1 Licence science de l’éducation Module formation enseignant Les nouvelles technologies dans l’enseignement Julien Morice Frederique Mary Clothilde Pinault
Mar 22, 2016
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Licence science de l’éducation
Module formation enseignant
Les nouvelles technologies dans
l’enseignement
Julien Morice
Frederique Mary
Clothilde Pinault
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INTRODUCTION
L’introduction de nouvelles technologies dans le système éducatif français, depuis les années
60, a bouleversé le « paysage scolaire ». Il faut entendre par « nouveaux outils
pédagogiques », tous les outils servant à faciliter, voir améliorer l’action éducative tel que : le
magnétoscope, le digital vidéo disque (DVD), rétroprojecteur, et surtout l’ordinateur qui est
devenu un outil fondamental pour l’école, car en plus d’être un « outil de savoir », il est
devenu un outil pour la production de documents et l’apprentissage des disciplines. Le
multimédia et Internet constituant le plus récent épisode de la saga de l’informatique
éducative.
Cette utilisation massive de l’informatique, des nouveaux outils de l’information et de la
communication à l’école s’est faite dans un laps de temps très court, et de ce fait a généré des
bouleversements importants et rapides.
Le corps enseignant a du très rapidement intégrer l’outil informatique dans ces cours et
s’adapter à ces nouveaux outils : les réactions n’ont pas manqué d’être vives! Ces
transformations matérielles ont indubitablement influencé les buts, les valeurs et les moyens
d’action de l’homme, enseignants et apprenants. Elles tiennent aujourd’hui une place
prépondérante dans la vie sociale des individus dans nos sociétés modernes et en particulier
dans les activités éducatives. On ne peut ignorer la multiplication des logiciels éducatifs à
l’attention des enfants et ceci pour toutes les classes d’âges.
Mais l’introduction de ces nouvelles technologies dans le « paysage scolaire » remet en cause
notre conception de l’éducation et de la pédagogie. La difficulté réside dans l’analyse de ces
nouvelles technologies, tout particulièrement dans l’analyse de leur influence sur l’élève, sur
l’enseignant et le bien fondé de leur utilité : est-ce ou non bénéfique pour l’enfant ? Va t-il
intégrer plus facilement certaines notions, apprendre plus facilement à lire, écrire…?
L’informatique stimule t- elle la curiosité de l’élève, est-ce un outil interactif, favorisant la
communication entre élèves, entre élèves et enseignants ou au contraire n’est ce pas nocif
pour la vie sociale d’une classe ?
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Etudier les nouvelles technologies c’est surtout se poser la question de leur intégration. Une
intégration qui doit être à la fois systémique et tropique pour que cette intégration soit une
réussite. Il faut entendre par « intégration systématique » : l’intégration des nouvelles
réformes, législations politiques… en matière d’éducation, pour cela les décisions politiques
doivent être en corrélation avec les attentes et les besoins de l’école.
Dominique Schnapper parle également « d’intégration tropique » qui revête un aspect plus
microsocial. Elle correspond, dans le cadre de notre sujet à la manière dont le personnel
enseignant, les élèves vivent l’introduction de nouvelles technologies au sein du système
éducatif français.
S’il semble qu’elles n’aient pas le pouvoir de réformer les pratiques éducatives, leur
introduction dans le système éducatif français n’en n’est pas moins au cœur d’un débat
passionné.
C’est parce qu’elles remettent en cause la fonction de transmission du savoir de l’enseignant
et par la même, le mode d’acquisition des savoirs par l’élève qu’elles suscitent un tel débat !
Débat auquel nous allons participer de la manière la plus objective possible. Pour cela, nous
construirons ce dossier à l’aide de références bibliographiques et d’entretiens qui sont au
nombre de trois. Ces trois enseignantes interrogées exercent dans deux écoles primaires
différentes : « Ecole des Verts Prés » et « Ecole du Petit Gobert » à Nozay (91).
En premier lieu, nous définirons le terme : « nouvelles technologies », ceci afin que le lecteur
cerne mieux notre sujet. Après quoi, il nous est apparut important de dresser un historique
des innovations technologiques qui ont bouleversé l’école.
La première partie sera traitée à la lumière des sciences de l’éducation. Puis, dans notre
seconde partie, intitulée : « Nouvelles technologies : adaptations et utilisations », il sera
question de l’utilisation des nouvelles technologies dans des situations scolaires concrètes,
ainsi l’accent sera sur le rapport des enseignants et des élèves avec ces nouvelles
technologies. Enfin, dans notre dernière partie, nous confronterons différents avis sur la
question, afin de mettre l’accent sur les avantages, inconvénients, coûts et accessibilité des
nouvelles technologies.
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I-Le cadrage
Comme nous l’avons précisé, dans l’introduction, nous allons dans un premier temps définir
le terme « nouvelles technologies », puis nous dresserons l’historique de leur intégration au
sein de l’éducation, avant de les situer dans le contexte des sciences de l’éducation.
a) Définition des termes :
Etymologiquement, « technologie » vient du grecque TECO, qui signifie fabriquer, construire,
produire. Ensuite, il a été décliné en TECOS, qui signifie outil, instruments, arbre. D’où le
terme « technique » qui, en Grecques, correspond à la fabrication de matériel.
Enfin, on trouve LOGOS, qui signifie « étude », « discours », mais en général correspond à
étude d’un phénomène
.
Par la suite, technologie, sera confinée à l’étude des outils et des processus de fabrication.
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C’est après avec les encyclopédistes que le terme introduit essentiellement les outils des
ingénieurs. Ce dernier prendra ensuite le caractère polysémique que nous lui connaissons
aujourd’hui :
- Étude des sciences et techniques
- Technique de pointe où technologie moderne/ complexe
La technologie peut également se définir en terme de médias, et concerne trois familles :
- L’informatique
- L’audiovisuel
- Les télécommunications
Dans l’éducation, le sigle NTICE, signifiant, technologie de l’information et de la
communication dans l’enseignement, est aujourd’hui très utilisé.
Il faut entendre par « nouvelles technologies éducatives », tous les outils servant à
faciliter, voire améliorer l’action éducative tels que : le magnétoscope, le digital vidéo
disque (DVD), rétroprojecteur, et surtout l’ordinateur qui est devenu un outil
fondamental pour l’école, car en plus d’être un « outil de savoir », il est devenu un outil
pour la production de documents et l’apprentissage des disciplines. Le multimédia et
Internet constituant le plus récent épisode de la saga de l’informatique éducative.
Il convient de préciser que si l’audiovisuel et les télécommunications seront ici abordés, ils
seront la plupart du liés à l’informatique. En effet, c’est surtout ce domaine qui est au cœur la
question de l’enseignement, c’est pourquoi, le lecteur comprendra qu’elle constitue de thème
majeur de ce dossier.
.
Définir le terme de « nouvelles technologies », c’est également s’intéresser à leurs
champs d’applications :
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• Les technologies éducatives comme Médias d’enseignement : foule de médias sont
au service de l’enseignant, pour qu’ils transmettent mieux le savoir à leurs élèves.
• Les technologies éducatives comme machine à enseigner pour cela on va inventer
des machines avec des programmes spécifiques. (enseignement programmé)
• Les technologies éducatives comme objets d ‘enseignement : formation sur
l’utilisation des nouvelles technologies.
• Les technologies éducatives comme outil d’apprentissage : comment les
technologies peuvent être au service des apprentissages ?
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b) Historique :
L’utilisation de la technique dans l’enseignement est très ancienne, elle date de
l’antiquité. Prenons l’exemple de la « lanterne magique », ancêtre de notre rétro
projecteur, qui consistait à créer un appareil de projection dont la source était la lumière
d’une bougie combinée avec des plaques. En quelque sorte c’était l’ancêtre du
multimédia !….
C’est au début des années 1970 que la possibilité d’utilisation pédagogique à grande
échelle des ordinateurs se développe. L’idée d’exploiter l’ordinateur pour la formation,
inspirée des thèses de Skinner, naît aux Etats Unis.
La France est un des premiers pays à tenter l’expérience de l’utilisation de
l’informatique dans les établissements scolaires. Ainsi, de 1970 à 1976 : 58 lycées sont
équipés en ordinateurs et une poignée d’enseignants est formé à leur utilisation.
En 1978, est fabriqué le premier micro ordinateur aux Etats Unis. Contrairement aux
premiers ordinateurs, le micro ordinateur est un appareil maniable qui permet un usage
personnel. La micro informatique vise d’emblée l’objectif de mettre l’ordinateur à la
porté de tous, tant pour des usages professionnels que privés.
Face à cette évolution technique et au rôle grandissant de l’informatique dans la vie
sociale, les responsables prennent conscience de la nécessité de préparer sans tarder les
enfants à cette véritable révolution que représente le développement de l’informatique
dans la société.
En 1984, la France, après l’Angleterre, lance un vaste plan d’équipement des
établissements scolaires en matériels informatiques. C’est le plan « IPT » (informatique
pour tous). Le gouvernement optera alors pour une solution industrielle nationale, celle
proposée par Thomson avec ses TO7 et MO5.
Progressivement tous les établissements scolaires d’Europe s’équipent en matériels
informatiques sans pourtant adopter les mêmes options. En effet, avec la naissance de
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IBM, société américaine dirigée par Bill Gates, le PC et le système d’exploitation MS
DOS multiplient les possibilités.
Les programmes de sensibilisation à l’informatique et d’intégration des micros
ordinateurs dans la pratique scolaire se font suivant trois volets :
• Equipement en matériel
• Formation initiale et continue des enseignants
• Développement des logiciels
En 1988, en France, la priorité est donnée au développement de logiciels éducatifs
adaptés aux besoins des élèves et des enseignants, dans le respect bien sûr des
disciplines, des programmes et des niveaux. On assiste pendant cette période à un
changement d’orientation : la norme PC est étendue en France à tous les établissements
scolaires afin de mieux préparer les élèves à l’environnement dans lequel ils devront
évoluer dans leur vie professionnelle. Une option informatique est également crée au
lycée. Toutefois, l’utilisation de l’informatique dans les pratiques pédagogiques prime
sur l’enseignement de la programmation. La priorité est alors donnée à la création de
logiciels éducatifs liés aux disciplines inscrites au programme.
En 1988 toujours, le ministre de l’Education Nationale, René Monory, met en place un
système de licences mixtes afin de lutter contre le piratage (cela permet d’acquérir des
logiciels à des prix bas) et aussi de faire bénéficier les écoles de meilleurs logiciels tout
en soutenant la production industrielle nationale.
Le bilan, dix ans après, des premiers plans d’équipement informatiques des années
1984-1985 sont plutôt mitigés. L’échec relatif de ces politiques en France et en
Angleterre est dû à des choix technologiques hasardeux dictés par une politique
industrielle protectionniste, à l’immaturité du matériel qui a découragé plus d’un
professeur, à la qualité souvent insuffisante des logiciels proposés et avant tout à un
manque de concertation et de prise en compte des réalités du terrain par l’administration
centrale.
Si en France le plan « Informatique pour tous » (IPT) a eu le mérite de sensibiliser toute
une génération aux nouvelles technologies, l’investissement financier n’était pas à la
hauteur des espérances. Même le marché des logiciels pourtant soutenu par le système
des licences mixtes n’était guère juteux et les éditeurs hésitent à se maintenir sur ce
marché. Il en est ainsi dans la quasi totalité de l’Europe sauf peut être en Angleterre où
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le marché est plus dynamique et dans les pays nordiques qui poursuivent leur politique
volontariste de soutien direct à la production.
La seconde vague
Au début des années 90 en France, initier l’ensemble des enfants à des outils qui se
banalisent dans tous les actes de la vie quotidienne est perçu comme une exigence
sociale.
Les années 80 ont laissé des mauvais souvenirs, c’est pourquoi il subsiste des réticences
et des hésitations en raison du coût, et aussi du fait que ces technologies évoluent
rapidement et qu’elles n’ont pas encore atteint leur maturité. Enfin, beaucoup
d’enseignants ne maîtrisent pas les outils informatiques récents.
Malgré cela, le développement d’Internet, initié par l’administration Clinton/Gore aux
Etats Unis, va toucher l’Europe et se propager rapidement. Les principaux pays
industrialisés prennent alors des mesures pour équiper les établissements scolaires. Un
plan est conçu en France en 1997. Aux Etats Unis, Al Gore parle le premier d’
«autoroute de l’information ». Tous les domaines de l’économie et de la société sont
concernés, l’éducation également. Il faut habituer les enfants d’aujourd’hui à
l’utilisation des nouvelles technologies. Outre la nécessité de préparer une main
d’œuvre bien formée il faut élargir le marché d’abord aux familles puis aux
consommateurs de demain. On constate une convergence d’intérêt entre les
préoccupations éducatives et l’industrie qui s’appuie sur le plan Clinton Gore. Il y a un
encouragement systématique au partenariat public/privé. Enfin, toujours aux Etats Unis
des journées de promotion aux technologies éducatives les « Netdays », mobilisant une
journée par an toutes les bonnes volontés au service de l’informatique et en particulier
des réseaux sont organisées dans tout le pays dès octobre 1996.
En Europe, comme aux Etats Unis on favorise la mise en réseau des particuliers et des
écoles en proposant des abonnements bon marché à Internet. En 1994, le réseau ODIN
relie par Internet la Suède, le Danemark et la Finlande.
En France, les premières connexions ont lieu début 1995, et en 1997 le président
annonce l’accès à Internet pour tous les établissements avant la fin du siècle, promesse
tenue…
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En 1997, Claude Allègre présente le plan national français prévoyant l’équipement et la
connexion avant l’an 2000 de tous les établissements de l’enseignement public, de la
maternelle à l’Université. Pour bien se démarquer du plan « informatique pour tous » de
1985, le plan de 1997 met en avant la question pédagogique : les nouvelles technologies
doivent conduire l’élève à une démarche plus active et permettre aux enseignants
d’échanger, de coopérer et de soutenir l’innovation pédagogique. La formation initiale
et continue est une des priorités du ministère, un plan d’urgence prévoit la création de
100 postes d’enseignants et de mille emplois de jeunes docteurs dans les instituts
universitaires de formation des maîtres (IUFM).
Financièrement, l’investissement est de 1 milliard de francs chaque année +12 sur les 3
ans. De plus un fonds de soutien aux collectivités locales est prévu. En outre, des tarifs
préférentiels sont proposés par les opérateurs.
Avec l’avancée technologique, il y a eu une très grande production et diffusion de
ressources pédagogiques.
Si la situation de 1995 présente quelques similitudes avec celle de 1985 la seconde
vague d’équipement prend place dans un environnement qui a beaucoup évolué où les
enjeux éducatifs associés aux nouvelles technologies prennent une dimension nouvelle.
Il ne s’agit plus seulement d’initier une classe d’age à l’informatique, c’est un véritable
projet de société auquel sont conviés les Européens. On assiste à un glissement
sémantique révélateur l’expression « autoroute de l’information » est progressivement
remplacée dans le discours politique par celle de « société de l’information ».
La France est le seul pays à ne pas agir seulement au niveau de l’enseignement
secondaire.
Si les plans de la première vague visaient surtout l’initiation à l’outil informatique et la
sensibilisation des élèves et des enseignants, la seconde vise l’éducation en général
quelque soit le niveau primaire ou secondaire. Ils mettent l’accent sur l’usage
transversal et pédagogique des nouvelles technologies.
Il s’agit de banaliser ces outils à l’école comme ils le sont dans la société.
Le maniement de ces technologies offre de nouvelles perspectives d’utilisation. La
création multimédia est désormais à la portée des élèves et des enseignants, même non
spécialistes. Mais surtout, les micros ordinateurs équipant les écoles deviennent
« communicants » : échange de messages électroniques, recherche documentaire en
ligne et gestion commune de fichiers permettant des activités pédagogiques d’une
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ampleur et d’une richesse nouvelle, inaccessible jusqu’alors. L’informatique et les
nouvelles technologies acquièrent définitivement leur statut d’outil pédagogique.
Les professeurs dans les écoles leur réservent un accueil bien souvent positif. Depuis le
premier plan d’équipement, 10 ans ont passé et les nouvelles générations d’enseignants
n’ont pas la même appréhension que leurs aînés vis à vis de l’informatique. Mais
surtout, la pression en faveur de l’usage des nouvelles technologies résulte davantage de
l’évolution de l’environnement socio-économique que de la volonté d’équipes
dirigeantes.
A l’occasion du renouvellement du parc de matériel hérité des premiers plans
d’équipement, les écoles vont se doter progressivement d’ordinateurs multimédias, de
réseaux locaux et de connexions aux réseaux internationaux.
Les récentes politiques en faveur de l’équipement des écoles en nouvelles technologies
résultent de dynamiques locales et nationales. Il suffit parfois d’une équipe
d’enseignants motivés pour obtenir le soutien ponctuel d’une municipalité, d’un
département ou d’une région. Cette démarche concerne plus les zones rurales qui dans
un souci de développement et pour affirmer leur identité choisissent d’investir dans
l’innovation technologique, l’enseignement et la culture. Des échanges se développent
entre les établissements, les élèves, les enseignants, souvent au sein d’une même
communauté linguistique, autour de thèmes communs d’étude : travaux sur la mer, sur
les monuments historiques locaux, participation à des journaux internationaux publiés
en ligne, création de CD ROOM par des classes de différents pays ou simplement
échanges linguistiques.
En Europe on assiste à la création de réseaux de télécommunication et de programme
d’éducation et de formation.
En 1997-1998, dans toute l’Europe, sur le thème « apprendre dans la société de
l’information » une semaine est consacré au multimédia à l’école.
De plus, afin de fidéliser une nouvelle clientèle, les opérateurs multiplient les offres
intéressantes.
Destinées au départ à sensibiliser toute une génération d’enseignants et d’élèves aux
nouveaux outils de l’information, les nouvelles technologies ont été introduites dans
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l’école sans que les pratiques soient modifiées, si ce n’est par la mise en place de cours
d’informatique. Ce n’est que très progressivement au cours de la décennie que ces
technologies ont été intégrées dans les usages pédagogiques.
Actuellement, nous sommes à un tournant, l’intégration dans les usages est encore loin
d’être acquise, car l’apparition de nouveaux auxiliaire pédagogiques s’accompagne
souvent de remises en cause de l’organisation de la classe, des disciplines et des
rapports entre enseignants et élèves.
c) Les nouvelles technologies à la lumière des sciences de l’éducation
.
En France, le réseau Freinet, fondé sur les méthodes actives et la libre expression de l’enfant,
a été le premier à introduire les nouvelles technologies dans l’éducation, il introduira
notamment l’informatique dès 1985.
Si l’utilisation des NT dans l’éducation a su évoluer pour devenir entre autre un outil qui
favorise l’autonomie de l’enfant, les premiers balbutiements de l’informatique ne fonctionnait
que sur le principe du stimulus / réponses chère aux béhavioristes.
Il est intéressant de noter qu’elles ont évolué en parallèle avec les grands fondements de
l’éducation que sont : le béhaviorisme, la constructivisme et le socioconstructivisme.
1) Le mouvement béhavioriste et l’enseignement assisté par ordinateur
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Qu’est ce qu’apprendre ? Cette question reste au cœur de toute activité éducatrice.
Selon les béhavioristes, le fonctionnement de l’esprit doit nous rester inconnu. Ce mouvement
fondé par John Broadus Watson (1878 – 1958) en 1913, essentiellement basé sur le principe
de stimulus/réponses a connu un succès considérable jusque dans les années 40, en particulier
auprès des psychologues américains.
Il a ensuite sombré sous les critiques virulentes qui dénoncées les insuffisances de la théorie,
ses promesses non tenues et insidieusement les opinions racistes de Watson.
.
Aujourd’hui, la théorie du behaviorisme est globalement rejetée mais son influence reste
visible notamment dans certains programmes informatiques encore utilisés dans l’éducation.
En terme d’informatique, on peut notamment aborder les études de Skinner et ses recherches
en EAO : enseignement assisté par ordinateur. Sa pédagogie de type béhavioriste consiste à
renvoyer au sujet suivant ses comportements des renforcements positifs ou négatifs ayant
pour but de stimuler sa motivation.
Il faut également noté qu’un scientifique du nom de Crowder va introduire le principe de la
rétroaction dans les programmes. Les mauvaises réponses seront donc également prises en
compte par le programme pour orienter les apprentissages.
L’enseignement assisté par ordinateur est en fait une simulation d’échange entre maître et
élève. Cependant il reste un problème technique, les ordinateurs ne parviennent pas à gérer
convenablement le dialogue libre avec l’élève. EOA, déçoit, il agace les élèves et n’est
finalement utilisé que ponctuellement pour des remises à niveau.
Il faut quand même noter certains points positifs comme l’individualisation des rythmes
d’apprentissage et l’adaptation possible en fonction du niveau de l’élève
En fait, le béhaviorisme est surtout efficace pour les savoirs procéduraux, il l’est beaucoup
moins pour les savoirs conceptuels, dans la mesure où il ne prend pas en compte les profils
cognitifs des élèves et où il n’évalue pas leur niveau de compréhension.
Finalement les projets des béhavioristes n’aboutirons pas, ni leur objectif implicite : se passer
des enseignants.
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2) La révolution cognitiviste
Cette théorie compare le cerveau à un ordinateur, le développement du cognitivisme
« informationnel » se nourrit de la diffusion fulgurante et parallèle de l’informatique dans
l’ensemble de la société et de l’espoir qu’elle fait naître.
Les sciences cognitives sont nées de la cybernétique (et notamment des travaux de John von
Neumann et Norbert Wiener) et de la théorie de l'information développée dans les années
1950-1960. Leur acte fondateur est peut-être les travaux d'Alan Turing, sur la mécanisation du
calcul et le parallèle qu'ils opèrent entre les opérations de l'esprit et les opérations d'une
machine.
Les nouvelles approches pédagogiques consisteront à privilégier la transmission du savoir
entre le professeur, le programme informatique et l’élève. Les pédagogues accorderont plus
d’importance à l’échange pédagogique et à la dynamique de groupe.
Il s’agit avant tout d’assigner à l’auxiliaire pédagogique un rôle facilitateur de la construction
individuelle et collective du savoir1.
C’est cette mouvance qui inspirera d’ailleurs Piaget, et sa théorie du constructivisme.
C’est à cette époque (année 60 - 70) que l’on s’intéresse aux méta connaissances, qui consiste
à comprendre le mécanisme de l’apprendre, apprendre à apprendre en quelque sorte.
Informaticiens et psychologues s’entendent sur le fait que : « le fonctionnement d’un système
intelligent doit reposer sur la connaissance que le système a de lui-même, de son
fonctionnement et des données qu’il contient ».2
Un programme, « Logo » conçu par Lepper, disciple de Piaget, va emprunter aux thèses de ce
dernier l’image de l’enfant bâtisseur de ses structures intellectuelles. Le principe consistait à
programmer par ordinateur des instructions à un périphérique, ici une tortue robot en
l’occurrence. L’enfant pouvait alors déplacer la tortue en lui donnant des ordres du type :
avance, recule, tourne…
1 Ponts-Lajus / Riché-Magnier à l’heure d’Internet p.21 2 Ponts-Lajus / Riché-Magnier à l’heure d’Internet p.23
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Cependant, les promesses pédagogiques n’étant pas tenues, du fait d’une trop grande
hétérogénéité dans l’apprentissage et d’une difficulté à transférer les connaissances à d’autres
matières, l’expérience s’arrêtera rapidement.
Les critiques inhérentes au cognitivisme sont, qu’à l’instar du béhaviorisme, cette théorie ne
prend pas en compte les dimensions affectives et sociales de l’individu. De plus, à l’heure
actuelles, les spécialistes de l’éducation considèrent que les métas connaissances découlent
bien plus de l’apprentissage du savoir que l’inverse.
3) La seconde révolution cognitiviste
Après la première révolution des sciences cognitives contre le behaviorisme, une seconde
remise en cause s’annonce à la fin des années 80.
Selon les didacticiens, on apprend toujours quelque chose à partir du moment au nous nous
trouvons en interaction avec quelqu’un, il s’agit donc d’un courant interactionniste.
A cette mouvance, s’associent de grand noms : Sigmeud Freud confirme le rôle fondamental
de la médiation dans le désir d’apprendre quant à Vygotsky (1896/1934) et Wallon
(1879/1962), ils placent la relation sociale et la langage au centre du modèle explicatif du
développement de l’enfant : le discourt du professeur crée un conflit sociocognitif nécessaire
à la transformation des conceptions3.
Pour les technologies éducatives, un tel recentrage n’est pas sans conséquences. Non qu’il
conduise à rejeter en bloc tout ce qui aurait été conçu et expérimenté mais il rétablit
l’équilibre entre les différentes composantes constitutives : des sciences cognitives,
pédagogiques, didactiques, linguistiques, psychologiques, biologiques, informationnelles et
communicationnelles. C’est dans ce nouveau cadre que doit être considéré la contribution des
technologies à l’éducation.
3 Ponts-Lajus / Riché-Magnier à l’heure d’Internet p.29
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Le modèle cognitiviste tant à ramener l’éducation à un processus individuel : le savoir ce
donne comme un objet extérieur qu’il faut conquérir seul le plus souvent. Cependant, La
seconde révolution cognitive cherche à construire ce cadre théorique faisant place à la fois à la
médiation humaine, celle de l’enseignant comme des élèves, et à la médiatisation des
ressources matérielles et en particulier des technologies.
Selon Vygotsky l’apprentissage est une transaction fondée principalement sur l’échange
verbal, son unique mode de réalisation.
Le behaviorisme, l’enseignement programmé, les sciences cognitives, l’intelligence
artificielle, ont été autant de tentatives pour essayer de concevoir un modèle de
l’apprentissage individualiste, logique, formalisé, un modèle se prêtant à l’automatisation.
Parallèlement, psychologue, pédagogue et didacticiens n’ont cessé de découvrir et de
redécouvrir à quel point l’activité d’apprentissage est sociale et affective avant d’être logique
et fonctionnelle.4
L’époque qui s’ouvre se caractérise par l’élargissement des potentialités pédagogiques des
technologies.
L’évolution des nouvelles technologies en fonction des théories de l’éducation pourrait donc
se résumer ainsi :
4 Ponts-Lajus / Riché-Magnier à l’heure d’Internet p.33
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Schéma récapitulant l’évolution de l’utilisation des nouvelles
technologies en fonction des grandes orientations en matière de
psychopédagogie.
Il y a donc eu un glissement progressif des pratiques pédagogiques vers le
socioconstructivisme, cependant il faut précisé que si l’utilisation de la technologie a suivi
le même schéma, le béhaviorisme reste très utilisé à l’heure actuelle.
L’apprentissage basé sur des programmes informatiques utilise souvent le processus lié au
béhaviorisme : stimulus/réponses. Si ce dernier est critiquable à de nombreux égards nous
verrons qu’il peut en certaines circonstances s’avérer efficace.
Behaviorisme Constructivisme socioconstructivisme (…../fin 50) (fin50 / début 80) (début 80 jusqu’à nos jours) 1ére révolution cognitive 2
nd révolution cognitive
Watson/ Skinner Piaget Vygotsky Conception de programmes Conception de programme L’informatique devient informatiques basés sur la centré sur l’autonomie de multimédia et peut servir répétition (utilisation de l’élève (ex : Logo) dans le cadre de travaux renforcement +) individuels où collectifs
Principe du stimulus/réponses
Activité de l’élève au centre de l’apprentissage
Dimension affective et sociale dans l’acte d’apprendre
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II- Nouvelles technologies : adaptation et utilisations
Les situations sont très diverses et certaines constantes apparaissent. L’informatique est perçu
de deux manières différentes : l’informatique comme outil d’apprentissage et l’informatique
comme outil de travail.
Il est intéressant de constater que les enseignants se disent être des utilisateurs personnels
pour leur travail bureautique.
En revanche, l’informatique comme outil d’apprentissage est souvent perçu comme un défi à
relever et dans le contexte quotidien d’une classe cela pose aux enseignants toute une série de
problèmes. Le thème du manque comme nous allons le voir est omniprésent, manque de
temps, de matériels, d’humains, de formations.
a) Quelle formation ?
Nous pouvons d’ors et déjà affirmer que l’Education Nationale ne joue pas un rôle très actif
dans la formation des enseignants face aux nouvelles technologies. Parmi les trois
enseignantes que nous avons pu interrogées, aucune n’a reçu de formation par l’Education
Nationale. Soit elles ont suivi une formation lors de leurs études universitaires (« j’ai fait un
stage en début d’année à la fac en 1996 » soit se sont des autodidactes (« je suis une
autodidacte, finalement je n’y connaît rien »).
Au temps de l’Ecole Normale, les nouvelles technologies commençaient à peine à se révéler
importantes pour le futur, cela explique donc pourquoi les enseignants de l’Ecole Normale
n’ont reçu aucune formation concernant l’informatique. De plus il ne faut pas attendre que les
pouvoirs publics prennent des initiatives de formation car cela est très coûteux et d’une
efficacité souvent limitée. Nous pouvons tout de même souligner certaines initiatives du côté
des institutions comme la mise en place de personnes ressource dans les académies chargées
d’intervenir directement dans les établissements pour différents problèmes.
En revanche, il revient aux IUFM de donner aux étudiants qui viennent s’y former les
références indispensables à la mise en pratique des instruments du traitement de l’information.
Il semble judicieux de sensibiliser les futurs enseignants à ces nouveaux outils pédagogiques
afin qu’ils ne se voient pas perturbés et déstabilisés lors de leurs premières années
d’enseignement.
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La question est de savoir si les outils informatiques peuvent devenir des outils professionnels
de l’enseignant. C’est donc dans cette optique qu’une note de la Direction des enseignants
supérieurs a été consacrée à la « formation aux technologies modernes d’information et de
communication dans les IUFM » en janvier 1992. Voici ce qui y était écrit :
« D’une part de faire prendre conscience aux futurs professeurs des enjeux technologiques,
sociaux et culturels que représente le développement de ces nouvelles techniques, d’autre part
d’habituer tous les futurs professeurs à leur utilisation, de telle sorte qu’elles deviennent
rapidement un outil pratique, banal et quotidien. »
Cette note suggère deux logiques différentes : celle liée aux enjeux sociaux de l’informatique
et celle liée à l’intégration de cette dernière dans la formation.
En 1993, le ministère assignait deux objectifs aux IUFM :
- L’informatique doit devenir un outil banal et quotidien.
- L’informatique doit s’intégrer aux disciplines existantes.
Cependant on remarque que la marge de manœuvre des IUFM pour atteindre ces objectifs est
plutôt faible car la première année est consacrée à la préparation du concours et
l’informatique y joue un rôle très secondaire. Cependant on peut distinguer trois types de
besoins à l’égard des usages de l’informatique :
- dans le champs disciplinaire, mais l’informatique en tant qu’objet n’y joue qu’un rôle
modeste.
- Dans le cadre de la préparation de l’épreuve professionnelle, ce qui correspond à de
l’informatique pédagogique.
- Comme outil de productivité personnelle, pour produire des documents.
De plus la deuxième année d’IUFM privilégie le travail sur le terrain et l’informatique et les
technologies nouvelles n’interviennent que dans la discipline d’enseignement soit comme
outils soit comme méthodes et procédures renouvelant la façon d’enseigner.
La situation actuelle est donc préoccupante car de nombreux enseignants n’ont pas eu les
moyens d’acquérir les éléments de formation pour avoir une connaissance et une maîtrise
suffisante de l’outil informatique au cours de leur formation initiale.
20
Consciente des différents obstacles, la Direction générale des enseignants supérieurs édite une
nouvelle circulaire en 1995-1996 qui donne certaines recommandations aux IUFM concernant
les technologies d’information et de communication.
BO n° 45 : « […] il convient d’insister sur deux modalités d’appropriation de ces
technologies :
- le libre accès des étudiants à ce type d’équipement
- le développement progressivement généralisé de l’utilisation des technologies les plus
courantes par les formateurs […] pour inciter les futurs enseignants à l’utiliser eux-
mêmes. »
On passe ici d’objectifs très ambitieux à des recommandations, tout en espérant un processus
d’acculturation avec ces nouvelles technologies. En effet, l’accommodation à ces nouvelles
technologies ne peut se faire qu’en s’exerçant surtout dans ce domaine où les savoirs sont
instables et évolutifs.
Afin d’illustrer ces propos nous allons prendre le cas le l’IUFM de Créteil en nous appuyant
sur une étude menée par G L. BARON et E. BRUILLARD5 en 1992 et 1994.
Parmi les différentes priorités mises en avant par le plan de formation des IUFM valable que
jusqu’en 1994, figurait la caractéristique suivante : améliorer la culture scientifique et
technique et la formation aux nouvelles technologies de l’information et de la communication
(ce que l’on appelait les NTIC) et qui doit être intégrée à la formation générale commune et
aux formations spécifiques du premier et second degré.
En ce qui concerne les professeurs des écoles, vingt-quatre heures ont été réservées aux NTIC
dans la formation générale tant en première qu’en deuxième année (cette formation a été
supprimée en première année en 1994). En seconde année l’informatique intervient au mieux
à titre optionnel et uniquement comme support didactique ou comme moyen participant à des
séquences.
Cette étude à était menée sur plusieurs années ce qui permet d’avoir plusieurs éléments de
comparaison sur les populations entrantes à l’IUFM. Il est intéressant de constater que la
situation des étudiants à l’entrée de l’IUFM évolue. Entre 1992 et 1994 il y a eu un
accroissement de la possession d’ordinateurs à domicile (d’environ 10%) et un accroissement
de la connaissance des outils généraux comme le traitement de texte et le tableur (d’environ
15%). En 1994, l’intérêt vers la maîtrise de l’informatique comme outil personnel se
5 Etude décrite dans L’informatique et ses usagers dans l’éducation p157.
21
développe cependant l’idée que l’informatique va conduire à une évolution de la discipline
reste minoritaire.
Ces résultats montrent un mouvement vers la bureautique mais qui ne s’accompagne pas d’un
intérêt grandissant vers un usage proprement scolaire.
En Angleterre le gouvernement est convaincu que les enseignants ne verront en ces nouvelles
technologies un intérêt pédagogique que lorsqu’ils en découvriront leur utilité dans le cadre de
leur vie personnelle. C’est pourquoi il est fourni à chacun d’entre eux un ordinateur portable
et des logiciels…
En France, les pouvoirs publics organisent des stages formations, mais pendant ces temps de
formation les enseignants doivent être remplacés ce qui pose de nombreux problèmes de
gestion du personnel au sein de l’académie. Des cessions de formation sont également
organisées les mercredis après-midi ou pendant les vacances scolaires mais elles n’attirent que
les enseignants les plus motivés et donc elles ne constituent pas un moyen de diffuser une
culture de l’information de la communication.
La diffusion et l’intégration des nouvelles technologies dans les écoles bute en partie à cause
de la question de la formation des enseignants, de ceux en particulier qui n’ont bénéficié
d’aucune familiarisation avec ces nouveaux outils.
On espère cependant que dans un avenir proche les futurs enseignants arriveront avec un
meilleur niveau de connaissance et de maîtrise de l’informatique ; en attendant il reste du
chemin à parcourir avant que les enseignants soient à l’aise avec les instruments de traitement
de l’information.
b) Utilisation des nouvelles technologies dans l’enseignement
A l’heure d’aujourd’hui il est légitime que beaucoup d’enseignants mais aussi de parents
se posent une quantité de questions : l’informatique doit elle être un objet
d’enseignement ? Dans quelle mesure l’informatique répond t elle aux besoins de
l’éducation ? Comment organiser des séances d’informatique lorsque l’enseignant est seul
avec sa classe ?
22
Afin de tenter de répondre à ces questions nous allons nous appuyer sur les différents
entretiens effectués ainsi que sur des exemples d’utilisation rencontrés lors nos diverses
lectures6.
En France, la double fonction de l’informatique en tant qu’objet et instrument a pendant
longtemps occupé une place centrale dans les discussions sur l’informatique éducative.
A la fin des années 80, un consensus s’est dégagé en faveur de l’intégration de l’outil
informatique dans les pratiques pédagogiques.
Aujourd’hui presque toutes les disciplines peuvent tirer parti de la technologie par
l’utilisation de logiciels mais aussi d’outils génériques comme le traitement de texte, le
tableur, le courrier électronique.
La technologie est utilisée dans le cadre d’utilisation individuelle de logiciel comme nous
le précise les enseignantes interrogées. Les ordinateurs de leur école sont équipés du
logiciel Wallon Soft qui permet de faire travailler les enfants soit en mathématiques soit
en français par le biais de petits exercices notés grâce à un petit bonhomme qui change de
couleur en fonction des réponses données ; cela stimule l’élève à répondre correctement.
Les ordinateurs sont également utilisés de manière individuelle lorsque les enfants sont
seuls face à l’objet et qu’ils doivent écrire ou recopier un texte afin qu’ils se familiarise
avec le clavier et les différentes fonctions de Word (changer la taille de la police,
souligner, encadrer…). Deux de nos enseignantes interrogées possèdent dans leur classe
un ordinateur qu’elles mettent à disposition des élèves à certains moments. « J’ai un
ordinateur dans ma classe que je met à disposition des élèves comme ils utilisent la
bibliothèque de classe. » Cela permet de les faire travailler autrement et sans qu’ils s’en
aperçoivent puisque l’informatique est perçue comme un jeu (idée que nous
développerons par la suite). « Je met à leur disposition des cdrom et ils apprennent tout
en s’amusant, autrement. C’est un moyen de se rendre autonome. »
Mais la technologie est aussi utilisée dans le cadre d’activités collectives dépassant l’objet
lui-même par le biais de créations collectives ou de communication sur le réseau. Ceci
nous est également confirmé par une enseignante interrogée qui utilisent l’informatique et
Internet surtout en histoire avec des CM2 pour que les élèves fassent des recherches sur
6 Notamment A l’heure d’Internet de S. Pouts-Lajus et Riché-Magnier et L’informatique et ses usagers dans l’éducation de G.L Baron et E. Bruillard
23
Internet puis qu’ils mettent en page leurs exposés. « En CM2 on fait des recherches sur
Internet quand ils doivent faire des exposés par exemple. »
La technologie pour quoi ?
- Outils pour lire et écrire :
S’il existe une bonne offre de logiciels de grammaire, d’orthographe et d’exploitation de
textes littéraires, se sont surtout des outils génériques comme le courrier électronique ou le
traitement de texte qui demeurent les applications phares. Quoi de plus motivant pour l’élève
que de produire un texte aussi lisible qu’un livre ! Quoi de plus stimulant pour écrire et être lu
non plus seulement par son professeur mais par d’autres élèves et adultes du monde entier.
Cependant perpétuent également des questions phares : l’écriture manuscrite est elle amenée
à disparaître ? La pédagogie de l’orthographe sera-t-elle affectée de la disponibilité des
correcteurs automatiques ?
Plus de peur et de questions pour pas grand chose puisque l’usage du traitement de texte reste
encore très limité à l’école primaire ; il est surtout utilisé pour la création de journaux
d’écoles.
- Outils pour les langues vivantes :
L’enseignement des langues vivantes recourt aux méthodes audiovisuelles depuis près de
vingt ans. S’exprimer, comprendre et dialoguer dans une langue étrangère par le biais de la
télévision, de cassettes audio ou de différents logiciels reste le meilleur moyen d’en acquérir
la maîtrise. Par exemple sur certains logiciels des scènes audiovisuelles sont présentées à
l’élève qui fera par la suite des petits exercices de compréhension. L’enseignante habilitée en
anglais que nous avons interrogée n’utilise pas l’ordinateur car elle ne se sent pas assez à
l’aise avec cet outil mais elle utilise des cassettes audio et la télévision (« j’utilise la TV en
langue étrangères car j’apprécie le support son et image qu’offre la TV. Les enfants peuvent
avoir une image réelle de la vie à l’étranger et ils peuvent entendre une autre voix e tune
autre prononciation que la mienne »)
24
De plus le réseau Internet, parce qu’il est fondé sur une logique internationale, crée des
situations particulièrement motivantes pour l’apprentissage des langues ; en effet le jumelage
et l’échange de courrier électronique avec des enfants de pays étrangers font partie des
exploitations pédagogiques les plus courantes d’Internet.
La consultation de serveur Web, réservoir inépuisable de documents originaux provenant du
monde entier, stimule l’apprentissage des langues par la découverte d’autres cultures.
- Outils pour laisser libre cour à son imagination :
La réalisation de cdrom ou de sites Internet permet de développer chez l’enfant son sens de la
créativité, artistique et littéraire en choisissant les couleurs, en imaginant différentes
animations…
Ceci requière de la part de l’enseignant une très grande connaissance et maîtrise le l’outil
informatique.
- Outils pour apprendre à communiquer :
Loin de limiter la production à l’écrit et d’isoler les élèves, une bonne utilisation des réseaux
et du multimédia développe des talents d’écriture et de communication (cela peut stimuler les
enfants ayant des difficultés scolaires). Echanger sur Internet c’est apprendre à produire des
messages rigoureux et concis. La communication avec des classes de tous horizons développe
la maîtrise de la langue écrite, le goût de la coopération et la capacité à structurer
l’information échangée. Cette approche va dans le sens des recommandations faites par
Célestin Freinet qui inspire aujourd’hui de nombreuses pratiques de classes.
- Outils pour les sciences et la technologie :
L’enseignement des sciences grâce à l’ordinateur n’occupe pas une grande place en France.
Certains enseignants utilisent plutôt la télévision pour monter des documentaires aux élèves.
Il semble intéressant de noter au passage la formidable expérience de l’académie de Rouen
qui a monté en 1997 un site baptisé : manipe en ligne, culture in vitro. Ce site permettait à
toutes les personnes d’observer l’évolution d’une culture végétale en temps réel sous forme de
photographies agrandies et de commentaires scientifiques.
Il est à noter également que la technologie n’est pas seulement un outil pour enseigner mais
un objet d’apprentissage. Il faut donner aux élèves les rudiments d’une culture informatique
25
tout comme le font les enseignantes rencontrées : « nous apprenons aux enfants le nom des
différentes composantes d’un ordinateur ».
- Outils pour changer les supports classiques des matières classiques :
Le rétroprojecteur est de plus en plus utilisé par les enseignants. Il facilite certaine tâche de
l’enseignant (comme reproduire la France au tableau) et permet à certain enfants de mieux
suivre. Une de nos enseignantes rencontrée utilise le rétroprojecteur essentiellement en
géométrie et insiste sur le fait que cet outil lui permet de faire l’exercice en « direct live »
avec les enfants.
Deux de nos enseignantes utilisent le caméscope pour filmer les enfants dans leurs activités
sportives pour ensuite regarder ensemble la vidéo afin qu’ils aient une image de leur corps et
qu’ils puissent ensuite travailler une partie du programme de science : l’articulation.
La télévision est fréquemment utilisée pour accompagner des séances d’histoire et
géographie, de sciences et d’éveil ou encore d’arts plastiques.
En conclusion nous pourrions dire que toutes les nouvelles technologies peuvent trouver leur
place au côté des matières enseignées, l’informatique étant mise au service d’autres activités.
Voici pour résumé un tableau récapitulatif des différentes utilisations des nouvelles
technologies en fonction des entretiens réalisés.
Diapositives Rétro Télévision
magnéto Caméscope
Traitement
de texte Logiciels Internet
Français Svt Svt
Maths Moy Svt
Histoire
Géographie Moy Moy Moy Moy Moy
EPS Moy
Langues
étrangères Svt Moy
Sciences et
technique Moy Moy Moy Moy
Svt : utilisé de manière régulière plus d’une fois par semaine
26
Moy : utilisé ponctuellement, lors d’un évènement particulier
Bien que les nouvelles technologies soient adaptables à toutes les matières, ce petit tableau
démontre avec sa majorité de sigle « Moy » que toutes les utilisations de ces nouvelles
technologies ne sont pas tout à fait intégrées dans la pratique professionnelle des enseignants
c) Rapports entres les nouvelles technologies et les enseignants
Pour les enseignants, l’introduction de l’outil informatique au sein des établissements du
primaire n’est pas un paramètre évident à intégrer. Les technologies de l’information et
de la communication pour l’enseignement (TICE) constituent un outil pédagogique
formidable pour enrichir le contenu de chaque discipline mais elles nécessitent également
de la part des enseignants une totale remise en question de leur manière d’enseigner. Les
enseignants doivent tenir compte de ces outils en leur trouvant des avantages et des
utilités. Ils doivent pour la plupart chercher eux-mêmes la manière de se servir de ces
nouveaux outils tout en gardant à l’esprit la notion d’utilité pédagogique. Certains
enseignants se sentent contraints sous la pression des élèves et de l’environnement social
d’innover en fonction des nouveaux instruments que le marché leur propose.
En plus de la pression des élèves et de l’environnement social existe une pression de la
part du gouvernement et des différents ministres qui se succèdent sans jamais être tout à
fait d’accord sur les points importants de la politique de l’Education. En effet chaque
ministre de l’Education Nationale fait ou propose une réforme. En matière de nouvelles
technologies nous pouvons citer la création du Brevet informatique et Internet en juin
2000, décision prise par le ministre de l’époque Monsieur Jack LANG. Ce Brevet
informatique et Internet (B2I : voir annexes) est un certificat obligatoire pour les élèves
des écoles et des collèges attestant de leurs compétences dans l’utilisation des ordinateurs
et d’Internet. Il faut selon Jack LANG qu’à court terme « les élèves sachent naviguer sur
Internet comme ils devraient savoir écrire et nager »7
Cette obligation a suscitée chez les enseignants de nombreuses réactions car ils voient en
cette nouvelle démarche un obstacle difficile à surmonter soit quand l’enseignant n’est
pas à l’aise avec l’outil informatique (comme c’est le cas de l’une de nos enseignante
7 Discours de jack LANG sur les nouvelles technologies du 20 août 2001.
27
rencontrée) soit quand l’enseignant ne sait pas comment est ce qu’il va réussir à gérer
cette passation de Brevet. En effet cette passation du B2I nécessite un entraînement
préalable avec des cours d’informatique ce qui nécessite également de beaucoup de
temps, de moyens humains et matériel car si les enfants sont trois ou quatre par ordinateur
cela n’est aucunement efficace. Parmi les enseignantes que nous avons rencontrés toutes
soulignent que si elles peuvent organisées des séances d’informatique c’est grâce à des
mères de famille bénévoles qui prennent sur leur temps personnel. Sans cela ou sans aide
éducateur ou assistants d’éducation il parait difficile de mettre en place des séances
d’informatique avec des classes à 25 enfants en moyenne.
Pourtant pour une grande partie des enseignants le B2I est perçu comme quelque chose de
bénéfique pour l’enfant et semble important à réaliser. En effet les nouvelles
technologies constituent un outil de travail pour les élèves comme pour les enseignants
afin d’effectuer des recherches documentaires sur Internet, pour produire des documents
utilisés en classe ainsi que pour échanger des informations et travailler en équipe grâce
aux messageries. Les réseaux offrent aux enseignants de nouvelles possibilités
d’échanger des réflexions et des informations, de mutualiser les expériences et les
travaux. Evidemment, l’intensité de ces usages varie selon les disciplines, le niveau de
familiarité et l’intérêt personnel face aux nouvelles technologies. Nous pouvons nous
reporter aux entretiens effectués qui illustrent bien nos propos : une de nos enseignante
nous dit que « Internet est une mine d’info […] Internet pour moi c’est la mutualisation
du travail ». Une autre nous dit « qu’Internet donne parfois des idées d’activités ou des
programmations toutes faites »
Il faut cependant mettre un bémol à tous ces enchantements car toutes nos enseignantes
rencontrées sont d’accord pour affirmer qu’Internet peut également être une perte de
temps car il y a trop d’informations. Souvent les enseignants cherchent le meilleur site,
celui où il y aura le plus d’informations intéressantes alors que finalement on s’aperçoit
que l’on retrouve les mêmes informations un peu partout.
Beaucoup d’enseignants utilisent l’informatique chez eux à titre personnel pour produire
des documents propres à utiliser en classe ou pour faire leurs évaluations. L’informatique
comme outil bureautique est vraiment celui qui l’emporte.
Nous nous sommes aperçus que les nouvelles technologies étaient plus faciles à utiliser
lorsqu’elles étaient intégrées dans un projet pédagogique. Nous pouvons noter ici
l’exemple d’une de nos enseignantes qui utilise le caméscope pour filmer ces élèves dans
28
différentes activités scolaire afin de faire une cassette vidéo à la fin de l’année à offrir aux
parents d’élèves. Il faut bien sûr préciser que ces nouveaux outils pédagogiques
n’atteindront leur pleine efficacité que s’ils sont utilisés au niveau de chaque
établissement de manières coopératives et étroitement imbriquées dans les projets
pédagogiques de l’établissement comme nous venons de le voir.
Il faut tout de même garder à l’esprit que tous les enseignants ne sont pas tous en accord
sur l’informatique et ses objectifs pédagogiques. Certains sont réticents à l’usage le
l’informatique comme nous allons le voir par la suite.
29
d) Rapport à l’enfant
Aujourd’hui, les nouvelles technologies occupent une place prépondérante dans la vie
sociale des individus et dans le « paysage scolaire » Français. C’est pourquoi, il est
important de sensibiliser et de former dés leur plus jeune âge, les futurs citoyens à ces
nouvelles technologies, cela est devenu indispensable.
De nombreux enfants, ont un ordinateur chez eux, de ce fait ils sont plus ouvert et
perméable aux nouvelles technologies : plutôt on apprend, plutôt on maîtrise. En classe,
cela se ressent : « on remarque tout de suite ceux qui ont un ordinateur chez eux »8.
Néanmoins, ne pas avoir accès à l’Informatique et Internet à la maison n’est pas du tout
un handicap, car il existe d’autres activités tout aussi ludique et éducatives comme la
lecture par exemple, « c’est simplement un petit plus pour l’enfant car de toute manière
il découvrira l’informatique à l’école ! »
Varier les supports pédagogiques n’est pas une mauvaise chose, cela peut contribuer à
la meilleur compréhension de l’enfant : «il faut varier les supports pédagogiques pour
faire avancer les enfants »1. De plus, ces différents supports technologiques que les
enfants vont avoir l’occasion de côtoyer dans leur vie future, stimulent leur curiosité.
Les enfants sont fascinés par tout ce qui est nouveau « au début ils sont plus captivés
par la machine en elle même que par la contenu ! Mais j’ai remarqué que les enfants
aiment aussi l’ancien »1
En plus de stimuler la curiosité et l’éveil de l’enfant, l’ordinateur est au service des
apprentissages basiques, à travers la mise en place d’applications pédagogiques :
journal de classe, compte rendu de travaux, analyse de texte. La rédaction d’un journal
de classe fait partie intégrante des activités de français et suscite une motivation à
l’écriture. Les textes sont écrits en classe, à la maison, par les élèves avant d’être
recopiés sur les ordinateurs.
Des logiciels spécifiques existent également pour apprendre à lire, compter tout en
s’amusant.
Le simple fait que l’enseignant dise : « on va faire de l’informatique », au lieu de
préciser ce qu’il va faire (traitement de texte, gestion de bibliothèque, lecture…) peut
8 Entretien à l’école du Petit Gobert » à Nozay
30
renforcer l’idée que l’ordinateur est un outil différent de ceux employés pendant le
temps scolaire. L’ordinateur peut être encore perçu par les enfants comme un jouet et
non un outil de travail. En effet, « la séparation entre le travail et le jeu, surtout en CP,
CE1, CE2 n’est pas encore très nette et beaucoup d’élèves considèrent l’ordinateur
comme un jouet électronique de type : jeux vidéo»9. Phénomène qui ne nuit en rien à
l’aspect ludique des logiciels informatique d’apprentissage… l’enfant apprend en
s’amusant.
Néanmoins, cela peut conduire à des comportements déviants comme la recherche de
faire mieux que son voisin. Dans ce cas l’apprentissage devient une compétition.
L’élève se préoccupe de savoir le score réalisé par son voisin, qui est indiqué dans une
fenêtre en bas de l’écran par exemple, l’objectif premier n’est plus l’apprentissage de la
règle de grammaire ou de mathématiques mais de battre l’adversaire. L’introduction
des ordinateurs au sein des établissements scolaires stimulerait les interactions entre les
élèves. En effet, l’informatique peut générer de l’entraide entre élèves, l’élève qui a
terminé l’exercice peut aider son collègue de classe à comprendre. Cette entraide
accroît l’acquisition et l’esprit d’initiative de l’enfant. Initiative qui est rendu possible
par une plus grande liberté de se déplacer dans la classe. Néanmoins une trop grande
liberté peut amener des situations de bavardages. Bavardages qui sont plus important
quand les élèves travaillent à deux sur la même machine: « Le fait de travailler seul où
à deux sur les ordinateurs influence les bavardages. »10
Former des futurs citoyens, c’est aussi formé des futurs consommateurs. C’est
pourquoi, il faut les former à faire le tri en matière de nouvelles technologies, tout
particulièrement sur Internet. En effet, les valeurs présentes dans la communication
mondiale sont celles de ces acteurs : violence, pornographie… mais aussi beauté,
solidarité, formation à l’humanité…il est donc nécessaire de sélectionner l’information
qui sera utilisable en matière d’enseignement !
C’est à l’enseignant de juger le plus objectivement possible ce qui va être bénéfique
pour l’enfant : car l’enseignant en plus d’être un médiateur joue aussi le rôle de
précepteur. L’enseignant doit toujours construire son cours dans l’intérêt de l’enfant et
non pas dans son intérêt personnel.
9 Christian Laguerre: Ecole, Informatique et Nouveaux comportements 10 Christian Laguerre : Ecole, Informatique et nouveaux comportements
31
III- Des avis partagés
32
Sur question des nouvelles technologies à l’école, les avis sont très hétérogènes. Si le résultat
de l’enquête que nous avons réalisée tend à penser que les nouvelles technologies sont plutôt
bien accueillies cela n’est pas vraie pour tous les établissements primaires.
Afin de répondre à la question de l’intégration et de l’utilité des nouvelles technologies dans
l’enseignement, nous axerons notre analyse d’une part sur l’accès aux nouvelles technologies
en abordant notamment la question du coût.
Ensuite nous étudierons les apports et limites de celle-ci dans le cadre de l’apprentissage.
Enfin nous verrons comment ces nouvelles technologies sont perçues par les enseignants eux-
mêmes au travers de nos enquêtes et de nos sources bibliographiques.
Dans cette dernière partie, nous n’analyserons pas seulement les apports et les limites des
nouvelles technologies dans le cadre de l’établissement scolaire mais nous aborderons la
question sous un angle plus global.
a) Accès et coût des nouvelles technologies
Concernant l’accès des nouvelles technologies dans les établissements primaires la situation
est difficile à cerner en raison du nombre d’établissement de leur taille très variable et d’une
gestion locale des équipements.
Il faut préciser que les élèves ne sont pas autonomes et sont déterminés par la mobilisation des
professeurs. Il ne servirait donc à rien d’avoir un niveau d’équipement en informatique tel que
le nombre d’enseignants serait insuffisant pour en assurer l’accompagnement.
Le sous équipement est parfois sous évaluer et une seul solution existe pour résoudre la
question des besoins en équipement des écoles primaires : faire l’inventaire des besoins
établissements par établissements.
De plus, même si à l’heure actuelle la situation tend à s’améliorer, l’accès aux nouvelles
technologies reste encore limité en milieu rural. Ceci s’explique en partie par un manque de
moyens financiers, un manque d’aide de la part de l’état…De ce fait, il paraît difficile pour
33
certains établissements primaires de faire évoluer leur matériel. Pourtant, ce matériel
informatique essentiellement fait pour les élèves de primaire serait bien utile pour ces
établissements, il serait notamment un moyen de s’ouvrir sur le monde, leur permettant ainsi
de sortir de leur isolement géographique.
Cependant, encore une fois, cette situation tant à ce raréfier même s’il reste encore de la
disparité entre la ville et la campagne. Pour illustrer cette évolution, l’exemple d’un réseau
dans le Vercors reliant 130 classes et 8 collègues témoigne de la résolution d’un problème qui
en tout état de cause n’en sera bientôt plus un.
Dans notre enquête de terrain par exemple les choses semble plutôt bien se passer de ce côté
là : « il y a 10 ordinateurs tous reliés à Internet, ADSL à 512k »
En terme de coûts, les enseignants, premiers utilisateurs des ressources pédagogiques
critiquent souvent les niveaux techniques et pédagogiques des logiciels commercialisés. En
effet, pour accueillir des commentaires élogieux dans la presse, les éditeurs sont tentés
d’exploiter les dernières trouvailles technologiques qui exigent des machines puissantes. Ces
machines devant dans la mesure du possible suivrent les progrès technologiques ont donc un
coût financier important.
De plus, outre le renouvellement nécessaire des machines, d’autres dépenses auxquelles on ne
pense pas au prime abord sont à prendre en compte tel :
- La formation
- La maintenance
- L’achat de logiciel
Dans l’une des écoles dans laquelle nous avons interrogé les enseignants c’est :
« la municipalité qui gère. Elle est au courant des nouveaux programmes, des obligations,
c'est à elle de faire en sorte que le parc informatique soit assez puissant et fiable. Il y a un
budget petits équipements de 1000 € pour tout ce qui est les CDROM, des cassettes vidéo,
des DVD, des casques pour ordinateur... »
Un autre problème est à soulever, en effet face à la baisse des prix, les établissements peuvent
être tentés de reculer leur investissement.
Il existe en fait deux stratégies d’investissement :
34
- investissement cher : reste à trouver les fonds
- Location : d’où, lissage des dépenses, matériels performant.
La deuxième stratégie est en tout état de cause la mieux adaptée.
En terme d’équipement à l’échelle nationale, nous nous devons de constater que la promesse
de Jacques Chirac d’équiper l’ensemble des écoles avant l’an 2000 a globalement été tenue.
De plus, la France est le seul pays à avoir prévu l’équipement de tous les établissements y
compris des écoles maternelles et des écoles primaires.
35
État des lieux : équipement et connexion des écoles 11
Estimation de la situation dans le primaire
en 2003
Nb d’élèves par
ordinateur
Taux d’accès à
l'Internet
2000 2003 2000 2003
Maternelles 25 25 14 % 30 %
Élémentaires 25 20 40 % 60 %
Accès à l'Internet
Taux d’accès à l'Internet des écoles
maternelles et élémentaires fin 2002
Nombre de
départements
Taux de connexion
des écoles
12 0 à 25%
33 26% à 50%
31 51% à 75%
20 76% à 100%
7 100%
Moyenne générale :
11 www.educnet.fr
36
50 %
b) Apports et limites dans le cadre de l’apprentissage
���� Des bénéfices difficiles à cerner
Il est difficile de mesurer les apports réels de l’informatique dans le domaine de l’éducation.
Certaines études font état d’effets cognitifs résultants de l’usage des technologies, mais ces
effets sont le plus souvent diffus et ne peuvent être directement reliés à une discipline ou à un
domaine de compétences particulier, il s’agit plutôt à des capacités métacognitives
(motivation, curiosité, ouverture aux autres).
Face à ces résultats fragmentaires, comment ce demander si l’effet observé ne résulte pas
davantage de l’attention particulière portée par l’élève à l’expérience, où d’une rupture avec
les habitudes scolaires plutôt que la technologie elle-même.
� Les états cognitifs de l’enfant
L’évaluation des processus et des états cognitifs est une tâche complexe. Il n’existe pas de
moyens sûrs permettant de mesurer non seulement les compétences acquises, mais également
de distinguer en cas de lacune, entre ce qui relève d’un défaut d’apprentissage où d’une
carence psychologique plus générale.
37
La complexité des situations éducatives ne permet pas de faire la différence, parmi les
nombreux paramètres entrant en jeu dans l’apprentissage :
- les causes liées à son histoire personnelle
- aux méthodes pédagogiques appliquées
- ressources matérielles utilisées
- relations avec l’enseignant et les autres élèves.
Les méthodes qui inspirent à la neutralité, celles qui utilisent par exemple des textes
soigneusement étalonnés, n’obtiennent pas foncement de meilleurs résultats que l’évaluation
intuitive, à la fois plus nuancée et plus fiable, réalisée chaque jours par l’enseignant au contact
quotidien des élèves. Dans le processus éducatif il ne sert à rien d’être confronté au problème
avant d’avoir acquis les connaissances. Formellement donc, les logiciels éducatifs familiaux à
base de questionnaires permettent de repérer les lacunes mais non d’y remédier.
Dans la pratique du logiciel permettra au bon élève de renforcer ces connaissances déjà bien
assimilées tandis que le mauvais élève, celui à qui il reste encore des compétences à acquérir,
parviendra mal à comprendre les causes de ses échecs et ne trouvera pas dans le logiciel
l’occasion de combler ses lacunes.
���� L’enfant et l’hypermédia
Enfin, concernant l’hypermédia la simple navigation déstructurée d’informations non
contrôlées ni validées, ne peut avoir d’effets positifs en terme d’apprentissage. Elle doit être
soit encadrée dans un projet éducatif explicite, négociée avec l’enseignant et résultant dans
des travaux individuels ou collectifs.
La navigation dans l’hypermédia conduit presque infailliblement l’utilisateur à une perte de
sens si l’élève n’est pas accompagné dans sa découverte il y a peu de chance qu’il puisse tirer
le moindre bénéfice de la consultation libre d’un CD Room, où bien plus encore, du monde
foisonnant et chaotique d’Internet.
De plus, il est nécessaire que l’enfant garde à son active un maximum d’activités toutes
nécessaires à son évolution (marcher, lire…).
Les enseignants savent aussi que les élèves ne sont pas tous égaux face aux technologies, en
raison des différences dans le style intellectuels, les profils psychologiques, l’environnement
familial ou les conditions sociales.
Turkle Sherry docteur en sociologie et en psychologie démontre également l’ambivalence de
l’ordinateur, qui pour certains constitue une aide à la croissance, et pour d’autres présente des
38
risques d’enlisement dans un monde virtuel, dont l’attrait provient des règles strictes qui la
régissent, contrairement au monde réel.
Enfin, des psychologues cogniticiens, aux Etat - Unis comme en Europe, se penchent sur
l’usage éducatif des hypermédias, c'est-à-dire des ressources numériques interactives
organisant autour de lien logique sur un même écran, textes, images et sons.
Leurs premières analyses mettent en évidence des effets inattendus de surcharge cognitive.
En effet, s’ils facilitent en principe l’accès aux documents, l’hypermédia en rend aussi la
lecture plus complexe. L’usager doit d’abord assimiler le fonctionnement de l’outil puis éviter
les pièges qu’il recèle : la perte de sens et l’oubli des objectifs initiaux provoqués par
l’incitation à activer des liens hypertextuels.
Cependant nombreux également sont les points positifs concernant l’utilisation des nouvelles
technologies. L’accès aux réseaux de télécommunication comme Internet et la possibilité de
puiser aux sources d’informations réparties dans le monde entier constitue un terrain
d’exploitation possible pour l’élève.
On peut également aborder l’existence des logiciels appelés micro mondes font leur
apparition et sont plutôt bien accueillis. Il s’agit d’un environnement d’action dans lequel
l’élève s’engage librement et exerce sa créativité. Il découle ici, non pas du behaviorisme
mais de la pédagogie Piaget (le constructivisme) qui met l’accent sur l’activité de l’élève au
centre de son apprentissage.
Enfin le didacticiel d’enseignement assisté par ordinateur (EAO) malgré les critiques, continu
d’être utilisés dans les établissements scolaires. Cependant plus pour une remise à niveau des
élèves en difficulté d’acquisition de savoir faire, de répétions, d’entraînement et de
mémorisation. De nombreuses vertus leur sont reconnues. L’interaction entre élève et
ordinateur permet d’adapter au plus près l’enseignement aux besoins individuels. Les logiciels
dont beaucoup incorporent des outils d’évaluation, permettent à chacun d’apprendre à son
rythme, de même qu’ils aident les enseignants à réaliser des suivis personnalisés de l’élève.
c) Les contraintes et les apports pour l’enseignant
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Les aspects positifs de l’usage des technologies en classe commencent à être bien connus,
mais l’informatique et les réseaux de communication ont encore un long chemin à parcourir
avant d’être légitimé auprès du monde enseignant dans son ensemble.
���� Charges de travail supplémentaire
L’une de limite que l’on peut noter en rapport avec le matériel informatique est que dans les
écoles se sont des enseignants motivés qui maîtrisent bien l’informatique qui doivent s’assurer
de la bonne marche des postes, des réseaux, de la mise à jour des logiciels et du matériel.
Contrairement, à titre d’exemple, aux entreprises où la gestion du réseau est prise en charge
par des spécialistes.
Ce pose alors le problème du temps de travail. En effet, dans les ouvrages étudiés il est
souvent fait référence à cette surcharge de travail qui peut être vécu comme une injustice de la
part de certains enseignants. Précisons, que ces derniers ne reçoivent aucunes contreparties
financières, il s’agit en quelque sorte de bénévolat.
De plus comme nous l’avons vu dans notre enquête parfois il y a un manque de personnel.
Pour illustrer cet état de fait, à la question de l’existence de cour d’informatique l’un de nos
interlocuteurs répond : « Il y a des cours surtout pour les CM mais c’est la maîtresse qui fait
cour pendant que l’autre demi groupe est à la bibliothèque qui est gérée grâce à des mamans
bénévoles ».
En effet, il faut savoir qu’à l’école primaire les enfants ne sont pas encore autonomes.
���� Les coûts à la charge des enseignants
Un autre fait est dommageable, il s’agit notamment des coûts à la charge des enseignants.
Nous pouvons également le constater dans note enquête : « J'ai un ordinateur à la maison
plus un portable pour l'école; il y a en plus l'encre que j'utilise le plus souvent pour mon
travail scolaire. Cela m'arrive aussi d'acheter des Cdrom ». Mais encore : « Non, j'achète
mon encre et encore j'estime que ce n'est pas à moi de le faire car mon imprimante sert
essentiellement pour l'école ».
���� Les querelles entre enseignants
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Comme nous l’avons précisé, les nouvelles technologies sont au centre d’un débat passionné,
ainsi nous ne sommes pas à l’abrie de désaccord entre enseignants, l’un de nos témoignages
recèle : « Nous ne sommes pas toute d'accord sur l'âge pour commencer ».
Cependant dans la plupart des cas les technologies crées du lien social : « Nous sommes toutes
à peu près d'accord, dans l'école on fait confiance aux personnes qui s'y connaissent, c'est
quelque chose qui nous sert d'échange ».
� L’Internet qui fait peur
Même s’ils se font de plus en plus rare, il existe des réfractaires à l’utilisation de l’Internet, les
propos d’une des enseignantes vont dans ce sens :
« Je ne fais pas de recherches sur Internet car je trouve que cela prend trop de temps et je
n’ai pas le temps de lire de l’information non essentielle car Internet ne trie pas
l’information, il y a trop de chose à filtrer ». Et surtout, « Internet me fait peur, j’ai peur de
me perdre de faire une mauvaise manipulation j’ai une certaine appréhension. »
���� Le devenir du métier
Le risque le plus fréquemment dénoncé est celui de la tentation possible de remplacer
l’enseignant par la machine12. Rappelons que c’était implicitement le but des béhavioristes qui
voyaient en les nouvelles technologies un moyen de faire des économies de personnel.
Cependant, cette inquiétude n’est pas légitime, nous le verrons.
� Un outil pas toujours exploité
En France, les 2/3 des enseignants sont de jeunes enseignants, et paradoxalement, les jeunes
enseignants sont ceux qui utilisent le moins les outils informatiques. En effet, ces derniers
consacrent leur début à la maîtrise pédagogique de la classe.
12 A l’heure d’Internet de S. Pouts-Lajus et Riché-Magnier p.96
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Dans ce cas de figure, c’est peut-être la formation aux nouvelles technologies qu’il faut
remettre en cause comme nous l’avons précédemment établie.
���� Les atouts non négligeables de l’hypermédia
Des bases de données mettent à la disposition des professeurs des documents téléchargeables
dans une diversité de matières, des sites Internet permettent également aux professeurs de
dialoguer entre eux sur les difficultés rencontrées et sur l’intérêt des exercices.
Cependant, la qualité de base des documents repose sur le nombres et la motivation des
enseignants décidés à collaborer à son enrichissement : sans cette mobilisation, les quelques
bonnes volontés du maintient de base finissent toujours par ce lasser.
Il existe également des annuaires Internet concernant le domaine de l’éducation, ils servent de
boussole aux internautes et les oriente vers les meilleurs sites.
Les enseignants interroger, ce disent pour la plupart intéressés par l’outil Internet : « J’utilise
beaucoup Internet pour faire des recherches par rapport aux sciences ou l’histoire. Certains
sites sont des mines d’infos… ». De plus, cela peut réellement les aider dans leur travail : « Je
ne communique pas avec les collègues. Je vais sur des sites d'enseignants parfois car ça
donne des idées, on peut trouver des programmations toutes faites ».
Cependant il y a quand même à ce sujet quelques bémols : « Beaucoup de plaisir, beaucoup
d’info mais parfois trop d’info donc c’est certaines fois une perte de temps. Internet est très
riche mais cela peut devenir un piège. On passe beaucoup de temps à chercher le meilleur
site puis on se rend compte que le sites se ressemblent tous ». Où encore : « Mais je trouve
qu'il y a trop d'informations sur Internet et que cela devient finalement une perte de temps. »
L’une des vocations des réseaux est de rapprocher les enseignants et de leur donner les
moyens de travailler ensemble. Le réseau leur permet d’échanger réflexions et pratiques, de
partager des ressources, d’organiser des rencontres, de coordonner des opérations
administratives comme l’attribution de matériels, de ce répartir le travail autour de projets
pédagogiques, et tout simplement de s’informer et de s’entraider. Sur les forums, des
solutions aux problèmes rencontrés par les uns et les autres sont mis à la disposition de tous.
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Conclusion
Comme il nous venons de le voir, les nouvelles technologies sont au centre d’un débat
intense. Entre les militants d’une école traditionnelle imperméable au monde extérieur,
donnant priorité au développement de l’esprit critique, et les partisans d’une école ouverte sur
le monde, dont l’objectif et de préparer les futurs travailleurs à l’environnement professionnel,
le fossé est immense. Ils semblent cependant que les seconds l’emportent et que les
technologies s’imposent d’avantage chaque jours dans l’enseignement.
L’école change, elle évolue avec ou sans technologies. La nécessité de pratiquer des
pédagogies plus actives ouvertes sur le monde s’impose à tous chaque jours d’avantage. C’est
d’ailleurs une nécessité maintes fois soulignée dans le passé par les grands pédagogues
comme Freinet, Montessori, Decroly et bien d’autres.
Cependant nous sommes en mesure de vérifier notre hypothèse selon laquelle il semble ces
technologies n’aient pas le pouvoir par elle-même de réformer les pratiques éducatives.
En effet, nous l’avons démontré, c’est dans l’intimité de la classe et dans la durée de la
relation pédagogique que l’élève acquière des connaissances.
Il semble que l’informatique ne remplacera jamais la qualité du travail de l’enseignant. Ne
perdons pas de vu que cette dernière est un moyen et non une fin pédagogique.
Seul l’enseignant peut acquérir une vision juste des capacités et des facteurs de blocage
personnels et sociaux de l’élève.
Comme, l’affirme le socioconstructivisme, la connaissances s’acquière avant tout dans une
relation d’altérité qui est le maître mot de toute apprentissage.
L’intégration des nouvelles technologies dans l’enseignement primaire ne peut donc ce faire
qu’en lien direct avec l’enseignant. Le rôle de celui-ci étant d’orienter les élèves dans
l’utilisation de cet outil qui peut s’avérer très efficace.
Les enseignants n’ont donc pas à ce faire de soucis, leur profession à encore de beaux jours
devant elle…
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