Survol hydrogéologique de l'aquifère transfrontalier du bassin versant de la rivière Châteauguay, Canada - États Unis Charles Lamontagne 1 , Miroslav Nastev 2 1 Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec, 675, boulevard René Levesque Est, boîte 42, Québec, Québec G1R 5V7 (418) 521-3885 #4814 ; [email protected]2 Commission géologique du Canada, Ressources naturelles du Canada, Québec, Québec G1K 9A9 For the use of the editors Paper #: Submitted on: Accepted on: Application or Research Paper: Résumé Le projet de cartographie de l'aquifère du bassin de la Châteauguay s'est déroulé sur quatre ans, entre 2003 et 2007, et a requis l'implication de plusieurs équipes multidisciplinaires. L'origine du projet est reliée au manque de connaissance sur l'état de la ressource en eau souterraine, tant au niveau de la qualité que de la quantité et à la difficulté de gérer la ressource. Le projet a défini le contenant (les unités aquifères) et le contenu (la qualité ainsi que les quantités d'eau disponible). La méthodologie utilisée comprend la compilation des données existantes, leur traduction en format numérique, la mise à jour de la géologie du Quaternaire, la collecte de nouvelles données, l'interprétation de ces données en vue d'établir les processus hydrogéochimiques, l'écoulement, la vulnérabilité et la 1 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 1
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Survol hydrogéologique de l'aquifère transfrontalier du bassin de la rivière Châteauguay
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Survol hydrogéologique de l'aquifère transfrontalier du
bassin versant de la rivière Châteauguay, Canada -
États Unis
Charles Lamontagne1, Miroslav Nastev2
1 Ministère du Développement durable, de l’Environnement et desParcs du Québec, 675, boulevard René Levesque Est, boîte 42,Québec, Québec G1R 5V7(418) 521-3885 #4814 ; [email protected]
Le projet de cartographie de l'aquifère du bassin de laChâteauguay s'est déroulé sur quatre ans, entre 2003 et 2007, eta requis l'implication de plusieurs équipes multidisciplinaires.L'origine du projet est reliée au manque de connaissance surl'état de la ressource en eau souterraine, tant au niveau de laqualité que de la quantité et à la difficulté de gérer laressource. Le projet a défini le contenant (les unités aquifères)et le contenu (la qualité ainsi que les quantités d'eaudisponible). La méthodologie utilisée comprend la compilation desdonnées existantes, leur traduction en format numérique, la miseà jour de la géologie du Quaternaire, la collecte de nouvellesdonnées, l'interprétation de ces données en vue d'établir lesprocessus hydrogéochimiques, l'écoulement, la vulnérabilité et la
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pérennité des eaux souterraines. L'aquifère régional estconstitué de couches sédimentaires mais c'est la nature etl'épaisseur des dépôts meubles qui définissent les contexteshydrogéologiques et d'écoulement.
Abstract
The regional hydrogeological study of the Châteauguay Riverwatershed was undertaken during a four years period, between 2003and 2007, and required the involvement of several multidisciplinary groups. The rationale for the study was the evidentlack of knowledge on the state of the groundwater resource whichhindered management efforts in the watershed. The projectobjective was to define the major aquifer units and the qualityand quantity of the groundwater resources. The appliedmethodology consisted of compilation of existing data andbuilding up of digital database, field acquisition of new data,update of geological maps, followed by the determination ofhydrodynamic and hydrogeochemical processes, and thesustainability assessment. The regional aquifer units are foundwithin the sedimentary bedrock formations and occasional coarsefluvioglacial sediments. The nature and thickness of thesurficial deposits defines the hydrogeological settings and flowregimes.
Introduction
Le bassin versant de la rivière Châteauguay est situé au sud-
ouest du Québec, immédiatement au sud-ouest de la ville de
Montréal (Figure 1). Le bassin est transfrontalier entre le
Canada et les États Unis et couvre une superficie de 2 543 km2
répartie presque également entre le Québec 57%) et l’état de New
York (43%). Au Canada, le bassin versant est densément peuplé
(100 000 habitants) et la population est fortement dépendante de
l'eau souterraine comme source d'alimentation. Approximativement,
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67% de l'eau utilisée provient de l'eau souterraine et on estime
qu'il y a plus de 20 000 puits domestiques sur le territoire.
Presque la totalité de ces puits interceptent l'aquifère
régional, situé dans les roches sédimentaires paléozoiques (grès,
dolomies et calcaires) qui sont par endroits en contact avec des
sédiments fluvio-glaciaires grossiers.
La qualité des eaux souterraines de la région est reconnue; une
usine d'embouteillage est active et plusieurs autres projets ont
été proposés dans les dernières années. Historiquement, les
activités industrielles à Ville Mercier ont mené à un des plus
importants cas de contamination de l'eau souterraine de la
province. Au début des années 70, des déversements d'huiles
usées, incluant des hydrocarbures chlorés, ont mené à la
fermeture des puits municipaux de Mercier et de Sainte-Martine.
D'ailleurs, un piège hydraulique, mis en place en 1984 par le
ministère du Développement durable, de l’Environnement et des
Parcs (MDDEP), pompe de l'ordre de 1 Mm3 d'eau souterraine par
année pour contrôler la contamination.
Figure 1. Zone d'étude avec le modèle altimétrique de terrain en
arrière plan.
Le bassin versant de la rivière Châteauguay est une des régions
du Canada où les eaux souterraines à l’échelle régionale sont les
mieux documentées en raison de la forte utilisation de l'eau
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souterraine pour l'agriculture et les usages domestiques. Le
cadre stratigraphique et la géologie du sud du Québec ont été
extensivement étudiés par Clark (1966) et Globensky (1981, 1986
et 1987). Une série de travaux thématiques plus récents ont été
réalisés par la Commission Géologique du Canada - CGC (Lavoie,
2004). La stratigraphie quaternaire a été étudiée par MacClintock
et Stewart (1965), Richard (1982), LaSalle (1981, 1985), et
dernièrement par Tremblay et Lamothe (2005). Plusieurs études
hydrogéologiques régionales ont été réalisées dans ce bassin
également (Freeze 1965; McCormak 1981; Morin et al., 2007; et
Nastev et al., 2008), ainsi que plusieurs travaux reliés à la
contamination des anciennes lagunes de Mercier, pour laquelle des
études de terrain et de modélisation locale ont été réalisées
dans le passé (Poulin, 1977; Pontlevoy, 2004). Il est intéressant
de noter qu'en 1964, à partir des débits de base, Freeze (1965)
estimait, que pendant les années 50, l'alimentation des nappes
représentait 13% des précipitations alors que les travaux récents
sur l'aquifère de Châteauguay ont conclu que la fraction des
précipitations qui alimentent la nappe régionale est de l’ordre
de 9 % (Croteau et al., cette publication).
Quoique la ressource eau souterraine soit relativement abondante
dans la région, l'augmentation graduelle de la population et des
activités économiques combinées aux prélèvements plus importants,
conjuguée aux conditions sèches des dernières années et aux cas
de contamination ponctuelles ont crée des pénuries locales et des
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conflits occasionnels d'usage dans les zones de forte demande. La
population locale est aussi préoccupée par les impacts potentiels
sur l'eau souterraine des usages agricoles intensifs reliés
notamment à la culture maraîchère sur les tourbières des régions
de Saint-Rémi et Sherrington (à l’est de Sainte-Clotilde-de-
Châteauguay), à la pomiculture et à l'utilisation des pesticides
sur le mont Covey Hill et à la généralisation des grandes
cultures dans la plaine argileuse (maïs, soya). Par ailleurs, les
résurgences du mont Covey Hill constituent l'unique habitat de la
salamandre sombre des montagnes au Québec. Un autre problème
potentiel relié aux eaux souterraines est causé par la
commercialisation de l'eau par les embouteilleurs (Dagenais et
Nastev, 2005). Des conflits entre les divers usagers de l'eau
sont anticipés. Les gestionnaires locaux ne sont pas équipés pour
faire face à ces problèmes, en partie à cause du manque de
connaissance sur l'état de la ressource, tant au niveau quantité
que qualité, ainsi que par le manque de compréhension de sa
dynamique d'écoulement. Il est donc difficile d'élaborer des
règles de gestion de la ressource. Ce sont toutes ces raisons qui
ont été invoquées pour justifier l'étude hydrogéologique
régionale entreprise en 2003 conjointement par le MDDEP, la CGC
et la USGS (United States Geological Survey). Cette étude avait
pour objectif la définition des unités aquifères (le contenant),
la qualification du régime d'écoulement des eaux souterraines
ainsi que la détermination d'un portrait de sa qualité et de sa
disponibilité (le contenu). Les principaux résultats du projet
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furent la publication de plusieurs articles scientifiques et
thèses ainsi que l'élaboration d'un atlas hydrogéologique du
territoire étudié (Côté et al, 2006).
L’objectif spécifique de ce manuscrit est d’introduire du point
de vue hydrogéologique le bassin versant de la rivière
Châteauguay aux lecteurs. Plusieurs sujets sont abordés pour
faciliter la compréhension des autres articles présentés dans
cette publication spéciale. Tout d’abord, la méthodologie
utilisée pour l'étude hydrogéologique régionale est présentée.
Par la suite, la physiographie et la description générale du
bassin versant sont présentées. La géologie du roc et les dépôts
quaternaires sont décrits en détail subséquemment. Les contexteshydrogéologiques, la piézométrie observée sur le terrain et le
modèle conceptuel de l’écoulement régional sont présentés à la
fin.
Figure 2. Calendrier des travaux et méthodologie : compilation
des données existantes, conceptualisation de l'écoulement de
l'eau souterraine (non grisé), modèles géologiques (en jaune),
dynamique de l'eau souterraine (en bleu), qualité de l'eau
souterraine (en vert) et pérennité de la ressource (en rouge).
Méthodologie de l’étude hydrogéologique régionale
La méthodologie utilisée pour l'étude hydrogéologique régionale
du bassin versant de la rivière Châteauguay était adaptée aux
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objectifs, au budget et au temps disponible pour la réalisation
du projet (Figure 2). Pour commencer, on a réalisé une revue de
la littérature et une compilation des données existantes; et on a
traduit ces données en format numérique (niveaux d'eau, levés
géologiques et géophysiques, propriétés hydrauliques de
l'aquifère, échantillonnage et analyses d'eau). Une des tâches
principales entreprise a été la mise à jour des cartes du
Quaternaire permettant ainsi l'élaboration d'un modèle géologique
tridimensionnel afin d'analyser et d'établir les contraintes
applicables à la recharge et à la vulnérabilité de l'aquifère.
Des méthodes ont été développés pour interpréter l'imagerie
satellitaire, notamment l'évaluation de l'analyse automatisée et
la compilation des informations complémentaires combinées avec
des mesures de terrain. Les propriétés hydrauliques des aquifères
fracturés furent établis à partir des essais hydrauliques
reconnus et des diagraphies de sondage. Des techniques numériques
ont été utilisées pour modéliser les propriétés hydrauliques, les
variations spatiales et saisonnières de la recharge régionale,
les processus hydrogéochimiques affectant la qualité naturelle,
ainsi que l'écoulement de l'eau souterraine. Ensuite, la
vulnérabilité de l'aquifère aux contaminants en surface et la
pérennité des ressources en eau souterraine ont été évalués ainsi
que certains aspects socio-économiques de l'usage actuel de l'eau
souterraine. Pendant la dernière année du projet, des rapports
techniques et un atlas hydrogéologique résumant les résultats des
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travaux dans un niveau de langage accessible aux résidants de la
région ont été rédigés.
Description du bassin de la Châteauguay
Au Québec, le bassin est localisé dans la région physiographique
des Basses Terres du Saint-Laurent, une étroite bande de terre de
faible relief, située de part et d'autre du fleuve, alors que
dans l'état de New-York cette région recouvre l'extrémité nord
des montagnes des Adirondacks. Cette dernière portion du
territoire est située en élévation et est dominée par les
affleurements rocheux ou par un mince couvert de till. Les Basses
Terres du Saint-Laurent sont une région de bas relief et de basse
élévation qui s'étendent d'Ottawa jusqu'au delà de la ville de
Québec. Dans la région de Montréal, elles mesurent de l'ordre de
120 km de largeur; cependant à la hauteur de Québec, les Basses
Terres ne sont plus que 5 km de large. Géologiquement, les mêmes
formations se poursuivent sur le côté nord du fleuve au delà de
la ville de Québec et atteignent de nouveau une centaine de km de
largeur au niveau de l'île d'Anticosti. Les Basses Terres sont
bordées au NW par le Plateau Laurentien (gneiss et roches ignées
du socle précambrien), au SE par la chaîne des Appalaches
(schistes et ardoises faiblement à moyennement métamorphisées) et
au sud par le massif des Adirondacks.
Figure 3. Profil longitudinal le long de la rivière Châteauguay.
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Dans l’aire à l’étude, l'élévation du sol varie d'environ 22 m
au-dessus du niveau moyen de la mer (mnmm) sur les berges du
fleuve Saint-Laurent, à 400 mnmm aux lacs Upper et Lower
Châteauguay, et à 1 160 mnmm au sommet du mont Lyon à la limite
sud du bassin. La rivière Châteauguay coule depuis le lac Upper
Chateauguay dans l'état de New York vers le lac Saint-Louis, sur
la rive sud du Fleuve. Les cours d'eau voisins, plus mineurs,
sont les rivières La Guerre et Saint-Louis qui se jettent dans le
fleuve Saint-Laurent ou dans le lac Saint-Louis (Figure 1). Les
affluents principaux de la Châteauguay sont les rivières Trout,
aux Outardes, des Anglais et de l’Esturgeon. La coupe
longitudinale, présentée à la Figure 3, illustre le profil du
terrain, les tributaires importants et les municipalités situées
le long de la rivière Châteauguay.
Le mont Covey Hill, à 340 mnmm est la portion la plus élevée du
bassin au Canada. Il constitue un élément topographique allongé,
d'une vingtaine de kilomètres de long par une dizaine de
kilomètres de large, orienté d'est en ouest. Il comprend de
nombreux affleurements rocheux de grès en lits horizontaux
localement recouverts de débris glaciaires qui forment une série
de terrasses (Clark 1966). Au nord et vers l'est, le terrain
descend abruptement et les pentes peuvent atteindre 10% dans la
direction des plaines Champlain et du Saint-Laurent. Vers le sud,
le relief est moins prononcé et évolue de ondulé à montagneux. Le
plateau du Rocher est une ceinture discontinue d'affleurements
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horizontaux de grès qui ont été érodés par l'eau de fonte des
glaciers. De la base du mont Covey Hill, une plaine argileuse
s'incline en pente douce vers le fleuve Saint-Laurent,
interrompue par quelques collines de till dans les régions de
Huntingdon et au nord ouest de Mercier. Au moins 80% des pentes
de la région ne dépassent pas 1%, ce qui a nécessité le
surcreusage de certaines rivières et l'implantation d'un réseau
de drainage pour l'exploitation agricole dans les secteurs à
pente faible. Une vallée enfouie, sensiblement parallèle à l'axe
du Fleuve, est présente entre Beauharnois et Châteauguay. Son
altitude minimum est de l'ordre de 15 mnmm. Dans la région, les
épaisseurs de dépôts superficiels excèdent rarement 15 m à 20 m
et les épaisseurs les plus importantes se retrouvent dans l'axe
de la vallée enfouie, au sud de la région entre Mercier et
Sainte-Martine (Dion et al., 1986). Durant la dernière
glaciation, au Wisconsinien, les glaciers ont complètement
recouvert la région. À la suite de leur retrait et à l'invasion
de la mer de Champlain, de fortes épaisseurs de sédiments fins
ont été déposés alors que les vagues délavaient le till déposé au
sommet des drumlins et sur les rivages exposés à Covey Hill.
Ainsi le relief actuel est contrôlé par les mouvements et les
dépôts glaciaires, la sédimentation marine et fluviale ainsi que
par la lithologie et la structure du socle rocheux (Tremblay et
Lamothe, 2005).
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Le drainage régional fait partie du réseau radial ceinturant les
hautes terres des Adirondacks. Ce système de drainage est
relativement peu développé sur le mont Covey Hill où les
sédiments glaciaires non consolidés grossiers, présents en
surface (till remanié), semblent avoir une forte capacité
d'infiltration et d'accumulation des eaux de précipitation. A cet
endroit, le drainage des eaux de surface est dominé par
l’infiltration et l’écoulement hypodermique ou souterrain. Sur le
plateau du Rocher, à des élévations situées entre 60 et 80 mnmm,
on retrouve plusieurs petits lacs et zones humides. Ces derniers
sont l'expression en surface des phénomènes importants de
ruissellement et de résurgence d'eau souterraine en marge de
Covey Hill (Nastev et al., 2008). La qualité des eaux de surface
se dégrade de l’amont vers l’aval du bassin avec des
concentrations plus élevées en mercure, phosphate, azote et une
quantité importante de particules en suspension (Caumartin et
al., 1996). L'intense développement des activités agricoles
combinées avec la présence de stations d’épuration municipales
ainsi que l’utilisation agricole de pesticides et de produits
chimiques expliquent en partie la dégradation du cours de la
Châteauguay de l'amont vers l'aval.
Figure 4. Carte de l’utilisation du sol et couverture végétale
(d’après Latifovic et al., cette publication).
L’utilisation du sol et la couverture végétale (Figure 4)
permettent de discerner les principales activités de la région à
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l’étude. Ces dernières sont déterminées avec l’interprétation de
l’image satellite LANDSTAT-5 datée de septembre 2003 (Latifovic
et al., cette publication) et validées à partir des travaux de
terrain de l’été 2004. Au nord, la région à l’étude est en
majeure partie vouée à l’agriculture en raison des terres
fertiles qui y abondent. Les usages agricoles intensifs sont liés
notamment à la culture maraîchère sur les tourbières des régions
de Saint-Rémi et de Sherrington, à la pomiculture sur Covey Hill
(33% des pommes produites au Québec) et à la généralisation des
grandes cultures (maïs, soya) dans la plaine argileuse longeant
la rivière Châteauguay. La partie qui se trouve aux Etats-Unis,
couverte en partie par le Parc des Adirondacks, est peu habitée,
et caractérisée par un sol plutôt accidenté et boisé.
Le bassin étudié fait partie de la région climatique des Grands
Lacs et du Saint-Laurent. Cette région est caractérisée par un
climat tempéré avec des hivers froids et humides et des étés
chauds et humides (Environment Canada, 2004). La température
moyenne annuelle est de 6.3 oC et les températures mensuelles
moyennes sont les plus basses en janvier avec une moyenne de -
11,4 ºC avec un maximum de + 20,9 ºC en juillet (Environnement
Canada, url). Le sol gèle normalement en novembre et demeure gelé
jusqu'à la mi-mars quand arrive le dégel. Les précipitations
moyennes annuelles s’élèvent à 963 mm et varient entre 698 et
1273 mm dont environ 20% sont sous la forme de neige.
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Figure 5. Géologie du socle rocheux (d’après Globensky, 1986;
Isachsen et Fisher, 1970).
Géologie
L'aquifère régional est situé dans les roches sédimentaires
fracturées paléozoiques qui sont par endroits en contact avec des
sédiments fluvio-glaciaires grossiers. La géologie du socle
rocheux est décrite en détail dans ce chapitre et s’appuie
surtout sur les travaux antérieurs. L'écoulement y s'opère à
travers les fissures, notamment les joints lâches en suivant la
stratification car aucune des formations géologiques de la région
ne présente la porosité primaire nécessaire pour permettre à
l'eau interstitielle d'y circuler. La description des sédiments
quaternaires présentée ici est tirée des travaux récents de
Tremblay et Lamothe (2005).
Socle rocheux
La région se compose essentiellement de couches sédimentaires
cambro-ordoviciennes reposant sur un socle précambrien (Figure
5). Les roches précambriennes du socle n'affleurent pas au Québec
et sont trop profondes pour qu'on puisse tenter de s'en servir en
tant qu'aquifères. Les roches intrusives du Crétacé, telles
celles formant les montérégiennes, sont limitées à quelques
affleurements mineurs en bordure du Fleuve ou localisées dans les
carrières. L'ensemble des formations sédimentaires repose en
concordance les unes sur les autres et possède un pendage
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régional faible vers le nord-est. Généralement, le roc est masqué
par la couverture de dépôts meubles de tel sorte que les
affleurements rocheux sont peu nombreux.
Le cadre stratigraphique et structural dans la zone d'étude
s’appuie en grande partie sur les travaux du Ministère des
ressources naturelles (MRN) complétés par des travaux thématiques
tectonostratigraphiques (Lavoie, 2004). Du côté américain du
bassin, la carte géologique de l'état de New-York (Isachsen et
Fisher, 1970) a servi de base pour la caractérisation des
lithologies et de la structure. Il persiste des divergences entre
les définitions des différentes unités et l'extension des
diverses unités sédimentaires. Du côté canadien de la frontière,
la carte officielle du MRN (Globensky, 1987) a été utilisée. Il y
a une bonne corrélation transfrontalière pour les dolomies du
Beauharnois mais il y a des travaux à faire en ce qui concerne la
confusion et la définition de l'étendue des formations de Theresa
du Groupe de Beekmantown et de certaines sous-unités du Potsdam.
Les interprétations structurales à petite échelle de Clark (1966)
et Wiesnet et Clark (1966) semblent mieux représenter les
conditions sur le terrain.
Figure 6. Section lithostratigraphique entre Valleyfield et le
Mont Covey, indiquée par AA’ à la Figure 5 (d’après Lavoie,
2004).
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Une coupe lithostratigraphique de la région est présentée à la
Figure 6. Quoique simplifiée, cette coupe présente l'information
au sujet des épaisseurs des unités aquifères dans lesquelles se
fait l'écoulement de l'eau souterraine. La coupe a été construite
à partir des informations géologiques disponibles dans la base de
données SIGEOM du MRN, complétées par des travaux
tectonostratigrahiques récents (Lavoie, 2004). Les
interprétations structurales détaillées de Clark (1966) ont été
intégrées avec de l'information non publiée sur certaines
formations forées lors d'exploration pétrolière ainsi que de
l'information indirecte provenant de lignes sismiques effectuées
dans la région.
Formations rocheuses
Les roches des Basses Terres, d'âge Cambrien à Ordovicien, sont
d’origine sédimentaire et reposent en discordance sur le socle
précambrien. Elles sont disposées en strates horizontales (2 à 5
degrés) qui ont été légèrement plissées lors de la mise en place
des Appalaches à l'Ordovicien. La séquence complète est de
l'ordre de 1500 à 3000 m d'épaisseur. Elles représentent un cycle
de transgression-régression; les formations de la base et du
sommet sont d'origine continentale alors que la partie médiane
est d'origine marine.
Groupe de Potsdam : Ce groupe est constitué de grès et repose en
discordance sur les roches précambriennes. On peut subdiviser
le groupe en deux formations: le Covey Hill à la base et le
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Cairnside au sommet. La Formation de Covey Hill est composée
de grès feldspathiques (3 à 10%), à grains grossiers
(localement conglomératiques), mal triés et mal cimentés. Son
origine est fluviatile. Elle correspond à la formation Ausable
de la vallée Champlain et au Covey Hill de l'Ontario. La coupe
type présente une épaisseur de 518 m mais elle peut être plus
épaisse quand elle comble des irrégularités dans le socle
précambrien. D'âge Précambrien supérieur au Cambrien
inférieur, la Formation de Cairnside, quant à elle, est
composée de grès bien trié (91-99% quartz), généralement bien
cimenté avec peu de matrice silteuse, localement à ciment
dolomitique. Elle est l'équivalente de la formation de
Keesville du nord de New-York et de la formation Nepean de
l'Ontario. La coupe type est de l'ordre de 250 m d'épaisseur.
Au Québec, elle serait d'âge Cambrien supérieur.
Groupe de Beekmantown : ce groupe est principalement constitué
de dolomie et de grès. On peut le subdiviser en deux
formations: à la base, le Theresa et au sommet, le
Beauharnois. La Formation de Theresa est composée d'une
interstratification de grès quatzitique, de grès dolomitique
et de dolomie marine. L'interstratification peut se faire en
minces interlits ou en bancs de grès de 1 m d'épaisseur. De la
base au sommet, le grès devient dolomitique et diminue en
importance ce qui suggère une hausse du niveau de la mer. La
Formation de Theresa est l'équivalente du March de l'Ontario
et porte le même nom aux États-Unis. La coupe type présente
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une épaisseur de l'ordre de 150 m. Au Québec, cette formation
serait d'âge Ordovicien inférieur. La Formation de
Beauharnois repose sans discordance sur la Formation de
Theresa. Elle est constituée d'une succession de dolomie
massive et laminée. Certains niveaux contiennent des cavités
remplies de cristaux de calcite (rose ou blanche) ou plus
rarement de gypse, dolomie beige ou rarement de halite ce qui
implique de l'eau peu profonde. Localement, on note la
présence d'interlits de grès dolomitique et vers le sommet
des interlits de shale. Le Beauharnois résulte d'un
environnement restreint, lagunaire intertidal et supratidal.
La formation est d'âge Ordovicien inférieur et est
l'équivalent de la formation d'Orford en Ontario; et elle a
été subdivisée en 4 formations aux États-Unis. La coupe type
présente une épaisseur de 305 m.
Les autres formations rocheuses, les Groupe de Chazy, de Black
River, de Trenton et de Utica ne sont présents que dans une
petite portion du bassin localisé au NE. Les brèches de Havelock
et de Lacolle consistent en une série de brèches de talus
développés le long de failles normales d'effondrement.
Figure 7. Géologie des dépôts meubles (d’après Tremblay et
Lamothe, 2005).
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Géologie du Quaternaire
La séquence rocheuse est recouverte d'une épaisseur variable de
sédiments meubles (Figure 7), pouvant atteindre plus de 45 m au
coeur de la vallée moderne de la Châteauguay. La série
stratigraphique quaternaire régionale la plus complète a été
observée lors des travaux d'excavation de la voie maritime et au
cours d'autres campagnes régionales dans le secteur américain de
la vallée du Saint-Laurent (MacClintock et Stewart, 1965). Ainsi
la séquence quaternaire peut être divisée en une succession de
quatre grandes unités physiques correspondant à des événements
géologiques.
L'unité de base est le till régional, généralement observé
directement sur le roc ou localement, sur des graviers
probablement relativement discontinus, en forage. Ce till
résulte de la dernière avancée glaciaire du Wisconsinien
supérieur. Le mouvement glaciaire dominant est vers le S et le
SW, les variations de l'écoulement étant contrôlées localement
par des obstacles topographiques comme dans le secteur de
Covey Hill. Des champs de drumlins sont fortement alignés dans
cette direction surtout à l'est de la zone étudiée. Vers
l'Ouest, dans le secteur de Huntingdon-Cazaville, ces mêmes
drumlins ont été remaniés et façonnés suite à réorientation de
l'écoulement glaciaire, lors de la déglaciation. Les crètes
furent partiellement ensevelies sous les dépôts argilo-silteux
de la mer de Champlain puis remaniées par l’action littorale.
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Les crêtes sont donc généralement aujourd’hui des reliefs peu
prononcés.
Au cours de la déglaciation, une séquence de dépôts
fluvioglaciaires (sensu lato) a été mise en place, en
conformité stratigraphique avec le till sous-jacent. Dans les
eskers, cette unité est communément en contact avec le roc. La
séquence basale est constituée de sédiments sablo-graveleux
d’origine sous-glaciaires. Les dépôts fluvio-glaciaires
cartographiés comprennent parfois une séquence supérieure de
sédiments sableux et silteux déposé par les eaux de fonte
glaciaire dans les lacs proglaciaires. Plus rarement, une
séquence diamictique est présente sur le dessus des dépôts
fluvio-glaciaires glacio-lacustres
Des sédiments glaciolacustres et marins représentent les
témoins de la déglaciation finale dans le secteur, datée
autour de 11000-12000 ans BP. L'unité la plus étendue est
celle des argiles de la Mer de Champlain, omniprésentes dans
les secteurs topographiquement situés sous les 50 m, alors que
les plages et littoraux souvent fossilifères sont
principalement élaborés à partir du remaniement des séquences
glaciaires et fluvioglaciaires, entre les élévations de 70 à
130 m. Une bande importante de sédiments d'origine marine a
été cartographiée dans le voisinage du mont Covey Hill ;
l’origine de ces graviers est probablement le délavage du till
par les vagues (mer de Champlain) et l’érosion des
affleurements de Potsdam.
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Une séquence lacustre et fluviale disposée très localement
autour et près du Fleuve actuel, représente des lambeaux
résiduels d'environnements de transition entre la Mer de
Champlain et le réseau de drainage actuel. Des dunes
contemporaines de la baisse du niveau d'eau sont aussi
observées localement. Une partie de la géomorphologie actuelle
origine de ces événements, qui se sont déroulés entre 10000 et
5000 BP. Une seule terrasse holocène est significative dans le
secteur cartographié. Reconnaissable au sud de Saint-Constant,
elle culmine à une élévation d'environ 30 m et devrait
correspondre à un stade tardif d'évolution du proto-Saint-
Laurent. Aujourd'hui, le drainage régional est assuré par la
rivière Châteauguay et ses affluents, à travers une plaine
relativement peu inclinée, et des terrasses fluviales
faiblement incisées.
Hydrogéologie
Tel que mentionné plus haut, l'aquifère régional est situé dans
les roches sédimentaires fracturées reposant sur et entourant les