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CONTINU,COGNITION,LINGUISTIQUE
JeanMichelSALANSKISUniversitdeLilleIII,CAMS
(ExtraitdeRastier,F.(d.),SensetTextes,Paris,Didier,1996)
SOMMAIRE:Introduction1.Lgitimitsdiversesducontinuparrapportaulinguistique1.1.L'entreperceptive1.2.Ledynamismecognitif1.3.Uncontinudusens?2.Espacecognitif,espacetranscendantal2.1.Positionduproblme2.2.Lepointdevuecognitif:Talmy,Poincar2.3.Confrontationdel'espacecognitiflinguistiqueetdel'espacetranscendantalgomtrique2.4.Laconceptionphnomnologiquedel'enracinement2.4.1.Indicationsgnralessurlerapport2.4.2.L'espaceorientpourlecorpsetl'intuitionpure3.Conclusion:ladisputeducontinu
Introduction
Le continu, nous l'envisageons d'abord, dans cette tude, comme
le signifi d'une activit
delangageparticulireetprivilgiebeaucoupd'gards,l'activitmathmatique.Cetteactivit,qui,aujourd'hui,alieusuivantladontologieformelle,prendplusspcialementlenomd'analyserelleoucomplexelorsqu'elleviselecontinu.Aucoursdelapriodercente,elleaproduitunequantitimmense
de savoir, dont une part ellemme considrable se range sous le titre
gomtriediffrentielle.Denombreuxaspectsdecesavoirs'investissentdanslaphysiquemathmatiquedecesicle,pour
laplusgrandegloireet leplusgrandsuccsdecettedernire : lemariagede
lagomtrie diffrentielle et de la physique, clbr la fin duXVIIe
sicle avec la naissance
ducalculinfinitsimal,continued'trelefaitmajeurlasciencemoderne,ycomprisductdelathoriequantique,reboursdecequ'imaginentdesgenstropimpressionnsparlecaractrediscretdesniveauxd'nergiedel'atomed'hydrogne.
La linguistique, mais avec elle plus gnralement les diverses
disciplines de la
constellationstructuraliste,ou,plusprsdenous,delagalaxiecognitive,n'onttoutd'abordpassuivilemodlede
la physique du point de vue de ce rapport au continu. La voie de la
formalisation
futemprunte,maisonacefaisantsystmatiquementprivilgilamathmatiquediscrte.Sil'onenaus
ainsi, c'est sans nul doute pour de bonnes raisons, ayant trait
l'intuition que l'on avait del'objetdontons'occupait.
Aujourd'hui,cependant,diversestentativesdemodlisationoudedescriptiontmoignentdecequecettepremireoptionn'taitpeuttrepas
irrversible,et
leprsentcolloquerendmanifestequecetteremiseenquestionatteintlalinguistiqueellemme.Nousdisonslalinguistiqueellemmeparcequelalanguesembledeprimeabordprsenterunediscrtionpourainsidireimprenable,etqu'une
thorisation continue apparat donc commeapriori maximalement
improbable dans soncas.
Nous savons, cela dit, dans quelle circonstance le continu
parvient nanmoins concerner lalinguistique:cequi joueunrledcisifest
ici laproblmatiquecognitive, le faitque la
recherchelinguistiquesetrouvedeplusenplusappeles'insrerdanslecadreplusgnraldel'tudeobjectivedelacognition.Nousallonsdonctenterdeprcisercommentlaproblmatiquecognitiveparvient
importer le continu dans le champ linguistique, en distinguant cet
gard plusieursmodalits. Lamthode suivie estphilosophique, c'estdire
que nous tentons chaque fois decaractriser philosophiquement la
perspective dans laquelle le continu est sollicit par la thorie
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cognitive,etlamesuredanslaquellecettemobilisationconcerneleniveauproprementlinguistique.
C'est ainsi que nous abordons dans ce qui suit trois points,
correspondant aux trois types
delgitimationpossiblesdel'interventiondelagrammaireducontinuqu'estl'analyserelledanslesmatirescognitives:lalgitimationparleperuetlaperception,lalgitimationparl'approchedynamicistedel'activitcognitive,lalgitimationparlapriseencompted'uncontinudusens.
Mais nous prendrons aussi, dans un second temps, le problme dans
le sens inverse : ladescription linguistique dgage quelque chose
comme une grammaire du continu habitantl'usage ordinaire de la
langue, qui fait en quelque sorte concurrence au dispositif
logicomathmatique,rfrenceimplicitedetoutlediscourssurlecontinuquiprcde.Nousessaieronsdonc
d'analyser le rapport entre les deux niveaux d'laboration du
continu disponibles, qui seprsentent en l'occurrence comme deux
niveaux d'laboration de la spatialit. Nous
profiteronsalorsdufaitquelaquestiondurapportentreunespacecognitifetl'espacedelagomtrieadjt
pose dans l'aire philosophique, propos de l'interprtation de la
doctrine kantienne del'esthtiquetranscendantale.
1.Lgitimitsdiversesducontinuparrapportaulinguistique
1.1.L'entreperceptive
Unepropritfondamentaledel'activitcognitiveestqu'ellesemetenrapportaveclemonde.Ilestdonc
possible d'introduire le continu dans le champ linguistique en
invoquant la dpendance
dulangagesurlaperception:laperceptionoudumoinsleperua,jugeonsnous,toutvoiraveclecontinu.
C'estbiencequeditPylyshynlorsqu'ilparledetransduction:pourlui,unefonctiondetransductionest
une fonction qui envoie certain classes of physical states of the
environment
intocomputationallyrelevantstatesofadevice.Maisladifficultproprelatransduction,cequifaitquelatransductionn'estpasuncalculsymbolique,c'est,Pylyshinlesignalenouveauentermesonnepeutplusclairs,lefaitquelesparamtresdeladescriptionphysiquesontincommensurablesavecleregistresymbolique:
Physicaldevicesrespondtophysicalmagnitudes(thatis,thebasicdimensionofphysicsforce,time,length).Thedevelopmentoftechnologicaltoolsformechanicalorelectricaltasksisintimatelyrelatedtothedevelopmentofphysicaltheory.Whatmakesspeechseemhighlyvariableisthatwelack
physical dimensions that correspond to phonetic similarity in other
words, we lack
adescription,inphysicalterms,thatwillgroupsoundsintoperceptuallysimilarclasses.
Formulainsi, leproblmeapparatcommelicequesont
lesparamtresphysiquesde
force,tempsoulongueur:ilprocdeplusprcismentdecequ'cesparamtressontassocisdanslathorisationphysiquedesdomainesmathmatiqueso
leursvaleursdoivents'inscrire,domainesquisont tousconstruitssur
lemodlemathmatiqueducontinu
linaireR.Passerdecequiestainsid'abordrapportunecollectiondenombresrels,decequiest
leplussouvent
interprtcommeunpointd'unevaritdiffrentiableplusoumoinscomplexe,passer,donc,via
uncritremathmatiqued'assimilationde cequi vaut symboliquement comme
lemme,de l'informationsymbolique, est le problme dit de la
transduction, dont Pylyshyn donne comme exemple
dersolutionpartielle lestravauxdeMarr(maisonpeutaussiciter
l'approchemorphodynamiqueduproblmede la reconnaissancedes
formessensiblesexternesproposeparPetitotdansPetitot[1991],etl'tudeprsenteparlemmeduproblmedelaperceptioncatgorielledansPetitot[1985]).
Ce problme a ses attraits, ses difficults et son langage, mais ce
que nous
voulionsseulementsouligner,c'estquelecontinu,jusquel,n'intervientqueparcequ'ilintervientengnraldanslamodlisationphysique,iln'yaaucunmotifproprementlinguistiquedelefairecomparatre.L'ide
est simplement qu'il y a une prparation de toute activit cognitive
linguistique dans
latransduction,etquelatransductionpardfinitioncommencedansununiversconventionnellementmodlisparlecontinu.
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Certes,ilyabienunesecondeinstancedel'affaireperceptivepourlelangage:depuisquel'onacommePylyshynposleproblmedel'entredusystmecognitifentermesdetransduction,onjugeparalllementquelabarrireentrelatransductionetlecalculsymbolique,entrelepassageduphysique
au symbolique et l'opration symbolique ellemme, est essentiellement
relative,
floue,variable.CitonscettefoislercentarticledeChalmersFrenchHofstadter:
RecentlybothPylyshyn(1980)andFodor(1983)havearguedagainst
theexistenceof topdowninfluences inperception,claiming
thatperceptualprocessesarecognitively impenetrableofinformationally
encapsulated . These arguments are highly controversial, but in any
case theyapply mostly to relatively lowlevel sensory perception.
Few would dispute that at the
higher,conceptuallevelofperception,topdownandcontextualinfluencesplayalargerole.
Certes,unediscussions'amorcepartirdecesconsidrations,etelleaurancessairementdesretentissementssurleniveauproprementlinguistique:lefaitquelelangagesoitlemdiumdelarecognition,
comme le pointent ChalmersFrenchHofstadter, contraint une
certainecommensurabilit, unecertaine relation lesoprationsdu
langageet la fonction transductive : laperception s'achve dans la
recognition. Comme ChalmersFrenchHofstadter explicitent
lecaractrekantiendecettediscussion,ilpeuttresimpleetclairantdedirequeceproblmeseraitdanslelexiquekantienceluiduschmatisme,alorsquelepremierseraitceluidelasensibilitetdel'intuitionpure.Entouttatdecause,lorsqu'onaditcela,onn'apaschanglefaitquelecontinuqui
vient ainsi concerner vritablement le niveau linguistique au niveau
de sa fonctionschmatisante, est le continu de la physique, le
continu imput par la physique l'tant spatiotemporeldelanature.
Enfait,notreassimilationduproblmeceluiduschmatismeestfoncirementinexacte,ouplutt,elleentretientuneconfusion.L'examende
la littraturecognitivervlequ'ilyaplusexactementdeuxproblmes:
Le problme de ce que l'on pourrait appeler la prparation
transductive des actes decatgorisation, de recognition dlivrs dans
et par le langage : la stratgie mathmatique etl'implantation sur
rseaudontPetitot rend compte dansPetitot [1991] nous semblent
relever decette rubrique dans l'exactemesure o les archtypes
cognitifs y sont les termini ad
quemininterrogsdutravaildurseau.
Leproblmeduschmatismeausensplusprcisduterme,etquiestaufondleproblmedelamesuredanslaquellelelangagesetransposedeluimmedansleregistrecontinuduperu:ceserait,parexemple,leproblmedecomprendrecommentlelangagepeutprescrirelasignificationcontinuedesdiagrammesdeLangacker(s'ilyenaune).
Le trans de transduction et transposition, selon les cas, ne va
pas dans lamme direction. Lapremireproblmatiqueest cellede
laprparationphysiquedusymbolique (dans les termesdePylyshyn), la
seconde celle du pouvoir schmatisant du langage. Seul le second
problme estproprement linguistique : il implique une tentative de
comprendre au niveau mme du
couplelangagepenseuneesquisseducontinuobaignentlesrfrents.
Il nous semble que ce problme du schmatisme linguistique ne peut
tre abord que dans lecadre d'une tude de la spatialisation a priori
qui est dans le langage : il est cohrent que lamanire dont le
langage se tourne vers une spatialit prdonne des choses demande
treenvisagepartird'unerflexionsurl'espacequelelangagepourainsidireproduitparluimme.Maiscecirenvoielasecondepartiedecetarticle.
1.2.Ledynamismecognitif
C'estunevieillethsedelaphilosophiequeleclivageentrelemondeetl'espritestunclivagedel'espaceetdutemps.L'me,onlesait,estdjdsignecommecompliceessentieldutempsparAristote
chezKant, le tempsest la formedusens interne chezHegel leconceptse
reconnatfinalementcommelammechosequeletempschezHusserl,lefluxintimedutempsestl'lmentdelaconstitutionpremiresurlaquelletoutelaphnomnologie,commedploiementduchampde
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conscience,repose.
Une telle tradition, peuttre, nous recommande de penser
l'essence de la pense du ct
dutemps:lepropredelapenseseraitd'treprocessus,d'treuncertainrythmedansletemps.
Mais ds lors, une hypothse philosophique sur la pertinence du
continu l'gard du domainecognitif merge naturellement : ne peuton
pas soutenir que le temps joue dans les sciencescognitives un rle
analogue celui que jouent conjointement l'espace et le temps dans
lamcanique classique ? Et que l'interprtation usuelle du temps par
le continu mathmatiqueunidimensionnelR s'impose alorsapriori la
recherche cognitive ? Si l'on veut exprimer
cettethsedanslelangageducriticismetranscendantal,dontelleestvisiblementinspire,ondiraqueletempsest
lecadredeprsentationdesphnomnescognitifs,etque
latentatived'objectiverscientifiquement lacognitionestparsuite
tributaired'uncontinu temporelesthtiqueausenskantien.
Ilapparatalorsqu'unetellehypothsepeuttrenotablementappuyeparlapriseenconsidrationdes
efforts rcents pour reconstruire l'ensemble des sciences cognitives
sur un paradigmedynamiciste.
Ces efforts, on le sait, ont plusieurs aspects. Le plus
manifeste, le plus clbre, est
ledveloppementdecequ'onappelleconnexionnisme
ouparfoisnoconnexionnisme.Souvent,l'exposdecesmodless'appuietrslargementsurl'inspirationneurobiologiquevidentequilesamotivsaumoins
l'origine :sur lavraisemblancede l'hypothseque
lapensemergederseauxneuraux.Onpeutnanmoinsregarderleschosesd'unetoutautremanire,etconsidrercommeessentielnonpaslefaitquecesmodlesmettentenscnelesystmedynamiqueassocilaremisejourritre,indfiniedesvaleursd'activationdesneuronesd'unrseau,maislefaitqu'ilsmettentenscneunsystmedynamiquetoutcourt.Onammetouteslesraisonsdelefairesil'ontientcomptedel'anticipationparRenThomdesidesconnexionnistesdemodlisationilyplusdevingtans,etcedansdestermesolarfrenceauxneuronesnejouaitpasungrandrle:c'est
surtout l'ide que Thom se faisait de l'activit cognitive comme
essentiellementvnementielle,temporelle,quileconduisaitunemodlisationdynamique.
Si nous suivons le langage de D. Amit dans son traitModeling
Brain Function, nous
n'avonsd'ailleurspasdepeinereprerl'importancedel'lmenttemporeldanslaprsentationqu'ildonnedesesANN(AttractorNeuralNetworks).
Tout d'abord, le principe de la reprsentation des contenus de
pense par desattracteurs
d'unsystmedynamiqueestunprincipetemporalisantdeuxgards:d'unepart,
lapenseapparatcommeunprocessus,d'autrepart,lasaisied'uncontenu,ausensdelamiseenactedesonsens,estinterprtecommel'arrivedusystmedynamiqueenl'attracteur:
The arrival of a trajectory, initialized by a given stimulus, at
an attractor is the realization
ofretrievalandatthesametimeitistheassignmentofmeaning...(Amit[1989],p.84).
Cettegrandeoptioninterprtativedel'essencedesreprsentationsseprcisedansleregistretemporel
: pour que la reprsentation soit vraiment actualise dans le systme,
il faut que
ladynamiquedemeureuntempssuffisantoellesestabilise,alorsqueletempsd'arriveencettat,comparativement,
est un temps rapide. partir de telles considrations, Amit distingue
larecognition du souvenir proprement dit (la premire est l'arrive
immdiate du systme sur
unattracteurquelestimulusappelleetquiestenmmoire,lesecondcorrepondaucasd'un
processbywhichadetaileditemofinformation,specifictotheparticularattractorwhichhadbeenreached,ispropagatedinthewidersystemtogeneratearesponsebasedonthespecificdetailedmemory.
On demande par ailleurs la slection d'un attracteur de dpendre
seulement des forces deconnexion du rseau, et pas dumode temporel
de remise jour des activations neurales : onenvisage cet gard deux
possibilits extrmes, l'une invraissemblable biologiquement mais
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commodemathmatiquement, selon laquelle ils se remettent jour
tousensembles, auxtapessuccessives d'un temps discret, l'autre,
plus raliste, selon laquelle ces remises jour
sontasynchrones,chaquetapedummetempsdiscretprescritparl'horlogebiologique,ilyaremise
jour d'un neurone tir au hasard. Ainsi le concept de stabilit
introduit a tout voir avec
lecaractretemporeldel'activitcognitive.
Enfin,auchapitre5dutrait,Amitreconnatquelemodletelqu'ill'ajusqu'icienvisaggaliselapenselammoire,etpardessuslemarchdesvnementssinguliersdemmorisation:ilestinvitable,ditilensubstance,detenterdemodliser
lapensecommeunprocessussquentiel,c'estdirecommeuneprocessusdeprocessus,l'enchanementselonunehorloged'unitlongued'vnements
qui sont euxmmes des droulements, scands par une unit plus brve.
Amitmontrealorsqu'unsystmepeuttransiterd'unattracteurunautre,etceunnombrefinidefois,conditionqu'onajoutelamatricedesforcesdeconnexionsuntermeantisymtriqueadquat,quiseraenfaitenpartiecalculd'aprs
lesactivationsdusystmetunitsdetempsauparavant(lesystmedynamiqueest
telque l'tatdusystme l'instant
t+1n'estpasseulementrgiparsontatl'instantt,maisaussiparsontatl'instanttt):dansdetellesconditionslepassaged'unattracteursonsuccesseurdansunelistefinied'attracteursneseferapasd'uninstantfrappparl'horlogemicroscopiquedusystmeneurall'autre,maistouteslestunitsdecetemps,
lenteurquipermetausystmed'actualiservritablementlesreprsentationsassociesauxattracteurs.
Ilestdoncpossible,dansunecertainemesure,deressaisirlesmodlisationsdynamiquescommegouvernes
par une ide rythmique de la pense : le fait de la pense est rapport
unediffrenciationqualitativedutemps,l'mergencedeplusieurschellesdetemps.Nosremarquesaccrditentelles
pour autant l'hypothse plus prcise avance plus haut, celle d'une
fonction
transcendantaleesthtiquedutemps?Nousvoyonsuncertainnombrederaisonsderpondreparlangative,quenousexplicitonsdansunenouvellesriederemarques.
1) La modlisation par attracteurs, par principe, ne met pas
seulement en jeu la
dimensiontemporelle:iln'yauraitpasd'attracteursilesystmedynamiqueconsidrn'avaitpasunespacesubstrat.
Cet espace substrat est livr quasiment tout fait au connexionnisme
par l'analogiebiologique(c'est l'espacedestatsdurseaudeneurones),
ilestpostulcommevaritde
ladynamiqueinterneparlepointdevuethomien(etc'estalorsunhypercubecontinudeHilbert
[0, 1]N). La cohrence de la modlisation de la pense comme
modulation rythmique
plusieurschellesdutempssupposeunespaced'actualisationpourcettemodulation.
2) Cette premire remarque rattache le problme de la perspective
temporelle sur la
pensecognitionlafoisdevieillesetdercentesdiscussions.D'unct,onsaitqueKantregardaitunepsychologiemathmatisecommeimpossibleprcismentcausedel'unidimensionnalitdutempslaquelleelleseraitncessairementconfine:
il luiparaissait
impossiblequelesconceptscatgoriauxobjectivantsdontcettescienceauraitbesoinpussentrecevoirunsensempiriquesurlascnedutemps,pourcettesimpleraisonqu'iln'yapasdetellescne,
letempsesttoujoursabsent,lerassemblementdutempsavecluimmeesttoujoursdmentiparlepassagedutemps.certainsgards,
lamodlisationdynamique reconnat ladifficultaumomentmmeoelle
lavainc, puisqu'elle ajoute au temps un espace d'actualisation qui
permet
l'identificationconceptuelleetschmaticomathmatiqued'unenotioncommecelled'attracteur.D'unautrect,on
sait que certains spcialistes modernes, adeptes d'un dynamicisme
extrme, prnent
lerenoncementtouteidedestockagesurlequelleprocessusdelapenseprendraitappui(nouspensonsauxidesdeRosenfield,dontClanceysefaitl'interprte):leurvue,dontonnevoitpasquellesortedemodleellepourraitconduire,rcusetelleaussil'ided'unespaced'actualisation,oubienactualisationetstockagesontilslesnomsdedeuxfonctionsabsolumentdistinctes?Ilnoussemblequ'ilyaenl'espceunthmederflexiond'unintrtnonngligeable.
3) Il fauten toutcasapportercetterestrictionque
lesauteursdesmodlisationsconnexionnistesn'ont paseuxmmesargument
leur recours au continuen termesd'une rfrenceau temps
:c'estlepointsurlequelnousavonsinsistdansSalanskis[1992].
4)Endernireanalyse,unedifficultmajeuresubsiste:mmetellequenouslaprsentonsici,la
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science cognitive ne nous semble toujours pas unemcanique
temporelle des phnomnes decognition. La science cognitive n'est pas
mcanique parce que son objet, la pense, n'est
paspassivementunesynthsedesphnomnesdecognitionauxquels il renvoie,
le tempsn'estpassimplement son cadre, il est sa substance, la pense
est l'animationmme de ce dont elle
estconstruitecommelasynthse.Nousretrouvonsici,nonsansrencontrerunedifficultprofondeleformuler,
lavieillepinephilosophiqueconcernant l'meet le temps :
l'men'estpasseulementdans le temps, elle temporalise. J.T. Desanti
a trs profondment expliqu, dans son livre surHusserl, quel point
celuici avait major cette difficult dans son analyse mticuleuse de
laconstitutiondutemps,pralabletouteslesconstitutions:autantdirequel'aporiedeladuplicitdutempspersistejusqu'nosjours,etchezcetauteurmmeenquil'onpeutvoirunprcurseurdesrecherchescognitives.
Maispourcequiregardecetarticle,leprincipalproblmeestceluidelamaniredontl'entredutempsdanslathoriecognitiveaffecteleniveaulinguistiqueproprementdit:lathoriedynamiquedelapensecognitionintroduitellelecontinudanslelinguistique,et,sioui,dequellemanire?
On peut d'abord observer que le temps des modles dynamiques
n'apporte pas de manirevidente lacontrainteducontinu :
lesmodles,pour leurmajeurepartie, fontusaged'un
tempsdiscret.ChezAmit,ilyamme,nousl'avonsvu,unerflexionenrapportavecladiscrtiondecetempsquis'autorisedelavraisemblancebiologique(l'ided'uncycledebasedusystmecognitifest
biologiquement plausible, celle du fonctionnement synchrone du
rseau neural ne l'est pas).Une telle discussion du modle tmoigne du
caractre profondment non transcendantal
del'invocationducontinuparleconnexionnisme.Restequel'onpeutnanmoinsallguerqueThometGrossberg
font appel un temps continu (condition ncessaire ce qu'on ait de
vritablesquationsdiffrentielles,devritablessystmesdynamiquesausensclassiqueduterme).
Biensr,onpourraitessayerd'apprcierleretentissementdel'approchedynamicistesurleniveaulinguistique
en regardant de prs les applications linguistiques du
connexionnisme, du type
grammaireharmonique.Ilnoussembleplussimpledecaractriserdeplusloinceretentissement,en
remarquant que le continu en question intervient essentiellement
pour dcrire notremanired'avoir le langagepluttquepourdcrire
lasignification.Parexemple,Smolenskynoncequeleconnexionnisme est
mieux mme d'expliquer le fait qu'un enfant apprenant les formes
deconjugaisondesverbessauradansunpremiertempsdesverbesirrguliers,puis,ayantacquislarglemajoritairedelasuffixationpared(enanglais)aligneradefaonerronelesverbesdontilconnaissait
lesformessurcepatrondansunsecondtemps,avantd'arriverlamatrisenormaledelachose.Pourlgitimantel'gardduconnexionnisme,etpourintressanteparellemmequecettevuesoit,ellen'estpasproprementparlerunelucidationdusenslinguistique.
Le continu perceptif demeurait extrieur au champ symbolique de
la langue pour des
raisonsessentielles,entantquecontinudecequifaitfacelalangue,decequoiellerfre.Lecontinudynamiquedemeureenunsensextrieuraummedegr,danslamesureoilaffectel'intrieurdenotrepossessiondusensoudelaperformancedesamobilisation,desonactualisation,etnonpasleplanmmeolesenssemanifeste,leplanlinguistique.Cependant,commedanslepremiercas,nousdevonsrserverlapossibilitd'uneanalysepurementlinguistiqueol'ontudieraitcequidanslamanifestationdusensseproduiraitcommehomologuel'vnementretracparlathoriedynamique
: il s'agirait en l'occurrence d'un second niveau du schmatisme
linguistique, enempruntant toujours Kant l'acception du mot
schmatisme, non plus le schmatisme au grduquel les expressions
linguistiques projettent des configurations dans le continu
externe, maiscelui au gr duquel elles enveloppent et accomplissent
des figures temporelles qui auront selontoute probabilit quelque
chose voir avec celles qui prsident l'activit cognitive portant
lamanifestationcesexpressions.
Nousavonsentendu, ilya longtemps,JeanPetitotgloser
lesensdusmmehainamoration
entermesdelagomtrieducuspetduconflitdesactantshaineetamour.Cetteglose,noussembletil,
avait bien la prtention de rvler un tel schmatisme temporel, elle
illustre en premireapproximation l'hypothse que nous venons de
faire. Ne subsistetil pas nanmoins un niveaustrictement
linguistique du sens de hainamoration par rapport auquel une telle
glose n'est pas
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ncessaire?Etlesensnerestetilpasd'unecertainemanireindemneducontinummedanscecasolecontinusaitsibienluiconvenir?
Detellesmisesaupointetlaformulationdetellesquestionsdsignentlelieuopourraitsejoueruneallianceessentielle
entre continuet linguistique : celui de lamanife
stationdusens.Nousyvenonsbrivementmaintenant.
1.3.Uncontinudusens?
Il semble possible de faire l'hypothse radicale qu'il y aurait
une dimension propre du
sens,absolumentdistinctedansleprincipedeladimensiondel'espaceoucelledutempsparexemple,etqui
devrait tre reconnue comme en droit ouverte une diversit continue
de degrs
oud'instanciations.Leprincipalargumentenfaveurdecettehypothseseraitlapriseencomptedesnombreusesfaonsdontlalangueparvientmodulerunesignification,avecunetellediversitdemoyens,dontcertainsseprtentlaritration,qu'onesttentdeconclurequetoutesignificationserfreunevariationcontinue.NousavonsentenduBernardVictorrisoutenirunepositiondecetype.Leproblmeposparunetellethsenoussembleessentiellementceluidelaprimitivitdeschellesdusens.
RonaldLangacker,parexemple,affirmeque touteprdication
renvoieundomaineausein duquel elle dlimite un profil , cette
opration tant pluttmise en scne sur unmodetopologicogomtrique
voquant pour nous le continu que sur lemode discret d'usage
enlinguistique. Cependant, il concde d'entre de jeu que le domaine
spatial
resteparadigmatique,entellesortequ'ilsemblequetoutcaractrecontinudesmultiplesdimensionsdusensseraittoutdemmehritducontinuspatial.
Danssonproposde1990,BernardVictorri rencontrait
unproblmesimilaire lorsqu'il faisait tatd'une capacit sise au plan
de la comptence linguistique de discerner les
diffrenceslmentairesdanslesens:laquestionsepose,parrapportchaqueexemplequ'onpeutprendre,siladiffrencen'estpastoujoursd'abordpensedansunregistrespatialconnot.
Ilnoussemblequepourvaluerdemaniresatisfaisantel'hypothsed'uncontinudusens,ilfautd'abord
claircir ce qu'il en est du propre phnomnologique de l'espace, et
de la
relationqu'entretientcepropreavecl'espacecognitifd'unepart,l'espacemathmatiqued'autrepart:nousyvenonsdanslasecondepartiedel'article.
Cependant,ilyauneautrefaondercuserl'imagefiniedusens:ductlittrairepluttqueductphnomnologique.Onneprtendrapascettefoisdirectementquelesenss'inscriraittoujoursdans
un continuum, mais plus simplement que la complexit smantique, la
richesse de laressource langagireexcdesans l'ombred'undoute
toutemesure finie.Cette
thseellemmenoussembleavoirquelquesmodalitsd'inscriptionprivilgiesdanslechamplinguistique:
D'unepart,austrictplande lasignification
intralinguistique,onpeutallguer lancessitd'enappeler la
totalitencyclopdiquedusavoirpour
rendreraisondumoindrevnementdesignification.TelleestdansunecertainemesurelapositiondeLangackerdansLangacker[1987],telle
est galement la position de Rastier dans Rastier [1987] : sur ce
point, il semble que smantiquecognitiveet smantique interprtative
convergentnaturellement, l'unecommel'autre refusant le gnrativisme
finitaire qui tait l'orientation tendancielle de l'poque
logicostructuraliste.
D'autrepart,onpeutinvoquerlavariabilitpragmatiqueinfiniedusensunetelledmarchen'affectera
le plan linguistique proprement dit d'un caractre d'infinitude que
si le
registrepragmatiqueestrintgraulinguistique.Or,telleestjustementlathsequeLangackeretRastier,
nouveau noncent de conserve dans leurs deux traits de 1987 : chez
Langacker, chaquesituation de discours est comprise comme occasion
de sanction d'une conceptualisationsingulire(otout
l'lmentpragmatiquefigure)paruneunit,soituneconceptualisationconventionnelle.Etcerapportdesanction,souslenomplusgnralderapportdecatgorisation,n'est
pas autre chose que le rapport fondamental constitutif du rseau de
la grammaire
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cognitive.ChezRastier, lanotiondesmeaffrent
rapatriedansl'enceintede lasmantiquedesdimensions de la
communication gnralement vues comme relevant de la pragmatique.
L'uncommel'autredecesauteurssouligne le
faitqu'untelpointdevuepermetd'intgrer lanovationsmantiquedans
lechampdela linguistique,et
lapriseenconsidrationd'untelenjeumontrel'videnceleurperspectiveinfinitairesurlelangage.
Celadit,onpeutprolongercequiprcdeparuneremarquephilosophiquegnrale:quecesoitductde
larfrence l'encyclopdieouductde larfrence
l'entourpragmatique(pourparlercommeRastier),laperspectiveinfinitisantesurlelangagepasseaufondessentiellementparl'ouverturedelasituation,enprenantcettefoislestermesdansleuracceptionphnomnologique.Lepointimportantn'estpastantlaquantitd'encyclopdieeffectivementaccumule,nilapluralitrpertorie
des circonstances d'nonciation, mais le fait que ces ensembles
sontessentiellementouverts,quelelangageestprofondmentrelatifunesituationochaquefois,sa
frontire se dplace, et ce sans qu'aucun horizon fini ne contienne
par avance la porte dudplacement. Si l'on veut, l'encyclopdie est
la situation comme pass, sdimentation qui
nousdpasse(labyrinthique),lacirconstanceicietmaintenantestlasituationcommefuturquisesaisitdenous(seprsente).Leproblmequiseposeestalors:queltypedediscoursestiladquatcettesorted'ouverture,d'infinitisationparlasituation?
Enprincipe, iln'estpasdifficilede rpondre,aumoinssi
l'onestphilosophe,ouattentifcequivient de la philosophie :
l'ouverture du sens par la situation est le thme, l'affaire
directrice
del'hermneutique.L'hermneutiqueestcettemthodeoucetteattitudequiviendraitlaplacedelamthodescientifiquedslorsqu'ils'agitdecomprendrelesenspluttquedel'expliquer(Dilthey).Maiscomprendren'estpasautrechosequerenvoyerlasituation,sonouverture,sonexcssurlarductionfinie,qu'ellesoitrductionaudjdposourductiondudjdpos(Heidegger,Gadamer).FranoisRastier,lafindesaSmantiqueinterprtative,rencontretoutnaturellementl'instance
de l'hermneutique : l'art de la cartographie des isotopies, ds lors
que le plan
dulinguistiqueatgnralisetlargicommel'avoulusonlivredepuisledbut,semblenepouvoirtre
qu'unemodalit ou une assomption nouvelle de l'hermneutique.Mais la
difficult est
que,jusqu'preuveducontraire,l'hermneutiqueestenalternativelascience,etRastierdsiretoutde
mme, au moins dans l'crit de 1987, une thorisation du linguistique,
autre chose qu'unverstehenlaDiltheyHeidegger.
notreconnaissance,RonaldLangackernevoitpascettedifficult.Onserait
tentdedirequeceluici pense simplement qu'il y a une
sciencedescriptive de tout ce qu'il met en jeu dans
lagrammairecognitive(illeditenproprestermeslorsqu'ilnonceleprogrammed'unedescriptiondenos
conceptualisations, rptant la conviction qui fut celle deHusserl
audbut du sicle).Nousavonscependantaumoinsun indiceque
leproblmeseposedans lecadrede lagrammairecognitive , cet indice
ayant d'autant plus de valeur nos yeux qu'il est en mme temps
unemanifestationdelaprofondeuretl'originalitdutravaildeLangacker:leprincipemthodologiquervolutionnaire
de la nonproductivit des schmasrgles, le principe selon lequel les
formesuniversellessontstockescommeunitsde lagrammairecognitiveavec
les formesparticuliresqui les instancient, n'est pas sans relation
avec l'lment hermneutique : le simple fait quel'universel cesse
ainsi d'tre le chemin contraignant vers le particulier ne donnetil
pas auparticulier, et la limite au singulier, un rle tel dans la
thorie que celleci est tout lemoinsrflexive au sens kantien, et
peuttremme hermneutique ?Car un des propres cruciaux
del'hermneutique,c'estquel'universelquinecessepasd'ytreditl'esttoujourscommeuniverseldesonsingulier(decequisedonnedanslasituation).
Nous conclurons par une remarque simple et gnrale sur le rapport
que peut entretenir
ceproblmedel'infinitisationdusensavecceluiquenousavionsd'abordprisenconsidration,celuide
lapertinenced'uncontinudusens. Ilyauneconnexion
technique,bienconnue,entre leproblme de l'infini et celui du
continu, regards comme problmes mathmatiques de typefondationnel :
toutes les synthses modernes du continu empruntent un concept de
l'infini
laressourcedcisivepourlaborercequ'onpourraitappelerl'effetcontinu.Onseraitdonctentdevoirunrapport,peuttremmeunpassagepossibled'unequestionl'autre.
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Nousvoudrionsnanmoinspluttsoulignercequisparelesdeuxproblmes,etlesraisonspourlesquellesnousn'attendonspasdulientechniqueentrecontinuetinfiniqu'ildlivrejamaisquelquechosecommeunpassagepositifde
l'lucidationducaractrehermneutiquede
l'usagedusenslinguistiquelaqualificationconvaincanted'uncontinuintrinsquedusens.Leproblmesesitue,croyonsnous,exactementaupointsuivant:l'usagedusensestrenduinfinitaireparl'ouverturede
la situation, laquelle relveessentiellementdusingulier en revanche,
l'idedu
continudusens,tellequenousl'avonsprsenteplushaut,nepeuttrequel'ideselonlaquellel'effetdesignificationestoriginairementsoumisunmultiplemanifestantunemodalitducontinu.Deplus,le
continu du sens devrait tre actuel (pour accueillir toutes les
modulations), alors que
l'infinihermneutiquedusensestessentiellementpotentiel.Ilyadonctouteslesraisonsdesparerlesdeuxproblmes.
2.Espacecognitif,espacetranscendantal
Commenous l'avonsexpliquaudbutde l'article,
nousabordonsmaintenant laquestionde larelationdu continuavec
ledomaine cognitif engnral et le plan linguistiqueenparticulier
pourainsi diredansunsens inverse decelui qui at suivi jusqu'ici :
au lieud'tudierquel titre
lecontinu,parletruchementdel'approchecognitivedelalangue,venaitconcernerlelinguistique,onvapluttsedemanderquelleinformationcognitivesurlecontinuapportelalanguenaturelle.
Cette question, en fait, se prcise comme question de l'espace
donn avec la langue, de cettespatialitque
rvleetprsupposenotreusagede la languenaturelle.Mais ilest
impossibledetraiter cette question sans confronter l'espace
cognitif donn par la langue avec l'espacegomtrique.
Ce problme de comparaison de la prcomprhension de l'espace avec
sa comprhension scientifique n'est, notre avis, luimme pas abord
d'une manire satisfaisante
lorsqu'onmconnatladiffrencedeprincipequiexisteentrecequenousappelonsspatialitcognitive,c'estdire
prcomprhension de l'espace en tant que psychologiquement atteste,
et ce qu'on peutappelerspatialit transcendantale, que nous allons
dcrire comme une prcomprhension
d'unautretype.Dansunecertainemesure,c'estl'laborationdecettedistinctionquenousconsacronsles
rflexions qui viennent, et donc nous devons avouer qu'elle ne va
pas de soi.Mais il n'y aaucune chance de saisir cette distinction
si on ne se jette pas d'abord dans une premirecomprhension.
2.1.Positionduproblme
Ce que nous appelons spatialit cognitive s'identifie donc en
principe une spatialit cble, laquelle ne revient prjudiciellement
aucune valeur de vrit : il s'agit d'une comprhension
del'espacefactice,ncessairementmiseenvidenceparunetudeempirique(tablissantdes
faitspsychologiques, ventuellement par unbiais neurophysiologique,
ethnologiqueou
sociologique).Cettespatialitestenquelquesorteuneconceptioninformuledel'espace,desrelationsspatialesentreleschoses,quiquipefactuellementlesujethumain,etquifaitpartielalimitedecedontildoits'manciperpourproduireunethoriescientifiquedel'espace,ayantvaleurdirectricepouruneinvestigationgnraledel'tantnaturel.
Carnap,audbutdusiclemaisiln'taitpasseul,ilsemblequeHelmholtzsoitlepredecetteattitude
qui fut en son temps prpondrante dans l'aire allemande a jug que
l'espacetranscendantaldontparlaitKantdans laCritiquede
laraisonpuretaitunespacecognitif.DansCarnap[1924],ilaargumentcontreKantens'efforantdemontrerquel'onnetrouvaitpas,dansuneanalysepsychologiquehonntedel'homme,lesprincipesdelagomtrieeuclidienne.
Cette interprtationdusensde l'esthtique
transcendantalekantiennenenousparatnanmoinspas soutenable : les
nokantiens de l'cole deMarburg, lamme poque, ont dfendu
uneinterprtationplusplausibleenaffirmantquel'espaceetletempsdeKant,lesformesaprioridela
sensibilit , devaient tre compris comme cela mme qui commandait la
thorisation
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scientifique de la nature. Seulement, ils en ont infr tort selon
nous que ces formesa priorin'taient pas du tout des intuitions,
mais de pures constructions de la pense au
sensessentiellementactifquepossdecemotchezKant.quoiHeideggerarponduens'efforantdesauver
lecaractre intuitifde
l'intuitionkantienne,maisenabandonnantcompltement le
liendecetteintuitionaveclascience:pourlui,l'intuitionpuredel'espacen'estpluscesurquoi,traversunegomtriemathmatise,serglelascience.
Nous avons tent de reprendre toute cette vieille discussion pour
arriver une conception dumessagekantienquinoussemble
laseulecompatible tout la foisavec
lapositiondediscoursphilosophique de Kant, et avec ses intentions
videntes (du type : dvoiler le
dispositifmtaphysiquerendantpossiblelaphysiquedeNewton).Notreconclusionestensubstancequecequi
s'appelle forme a priori espace, chez Kant, est le contenu d'une
exprience de pense,incontournable comme contenu ds lors que nous
voulons accueillir un divers externe qui
seprsentenous:lacontrainteselonlaquellelediversdoittrespatialisestmtaphysique,elleestrencontre
dans la tentative de nous reprsenter ce que signifie pour nous la
prsentation d'undivers externe. L'ide de Kant est que dans cet
effort pour nous reprsenter a priori le
diversexterne,nousfaisonsunpeuplusquerencontrerl'espaceluimmecommecadre,nousanticiponsunestructure
de cet espace : cela fait question pour nous de savoir quelle est
la structure
del'espace,etnoussommesportsledciderdanslestermesd'unegomtrie.Ilyaexprience,parcequetoutsedvoiledansunetentativedereprsentationaprioriquiestsitue(elleestcelledequelqu'unquiapartl'aventuredelaphilosophie,lamathmatiqueetlaphysiqueellen'apascourssinousneluiprtonspasnotrenergierflexivepersonnelle).Maisc'estuneexpriencedepense,riendecequiestlgifrnel'estautrementquesurlemodedcisoireresponsabledelapense
au sens actif. Le fait transcendantal est que la science de la
nature ne cesse pas
des'appuyersurlesrsultatsdecetteexpriencedepensemillnaire,quicommencedoncdanslamtaphysiquepourseprolongerdanslamathmatiqueets'acheverdanslaphysique.
Si donc l'on entend la diffrence qu'il y a entre l'ide d'un
espace cognitif et celle de l'espacetranscendantal
tellequenousl'avonsl'instantspcifie,
leproblmequidevientaussittcentralest de situer l'espace
linguistique par rapport ces deux espaces : s'il est vrai, comme
lesrecherches rcentes de l'cole californienne y insistent, qu'il y
a une prcomprhension del'espacedans la langue et si, deplus,
cetteprcomprhensionest fondamentalepour tout lesystme smantique la
prcomprhension linguistique estelle le reflet de l'espace
cognitifpsychocbl, ou estelle l'amorce de la prcomprhension
transcendantale, de l'intuition purekantienne?
Notons bien que ce problme d'assignation ne se pose pas
seulement pour la forme a prioriespace, mais tout aussi bien pour
le systme catgorial : Kant a dgag en fait deux
facteurstranscendantauxparrapportauxquelsselaissecomprendreselonluiladmarchedelascience,etqui
sont d'une part les formes a priori de la sensibilit, d'autre part
les concepts purs
del'entendement,lescatgoriesdesafameusetable.Ausujetdecellesciunediscussiondestructuresimilaire
celle que nous venons de rsumer s'est naturellement leve dans la
traditionphilosophique:silesempiristeslogiques,aupremierchefCarnapquenouscitionstoutl'heure,ontsanctifil'lmentcatgorialcommeinvariantncessairecommandantlaconnaissance,maisenyreconnaissantpurementetsimplementl'expressiondelalogicitdelapenseetdudiscours(avec,
prsente l'esprit, la logique des prdicats du premier ordre comme
modle de cettelogicit),d'autrescommentateurs,sensiblesau faitque
lecanonkantienneconcidaitde
faitpasavecunquelconquecanondelalogiqueformelle,yontvunouveauunepuredonnecognitive,etpar
dessus lemarch ils ont critiqu ce qui leur semblait tre lamthode
suivie par Kant pourl'exhiber : l'analyse de la langue ordinaire.
Dans ce cas au moins, il semblerait qu'on
assimilenaturellementcequereclelalangueaucontenufactice,biopsychologique,del'esprithumain.
Mais, pour ce qui nous concerne, la question est de savoir ce
qu'il en est pour le facteur
esthtiquedanslestermesdeKantqu'estl'espace.Onpeutcommencerparremarquerquecertainsauteursphilosophiques,pourexpliquer
lasignificationde l'intuitionpurede
l'espacechezKant,fontnaturellementappelauxindicesdlivrsparlalangue.
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Heideggerprsenteainsil'intuitiondel'espacedanslestermessuivants:
Lachoseellemmeesticimaintenant,chosetotaledansunecoordinationd'autreschosesquisont
ici, puis la voici l, demain elle aura rapetiss et elle sera lbas,
etc.Or qu'en estil de
lateneurquidditative,plushautvoque,decettechose?Appartientilcette
teneurque
lachosegisehicetnuncctdecetteponge?Le"ici"etle"ctde"ensontilsdesdterminationsdeteneurraletoutcommelacouleur?Maisle"ici"et
le"dessous",toutcommele"maintenant"nesontmanifestementpasdonnsparunorganedessens,etpourtant
j'noncequandmmecesdterminationsdelachoseellemme.Heidegger[1928],p.111.
Plusloindanslammepageilajoute:
Lesrapportsdejuxtaposition,d'avantaprs,depostpositionnesontpasdonnsparlesorganesdes
sens, et pourtant lamatire du phnomne est ordonne certes chaque
fois de faondiffrenteetchangeantedanscesrapports ajoutons :mmesi
lesdata
noustaientdonnssansrgleetsansordre,cedsordrenelaisseraitpasdeprsupposerquelquechosequin'auraitpassontourlecaractredesdata:unrapportpossibledejuxtapositionetdepostposition.
Nouspouvonsdonc retenir provisoirementquemmesi
l'intuitionpuren'estnullementgaleunestructuredposedans le langage,
l'analysedeHeideggerdgagedeslments langagiersqui en fonctionnent
comme les indices : les dictiques (ici, l, lbas, maintenant), et
lesprpositionsspatialisantesfondamentales(ctde).coutonsmaintenantJeanFranoisLyotard,analysantdansLeDiffrendcommentchezKant
laphrasede l'intuition recouvre laphrasede lasensation:
Lafonctionrfrentiellequiapparatalorsrsultedelacapacitqu'alesujet,capacitactive,demontrerlemomentetlelieudecequiparsamatirefaitl'effet(Wirkung)oul'impressionsensiblesur
ledestinatairedelapremirephrase.Cequenousappelonslacapacitostensive:C'est
lbas, C'tait tout l'heure. Cette deuxime phrase qui applique les
marqueurs dictiques
surl'impressionprocureparlasensations'appelledanslelexiquekantienintuition.Lyotard[1985],p.97.
Cettefois,l'intuitionkantienneestgaliseavecunephraseimposantlesmarqueursdictiques.Etplus
loin,dansle
livre,plusradicalementencore,exposantcequ'ilenjugeetnonpluscequeKantendit,Lyotardassumeuneinterprtationlangagiredel'espaceetdutemps:
120.Iln'yauraitpasd'espaceetdetempsindpendammentd'unephrase.
121.Sil'ondemande:d'otenezvousqu'ilyaitdel'espaceetdutempscommesortesdesituation?onpeutrpondre:desphrasescomme:Lamarquisesortitcinqheures,Iltaitarriv,Vat'en,Couch!Dj?(...)L'espaceetletempssontdesintitulsgroupantleseffetssituationnelsproduitsdans
les univers de phrases par des expressions comme : en arrire, bien
plus tard, juste
audessous,naquit,audbut,etc.Lyotard[1985],p.116.
Nous aurions, donc, quelques raisons de juger que la philosophie
est prte voir le
facteurtranscendantalkantienespacecommegalunecertainestructurationdu
langage,attesteparlesdictiquesetpar
lesprpositions.Mfionsnoustoutdemme:
lesderniersnoncscitsdeLyotardfontpartied'uneorientationgnraledesonlivrequel'onpourraitqualifierd'empiriste.EtHeidegger,quant
lui,prendbiensoin,en findecompte,dedmarquer l'intuitionpurede
toutediscursivit,
cequiestconformeauproposkantien.Restequecebrefvoyagedansdeux
textesnousfaitpressentirqu'ilnevapastresimpledesparersurleterraindelalangueespacecognitifetespacetranscendantal.
2.2.Lepointdevuecognitif:Talmy,Poincar
Changeonsdetypederfrence,maintenant,etvenonsencequeditTalmy.DansTalmy[1983],ilanalyseendtaillesconditionsd'utilisationdesprpositionsenanglais.Ilmetenvidencelefaitque
la localisationpar le langage faitgnralement intervenirunobjetde
rfrence (et,souvent,
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deux tels objets), en regard duquel la localisation s'accomplit.
Il nonce la thse que
chaqueprpositionapporteunschmeentermesduquelconstruiredanslalanguelaspatialitdesscnes.L'application
de ces schmes ne va pas sans idalisation (lorsque je profre from
Mars,j'idaliselaplanteMarscommeunpointpourappliquerleschmedefrom)nisansabstraction(dans
lemmeexemple, je faisabstractionde toutcequiest irrelevantpourmon
idalisation, lamatire dont la plante est constitue, son dfaut de
sphricit, etc.). Ce genre
d'observation,combineavecquelquesautres,convergeasseznaturellementversl'ideques'ilyacommeunegomtrie
dpose dans la langue, elle serait plutt une topologie gnrale qu'une
gomtriemtrique:
This sort of further abstraction is characteristic of the
spatial relations defined within themathematical field of topology.
It is metric spaces, such as classical Euclidean geometry,
thatobservedistinctionsofshape,size,angleanddistance.Distinctionsofthissortaremostlyindicatedinlanguagesbyfulllexicalelementse.g.square,straight,equal,plusthenumerals.Butatthefinestructural
level of conceptual organization, language shows greater affinity
with topology.
(Onemightfurtherpostulatethatitwasthislevelanditscounterpartsinothercognitivesystemsthatgaverisetointuitionsfromwhichthefieldoftopologywasdeveloped).Talmy[1983],p.262.
Ilestjustededirequecen'estpasseulementdanslecasdel'espacequeTalmyprtend,partirde
son analyse linguistique, dvoiler un niveau objectif de
prcomprhension chez le
sujethumain.DanssonarticledesynthseTheRelationofGrammartoCognition,iltudiecequ'ilappelle
les constituantsdeclasses fermes de la langue, c'estdire, si
nouscomprenonsbien,ceuxquin'appartiennentpasuneclasseindfinimentsusceptibled'treenrichie(ladiffrencedesclassesprototypiquementouvertesqueformentlesnomsetdesverbes),maisquis'agrgentenunebatteriefiniedetermesgrammaticauxstructurantspourlesens:
Thepurportofthepresentpaperisthatthissetofgrammmaticallyspecifiednotionscollectivelyconstitutes
the fundamental conceptual structuring of language. That is, this
crosslinguisticallyselected set of grammatically specified concepts
provides the basic schematic framework
forconceptualorganizationwithinthecognitivedomainoflanguage.Talmy[s.d.],p.166.
Unetelleanalysesemblejusqu'uncertainpointextrmementaffinecellequiconduitKantsatable
des catgories : l aussi, les concepts autour desquels s'organise la
construction del'exprience et donc de la nature sont recherchs
partir d'une analyse des modes desynthse de reprsentations
fondamentaux pour l'exercice humain du jugement.
Or,qu'accomplissent les lments de classes fermes de Talmy, sinon
des synthses entre
termesporteursdecontenu(Together,thegrammaticalelementsofasentencedeterminethemajorityofthestructureofthecognitiverepresentation,whilethelexicalelementscontribuethemajorityofitscontent.Talmy[s.d.],p.165)?ChezKant,leschosesnesontpasditesentermesdel'oppositiongrammaire/lexique,onn'estpasouvertementdansl'lmentlinguistique(bienquelemotdiscursifait
une charge non ngligeable dans le texte kantien), mais il est
impossible de nier la fortehomologie des approches (que Talmy
dtermine l'enjeu comme celui de la dtermination de lastructure de
la reprsentation cognitive est galement un lment d'homologie
important :rappelons que Kant, pour dresser la table des jugements,
envisage ces derniers en tant
queporteursd'uncontenudeconnaissance).Toutnousengagedonctenterdecomprendrejusqu'quelpointilpeutyvoiridentit,recoupementoubienquelledisparitinsouponnedemeureentrel'analyselinguistiquecognitiveetl'enqutetranscendantale:mais,rappelonsle,c'est,pourcequiconcernecetarticle,danslecasduthmespatialquenousvoulonstraitercettequestion(cequiprcdetaitdoncunedigression).
Revenonsdoncau casde l'espace. Il peut certes paratre singulier
que la gomtrie de la
prcomprhensiondgageparTalmysoitentatdeprtendreuneplusgrandevaleurscientifiqueque
la gomtrie pour l'ternit associe l'esthtique transcendantale
kantienne : la
topologiegnralepossdel'garddelagomtrieeuclidiennel'avantagedelamodernitetduprestige.Ilesttroublantdeconstaterquel'hypothsed'uneprcomprhensiontopologiqueestdjmiseenavant
par Poincar, partir d'un point de vue qui en l'occurrence ne doit
rien l'analyse dulangage. Dans Poincar [1912], en effet, l'auteur
affirme que l'analysis situs est la vritable
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gomtrie intuitive, parce qu'elle nonce ce qui vaut en dpit de
l'imperfection de nosreprsentationsmatriellesdesfigures:
Onaditsouventquelagomtrieestl'artdebienraisonnersurdesfiguresmalfaites.(...)Maisqu'estcequ'unefiguremalfaite?C'estcellequepeutexcuterledessinateurmaladroitdontnousparlionstoutl'heureilaltrelesproportionsplusoumoinsgrossirementseslignesdroitesontdeszigzags
inquitantssescerclesprsententdesbossesdisgracieuses toutcelanefait
rien,celanetroubleranullementlegomtre,celanel'empcherapasdebienraisonner.
Mais il ne faut pas que l'artiste inexpriment reprsente une
courbe ferme par une courbeouverte, trois
lignesquisecoupentenunmmepointpar trois
lignesquin'auraientaucunpointcommun,unesurfacetroueparunesurfacesanstrou.Alorsonnepourraitplusseservirdesafigureetleraisonnementdeviendraitimpossible.(...)
Cetteobservation trssimplenousmontre levritable rlede
l'intuitiongomtrique
c'estpourfavorisercetteintuitionquelegomtreabesoindedessinerdesfigures,outoutaumoinsdeseles
reprsentermentalement.Or, s'il
faitbonmarchdespropritsmtriquesouprojectivesdeces figures, s'il
s'attache seulement leurs proprits purement qualitatives, c'est que
c'est lseulementquel'intuitiongomtriqueintervientvritablement.
Danslasuitedecetarticlefameux,onlesait,Poincardiscutedelatridimensionnalitdel'espacecommede
laproprit fondamentaledeceluicidans laperspectiveauthentiquement
intuitivedel'analysis situs, et formule une conception de l'origine
de cette tridimensionnalit hautementcognitive en termes modernes,
puisque tout se ramne l'examen des changements externes(souponns
d'aprs le tmoignage des suites de sensations) que nous savons
corriger par unchangementinterne(ungestemoteur).
L'argumentationdePoincaraquelquechoseencommunaveccelledeTalmy:elleserfreaufait
anthropologique d'une indiffrence aux relations mtriques. Mais le
fait anthropologique
deTalmyrsidedansl'usagenatureldelalangue,celuidePoincardansl'habitusgomtrique.
Unepremireractionargumentativeparrapportcequ'noncentdoncdemanireconvergenteTalmy
et Poincar serait de souligner la diffrence essentielle qui existe
entre l'identification del'analysis situs comme oubli de
dterminations (mtriques, projectives, jusqu' un certain
pointmorphologiques) et sa fondation comme discoursmathmatique. Le
thme propre de
l'analysissitusentantquediscoursmathmatique,enfindecompte,estl'tudedesespacestopologiques,desapplicationscontinuesetdelamodificationoudel'invariance,sousl'effetdecesderniresdesproprits
topologiques. Or, on le sait, la dfinition d'un espace topologique
fait intervenir
unensembleactuel(ventuellementinfini)depoints,etunefamilleprivilgiedesousensemblesdel'ensemblesubstrat(soitunobjet,qui,danslaperspectived'unethoriedestypes,estdetype((0)),si0estletypedesindividusdel'ensemblesubstrat).
Autantdireque, lorsqueTalmysuggreque
leniveaudeprcomprhensionspatiale langagirequ'il a dgag gave rise to
intuitions fromwhich the field of topologywas developped ,
sonaffirmationnepeuttreacceptequesousrservequel'onmarqueenmmetempsladiffrencedeperspectiveapporteparlatopologie.Celleciconsiste,commenousl'avonsdit,enpremierlieuenl'inscriptiondudiscoursdanslecadreinfinitairetypaldelathoriedesensembles.Alorsqueleniveau
explor par Talmy ne connat que des objets tendusspatialement
composites et
desrelationsentrecesobjetsexprimespardesprpositions,etquelafonctionderfrentielyestparsuitetoujoursassumeparunobjetprivilgi(pluttqueparquelquechosequin'estpasunobjet,maislasynthseactualisedetouteslesponctualitsidalescouvertesparlesobjets),latopologie
gnrale pense en termes de points et d'ensembles, ainsi que nous
l'avons dit,
etorganiseenfindecomptetoutesapensedelaproximitenfonctiondethsesdeproximitfondamentalesqui
ne sont pas relationnelles, au sens o elle ne mettent pas en
rapport
deuxconfigurationsoudeuxpoints:lathseestdutypeOestuneproximitducadreX(Oestunouvert
de l'espace topologique X), ou, dans une formulation alternative
galement proche
del'intuitionsecondedutopologueVestuneproximitpourlepointx(Vestunvoisinagedex
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i.e. V contient un ouvert dont x est lment), thse relationnelle
mais entre individus de
typesdiffrents(0et(0))etquiexprimeenfaitunenveloppementducadreautourdupointx.
BienquePoincar,encoreune fois, nes'adressepasaummeplande
l'habitusqueTalmy,
lammeobservationpeuttrefaiteausujetdecequ'ilallgue:sil'intrtpratiquedugomtrepourcequi
subsisteduspatial, aprsoubli de lamtrique,de la
structureprojectivepeut fonctionnercomme
indiceendirectiond'unevaleur intuitivede la topologie,celane
faitpasque la
topologiepuissetreenquelquemanireconsidrecommedonneavecsonpointdevuepropreaveccetindice.
Mais cela, Talmy ne l'atil pas d'emble reconnu en disant
simplement que le domaine de
latopologieavaitpeuttretdvelopppartirduniveaudeprcomprhensionqu'ilavaitdgag?Cequinoussemblelerisque,danscettematire,c'estqu'onsefasseuneconceptionhomogneetgntiquedecedveloppement.
2.3. Confrontation de l'espace cognitiflinguistique et de
l'espace transcendantalgomtrique
En fait, ce que nous avons rapidement signal titre de remarques
situant l'originalit de
latopologieparrapportlaspatialisationtalmiennepeuttrereditetaccentuendistinguantleplandelaprcomprhensionlangagireduplandelaquestionmathmaticomtaphysiquedelaspatialit,etenlucidantlafonctionhermneutiqueoprantl'intrieurdechaqueplanaussibiencommed'unplanl'autre.
La prcomprhension langagire de l'espace que Talmy, aprs
d'autres, met en vidence, estorientesur lesobjetset
leursrapports,elleneconnaitgure,cequ'ilsemble,
lecadrespatialcommetel,oulepointcommeindividualitultimeencecadre.Elleestparnaturesmantique.l'appuidecequ'ilavance,etcommeconfirmationdeslimitesdevaliditdesemploisqu'ildtecte,Talmycite
desexemplesd'noncs inacceptablesoumal acceptables (prcdsdu symbole
*),commeIcrawledinthewindow/*intothewindow(Talmy[1983],p.240)attestantque
inpeutrfrerlepassagetrhoughanopeninginanenclosure'swallalorsqueintonelepeutpas.Cegenre
de reprage des limites est tout autre chose que la proposition d'un
ensemble d'axiomesauxquels lesprpositionsde
l'anglaisobiraient,etquiseraientcandidatstreporteurs (sur lemode
implicite)de leursens.Lesapproches tournesvers
l'obtentiond'uneaxiomatique
fontaucontrairepartiedecedontlalinguistiquecognitivesespare.D'ailleurs,lestenantsdel'intelligenceartificielleclassiquesaventbienquelesrelationsspatialesrsistentlatranscriptionparmeaningpostulates.LeprojetdeTalmy,etdeceuxquitravaillentdemaniresimilaire,estfortdiffrent:ils'agit
de saisir descriptivement le contenu smantique des prpositions de
l'anglais enprsupposant la gomtrie euclidienne. L'article que nous
commentons tend vers ce que l'onappellerait techniquementune
interprtationde lagomtriede laprcomprhension
langagiredanslagomtrieeuclidiennebiettridimensionnelle(cetaspectestencoreplusvidentdansuntravail
comme celui d'Annette Herskovits). Ce que nous venons de dire
spcifie le modehermneutique propre aux thoriciens de la
prcomprhension langagire de l'espace.Mais
sinouslesencroyons,etTalmyaussibienqu'AnnetteHerskovits,parexemple,s'enexpliquentassezclairement,
il y a par ailleurs un aspect hermneutique oprant l'intrieur de
cette
prcomprhensionellemme:lechoixdemarquerdanslalangueteltypederelationouconfigurationplutt
que tel autre, ou, similairement, le choix de conceptualiser telle
situation par telle ou telleprposition,enadoptant
telleoutelleperspective, telou
telparcoursdudonn,etc.,estquelquechosequelelocuteurassumechaquefoisdemaniresingulire.Touslesauteursinsistentsurlefait
qu'il y a l une dimension non contrainte, le geste de configuration
se dcide en dernireanalyse par la situation du locuteur (son
engagement, ses intrts, etc.). La stratgie
del'interprtationdessignificationsspatialesordinairesdanslerfrentielneutredelagomtrieeuclidienneserten
findecompteprincipalementcetobjectif : rvler lanonneutralitde
laprcomprhensionlangagireensituation.
De son ct, la gomtrie comme branche de la mathmatique est depuis
l'origine sous
lagouvernedelaquestionQu'estcequel'espace?,etchercheexplicitermathmatiquementce
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qu'elleatoujoursdjcommencdecomprendresonsujet.Cette
longueexpriencetmoignede ce qu'il entre dans la prcomprhension
gomtrique de l'espace la sensibilit au
cadre(l'espace)etaupoint.Onpeutdirequedepuis l'origine, lagomtrie
travaillepartir
ducoupleespacepoint,quiproblmatisedefaonradicaleetexigentelaquestiondelalocalit.LaquestionQu'estceque
l'espace?, laquestionducadre,estparexempledjposedans
laphysiqued'Aristote,et la constructioneuclidienne,on le sait,
commenceennonant la
fondamentalitetl'abstractiondupoint.Cenesontdoncpaslesobjetsetleursrelationsquioccupentledevantdelascne
: la gomtrie commence avec l'exprience de pense qui vide l'espace,
exprience
depensequiestlammechosequel'assomptiondelaquestionQu'estcequel'espace?,ainsiqueKant
l'a restitudans l'esthtique
transcendantale.Deplus,pourcettegomtrieauxprisesavec le couple
espacepoint alors mme qu'elle n'entre pas encore dans une
vuecompositionnelle,ensemblistedel'espacel'infinietlecontinufontd'emblequestion.Aujourd'hui,cet
intrt pour l'espace, le point, l'infini, le continudonne lieu des
formulationsdans le cadreensembliste,et il apparat
quebeaucoupdecequia trait l'infinitou la continuitde
l'espacedemande tre exprim au second ordre , fait appel une
perspective o l'ensemble despartiesestcoposavec l'ensemble
luimme.Sur leplantechnique,maintenant,
l'hermneutiquegomtrique,nedisposantpasd'unlieuexternesurlequelprojetercequ'ellepressent,nepeutpasrecourirlamthodesmantiquecommelalinguistiquecognitive,illuiestimpossibled'interprtercequ'elleviseetpensedansunlangageplusricheprexistant.C'estcequiexpliquequ'l'poquemoderne,
lavoiehermneutiqueprdominantesoit lavoieaxiomatique:
lesensquej'anticipe,
jel'exprimeencrivantlesprescriptionsgouvernantletyped'emploiquisedessinepartirdelui,soitenspcifiantunelisted'axiomes,enlaquelles'impliciteralesensgomtrique.Seuldonclergimesyntaxiqueestpropicel'accomplissementdel'hermneutiquegomtrique.
Resteessayerdecomprendrelelienentrelesdeuxniveaux.Nouslevoyonscommedouble:
D'une part, le phnomne de la prcomprhension a certainement sa
source dans lelangage, et plus prcisment dans l'habitus d'un sujet
dont la situation est
fondamentalementdtermineentermeslangagiers(lesujethumain:nouscontresignonslesthsesfondamentalesde
l'anthropologie hermneutique explicites par Gadamer). Donc la
prcomprhensiongomtrique de l'espace ne peut pas tre radicalement
trangre sa
prcomprhensionordinairelangagire:sansdoutel'exprienceprimitive,fondamentale,selonlaquellenotrelangage
structure l'espace , et ne le fait qu'au gr d'une dcision de la
scne dans la
situationhermneutiquedel'treaumonde,estelleaufonddelaperspectivegomtriqueellemme,ausensoc'estdanscetteexprienceprimitivequesemontre
l'expriencedepenseconsistantviderl'espace,quesurgit,donc,laquestionQu'estcequel'espace?(end'autrestermes,cettequestion
questionne dj dans l'habitus indtermin qui configure la scne de
l'tant, chaquefois). Le caractrenonprescrit de l'organisationde la
scne fait signe vers le fond invariant surlequelsontprojetes
lesdiversesconfigurationspossiblesdesobjets.Decefaitmme, ilestsrque
toutes les laborations de la gomtrie, d'une manire ou d'une autre,
rintroduisent lasituation primitive relativement l'univers
corrlatif idal auquel elles destinent le gomtre : lesfigures,plus
tard lesouverts,oudumoins lesvoisinagescompacts,prennent
lerelaisdesobjetsordinaires,etlasituationdebaseestrevcueparrapportaumondeidal,qui,entreautreschoses,atbtiafindepouvoirl'accueillir.Latopologiepeuttreenvisagecommelecadrethoriqueleplus
pauvre au sein duquel peut tre restitue la situation primitive, au
sein duquel
l'habitusstructurantlascnedesobjetspeutseredployer,d'unemanirehomologuecequiacoursdansl'exprienceordinaire,c'estdiresansquelereprageeuclidieninterfre.Cepremieraspectdulien
est un rapport de subordination et de reprise (l'exprience
gomtrique est
ncessairementsubordonnel'exprienceordinaire,c'estforcmentd'ellequ'elletirelafacultproblmatiquequipourtant
la distingue absolument par suite, cette premire exprience ne cesse
jamais d'tredisponiblel'tapedel'hermneutiquegomtrique).
Ilnoussemble,celadit,qu'ilyaundeuximerapport,quiseraitpluttdel'ordred'unesimulationmthodique.Lefaitmmequ'ilyaituneprcomprhension
langagirede l'espacemanifesteunpouvoir insigne du langage : le
langage est donateur d'intuition.Ds lors que cela est prouv,comment
ne pas comprendre en effet la modalit dominante de l'hermneutique
gomtriquemoderne,celledel'axiomatique,commerptitiondelasituationoriginaireolelangagedonne
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voir de faonprimitive la scnede l'tant ?Enarticulant de
toutespicesunnouveau
langage,institutoutexprspourques'ylaissedirelesupplmentdesensspatialquel'onaenvue,etendlimitant
par l'nonc de rgles un habitus artificiel (celui du parler de la
langue gomtriqueformelleensembliste,parexempleceluiduparler
topologique),on
faitconfiancenouveaucepouvoirinsignedulangagedontontientl'nigmemmedel'espace.Onescomptedel'usageverslequelons'estlanclanouvelleintuition,lanouvellefamiliarit,lanouvellecapacitdes'interrogersurceparquoi,dansl'lmentdupremierusage,onsesentaitrequis.Mmesi,commenousledisions
tout l'heure, et comme les sciences cognitives nous l'ont enseign,
il n'y a pasd'axiomatisation originaire rendant compte de la
prcomprhension spatiale (sans doute
parcequ'ellen'apasdelieuosecirconscrire),etsidoncnousnepouvonscomprendrelasignificationgomtriquede
l'usage linguistiqueordinairequ'en interprtantdans les
langagessuprieursde lagomtrie, il reste srque le fait globalde la
langueest celui d'une implicitationoriginairecolossale, investie
dans une profusion relationnelle. La stratgie hermneutique moderne
secomprenddonccommeeffortpourrecommencer,rpterl'implicitationdusenslafaveurdecettesimulationqu'estlejeuavecdeslangagesformelsetlaspcificationd'axiomes.
2.4.Laconceptionphnomnologiquedel'enracinement
dutranscendantaldanslecognitif
Nouspourrionsnousarrterl,puisqu'aufondnousvenonsd'explicitercequiest,visvisdecettequestion
de l'espace cognitif et de l'espace transcendantal, notre position
philosophique.Mais
ilnousparatimportantdeconfronternotrerflexionavecunpointdevueaprioridiffrent,quoiquecousinduntre:lepointdevuehyperphnomnologiquesoutenuparMerleauPonty.
2.4.1.Indicationsgnralessurlerapportphnomnologie/transcendantalisme
Il est sans doute bon de commencer par faire remarquer que la
phnomnologie entretient unrapport ambigu avec le transcendantalisme
kantien. Dans la mesure o, comme nous
l'avonssuggrplushaut,laphilosophiecritiquekantienne,sansreprendresoncompteladmarchedetable
rase de Descartes, fait nanmoins rfrence une exprience de pense en
laquelle
sedvoilentlancessitdeformesetdeprincipesgouvernantlaconnaissance,laphnomnologienepeutpasnepasvoirdans
lekantismesonanctre lemieuxautoris.Lasimpleaccentuationduconcept de
phnomne l'isolation de l'apparatre de l'apparition phnomnale, sa
sparationd'avecleplenoumnaldelachoseensoisemblebeaucoupd'gardsl'instaurationmmeduregardphnomnologique.Toutcela,unauteurcommeHusserllereconnat,danssonlangageetdeloinenloin.Commeparailleursilacceptelanotionkantienned'idecommeexpressioncorrectede
la tlologie animant la connaissance (cf. la fin des Ideen), et
comme il reprend l'adjectiftranscendantal luimme pour qualifier le
caractre normatif de ce que son
enqutephnomnologiquedcouvreparlamthodedelavariationimaginaire(c'estencestermesquelaphnomnologietranscendantalesedistingued'unesimpledescriptionduvcupar
l'oeil interne),on n'prouvera gure de gne dire que le fondateur de
la phnomnologie s'est voulu lecontinuateurde l'entreprise
transcendantale.Pourtant,chezHusserldj,
lesmotifsd'undivorcepossibleapparaissentclairement,et
iln'estpassrquelessymptmesd'accordquenousavonsrelevs l'instant
rsistentcesmotifs.Ladifficult tientceque lenormatif, lencessaire,
lenomologique,pourHusserl,n'estjamaistelquepourautantqu'ilsefaitvaloircommetellocalementdansl'expriencephnomnologiquedelavariation.Maisl'universeldelalogiqueouleglobaldel'espaceoudu
tempsne tiennentpasdanscetteexprience. Ilse trouvealorsque
l'impratifdeconstitutionreplacencessairementlaphnomnologietoujoursavantl'mergenced'aucunfacteurouinvarianttranscendantaltelqu'ilacoursdanslaconnaissancerationnelle.Latensionquis'tablitainsientrel'endedel'exprienceinterneetl'audeldeslmentsnormatifsdelaconnaissanceest
telle qu' la limite on peut parfaitement imaginer que la consquence
de l'poch soitl'miettement radical du champ de conscience, son
effondrement dans le singulier
(perspectivelimitequi,vraidireexistedjchezKant,maisceciestuneautrehistoire).Heidegger,desonct,commencecertesparsituerdemanirephnomnologiquetranscendantalel'investigationdelaquestiondusensde
l'tre :cecisemanifested'unctpar lechoixdudtourpar
l'analytiqueexistentiale, de l'autre par la permanence, tout au
long de Sein und Zeit, de l'attitude
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mthodologiquede la recherchedesconditionsdepossibilit.
L'ustensilit, la structure du souci,finalement le jeu de la
temporalisation selon les ekstases sont dcouvertes
successivementcomme les lments possibilisant de prime abord
inapparents pour la comprhension de
l'trequ'abriteetdissimuleleDasein.Ilsembledoncd'abordqueHeideggerconvienneavecKantqu'ilyaquelquechosetrouverdecequiestessentiellementncessitantparlavoied'uneinvestigationquelaplupartqualifierontd'interneparailleurs,cetteconvergenceavecletranscendantalismeestconfirmeparlalecturedeKantquedonnelammepoqueHeidegger,dansHeidegger[1928]ouHeidegger
[1929], lectureselon laquelle l'analytiqueexistentialeapparat
commeunkantismequi s'est mieux compris que Kant ne le comprenait
(en tant, notamment que la temporalit duDasein serait la structure
ncessitante ultime dont l'appareil logicocatgorial et l'intuition
purekantiens seraient les drivs). Cependant, le second Heidegger
s'loigne d'un tel point de
vue(parfoisentermesexplicites)enrefusantlagnalogiedusensdel'treenleDasein,enrefusantaposterioritoutlafoislastratgiedel'analytiqueexistentialeetl'galisationdusensdel'treavecl'essence
de l'tant. Une telle dconstruction semble une rupture radicale avec
letranscendantalisme: les invariants
transcendantauxnesontilspasforcmentdesdterminationsessentielles de
l'tant, l'accs critique ces invariants n'estil pas ncessairement
uneexprience subjective ? Si l'tre devient quelque chose de plus
obscur et de plus absent quel'tant,etsic'est laparole, le
langage/maisondel'trequiencontiennent lesecretpluttque leDasein se
devanant, que restetil comme possiblit d'une thorie transcendantale
de laconnaissance?
Qu'onnouspardonnecetexpostropbrefetprobablementabsconspourplusd'uneoreille.Nousvoulionscamper
lecontextedecedontnousallonsmaintenantparler,etquiest
lamaniredontMerleauPonty comprend laquestionde l'espacecognitif et
dumoment transcendantal,
ennousfondantcettefinsursonouvrageclassiquePhnomnologiedelaperception.
Dans ce livre, MerleauPonty tudie comment le sens objectif merge
de la perception. Dsl'introduction, il explique les deux approches
dont il entend se sparer, celle de l'empirismeassociationniste et
celle de l'intellectualisme. La premire approche est celle du
positivismenaturaliste, qui, tout la fois, prtend pouvoir tudier la
perception en troisime personne
,commeunechosedumondeexterne,et,defaonlie,necomprendpaslatranscendancedusensobjectif,
entreprend sans cesse de la rduire une harmonisation des
impressions sensibles.Pchantdemaniresymtrique,
l'intellectualismecomprendbiencettetranscendance, il
l'identifieseulementcelledujugement,delacatgorie,dulangagelalimite:dansl'airedelaphilosophieclassique,
l'intellectualisme est le cartsianisme ou le kantisme, plus ou
moins assimils l'un l'autre par MerleauPonty. cet intellectualisme,
MerleauPonty reproche gnriquement de
sedonnertoutfaitlesensobjectifcommeunesecrtiondelaconscienceconstituantesupposenonproblmatiquecommeprsencesoi
:or,pourMerleauPonty,supposerque
lesenscatgorial,objectif,estdisponibledemaniretransparentelaconscienceconstituante,c'estprsupposerunpouvoir
infinidecelleciquen'autorisenullement l'poch,etquinepeut,en
fait,exprimerautrechose que le retour dissimul de la conscience
nave crdule envers les objets. MerleauPontydcrteavec laplusgrande
fermetque lechampphnomnal,auquelonest renvoyds
lorsqu'onaprocdl'poch,estunchampol'installationdelaconsciencesujetestsingulire:ellel'habiteausensdelasituation,jamaisdelatotalisation.Dslorsoncomprendqueleproblmedel'mergence
des invariants configurant l'exprience pose la phnomnologie un
problmeabsolumentredoutable,quepouvaitseulementvacuerHusserldanslamesureoilmconnaissaitl'enracinement
singuliersituationnel du moi, dans la mesure o il minimisait la
difficult pourl'exprience phnomnologique radicale de remonter de
cette singularit quelque contenuuniverselquecesoit.Engreffant
leconceptheideggeriendesituationsur
lechampphnomnalhusserlien,MerleauPontymodifielesdonnesduproblmetelpointquelesrponsesdesIdeennepeuventplusservir,etquelaquestionduraccordentrephnomnologieettranscendantalismeseposed'unemanireincontournablementproblmatique.quoiMerleauPontyajouteunsecondlment
maximisant l'aporie : c'est que le champ phnomnal prcde en fait la
distinction del'intrieuretde l'extrieur,etqueparconsquent,
laconceptiontranscendantaled'uneimpositiondesinvariantsinternescequiestexternen'yfaitpassensd'emble.LaconclusiongnriquedeMerleauPontyestquelessynthsesconstituantesdontparleHusserletqui
luiviennentdeKantdevrontd'abordtrecomprisesauniveaudeleuramorce,onnepourrapenserqu'unlanversla
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structuration transcendantalede
l'exprience,partird'unesituationoriginaireirrflchiedans
lechampphnomnal:
Larflexionnepeut jamaisfairequejecessedepercevoir
lesoleildeuxcentpasunjourdebrume, de voir le soleil "se lever" et
"se coucher", de penser avec les instruments culturels quem'ont
prpars mon ducation, les efforts prcdents, mon histoire. Je ne
rejoins donc
jamaiseffectivement,jen'veillejamaisdanslemmetempstouteslespensesoriginairesquicontribuentmaperceptionoumaconvictionprsente.Unephilosophiecommelecriticismen'accordeendernire
analyse aucune importance cette rsistance de la passivit, comme
s'il n'tait
pasncessairededevenirlesujettranscendantalpouravoirledroitdel'affirmer.Ellesousentenddoncquelapenseduphilosophen'estassujettieaucunesituation.
Nousnesommesjamaiscommesujetmditantlesujetirrflchiquenouscherchonsconnatre
mais nous ne pouvons pas davantage devenir tout entier conscience,
nous ramener laconscience transcendantale (...). Une philosophie
devient transcendantale, c'estdire radicale,non pas en s'installant
dans la conscience absolue sans mentionner les dmarches qui
yconduisent, mais en se considrant ellemme comme un problme, non
pas en postulantl'explicitation totale du savoir, mais en
reconnaissant comme le problme
philosophiquefondamentalcetteprsomptiondelaraison.MerleauPonty[1945],p.76.
Aprsavoirainsivoulucaractriserl'anglegnrald'approchedeMerleauPonty,intressonsnousdefaonprcisecequ'ilditdel'espacephnomnal:unespacequi,d'aprscequiprcde,doitpourluitreantrieurl'espacetranscendantal.
2.4.2.L'espaceorientpourlecorpsetl'intuitionpure
MerleauPontyabordeunepremirefoisleproblmedanslasectionLaspatialitducorpspropreet
lamotricitduchapitreLecorps.Danscette section, il avance la trs
importantenotiondeschmacorporeldynamique:pourreprendresonexemple,danslescasd'allochiriec'estdirelorsqu'unsujetemploiel'unedesesmainslaplacedel'autre
ilyatranspositiongomtriqueparfaitedugestequeferaitunemainenceluiquel'autrepeutfaire,maiscettetransformationnesurvientcertainementpascommeuneapplicationausensmathmatique,commel'accumulationdetranspositionsponctuelles,cequisetransposeestpluttuneGestaltindexesurletemps,soitcequeMerleauPontyappelle
schmacorporel dynamique, et dont il
trouved'autresexemplesdanslequotidienducorps.
Le problme philosophique est nanmoins de savoir si ce que
MerleauPonty appelle espaceobjectif, ou, reprenant Malebranche son
vocabulaire, espace intelligible, ne prexiste
pasncessairementlaspatialitduschmacorporel,entantqu'ildlivrelespossibilitsdereprages.MerleauPontyrpondparlangative,enaffirmantquel'espaceorientpourlecorps,soitl'espaceduschmacorporeljustement,estpremierparrapportl'espaceintelligible,etquecedernierneferait
que l'expliciter. Il est fort intressant d'observer que le
principal argument invoqu parMerleauPonty en faveur de la plus
grande primitivit de l'espaceorientpourlecorps est
lesystmedel'expressionlangagiredelaspatialitparlesprpositions,objetdel'tudedeTalmy:
Mme si la forme universelle d'espace est ce sans quoi il n'y
aurait pas pour nous
d'espacecorporel,ellen'estpasceparquoiilyenaun.Mmesilaformen'estpaslemilieudanslesquel,maislemoyenparlequelseposelecontenu,ellen'estpaslemoyensuffisantdecettepositionencequiconcernel'espacecorporel,etdanscettemesurelecontenucorporelresteparrapportellequelque
chose d'opaque, d'accidentel et d'inintelligible. La seule solution
dans cette voie
seraitd'admettrequelaspatialitducorpsn'aaucunsenspropreetdistinctdelaspatialitobjective,cequi
feraitdisparatre lecontenucommephnomneetpar l
leproblmedesonrapportavec
laforme.Maispouvonsnousfeindredenetrouveraucunsensdistinctauxmots"sur","sous","ctde...",auxdimensionsdel'espaceorient?Mmesil'analyseretrouve,danstoutescesrelations,larelationuniverselled'extriorit,l'videnceduhautetdubas,deladroiteetdelagauchepourceluiquihabitel'espacenousempchedetraitercommenonsenstoutescesdistinctions,etnousinvitecherchersouslesensexplicitedesdfinitionslesenslatentdesexpriences.Lesrapports
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desdeuxespacesseraientalorslessuivants:dsquejeveuxthmatiserl'espacecorporelouendvelopper
le sens, je ne trouve rien en lui que l'espace intelligible. Mais
en mme temps
cetespaceintelligiblen'estpasdgagdel'espaceorient,iln'enestjustementquel'explicitation,et,dtach
de cette racine, il n'a absolument aucun sens, si bien que l'espace
homogne ne
peutexprimerlesensdel'espaceorientqueparcequ'ill'areudelui.MerleauPonty[1945],p.118.
Qu'on nous pardonne cette longue citation, dont la fonction est
certes d'attester ce que nousrapportions juste avant elle du propos
de MerleauPonty, mais aussi de fournir un
supportdocumentaireaucommencementdediscussionquivient.
Tout d'abord, le discours de MerleauPonty confirme l'ide que
l'espace du langage
estphnomnologiquementplusprimitifquel'espacegomtrique.Ilajoutecetlmentquetouteslesdterminationsspatialesquiviennentparl'usagedesprpositionscommeparceluidesdictiquesprsupposent
l'trel'espaceducorps.En fait,onpourrait
relirebeaucoupdecequeditTalmydanscesens,notammentenrapportantlafonctionducorpslerledesobjetsderfrence,quiseraient
gnralement analyss comme projectionrptition du corps dans son
privilge spatialisant.
Deuximement,MerleauPontyenvisage,demaniretrsintressante,decomprendrelarelationde
l'espace intelligible l'espacecorporel commeune
relationd'explicitation, cequi
sembleallerdanslesensdelarelationhermneutiquesuggreparnoustoutl'heuredel'unl'autre.RestequeletextedeMerleauPonty,cequenousenjugeons,faittropcommesil'espaceintelligiblenecorrespondait
pas une exprience de pense originale par rapport l'exprience
primitive,
etfaisantvaloircetitresespropresexigenceshermneutiques.Danslalignedecequenousavonsditplushaut,parexemple,commentnepassupposerque
l'homognitde l'espace, finalementtraduite dans les termes
d'unemathmatisation (aujourd'hui, par le fait qu'un certain groupe
detransformations privilgi opre de faon transitive dans l'espace),
explicite ce qui estinformellement imput l'espaceds
lorsqu'ilestvidde toutobjet,cequiveut
forcmentdire,aussi,spardel'trel'espacecorporel,bienquecederniersubsistenanmoinscommetrel'espacefictifcf.parexemplelargledubonhommed'Ampre.Commenousavionsessaydeledire,
ilyabienunediscontinuithermneutique,correspondant l'mergencede
laquestiondel'espaceglobal,virtuellementinfinitaire,ducoupleespacepoint.Ilyamotivation,ilyaexplicitationd'un
plan l'autre, mais il faut aussi voir qu'il y a unemutation
hermneutique, la situation
dugomtreinnoveparrapportcelledusujetordinairequelegomtrenecessejamaisd'tre.
MerleauPontypourraitilconvenirdecequenousavanonsici?Ilyapournousdoutecesujet.Certes,lasuitedelasectionquenouscommentonsaccordeuneimportanceextrmelanotiondemouvementvirtuel,quicorrespondexactementcequenousavonsrpertoricommersidudel'trel'espace
corporel dans l'attitudegomtrique.Mais il ne semblegure, prcisment,
queMerleauPonty fasse le lien entre cettemodalit de l'treaumonde et
la gomtrie ce qui
luiimportepluttestquesaperteconstitueunepathologiedelaspatialitducorpspropre,etillustreainsilafondamentalitdel'treaumondepourcelleci.
Il est noter, pour tre complet, queMerleauPonty donne quelques
indications saisissantes
etfulgurantesquiiraientdanslesensd'unegensedelaconceptiontopologiqueauniveaudel'trel'espacecorporel,rejoignantainsi,dansuneformulationparfaitementradicale,toutlafoisTalmyetPoincar:
C'est ce que nous avons essay d'exprimer en disant que la
structure pointhorizon est
lefondementdel'espace.L'horizonoulefondnes'tendraientpasaudeldelafigureoul'entours'ilsn'appartenaientaummegenred'trequ'elleets'ilsnepouvaientpastreconvertisenpointspar
unmouvement du regard.Mais la structure pointhorizon ne
peutm'enseigner ce qu'est unpoint qu'enmnageantenavant de lui la
zonede corporitd'o il sera vuet autourde lui
leshorizonsindterminsquisontlacontrepartiedecettevision.Lamultiplicitdespointsoudes"ici"nepeutparprincipeseconstituerqueparunenchanementd'expriencesochaquefoisunseuld'entreeuxestdonnenobjetetquisefaitellemmeaucoeurdecetespace.Etfinalement,loinquemoncorpsnesoitpourmoiqu'unfragmentdel'espace,iln'yauraitpaspourmoid'espacesije
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n'avaispasdecorps.MerleauPonty[1945],p.118119.
Lercitdel'exprienceprimitive,laphnomnologiedel'espacecorporelproposeiciparMerleauPonty
semble restituer les contenus espace, point, et voisinage, dont
nous avions dit qu'ilsconstituaient le fondement de la thorisation
moderne de l'espace comme espace
topologique.Maisn'yatilpasuneambigutdanscercit?Estcevraimentl'exprienceoriginairequeracontelefragment,ouuneexpriencephnomnologiquedansl'universdelagomtrie?Oubien,sil'onprendvraimentcercitcommeprimitif,lastructurepointhorizondontilparleestellelammequelastructureespacepoint?L'espacen'estilpasplusetautrechosequ'unhorizonausensprimitif,quelquechosecommelatotalisationdetoutcequipourravaloircommehorizon,totalisationquisesuggreet
faitquestionseulement lorsque
l'espaceatvid?Yatilproprementparlerdespoints au bout des
engagements du corps, points environns de leur voisinage selon
lesmodulationsdecetengagement,oubienn'yatil jamaisquedesobjets,
soit toutautre
chose?Enfin,n'yatilpas,sil'ondevaitentendrelediscoursdeMerleauPontyvraimentcommel'esquissed'une
constitution , une illusion inductive dans l'ide de la synthse de
l'espace parl'enchanementdesexpriencespointantsurlesobjets?
Nousneprendrons lerisqued'unerponsequ'aprsavoirprisencompte
lesecondpassageoMerleauPonty confronte sa phnomnologie de l'espace
avec la gomtrie : dans ce secondcontexte, MerleauPonty reprend
purement et simplement la notion kantienne de
raisonnementgomtriqueparconstructiondeconcept.
CettereprisesurvientdanslechapitreLecogito,etl'enjeuyest,pourMerleauPonty,detaille:ils'agit
encoreet toujoursdediscuter avec cequ'il appelle
intellectualisme,oupoint de vuede
laconscienceconstituante,qu'ilimputesansambigutDescartes,alorsqu'iljoueavecKantunjeuambivalent,tanttl'incluantparmilesinculps,tanttl'appelantcommetmoindel'accusation.Laquestion,
donc, est de savoir si la vrit en gnral n'exige pas que la
conscience
puissefonctionnercommeune,sepossdantsansfaille,et,prototypiquement,silavritgomtriquen'apas
forcmentsasourcedansunetelleconsciencepleine(alorsqueMerleauPonty,quant
lui,veut plutt soutenir qu'il n'y a jamais de conscience pleine, en
aucune faon, qu'il n'y a qu'unhorizon du devenirintelligible du
champ phnomnal dans et partir de la situation). MerleauPonty
reprend donc l'exemple kantien de la preuve de l'galit deux droits
de la somme
desanglesd'untriangle.Ensubstance,ilinterprtecequis'appellechezKantconstructiondeconcept,interventiondel'imaginationtranscendantaleproductrice,commetracedelafonctionducorpsetdel'treaumondejusquedansl'enceintedel'entendementgomtrique.
Sonargumentationestlasuivante:d'abordilrefusel'idequ'onpuisseregarderlepassageparlafigureet
laconstructiond'uneparallleunctpassantpar
lesommetopposcommedesingrdients contingents l'heure de la
formalisation. Il assure que toute formalisation
estformalisationd'uneintuition,ettmoignedelapermanenced'uncommerceintuitifavecunevritenactepluttqu'ellenelanie:
Mais,que la formalisationsoit toujours
rtrospective,celaprouvequ'ellen'est
jamaiscompltequ'enapparenceetquelapenseformellevitdelapenseintuitive.Elledvoilelesaxiomesnonformulssurlesquelsonditqueleraisonnementrepose,ilsemblequ'elleluiapporteunsurcrotderigueuretqu'ellemettenulesfondementsdenotrecertitude,maisenralitlelieuosefaitlacertitudeetoapparatunevritest
toujours
lapenseintuitive,bienquelesprincipesysoienttacitementassumsoujustementpourcetteraison.MerleauPonty[1945],p.442.
On peut rapprocher ce genre de propos de notre conception de la
gomtrie commehermneutique de l'espace. Nanmoins, il nous semble que
MerleauPonty simplifie trop
leproblmeenposantpurementetsimplementunevritintuitive.L'hermneutiquedel'espace,toutle
dveloppement moderne l'atteste, n'est pas hermneutique d'une vrit
informule maispossde, mais plutt hermneutique d'une dpossession.
Mais laissons provisoirement cettecritique.
S'tant ainsi donn le droit de reprendre l'exemple kantien et de
lui garder sa valeur,Merleau
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03/02/2015 Salanskis:Continu,cognition,linguistique
http://www.revuetexto.net/19962007/Inedits/Salanskis_Continu.html
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Pontydcritl'acteconstructifraisonnant,afind'endgagerlaprconditionexistentiellemotrice:
Nousavonsvuquecen'estvidemmentpasuneoprationmanuelleseulement,ledplacementeffectifdelamainetdemaplumesurlepapier,caralorsiln'yauraitaucunediffrenceentreuneconstructionetundessinquelconqueetaucunedmonstrationnersulteraitdelaconstruction.Laconstructionestungeste,c'estdireque
le traceffectifexprimeaudehorsune intention.Maisqu'estce encore que
cette intention ? Je "considre" le triangle, il est pourmoi un
systme
delignesorientes,etsidesmotscomme"angle"ou"direction"ontpourmoiunsens,c'estentantquejemesitueenunpointetdeltendsversunautrepoint,entantquelesystmedespositionsspatiales
est pour moi un champ demouvements possibles. C'est ainsi que je
saisis l'essenceconcrte du triangle, qui n'est pas un ensemble de
"caractres" objectifs,mais la formule d'uneattitude, une certaine
modalit de ma prise sur le monde, une structure. En construisant,
jel'engagedansuneautrestructure,lastructure"parallleetscante".Commentcelaestilpossible?
C'est quema perception du triangle n'tait pas, pour ainsi dire,
fige et morte, le dessin
dutrianglesurlepapiern'entaitquel'enveloppe,iltaitparcourupardeslignesdeforce,detoutespartsgermaientenluidesdirectionsnontracesetpossibles.Entantqueletriangletaitimpliqudansmaprisesurlemonde,ilsegonflaitdepossibilitsindfiniesdontlaconstructionralisen'estqu'uncasparticulier.Elleaunevaleurdmonstrativeparcequejelafaisjaillirdelaformulemotricedu
triangle. Elle exprime le pouvoir que j'ai de faire apparatre les
emblmes sensibles d'unecertaine prise sur les choses qui est ma
perception de la structure triangle. C'est un acte
del'imaginationproductriceetnonpasunretourl'ideternelledutriangle.
nouveau la citation est trop longue : il n'y a gure moyen, avec
MerleauPonty, de faireautrement,cequ'ilditn'est jamaisditauniveaude
laphrase,maiscommenced'treaudibleauniveauduparagraphe.Donc,MerleauPontyidentifielerlekantiendel'imaginationproductriceaudploiement
de la formule motrice du triangle : le fonds sur lequel la
construction et leraisonnement s'appuient, c'est celui des
mouvements virtuels dont la structure (au sens deGestalt)est
levritablecontenugomtrique.MerleauPontypoussealors l'analyse
jusqu'deuxsortesdeconsquences:
D'unepartl'instancemotriceestditeentermespropresengendrerl'espace:
Ilfautqu'ilyait,commeKantl'admettait,un"mouvementgnrateurdel'espace",quiestnotremouvement
intentionnel, distinct du "mouvement dans l'espace", qui est celui
des choses et denotrecorpspassif.
D'autre part la pense du gomtre est en profondeur la
transcendance mme (au
sensheideggerien)del'treaumondecorporel,lasortiehorsdesoiducorps:
Sijepeux,parlemoyend'uneconstruction,faireapparatredespropritsdutriangle,silafigureainsitransformenecessepasd'trelammefigured'ojesuisparti,etsienfinjepeuxoprerunesynthsequigarde
lecaractrede lancessit,cen'estpasquemaconstructionsoitsoustenduepar
un concept du triangle o toutes sesproprits seraient incluses, et
que, sorti de laconscience perceptive, je parvienne l'eidos : c'est
que j'effectue la synthse de la
nouvellepropritparlemoyenducorpsquim'insred'unseulcoupdansl'espaceetdontlemouvementautonomeme
permet de rejoindre, par une srie de dmarches prcises, cette vue
globale del'espace.
Cet approfondissement de ce que nous avions dj reconnu comme la
conception de la
prcomprhensiondel'espacepropreMerleauPontyappelledenombreuxcommentaires.
Toutd'abord,cequenousenapprenonspermetdemieuxcomprendrelaconvergencerellequis'tablitentreTalmyetPoincar.CedontparlePoincar,savoirlerapportprofonddugomtre
ses figures, et ce dont parle Talmy, savoir la thorie primitive de
l'espace inscrite dans
lalangue,sontbeletbienlammechoselalumiredesthsesdeMerleauPonty:danslesdeuxcas,ilsagitdemanifestationsdel'treaumondecorporel.
Deuximement,pourquiconnatlathsesurl'unitdel'entendementetdelasensibilitdfendue
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parHeideggerdanssalecturedeKant,lapositiondeMerleauPontyapparatcommesareprise,avec
cette seule nuance, de grande importance il est vrai, que
l'treaumonde y est relu comme corps. Heidegger soutient bien, en
effet, que le fonds de l'intuition pure kantienne estl'intuition
pure du temps, et que celleci ellemme demande tre comprise partir
de latranscendanceduDasein.Lessynthses
fondativesquimergentdesekstasesduDasein
sontl'imaginationproductriceellemmepourHeidegger, c'estdireencore,
l'intuitionpuredansseslimbes en mme temps que le jugement
conceptuel sa source. MerleauPonty nonce desphrases
quasiheideggeriennes ( La pense du gomtre, dans la mesure o elle
s'appuiencessairementsurcetacte,neconcidepasavecellemme:elleestlatranscendancemme.p.444).
Sauf que, justement, pour Heidegger, la gense de l'intuition
partir de la transcendance duDaseinn'estpas l'affairede
ladisciplinegomtrie,
ils'estprotgdetouteconfrontationdesondiscoursaveclamathmatiqueparunensembledethsesdmarcatricesdontl'incidencepeuttrerepredanssalecturedeKant(notammentdanslestraitementsqu'ildonnedel'expositionmtaphysiquedel'espaced'unepart,delanotiond'intuitionformelled'autrepart).C'estpourcetteraisonquelapositiondeMerleauPontyestbeaucoupplusinconfortablequecelledeHeidegger,bienque,d'autresgards,plusintressante.
Lesdifficultssonteneffet lessuivantes :
ilyabeaucoupdevritdanscequ'nonceMerleauPonty, nous voulons dire,
beaucoup de vrit sur la position du gomtre. Il est de fait que
lecaractred'orientation, le
rled'unesortedecorpsvirtuelvenantdonnersens
laconceptualitthoriquesontinliminablesdelamathmatiquegomtrique,ycomprislaplusformelleetlaplussophistique
(Daniel Bennequin nous a rcemment exprim sans ambigut l'importance
del'lmentgestuelexistentieldanslacomprhensionqu'ilavaitdelanotiondesiteetdefaisceausurunsite).
Leproblmeestdesavoirdequel corpsonparle.notresens, la cohrencede
lapositiondeMerleauPontyexclutqu'onsedonneunerfrencesensiblepourlecorps,c'estbienlemoins.Lecorps
portetil l'treauMonde comme corps organique, comme corps biologique
? Peutonnommercorps toutcequia
traitaumouvementvirtuel,c'estdirecequis'appellespatialitapriori,imaginationtranscendantaleproductricechezKant,sanscderuncertainconfusionnisme?C'estparexemplecequefaitLakoffdanslaplupartdesesanalyses,estimantqu'ilatrouvunfondementmatrialistepositivistechaquefoisqu'ilamisenvidencelarelativitdelasignificationauxmouvementsvirtuels,etenpinglantdunomdecorpsceniveaudefondement,allgucommepositif.Maissil'onestunphnomnologuecohrentcommeMerleauPonty,nefautilpasdirequel'treauMondeestlevritableconceptgnral,etquelecorps,ausensnafdumot,n'estjamaisque
la premire faon dont l'treaumonde se comprend luimme, s'interprte
(touteinterprtationtantexistentielleavantqued'treverbale)?Maisalors,notredistinctionentre
lesdeuxcouchesdelaprcomprhension,notredescriptiondelanaturehermneutiquedechacuneet
de la relation hermneutique entre elles peut tre reprise en
accompagnant le discours
deMerleauPonty.Ilyaunespatialitdel'treaumonde/corps,maisilyaunespatialitdel'treaumonde/gomtrique,etilnefautpasnierl'existenced'unediscontinuitdel'unel'