : Olivier Lapierre, AgroParisTech/Céréopa Tuteur de stage : Annie Danzart, TelecomParisTech Décembre 2008 Multimédia et éducation Quelles perspectives pour l'utilisation du multimédia à des fins éducatives dans le domaine de la culture scientifique et technique ?
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THESE PROFESSIONNELLE DE MASTERE SPECIALISE
CREATION ET PRODUCTION MULITMEDIA
Marion BARRAL
Maître de stage : Olivier Lapierre, AgroParisTech/Céréopa Tuteur de stage : Annie Danzart, TelecomParisTech
Décembre 2008
Multimédia et éducation
Quelles perspectives pour l'utilisation du multimédia à des fins éducatives dans le domaine de la culture scientifique et technique ?
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Résumé
L'objectif de la présente étude est de proposer une synthèse et des perspectives de mise en
œuvre professionnelle du multimédia à des fins éducatives dans le domaine de la culture
scientifique et technique.
Pour cela, une analyse du besoin et un benchmark de l‟offre ont permis d'identifier une très
forte attente de la société en matière d‟éducation scientifique, de très grande potentialités
offertes par les technologies du multimédia et enfin une très grande diversité de pratiques. Mais
une tendance forte est celle de l‟utilisation du levier ludique afin de détacher les sciences de
leur logique « expert » pour les rendre plus accessibles.
Ensuite une analyse SWOT a permis de repérer que le multimédia éducatif appliqué au domaine
de la culture scientifique et technique permet une meilleure représentation de la
complexité, une aide au franchissement d'obstacles didactiques et une prise en compte de la
diversité des apprenants. Mais les risques de surcharge cognitive, la complexité de l'intégration
technique et pédagogique et l'importance des ressources à mobiliser représentent des faiblesses
majeures. Le plan France Numérique 2012 et les évolutions technologiques représentent des
opportunités mais l'existence d'une offre foisonnante et encore peu stabilisée représente un
risque non négligeable.
Les principales conclusions que nous pouvons tirer sont celles de l‟importance, d'un point de
vue micropédagogique, de la coordination dans l'espace et dans le temps des différents médias en
évitant une redondance entre le son et le texte ainsi qu‟un niveau d'interactivité modéré dans le
cas d‟un travail de groupe. Au niveau macropédagogique, il nous semble qu‟une stratégie
« multi-outils » et « multi-acteurs » permet d‟atteindre un public large, de proposer un
traitement multimodal des thématiques scientifiques et de mobiliser les compétences nécessaires
à la création d‟outils performants. C‟est ce que nous proposons de mettre en œuvre pour le
projet « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! » avec la déclinaison multimédia d‟un jeu
de plateau qui sera intégré dans un site internet éducatif qui, lui-même, sera associé à une
exposition itinérante, en partenariat avec des acteurs du territoire.
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Abstract
The objective of this study is to propose a professional synthesis for the use of educational
multimedia tools in the field of scientific and technical culture.
In order to achieve this goal, a need analysis and a benchmark study led to the conclusions that
there is a strong demand amongst society for scientific education achieved through a diversity of
multimedia technologies. Further to this there is a major trend incorporating the use of playful
means in order to give sciences a less complicated and more accessible dimension.
A SWOT analysis was then performed. It highlighted the fact that educational multimedia tools
applied to the scientific and technical culture help to better represent complexity, to cross
didactic barriers and to take into account the learners‟ diversity. But contrary to these strengths
there are the risks of cognitive overload, the complexity of technical and educational integration
and the importance of the resources to mobilize. The “France Numérique 2012” plan and latest
technological breakthroughs are major opportunities but the existence of an important but
currently not guaranteed offer represents a considerable risk.
The main conclusions we can draw are those of the importance from a micro-educational level
of the coordination in space and time of the different media. Redundancy between sound and
text as well as high level of interactivity in the case of work group should be avoided. From a
macro-educational level, it seems like “multi-tools” and “multi-stakeholders” strategies make it
possible to reach a large audience, to propose a multimodal treatment of scientific issues and to
gather the competences that are necessary to create efficient tools. This very clearly corresponds
to our proposition for the project “bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! ”: the
multimedia adaptation of a board game which will be integrated in an educational website site
which, itself, will be associated to a touring exhibition, in partnership with local stakeholders.
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Remerciements
Je tiens tout d‟abord à remercier mon directeur Olivier Lapierre. Depuis maintenant trois ans, il
me soutient dans le développement de projets originaux dans un domaine qui me tient à cœur :
celui de l‟éducation au développement durable appliquée à l‟agriculture.
Je remercie également Claude Holl qui m‟a donné l‟opportunité de faire mes premiers pas dans
l‟enseignement en animant un atelier vidéo et un atelier multimédia lors de la semaine
européenne Athens à AgroParisTech. Il m‟a par ailleurs fait part de son expertise dans le
domaine des sciences de l‟éducation pour la réalisation du présent document.
Je remercie par ailleurs les enseignants-chercheurs d‟AgroParisTech, de TelecomParisTech et de
l‟Institut National de l‟Audiovisuel rencontrés lors de mon parcours pour ce qu‟ils m‟ont appris,
l‟expertise qu‟ils m‟ont permis de développer et le goût qu‟ils m‟ont donné de l‟éducation.
Enfin et surtout merci à celle à qui je dois tout ce que je suis aujourd‟hui.
1ère partie : Contexte et périmètre de l’étude ................................................... page 7
1.1. Problématique et objectifs ................................................................ page 8
1.2. Qu‟est-ce que le multimédia ? ........................................................... page 8 1.2.1. Une définition du multimédia ................................................... page 9 1.2.2. Plusieurs niveaux d‟interactivité................................................. page 9
1.3. Qu‟entend-on par « éducation » ? ...................................................... page 10 1.3.1. Quelques termes relatifs aux sciences de l‟éducation ....................... page 10 1.3.2. Comment apprend-on ? .......................................................... page 10
1.4. Pourquoi le domaine de la culture scientifique et technique (CST) ? ............. page 11 1.4.1. L‟époque du « tout technologique » ........................................... page 11 1.4.2. Le cas des sciences du vivant et de l‟environnement ........................ page 12
2ème partie : Quelle évolution du besoin en matière d’éducation dans le domaine de la CST aujourd’hui ? .................................................................................... page 13
2.1. Du modèle d‟apprentissage magistral à la nouvelle éducation ..................... page 14
2.2. Des contextes et parcours d‟apprentissage nouveaux ............................... page 15 2.2.1. Le système éducatif n‟est plus le seul pourvoyeur de connaissances ...... page 15 2.2.2. L‟apprentissage tout au long de la vie ......................................... page 16 2.2.3. Adultes, seniors, screenagers… Les « nouveaux apprenants » .............. page 17
2.3. La « crise » de la science ................................................................. page 17 2.3.1. Science et société : le chaînon manquant ...................................... page 17 2.3.2. De l‟éducation scientifique à l‟éducation à l‟environnement pour un développement durable (EEDD) ............................................. page 18
2.4. Une offre de connaissances inédite ..................................................... page 19 2.4.1. L‟explosion de la quantité des données numériques ........................ page 19 2.4.2. Des connaissances de qualité difficilement identifiable ..................... page 20
3ème partie : Multimédia et éducation : Quels outils pour quels usages ? ....... page 21
3.1. Méthodologie .............................................................................. page 22 3.2. A l‟école et dans l‟enseignement secondaire et supérieur : la priorité à la qualité des supports ........................................................................ page 22
3.2.1. Quel est le dispositif d‟apprentissage ? ........................................ page 22 3.2.2. Quels sont les besoins ? .......................................................... page 22 3.2.3. Quelles sont les pratiques en matière de multimédia ? ..................... page 22 3.2.4. Quels sont les outils actuellement utilisés ? ................................... page 23
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3.3. En entreprise : se former tout au long de la vie ...................................... page 38 3.3.1. Quel est le dispositif d‟apprentissage ? ........................................ page 38 3.3.2. Quels sont les besoins ? .......................................................... page 38 3.3.3. Quelles sont les pratiques en matière de multimédia ? ..................... page 38 3.3.4. Quels sont les outils actuellement utilisés ? ................................... page 39
3.4. Musées, parcs à thèmes et autres lieux de transmission des savoirs vers le grand public : à la frontière entre loisir et éducation ............................................. page 42
3.4.1. Quel est le dispositif d‟apprentissage ? ........................................ page 42 3.4.2. Quels sont les besoins ? .......................................................... page 42 3.4.3. Quelles sont les pratiques en matière de multimédia ? ..................... page 42 3.4.4. Quels sont les outils actuellement utilisés ? ................................... page 42
3.5. A domicile : l‟autonomie, les parents prescripteurs et médiateurs ............... page 49 3.5.1. Quel est le dispositif d‟apprentissage ? ........................................ page 49 3.5.2. Quels sont les besoins ? .......................................................... page 49 3.5.3. Quelles sont les pratiques en matière de multimédia ? ..................... page 49 3.5.4. Quels sont les outils actuellement utilisés ? ................................... page 49
4ème partie : Analyse, conclusion et perspectives ............................................ page 52
4.2. Quelques recommandations en matière de conception et d‟utilisation d‟outils multimédia éducatifs ................................................................. page 62
4.2.1. Au niveau micropédagogique : coordination des différents médias et interactivité ............................................................................. page 62 4.2.2. Au niveau macropédagogique : un choix stratégique des outils à mettre en œuvre ................................................................. page 63 4.2.3. Un nouveau jeu d‟acteurs ....................................................... page 64 4.2.4. De nouvelles perspectives d‟interaction avec les médias traditionnels ... page 65
4.3. Applications à un cas réel : le jeu éducatif « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! » ......................................................................... page 65
4.3.1. Contexte ........................................................................... page 65 4.3.2. Quelles sont les limites du jeu dans sa version actuelle ? ................... page 66 4.3.3. Quelles propositions pour un jeu multimédia ? .............................. page 67
« Il n'y a qu'une façon d'apprendre, c'est par l'action. »
Paolo Coelho, l‟alchimiste.
Aujourd‟hui de nombreux pédagogues remettent en cause le système éducatif classique. Trop
abstrait, excluant, inadapté aux évolutions de notre société… Comme toutes les technologies
nouvelles, celles du multimédia font l‟objet de grands espoirs pour apporter des réponses à ces
questions. Ce besoin d‟innovation pédagogique devient d‟autant plus crucial au moment où
nous assistons à une réelle crise de confiance de la société envers les innovations scientifiques et
techniques. Peut-on tirer avantage de l‟utilisation d‟outils multimédias à des fins éducatives
dans ce domaine ?
La présente étude prend forme dans le cadre d‟une mission professionnelle qui m‟a été confiée il
y a trois ans au Céréopa, un bureau d‟études d‟AgroParisTech, école d‟ingénieurs dans le
domaine des sciences du vivant et de l‟environnement. Cette mission vise un double objectif :
● Mettre en place un projet d‟éducation citoyenne au sein du programme « Grignon Energie Positive », programme de recherche appliquée sur les enjeux énergétiques et climatiques de l‟agriculture ;
● Réouvrir au Céréopa le chantier de l‟éducation et de la communication, chantier initié en son temps par le professeur Julien Coléou qui fut l‟un des premiers à utiliser les solutions audiovisuelles en cours à AgroParisTech.
Les deux questions sous-jacentes à celle des applications éducatives du multimédia dans le
domaine des sciences et techniques sont donc de deux ordres :
● Quelles solutions développer pour atteindre les deux objectifs précités ?
● Quel rôle peut jouer le Céréopa au sein d‟un jeu d‟acteurs mêlant expertises pédagogiques, techniques et scientifiques ?
C‟est à ces questions que nous allons tenter de répondre dans la présente étude.
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1ère partie :
Contexte et périmètre de l’étude
1.1. Problématique et objectifs
1.2. Qu‟est-ce que le multimédia ?
1.3. Qu‟entend-on par « éducation » ?
1.4. Pourquoi le domaine de la culture scientifique et technique (CST) ?
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1.1. Problématique et objectifs
Problématique : Quelles perspectives pour l'utilisation du multimédia à des fins
éducatives dans le domaine de la culture scientifique et technique ?
Nous proposons de représenter un contexte d‟apprentissage (cf. schéma ci-dessous) comme un
système au sein duquel où, en réponse à un besoin et/ou un enjeu, un ou plusieurs médiateurs
pédagogiques vont mobiliser des contenus, des outils et des méthodes afin de permettre la
transmission de savoirs au(x) apprenant(s).
Les objectifs de l‟étude sont les suivants :
● Proposer une synthèse et des préconisations pour l‟utilisation d‟outils multimédia à des
fins éducatives dans le domaine des sciences et techniques ;
● Réfléchir à leur mise en application dans le cadre d‟un projet professionnel.
Pour cela nous allons procéder en plusieurs étapes :
● Tout d‟abord définir le périmètre de l‟étude et les termes utilisés (partie 1) ;
● Ensuite identifier les besoins en matière d‟éducation dans le domaine de la culture
scientifique et technique (partie 2) ;
● Ensuite procéder à un benchmark de l‟offre multimédia à des fins éducatives dans divers
contextes d‟apprentissage (partie 3) ;
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Etudiants en atelier multimédia à AgroParisTech. Photo : C. Holl, 2008
● Enfin mettre ces différents usages en perspective pour proposer des recommandations en
matière de conception d‟outils éducatifs multimédia dans le domaine de la culture
scientifique et technique et les illustrer au travers d‟un exemple : l‟adaptation
multimédia du jeu de plateau « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! » (partie 4).
1.2. Qu’est-ce que le multimédia ?
1.2.1. Une définition du multimédia
Le terme « multimédia » est un mot largement utilisé par le grand public dans des sens très
divers (voir annexe 1, « quelques définitions du mot « multimédia »). Le terme « multimédia »
est en effet aussi bien utilisé pour qualifier des outils matériels (caméscope, appareil photo,
lecteur DVD, etc.) que des logiciels, des contenus (un site internet « multimédia », des lieux
(« laboratoires multimédias ») ou des types d‟activités (un
« cours multimédia »).
Il existe cependant un consensus sur le fait que « multimédia »
implique la réunion sur un même support d’au moins
deux médias de nature différente : texte, image fixe,
image animée et/ou son. Mais cette caractéristique ne
suffit pas car elle signifierait que la télévision serait un outil
multimédia. Le mot multimédia ne sous-entend ainsi pas
seulement la possibilité d‟utiliser différents médias réunis sur
un même support, mais aussi la possibilité d‟interagir avec ces
derniers en les pilotant et/ou les générant. C‟est ce que l‟on
appelle l’interactivité.
1.2.2. Plusieurs niveaux d’interactivité
On peut distinguer différents niveaux d‟interactivité en matière de multimédia :
Niveau d’interactivité
Caractéristiques Exemple
Niveau 1 Pouvoir naviguer dans un scénario prédéfini.
Faire défiler les diapositives d‟un power point.
Niveau 2 Pouvoir naviguer dans un scénario parmi une quantité de scenarios prédéfinis.
Choisir une stratégie et un parcours dans un jeu.
Niveau 3 Pouvoir réaliser son propre scénario et construire un micromonde.
Se créer une vie sur Second Life.
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1.3. Qu’entend-on par « éducation » ?
1.3.1. Quelques termes relat ifs aux sciences de l ’éducation
Education, apprentissage, médiation… Les termes relatifs aux sciences de l‟éducation sont
nombreux et il n‟existe pas vraiment de consensus à ce jour concernant leur définition. Pour
plus de clarté, il convient donc de préciser le sens que nous attribuons aux termes utilisés dans la
présente étude.
● Education : Le mot « éducation » vient du latin « ex-ducere » qui signifie littéralement
« conduire à l'extérieur ». A l‟origine, l‟éducation consistait ainsi en toutes les actions
permettant de découvrir le monde « extérieur » à la sphère familiale. On entend aujourd‟hui
par éducation plus spécifiquement les actions visant à développer les facultés physiques,
intellectuelles et morales d‟une personne dans le but d’aider à une meilleure
compréhension du monde pour y devenir un acteur responsable.
● Pédagogie : La pédagogie est la science qui a pour objet l‟éducation des enfants.
● Médiation : La médiation est l’ensemble des moyens qu’une personne peut mobiliser en
vue de rendre plus accessible un savoir quelconque à une ou plusieurs autres personnes.
● Apprentissage : Moyen par lequel on acquiert des connaissances, des informations ou
une pratique.
● Savoirs : On distingue différents types de savoirs. Ils ne sont pas indépendants mais
fonctionnent au contraire en étroite interaction.
Dénomination Définition Exemples
Savoir théorique Ensemble des connaissances
théoriques acquises par l’éducation,
l’enseignement, etc.
Principes et lois
mathématiques, règles
grammaticales, etc.
Savoir-faire Aptitude à réaliser une démarche,
une action.
Gestes à exécuter pour tracer
une courbe, pour faire bouger
une souris à l’écran, etc.
Savoir-entreprendre
(Versailles, 2003)
Aptitude à développer des
démarches adaptées dans un
objectif prédéfini.
Choix d’une méthodologie
pour réaliser une expérience
scientifique.
Savoir-être Aptitude à développer des attitudes
adaptées à un contexte donné.
Attitude d’écoute réciproque à
adopter lors d’un travail en
équipe.
1.3.2. Comment apprend-on ?
Les avancées dans le domaine des sciences de l‟éducation ces dernières décennies ont permis de
mieux comprendre les mécanismes à la base de l‟apprentissage. On estime aujourd‟hui que
l‟apprentissage consiste en la formation d‟une représentation mentale d‟un phénomène.
Dans le domaine des sciences, il est très fréquent que l‟on se soit créé une représentation
mentale d‟un phénomène qui nous semble évident au travers de notre vécu (par exemple, un
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Appareils multimédia connectés. Photo : M. Barral, 2007.
objet tombe toujours par terre). Mais ces représentations mentales sont parfois fausses.
L‟apprentissage va donc consister en la formation de nouvelles représentations. Cela peut
provoquer un conflit cognitif.
Cette acquisition de nouvelles représentations se fonde selon des mécanismes complexes
mobilisant la mémoire. On peut citer les travaux de la Paivio (1986) à l‟origine de la théorie
du double codage. Cette
dernière est fondée sur l‟idée que
l‟apprentissage repose
essentiellement sur deux
éléments: la mémoire de
travail et la mémoire à long
terme (cf. figure ci-contre).
La mémoire de travail est celle
que l‟on mobilise en temps réel
dans un contexte d‟apprentissage.
Elle traite les informations via
deux canaux qui fonctionnent
simultanément : le canal visuel
(texte et images) et le canal
phonétique (son). La mémoire à long terme est celle où nous stockons nos connaissances et
nos souvenirs. Ainsi dans un contexte d‟apprentissage efficace, l‟information est traitée par la
mémoire de travail puis stockée dans la mémoire à long terme et rapatriée dans la mémoire de
travail en cas de besoin. Mais les capacités de traitement de la mémoire de travail sont limitées,
en particulier si l‟un des canaux est très chargé. Une des difficultés en matière d‟apprentissage va
donc consister à limiter une « surcharge cérébrale » en équilibrant les informations véhiculées
via le canal visuel et via le canal phonétique.
1.4. Pourquoi le domaine de la culture scientifique et
technique (CST) ?
Le domaine de la culture scientifique et technique nous
paraît revêtir un intérêt tout particulier en matière
d'éducation étant donné les questionnements qu'il pose
aux citoyens de nos jours.
1.4.1. L’époque du « tout
technologique »
Nous sommes en effet aujourd‟hui dans une époque du
"tout technologique". La technologie est devenue, parfois même sans le percevoir, une
Fonctionnement de la mémoire en contexte d’apprentissage. Source : Adobe.
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Répartition du budget de recherche et développement 2005 par objectifs socio-économiques. Source : Ministère de l'éducation nationale,
de l'enseignement supérieur et de la recherche, 2007
composante du quotidien de chacun. Elle est présente dans de nombreuses sphères de l‟activité
humaine : les loisirs, la culture, les transports, la santé, l‟alimentation, etc. Le citoyen associe
des risques liés à la mise en œuvre de ces techniques mais en comprend et maîtrise peu les
déterminants. Cela génère des débats souvent houleux, médiatiques et menant rarement à des
prises de décision et actions concrètes, comme l‟illustrent les débats de ces dernières années
autour des organismes génétiquement modifiés, du clonage humain et de l‟énergie nucléaire. La
science ne peut donc plus rester l‟affaire des scientifiques, dans une « logique expert »
(Versailles, 2003). Tous les citoyens sont concernés par ses conséquences sociales, culturelles,
économiques et politiques. Il devient désormais essentiel d'associer à la recherche et à
l'innovation technologique des moyens visant à permettre aux citoyens de comprendre les
phénomènes techniques parfois complexes qui leur sont associés. C‟est ce que le physicien
français Jean-Marc Lévy-Leblond appelle « mettre la science en culture » (1984).
1.4.2. Le cas des sciences du vivant et de l’environnement
Les sciences du vivant et de
l’environnement (SVE)
méritent une attention
particulière car elles se
trouvent au cœur des enjeux
actuels de la société. Ce
domaine représentait en effet
34% du budget civil de
recherche et développement
en 2005, en comparaison de
11% pour les sciences et
technologies de l‟information
et de la communication ainsi
que pour les mathématiques
et la physique.
Un sondage LH2 publié en Octobre 2008 montrait par ailleurs que les Français sont autant
préoccupés par la crise écologique que par la crise financière.
Conclusion de la 1ère partie
Pour conclure cette première étape de cadrage du sujet, nous pouvons dire que la question de
l'utilisation du multimédia à des fins éducatives dans le domaine de la culture scientifique et
technique se pose au sein d‟un environnement en plein changement. Nous allons maintenant
voir que plus que jamais, la société est en attente d‟une vraie (r)évolution en matière d‟accès aux
savoirs scientifiques et techniques.
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2ème partie :
Quelle évolution du besoin en matière
d’éducation dans le domaine
de la CST aujourd’hui ?
2.1. Du modèle d‟apprentissage magistral à la nouvelle éducation
2.2. Des contextes et parcours d‟apprentissage nouveaux
2.3. La « crise de la science »
2.4. Une offre de connaissances inédite
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L’apprentissage “littéraire”…
L’apprentissage « littéraire ». Photo : Flickr
2.1. Du modèle d’apprentissage magistral à la
nouvelle éducation
Les approches en matière d‟éducation et d‟apprentissage ont
beaucoup évolué au cours des deux derniers siècles, passant
progressivement d‟une approche mécanique visant à la
mémorisation de savoirs et à la répétition d‟une méthode à une
approche compréhensive mettant plus l‟accent sur le
questionnement, la compréhension et l‟analyse.
En acceptant la simplification, nous pouvons résumer ces
différentes approches et les organiser d‟un point de vue
chronologique comme l‟illustre le tableau suivant :
Unilatéral (du maître à l‟élève), mobilise beaucoup la mémoire, savoirs décontextualisés.
Enseignement de la grammaire.
Années 60 Modèle d'apprentissage béhavioriste
Apprentissage par l'entraînement (répétition). Savoirs décontextualisés.
Questionnaires à choix multiples, apprentissage de l‟orthographe en mode binaire (ou/où, a/à, etc.).
Années 70 Pédagogie Freinet
Démarche d‟éveil Apprentissage par le vécu. Classes de découverte, approches utilisées en maternelle.
Années 80 Approche constructiviste
Résoudre une situation par problèmes, approche expérimentale.
Enseignement des sciences expérimentales, activités du type « la main à la pâte » (http://lamap.inrp.fr/)
Années 90 Travaux de Piaget et Giordan
Approche cognitiviste Droit à l‟essai plutôt qu‟à l‟erreur. Construction des savoirs à partir des représentations de l‟individu qui sont parfois fausses et qu‟il faut donc parfois détruire (modèle allostérique). Importance du contexte et des interactions avec l‟environnement d‟apprentissage.
Approches de type « apprendre en faisant » de Team Factory (www.teamfactory.org), cursus par l‟apprentissage en entreprise.
La cité de l’espace à Toulouse. Photo : M. Barral, 2007.
Pour reprendre les termes définis dans la première partie concernant les différents types de
« savoirs » (page 9), on peut ainsi dire que l’acquisition des savoirs et savoir-faire a constitué
le moteur de l’éducation pendant des décennies. Mais de nombreux pédagogues plaident
aujourd’hui en faveur du recentrage de l’éducation vers le développement de démarches
(savoir-entreprendre) et d'attitudes (savoir-être). En effet les savoirs deviennent vite obsolètes
face à l'évolution permanente des connaissances, en particulier dans le domaine scientifique.
Giordan (1998) explique ainsi : « Il importe donc, avant tout, de former des citoyens aptes à
débattre des enjeux sociaux, des esprits ouverts capables de s'interroger sur le monde ou sur
eux-mêmes. »
2.2. Des contextes et parcours d’apprentissage
nouveaux
En matière d‟éducation, ce ne sont pas seulement les approches et théories concernant les
méthodes d‟apprentissage qui ont évolué. Le système éducatif lui-même a connu ces dernières
décennies une réelle révolution : nouveaux acteurs « sur le marché », besoin de se former qui
dépasse la seule période scolaire et, conséquence de cela et des évolutions technologiques en
cours, apparition de nouveaux apprenants.
2.2.1. Le système éducatif n’est plus le seul pourvoyeur de
connaissances
En marge de l‟institution scolaire, qui a détenu pendant des siècles le pouvoir de transmettre le
savoir et les connaissances, diverses initiatives et lieux propices à l‟apprentissage se sont
développés ces dernières décennies : musées « nouvelle génération », associations d'éducation,
sites internet, jeux et dvd éducatifs, organisation de nuits, de festivals et autres fêtes sur le
thème des sciences, du cinéma, de la poésie…
Le cas des musées « nouvelle
génération » traitant de thématiques
scientifiques, avec leurs déclinaisons
diverses de type écomusées, parcs à thème
et centres d‟interprétation mérite une
attention particulière. En effet dans les
musées traditionnels, dont la vocation
première est la conservation de biens
patrimoniaux, la démarche active
d'appropriation du savoir est assez limitée.
Aujourd‟hui l‟objectif est au contraire de
faire pleinement participer les publics au
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processus de transmission des savoirs. Le Futuroscope à Poitiers, la cité de l‟espace à Toulouse
et la Cité des sciences et de l'industrie, à Paris, en sont de très bons exemples. Dans ces lieux,
l‟interactivité avec le visiteur et la dimension émotionnelle sont très importantes, menant à de
nouvelles expériences d‟apprentissage. C‟est un sujet sur lequel nous reviendrons plus en
profondeur dans la 3ème partie, lors des études de cas.
Les conclusions que l‟on peut tirer de cette nouvelle donne sont les suivantes :
● D‟une part aujourd‟hui l‟éducation n‟est plus localisée dans le temps et l‟espace mais
présente en permanence et partout. Tout est devenu contexte à apprendre. Certains
parlent même d‟un « empire pédagogique » (Marchand, 2003).
● Par conséquent la frontière entre temps d‟apprentissage/de travail et temps de loisir
devient de moins en moins distincte. Dans le domaine des sciences, on parle de plus en
plus de loisirs scientifiques.
● Enfin, le secteur marchand s‟intéresse de plus en plus à l‟éducation. La connaissance est
désormais incorporée à tous les actes de consommation et de production et se trouve
donc maintenant dans un univers marchand et concurrentiel. Se pose alors la
question de la réelle valeur pédagogique de cette offre de connaissances.
2.2.2. L’apprentissage tou t au long de la vie
La durée du cycle scolaire a fortement augmenté au cours du XXème siècle. Elle est aujourd‟hui
de 18 ans en moyenne. Mais le phénomène qui modifie le plus en profondeur la façon d‟aborder
les questions d‟éducation est le fait que de nos jours, le parcours individuel et de formation se
construit tout au long de la vie. En 1987 déjà, John Sculley affirme dans un livre intitulé De Pepsi
à Apple que « l'éducation ne sera pas seulement le prélude à une carrière mais l'effort de toute
une vie ». Cela s‟explique par deux phénomènes majeurs :
● D‟une part la rapidité des découvertes scientifiques, menant au fait que les connaissances
doivent être régulièrement réactualisées, au risque d‟être dépassées… Dans le domaine
de la nutrition-santé, tous les deux ans en moyenne de nouvelles connaissances
remettent en cause celles qui prévalaient auparavant.
● D‟autre part le caractère plus ou moins incertain de la conjoncture économique. Pour se
protéger et s‟assurer plus de flexibilité, les entreprises sont tentées de surqualifier les
postes et d'exiger des compétences excédentaires pour lesquelles le seul cursus scolaire
ne suffit plus.
Ce besoin de formation tout au long de la vie se manifeste par un investissement important dans
la formation entreprise, l‟autoformation et l‟élargissement des critères d‟âges pour entrer dans
les cursus de formation.
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Des « digital natives » au travail ! Photo : Flickr.
2.2.3. Adultes, seniors, screenagers… Les « nouveaux apprenants »
Une des conséquences de l‟apprentissage tout au long de la vie est le fait que l‟on trouve dans les
cursus d‟apprentissage des apprenants que l‟on ne trouvait pas auparavant comme les adultes
et les seniors. Le cas de bacheliers sexagénaires que l‟on ne manque pas de nous montrer
chaque année au journal télévisé à la période du baccalauréat peut certes prêter à rire mais est
sans doute révélateur d‟un phénomène de société plus profond. Ces apprenants sont peu
habitués à l‟utilisation des solutions multimédia et ont des connaissances scientifiques qui ont
besoin d‟être réactualisées car apprises sur les bancs d‟école il y a longtemps. Ils représentent
aujourd‟hui une catégorie de la population disponible, en vraie demande de
connaissances, en particulier dans le domaine de la santé.
Par ailleurs les adolescents d‟aujourd‟hui
constituent aussi de nouveaux apprenants.
Ayant grandi avec les outils informatiques, ils
font partie de la génération des « digital
natives », par opposition aux « digital
immigrants » (Prensky, 2001) nés auparavant
et qui ont du s‟adapter aux outils
informatiques au cours de leur vie
professionnelle. Habitués aux écrans, les
Digital Natives sont aujourd'hui des
« screenagers » dont la culture et les
connaissances ne sont plus seulement
façonnés au sein de l'institution scolaire et par le support de la lecture des ouvrages scolaires. Ils
font par ailleurs partie d‟une génération directement concernée par les conséquences
de la crise écologique actuelle. Ils se posent par conséquent de vraies questions en la
matière.
Ainsi peut-on conclure que le système éducatif au sens large du terme, c'est-à-dire comprenant
tout aussi bien l‟institution scolaire que les autres lieux et supports de connaissance évoqués plus
haut, doit aujourd‟hui prendre en charge une plus grande diversité d‟apprenants qui n‟ont pas
tous forcément les mêmes besoins en matière d‟outils d‟apprentissage, de méthodes et de
connaissances à acquérir.
2.3. La « crise » de la science
2.3.1. Science et société : le chaînon manquant
Une enquête TNS Sofres publiée en Novembre 2007 montre que 90% des Français ont plutôt
confiance en la science. Cependant si 44% d‟entre eux pensent que la science apporte à
l‟Homme plus de bien que de mal, 48% estiment qu‟elle apporte autant de mal que de bien.
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Par rapport à il y a une cinquantaine d'années, diriez-vous que la situation en France s'est beaucoup améliorée, plutôt améliorée, plutôt dégradée ou beaucoup dégradée en ce qui concerne :
Source : « Les attitudes des Français à l’égard de la science » Palais de la découverte-TNS Sofres, Novembre 2007.
Animation « la ferme qui positive » au salon de l’agriculture. Photo : M. Barral, 2008.
Cela montre bien l‟écart de perception entre la recherche fondamentale et ses mises en
application dans la société ainsi qu‟une confusion entre science et progrès.
Questionnés sur l‟impact de la
science dans différents
domaines de la vie courante,
68% des français estiment que
la science a permis d‟améliorer
la santé. Parcontre pour les
questions liées à
l‟environnement et à
l‟alimentation, la situation est
opposée. La majorité des
français considère que la
science a dégradé la situation
(voir graphe ci-contre).
On assiste donc à une réelle
crise de confiance de la société
envers les mises en application de la science. Le cas de l‟agriculture est emblématique de cette
problématique. Ses évolutions récentes d‟un point de vue technologique, en particulier dans le
domaine des sciences du vivant, ont des répercussions dans trois domaines qui interpellent le
grand public : l‟alimentation, la santé et l‟environnement. La distance croissante entre réalité et
perceptions, à l‟image du débat autour des biotechnologies, montre un besoin crucial
d‟éducation. Il devient urgent de développer une pédagogie aidant à comprendre
les fondements scientifiques de nombre d’éléments de notre quotidien, pédagogie
au sein de laquelle les acteurs de la recherche doivent pouvoir s‟exprimer.
2.3.2. De l’éducation scientif ique à l’éducation à l’environnement
pour un développement durable (EEDD)
Un exemple de cette volonté de développer une
pédagogie qui donne à chacun les moyens de
mieux comprendre la complexité du mode
qui nous entoure est celui de « l‟éducation à
l‟environnement pour un développement
durable » (EEDD). L‟EEDD, inscrite en
France dans les programmes scolaires du
primaire jusqu‟au lycée depuis 2002, consiste
à donner à l’apprenant les moyens de
comprendre et d’agir en faveur d’un
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développement durable, autrement dit un développement ne dépassant pas les capacités
naturelles de notre planète afin de ne pas obérer le bien-être des générations futures.
L‟EEDD représente un véritable changement de paradigme en matière d‟éducation car elle
nécessite une approche globale des phénomènes et fait donc appel à des champs disciplinaires
aussi divers que les sciences de la vie, la physique, l‟éducation civique, etc. D‟une éducation
scientifique, qui consistait à comprendre les phénomènes à l‟origine du monde qui nous entoure,
nous passons désormais à une éducation visant à comprendre la complexité de ce monde et
comment nous interagissons avec lui, à court, moyen et long terme. Cela nécessite donc un
décloisonnement des champs disciplinaires, de réelles innovations pédagogiques en
faveur d‟un apprentissage à la complexité et à la prospective (mise en horizon long) et
enfin une reconnexion des enseignements, en particulier scientifiques, avec la réalité et les
enjeux de demain.
2.4. Une offre de connaissances inédite
Internet et les technologies numériques ont permis un accès inédit à la connaissance qui pose des questions nouvelles en matière d‟apprentissage et d‟éducation.
2.4.1. L’explosion de la quantité des données numériques
La quantité d‟information sous forme numérique actuellement disponible est très difficile à chiffrer étant donné le caractère volatile et décentralisé de ce type de ressources. Cependant une étude IDC publiée cette année donne des ordres de grandeur en matière d‟offre numérique disponible sur internet. Ainsi :
● L'univers numérique représentait en 2007 281 milliards de gigaoctets, soit environ 45 gigaoctets d'informations numériques pour chaque individu sur terre, soit l'équivalent de presque 6 IPhones de 8 gigaoctets par personne ;
● Avec une croissance annuelle globale de quasiment 60 %, l'univers numérique atteindra, selon les estimations, près de 1,8 zettaoctets en 2011, soit un décuplement en cinq ans ;
● L'explosion des informations (du moins en termes de gigaoctets purs) est essentiellement visuelle : images, films vidéo, signaux de télévision numériques et images de caméras de surveillance.
Que retenir de ces chiffres ?
● D‟une part que cette croissance exponentielle de la quantité de données numériques, rendue possible par la dématérialisation de l‟information, ne correspond pas forcément à une croissance de la quantité de connaissances. La plupart des données numériques correspondent à du « bruit », c'est-à-dire des réadaptations, traductions ou copies de connaissances déjà existantes.
● Par ailleurs cette disponibilité de l‟information ne résout pas la question de l‟accès à l‟information. Du point de vue utilisateur, il faut développer des démarches très pointues
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pour trouver ce que l‟on cherche vraiment. D‟un point de vue « conception », cela implique de développer une vraie stratégie permettant d‟être « visible » dans l‟univers numérique. Cela passe par des moyens techniques permettant d‟optimiser le repérage par les moteurs de recherche mais aussi, dans le domaine qui nous concerne, par le développement de partenariats et de stratégies locales avec différents acteurs : producteurs de contenus multimédia, éducation nationale, entreprises, centres de culture scientifique et technique, organismes de recherche, etc.
● Enfin l‟information numérique est désormais disponible sous des formes très variées : texte mais aussi son et image (fixe ou animée). Nous sommes clairement dans l‟ère de « l‟information multimédia ». L‟accès à cette information « protéiforme » nécessite de pouvoir traiter les connaissances portées par d‟autres supports que le seul texte, mode de transmission des savoirs qui a prévalu pendant des siècles.
2.4.2. Des connaissances de qualité diff ici lement identifiable
Au-delà du seul aspect quantitatif se pose la question de la qualité de l‟information et des
connaissances désormais disponibles au sein de « l‟univers numérique ». En effet c‟est un univers
au sein duquel tout un chacun peut s‟exprimer sans pour autant s‟identifier ou utiliser des
contenus sans citer ses sources. La fiabilité de l‟information véhiculée sur des sites comme
l‟encyclopédie collaborative Wikipédia a notamment beaucoup fait débat. Ce phénomène pose
une vraie question en matière d‟éducation où l‟essentiel n‟est plus seulement l‟information
apprise – de toute manière aisément disponible sur la toile – mais l‟aptitude à sélectionner et à
porter un regard critique sur l‟information disponible. Pour les acteurs de la recherche
scientifique, pouvoir s‟exprimer directement sur la toile pour véhiculer une information fiable
représente une opportunité à saisir.
Conclusion de la 2ème partie
Nous pouvons donc conclure de cette deuxième partie qu‟il existe une attente très forte de la
société en matière de culture scientifique et technique. Face à cela, un accès aux savoirs
révolutionné par le numérique. Les outils multimédia peuvent-ils apporter des réponses à ce
nouveau contexte ? Quels sont les usages en la matière à l‟heure actuelle ?
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3ème partie :
Multimédia et éducation :
Quels outils pour quels usages ?
3.1. Méthodologie mise en œuvre
3.2. A l‟école et dans l‟enseignement secondaire et supérieur : la priorité à la qualité des supports
3.3. En entreprise : se former tout au long de la vie
3.4. Musées, parcs à thèmes et autres lieux de transmission des savoirs vers le grand public : à la frontière entre loisir et éducatif
3.5. A domicile : l‟autonomie, les parents prescripteurs et médiateurs
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Salle de classe. Photo : Flickr
3.1. Méthodologie mise en œuvre
Nous avons vu dans la deuxième partie que l‟institution scolaire n‟était plus le seul pourvoyeur
de connaissances. Nous allons donc proposer un benchmark de l’offre multimédia dans les
quatre contextes majeurs de transmission des savoirs scientifiques et techniques : l‟école,
l‟entreprise, les lieux publics de type musées et parcs à thème et enfin le domicile. Pour autant,
ces univers ne sont pas imperméables don certains éléments seront valables dans plusieurs
contextes, comme nous allons le voir plus loin.
Pour réaliser le benchmark, nous avons repéré des solutions qui nous semblaient présenter un
intérêt particulier du point de vue éducatif, sans toujours être forcément spécifiques du domaine
scientifique et technique. Ce panorama n‟a pas pour objectif d‟être exhaustif mais plutôt de
mettre en évidence des solutions originales pour permettre une mise en perspective de la
question de départ. Ce travail a été entrepris de Juin à Novembre 2008.
3.2. A l’école et dans l’enseignement secondaire et
supérieur : la priorité à la qualité des supports
3.2.1. Quel est le dispositif d’apprentissage ?
A l‟école et dans l‟enseignement secondaire et
supérieur, autrement dit le système scolaire
« classique », le médiateur est l‟enseignant,
l‟apprenant est l‟étudiant ou l‟élève.
3.2.2. Quels sont les besoins ?
Du côté de l‟enseignant, les besoins sont
principalement de quatre ordres : rechercher
des informations, supports et outils pour
construire ses cours, organiser et planifier
ses cours, communiquer avec ses élèves et
enfin, éventuellement, diffuser ses cours et partager ses expériences avec celles d‟autres
enseignants.
Du côté de l‟élève ou de l‟étudiant, les principaux besoins sont : rechercher des informations,
supports et outils pour réaliser ses travaux scolaires, communiquer avec les enseignants et les
autres élèves, planifier ses travaux scolaires, trouver une assistance en cas de difficultés.
3.2.3. Quelles sont les pratiques en matière de multimédia ?
L‟enseignant va élaborer son cours selon des programmes préétablis mais en tenant à garder une
relative liberté en ce qui concerne le choix des méthodes. Cela va se traduire par une grande
diversité de démarches en matière de multimédia et par le choix de solutions modulaires
plutôt que des solutions toutes intégrées prenant en charge l‟apprenant tout au long du
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processus, jusqu‟à l‟évaluation. Concernant le choix des outils, la priorité pour l‟enseignant va
être la validité des contenus qu‟il va utiliser (sources fiables et reconnues).
3.2.4. Quels sont les outils actuellement uti l isés ?
La vidéo en ligne
La vidéo n‟est devenue un outil très interactif qu‟à partir du moment où elle a pu être
accessible par un autre média que la seule télévision. Ainsi avec le numérique et le
développement d‟internet les chaînes de télévision se sont progressivement mises à associer à
leur programmation télévisée des contenus en ligne.
● Exemple 1 : Le site éducatif de France 5 (http://www.lesite.tv/)
Voici une synthèse de l‟analyse Swot. Certains éléments n‟ont pas été détaillés précédemment
car étant plus spécifique du numérique que du seul multimédia ou car n‟étant pas spécifiques de
l‟éducation dans le domaine de la culture scientifique et technique.
Forces Faiblesses
● Franchissement d'obstacles didactiques
● Représentation de la complexité
● Prise en compte de la diversité des apprenants
● Relation aux savoirs et apprenant-médiateur refondés
● Rapport élastique au temps et à l‟espace
● Apprentissage multimodal
● Actualisation des contenus
● Droit à l‟essai et à l‟erreur
● Accès aux savoirs et à la remise en cause de ces savoirs
● Interactivité, prise de décision, action, anticipation
● Coopération, travail collaboratif, mutualisation, partage d‟expérience
● Travail autonome, individualisation des parcours
● Ordinateur décomplexant pour l‟apprenant
● Surabondance informationnelle > risque de surcharge cognitive
● Risque de dispersion
● Intégration technique et pédagogique
● Compétences à acquérir/mobiliser
● Coûts matériels et de développement
● Expérience émotionnelle limitée
● Contenus disparates, émanant de sources diverses, moins contrôlables par l‟institution publique
● Communication interhumaine dénaturée (timidité face à la caméra, contact non réel)
● Plagiat et autres types de tricheries
Opportunités Menaces
● Contexte politique : B2i (Brevet Informatique et Internet) au collège, incitation aux investissements matériels, plan France numérique 2012
● Changement de génération pour les médiateurs pédagogiques
● Evolutions technologiques : puissance des ordinateurs, haut débit, diversification des périphériques
● Remise en cause du système éducatif classique
● Apprentissage tout au long de la vie
● Multiplication des acteurs, lieux et contextes d‟apprentissage
● Demande forte de la société pour l‟accès aux savoirs scientifiques et techniques
● Risque d‟individualisation
● Risque d‟un usage prématuré
● Résistance du système éducatif à l‟émergence d‟un « marché de l‟éducation »
● Part de la communauté enseignante réfractaire
● La question des droits d‟auteur
● Offre foisonnante mais pas encore stabilisée
● Crise économique et financière
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4.2. Quelques recommandations en matière de
conception et d’utilisation d’outils multimédia
éducatifs
Nous pouvons élargir les préconisations intégrées dans l‟analyse SWOT aux recherches et
travaux réalisés dans le domaine des sciences de l‟éducation sur les intérêts pédagogiques des
outils multimédia.
4.2.1. Au niveau micropédagogique : coordination des différents
médias et interactivité
Parmi les recherches sur les intérêts pédagogiques des outils multimédia, on peut citer les
travaux de Mayer (2005) qui estime aujourd‟hui que l‟on retient 10 % de ce qu'on lit, 20 % de
ce que l'on entend, 30 % de ce que l'on voit, 50 % de ce que l'on entend et voit, 80 % de ce que
l'on dit et 90 % de ce que l'on dit en faisant. Cela est en partie du au fait que l‟association de
texte, de son et d‟images permet d‟équilibrer le flux informationnel envoyé au cerveau entre le
canal visuel et le canal phonétique (voir page 11).
Mayer a tiré de ses études de cas un certain nombre de principes concernant la coordination des
différents médias que nous détaillons ci-dessous :
Principe du multimédia
Les personnes apprennent mieux à partir de texte et d‟images qu‟à partir de texte seul.
Principe de segmentation
Les personnes apprennent mieux lorsqu‟une leçon multimédia est segmentée plutôt qu‟en unité continue.
Principe de pré-apprentissage
Les personnes apprennent mieux dans un dispositif multimédia si elles connaissent déjà les noms et caractéristiques des principaux concepts.
Principe de modalité
Les personnes apprennent mieux avec une animation accompagnée d‟une narration qu‟avec une animation accompagnée de texte s‟affichant à l‟écran. Cela s‟explique par le fait que l‟association de l‟image et du son permet de répartir la charge informationnelle entre le canal visuel et phonétique (voir partie 1.3.2, page 8)
Principe de cohérence
Les personnes apprennent mieux lorsque les mots, images et sons étrangers hors sujet sont exclus.
Principe de redondance
Les personnes apprennent mieux avec seulement une animation et sa narration qu‟avec une animation et la narration sous-titrée.
Principe de signalisation
Les personnes apprennent mieux lorsqu‟il existe des indications concernant l‟organisation/la structure de la présentation.
Principe de contigüité spatiale
Les personnes apprennent mieux lorsque le texte est placé près de l‟image correspondante.
Principe de contiguïté temporelle
Les personnes apprennent mieux lorsque texte, son et image correspondants apparaissent simultanément.
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Principe de personnalisation
Les personnes apprennent mieux lorsque le style de langage utilisé est le langage courant plutôt que le langage formel.
Principe de la voix
Les personnes apprennent mieux lorsque la voix utilisée est une vraie voie humaine plutôt qu‟une voie synthétique ou d‟accent étranger.
Principe des différences individuelles
Les efforts en matière de design précités ont un effet plus marqué auprès du public n‟ayant pas de connaissances préalables et auprès des personnes ayant une mémoire visuelle.
Cependant ces recommandations ne suffisent pas. Elles n‟intègrent notamment pas les aspects
liés à l‟interactivité. Les travaux de Brétancourt (2007) sur les effets de l‟interactivité sur
l‟apprentissage permettent de compléter cette approche.
● Le principe de contrôle : Donner à l‟apprenant, lorsqu‟il travaille seul face à l‟écran, le
contrôle sur le déroulement d‟une animation multimédia a un effet positif sur la
compréhension (cf. page 55).
● L’effet « split-interaction » : Le principe précédent n‟est plus vrai dans le cas d‟un
apprentissage à plusieurs devant le même écran. En effet, le fait d‟interagir avec le dispositif
multimédia et avec un ou plusieurs autres apprenants provoque une surcharge cognitive
préjudiciable à la compréhension.
4.2.2. Au niveau macropédagogique : un choix stratégique des outils
à mettre en œuvre
Nous avons vu tout au long de la présente étude qu‟il existe une grande diversité d‟outils
multimédia utilisables à des fins éducatives dans le domaine des sciences et techniques. Cela
constitue à la fois un avantage et un inconvénient pour le concepteur de ce genre d‟outils. En
effet, contrairement à un éditeur de livres scolaires qui va se contenter de faire imprimer son
ouvrage et d‟en faire la promotion dans les catalogues du CNDP (Centre National de
Documentation Pédagogique), un acteur du multimédia éducatif va devoir envisager son projet
dans un cadre plus large. L‟un des facteurs du succès de la Cité des Sciences et de l‟Industrie
réside dans la diversité des outils multimédias utilisés : des expositions présentielles interactives,
des sites internet d‟expositions virtuelles, des vidéos de conférence en ligne et des podcasts. Il
nous semble que cette approche est particulièrement pertinente car elle permet :
o de toucher un public large, ce qui constitue la mission première d‟un centre de culture
scientifique et technique ;
o une approche multimodale des sujets scientifiques, ce qui aide l‟apprenant à porter un
regard critique ;
o une fidélisation du public avec des contenus souvent renouvelés ;
o et enfin l‟association d‟éléments gratuits et payants à la base d‟un business-model efficace
permettant l‟engagement de l‟organisme sur la durée.
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4 déclinaisons multimédia du thème de l’énergie à la Cité des Sciences et de l’Industrie
4.2.3. Un nouveau jeu d’acteurs
Au sein de la diversité d‟acteurs agissant dans le domaine de la culture scientifique et technique,
il nous que de nouveaux rôles et de nouvelles collaborations sont en perspective.
● Le médiateur : lorsqu‟il y a en a un, ce dernier devient plus une personne ressource qu‟un transmetteur de savoirs pour ses apprenants ;
● Les apprenants : ils deviennent plus autonomes et responsables de leur apprentissage ;
● La communauté scientifique : son expertise dans le cadre d‟un projet multimédia éducatif est essentielle mais cette participation doit dépasser le seul stade du conseil et de l‟expertise. La communauté scientifique peut s‟adresser directement aux citoyens de façon compréhensible et attractive. Elle doit saisir cette opportunité pour devenir un porte-parole de référence sur tous les sujets qui la concernent. Les chercheurs doivent prendre le devant de la scène ;
● Les entreprises éditrices de contenus multimédia voient apparaître de nouveaux marchés à saisir en matière de production de contenus mais aussi de formation des utilisateurs aux outils et technologies. Elles pourraient à terme détrôner les éditeurs papier dans le cœur des enseignants ;
● Les acteurs dans le domaine des loisirs scientifiques (musées scientifiques et parcs à thème) deviennent de nouveaux lieux de référence en matière d‟éducation et développent avec enseignants et pédagogues une offre spécifiquement dédiée au secteur éducatif ;
● L‟institution scolaire devient un acteur essentiel pour le contrôle et l‟accréditation des outils au sein d‟une offre foisonnante et disparate.
Nouvelles collaborations : L’institution scolaire, la recherche scientifique, le secteur des loisirs scientifiques et
le secteur des entreprises et producteurs de contenus multimédia éducatifs mutualisent de plus en plus leurs expertises et outils.
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Le jeu « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! » au salon de l’agriculture 2008.
Photo : M. Barral, 2008.
L’émission E=M6. Photo : M6, 2008.
4.2.4. De nouvelles perspectives d’interaction avec les médias
tradit ionnels
Au sein de ce jeu d‟acteurs, l‟offre de contenus
multimédia est foisonnante et encore très instable et
disparate. Il nous semble que de plus en plus
d‟interactions vont se développer entre les médias
traditionnels (livre, télévision, radio…) et les médias
numériques. A ce titre le secteur audiovisuel mérite une
attention particulière car il a atteint une grande maturité
en matière de vulgarisation scientifique, comme
l‟illustrent les émissions à succès E=M6 et c‟est pas
sorcier qui affichent une longévité rare dans un secteur à l‟offre régulièrement renouvelée. C‟est
un secteur qui a su développer une réelle expertise en matière de transposition des contenus
scientifiques pour délivrer un message adapté au grand public, sans pour autant en dénaturer le
sens. C‟est pourtant un secteur qui ne valorise pas encore au maximum les potentialités offertes
par le multimédia. Il nous semble donc que les émissions de vulgarisation scientifique vont
connaître un essor très important en nombre, mais aussi en matière de déclinaison multimédia
sous forme de sites éducatifs très complets et d‟animations interactives dans les musées
scientifiques.
4.3. Applications à un cas réel : Le jeu éducatif
«bien dans mon assiette, bien sur ma planète !»
4.3.1. Contexte
Le jeu éducatif « bien dans mon assiette, bien sur ma
planète ! » est un jeu de plateau éducatif visant à
sensibiliser les enfants de 8 à 12 ans aux enjeux
environnementaux liés à notre alimentation. Réalisé
par le Céréopa pour le salon international de
l‟agriculture 2008, il a depuis été testé auprès de plus
de 1000 jeunes, en France et en Angleterre.
Ce jeu présente l‟originalité de présenter un double
enjeu
● Un enjeu personnel : chaque joueur doit
composer un repas équilibré pour préserver sa santé,
● Un enjeu collectif : les joueurs doivent faire des choix alimentaires ayant un impact
environnemental limité en matière d‟émissions de gaz à effet de serre.
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Le jeu « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! » aux journées Terrena Poitou, Avril 2008. Photo : M. Barral, 2008.
Les éléments du jeu « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! »
Le jeu fonctionne sur le principe d‟un jeu de l‟oie avec les informations nutritionnelles et
environnementales des aliments qui s‟affichent sur un diaporama associé. Le jeu mêle décision et
hasard :
● Le joueur lance le dé pour faire avancer son pion,
● Le joueur choisit, lorsqu‟il est sur une case, de prendre un aliment ou non.
4.3.2. Quelles sont les l imites du jeu dans sa version actuel le ?
Malgré les intérêts du jeu d‟un point de vue pédagogique, nous voyons trois limites majeures
dans sa version actuelle.
● Une expérience de jeu peu réaliste
Le hasard est une des composantes essentielles d‟un jeu de société. En effet pour un jeu destiné à
être utilisé plusieurs fois par un même joueur, la présence d‟un élément permettant de ne pas
reproduire à chaque fois la même stratégie est essentielle. Mais cela éloigne le jeu d‟une
situation réelle. Dans la vie, nos choix alimentaires sont arbitrés par différents facteurs : budget,
temps et santé. Cet élément est essentiel pour permettre au joueur de transposer ce qu‟il a
appris au cours du jeu dans la réalité.
● Espaces pour la communication non verbale limités
Dans un jeu de société, en dehors des règles du jeu, qui doivent être très succinctes, la forme
matérielle du jeu limite les espaces disponibles pour donner des explications complémentaires.
Cela pose un problème d‟un point de vue
pédagogique. Dans le jeu « bien dans mon
assiette, bien sur ma planète », il faut
expliquer les facteurs à l‟origine du profil
nutritionnel et environnemental de chaque
aliment. A l‟heure actuelle, cette tâche est
assurée par l‟animateur.
● Un jeu nécessitant un encadrement
Nous venons d‟expliquer que la présence
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d‟un animateur était essentielle pour le jeu dans sa version actuelle. Cependant face à une
demande croissante de la part des enseignants et d‟organisations professionnelles pour utiliser le
jeu, cela constitue une charge que l‟équipe du Céréopa ne pleut plus assurer par manque de
ressources humaines, même en formant d‟autres animateurs. Le dispositif a donc atteint ses
limites et pourtant le succès connu par le jeu mérite la poursuite de sa diffusion.
4.3.3. Quelles propositions pour un jeu multimédia ?
Une version du jeu multimédia pourrait-elle résoudre les trois limites évoquées précédemment ?
● Scénariser le jeu pour rendre l’expérience plus réaliste
L‟avantage d‟un jeu multimédia est qu‟il permet plus facilement de raconter une histoire avec
des images, de la vidéo, des voix, des personnages animés, etc. Nous proposons donc de mettre
le joueur dans une situation concrète de choix alimentaire : au supermarché. Donc au lieu de
présenter les aliments autour d‟un plateau, nous proposons de les représenter dans un rayon de
supermarché. Le joueur est derrière son caddie et doit faire ses courses en un temps limité. Il
nous semble important d‟opter pour un style humoristique dans le graphisme et les illustrations
sonores.
● Plusieurs niveaux d’information
Sur un support multimédia il est possible de proposer des informations sur différents niveaux.
Entendons par là le fait de permettre à l‟utilisateur d‟approfondir une question selon ses besoins
en cliquant sur des contenus qui vont donner des explications sous forme de texte, de vidéo,
etc. Nous proposons donc de fournir les informations relatives aux caractéristiques des aliments
au travers de deux petits personnages : le Professeur Marotte pour les informations
nutritionnelles et le Professeur Carbono pour les informations environnementales, un peu à
l‟image des personnages Eco et Dug dans l‟exposition « The Science of Survival ».
● Un jeu diffusable auprès d’un large public
Le Céréopa lance un site internet éducatif à destination des enseignants et du grand public sur
l‟alimentation et l‟environnement au mois de Février 2009, pendant le salon de l‟agriculture. Le
jeu pourra être diffusé sur ce même site. Cela permettra son utilisation par les établissements
scolaires avec le seul encadrement de l‟enseignant qui pourra par ailleurs trouver sur le site
d‟autres éléments (fiches pédagogiques, vidéos, animations, etc.) permettant de prolonger son
cours sur la même thématique.
● Un jeu adapté pour être joué seul et en groupe
Le jeu de plateau est conçu pou 3 à 6 joueurs. Nous proposons deux versions du jeu multimédia.
o La première sera la version « un joueur ». L‟impact collectif des choix alimentaires
réalisés par ce dernier sera estimé par le calcul de l‟impact global si six joueurs avaient
fait des choix identiques.
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o La deuxième, destinée aux établissements scolaires, sera la version « multi-joueurs ».
Elle permettra de calculer l‟impact résultant des choix effectués par tous les joueurs.
Ecran-type du jeu « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! » en version multimédia
● Pour quels coûts de développement ?
Pour un jeu d‟une durée de cinq minutes environ, nous estimons le coût de développement du
jeu à 31800 €, pour 38 journées de travail. C‟est un projet qui s‟étendrait sur trois mois environ
depuis le premier contact avec l‟agence responsable du développement jusqu‟à la mise en ligne
du jeu.
Estimation des coûts de développement du jeu « bien dans mon assiette, bien sur ma planète ! »
Le jeu sera intégré dans un site interne éducatif, lui-même associé à une exposition itinérante. Il
constituera donc une composante d‟un projet global d‟éducation au développement durable.
Tâche Tarif/jour (€)
jours total (€)
1 Pré-étude 800 5 4 000
2 Conception
Rédaction du cahier des charges 800 3 2 400
Direction artistique/recherche graphique 800 2 1 600
Spécifications techniques 800 2 1 600
3 Production
Rédaction des contenus 400 8 3 200
Développement flash et base de données 600 10 6 000
4 Post-production
Tests et corrections 600 2 1 200
Aspects juridiques 1 000
Imprévus 1 500
Frais de structure 2 100
5 Manangement du projet 1 200 6 7 200
TOTAL 38 31 800
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Conclusion
Pour conclure la présente étude il nous semble qu‟au moment où le système éducatif est très
remis en cause et où la communauté scientifique a besoin de regagner la confiance des citoyens,
de nouvelles perspectives sont offertes par les technologies multimédia. Elles offrent aux
sciences la possibilité de prendre forme, de prendre vie et parfois même devenir un jeu, pas
seulement pour les enfants !
Le rôle que peut jouer la communauté scientifique, non plus seulement en tant « qu‟expert » de
contenu mais en acteur à proprement parler, qui s‟adresse directement aux citoyens, constitue
peut-être le premier pas d‟une réconciliation entre la science et la société.
On peut déjà présager l‟ère de la télé 2.0 où les acteurs du petit écran raconteront la science sur
écran géant à la cité des Sciences et de l‟Industrie, sur tableau blanc interactif en classe, sur la
Wii, etc. Les sciences et techniques auront alors atteint une nouvelle dimension culturelle…
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Bibliographie et webographie
Sites et documents internet
Action commerciale, le site des managers commerciaux. « Les serious games sont de merveilleux
outils de formation ». Interview d‟Olivier Lombart, Pdg de Netdivision. 27/10/2008 [réf. du 4
LEVY-LEBLOND Jean-Marc. Pour des centres culturels scientifiques et techniques. L'Esprit de sel,
Points Seuil, 1984.
MAYER Richard. The Cambridge Handbook of Multimedia Learning. Cambridge University Press.
New York, 2005.
PAIVIO Allan. Mental representation : A dual coding approach. Oxford University Press, New York,
1986.
PAPERT Seymour. Jaillissement de l'esprit - ordinateurs et apprentissage. Flammarion, 1999.
PAPERT Seymour. L'Enfant et la machine à connaître - repenser l'école à l'ère de l'ordinateur. Dunod,
1994.
SCULLEY John. De pepsi a apple. Grasset, 1988.
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Lexique
B2I
En février 2001, le ministère de l'Éducation nationale a déposé la marque "B2i - Brevet informatique et internet". L‟objectif de ce brevet est d'attester le niveau acquis par les élèves dans la maîtrise des outils multimédias et de l'internet. Source : Educnet (http://www.educnet.education.fr/formation/certification/b2i)
Ent
Un Espace Numérique de Travail est un point d’accès, dans ou hors de l'établissement
scolaire, aux emplois du temps, cahiers de texte, notes, ressources documentaires ou éléments
de cours mis à disposition par les professeurs. Un ENT permet aussi de travailler en
Podcast (de iPod, nom déposé et de l'anglais broadcast, émission) Émission de radio ou de télévision qu'un internaute peut télécharger et transférer sur un baladeur numérique ; fichier correspondant. Source : Larousse en ligne (http://www.larousse.fr/)
Rip
La marque "Reconnu d'intérêt pédagogique par le ministère de l'Éducation nationale" est destinée à guider les enseignants dans le monde du multimédia pédagogique. Un logo permet d'identifier les logiciels et les créations multimédias qui, après expertise par des enseignants et spécialistes du domaine, et par décision de la commission multimédia, répondent aux besoins et aux attentes du système éducatif. Source : Educnet (http://www.educnet.education.fr/contenus/dispositifs/rip)
RSS
Really Simple Syndication
Fichier XML mis à jour en temps réel. Il reprend automatiquement soit les titres, soit le texte
intégral, d'un site d'actualité ou d'un blog. Le flux RSS peut ensuite être inclus et affiché sous
forme de liens cliquables dans une page web tierce ou par un logiciel spécialisé.
2. Equipement informatique et accès à internet dans les établissements scolaires
3. Un peu de science-fiction… ou de prospective ? La frise chronologique des technologies de l‟éducation
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1. Quelques définitions
du mot « multimédia »
Un rapide passage en revue de diverses définitions du terme « multimédia » montre à quel point
ce mot revêt des acceptions diverses selon les auteurs :
Définition Source
Technique qui combine, pour une utilisation simultanée et interactive, textes sons et images fixes ou animées ; matériels et produits qui offrent cette combinaison.
Larousse de poche 2005
Se dit d‟une application, d‟un service, d‟un appareil utilisant plusieurs médias (image, son, vidéo…), le mot média étant pris dans son étymologie voulant dire "moyen de relier".
Ensemble des caractéristiques d'un ordinateur lui permettant de gérer d'autres médias que le texte : images fixes ou animées, sons...
Glossaire de l‟académie de Grenoble http://www.ac-grenoble.fr/savoie/Info/glossaire/glossaire2.htm
Il existe tout un tas de définitions, qui arrangent tour à tour les commerciaux, les utilisateurs, les fabricants, ou les médias (trouvé sur le Net : «nebulous marketroid term meaning audio and visual stuff»). Le multimédia est tout de même ce qui concerne le traitement simultané de l'image, du son et des informations en général.
Linux France http://www.linux-france.org/prj/jargonf/M/multimeacdia.html
Dans son acception la plus générale, le multimédia permet d'accéder à n'importe quel type d'information (écrite, sonore, visuelle), à n'importe quel moment et sur n'importe quel support (récepteur de télévision, micro-ordinateur, communicateur personnel). Dans les faits, sa définition est plus restreinte. Il s'agit de la réunion sur un même support de fichiers contenant du texte, du son, des images fixes ou animées et organisés au moyen d'une programmation informatique. Une autre caractéristique fondamentale est l'interactivité, qui qualifie les matériels, les programmes ou les conditions d'exploitation permettant des actions réciproques en mode dialogué avec des utilisateurs ou en temps réel avec des appareils.
Encyclopedia Universalis en ligne http://www.universalis.fr/corpus2-encyclopedie/117/0/T523705/encyclopedie/MULTIMEDIA.htm
Source : Information and Communications Technologies (ICTs) in Schools, European commission Information
Society and Media, Septembre 2006.
Total France Totale Europe 25 Primaire Secondaire Supérieur Professionnel
Ordinateurs pour 100 élèves 12.5 11.3 8.1 11.4 19.7 25.1
… dont connectés à internet 8.9 9.9 4.8 10.0 14.0 18.2
Pourcentage d'écoles ayant…
Ordinateurs pour l'enseignement 99.3 98.7 99.2 100.0 100.0 98.8
Accès à internet 90.3 96.2 88.4 99.4 100.0 97.5
Accès haut débit 74.8 66.9 70.3 96.2 87.6 90.2
Un site internet 29.0 63.0 20.6 64.8 86.5 82.6
Une adresse e-mail pour la majorité des
enseignants67.8 65.2 65.4 76.6 67.4 77.4
Une adresse e-mail pour la majorité des
élèves19.0 23.5 15.4 29.6 26.0 41.3
Un réseau 21.7 55.2 16.9 42.5 64.2 56.7
Un intranet 24.9 40.8 16.7 59.7 60.5 70.2
Un contrat de maintenancer externe 30.1 47.1 27.7 43.4 36.7 53.1
Pourcentage des écoles utilisant les
ordinateurs en éducation dans…
les salles informatiques 66.2 80.5 59.5 95.6 100.0 96.3
les classes 76.7 61.4 76.9 74.8 69.3 72.9
les centres de documentation 36.5 33.4 23.9 86.9 93.9 89.6
autres lieux accessibles aux élèves 11.7 27.0 7.4 27.9 41.9 45.5
Niveau scolaire
Densément peuplé Intermédiaire Faiblement peuplé bas débit haut débit
Ordinateurs pour 100 élèves 14.0 9.7 12.3 15.8 12.4
… dont connectés à internet 10.0 7.6 8.2 8.7 9.5
Pourcentage d'écoles ayant…
Ordinateurs pour l'enseignement 98.9 98.0 100.0 100.0 100.0
Accès à internet 84.9 91.4 92.8 100.0 100.0
Accès haut débit 81.0 82.4 68.5 0.0 100.0
Un site internet 37.8 25.5 25.6 20.7 34.5
Une adresse e-mail pour la majorité des
enseignants54.5 74.0 72.7 74.9 75.1
Une adresse e-mail pour la majorité des
élèves18.7 21.7 18.0 18.5 21.5
Un réseau 28.6 18.4 18.9 14.8 26.0
Un intranet 37.6 22.8 18.7 13.3 30.5
Un contrat de maintenancer externe 41.2 29.6 24.2 12.7 37.6
Pourcentage des écoles utilisant les
ordinateurs en éducation dans…
les salles informatiques 80.4 69.5 57.3 34.1 74.4
les classes 74.3 76.5 78.0 91.6 73.5
les centres de documentation 48.8 34.4 30.6 16.1 43.6
autres lieux accessibles aux élèves 14.3 11.5 10.2 9.8 12.5
Localisation géographique Accès à internet
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3. Un peu de science-fiction…
ou de prospective ?
La frise chronologique ci-dessous a été créée par des étudiants de l‟université de l‟Illinois suivant
des cours de technologies éducatives, d‟enseignement assisté par ordinateur et de nouvelles
technologies.
2009 Première classe entièrement automatisée (Sh. Regan)2010 Le e-Trapper, l‟outil scolaire “tout-en-un”, est introduit dans les écoles (S. Cooper)
2020
> Introduction du bureau automatique individuel pour les étudiants (M. Sennert)
> Les étudiants apprennent l‟histoire avec la réalité virtuelle (G. Henke)
2036 La classe virtuelle est introduite pour la première fois dans une école publique (Ju. An)
2084 Les enfants apprennent avec des robots (A. Jamshidi)
2203 Des auxiliaires d‟apprentissage holographiques sont introduits dans les classes (T. Barcalow)
La frise chronologique des
technologies de l’éducationSource : Bertram C. Bruce University of Illinois at Urbana-ChampaignDisponible sur : http://www.isrl.uiuc.edu/~chip/projects/timeline/
2112 Des sorties de terrain dans des espaces virtuels sont introduits dans les écoles (George Gerrietts)