Rétrospective - Ecole de journalisme et de Communication d ...des Bouches-du-Rhône, Martine Vassal. Le communiqué de presse est clair. Nous allons couvrir la signature d’un partenariat

Rétrospective : Dans les coulisses d’une collaboration inédite

J-1 13h45 : Le départ Parés de nos calepins, d’un appareil photo et de nos valises fin prêtes, il est temps de partir. Corentin et moi, heureux élus d’un tirage au sort parmi les étudiants de notre promotion, sommes invités à intégrer une délégation provençale menée par la présidente départementale des Bouches-du-Rhône, Martine Vassal. Le communiqué de presse est clair. Nous allons couvrir la signature d’un partenariat exceptionnel entre le musée départemental de l’Arles Antique et le musée paléontologique du Vatican. Une première pour une collectivité locale française. Au cœur de cette collaboration, le prêt des reliques de St Césaire -les plus anciennes du monde chrétien occidental- pour une exposition de plusieurs mois au musée du Vatican. Le rendez-vous est fixé à 15h45 à l’aéroport de Marignane. Trente minutes de trajet à tout casser, mais nous décidons de prendre nos précautions pour éviter un retard. Métro, navette, c’est l’occasion de réviser un trombinoscope improvisé. “Ici, c’est Martine Vassal, là Sabine Bernasconi, l’archevêque d’Aix et Arles…”

Arrêtez tout ! Soulagement et désarroi. Le trajet est beaucoup (beaucoup) plus court que prévu. La navette nous dépose devant le Hall 3 avec plus d’une heure d’avance. En descendant du bus, Corentin

sur les talons, je récupère mon petit bagage à main violet. Déjà seul dans la soute. J’y avais pourtant placé ma valise près de la sienne. Il blêmit : “Ah non arrêtez tout”. Alors qu’il observe d’un air inquisiteur les valises de nos compagnons de route, je lui conseille de demander au chauffeur. Ouf. Fausse alerte, il nous suffit de contourner le bus, la valise a été changée de soute.

Rejoindre la délégation La pression redescendue, nous foulons la moquette grisâtre du grand Hall 3. Il est vide -enfin presque, pas d’attroupement ni de probable délégation à l’horizon- Je jette un coup d’œil à ma montre : 1h d’attente. Corentin pousse un râle, mais nous sommes rassurés. Quitte à tuer le temps de manière efficace, nous décidons d’étudier une nouvelle fois le communiqué de presse afin de saisir l’ensemble des enjeux du déplacement. Aidés de nos portables, nous tentons de mémoriser les visages et les rôles de chacun. Quelques minutes plus tard, un léger mouvement de foule m’interpelle. À une trentaine de mètres, devant l’une des lignes d’enregistrement, des gens s’embrassent. Des hôtesses vêtues de tailleurs bleu marine, sont maintenant disposées à des endroits stratégiques. Dans leurs mains une pancarte. “C’est peut-être la délégation, non ?” Après un court moment d’hésitation nous décidons de nous rapprocher. C’est bien là, écrit noir sur blanc : Conseil départemental des Bouches-du-Rhône.

Premier contact Nous sommes directement pris en charge par Linda Casta en charge de la communication. Elle nous présente les membres de son équipe, puis nous invite à enregistrer nos bagages. Ça y est. Désormais estampillés de l’étiquette bleu et jaune sur laquelle est inscrit “Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône”, nous faisons officiellement partie de la délégation. D’ailleurs, un vent de curiosité accompagne notre arrivée. En réponse à nos explications, un élu lance -non sans une pointe d’humour- “Et, oui, maintenant nous les prenons de plus en plus jeunes. À cet âge là, ils sont encore malléables !” Petits fours et macarons fourrés à la pistache font patienter ce petit monde avant le décollage. L’occasion pour moi d’avoir un premier échange avec Mgr Christophe Dufour, évêque de l’Archidiocèse Aix-Arles. “Je m’apprêtais à prendre un billet avant d’entendre parler de la délégation. Ça fait quelques années maintenant que je souhaitais rencontrer le pape et faire en sorte que soit intégré St Césaire au calendrier universel. Il a joué un grand rôle dans un contexte difficile. C’était un homme de terrain pour qui j’ai beaucoup d’admiration,” me confit-il avant d’entrer dans l’avion.

Destination Rome À peine arrivés que voilà l’heure de la photo officielle pour la délégation. Après un court trajet en bus, nous nous restaurons dans un établissement aux portes du Vatican.

Lors du repas, l’affaire Fillon et son traitement par les journalistes, est sur toutes les lèvres. Il est près de minuit quand nous rejoignons repus notre hôtel. Après dix minutes de galère, nous découvrons finalement nos chambres. Il est temps de prendre des forces. Demain, c’est le grand jour.

J-2 En route pour la conférence de presse

Le réveil est matinal. Après un petit-déjeuner copieux, nous rejoignons la petite troupe au bus. À notre arrivée sur l’esplanade des musées du Vatican, il y a déjà foule. Encadrés par l’ambassadeur français auprès du Saint-Siège, Philippe Zeller, nous nous frayons un chemin parmi les visiteurs. Trois longs couloirs, un escalator et une dizaine de virages plus tard, nous voilà arrivés dans la pièce où se déroulera la première conférence de presse de la journée.

L’ambiance est intimiste. Seuls les acteurs majeurs de l’accord, la presse, et quelques invités sont présents. Avec Corentin, nous décidons de nous répartir les rôles. Je prendrai des notes, lui enfile sa casquette de paparazzi. Les interventions sont enthousiastes. La directrice du Musée, Barbara Jatta, pour sa première exposition depuis sa prise de fonction, salue le travail des équipes. Mgr Dufour rappelle l’importance de St Césaire et ces aspirations pour lui. Mais c’est Martine Vassal, jonglant adroitement entre français et italien assuré, qui fait grande impression. “ Entre Arles et Rome et la chrétienté, ce sont des siècles d'histoire commune. C’est pourquoi il était essentiel d'être ici aujourd'hui. Le patrimoine du musée d'art antique n’est pas encore autant visité que celui du Vatican, il y a encore des efforts à faire. D’ailleurs si vous souhaitez nous envoyer des visiteurs… (rires) ». Après s’être félicitée d’être entourée d’élus “très investis”, elle invite Sabine Bernasconi, instigatrice du partenariat, à s’exprimer. « La grande personnalité de St Césaire, les traces qu'il a laissées à Arles et son internationalité, font de ces reliques un des trésors cachés de Provence méritant d’être mis en valeur. »

À la découverte des reliques Alors que le service de communication s’affaire à rassembler l’ensemble des membres de la délégation qui s’éparpillent déjà dans la foule de spécialistes, de membres du Musée, invités pour l’occasion, ils parviennent à nous glisser, entre deux commandements, que la suite se déroulera pour nous dans la salle d’exposition. Ce n’est pas sans un petit pincement au cœur que nous voyons les élus s’en aller vers la Chapelle Sixtine. Après quelques secondes de flottement, un des responsables italiens de l’Exposition nous emmène découvrir les précieuses reliques- Nous réaliserons plus tard, à quel point ce moment avec les acteurs de l’ombre, qui plus est dans une salle privatisée, fut privilégié.- C’est le moment de poser nos questions. Les formulaires et le dossier de presse fournis ont beau être très complets, rien ne vaut le témoignage de spécialistes passionnés.

Au fil des reliques que nous contemplons, nous accompagnent les commentaires de Claude Sintès, directeur du Musée d’Arles, mais également ceux de Père Stéphane Cabanac de la paroisse d’Arles. Enchaînant anecdotes sur anecdotes, ils nous permettent de réaliser le poids historique que cette tunique mortuaire, ces sandales et cette ceinture représentent. Ils nous transmettent avec passion le savoir d’une vie. Claude Sintès nous racontera comment par exemple, munis de ciseaux les fidèles accompagnaient la procession des cercueils des saints et de certains membres du clergé dans l’espoir de récupérer un bout d’étoffe, de sandales, qu’ils pensaient source de guérison.

Ils en venaient même à voler des ossements - souvent les doigts de pieds, car plus accessibles et moins visibles- dans les sépultures. « Les fidèles frisaient le fanatisme. On est aujourd’hui loin de l’hystérie générale que pouvait provoquer les reliques, mais leur portée symbolique reste primordiale chez les catholiques. »

Signature de l’accord

Après un bref retour à l’hôtel pour nous restaurer, nous reprenons le bus pour assister à la signature de l’accord. Cette fois, la salle est bondée. Nous sommes entourés d’immenses tableaux et tapisserie réalisés par Raphaël. En dehors de l’intervention du cardinal Giuseppe Bertello et de la signature, il s’agit plus ou moins d’une répétition de la conférence du matin. Martine Vassal aura cependant légèrement modifié son discours, en ajoutant « C’est un rapprochement qui confirme et relève nos racines chrétiennes. Un héritage dont nous sommes les dépositaires. Le devoir de la France est d’assumer ses racines chrétiennes tout en respectant la laïcité qu’elle a mise en place. »

La conférence finie, l’exposition est ouverte officiellement.

Arrivederci Nous clôturons notre aventure par un repas à l’ambassade de France, en présence notamment d’éminents membres du Saint-Siège.

Puis le lendemain matin, par une visite guidée dans le vieux Rome, avant de reprendre la route de l’aéroport. Dans le bus du retour, les discussions sont animées. Tous se félicitent. Les membres de l’Église les premiers. « On a senti de la passion. Un véritable investissement personnel de la part des élus. C’est très agréable, » nous livre Père Stéphane Cabanac. Les autres acquiescent. Ce déplacement est une réussite. Reste à savoir s’il portera les fruits escomptés.

Justine Saint-Sevin