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INTRODUCTION La façade occidentale et l’escalier en vis du chevet de l’abbatiale de Saint-Gilles-du- Gard, chefs d’œuvre de l’art roman méri- dional, n’ont cessé de susciter l’intérêt des historiens de l’art à partir de la publication, au milieu des années 1830, des illustrations du second tome du Languedoc dans la série des Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France du baron Taylor 1 , et de la description de Prosper Mérimée dans son Voyage dans le Midi de la France 2 . Le présent recueil d’articles, nouvelle contri- bution à cette littérature foisonnante, ne constitue pas une monographie exhaustive. Centré sur les résultats des recherches récentes de ses auteurs, il se dispense d’une nouvelle synthèse historiographique et bibliographique, fort du bilan déjà publié en 2000 dans les actes du 157 e Congrès archéologique de France avec la première esquisse d’une nouvelle lecture archéolo- gique. Depuis la publication des articles du Congrès du Gard 3 , la thèse de doctorat de Heike Hansen sur la construction de la façade, soutenue en 2006, a ouvert, pour la première fois dans l’histoire de la recherche sur l’insigne édifice, une enquête d’archéologie du bâti, fondée sur le relevé pierre-à-pierre exact et exhaustif de l’en- semble des structures analysées 4 . En 2004, la conduite d’une première campagne de sondages au pied de la façade et à l’inté- rieur de la crypte 5 , ainsi que de sondages préparatoires dans l’ancienne aire claustrale en 2009 6 renouèrent avec l’archéologie du sous-sol, trente ans après les dernières fouilles entreprises dans les années 1970 par l’association archéologique locale 7 . Parmi les recherches récentes sur les sources écrites relatives à l’histoire de l’abbaye de Saint-Gilles, les publications de Marcel et Pierre-Gilles Girault 8 et de Florian Mazel 9 ont apporté de nouvelles réflexions stimu- lantes sur la configuration monumentale du monastère et de ses édifices de culte d’après le témoignage des textes antérieurs au XIII e siècle. La chronologie controversée de la façade et de l’église fut réexaminée il y a peu par Jochen Zink, à partir d’une lecture du monument calquée sur la chro- nologie des dates historiques à l’appui de la datation précoce traditionnelle de la façade romane, assortie de la restitution aussi audacieuse qu’imaginaire, car infon- dée sur le plan archéologique et chrono- typologique, du plan et des vestiges hypo- thétiques d’une abbatiale préromane 10 . Réalisés de 2009 à 2011, les travaux du projet de recherche franco-allemand Aegidiana sont au cœur du présent dossier. Cofinancé par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et la Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG) avec le soutien de la Direction régionale des affaires culturelles Languedoc-Roussillon, ce projet visait la mise en œuvre d’un relevé et d’une étude archéologique de l’ensem- ble du site abbatial, accompagnés d’un programme de fouilles archéologiques et de recherches d’archives. La colla- boration bilatérale de deux laboratoires partenaires, placée sous la codirection d’Andreas Hartmann-Virnich pour le Laboratoire d’Archéologie Médiévale et Moderne en Méditerranée d’Aix-en-Provence (LA3M UMR 7298, CNRS-Aix-Marseille Université) 11 , et de Klaus Jan Philipp pour l’Institut für Architekturgeschichte (IFAG) de l’Université de Stuttgart, a permis de fédérer des compétences complémentaires en matière de relevé numérique et manuel, de fouille et d’expertise archéologique et archivistique. En appréhendant l’évolution du bâti sur le site dans son ensemble, la restitution des structures disparues, la chro- nologie des formes architecturales et des techniques constructives en vue de leur étude comparative, le projet devait contri- buer à l’élaboration des stratégies pour la future restauration, conservation, réhabili- tation et mise en valeur patrimoniale, et inaugurer un accompagnement archéolo- gique permanent. Le projet Aegidiana, fondé sur la complémentarité des fouilles archéolo- giques 12 , de la recherche d’archives 13 , de l’étude des matériaux 14 et du relevé d’élé- vation, réalisé sous la forme d’un relevé pierre-à-pierre global au tachéomètre, d’une documentation mono-photogram- métrique et d’un vaste programme de rele- vés manuels pierre-à-pierre hautement détaillés à l’échelle du 10 e tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’église inférieure 15 , permit de vérifier, de corriger et de préciser l’ordre de la construction de l’ensemble monumental dont nous esquisserons les acquis majeurs à titre d’annonce : l’étude archéologique confirme la date tardive de l’église romane, édifiée à cheval sur un tiers de l’ancien cloître déjà en place, dont les galeries, identifiées en fouille, et les bâti- ments monastiques avaient été partielle- ment reconstruits ou modifiés. Le relevé et l’analyse des innombrables irrégularités, changements et repentirs au cours d’un chantier éminemment complexe, condi- tionné au départ par le remploi de maté- riaux retaillés et de maçonneries fragmen- taires comme, probablement, par le maintien en élévation temporaire d’édifices antérieurs, révèlent de manière indirecte l’impact du bâti préexistant, objet des 293 SAINT -GILLES-DU-GARD L’éGLISE ABBATIALE ET LES BâTIMENTS MONASTIQUES NOUVELLES RECHERCHES ARCHéOLOGIQUES Andreas HARTMANN-VIRNICH * et Heike HANSEN ** Bulletin Monumental Tome 171-4 • 2013
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Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

Feb 07, 2023

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Page 1: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

INTRODUCTION

la façade occidentale et l’escalier en visdu chevet de l’abbatiale de Saint-Gilles-du-Gard, chefs d’œuvre de l’art roman méri-dional, n’ont cessé de susciter l’intérêt deshistoriens de l’art à partir de la publication,au milieu des années 1830, des illustrationsdu second tome du languedoc dans lasérie des Voyages pittoresques et romantiquesdans l’ancienne France du baron taylor 1, etde la description de Prosper mérimée dansson Voyage dans le Midi de la France 2. leprésent recueil d’articles, nouvelle contri-bution à cette littérature foisonnante, neconstitue pas une monographie exhaustive.centré sur les résultats des recherchesrécentes de ses auteurs, il se dispense d’unenouvelle synthèse historiographique etbibliographique, fort du bilan déjà publiéen 2000 dans les actes du 157e Congrèsarchéologique de France avec la premièreesquisse d’une nouvelle lecture archéolo-gique. depuis la publication des articles duCongrès du Gard 3, la thèse de doctorat deheike hansen sur la construction de lafaçade, soutenue en 2006, a ouvert, pourla première fois dans l’histoire de larecherche sur l’insigne édifice, une enquêted’archéologie du bâti, fondée sur le relevépierre-à-pierre exact et exhaustif de l’en-semble des structures analysées 4. en 2004,la conduite d’une première campagne desondages au pied de la façade et à l’inté-rieur de la crypte 5, ainsi que de sondagespréparatoires dans l’ancienne aire claustraleen 2009 6 renouèrent avec l’archéologie dusous-sol, trente ans après les dernièresfouilles entreprises dans les années 1970par l’association archéologique locale 7.Parmi les recherches récentes sur les sources

écrites relatives à l’histoire de l’abbaye deSaint-Gilles, les publications de marcel etPierre-Gilles Girault 8 et de Florian mazel 9ont apporté de nouvelles réflexions stimu-lantes sur la configuration monumentaledu monastère et de ses édifices de culted’après le témoignage des textes antérieursau xiiie siècle. la chronologie controverséede la façade et de l’église fut réexaminée ily a peu par Jochen Zink, à partir d’unelecture du monument calquée sur la chro-nologie des dates historiques à l’appui dela datation précoce traditionnelle de lafaçade romane, assortie de la restitutionaussi audacieuse qu’imaginaire, car infon-dée sur le plan archéologique et chrono-typologique, du plan et des vestiges hypo-thétiques d’une abbatiale préromane 10.

réalisés de 2009 à 2011, les travauxdu projet de recherche franco-allemandAegidiana sont au cœur du présent dossier.cofinancé par l’agence nationale de larecherche (anr) et la DeutscheForschungsgemeinschaft (dFG) avec lesoutien de la direction régionale desaffaires culturelles languedoc-roussillon,ce projet visait la mise en œuvre d’un relevéet d’une étude archéologique de l’ensem-ble du site abbatial, accompagnés d’unprogramme de fouilles archéologiqueset de recherches d’archives. la colla-boration bilatérale de deux laboratoirespartenaires, placée sous la codirectiond’andreas hartmann-virnich pour lelaboratoire d’archéologie médiévale etmoderne en méditerranée d’aix-en-Provence(la3m umr 7298, cnrS-aix-marseilleuniversité) 11, et de Klaus Jan Philipp pourl’Institut für Architekturgeschichte (iFaG)de l’université de Stuttgart, a permis defédérer des compétences complémentairesen matière de relevé numérique et manuel,

de fouille et d’expertise archéologique etarchivistique. en appréhendant l’évolutiondu bâti sur le site dans son ensemble, larestitution des structures disparues, la chro-nologie des formes architecturales et destechniques constructives en vue de leurétude comparative, le projet devait contri-buer à l’élaboration des stratégies pour lafuture restauration, conservation, réhabili-tation et mise en valeur patrimoniale, etinaugurer un accompagnement archéolo-gique permanent.

le projet Aegidiana, fondé sur lacomplémentarité des fouilles archéolo-giques 12, de la recherche d’archives 13, del’étude des matériaux 14 et du relevé d’élé-vation, réalisé sous la forme d’un relevépierre-à-pierre global au tachéomètre,d’une documentation mono-photogram-métrique et d’un vaste programme de rele-vés manuels pierre-à-pierre hautementdétaillés à l’échelle du 10e tant à l’intérieurqu’à l’extérieur de l’église inférieure 15,permit de vérifier, de corriger et de préciserl’ordre de la construction de l’ensemblemonumental dont nous esquisserons lesacquis majeurs à titre d’annonce : l’étudearchéologique confirme la date tardive del’église romane, édifiée à cheval sur un tiersde l’ancien cloître déjà en place, dont lesgaleries, identifiées en fouille, et les bâti-ments monastiques avaient été partielle-ment reconstruits ou modifiés. le relevé etl’analyse des innombrables irrégularités,changements et repentirs au cours d’unchantier éminemment complexe, condi-tionné au départ par le remploi de maté-riaux retaillés et de maçonneries fragmen-taires comme, probablement, par lemaintien en élévation temporaire d’édificesantérieurs, révèlent de manière indirectel’impact du bâti préexistant, objet des

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Saint-GilleS-du-Gard

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueSnouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

andreas hartmann-virnich * et heike hanSen **

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investigations géophysiques et archéolo-giques présentes et à venir. l’étude desmatériaux a confirmé le remploi d’unimportant lot de pierres retaillées et prove-nant d’un édifice roman plus ancien,comprenant notamment la célèbre inscrip-tion attestant une fondation en 1116 –fondation unanimement confonduejusqu’à présent avec celle de l’abbatialeactuelle, en dépit des indices stylistiques ettypologiques qui plaident pour un débutdu chantier dans le dernier tiers ou le dernierquart du xiie siècle seulement. la fouillearchéologique dans l’ancien cloître, cofi-nancée par le programme franco-allemandet la direction régionale des affaires cultu-relles languedoc-roussillon, a permis poursa part d’élucider l’histoire médiévale etpostmédiévale de l’espace claustral, avecl’épierrement complet des galeries romanesvers la fin du xviiie siècle, et de remonteraux origines de l’occupation du secteur,dont le phasage a pu être précisé grâce auxdatations archéologiques et archéomé-triques. cette fouille a mis en évidence leremblaiement d’une dépression naturelleau début du haut moyen âge - causeprobable de l’instabilité de la future égliseromane – suivi de la construction degrands bâtiments à l’époque pré- ou proto-carolingienne – bâtiments rasés dès avantune réoccupation au xe siècle qui précéda àson tour le cimetière, installé vers le débutdu xiie siècle avec l’ensemble claustralroman. la déchéance du monastère,converti en collégiale en 1538 et enfinsupprimé en 1777, attestée par les sourcesécrites – que les recherches d’archives ontpermis de compléter pour les xviie, xviiie etxixe siècles –, se traduisit manifestementpar une laïcisation du cimetière, l’ancienneaile orientale étant remplacée dès 1602-1603 par une chapelle des Pénitents. Si lesdestructions massives consécutives auxguerres de religion rendent difficile larestitution de l’ordonnance de l’édificeroman, qui au demeurant ne fut selontoute probabilité jamais complètementachevé, le processus de la mise en œuvredes parties conservées peut désormais êtreretracé dans le détail. la description desétapes constructives, illustrées par unemaquette tridimensionnelle virtuelle, dontla mise en œuvre complexe prend en

compte les irrégularités dimensionnelles etstructurelles des composantes architectu-rales afin de servir d’outil pour la réflexionarchéologique, s’est limitée à l’église infé-rieure et à une partie des bâtiments monas-tiques, en attendant l’achèvement desrecherches sur l’église haute et la publica-tion de leurs résultats dans un volume ulté-rieur.

ÉLÉMENTS POUR UNE HISTOIRE

MONUMENTALE DE L’ABBAYE

ARCHÉOLOGIE ET SOURCES ÉCRITES

Le cadre monumental de l’abbaye duhaut Moyen Âge au début du XIIe siècle

la recherche sur l’histoire monumen-tale médiévale de l’abbaye de Saint-Gillesne peut s’appuyer que sur un nombrelimité de données historiques, comme lemontre l’examen critique des sourcesécrites dont Florian mazel vient de réétu-dier l’arrière-plan hagiographique et histo-rique 16. Si la première légende de saintGilles, rédigée vers l’an mil au sein dumonastère 17, met en scène le cadre de viesauvage dans lequel l’ermite se seraitinstallé après un premier séjour enSeptimanie, la réalité matérielle desorigines, trop évanescente pour avoir laissédes traces archéologiques vérifiables, resteincertaine. empruntée à des sourcesd’époque carolingienne, l’image d’un lieusylvestre isolé et désert veut avant toutjustifier l’absence de toute autre tutelle quecelle du souverain fondateur, représentésous les traits du roi goth Flavius. d’aprèsla vita, une « terre tout autour du monas-tère qui s’étend sur un espace de cinqmilles » (terra circumcirca monasteriumquinque miliariorum spatio porrecta) auraitalors fait l’objet d’une donation royale 18.en revanche, la mention de la constructionde deux églises dédiées l’une à saint Privatet l’autre, près de la grotte de l’anachorète,à saint Pierre et à tous les apôtres, de mêmeque le voyage de Gilles à rome, où cedernier aurait sollicité et reçu l’immunitépontificale, reflètent sans doute la topo-graphie religieuse contemporaine de la

rédaction du récit, et le souci des moinesde rattacher l’exemption, régulièrementcontestée au cours des xie et xiie siècles, auxorigines mêmes du monastère.

l’épisode légendaire de la rencontre dusaint avec le « roi charles de France », quiaurait obtenu l’absolution d’un grave péchégrâce à l’intercession de Gilles, inscrit,quant à lui, les origines de l’abbaye en tantque telle dans l’histoire carolingienne,conformément au plus ancien diplômeconnu, daté de 814, dans lequel louis lePieux évoque l’existence d’une cellula dansla vallis Flaviana dédiée à « saint Pierreprince des apôtres » et soumise à l’autoritéde l’évêque de nîmes - source de conflits àvenir. le saint éponyme n’est, quant à lui,mentionné que vers 875 dans le martyro-loge d’usuard. vers 882-884 puis proba-blement en 904, deux bulles pontificalesévoquent respectivement le monasteriumquod vocatur Vallis Flaviana et le monaste-rium sancti Petri in Gothia, confirmant ladédicace à saint Pierre auquel le nom dulégendaire saint fondateur n’est pas encoreassocié, tandis que le terme de monasteriumsemble suggérer l’existence d’une commu-nauté plus importante qu’au début dusiècle. l’invention du corps du saint, en925 19, précéda le changement de vocabledu monastère, qui figure pour la premièrefois sous le nom de sanctus Aegidius dans letestament de raimond, comte derouergue, en 961. l’exemption pontifi-cale, accordée effectivement dès 879,comme les séjours de l’abbé de Figeacadacius en 988 et du roi robert le Pieuxen 1019/1020, venus en pèlerinage, confir-ment la réputation croissante de l’abbayeet du saint, en l’honneur duquel l’évêqueFulbert de chartres composa peu avant1029 un office qui, « très local en appa-rence, connaîtra une grande fortune àpartir du xiiie siècle » 20. de la diffusion duculte et du prestige du saint témoigne ladédicace à saint Gilles de l’autel majeurde la crypte de la cathédrale de Spire, en1039 21. Source de convoitises et de conflitsd’intérêt entre les comtes de toulouseet l’évêque de nîmes, l’abbaye fut rattachéeà cluny à l’initiative de la comtessealmodis 22, et ne recouvrit son autonomiedéfinitivement qu’en 1119 puis en 1132,

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après que raymond iv, comte de Saint-Gilles, eut formellement abandonné sesdroits en 1090-1096 23, avant de partir enterre sainte comme miles sancti Petri 24.

Si les fouilles conduites en 2010 dansl’ancien cloître de l’abbaye médiévale 25 ontmis au jour des traces inédites de l’occupa-tion du site au haut moyen âge, rien neconfirme encore le lien des vestiges avecl’espace monastique avant le xiie siècle.dans la stratigraphie, de faibles indicesd’une occupation protohistorique installéesur le terrain naturel en nette pente vers lesud, dépression ou ancien vallon, précè-dent les premières traces d’une présencehumaine plus conséquente à partir dumilieu du ve siècle de notre ère, avec l’ap-port d’un remblai, scellé sous une sédi-mentation naturelle attestant une activitéalluviale. vers le viie siècle fut édifié puisagrandi un bâtiment dont les murs ortho-gonaux, non maçonnés mais soigneuse-ment construits à double parement,renferment un foyer dallé. abandonné etarasé vers le viiie ou au début du ixe siècle,cet habitat dont l’orientation semble préfi-gurer celle des plus anciennes structuresidentifiables du monastère roman, dispa-rut bien avant le creusement de quatrelarges et profonds silos dans le courant duxe siècle. un niveau de destruction attestel’existence de constructions maçonnéesdatées du xie ou du tout début du xiie

siècle, démantelées apparemment lors de laconstruction des arcades du cloître romanau début du xiie siècle 26.

Parmi les rares éléments architecturauxantérieurs à l’abbatiale romane, il fautparticulièrement regretter la perte des restesd’une ancienne confession, dégagés en juil-let-août 1864 dans la travée centrale de lacrypte et supprimés aussitôt pour la créa-tion d’un espace cultuel dans le goût del’époque 27. les descriptions de l’architectehenry révoil 28, chargé du dégagement etdes travaux en sous-œuvre, et celles du curéde l’époque 29 restent trop sommaires pourpermettre une restitution des vestiges, enl’absence de dessins ou de photographies30. Sous le sol, qui avait déjà été abaissé unepremière fois en 1842 31, un puissantremblai maçonné, épais de 2,60 à 2,80 m,

couvrait le sarcophage du saint 32. cemassif lié au « ciment de granit », d’unesuperficie de 5 m2, formait un amas désor-ganisé de blocs en remploi, sous une dallemonolithe de 2,80 x 1,20 m qui pourraitavoir appartenu à un dispositif monumen-tal abritant la tombe 33. il pourrait en allerde même pour un devant de sarcophagepaléochrétien retrouvé sous la dalle, quirecouvrait un assemblage désorganisé defragments de décors architecturaux et funé-raires d’origine incertaine : tronçons decolonnes, bases, blocs de grand appareil, unchapiteau et trois cippes antiques 34. À sonouverture, le sarcophage contenait desossements reconnus comme complémen-taires de ceux transférés à Saint-Sernin detoulouse en 1562 lors des guerres dereligion. or, si des reliques du saintavaient été élevées dès le début du xiie

siècle, d’après le Liber quintus sancti Iacobi,composé pour l’essentiel entre 1110 et1140 35, qui donne une description détail-lée de sa châsse 36, la vénération continuedu lieu thaumaturge de sa sépulture, attes-tée par les sources écrites 37, suggère qu’unepartie du corps était toujours présente etprotégée, puisque le Liber Sancti Iacobiinsiste explicitement sur l’impossibilitéavérée d’enlever les reliques du saint de sonpropre sarcophage 38. la présence de deuxtombes sous tuiles « non loin du sarco-phage de S. Gilles » 39, comparables à cellesdes vie-viie siècles reconnues au pied desfondations de la façade 40, pose la questiondu contexte funéraire originel.

À deux mètres du sarcophage 41, unmur transversal « de grand appareil »,conservé sur une longueur de près de 4 mpour une hauteur de 1,5 m et une épais-seur de 0,53 m 42, comportait « l’entréed’un caveau et une petite fenêtre ronde,garnie de son fer en croisillon. il est diffi-cile de préciser ce qu’a été cette construc-tion et à quelle époque elle remonte. –mais il est à présumer qu’elle faisait partied’une des anciennes chapelles qui furentdémolies à l’époque de la construction dela crypte de l’église abbatiale…. » 43. laposition de l’oculus dans l’axe du sarco-phage 44 permet d’identifier l’ouverturecomme la fenestella d’une confession àlaquelle on pouvait accéder par uneporte 45.

L’église de 1116

Si le passage d’urbain ii en juillet 1096donna lieu à la consécration d’un autel 46,rien ne permet de lui associer une activitéconstructive attestée ou identifiable.l’histoire monumentale de l’abbaye ne seprécise qu’avec la fondation, en 1116,d’une nouvelle abbatiale (selon un récitrédigé de façon rétrospective dans lesannées 1150-1166 par le continuateuranonyme du livre des Miracula sanctiEgidii, dont la rédaction avait été commen-cée vers 1121-1124 par le bibliothécaire dumonastère Pierre Guillaume) 47. le récit dumiracle 48 mentionne la destruction destrois églises alors existantes dont la confi-guration est donnée avec une précisioninhabituelle, tant pour le cadre monumen-tal que l’auteur anonyme semble avoirconnu de visu, que pour les conditionsdifficiles d’un chantier qui aurait pu mettreen danger les pèlerins pendant les travauxde démolition 49 : « lorsque nous posâmesles fondations de la nouvelle basilique l’ande l’incarnation du Seigneur 1116, car l’au-tre église était moins spacieuse et nepouvait accueillir la foule des arrivants,nous nous adonnions à l’œuvre du renver-sement des églises. alors que nous détrui-sions l’église majeure, qui avait été bâtieanciennement avec trois très grands espacesvoûtés (criptis maximis) et des pierreséquarries, ainsi que l’église Saint-Pierre, quipouvait contenir quatre-vingt frères dans lechœur, ensemble avec le passage (porticus)de pierre qui lui était attenant du côténord et qui s’étendait du chevet de l’églisesupérieure jusqu’à l’extrémité de l’égliseSaint-Pierre dans le sens de la longueur,par lequel les frères avaient coutume desortir en procession les jours de fêtesolennelle, et qui était appelée depuis lestemps anciens via sacra, et que nous détrui-sions aussi l’église Sainte-marie, se mani-festa l’admirable force de dieu toutpuissant » 50.

ce texte quelque peu équivoquesuggère l’existence d’une église majeure àdeux niveaux dont le chevet supérieur,situé au-dessus d’une cripta anciennementvoûtée abritant le corps du saint 51, étaitrelié à une autre église dédiée à saint Pierrepar une galerie maçonnée accolée au côté

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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nord de cette dernière : un dispositif decirculation attesté, par exemple, à l’abbayede Saint-claude (Jura) au xie siècle 52. lesdeux édifices auraient été alignés sur un axelongitudinal ‒ probablement selon le déni-vellement du terrain ‒, l’église Saint-Pierreétant située à l’est de l’église majeure 53, etl’église Sainte-marie à un emplacementnon spécifié. on constate que le vocable desaint Privat est absent, et que celui de saintPierre, qui correspond à l’église principaledans le récit de la fondation du monastère,n’est pas celui de l’ « ecclesia maior », bienque cet édifice abrite le « chorus » desmoines dont le nombre considérable dequatre-vingt personnes suppose un édificeassez spacieux, et une communauté etune familia encore plus nombreuses. Si ladisposition des édifices fut effacée par leurdestruction, le souvenir de la porticus lapi-dea appelée « via sacra » survivra dans latitulature de l’office du sacriste jusqu’à lasécularisation de l’abbaye en 1538 54. et sila démolition de trois églises au profit d’un

seul édifice abbatial plus grand supposeune réorganisation spatiale et liturgiquesubstantielle, elle ne fut peut-être pascomplète, si l’on en juge d’après le murdécouvert en 1843 devant la façade(fig. 1) : « au nord des fondations on arencontré un mur avec contrefort qui a étécoupé pour la construction de la basilique.c’est sans doute un mur qui avait appar-tenu à une église, puisqu’on a trouvé descroix grossièrement gravées contre lecontrefort, et au pied plusieurs sarcophagesen pierre et des ossements » 55. la construc-tion en appareil mixte de ce mur, dont lescontreforts ou piles en moyen appareil sontarasés à fleur de parement, ne saurait êtreantérieure à la fin du xie siècle et son appar-tenance à l’une des églises détruites en1116 laisserait supposer que l’édifice dontil faisait partie était alors de constructionrécente.

d’après le célèbre récit rétrospectif ducontinuateur des Miracula, les murs de

l’église commencée en 1116 atteignirentrapidement une hauteur suffisante pourqu’un homme risquât la mort en tombantdu lit d’attente 56. au terme de sa construc-tion, l’édifice comportait une église infé-rieure, où la communauté célébrait la missamatutinalis avant de monter en processionad altare superius, l’autel majeur de l’églisesupérieure qui accueillait les fidèles 57,ceux-ci n’étant permis de prier « devant letombeau du saint » 58 qu’à titre exception-nel : vers 1138-1152, l’autel de Saint-Gilles« nouvellement fait » répondait à « l’autreautel inférieur… où le corps du saintrepose inhumé depuis les temps anciens »et auquel les fidèles ne pouvaient accéderque sur autorisation spéciale, et sous bonnegarde 59. le 11 mai 1166, une guérisonintervint devant la tombe du saint dans la« crypte inférieure » 60 .

la date de 1116 correspond à celledonnée par la célèbre inscription incorpo-rée dans le premier contrefort méridional

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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Fig. 1 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, mur nord sous l’escalier, au nord-ouest du soubassement de la façade occidentale (relevé tachéométriqueet photoredressement h. hansen, 2009-2011).

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de la nef, à l’angle occidental de lacinquième assise au-dessus du sol actuel,dans l’ancienne galerie nord du cloître(fig. 2) 61. le texte, déjà publié dans sonétat mutilé par Prosper mérimée,mentionne le début de la constructionde « ce temple de Saint-Gilles » le lundide l’octave de Pâques 1116 : (AN)NOD[OMI]NI M°C°XVI° HOC TE[M]PLV[M]/ (SANCTI) ÆGIDII ÆDIFICARI CEPIT/ (MENSE) AP[RI]L[IS] FER[I]A II INOCTAB[A] PASCHE 62. toutefois, si l’ins-cription est en soi considérée commeauthentique 63, sa position décalée sur laface du bloc 64 est sans rapport avec sonemplacement actuel ; par ailleurs, la pierrese situe dans un niveau de constructioncaractérisé, à l’extérieur, par le remploimassif de blocs retaillés, de formats et dematériaux divers (fig. 3) et, à l’intérieur, parl’un de ces changements d’axe et d’aplombqui intervinrent à plusieurs reprises aucours du chantier de l’église inférieure.tout porte donc à croire que l’inscriptionet les matériaux en remploi furent prélevéssur un édifice antérieur. or, l’étude archéo-logique atteste que l’église actuelle futconstruite au détriment de l’espace claustraldu xiie siècle, déjà en place, tandis que la

date tardive de son architecture est confir-mée sans équivoque par l’ensemble desdonnées typologiques, techniques et sty-listiques, et même celles de la numisma-tique (la représentation des monnaiesdans la scène de l’achat des aromates esten effet suffisamment précise pour qu’onpuisse les dater de la fin du xiie ou du xiiie

siècle) 65.

L’espace claustral et les vestiges antérieurs àl’abbatiale romane (étape 1 de la construc-tion 66)

comparé à l’abbatiale, l’ensembleclaustral situé au sud de celle-ci (fig. 4) sedistingue par la modestie de ses dimen-sions, le désaxement des bâtiments,l’irrégularité et l’étroitesse de sa courrectangulaire. ce contraste relève en fait deson antériorité.

l’état d’abandon des vestiges de l’an-cien cloître et des bâtiments adjacents,rarement évoqués dans la littérature etmoins encore étudiés 67, résulte d’un déclindu monastère amorcé dès la fin du moyenâge qui aboutit à sa sécularisation, en1538. une bulle de Paul iii apporte

quelques informations sur son état, l’insuf-fisance, l’insalubrité et l’inadaptation dubâti au climat étant évoquées commeautant d’arguments en faveur de l’abandonde la vie régulière 68. la présence de« personnes séculières » dans la clôture 69,l’utilisation du cimetière claustral par unepopulation laïque ‒ confirmée par lesfouilles archéologiques 70 ‒ et le fumierentassé devant le cellier 71 illustrent ladéchéance des anciens espaces de la viecommunautaire, convertis ou voués à ladestruction. le remplacement de l’an-cienne aile orientale par la chapelle de laconfrérie des Pénitents blancs, baillée àprix-fait le 29 septembre 1602, entraîna ladestruction des voûtes, de la façade sur lecloître et des parties hautes du mur orien-tal du bâtiment médiéval « depuis lamuraille de ladite église jusqu’à la chapellequi est joignant la maison abbatiale » 72 ;cette dernière fut rasée peu de temps aprèspour construire des ouvrages de fortifica-tion au-dessus des parties hautes de l’église,transformée en forteresse protestante 73. Sile second contrat pour la reconstruction del’église en date du 7 septembre 1650 auto-risait déjà la récupération des pierres « àprendre autour des cloîtres… » 74 , lesvoûtes de la galerie nord sont encorementionnées vers 1739 75. conséquencepossible de l’union de l’ancienne collé-giale à la mense archiépiscopale d’aix en1777 76, la destruction des arcades et de leursmurs-bahuts jusqu’aux fondations, accom-pagnée de toute évidence de la transforma-tion du décor sculpté en chaux vive 77, étaitdéjà consommée au moment de la vente del’ensemble comme bien national. en effet,le « Plan géométrique des bâtiments desci-devant chanoines de st-Gilles servant àexploiter la dîme » dressé en 1791 78 (fig. 5)montre une cour vide. l’état des bâtimentsclaustraux, tous affectés à des usages agri-coles, oléicoles, viticoles et de stockage,permet de mesurer l’ampleur des destruc-tions ‒ l’aile sud était cependant encoreconservée sur toute sa longueur, au-delà dela chapelle des Pénitents, et partiellementcouverte. une longue salle perpendiculaireattenante, divisée en deux nefs par unerangée de piliers, devait être supprimée parla suite, et l’aile sud rétrécie et éventréepour ménager un passage à la cour. en

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cl. a. hartmann-virnich.Fig. 2 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, inscription incorporée dans le premier contrefortméridional de la nef.

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dehors de la partie basse du mur est del’aile orientale, conservée dans la chapelledes Pénitents, il ne subsiste aujourd’huiqu’une partie de la façade nord du bâti-ment méridional et l’extrémité orientale dumur sud, ainsi que le rez-de-chaussée del’aile ouest située en contrebas, divisée en

trois travées voûtées de croisées d’ogives« lombardes », et enchâssé dans un ensem-ble de maisons parasitaires. Si l’analysedétaillée de ces vestiges dépasse le cadre dela présente étude, celle de leur rapport avecle cloître et l’église est incontournable pourla restitution des états antérieurs (fig. 6).

À l’heure actuelle, la nature fragmen-taire des indices archéologiques n’autorisequ’une approche partielle et indirecte de laquestion des antécédents monumentaux del’abbatiale romane. en 2004, la mise aujour d’un ancien mur orienté est-ouest,arasé lors de la construction de l’égliseromane et incorporé dans les fondations desa façade au milieu du massif saillant dusoubassement 79, permit de comprendreque, lors de sa construction, l’église actuelleavait empiété sur une aire claustralepréexistante, située au sud de l’ancien murattribué à une église antérieure 80. levestige constituait en effet un point derupture, provoquant dès le départ du chan-tier un affaissement de la partie sud del’église 81, bâtie sur un terrain plus instable(fig. 7). un autre fragment de cette maçon-nerie semble être conservé dans le pare-ment intérieur du mur occidental : réduità deux assises sur une longueur de 3 à 4 m,il pourrait être en relation avec la construc-tion ancienne incorporée dans les fonda-tions de la façade, du côté extérieur. lapartie nord du mur présente d’autresanomalies remarquables : à hauteur descinq premières assises, le parement estcomposé d’un petit appareil irrégulier,grossièrement ravalé en surface pour êtreintégré dans la nouvelle construction. bien

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Fig. 3 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, relevé tachéométrique du mur sud de l’église. étude géologique des variétés de pierre, a. hairabian, 2010(relevé numérique h. hansen, mise au net l. maggiori).

Fig. 4 - Saint-Gilles-du-Gard, espace claustral de l’ancienne abbaye.cl. h. hansen.

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qu’on ne puisse assurer qu’il prolongeait unautre mur plus ancien, coupé par laconstruction de l’abbatiale romane, maisconservé en élévation sous l’escalier duparvis 82, la présence dans ce secteur deconstructions plus anciennes est évidente.les ressauts et les corrections d’axe desmurs nord et ouest de l’église inférieure,particulièrement marqués, répondent dureste à des contraintes héritées du bâti anté-rieur même si, en l’absence de fouilles, ilest impossible de préciser leur nature 83.

tandis que la fouille de la cour du cloî-tre a établi que l’ancien espace claustralavait été implanté sur une dépression natu-relle anciennement remblayée (la compres-sion de ce terrain par l’église romane ayantmême provoqué l’affaissement des tombesà coffrage du cimetière claustral situé àproximité de l’édifice) 84, l’étude du bâti amontré que le cloître roman était alorsdéjà en place, et qu’il s’étendait au-delà de

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Fig. 6 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbaye, plan tachéométrique de l’ensemble de l’église et des restes des bâtiments monastiques ;restitution des éléments antérieurs en rouge (h. hansen, 2009-2011).

Fig. 5 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbaye, copie du plan de 1791 (arch. dép. Gard G1235).

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l’emprise de la grande abbatiale, sur unedistance d’au moins 11 m (fig. 8).

Sous le parvis, le soubassement de lafaçade (fig. 9) est longé à une distanced’environ 5,50 m par un mur médiéval,borné au nord et au sud par deux murstransversaux de construction inégale dansl’axe des murs gouttereaux de l’église.lorsqu’il fut dégagé au cours des premierstravaux de restauration, en 1842, ce murconservait encore la retombée d’une voûte,qui inspira alors la construction du demi-berceau destiné au soutènement du nouvelescalier d’accès 85, tel qu’il devait effective-ment exister avant le xviie siècle 86.légèrement désaxé vers le nord-ouest, lemur de moyen appareil comporte plusieurscoups de sabre issus de différentes étapesde construction et de modifications. Samoitié sud est toutefois homogène, avec

des assises continues dotées de rangéesrégulières de trous de boulin supposantl’existence d’une élévation plus importanteà l’origine, et plusieurs occurrences d’unmême signe lapidaire. de faibles tracesd’inscriptions, inédites à ce jour, attestentl’accessibilité de ces élévations au xiie siècle.le relevé topographique met en évidenceque ce mur, dont l’orientation diffère decelle de la façade, était en fait l’extrémiténord du mur de l’aile occidentale quis’avançait sur une longueur de 11,81 msous l’escalier actuel. au-delà de cettelimite, l’appareil plus sommaire et l’orien-tation divergente du mur suggèrent unprolongement destiné à soutenir la voûtede l’escalier, pour laquelle le mur de l’aileouest fut alors réduit en hauteur. trois arra-chements attestent la présence de deuxpiles engagées larges de 0,33 m, suivis du

négatif d’une maçonnerie perpendiculaired’une épaisseur de 0,63 m. l’écart régulierentre ces éléments permet de restituer unesérie continue de douze supports du mêmetype, espacés de 2,11 m, en correspon-dance exacte avec deux négatifs semblablesà l’extrémité sud du même mur 87, et entous points identiques au ryhtme del’arcade aveugle du bâtiment claustral sud.À l’intérieur, le rez-de-chaussée de l’aileoccidentale, long de 25,50 m pour unelargeur moyenne de 7,50 m, est coupé aunord par un mur de refend de facture plussommaire, ce qui suppose effectivementune extension du bâtiment vers le nord,avec des subdivisions internes 88. la resti-tution de l’aire claustrale, qui formait unrectangle d’environ quatre sur cinq 89, apermis d’attribuer au mur-bahut de l’ar-cade occidentale une maçonnerie parallèle,

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Fig. 7 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, relevé manuel de la façade occidentale, élévation extérieure (h. hansen, 1999-2002). relevé des maçonneriesdégagées au niveau du soubassement, en jaune transparent (c. markiewicz, 2004).

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située à environ 3,50 m de l’ancien bâti-ment ouest et à proximité immédiate del’abbatiale, une construction qui fut araséemais laissée en place lors du creusement desfondations de la façade. ce mur corres-pondait donc sans doute au mur mur-bahut de la galerie sud du cloître, dont laposition et les dimensions sont indiquéespar la forme de la tranchée d’épierrementdu xviiie siècle identifiée en fouille.

Si l’arcade aveugle des galeries ducloître se poursuivait selon le mêmerythme à l’est et au sud, la construction

et l’ordonnance de l’aile méridionale sedistinguaient de celles de l’aile occidentale.À la différence de la salle sud-ouest, entiè-rement parementée et voûtée en pierre detaille, l’intérieur du rez-de-chaussée dubâtiment sud est en petit appareil, tandisque sa façade, scandée sur toute la longueurde l’arcature aveugle en moyen appareild’après les traces d’arrachement, était pare-mentée en moyen appareil. À l’inverse,l’étage, dont le mur de façade est plusmince pour ménager un retrait d’appuipour le plancher, est construit en pierre detaille à l’intérieur et en petit appareil à

l’extérieur, au-dessus du négatif du plan-cher et de l’arcade aveugle de la galerie atte-nante du cloître, dont il subsiste deuxtravées et la moitié d’une troisième à l’ex-trémité occidentale, avec un pilastre d’ori-gine (fig. 10 et 11) 90. une claire-voie dehuit baies étroites à ébrasement simple,dont l’arc en plein cintre encadre un petittympan monolithe, s’inscrit à l’extérieurdans un troisième niveau en pierre de tailleet en appareil mixte. avec une secondesérie de fenêtres plus larges au sud, dont ilne subsiste que la plus orientale 91, elleéclairait une longue salle rythmée deconsoles et de colonnettes engagées alter-nant avec les baies, sous les entraits d’unecharpente de toit. À l’extrémité orientale,une porte monumentale donnait sur l’étagede la galerie orientale, qui communiquaitsans doute avec l’église haute de l’abbatialeantérieure à l’église actuelle. l’appareilmixte, la forme des baies, les tailles décora-tives des claveaux du portail d’étage(fig. 12), les rares signes lapidaires, la sectionlégèrement outrepassée des fûts des colonneset leurs chapiteaux décorés d’une simpleesquisse de feuilles d’eau géométriquesconfirment une date vers le second tiers duxiie siècle ; les acanthes raides et charnues duchapiteau de l’arcade du cloître (fig. 13)s’apparentent pour leur part à ceux duportail du bâtiment occidental du cloîtred’arles, construit vers la même époque 92.

les dimensions, l’éclairage, le décor etla porte haute posent la double question dela fonction de la salle – probablement ledortoir ‒ et de la circulation à l’étage ducloître avant la construction de l’abbatialeactuelle. or, le relevé de la crypte a montréque l’ouverture supérieure bouchée dans lemur méridional de la quatrième travéecentrale, construite au tout début ou en

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Fig. 9 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, mur à l’ouest de la façade occidentale, sous l’escalier (relevé tachéométrique et photoredressement,h. hansen, 2009-2011).

Fig. 8 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbaye, maquette 3d : étape 1, en bleu ; étape 2.1, en vert(G. echtenacher, 2010-2013).

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Fig.10 - Saint-Gilles-du-Gard, façade nord de l’ancien bâtiment sud du cloître (relevé tachéométrique h. hansen, 2009-2010 et photoredressementl. deye, h. hansen, 2009-2011).

Fig.11 - Saint-Gilles-du-Gard, façade nord de l’ancien bâtiment sud du cloître (restitution h. hansen, 2009-2011).

cl. a. hartmann-virnich. cl. a. hartmann-virnich.

Fig.12 - Saint-Gilles-du-Gard, portail à l’étage du bâtiment claustral sud. Fig.13 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne galeriesud du cloître, chapiteau de pilastre de l’arcadeaveugle.

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amont du chantier 93, était en fait une fenê-tre fortement ébrasée, située à hauteur del’étage du cloître 94 et donc incompatibleavec le bas-côté de l’église inférieure ajoutédans un second temps 95. Sa présencesuppose pour la nouvelle église un premierprojet ou état respectant l’emprise du cloî-tre, projet qui fut rapidement abandonnéau profit d’un programme beaucoup plusambitieux. la porte haute du bâtimentclaustral sud, qui n’avait aucun lien avec lanouvelle église haute, pourvue d’une portelatérale à l’est de l’espace claustral, fut alorsmurée par un moyen appareil dont lafacture romane atteste la précocité duchangement de projet.

L’espace funéraire dans les galeries du cloître

Six inscriptions funéraires, attribuées àla première moitié du xiie siècle par leurmillésime ou par des conjectures prosopo-graphiques au demeurant discutables, ontété gravées sur certains blocs d’appareilappartenant à la partie méridionale dusoubassement de la façade et sur le mur sudde la travée occidentale de l’église, à unniveau immédiatement inférieur à celui del’assise portant l’inscription de 1116.l’apparente consonance de ces repèreschronologiques, qui contraste avec la dateplus tardive de l’édifice fournie par lesdonnées archéologiques et chrono-typolo-giques 96, pose le problème de la date et dela nature de ces inscriptions 97, dont laformule tumulaire (hic iacet, hic sepultusest) 98 pourrait se référer à des sépulturesqui auraient été déplacées du cloître lors dela construction de l’église. l’utilisation desgaleries, non encore fouillées 99, commeespace funéraire est en effet attestée par uneépitaphe similaire gravée dans le mur dubâtiment méridional 100. on ne sauraitcependant affirmer que l’inévitabledestruction de tombes et la création après-coup d’inscriptions commémorativessuffise à expliquer que certaines formulesne comportent ni millésime ni date d’an-niversaire du décès 101. quoi qu’il en soit,l’absence de sépulture est confirmée aumoins dans un cas tandis que subsistent lesindices d’au moins un ossuaire contempo-rain du remblaiement lié au chantier del’abbatiale 102.

Étape 2. Construction de la crypte :abandon et modification d’un premier

projet ou d’un état antérieur

l’ordonnance de l’église inférieurerésulte d’un long processus constructif aucours duquel un premier état ou unepremière amorce de moindre envergurefurent remplacés par un vaste édifice à troisvaisseaux. celui-ci s’étend sous les sixtravées occidentales de la nef supérieure demême envergure et dont la quatrièmetravée surplombe l’espace-reliquaire autourdu tombeau du saint (fig. 14a-f ). À l’inté-rieur des puissants murs gouttereaux scan-dés de contreforts massifs et de deuxtourelles d’escalier à l’angle du socle sail-lant de la façade occidentale, les collatérauxde cette crypte monumentale, de largeurinégale à la différence de ceux de l’églisehaute qui corrige la dissymétrie dimen-sionnelle, ne se développent sur toute lalargeur de l’édifice que sous les deux travéesoccidentales de la nef haute, le collatéralnord étant muré à partir de la troisièmetravée à hauteur de l’escalier principal et ducôté nord du vaisseau central. établi contrela face orientale du second pilier nord etsoutenu par deux voûtes rampantes, l’esca-lier descend sous une voûte en berceausegmentaire en direction du nord jusqu’àune seconde volée adossée au mur goutte-reau. Si les deux travées occidentales sontintégralement voûtées sur croisées d’ogivesornées, soutenues par des piliers et pileslatérales de forme inégale et discordante, cemême voûtement se limite au seul vaisseaucentral dans les troisième, cinquième etsixième travées voûtées d’arêtes dans le bas-côté unilatéral. Sous une sobre voûted’arêtes, la quatrième travée du vaisseauprincipal est fortement resserrée entredeux murs massifs décalés, désaxés et dotésà un niveau aujourd’hui inaccessible deplacards, d’un escalier au nord, aujourd’huiincomplet et impraticable, et d’un passageau-dessous de la baie murée au sud. elleaccueille le tombeau du saint, dégagé etenchâssé au milieu du xixe siècle dans unnouvel espace liturgique dont l’enveloppefut encastrée en sous-œuvre sur tout lepourtour dans les parties basses de la travée.au bas-côté sud, le mur de séparation,

doublé d’une puissante maçonnerie à arcde décharge aménagé en enfeu et faisantcorps avec la voûte en berceau longitudi-nal, est traversé de part en part par lepassage donnant dans l’espace reliquaire.Face à ce couloir mural, sous le puissantdoubleau occidental de la voûte, un puitsa été aménagé dans le dallage, à proximitéde la porte du cloître qui s’ouvre sur latroisième travée voisine. les deux travéesorientales, adossées au nord à des maçon-neries qui se distinguent du moyen appa-reil de l’ensemble de la crypte par leurcaractère plus sommaire et irrégulier, et àl’est par des murs de refend insérés entre lesoubassement des piliers de la croisée, sontprogressivement surélevées conformémentà la montée du terrain. À la cinquièmetravée, un troisième escalier, adossé au murgouttereau sud, donne sur une rampe d’ac-cès. cette dernière traverse le collatéral àl’équerre pour rejoindre le haut vaisseau del’église supérieure par une dernière voléeétablie contre la face orientale du dernierpilier à hauteur de la voûte.

au sud, une série de grandes fenêtres,dont l’ébrasement double très fortementincliné dépasse le niveau de l’église haute àl’extérieur, est interrompue à la quatrièmeet à la sixième travée par des baies d’enver-gure plus modeste. un septième jour,aujourd’hui muré, s’ouvrait dans le muroccidental du collatéral nord. au sud, lemur homologue accueille un grand enfeugothique, percé d’une porte au xixe siècle.

l’ordonnance de la nef haute romanecontraste avec celle de la crypte par lacadence régulière de ses piliers cruciformeset piles latérales à demi-colonnes engagées,établis sur de hauts socles parallélépipé-diques moulurés. une anomalie trahit laprésence ancienne d’un refend à l’entrée dela quatrième travée qui surplombe letombeau du saint. dans les quatre travéesoccidentales, les grandes arcades brisées àdouble rouleau, dont les premiers claveauxbûchés à la verticale subsistent dans lasuperstructure du xviie siècle, prenaientappui sur les chapiteaux sculptés toujoursen place, en soutenant les voûtes d’arêtesdes collatéraux, établies sur des doubleauxet des formerets dont il ne subsiste de tracequ’au collatéral sud. À la différence du

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Fig.14a - Saint-Gilles-du-Gard, ancienneabbatiale, coupe longitudinale sur lecollatéral nord (h. hansen, 2009-2012)avec cartographie des matériaux des partiesromanes (a. hairabian, 2010, mise au netl. maggiori).

Fig. 14b - Saint-Gilles-du-Gard, ancienneabbatiale, coupe longitudinale sur le collaté-ral sud (h. hansen, 2009-2012) avec carto-graphie des matériaux des parties romanes (a.hairabian, 2010, mise au net l. maggiori).

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Fig. 14d - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abba-tiale, coupe longitudinale sur le vaisseau central,côté sud (h. hansen, 2009-2012) avec carto-graphie des matériaux des parties romanes(a. hairabian, 2010, mise au net l. maggiori).

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Fig. 14c - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abba-tiale, coupe longitudinale sur le vaisseau central,côté nord (h. hansen, 2009-2012) avec carto-graphie des matériaux des parties romanes(a. hairabian, 2010, mise au net l. maggiori).

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chevet, qui avait déjà atteint au moins lamême hauteur, les deux travées orientalesde la nef, le transept et l’amorce de la travéejointive du chevet ne dépassaient pas alorsencore le niveau d’appui des claires-voieslatérales 103.

élevés avant l’ouverture du chantier dela grande abbatiale ou au tout début decelui-ci autour de l’ancienne confession, lesmurs de la quatrième travée centrale de lacrypte 104, qui se distinguent par leur posi-tion et leur axe discordants 105, ont mani-festement été tributaires du bâti claustralantérieur, dont la fenêtre haute du mur sudtient encore compte. le relevé numériquemet en évidence les désaxements qui accu-sent le caractère particulier de cet espace,dans un contexte architectural qui marqueun changement substantiel du projet. lepremier noyau, constitué de murs moins

épais flanqués de piles engagées (étape 1,en bleu dans la maquette fig. 8 et le planchronologique fig. 15) fut consolidé dansun second temps par l’adjonction des puis-sants murs et piliers des collatéraux quimodifièrent l’emprise et l’orientation del’édifice (étape 2, en gris). ce renforcementsuivait le nouveau système d’axe du murgouttereau sud et de la façade occidentalede la grande abbatiale, sans toutefois s’im-poser aux autres parties du nouvel édifice,dont les piliers et le mur nord reprenaienten l’atténuant l’orientation discordante desmurs de la travée centrale. or, le désaccordavec le nouvel édifice semble hériter d’unalignement plus ancien, perpendiculaire àl’aile orientale du cloître et à peu près paral-lèle au bâtiment claustral sud (fig. 16).d’incessants changements d’aplomb etd’axe au cours de la mise en œuvre des

murs et des piles des premières travées révè-lent les difficultés rencontrées pourimplanter une géométrie cohérente, diffi-cultés aggravées par le fait que la conver-gence de la file de piliers et du gouttereaunord avec le mur sud engendrait entre lafaçade occidentale et le chevet un rétrécis-sement de plus de 2 m interdisant touterégularité métrologique.

l’orientation de la travée de la confes-sion et la position de sa fenêtre méridionalesupposent que le cloître et les bâtimentsmonastiques contigus s’étendaient jusqu’àl’emplacement occupé par le collatéral sudde la nouvelle église. l’archéologie confir-me en effet que celle-ci fut construite àcheval sur le cloître et l’aile orientale, ce quifut probablement à l’origine des faiblessesstructurelles du mur gouttereau dansl’entourage des anciennes constructions

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Fig. 14e - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, coupe transversale sur la troisième travée (h. hansen, 2009-2012) avec cartographie des matériauxdes parties romanes (a. hairabian, 2010, mise au net l. maggiori).

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démontées 106. or, le puits aujourd’huienglobé dans le collatéral de l’église basseétait situé à l’origine dans l’angle nord-estdu cloître, dans le prolongement d’unecanalisation oblique retrouvée sous lepréau, dont la construction soignée, faitede pierres de taille emboîtées sur un solinmaçonné, précéda l’installation du cime-tière 107. la tranchée d’épierrement dumur-bahut de la galerie nord 108, dont unvestige subsiste au contact avec la canalisa-tion 109, et celle du mur-bahut de la galeriesud ne sont pas identiques 110 : parallèle aumur gouttereau de l’église, celle du nord nesuit pas l’orientation de la galerie méridio-nale et la couleur des résidus de mortiersuggère une maçonnerie différente. lareconstruction de la galerie nord sur l’em-placement identifié par la fouille, imposéepar le projet de la grande abbatiale et prise

en compte dès avant l’achèvement del’église inférieure 111, explique aussi la diffé-rence stylistique entre les fragments desculpture architecturale retrouvés dans lecomblement des fosses de récupérationprès de l’arcade nord, qui sont issus desateliers de la façade et du chevet de l’abba-tiale, et le décor en place de la galerie sud,qui appartient à une phase plus ancienne.

les murs de la travée centrale de lacrypte, construits en moyen appareil fine-ment layé sans ciselures périphériques etmaçonné avec des joints retracés à latruelle, accusent la transformation d’élé-ments incompatibles avec le nouveauprojet. Pourtant, les rares signes lapidairesgravés sur l’une des piles du mur sud de latravée se retrouvent sur les maçonneries del’état suivant, qui correspond à une restruc-turation fondamentale de l’ensemble. Si

cette récurrence plaide en faveur d’unemodification au cours d’un même chantier,un remploi de blocs provenant du démon-tage partiel des élévations déjà en placen’est pas à exclure. dans ce cas, il estimpossible d’affirmer si le premier étatidentifié appartenait à un édifice antérieurou à un premier projet de l’édifice actuel,rapidement abandonné.

après le changement de projet, l’esca-lier courbe qui, du côté nord, était logédans l’épaisseur du mur, fut remplacé parun escalier coudé destiné à contourner l’undes piliers de l’église haute (fig. 17 a-c). cenouvel escalier qui remplaça en le détrui-sant le premier escalier mural de la travéede la confession, devenu inutilisable 112, futdécalé vers le nord en interposant un palier

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Fig. 14f - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale. coupe transversale sur le transept, côté ouest (h. hansen, 2009-2012) avec cartographie des maté-riaux des parties romanes (a. hairabian, 2010, mise au net l. maggiori).

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Fig. 15 - Saint-Gilles-du-Gard, plan d’ensemble au niveau de la crypte, chronologie relative sans prise en compte desmodifications ni des restaurations (a. hartmann-virnich, h. hansen, G. echtenacher, 2009-2011, mise au net l. maggiori).

Fig. 16 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbaye, plan d’ensemble, avec indications des différents axes (a. hartmann-virnich, h. hansen, 2009-2011, mise au net l. maggiori).

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entre la première volée de huit marches,orientée vers le nord, et une seconde detreize marches en direction de l’est, pouraboutir à une distance de 1,15 m seule-ment au pied du pilier iv-v nord del’église haute. trop exigu pour des usagersnombreux et construit dans un moyenappareil fruste dont les blocs pourraientavoir été remployés 113, ce passage dérobéétait sans doute réservé à la desserte desdeux espaces liturgiques superposés àl’aplomb de la tombe du saint. la face estdu pilier iii-iv nord bute contre l’appareildu mur nord de la travée déjà en place,remanié pour rectifier la courbe du premierescalier. elle correspond désormais à lalimite ouest du nouvel escalier, dont lepalier est encastré dans la maçonnerie dusupport. ce repentir intervint toutefoisavant l’achèvement de l’église basse : alorsque le mur nord de la seconde voléeperpendiculaire, étrésillonné par un arc dedécharge, s’appuie sur le palier, ses assisessont chaînées à celles de la partie supérieuredu pilier iii-iv, construite en même temps,en fonction des contraintes imposées par leplan de l’église haute et l’ordonnance desvoûtes.

au sud, la fenêtre haute ébrasée futsoigneusement obturée pendant la mise en

œuvre avec un appareil semblable maisd’un module réduit 114. l’arc segmentairede la baie, grossièrement entamé lors de laconstruction de la voûte actuelle, et lesfortes piles engagées ont d’abord été conçuspour un voûtement plus élevé qui futramené ultérieurement au niveau de lavoûte du nouveau collatéral, dont l’ajoutcondamnait la baie du mur déjà en place(fig. 18) au niveau inférieur de ce mêmemur fut ménagée une porte sous linteaud’une largeur confortable de 1,08 m, quicommuniquait sans doute avec l’angle desgaleries du cloître. lors du changement duprojet, ce passage fut prolongé dans lemassif plaqué à coup de sabre contre leparement sud du mur déjà construit(fig. 19a) 115. À côté du passage, l’arc dedécharge segmentaire qui surmonte uneniche profonde et dont le sommet à plate-bande s’inscrit dans l’amorce de la retom-bée du futur voûtement du collatéralaccuse la puissance des maçonneries ados-sées au mur (fig. 19b). l’épaisseur de 1,10 mfut ainsi portée à 2,70 m à l’ouest et à2,55 m à l’est de la travée, de manière àcompenser le fort désaxement dû à la diffé-rence d’orientation avec l’église agrandie.Si l’appareil du second état (étape 2)diffère, le remploi de blocs épaufrés et larécurrence du signe lapidaire associé à lapremière étape 116 laissent à penser qu’une

partie des blocs proviennent de la construc-tion initiale.

À l’est de la travée de la confession,l’ajout des structures du nouveau projetmodifia les piles engagées, dont la diffé-rence de largeur, de 1,36 m au nord et de1,48 m au sud, visait à nouveau à rattraperle changement d’orientation 117. le raccorddes appareils de la travée jointive, difficile-ment lisible et masqué au nord comme ausud par l’adaptation aux assises en place(fig. 20), a effacé les traces de la terminai-son originelle de la travée ‒ peut-être unchevet dont la forme reste conjecturale 118.des indices d’un chaînage pourraient attes-ter l’existence d’une fermeture transversalevers l’est 119, conçue ou construite avec leprolongement de la crypte. en effet, l’en-duit ancien et le semis d’un piquetage desmurs de la travée réalisé pour l’applicationd’un décor peint de la fin du xiiie ou duxive siècle ‒ décor dont il ne reste que dessinopies très fragmentaires ‒ dessinent lenégatif d’un mur de refend de 0,43 md’épaisseur 120. À l’ouest, les piles de latravée de la confession furent enchâsséesdans un mur transversal dissymétrique,avec un retrait des piliers de la travée join-tive de 1,60 m au nord contre seulement0,85 m au sud, la nef centrale se trouvant

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cl. G. echtenacher. cl. G. echtenacher. cl. G. echtenacher.

Fig. 17 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée iv. a : restes d’un premier escalier en vis ; b et c : restes d’un deuxième escalier coudé.

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Fig. 18 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée iv, relevé manuel du mur sud à l’échelle 1 :10, avec cartographie des étapes de construction et desrestaurations (h. hansen, 2011, mise au net l. maggiori).

Fig. 19a - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée iv, passage entre lecollatéral et le vaisseau central, mur ouest. relevé manuel à l’échelle 1 :10avec cartographie des étapes de construction (n. lamoureux, 2011, miseau net l. maggiori).

Fig. 19b - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée iv sud, mur nord.

cl. h. hansen.

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de ce fait fortement décalée vers le nord.un arc de tête engravé dans la voûte de latravée de la confession (fig. 21) vint alorsremplacer une attente ou un arrachementdu voûtain qui suppose le projet ou l’exis-tence d’un prolongement du premier étatvers l’ouest. l’appareil de ce raccord, qui sedistingue par le lissage des surfaces presquedépourvues de traces d’outil et par lessignes lapidaires qu’il comporte, rattachecette reprise à la quatrième étape de laconstruction, qui devait effacer toute tracehors sol de l’ordonnance initialementprévue.

la modification de la travée de confes-sion inaugura le chantier du secondprojet, dans lequel les collatéraux, l’exten-sion orientale et, au niveau supérieur, letransept et le chevet à déambulatoire etchapelles rayonnantes occupent, au nordde l’ancien cloître, une surface plusieursfois supérieure à l’emprise hypothétique del’église précédente. le relevé et la cartogra-phie pierre-à-pierre des assises, des tracesd’outil et des signes lapidaires 121 permet-tent d’attribuer à cette étape l’amorce desmurs sud, ouest et nord ainsi que les pilierssitués à l’est et à l’ouest de la confession(pilier ii-iii nord et sud, v-vi sud et vi-vii nord et sud) [fig. 22]. la répartitiondes signes lapidaires reflète bien les étapesde construction. dans les parties les plusanciennes de l’ensemble monumentalroman, y compris dans le premier état de latravée centrale de la crypte 122 et dans lesbâtiments claustraux 123, les marques sontpour ainsi dire absentes. en revanche, surla voûte de la travée iv centrale, construitedans un second temps, des signesnombreux et variés correspondent à ceuxdu placage du mur sud dans le collatéral.la présence de plusieurs exemplaires de laseule marque associée à la première étapes’expliquerait soit par la proximité dans letemps de la seconde, soit par le remploi dematériaux provenant de la constructioninitiale 124, sans exclure une similitudefortuite des signes dont la forme est trèssimple (fig. 23 a-b). en règle générale, lessignes lapidaires des deux premières étapesde construction se distinguent de ceux desétapes suivantes par une taille irrégulière et

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cl. h. hansen.

cl. a. hartmann-virnich.

Fig. 20 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée de la confession, pilier nord-est (avec traces dechaînage et de restauration).

Fig. 21 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée de la confession, côté sud.

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Fig. 22 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, plan schématique avec codage des éléments architecturaux (h. hansen, l. maggiori, 2009-2011).

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peu profonde 125, par l’occurrence d’élé-ments d’apparence figurative (« oiseau »,« crosse ») et par la fréquence, dès laseconde étape, de traits diagonaux tracésavec ou sans recours à une règle.

la présence de nombreux signes lapi-daires identiques confirme que la voûte dela travée centrale iv et les maçonneriesplaquées contre le mur sud de celle-ci

furent construites en même temps. d’autressignes lapidaires se retrouvent à la fois surle mur de placage des travées iii à v et surle mur gouttereau sud, ce qui souligne lacohérence de la construction au début dugrand projet. Se rattachent probablementà cette étape les piliers v-vi sud dontl’appareil, bien que dépourvu de signeslapidaires, est similaire et dont la largeurcorrespond à quelques centimètres près à

celle du pilier iv-v sud. les mêmes carac-tères techniques permettent d’associer àcette étape les piliers ii-iii, les piliers enga-gés iii-iv et iv-v et les piliers situés à l’ex-trémité orientale en dépit de leursdimensions discordantes 126. À ce stade destravaux, le pilier vi-vii sud, le pilierengagé vi-vii et le mur sud de la sixièmetravée, réalisés plus sommairement,n’étaient pas destinés à être vus mais à

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Fig. 23a - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, extrait du tableau de l’étude systématique des signes lapidaires (h. hansen, 2009-2011).

Fig. 23b - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, coupe longitudinale sur le collatéral sud, relevé numérique avec cartographie des signes lapidaires(h. hansen, 2009-2011).

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servir de fondation. ce n’est qu’à laquatrième étape qu’un remaniement despiliers conférera à cette travée un aspectplus soigné pour agrandir l’espace utile del’église inférieure vers l’est. les deux piliersoccidentaux i-ii nord et sud appartiennentpour leur part à deux étapes beaucoup plustardives (étapes 6 et 7).

la mise en œuvre simultanée des murssud, ouest et nord de la grande église bassetenait compte de la présence de construc-tions plus anciennes, dont les murs quiferment les cinquième et sixième travées duvaisseau central en délimitant un espaceinaccessible situé sous le collatéral nord de lafuture église supérieure. entièrement homo-gène sur toute sa hauteur visible jusqu’à lavoûte adossée ultérieurement, le mur de lacinquième travée est construit avec unmoyen appareil simplement layé, dépourvude ciselures périphériques et sensiblementplus irrégulier. au sommet, d’anciens jointstracés à la truelle, qui ont échappé au rejoin-toiement au ciment, disparaissent derrière leformeret de la voûte 127. les six premièresassises de la pile engagée v-vi nord, chaî-nées avec celles du mur, témoignent del’existence d’une structure perpendiculaire,grossièrement retaillée pour accueillir lesassises plus réduites et finement taillées dusupport. le socle du mur nord de latravée vi, enduit jusqu’à une hauteur d’en-viron 1,70 m, est lui aussi antérieur à laconstruction de la crypte. Son appareil estdissimulé sous un liant récent qui enconserve la surface irrégulière 128 et quidéborde sur la partie haute en pierre de tailleattribuable probablement à la seconde étapede la construction de la crypte. on distingueà une hauteur d’environ 4,30 m les tracesd’une série de quatre ou cinq consolesformées de trois assises superposées d’envi-ron 0,15 sur 0,35 m, bûchées à fleur deparement. la fonction de ces encorbelle-ments, espacés de 1,10 m, qui se poursui-vaient sur le mur dégagé entre les fondationsdes piliers de la croisée du transept lors desfouilles des années 1970, reste incertaine. ils’agissait peut-être d’une construction à rez-de-chaussée ou étage planchéié, liée à un étatplus ancien ou provisoire.

Si les assises du mur gouttereau sud sontgénéralement continues et caractérisées par

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Fig. 24 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 2.2 (G. echtenacher, 2010-2013).

Fig. 25 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, mur occidental du collatéral nord, baie obturée par unappareil irrégulier.

cl. h. hansen.

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un même type de layures 129 obliques finesà ciselure périphérique de 0,03 à 0,05 m,une rupture partielle à l’angle de la pile ii-iii sud à l’intérieur, et un changementd’épaisseur dans le mur 130 marquent larencontre d’assises poursuivies depuis lesocle de la façade à l’ouest et de laquatrième travée à l’est. À l’extérieur, lapartie occidentale se distingue avant toutpar la fréquence de matériaux retaillés hété-roclites. À l’intérieur, où un enduit gênel’identification des matériaux, l’existencede remplois dans les premières assises duparement est suggérée par des tailles en épicomparables à celles de la porte haute dubâtiment sud et généralement absentes surles parements de l’église. cet appareil destravées i et ii, plus grand, plus régulier etplus homogène que celui des travées iii, ivet v, est caractérisé en outre par le ravale-ment de blocs mal ajustés au moment dela pose 131 et par une répartition différentedes signes lapidaires : à l’intérieur des deuxtravées occidentales, ce sont presque exclu-sivement des grands traits diagonaux 132,gravés le plus souvent à l’aide d’une règle.Si le même type de signes s’observe encoredans la travée iii, les traits y sont tracés àmain libre et associés à des marques d’untype différent, dont un signe figuratifcaractéristique en forme d’oiseau 133. Plus àl’est, dans les travées iv et v, dominent lessignes repérés sur le placage du mur sud dela travée de la confession 134. À l’extérieur,le raccord entre les travées occidentales etorientales correspond à un changementdans la construction des contreforts versl’est, réalisés avec un système d’assisesdistinct de celui du mur.

on peut ainsi résumer l’étape 2 : l’ad-jonction de murs et de piliers autour del’ancienne confession s’accompagna de laconstruction de la base des murs périphé-riques ; le mur gouttereau sud fut, à partirde la quatrième travée vers l’est jusqu’autransept, ainsi que vers l’ouest, érigéjusqu’au raccord avec les assises continuesdepuis le mur occidental et incluant laseconde travée. Si les murs sud et ouest,homogènes entre eux 135, sont d’équerre,l’inflexion du mur nord, dont les assisesinternes s’interrompent à l’angle 136, est la

conséquence manifeste d’anciennescontraintes. À l’issue de l’étape 2 (fig. 24),la construction des murs extérieurs sud,ouest et nord atteignait du côté extérieursud une hauteur d’environ 5,40 m au-dessus du sol actuel, soit environ à 6,20 mdu sol intérieur, un niveau proche du solde la future église haute. au sud, les assisesarrivent à la mi-hauteur des fenêtresactuelles plus tardives, car construites ensous-œuvre à la place d’une ébauche defenêtres moins hautes et plus étroites, dontil subsiste les deux à trois assises infé-rieures ; leur imposte devait correspondre àl’arase de cette étape de construction, lais-sée en attente pour le voûtement. uneautre baie incorporée dans le mur occiden-tal, obturée par un appareil irrégulier quirappelle les constructions du xviie siècle,s’inscrit de toute évidence dans la construc-tion d’origine 137. antérieure à la voûte ducollatéral nord qui coupera sa partie supé-rieure, elle ne traverse pas le socle de la

façade, car celui-ci ne pouvait sans doutepas recevoir un jour direct. l’amorce d’unevoûte segmentaire inclinée, taillée dans levoûtain au-dessus de l’ouverture, permetde restituer un puits de lumière aboutissantdevant le seuil du portail nord, sécurisésans doute par une grille et destiné à éclai-rer le pied de l’escalier nord de la crypte(fig. 25) 138.

La troisième étape de la construction dela crypte : la voûte en berceau de laquatrième travée du bas-côté sud

les élévations des murs et des piliersengagés de la grande crypte (fig. 26) neprévoyaient pas d’impostes pour recevoirun voûtement. au départ du projet de lanouvelle crypte, les piliers engagés liés auxassises des murs dépassaient le niveau desvoûtes actuelles, à l’instar de la pile engagée

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Fig. 26 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 3 (G. echtenacher, 2010-2013).

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sud du mur ouest, qui ne fut pas modifiéepar la suite 139, et de la pile nord dont lesassises poursuivent celles de la partie hautedu mur sans interruption. ultérieurement,ce support fut, de même que la pile i-ii dumur nord, en partie démonté pour mettreen place un niveau d’appui destiné auvoûtement 140. au sud, plusieurs solutionsfurent adoptées au fur et à mesure del’avancement du chantier. dans unpremier temps, on encastra les largesdoubleaux des travées ii, iii et iv dansl’appareil des supports qui continuent às’élever au-dessus de la retombée et au-delàdu voûtement, sans doute jusqu’au sol del’église haute. le mur de la quatrièmetravée qui avait atteint le même niveau quecelui de l’église fut repris pour recevoir lecordon d’imposte et la retombée duberceau, qui n’étaient pas prévus à l’origine141. le percement d’une baie à pénétration,dont l’ébrasement perturbe l’appareil de lavoûte, intervint certainement après l’amé-nagement des grandes fenêtres dans lesautres travées voûtées d’arêtes et sur croi-sée d’ogives (étape 4), qui se distinguentpar la précision et la qualité de l’appareil etde la mise en œuvre.

Selon une technique courante dans larégion à partir du tournant du xiiie siècle 142,les assises en pierre de taille de la voûteen berceau étaient soutenues pendant laconstruction par des bois de faible épais-seur placés sous les joints et engagés dansdes encoches taillées dans l’extrados desdoubleaux au dernier tiers environ de leurhauteur 143. du côté nord, la voûte prendappui sur l’arase en tas-de-charge du murde placage. À la différence du mur goutte-reau et de ses piles, cette assise incurvée etles ressauts d’appui des piles de part etd’autre ont été conçus dès le départ pourun voûtement ; la concordance des signeslapidaires 144 avec ceux de la voûte de latravée centrale contiguë relève de la mêmeétape de construction. la constructionsimultanée d’un doubleau de formeidentique à la troisième travée suggère leprojet d’une seconde voûte en berceau 145,projet qui sera toutefois abandonné auprofit du voûtement actuel. au-dessus dulinteau de la porte du cloître, le mur de

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Fig. 27a : Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 4.1 (G. echtenacher, 2010-2013).

Fig. 27b - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 4.2 (G. echtenacher, 2010-2013).

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cette travée iii fut alors complètementreconstruit pour accueillir la nouvellegrande fenêtre, contrairement aux deuxtravées occidentales et orientales dont lesparements ne furent remaniés que dansl’entourage des baies. l’hypothèse d’unprojet de voûte en berceau supposeraitl’existence d’un mur d’appui en face dumur gouttereau, dans le prolongement decelui de la travée de la confession, murdont les traces auraient disparu sous lerhabillage cannelé des piliers 146.

dans cette étape de construction, onn’identifie que deux occurrences isoléesd’un seul signe lapidaire 147, du côté norddes premières assises de chaque doubleau.les mêmes marques se retrouvent dans lestravées i, ii et iv aussi bien sur le murgouttereau que sur le mur de placage de latravée centrale.

La quatrième étape de la constructionde la crypte. Un nouveau projet pour

le voûtement et l’éclairage : remaniement des piliers et des baies,

construction successive de deuxnouveaux escaliers

un nouveau changement deplan entraîna des modifications impor-tantes (fig. 27a-b) : le remplacement despremières baies par des fenêtres plus largeset plus hautes, accompagné d’un exhausse-ment des murs d’environ 3 m, un nouveausystème de voûtement auquel il fallut adap-ter les supports et, enfin, une modificationde la circulation. dans le même tempsfurent mis en place les premiers élémentsde trois escaliers : le premier, dans le colla-téral nord servant aux pèlerins ; la rampedes travées v et vi du collatéral sud et l’es-calier mural situé au nord de la travée deconfession, déjà modifié, étant réservé à lacommunauté comme au service liturgique.

l’espace pour le grand escalier nord,établi à cheval sur la seconde et la troisièmetravée du collatéral, fut créé par laconstruction d’un mur de séparation du

côté du vaisseau central, en adossant cemur à la face orientale du pilier ii-iiidéjà en place. l’absence d’un rhabillagedu pilier de ce côté suggère que l’escalierfut construit avant le remaniement dessupports centraux 148. À une distance de1,38 m du pilier, un mur perpendiculairechaîné au précédent vint condamner lecollatéral vers l’est 149. À 1,82 m, les mêmesassises poursuivies une fois encore à angledroit s’intègrent dans le massif sous les seizepremières marches de l’escalier, allégé parune voûte segmentaire adossée au goutte-reau, selon un dispositif identique à celuiemployé pour la rampe au sud. le moyenappareil de l’ensemble se distingue de celuides constructions de la même étape parune finition moins soignée. Si les raressignes lapidaires s’accordent à plusieursétapes du chantier 150, une grande partiede l’ensemble constructif s’inscrit claire-ment dans la quatrième étape. il fut réaliséau fur et à mesure, simultanément avec levoûtement de la troisième travée centrale(étape 5) 151.

la rampe d’escalier de la cinquièmetravée du collatéral sud, réservé aux reli-gieux, débouche entre les travées v et viau milieu du vaisseau principal, dans lechœur liturgique de l’église haute, jadisséparé des trois travées occidentales par unjubé ‒ inséré à une date plus tardive entreles piliers déjà en place 152. la constructionen pierre de taille, plaquée contre le murgouttereau et allégée d’un arc segmentaireà l’instar de l’escalier nord, traverse le bas-côté au moyen d’une plate-bande moulu-rée rampante. cette structure repose sur unsocle d’une hauteur d’environ 2,60 madossé au pilier v-vi sud, pour rejoindrela partie haute de l’escalier, qui prend appuisur un voûtain en trompe conçu spécifi-quement pour la croisée d’ogives du vais-seau central 153. la mise en œuvre de cedispositif débute par un massif de soutène-ment sur lequel on trouve des signes lapi-daires caractéristiques des travaux effectuéslors de la même étape dans le collatéral 154.ce massif est plaqué contre la face est dupilier méridional du vaisseau central à unmoment où ce support n’est pas encorerenforcé pour recevoir les voûtes. ici aussi,

l’escalier laissé en attente ne devait êtrecomplété qu’avec la mise en place du voûte-ment lors de l’étape suivante (étape 5). ausud, en face du massif, on bâtit un soclehomologue, destiné à porter la rampesuspendue. adossé contre le mur goutte-reau et la pile murale v-vi, le massifsitué sous la rampe inférieure est construitdans un appareil alterné du type dit « demontpellier » 155, aujourd’hui altéré ensurface 156. un autre massif indépendant,édifié avec le même type d’appareil, s’ap-plique vers l’ouest contre le précédent,déjà en place, en élargissant le passage de0,20 m. il est allégé par un arc segmentairedont les claveaux répondent au mêmemodule que ceux des arcs analogues de l’es-calier nord, conçu en même temps 157. Plusà l’ouest, la rampe se termine contre la pileiv-v par un escalier de neuf marches qui aété fortement restauré. nonobstant sonaspect incongru, la plate-bande transver-sale bandée entre les deux socles de soutè-nement du côté du mur sud et du côté dela pile v-vi présente une modénature 158

et des tailles à la gradine compatibles avecune date autour de la fin du xiie ou le débutdu xiiie siècle. or sa mise en place précèdecelle de la première marche de l’escaliersupérieur qui conduit vers l’église haute 159.

le nouvel éclairage de la crypte, plusgénéreux, allait de pair avec un change-ment majeur de projet pour le voûtement,changement qui devait entraîner le rema-niement des supports, inadaptés. lesgrandes baies, incorporées en sous-œuvredans le mur gouttereau sud alors que celui-ci avait déjà atteint le niveau du sol del’église haute 160, se distinguent de celles desconstructions précédentes autant par leformat et la taille de l’appareil que par latechnique d’assemblage. la reprise desouvertures ‒ à double ébrasement forte-ment incliné ‒ fut plus importante à l’in-térieur qu’à l’extérieur, où les premièresassises des anciennes fenêtres et la petitefenêtre bouchée de la travée iii restèrent enplace ‒ elles se trouvèrent dissimulées plustard par la toiture de la nouvelle galerienord du cloître, placée au-dessus d’une arca-ture aveugle appuyée sur les contreforts 161.Seules les trois à quatre premières assises

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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Fig. 28 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, relevé numérique, élévation extérieure, côté sud, avec chronologie des principales étapes de la construction(h. hansen, 2009-2011, mise au net l. maggiori).

Fig. 29a - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, coupe longitudinale sur le collatéral sud : relevé tachéométrique avec les baies successives (h. hansen,2009-2011).

Fig. 29b - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, extrait du relevé manuel du mur sud à l’échelle 1 :10, travées ii et iii, avec cartographie des remaniements auniveau de la baie de la travée ii (h. hansen, 2009-2011).

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des grandes baies furent encastrées dans leparement après coup, les assises suivantesfaisant partie d’une nouvelle étape deconstruction (fig. 28).

bien que le module des hauteurs desassises ait été respecté, on constate unedifférence de traitement entre l’ébrase-ment des deux premières baies et celui de latroisième, réalisé avec un soin extrême dansun calcaire fin légèrement dichrome 162.notons que la troisième travée, privilégiéepar la présence de la porte du cloître, sedistingue des autres par une finesse de lataille et un soin dans l’assemblage desblocs, qui tend à effacer la transition entrela partie basse et la reprise. À l’intérieur,celle-ci débute au-dessus du linteau de laporte et s’étend jusqu’à la quatrième assiseau-dessus du sommet de l’ébrasementexterne 163 ; elle est marquée par l’absencede signes lapidaires et par un changementde module, d’outillage et de technique de

taille 164. dans les deux premières travées,en revanche, l’encastrement de l’embrasuredes baies a occasionné des ruptures d’assiseet des incohérences jusque dans l’assisagedu parement externe de la partie supé-rieure, pourtant construite en mêmetemps. ces perturbations sont particuliè-rement lisibles dans la travée occiden-tale 165. Si les trois premières fenêtres ontles mêmes couronnements en plein cintreclavés de part en part, les baies des deuxdernières travées, dont l’insertion a poste-riori est à peine perceptible 166, diffèrentpar leur largeur réduite 167 et par laconstruction en tas de charge des arcs d’ou-verture internes ‒ celui de la sixième baie,beaucoup plus petite, étant intégralementformé d’assises horizontales (fig. 29a-b).dans la mesure où les signes lapidaires 168

suggèrent une continuité des travaux, cesdifférences entre les ouvertures sont proba-blement dues soit à la répartition du travail

au sein d’une même équipe, soit à unedifférenciation fonctionnelle des espaces.

À l’extérieur du mur gouttereau sud,l’appareil de la quatrième étape, de lacinquième assise des grandes baies à la troi-sième assise au-dessous de l’appui des baiesméridionales de l’église supérieure 169, esthomogène pour l’ensemble de la nef et dela façade occidentale (fig. 28 et 30) avec,au sud, une réduction de trois assises àpartir du dernier tiers de la cinquièmetravée. la fin de la quatrième étape estmarquée par un changement de signeslapidaires et de module d’appareil 170. laconstruction atteignait alors une hauteurd’environ 3 m au-dessus du seuil desportails, à mi-hauteur du registre desapôtres, toute la partie inférieure de lafaçade étant chaînée aux tourelles d’angle ;de même, le parement intérieur inclut lesgrands blocs d’embrasure des portes 171.

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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Fig. 30 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, façade occidentale, chronologie relative des étapes de construction sans prise en compte desrestaurations (h. hansen, 2009-2011. vectorisation l. maggiori, 2011 à partir du relevé manuel de h. hansen, 1999-2002).

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la réalisation du socle cannelé de lafaçade alla de pair avec l’adjonction depanneaux cannelés aux quatre piliers de latroisième travée de l’église inférieure 172. cedécor d’apparat masque un renforcementdes faces tournées vers le vaisseau central etl’accès au cloître 173, les supports de cedernier comportant de nombreux graffitid’époque médiévale. les cannelures, tail-lées en ravalement à partir d’un système de

traits préparatoires encore lisible, sont trèssoignées. en revanche, l’imbrication deblocs de dimension variable comme lerecours à l’encastrement à joints d’ongletpour l’ajout des piles obliques destinées ausoutien des ogives, réunies au corps dusupport sous un cordon d’imposte continu,trahissent un certain embarras technique etun manque de familiarité avec la concep-tion de ce type de voûtement. avant le

renforcement des piliers, un parement enpierre de taille fut plaqué contre la faceoccidentale de la travée de confession. lavoûte de cette dernière, fermée par l’in-crustation en sous-œuvre d’un arc en pleincintre, ne laisse dépasser que quelquesvoussoirs en guise de chaînage d’attente. letype de taille et les signes lapidaires quel’on observe sur ces appareils les rappro-chent du voûtement réalisé lors de lacinquième étape 174.

dans les deux travées orientales, sansdoute différentes du point de vue fonc-tionnel, les piliers furent également modi-fiés pour recevoir des croisées d’ogives maisd’une autre manière, en tenant compte dumassif de l’escalier déjà en place. au lieu deplacages cannelés, le renforcement dessupports 175 fut réalisé avec un moyenappareil régulier 176, finement taillé etassemblé à joints très serrés, dont les raressignes lapidaires annoncent ceux du voûte-ment 177. dans le même temps, onconstruisit un mur de refend pour séparerles travées orientales de celle de la confes-sion. un piédroit incorporé dans la faceoccidentale du pilier sud-est de lacinquième travée appartient de touteévidence à une porte ouvrant sur le bas-côté, porte dont le négatif se poursuit dansle harpage de la voûte du collatéral, au-dessus d’une reprise de la face sud du pilier(fig. 31), ainsi que sur la face orientale dupilier d’en face. il est probable que ce cloi-sonnement, dont il ne subsiste aucunetrace dans la sixième travée, était lié à unefonction liturgique.

La cinquième étape de la constructionde la crypte : le voûtement de la

troisième travée

après la modification des piliers, lamise en œuvre du voûtement de la troi-sième travée 178 (fig. 32) 179 permit d’assu-rer une circulation couverte entre letombeau du saint et le cloître. un harpagerégulier lie la voûte sur croisée d’ogives duvaisseau central, réalisée dans un premiertemps, à la voûte d’arêtes du collatéral 180,où figurent les mêmes signes lapidaires 181.le décalage de la troisième et de la

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

322

cl. a. hartmann-virnich.Fig. 31 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée v, pilier v-vi sud. indices d’un refend entre le vaisseaucentral et le collatéral sud.

Page 31: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

quatrième travée centrale imposait unvoûtement dissymétrique que le raccordavec le harpage en attente de la voûted’arêtes déjà en place tendit à harmoniserau mieux. la croisée d’ogives fut conçuesur un tracé segmentaire pour compenserla portée et a été montée non sans difficul-tés en plaçant d’abord les quatre à cinqpremiers claveaux de la retombée. cesderniers, en effet, amorcent une courbedifférente de la partie supérieure desbranches d’ogives 182. cette croisée d’ogivesimpressionne par la qualité remarquable dela taille et de la finition des voussoirs ornésd’un ruban plissé, où apparaissent dessignes lapidaire inédits, incisés sur laface latérale de la grande majorité desclaveaux 183. au-delà d’un large doubleauoccidental, agrémenté de part et d’autred’une moulure à bandeau ionique, la voûtecentrale se poursuit sur environ 0,90 mvers l’ouest avec l’amorce des ogives pourformer une harpe d’attente régulière, quine devait être reprise qu’à la fin du chantierde l’église inférieure, lors du voûtement dela seconde travée, mais avec un appareildifférent, dépourvu de signes lapidaires 184.la limite d’un ancien enduit le long de laharpe du voûtain en attente garde la traceen négatif d’une cloison qui fermait lapartie couverte de la crypte vers les travéesoccidentales restant à ciel ouvert, vraisem-blablement – parmi d’autres raisons – enréponse à des problèmes statiques de plusen plus manifestes.

le chantier se poursuivit avec le voûte-ment des deux travées orientales du vais-seau central 185 dont les ogives furentprobablement assemblées avec le cintredéjà employé à la troisième travée 186. onajouta ensuite les voûtes d’arêtes latéralesau sud (fig. 33), en reprenant le modèle duvoûtement de la troisième travée, déjà enplace 187. le raccord avec le mur nordpréexistant ne fut toutefois pas réalisé de lamême façon dans les deux travées, seule lacinquième étant pourvue d’un formeret.dans le collatéral, la retombée des voûtess’appuie sur des impostes dont l’encastre-ment a posteriori dans le mur gouttereaudéjà construit, quoique quasi impercepti-ble, est notamment attesté par l’emploi

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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Fig. 32 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 5.1. (G. echtenacher, 2010-2013).

Fig. 33 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 5.2. (G. echtenacher, 2010-2013).

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d’un mortier différent 188. les voûtes duvaisseau principal, et plus particulièrementcelles de la dernière travée, se distinguentpar un grand nombre de marques lapidaires,apparentées à celles des voûtes de la travéeiii 189 et du collatéral nord (travée ii eti) 190, mais comportant des signes inédits 191.la répartition de ces marques sur les diffé-rents éléments architecturaux réalisés enmême temps suppose une distributionorganisée des tâches 192 (fig. 34).

après ou avec le voûtement des troi-sième, cinquième et sixième travées, lechantier atteignait l’élévation hors fonda-tion des parties orientales, où l’on retrouveun grand nombre de signes lapidairesidentiques sur les parements des chapelles

rayonnantes et de la vis 193. le fait que lesmêmes marques existent à l’extérieur descinq travées occidentales de la nef, jusqu’àune hauteur d’environ 13 m 194, confirmeun avancement simultané des travaux dansle chevet et la nef (fig. 35).

au-dessus des baies de l’église infé-rieure, la nouvelle étape de constructions’annonce par un changement des signeslapidaires 195 et du format de l’appareil. ilexiste, en effet, une différence marquéeentre les blocs du niveau précédent, trèslongs – certains d’entre eux dépassent 2,20m pour une hauteur de 0,20 à 0,35 menviron ‒ et les assises de la reprise, plushautes et de formats moins allongés ‒ entre0,80 m et 1,80 m environ, exceptionnelle-ment 2 m. dans le mur sud, moinsperturbé par les restaurations du xviie

siècle, les assises, au nombre de 9 à 11 selonles travées 196, sont sensiblement homo-gènes, et prolongent sans discontinuitécelles de la façade et des tourelles d’angle.au-dessus d’un arrêt visible à hauteur dusommet des archivoltes latérales, le pare-ment est composé d’un appareil standar-disé 197, avec des assises de 0,25 à 0,28 mformées presque exclusivement de blocsde 0,60 à 0,70 m, qui témoigne d’uneorganisation différente de l’approvisionne-ment, correspondant à une nouvelle étape(étape 7) 198.

la simultanéité des travaux danscertaines parties des églises inférieure etsupérieure se traduit par la parenté dudécor. de même que les panneaux canne-lés des piliers de la crypte s’apparentent àceux du socle de la façade, les ogives à

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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Fig. 34 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, coupe longitudinale sur le vaisseau central, avec cartographie des signes lapidaires (h. hansen, 2009-2011).

Fig. 35 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, élévation extérieure côté nord, relevé numérique montrant la chronologie des étapes de construction(h. hansen, 2009-2011, mise au net laurent maggiori).

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ruban plissé répondent à celles du collaté-ral du chevet (fig. 36a-b). quant au décorfiguratif et végétal des clefs, il est compara-ble aussi bien à celui de la frise et de la faceinférieure de la corniche de la façade(fig. 36c-d) qu’à celui des chapiteauxencore en place à l’entrée du déambu-latoire 199.

La sixième étape de la constructionde la crypte :

le voûtement du collatéral nord

Pour préparer le voûtement du collaté-ral nord, les piles engagées du mur occi-dental et du mur gouttereau nord furent

démontées 200 et couronnées d’impostes 201

(fig. 37). un pilier oblique fut adossé àl’angle nord-ouest de la crypte, contre lesressauts du mur nord, et raccordé auxassises de ce dernier. le pilier i-ii nord, lapartie haute de l’escalier et les voûtes ducollatéral appartiennent à une mêmecampagne de travaux 202, caractérisée par la

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

325

cl. G. echtenacher. cl. h. hansen.

cl. h. hansen. cl. h. hansen.

Fig. 36a - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée iii centrale, voûtes d’ogives.

Fig. 36d - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, façade occidentale, cornicheterminale, détail.

Fig. 36b - Saint-Gilles-du-Gard, ancienneabbatiale, déambulatoire, côté nord, départ desvoûtes d’ogives.

Fig. 36c - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, travée vi centrale, clef devoûte.

Page 34: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

sobriété fonctionnelle des composantesarchitecturales. il en va ainsi du pilierquadrangulaire 203 dont la forme simple,qui était inadaptée aux ogives et doubleaux

mais conforme à celle des piles engagéesdéjà en place, ne sera pas reprise pour lepilier homologue du côté sud, construitplus tard (étape 7). du côté du vaisseau

central, les retombées des ogives etdoubleaux furent mises en place. le voûte-ment du collatéral, qui obligeait à modifierla baie du mur ouest destinée à éclairer l’es-calier nord, alla de pair avec l’achèvementde ce dernier, au fur et à mesure de l’avan-cement des travaux. Juste au-dessus de lavoûte de la troisième travée, le passage del’escalier imposait un épaississement dumur nord de celle-ci 204 (fig. 38a-b). réaliséen appareil « de montpellier », le placageinséré après coup entre les piliers ii-iii etiii-iv et à la voûte s’avéra toutefois insuf-fisant : afin d’éviter que l’escalier n’entamele sommet du voûtain, sa trajectoire futdéviée vers les reins.

dans le même temps, deux autres mursde refend construits avec un appareil dumême type vinrent définitivement fermerla dernière travée (vi) entre les piliers etmurs déjà en place, qui s’avançaient endirection du transept. c’est à ce moment-là seulement que la limite orientale de la

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

326

Fig. 37 - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 6 (G. echtenacher, 2010-2013).

Fig. 38a - Saint-Gilles-du-Gard, crypte,maquette 3d, détail de l’escalier nord :trajectoire restituée, non réalisée à cause de lacontrainte de la voûte (G. echtenacher, 2010-2011).

Fig. 38b - Saint-Gilles-du-Gard, crypte,maquette 3d, détail de l’escalier nord :déviation de la trajectoire de l’escalier 6(G. echtenacher, 2010-2011).

Fig. 39 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, vaisseau central, croquis des traces de peinture dumur oriental (a. hartmann-virnich 2009).

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crypte fut définitivement fixée. deuxniches incorporées dans le mur oriental duvaisseau central 205 étaient destinées à unusage liturgique ; au-dessus se trouvait unepeinture murale du milieu du xiiie siècleenviron dont les restes très fragmentairesont été révélés par les recherches archéolo-giques (fig. 39) : dans un cadre de rinceauxfloraux de 2,20 sur 1,64 m, bordé de lignesnoires doubles entrecroisées aux angles, ondistingue les contours et l’extrémité gauched’une vierge à l’enfant entourée d’aumoins trois personnages nimbés 206.

la différence du collatéral nord de lacrypte est soulignée par des doubleaux longi-tudinaux qui font défaut au sud, où lesvoûtes du vaisseau central et du collatéraln’étaient pas encore construites, probable-ment en raison des graves désordres provo-qués par le tassement continu de la façade etdu mur gouttereau sud 207. dans les anglesdes deux premières travées du collatéral sud,on mit en place les retombées d’ogives parl’encastrement des trois premiers claveaux,sans modénature 208, au-dessus d’impostesobliques, moulurées selon le profil courantdans toute la partie occidentale de lacrypte 209. en même temps, la pile engagée i-ii sud fut entaillée à coups de bretture pourla retombée du doubleau, formée à son tourde trois voussoirs non moulurés 210. le pilieri-ii, qui n’était pas encore construit, nedevait l’être qu’avec les voûtes dont les ogivesmoulurées rejoignent le cordon d’impostesans l’intermédiaire d’un sommier.

La septième étape de la constructionde la crypte : les voûtes des travées

occidentales du bas-côté sud

le pilier i-ii du côté sud, dont l’appa-reil est taillé pour la première fois de lamême façon 211 que les retombées desnervures et doubleaux qui y prennentappui 212, fut construit avec les voûtes ducollatéral sud (fig. 40a-b). Ses assises de0,255 à 0,285 m et la récurrence de blocsd’environ 0,60 à 0,70 m le rapprochent del’appareil régulier visible au-dessus desarchivoltes des portails latéraux de la façadeoccidentale, réalisé à partir de la septièmeétape. À la différence de son symétrique du

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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Fig. 40a - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 7 (G. echtenacher, 2010-2013).

Fig. 40b - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 7, détail : les travéesoccidentales (G. echtenacher, 2010-2013).

Page 36: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

côté nord, ce pilier est doté de ressautscorrespondant à la largeur des doubleauxet de pilastres d’angle pour recevoir lesogives du vaisseau central. À peine engagésdans le pilier, ces pilastres accusent encorela conception et la facture malaisées dessupports obliques qui caractérise l’ensem-ble de la crypte 213. il en va de même pourles deux retombées d’ogives orientées versle vaisseau central, mises en place sanségard pour l’axe diagonal de la retombéecorrespondante au nord, déjà en place ‒indice possible de la préparation à un arrêtdu chantier qui interviendra au niveau desdeux travées occidentales centrales. laconstruction se poursuivit avec la mise enœuvre des voûtes latérales dont les ogiveset doubleaux moulurés sont posés sur desamorces frustes, les voûtains empiétant surle vaisseau central dont les voûtes étaienttoujours en attente 214.

La huitième étape de la construction dela crypte : les voûtes occidentales du

vaisseau central

le chantier de la crypte s’acheva avec lemontage des deux voûtes occidentales duvaisseau central (fig. 41a-c). malgré ladestruction de la première travée au coursdes guerres de religion et le remontageattribué aux années 1650-1655, il subsisteles retombées et une partie des voûtainsromans, construits, comme ceux déjà enplace dans le collatéral septentrional, selonla technique du cintrage sur encoches inci-sées dans les ogives et doubleaux. lesommier nord du doubleau de séparation,resté en attente, fut alors grossièrementépannelé pour atténuer le contraste avecla modénature des claveaux. le sommiersymétrique du côté sud, dont l’amorceprésentait une moulure différente et unecourbe sensiblement plus écrasée, fut laisséen l’état sur sa face orientale mais son intra-dos fut ravalé sommairement après ledémontage du cintre, ancré dans deuxencoches pratiquées dans le cordon d’im-poste du pilier 215. des retouches et desravalements analogues 216 rectifièrent lesretombées d’ogives tandis qu’un épaisblocage vint combler le décalage existant

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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Fig. 41a - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 8 (G. echtenacher, 2010-2013).

Fig. 41b - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale. maquette 3d, étape 8 (G. echtenacher, 2010-2013).

Page 37: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

entre leur extrados et les voûtains, malraccordés à ceux du collatéral sud déjà misen œuvre : preuves s’il en est des limites dusavoir-faire des bâtisseurs.

en dépit de la sobriété de la moulura-tion de ses croisées d’ogives, la premièretravée abrite un élément fonctionnel etdécoratif particulier : une baie rectangu-laire ménagée dès l’origine dans l’appareildu voûtain méridional, à côté du doubleaumouluré en talon renversé et agrémentéd’une frise végétale sculptée avant l’assem-blage (fig. 42) ; cette baie est liée à unpuits en pierre de taille ouvert sur l’églisesupérieure ‒ dispositif dont la vocationacoustique est suggérée par la bonne trans-mission phonique des sons venant del’église supérieure. les tailles à la gradine,l’usage de la ripe et le décor végétal compa-rable au répertoire proto-gothique destailloirs de la galerie orientale du cloîtred’arles appartiennent déjà au début duxiiie siècle. un repentir au cours de la miseen œuvre se traduisit par le percement et lataille en ravalement d’un oculus encadréd’une moulure décorée de feuilles d’eau, del’autre côté du doubleau, dans le voûtaincontigu.

L’église haute : les recherches en cours

en attendant la poursuite desrecherches, la chronologie de la construc-tion de l’église supérieure, dont l’étude estlargement entravée par l’état fragmentairedes vestiges et la coupure complète entre lanef et les parties orientales, ne peut êtreesquissée ici que dans ses grandes lignes.au terme du chantier de la crypte, la miseen œuvre des collatéraux de la nef hauteavec les grandes arcades au-dessus de leurschapiteaux toujours en place, était bienavancée voire achevée dans les quatretravées orientales mais laissée en attente auniveau d’appui des baies latérales à partirde la mi-hauteur de la cinquième travée(fig. 28, 35 et 41). lors de la reprise,le nouvel appareil se distingue par unmodule réduit, clairement identifié par lessignes lapidaires, et un décor architecturaldéjà d’inspiration gothique. quant auxpiliers, grandes arcades et voûtes latérales

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

329

Fig. 41c - Saint-Gilles-du-Gard, ancienne abbatiale, maquette 3d, étape 8 (G. echtenacher,2010-2013).

Fig. 42 - Saint-Gilles-du-Gard, crypte, vaisseau central, ouvertures acoustiques dans les voûtesdes deux premières travées.

cl. a. hartmann-virnich.

Page 38: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

annexe 1

1650, 7 septembre – Saint-Gilles

Bail à prix-fait des travaux de restauration del’église abbatiale

archives départementales du Gard, G 1594,fol. 4-12 (transcription a. hartmann-virnich)

bail a priffaict de la grand’église 1

l’an 1650 et le 7e jour du mois de septam-bre apprès midy, regnant le souverain et trèschrestien prince louis, par la grâce de dieu royde France et de navarre, par devant moy notaireroyal soubzsigné et tesmoings (4 v°/5 r°) basnommés ont esté constitués en leurs personnesmessire michel barthélemy, prebtre et chanoineen l’églize colegialle de la présante ville deSainct-Gilles, procureur et ayant charge de illus-trissime seigneur messieur Julles de nogaret decalisson, abbé, seul seigneur haut, moyen et basesperituel et temporel de ladite ville de Sainct-Gilles, ainsin qu’il a dict, et auquel promet defère aprouvé et ratiffié le présant contract danstrois jours à peyne de tous despans, dommageset interests, d’une part, et messieur Guilhaumesde Piquet, chanoine et grand archidiacre,Jacques legenre, capiscol, anthoine cabot,chanoine et sindic, et Pierre robillard, chanoinedu vénérable chappitre de ladite églize colegialle,

deputtés dudit chappitre par desliberationprinze par icelle le douziesme jour du moisd’aoust dernier (5 r°/5 v°), et les sieurs bernardbarthélemy, consul moderne dudit Sainct-Gilles, Guilhaumes boudet, acesseur, henry debarthélemy, Girard de Fabry et Justin de Ferrier,escuyer, messires Jean vidalon, docteur ezdroictz, Jacques laurens, andrieu et Pierrebarthélemiy, bourgeois habitant dudit Sainct-Gilles et deputtés par desliberation du conseiltenu audit Sainct-Gilles le neufiesme duditmois d’aoust année présente, lesquelz ayant cydevant faict proceder a diversses enchères sur laconstruction et édification de la grand églizedudit Sainct-Gilles à cauze que celle que à prea-sant le sainct service se faict n’est assez grandepour les habitants catholiques, estant iceuxconstraints les festes et kermesses et particulliè-rement lhorsqu’il y a prédication de demurer laplus grande partie hors d’icelle, et lesdictesenchères auroint esté faictes, publiées et placar-dées aux villes (5 v°/6 r°) d’arles, nismes,beaucaire, lunel, marcelhargues et aux villes etlieux circonvoisins, et estant Jean, Gabriel etPierre daudetz, maistres massons de ladite villede lunel, et Jean Girardeau, charpantier duditmarcelhargues, trouvés moingtz dizans, et desli-vra un reçu ayant esté faicte et bail espedié levingtiesme jour du mois d’apvril année présante1650, receue par messire Jean monnier, notaireroyal dudit Sainct-Gilles, aux pactes et condi-tions portées par icelles, et du despens ayantrecogneu qu’au susdit contract y avoir plusieurs

deffauctz à l’édiffication de ladite églize, etparticullierement pour estre trop oscure et nepouvoir tirer jour d’aulcun lieu pour psalmo-dier dans le cœur, et le couvent estre dehors, etle dessain d’icelle n’estre pas en forme d’églize etsubjet à (6 r°/6 v°) beaucoup d’inconveniantz ;pour lesquels manquemantz et desfaucts leditseigneur abbé, chappitre et habitans auroint denouveau rézolleu de fère audit dessain et ne ceservir du susdit contract, de la rézollutionduquel ils en auroint demandé d’accord avec lessusdits presfaichiers, et de nouveau faict ausditsarticles ; et apprès plusieurs proclamationsfaictes tant dans ladite ville de Sainct-Gillesque alheurs, lesdits daudès auroint demeuréderniers surdizans à la somme de 15600 livres,et promit fère agréer la rézolution du susditpremier contract audict Girardeau à peyne detous despans, dommages et intérêts.

Suivant lesquelles offres ledit sieur michelbarthélemi, chanoine, procureur susdit,Guilhaume de Piques, Jacques legenre,anthoine cabot et Pierre robillard, depputtés(fol. 6 v°/7 r°) dudict chappitre, bernardbarthélemy, consul, Guilhaumes boudet, aces-seur, henry de barthélemi, Girard de Fabry,escuyer, messires Jehan vidalon, docteur ezdroictz, Justin de Ferrier, escuyers, Jacqueslaurens, andrieur et Pierre barthélemi, bour-geois, ez la qualité qu’ilz poscèdent, ont denouveau balhé et balhent audit Jean, Gabriel etPierre daudet, frères icy presantz, stipulant et

orientales, ils furent surélevés de près de3 m par rapport aux autres travées de lanef, et alignés sur la hauteur du déambula-toire et des chapelles du chevet, déjà encours de construction à l’époque du voûte-ment de la crypte et de la mise en œuvredu décor de la façade. À l’arrêt du chantierroman, au début du xiiie siècle, le transept,ses piliers et les travées contiguës à l’ouestet à l’est n’avaient donc encore guère atteintla hauteur des portails latéraux. l’ampleurde la modification du projet lors de la miseen œuvre suggère un hiatus significatifavant les travaux de construction comman-dés en 1261 au magister et régisseur martinde launay de Posquières (vauvert) en vuede l’achèvement de l’église (quousquedictum opus dicte ecclesie fuerit integreconsummatum) 217, à l’époque où le monas-tère bénéficia de l’appui de clément iv,natif de Saint-Gilles. les parties hautes

étaient alors au moins partiellement acces-sibles 218 et l’église suffisamment avancéepour servir de cadre à une « messe sur l’au-tel auprès duquel repose le saint corps »(missam super altare iuxta quod requiesquitcorpus sanctum) célébrée par l’archevêquede rouen eudes rigaud lors de sa visite de« la maison du bienheureux Gilles » (liminabeati Egidii) en 1260 219. d’après les étudesen cours, la construction du chevet, vrai-semblablement entamée à la suite de lacinquième étape du chantier de la crypte,dut progresser selon un rythme différent,avec une attente verticale dont la destruc-tion du monument a effacé toute trace.lors de la reprise, un escalier en vis secon-daire, dont il ne subsiste que les marchesd’accès saillantes engagées dans la basemoulurée du mur gouttereau, fut logé dansle massif de la façade nord du transept àl’ouest de l’oculus jouxtant la célèbre « vis »

du chevet 220, pour desservir l’escalier supé-rieur, toujours en place à l’angle nord-ouestdu transept, par un couloir mural à l’étage.la disposition symétrique du bras sud,presque entièrement arasé, demeure aussihypothétique que la position et la formedu clocher détruit en 1622.

malgré les incertitudes qui subsistent,nos recherches ont permis de rapprocherles étapes de construction de la cryptede celles des murs de l’église haute.l’achèvement de la crypte par la construc-tion retardée de ses voûtes occidentaleslaisse supposer un lien direct avec laprogression des travaux à la façade occi-dentale, perturbée par l’affaissement partielde l’édifice au cours du chantier, mis enévidence par l’étude archéologique dont lesrésultats seront exposés plus loin.

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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ANNEXES

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l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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aceptant, a fère et construire ladite églize en laforme et manière que s’ensuit.

et premièrement seront tenus lesdictzdaudet fère ung peron pour monter et entreren l’églize et le former en rond pour plus facil-lement monter à icelle ; abattre une pettitemuralhe regardant le marin quy empêche fèreledit peron ; et les marches dudit peron aurontquatre poulsses et demy d’autheur et ung(7 r°/7 v°) pan et demy de largeur.

Plus seront tenus lesdictz daudet fère à lagrand porte servant d’entrée à ladite églize ungpillier au millieu pour la séparer en deux, etmettre au-dessus une plate-bande ou comble encas ne ce treuveront point de pierre vielhe ayantservi pour pouvoir fère ledit travail, fère lesornemantz quy ce trouveront dans les pierrestravalhées de nouveau en suite du vieux dessain.et quant aux artz (sic pour « arcs ») quy sont au-dessus ladite porte autant dehors que dedans,les reffaire en suite des autres avec leurs archita-tures ; et fermer les trous quy sont au-dessusladite porte conformement au vieux bastiment.

item seront tenus lesdits presfachiers de fereune ove dans le pignon au-dessus de laditegrand’porte ; de mesmes seront tenus fermer lesdeux portes quy sont à (7 v°/8 r°) droict et àgauche de la grand porte avec pierre massonnéeet mourtier faict avec chaux et sable.

aussy seront tenus lesdits daudetz voûterladite églize despuis la grand porte jusques aumillieu et tambour du sixiesme pillier contenansde longueur vingt-trois canes ou environ et enlargeur d’une estrémité des muralhes mestressesde ladite églize a l’autre de vent droict et marin,et tenir lesdites voûtes d’auteur : sçavoir celle dela nef de sept canes et demy à prendre du plainpied de la grand porte soubz la clef de laditevoûte, et la voûte des chapelles à prendre aumesme plain-pied quatre canes et demy soubz laclef ; le tout vouté en ogive.

item seront tenus lesdits presfachiers debastir deux muralhes tout au long de la nef surpilliers du cousté dudit vent droict et marin del’espesseur de deux pans et (8 r°/8 v°), hauteurconvenable pour donner les pentes, et fère lesfenestres de l’auteur et largeur que donnerontlesdites muralhes ; feront aussi des pilliers ouancoules au-dessus des chappelles à l’endroictdes arts doubleaux de la nef pour leur servir debutté ; et les mettre en talus comme la besognele requera.

item feront lesditz presfachiers deuxmuralhes de ressaut ; et ce formera dans uned’icelles deux faces de pilliers ; et d’une desditesmuralhes à l’autre formera le cœur en cueu defour ; et deux chappelles voutées conformement

aux autres et de la mesme auteur quy servirontde secresties. et sera faict ung art doubleau a lamuralhe quy servira de pignon à la nef de l’en-trée du cœur, sur lequel sera faict ung ove etfenestres necessaires pour donner (8 v°/9 r°) jouraudict cœur. davantage dresseront trois pillierstumbés conformement aux autres et de lamesme grandeur quy servent a fère la cépara-tion de la nef avec les chappelles.

comme aussi seront tenus paver toutautour des muralhes mestresses avec bars debeaucaire a demy cimay sur mourtier faict avecchaux et sable, avec canal et gargouilles pourjetter les eaux pluvialles.

Parelhement feront le couvert de la nef deladite églize a tuilles bagnat boisé, le toutconformément à celuy de l’églize cathédralle denismes. toutes les voûtes des chappelles serontcouvertes à tuilles bagnat sur le plan des voûtes.

Plus seront tenus fère le grand autel avecson escallier nécessaire et de l’autheur convena-ble, paver ledit cœur et bastir tout autour(9 r°/9 v°) d’icelle de l’autheur de quatre panspour y pozer les chèses.

item enduiront et blanchiront la voûte ducœur et muralhes de l’autour dudit cœur,ensemble les deux chappelles quy serviront desacresties par dedans et dehors ; bastiron unechèze de pierre pour le prédicateur à l’endroitque leur sera marqué. et icelle sera faicte a panou en rond à l’obsion des dépputtés. Plus serontobligés de fère et bastir les fontz baptismallescimantées au lieu que leur sera aussi marqué.

item seront tenus ouvrir la porte de l’escal-lier quy dessent a l’églize soubzterrene, remetrela voute dudit escallier en l’estat quelle estoitantiènement.

item seront tenus de fere cinq portes,sçavoir deux du cousté du vent droict et troisdu marin aux endroictz que luy seront marqués.

item sera permis et (9 v°/10 r°) loizibleausdits prisfachiers de se servir pour ledit travailet bastiment de la pierre qu’est tant dedansladite églize que dehors, ensemble de la ruynepour sable ce treuvant bonne. et en cas n’yauroit de pierre a suffizance, les dits seigneurabbé chappitre et consuls luy en fourniront ouindiqueront à prendre autour des cloistres. etseront tenus lesditz presfaichiers de fournir à sesdespans tous les tuilles, bois du couvert, bardz etmourtier faict aus chaux et sable quy conviendraemployer audit bastiment ; et d’avoir bien etdeubement faict et parachevé tout ledit entiertraval et besougne sur especiffier entre icy et lepremier jour du mois de mars de l’année qu’oncontera 1652, et de besougne bonne et resseva-ble faict en bon père de famille à peyne de tout

despans (10 r°/10 v°), dommages et intherestz,et ce pour et moyenant le pris et somme de15600 livres à laquelle la deslivration leur enauroit esté faicte comme ayant faict à la condi-tion meiheure ausdictes encheres ; en déductionde laquelle somme de 15600 livres, lesdictzdaudet ont declairé avoir receu par le contractdudit jour 20e apvril dernier la somme de 3000livres desdictz seigneur abbé, chappitre et habi-tans, laquelle some seron tenus, ainsy qu’ilz ontpromis, tenir en compte en déduction de laditesomme de 15600 livres. et les 12600 livres leditseigneur abbé sera tenu en payer ung tiers, leditchappitre un autre et ladite commune duditSainct-Gilles l’autre tiers, revenant pour chacuna 5200 livres, payable ladite somme en troispayes, sçavoir 3000 (10 v°/11 r°) livres le quin-zièsme jour du mois d’octobre prochain, 6000livres lhorsque la moytié de de l’entière besognesera faicte, et les 3600 livres restantes lhorsquetoute ladite besougne et traval sera parachevé ;et receu le tout à peyne de tous despans… Pourlaquelle réception lesdites parties s’acorderontamiablement d’espertz…

1. « de la grand’église » ajouté postérieurement par une secondemain.

annexe 2

extraits du récit du dégagement dutombeau du saint et du vestige d’un ancien murde confession en août-septembre 1864 d’aprèsGoubier 1866, p. 13-234

« au centre même de la crypte, onremarque, au premier coup d’œil, une construc-tion d’un caractère plus antique que le reste dela vaste nef. les voûtes de cette chapelle médialelaissent apercevoir des traces de peintures indi-quant le soin spécial pris par les moines d’ornerun lieu voué à quelque culte particulier. autourdu pendentif, des crochets disposés en couronneont dû soutenir des lampes veillant autour d’uncorps saint, selon l’usage des confessions ouchapelles cryptales. c’était là autant de signesfrappants et comme un (13/14) mémorial desouvenirs antiques propres à fixer en cet endroitnotre premier chantier d’opérations, le 17 août1864.

mais loin de rencontrer ici un terrain sansrésistance, qui, d’ailleurs, règne dans toutel’étendue de l’édifice, les ouvriers vont se trou-ver aux prises avec une maçonnerie compacte,un amas effrayant de pierres de toutes dimen-sions, unies entr’elles et sans ordre par unciment de granit. et ce massif impénétrable

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occupe un espace de 5 mètres carrés ! et pourextraire les blocs accumulés, les instrumentsnous manquent ou sont insuffisants ! ensuiten’y avait-il pas un certain danger à démantelerces sortes de fondations construites, peut-être,en vue d’une plus grande solidité du bâtiment ?

cependant la main est résolument mise àl’œuvre. voici déjà un monolythe en pierrefroide, mesurant 2 mètres 80 centimètres delongueur, sur une largeur de 1 mètre 20 centi-mètres ; son extraction a duré 48 heures.creusons encore ! vient à la suite un sarco-phage, peut-être un autel en marbre blanc, avecdes sculptures d’une grande beauté représentantl’entrée des mages à Jérusalem. il est du ivesiècle ; mutilé en partie, ce chef-d’œuvre duciseau chrétien n’en occupe pas moins la placed’honneur de notre musée lapidaire.

Puis apparaissent successivement des débrisd’anciennes chapelles, colonnes, chapiteaux,corniches, frises, figurines, encorbellements,fragments d’acrotères, quelques pièces demarbre avec inscription. toutes ces richessesarchéologiques, ensevelies sous des blocs énor-(14/15) mes, d’où viennent-elles ? on les croitdes restes de la basilique supérieure…

(p. 16 :) « mais voici l’aurore du 29 août,seizième jour des fouilles ! elle vient dissipertoutes les incertitudes et combler toutes lesespérances.

v – l’extraction de 1,200 quintaux dedécombres, aux dires des ouvriers, avait ouvertune profondeur de 2 mètres 60 centimètres : làse présentait une surface plane, interrompue surplusieurs points et figurant une sorte demosaïque avec de légères saillies… au centremême du creux, des couches d’un épais cimentdérobaient à la vue une pierre d’une certaine(16/17) étendue et dont le sourd retentissementaccusait un caveau… on se hâta de dépouillesles alentours par une large excavation, et voilànon-seulement une pierre tombale, mais encorel’apparition du sépulcre qu’elle recouvre…(17/18) a peine la pierre fortement scellée dutombeau fut-elle mise sur son champ, qu’à l’aided’un flambeau on entrevit un double rang delettres rapidement tracées, mais assez apparentespour exciter l’émotion générale de l’assemblée.nous venions de lire :

in-h-tvml-q

c.b.aeGd.

(18/19) vi - la pierre du tombeau de saintGilles mesure deux mètres de longueur sur0 mètre 70 de largeur… dans ce tombeau unecertaine quantité d’ossements… qui appartien-nent à diverses parties du corps… ont étéextraits au nombre de 64… (19/20) le procès-

verbal délivré à mgr de nimes par mgr l’arche-vêque de toulouse, et qui donne la no- (20/21)menclature exacte de ceux que contient le reli-quaire de Saint-Sernin, signale des partiesabsentes, et ce sont précisément celles que nouspossédons. le sacré tombeau renfermait encoredes lambeaux de vêtement ou de suaire qui, àpeine exposés au contact de l’air, ont été immé-diatement pulvérisés, et trois morceaux de feroxydé, terminés en pointe aiguë, faisant partied’une même lame… »

(22 :) « … la commission ordonna leprolongement des fouilles sur la même direc-tion, ensuite sur toute la surface de la basseéglise… ces fouilles immédiatement exécutéesont amené d’autres témoignages à l’appui de madécou- (22/23) verte, et nous citerons ici,comme une pièce de conviction des plus impor-tantes, un vieux mur de clôture trouvé à deuxmètres de distance du sépulcre. cet appareiloffrant au centre même une fenêtre grillée, dontle prospect s’étend directement sur l’axe de lapierre tombale, servait probablement d’oratoireaux fidèles de l’époque. il a été difficile d’enfixer la véritable origine ».

annexe 3

extraits du récit du dégagement dutombeau du saint et du vestige d’un ancien murde confession en août-septembre 1864 d’aprèsrévoil 1865-1866, p. 168-172

(168) « dans le milieu du mois d’août1865, le conseil de fabrique de l’église de Saint-Gilles, pour placer un autel dans la crypte de cemonument, fit opérer quelques fouilles, dont lepremier résultat fut la découverte d’un sarco-phage en marbre blanc. cette sculpture remar-quable et parfaitement conservée appartient auxpremiers temps de l’ère chrétienne ; elle a 2m18de longueur sur 0m37 de hauteur…

(169) des tronçons de colonnes, des bases,des appareils énormes mis à découvert, engagè-rent à continuer ces fouilles, et l’administrationdépartementale mit à la disposition de l’archi-tecte des monuments historiques une subven-tion sur les fonds départementaux, pour lespoursuivre activement sous sa direction. un beauchapiteau et trois cippes antiques en pierre durefurent extraits des décombres mêlés à la terre…

en poursuivant les déblais autour du beausarcophage en marbre, et après avoir extrait cestrois cippes antiques, la pioche de l’ouvrierretentit sur une grande dalle, et on mit bientôtau jour un sarcophage de pierre grossièrementtaillée. cette dalle, servant de couvercle, fut

soulevée avec soin ; elle portait, sur la face inté-rieure, les caractères suivants gravés dans le sensde sa longueur : (169/170) in.h.tml.qi /c.b.ÆGid…

les fouilles se continuèrent activementautour de cette tombe… et mirent à découvertun mur transversal de grand appareil, danslequel sont pratiquées l’entrée d’un caveau etune petite fenêtre ronde, garnie de son fer encroisillon. il est difficile de préciser ce qu’a étécette construction et à quelle époque elleremonte. – mais il est à présumer qu’elle faisaitpartie d’une des anciennes chapelles qui furentdémolies à l’époque de la construction de lacrypte de l’église abbatiale…. (170/171)

les religieux de cette abbaye, jaloux deconserver quelques restes précieux de leur saintabbé, après l’enlèvement d’une partie de sesreliques, durent recouvrir la tombe de tous cesdébris et de cet amas de matériaux, pour luiépargner de nouvelles soustractions…

dans d’autres tranchées et fouilles opéréesdans les bas-côtés de cette crypte, s’est trouvée ladalle tumulaire d’un châtelain du château de lamotte, située sur la rive droite du Petit rhône,en face d’albaron… la partie de la pierre supé-rieure manque, mais on lit encore :

… niS. Jabeti. caStellani.caStri. mote / qvi. tvmvlvmcerniS. cvr. non. mortalia / SPer-niS. tali. namque. domo. claudi-tur omneS ho…

[Hic jacet corpus nobilis viri Joha]nnisJa(u)be(r)ti, castellani castri Mote. – Qui tumu-lum cernis, cur non mortalia spernis ? Talinamque dono clauditur omnis ho[mo. Amen]

(1) ce distique léonin se rencontre trèsfréquemment sur les dalles funéraires dumoyen-âge

(172) derrière le tombeau de Pierre decastelnau, dans le sépulcre d’un ancien abbé,on a recueilli quelques lambeaux d’étoffes, unmorceau de crosse en bois, garni de deux frag-ments d’une sorte d’anneau en argent, émailléet découpé en lambrequin. ces objets sont ducommencement du xive siècle ; mais rien n’a pudonner la moindre indication sur le nom dupersonnage renfermé dans cette tombe enpierre.

non loin du sarcophage de S. Gilles, furentégalement trouvés deux squelettes enfermésdans des briques dites sarrasines ; trois briquesfaisaient le fond du sépulcre : elles étaient recou-vertes par d’autres briques inclinées formantune sorte de toiture… »

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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* laboratoire d’archéologie médiévale et moderne enméditerranée la3m umr 7298 aix-marseilleuniversité amu/cnrS.

** institut für architekturgeschichte iFaG, universitéde Stuttgart/laboratoire d’archéologie médiévale etmoderne en méditerranée la3m umr 7298.

1. taylor, nodier, de cailleux 1837, pl. 287-293quater.

2. mérimée 1835, p. 336-345 ; cf. mérimée 1835(1989), 183-187.

3. hartmann-virnich, hansen 2000 ; hartmann-virnich 2000 a ; mallet 2000.

4. hansen 2007.

5. markiewicz 2004, 2005.

6. markiewicz 2009, 2011.

7. voir les archives de l’association histoire,archéologie et Sauvegarde de Saint-Gilles. Pour uncompte rendu partiel et succinct des résultats de cesfouilles conduites dans le transept et le cloître, publiésde manière confidentielle dans le bulletin archéolo-gique de l’association, voir dufoix 1976 (1979), p.147-150, fig. 1 et 2 et Jeolas 1994, p. 42. S’y ajouteune reconnaissance de sols dans l’angle sud-ouest dela chapelle des Pénitents, à l’initiative de l’architecteJ.-P. dufoix (dufoix 1976 (1979), p. 158).

8. Girault, Girault (éd.) 2007

9. mazel 2011.

10. Zink 2010. Jochen Zink tente une distinction dephases constructives à partir d’une étude des princi-paux signes lapidaires, en étayant une attribution dela façade occidentale aux années 1130 par une étudemonumentale sélective et partiale, accompagnéed’une documentation graphique périmée. Sadémarche, délibérément indépendante de la recherchearchéologique récente dont elle ignore les résultats,n’est pas dénuée d’intérêt dans certains détails, maiselle renoue avec une tradition déjà critiquée pardorothea diemer (diemer 1978, p. 72), fondée surl’idée d’un lien systématique du bâti existant avec lesdates historiques, au prix d’une interprétation erro-née de certaines données archéologiques qui tend àinvalider le raisonnement dans son ensemble.

11. ex-laboratoire d’archéologie médiévaleméditerranéenne lamm umr 6572 cnrS-université de Provence aix-marseille i.

12. direction : loïc buffat (mosaïquearchéologie/umr 5140-lattes), aurélie masbernat-buffat (mosaïque archéologie/ umr 5140-lattes) ;encadrement et accompagnement scientifique :laurent Schneider (la3m-umr 7298), andreashartmann-virnich (la3m-umr 7298).anthropologie : alexandrine legrand-Garnotel(umr 5140-lattes).

13. henri amouric (la3m-umr 7298) ; véroniquerinalducci de chassey (la3m-umr 7298), claudePribétich-aznar (la3m-umr 7298) ; andreashartmann-virnich (la3m-umr 7298).

14. étude géologique : alexandre hairabian (ea4229) ; étude des mortiers : bénédicte Palazzo-bertholon (ceScm - umr 6223) ; étude dendro-chronologique : Frédéric Guibal (inee -umr 7263) ; prospections géoradar : michel dabas(Geocarta), agathe crespin, nicolas ardito(So.in.G.) ; datation par le radiocarbone :c.d.r.c.-lyon.

15. relevés numériques : heike hansen (dir.) (iFaG,la3m - umr 7298 , Peter dresen (iFaG), KristianKaffenberger (iFaG), hassan al-omar (iFaG), Götzechtenacher (iFaG), relevés manuels : heikehansen (dir. et del.), nicolas lamoureux (†) (la3m-umr 7298), laura deye (la3m-umr 7298).

16. mazel 2011.nous renvoyons aux référencesbibliographiques détaillées dans cet article.

17. les différentes rédactions de la vita du saint ont étéétudiées par Jones 1914. le succès de ce texte tributaired’emprunts, qui traduit l’essor du culte et du pèlerinageauprès du tombeau de saint Gilles, se manifeste jusqu’à lafin du xiie siècle dans des variantes tardives (cf. F. laurent(éd.) 2003).

18. Pour cette analyse voir mazel 2011, p. 230-243.

19. J. Zink identifie cet événement à la constructiond’une église (Bau I) dont le plan hypothétique à troisnefs et chevet triabsidal, coïncidant avec les quatrepremières travées de l’église inférieure actuelle (Zink2010, p. 214-217) se fonde sur une interprétationerronée des fondations du mur gouttereau sud del’église romane, dégagées en 2004 (markiewicz 2004,p. 51-59 et fig. 53 ; markiewicz 2005, p. 97).

20. Jean-François Goudesne, « Fulbert et son écoledans l’histoire du chant liturgique », dans m. rouche(dir.), Fulbert de Chartres, précurseur de l’Europe médié-vale ?, Paris, 2008 (Presses universitaires del’université Paris-Sorbonne), p. 301-317, p. 302.

21. odenthal 2013, p. 286.

22. Gallia Christiana, vi (1739), Instrumenta, n° xii,col. 178-179. almodis, qui agit au nom de son filsraimond, prétend en effet tenir l’abbaye comme« alleu de Saint-Pierre » du pape lui-même (Hoc autemnotum sit locum praedictum et abbatiam praedictamalodium esse sancti Petri, quae dono domni papaeRomani tenemus), et le considère conséquemmentcomme étant placé sous sa dépendance seigneuriale(dominicatura quam ibi habemus).

23. mazel 2011, p. 236, 244-245. Girault, Girault(éd.) 2007, p. 220 ; magnani 2004 ; remensnyder1995, p. 236-242 ;

24. vones-liebenstein 2009, p. 110-114.

25. buffat, Schneider, hartmann-virnich,masbernat-buffat, legrand-Garnotel 2011 ;masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012. lachronologie absolue des phases s’appuie sur la concor-dance de l’étude céramologique et des datations auradiocarbone. voir l’article dans le présent volume, p.377-390.

26. masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012, p. 53-80, phases i-d.

27. Jean astier (abbé), textes.

28. révoil 1865-1866. cf. annexe 4.

29. Goubier 1866, p. 14-21. cf. annexe 3. deuxautres publications de l’époque sont dénuées de toutintérêt archéologique (baron de rivière, Antiquités duMidi. Tombeau d‘ (saint Gilles) récemmentdécouvert dans la crypte de la ville dont il fut le fonda-teur et dont il est le patron, marseille, 1866, 12 p. ;Jean astier (abbé), Découverte du tombeau de Saint-Gilles, bagnols, 1866, 4 p).

30. outre la perte des archives personnelles de l’ar-chitecte, dispersées ou détruites il y a quelques décen-nies, une maquette de liège des vestiges réalisée àl’échelle de 4 cm pour un mètre (nicolas 1907(1908), p. 108) est aujourd’hui introuvable.

31. « église de Saint-Gilles, registre d’attachement »,médiathèque de l’architec-ture et du Patrimoine,archives des monuments historiques, dossier Saint-Gilles-du-Gard, sans cote, p. 8.

32. Goubier 1866, p. 25.

33. il pourrait s’agir de la grande dalle de calcaire tail-lée brisée et incomplète posée sur chant contre le murgouttereau sud à l’extérieur : cet élément entouré àl’origine d’un tore périphérique aplati arasée, etrehaussée d’un tore transversal formant une croix avecune moulure axiale plus large, fut réduite à près de lamoitié de sa largeur originelle par une retaille soignée,peut-être pour servir dans un dispositif monumentalabritant la tombe du saint, tel le tombeau des abbésmaïeul et odilon à la priorale clunisienne deSouvigny (chevalier 2004, Sapin 2010, p. 199, fig.5).

34. henry révoil attribuait ces fragments à « une desanciennes chapelles qui furent démolies à l’époque dela construction de la crypte de l’église abbatiale », réfé-rence implicite au récit des Miracula sancti Egidii(révoil 1865-1866, p. 170), à la différence d’achilleGoubier qui y voyait « des restes de la basilique supé-rieure » (Goubier 1866, p. 15).

35. méhu 2011, p. 82-83 d’après Gerson 1998, i,p. 55-90.

36. iv, cap. viii. vielliard 1990 (1978), p. 40-46.

37. voir infra.

38. « … cum nullo modo ejus ossa sacratissima, ut amultis probatur, queant extra horas ipsius deferri.Quidam enim beati confessoris brachium venerandumextra Egidianam // patriam in horis scilicet longinquisolim // deferre fraudulenter conati sunt, sed nullo modoire una cum eo valuerunt. Quatuor sunt sanctorumcorpora que ab aliquo propriis sarcofagis nullo modomoveri posse referuntur, ut a multis probatur : beati scili-cet Jacobi Zebedei et beati Martini Turonensis et sanctiLeonardi Lemovicensis et beati Egidii, Xpisti confesso-ris….” (cap. viii. vielliard 1990 (1978), p. 46).révoil interprétait effectivement le remblai maçonné

NOTES

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comme dispositif protecteur (1865-1866, p. 171). Cf.annexe 3.

39. révoil 1865-1866, p. 172. Cf. annexe 3.

40. uS 79, fin ve/début vie-viie siècle d’après le mobi-lier céramique (markiewicz 2004, p. 23-24).

41. la position de ce mur n’est pas indiquée.

42. chiffres d’après Girault, Girault (éd.) 2007,p. 232-233, sans référence.

43. révoil 1865-1866, p. 170. Cf. annexe 3.

44. Goubier 1865-1866, p. 22. Cf. annexe 2.

45. la restitution d’un enclos entourant le tombeauavec une fenestella à l’ouest, proposée par J. Zink àpartir d’un résumé inexact de la description de révoil,est infondée (Zink 2010, p. 219).

46. Pour le contexte de cette consécration voir mazel2011, p. 250-251.

47. Girault, Girault (éd.) 2007, p. 217

48. «… dum enim anno incarnationis dominiceM°C°X°VI° fundamenta basilice nove poneremus, quiaecclesia alia minus continens erat et multitudinemadventantium capere non poterat, subversioni ecclesia-rum operam dedimus. Cum autem ecclesiam majorem,que cum tribus criptis maximis et quadratis lapidibusantiquitus edificata fuerat, destrueremus, necnon etecclesiam sancti Petri, que LXXXa fratres in choro caperepoterat, simul cum porticu lapidea que ei adherebat aparte septentrionis et a capite superioris ecclesie usque adextremitatem ecclesie sancti Petri in longum protende-batur, in qua fratres ad processionem diebus sollempni-bus egredi soliti erant et antiquitus via sacra vocabatur,necnon et ecclesiam sancte Marie, destrueremus, miravirtus omnipotentis Dei patefiebat.

Inter tot quippe moles ruinarum et edificiorum corruen-tium, beato Egidio interveniente et plebem fidelemdefendente, numquam aliquis ingredientium et egre-dientium ecclesias ipsas lapidis unius ictu attaminatusest. Immo vero multitudo oratorum, qui tunc maximeconfluebat persolvendi vota sua in eisdem ecclesiis,tantam securitatem assumpserant ac si nullus ibi strepi-tus vel commotio fieret.

Illis nempe diebus vir quidam, Pictavensis territorii indi-gena, corpore vegetus, dum in excelsiore parte muri, ubisuper corpus sancti Egidii cripta sublimior antiquitusvolvebatur, toto annisu lapides quadratos maximos evol-veret deorsum, subito toto (134/136) corpore collapsus,solis manibus se vix retinuit. Qui profecto si inferiuscorruisset, et ferreus esset, nimirum super moles lapidumillorum qui ibi erant, contritus deperisset. Sed quia adeum juvandum nemo accedere poterat, cum in parvospatio muri singularis penderet, sanctum Egidium clam-ore valido ut eum juvaret implorabat. Statim adfuit mise-ricordia confessoris Christi et destitutum humano auxilioJuvit. Pedibus enim se suberigens et manibus quodam-modo nitens, in loco unde conlapsus fuerat, non sineadmiratione multorum, facile rediit.

Non post multum tempus, cum jam paries ecclesie novealiquantum in sublime provectus esset, die dominica,dum vir quidam, Petrus Arvernensis nomine, post pran-dium super murum incautius deambularet, a parte forisuper tectum quoddam inferius impulsu antiqui hostis

decidit. Tunc mirum in modum, cum caro mollis et ossaejus confrigi potuissent, versa vice ipse tegulas et lignatecti sub se confregit. Sicque, beato Egidio intervenientequem inclamabat, ad domum suam absque vulnere etdolore rediit, multoque tempore postea supervixit »(Girault, Girault (éd.) 2007, miracle 19, p. 134-137).

49 « Inter tot quippe moles ruinarum et edificiorumcorruentium, beato Egidio interveniente et plebem fide-lem defendente, numquam aliquis ingredientium et egre-dientium ecclesias ipsas lapidis unius ictu attaminatusest. Immo vero multitudo oratorum, qui tunc maximeconfluebat persolvendi vota sua in eisdem ecclesiis,tantam securitatem assumpserant ac si nullus ibi strepi-tus vel commotio fieret. » Girault, Girault (éd.) 2007,miracle 19, p. 134

50. « Dum enim anno incarnationis dominiceM°C°X°VI° fundamenta basilice nove poneremus, quiaecclesia alia minus continens erat et multitudinemadventantium capere non poterat, subversioni ecclesia-rum operam dedimus. Cum autem ecclesiam majorem,que cum tribus criptis maximis et quadratis lapidibusantiquitus edificata fuerat, destrueremus, necnon etecclesiam sancti Petri, que LXXXa fratres in choro caperepoterat, simul cum porticu lapidea que ei adherebat aparte septentrionis et a capite superioris ecclesie usque adextremitatem ecclesie sancti Petri in longum protende-batur, in qua fratres ad processionem diebus sollempni-bus egredi soliti erant et antiquitus via sacra vocabatur,necnon et ecclesiam sancte Marie, destrueremus, miravirtus omnipotentis Dei patefiebat ». Girault, Girault(éd.) 2007, miracle 19, p. 134. traduction a.hartmann-virnich.

51. « Illis nempe diebus vir quidam… dum in excelsioreparte muri, ubi super corpus sancti Egidii cripta subli-mior antiquitus volvebatur, toto annisu lapides quadra-tos maximos evolveret deorsum, subito toto corporecollapsus, solis manibus se vix retinuit. Qui profecto siinferius corruisset, et ferreus esset, nimirum super moleslapidum illorum qui ibi erant, contritus deperisset.(Girault, Girault (éd.) 2007, miracle 19, p. 134-136).

52. bully 2010, p. 81-87.

53. Cf. le schéma publié par mazel 2011,p. 249, fig. 5

54. « necnon… una alia Sancti Petri de Via Sacranuncupate sacristie officia claustralia… nec non pluraloca et monachales portiones et quamplures monachi, etex illis unus decanus, unus prior major,… unus primusaltaris Sancti Egidii et alius secundus ejusdem altaris etalius Sancti Petri de Via Sacra nuncupati sacriste… »(Goiffon 1882, clxxx – 131, p. 256). cf. nicolas1905-1907.

55. delmas 1843 cité dans nicolas 1903, p. 16.

56. « Non post multum tempus, cum jam paries ecclesienove aliquantum in sublime provectus esset, die domi-nica, dum vir quidam, Petrus Arvernensis nomine, postprandium super murum incautius deambularet, a partefori super tectum quoddam inferius impulsu antiquihostis decidit. Tunc mirum in modum, cum caro molliset ossa ejus confrigi potuissent, versa vice ipse tegulas etligna tecti sub se confregit. » (Girault, Girault (éd.)2007, miracle 19, p. 136). voir note 48.

57. « Cum missa matutinalis die eodem celebrata fuis-set, ad altare superius more solito ad processionem

conscendimus. Ubi populo, qui huius miraculi famamagnus in ecclesia confluxerat… » (Girault, Girault(éd.) 2007, miracle 15, p. 120).

58. « ante sancti sepulchrum » (ibid.)

59. « cum autem ante altare superius beati Egidii noviterfactum in ecclesia ejusdem preces suas fudisset, socii quicum eo venerant vix ab edituis impetraverunt ut ad aliudaltare inferius introducerentur, ubi corpus sanctum huma-tum antiquitus jacet. Quo cum introissent,… sanctumEgidium implorabat… Cum oblationem suam superaltare posuisset, astantibus custodibus ecclesie circa eum,subito exclamat : Sancte egidie, gratias tibi ago…»(Girault, Girault (éd.) 2007, miracle 20, p. 140).

60. « … mulier ad ecclesiam beati Egydii a viro suodeducta, cum in criptam inferiorem, ubi corpus ejusrequiescit, introduci renueret, tandem eo die…, quorun-dam viribus superata, ante venerabile corpus almi confes-soris Egydii perducta est. » (Girault, Girault (éd.) 2007,miracle 30, p. 204)

61. d’après la Gallia Christiana (iv, 1739, col. 504),l’inscription était toujours « claustri fornice tecta » audébut du xviiie siècle. il est incertain si ce passagedésigne les profondes arcades segmentaires insérées ensous-œuvre dans les flancs des contreforts de l’égliseou une voûte de la galerie.

62. les parties non soulignées entre parenthèsesrondes manquent.

63. Favreau, michaud 1988, n° 60, p. 70.

64. voir nos remarques dans hartmann-virnich2012.

65. voir la notice de Jérome bénézet dans le présentvolume, p. 375-376.

66. les étapes sont comptées à partir de l’abandon del’édifice précédent dont les dimensions et l’empriseau sol restent hypothétiques.

67. hamann 1955-1956, p. 74-77, dufoix (1976)1979, p. 145-192, Jeolas 1994, p. 42-49. l’étude deJean-Pierre dufoix constitue à ce jour l’uniqueapproche de l’espace claustral dans son ensemble.

68. « … Verum cum monasterium ipsum, in quo corpusprefati Sancti Egidii, quod a diversis fidelibus devote etvenerabiliter visitatur requiescat, inter mare, flumenRhodani, ac in loco calido et paludibus circumdato, inquo tempore estivo aer intemperatus multum existit,constitutum sit, et illi monachi qui, juxta dicti ordinisregularia instituta, in eorum claustris habitare deberent,cameras seu cellulas in numero sufficienti pro eorumhabitatione in dicto monasterio non habeant, ac camereseu cellule in illo subsistentes subterranee et pro majoriparte ita humide seu aquatice sint, ut vix habitaripossint, et ipsi monachi ex frequent (sic !) cum illis ineodem monasterio secularium personarum conversatione,vitam ab eisdem institutis regularibus quodammodoalienam ducere incitantur… » (Goiffon 1882, clxxx– 131, p. 261-262)

69. Ibid.

70. masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012, p. 90-101 (phase c). voir l’article dans le présent volume,p. 385.

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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71. « a été proposé qu’il serait bon délibérer si on doitcette année faire porter du fumier à la vigne, et quellequantité. a été conclu que chacun des rentiers en feraporter le nombre de vingt charges… et le fumier quiest au-devant du cellier sera porté à la vigne auxdépens du chapitre » (dufoix 1979, p. 27, d’aprèsarch. dép. Gard, G 1118, d’après une transcriptionde r. Jeolas).

72. « … au joignant de la grande église, depuis lamuraille de ladite église jusqu’à la chapelle qui estjoignant la maison abbatiale, ledit endroit où ferontladite chapelle étant voûté qui seront tombées, etcommenceront la muraille du devant devers les claus-tres sur le fondement vieux qui y est encore, et l’autremuraille, dessus le derrière et levant, la commence-ront sur la muraille ancienne, à fleur de la crotte quiy était…» (dufoix (1976) 1979, p. 25, d’après arch.dép. Gard, h 914, Pénitents blancs. transcription der. Jeolas). Cf. infra.

73. « … ladicte religion veriffie encores que des pierresdela maison abbatialle que ledit de chaumont a dutout ruyner & a basty le fort deladite esglize. » (Sansdate. archives municipales de Saint-Gilles, n° 348,p. 25. inédit. transcription a. hartmann-virnich).

74. annexe 1, fol. 10 r°.

75. d’après les auteurs du sixième tome de la GalliaChristiana, l’inscription de la fondation de 1116 estalors « claustri fornice tecta » (Gallia Christiana VI(1739), col. 504).

76. Goiffon 1882, clxxxvii, p. 311-318 ; Girault2007, p. 21. la date archéologique est située dans ledernier quart du xviiie siècle (masbernat-buffat,buffat, hartmann-virnich, legrand-Garnotel,Schneider, chazottes 2012, p. 102-105).

77. masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012,p. 102-107 (phase b). voir l’article dans le présentvolume, p. 385.

78. arch. dép. Gard, G 1235. Pour la vente des biensnationaux cf. rouvière 1899-1900, p. 219 n° 1410 etp. 279 n° 1818.

79. markiewicz 2004, p. 12-16, uc 20.

80. hartmann-virnich, hansen, markiewicz 2007,p. 55.

81. Pour l’analyse de la compensation de ce tassementprogressif au cours du chantier voir infra.

82. voir infra.

83. les fouilles ont mis en évidence que les correc-tions d’axe, omniprésentes dans les murs et piliers del’église inférieure, commencent au niveau des fonda-tions. À l’ouest, un retrait de 0,17 m à une hauteur de2,25 m au-dessus du sol actuel, qui se poursuit ducollatéral nord à la nef centrale en se résorbant prèsde la pile engagée méridionale, corrige l’épaisseur etl’orientation du mur occidental, dont les parementsne sont pas parallèles au niveau inférieur. le murgouttereau nord est corrigé à trois reprises, à 0,40 cm,à 1,84 m et à 3,40 m au-dessus du sol. dans ce cas, lesretraits successifs de 0,20 m, 0,09 m et 0,07 m élar-gissent le bas-côté trop étroit pour égaliser les deuxcollatéraux de l’église supérieure, qui compensent

ainsi une différence d’environ 0,70 m. une autremesure qui confirme ce but compensatoire est le déca-lage du pilier engagé nord du mur occidental del’église supérieure (cf. hansen 2007, p. 103-104).

84. masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012, sépul-ture SP1220, p. 20-204 (l’inclinaison du coffrage depierre, observée sur le terrain, n’est pas mentionnéedans le texte du rapport). voir l’article dans le présentvolume, p. 384-386.

85. d’après anacréon delmas, chargé des travauxsous la direction de charles questel, « …ces décom-bres…occupent tout l’espace compris entre l’église etune culée qu’on a rencontrée à 5,50 m du mur desfondations et qui portait encore les premières vous-soirs d’une voûte. » (nicolas 1902, p. 105).

86. le rapport sur l’état de ruine de l’abbatiale, rédigéle 6 août 1622 par Jean amiguet, trésorier de Saint-Gilles, fait état de la disparition complète de l’escalieret de ses dimensions d’après le témoignage du gardedu port de Saint-Gilles, maître russac : « noussommes acheminés là où souloyt estre les grandsdegrés de la dite église, par lesquels facilement,comme russac nous a dit, pourraient monter trentehommes de front, tous lesquels degrés ont été démo-lis et rompus » (archives de Jean dumas, notaire àSaint-Gilles. nicolas 1912, p. 108-109). les deuxbaux à prix-fait de 1650 mentionnent l’existence d’unmur devant la partie sud de la façade qui devait êtredétruit pour la construction d’un perron (arch. dép.Gard, archives de maître monnier, G 1594, fol. 4-12,fol. 7r°, cf. annexe 1).

87. un écart de 9 cm répond sans doute à une travéeplus large, identique à celle de la porte du rez-de-chaussée du bâtiment méridional (infra). une étudeapprofondie du mur et des traces de portes liées aucloître et au prolongement de l’aile occidentale est enattente.

88. un coup de sabre et des murs plus épais suggè-rent une séparation de la travée méridionale. deuxportes dans la première et dernière travée donnaientdans le passage entre les ailes ouest et sud et dans lecloître, et il subsiste des traces d’une troisième porteplus au nord.

89. 26,63 m de largeur nord-sud sur 34,30 m delongueur est-ouest.

90. les quatre assises de pierre de taille au-dessus del’assise d’arase au-dessus du sommet de l’arc avec unerangée de corbeaux à crochet correspondent à unesurélévation secondaire, surhaussée à son tour auxixe siècle.

91. Seule la dernière travée orientale de ce mur subsistedans une propriété privée actuellement à ciel ouvert.

92. Cf. hartmann-virnich 2004, p. 288-289 et fig. 2.une épitaphe gravée sous une des arcades du rez-de-chaussée, apparentée aux épitaphes du socle de lafaçade par son cadre mouluré, suppose l’existence dubâtiment dans un xiie siècle avancé (hamann 1955-1956, i, p. 74-75 ; Favreau, michaud, mora 1988,n° 66, p. 75).

93. voir ci-dessous. Pour un bilan des hypothèses rela-tives à la date précoce de ces murs cf. diemer 1978,

p. 81-89 et note 252, p. 138. m. et P.-G. Girault etJ. Zink attribuent les murs latéraux de la travée à unephase précoce du chantier de l’abbatiale actuelle, iden-tifiée avec l’édifice commencé en 1116 (Girault,Girault (éd.) 2007, p. 238 ; Zink 2010, p. 220).

94. ignorant l’ébrasement, J. Zink interprète cetteouverture comme porte d’un escalier, sans égard à saposition et à ses proportions improbables (Zink 2010,p. 232-233, 241 et fig. 3). d. diemer l’attribue à tortà une modification tardive (diemer 1978, P 86), r.hamann à un état carolingien (hamann 1955-1956,i, p. 25).

95. voir infra.

96. Cf. hartmann-virnich 2012.

97. Favreau, michaud 1988, n° 59, 61-65, p. 69, 71-74. trois inscriptions, dont celle du mur sud de lapremière travée, se trouvent à l’assise précédant cellede la fondation, les trois autres assises en dessous decette dernière, en alternance avec les premières, sansrapport avec l’une ou l’autre des deux périodes chro-nologiques. depuis l’étude de meyer Schapiro(Schapiro 1937 (1987), l’authenticité de ces inscrip-tions a été admise par tous les auteurs (cf. en dernierlieu Zink 2010, p. 281-283).

Si deux sont datées de 1142, les trois autres épitaphessous la façade, non millésimées, ont été identifiéesavec des personnages décédés avant 1129 (Schapiro1937 (1987), p. 416-425) bien que des homonymesplus tardifs aient également été envisagés : un articleinédit de roselyne Jéolas intitulé « inscriptions de lacrypte de l’église de Saint-Gilles » liste, sans en indi-quer les sources, les références à des noms conformesà l’onomastique des épitaphes ou inscriptions funé-raires pour des périodes plus tardives : Hubilotus (de1138 à 1221), Frotardus (1138, 1174) et Petrus deBrozet (1158) (archives de l’association histoire,archéologie et Sauvegarde de Saint-Gilles). Parailleurs, un lieu dit Brozet, quem Petrus tenere videtur,est déjà mentionné en 1029 dans un acte de l’abbayede Gellone (Gallia Christiana, VI, Instrumenta, ix,col. 174-177, col. 177). Selon l’état actuel de larecherche, rien ne semble trahir clairement le caractèreapocryphe des inscriptions ni un remploi de blocsprovenant d’une autre construction. au contraire :dans au moins trois voire quatre cas une marquecomplémentaire en forme de v a été incisée dans leparement à l’aplomb ou en dessous de l’épitaphe avecla même graphie et la même technique. une étudecomparative de la graphie et de la facture des lettresfait toutefois appa-raître des liens de parenté au-delàde la date différente suggérée par Schapiro et invite àreprendre l’étude prosopographique des personnesdésignées. en dehors de l’évidente similitude desépitaphes datées de 1142, les trois autres présententdes analogies nonobstant. les différences induites,notamment par la taille inégale des lettres, plus grandepour l’inscription de Petrus de brozet qui necomporte que deux lignes, étalées sur toute la surfacedu bloc comme dans les deux autres cas, en l’absencede la mention de l’anniversaire du décès. l’absence dela mention de l’anniversaire de la mort de Petrus debrozet interroge en outre sur le lien direct de cetteinscription avec la commémoration d’un décès dontle souvenir était encore vivant. une nouvelle étudearchéo-logique et épigraphique est actuellement en

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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cours (a.-S. brun, sous la codirection dea. hartmann-virnich et de c. treffort).

98. Cf. treffort 2010, p. 240.

99. la documentation sommaire du sondage conduiten 1975-1976 dans l’angle sud-ouest, rouvert en2009, ne livre aucune information précise sur l’étatde la stratigraphie et la présence de sépultures(markiewicz 2009, p. 25-30 ; 2011).

100. Favreau, michaud 1988, n° 66, p. 75.

101. les épitaphes de causitus (+ HIC SEPVLTVS /EST CAVSITVS : / ANN(O) : D(OMI)NI : M̅: C̅:XLI̅I° : ORATE : PRO : EO) et de Gilius (HIC :SEPVLTVS : / EST : GILIVS ANN° / D(OMI)NI :M° : C : X°LII° / ORATE PRO EO) ne mentionnentque l’année 1142, celle de Petrus de brozet, de tailleparticulièrement monumentale, étant dépourvue detoute référence chronologique (HIC IACET /PETR(VS) DE BROZET).

102. markiewicz 2004, p. 39-40.

103. Cf. infra.

104. cr-tr iv c mur s, cr-tr iv c mur n.

105. Cf. diemer 1978, p. 81-89.

106. markiewicz 2004, p. 51-61 ; markiewicz 2005,p. 97.

107. masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012,cn1167, p. 84-87 et fig. 6.01-6.08.

108. Ibid., p. 82, fig. 6.01, tr1006.

109. une future poursuite des fouilles vers l’église doitvérifier si l’antériorité de la galerie au conduit(masbernat-buffat, buffat, hartmann-virnich,legrand-Garnotel, Schneider, chazottes 2012,cn1167, p. 84), improbable du point de vue de lachronologie, répond à une réparation.

110. Ibid., p. 82, fig. 6.01, tr1003.

111. voir infra.

112. le mur en demi-cercle du premier escalier estalors grossièrement bûché.

113. les blocs simplement layés, sans ciselure etdépourvus de signes lapidaires, sont fréquemmentépaufrés aux bords.

114. des formats comparables (23 à 30 cm enhauteur et 30 à 40 cm en largeur en moyenne) carac-térisent les remplois dans les parties basses du pare-ment extérieur du mur gouttereau sud (cr-tr i, ii,iii, iv s mur s), et dans les parties hautes des travéesi et ii du mur gouttereau nord (crtr i, ii n mur n).dans ce dernier cas, on observe des traces de retailleà la broche ou au pic sur plusieurs pierres isolées.

115. d. diemer attribuait ce coup de sabre à la modi-fication d’un édifice plus ancien (diemer 1978,p. 87).

116. Pour les maçonneries du premier état, un seulsigne est identifiable à la pile occidentale du mur sudde la travée centrale.

117. l’impact de la correction est encore plusprononcé au doubleau soutenu par les piles (cr-tr

iv-v c arc ii), dont la retombée nord est plus large de30 cm.

118. au pilier engagé sud-est, un léger changementd’axe semblable au départ d’une abside est effacé parla reprise du second état. l’abside restituée par J. Zinks’inscrit dans sa reconstruction d’un hypothétique« édifice i (vers 924) » (Zink 2012, p. 217-220 et fig.15b), infondée car inspirée d’une connaissancepartielle et d’une interprétation erronée des donnéesarchéologiques (cf. supra).

119. Cf. déjà diemer 1978, p. 84.

120. il s’agissait probablement d’une théophanie autétramorphe peinte sur la voûte et les doubleauxorientaux, accompagnée de figures d’angles sur lesmurs latéraux. de la même époque pourraient daterles restes inédits d’un décor formé d’une résille decarreaux posés sur la pointe et alternant une dichro-mie orange et verte, qui subsistent à la seconde travéedu mur latéral sud.

121. des relevés exhaustifs et cartographies ont déjàété réalisés entre 1999 et 2002 pour la partie ouest del’abbatiale dans le cadre de la thèse de doctorat de h.hansen (hansen 2007), et par le même auteur dansle cadre d’une commande de la drac languedoc-roussillon en 2003. les observations de J. Zink, quipassent sous silence l’apport de ces travaux préexis-tants, se fondent sur un repérage partiel, succincte-ment illustré par une photographie synoptique dessignes pris en considération (Zink 2010, p. 304, fig.22). les conclusions sélectives, contaminées par desdéductions infondées, sont de ce fait hétérogènes etméthodologiquement contestables.

122. un seul signe en forme de losange identifié à lapile sud-ouest de la travée (Pe iii-iv s).

123. on trouve à la façade du bâtiment sud, des traitsdiagonaux sur trois blocs autour de la porte haute,semblables à ceux de la seconde étape de l’église, etdeux signes en forme de flèche dans les parties bassesau-dessus et en dessous du sol actuel, ainsi quequelques occurrences de signes dans le bâtiment ouest(intérieur et extérieur). voir infra.

124. le recours à des blocs en remploi est suggéré parla fréquence des épaufrures (cf. supra), l’apparitioninsolite de signes doubles sur un même bloc et destailles particulières comme les layures en éventail.

125. on distingue la même façon irrégulière auxsignes du mur oriental du bâtiment ouest du cloître(plusieurs signes en face du socle de la façade occi-dentale de l’abbatiale).

126. les irrégularités considérables de tous leséléments architecturaux entravent la comparaison desmesures.

127. J. Zink, sans égard à la chronotypologie desappareils, attribue ce mur aux restaurations du xviie

siècle en référence au premier bail à prix-fait du 20avril 1650, dont les termes très vagues ne peuventtoutefois être mis en relation avec l’élévation en ques-tion (« plus bastir audedans des voultes basses deuxpetites murailhes pour boucher ce qui est thumbé »(Zink 2010, p. 248, note 136 d’après nicolas 1895,p. 450-451).

128. un sondage limité à environ 20 cm a mis à jourune surface très irrégulière qui ressemble à des moel-lons.

129. la bretture et le grain d’orge n’apparaissentqu’avec la construction des grandes fenêtres (étape 4)et des voûtes (étapes 5, 6, 7, 8).

130. travées i-ii : 285 cm, travées iii-v : 288 cm.

131. ce procédé se raréfie considérablement avec leschangements d’appareil ultérieurs.

132. avec des variantes à traits parallèles ou croisés encrux decussata.

133. les deux derniers « oiseaux » se limitent précisé-ment au raccord.

134. « oiseau », des petits traits à l’emplacement d’unangle du bloc manuellement gravés, F, a, t à traverse.en revanche la travée vi du mur sud est dépourvue designes lapidaires à hauteur de la crypte, à une excep-tion près. les blocs moins soignés de cette travée nesemblent pas avoir été destinés à rester apparents à cestade de la construction.

135. Cf. hansen 2007, p. 93.

136. le remaniement a toutefois effacé le contactdirect entre les murs et les indices chronologiques.

137. du côté sud, où l’ébrasement est resté intact, lesblocs, façonnés avec précision, ne sont pas retaillés,comme l’attestent les signes lapidaires en forme detrait diagonal. du côté nord, l’ébrasement est proba-blement élargi, en entamant les blocs d’angle.

138. l’emplacement de cette source de lumière, quidélaisse le côté nord, semble tenir compte du meil-leur ensoleillement ou de contraintes aujourd’huiinconnues. l’absence d’ouverture en façade tend àconfirmer l’existence d’un escalier sur voûte, confor-mément aux vestiges d’une telle construction identi-fiés en 1842 (cf. supra).

139. Cf. diemer 1978, p. 95-98.

140. contre J. Zink qui suppose que les piliers enga-gés i-ii nord du mur nord et 0-i nord du mur ouestsont conçus dès le départ avec une imposte (Zink2010, p.236), en se fondant sur la comparaison dessignes lapidaires sur le pilier engagé i-ii nord avecceux situés 8 m plus haut sur le mur sud, au niveaudes arcs des grandes fenêtres de la crypte. toutefoisl’interprétation des marques lapidaires hors ducontexte global, sans prendre en compte la réalitéconstructive complexe, conduit l’auteur à des conclu-sions erronées, même si la réapparition des marquesdans un groupe de signes différents illustre de touteévidence l’organisation stricte d’un chantier menésans interruption.

141. Sur la chronologie des voûtes cf. déjà diemer1978, p.113-127.

142. bernardi, hartmann-virnich 2003.

143. Si la voûte de la travée i de la nef centrale futlargement reconstruite au xviie siècle, les prix-faits de1650 ne la mentionnent pas explicitement. unepremière restauration ou réfection des voûtes des deuxtravées occidentales du vaisseau principal n’est pas àexclure (voir ci-dessous).

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

336

Page 45: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

144. « crosse » et « a ».

145. d. diemer suggère le projet d’un voûtement enberceau intégral pour tout le collatéral sud (diemer1978, p. 113-127, avec références). cette voûte auraitalors nécessité une pénétration pour la baie réduite.

146. un autre indice en faveur de cette hypothèse estl’absence de doubleau entre la troisième et quatrièmetravée centrale, suggérant soit une attente, soit unprolongement du voûtement de la travée de la confes-sion dont quelques claveaux dépassent en effet latravée iv vers l’ouest.

147. « F »

148. la face arrière nord du pilier qui n’était vrai-semblablement pas fait pour être accessible, montreun détail important : à l’est de la corniche d’impostequi se trouve à la hauteur des autres impostes dans lacrypte, le pilier continue, encore 50 cm, jusqu’aucontact avec le mur de l’escalier, où il dépasse leniveau de la corniche de 1,50 m pour disparaitrederrière l’arc de soutènement de la partie haute de l’es-calier. il s’agit du reste de la partie haute du pilier dansson état initial sans imposte. du côté ouest de cetteface du pilier les assises seront sans doute démontéeset remplacées par la maçonnerie des vôutes.

149. l’étude de cet espace est actuellement impossi-ble.

150. assises 1 à 6 : traits diagonaux simples et croisés(étape 2), « croix », trait avec apices (étapes 2 et 5) ;parties hautes : « a, e, b, x, i, t » (cf. la voûte surcroisée d’ogives, étape 5), « r » (étapes 4 et 5).

15. Cf. infra.

15. Cf. infra.

15. la maquette 3d a démontré que deux autresorientations auraient été possibles pour conduire l’es-calier au-dessus de la voûte, ce qui soutient l’hypo-thèse que l’emplacement était délibérément choisi.

15. les signes lapidaires sur les blocs de ce massif sont: « a, b, Ω ». le « b » se trouve aussi dans l’ébrasementde la grande fenêtre de la travée vi voisine, le « Ω » surun bloc du remaniement du pilier iv-v sud, le « b »et le « a » sur la voûte vi centrale. la constructiondu massif d’escalier, proche de celle des grandes baies,précède une étape de remaniements du voûtement etmet en évidence la densité de la chronologie relative.

155. l’appareil dit « de montpellier », qualifié d’opusmonspessulanum ou opus monspeliensium par Jean-claude bessac et Jacques Pécourt (bessac, Pécourt 1995,p. 107-109), alterne des assises de blocs de parementposés dans le lit et sur chant. il est dit « carrettes et jasens »dans les sources (Sournia, vayssettes 1991, p. 157 et fig.159- 160 ; Pousthomis-dalle 2008, p. 68-69).

156. les traces d’outil et signes lapidaires ne sont dece fait plus lisibles.

157. Sans ciselure périphérique, surfaces relativementlisses avec beaucoup moins de traces d’outils qu’aumur sud, orientation des coups moins régulière.

158. deux tores encadrant une doucine.

159. un autre détail confirme la position chronolo-gique de l’escalier : entre les travées v et vi, le mur

sud montre une perturbation importante à l’endroitdu démontage de la pile engagée v-vi au profit del’escalier rampant. au moment du voûtement, lepilier engagé était encore en place. les deux impostesqui furent alors posées à droite et à gauche de cesupport respectent encore son ancien emplacementdans la maçonnerie, avec un coup de sabre vertical surtoute la hauteur du pilier disparu. l’entrée du pilierdans la voûte se distingue encore à une hauteur d’en-viron 4,55 m au dessus du niveau du sol. rétrécissantle passage. ce pilier fut démonté après la construc-tion de la rampe d’escalier pour rendre plus conforta-ble la circulation. le rebouchage retrace exactementl’empla- cement du pilier engagé ; il est réalisé avecles mêmes modules d’appareil que la reprise des piliersdes travées v et vi, ce qui confirme à nouveau l’im-brication chronologique de la construction de l’esca-lier et des autres travaux menés pour achever la partieorientale.

160. un changement de format se distingue déjà àplusieurs assises au-dessous du niveau de fin d’étape,à hauteur de la première assise des petites fenêtres,passant de blocs relativement petits et irréguliers à desformats extrêmement élancés et plats. la répartitiondes signes lapidaires tend à désigner ce changementcomme une sous-étape (cf. hansen 2007, p. 94).

161. les traces de mortier au contact des arcades,dont les retombées sont engravées dans les contrefortsdéjà en place, permettent de restituer une double arca-ture par travée (voir la maquette 3d).

162. la dichromie des claveaux rapproche cette baiede la porte de la vis au chevet.

163. il reste incertain si la reprise complète du mur au-dessus du linteau est due au remplacement d’une voûteen berceau préexistante (voir supra).

164. outre l’absence de signes lapidaires,l’appareil de la partie haute du mur se distingue à l’in-térieur par une alternance d’assises grandes et réduites,par l’absence de ciselures périphériques et par lespremiers impacts de bretture, un outil qui sera utilisépar la suite de plus en plus fréquemment pour lesblocs des autres grandes baies et au cours des étapessuivantes.

165. nous avions naguère interprété à tort ces pertur-bations comme le fruit d’un encastrement après-coup,à la différence de la baie homogène de la travée iii(hansen 2007, p. 96).

166. les hauteurs des assises en place sont en effetrespectées avec des différences de dimensions minimesd’environ 5 mm. mais la distinction des deux étapesest plus facilement visible à travers les traces d’outildes pierres. Sur les blocs insérés après coup, il y a unesurface plus lisse, moins d’impacts d’outil et partiel-lement des traces de bretture qu’on ne trouve jamaissur les blocs du mur sud avant les remaniements del’étape 4. (observations faites à partir d’un relevépierre à pierre exhaustif des 6 travées du mur sud, àl’échelle 1 :10)

167. la largeur de la fenêtre de la cinquième travée estréduite de 10 cm, celle de la sixième baie de 1,10 m,en raison des contraintes architecturales

168. le même signe « b », identifié par sa forme parti-culière, qui apparaît dans l’ébrasement de la baie de la

sixième travée, se rencontre fréquemment au voûte-ment de la travée iii et des travées orientales, ainsiqu’au socle de l’escalier du bas-côté sud.

169. l’appui des baies septentrionales se situe à envi-ron 2 m au-dessus de celui des fenêtres sud.

170. au sud, les assises au-dessus de la ligne de reprisesont plus hautes et les blocs plus courts ; au nord, l’as-sisage est nettement plus variable d’une travée à l’au-tre jusqu’à la hauteur de la claire-voie.

171. Cf. hartmann-virnich, hansen 2000, p. 282,et nos observations sur la façade.

172. d. diemer avait déjà supposé une relation entreles éléments décoratifs de la façade et ceux de la crypte(diemer 1978, p. 227).

173. le revers des piliers du côté des collatéraux restealors en l’état. d. diemer avait attribué la diversitédes solutions architecturales et les incohérences dansla crypte en partie à la distinction fonctionnelle desespaces (diemer 1978, p. 132). mais, s’il est en effetindéniable que la crypte fut dès le début conçuecomme un espace divisé en différentes zones d’aprèsles traces d’anciennes cloisons et de décor peint et laconcentration des graffiti médiévaux dans la travéed’accès au cloître, il est difficile de faire la part desdifférences intentionnelles et accidentelles au coursd’un chantier manifestement difficile.

174. ce rapprochement entre le mur ouest de latravée de la confession et le voûtement de la troisièmetravée de la nef centrale est suggéré par un signe lapi-daire « a » à la deuxième assise du côté nord, simi-laire à un des nombreux signes de la voûte sur croiséed’ogives de la travée iii et la quasi absence de tracesd’outils sur les surfaces lissées des pierres.

175. le pilier engagé vi-vii est retaillégrossièrement en biais pour modifier sa forme rectan-gulaire originelle, d’après les traces à la première assiseau-dessus du sol actuel. le remaniement assez consé-quent se distingue à la fois par les impacts grossiersdes outils de taille et par les gros joints.

176. les modules sont relativement petits et réguliers,avec une hauteur d’assise de 17 à 23 cm et unelongueur majoritairement entre 50 et 75 cm.

177. les signes de la face septentrionale du dernierpilier sud répondent à ceux du voûtement, avec ungroupe d’autres signes des voûtes des travées iii et ducollatéral nord.

178. la chronologie des voûtes de la travée iii a déjàété établie par d. diemer (diemer 1978, p. 90-98).

179. À partir de l’étape 5, la maquette 3d, centréesur la crypte, ne représente la progression des travauxà l’église supérieure que dans les travées correspon-dantes.

180. la poussée de la voûte sur croisée d’ogives estcontenue entre autres par la quatrième travée et lavoûte par les piliers s’élevant au moins au niveau dusol de l’église haute.

181. Signe « b » du même type.

182. comme l’attestent le tracé hésitant des ogives etles retailles en ravalement à la naissance de certainsvoûtains.

l’éGliSe abbatiale et leS bâtimentS monaStiqueS. nouvelleS rechercheS archéoloGiqueS

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Page 46: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

183. « a, b, e, x,t, db, i, losange, croix et cercle, Δ». les signes sont insculpés profondément et avecgrand soin, à la différence des signes qui apparaissentsur les murs, conformément à la qualité de la factureet du décor des ogives.

184. ce voûtement est construit en dernier après lesvoûtes de la partie orientale et celles des deux travéesoccidentales dans les collatéraux.

185. les voûtes du collatéral ont été fortementendommagées et reprises à l’époque moderne, sansdoute suite aux travaux de démolition ordonnés en1622 par henri de rohan et interrompus par ledépart précipité des troupes protestantes. le 6 août1622, le rapport du trésorier de Saint-Gilles constate :« nous a été montré… comme on a sapé la tour et legrand clocher de la grande église, lequel clocher, entombant a ouvert deux chapelles de la dite église etune partie des murailles maîtresses d’icelle.Pareillement on a sapé quatre piliers qui soutenaientles voûtes des couverts des chapelles de la dite église,lesquels piliers et voûtes, en tombant sur la voûte dela plus basse église, a enfoncé l’autre voûte de la ditebasse église » (Saint-Gilles, arch. mun., FF, n° 19,manuscrit de raybaud, d’après nicolas 1912, p.108).

186. les courbes et les dimensions très proches desnervures sont mises en évidence par le relevé numérique.

187. la reprise est marquée à la cinquième travée pardes pierres d’attente à la jonction des deux voûtes effa-cée à la sixième travée par les destructions et restau-rations du xviie siècle.

188. outre la différence du liant, le relevé manuel àl’échelle du 10e met en relief les différences trèssubtiles entre l’appareil en place et ces éléments.

189. « b, Δ, t ».

190. « t, n, a » en trois variantes.

191. « Pentagramme », « double trilobe ».

192. À la sixième travée et dans la moitié orientale dela travée précédente, la quasi-totalité des claveauxd’ogives porte le signe « t », combiné aux doubleauxdu collatéral nord avec un second signe « a ». lesdoubleaux des croisées d’ogives orientales en revanchesont dépourvus de signes, et l’absence de marques surles branches d’ogives occidentales de la cinquièmetravée pose la question du partage du travail pour unmême ouvrage. À l’arcade orientale de la dernièretravée, la marque « t » est absente tandis que les signes« a » (trois variantes), « b, Δ, n, +, i » et le « doubletrilobe » abondent.

193. il s’agit d’un mélange des signes des voûtes de latravée iii (« b, e, x »), des voûtes des travées v et vi(« b, n », différentes variantes de « a », « doubletrilobe », « +, t, pentagramme, Δ ») et d’autres signes(« P, S », variante de « b »).

194. À partir du sol actuel de l’ancien espace claus-tral, soit environ à la mi-hauteur originelle des baiesde l’église haute.

195. À la différence de l’étape 4 (mur sud), les signesdeviennent beaucoup plus nombreux : mur sud : « b,S, m, x, t, Δ, n, Π, Џ, losange ». mur nord : « b, r,∞,S, m, v, Џ ».

196. observations dans le mur sud seulement. dansle mur nord, les parties hautes sont encore plusperturbées par les réparations du xviie siècle et l’achè-vement de l’étape 5 n’est conservé dans aucune travéede la nef, sauf dans la travée vi où le l’arrêt de cetteétape se trouve à un niveau beaucoup plus bas,comme c’est le cas aussi du côté sud.

197. Pour la question de la standardisation du moyenappareil dès le xiie siècle cf.hartmann-virnich 2004b.

198. les archivoltes centrales, postérieures aux archi-voltes latérales, font probablement partie de cettesixième étape de la construction.

199. Cf. diemer 1978, p. 171, qui propose déjà unedate autour de 1200 pour ces éléments à partir descritères stylistiques. une nouvelle étude de la sculp-ture architecturale de l’abbatiale, centrée en premierlieu sur les fragments erratiques et le mobilier lapi-daire issu des fouilles archéologiques, est actuellementen cours (cf. bonetti 2012).

200. un reste de la partie supérieure subsiste à la pileii-iii nord.

201. les profils des moulures sont en principe lesmêmes mais leur hauteur varie souvent de 1 à 3 cm,y compris dans des parties homogènes de la crypte.

202. les signes « b » et « e » sur les parements de l’es-calier, à une hauteur de 1,50 m à 3 m, répondent àceux des voûtes de la troisième travée contiguë. Sur l’arcnord-sud soutenant la partie haute de l’escalier setrouve le signe « t », qui revient au pilier i-ii nord etau doubleau entre les deux travées du collatéral nord,avec d’autres signes qui relient ce pilier au même voûte-ment (« a, n, t, x »). ce synchronisme a déjà étésupposé par d. diemer (diemer 1978, p. 98).

203. le pilier i-ii nord se distingue par un moduled’appareil plus réduit et plus régulier, aux surfacessoigneusement lissées. les signes lapidaires le ratta-chent clairement à l’étape de construction tardive desparties hautes du collatéral nord.

204. cette découverte résulte de la création de lamaquette numérique à partir des cotes réelles relevéessur le monument.

205. dimensions : 0,83 m x 0,79 m et 0,83 x 0,84 cmpour une profondeur de 0,70 m.

206. l’état fragmentaire des restes et leur recouvre-ment par des concrétions calcaires et des sels interdi-sent un relevé par décalque au contact de la couchepicturale, et entravent une étude approfondie. dans laseconde travée du collatéral sud, un décor peintdichrome extrêmement fragmentaire, formé delosanges, pourrait avoir été lié à une partition duvolume architectural vers le xive siècle.

207. le tassement progressif des murs ouest et sud aucours même du chantier fut mis en évidence par notrerelevé pierre-à-pierre de la façade et de son socle(hansen 2007, p. 79, 87, 108-111, 121-122, 125-159, passim). ces problèmes de stabilité eurent desconséquences considérables pour la construction duportail central dont le porche initialement prévu dutêtre abandonné (cf. hansen infra). dans ce contexteun retard de la construction des parties occidentalesde la crypte au profit du chantier des parties orien-tales semble plausible, sans indice clair d’une inter-ruption des travaux.

208. ces nervures simples rappellent les doubleauxnon moulurés du collatéral nord et leur largeur (0,53-54 m) répond à 2 cm près à celle des ogives septen-trionales (0,55-56 m).

209. Scotie à onglets bordée de quarts-de-ronds entredeux bandeaux, avec des variations de hauteur (entre0,02 et 0,03 m) et de galbe des composantes du profil,plus ou moins prononcé. Seule la console dans l’anglesud-est de la première travée n’est pas moulurée.

210. l’appartenance des trois rainures verticalesmourant sur le sommier à l’état d’origine est incertaine.

211. les blocs, majoritairement layés verticalementet horizontalement sans ciselure, ci et là ravalés dansl’entourage des joints, se distinguent par des signeslapidaires isolés d’un type particulier (« av » composéde longs traits diagonaux, « iv »).

212. du côté du collatéral, les trois premières assisesdu doubleau sont verticales puisque l’imposte estsituée à environ 0,80 m en dessous de celle des retom-bées méridionales déjà en place.

213. les blocs des piédroits sont adossés aux facesd’angle obliques du pilier en respectant la hauteur desassises à 0,015 m près. ce mode de constructionpourrait relever d’une modifi-cation au cours de lamise en œuvre ou du manque de familiarité avec levoûtement sur croisée d’ogives généralement caracté-ristique de la crypte.

214. une réfection partielle d’une construction initia-lement homogène des voûtes centrales et méridio-nales, dès avant la restauration moderne de lapremière travée centrale est incertaine et improbable,faute de traces. les irrégularités des nervures etvoûtains dans cette travée résultent effectivement duremontage partiel après les destructions des guerresde religion.

215. le tracé segmentaire du doubleau amorcé par lesommier, incompatible avec la hauteur de la voûte dela troisième travée déjà en place, accuse l’incompé-tence des tailleurs de pierre et des bâtisseurs, qui n’ontpas hésité à ravaler l’intrados du sommier et des quatrepremiers claveaux sur la moitié orientale de l’arc pourcorriger la courbe après-coup.

216. dont des ravalements à la bretture et à la gradineau contact de l’extrados et des voûtains.

217. quicherat 1876, mortet, deschamps 1929(1995), p. 290, n° cxxxvi.

218. comme l’attestent les termes d’une bulle ponti-ficale datant du milieu des années 1260, qui exhorte,en des termes inspirés des lamentations de Jérémie(Jr 4,1), l’abbé à interdit aux moines d’accéder sansraison aux « parties hautes » qui dominent toutes lesrues, en s’exposant inutilement à la vue des habitants :« In ecclesie tue superiori parte, que caput est omniumplatearum, dispergi lapides sanctuarii minime patiaris,quod profecto contingeret, si tuos monachos iuxta moremilluc ascendere sine causa, ibi currere et discurrere, videripariter et videre… » (thumser 2007, n° 189, p. 121-122 ; Jordan 1893, n° 1058, p. 379 ; cf. nicolas 1912,p. 243 d’après de lasteyrie 1902, p. 98).

219. bonnin 1852, p. 366. Cf. Girault, Girault (éd.)2007, p. 238.

220. hartmann-virnich 1996, 2000 a.

andreaS hartmann-virnich et heiKe hanSen

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Page 47: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

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oint majeur du programme duProjet collectif de rechercheaeGimaior faisant suite auprogramme anr-dFG aeGi-

diana, validé par la conservation régio-nale des monuments historiques en tantqu’organisme financeur et par la commis-sion interrégionale de l’archéologie, laprospection géoradar de l’ensemble dusite abbatial a été réalisée en septembre2012 par les sociétés Geocarta (m. dabas,responsable) et So.in.G. (n. ardito,a. crespin). la décision de tester la perti-nence de ce type d’analyse non destructivedu sous-sol 1 résultait du constat de l’adap-tation de la méthode aux conditionsimposées par la nature du site, de l’impos-sibilité matérielle d’envisager des investiga-tions archéologiques à grande échelle, enparticulier dans l’église inférieure, et de laprésence de renseignements sur l’existencede structures bâties dans le sous-sol à diffé-rents endroits, permettant de tester la tech-nique. il s’agissait, d’une part, des fouillesconduites dans les années 1970 dans l’an-cien bras nord du transept et dans le colla-téral nord du chœur, qui avaient mis aujour des éléments susceptibles d’être repé-rés par les prospections : des murs longitu-dinaux orientés est-ouest entre les piliers dela croisée et de nombreuses tombes à cof-frage de pierre ; de l’autre, des plans dres-sés en 1791, à la veille de la vente au titredes biens nationaux des anciens bâtimentsclaustraux, de l’aire claustrale et des partiesorientales ruinées de l’abbatiale, attestantla présence de constructions aujourd’huidisparues dont les fondations pourraientsubsister dans le sous-sol. Par ailleurs, lesconclusions de l’étude archéologique dubâti et des vestiges dégagés en 2004 au pieddu soubassement de la façade occidentale

de l’église apportent des renseignements ‒le plus souvent indirects et hypothétiques ‒sur l’emprise possible des églises antérieuresà l’abbatiale actuelle. enfin, la fouille ducloître, remblayée en fin d’opération,offrait la possibilité de comparer le résul-tat des prospections géoradar avec laconnaissance réelle de la zone fouillée et depréciser ainsi l’interprétation des analyseseffectuées dans des zones non fouillées.

quinze zones d’une superficie totale de1670 m2 ont été prospectées, en laissantde côté certains secteurs trop encombrésou inaccessibles comme l’espace situé sousl’escalier du parvis, le déambulatoire et lesailes sud et ouest des bâtiments monas-tiques. deux niveaux de profondeur ontété explorés, situés respectivement entre-0,5 et -1 m et entre -1 et -2 m sous le solactuel, dans des conditions variables,désavantageuses dans la partie occidentalede la crypte en raison de l’humidité dusous-sol. l’interprétation des résultatss’avère difficile, dans la mesure où les zonessensibles repérées ne font guère apparaîtredes structures linéaires identifiables. dansl’aire claustrale, la concentration desanomalies aux quatre angles pourrait rele-ver soit de la présence résiduelle de maçon-neries liées à la fondation des galeries,soit de la concentration de sépultures àcoffrage. celles dans l’ancienne salle capi-tulaire pourraient concorder avec desperturbations observables dans les maçon-neries du mur oriental roman et corres-pondre aux fondations de supports engagésou de murs de refend. trois anomalieslinéaires et autour de la tombe du saintdans la travée de confession posent la ques-tion de l’éventuelle présence de restes de laconfession préromane dégagée et détruiteen 1864, bien que l’ampleur des travaux de

reprise en sous-œuvre et de réaménage-ment de la travée pour le culte conduisentà en douter. Si les murs longitudinauxdécouverts sous la croisée du transept appa-raissent, quoique de manière fragmentaireet peu explicite, rien ne vient confirmerl’emprise hypothétique d’une église anté-rieure sous la crypte de l’abbatiale actuelle.en revanche, le prolongement vers le nordde l’ancienne aile orientale sous l’actuelcollatéral sud de l’église inférieure, dontl’étude archéologique montre que cettedernière avait été bâtie à l’emplacement del’ancienne galerie nord du cloître, pourraitcorrespondre à deux anomalies identifiéesau sous-sol de la quatrième travée du bas-côté de l’église inférieure.

en fin de compte, la conduite de l’opé-ration a démontré à la fois les possibilités etles limites de ce type de prospection,contrainte par l’exiguïté de certainsespaces, les conditions d’enfouissementinégales et l’impact d’éléments perturba-teurs, comme les revêtements de sol et l’hu-midité. il s’agit néanmoins d’une solutionutile, opportune voire nécessaire du pointde vue méthodologique car non intrusiveet sans impact archéologique, bien que soncoût reste élevé.

* Société So.in.G.

** Société Geocarta.

*** Société Geocarta/ université Paris 6, umr 7619cnrS.

**** laboratoire d’archéologie médiévale et moderneen méditerranée la3m umr 7298 aix-marseilleuniversité amu/cnrS.

1. Pour la prospection géophysique dans le contextede l’architecture religieuse, voir bully, camerlynck,Sapin 2011.

cartoGraPhie Géoradar de l’ancienne abbaye de

Saint-GilleS-du-Gard

agathe creSPin *, Gérald vacheyroux **, michel dabaS ***, andreas hartmann-virnich ****

Page 48: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

340

Saint-Gilles-du-G

ard, abbaye, image planaire à -1,1-1,8 m

de profondeur (a. crespin, a. m

orelli, m. d

abas 2012).

Page 49: Saint-GilleS-du-Gard l’église abbatiale et les bâtiments monastiques : nouvelles recherches archéologiques

341

a création d’un modèle 3D del’abbatiale de Saint-Gilles seheurte aux innombrables irrégula-rités et changements au cours de

la construction de l’édifice à l’intérieur del’espace précontraint d’un bâti monastiquedéjà en place. l’état fragmentaire des ves-tiges architecturaux romans et leur cloi-sonnement ajoute à la grande difficulté decréer une vision virtuelle cohérente. nosexpériences précédentes avec les cathédralesd’auxerre et de Fribourg-en-brisgau ontdémontré l’intérêt fondamental de l’imagetridimensionnelle pour la reconstitutiondu processus constructif et le dialogue per-manent entre l’archéologue et l’architecte-infographe qu’elle suscite, un constatqui ne fait plus débat aujourd’hui 1. laconstruction des maquettes 3d en cad2se fonde presque exclusivement sur lesnuages de point issus du relevé tachéomé-trique, complétés par une couverture pho-tographique des éléments, masqués ou nonpris en compte par le relevé, ce qui induitla prise en compte systématique des di-mensions réelles et l’impossibilité de répé-ter des formes-type reproductibles. Pourréduire le temps de travail, l’alignement des

piles et contreforts a été ajusté en admet-tant une tolérance de quelques centimètres,allant jusqu’à 10 cm pour la longueurtotale de l’église inférieure et en redressantle mur gouttereau sud considérablementincliné à la verticale. en revanche, lesvoûtes, doubleaux et ogives ont été modé-lisés au plus près de leur forme et tracéirréguliers, en réduisant le détail de la mo-dénature à l’essentiel pour éviter la distrac-tion du regard par une surcharge d’élé-ments réalistes. le rendu des surfaces selimite à une monochromie artificielle pourappuyer la réflexion sur l’articulation desvolumes architecturaux et leur ordreconstructif.

comparé à nos modèles 3d des cathé-drales d’auxerre et de Fribourg, dont l’ar-chitecture pouvait être plus facilementtraduite par des composantes-types, le mo-dèle de l’abbatiale de Saint-Gilles s’avérabeaucoup plus chronophage, limitant saréalisation dans le temps imparti à la seuleéglise inférieure. Face à la nature « passive »du relevé au scanner, dont la conversion enmaquette 3d pose des difficultés non

moins considérables, la démarche « active »de la création de ce type de maquette vir-tuelle offre l’avantage d’imposer d’embléeune prise en compte fondamentale desphases de la mise en œuvre mises enévidence par l’étude du bâti et un dialogueinterdisciplinaire permanent qui apporteune contribution essentielle à la réflexionarchéologique.

* architecte-archéologue du bâti indépendant.

** chercheur associé au laboratoire d’archéologiemédiévale et moderne en méditerranée la3m umr7298 aix-marseille université amu/cnrS.

*** laboratoire d’archéologie médiévale et moderneen méditerranée la3m umr 7298 aix-marseilleuniversité amu/cnrS.

1. la présente notice résume nos réflexions dansechtenacher, hansen, hartmann-virnich 2011voirà ce sujet les actes des colloques spécifiques tenus àcottbus et à cluny en 2010 (heine, rheidt, henze,riedel 2011 ; Père, rollier 2011).

2. autocad 2009 by autodesk.

Saint-GilleS-du-Gard

la reStitution 3d : un outil au Servicede la réFlexion archéoloGique

Götz echtenacher *, heike hanSen ** et andreas hartmann-virnich ***