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N° d'ordre: 4214 Année 2010
THÈSE
présentée à
L'UNIVERSITE BORDEAUX-I
Par M. M’hammed MERBOUH
pour l’obtention du grade de DOCTEUR
SPÉCIALITÉ : MECANIQUE ET INGENIERIE
CONTRIBUTION A LA MODELISATION DU COMPORTEMENT RHEOLOGIQUE
DES
ENROBÉS BITUMINEUX Influence des conditions extrêmes de
température
et de trafic en fatigue
Soutenue le 21 décembre 2010 Devant la commission d'Examen : Pr
Christophe Petit..............L3MSGC..U de
Limoges.........................................Rapporteur Mr
Pierre Hornych ......Directeur d'unité Manège de fatigue, HdR LCPC
…Rapporteur Pr Belkacem Draoui............Université de Bechar
Algérie................................Examinateur Pr Denys
Breysse................GhyMac.U.
Bordeaux1.................................Directeur de thèse Mme
Sylvie. Yotte………..........McF GhyMac U.
Bordeaux1..........................Examinateur Mr Touhami
Abdelhamid …....McF HdR..U. de Bechar……………… ..….Examinateur Mme
Fatima Allou……………..McF L3MSGC U. de Limoges……………… ….Invitée
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Remerciements
Arrivé au bout de ce travail effectué au sein du laboratoire
Géoscience Hydraulique et Matériaux de Construction, à l’université
Bordeaux-1, je tiens à exprimer ma sincère reconnaissance à
l’ensemble des personnes qui m’ont permis de le mener à terme.
Je tiens à remercier tout d’abord Denys Breysse, Professeur à
l’université Bordeaux-1, mon directeur de thèse, de m’avoir intégré
à son équipe au sein du GHyMaC, pour m’avoir mis le pied à l’étrier
pour toute les parties de ce travail, de m’avoir fait bénéficier
aussi bien de ses conseils et compétences scientifiques que ses
qualités humaines, et me donner toute l’autonomie nécessaire pour
mener à bien ce projet et sans qui ce manuscrit ne serait pas ce
qu’il est, ainsi pour ses réponses à mes nombreuses « petites
questions ». Merci à mon frère, amis et co-encadreur, le défunt Pr
N. Laradi, qui nous a quitté depuis 2007. Que dieu l’accepte dans
son paradis.
Je remercie les rapporteurs, le Pr. C. Petit et Mr Pierre
Hornych, pour avoir expertisé avec attention ce manuscrit ainsi
qu’aux membres du jury.
Je suis reconnaissant à C. Such et E. Chailleux pour m’avoir
accueilli dans leur unité LMR au sein de la division MSC, lors de
mon séjour en plusieurs reprises au LCPC-Nantes pour les essais
rhéologiques et mécaniques sur bitumes. A L. Moriceau au
LRPC-Bordeaux lors de mon stage pour essais de fatigue sur enrobé.
Je souhaite remercier J. Riss directrice du laboratoire GHyMaC de
m’avoir facilité les procédures administratives.
Je voudrais remercier S. M. Elachachi pour ses conseils et ses
compétences scientifiques, à S. Yotte, H. Niandou, Pr R. Fabre,
M.C. Lavenier et J. Chambert pour leur soutien, leur bonne humeur
lors de mon séjour au GHymac et leur disponibilité offrant un bon
cadre de travail.
Sans oublier mes collègues doctorants, j’ai beaucoup apprécié
leur joie de vivre, les nombreuses pauses et discussions notamment
leur soutien. Ces quelques années sont pour moi inoubliables.
Je ne saurais exprimer tout l’amour et la reconnaissance que
j’ai pour mes parents, ma femme, et mes enfants, pour la paine qui
l’ont pris pour moi, ainsi que le soutien qu’ils m’ont apporté,
pour m’avoir donné leurs moyens, leur patience et sacrifice depuis
le début de réaliser mon devoir et ma passion.
Enfin un merci affectueux à B. Z. qui est le pilier
indispensable à ce travail.
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RESUME
La stabilité et la durabilité des chaussées routières et
aéronautiques en enrobé bitumineux dépendent principalement de sa
résistance aux sollicitations, dans le temps et sur le site pour
des conditions spécifiques extrêmes, telles que les particularités
de climat dans les différentes régions et les chargements des
nouvelles conceptions d’avions très gros porteurs.
Ces types de sollicitation entraînent des dégradations
dangereuses dans les couches de roulement et demeurent des
préoccupations majeures des maîtres d’ouvrages, en particulier avec
l’accroissement de l’agressivité du trafic.
Les simulations en laboratoire de ces phénomènes ont montré que
les qualités viscoélastiques du bitume sont fonction des variations
extrêmes de la température que subit la couche de surface. Elles
influent directement sur les propriétés rhéologiques et mécaniques
de l’enrobé. Les déformations permanentes et le durcissement du
bitume sont associés à une perte de résistance et un vieillissement
accéléré dus aux cycles thermiques.
En ce qui concerne les sollicitations sous trafic en fatigue,
les lois de comportement déterminées prouvent que les grandes
amplitudes de déformations et la forme des signaux tandem
endommagent sévèrement la couche d’enrobé en comparaison avec les
signaux classiques.
L’évaluation des propriétés rhéologiques et mécaniques
intrinsèques de ces matériaux, sous l’influence des conditions
extrêmes de climat et de trafic, permet de mieux prévoir
l’évolution du comportement in situ de l’enrobé et la durée de vie
des chaussées.
Mots clés : bitume, enrobé, variation de température, tandem,
cycles, comportement, fatigue.
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TABLE DES MATIERES
TABLE DES MATIERES………………………………………………………………05
INTODUCTION GENERALE…………………………………………………………10
CHAPITRE I :
COMPOSITION ET COMPORTEMENT DES BITUMES ET ENROBES ……..…12
1- INTRODUCTION…………………………………………………… …………..…12
2- COMPOSITION, STRUCTURE ET PROPRIETES DES
BITUMES……….....13
2.1.- Origine et grandes catégories…………………………………….………………13
2.2.- Structure colloïdale du bitume…………………………………………………...13
2.3.- Caractéristiques chimiques du bitume…………………………………………..
17
2.3.1.- Séparation par
précipitation…………………………………………………....17
2.3.2.- Séparation par chromatographie
d'adsorption…………………………............18
2.3.3.- La chromatographie sur gel perméable
(GPC)………….……………………..19
2.3.4.- La spectroscopie infra–rouge………………………………..…………………20
2.4.- Propriétés thermo-physiques des
bitumes……………………….……………….20
3 - METHODES DE MESURE DES PROPRIETES RHEOLOGIQUES………....21
3.1.- Les différentes familles
d’essais………………….……………….……….…….21
3.2.- Les essais « technologiques » ………………………….………………. ….…..
21
3.2.1.- Mesure de la fragilité…………………………….……………. ….….………21
3.2.2.- Mesure de la pénétration……………………………..…………… .……….…22
3.2.3.- Mesure du point de ramollissement………………………….…..
……………23
3.2.4.- Influence de la température sur les
propriétés……………..…………..………23
3.3.- Essais mécaniques………………………………………… ……………………28
3.3.1.- Essais à vitesse imposée………………………………………… ……………29
3.3.2.- Essai à charge imposée………………………………………….. ……………..31
3.3.3.- Essai de module complexe………………………………………… ……….…34 3.3.4.-
Mesure de la viscosité………………………………………………………….37
3.3.5.- Présentation des résultats : isothermes et
isochrones……………….………….37
4- LES MODELES DE COMPORTEMENT………………………..………………38
4.1.- Les familles de modèles…………………………………………… ……………38
4.2.- Influence de la composition sur la rhéologie des
bitumes……………....… …… 40
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5- CARACTERISATION ET FORMULATION DES ENROBES
BITUMINEUX………………………..……………… …………………..……………41
5.1- Méthodes de formulation basées sur les essais mécaniques
traditionnels…….… 42
5.2- Méthodes de formulation basées sur les essais mécaniques «
modernes » …...… 42
5.2.1.- Essai de module complexe……………………………………………. ………42
5.2.2.- Essais de fatigue ………………………………………...… ………….………43
5.2.3.- Essais de fluage dynamique……………………………..…………… .………44
5.3.- Méthodes analytiques de formulation………………………..…….……………
44
6- INFLUENCE DES CARACTERISTIQUES DES LIANTS SUR
LES PROPRIETES MECANIQUES DES ENROBES……..……….………………44
6.1.- Rôle de la température, fragilité, rigidité et
viscosité……………….….……… 45
6.2.- Propriétés rhéologiques et spécifications……………………………….……….
45
6.3.- Du liant à l´enrobé : prévision du module et de la
résistance…………….………46
6.4.- Influence du bitume sur la fatigue des
enrobés…………………….…………....47
6.5.- Résistance aux déformations permanentes et
orniérage…………….…………....48
7- EVOLUTION ET VIEILLISSEMENT DES BITUMES… ……….……………...48
7.1.- Mécanismes de vieillissement et facteurs
influents……………...……………….48
7.1.1.- Le vieillissement physique……………………………….…..…….…… ……49
7.1.2.- Le vieillissement chimique…………………………….………….…… ………49
7.2.- Essais de vieillissement accéléré des
bitumes………….…………………………50
7.2.1.- Essai RTFOT (Rolling Thin Film Oven Test)
……………..….…….………… 50
7.2.2.- Autres essais de vieillissement du
bitume……………………….….…………. 51
8- FATIGUE MECANIQUE DES ENROBES BITUMINEUX…… …...……………53
8.1- Comportement en fatigue des chaussées
bitumineuses…………....………………53
8.1.1.- Les chaussées : structures soumises à des chargements
répétés….……… …….53
8.1.2.- Phénomènes résultant de la fatigue…………………………….…………… …
55
8.1.3.- L’essai normalisé de fatigue et son
exploitation………………..……… ………56
8.2.- Paramètres influençant le comportement en
fatigue…………….….……… …….61
8.2.1.- Effet du mode de sollicitation et critère de
rupture…………….…….…… ……62
8.2.2.- Effet de l’échauffement………………………………………...… …… ………62
8.2.3.- Effet de la forme du signal et de la fréquence de
sollicitation…….…… ………63
8.2.4.- Effet de la température d’essai……………………………….….……...
………64
8.2.5.- Effet du temps de repos………………………………………...… …… ………67
9- CONCLUSION …………………………………………..…….……… …………….67
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CHAPITRE II :
ESSAIS RHEOLOGIQUES ET MECANIQUES SUR BITUMES FATIG UES
THERMIQUEMENT…………… …..……………………………………………….....70
1- INTRODUCTION……………………………………………………………….....70
2- CARACTERISATION DU COMPORTEMENT VISCO-ELASTIQUE DE
BITUMES FATIGUES THERMIQUEMENT: ESSAIS DE FLUAGE-
RECOUVRANCE…………………………………………………………………….71
2.1.- Phénomène de fatigue thermique et conséquences sur les
propriétés du bitume.71
2.2.- Fatigue thermique et fissuration des chaussées :
expression des besoins…….…73
2.3.- Etat de l’art sur la fatigue
thermique…………………………………………....74
2.4.- Approche expérimentale des effets de la fatigue
thermique……………………76
2.4.1.- Matériau……………………………………………………… …...…………76
2.4.2.- Programme expérimental : simulation de la fatigue
thermique……………...76
2.4.3.- Programme expérimental : essais de
fluage-recouvrance…………………....78
2.5.- Analyse des résultats expérimentaux………………………………….………..
81
2.5.1.- Procédure de traitement de la réponse des
échantillons……………………...81
2.6.- Analyse des résultats – influence de la fatigue
thermique………………………91
2.6.1.- Identification en fluage et
analyse…………………………………………….91
2.6.2.- Analyse du modèle en recouvrance……………………………………
..….99
2.7.- Analyse des résultats – influence du phénomène de
gel-dégel…………..…….102
2.7.1.- En fluage……………………………………...……………… …….……….102
2.7.2.- En recouvrance……………………………………...……………….………104
2.7.3.- Conclusion sur l’effet du
gel-dégel…………………………….…………….105
2.8.- Influence du phénomène
d’échauffement/refroidissement…….………..…….105
2.8.1.- En fluage……………………………………………………….………….....105
2.8.2.- En recouvrance…………………………………………...…….……………108
2.8.3.- Conclusion sur l’effet
d’Echauffement/refroidissement………………...……108
3- COMPORTEMENT EN TRACTION UNIAXIALE DES BITUMES F ATIGUES
THERMIQUEMENT…………………………………… ………..……….…………109
3.1.- Introduction…………………………………………………………….……....109
3.2.- Approche expérimentale du comportement en traction
uniaxiale….…….…….110
3.2.1. - Matériel d’essai………………………………………… …….….…………110
3.2.2.- Programme expérimental………………………………………………….....112
3.3.- Analyse des résultats
expérimentaux…………………………………………..114
3.3.1.- Types de comportements observés………………………………
…………..114
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8
3.3.2.- Influence de la vitesse de sollicitation………………….………
……………118
3.3.3.- Exploitation synthétique des
résultats………………………….……….……120
3.3.4.- Influence de la fatigue thermique……………………………….…………
...127
3.4.- Conclusions sur le comportement uniaxial en
traction…………..……………..129
4- CONCLUSION GENERALE: EFFET DE LA FATIGUE THERMIQ
UE...….129
CHAPITRE III :
FATIGUE MULTIPIC SOUS SOLLICITIONS MECANIQUES
A GRANDE DEFORMATION………………………….………………….……..……132
1- INTRODUCTION………………………………….…………….…… .…..………132
2- ENJEUX ET OBJECTIFS……………………….……………….……..………....133
3- APPROCHE EXPERIMENTALE DE LA FATIGUE SOUS
CHARGEMENT COMPLEXE… ………………………………………………........135
3.1.- Moyens expérimentaux……………………………………………… …………135
3.1.1.- Le matériau…………………………….……….…..… .……………………135
3.1.2.- Eprouvettes et sollicitations
expérimentales………………………………...136
3.1.3. Matériels d’essai……………………………….…………… ….……………142
3.1.4.- Caractérisation des éprouvettes - mesure du module
complexe….…… ……144
3.1.5.- Programme d’essai de fatigue à grande déformation…………………
…….145
3.1.6.- Mesure du module complexe : effet de la fréquence…..…………
…………146
4. PROCEDURE DE DEPOUILLEMENT DES ESSAIS…………….… ……….....149
4.1.- Analyse des sollicitations effectives…………...…………………….….………
149
4.1.1.- Des essais individuels aux caractéristiques de la loi de
fatigue…….… .……149
4.1.2.- Des enregistrements bruts aux résultats
consolidés…..….……….… ………150
4.2.- Procédure de traitement des résultats sur un
essai…..…………….…… …......153
4.2.1.- Détermination de la durée de vie………..…………………….……
…….....154
4.2.2- Détermination du niveau de déformation….………………..….……
………155
5. - ANALYSE DES RESULTATS EXPERIMENTAUX… …….…….…… ………157
5.1.- Droites de fatigue pour l’ensemble des essais…………………….….…
…….....157
5.2.- Effets de la fréquence et de la forme du signal
tandem………………… ……….161
5.3.- Analyse de l'agressivité de la sollicitation en
tandem…………..……… .………163
6. - CONCLUSIONS…………..………………..……………..…………… ………… 165
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9
CHAPITRE IV :
MODELISATION DE L’EFFET DES VARIATIONS JOURNALIERES
DE LA TEMPERATURE… …...……………………………………….………………...167
1- INTRODUCTION……………..…………………………………………………167
2- POSITION DU PROBLEME……………………………………………………168
3- APERÇU HISTORIQUE……………………...…………………………………169
4- EQUATIONS DE BASE POUR LE COMPORTEMENT
THERMO-MECANIQUE DES BITUMES ET ENROBES……………………...1 71
4.1- Sollicitation thermique………………………………………………………....171
4.2- Equation de la chaleur………………………………….………………………174
4.3- Coefficient de dilatation/contraction thermique
linéique……………………....174
5- COMPORTEMENT THERMOMECANIQUE AU COURS
D’UN CYCLE DE GEL…………………………………..…………………………177
5.1- Modélisation numérique de l’évolution de la température au
cours
d’un cycle de gel……………………………………………………………….……177
5.2- Analyse thermomécanique au cours d’un cycle de
refroidissement…………...178
5.2.1- Retrait thermique empêché…………………………………………………178
5.2.2- Contrainte thermique…………………………………………… …………178
5.2.3- Procédure de calcul de la contrainte
thermique……………….……………181
5.3- Simulation des cycles thermiques………………………………………………191
5.3.1. Simulation d’un refroidissement brusque, progressif
suivie
d’une stabilisation de la température…………………… ……………..…………191
5.3.2- Cas d’une variation sinusoïdale de la
température………..………………..202
6. ANALYSE QUALITATIVE ET QUANTITATIVE
DES RESULTATS - BILAN………………………………………………………...214
7- CONCLUSION………………………………………… …………………..…… 215
CONCLUSION GENERALE………………..………………….…..…………………217
ANNEXE A1 :
Courbes de traction directe sur bitumes……………………………………………222
ANNEXE A2.a- :
Courbes de déformation et de raideur……………………………………………...226
ANNEXE A2.b- :
Critères de fatigue, Lois de
fatigue………………………………………………....244
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10
INTRODUCTION GENERALE
La croissance économique agressive des pays a engendrée un
développement très important des moyens et des infrastructures de
transport, même dans les zones à climat spécifique, telles que les
régions sahariennes chaudes ou à climat continental et les régions
froides. Ainsi, plus récemment, le besoin aux engins de transport
géants assurant de grandes capacités à conduit à des modifications
significatives dans la conception des appareils.
Cependant les aspects dimensionnement et optimisation du choix
des matériaux routiers, en particulier le liant bitumineux, reste
pratiquement limité. Il suffit d’observer la surface de certaines
chaussées à faible trafic, mais situées dans des régions à fortes
amplitudes thermiques journalières ou saisonnières, pour constater
qu’elles sont parfois le siège de graves dégradations dés les
premières années de mise en service. Ce phénomène s’est en plus
aggravé par l’intensification du trafic et des charges supportées
par les structures de chaussée, étant due en particulier à
l’accroissement du trafic Poids Lourds. Ces dégradations
préoccupent les maîtres d’ouvrages et posent un gène voire des
risques aux usagers, la durabilité et la rentabilité des
investissements sont un défit permanent.
Le comportement mécanique en contrainte-déformation du bitume et
enrobé dépond des conditions de chargement « thermiques et
mécaniques), comme il dépond aussi de son histoire (thermique et
mécanique).
Il apparaît donc nécessaire d’approfondir les connaissances
concernant les propriétés des bitumes et enrobés, ainsi que leur
évolution dans le temps, qui permettra à terme de formuler des
enrobés durable dans leur environnement climatique et suffisamment
performant face aux exigences modernes.
Cette étude décrit la simulation en laboratoire de deux
phénomènes de fatigue sur bitume et sur enrobés. Le premier
concerne l’effet cyclique des variations de la température sur le
bitume, souvent rencontrés dans les régions à climats spécifiques.
Le deuxième s’intéresse à la reproduction de l’effet cyclique des
grandes déformations, sur l’enrobé, imposées par les nouveaux
avions très gros porteurs.
Dans le matériau composite, le liant bitumineux est l’élément le
plus sensible aux effets thermiques. Lors de la caractérisation des
bitumes soumis à la fatigue thermique deux types d’essais ont été
réalisés, l’essai de fluage-recouvrance et l’essai de traction
directe à froids « DTT », pour évaluer les différences de
comportement en fonction des plages thermiques d’une part et le
nombre de cycle de température de l’autre part.
La proposition d’un modèle analologique cohérant a permis
d’analysée et de déduire les paramètres de la réponse
viscoélastique des bitumes testés en fluage-recouvrance, ainsi que
le comportement en traction directe à basse température et la
rupture ductile/fragile sont également étudiées. Une comparaison
des résultats conduit à des constations qui expliquent les
différences enregistrées entre les bitumes fatigués thermiquement
et le bitume neuf à l’origine.
A fin de déterminer l’effet des grandes intensités sur les
couches d’enrobé de surface, des
essais de fatigue mécanique ont été effectués sur des
éprouvettes prismatiques d’enrobé bitumineux de classe « 0/6 »,
selon la méthode française. La dépendance de la réponse du
-
11
matériau à l’amplitude et au type de chargement (sinus ou
tandem) est prise en compte dans le programme expérimental, par la
variation de l’intensité et la profondeur du creux entre les deux
extrêmes d’un tandem.
De l’autre coté des lois de comportement en fatigue sont
établies dans des conditions de chargement dynamique analogues à
celles que subit la chaussée sous l’effet d’un gros essieu tandem,
afin d'étudier la relation entre ce dernier et un essieu
classique.
Une simulation numérique de l’évolution des contraintes
thermiques a été établie, selon un
modèle simple de Burger, lors des variations brusques, monotones
et sinusoïdales de la température dans le but de l’estimation des
contraintes générées.
L’ensemble de cette thèse s’inscrit dans le cadre de
collaboration entre le laboratoire de
génie civil à l’université de Bechar et le laboratoire GHyMAC à
l’université Bordeaux-1. Le LCPC Nantes et le LRPC-Bordeaux sont
également associés à cette étude dans la mesure où la majorité des
essais ont été réalisés.
Ce mémoire de thèse est constitué de quatre chapitres : Le
premier chapitre est entièrement consacré à une étude
bibliographique sur les
propriétés physiques, thermo-mécaniques, rhéologie et quelques
modèles rhéologiques, évolution des bitumes issus de la
littérature, ainsi que les essais de fatigue sur enrobés bitumineux
sont présentés en fin de chapitre.
Le deuxième chapitre présente l’étude expérimentale consacrée au
traitement des
échantillons de bitume par différents types de cycles
thermiques, suivi par deux types d’essai de caractérisation. Des
essais de fluage-recouvrance ont été réalisés, dont on a proposé un
modèle rhéologique dit de Jeffrey et qui consiste en un modèle
viscoélastique simple à trois éléments, il permet de décrire
facilement et efficacement le phénomène de fluage-recouvrance des
bitumes. Egalement des essais de traction directe ont été effectués
afin d’étudier la réponse de ces échantillons à basse température.
Certaines caractéristiques à la rupture des liants testés ont été
étudiées en réalisant des essais sous des vitesses de déformation
constante. Finalement, des comparaisons entre les différentes
courbes peuvent conduire à des constatations très utiles sur
l’effet de ce phénomène et l’évolution des bitumes sur site.
Le troisième chapitre est consacré à des essais de fatigue sur
éprouvettes trapézoïdales en
enrobés bitumineux. Des essais de flexion deux points à grandes
déformations, la forme du signal (tandem) et la profondeur du creux
entre les deux extrêmes, ont également été développés. L’effet de
l’amplitude du tandem, ainsi que de la fréquence en mode sinus ont
pu être étudiés et comparés.
En quatrième chapitre, le comportement des enrobés bitumineux en
retrait thermique
empêché a été simulé numériquement, prenant en considération
l’évolution des propriétés viscoélastiques du matériau en fonction
des différents types de variations de la température (brusques,
monotones et cycliques). Cette méthode constitue un outil simple de
prévision du comportement de l’enrobé bitumineux sous diverses
sollicitations thermiques. Le modèle rhéologique de Burger a permit
de faire le lien entre les caractéristiques viscoélastiques de
l’enrobé et le phénomène du retrait empêché.
Enfin, une conclusion générale reprend les principaux résultats
ainsi que les évolutions
possibles de nos développements.
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12
CHAPITRE I
COMPOSITION ET COMPORTEMENT
DES BITUMES ET ENROBES
1- INTRODUCTION
L’asphalte a été utilisé sous forme de liant hydrocarboné depuis
l’antiquité, il y a plus de 5000 ans. En particulier pour le génie
civil, le bitume naturel a été employé généralement comme adhésif
dans des mortiers ou en tant qu'un agent d'imperméabilisation dans
certaines parties des bâtiments. Au cours du 19ème siècle,
l'utilisation du bitume s’est répandue dans les techniques
routières.
Les bitumes sont devenus aujourd’hui des matériaux de haute
technicité, et il existe un
nombre très important de gammes variées et même certains
additifs commerciaux, minéraux ou organiques, dans le but
d'améliorer leurs qualités selon les propriétés recherchées.
Actuellement l´utilisation principale du bitume est la technique
routière.
Le bitume présente des propriétés de grande complexité à la fois
sur le plan de sa
composition chimique et de sa réponse aux sollicitations
mécaniques. Il possède un grand pouvoir adhésif pour agglomérer les
matériaux minéraux et les empêcher de désunir sous les diverses
sollicitations. Les variations importantes de sa viscosité avec la
température permettent un mélange adéquat avec les granulats lors
des différentes étapes de fabrication et de mise en œuvre de
l’enrobé et par conséquent une bonne stabilité lors de
l’exploitation de la chaussée, sous sollicitation, mécanique,
thermiques et climatiques.
Les performances demandées aux bitumes sont généralement
antinomiques et sont essentiellement basées sur leurs propriétés
rhéologiques, pour garantir la durabilité des chaussées. Il est
demandé par exemple au bitume d’avoir une viscoélasticité
convenable durant tout le temps d’exploitation, dans le domaine le
plus large des températures de service extrêmes, pour éviter sa
fissuration.
Les essais de point de ramollissement, pénétrabilité, Fraass et
de viscosité donnent des indications satisfaisantes sur la
susceptibilité et la fragilité du bitume, mais non suffisantes pour
identifier son comportement viscoélastique. Les propriétés du
bitume déterminent principalement les variations de la rigidité de
l’enrobé.
A haute température de service le bitume doit demeurer
suffisamment rigide pour maintenir le squelette granulaire et
limiter le fluage des enrobés, permettant d’éviter ainsi le
phénomène d’orniérage qui se manifeste typiquement autour de 50°C,
sous l’effet du trafic.
-
13
Enfin, il doit être suffisamment souple à basse température de
service pour permettre aux contraintes de se relaxer et résister
ainsi à la fissuration due au retrait thermique ou par fatigue.
Ces propriétés sont généralement difficilement conciliables,
sinon incompatibles, il est donc difficile d'obtenir un bitume
utilisable et durable sous tous les climats et trafics
possibles.
2- COMPOSITION, STRUCTURE ET PROPRIETES DES BITUMES
2.1.- Origine et grandes catégories
Le bitume de pétrole est obtenu par raffinage des pétroles
bruts. Il s’agit de la fraction la plus lourde obtenue après
distillation. Tous les bruts ne sont pas propres à produire du
bitume. Des bruts légers, dépourvus d’asphaltènes, peuvent avoir un
rendement insuffisant en bitume. Partant d’une qualité de brut,
divers modes de fabrication sont possibles, cependant ils
impliquent toujours le passage par la distillation.
Suivant les conditions d’emploi et les propriétés recherchées,
le bitume peut être utilisé pur ou en association avec d’autres
composants (modificateur, fluidifiants, fluxants, eau ou
émulsifiant) [AIP99], on définit ainsi les différentes catégories
:
- les bitumes purs spéciaux, modifiés ou naturels ; - les
bitumes industriels ou oxydés ; - les bitumes fluidifiés ou fluxés
obtenus par soufflage à l’air ; - les bitumes en émulsion.
Les deux premiers s’utilisent à chaud (T supérieure à 100 °C).
Pour avoir des viscosités
faibles (grande pénétrabilité), on a recours aux bitumes appelés
fluidifiants ou fluxés. Les bitumes fluidifiés sont des solvants
assez volatils, qui sont utilisés à des températures plus basses.
Les bitumes fluxés sont assez peu volatils (huile et huile de
pétrole), utilisés à des températures variables, mais souvent au
delà de 100°C.
Pour des viscosités trop faibles les bitumes émulsionnés peuvent
être utilisé à froids ou à températures intérmédiaires.
2.2.- Structure colloïdale du bitume
Dans l'enrobé, le bitume sert de colle à des granulats de forme,
de nature et de taille différentes; l’air et l’eau peuvent y
circuler à peu près librement. En ce milieu très hétérogène, le
bitume est soumis à des sollicitations mécaniques, chimiques et
physiques diverses et combinées. Dans ce cas que deviennent alors
les caractéristiques obtenues sur le produit pur ?
Le bitume peut être décrit comme une substance colloïdale, dans
laquelle les phases
dispersées, constituant des asphaltes sont couvertes par une
couche protectrice de résines. Ce complexe appelé micelle est
dispersé dans une phase continue de maltènes qui constituent un
mélange de huile aromatique et saturé [CLA91], [CLA92], [PLA02],
[TEU00]. Cette structure a été proposée dès les années 1920 par
Nellensteyn, qui fut ainsi le premier à décrire le bitume comme une
suspension colloïdale [RAM90].
Les asphaltènes sont des éléments solides, noirs ou bruns,
aromatiques. L’arrangement lâche des asphaltènes entourés par des
composantes aromatiques d’un bitume lui confère un
-
14
comportement de « type sol ». Le degré de peptisation des
asphaltènes influe directement sur la viscosité du bitume (plus
faible), les micelles résultantes ont une bonne mobilité dans le
bitume [SAA40], [PFE39] dont les propriétés rhéologiques sont
essentiellement newtoniennes à température ambiante.
Si la fraction d'aromatique/résine n'est pas présenté en
quantité suffisante au peptisés des
micelles les asphaltes peuvent s'associer plus loin. Ces liants
hydrocarbonés sont connus en tant que « type gel », dans ce cas les
asphaltènes sont moins peptisés que pour les bitumes de « type sol
». Ce caractère peut disparaître quand ils sont chauffés à haute
température. La viscosité des saturés, aromatiques et résines
dépend de leur distribution moléculaire respective [MOR95],
[COR041]. Plus le poids moléculaire est élevé, plus la viscosité de
la phase continue, c.-à-d. les maltènes confèrent au bitume une
viscosité intrinsèque qui est augmentée par la présence de la phase
dispersée (les asphaltènes). Les propriétés rhéologiques de ces
bitumes à température ambiante sont nettement non-newtoniennes.
Dans la pratique, ils existent des liants hydrocarbonés qui
présentent un caractère
intermédiaire, appelé « sol-gel » [GAW00], [TEU00]. La teneur en
asphaltènes a une incidence très importante sur les propriétés
rhéologiques d’un bitume : leur augmentation conduit au
durcissement du bitume qui devient plus visqueux, de plus faible
pénétration et de point de ramollissement (TBA) plus élevé.
Fig. I. 01- Représentation schématique des deux types de
structures de bitumes
Asphaltènes
Hydrocarbures aromatiques A haut poids moléculaire
Hydrocarbures aromatiques à bas poids moléculaire
Hydrocarbures naphténo-aromatiques
Hydrocarbures naphténiques et aliphatiques
Hydrocarbures saturés
Bitume type « SOL »
Bitume type « GEL »
-
15
Selon le caractère « sol » ou « gel » les propriétés diffèrent :
les bitumes sols présentent une excellente résistance aux
sollicitations rapides, mais ils sont plus sensibles que les
bitumes gels aux sollicitations lentes, ainsi qu’aux variations de
température [COR041].
Pour résumer, le bitume peut être décrit comme un matériau
hétérogène avec une phase de
maltènes et une phase d'asphaltènes [DJO96], [LES96]. La partie
dissoute- les maltènes - a l'aspect d'une huile visqueuse de
couleur foncée ; la fraction précipitée- les asphaltènes - est
constituée par de corps de poids moléculaire très élevé [PFE50].
Les maltènes se comportent comme un fluide parfaitement visqueux
(fluide newtonien). La présence des asphaltènes confère aux bitumes
des propriétés caractéristiques de l'état colloïdal.
Pour l'analyse de structure d'un bitume, de nombreuses
difficultés peuvent être
rencontrées, comme la nature du produit, tel que le grand nombre
des molécules, et les écarts de composition. L’identification
chimique d’un bitume passe alors par la détermination qualitative
et quantitative de ses constituants principaux ou groupes
génériques (saturés, aromatiques, résines et asphaltènes). Il est
aussi impératif d’apprécier la façon dont ces molécules vont
s’associer pour former une structure spatiale tridimensionnelle qui
donne au bitume ses propriétés physiques et mécaniques. Selon le
modèle de Yen [YEN81], les molécules d’asphaltène sont dans un état
associé soit sous forme de micelles (entité élémentaire de quelques
feuillets de molécules), soit sous forme de paquets de micelles
qu’on appelle agglomérats. Les forces qui lient ces paquets sont de
type hydrogène, dipolaires induites ou permanentes (fig. I.01).
Les maltènes ne dissolvent pas entièrement leurs micelles et
leurs agglomérats; il en
résulte une dispersion plus ou moins forte selon la composition
de la phase maltènes. Les molécules isolées constituent la phase
continue, les micelles et les agglomérats la phase dispersée. Le
bitume est donc un milieu colloïdal complexe dans lequel se crée un
équilibre:
molécules ↔ micelles ↔ agglomérats.
Cet équilibre est caractérisé par un indice d’instabilité
colloïdal (IC) selon Gaestel
[GAE71]:
)()sin(
)()(
sAromatiqueesRé
SatuéssAsphaltèneI C +
+=
Plus la valeur de l'indice d'instabilité colloïdal est élevée,
moins les asphaltènes sont
peptisés dans la phase maltanique. Les résines s’adsorbent sur
les asphaltènes et permettent leur dispersion dans le mélange
"aromatiques + saturés". Les aromatiques jouent le rôle de solvant
et les saturés de précipitant ou de floculant.
Les propriétés d’un bitume sont en relation avec sa composition
chimique. La présence
des résines et d’éléments polaires explique sa bonne adhésion
aux minéraux, la viscosité de celui ci est bien choisie et d’une
quand le matériau enrobé résiste au phénomène de désenrobage par
l’eau ou par la plupart des agents chimiques (étanchéité).
-
16
Fig. I.02.a- Coupe d’un modèle de micelles d’asphaltènes selon
Yen et Erdman [RAM90].
Fig. I. 02.b- Macrostructure des Asphaltènes selon Dickie et Yen
[RAM90]. A: molécule, B: micelle, C: agglomérat
C
B
A
Plages aromatiques polynucléaires
8 à 15 A°
16 à 20 A°
16 à 20 A°
3,55 à 3,70 A°
-
17
Fig. I. 03- Schématisation de la structure colloïdale d’un
bitume routier [LES02].
2.3.- Caractéristiques chimiques du bitume
La chimie du bitume est née avec les premiers travaux de
Boussingault, qui a séparé une fraction distillable qu´il a nommé «
pétrolènes », maintenant appelée plutôt «maltènes», et une fraction
non-distillable, les asphaltènes. Plus récemment, le développement
des techniques de chimie analytique a permis de mieux définir et
caractériser ses fractions, mais la séparation des bitumes en
maltènes et asphaltènes est encore très largement acceptée, avec
toutefois des méthodes d´obtention différentes.
L´analyse élémentaire d´un bitume révèle la domination des
atomes de carbone (typiquement 80 à 87 % massique) et d'hydrogène
(8-12 %). En outre, des hétéroatomes tels que le soufre (1-9 %),
l'azote (0- 1,5 %) et l'oxygène (0,5-1,5 %) et des traces de métaux
tels que le vanadium ou le nickel sont présentes [MER00]. Une bonne
partie de ces derniers est à l’état colloïdal ou sous forme de sels
[COR041]. Devant la complexité des mélanges bitumineux, il semble
judicieux de vouloir déterminer leur composition plus
précisément.
2.3.1.- Séparation par précipitation
La séparation par solvant la plus utilisée est celle qui permet
de séparer les bitumes en asphaltènes et en maltènes : les
asphaltènes constituent la partie insoluble des bitumes dans les
solvants de type n-alcanes, les maltènes la partie soluble. Ces
derniers sont séparés en résines, hydrocarbures aromatiques et
saturés (huile) par précipitation sélective ou par chromatographie
d'adsorption (figure II.03).
Les constituants des maltènes sont :
milieu inter micellaire (huiles saturées et
aromatiques)
particule d'asphalte
résine
-
18
- Les huiles : cette fraction est généralement soluble dans tous
les solvants organiques, elle représente 40% à 60% du bitume, sa
masse moléculaire moyenne est généralement relativement faible et
leur viscosité peu élevée.
Fig. I. 04 - Séparation d'un bitume en asphaltènes, résines et
huiles.
- Les résines : elles ont un caractère nettement plus
aromatique. La structure des résines est beaucoup plus complexe que
celle des huiles et leur masse moléculaire moyenne est plus élevée.
Les résines ont un rôle essentiel vis-à-vis la stabilité colloïdale
du bitume. Elles ont un rôle tensioactif qui permet de stabiliser
la dispersion d´asphaltènes dans la matrice maltène.
Les constituants des asphaltènes :
Les asphaltènes représentent de 10 à 30% des bitumes et leur
masse moléculaire est assez variable suivant l'origine du bitume et
selon qu'il a été soufflé ou non. Ils se présentent sous la forme
d'un solide dur friable, brun-noir qui contribue largement à la
couleur noir du bitume. Ce sont des composés très lourds à
structure condensée, cylindrique et aromatique. Les asphaltènes
sont considérés comme l'entité la plus responsable du comportement
rhéologique des bitumes.
2.3.2.- Séparation par chromatographie d'adsorption
Les techniques chromatographiques ont été les plus utilisées
pour l'étude chimique des bitumes. Dans la plupart des méthodes,
les asphaltènes sont préalablement séparés des maltènes par
précipitation. La chromatographie est alors faite sur la fraction
maltenique en solution dans les solvants de type n-alcane. C'est la
méthode de fractionnement sur colonne d'alumine mise au point par
Corbett, qui a servi de base à la séparation des bitumes en
fonction de la polarité des composés. Cette chromatographie
schématisée sur la figure I.04 sépare le bitume en quatre familles
génériques :
• saturé • aromatique • résine
BITUME
MALTENE (Solution)
ASPHALTENES (Précipité)
HUILES RESINES
-
19
• asphaltène
Fig. I. 05- Séparation d'un bitume en familles génériques selon
Corbett [COR67].
2.3.3.- La chromatographie sur gel perméable (GPC)
La considération du cas du soufflage, l’oxydation chimique
accidentelle (surchauffe à l’enrobage), le vieillissement
artificiel ou sur route sont des facteurs responsables de la
création des sites réactifs [BRU83].
L’équilibre : molécules micelles agglomérats
se déplace alors pour former des entités de grosses tailles
(micelles et agglomérats) et le caractère « gel » du bitume est
plus marqué.
La GPC est une technique qui permet d’obtenir une image de la
répartition des tailles moléculaires. Elle est suffisamment précise
pour classer les bitumes du point de vue leur
Bitume
Précipitation au n-heptane
Maltènes
CHROMATOGRAPHIE
Résines
Aromatiques
Saturés
Asphaltène
2) Benzène
3) Méthanol/Benzène 4) Trichloréthylène
1) n-Heptane
-
20
structure, mais ce n’est qu’en association avec d’autres
paramètres, telles que les propriétés rhéologiques et mécaniques,
qu’on peut décrire le comportement du liant dans un enrobé. La
chromatographie sur gel perméable est utilisée pour la séparation
de composés ayant des tailles moléculaires très différentes
(espèces présentes dans la phase malténique comme les bitumes), en
fonction de la polarité des solvants d’élution utilisés
[BEG03].
Le tableau suivant (Tab.I.01) résume les résultats trouvés par
certains auteurs sur la
composition chimique des bitumes Algériens en groupes génériques
(SARA), appréciée par la méthode Iatroscan (séparation et
détermination des familles génériques) ou par chromatographie
liquide [DEK96], [IDD98], [LAR962], [RAB96]:
BITUMES Saturés (%) Aromatiques (%) Résines (%) Asphaltènes
(%)
80 / 100 8.72 à 19.0 34.7 à 58.55 18.33 à 30.30 14.61 à 23.0
40 / 50 10.97 à 19.0 30.40 à 50.19 20.41 à 30.50 17.91 à
35.55
Tableau I. 01- Composition chimique des bitumes algériens selon
certains chercheurs algériens.
2.3.4. La spectroscopie infra–rouge
La spectroscopie infra–rouge est bien adaptée pour déterminer
les principales fonctionnalités des bitumes et leur évolution dans
le temps. Elle est principalement utilisée pour déceler la présence
de constituants chimiques de nature très différente de celle des
bitumes.
2.4. Propriétés thermo-physiques des bitumes
La densité: n’est pas très importante du point de vue
performance. Elle est utile dans les calculs des formulations. Elle
est mesurée à l’aide d’un pycnomètre entre 15 et 25°C. Elle vaut
généralement entre 1,0 et 1,10 et dépend du grade et de l’origine
du brut. Elle décroît sensiblement quand la température
augmente.
Les propriétés thermiques sont très importantes sur le plan du
comportement et
performance. Le bitume a une chaleur spécifique relativement
faible, dans l’ordre de 2,0 kJ / kg °C à 25°C (celle de l’eau est
de 4,18kJ / kg °C), qui croît faiblement quand la température
augmente (1,7 à 0°C et 2,15 à 200 °C). Le bitume ne requiert donc
pour augmenter sa température qu’une quantité d’énergie modérée. La
quantité nécessaire par °C décrit légèrement quand la température
augmente de 0 à 70°C.
Le bitume a en revanche une faible conductibilité thermique
(0,163 W/m °C à 20°C) et de
ce fait nécessite de grande surface de chauffe pour les
manipulations et l’enrobage (on peut dire qu’il est relativement
isolant). Il possède enfin un coefficient de dilatation volumique
relativement faible (de l’ordre de 0,00066 /°C) [BP09]. Lors de
l’enrobage et de la mise en
-
21
œuvre à très haute température, le bitume subit une légère perte
de masse liée au départ d’éléments volatils, ce qui explique en
partie le vieillissement du bitume.
3 - METHODES DE MESURE DES PROPRIETES RHEOLOGIQUES
3.1. Les différentes familles d’essais
Les essais rhéologiques sont effectués pour caractériser la
consistance, ils ont pour but de déterminer la température de
fragilité Fraass, les pénétrations à diverses températures,
l’indice de pénétrabilité qui en dérive et la détermination de la
TBA (température de ramollissement bille-anneau).
On peut aussi effectuer des essais mécaniques qui permettent de
mesurer des grandeurs
physiques définies (module, complaisance, viscosité…). On peut
distinguer :
* Des essais comportant un échelon de sollicitation créé
instantanément : - l’essai de relaxation, à déformation constante,
- l’essai de fluage, à contrainte constante, et sa recouvrance. Le
fluage comporte une partie dynamique ou fluage primaire, une partie
quasi-statique où l’écoulement est stationnaire ou fluage
secondaire, et une partie qui précède la rupture ou fluage
tertiaire [RAM90];
* Des essais à sollicitations périodiques, la déformation
sinusoïdale étant la sollicitation la plus simple et la plus
utilisée, permettant la mesure du module complexe.
On rencontre aussi dans la pratique différents essais à vitesse
de déformation imposée, des essais à vitesse d’élongation imposée,
des essais à vitesse de chargement imposée, etc… Les sollicitations
dans ces essais peuvent s’effectuer en traction, cisaillement,
flexion ou torsion.
Pour les bitumes, on utilise principalement la traction (à
froid) et le cisaillement (à chaud). Par contre pour les composites
(enrobés), on pratique des essais de traction, de compression et de
flexion.
3.2.- Les essais « technologiques »
Ces essais tendent à caractériser la consistance du liant et son
évolution en fonction de la température. Du point de vue
technologique, le passage de la zone élastique à la zone médiane
peut être défini par la température de fragilité, celui de la zone
médiane à la zone fluide par la température de ramollissement. Mais
en réalité les limites des zones de comportement dépendent
étroitement des conditions thermomécaniques des essais de
caractérisation. La consistance dans la zone intermédiaire peut
être caractérisée par la pénétration à diverses températures.
3.2.1.- Mesure de la fragilité
Le point de fragilité Fraass est la température pour laquelle un
film mince de bitume rompt sous l’effet d’une flexion dans des
conditions opératoires de fabrication et d’essais bien définies.
C’est un indicateur permettant de caractériser la fragilité du
bitume à basse température.
D'après les travaux de Van der Poel [BOU962], il s’agit d’une
température d’isoconsistance correspondant à un module de 100 MPa
pour un temps de charge de 11s et une pénétration de 1,25 dixième
de millimètre.
-
22
Selon le rapport du groupement de laboratoires européens
(rapport BitVaL) l’essai est discutable et à fidélité médiocre,
mais il est le seul à l’heure actuelle à permettre de caractériser
le maintien de l’élasticité du bitume lorsque la température baisse
[BIT02].
Ramond et Such [RAM90] précisent que, par expérience, on sait
que la zone critique où se présentent les phénomènes de fissuration
correspond à des liants bitumineux dont:
- la pénétrabilité est inférieure à 20 1/10ème de mm; - la
température de ramollissement est supérieure à 70°C ; - la
température de fragilité Fraass est supérieure à 0°C.
3.2.2.- Mesure de la pénétration
La pénétration est la profondeur d’enfoncement d’une aiguille
normalisée dans des conditions opératoires définies de température,
de charge et de temps. Sa valeur à 25°C est souvent employée pour
spécifier la qualité d'un bitume [ASTM25], [ASTM66]. Le bitume est
plus mou lorsque la température est plus haute, et la pénétration
plus forte. Pfeiffer [RAM90], a montré en 1936 l'existence d'une
relation linéaire entre le logarithme de la pénétration et la
température.
CATpen +=lg (1)
où A est la susceptibilité thermique. La valeur de A varie entre
0.015 à 0.06. On définit aussi l’indice de pénétrabilité IP :
AIP
IP50
10
20 =+−
ou encore A
AIP
501
50020
+−= (2)
Selon la susceptibilité à la température, l'indice de
pénétrabilité IP va de –3.0 (bitumes très
susceptible) jusqu'à environ +7.0 (bitumes moins susceptible). A
partir des mesures de pénétration à deux températures T1 et T2, les
valeurs de A et IP
peuvent être calculées :
21
2lg1lg
TT
penpenA
−−= (3)
La pénétration fonction du temps – relation avec la viscosité
Selon Saal [RAM90], le logarithme de la pénétration est une
fonction linéaire du
logarithme du temps de charge.
CtBATpen ++= loglg (4) Où A, B, C sont des constantes, T: la
température (°c), pen : la pénétration (1/10 mm).
-
23
Saal et Koens [RAM90], ont proposé une équation empirique
reliant la viscosité η à la
pénétration. Après une légère rectification cette formule peut
s'écrire comme suit :
Popen 16.2
101058.1 ×=η (5)
P0: pénétration de référence (1/10 mm).
Il est à noter que la pénétrabilité reste une propriété
empirique. Cela est particulièrement
constaté lors des essais, le taux de cisaillement à proximité de
l’aiguille de pénétration varie considérablement, la vitesse de
déformation est non linéaire, confondant ainsi l’effet de l’effort
et le taux de cisaillement [PET94].
3.2.3.- Mesure du point de ramollissement
La plus connue est le point de ramollissement de bille et
anneau, réalisée dans des conditions opératoires de fabrication et
d’essai bien définies. Selon Van der Poel [BOU962], il s’agit d’une
température d’isoconsistance correspondant à un module de 0,01MPa
pour un temps de charge de 0,4s et une pénétration de 800 dixièmes
de millimètre. Autour de cette température, la viscosité du bitume
peut varier d’une façon très importante.
Le point de ramollissement TBA des bitumes, peut être exprimé en
terme de pénétration, à
la fois par extrapolation linéaire de lg pen en fonction de T,
et par mesure directe à la température TBA.
TBAT
penA T
−−= 800lglg (6)
A: la susceptibilité thermique TBA: température de
ramollissement de bille et anneau [°c]. Pour des températures
supérieures à la TBA, la viscosité d'un bitume varie fortement
avec
la température, comme l’exprime la relation de Williams, Landel
et Ferry (WLF) [RAMO90]; qui a été utilisée avec succès pour toutes
sortes de fluides :
( )
ref
ref
ref TTY
TTX
−+−−
=ηη
lg (7)
refη : viscosité de référence.
refT : température de référence.
Dans cette expression, les facteurs X et Y sont des constantes
pour un liquide donné.
3.2.4.- Influence de la température sur les propriétés.
Le bitume a une très large et progressive plage de variation de
la consistance avec la température. Cette variation caractérise la
susceptibilité thermique.
-
24
La susceptibilité thermique est définie comme le changement de
consistance, de la raideur ou de la viscosité d’un matériau en
fonction de la température, elle est généralement quantifiée par
les paramètres calculés à partir de mesures de cohérence
(consistance) prises à deux températures différentes [PET94]. Les
chaussées souples ou les liants bitumineux sont soumis à une large
gamme de températures de service.
Bon nombre de problèmes observés sur les chaussée en résulte
clairement de la grande dépendance Température-Variations-
Consistance, la température de susceptibilité est souvent proposée
comme moyen de caractérisation du bitume. En revanche, on rencontre
des difficultés majeures dans l’analyse et l’interprétation de ce
paramètre. Les propriétés rhéologiques du bitume sont fonctions du
temps de chargement et de la température, la susceptibilité
thermique est un paramètre basé sur des mesures à différentes
températures, mais aussi sous les mêmes temps de chargement. En
revanche, ce paramètre sera confondu avec le temps de chargement
comme c’est le cas avec la TBA, la pénétrabilité,… les mesures sont
combinées pour créer une température, un IP.
Idéalement, les paramètres rhéologiques utilisées devrait être
parfaitement distincts et l’effet de la température doit être
largement indépendant du temps et des plages thermiques sur
lesquelles ils sont calculés.
• Abaques de rigidité
Ces abaques ont été utilisés pour estimer la raideur du bitume
sans accès directe aux mesures de laboratoire. Ils sont déduits à
partir des données des essais classiques sur bitume.
L’IP a été initialement développé par Pfeiffer et Van Doormaal
[PFE36] et fut plus tard utilisée par Van der Poel [POE54], qui a
réalisé des essais au fluage dynamique sur des mélanges denses bien
compactés pour l’élaboration d’un monogramme de prédiction de la
rigidité. Il a indiqué que la rigidité de l’asphalte et la
concentration en volume des fines dans les agrégats. Sur la base
des résultats de ce test, il a développé un abaque dont on peut
raisonnablement estimer la raideur du bitume à température
ambiante, ainsi que le point de ramollissement et l’IP, si le
chargement est lent.
Heukelom et Klomp [HEU64] ont modifié ce nomogramme par
l’inclusion des mesures de pénétration à trois températures pour
corriger l’IP.
Le diagramme d'Heukelom représente la variation de la
consistance en fonction de la température. On y reporte [RAM90]: -
la température de fragilité Fraass Fr (pour P= 1,2 dixième de
millimètre), - les pénétrations P, - la TBA (pour P = 800 dixièmes
de millimètre), - les mesures de viscosité aux températures
élevées, consistance. La pente, la variation de pente et cassures
éventuelles donnent des informations très importantes sur la
structure et le comportement du liant. - la consistance.
McLeod [LEO76] ensuite a adapté la méthode d’Heukelom en
proposant la notion de
PVN (Pen-Vis Number), qui est un autre paramètre de sensibilité
à la température, au lieu de l’IP. Ce paramètre est basé sur la
pénétration à 25°C et la viscosité à 135°C ou à 60°C, qui sont
habituellement des données requises. Le PVN est déterminé à partir
de la formule suivante :
-
25
)5,1(−−−=ML
LXPVN (8)
D’où
X : le logarithme de la viscosité en centistokes mesurée à 135°C
L : le logarithme de la viscosité à 135°C pour un PVN de 0,0 L : le
logarithme de la viscosité à 135°C pour un PVN de -1,5
Les valeurs de L et M peuvent être lu à partir d’un graphique
développé par McLeod qui
donne la pénétration à 25°C vis-à-vis la viscosité à 135°C pour
deux bitumes typiques. Ce graphique contient deux lignes avec les
valeurs PVN allant de 0,0 à -1,5. Plus la valeur de PVN est grande,
plus sa sensibilité à la température augmente. La plupart des
bitumes ont un PVN entre 0,5 et -2,0.
Une différence notable est enregistrée entre l’IP et le PVN,
l’IP change au cours du vieillissement, mais le PVN reste
relativement constant.
Ces méthodes indirectes de détermination de la raideur ont leurs
limites, mais peuvent etre utilisées avec prudence pour des
estimations préliminaires.
Ces chercheurs ont eux aussi reconnu la confusion entre les
effets du temps et de la température qui est indispensable dans le
calcul de l’IP, mais ils ont constaté que, dans la plus part des
cas, la dépendance au temps ou au type rhéologique du liant
[PFE94].
A des températures plus de 80°C, le bitume se présente sous la
forme d’un liquide newtonien peu visqueux. Il devient solide
vitreux élastique et fragile à température négative, en passant par
des états intermédiaires qui appartiennent au domaine dit
viscoélastique (linéaire et non linéaire).
Donc la consistance peut être caractérisée par différentes
caractéristiques et grandeurs mécaniques. Elles sont fonction des
deux paramètres physiques qui sont la température et le temps
d’application des charges [COR041].
Les choses peuvent être encore plus compliquées avec l’IP si on
prend en considération la dépendance du phénomène de vieillissement
au changement de la température. En revanche, la notion du PVN, qui
demeure inchangé avec l’âge, semble être invalide avec ce type de
liant. On constate que l’effet du temps et le comportement
rhéologique est dominant. Selon Anderson et al. [AND91],
l’évaluation traditionnelle des paramètres de sensibilité à la
température pour la caractérisation des liants est rejetée.
Les abaques développés par différents chercheurs proposent un
moyen de calcul de la raideur à différentes températures. Ces
abaques fournis des estimations raisonnables de la rigidité de
l'asphalte à des températures supérieures à la température
ambiante; cependant, ces estimations fournies donnent des erreurs
considérables à des températures plus basses. Compte tenu de la
faible fiabilité de ces abaques et leur incertaine applicabilité
aux différents types de liants (modifiés, vieillis, recyclés,…),
des mesures plus directes de la rigidité sont indispensables.
La susceptibilité cinétique ou dynamique est liée aux variations
de ces propriétés dans le temps sous chargement mécanique
(mouvement des véhicules). Dans la pratique les durées
d’application de ces charges varient de quelques fractions de
seconde à plusieurs heures.
-
26
Cette grande susceptibilité (thermique et cinétique) du bitume
influence directement le comportement à long terme et la résistance
du matériau enrobé.
Bien que la quantité de liant bitumineux dans le mélange soit
faible par rapport aux composants minéraux, il apporte au mélange
la susceptibilité thermique et la susceptibilité cinétique. La
susceptibilité thermique et cinétique du mélange bitumineux se
traduisent sous forme d’un changement de ses propriétés´es
m´mécaniques: le module de rigidité, la r´résistance aux
d´déformations permanentes,... en fonction de la température et du
temps d’application des charges.
Des essais de lois de chargement sinusoïdale dans le domaine
fréquentiel ou monotone, mettent en évidence les variations du
module de rigidité |E*|(module du module complexe, paragraphe
3.3.3) des matériaux bitumineux suivant les température et les
fréquences de chargement, paramètres qui influencent le plus la
valeur du module de rigidité, plus la température et/ou la durée de
sollicitation sont élevées plus le module de rigidité est
faible.
L’angle de phase φ, paramètre caractérisant le déphasage entre
le chargement fréquentiel
et la déformation, varie également avec la température. Il
augmente avec la température jusqu’à une valeur de température
palier puis diminue au-delà. Cela peut être expliqué par le fait
qu’au-delà d’une certaine température, le bitume devient
suffisamment fluide pour ne plus intervenir dans la rigidité du
mélange, il joue le rôle de lubrifiant entre des grains minéraux et
le comportement tend vers celui d’un matériau granulaire non lié
[COR05].
Le module de rigidité du mélange est influencé également par les
paramètres de composition. La teneur en liant influence la
compacité du mélange, son augmentation conduit à une augmentation
du module de rigidité du mélange jusqu’`a une valeur optimale et
au-delà de cette limite, le module diminue [MOU91]. L’augmentation
du volume relatif de granulats donne un module de rigidité plus
´élevé [JAC96]. Il est également observé que la diminution de la
teneur en vides va améliorer le mélange avec une rigidité plus
´élevée et une susceptibilité thermique plus faible [SOL76],
[MOU92].
La relation entre le module de rigidité des mélanges bitumineux
|E*| et les propriétés du
liant, en particulier le module de rigidité du bitume Ebit, est
pertinente. Jackson [JAC96] donne une évaluation de |E*| à partir
de Ebit dans la zone où ce module est relativement élevé. A une
température et une fréquence donnée, plus le bitume est dur et plus
le module de rigidité du mélange est élevé [FRA77], [ROC94]. E* en
fonction de Ebit pour différents mélanges [JAC96].
La résistance des matériaux bitumineux à l’orniérage dépend
également de la température. Aux basses températures, le bitume est
rigide, la résistance de cohésion des éléments est alors élevée, le
mastic contribue à rigidifier le mélange, et la résistance du
mélange est élevée. A température élevée, le bitume devient plus
visqueux (Figures I. 06 et I. 07), la force de cohésion est alors
affaiblie, la résistance à la déformabilité du squelette granulaire
ainsi que du mastic est diminuée, le mélange devient beaucoup plus
déformable. A températures faible on constate une rigidification
des matériaux bitumineux.
-
27
Fig. I. 06 : Comportement en compression simple, selon la
température [YAN97]
Fig. I. 07: Comportement en traction simple, selon la
température [YAN97]
Selon les essais réalisés par Erkens sur des enrobes bitumineux,
le niveau de déformation permanente est également sensible aux
durées d’application des charges. Les essais de
compression simple à différentes vitesses de chargement, Fig. I.
08, montrent que plus la vitesse est faible, plus le niveau de
déformation atteint est élevé [ERK98].
-
28
Fig. I. 08 : Essais de compression simple à différentes vitesses
[ERK98]
3.3.- Essais mécaniques
Les propriétés peu courantes du bitume et la complexité de sa
composition ont d'abord conduit à introduire des essais empiriques
destinés à repérer les différentes variétés obtenues, mais
l'importance et la multiplicité des applications qui en sont faites
ont ensuite amené producteurs et utilisateurs à l'étudier plus
complètement.
Les moyens modernes d'investigation ont permis d'analyser
l'influence de la composition sur les propriétés physiques et de
s'orienter ainsi vers des qualités répondant mieux aux besoins des
utilisateurs. L'étude des propriétés viscoélastiques a permis de
comprendre la signification d'essais empiriques utilisés
jusqu'alors et de les relier à des notions fondamentales. Elle a
également permis de caractériser du comportement mécanique des
bitumes au même titre que celui des autres matériaux de
construction, tels que le béton ou les métaux.
Le bitume pur est considéré comme matériau continu isotrope.
Selon les hypothèses de la viscoélasticité linéaire les
caractéristiques mécaniques restent indépendantes du niveau de
sollicitation. Les variables contrôlées sont la température, le
temps et les niveaux de contraintes ou de déformation
On distingue les essais selon la manière dont les sollicitations
sont appliquées en fonction
du temps : - Essais sous charge ou déformation constante
(fluage-relaxation) ; - Essais à vitesse de chargement ou
déformation imposée ;
-
29
- Essais à chargement sinusoïdal (module complexe). Les types de
géométrie d’échantillon sont différents et donc permettre l’étude
de plusieurs
modes de sollicitation.
TYPES DE SOLLICITATION Charge
constante Déplacement
constant Vitesse de
déformation constante
Chargement sinusoïdal
Fluage Viscosité
Relaxation Viscosité Module complexe
Flexion
x
Traction Compression
x
x
x
Cisaillement
x
x
x
x
Torsion
x
x
Tableau I.02 : - Types et modes de sollicitation pour l’étude
des bitumes
3.3.1.- Essais à vitesse imposée
Ils se subdivisent en [WHO80]: - essais à vitesse de déformation
imposée : c’est le cas de la plupart des viscosimètres cône-plateau
ou cylindre-cylindre. Ils s’effectuent le plus souvent, pour les
bitumes, aux températures ambiantes avec des géométries
cône-plateau; - essais à vitesse d’allongement imposée : c’est le
cas des presses de traction ou des ductilomètres.
L’essai de traction directe s’effectue sur des presses
uniaxiales. Les éprouvettes en forme de I sont soit coulées dans
des moules aux formes prédéterminées, soit découpées à partir de
films d’épaisseur donnée. Cette dernière est imposée lorsque les
échantillons sont des mélanges macroscopiquement hétérogènes.
Le DTT avait été originalement introduit en 1992 dans le cadre
du système d'origine de
spécification SuperPave concernant les liants, il est utilisé
pour mesurer les propriétés du liant bitumineux lors de la rupture
en traction à basse température. Après plusieurs modifications, un
nouvel essai DTT de Superpave a été introduit en 1995. Ce système
améliorer utilise un fluide pour le contrôle de la température et a
été procurer de donner des résultats plus précis [DON97].
-
30
Lors de l'essai DTT on applique une charge de traction uniaxiale
à l'échantillon dans une enceinte à environnement contrôlé, ce qui
simule le chargement.
Dans cet essai, l’échantillon est placé dans l’environnement
d’un fluide, maintenu à la température désirée et tiré en traction
jusqu'à la rupture. Le système de Spécification SuperPave est conçu
pour déterminer l’allongement à la rupture afin de s'assurer
qu'elle est au environ de 1% à 10%, où la zone de transition
fragile/ductile peut être définie.
La rupture est définie, dans le cahier des charges SuperPave sur
les liants, comme le point
de la courbe de traction lorsque la l’effort atteint son maximum
(Fig. I. 09). Elle peut se produire lorsque l’échantillon se
fissure comme dans la courbe B, ou
l’éprouvette continue à s’étirer après avoir passer par le
maximum comme dans les courbes C et D. Ces spécifications sur les
liants routiers indiquent que l’allongement minimale à la rupture
doit être supérieure à 1%, donc, la courbe A sera moins importante
conformément à la spécification [AND94].
Fig. I. 09 : Différents types de courbe lors d’un essai DTT,
selon Imad Al-Qadi [QAD08]
Ces essais ne peuvent se réaliser que dans le domaine de
températures où le liant possède encore une cohésion suffisante.
Pour les températures comprises entre –10 et +10°C, des essais de
traction classiques peuvent être réalisés sur des éprouvettes
semblables à celles déjà citées. L’essai est conduit à une vitesse
imposée de 100 ou 1 mm/mn jusqu’à la rupture. Cependant, on est
capable de déterminer certains paramètres utiles. Les courbes
effort-allongement sont conventionnellement exploitées en termes de
cohésion et d’énergie de cohésion (Norme AFNOR). En règle générale,
ces valeurs d’énergie conventionnelles permettent de distinguer les
bitumes purs des mélanges physiques de bitume et de polymère en
concentration suffisamment élevée.
-
31
L’essai de rupture à basse température (SHRP) est réalisé à
1mm/mn, pour des taux de déformation allant de quelques 10-3 à des
valeurs maximales de 4 à 5.10-2. Ce type d’essai a été développé
pour caractériser le comportement à basse température en traction
des liants bitumineux, mais les résultats restent dispersés et
n’ont pas encore été bien corrélés avec le comportement sur route
en régions très froides [COR041].
Contrainte (MPa)
3.5
3.0
2.0
1.0
0 20 40 60 80 100 Temps (s)
Fig. I. 10 :- Courbe de traction SHRP d’un bitume 50/70 à deux
températures θθθθ
Plus les températures sont basses, elles conduisent à des
ruptures fragiles. Quand elles sont élevées, la ductilité du liant
augmente et engendrent des ruptures ductiles [MAI05].
3.3.2.- Essai à charge imposée
Il s’agit principalement des essais de fluage et de relaxation:
[DER83], [SUC86], [SUC54].
• Essai de fluage
On peut utiliser des sandwichs, pour mesurer le fluage sur les
bitumes entre:
* deux disques plats; * un cône et un plateau; * deux cylindres
coaxiaux; - tournant l’un dans l’autre; - coulissant l’un dans
l’autre; * deux lames parallèles, etc.
Une contrainte σ est engendrée par une charge connue. Le
déplacement mesuré à l’aide d’un capteur permet de calculer la
déformation ( )Tt,ε et l’on a :
( ) ( )TtJTt ,, 0σε =
θ élevée
θ basse
-
32
Où J(t, T) est la complaisance en fluage.
Les résultats peuvent être représentés, pour une température
donnée, par une courbe de fluage (fig. I.11).
Fig. I. 11- Essai de fluage, comportement à déformation
imposée
L’essai de fluage en cisaillement est pratiqué souvent par des
rhéomètres plan-plan (disques), deux cylindres coaxiaux ou
cône-plateau. Dans le domaine des températures moyennes (25 à
60°C), on peut également utiliser un disque de bitume entre deux
plans, la régularité de l’épaisseur est appréciée.
Le fluage est un autre phénomène qui exprime les propriétés
visqueuses des matériaux
bitumineux [HIL73], [LOO74]. Les essais de fluage statique avec
ou sans confinement mettent en évidence des déformations qui
évoluent avec la durée d’application d’une charge constante (Fig.
I. 12).
Déformation
Contrainte
ε0
σ0
Temps
Temps
t0
t0
-
33
Fig. I. 12 : Essais de fluage statique [SOU94]
• Essai de relaxation On impose une déformation ε0 et on
détermine à chaque instant la contrainte σ(t, T), qui
en résulte. En viscoélasticité linéaire le module de relaxation
est donné par la relation : σ(t, T)= ε0 R(t, T) (9)
Sur les bitumes ces essais sont pratiqués après une rampe de
déformation (croissance rapide imposée). Les courbes expérimentales
de variation de la contrainte en fonction du temps présentent
rarement la forme attendue d’exponentielle décroissante qui
correspondrait au comportement newtonien [COR041].
Fig. I. 13- Essai de relaxation, comportement à déformation
imposée
ε0
σ0
Temps
Déformation
Contrainte
t0
Temps t0
-
34
3.3.3.- Essai de module complexe Le module complexe peut se
mesurer sur les bitumes [RAM85], [SUC54]: - à basse température, en
traction-compression sur des éprouvettes cylindriques. Le
module identifié en traction-compression est symbolisé par E ; -
à plus haute température, en cisaillement annulaire (cylindres
coaxiaux coulissant l’un
dans l’autre). On a alors le module de cisaillement symbolisé
par G. Pour les matériaux homogènes et isotropes [LAR961], [TEU00],
sachant que E est le
module d’Young, G le module de cisaillement et ν le coefficient
de Poisson : On a E= 2(1+ν)G,
E= 3G avec ν= ½ (10)
L'essai est réalisé en appliquant un déplacement ou une force
qui varie dans le temps selon
une fonction sinusoïdale. On impose la fréquence et l’intensité
(déformation ou contrainte maximale). La majorité des essais
s’effectuent à déformation imposée.
Les résultats peuvent être représentés soit par les isothermes
des parties réelles du module
G1 (f) et imaginaire G2 (f) en fonction de la fréquence, soit
par celle de la norme G (f) et de l’argument φ (f). Par ailleurs,
le fait d’avoir, pour chaque couple fréquence-température, deux
valeurs (partie réelle et partie imaginaire ou norme et argument)
permet, par élimination de la fréquence et de la température, de
tracer des représentations spécifiques au module complexe comme
:
La représentation Cole-Cole:
)),((),( 12 TfGgTfG = (11) La représentation de Black:
)),((lg),( TfGhTf =φ (12) L'avantage de ces représentations est
de résumer les propriétés rhéologiques sur une seule
courbe. Selon l'étude effectuée sur des bitumes Algériens de
classes 80/100 et 40/50, à l’aide d’un
viscoanalyseur de type METRAVIB, pour des fréquences de 7.8 à
250 Hz, en traction- compression à basses températures (–20°C à
25°C) et en cisaillement annulaire (cylindres
-
35
φ 90 45 0 Norme du module (Pa) 1000 106 109
Fig. I. 14- Espaces de Black de deux liants Algérien 40/50 et
80/100 [LAR961
1/J” (Pa) 106 105 104 103 40 50 60 70 Température (°c)
Fig. I. 15- Complaisances complexes à 7.8 Hz de certains liants
Algériens [LAR961].
coaxiaux) à hautes températures (25°C à 70°C), aucun bitume n’a
resté encore consistant à plus de 50°C, ce qui confirme déjà la
grande fragilité des bitumes étudiés [LAR961]. La plage de
température permettant de recouper les résultats des deux essais
varie selon la consistance du bitume testé.
Plus le temps de relaxation est large, moins l'angle varie en
fonction de la norme du module. La forme de la courbe dans l'espace
de Black dans les conditions opératoires adoptées est liée à la
structure du bitume [LAR961].
A basse température et haute fréquence, dans la zone élastique
du comportement, la valeur limite généralement admise dans la
littérature concernant les modules des bitumes tend vers un maximum
de l'ordre de 3.0 GPa, comme représentant de la rigidité maximale
des bitumes [TEU00].
40/50 80/100
40/50 80/100
-
36
Fig. I. 18: Inverse de la complaisance de perte 1/J"[Pa]
Fig. I. 16: Norme du module
Fig. I. 17: Angle de phase
Dans une étude sur les enrobés bitumineux [IDD00], Il est
confirmé que les enrobés algériens à base de bitume plus dur ont
donnés des modules plus élevés.
Dans une autre étude menée au LCPC
par Ramond et Laradi, le module du liant 40/50 tel quel est de
l’ordre de 5,5.106 Pa pour un angle de phase de 45° environ. Les
exigences des avis techniques sont donc satisfaites et on ne
devrait pas observer de fissuration par retrait empêché à basse
température, sous réserve, toutefois, d’une faible évolution
ultérieure par vieillissement en place [RAM00].
Le liant 40/50 répond aux exigences
des avis techniques à basse et à hautes températures, mais
l’évolution à l’enrobage est forte ; aux températures de service
élevées, l’influence du sinus de l’angle de phase est faible et
doncG(f) est un bon estimateur deG(f)/sin φ(f). DoncG(f) est un bon
estimateur deG(f)/sin φ(f). Les valeurs seuils, traduisant les
grandeurs limitant les performances exigées par les avis techniques
sont atteintes respectivement pour 72,3 °C pour le liant tel quel
et 70 °C dans le cas du bitume testé après l’essai RTFOT.
Sur le plan pratique, ils ont vu que les
conséquences des caractéristiques mesurées sur ce liant sont à
examiner sur trois plans, classés dans un ordre d’importance
décroissante, compte-tenu de l’ensemble du climat algérien :
La déformation permanente, la fissuration par fatigue thermique,
la fissuration à
basse température.
Isochrone de la norme du module, de l’angle de phase et de
l’inverse de la complaisance de perte à 7,8Hz d’un bitume algérien
40/50 tel quel et après évolution simulée ou réelle Selon Ramond et
Laradi [RAM00]
-
37
3.3.4.- Mesure de la viscosité
Dans une expérience « rhéologique », en sollicitation pure, la
viscosité η est définie, par la relation suivante [TEU00]:
η = σ / (dε /dt) (13)
Qui devient en cisaillement :
η = τ / (dγ /dt) (14) On peut calculer la viscosité à partir
d’un essai de fluage, d’un essai à vitesse imposée, ou
d’une mesure de module complexe. Concernant les bitumes, on ne
mesure la viscosité que dans un domaine de température où il est
malaisé ou impossible d’effectuer des mesures de pénétration (nous
avons vu plus haut que les mesures de pénétration fournissent une
information que l’on peut corréler à la viscosité).
La viscosité est en particulier une propriété intéressante à
60°C pour estimer la
consistance des liants aux températures de service élevées, pour
lesquelles la structure des bitumes peut évoluer de façon
importante en fonction de la température, des contraintes
mécaniques et du temps, l’influence de l’hystérésis thermique peut
être considérable. Les variations de structures conduisant à de
fortes fluctuations de viscosités révèlent des profondes
modifications de l’état colloïdal du liant.
• Déformation visqueuse du liant bitumineux Il est nécessaire de
rappeler que le liant bitumineux possède un comportement qui
est
thermiquement et cinétiquement susceptible. Sous une température
élevée et/ou une longue durée d’application de charge, le liant
bitumineux réagit asymptotiquement comme un fluide visqueux.
C’est avant tout dans ces propriétés visqueuses du liant
bitumineux que réside l’origine physique des déformations
permanentes des matériaux bitumineux. Une fois suffisamment
fluidifié, le liant agit comme un agent de lubrification plutôt que
de cohésion entre les agrégats, et ceci permet au squelette
granulaire de se déformer plastiquement.
Ce phénomène est vérifié en observant le comportement d’autres
matériaux granulaires, comme les bétons hydrauliques, les roches ou
les bétons bitumineux eux-mêmes à basses températures dont la
relation entre les agrégats du squelette granulaire est de type
rigide et ne se déforme pas facilement [NGU06], [COR05].
Ceci explique la relation importante entre la viscosité du liant
et le niveau de déformations permanentes des matériaux. Pour cette
raison, l’orniérage des couches bitumineuses est
souvent appelée par la profession ”orniérage par fluage”. Mais
il est nécessaire de noter que cette terminologie n’est ici
justifiée que dans la mesure où l’on tient compte de
l’hétérogénéité des mélanges bitumineux et que l’on n’utilise le
terme que pour qualifier le comportement du liant [NGU06],
[COR05].
-
38
3.3.5.- Présentation des résultats : isothermes et
isochrones
Diverses méthodes d'essai sont utilisées actuellement [RAM85].
Elles diffèrent par le type de chargement, la direction de
chargement, et le mode de chargement. Un grand effort a été fourni
pour établir la liaison entre ces mesures (temps/fréquence,
température de référence), ce qui a été rendu possible par
l'utilisation du principe de superposition de la temps-température,
qui est applicable aux matériaux thermorhéologiquement simples.
La disponibilité de telles mesures rhéologiques permet de
décrire le comportement
viscoélastique linéaire dans une gamme étendue de
temps/fréquences, ce qui peut être utilisé pour développer les
représentations mathématiques d'un tel comportement en utilisant
différentes techniques de modélisation. A partir des couples
température-temps de charge t (ou fréquenceƒ), on trace les
isothermes et les isochrones des fonctions:
- J pour le fluage, - G1, G2, G*, et |G| pour le module
complexe.
4- LES MODELES DE COMPORTEMENT 4.1.- Les familles de modèles
Deux techniques principales de modélisation sont employées pour
exploiter les données rhéologiques rassemblées. La première
technique est phénoménologique (c.-à-d., empirique) : une
formulation mathématique est choisie a priori, puis elle est
adaptée aux données et les valeurs des paramètres du modèle sont
identifiées par des techniques convenables statistiques. La
deuxième technique est « mécanique » et repose sur des modèles
rhéologiques, dans la mesure où une combinaison de composants
mécaniques (a priori un ensemble de ressorts et d’amortisseurs) est
employée pour décrire respectivement les aspects élastiques et
visqueux du comportement du matériau. Les modèles mécaniques ont
des avantages considérables par rapport aux modèles empiriques
:
• ils peuvent être aisément mis en application dans des
techniques d'analyse numérique, • ils sont amendables aux solutions
de forme analytique précise, puisque les équations régissant leur
déformation sont aisément différenciées et intégrées, • leurs
constantes mécaniques (c.-à-d., des ressorts et des amortisseurs)
reflètent les comportements qui peuvent être facilement visualisés
en termes de technologie (élasticité linéaire, viscosité
newtonienne, plasticité,…). En pratique les bitumes peuvent être
assimilés: - à haute température (T >70 °C), à des liquides
généralement newtoniens, fluides de
viscosité plus ou moins élevée. - à moyenne température
(conditions usuelles de service), à des liquides ou des solides
viscoélastiques plus ou moins complexes selon le type de bitume,
- à très basses températures, à des solides élastiques
fragiles.
De nombreux auteurs ont proposé des modèles phénoménologiques ou
mécaniques pour
les polymères ou les matériaux bitumineux, tels que: Laradi
[LAR90], Christensen-Anderson [CHRI92], Neifar [NEI97], Huet-Sayegh
[ROC96], Shenoy [SHE99], Heck [HEC01], Olard [OLA03]. Les deux
modèles de base souvent utilisés pour former des modèles plus
compliqués et plus précis sont le modèle de Maxwell et le modèle de
Kelvin Voigt (Fig. I. 19):
-
39
Fig. I. 19: (a) Modèle de Maxwell, (b) Modèle de Kelvin, (c)
Modèle de Burger, (d) Modèle de Kelvin généralisé (e) Modèle de
Maxwell généralisé.
Selon les saisons et même durant la journée, le liant peut avoir
plusieurs valeurs de consistance aux différentes plages de
température et selon les conditions climatiques spécifiques à
chaque région en passant par des états intermédiaires qui
appartiennent au domaine dit viscoélastique. On dispose d’une
palette d’essais pertinents pour apprécier les propriétés
significatives correspondantes [COR041]:
-
40
Phénomène
Fissuration Fragilité
Fatigue thermique
et mécanique
Orniérage Fabrication et Mise en œuvre
Marge de température (°C)
Basse -20
Moyenne +20
Elevée +60
Très élevée 130 à 180
Essais « technologiques »
Fraass - BBR
Pénétra