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INTERVALLE ( ) S ( SEPTEMBRE 2012 ) ENTRE TEMPS ET ARCHITECTURE PATRIMOINE ARCHITECTURE OBLIQUE RENCONTRE MONUMENTS PAYSAGE RESPECT COMPOSITION DETOURNEMENT RECYCLAGE LIBERTE REDECOUVERTE MODERNITE TRADITION CULTURES INSTITUTION REAPPROPRIATION MONUMENTS HISTORIQUES ECOLE MILITAIRE DE PARIS IDENTITE
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Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

Jan 12, 2023

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I N T E R VA L L E ( ) S

( SEPTEMBRE 2012 )

ENTRE TEMPS ET ARCHITECTURE

PATRIMOINE

ARCHITECTURE OBLIQUE

RENCONTRE

MONUMENTS

PAYSAGE

RESPECT

COMPOSITION

DETOURNEMENT

RECYCLAGE

LIBERTE

REDECOUVERTE

MODERNITE

TRADITION

CULTURES

INSTITUTION

REAPPROPRIATION

MONUMENTS HISTORIQUES

ECOLE MILITAIRE DE PARIS

IDENTITE

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Au hasard d’une promenade citadine, un obstacle vous a-t-il déjà surpris?

L’obligation de le contourner crée l’envie de le percer. Un mur rigide, imperméable et froid peut aussi être l’enceinte d’un mys-tère.

Nous vous proposons d’ébrécher les remparts de l’Ecole Mili-taire de Paris pour parcourir l’épaisseur de ce lieu, dévoiler ses secrets et offrir son potentiel.

Le monument de l’école militaire dont l’histoire commence sous le règne de Louis XV, nous semble aujourd’hui introverti; cet édifice ne montre à la ville que ses façades austères.

Face à cette partie de ville autarcique, nous n’acceptons pas que l’energie de ce patrimoine s’éteigne. Comment entretenir ce qu’on nous laisse pour le transmettre à notre tour?

L’arrivée du «Balardgone», nouveau ministère de la Défense, questionne le devenir de ce monument historique que nous souhaitons transformer en exemple type d’un patrimoine à entretenir.

Notre reflexion sur le patrimoine bâti ou culturel, sera encadrée par le point de vue critique de l’action du temps sur l’architec-ture.

Nous distinguons le monument du monument historique grâce à leurs temporalités. Le monument est le legs d’un événement, alors que le monument historique lui, témoignera d’une série d’événements. Or si toute architecture vit, elle finira par être le cadre de plusieurs évènements. Par conséquent, chaque monument est un futur monument historique.

Selon nous, bloquer un patrimoine dans une époque lui retire sa temporalité. Ainsi, pour éviter qu’un monument protégé ne meure, nous proposons un autre type de classement.

Fondé sur les cohérences, le sens, et l’usage d’un lieu, cette classification sera adaptable à chaque situation et appuyée sur la conservation des façades et/ou toitures et/ou structures. Elle facilitera la réutilisation des édifices pour les rendre pérennes.

Conscientes des valeurs pédagogique et identitaires du patri-moine, nous estimons qu’il ne peut remplir sa fonction qu’en étant appropriable et exploité.

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THÉORIQUE

Patrimoine : création d’une institution et évolution du concept Mot « fourre-tout » qualifiant le passé sous toutes ses formes. Quelles en sont les origines, et comment a-t-il évolué ?

Patrimoine et identité Strates, elles sont le témoin du temps de l’urbanisation d’une ville.

Influence des cultures Etude du contraste, entre la culture du temps japonais et nos principes occidentaux, elle ouvrira un nouveau point de vue.

ECHELLE DU QUARTIER - TEMPS ASYNCHRONE - PATRIMOINE REDÉFINI

Respect et liberté Atténuer les limites entre la coupure et la couture que nécessite la revalorisation d’une architecture.

Le Prix PritzkerLe patrimoine, un sujet d’actualité.

Patrimoine et monuments historiques Origines de l’amalgame entre icône surprotégée et patrimoine quotidien.

Impact d’un monument Contraintes et besoins d’un environnement pour concevoir un édifice.

Exemple du Reichstag

Réappropriation Le patrimoine devient une matière à remodeler, il est redéfini par des choix stratégiques qui serviront l’architecture.

ECHELLE DU PROJET - TEMPS CONCEPTUEL - PATRIMOINE PROSPECTIF

Concepts de temps Créateur d’espace et gardien de continuité que signifie-t-il ?

Un projet prospectif Adaptations perpétuelles face à une « société du mouvement »

Exemple du Louvre

Conclusion

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ETUDE DES EVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

L’école militairePourquoi l’Ecole Militaire

ContextePourquoi la formation de l’Ecole Militaire

L’ArchitecteJacques-Ange Gabriel

Du programme au premier projetL’étude des nombreuses modifications

Un nouveau pôle urbainL’élargissement de la ville

De l’ouverture à l’encloisonnementEtude des aléas budgétaires et programmatiques

Chronologie cartographiée de l’Ecole Militaire de 1751 à 1860L’évolution

LE SITE DE L’ECOLE MIILITAIRE AUJOURD’HUI

Etude des modénatures Relevé photographique et historique de construction

Constat à l’échelle urbaineTemps historique - Patrimoine Théorique

Constat à l’échelle du quartierTemps asynchrone - Patrimoine redéfini

Constat à l’échelle du siteTemps conceptuel - Patrimoine prospectif

LE SITE DE L’ECOLE MIILITAIRE DEMAIN

Echelle urbaine - Premières hypothèses - PropositionsScénarios urbains

Intentions à l’échelle urbaine Temps historique - Patrimoine Théorique

Intentions à l’échelle du quartierTemps asynchrone - Patrimoine redéfini

Intentions à l’échelle du siteTemps conceptuel - Patrimoine prospectif

Programme Ecole du patrimoine européene

ConceptProjet hybride

Plan Rez de Chaussée

Zoom

Manifeste

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

Le patrimoine est une notion complexe. De part sa définition actuelle, elle relève de celle de l’héritage. Dans son sens commun et populaire, il s’agit de l’acte de transmettre et de recevoir. Recevoir paraît simple. Nous naissons dans un système déjà existant, avec son passé et ses lois. Nous n’agissons pas pour acquérir un legs, le rece-voir est un fait inné. Nous héritons des traditions, d’une culture, d’une famille, d’un art, d’une architec-ture que ce soit matériellement ou immatériellement. Il est donc aisé de recevoir, mais qu’en est-il de de transmettre ? Que devons nous transmettre ou oublier ? C’est dans ce contexte que le patrimoine prend son sens. Nos villes sont déjà pré-sentes, certaines vivent et d’autres étouffent. Mais comment réussir à créer, en continuant à transmettre ?

Le mot patrimoine vient du latin Patrimonium qui signifie : héri-tage du père. C’est un bien que l’on détient par héritage de ses ascendants, l’ensemble des biens hérités des pères. Il peut se définir comme tous les biens matériels ou immatériels ayant une importance artistique et/ou historique certaine, appartenant soit à une entité privée soit à une entité publique.

Le patrimoine dit « matériel » est surtout constitué par l’urba-nisme, l’architecture et des pay-sages construits, comme des sites archéologiques, certains aména-gements de l’espace agricole ou forestier, des objets d’arts et mobi-liers, ainsi que des sites industriels.

Le patrimoine dit « immatériel »

ou patrimoine informationnel repré-sente l’ensemble du patrimoine au sens juridique, constitué par les connaissances détenues par une organisation, entreprise, adminis-tration ou collectivité locale. Il peut revêtir différentes formes : chants, costumes, danses, traditions gas-tronomiques, jeux, mythes, petits métiers, témoignages, techniques, documents d’archives. C’est aus-si l’ensemble des manifestations culturelles, traditionnelles et popu-laires, à savoir les créations collec-tives, émanant d’une communauté, fondées sur la tradition.1 Son éva-luation est un exercice délicat: la recherche, le développement, les informations culturelles, ainsi que la nature sont à intégrer comme patri-moine immatériel.

Le patrimoine fait appel à la notion de mémoire et d’identité. Il consti-tue un héritage dans lequel nous pouvons nous reconnaître. Dans toutes les civilisations passées, nos ancêtres ont reçu un héritage, l’ont enrichi, puis transmis aux suivants. C’est la chaine qui a constitué le patrimoine d’aujourd’hui. Avant l’ère de la protection patrimoniale actuelle, les transmissions se réali-saient naturellement.

La première forme de préser-vation patrimoniale apparaît sous l’Antiquité en Italie. Elle se consti-tue sous la forme du réemploi. Le pape Grégoire 1er, après les débuts de l’avènement du Christianisme donne l’ordre d’investir les édifices païens déjà existants, de les réutili-ser mais de ne pas les détruire : «ne détruisez pas les temples païens (…) contentez vous de les asperger

d’eau bénite et d’y placer vos au-tels et vos reliques»1. Puis en 1162, le sénat romain ordonne la protec-tion de la colonne de Trajan en ces termes : « Nous voulons qu’elle de-meure intacte aussi longtemps que le monde durera ». Le désir de pos-térité est compréhensible, chacun souhaite marquer son passage sur terre le plus longtemps possible, afin de montrer la grandeur de ses actes, et d’exister face aux futures générations.

Au fil des siècles, la notion de préservation patrimoniale s’est élar-gie. Les antiquaires représentent des édifices, afin d’en conserver la trace graphique, et stockent des objets. Mais le réel début du classe-ment patrimonial émerge en France avec la révolution de 1789. Après avoir légué les biens du clergé à la nation, l’assemblée Constituante a livré les architectures d’un passé à la destruction et au pillage des révo-lutionnaires. Voulaient-ils annihiler les signes dominants d’une histoire, afin de poser de nouvelles bases? Certaines oeuvres construites petit à petit pendant des siècles, furent détruite en l’espace d’un instant.

Par rapport au temps long de l’histoire, les hommes voulaient vivre au présent, et développer une identité nouvelle. Ce vandalisme a conduit aux premières mesures de protection. L’abbé Grégoire (1750 – 1831) affirme que certes « les objets nationaux qui n’étant à personne sont la propriété de tous » mais que « tous les monuments de sciences et d’art sont recommandés à la surveillance de tous les bons ci-toyens.»3 Puis en 1796, sont crées

La création d’une institution : patrimoine

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

les archives départementales, et Charles de Talleyrand (1754 - 1838) demande la conservation des chefs d’œuvre des arts ce qui constituera plus tard les monuments.

Cependant, les ravages des dé-molitions causées par la Révolution sur les biens architecturaux ont per-mis de protéger progressivement le patrimoine, afin de sauvegarder les restes et de les restaurer. En réac-tion au pillage et à la destruction, les propriétés monumentales, telles que les châteaux et objets d’arts, sont transférées à la République. Seules les œuvres architecturales ecclésiastiques ou seigneuriales ne bénéficient pas de protection. Le patrimoine « protégé » tel qu’il est entendu à cette époque est très sélectif.

En 1830, sous l’impulsion de François Guizot, ministre de l’Inté-rieur sous la Monarchie de Juillet, est instaurée en France, l’Inspec-tion générale des monuments his-toriques. Cette structure est char-gée de procéder à un inventaire du patrimoine architectural français, dont les premiers inspecteurs sont Ludovic VITET (1802 - 1873), puis Prosper MERIMEE (1834 – 1870). Ce dernier structure cet outil de connaissance et de sauvegarde en organisant des visites dans les régions, afin d’établir des rapports sur les conséquences de la Révo-lution.

En 1837, la commission supé-rieure des Monuments historiques est chargée de dresser la liste des édifices méritant une protection, et dont les travaux bénéficieront de subventions ministérielles. La pre-mière liste des monuments proté-gés est établie en 1840. Cette liste est suivie en 1841 par la première loi de protection des monuments historiques et par le classement de bâtiments menacés.

En 1887, une loi sur la conserva-tion des monuments et objets d’arts

ayant un intérêt historique et artis-tique national, normalise les règles de la conservation du patrimoine, et détermine les conditions de l’inter-vention de l’Etat pour la protection des monuments historiques. Sa portée est limitée car elle restreint le classement aux monuments appar-tenant à des personnes publiques. Le corps des architectes en chef des monuments historiques est instauré.

Au XIXème siècle, la protection des monuments est toujours très sélective, mais le terme de patri-moine évolue et s’élargit jusqu’à la création des monuments histo-riques au XXème siècle.

A la suite de la première révo-lution industrielle, nos ancêtres ont pris conscience que le monde allait radicalement changer et ont eu un élan d’attachement aux vestiges du passé. La loi de 1913 qui définit le cadre et le statut des monuments historiques révèle que l’étau se resserre sur le patrimoine architectural bâti : il devient inscrit, classé, et progressivement intou-chable; il se transforme en monu-ment historique. Deux événements majeurs marquent ce siècle : les deux guerres mondiales, dévasta-trices pour le patrimoine architec-tural aussi bien urbain que rural. Nous l’avons vu, lors de la révolu-tion française de 1789, devant les pertes nous nous raccrochons au passé et aux symboles présents qui sont les vecteurs d’une cer-taine stabilité. Les campagnes de reconstruction des villes bombar-dées montrent bien ce besoin, et accélèrent la « modernisation ». Soit on enlève pour repartir de rien, soit on reconstruit à l’identique, soit on modernise comme par exemple la reconstruction de la ville du Havre par Auguste Perret entre 1945 et 1964. C’est pourquoi, en 1962, la loi sur les secteurs sauvegardés vient protéger les tissus anciens, soumis à une réelle reconfigura-tion. Nous passons d’une protec-

tion d’un objet dans la ville à un ensemble construit, du monument à l’urbain.

A cette période nous constatons que la notion de patrimoine glisse à nouveau : elle transforme l’objet unique et rare en objet banal, indi-cateur matériel d’une existence ré-volue et intouchable.

En 1964, André Malraux crée l’Inventaire général afin d’instituer une science du patrimoine. Due à une information insuffisante, il s’agit d’une stratégie technique et scien-tifique qui répond à des normes afin de constituer une base exhaus-tive. Puis, la notion s’étend encore, elle comprend non seulement les vestiges du passé, mais aussi les constructions contemporaines.

Désormais, on peut dire que le patrimoine n’a plus de limites tem-porelles : tout peut devenir patri-moine, rien n’est plus indigne.

En 1972, l’UNESCO signe une convention pour la protection du patrimoine mondial. Celle-çi im-plique l’idée d’un héritage commun à l’humanité entière, surpassant les identités nationales parfois concur-rentes.

On peut conclure qu’aujourd’hui, le patrimoine est partout: il est régi de toute part, et institutionnalisé mondialement.

1- Définition donnée par l’UNESCO : organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture

2- Françoise CHOAY, l’Allégorie du Patrimoine, p.29

3- Rapport sur les destructions opérées var le vanda-lisme et sur les moyens de le réprimer » présenté à la Convention nationale, 1794.

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

Législation de l’évolution du concept patrimonial

Aujourd’hui, le patrimoine com-porte différentes facettes. Il se constitue de trois grandes catégo-ries :

- le patrimoine matériel ou physique concernant le bâti, les œuvres d’art et les livres. Cette première acception du terme cor-respond à l’origine de la protection patrimoniale découlant de la révolu-tion française de 1789.

- le patrimoine immatériel ou non physique incluant les signes et symboles reflétant le passé ou mé-ritant d’être préservés et transmis par la tradition orale. Il comprend les langues, les modes de vie, les savoir-faire et savoirs, les mythes et croyances. Cet aspect complète la première catégorie en s’intéressant aux vestiges impalpables du passé.

- le patrimoine naturel qui s’intéresse aux trois règnes, le monde animal, végétal et minéral. Il est appelé patrimoine culturel, dû à une récente prise de conscience des autorités mondiales, il dialogue avec l’environnement.

Ces catégories se sont étof-fées au fil du temps. Le patrimoine comprend tellement de choses que lorsque nous en parlons, nous sommes à présent contraints d’em-ployer un qualificatif pour spécifier de quel patrimoine il s’agit.

Aujourd’hui, nous ne pouvons rien modifier dans une ville ou un quartier sans nous heurter au sé-vère droit du patrimoine. La varia-tion du concept patrimonial se tra-duit par une législation qui évolue continuellement.

Sous la période révolutionnaire, la nationalisation des biens du clergé induit la notion de sélection patrimoniale. En 1790 la Commis-sion des monuments est chargée

des premières opérations d’inven-taire et de conservation ; elle met en place les débuts d’une classifi-cation du patrimoine architectural. Puis en 1794, l’introduction de la punition de vandalisme par l’Abbé Grégoire, renforce la protection du patrimoine construit.

La première administration des monuments historiques est demandée au roi Louis-Philippe Ier par son ministre de l’intérieur François Guizot. La création d’un poste d’inspecteur général des monuments historiques permettra d’instituer le début d’un inventaire concrétisé en 1837 par la commis-sion des monuments historiques. Elle permettra d’obtenir les fonds nécessaires à la sauvegarde des monuments sélectionnés.

En 1887, le premier véritable ins-trument de classement est créé. Cette loi constitue les prémices de celle de 1913 sur les monuments historiques ; elle renforce la prio-rité du classement et sanctionne pénalement et civilement le vanda-lisme opéré sur les constructions classées. « Les immeubles dont la conservation présente, au point de vue de l’histoire ou de l’art, un inté-rêt public, sont classés comme mo-numents historiques en totalité ou en partie par les soins du ministre chargé des affaires culturelles.»1

La protection du patrimoine bâti se rigidifie encore, c’est pour-quoi en 1927, intervient la loi sur l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques. Elle per-met d’une part d’assouplir les res-trictions en créant une autre forme

Le concept de patrimoine est donc passé d’une entité construite par l’homme et choisie comme monument à une zone «naturelle».

d’inscription pour les objets ou constructions ne nécessitant pas la mesure maximale de protection, mais qui méritent un intérêt patri-monial, et d’autre part, d’étendre la liste des patrimoines protégés.

En 1930, apparaît la protection des sites naturels, les champs du patrimoine s’étendent encore grâce à la création dans chaque département d’une commission départementale des sites, pers-pectives et paysages. Elle pré-voit l’institution d’ « une liste des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préser-vation présente, au point de vue artistique, historique ou scienti-fique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général »2. Elle traduit l’élargissement du patrimoine en

incluant au bâti les sites naturels et en instaurant des périmètres de protection autour des monuments naturels. Elle marque le passage de l’inscription patrimoniale d’un monument unique à un ensemble façonnant un contexte.

La protection d’un tout et non plus d’un monument isolé prend tout son sens avec la loi de 1943 sur les abords des monuments historiques. Elle propose un péri-mètre de 500 mètres autour de tout monument classé afin d’en préserver le contexte. A l’inté-rieur de cette zone de protection, toute transformation sera soumise à l’avis des architectes de bâti-ments de France du département. Cette loi introduit le concept de la mise en valeur du patrimoine monumental. C’est le début de la

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

médiatisation et de la mise en scène touristique des monuments.

La conception d’un contexte en-vironnant délimité arbitrairement par le rayon des 500 mètres est étoffée par la loi Malraux de 1962 qui ins-taure des secteurs sauvegardés. Une étude plus fine du tissu urbain permet alors de définir la protection d’un quartier cohérent. Ce nouveau périmètre établi permet la création des plans de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) dont l’objectif est de préserver la qualité du tissu urbain en déterminant ce qu’il faut conserver avec une remise aux normes. De plus, le terme de des-truction apparaît pour la première fois: une liste d’éléments à démo-lir est établie. Nous entrons dans une ère où chaque patrimoine, qu’il soit matériel ou immatériel, relèvera d’une mise en valeur adaptée à son statut, son échelle, et son environ-nement. Cette loi est complétée par celle de 1983, sur les zones de protection du patrimoine architec-tural et urbain (ZPPAU) qui permet la substitution du rayon arbitraire afin de définir les abords des mo-numents en s’inscrivant dans une réflexion d’ensemble urbain et non plus d’unité isolées. Enfin en 1993, les ZPPAU sont complétées par le terme paysager, ce qui étend en-core les qualificatifs et législations patrimoniales.

D’abord en Europe, au travers de différentes commissions euro-péennes puis, mondialement, avec la création de l’UNESCO3; qui a pour but de préserver le patrimoine mondial matériel et immatériel ; le concept français patrimonial s’étend non seulement sémantiquement, mais aussi géographiquement.

La déclaration des Nations Unies sur l’environnement précise que « les deux éléments de l’environ-nement, l’élément naturel et celui que l’homme a lui-même créé, sont indispensables à son bien être et à la pleine jouissance de ses droits fondamentaux, y compris le droit à

la vie même »4. La préservation des deux formes patrimoniales natu-relles et culturelles doit donc être prise en compte simultanément.

Le concept de patrimoine est donc passé d’une entité construite par l’homme et choisie comme mo-nument à une zone «naturelle». La notion s’est considérablement élar-gie jusqu’à en devenir totalement floue. A force de se compléter et de se diversifier, le patrimoine finit par signifier tout signe du passé ou du présent ayant un intérêt quelconque ou pas. Tout peut devenir patrimoine si une collectivité, ou une personne simple, s’y intéresse, réalise une étude intelligente du lieu ou de son histoire. Patrimoine ou monument historique, nous ne savons plus où débute l’un, ni où finit l’autre.

« Pour que l’œuvre soit inventoriée, il faut qu’elle soit devenue visible. Et qu’elle n’échappe pas à la nuit par la lumière qui l’éclaire comme

elle éclaire les roches, mais par les valeurs qui l’éclairent comme elles

ont toujours éclairé les formes déli-vrées de la confusion universelle.

Tout inventaire artistique est ordon-né par des valeurs, il n’est pas le résultat d’une énumération mais

d’un filtrage. » André Malraux, Avril 1964

Dates clés

1- Ordonnance 2004-178 du Code du Patrimoine, Article 1er

2- Code du Patrimoine, Article L630-1

3- UNESCO : organisation des Nations Unies pour l’édu-cation, la science et la culture

4- Déclaration finale de la conférence des Nations Unies sur l’Environnement, Stockholm, 1972

1790 Première utilisation du terme patrimoine 1792 Création de la Commission des monuments 1794 Dénonciation du vandalisme par l’Abbé Grégoire 1830 Création du premier poste d’ins-pecteur des monuments histo-riques 1837 Création de la Commission des monuments historiques 1840 Première liste de monuments (1090 monuments)1887 Premier texte de loi sur le clas-sement des immeubles ou des objets mobiliers 1905 Séparation de l’Eglise et l’Etat : classement des objets mobiliers religieux 1913 Loi sur les monuments histo-riques (4800 monuments) 1945 Création de l’UNESCO1964 Charte de Venise fixant les règles de restaurations des monuments historiques et des sites1972 Convention pour la protection du patrimoine mondial 1975 Année européenne du patrimoine architectural 1991 « Journées européennes du pa-trimoine » 1998 Fusion de la Direction du patri-moine et de la Direction de l’architecture au Ministère de la culture

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

Le patrimoine est un support que l’homme a créé pour laisser l’empreinte de son époque sur l’axe du temps long de l’huma-nité. Une civilisation s’identifie par son rapport au patrimoine.

La communication étant la base de tout héritage, elle constitue le support de la notion de patrimoine. Les hommes préhistoriques avaient déjà appréhendé ce lien : ils pei-gnaient leurs rites de chasse et de cueillettes au sein de grottes. Les premières peintures sont deve-nues totems, puis architectures sacrées, puis religieuses, puis co-loniales, puis symboliques ; mais l’arrivée de l’écriture vint modifier les moyens de transmission. Pour rivaliser, l’architecture patrimoniale devint monumentale ; mais ces constructions devenues icônes ne sont que le reflet d’un désir de pérennité. Le patrimoine s’adapte à la vision de l’homme, face à son quotidien : il marque ses habitudes de vie. Ainsi, dans une ère de colo-nisation, le patrimoine s’exprimera par la démolition et la reconstruc-tion d’édifices de pouvoir. Dans notre période actuelle de globali-sation, il référencera les coutumes culturelles à travers le monde.

Le patrimoine est constitué par deux temporalités complémen-taires: celle qui lui est propre, et celle rythmée par les grands mou-vements de pensée. La première résulte de son existence et de sa continuité dans le temps de l’huma-nité ; la deuxième marque sa com-position et son évolution à plus court terme. Une identité se forgeant par le conflit entre réactions actuelles et certitudes obsolètes, un patrimoine évoluera en fonction d’un rythme contestataire, face aux avancées technologiques et socioculturelles.

La notion administrative de patri-moine est récente ; elle résulte d’un mouvement de pensée éthique face aux saccages des révolutions sur les monuments à fort pouvoir fédérateur, qu’ils eussent été reli-

Patrimoine &

identité

gieux ou non. A la suite de cette attitude conservatrice mais élitiste, les philosophes prônèrent la fin du monument isolé, pour prendre en compte son environnement. La ville subissant les mutations dûes – le plus souvent – aux révolutions industrielles, les lois adaptèrent le monument en fonction de flux et des cohérences de la cité. Puis, avec les avancées technologiques telles que l’arrivée des réseaux internet, l’identité patrimoniale de-vint mondiale. Enfin, afin d’accor-der des aides pour le conserver, le dogme du patrimoine devint très

réglementé ; et face à un constat de sclérose administrative, les poli-tiques utilisent aujourd’hui le lien affectif des habitants pour trans-former un patrimoine statufié en patrimoine « habité ». On assiste ainsi à une dilatation de l’échelle de réflexion, la communication n’est plus hiérarchisée par les élus, elle passe par les réseaux sociaux: le patrimoine anciennement éli-tiste devient aujourd’hui populaire.

Etant devenu le gage d’une iden-tité, chacun veut démontrer qu’il a son patrimoine, et par conséquent une mémoire liée à un temps et à un espace. Face à cette perte de qualité, deux courants se dis-tinguent : l’expansion, et le retour aux sources. L’expansion nous ramène au temps linéaire d’un patrimoine immuable qui ne fait que s’enrichir au fur et à mesure d’un temps long composé de pé-riodes successives. Le retour aux sources nous oriente plutôt vers un temps cyclique d’un patrimoine plus en accord avec la nature.

Considéré comme précieux pour l’humanité, le patrimoine actuel référencera aussi bien une danse originale, témoin d’un rite culturel unique; qu’un site natu-rel, indispensable au respect de la biodiversité. L’environnement est le seul patrimoine originel détérioré depuis des décennies, sans qu’aucun mouvement de pensée ne le rende identificatoire.

N’oublions pas que notre échelle de réflexion se fonde sur notre époque. L’histoire nous a prouvé qu’entre réactions passées face aux héritages, et actions futures face aux potentiels d’un patrimoine, l’humanité a toujours su trouver un équilibre. Notre identité n’est autre que les strates historiques de pen-sées des civilisations qui nous ont précédées : notre patrimoine est le «meilleur instrument dont nous dis-posons pour inventer notre avenir»1

1- Françoise Choay, 1992

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ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

Une comparaison entre les cultures japonaise et occidentale permet d’ouvrir notre vision sur une notion de patrimoine qui ne peut plus être autocentrée sur elle-même.

Pour les Occidentaux, le patri-moine est une notion qui transforme les architectures en objets sacrés, témoins du passé révolu, il devient donc un héritage investi d’une fonction éducative. Pour être effi-cace, un patrimoine se doit d’être parfaitement conservé, afin d’être restitué intact aux générations fu-tures. L’architecture occidentale se confine alors dans la recherche de l’absolu d’une beauté universelle, or un état «parfait» au sens de fini, n’existe pas. La notion de temps prend ici toute son importance, un projet ne peut être fini, il vit. Même en le surprotégeant, l’intention de le rendre immuable est par principe impossible. Le temps agit sur toute chose, et en particulier sur le patri-moine qu’il soit matériel ou imma-tériel. Notre vision judéo-chrétienne du temps nous influence vers une linéarité : partant de la création pour arriver sur la Terre Promise. Cette condition pousse vers la cristallisa-tion d’une œuvre: l’évolution, ou la retouche d’un patrimoine bâti serait la remise en question de sa perfec-tion.

Les japonais appréhendent au-trement la restitution d’un héritage, leur temps long étant cyclique, et leur présent une durée composée d’un passé et d’un futur proche. Ils ne se formalisent pas avec un état à figer : leur vision du patrimoine en devient une mémoire de la fonction et du sens de l’ouvrage.

Les Japonais auraient pris conscience de la notion de temps en observant les phénomènes de putréfaction des êtres vivants après leur mort. Leur cadre de vie,

Influence des culturesétant sujet à de nombreuses catas-trophes naturelles telles que des séismes ou tsunamis, a développé la notion d’impermanence.

Dans les Chroniques des choses anciennes (la plus ancienne trans-cription des mythes Japonais) le point de départ du temps se fait par l’apparition de divinités qui donne-ront naissance à l’archipel du Ja-pon. Cependant, ce point de départ n’est pas précis, il n’est que l’idée d’un passé qui remonte infiniment loin dans le temps. Ainsi, tous les évènements apparaissent succes-sivement sur la droite du temps his-torique infini, qui est donc une suc-cession de « maintenant ».

Pour les Japonais, le « mainte-nant » est une réalité sur l’axe histo-rique ; il n’est pas l’instant, ce serait plutôt une durée incluant un passé et un futur proche. Couplé à l’idée de saison, leur concept de temps devient cyclique, et par conséquent répétitif. Enfin, les Japonais parlent de jeunesse, de maturité, et de sa-gesse ; une fois vécus ces périodes ne reviennent pas, à l’instar des saisons, ainsi le cadre de la vie hu-maine est un temps ayant un début et une fin, au sein d’une humanité infinie.

Au Japon, le temps est indisso-ciable de l’espace, ces deux élé-ments intimement liés forment le concept du « ma ». Le « ma » repré-sente l’intervalle entre deux choses, le moindre cheminement devient un parcours durant lequel l’idée de rythme est très importante. Dans leur architecture, les bâtiments se développent horizontalement selon deux principes : le premier est celui d’ « oku », les lieux importants ou sacrés sont difficiles à atteindre ; le second principe est celui de la construction par ajout.

Leurs principes architecturaux sont une conséquence de leur

vision du temps : pour les Japo-nais, le « tout » du temps est une droite composée de « maintenant » s’enchainant indéfiniment. Ainsi, la notion de subsistance à travers le temps, ou pérennité des bâtiments, est relative à un présentisme cy-clique. Ils adaptent l’espace à leurs besoins.

L’espace de la maison Japonaise varie en fonction du temps, une pièce peut accueillir des fonctions différentes suivant les heures de la journée. Cette modularité est pos-sible grâce aux cloisons amovibles « shojis », et aux différents éléments de mobilier qui apparaissent ou disparaissent suivant le moment de la journée : le temps imprègne l’espace.

A l’échelle des édifices, une pièce est d’abord construite, puis une seconde en fonction des besoins… et lorsque le budget - ou le terrain - ne le permet plus, on s’interrompt. On part des parties pour arriver au « tout », il est impossible d’anticiper la forme globale du bâtiment. Une addition consiste à modifier une forme finie, pour aboutir à une autre forme finie.1

«En Occident la notion d’espace est constituée par trois dimensions, le temps en ajoute

une quatrième, alors qu’au Japon l’espace comprend

uniquement deux dimensions. Il est constitué par une suite de

plans à deux dimensions. Ainsi la profondeur de

l’espace était exprimée par la combinaison de plusieurs plans

à travers lesquels plusieurs échelles de temps pouvaient

être perçues. »

(Isozaki, 1978)

« L’architecture japonaise se délabre en accord

avec le temps. »

(Tadao Ando) 1- Expression employée par Tadao Ando

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 12 )

ECHELLE URBAINE - TEMPS HISTORIQUE - PATRIMOINE THEORIQUE

Le temple d’Ise est un des plus célèbres monuments du Japon et représente un des exemples les plus flagrants de la vision japonaise. Il est une figure du patrimoine natio-nal dans la mesure où, depuis plus de 1000 ans, il témoigne du savoir-faire et des mœurs de la civilisation. Démoli et reconstruit à l’identique tous les vingt ans, selon les tech-niques ancestrales de sa construc-tion originelle. Ise a toujours fonc-tionné comme un temple et ne s’est pas transformé en musée : il n’est pas considéré comme le fétiche d’une époque révolue. Le peuple japonais saisit ainsi, non pas la valeur plastique accordée en fonc-tion d’une pérennité, mais le sens immuable qui restera authentique.

« Demain soufflera le vent de demain »

Ce dicton Japonais nous dit de nous concentrer sur le présent, plu-tôt que de nous soucier de l’avenir, car le futur est incertain.

Contrairement aux Japonais, la notion de temps n’apparaît pas dans le schéma de construction occidentale. L’harmonie générale du bâtiment se trouve dans sa sy-métrie, on partira d’un « tout » : une structure et une enveloppe, que l’on pourra diviser selon les besoins. L’important étant la trace immuable de l’œuvre : sa perfection. Cet es-prit de cristallisation empêche-t-elle l’architecture d’Occident de tirer profit de son potentiel?

Pourtant cet esprit conservateur n’est arrivé que tardivement. Dûs aux dommages de guerres, ou aux dommages du temps, la cathédrale de Reims a subi des agrandisse-ments successifs ; à l’époque on ne pensait pas à ce lieu comme un héritage bâti à transmettre, mais plutôt comme un site à fort pouvoir religieux qu’il fallait pérenniser.

Le pouvoir mémoriel d’un héri-tage n’a de force que s’il est com-

« Dans le pays qui passe - à juste titre - pour le plus fidèle du monde à sa propre identité, le Japon, certains comportements à l’égard du patri-moine peuvent paraître déconcertants aux Occidentaux. Endommagés

ou non, les grands sanctuaires sont périodiquement reconstruits inté-gralement, en matériaux identiques mais neufs ; parfois, comme c’est le cas à Ise, une aire destinée au nouvel édifice est dûment préparée

pendant la durée d’existence du dernier réalisé. Cette pratique suppose une fidélité aux partis, aux techniques, aux procédés de construction,

au décor, aux usages, qui démontre justement pour le Nippon son souci de la dignité à l’édifice. A ce sentiment d’une continuité idéale

s’oppose l’attitude occidentale, hantée par le déclin, l’irremplaçable et la double mort des objets qui se ruinent et des sentiments qui changent. «

(J.-P. Babelon, A. Chastel, La Notion de patrimoine, 1980)

pris et approprié par les généra-tions futures. Un bâti rongé par le temps, même restauré pour donner l’apparence d’être intact, sera froid. La culture nippone nous démontre que la mémoire passe par la mani-pulation actuelle des sens passés :

le patrimoine doit vivre pour remplir sa fonction de transmission.

La symétrie du hateau de Versailles

Le composite de la Villa impériale de Katsura

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( SEPTEMBRE 2012 )I NTERVALLE ( S ) ( 13 )

ECHELLE DU QUARTIER - TEMPS ASYNCHRONE - PATRIMOINE REDEFINI

L’idée du patrimoine est un concept temporel qui fait appel à l’instinct de survie : l’homme ap-prend de ses expériences passées pour améliorer sa situation future. Ce pragmatisme est complété par un affect entre générations : le père transmettra au fils ses acquis, afin de lui forger une identité sociale et culturelle.

Le patrimoine, qu’il soit matériel ou immatériel, joue un rôle essen-tiel dans une culture, il est le témoin de son histoire. Cet aspect nous intègre dans une logique du temps. Au sein d’un temps long, le patri-moine est considéré comme une empreinte de la postérité d’une communauté. Sur une échelle plus courte de temps, il incarne un legs à valeur éducative pour la société. Et enfin, dans le contexte d’une temporalité tournée vers l’avenir, il devient l’héritage que l’humanité décidera de transmettre. Le res-pect du patrimoine est fondamental à toute civilisation qui se veut pé-renne, et relève par conséquent du devoir de mémoire.

Dans cette logique de rapport au temps, la mémoire peut, elle aussi ,se décomposer sous la forme de trois temporalités distinctes : celle de l’instant, celle du court terme, et enfin celle du long terme. Chacune correspond à un rôle bien particu-lier : la mémoire sensorielle, celle de l’instant servira à composer un numéro de téléphone ; la mémoire à court terme sera utile pour se rappeler d’un rendez-vous ; enfin, la mémoire à long terme sert à emmagasiner tous les événements significatifs de notre existence : elle est biographique, sémantique (liée à l’apprentissage scolaire), procé-durale (résultant de gestes profes-sionnels), ou épisodique (en relation avec le temps et le lieu) ; elle pour-

rait être assimilée à la mémoire pa-trimoniale. Malgré tout, la mémoire n’est pas infaillible, elle peut parfois déformer les faits s’ils ne sont pas bien assimilés; il faut par consé-quent l’entretenir.

Un patrimoine ne sera mémo-risé que s’il est compris, analysé et apprécié : il doit être accessible. Il sera alors appropriable, et pourra ainsi exercer son rôle d’enseigne-ment. La sagesse pousse l’homme à offrir à ses fils une diversité d’ex-périences pour qu’ils en tirent eux-mêmes leurs conclusions ; une fois acquises ses connaissances pour-ront être transmises à leur tour.

Le patrimoine offert aux généra-tions futures se doit d’être non seu-lement vivant et animé, mais aussi le plus composite possible afin de proposer une analyse en accord avec son temps d’étude. La reva-lorisation du patrimoine, qu’il soit bâti ou non, est une construction mentale subjective. Cette vision est basée, non pas sur un état anté-

rieur connu, mais sur les critères de notre temps, une image actuelle et formatée que l’on se fait de cet héritage.

Notre action sur le patrimoine est donc irréversible. Que l’on prenne le parti de laisser le temps agir en transformant un édifice en ruine, ou qu’on le restaure en marquant notre intervention par un contraste visible ; le patrimoine est une série de legs subjectivés par ceux qui les transmettent. Il faut donc privilégier le sens à l’ouvrage.

Les règles d’urbanisme n’existent que pour contrôler les débordements d’une architecture nombriliste qui pourrait annihiler l’identité d’une ville. Cependant, une ville comme Naples où aucun code n’est respecté, possède sa propre unité. Et Rome, où les ruines caractérisent la cité, s’autorise des interventions contemporaines. Le sens de la cité n’est donc pas es-thétique, mais communautaire.

Respect et liberté face à un patrimoine« Lorsque des réalisations nouvelles se greffent sur des quartiers anciens, le système constructif des édifices préexistants doit être

respecté. (…) Il faut maintenir une harmonie entre l’ancien et le nouveau; (…) Mais chaque ville a sa propre ‘atmosphère’ artistique,

c’est à dire un sentiment des proportions, des couleurs et des formes qui s’est conservé à travers l’évolution des différents styles, et il faut en

tenir compte. Les nouveaux édifices doivent rester dans le ton, mêmes lorsqu’ils procèdent d’une inspiration nouvelle et audacieuse.»

Gustavo Giovannoni dans l’Eclaircissage urbanistique des centres anciens

« Deux maladies sont pareillement mortelles : se souvenir de tout et tout oublier. L’oubli est l’indispensable étai de la mémoire »

François Barré, président du FRAC d’île de France lors du colloque Patrimoines et développement des territoires

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INTERVALLE ( S ) N° 1( JEUDI 12 AVRIL 2012 ) ( 14 )

ECHELLE DU QUARTIER - TEMPS ASYNCHRONE - PATRIMOINE REDEFINI

On associe Paris à un patrimoine haussmannien uniforme et authen-tique, une ville pensée avec des tracés, des visées composées d’im-meubles invariables - ou presque - renforçant des perspectives pour valoriser ses monuments. Mais Haussmann a mis en scène ces percées, souvent au détriment d’un bâti parisien préexistant ; pour-tant, aujourd’hui, son intervention a valeur non seulement de patri-moine, mais est aussi considérée comme le symbole d’une identité architecturale parisienne. Le sens de son d’urbanisme a su s’impo-ser comme une évidence. Pourquoi ne pas agir ainsi aujourd’hui ? Par respect, ou par crainte d’imposer une vision autocentrée sur notre époque, nous avons fini par avoir peur d’un patrimoine historique. Mais un temps long n’est qu’une composition de temps courts ; nos actions présentes seront peut-être le patrimoine de demain.

Aujourd’hui la société se tourne vers une démarche durable, elle commence donc à prendre en compte un temps plus long que celui d’une ou deux générations. Ce temps long induit une flexibilité, puisque les besoins et/ou évolu-tions technologiques modifieront les habitudes de vies. La consé-quence de cette approche étant soit l’aplanissement des interven-tions, soit, en contraste à cette timi-

dité, des gestuelles caractérielles imposantes. Dans le premier fait, la démarche ne peut pas être durable, puisqu’elle n’est pas ancrée dans son temps ; dans le second cas, cette attitude fixée dans l’instant en devient périssable à court terme puisqu’elle dénature un patrimoine hérité, en dédaignant l’existence du passé et du futur.

En pratique, le constat d’une architecture inadaptée - ou pour le cas des monuments historiques, d’un bâti classé - ne doit pas for-cément aboutir à une totale remise en question. Adapter le patrimoine

en privilégiant les cohérences archi-tecturales (trop souvent dénaturées par les interventions contempo-raines) face aux cohérences his-toriques (dûes aux vénérations du passé) lui rendront son sens face aux pratiques actuelles ; cette logique d’intervention paraît indis-pensable à la continuité d’une civi-lisation.

Le respect d’un héritage s’arrête là où commence sa transmission: déculpabilisons nous, notre em-preinte renforcera son assimilation; un patrimoine libre sera un patri-moine immortel.

Avant / après la création de l’Avenue de l’Opéra sous HaussmannPhotos de Charles Marville pour le Figaro Magazine

Photo de Zhu Chenzhou

«L’œuvre de Wang Shu saluée par le prix Pritzker est capable de transcender le débat entre tradition et modernité, en produisant une architecture qui est hors du temps, profondément ancrée dans son

contexte et pourtant universelle»

Lord Palumbo, président du jury de la remise du prix Pritzker, le 28 février 2012.

Le prix Pritzker 2012Le prix Pritzker est une

récompense annuelle valori-sant le travail d’un architecte ayant offert un apport signifi-catif à l’humanité.

Cette marque de res-pect fut accordée en 2012 au chinois Wang Shu pour son travail en accord avec le temps. Un travail basé sur le respect du patrimoine combiné à une création très contemporaine.

Ce prix a relancé le dé-bat sur le concept de patri-moine. Wang Shu s’est spé-cialisé dans une démarche de continuité avec l’existant tout en le réinterprétant pour lui offrir une ancre dans son

temps; on pourrait parler de «re-création».

Réutiliser, transcander un matériau, retrouver l’harmo-nie d’un lieu en conservant ses cohérences.

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Les tendances actuelles assi-milent le patrimoine au monument historique. Nous sommes entrés dans l’ère de la protection de tout ce que nous pouvons considérer comme risquant de nous échapper. Le moindre élément de l’environne-ment urbain tend à rendre une vie dénuée de sens face au sentiment d’appartenance à un tout durable puisqu’elle est érigée dans l’instan-tanéité éphémère. Selon Françoise Choay, « le patrimoine est lié aux structures stables (…) d’une so-ciété enracinée dans l’espace et le temps »1 tandis que le monument historique renvoie à « une institution et à une mentalité ». Sous toutes ses formes, le patrimoine définit donc un héritage.

Il convient maintenant de s’atta-cher au « monument historique » qui pendant longtemps fut le syno-nyme de patrimoine architectural bâti.

« Monument » vient du mot latin monumentum, qui lui même est dérivé de monere qui signifie « faire penser », « faire se souvenir ». Il est présent dans le but de préserver une identité menacée par l’oubli. C’est « un ouvrage d’architecture ou de sculpture édifié pour trans-mettre à la postérité le souvenir d’une personne ou d’un évène-ment».2 Il est donc érigé pour livrer une affirmation. Lors de sa concep-tion, il est pensé en tant que monu-

1- Françoise Choay dans l’introduction de l’Allégorie du Patrimoine2- Trésor de la langue française informatisé

ment, comme les monuments aux morts, certes, son sens s’est élargi au fil des années, sa destination

originelle est de rappeler un passé glorieux ou douloureux. Peu à peu il emporte avec lui les notions de «beau, grand, illustre ».

Lorsqu’un bâtisseur des époques qui nous ont précédées construi-sait, il décidait de la valeur de son édifice, qu’il soit destiné au loge-ment, à une institution publique ou à célébrer une mémoire. Un monu-ment est destiné à être monument.

Le « monument historique », lui, est né à la suite de la volonté de conservation patrimoniale en réac-tion aux ravages architecturaux is-sus de la révolution française. Selon Kersaint, ils est « le témoin irrépro-chable de l’histoire ». En temps de crise, il rappelle au présent l’histoire d’un passé durable. Il permet les fondements d’une nouvelle société conservant un lien vivant avec le passé grâce à son « ex tempora-lité ». Le monument à pour vocation d’être durable, cela rassure donc les sociétés occidentales dans les-quelles il se dresse.

PatrimoineMonument

Monument historique

L’amalgame entre patrimoine et monument vient de cet élargisse-ment de la notion de monument. Peu à peu, le monument se trans-forme en monument historique car il est le témoin d’une présence pas-sée. C’est l’histoire qui le rend mo-nument « historique », il est monu-mental selon les critères actuels, et a vaillamment traversé les époques. Le monument obtient son statut par des critères de beauté et de grandeur ; mais c’est sa vocation à rappeler le passé qui lui donne son statut historique, grâce à l’interpel-lation, à l’émotion du souvenir qu’il dégage de part sa valeur originelle.

Le monument historique est donc un héritage construit du pas-sé et pensé comme tel, alors que le patrimoine est un héritage dans tous les sens du terme, c’est ce qui nous ancre dans un temps choisi, il peut être aussi bien matériel qu’im-matériel ; il n’a pas pour vocation d’entretenir la mémoire d’un évé-nement ponctuel, mais plutôt d’une succession d’évènements qui fait de l’histoire et de la culture leurs forces. Le patrimoine entretient une mémoire quotidienne, tandis que le monument historique se dresse devant nous comme une évidence du passé destiné à réveiller une mémoire oubliée.

Peu à peu, le monument se transforme en monument historique car il est le témoin d’une présence passée.

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Impact d’un

monumentAujourd’hui, à l’échelle de l’envi-

ronnement proche, l’implantation d’un projet s’appuie sur les gaba-rits existants et les réglementations. Une construction se développe ainsi en fonction du patrimoine qui l’entoure et des règles qui condi-tionnent le respect et la mise en valeur de ce patrimoine. Mais qu’en est il du monument ?

Un monument sert de repère dans la ville : il participe à l’élabo-ration de quartiers au sein desquels la population peut se regrouper en communauté.

Le monument est érigé pour mar-quer un pouvoir ou un événement. Du premier monolithe aux tours de plus en plus hautes, leur dessein est le même : celui du totem. Il n’a donc pas à respecter son contexte, il s’y insère en affirmant son auto-nomie.

Un monument joue un rôle ma-jeur dans l’organisation de l’es-pace. Un édifice n’obtient son sta-tut de monument qu’à partir de son inscription dans un tissu ; une bulle, même idéale, ne peut participer à l’élaboration d’une ville pérenne.

Le monument a trois compo-santes : sa fonction, son aspect, et son usage. Lorsque la fonction d’un monument n’est plus d’actua-lité, il en perd son usage, et il ne lui reste plus que son aspect à proté-ger pour éviter de tomber en ruines.

La conservation d’un monument, qu’il soit monument historique ou non, devrait être un engagement dans la pérennité de son usage. Si pour cela, le dit monument doit changer de fonction, nous devons

y recourir sous forme de réhabili-tation en ayant un impact minime qui proposera un usage compatible respectant sa valeur culturelle.

L’ICOMOS (Conseil International des Monuments et Sites) s’appuie sur la Charte de Burra de 1979, pour définir la valeur culturelle : va-leur esthétique, historique, scienti-fique, sociale, ou spirituelle pour les générations passées, présentes, ou futures. Cette valeur ne serait respectée que lors d’une adapta-tion : modification d’un lieu avec un usage actuel. Ainsi, nous pouvons en conclure que seul l’usage quo-tidien d’un héritage peut en sauver la mémoire.

Il y a plusieurs types de quar-tiers : ceux dessinés par les limites administratives; ceux délimités par l’identité d’une communauté qu’un monument peut générer; et ceux qui dans la pratique sont caracté-risés par leurs usages. Les « quar-tiers administratifs » sont géné-ralement arbitraires, et établis en fonction des vagues de construc-tion de la ville, ces vagues étant habituellement orchestrées par la construction d’un édifice impor-tant. Les « quartiers identificatoires » sont le résultat du magnétisme qu’une icône peut engendrer sur une population. Et enfin, les « quar-tiers usuels » sont le témoin d’une appropriation d’une partie de ville par ses habitants, et de leurs be-soins quotidiens. Chaque quartier a donc son atmosphère, sa vie, et son propre rythme. Que se passe-t-il lorsque des quartiers de type différent se superposent?

Prenons l’exemple du quartier de l’Ecole Militaire de Paris. Construit

face au Champs de Mars, le monu-ment assista à de nombreux évène-ments publics et rassemblements, rendant le monument fédérateur et donc créateur de quartiers; cepen-dant, le « quartier administratif » de l’Ecole Militaire ne correspond pas à son influence réelle. En effet, le « quartier identificatoire » est une zone dont le point de focus se trouve à l’entrée de l’Ecole. Des commerces, restaurants, cafés et, bien évidemment, une station de métro, portant le nom de l’Ecole Militaire, attestent de son influence sur la ville. En parallèle, le « quartier usuel » du Gros Cailloux organisé autours de la rue Saint Dominique

« Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient à son propriétaire, sa beauté à tout le monde ;

c’est donc dépasser son droit que le détruire. »

V. Hugo, Littérature et philosophies mêlées, Paris, 1834

et de son église, s’étend sur la rue Cler, rue piétonne et très commer-çante, et devient ainsi très attractif. De même, le quartier de la Motte Piquet Grenelle se transforme lui aussi en « quartier usuel » de la Rue du Commerce.

La rencontre de ces différents types de quartiers aboutit sur le déni du monument de l’Ecole Mili-taire de Paris. Ayant un aspect froid et encloisonné, son usage se limite à sa fonction première tournée vers une époque révolue. On as-siste donc au choc des époques : conséquences palpables et réelles du temps qui passe.

En considérant que la maille urbaine est aussi importante que le monument lui-même, alors les abords du monument représentent les strates successives de forma-tion de la ville, et donc l’appropria-tion de ce monument. En effet, une fois la ville aménagée autour de ses monuments, il se créé une interdé-

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( SEPTEMBRE 2012 )I NTERVALLE ( S ) ( 17 )

ECHELLE DU QUARTIER - TEMPS ASYNCHRONE - PATRIMOINE REDEFINI

pendance.

Les transports urbains se sont adaptés aux emplacements des monuments : nos repères actuels sont bien les stations de métro, qui la plupart du temps tirent leurs noms des édifices dont ils sont proches. Ce réseau marque l’héritage phy-sique de l’organisation de la cité par ses constructions. Cependant, les flux quotidiens de la cité pour-ront, eux aussi, modifier la dyna-

mique interne des monuments. Par exemple, l’aménagement d’une entrée supplémentaire pour faciliter un usage quotidien. Ici, deux tem-poralités se rencontrent : celle du bâti statique, le contenant et celle du contenu plus fluide et malléable.

Un monument influence la ville, mais pour conserver son statut de monument il doit pouvoir être ap-propriable. L’urbanité du XXIe siècle est marquée par l’accélération

des flux, qu’ils soient physiques : mouvements des populations, ou virtuels : communication via des réseaux de plus en plus rapides. Un monument ne peut plus se permettre d’être statique et rigide, sinon il deviendra une bulle isolée et finira par mourir. Il doit s’ouvrir et se laisser imprégner par les flux qui l’entourent.

Exemple du Reichstag

Le Reichstag est un des monuments icônes de la ville de Berlin, il fut conçu spécialement pour accueillir le Bundestag, assemblée parlementaire allemande. A l’origine, non désiré par l’empereur, l’édifice a su se faire aimer du pouvoir ; recensant l’histoire de l’Alle-magne à travers ses murs, il est aujourd’hui considéré comme un patrimoine sym-bolique national.

Construit sur l’empla-cement de l’ancien Palais Raczynski, château édifié en 1847 sur la place Royale, le Reichstag s’était déjà man-daté un statut de monument en choisissant un site à fort caractère symbolique ; pour preuve son ancien parvis est devenu l’actuelle place de la République. Mais son édification se fit non sans peine: l’empereur Guillaume Ier ne voulait pas que le lieu du parlement soit plus pres-tigieux que sa résidence. La réalisation de la coupole, plus haute de quelques mètres que le château impé-rial, donna ainsi au Reichs-tag un statut politique inné en faveur du peuple.

Son rôle fédérateur ne fera qu’augmenter au fur et à mesure des évènements qui marquèrent sa pierre : la proclamation de la Ré-publique du haut de ses fenêtres par Scheidemann en 1918, son incendie ‘mys-térieux’ qui permît aux nazis de justifier leur répression en 1933, son bombardement pendant la seconde guerre mondiale, le drapeau rouge de l’armée soviétique hissé à son sommet en 1945, le mur de Berlin érigé à ses pieds en 1961, et enfin le retour du parlement dans son enceinte en 1991, afin d’officialiser la réunification du pays de 1989.

Tout au long de ces péri-péties, l’édifice en lui même subît de nombreuses inter-ventions. A l’origine, repré-sentant de l’unité du Reich, les quatre tours suppor-tant une coupole de verre et de fer, symbolisaient les royaumes qui avaient été réu-nis pour former un empire. Paul Wallot, architecte dési-gné par concours, supervisa la réalisation du Reichstag de 1884 à 1894 ; le bâtiment avait un style néo-classique, et pourtant, sa coupole était déjà contemporaine pour l’époque. A la suite de l’incendie de 1933, et aux bombardements de 1945, les ruines furent recons-truites sans coupole, elles furent ainsi non restaurées à l’ « identique », puisque la rénovation se fît avec un schéma simplifié, mais mal-gré tout respectueux des cohérences architecturales du monument. Les travaux dureront dix ans, soit, la durée qui avait été néces-saire à la construction du bâtiment. Il abrite alors des expositions sur l’histoire de l’Allemagne. Ce n’est qu’en 1994 que le Reichstag connait de nouveau un re-bondissement architectural : une performance artistique de Christo et Jeanne-Claude le recouvre de rubans de plastique argentés, et par ce procédé lui offre ainsi

un renouveau de neutralité, essentiel à un retour désiré du parlement. Grâce à cette renaissance, le Bundestag - s’étant précédemment réfugié à Bonn - reprendra sa place au sein du Reichs-tag en marquant son arri-vée par la réalisation d’une nouvelle coupole dessinée par Sir Norman Foster, tout aussi avant-gardiste que l’ancienne en son temps, et annoncera un « parlement moderne».

Le Reichstag est l’exemple type qu’un édi-fice iconique ne peut être patrimonial qu’à travers une dynamique constante : l’énergie de sa vie renforce son attractivité. Ce n’est pas anodin que l’inscription sur le fronton du Reichstag «Dem Deutschen Volk » / « Au peuple Allemand » n’ait été apposée qu’en 1916 : offert au peuple, la pierre devient leur mémorial.

L’architecture est un emblème de pouvoir, par conséquent, les architec-tures de monuments, ou interventions architecturales sur du patrimoine identifica-toire, sont des armes poli-tiques qui tissent l’histoire.

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ECHELLE DU QUARTIER - TEMPS ASYNCHRONE - PATRIMOINE REDEFINI

historiques d’un bâtiment ainsi que son contexte. Après Ruskin et Viollet-Le-Duc, s’impose Camillo Boito (1835-1914) en proposant trois types d’interventions en fonc-tion de l’âge et du style des monu-ments concernés. Une restauration archéologique pour les monuments de l’Antiquité en considérant uni-quement leur masse et leur vo-lume; une restauration pittoresque pour les monuments gothiques en s’intéressant à la structure du bâ-timent ; et enfin une restauration architecturale pour les monuments classiques qui prend en compte les constructions dans leur globalité1.

Restauration stylistique ou conservation romantique, tel est le grand dilemme toujours d’actualité. Plutôt que de préférer la valeur his-torique passéiste des monuments, il faut mettre en avant les cohérences architecturales. Respecter les in-tentions spatiales d’origines ; au lieu de s’acharner à reconstruire les ornements. S’inscrire dans la conti-nuité plutôt que dans la contradic-tion permettra une réappropriation subtile des environnements et des monuments. Une étude fine des tissus existants pour des interven-tions cohérentes serait le point de départ d’une réintégration des mo-numents. Ouvrir des espaces afin de sensibiliser des riverains serait une des solutions à l’enfermement symbolique des espaces cristallisés par les textes législatifs rigides rela-tifs aux monuments historiques.

1- Camillo Boito, La Restauration en architecture, (1893), in Conserver ou Restaurer, les dilemmes du patrimoine, Besançon, les Editions de l’Imprimeur, 2000

Réappropriation d’un monument

Aujourd’hui, la cité comprenant ses espaces, ses monuments, et son patrimoine devient intouchable. La ville, comme tous les milieux, est un ensemble de contraintes et d’attraits. Pour survivre dans un milieu, l’homme doit pouvoir établir un équilibre entre les règlements et les bénéfices qu’il en tire. Les monuments sont cristallisés, or pour se réapproprier son espace urbain, l’être humain doit y avoir accès. L’instrumentalisation du patrimoine ne doit pas devenir celle de la ségrégation et de l’exclusion. Le monument naît dans une ville, à une époque donnée ; cela créé un ensemble de corrélations de lieux où certaines communautés se for-ment. Ces relations sont le fonde-ment même de l’urbanité. S’il on en exclu l’icône, il manque un maillon à la chaîne et en conséquence, les relations se déséquilibrent, c’est pourquoi il est si urgent de se réap-proprier les monuments.

A travers son symbolisme le mo-nument gère l’organisation d’une société. Il contribue à présenter l’identité d’une communauté. La restauration de sa mémoire est donc nécessaire à son inscription dans la continuité du temps.

Le patrimoine et le monument sont des ressources et leurs modes d’appropriations sont variés. La première est l’appropriation juri-dique, elle cristallise le monument et invoque une adaptation sélec-tive. Il existe aussi une appropriation affective et cognitive, qui implique l’homme dans la durée. Et enfin, l’appropriation identitaire et sym-bolique rattache l’homme au temps présent, grâce à un encrage en association avec le passé. Ces dif-férents modes d’appropriations ra-vivent la mémoire de l’être humain, que se soit par la restriction, ou la

mise en valeur des monuments. Le point de départ est la réactivation de la mémoire d’un lieu, afin de s’en réapproprier les dimensions. Mais ces belles théories sont diffici-lement mises en pratique. Réinves-tir et revaloriser afin de reconstruire les ressources est nécessaire à l’appropriation de l’espace.

Les différentes théories de prise en charge des monuments par les nombreuses pratiques de res-taurations passées ont permis à nos ancêtres de s’approprier leurs monuments. Au cours de la fin du XIXème et du début du XXème siècle, Viollet-Le-Duc (1914-1979), historien de l’art, architecte prati-cien et architecte des monuments historiques, lors de ses interven-tions de restauration, tend à récu-pérer la perfection stylistique du monument en éliminant toutes les stratifications historiques consi-dérées comme une altération à la forme pure. John Ruskin (1819-1900), préfère une conservation de l’état des monuments ; toute forme de restauration étant absurde, au-tant essayer de réanimer un mort. Il s’intéresse d’avantage au symbole qu’au style ; et la restauration est une forme de destruction emblé-matique du monument. Le destin de tout monument est la ruine. Il vise à protéger toutes les couches

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( SEPTEMBRE 2012 ) INTERVALLE ( S ) ( 19 )

ECHELLE DU PROJET - TEMPS CONCEPTUEL - PATRIMOINE PROSPECTIF

1- Le « maintenant » étant une combinaison d’un passé et d’un futur proches

Concept de tempsLe temps, en soi, est une pure

fabrication de l’esprit. Il n’est que la durée que l’on accorde aux choses. Bergson disait que « si le temps est quelque chose, il n’est qu’illusion ». Il ne sert qu’à établir des rapports relatifs au mouvement. Du latin « tempus », et de la racine grecque « temnein » : couper, le terme fait référence à une division d’un flot en éléments finis.

Notre esprit conçoit deux tempo-ralités: une chronologie physique, celle du temps vécu et des durées psychiques, celle du temps perçu.

L’homme a toujours rêvé de déli-miter le temps physique. Plusieurs milliers d’années avant notre ère, il avait compris qu’il existait un rythme des années, des saisons, de la lune, l’alternance des jours et des nuits, mais attribuait aux Dieux cette régularité cyclique. Les premiers outils pour caractériser le temps que se soit un dolmen, un menhir en Bretagne, ou un obé-lisque en Egypte, reposent sur des considérations diverses : tombes, marques de lieux religieux, repères pour voyageurs, repères astrono-miques, etc. Le gnomon, ancêtre du cadran solaire, simple bâton planté verticalement dans le sol, permettait facilement, en n’importe quel endroit, d’observer le mouve-ment de l’ombre du soleil ou de la lune. Vint ensuite les horloges, puis la photographie ; maitriser le temps a toujours rassuré l’homme sur le sens de son existence.

Chaque culture appréhende le temps à sa manière : les Occiden-taux étudient le passé pour pré-parer l’avenir, alors que, les Japo-nais vivent dans le « maintenant »1, l’avenir leur paraissant incertain, et pourtant, cyclique. Le monde judéo-chrétien se fonde sur le concept d’un temps rectiligne com-posé d’un passé, d’un présent, et d’un futur ; le tout progressant vers l’objectif de la «Terre promise ». Ain-si, dans l’architecture Occidentale,

la notion de temps est présente dès les premiers écrits de Vitruve. « Firmitas, utilitas, et venustas » : so-lidité, utilité, et beauté caractérisent un état « parfait » - au sens latin de finition ultime - qui conduira à la pérennité de l’ouvrage ; ce « parfait achèvement » pourrait être compa-ré à l’idée que ce fait un architecte occidental de la « Terre promise ».

C’est avec le temps physique que l’architecte doit travailler au sein de ses projets. Chaque réalisa-tion possède une dynamique parti-culière : la conception n’aura pas la même allure que la mise en œuvre, qui n’aura pas le même tempo que les attentes des utilisateurs, ou de la maitrise d’ouvrage. L’architecture est un art de « l’hétérochromie » : il faut réussir à régler les interactions entre les différents rythmes des intervenants, tout en entremêlant celle-ci à la temporalité propre du projet.

La réflexion sur les échelles de temps amène l’architecte à manier non seulement l’intégrité des bâti-ments dans un temps « physique » ; mais aussi à penser leur devenir fonctionnel dans un temps « psy-chique ».

Le temps psychique, ou perçu, est relatif à l’être, il n’est pas objec-tif. Un moment agréable ‘passera’ plus rapidement qu’une période ennuyeuse ; pourtant la chronolo-gie de l’univers n’est pas modifiée, c’est l’émotion associée au mo-ment qui en change la temporalité.

L’espace peut lui aussi être ca-ractérisé selon cette logique : un espace cartésien à trois dimensions n’est pas le même que celui, émo-tionnel, constitué par nos lieux de vie. La liaison entre le temps et l’es-pace se manifeste non seulement par l’acte de concevoir et de bâtir, mais aussi dans l’action d’habiter.

Face aux différents rythmes de la vie, la spatialité existe par l’appro-priation de lieux quotidiens où l’on trouvera un confort, ou un bien-être rassurant. L’espace habité est donc engendré par le temps passé en un lieu. Une localisation peut devenir signifiante, non pas pour des rai-sons logiques, mais parce qu’elle est un réservoir d’intentionnalités symboliques qui la transforme en patrimoine.

Ainsi chacun de nous a une iden-tité spatiale : une accumulation de lieux et de repères affectifs, qui nous ancrent au sein de l’espace. Cette identité est en corrélation avec un temps intime et personnel: celui de la conscience de soi. Par conséquent, on peut émettre l’hy-pothèse que l’espace-temps est le cadre de l’existence humaine.

Le temps est une notion à mul-tiples facettes. Un temps affectif correspondant à l’action d’habiter pourra engendrer une architecture; cependant, afin de faire perdurer cet « habiter », il doit s’adapter au travers d’un temps chronologique physique. Un projet doit être pros-pectif pour exister.

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 20 )

ECHELLE DU PROJET - TEMPS CONCEPTUEL - PATRIMOINE PROSPECTIF

L’architecture s’inscrit non seu-lement dans le temps mais en constitue aussi les repères chro-nologiques ; elle est le témoin du passé et de l’avenir. La durée d’une période ou d’un évènement est la condition sine qua non du développement d’une histoire, qu’elle soit rapide ou lente. Elle suppose la continuité du temps qui demeure, en opposition à l’instant. A l’inverse d’une période, l’instant est un temps de courte durée, qui peut défiler rapidement. Etymolo-giquement l’instant vient du latin instans qui peut se traduire par : imminent, prochain, voisin, mena-çant, pressant. L’instant est consi-déré comme présent, il se situe à la limite entre le passé et l’avenir. Cet instant est difficile à visualiser car il est si rapide que nous ne le per-cevons qu’après son passage. La notion d’architecture est opposée à celle de l’instant, elle correspond à celle d’un temps plus ou moins long. L’architecture peut constituer un repère de temps ou d’espace pour une population. Tout homme a besoin de repères et un instant ne constitue pas un repère fiable du fait de sa rapidité.

L’architecture ne s’inscrit pas dans l’instant car par définition il est court voire imminent, or la vocation de toute architecture est de durer. Même les structures dites éphé-mères sont vouées à une certaine postérité du fait des médias qui les archivent. Certes leur courte durée les rend célèbres, mais l’archivage fait perdurer cette célébrité à l’ori-gine provisoire. Le but de l’archi-tecture est de créer un espace hors de l’instant afin de « ramener la mesure humaine à la démesure de l’univers»1. Dans cette création, l’instant est exclu car il n’offre pas un sentiment de sécurité. Un projet doit donc s’inscrire dans le temps et non dans l’instant. Il ne doit pas

s’imposer brutalement, mais doit apparaitre progressivement en fonction des besoins ; il n’en sera que plus pérenne. La prospective d’un projet permet d’étudier les be-soins d’une société, afin de mieux comprendre les incidences de l’ar-chitecture sur un milieu ; et non pas de tester pour détruire ensuite, si l’édifice réalisé ne convient pas.

Le développement durable s’impose comme la nouvelle ligne de conduite idéale de nos socié-tés contemporaines. Comme si, tout d’un coup, nous prenions conscience que la contrainte d’édi-fices grandiose laissait une trace non négligeable sur leur contexte, parfois profitable par le passé, mais actuellement néfaste. Nous sommes aujourd’hui soucieux des impacts de l’architecture sur son milieu ; à première échelle urbaine et plus largement ouverte sur l’envi-ronnement. En tant qu’architecte, il nous est fondamental de prendre conscience des conséquences de

Un projet prospectifnos actes : ils façonnent des modes de vies au sein d’écosystèmes éta-blis. Comprendre les systèmes existants afin de créer une synergie permettra de s’établir en continuité avec le tissu présent. Qu’il s’agisse de la morphologie ou de l’anthropo-logie, en s’inscrivant en contradic-tion ou en cohésion avec le milieu, une imposition violente n’est pas la meilleure manière de marquer les esprits. En s’appropriant pas à pas un espace, nous comprendrons mieux ses modes de fonctionne-ment et serons plus vigilants des impacts de nos constructions.

Nous sommes dans un contexte de complète mutation culturelle et notre mode de vie quotidien change à une vitesse extraordinaire, que ce soit par l’apparition de nouveaux modes de savoir, de la rapidité des échanges ou de l’accélération de la création. Du fait de l’instanta-néité des constructions modernes et contemporaines, les possibilités d’adaptabilité et de modification des édifices pendant leur réalisa-tion se restreignent de plus en plus. C’est pourquoi il faut se poser les bonnes questions avant de concré-tiser certaines idées et permettre la mise en avant de la vision prospec-tive du projet. Ouvrir un débat et ne pas s’enfermer dans un processus prédéfini par certaines élites.

En tant qu’architecteil nous est fondamental de prendre conscience

des conséquences de nos actes : ils façonnent

des modes de vies

«Si nous nous passionnons pour la prospective, c’est qu’elle nous aide à choisir nos avenirs potentiels. Elle permet de faire émerger des lignes de choix collectifs et d’en débattre avant même que les erreurs ne soient commises. La prospective est d’autant plus utile qu’elle est

constituée dans des périodes de crise généralisée.(…) Nous avons la profonde conviction que l’avenir ne peut plus se

construire dans le sillage de quelques esprits éclairés. La nouvelle uto-pie que nous proposons de développer se veut collaborative et parti-cipative. Elle doit être négociée, combattue et soutenue tout à la fois,

elle doit être non pas un sujet de dispute mais un lieu d’échange où le débat contradictoire devient une richesse.»

Claire BAILLY et Jean MAGERAND, chronique Prospective, 2010

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ECHELLE DU PROJET - TEMPS CONCEPTUEL - PATRIMOINE PROSPECTIF

Le but de ces recherches n’est pas une peur de l’affirmation, mais une inscription petit à petit dans un milieu en collectant des indices afin de modeler la matérialisation des actes architecturaux. En prenant contact avec les riverains par l’in-termédiaire des nouveaux modes

de communication, en décidant une chose après l’autre plutôt que de matérialiser trop rapidement de grand gestes architecturaux peu si-gnificatifs, en adaptant le processus de création à l’édification contem-poraine, les projets constructifs futurs seront plus cohérents et

moins controversés. En imaginant un projet en interrelation entre les éléments, la porte est ouverte au débat afin de définir un avenir pro-metteur.

1- Catherine Millet, «Architectures de Jean Dubuffet», Art press, n°45, février 1981

Le Louvre est un des musées les plus grands et les plus visités au monde. Aujourd’hui, icône française muséale, il était par le passé la demeure de nombreux rois de France.

A l’origine, à la place de l’actuel Louvre, existait un château fort demandé par le roi Philippe Auguste en 1190 afin de protéger les parisiens contre les attaques normandes. Le plan était constitué d’une forteresse médiévale protégée par un fossé, des tours et un don-jon. En 1646, François Ier transforme le château défen-sif en en résidence luxueuse: il fait abattre une partie des enceintes pour les remplacer par une aile de style Renais-sance. Puis sous les règnes d’Henri II et de Charles IX, le reste des enceintes est démolie ; le château fort se transforme alors en château de style Renaissance. Henri IV décide de l’unir au Palais de Tuileries afin de créer un axe appelé projet du « grand dessein ». Enfin sous le règne de Louis XIII et de Louis XIV, la cour carrée est édifiée par les architectes Lemercier et Le Vau. Puis le projet crée et continué par les rois de France arrête son évolution durant le règne de Louis XIV qui décide d’établir le centre du pouvoir à Ver-sailles. Puis Louis XV lance comme projet de transfor-mer le Louvre en musée. Mais ce n’est qu’après la révolution que le destin muséal du lieu prend effet. En 1793 le musée est créé, mais le public n’y est admis

que le dimanche parce qu’il servait essentiellement à la formation des artistes de l’époque. Sous l’Empire, le Louvre entreprend sa car-rière internationale, et en 1802, Dominique-Vivant Denon (premier directeur du Louvre) en fait le plus grand musée du monde. Agrandi par Percier et Fontaine qui construisent l’aile de la rue de Rivoli. Sous Napoléon III, des ajouts ont encore lieu afin d’assurer la symétrie prévue par le « Grand Des-sein ».

Le Louvre tel qu’on le connaît aujourd’hui n’est pas sorti de terre en un jour, il est le résultat de l’addi-tion de modifications intelli-gentes des architectures et des styles selon les époques successives. Chaque roi a apporté sa touche et a ajou-té une pierre à l’édifice pour qu’il devienne le symbole qu’il représente aujourd’hui.

Dès 1981, François Mit-terrand veut redonner au musée son prestige et fait réaliser d’importants travaux de rénovation. La construc-tion d’une nouvelle entrée en forme pyramidale transforme une fois de plus l’aspect du musée sans pour autant en changer la cohérence. Inau-gurée en 1989, dessinée par Ieoh Ming Pei, architecte sino-américain, la pyramide du Louvre très controversée hier, admirée aujourd’hui, est à la troisième place par-mi les œuvres les plus pri-

sées du musée, et fait partie intégrante des symboles de Paris.

Château fort, puis palais royal et finalement musée, le Louvre est un excellent exemple de la réussite de l’implication du temps dans la construction d’une archi-tecture. Chaque époque a construit, modifié ou enlevé un ou plusieurs édifices afin d’arriver à un tout qui n’était pas figé dès le départ. Pourquoi notre temps pré-sent se borne à en fixer un état? La pyramide de verre, récemment construite par rapport aux siècles de vie du lieu n’en a pas modifié l’architecture originelle. Elle a alimenté la bataille entre anciens et modernes, pas-séistes et novateurs. Sans les bâtisseurs novateurs de chaque époque, le Louvre ne serait pas tel qu’il est au-jourd’hui, symbole de puis-sance et de culture. Chaque constructeur a osé édifier en continuité entre le passé et le futur, pourtant notre ère le fige dans un état qu’elle considère « parfait ». Il est dommageable d’assister à un tel blocage par les ins-titutions du XXIème siècle. Nous ne devons pas cesser d’ajouter des pierres aux édifices pour rester en conti-nuité avec la création.

Exemple du Louvre

Plan du Louvre, en 1202

Plan du Louvre, en 1553

Plan du Louvre, en 1610

Plan du Louvre, en 1642

Plan du Louvre, en 1677

Plan du Louvre, en 1810

Plan du Louvre, en 1961

Plan du Louvre, aujourd’hui

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 22 )

SYNTHES ( ) ENous comprenons l’architecture à travers différentes temporalités :

- Le temps créateur à l’échelle de l’espace - Le temps désynchronisé à l’échelle du projet - Le temps historique à l’échelle de la ville

Le temps est avant tout la perception d’un mouvement. Un mouvement dessine une trajectoire dont l’empreinte profilera une spacialité.

A l’échelle de l’espace, le temps créateur se traduit par une volonté qui composera entre des paramètres (tels que la lumière, la sonorité, et le mouvement) et l’affect qu’ils produisent, pour créer cette spatialité.

La conception d’un projet d’architecture passe par différentes phases de l’essai à l’erreur (du croquis à l’esquisse) pour arriver à une forme satis-faisante à un moment donné. En considérant une échelle de temps plus longue, cet état peut se révéler insuffisant face à de nouvelles attentes ou besoins. Un projet même prospectif, prenant en compte différents scéna-rios devra être remodelé un jour ou l’autre. L’utilisation entrainera toujours l’adaptation.

Le temps de l’histoire nous place à un point de vue présent sur le passé. Dans cette logique ,nous nous confrontons à la notion de patrimoine. Que faire de ce qu’on nous laisse, et comment le léguer à notre tour ?

Le patrimoine peut-être matériel ou immatériel. Le patrimoine immatériel représente une culture transmissible par

d’autres moyens que la pierre, la feuille ou l’objet. L’Unesco le répertorie et le protège. Il se transmet le plus souvent par la parole d’une génération à l’autre.

Le patrimoine matériel se compose d’éléments : naturel : la biodiversité ou paysage dépourvu de toute in

tervention de l’homme, mobilier : objets d’art ou chefs d’œuvre transportables, immobilier : architectures quotidiennes ou monuments.

Le temps créateur

Le temps désynchronysé

Le temps historique

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PROBLEMATIQU

HYPOTHES

SIT

PROPOSITIO

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( )

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E

E

E

N

Qu’il soit remarquable grâce à son échelle, son site ou par le traitement de ses abords, le monument est avant tout le legs d’un événement, il ré-sulte d’une volonté de laisser une empreinte dans l’histoire. Le monument historique transmet une série d’événements, il justifie son statut grâce à un jugement présent sur le passé.

Or tout monument vivant, finira par témoigner de plusieurs évènements, notre réflexion nous a donc poussées à considérer chaque monument comme un futur monument historique.

Si nous considérons que chaque monument devient historique, un autre type de classement (adaptable à chaque situation) fondé sur la conser-vation des façades et/ou toitures et/ou structures mettrait en valeur les cohérences, le sens et l’usage de l’édifice.

Ce nouveau type de classement faciliterait la réutilisation des monu-ments. Il permettrait de les conserver dans une temporalité, et ainsi de les rendre pérennes. L’histoire ne s’arrête pas au constat présent, elle se forge instant par instant.

L’hypothèse que le monument historique de Ecole Militaire de Paris, situé au coeur d’un axe patrimonial important, sera peu à peu vidé de ses fonctions avec l’arrivée du nouveau Ministère de la Défense à Balard, nous permet de partager notre affection pour ce lieu.

Nous proposons une reflexion sur le respect et la mise en valeur de l’existant, associée à un projet radical et contemporain.

Considérer le patrimoine comme une énergie.

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L’ECOLE MILITAIR( ) E

Nous partons du constat de la muséi-fication de Paris, avec ses lois ur-

baines et architecturales qui se rigidifient. Pourtant les réflexions politiques à l’ordre du

jour sont centrées sur un Grand Paris qui veut « prévoir un urbanisme complètement revu, une démarche soutenue par une refonte des aspects réglementaires qui contraignent trop souvent les projets audacieux»1.

La perception des architectes en charge du pa-trimoine étant exigible pour tout nouveau projet, elle démontre l’existence d’un besoin manifeste de confrontation avec la notion de patrimoine.

Dans cette optique, nous émettons l’hypothèse que l’élaboration d’un Institut National de la Recherche et du Patrimoine (INRP) est nécessaire à un Grand Paris durable, et en accord avec son temps.

Ce lieu de redéfinition du patrimoine aura sa place sur l’axe du Palais de Chaillot, du Champs de Mars, de l’Ecole Militaire de Paris, et de l’Unesco.

La colline de Chaillot abrite la Cité de l’Archi-tecture et du Patrimoine, réalisée suite au rap-port de Jean-Louis Cohen en 1998: « Le principe sur lequel se fonde la cité est précisément de permettre la rencontre et pourquoi pas le conflit entre toutes les dimensions de l’architecture dans l’histoire autant que dans le présent.»

Aujourd’hui, le projet de la Cité de l’Architec-ture et du Patrimoine est constitué par le Musée des Monuments Français, l’Ecole de Chaillot, et l’Institut Français d’Architecture (IFA).

La construction de l’Ecole Militaire destine le Champs de Mars à un être espace de manœuvres. Ce terrain fut le témoin des Expositions Univer-selles, dont la tour Eiffel construite en 1889, de-viendra le symbole international des prouesses de l’ingénierie Française. Notre institut conservera

Vue du bureau de Napoléon, actuel bureau de l’Etat Major

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Vue de la Galerie du «Chateau»

1- Phrase tirée de la description générale du Grand Paris

la liberté d’appropriation de cet espace vert, pour de futures fabriques éphémères ou temporaires.

Le siège de L’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) édifié place Fontenoy en 1959, a pour but de protéger et promou-voir le patrimoine matériel et culturel de l’humanité. Sa proximité avec l’Institut pérennisera sa localisation.

Sous le modèle et le programme du compagnon-nage aujourd’hui classé au patrimoine immatériel par l’UNSECO, les étudiants, professionnels, et cher-cheurs pourront se rencontrer autour des différents pôles de recherches et d’application, et débattre dans les espaces d’expositions, les ateliers d’expérimenta-tions, les restaurants, et autres espaces communs.

L’Ecole Militaire est un excellent cas pra-tique pour travailler l’illustre notion du patrimoine existant face à une volonté de création radicale.

Fondée en 1751, par Louis XV, cet ensemble de-vait rivaliser avec les Invalides. Les ambitions de ce monument ont évoluées au cours de sa concep-tion, sa construction, et sa destination. Au fil des an-nées, il a été complété par des édifices d’époques, et de styles différents ; cet amas d’architectures hé-téroclites est un parfait exemple de la notion de pa-trimoine, qui ne peut, et ne doit pas être figée.

L’implantation du ministère de la Défense à Balard, videra l’Ecole Militaire de ses usagers. Pour éviter que ce monu-ment ne dépérisse, nous proposons de le réinvestir.

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 26 )

ETUDE DES ÉVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

Après la guerre de la suc-cession d’Autriche (1740-1748), Maurice de Saxe, maréchal de France, qui venait de remporter la bataille de Fontenoy fit part au Conseil de la nécéssité de former les jeunes officiers. Les évolutions de l’art de la guerre impliquaient un changement dans les stratégies militaires. Paris-Duverney, secré-taire des finances du Roi Louis XV, se chargea de lui présenter un mé-moire qui n’attira pas son intêret.N’ayant pas obtenu satisfaction, ils réussirent à intéresser Madame de Pompadour, maîtresse du Roi, qui finît par le convaincre. Dans le contexte politique de la cour de Louis XIV, Madame de Pompa-dour réagit à la domestication de la noblesse en invoquant la nécés-sité de : «réanimer les vieux guerriers et d’égayer la fin de leur carrière par la vue constante de la jeunesse». Ces arguments ayant capté son attention, Louis XV ordonna la créa-tion de l’école militaire.

Le contexte

Louis XV

Madame de Pompadour,

Maurice de Saxe, portrait de Quentin de La Tour

«L’Ecole voit le jour grâce à la ren-contre de Maurice de Saxe qui en eut l’idée, Paris-Duverney qui en

fit le programme et le mena à son terme, Madame de Pompadour

qui en emporta la décision auprès de Louis XV et de Jacques Ange Gabriel qui en fut l’architecte.»1

Le Roi confie le projet à son archi-tecte Jacques-Ange Gabriel. L’édit du 13 janvier 1751 en fixa la mis-sion : « Entretenir et éduquer dans I ‘ art militaire cinq cent jeunes gentils-hommes de notre royaume nés sans bien… ». Ce projet étant celui de son règne, il devra rivaliser par son importance avec l’Hôtel des Invalides, construit 70 ans plus tôt.

L’architecte Jacques-Ange Gabriel est né à Paris le 23 octobre 1698 et mort le 4 janvier 1782. Dès 1730, Jacques-Ange Gabriel est désigné comme l’architecte du château de Versailles. En 1742, il devient Pre-mier Architecte du Roi, il jouit ain-si de la pleine confiance de Louis XV. . L’echelle de ses projets étant monumentale, leurs constructions étaient longues. Gabriel gérait déja à l’époque la notion d’adaptibilité face aux contraintes et au temps.

« Tout projet, disait-il, entraîne après soi de grandes modifications et ré-flexions de la part de l’architecte (…) Ainsi il ne sera pas étonnant que, dans le courant de l’ouvrage, je change en bien des occasions pour mieux faire »

Parmi ses réalisations les plus connues, nous pouvons citer la place Louis XV (aujourd’hui place de la Concorde 1757-1772), de nombreuses résidences royales comme le château de Compiègne (1751-1765), les transformations au palais de Fontainebleau, le Petit Trianon à Versailles (1762-1764) et l’opéra de Versailles (achevé en 1770).

Jacques-Ange Gabriel,architecte du Roi Louis XV

1- L’Ecole militaire, lieu de mémoire de l’équitation française, Colonel Hubert Derode, le lieutenant-colonel Jean de Préaudet et Claude Trabuc

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( SEPTEMBRE 2012 ) I NTERVALLE ( S ) ( 27 )

ETUDE DES ÉVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

En 1750, Pâris-Duverney présente au roi un mémoire dé-taillé sur ce que doit être le futur enseignement militaire. Sa réflexion s’inspire de l’exemple des Invalides et de Saint Cyr.

Il souhaite un grand bâti-ment principal à trois faces, l’une reservée au logement de l’Etat-Major, tournée vers la Seine, la deuxième pour les professeurs et l’administration vers Meudon, et la troisième pour les élèves, dirigée vers Paris. Duverney, soucieux de la qualité de vie et de l’hygiène dans cet édifice, établit un programme très détaillé. Il précise la nécessité de logement en chambres indivi-duelles pour empêcher les conta-gions. La partie arrière de l’Ecole devra comporter des bâtiments regroupant un ensemble très com-plet de fonctionnalités : une cuisine avec ses annexes, une boulange-rie, une buanderie, une lingerie, un manège, des écuries, quatre infirmeries (maladies contagieuses, élèves, officiers, et domestiques), et une chapelle. Il prévoyait également des galeries de communications entre les différents bâtiments. L’ensemble devait comporter un réseau de ca-nalisations desservant cuisine, infir-merie, buanderie, et permettant le nettoyage et l’assainissement de l’ensemble, véritable innovation. Il voulait doter la France d’un outil efficace, répondant aux exigences du siècle. Il l’exprimera à Gabriel en des termes clairs : « Il s’agit moins d’élever un édifice à la gloire du roi que d’en former un qui soit utile à l’Etat et conforme aux vues que l’on se pro-pose de l’éducation de cinq cents jeunes gens pour lesquels on le des-tine. Entre le beau et l’utile, il n’y a point à balancer lorsqu’on ne peut pas réu-nir les deux. Je crois que le pre

Du programme au premier projetmier principe auquel vous avez à vous attacher, est qu’il faut subordonner, et même sacrifier le beau à l’utile dès que les circonstances ne permettent pas que l’on concilie l’un avec l’autre » Gabriel aura néanmoins le génie et la persévérance néces-saire pour concilier pragmatisme et esthétique, au prix de remanie-

ments incessants de son projet pendant plus de vingt ans. Il pro-pose une première esquisse en dé-cembre 1750 et la construction des bâtiments utilitaires débutera sur la base de ces plans. (ci-dessous)

Projet initial de J.A. Gabriel, 1751,gravure de Le Rouge

Vue cavalière gravée par Le Rouge etn 1751

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 28 )

ETUDE DES ÉVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

Pllaine de Grenelle en 1730

Gravure de 1753

Le choix du terrain n’était pas annodin, la plaine de Grenelle, proche des Invalides offrait de vastes espaces. La construction des Invalides au siècle précé-dent a contribué à élargir la ville. Cependant, le site de l’Ecole mi-litaire est une vaste zone rurale avant le début de son édification.

Certains grands axes sont déjà dessinés, par l’Hôtel des Invalides et son esplanade, la plaine de Grenelle étant encore parcourue par des chemins dont le tracé se hasarde à travers les parcelles agraires.

Le projet consacré par l’édit de la création de l’école en 1751 doit rivaliser avec l’Hotel des In-valides.

C’est ainsi que sur la planche de 1753, les Invalides appa-raissent comme faisant partie des « environs » de l’Ecole Mili-taire, et les allées tracées autour de l’Ecole sont à l’image d’un monument qui aura un impact pour modeler la morphologie du 7ème arrondissement.

Les documents graphiques changent même d’orientation.

Gravure de 1752

Un nouveau pôle urbain

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( SEPTEMBRE 2012 ) I NTERVALLE ( S ) ( 29 )

ETUDE DES ÉVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

De l’ouverture à l’encloisonnementfonctions en 1775 et l’école

militaire ferme de 1776 à 1778. La conséquence de son avenir incer-tain est la construction anarchique de bâtiments divers en fonction des besoins. L’architecte Louis-Etienne Boullée succède à Gabriel en 1780. Il entreprend des travaux de désengorgement afin de créer l’actuelle avenue de Saxe. Ses tra-vaux seront complétés et achevés par Alexandre Théodore Brogniart, de 1782 à 1787, qui crée deux pavillons gardant l’accès de l’école sur la place Fontenoy.

En 1787, l’école militaire dispa-rait en tant qu’école pour des rai-sons économiques. La ville de Paris étudie le projet d’y installer l’hôtel Dieu mais cette étude n’aboutira pas. L’école abandonnée est pil-lée et saccagée, et sert de casarne et de dépôt de farine à partir de 1793. Bonaparte, devenu empe-reur y installe sa garde impériale jusqu’en 1815. Mais ce n’est que sous Napoloén III que l’école peu à peu enserrée acquiert son péri-mètre actuel, marquée par d’aus-tères façades, une activité tournée vers l’intérieur et perd toute com-munication avec la ville.

L’école militaire retrouve sa vo-cation initiale à la fin du XIXème siècle avec l’implantation de l’Ecole Supérieure de Guerre et conserve son aspect encloisonné.

Les transformations du XXème siècle ne concerneront que l’inté-rieur de l’enceinte où les différentes cours seront peu à peu colonisés soit par des constructions, soit par des parkings, ce qui complétera l’étouffement de l’oeuvre de Ga-briel qui perd ainsi toute sa lisibilité. «Les mètres carrés de l’Ecole militaire ne sont pas pour eux des mètres car-rés comme les autres, ce sont des mètres carrés inspirés.» Jean RIOM, Président de l’Associa-tion «Saumur, Mars 1991

Le premier projet est grandiose et donne à voir de tout côté. Le châ-teau (appellation donnée au bâti-ment principal, face au Champs de Mars), le manège et la chapelle (au centre du plan) sont mis en valeur dans cet ensemble ambitieux.

Si ce projet répond au pro-gramme, il est avant tout l’expres-sion de l’art de Gabriel. Même les cuisines et l’infirmerie sont traitées avec finesse et élégance. On peut remarquer que si l’on retrouve, comme aux Invalides, un jeu de cours, dénommées en fonction de leur usage, celles-ci sont en re-vanche très ouvertes et larges, cor-respondant au soucis de salubrité évoqué dans le programme.

Le projet initial sera jugé trop oné-reux. Cependant devant la nécessi-té de construire rapidement l’école, les ouvrages les moins nobles se-ront édifiés en premier , il s’agit de l’infirmerie, de la buanderie et de la lingerie. Ce sont ces bâtiments qui abritent les premiers cadets quand l’école ouvre ses portes en 1756. Par leur sobriété, ils consituent les bâtiments les moins onéreux. Pen-dant leurs constuctions, Gabriel revoit son pojet afin de respecter les budgets.

Malgrès les modifications de Ga-briel, dès 1755, le chantier menace de fermer. Ne subsistent du projet initial que les cours de l’infirmerie et de la lingerie; elles ne se présentent plus aujourd’hui sous leurs aspects originels: la « rotonde Gabriel » est le seul témoin de l’ancienne chapelle de l’infirmerie.

Le reste du projet de Gabriel aurait pu ne jamais voir le jour. Dès 1765, le projet a perdu tous ses bâtiments nobles, le château n’est même plus au programme, remplacé par une galerie surmontée d’une horloge, et reliant deux corps de bâtiments, l’un destiné aux cuisines, l’autre à la chapelle. plan de 1751 et plan actuel

Plan masse de 1765en gris les bâtiments déja construits

 

Plan masse de 1765. Les bâtiments en gris foncé sont déjà construits

Dans le projet de 1751, l’insertion de l’Ecole dans son environnement se marque par un espace qui ins-pire le respect grâce à ses façades austères, ou attire l’oeil par une co-lonnade ouverte qui filtre le regard. Les cours étaient ouvertes et des-sinnées vers l’extérieur. L’enveloppe constituait une peau perméable à double fonction: celle de l’échange avec l’extérieur et celle de la senso-rialité de l’espace en lui même.

Le bâtiment était conçu pour être ouvert sur la ville. La spécificité de l’ensemble réside d’une part dans l’articulation hierarchique des pleins et vides, du bâtiment de prestige avec les bâtiments d’accompagne-ments; d’autre part dans la variété des modes de relations de ce lieu, des volumes et ornements.

De 1766 à 1774, Gabriel, en désaccord avec Duverney, établit de nouveaux plans qui impliquent la destruction de bâtiments déjà construits afin de mettre en avant la symétrie du château. Louis XV meurt en 1774, Gabriel quitte ses

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 30 )

ETUDE DES ÉVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

Chronologie cartographiée de l’Ecole Militaire de 1751 à 1860

Carte de 1730

Carte de 1752

Carte de Cassini de 1756

L’école militaire s’est construite dans la plaine de Grenelle à proxi-mité des Invalides. Le site était une zone maraichère en périphérie de l’urbain. L’actuelle avenue de Lowendal, tracée en 1770, marque un axe partant des Invalides vers ce futur projet.

Un des premiers plan du projet ex-prime bien l’importance des voies et perspectives créés pour mettre en avant l’assise et l’axialité du bâtiment.Sa taille, ses axes, et sa com-plexité rivalisent avec les Invalides construits 70 ans plus tôt (volonté de Louis XV pour offrir à l’Ecole Royale sa dimension nationale).La plaine de Grenelle est choisie pour son aptitude à accueillir les terrains d’exercices nécessaires à l’Ecole, ses espaces deviendront l’actuel Champs de Mars.

Le premier projet est grandiose et s’étend presque jusqu’à la Seine. Il sera jugé trop onéreux.

La future composition, quoique énormément appauvrie, conserve-ra néanmoins le système d’hygiène et des proportions de vide/plein du projet initial.

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( SEPTEMBRE 2012 ) I NTERVALLE ( S ) ( 31 )

ETUDE DES ÉVOLUTIONS DE L’ECOLE MILITAIRE

Chronologie cartographiée de l’Ecole Militaire de 1751 à 1860

Carte de chasse du Roy de 1774

Carte de 1787

Carte de 1860

Louis XV meurt en 1774, et Gabriel son architecte en chef quitte ses fonctions en 1775, malade.

La fermeture de l’Ecole Militaire en 1776 rend son avenir incertain. Ce qui aura pour résultat la construction quelque peu anar-chique de bâtiments divers en fonction de besoins éprouvés, sans vision architecturale globale de l’école.

L’architecte Louis Etienne Boullée succède à Gabriel en 1780. Conscient des maux dont souffre déjà l’Ecole, Boulée entreprend des travaux de désengorgement, en appuyant des vues sur l’actuelle place Fontenoy et en créant ce qui deviendra l’Avenue de Saxe.L’Ecole acquièrt ainsi sa place dans un réseau urbain, à l’intérieur de l’enceinte parisienne de Louis XVI.

Avec la Révolution, l’école militaire perd son usage. Ce changement de destination durera un siècle où l’école sera pillée et transformée en caserne. Elle retrouvera sa voca-tion d’origine en 1880 avec l’Ecole Supérieure de Guerre puis l’Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale en 1949, organismes encore présents aujourd’hui. En 1860, l’école militaire est repré-senté comme un des monuments importants de Paris.

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 32 )

ETUDE DES MODENATURE ( ) S

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( SEPTEMBRE 2012 ) INTERVALLE ( S ) ( 33 )

Plan de repérage

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ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiment n° 1:Date de construction: 1773Gabarit: R+2+CProgramme: bureaux, bibliothèque, chapelle, logement Etat major, Catégorie: « Chateau de campagne»

Batiments n° 4 et 7:Date de construction: 1773Gabarit: RProgramme: --Catégorie: cloitreRemarque: structure renforcée

Batiment n° 2 et 9:Date de construction: 1767Gabarit: R+1+CProgramme: bureaux, enseignementCatégorie: facades noblesRemarque: cadrés par de petites cours

Batiment n° 5 et 6:Date de construction: 1773Gabarit: RProgramme: --Catégorie: pavillons de gardeRemarque: cloisonnent la Cour d’Hon-neur

Vue de la Cour d’Honneur- Batiment 1Vue de l’avenue de la Motte Piquet - Batiment1

Vue de la Cour d’Honneur - Batiments 1 et 7Vue de la Cour d’Honneur - Batiments 1 et 7

Vue de la Cour Riberpray - Batiment 9Vue de la Cour Riberpray - Batiment 2

Vue du batiment 1- Batiments 5 et 6Vue de la Cour Morland- Batiments 5 et 6

Batiments n° 1 / 2 / 5 / 4 / 6 / 7 / 9 1

97 4

2

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 35 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

Batiment n° 3:Date de construction: 1756Gabarit: R+1+CProgramme: bureaux, restaurants, salle de reception Catégorie: facades sobresRemarque: la rotonde était une infir-merie reconvertie en chapelle, et au-jourd’hui salle de reception

Vue du batiment 37 - Batiment 3Vue de l’avenue de la Cour Garnier

Vue du batiment 37 - Batiment 3Coté Cour Delatte

Vue de la Cour Leclerc Almandet

Vue de la Place FontenoyVue du105 avenue de Suffren 9e étage

Batiment n° 3

Page 36: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

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ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiment n° 8:Date de construction: 1773Gabarit: R+1+CProgramme: bureaux, équipements sportifs, amphithéatreCatégorie: facades sobres

Vue de la Cour MorlandVue de la Cour Baumel - Batiment 13 et 8

Vue de la Cour MalanotVue de la Cour Legrand

Vue de la Cour Bertier

Vue de la Place FontenoyVue du105 avenue de Suffren 9e étage

Batiment n° 8

Page 37: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 37 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

Batiments n° 11 / 44

Batiment n° 11:Date de construction: 1856Gabarit: R+1+CProgramme: bureaux, enseignement Catégorie: facades travailléesRemarque: batiment d’entrée pour l’enseignement

Batiment n° 44:Date de construction: 1856Gabarit: R+1+CProgramme: bureaux, enseignement Catégorie: facades travailléesRemarque: ancienne entrée pour les cavaliers

Vue de l’avenue de la Motte Piquet

Vue de la Cour Guercet

Vue de l’avenue de la Motte Piquet

Vue de la Cour Garnier

Page 38: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

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ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiments n° 10 / 43

Batiment n° 10:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+CProgramme: enseignementCatégorie: pavillonRemarque: batiment récemment rava-lé

Batiment n° 43:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+CProgramme: restauration / entrepotCatégorie: pavillonRemarque: ancienne prison

Vue de la Cour des Jardins

Vue de la Cour GarnierVue de la Cour Garnier

Vue de la Cour Garnier

Vue de la Cour RiberprayVue du patio

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 39 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

Batiments n° 22 / 23 / 24 / 25

Batiment n° 22:Date de construction: 1786Gabarit: R+1+CProgramme: ?? Catégorie: hybrideRemarque: Brogniart a respecté la continuité des facades sur la Cour Morland, mais s’est exprimé sur la Place Fontenoy

Batiment n° 25:Date de construction: 1786Gabarit: R+1+CProgramme: ?? Catégorie: hybrideRemarque: Brogniart a respecté la continuité des facades sur la Cour Morland, mais s’est exprimé sur la Place Fontenoy / Premier manège

Batiments n° 23 et 24:Date de construction: 1786Gabarit: RProgramme: -- Catégorie: pavillon de garde dit pa-villon du suisse

Vue de la Place Fontenoy - Batiment 22Vue de la Cour Malanot - Batiments 21 et 22

Vue de la Place Fontenoy - Batiments 24 et 23

Vue de la Place Fontenoy - Batiments 23 et 24Vue de la Place Fontenoy - Batiments 23 et 22

Vue de la Place Fontenoy - Batiment 25Vue du 105 av de Suffren 9e étage - Batiment 25

Page 40: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( 40 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiments n° 20 / 26

Batiment n° 20:Date de construction: 1786Gabarit: R+1+CProgramme: ?? Catégorie:

Batiment n° 26:Date de construction: 1786Gabarit: R+1+CProgramme: Ecurié, carrière, sellerie, vestiaire, bureauxCatégorie: ferme

Vue de la Cour Malanot - Batiment 20

Vue de la Cour Legrand - Batiments 20

Vue de la Cour Delatte - Batiments 26

Vue de la Cour Delatte - Batiments 26

Page 41: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 41 )

LE SITE DE L’ECOLE MILITAIRE AUJOURD’HUI

Batiments n° 12 / 13 / 14 / 16 / 17

Batiment n° 12:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+CProgramme: médiathèqueCatégorie:--Remarque: batiment récemment réha-bilité, abritait les services tels que le tailleur ou le bottier

Batiment n° 13:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+2+CProgramme: bureaux, logementsCatégorie: facades travailléesRemarque: escalier avec portes déro-bées

Batiment n° 14:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+1+CProgramme: bureauxCatégorie: caserne

Batiments n° 16 et 17:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: RProgramme: videsCatégorie: pavillons

Vue de la Cour BeaumelVue de la Cour Beaumel

Vue de la Cour Beaumel

Vue de la Cour LegrandVue de la Cour Legrand

Vue de la Cour LegrandVue de la Cour Beaumel

Page 42: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( 42 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiments n° 19 / 33 / 38

Batiment n° 19:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+1+CProgramme: archives et logements Catégorie: caserneRemarque: meutrières sur rue et portes fenetres sur cour

Batiment n° 33:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+1+CProgramme: archives et logements Catégorie: caserne

Batiment n° 38:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+1+CProgramme: archives et logements Catégorie: caserneRemarque: meutrières sur rue et fe-netres sur cour, restauré par l’Agence Prost en 2012

Vue de la Place Fontenoy - Batiment 19Vue du 105 av de Suffren 9e étage - Batiment 19

Vue de la Place Fontenoy - Batiment 33Vue de la Cour du Lazare - Batiments 33 et 38

Vue de l’av de Lowendal - Batiment 38

Page 43: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 43 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

Batiments n° 31 / 32

Batiment n° 31:Date de construction: Début XXeGabarit: RProgramme: techniqueCatégorie: annexe

Batiment n° 32:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: RProgramme: techniqueCatégorie: halles / hangar

Vue de la Cour du Lazare - Batiments 31 et 32

Vue vers la Cour du Lazare - Batiments 32 et 31

Vue vers la Cour du Lazare - Batiments 32 et 34

Vue de l’avenue Lowendal - Batiment 32Vue de l’avenue Lowendal - Batiment 32

Page 44: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

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ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiments n° 34 / 35 / 36 / 37

Batiment n° 34:Date de construction: 1767Gabarit: R+1+CProgramme: infirmerie, Catégorie: hôtel particulier

Batiment n° 35:Date de construction: début XXème

Gabarit: RProgramme: maréchalerie Catégorie: halle

Batiment n° 36:Date de construction: début XXème

Gabarit: R+1+CProgramme: box chevaux Catégorie: caserne

Batiment n° 37:Date de construction: début XXème

Gabarit: R+CProgramme: archives et logements Catégorie: halle

Vue du Batiment 42- Batiment 34

Batiment 35

Batiments 36

Batiments 36 et 37 Vue de la cour Garnier - Batiment 37

Vue du batiment 42 - Batiments 36

Page 45: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 45 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

Batiment n° 42 / 45 / 46 / 48

Batiment n° 42:Date de construction: Début XXeGabarit: RProgramme: manège, garage, hangarCatégorie: halle

Batiment n° 45 / 46 / 48:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: RProgramme: acueilCatégorie: pavillon

Vue de la Cour Garnier - Batiments 42

Vue intérieure - Batiments 42

Batiments 45 et 46

Vue de la place Joffre - Batiment 45, 46, 48 et 38 Batiment 46 et 48

Batiment 42

Vue de l’entrée principale - Batiment 42

Page 46: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( 46 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Batiment n° 21

Batiment n° 21:Date de construction: Napoléon IIIGabarit: R+CProgramme: amphithéâtre, réception Catégorie: halleRemarque: ancien manège

Vue vers la cour Malanot - Batiment 21

Vue de la cour Malanot - Batiment 21 Vue de la cour Malanot - Batiment 21 et 18

Vue av de Lowendal - Batiments 21

Vue de l’UNESCO - Batiment 21

Page 47: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 47 )

ETUDE DES MODENATURES DE L’ECOLE MILITAIRE

Batiment n° 49

Batiment n° 49:Date de construction: XXIème

Gabarit: R+2Programme: bureauxCatégorie: temporaireRemarque: Algeco

Vue de la Cour Guercet - Batiments 49

Vue vers la Cour des Jardins - Batiments 49 et 10

Vue de la Cour des Jardins- Batiments 49 et 12

Vue de la Cour Beaumel - Batiments 49, 12 et 16

Page 48: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( 48 )

LE SIITE DE L’ECOLE MILITAIRE AUJOURD’HUI

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

L’Ecole se trouve sur la rive gauche de Paris, à proximité de l’Hotel des Invalides.

A l’origine l’Ecole Militaire devait suplanter les Invalides. On constate aujourd’hui que l’hôtel des Invalides a conservé le lien avec son espla-nade ce qui rend son empreinte plus signifiante que celle de l’Ecole Militaire coupée du Champs de Mars par la circulation.

Malgré tout, l’axe dessiné par le monument existe toujours.

Le monument a donc structuré son environnement, comme l’avait fait auparavant l’hôtel des Invalides.

Cet axe abrite aujourd’hui une série de lieux en rapport avec le pa-trimoine: le Palais de Chaillot, avec l’Ecole de Chaillot, le Champs de Mars et la Tour Eiffel, legs des ex-positions universelles et l’UNESCO, centre du patrimoine mondial.

L’Ecole militaire a structuré l’ur-bain, mais dans la pratique journa-lière, ce monument est comme un mur. En s’intéressant aux typolo-gies de quartier, on comprend que son influence n’est que théorique.

Différents types de quartiers

Axe patrimonial

Axes historiques

Proportions monumentales

Constat - Echelle urbaine

«Quartiers administratifs»«Quartiers usuels»

«Quartier identificatoire»

Page 49: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 49 )

LE SITE DE L’ECOLE MILITAIRE AUJOURD’HUI

Constat - Echelle du quartierCette echelle confirme l’encercle-

ment du site par l’arrivée de la circu-lation. L’Ecole Militaire a structuré son environnement, cependant, il subsiste une rupture avec le champ de Mars due à une importante voie de circula-tion

La proportion des pleins et des vides met en exergue la différence de densité entre le site et son contexte.

L’Ecole militaire semble vide par rapport aux îlots environnants. En effet l’espace d’une cour peut se révéler être la surface d’un îlot rési-dentiel.

Seul 22% sur les 15 hectares du site sont construits.

L’étude du programme montre que le Champs de Mars (au départ terrain pour les manœuvres mili-taires) s’est détaché du monument et sert de lien entre deux quartiers commerçants, face à l’enceinte mi-litaire qui se détache complètement pour n’être plus qu’une partie de ville autarcique et austère.

Le quartier administratif de l’Ecole est enclin aux grands orga-nismes tels que les ministères.

Malgré un programme hétéroclite, les flux civils, militaires et unescains ne se mélangent pas.

Les travailleurs de l’Unesco sont obligés de contourner l’enceinte de l’Ecole et les civils ne font qu’ignorer l’existence du lieu.

Dans l’enceinte même du site les flux sont différenciés en fonction des activités.

Aucun n’a de vision globale, le site constitue une hernie dans la ville au lieu d’un repère.

1919 - 1954

1852 - 1880

1783 - 1803

1902 - 1919

1840 - 1852

1670 - 1783

1880 - 1902

1803 - 1840

Antérieurs au début du XVIIe siècle

Différents types de flux

Activités programmatiques

Densité pleins / vides

Historique des voies

Zones de marchéEspaces verts

Ministère de la PosteMinistère de s affaires sociales

Ministère de la jeunesse et du sport

Flux equestre

UNESCO

Flux UNESCO

Enseignements militaires

ParkingsFlux militaires / automobile

Enseignement equestre

Flux civils

RestaurantsCommerces

Page 50: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( 50 )

LE SIITE DE L’ECOLE MILITAIRE AUJOURD’HUI

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Plusieurs vagues de construc-tions ont aboutis à l’encloisonne-ment du site sous Napoléon III. Depuis, les espaces vides sont colonnisés petit à petit réduisant la lisibilité de l’Ecole Militaire.

Le classement en toiture et fa-çade concerne pratiquement tous les bâtiments de l’édifice. Les par-ties les plus anciennes comme le château, sa cour et la rotonde Ga-briel, sont, eux, classés en totalité.

La place est limitée pour de nou-veaux édifices.

Ces cours sont hiérarchisées par rapport à l’axe historique.

Napoléon III

1773

XXIe

1786

1767

XXe

1780

1756Historique des constructions

Classement des bâtiments

Hierarchie des espaces

Evolution typologie

Sols classésClassé en toitures / facades

Classé en totalitéPossibilité de démolition

Constat - Echelle du site

Une typologie de cour est pré-sente sur le site.

Page 51: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 51 )

LE SITE DE L’ECOLE MILITAIRE AUJOURD’HUI

Les cohérences de ces cours existent par le plein ou le vide et leurs utilisations.

Typologige

L’actuelle entrée principale se situe au Nord-Ouest du site ce qui provoque des flux orientés et sans issues.

Les circulations dans l’en-ceinte de l’Ecole Militaire coupent les communications et le vide du site est colonisé par des parkings.

Typologies façades

Flux

Circulation

Constat - Echelle du site

Fondées sur ce système de cours, des cohérences archi-tecturales se dégagent, que la plus part des interventions ont respectées même à travers les âges.

Par exemple, Brogniart avait suivi le dessin des façades de la grande cour pour s’offrir le luxe de la création sur la place Fon-tenoy.

Parking Circulation

Cohérence respectée

1756

Façades Brogniart

Brogniart

Page 52: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( 52 )

ECHELLE URBAINE - HYPOTHESES PROJET

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Premières hypothèses

Existant

Afin de ne pas s’enfer-mer dans une solution architecturale qui pourrait être candide ou interpré-tée comme une simple gestuelle contemporaine, nous avons exploré dif-férentes interventions de façon radicale, à la re-cherche d’un projet com-posite adapté à ce lieu hétéroclite.

1

3

2

4

1

2

34

diagramme existant conservé démoliprincipe recrée existant construitimage 3dmaquette 1/5000e

Page 53: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 53 )

ECHELLE URBAINE - HYPOTHESES PROJET

Premières hypothèsesDémolition

Retrouver la cohérence historique en ne conser-vant que les deux élé-ments les plus anciens. La ville reprendrait pos-session du site par de nouveaux ilots conformes à la typologie la plus an-cienne dans les quartiers alentours.

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Ajouts

Rester en continui-té avec la colonisation constatée. Le site attein-drait ainsi sa densité maximale.

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ECHELLE URBAINE - HYPOTHESES PROJET

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Premières hypothèses

Visées

Relier et traverser l’édi-fice en jouant sur l’axia-lité. Le site en deviendrait plus perméable.

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Restructuration

Redonner une cohé-rence classique fondée sur une architecture de cour. Le site fonctionne-rait par une programma-tion en ilots.

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 55 )

ECHELLE URBAINE - HYPOTHESES PROJET

Premières hypothèsesEnterrer

Utiliser les sous-sols pour traverser le site sans le dénaturer. Le site ga-gnerait en accessibilité, tout en ayant une strate respectueuse de l’exis-tant.

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Draper

Créer une nouvelle topographie pour garder une empreinte. Le site pourrait évoluer tout en conservant une trace de son passé.

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ECHELLE URBAINE - HYPOTHESES PROJET

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Premières hypothèses

Interventions ponctuelles

Placer des repères pour qualifier l’espace.

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Envelopper

Une double peau pro-tégerait l’édifice. Son uti-lisation serait restreinte à son enveloppe.

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ECHELLE URBAINE - HYPOTHESES PROJET

Premières propositions

Affirmation

Jouer sur l’espace des cours et sur l’axialité du monument, tout en occu-pant un espace qui émer-gerait du sol pour garder une empreinte où serait enterré pour respecter l’existant.

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Compromis

Respect

Notre deuxième ré-flexion s’est appuyée sur la composition de nos hypothèses sélec-tionnées en fonction des situations.

Notre première intuition était celle de l’intervention classique fondée sur une architecture de cour.

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diagramme existant conservé démoliprincipe recrée existant construitmaquette 1/5000e

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LE SIITE DE L’ECOLE DEMAIN

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Intentions - Echelle urbaineL’Ecole fonctionnera en lien avec

le Champs de Mars comme les Invalides avec ses jardins et son esplanade.

Grâce à une réapropriation du champs de Mars, ainsi qu’une ou-verture au public du site, l’Ecole Militaire retrouvera sa place au sein de son axe historique.

Les visiteurs eux aussi pourront retrouver cette ligne de force la pra-tiquant physiquement.

En plaçant un programme rela-tif au patrimoine au sein du site, L’école trouvera sa place en tant qu’épicentre programmatique afin de compléter l’axe patrimonial préexistant formé par l’Ecole de Chaillot, l’UNESCO et le Champs de Mars.

Par la réhabilitation et l’ouverture de l’Ecole, le quartier identificatoire reprendra sa place autour du mo-nument.

Et le quartier usuel se recentrera sur le monument afin de créer une continuité avec les quartiers com-mercants du Gros Cailloux et de la Motte Piquet Grenelle.

Différents types de quartiers

Programme patrimonial

Axes historiques

Proportions monumentales

«Quartiers administratifs»«Quartiers usuels»

«Quartier identificatoire»Flux velos/chevaux/livraison/secours

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 59 )

LE SITE DE L’ECOLE DEMAIN

Intentions - Echelle du quartierL’avenue de la Motte-Picquet

devient pietonne en surface afin de reconnecter le château au Champs de Mars. Les flux automobiles et bus seront enterrés.

La densité de l’Ecole augmente mais conserve son statut de monu-ment grâce au traitement de ses abords non construits.

Grâce aux activités, la ville péné-tre peu à peu dans le site.

La reconfiguration de l’école per-mettra aux différents usagers du quartier de se croiser.

Les travailleurs de l’UNESCO ne sont plus obligés de contourner l’enceinte de l’Ecole. Les civils ne peuvent plus ignorer l’existence du lieu.

Dans l’enceinte même du site les flux sont toujours différenciés en fonction des activités mais ils se mélangent.

1919 - 19542012

1852 - 1880

1783 - 1803

1902 - 1919

1840 - 1852

1670 - 1783

1880 - 1902

1803 - 1840

Antérieurs au début du XVIIe siècle

Différents types de flux

Activités programmatiques

Densité pleins / vides

Historique des voies

Zones de marchéEspaces verts

Ministère de la PosteMinistère de s affaires sociales

Ministère de la jeunesse et du sport

Flux equestreFlux velos/chevaux/livraison/secours

UNESCO

Flux piéton unescainFlux piéton intérieur

Enseignements militairesEnseignement equestre

Flux publics

RestaurantsCommerces

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LE SIITE DE L’ECOLE DEMAIN

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

La colonisation du site continue mais contribue à en améliorer sa li-sibilité. Seuls deux bâtiments seront démolis: les algécos et la manège qui pour ne sont pas cohérents face à la composition majeure.

Nous proposons un autre type de classement qui permettrait une meilleure adaption du lieu en clas-sant les enveloppes (façades et/ou toiture et/ou structures).

Le classement deviendrait global et non plus particulier.

La typologie préexistante sous forme de cours est conservée .

Napoléon III

1773

XXIe2012

1786

1767

XXe

1780

1756Historique des constructions

Classement des bâtiments

Typologie

Classé

Intentions - Echelle du site

Hierarchie

L’axialité du lieu est réinterpré-téé. La typologie de cours s’oriente non plus hiérarchiquement par rap-port à l’axe historique, mais selon l’axe solaire que nous considérons comme pas patrimoine actuel.

Certaines cours restant orientées selon l’axe historique pour respec-ter les cohérences préexistantes.

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 61 )

LE SITE DE L’ECOLE DEMAIN

Nous différencierons les cours non plus par le plein ou le vide mais par des jeux de niveaux.

Les nouvelles cours orientées sur l’axe solaire seront semi-en-terrées.

Evolution typologie

Nous restons en continuité avec la démarche existante pour l’im-plantation des façades du projet. Comme un jeu de trompe l’oeil, l’expression contemporaine du pro-jet n’affectera pas les cohérences architecturales que nous pouvons respecter.

La matérialité marquera par le contraste notre intervention et indi-quera la destination des bâtiments.

Les flux sans issues de-viennent traversant. Le site devient poreux et son entrée principale redevient la porte du «château».

Le site devient piéton avec un parcours pour les chalants et des raccourcis pour les usagers de l’école dont les matérialités au sol dépendra de la vitesse de parcours. Plus le cheminement sera rapide, moins le matériau sera ductile.

Des voies de livraison seront pratiquées par des vélos et des chevaux au quotidien. Elles met-tront en avant le système d’îlots programmatiques.

Evolution des modénatures

Flux

Circulation

Intentions - Echelle du site

Vélos Chevaux Pompiers

Scolaire + UsagersChalants

Cohérence respectée

Cohérences existantes

1756

Napoléon IIIFaçades Brogniart

Cohérences recrées

Brogniart

Futur

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LE SIITE DE L’ECOLE DEMAIN

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Fonctionnement programme

Pôle enseignement théorique

PROGRAMME

METIERS DES COMPAGNONS

Pôle métallerie

Pôle expositions

Pôle médiathèque

Pôle biodiversité

Pôle vie quotienne

Pôle forum

Pôle bois

Pôle nouvelles technologies

Pôle recherche

Pôle pierre

Salles de cours

ForgeronsMétalliersChaudroniers

Expositions temporaires / Permanantes

Plâtriers staffeur / Maçons

Médiathèque

EquitationPaysagisme

Logements / Services de proximité

Restauration / Cafés

Théorique

Mécaniciens de précision

EbennistesCharpentiers / Couvreurs

Tailleurs de pierre

Amphithéâtres

Théorique

Programme

Pour que le sens d’un monument perdure, nous proposons de conserver sa fonction mais d’actualiser son usage. Située au coeur d’un axe patrimonial important,l’Ecole Militaire devient l’Ecole du Patrimoine.

Le patrimoine étant pluridisciplinaire, cette école abritera les Compagnons du devoir (le sys-tème d’apprentissage du compagnonage est une méthode d’apprentissage rigoureuse classée par l’UNESCO au patrimoine immateriel français), des élèves d’écoles relatifs à la construction (urbanisme, architecture, ingénérie, paysagisme), des agences d’architecture, d’urbanisme ou de paysagisme ainsi que des visiteurs afin de créer une formation professionnalisante.

Il permet d’allier la théorie à la pratique.

Le programme est centré sur deux pôles théoriques reliés par une médiathèque. Les ateliers des Compagnons viendront se brancher autour des pôles théoriques et s’implanteront dans les bâtiments réhabilités en fonction de leurs besoins.

Page 63: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 63 )

LE SITE DE L’ECOLE DEMAIN

Nous avons placé les activités en accord avec les espaces offerts par l’actuelle école. Deux pôles d’enseignement théoriques s’organisant autour de patios. La médiathèque se situe au sein du château. Les métiers des compagnons se regroupent par thème :

- Autour du bois, les charpentiers, les ébénistes, les couvreurs et les menuisiers partagerons le RDC de l’artillerie pour les cours théoriques et deux ateliers pour la mise en pratique dont un neuf.

- Autour de la pierre, les plâtriers staffeurs, les maçons et les tailleurs de pierre partagerons le RDC de la cavalerie pour les cours théoriques et deux ateliers pour la mise en pratique dont un neuf.

- Autour du métal, les forgerons, les métalliers et les chaudronniers s’établiront dans l’ancienne maréchalerie où se trouve un puit. - Autour de la biodiversité, les paysagistes côtoieront les chevaux.- Autour des nouvelles technologies, les mécaniciens de précision s’établiront dans un bâtiment neuf semi enterré.

Les anciennes casernes abriterons des services de proximité et des galeries couvertes. Un pôle recherche sera situé en liaison avec l’UNESCO et des espaces d’expositions se placeront en façade sud-est du site.

Au centre, un forum qui fonctionnera comme une place publique; il abritera les équipements relatifs à la restauration et sera ouvert auxx usagers du site comme aux visiteurs et habitants des quartiers environnants.

Page 64: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

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LE SIITE DE L’ECOLE DEMAIN

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Sol

Se creuse pour assoir des lieux

Se soulève pour abriter du programme

S’oriente sur la course du soleil

S’adapte à la composition existante

Paysage de lieux

Un projet hybride est proposé jouant avec le sentiment de trompe l’oeil grâce à une architecture prismatique qui compo-

sera un paysage.

Concept

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 65 )

LE SITE DE L’ECOLE DEMAIN

Plan masse

Coupe d’intention

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LE SIITE DE L’ECOLE DEMAIN

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Plan RDC

Vue selon l’axe historique

Vue selon l’axe historique

Vue selon vers le nord

Vue selon vers le sud

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LE SITE DE L’ECOLE DEMAIN

Plan RDC

Coupe longitudinale

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LE SIITE DE L’ECOLE DEMAIN

INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 )

Zoom bois

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plan coupe vue de l’entrée

4 000m2

dont 1 200m2 neufs

Le rez de chaussée de l’ancienne artillerie abri-tera les classes théo-riques sur le thème du bois.

Un atelier pour les me-nuisiers et les ébénistes sera dans l’ancienne prison et un neuf sera construit pour les char-pentiers

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( SEPTEMBRE 2012 )INTERVALLE ( S ) ( 69 )

LE SITE DE L’ECOLE DEMAIN

Zoom siderurgie

123

2 400m2 neufs

Les mécaniciens de précisions s’établiront dans un bâtiment neuf adaptés pour leurs équi-pements.Qui fonctionne-ront sur deux niveaux : en partie basse, la pra-tique et en partie haute la théorie.

plan coupe vue de l’entrée

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 70 )

PROJE ( ) T

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( SEPTEMBRE 2012 ) INTERVALLE ( S ) ( 71 )

MANIFEST( ) E

Expérimenter la notion de patrimoine à entretenir en prenant comme cas concret l’Ecole Militaire de Paris, nous permet de dégager trois points essentiels pour péréniser un monument:

1- Connaître pour partager

Nous sommes parties d’une étude sensible de l’école afin de proposer une intervention sensée, respectueuse mais contem-poraine.

Une typologie de cour rythmait le lieu, nous l’avons réinterpé-tée. Des modénatures qualifiaient une composition, nous pro-posons des facades neutres pour compléter certains gabarits. Enfin, le programme a été placé en fonction des qualités exis-tantes des espaces.

2- Parcourir pour appréhender.

Pour ouvrir l’ecole militaire à la ville, son enceinte n’était pas à démolir mais simplement à percer. Un obstacle contraignant peut aussi être struturant s’il participe à la compréhension du lieu.

Orienter des flux grâce à des passages. Créer des points d’en-trée afin de mettre en valeur la profondeur du site. Requalifier le sol pour orienter le parcours. Jouer sur les niveaux pour décou-vrir le potentiel du lieu. Chaque intention doit faciliter la lisibilité du site.

3- Contraster pour respecter

L’histoire du monument doit continuer de s’écrire par strates en accord avec leur temps.

Un contraste de formes, de materialité mais aussi d’usage doit rester en continuité avec la composition, la cohérence et la fonction du lieu. S’exprimer sans interompre une conversation architecturale existante.

Nous avons travaillé le sol comme un paysage. Il se creuse pour asseoir des jardins, se soulève pour abriter du programme, s’oriente sur la course du soleil et s’adapte à la composition existante. Une architecture prismatique appuie notre interven-tion contemporaine en permettant une découverte ou redécou-verte du lieu.

Un patrimoine doit être offert avec son mode d’emploi. Un héritage ne doit pas être perçu comme un fardeau, mais plu-tôt comme une impulsion. La transmission ne doit être qu’une réactivation de la mémoire.

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INTERVALLE ( S ) ( SEPTEMBRE 2012 ) ( 72 )

Nous remercions Marlène Ghorayeb (Historienne de l’urbanisme),

Catherine Blain (Docteur en projet architectural et urbain), Carl-Frédrik Svensdedt (Architecte),

Benjamin Mouton (Architecte en chef des monuments historiques) Gian Maurizio (Architecte)

Stéphane Paoli (Journaliste, France Inter), Cyrille Tuot (Architecte, Secrétaire Général de la SADESA), et

Josserand Crochet (Architecte).

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Diane Brédy-Sidos Elisa Querub-Durand

REMERCIEMENT ( ) S

SOURCE ( ) S

AUTEUR( ) S

PATRIMOINE

TEMPS

MONUMENTS

PAYSAGE

DETOURNEMENT

REDECOUVERTE

Page 73: Temps et architecture, un patrimoine à redéfinir, E. Querub & D. Bredy, 2013

IDENTITE

PATRIMOINE

ARCHITECTURE OBLIQUE

RENCONTRE

TEMPS

MONUMENTS

PAYSAGE

ARCHITECTURE

RESPECT

COMPOSITION

DETOURNEMENT

RECYCLAGE

LIBERTE

REDECOUVERTE

MODERNITE

TRADITION

CULTURES

INSTITUTION

INTERVALLE

REAPPROPRIATION

MONUMENTS HISTORIQUES

ECOLE MILITAIRE DE PARIS