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Sociolinguistique - 2 A propos de Labov et de la variation linguistique
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Sociolinguistique - 2

Jan 05, 2017

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trinhnhi
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Sociolinguistique - 2

A propos de Labov et de la variation linguistique

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WILLIAM LABOV 

                     

       

Professor of Linguistics

University of Pennsylvania         

 

Office address: Department of Linguistics University of Pennsylvania  Philadelphia, PA 19104-6305

http://www.ling.upenn.edu/~wlabov/home.html

(Born: Dec 4, 1927, Rutherford, NJ)

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« Some Observations on the Foundation of Linguistics » 

William Labov, University of Pennsylvania

http://www.ling.upenn.edu/~wlabov/Papers/Foundations.html

Labov distingue deux conceptions du langage / de la langue (il attribue à Chomsky et à son école la « tendance idéaliste » !).

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« What is language?   The idealist conception is that language is a property of the individual, a species-specific and genetically inherited capacity to form rules of a particular type, relatively isolated from other activities of the human intelligence.  The materialistic conception is that language is a property of the speech community, an instrument of social communication that evolves gradually and continuously throughout human history, in response to a variety of human needs and activities. »

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Quelques idées fortes chez Labov

- S’il y a de la variation, il convient toujours de tenter de l’expliquer : les prétendues « variantes libres » sont des variantes dont le conditionnement nous échappe mais il convient de chercher parmi les données sociales au sens large celles qui de fait conditionnent les variantes analysées.

- Se méfier de l’introspection, d’une prétendue « compétence » (cf. Chomsky) : on ne touche de fait que des « performances », et il existe des procédures objectives d’analyse linguistique pour approcher la variation – qui est la règle.

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- En conséquence : scepticisme quant aux « universaux », au sens où ils pourraient être présents dans toutes les langues. Mais c’est l’explication qui forge l’universalité (cf. ne pas confondre les universaux de la linguistique avec des universaux du langage !).

- Intérêt particulier pour le changement linguistique : tout particulièrement les signes du changement en cours. Toutes conditions égales, ce qui a entraîné des changements dans le passé se reproduit nécessairement maintenant (mais ne pas oublier les caractéristiques sociales qui font partie des « conditions égales »).

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Nécessité de convenir de principes de notations stables : aussi bien pour les catégories phonologiques et grammaticales (syntaxiques) que pour la phonétique (prévoir pour la grammaire ce que permet l’API pour la phonétique). En-dehors de cela : aucune comparaison n’est possible.

Orientations pour toute recherche future.

Toujours expliciter les facteurs d’introspection et les a priori qui sont susceptibles de fausser la recherche.

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Se rappeler que l’on tente toujours d’enquêter sur la langue d’une communauté linguistique et non pas sur celle d’un seul individu. Se soucier nécessairement de la question de la représentativité des informateurs.

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Les types de variation

Diachronique

Diatopique

Diastratique

Diaphasique

Extrait de M.L. Moreau, art. « Variation » in Sociolinguistique. Concepts de base :

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« Quatre grands types de variations sont classiquement distingués :

- La variaton diachronique est liée au temps ; elle permet de contraster les traits selon qu’ils sont perçus comme plus ou moins anciens ou récents.

- La variation diatopique joue sur l’axe géographique ; la différenciation d’une langue suivant les régions relève de cette variation. Pour désigner les usages qui en résultent, on parle de régiolectes, de topolectes ou de géolectes.

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- La variation diastratique explique les différences entre les usages pratiqués par les diverses classes sociales. Il est question en ce cas de sociolectes.

- On parle de variation diaphasique lorsqu’on observe une différenciation des usages selon les situations de discours ; ainsi la production langagière est-elle influencée par le caractère plus ou moins formel du contexte d’énonciation et se coule-t-elle en des registres ou des styles différents. »

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Extraits de F. Gadet, « Classe sociale », ibid.

« Le rôle et l’amplitude de la variation sociale différent selon le type de société concerné : ils sont maximaux (et maximalement complexes) dans les sociétés de type occidental, où la hiérarchisation socio-économique l’emporte sur d’autres modes de classification des individus ; ils sont aussi plus forts dans les villes. » (p. 77)

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« Les traits de langue caractéristiques de la variation sociale sont la plupart du temps saisis dans une comparaison avec la langue standard, ou la norme. C’est ainsi que l’on tend à établir un pôle dont on considère qu’il est maximalement opposé à la norme, la variété dite « langue populaire ». Les travaux descriptifs qui se sont intéressés à la variation sociale ont bien plus souvent porté sur les usages des milieux populaires que sur la langue des classes favorisées, sans doute avec l’illusion que cette dernière se confondait avec la langue standard. Les études sur les usages des classes favorisées demeurent assez peu nombreuses. » (ibid. p. 77)

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Une enquête de W. Labov : Martha’s Vineyard :

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En cause : la question de la prononciation des diphtongues :

/ay/ : right, wide, pride, wine, wife

/aw/ : house, out, doubt…

A M’sV : tendance à la centralisation du /a/ > /e/

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Pourquoi ce trait ?

« Je crois qu’il est possible d’apporter à cela une réponse spécifique en étudiant dans le détail la configuration de ce changement phonétique à la lumière des forces sociales qui agissent le plus profondément sur la vie de l’île. » (Labov, p. 73)

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Recherche de corrélations entre ce trait linguistique et divers traits sociolinguistiques :

- Selon répartition géographique : basse-île / haute île ?

- Selon groupes sociaux : pêcheurs, fermiers…

- Selon l’ethnie d’origine : Anglais, Portugais, Indiens…

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Parallèlement Labov étudie « contexte » extra-linguistique :

Difficulté des insulaires à se maintenir sur l’île : 5563 hab. tout au long de l’année ; 42 000 estivants en plus en juin et juillet.

Malgré le tourisme, le taux de chômage reste important.

Certains de ce fait veulent travailler sur le continent, d’autres veulent rester sur l’île.

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De fait :

Plus les gens veulent rester, plus ils centralisent les diphtongues.

(prononciation spécifique, « îlienne », qui les distingue des « continentaux » ; en revanche ceux qui veulent partir adoptent systématiquement la prononciation de Boston).

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A noter :

-Ne pas s’en tenir aux variables sociales « de base » (âge, sexe, profession…) : disposer de toutes les variables sociales susceptibles de conditionner un choix

- Résultats ne sont valables que « hic et nunc » : pour cette situation (ne pas extrapoler à tous les « îliens » !)

-Sur deux traits phonétiques, tâche est relativement aisée (l’opposition est nette, le nombre de variantes possibles limitées, le sujet ne risque pas beaucoup de se contrôler…), mais la difficulté est énorme dès que l’on sort du domaine de la phonétique

- Dans le domaine grammaticale notamment, la stigmatisation dans le cas de variantes non normatives intervient pour provoquer des corrections

- Dans le domaine lexical (où le nombre des variantes est considérable) : les conduites d’évitements ne rendent guère l’enquête possible : recours à des périphrases, changement de structures…

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A priori, la variation concerne :

les traits phoniques les traits lexicaux les traits grammaticaux

Mais les difficultés ne sont pas les mêmes partout, précise Gadet dans l’article cité plus haut « Classe sociale », in Moreau, éd. :

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« C’est dans le domaine phonique que William Labov a développé un ensemble de recherches d’une grande importance pour l’organisation du champ de la sociolinguistique. Partant du concept structuraliste de variation libre, Labov établit qu’il ne faut pas entendre le terme libre comme signifiant « aléatoire », mais que toute société se caractérise par une configuration sociolinguistique particulière organisant les modalités de stratification de sa variation. » (p. 78)

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« La possibilité d’étendre une telle description sociolinguistique à d’autres domaines de la langue se heurte à quelques difficultés : s’il se manifeste incontestablement de la variabilité à ces niveaux, il n’est pas certain qu’il soit encore souhaitable de la saisir à travers le concept de variation.

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La diversité du lexique est observée et notée depuis très longtemps par les grammairiens […] et c’est essentiellement pour ce plan qu’ont été constituées des notions comme celle de niveau de langue ou de registre, qui tentent de saisir (par exemple dans les marques d’un dictionnaire : populaire, vulgaire, argotique ou familier) la diversité des usages sociaux selon les situations.Il en va encore différemment dans la morphologie et la syntaxe, où la différence de signification entre formes invite à s’interroger sur une conception de la langue qui met en avant la facultativité, conçue comme choix de la part du locuteur – choix largement inconscient. […] la question se pose de l’équivalence fonctionnelle des formes.

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On peut ainsi se demander si les deux énoncés suivants comportant des relatives (l’une standard et l’autre populaire), l’homme dont je parle et l’homme que je parle de lui ont bien la même signification. La valeur que revêtent ces formes dans une séquence met en jeu beaucoup plus que la seule sémantique référentielle, et il serait souhaitable de prendre aussi en compte leur utilisation pragmatique. Mais on ne dispose pas de réponse claire en la matière, et c’est sans doute pourquoi la variabilité dans les dimensions de la morphologie et de la syntaxe (voire du discours) constitue un champ très peu exploré pour le moment, même dans les langues les plus décrites. » (p. 79)

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Conclusion :

Les limites de la sociolinguistique variationnelle sont donc à la fois :

-Méthodologique (complexité d’aboutir en obtenant les formes requises de façon régulière et automatique) ;

- sur le fond : y a-t-il « conditionnement » langagier de l’homme ? Gardons-nous une certaine « liberté de parole » quel que soit notre groupe social d’appartenance ?

Ces questions méritent d’être posées face au déterminisme de W. Labov.

Certes toutes les sciences sont plus ou moins déterministes, mais l’échec du déterminisme strict est régulier en sciences humaines.