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21GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
Résumé
Le passage Oxfordien/Kimméridgiendu Boulonnais est étudié grâce
à deux son-dages carottés d’une cinquantaine demètres de long ayant
traversé des forma-tions non affleurantes, connues unique-ment par
des travaux anciens. La partieinférieure des sondages correspond à
unintervalle compris entre le sommet de lazone d’ammonites à
Plicatilis et la base dela zone à Cautisnigrae
(Oxfordienmoyen/supérieur). La partie supérieure estdatée de la
zone à Cymodoce(Kimméridgien inférieur). L’étude desfaciès et
microfaciès est complétée parl’analyse à haute résolution de la
fractionargileuse du sédiment ainsi que de soncontenu organique
(pyrolyse Rock-Eval etobservation de palynofaciès). La
micro-granulométrie, effectuée sur la fractioninsoluble du
sédiment, permet d’analyserles variations des apports terrigènes.
Undécoupage séquentiel de la série s’ap-puyant sur des données
convergentes peutainsi être proposé dans un cadre chronolo-gique
précis. L’intégration des assem-blages argileux dans ce découpage
montreque des interstratifiés smectitiques sont
associés à des baisses du niveau marinrelatif au 3ème ordre,
alors que la kaoliniteet l’illite caractérisent les périodes de
hautniveau marin relatif. Cette relation inhabi-tuelle entre
assemblages argileux et niveaumarin relatif se retrouve dans
leKimméridgien/Tithonien du Boulonnais etsemble donc
caractéristique du Jurassiquesupérieur de cette région. Elle
pourraitrésulter de simples variations de sourcesdétritiques en
fonction de la physiographiede la côte ou d’un contrôle climatique
outectonique de la sédimentation. Lesdonnées actuelles ne
permettent cependantpas de trancher entre ces hypothèses.
Abridged English Version
Introduction
Samples were selected in cored sectionsof two boreholes drilled
through theOxfordian/Kimmeridgian boundary closeto Boulogne-sur-Mer
(Boulonnais area,North of France). By the end of theJurassic, this
area was subjected to a mixedcarbonate/siliciclastic sedimentation
in anepicontinental environment close toemerged land
(London-Brabant Massif)(Fig. 1).
This study provides additional data ona series of formations not
recognized inoutcrop since the beginning of the 20thcentury
(Pellat, 1867, 1878, 1880a, b;Rigaux, 1872, 1893, 1901; Pruvost,
1921;Dutertre, 1925). It completes the recentregional revision of
the late Bajocian toearly Oxfordian formations (Magniezet al.,
1984; Vidier et al., 1995; Thierry etal., 1996) and the
Kimmeridgian-Tithonianformations exposed in the cliffs
betweenBoulogne-sur-Mer and Cape Gris-Nez(Deconinck et al., 1983;
Wignall, 1991; ElAlbani et al., 1993; Geyssant et al., 1993;Proust
et al., 1993, 1995; Wignall et al.,1996).
Description of the formations (facies,microfacies)
The studied section includes fourdistinct formations from the
base up:
a) The "Argiles du Mont des Boucards"Formation (15-30 m thick;
Pellat, 1867).
It consists of homogeneous claystone tomarlstone with occasional
mollusk shells.The formation is generally subdivided into
Stratigraphie et analysesédimentologique du
passageOxfordien/Kimméridgiendans le Boulonnais*
Stratigraphic and sedimentologic analyses through the
Oxfordian/Kimmeridgianboundary in the Boulonnais area (Northern
France)
Johann SCHNYDER (1, 2)François BAUDIN (2)
Jean-François DECONINCK (1)Christophe DURLET (2)
Roger JAN DU CHENE (2)Bernard LATHUILIERE (3)
* Manuscrit déposé le 31 octobre 2000, accepté le 8 janvier
2001.(1) Université de Lille 1, Sciences de la Terre, Bât. SN5,
Sédimentologie et Géodynamique, FRE 2255 CNRS, 59655 Villeneuve
d’Ascq Cedex.(2) Université Pierre et Marie Curie, Paris 6,
Département de Géologie Sédimentaire, FRE 2400 CNRS, Case 117, 4
pl. Jussieu, 75252 Paris Cedex 05.(3) UMR 7566 G2R Géologie et
Gestion des Ressources Minérales et Energétiques, Université Henri
Poincaré de Nancy 1, BP 239, 54506 Vandoeuvre-lès-Nancy Cedex.
Géologie de la France, n° 4, 2000, pp. 21-37, 11 fig., 1
ann.
Mots-clés : Oxfordien, Kimméridgien, Biostratigraphie, Argiles,
Matière organique, Stratigraphie séquentielle, Pas-de-Calais,
Boulonnais.
Key words: Oxfordian, Kimmeridgian, Biostratigraphy, Clay
minerals, Organic matter, Sequence stratigraphy, Pas-de-Calais
(France),Boulonnais.
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two members: the "Argiles à pyrite" Memberat the base and the
"Argiles à Ostrea sub-deltoidea" Member above. The secondmember
commonly contains Ostrea beds.
Coral boundstone may be observedlocally between the two main
members -thisfacies, the "Calcaire de Brucquedal"Member consists of
marlstone with abun-dant echinoderm debris, brachiopods,
shellfragments and calcareous build-ups domi-nated by microbial
crusts (thrombolites).The poorly diversified coral fauna
includeThamnasteria (dominant), Stylosmilia,Comoseris, Fungiastraea
and Enallheliagenera. The limited palaeogeographicextension of the
reefal facies can be mapped(Fig. 6).
b) The "Grès de Brunembert"Formation (1-10 m thick; Pellat,
1878).
This formation consists of decimetre- tometre-thick alternations
of bioclast-richsandy beds and silty to sandy marl. It isseparated
from the underlying formation byan erosional surface.
c) The "Oolithe d'Hesdin-l'Abbé"Formation (about 10 m thick;
Pellat, 1867).
It comprises decimetre- to metre-thickbeds of bioturbated
limestone consisting ofpoorly-sorted ooliths and pisoliths in
amarly matrix. The formation is fairly fossil-iferous (pelecypods,
brachiopods, echino-derms, bryozoans, foraminifera). Oncolitesare
also observed.
d) The "Caillasses d'Hesdigneul"Formation (5 m thick; Pruvost,
1921).
This formation is composed of micriticand compact limestone.
Results and discussion
The biostratigraphic framework used inthe boreholes is based on
both palynologicdata (dinoflagellate cysts) and publisheddata
(ammonites). The ammonite zonationdefined by the Groupe français
d'étude duJurassique (1997) for the subboreal realmin the West
European basins is used here(Fig. 2). The lowermost part of both
bore-holes is comprised between the top ofPlicatilis Zone and the
base of theCautisnigrae Zone (Glosense/Tenuiserratumammonite zones
in the Boreal ammonitescheme, middle/late Oxfordian). The top ofthe
boreholes belongs to the Cymodocezone (early Kimmeridgian) (Fig.
7).
In addition to facies and microfaciesanalysis, a high-resolution
determinationof the clay mineral assemblages and astudy of the
organic content (Rock-Evalpyrolysis, palynofacies observations)
ofthe well-preserved borehole (SCP8) havebeen carried out (Fig. 8).
Grain-size datawere obtained on the insoluble fraction,with the
hypothesis that this fractionreflects variations of terrigenous
input.The clay assemblages are composed ofkaolinite, illite, mixed
illite-smectite layersand chlorite. Variations of the kaoliniteand
illite content are similar and in directcontrast to variations of
the smectitic min-eral content. A smectite-rich intervaloccurs in
the "Argiles à pyrite" Memberand is correlated with a
grain-sizeincrease of the insoluble fraction, interpre-tated as a
terrigenous input. Kerogen stud-ies have been essentially limited
to themarly or clay intervals. The organic con-tent is generally
low (TOC
-
contenu organique du sédiment (148échantillons). Le pas
d’échantillonnagedans les faciès argileux est de l’ordre de20
centimètres. Quarante-quatre lamesminces ont été réalisées dans les
facièsgréseux et carbonatés.
La microgranulométrie est effectuée àl’aide d’un
microgranulomètre laserMalvern Mastersizer X. Les
échantillonsdestinés à la microgranulométrie ont subiune
décarbonatation dans le but de pré-server préférentiellement le
signal desflux terrigènes détritiques, en faisant lasupposition
raisonnable que la productioncarbonatée était essentiellement
autoch-tone et marine et la fraction insoluble dusédiment plutôt
dominée par les flux ter-rigènes, dans un contexte
paléogéogra-phique marqué par la proximitéimmédiate de terres
émergées.
La fraction argileuse (< 2 µm) est étu-diée par diffraction
des rayons X sur pâtesorientées selon le protocole analytiquedonné
par Holtzappfel (1985). Les propor-tions relatives des minéraux
argileux sontestimées avec une erreur de ± 5 %.
Le contenu organique est déterminépar pyrolyse Rock-Eval de type
OSA, quipermet d’obtenir les paramètres suivants(Espitalié et al.,
1985a, 1985b, 1986) :teneur en carbone organique total (COTen %
pondéral), Tmax indicateur du degréde maturité thermique et index
d’hydrogè-ne (IH), qui permettent d’estimer la natu-re de la
matière organique. L’analysegéochimique du contenu organique
estcomplétée par l’observation de 11 lamespalynologiques. La
classification despalynofaciès utilisée est celle de
Whitaker(1984), modifiée par Steffen et Gorin(1993). Cette
classification distingue plu-sieurs catégories au sein des
palynomacé-raux (PM) issus des débris de végétauxsupérieurs,
suivant la résistance des parti-cules à la dégradation. Ces
catégories sontregroupées ici pour plus de clarté.
Faciès et microfaciès
Les faciès rencontrés étant mixtes,silico-clastiques et
carbonatés, une échel-le parallèle des textures est utilisée(fig.
4). Les formations suivantes sontidentifiées (de la base au sommet)
:
a) formation des Argiles du Mont desBoucards (épaisseur 15-30 m
; Pellat,1867),
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
23GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
BrabantMR
TETHYS
MLB
MI
MA
500 km
Terres émergées/Exposed land Plate-forme carbonatée/carbonate
platform
Bassins profonds/deep basins
Marnes ou calcaires argileux/Marl or argilaceous carbonate
Continental probable/Possible exposed land
Plate-forme terrigène etbassins terrigènes peu
profonds/Terrigenous shelf and shallow terrigenous basins
MR : Massif rhénan/ Rhenish Massif
MI : Meseta ibérique/Iberic Meseta
MA : Massif armoricain/Armorican Massif
MLB : Massif Londres-Brabant/
London-Brabant Massif
Boulonnais/Boulonnais area
Fig. 1.- Paléogéographie du Kimméridgien inférieur, d’après
Cecca et al., 1993.
Fig. 1.- Early Kimmeridgian paleogeography, after Cecca et al.,
1993.
Zones d'ammonites
Transversarium
Bifurcatus Cautisnigrae
PseudocordataBimammatum
Planula*
Angleterre, Nord de l’Europe, régions arctiques
Province méditerranéenne
Zonation subboréale utilisée pourle Boulonnais
Zonation boréale
Plicatilis
Pumilus
Plicatilis
BayleiCymodoce
TenuiserratumDensiplicatum
GlosenseSerratumRegulare
Rosenkrantzi
SOUS-ETAGES
DOMAINE BOREALDOMAINE TETHYSIEN
Oxfordien supérieur
Kimméridgien inférieur
Oxfordien moyen
* Les corrélations entre les zonations téthysienne et subboréale
à la limite Oxfordien/Kimméridgien ne sont pas encore
clairementétablies. La limite Oxfordien/Kimméridgien (passage
Pseudocardata/Baylei dans la zonation subboréale) pourrait
correspondre àla limite Bimammatum/Planula ou se situer dans la
partie inférieure de la zone à Planula dans la zonation
téthysienne.
Fig. 2.- Zonations d’ammonites du passage Oxfordien/Kimméridgien
pour les domaines boréal ettéthysien, d’après Groupe français
d’étude du Jurassique, 1997. La zonation de la province boréale
n’apas été représentée au Kimméridgien inférieur, par souci de
simplification.
Fig. 2.- Ammonite zonation of late Oxfordian and early
Kimmeridgian for the Boreal and Tethyan realms,after the Groupe
français d’étude du Jurassique, 1997.
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STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200024
b) formation des Grès de Brunembert(épaisseur 1-10 m ; Pellat,
1878),
c) formation de l’Oolithe d’Hesdin-l’Abbé (épaisseur, environ 10
m ; Pellat,1867),
d) formation des Caillasses d’Hesdigneul(épaisseur 5 m ;
Pruvost, 1921).
a) Formation des Argiles du Montdes Boucards
La formation correspond à unensemble de marnes et d’argiles
parfoispyriteuses, à rares débris coquilliers etdébris
millimétriques de végétaux. Dansles deux sondages, la base de la
formationn’est pas atteinte. La comparaison desépaisseurs des
sondages SCP8 et SCP6avec celles du sondage APO 1 et d’unsondage
près d’Outreau (fig. 3) suggèrenéanmoins que la formation est
pratique-ment complète. Les marnes nettementplus claires et
carbonatées à la base desdeux sondages SCP8 et SCP6 confirmentla
proximité de la Formation du Calcairedu Mont des Boucards
sous-jacente. LaFormation est généralement composée dedeux membres
: le « Membre des Argilesà pyrite » à la base et le « Membre
des
Argiles à Ostrea subdeltoidea » au som-met (Rigaux, 1893, in
Mansy et al. souspresse). Le membre supérieur présentequelques lits
à Ostrea. Un lit de silt argi-leux orangé riche en sidérite est
observé àla cote 29,70-29,80 m du sondage SCP8.Il est aussi présent
dans le sondage SCP6.Des nodules de sidérite ont par ailleurs
étédécrits dans la littérature (Bonte, 1969).
Un ensemble corallien, le « Calcairede Brucquedal » (épaisseur
0-10 m, Pellat,1867) s’intercale ponctuellement entre lesdeux
membres précédents. Nous repre-nons dans ce travail le découpage
anciende la Formation des Argiles du Mont desBoucards en deux
membres principauxparfois séparés par un troisième membrecorallien
(Rigaux, 1893), car il est souli-gné, comme on le verra plus tard,
par desdifférences sédimentologiques.
Les faciès coralliens sont présents dansles deux sondages
étudiés. Il s’agit debancs de calcaires gris à jaunâtres en
bancsdécimétriques à métriques, qui contiennentdes polypiers rosés,
des radioles d’oursinset des brachiopodes, alternant avec
desmarnes. Ces marnes gris-bleu silteuseslivrent de nombreux
radioles d’oursins, derares pentacrines, des brachiopodes et
des
petits lamellibranches. Quelques brachio-podes, mal conservés,
ont pu être déter-minés, et attribués aux genresSeptaliphoria et
Torquirynchia. Les cal-caires récifaux présentent à la fois
desfaciès de démantèlement (floastone à rud-stone) et des faciès
construits variés (poly-piers lamellaires, branchus, colonies
enréseaux). Des nodules carbonatés centimé-triques à décimétriques
s’intercalent par-fois dans les marnes. La faune depolypiers,
constituée de colonies et d’indi-vidus de petites tailles est assez
peu diver-sifiée et relativement homogène. Elle estdominée par le
genre Thamnasteria, quiprésente ici un morphotype lamellaire
trèsfin. On y trouve aussi les genresThecosmilia, Stylosmilia,
Comoseris,Fungiastraea, Enallhelia, ainsi qu’un indi-vidu de la
famille des Montlivaltidés. Descoraux branchus n’ont pu être
déterminés.Les faciès coralliens sont aussi caractériséspar un très
grand développement d’encroû-tements microbiens (thrombolites)
quirecouvrent pratiquement toutes les colo-nies coralliennes. Les
croûtes micro-biennes sont souvent les bioconstructeursessentiels
de ces calcaires. De petites accu-mulations d’intraclastes
millimétriques,issus du démantèlement de ces croûtes sontaussi
visibles, notamment à la base de la
WIMEREUX
A16
MARQUISE
FRANCE
SONDAGE SCP8
SONDAGE SCP6
OUTREAU
APO 1
SAMER
DESVRES
LianeECHINGHEM
Liane
CAP GRIS-NEZ
5 Km
Outreau(Rigaux 1872) 1 m
Forage SCP8
?
APO 1Bonte 1974
?
Calcaire du Montdes Boucards
Argiles duMont des Boucards
Calcaire deBrucquedal
Grès de Brunembert
Oolithe d'Hesdin-l'Abbé
Caillasses d'Hesdigneul
BOULOGNE-SUR-MER
AUDRESSELLES
AMBLETEUSE
Fig. 3.- Localisation des sondages SCP8 et SCP6. La comparaison
des sondages APO 1 (Bonte, 1974), d’Outreau (Rigaux, 1872) et du
sondage SCP8 donneune idée des variations latérales de faciès et
suggère la présence sous les sondages SCP8 et SCP6 de la Formation
des Calcaires du Mont des Boucards.
Fig. 3.- Location of boreholes SCP8 and SCP6. Comparison between
boreholes APO 1 (Bonte, 1974) and Outreau (Rigaux, 1872) and
borehole SCP8 indicatesthe lateral facies variations and suggest
the presence of the Mont des Boucards Limestone Fm. beneath
boreholes SCP8 and SCP6.
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STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
25GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
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LEGENDE/LEGEND
lamines obliques/cross bedding
surface érosive/erosive surface
lamines planes/planar laminations
surface bioturbée/ burrows
Structures sédimentaires et biologiques/sedimentary and
biological structures
Lithologie/Lithology
calcaire/limestone
calcaire argilo-silteux/clayey or silty limestone
argile,marne/clay, marl
argile silteuse/silty clay
niveau sidéritique/sideritic layer
sable,grès/sand,sandstone
nodule carbonaté/carbonate nodule
ciment carbonaté/carbonate cement
à terriers
surface ferrugineuse/ ferrugineous surface
Bioturbation/bioturbations
Fossiles et éléments figurés/Fossils and clasts
encroûtements microbiens/microbial crusts(thrombolites)
rudstone
floatstone
colonie en réseau
colonie branchue
faciès indifférencié
faciès coralliens/coral facies
démantèlementfaciès de
Facièsconstruits
radiole d'oursin/sea-urchin
spinespentacrineIntraclastes/intraclasts
oncolithes
pelecypodbrachiopode/brachiopod
pisolithes/oolithes
bois/wood debris
lamellibranche indifférencié/ undeterminategrande
huître/Ostrea
polypiers lamellaires
Fig. 4.- Lithologie, faciès et microfaciès dusondage SCP8.
Fig. 4.- Lithology, facies and microfacies ofborehole SCP8.
-
formation (cote 37,80-38 m du sondageSCP8 et 34-36 m du sondage
SCP6). Lespolypiers apparaissent souvent perforéspar des éponges ou
des bivalves(Gastrochaenolites).
L’extension cartographique du Calcairede Brucquedal au sud-est
de Boulogne-sur-Mer peut être précisée grâce à une compi-
lation bibliographique (fig. 6). L’ensemblecorallien semble
s’allonger suivant unedirection NW-SE, grossièrement parallèleau
paléorivage (cf. fig. 6). L’organisationspatiale et stratigraphique
précise de cesfaciès n’est toutefois pas connue.
D’après Vidier (in Mansy et al.,2000), le Calcaire du Mont des
Boucards
(situé sous les sondages SCP8 et SCP6 etle Membre des « Argiles
à pyrite ») estdaté du sommet de l’Oxfordien moyen-base de
l’Oxfordien supérieur par desammonites des genres Orthosphinctes
etDichotomoceras, alors que le Calcaire deBrucquedal est daté de la
limiteOxfordien moyen/supérieur par unefaune d’ammonites
(Amoeboceras ovaleet Dichotomosphinctes wartae).
b) Formation des Grès deBrunembert (épaisseur 1-10 m ;Pellat,
1878)
Séparés des Argiles du Mont desBoucards par un contact
particulièrementnet, se trouvent plusieurs bancs décimé-triques à
métriques de grès roux luma-chelliques ou de lumachelles plus
oumoins gréseuses, à rares débris d’échino-dermes. Les grès
présentent quelqueslamines obliques estompées, peu faciles
àidentifier en carottes. La base des bancsest parfois érosive.
Plusieurs lamines fer-rugineuses brunes peuvent aussi
êtreidentifiées. Ces grès alternent avec desmarnes silto-gréseuses
brunes en bancsdécimétriques. D’après A. Bonte (inMégnien et al.,
1980), les Grès deBrunembert renferment Trigonia bronni,Astarte
morini, Gervillia tetragona,Ostrea bruntrutana, O.
subdeltoideaainsi que des petits gastéropodes. Lesbancs gréseux des
sondages passent laté-ralement à des calcaires roux et des
pla-quettes gréseuses vers Echinghen.
c) Formation de l’Oolithe d’Hesdin-l’Abbé (épaisseur (10 m
;Pellat, 1867)
Des lacunes (cotes 13,95-13 m et12,40-11,20 m) dues au
prélèvement d’é-chantillons géotechniques sont présentesdans cet
intervalle. La formation estconstituée de bancs décimétriques
àmétriques de calcaires blancs-jaunâtresfréquemment bioturbés,
riches en piso-lithes et oolithes souvent mal classées,baignant
dans une matrice argileuse.Quelques oncolithes sont parfois
pré-sentes. Les premiers bancs sont enrichisen quartz anguleux. La
faune et la micro-faune, assez riches, sont composées
delamellibranches, de brachiopodes, d’échi-nodermes, de bryozoaires
et de forami-nifères (Lenticulines et Textularidés),souvent
oolithisés ou pisolithisés. Leslamellibranches Trigonia
papillata,
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200026
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Forage SCP8
ciment carbonaté
Surface ferrugineuse
niveau sidéritique
50,30-47,20 m marnes claires
Argiles/marnesplus sombres
IntraclastesCa
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pyrite
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Cote (m)
Forage SCP6
0-7 m : sol, lacunes
marnes claires
marnes plus sombres
Fig. 5.- Comparaison des sondages SCP8 et SCP6.
Fig. 5.- Comparison of boreholes SCP8 and SCP6.
-
Pholadomya protei, Pygurus blumenba-chi, le gastéropode Nerinea
goodhalli, lebrachiopode Zeilleria egena et les ammo-nites «
Perisphinctes » involutus etRingsteadia sp. ont été
précédemmentdéterminés dans la formation (Bonte, inMégnien et al.,
1980).
Une faune d’ammonites composée deRingsteadia anglica, R.
frequens et R.branderi trouvée dans l’Oolithed’Hesdin-l’Abbé
indique l’Oxfordiensupérieur, zone à Pseudocordata (Vidierin Mansy
et al., 2000). De récentesdécouvertes indiquent même au sommetde
l’Oolithe d’Hesdin-l’Abbé la présencedu Kimméridgien inférieur,
zone à Baylei(Pierre Hantzpergue, travail en cours).
d) Formation des Caillassesd’Hesdigneul (épaisseur 5 m ;Pruvost,
1921)
Au-dessus d’une lacune d’observationdue à un échantillonnage
géotechnique, onobserve un niveau carbonaté blanc micri-tique, très
compact, bioturbé, sans macro-fossiles et très différent des
calcaires àpisolithes et oolithes sous-jacents entre lescotes 7,70
et 6,15 m de profondeur. Lesommet de ce banc est affecté par des
ter-riers verticaux centimétriques à décimé-triques remplis par un
sable bioclastique etquartzeux provenant du banc sus-jacent.En lame
mince, des intraclastes, desoncoïdes ou oncolithes, de petits
lamelli-branches, des brachiopodes, des forami-nifères hyalins
ainsi que des échinodermessont visibles dans ces terriers. La
micriteencaissante contient aussi de petits lamelli-branches, des
gastéropodes et parfois desostracodes. Elle s’enrichit en grains
dequartz à proximité des terriers. Des lamina-tions sont parfois
visibles lorsque la biotur-bation est absente. Après un
niveaumétrique de marne blanche puis le débutd’un calcaire
bioclastique blanc crème, lescolluvions et la terre végétale
apparaissentà la cote 3,5 m. Les bancs calcaires sontséparés par
des lits marneux lorsque la for-mation est complète. La formation
passelatéralement aux Sables et Grès deWirwignes ou de Questrecques
(Bonte, inMégnien et al., 1980).
Les Caillasses d’Hesdigneul ont livréles ammonites Perisphinctes
achilles,Rasenia cymodoce, le brachiopodeZeilleria humeralis, et
les gastéropodesNerinea goodhalli, Harpagodes oceani(Bonte, in
Mégnien et al., 1980). Une faune
de Rasenia cymodoce, récoltée récemmentsur des affleurements à
la base desCaillasses d’Hesdigneul, dans les talus del’autoroute
A16 indique le Kimméridgieninférieur (zone à Cymodoce) (Vidier
inMansy et al., 2000).
Cadre bio-etchronostratigraphique
De nouvelles données biostratigra-phiques sont obtenues dans le
sondageSCP8. Elles sont issues de l’étude dekystes de dinoflagellés
dans 10 prépara-tions palynologiques provenant de laFormation des
Argiles du Mont desBoucards. Ces données sont cohérentesavec les
datations précédentes basées surla présence d’ammonites dans les
facièscarbonatés et les complètent dans lesfaciès argileux des
Argiles du Mont desBoucards, sans apporter d’éléments nou-veaux sur
la position de la limiteOxfordien/Kimméridgien (fig. 7).
Sur les 36 espèces de dinoflagellésidentifiées à différents
niveaux du sonda-ge, 6 sont des espèces-index (cf. ann. 1)dont
l’apparition ou la disparition peuventêtre corrélées avec certaines
limites dezones d’ammonites dans la provinceboréale. Ces repères
biostratigraphiques
sont ensuite rapportés à la zonation sub-boréale en utilisant
les corrélations pro-posées dans la littérature (Groupe
françaisd’étude du Jurassique, 1997, fig. 2).
La disparition stratigraphique (LAD) deCompositosphaeridium
polonicum coïnci-de ainsi avec le sommet de la zone àGlosense (=
sommet de Pumilus ou base deCautisnigrae, zonation subboréale).
Lesapparitions de Cribroperidinium globatumet Glossodinium
dimorphum sont corrélésavec la base de la zone à Tenuiserratum
(=sommet de Plicatilis, zonation subboréale).L’association de C.
globatum, G. dimor-phum et C. polonicum dans certainsniveaux des «
Argiles à pyrite » permetalors de dater par encadrement cet
interval-le : il correspond à la zone à Tenuiserratumou à la zone à
Glosense (= sommet dePlicatilis, zone à Pumilus ou base de la zoneà
Cautisnigrae dans la zonation subboréale,Oxfordien moyen-début de
l’Oxfordiensupérieur). Les faunes d’ammonites indi-quent le passage
Oxfordien moyen/supé-rieur pour le Calcaire du Mont desBoucards
(situé sous le sondage SCP8)ainsi que pour le Calcaire de
Brucquedal(Vidier in Mansy et al., 2000). Jusqu’ausommet du Membre
du Calcaire deBrucquedal, le sondage est donc daté dusommet de
l’Oxfordien moyen ou du débutde l’Oxfordien supérieur.
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
27GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
WIMEREUX
A16
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AUDRESSELLES
AMBLETEUSE
BOULOGNE-SUR-MER
OUTREAUSONDAGE SCP6
SONDAGE SCP8
BRUCQUEDAL
HESDIGNEUL-LEZ-BOULOGNE
Fig. 6.- Extension géographique des faciès corolliens du
Calcaire de Brucquedal, d’après unecompilation bibliographique.
Vers Desvres à l’est et au nord d’Outreau, la présence de ces
faciès n’estpas certaine.
Fig. 6.- Lateral extension of the coral facies (Calcaire de
Brucquedal Limestone Fm) based onbibliographic data. The occurrence
of coral facies east of Desvres and north of Outreau is
uncertain.
-
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200028
2 3 4 5 6 7 8 9
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50
51
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SOMMET OXFORDIEN MOYEN/BASE OSXFORDIEN SUPERIEUR
PASSAGE OXFORDIEN MOYEN/OXFORDIEN SUPERIEUR
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Zones
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Aldorfia dictyotaChrytroeisphaeridia chrytroeides
Impletosphaeridium tribuliferumDowniesphearidium
iaculigerumCleistosphaeridium SPP.
Cribroperidinium SP. type sarjeantiiCribroperidinium
SPP.Ctenidodinium ornatumEllipsoidictyum cinctumEndoscrinium
galeritumEndoscrinium luridumScriniodinium inritibileEpiplosphaera
reticulospinosaEscharisphaeridia SPP.
Gongylodinium SP.Wrevittia helicoideaGonyaulacysta
jurassicaLeptodinium eumorphumLeptodinium millioudiiLeptodinium
subtileMendicodinium microreticulatum
Pareodinia ceratophoraRhynchodiniopsis cladophora
Sentusidinium SPP.Stephanelytron SPP.Systematophora
aerolataSystematophora penicillatumSystematophora
orbiferaTubotuberella dangeardiiTubotuberella egemenii
Clatroctenocystis asaphes
Compositosphaeridium polonicumCribroperidinium globatum
Glossodinium dimorphum
Occisucysta balios
Scriniodinium crystallinum
18,6
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Au-dessus, les disparitions deClathroctenocystis asaphes et
Scrinodiniumcrystallinum sont corrélées avec le sommetde la zone à
Baylei, tandis que l’apparitiond’Occisucysta balios coïncide avec
la basede la zone à Rosenkrantzi (= base de lazone à Pseudocordata,
zonation subboréa-le). L’association de C. asaphes, S.
crystal-linum et O. balios, au sommet des« Argiles à Ostrea
subdeltoidea », indiquedonc la zone à Pseudocordata ou la zone
àBaylei (Oxfordien supérieur-Kimméridgieninférieur). La formation
de l’Oolithed’Hesdin l’Abbé est datée de la zone àPseudocordata et
de la zone à Baylei parles ammonites, alors que la base
desCaillasses d’Hesdigneul a livré une faunede la zone à Cymodoce
(Vidier in Mansy etal., 2000). Le sommet du sondage est doncdaté du
sommet de l’Oxfordien supérieuret du début du Kimméridgien
inférieur ; lepassage Oxfordien/ Kimméridgien sesituant dans la
Formation de l’Oolithed’Hesdin-l’Abbé.
Entre les cotes 38 et 21,05 m, l’absen-ce de marqueurs
biostratigraphiques laisseune incertitude de datation. Néanmoins
lesmarqueurs correspondant à la zone àGlosense (= sommet de Pumilus
et base deCautisnigrae dans la zonation subboréale),abondants sous
le Calcaire de Brucquedalne sont plus présents dans les « Argiles
àOstrea subdeltoidea ». La base du membredes « Argiles à Ostrea
subdeltoidea » seraitdonc Oxfordien supérieur, l’incertitude
dedatation s’étendant ici de la zone àCautisnigrae à la zone à
Pseudocordata.
Analysede la microgranulométrieet de la fraction argileuse
Le sédiment correspond à une siltitetrès fine sur l’ensemble de
la Formationdes Argiles du Mont des Boucards (fig. 8).Les
pourcentages d’argiles (< 4 µm) nesont supérieurs aux silts
(> 4 µm et< 63 µm) qu’à la base du forage, dans leMembre des
« Argiles à pyrite » (cote46,80-47 m, 49,65-50,30 m). Les
sablesfins et moyens sont présents à l’état detraces, sauf autour
du Calcaire deBrucquedal, où ils dépassent souvent 10 %(27-31 m,
38-43,40 m).
La fraction argileuse est constituée deproportions variables de
chlorite, d’illite,d’interstratifiés illite/smectite
irréguliers(I/S) de type R0 et de kaolinite :
- la chlorite n’est présente qu’en trace ;
- les proportions d’illite varient d’en-viron 10 % à plus de 50
% ;
- les interstratifiés illite/smectite (I/S)de type R0 fluctuent
d’environ 15 % àplus de 90 % ;
- enfin la kaolinite qui n’est pas systé-matiquement présente
peut constituer jus-qu’à 40 % de la fraction argileuse.
D’une manière générale, les propor-tions d’illite et de
kaolinite varient demanière parallèle, en opposition avec
lesproportions des interstratifiés I/S.
Deux zones minéralogiques se distin-guent dans le sondage SCP8
:
1) dans les « Argiles à pyrite », onremarque une rapide et très
forte augmen-tation des interstratifiés smectitiques audétriment de
la kaolinite et de l’illite.L’augmentation de la teneur en
interstra-tifiés I/S est associée à un enrichissementparallèle de
la teneur en silt puis en sablesfins et moyens de la fraction
insoluble dusédiment.
2) dans le Calcaire de Brucquedal,puis lors du dépôt des
premiers mètresdes « Argiles à Ostrea subdeltoidea »,ce flux de
minéraux argileux smectitiqueset de silts diminue. La cote 26,80-28
mcorrespond ainsi à un pic d’argilosité etun minimum des teneurs en
interstratifiésI/S. Un enrichissement en sable est aussiprésent
juste au-dessus du Calcaire deBrucquedal. Au-dessus de la cote
26,80-28 m, la fraction argileuse se partage sanschangements entre
kaolinite, illite etinterstratifiés I/S, l’illite étant en moyen-ne
mieux représentée qu’en-dessous.
La microgranulométrie montre que labase des Grès de Brunembert
repose sanstransition granulométrique sur laFormation des Argiles
du Mont desBoucards, confirmant le caractère brutalde cette
limite.
Contenu organique
Analyse du carbone organique
Le sédiment présente une faible teneuren carbone organique, le
COT étant enmoyenne sur l’ensemble du sondage SCP8de 0,36 % (fig.
8). La valeur la plus forte(0,67 %) est atteinte dans les « Argiles
à
pyrite » et des COT très faibles (> 0,1 %)voir nuls se
rencontrent sur les quelqueséchantillons provenant des Grès
deBrunembert et des Caillasses d’Hesdigneul,leur lithologie ne
permettant pas la préser-vation de la matière organique.
La moyenne des index d’hydrogène(IH) sur le sondage est de 25 mg
HC/gCOT. Quelques pics à 80-90 sont enregis-trés dans les « Argiles
à pyrite », alors queles teneurs en carbone organique sont
tropfaibles dans les Grès de Brunembert et lesCaillasses
d’Hesdigneul pour que le Rock-Eval puisse donner un IH fiable. Les
Tmaxsont en général compris entre 420 à430 °C, quelques valeurs
pouvant toutefoisdépasser 450°C. Dans un diagrammeIH/Tmax (fig.
10), les échantillons du fora-ge SCP8 apparaissent comme étant
majori-tairement de Type IV (matière organiquetrès altérée dont
l’origine n’est pas identi-fiable géochimiquement), les
quelqueséchantillons présentant les plus forts IH serapprochant du
Type III (matière organiqued’origine continentale), ce qui est
cohérentavec les débris de végétaux identifiés sur lacarotte.
Le COT est plus fort dans les« Argiles à pyrite » (0,43 % en
moyenne)par rapport aux « Argiles à Ostrea sub-deltoidea » (0,35
%). La moyenne la plusfaible (0,26 %) se rencontre dans leCalcaire
de Brucquedal. Les IH sont aussiplus forts dans les « Argiles à
pyrite »(30) par rapport aux « Argiles à Ostreasubdeltoidea » (18).
Dans les « Argiles àOstrea subdeltoidea », les IH commen-cent à
diminuer vers la cote 26,60 m, lacourbe présentant peu après une
nettecassure (25,40 m). Par contre, au sein duCalcaire de
Brucquedal, les IH ne dimi-nuent pas (39 en moyenne).
Palynofaciès
Les palynofaciès montrent que lamatière organique d’origine
continentale,allochtone, domine largement : les paly-nomacéraux et
les spores-pollens repré-sentent de 83 % à 97 % des
particulesfigurées (fig. 8). La matière organique asouvent un
aspect altéré, ce qui est cohé-rent avec les faibles IH. La
présenceconstante quoique parfois en très faiblequantité de
dinoflagellés et de membranesbasales de foraminifères indique un
milieumarin franc sur l’ensemble des Argiles duMont des
Boucards.
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
29GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
-
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200030
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Grès deBrunembert
Oolithed'Hesdin-l'Abbé
Caillassesd'Hesdigneul "Argiles à Ostrea subdeltoidea” Calcaire
de Brucquedal
Argiles du Mont des Boucards
"Argiles à pyrite"
SOMMET PLICATILIS-BASE CAUTISNIGRAEPSEUDOCORDATA
CAUTISNIGRAE
SOMMET OXFORDIEN MOYEN/BASE OXFORDIEN SUPERIEUR
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KIMMERIDGIEN OXFORDIENSUPERIEURINFERIEUR
CYMODOCEZones d'ammonite
Sous-étages
BAYLEI
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STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
31GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
Ces données sont en accord avec laproximité des terres émergées,
notammentdu Massif Londres-Brabant, qui devait êtrela source d’un
important apport de parti-cules organiques, par voie aquatique
ouaérienne. La part des éléments marinsautochtones est plus
importante dans les« Argiles à Ostrea subdeltoidea », où
dino-flagellés et membranes basales de forami-nifères représentent
plus de 10 % despalynofaciès, avec un maximum de 17 % àla cote
28,25 m, que dans les « Argiles àpyrite », où ils en constituent
toujoursmoins de 10 %. Le palynofaciès de la cote23,35 m est
caractérisé par l’abondancemaximum sur l’ensemble des lames
defragments de végétaux curieusement bienpréservés (10 % de
PM2-PM3). Il pourraitcorrespondre à un événement exceptionnel(crue
ou tempête) amenant dans le milieude sédimentation des fragments de
végétauxplus frais. Les lames situées dans le Calcairede Brucquedal
(34,30 m) ou juste en-des-sous (38,30 m) présentent la plus
faibleproportion de particules marines (< 5 %) despalynofaciès
étudiés. L’influence marinesemble donc avoir été la plus faible au
seinde ce membre, à moins qu’il ne s’agissed’un meilleur recyclage
des producteurs. Ilfaut aussi signaler que les lames situéesentre
les cotes 42,90 m et 34,30 m mon-trent les plus grandes fréquences
de pollensbisaccates. Enfin, dans certaines lames, laprésence en
quantités infimes de scoléco-dontes et d’algues tasmanacées
estobservée, sans que ces particules apportentde renseignements
supplémentaires du faitde leur trop faible proportion.
Interprétations
Environnements de dépôtset découpage séquentiel
Evolution des environnements dedépôts (fig. 9)
Offshore
Argiles du Mont des Boucards : lalithologie (marnes/argiles,
siltites trèsfines) indique des milieux calmes de typeoffshore
inférieur, voire supérieur lorsqueles argiles s’enrichissent en
silts. L’absencede tempestites pourtant fréquentes dansles faciès
argileux sus-jacents duKimméridgien/Tithonien du Boulonnaispeut
être expliquée soit par la bioturbation,soit par un environnement
relativementprofond et/ou relativement protégé.
Offshore sup.
Calcaire de Brucquedal : c’est unmilieu corallien, construit,
peu agité, sansdoute protégé, aux conditions environne-mentales
favorables à l’épanouissementdes encroûtements microbiens. La
faunecorallienne est assez peu diversifiée et rela-tivement
homogène ; les colonies sont depetites tailles et dominées par le
genreThamnasteria supportant des conditionschangeantes. Le milieu
pourrait avoir étéeutrophisé ou mal éclairé, par exemple enrelation
avec une forte turbidité des eauxdue à d’importants apports
détritiquescontinentaux. Les faciès de démantèlement
et les bancs à intraclastes enregistrentquelques remaniements
par des tempêtes,qui pouvaient sans doute occasionnelle-ment
perturber ce milieu probablementsitué sous la limite d’action des
vagues debeau temps. La probable faible luminositédu milieu et son
lien avec la turbidité ren-dent difficiles l’appréciation précise
d’unepaléobathymétrie. Les faciès corallienssont assez étendus au
passage Oxfordienmoyen/supérieur sur les marges nord de laTéthys et
dans le domaine boréal del’Europe occidentale. Même s’ils ne
sontpas tous du même âge, ils existent enLorraine, dans les
Ardennes, enBourgogne, en Normandie, dans le JuraSuisse, la
plate-forme du Frioul, enAngleterre, en Pologne, Roumanie,Géorgie
et Arabie (Flügel et al., 1996 ; e.g.Insalaco et al., 1997 ;
Insalaco, 1999).Dans le Jura Suisse et en Angleterre, cer-taines
bioconstructions situées en environ-nement silico-clastique sont
aussicaractérisées par un grand développementdes encroûtements
microbiens et sont asso-ciées à des conditions mésotrophes
voireeutrophes en milieu plutôt confiné (Duprazet Strasser, 1999 ;
Insalaco, 1999). EnAngleterre, la faune faiblement diversifiéede
ces bioconstructions est proche de celledu Calcaire de
Brucquedal.
Shoreface
Grès de Brunembert : la lithologie(arénites), les discrètes
laminationsobliques, les lumachelles à assez grossescoquilles de
lamellibranches associées au
OFFSHOREPROTÉGÉ
PLATE-FORME INTERNET
LVT?
LVBT10 à 20 m
T TFACIÈS CORALLIENS
SHOREFACE
Faciès construits, faciès de démantelement (tempêtes) :
rudstone, floatstoneAssociation corallienne dominéepar le genre
omniprésencedes microbialites.Faune associée : oursins,
brachiopodes, lamellibranches
Thamnasteria,
Faible hydrodynamisme, facièsprotégé :
mudstone/wackestone,oncolithes, surface marquée par des terriers
verticaux.
Fort hydrodynamisme : Arénites, discrètes laminations obliques,
lumachelles àlamellibranches (Grès de Brunembert)
Packstones/Grainstonesà oolithes et pisolithes
(Oolithed’Hesdin-l’Abbé)
Faible hydrodynamisme :argiles, marnessiltites finesFaciès
profond : absencede tempestites.
?
?
Calcaire de Brucquedal
Grès de BrunembertOolithe d’Hesdin-l’Abbé
Caillasses d’Hesdigneul
Argiles du Mont du Boucards
Fig. 9.- Zonation idéalisée des faciès des sondages SCP8 et
SCP6, LVBT : limite inférieure des vagues de beau temps, LVT :
limite inférieure des vagues detempêtes, T : faciès de
transitions.
Fig. 9.- Facies zonation of boreholes SCP8 and SCP6. LVBT:
fairweather wave base, LVT: stom wave base, T: transtional
facies.
Argiles du Mont des Boucards
-
contexte sédimentaire général indiquentdes milieux de haute
énergie peu profonds.
Oolithe d’Hesdin-l’Abbé : les packs-tones/grainstones à oolithes
et pisolithescaractérisent aussi de tels milieux. Il exis-te un
relais graduel des faciès entre lesdeux formations : les premiers
bancs car-bonatés de l’Oolithe d’Hesdin-l’Abbé,qui contiennent
encore des grains dequartz passent ensuite à des bancs où lesgrains
de quartz ont totalement disparu. Ilest difficile d’apprécier si
l’Oolithed’Hesdin-l’Abbé marque une variationbathymétrique par
rapport aux Grès deBrunembert ou correspond simplement àune période
plus favorable à la produc-tion carbonatée. Il ne semble pas y
avoird’indication dans la littérature sur unéventuel passage
latéral de faciès entreces formations.
Plate-forme interne
Caillasses d’Hesdigneul : elles cor-respondent à un
environnement calme,vraisemblablement peu profond etprotégé. Cette
interprétation est étayéepar les textures
(mudstones-packstones),par l’absence de structures de tempêtes,par
la présence de terriers verticaux,d’oncolites ou oncoïdes, ainsi
que par laprésence latéralement de faciès sableux(Sables et Grès de
Wirwignes) (Bonte inMégnien et al., 1980).
Interprétation séquentielle (fig. 8)
Les Argiles du Mont des Boucardssemblent pouvoir être découpées
en deux
tendances opposées, de part et d’autre duCalcaire de Brucquedal.
Dans le Membreinférieur des « Argiles à pyrite », la gra-nulométrie
de la fraction insoluble du sédi-ment donne une image approchée des
fluxterrigènes. Cette image suggère une ten-dance progradante,
indiquée par l’enrichis-sement progressif de la fraction
insolubledu sédiment en silt, puis en sable juste sousle Calcaire
de Brucquedal (cote 50,30-38 m). Cette variation granulométrique
estliée à l’augmentation de l’hydrodynamis-me du milieu, ou au
rapprochement dessources lorsque le niveau marin relatifbaisse.
Dans le Membre supérieur des« Argiles à Ostrea subdeltoidea » le
phé-nomène inverse est observé. La fractioninsoluble devient de
plus en plus argileuse.Ceci pourrait correspondre à l’ennoiementdes
bioconstructions sous-jacentes lors dela montée du niveau marin
relatif (tendan-ce rétrogradante). Le niveau riche en sablessitué
juste au-dessus du Calcaire deBrucquedal (cote 31-27 m) peut
êtreconsidéré comme une surface de ravine-ment, la montée du niveau
marin relatifentraînant une érosion et/ou une remobili-sation des
sédiments. La surface maximaled’inondation suivante pourrait être
placéedans l’intervalle 26-28 m, associée aumaximum d’argilosité de
la fraction inso-luble. Le niveau de sidérite de la cote29,70-29,80
m pourrait alors correspondreà un ralentissement du taux de
sédimenta-tion au cours de la montée du niveau marinrelatif.
Cette interprétation séquentielle desArgiles du Mont des
Boucards estappuyée par les palynofaciès et les ana-lyses
géochimiques de la matière orga-nique du sédiment. La
tendanceprogradante sous le Calcaire deBrucquedal est associée à de
plus fortesvaleurs de l’IH, du COT, et à une présen-ce plus
discrète des particules d’originemarine (dinoflagellés et
membranesbasales de foraminifères). La baisse duniveau marin
relatif serait ainsi associée àune moindre oxydation de la
matièreorganique et/ou au rapprochement dessources continentales.
L’ennoiement desbioconstructions est au contraire accom-pagné par
une plus forte proportion desparticules d’origine marine et de
faiblesIH et COT. L’abondance maximale de cesparticules d’origine
marine est associée àla possible surface maximale d’inonda-tion de
la cote 26-28 m. La montée duniveau marin relatif et sa
stabilisation
entraîneraient aussi l’accroissement del’altération de la
matière organique conti-nentale (plus faibles COT et IH).
Ceciserait lié à une plus forte oxydation desparticules organiques
due à l’éloignementdes sources continentales et/ou au milieumarin
plus ouvert. L’abondance minimaledes particules d’origine marine se
situeenfin dans le Calcaire de Brucquedal, cequi peut être dû au
bas niveau marin et/ouau relatif confinement du milieu
qu’indi-quent les associations de polypiers et lesencroûtements
microbiens.
Les données biostratigraphiques, bienque rares, permettent
d’identifier les cyclessédimentaires. La disparition
stratigraphiquedu dinoflagellé Compositosphaeridiumpolonicum
au-dessous du Calcaire deBrucquedal indique que le membre des«
Argiles à pyrite » ne peut être plus jeuneque la séquence Ox 5 de
Hardenbol et al.(1999). La partie supérieure des « Argiles àOstrea
subdeltoidea » est datée de la zoneà Pseudocordata ou Baylei par la
présencedes dinoflagellés Clathroctenocystisasaphes et Occisucysta
balios. Elle ne peutdonc être plus récente que la séquence Ox8 de
Hardenbol et al. (1999). Si ces argu-ments biostratigraphiques sont
considéréscomme déterminants, il faut admettre queles séquences au
troisième ordre Ox 6,Ox 7 et la base de Ox 8 sont comprises,
aumoins pro parte, entre la base du Calcairede Brucquedal et le
sommet des « Argiles àOstrea subdeltoidea ». Le maximumrégressif de
second ordre défini parHardenbol et al. (1999) correspondraitdonc
au sommet du système régressif desecond ordre et probablement au
prisme dehaut niveau (highstand : HST) de laséquence Ox 5. Le
Calcaire de Brucquedalcorrespond à la condensation de
plusieurscycles de troisième ordre, probablementOx 6 et le début de
Ox 7. Il doit être inter-prété comme une alternance verticale
decorps sédimentaires incluant les partiesproximales d’événements
transgressifs(transgressive system tract : TST) et peut-être de
prismes de haut niveau (highstand :HST), les prismes de bas niveau
n’étantpas enregistrés dans ces faciès proximaux.Le membre des «
Argiles à Ostrea subdel-toidea » représente la base du long
systè-me transgressif de second ordre dont lesommet se situe au
Kimméridgien supé-rieur (Hardenbol et al., 1999).
La limite brutale et érosive de la basedes Grès de Brunembert
marque certaine-
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200032
0400 500
Tmax (°C)
600
100 IV Altéré
200 III Continental
300IH (
mg
HC
/g C
OT
)
400
500 II Marin
600
700
800
900
I Lacustre
Fig. 10.- Diagramme IH/Tmax. Position deséchantillons du
sondages SCP8.
Fig. 10.- IH/Tmax diagram for the SCP8 samples.
-
ment une importante lacune d’érosion oude non-dépôt consécutive
à une chute duniveau marin relatif qui aurait rapidementrapproché
les sources terrigènes. Les Grèsde Brunembert, très bioclastiques,
corres-pondent probablement à la partie proxima-le et sommitale
d’un prisme de bas niveau(LST) ou à la base d’un prisme
transgres-sif (TST). Les environnements de dépôtssont par la suite
restés relativement proxi-maux durant le dépôt des formations
sui-vantes : Grès de Brunembert, Oolithed’Hesdin-l’Abbé, Caillasses
d’Hesdigneul.Des faciès sableux sont souvent observéslatéralement.
Les nombreuses lacunesd’observation au sein de
l’Oolithed’Hesdin-l’Abbé et des Caillassesd’Hesdigneul dans le
forage SCP8 limitentcependant une interprétation
séquentielleprécise de ces formations. La présence deRasenia
cymodoce dans les Caillassesd’Hesdigneul suggère le sommet de
laséquence Kim 1 ou la base de la séquenceKim 2 telles que définies
par Hardenbol etal. (1999).
Il faut cependant souligner que ceshypothèses sont
préliminaires, l’étuded’une seule verticale ne permettant pas
dedistinguer le signal eustatique du signaltectonique dans le
contrôle de l’espacedisponible, ce qui peut amener des distor-sions
sédimentaires importantes d’un siteà l’autre.
Discussion sur la significationdu signal argileux
Une influence négligeablede la diagenèse
L’augmentation de la teneur en miné-raux smectitiques dans le
Membre des« Argiles à pyrite » ne semble pas due àune influence
diagénétique. Si c’était lecas, cette augmentation devrait
s’effectueraux dépens de l’illite et de la kaolinite dansdes
proportions comparables, or ici la kao-linite disparaît totalement.
La diagenèsed’enfouissement semble négligeable carl’enfouissement
des séries est probable-ment resté inférieur à 500 m. De plus
lesvariations des minéraux argileux ne sontpas continues et de sens
constant : il n’y adonc pas de transformation de minérauxargileux
liée à une augmentation detempérature en profondeur, ce qui
s’accor-de avec la présence de matière organiquepeu mature (Tmax
compris généralemententre 420 et 430°C). Les variations des
assemblages argileux semblent doncessentiellement liées aux
fluctuationspaléoenvironnementales.
Sources des argiles et intégrationdes assemblages argileux
dansle découpage séquentiel
A l’instar des sédiments duKimméridgien du Boulonnais et
deNormandie (Deconinck et al., 1983 ; StGermès et al., 1996) les
minéraux argileuxsemblent avoir essentiellement une
originedétritique. L’illite et la chlorite (minérauxprimaires)
proviennent certainement del’érosion des terres émergées. Le
parallélis-me entre les évolutions de la kaolinite et del’illite
suggère un remaniement de la kaoli-nite de roches anciennes ou de
paléoaltéra-tions. Les minéraux smectitiques peuventprovenir soit
d’une source pédogénétique,soit d’altération de roches volcaniques
enmilieu océanique. Le signal argileux, sou-vent complexe, reflète
l’érosion à terre et laredistribution des flux terrigènes par
lescourants marins.
Il semble exister une relation entre lesvariations des
assemblages argileux dans laFormation des Argiles du Mont des
Boucards et le découpage séquentiel pro-posé (fig. 8).
L’augmentation des propor-tions des interstratifiés I/S au
détriment dela kaolinite et de l’illite est associée à labaisse du
niveau marin relatif dans leMembre des « Argiles à pyrite ». Dans
leMembre des « Argiles à Ostrea subdeltoidea »,au contraire, les
interstratifiés I/S dimi-nuent légèrement par rapport à la
kaoliniteet à l’illite, alors que le niveau marin relatifremonte.
Les variations des interstratifiésI/S sont ainsi parallèles aux
silts, donc auxflux terrigènes. Cette corrélation peut indi-quer
que les minéraux smectitiques résul-tent d’apports continentaux
directementliés à la baisse du niveau marin relatif. Iln’est
toutefois pas exclu que les teneurs enkaolinite et illite baissent
et entraînentl’augmentation des proportions relatives deminéraux
smectitiques. Cette relation entreassemblages argileux et
découpageséquentiel des ensembles sédimentaires adéjà été décrite
dans les sédiments sus-jacents du Kimméridgien et du Tithoniendans
le Boulonnais (Proust et al., 1995 ;Baudin et al., en prép.) (fig.
11). Seulsdeux intervalles de la série du Jurassiquesupérieur du
Boulonnais font exception :les transitions « Argiles à Ostrea
subdeltoi-dea »/ Grès de Brunembert dans le sonda-
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
33GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
GRES de CHATILLON
ARGILES de CHATILLON
GRES DE LA CRECHE
GRES de CONNINCTHUN
CALC. de BRECQUERECQUES
GRES de BRUNEMBERT
CAILLASSES d'HESDIGNEUL
OOLITHE D’HESDIN-L’ABBE
WIBERTARGILES du MOULIN
CALC. du MOULIN WIBERT
ILLITE/KAOLINITE
ILLITE/KAOLINITE
ILLITE/KAOLINITE
SMECTITE
SMECTITE
SMECTITE
SMECTITE
BOULONNAIS
LST
LST
LST/TST
LST/TST
LST
HST
HST
HST
HST
HST
??
AR
GIL
ES
du
MO
NT
des
BO
UC
AR
DS
"Argiles à pyrite"
Calcaire de Brucquedal
"Argiles à Ostrea
subdeltoidea"
?
?
OX
FO
RD
IEN
KIM
ME
RID
GIE
NT
ITH
ON
IEN
Proust ., 1995et al
Baudin et al., données non publiées
ce travail
Fig. 11.- Intervalles enrichis en minéraux smectitiques dans la
série sédimentaire du Boulonnais, del’Oxfordien moyen/supérieur au
Tithonien et relation avec le découpage séquentiel. D’après Proust
et al.,1995, Baudin et al., données non publiées, et ce
travail.
Fig. 11.- Position of the smectite-rich sediments in the Late
Jurassic series of the Boulonnais area, andrelation with sequence
stratigraphy. After Proust et al., 1995, Baudin et al., unpublished
data, and thiswork.
-
ge SCP8 et le passage Calcaires du MoulinWibert/Grès de
Châtillon au Kimméridgiensupérieur, zone à Eudoxus, sous-zone
àCaletanum (Proust et al., 1995) qui sontassociés à des baisses du
niveau marin rela-tif ne présentent pas d’intervalle enrichi
enminéraux smectitiques.
Ce type de relation est d’autant plusétonnant que les minéraux
smectitiques,plus légers, se déposent par sédimenta-tion
différentielle de préférence au large,alors que l’illite et la
kaolinite provien-nent souvent de l’intensification de l’éro-sion
sur les domaines continentaux enpériode de bas niveau marin
(Chamley,1989). L’apparition de minéraux smecti-tiques dans l’est
du Bassin de Paris àl’Oxfordien inférieur (zone à Mariae,sous-zone
à Scarburgense) semble ainsiconcordante avec l’élévation relative
duniveau marin lors d’un cycle de deuxièmeordre (Pellenard et al.,
1999). Cet apportimportant de smectites détritiques pro-viendrait
majoritairement de l’AtlantiqueNord en cours d’ouverture et
envahirait àl’Oxfordien le Bassin parisien par l’inter-médiaire
d’une structure subsidente, lesillon marneux (Dugué, 1991).
Dans le Boulonnais, le message argi-leux est systématiquement
inverse. Dans lebassin de Cleveland (Yorkshire,Angleterre), dans la
Formation de laKimmeridge Clay (Kimméridgien/Tithonien), il existe
aussi de fortes varia-tions des proportions des minéraux
smecti-tiques (Ramdani, 1996), mais celles-ci nesemblent pas avoir
la même significationque dans le Boulonnais. En particulier,
ilsemble que dans le bassin de Cleveland, lesbaisses du niveau
marin relatif soient majo-ritairement associées à des baisses
desteneurs en smectite (Ramdani, 1996). Lemessage argileux du
Boulonnais sembledonc assez particulier, ceci étant peut-êtrelié à
sa position proximale. La région duHavre, relativement proche du
Boulonnais,présente elle aussi un intervalle smectitiqueassocié à
une baisse du niveau marin. Ceniveau, dans les Marnes de Bléville,
estcorrélable, aux incertitudes de datationprès, avec un intervalle
smectitique trouvédans le Boulonnais au sommet desCaillasses
d’Hesdigneul (zones àCymodoce/Mutabilis, Saint Germès et al.,1996 ;
Baudin et al., en prép.). L’étude dusondage SCP8 étend donc
l’enregistrementargileux particulier du Boulonnais jusqu’aupassage
Oxfordien moyen/supérieur.
Hypothèses sur l’enregistrementargileux du Boulonnais
Plusieurs hypothèses peuvent êtreavancées pour tenter
d’expliquer cette rela-tion entre signal argileux et variations
duniveau marin relatif, particulière à la sériedu Jurassique
supérieur du Boulonnais :
1) existence de barrières morpholo-giques en mer,
2) changement des sources argileusesen relation avec les
variations eustatiques,
3) changements climatiques,
4) influence tectonique.
1) Présence de barrières morphologiquesen mer
L’augmentation des interstratifiés I/Sen période de baisse du
niveau marin pour-rait être liée à l’existence de barrières
mor-phologiques en mer, susceptibles de« filtrer »
préférentiellement certainsminéraux argileux venant du continent
parle jeu de la sédimentation différentielle.De tels phénomènes
sont connus enNormandie à l’Oxfordien moyen (Dugué,1991). Les
particules d’illite et de kaolini-te sont bloquées en domaine
interne debarrières sous-marines oolithiques ou réci-fales, alors
que les particules smectitiquessont plutôt concentrées vers le
large, endomaine externe, en raison de leur plusgrande
flottabilité. Dans le Boulonnais, lesensembles sableux du
Kimméridgien/Tithonien pourraient avoir joué ce rôle debarrières
morphologiques sous-marines, labaisse du niveau marin accentuant
demanière relative les morphologies sous-marines. Pendant l’épisode
du Calcaire deBrucquedal, il est cependant peu probableque ces
bioconstructions discontinuesaient pu jouer un rôle de
barrière.
2) Changement de sources argileuses enrelation avec les
variations eustatiques
Les fluctuations du niveau marin àproximité de terres émergées
peuvententraîner des changements dans les sourcesdétritiques
gouvernés par exemple par desvariations courantologiques ou
paléogéo-graphiques (émersion de certainsdomaines, accentuation de
l’érosion etmise en déséquilibre de sols ou depaléoaltérites...).
Ce type de phénomènepourrait expliquer l’augmentation
desinterstratifiés I/S dans le Membre des
« Argiles à pyrite ». Le couple illite/kaoli-nite et les
minéraux smectitiques semblenten effet provenir de stocks
différents à l’é-chelle du Boulonnais. Parmi les sourcespossibles
des minéraux smectitiques, l’éro-sion régressive de sols
smectitiques (verti-sols) a par exemple été invoquée(Deconinck et
al., 1983). Ces sols pour-raient être antérieurs ou se développer
surles aires peu déclives et mal drainées,libérées par le retrait
de la mer en borduredu Massif Londres-Brabant et à
proximitéimmédiate des milieux de sédimentation.Dans le
Kimméridgien et le Tithonien duBoulonnais, les smectites
appartiennentd’ailleurs au groupe des montmorilloniteset
beidellites alumineuses et ferrifères, quiproviennent surtout de
l’érosion de sols(Proust et al., 1995). Lors de la montée duniveau
marin relatif au sein des « Argiles àOstrea subdeltoidea » dans le
sondageSCP8, et dans les niveaux de la série duJurassique supérieur
du Boulonnais, la pro-portion des minéraux smectitiques dimi-nue.
Les stocks smectitiques ne subiraientplus la même érosion, pouvant
par exempleêtre ennoyés. Les assemblages argileuxreflèteraient
alors la composition minéralo-gique de l’arrière-pays à grande
échelle,avec un mélange de minéraux smecti-tiques, de kaolinite,
d’illite et de chlorite.
3) Changements climatiques
Les apports smectitiques associés auxbaisses du niveau marin
relatif pourraientaussi marquer des phases climatiques plusarides.
La formation à terre de sols smecti-tiques serait alors favorisée
par rapport auxsols à kaolinite qui caractérisent despériodes plus
humides associées à une plusforte hydrolyse. Le climat en Europe
auJurassique supérieur était tempéré chaud etcaractérisé par une
forte saisonnalité(Frakes, 1992, Valdes et Sellwood,1992). Sur le
long terme, l’intervalleKimméridgien-Tithonien est marqué parune
phase relativement plus chaude et aridedébutant à l’Oxfordien et
attestée au moinsà l’échelle ouest-européenne par des mar-queurs
sédimentologiques, minéralogiqueset isotopiques (Frakes, 1992 ;
Riboulleau etal., 1998). Une brutale baisse des teneursen kaolinite
dans des sédiments de laKimmeridge Clay au sein de la zone
àHudlestoni a été interprétée comme signantun changement climatique
associé à cettetendance, parallèlement à d’autres données(Wignall
et Ruffel, 1990). La zone àHudlestoni correspond dans le
Boulonnais
STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200034
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STRATIGRAPHIE ET ANALYSE SÉDIMENTOLOGIQUE DU PASSAGE
OXFORDIEN/KIMMÉRIDGIEN DANS LE BOULONNAIS
35GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 2000
à une lacune de sédimentation. Toujoursdans la Kimmeridge Clay,
mais à uneéchelle de temps de 20 ka, des enrichisse-ments ponctuels
en kaolinite corrélés avecdes cycles organiques sont attribués à
desvariations climatiques à haute fréquence(Desprairies et al., in
Lallier-Vergès, E.,Tribovillard, N. P., Bertrand P., 1995).Dans le
Jura Suisse et en Espagne, desétudes à haute résolution des faciès
ont mon-tré l’influence du climat, parmi d’autres fac-teurs, à des
échelles de temps de l’ordre de20 ka et 100-400 ka à l’Oxfordien
(Pittet etStrasser, 1998). Dans le cas du Boulonnais,une influence
climatique régionale ne peutêtre écartée. Mais le fait que les
apportssmectitiques synchrones avec les baissesdu niveau marin
relatif au troisième ordrene se retrouvent pas systématiquementdans
les régions voisines ne plaide pas apriori en faveur de changements
clima-tiques à large échelle pour expliquer l’es-sentiel du signal
argileux. De plus, lesvariations climatiques à haute fréquence
nesemblent pas enregistrées par les argilesdans ces faciès
proximaux. Il faut aussigarder à l’esprit qu’un retard entre le
chan-gement climatique entraînant à terre ledéveloppement de sols
en équilibre avec leclimat et l’arrivée dans le milieu de
sédi-mentation de ces minéraux argileux estpossible, comme cela a
été montré dans lecas des paléoaltérites du Crétacé (Thiry etal.,
1999). Il est même possible d’imaginerun complet déphasage entre
variation cli-matique et arrivée des minéraux
argileuxcorrespondants dans le bassin.
4) Influence tectonique
La domination de l’illite et de la kaoli-nite en période de
remontée du niveaumarin relatif pourrait également être liée àune
forte activité tectonique entraînant desrajeunissements de reliefs
et favorisant lesapports d’illite et de kaolinite provenant
del’érosion continentale (Deconinck et al.,1983). Les périodes de
baisse du niveaumarin relatif seraient au contraire despériodes de
quiescences tectoniques. Cettehypothèse est aussi cohérente avec la
géo-dynamique, marquée alors en Europe parun rifting actif dans
l’Atlantique Nord et enMer du Nord (Ziegler, 1989). Cependant,cette
possible phase d’activité tectonique nese marque pas dans le
sondage et dans lereste de la série du Jurassique supérieur
duBoulonnais par des apports plus grossierspendant ces intervalles.
Dans leBoulonnais, des preuves d’activité tecto-nique marquée ne
sont présentes qu’à partirde l’extrême fin du Jurassique sur les
lignessismiques disponibles (Mansy, comm. pers.).
Conclusions1) Un découpage séquentiel des sédi-
ments dans un cadre chronostratigra-phique précisé est proposé
pour desformations qui n’ont pas bénéficié d’é-tudes exhaustives
depuis longtemps. Cedécoupage complète les travaux régio-naux et
permet d’avoir une vision globa-le de la succession sédimentaire
duJurassique supérieur du Boulonnais.
2) Il existe une logique entre signalargileux et variation du
niveau marinrelatif depuis le passage Oxfordienmoyen/supérieur
jusqu’au Tithonien dansle Boulonnais. Les données acquises etles
données bibliographiques sur leKimméridgien/Tithonien du
Boulonnaisne permettent pas actuellement de validerou d’infirmer
définitivement les diffé-rentes hypothèses avancées ici
pourexpliquer le signal argileux, les méca-nismes sédimentologiques
possiblesayant pu par ailleurs être couplés. Le oules processus
sédimentologiques à l’ori-gine de ce signal semblent a priori
avoirété restreints à la bordure nord-occidenta-le du Massif
Londres-Brabant. Seul unlarge contrôle latéral de la
sédimentationpourrait permettre de contraindre ceshypothèses et de
séparer les influenceseustatiques et tectoniques, dans uncontexte
géodynamique de rifting actif àl’échelle de l’Europe.
Remerciements
Nous remercions la société FONDA-SOL de nous avoir fourni les
carottes étu-diées. Nous remercions aussi Jean-PierreGarcia pour la
détermination des brachio-podes du sondage SCP8, Alain Foucault
etCécile Robin pour les remarques et discus-sions enrichissantes,
ainsi que les relec-teurs du manuscrit. Nous avons bénéficiédu
soutien technique de Philippe Recourt,Deny Malengros (Lille 1) et
FlorenceSavignac (Paris 6).
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Annexe 1 - Références des espèces-index citées dans le texte.
D’après Williams G.L. et Lentin J.K. (1998) - The Lentinand
Williams index of fossil dinoflagellates. AASP Contributions Series
Number 34.
Annex 1 - References of index-species quoted in the texte. After
Williams G.L., Lentin J.K. (1998) - The Lentin and Williamsindex of
fossil dinoflagellates. AASP Contributions Series Number 34.
Clatroctenocytis asaphes Compositosphearidium polonicum
Cribroperidinium globatum Glossodinium dimorphum et al.Occisucysta
balios et alScrinodinium crystallinum
(Drugg, 1978) Stover et Helby, 1987d(Gorka, 1965) Erkmen et
Sarjeant, 1980
(Gitmez et Sarjeant, 1972) Helenes, 1984Ioannides , 1977
Gitmez, 1970 émend. Jan du Chêne ., 1986b(Deflandre 1939a)
Klement, 1960
-
GÉOLOGIE DE LA FRANCE, N° 4, 200038
STRUCTURES PROFONDES DU BASSIN NORD LIGUREET DU BASSIN NORD
TYRRHÉNIEN
parI. Contrucci
Document du BRGM n° 292