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1Hors srie N1 de la Revue de Nou
velle Acrop
ole
Sep
tembre 20
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Le monde changesi les tres humains changent
tre ph i losophe au jourdhu iHORSSRIEN1
CIVILISATIONSLhumanisme,le souffledu renouveauen Alsace
SOCITPeut-on sinspirerdes valeurs anciennes ?
QUESTIONPHILOPeut-on apprivoiserla solitude ?
SOCIT
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2rendre le monde plus humain
Philosophie Culture Volontariat
54 ans d'exprience dans 50 pays dans le monde
www.nouvelle-acropole.fr
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Le retour la morale pratiqueDepuis janvier 2011, notre revue est
devenue mensuelle et est dite sous format lectronique.Notre
lectorat sest vu augmenter de plusieurs milliers de personnes mais
une trace papier, aumoins une fois par an, me semblait
indispensable pour consolider nos liens.
Ce numro exceptionnel de rentre synthtise nos orientations
philosophiques et nos ambitions.Nous constatons que le besoin de
philosophie en action, travers un savoir-vivre pratique est
unedemande croissante dans notre socit et en mme temps une option
indispensable si celle-civeut oser faire face aux dfis de notre
poque.
Nous apprenons avec joie que le ministre de lducation nationale
a dcid quil tait tempsdoprer le grand retour de la morale lcole.
Sentences et maximes dautrefois reviennent surle devant de la scne
; bien entendu, il ne sagit pas de les apprendre par cur mais de
les vivre.L se situe lenjeu. Nous pensons que les enseignants et
les parents doivent conjuguer leursefforts pour aider lenfant
acqurir les principes de la citoyennet et de la vie collective.
Latransmission des rfrences communes qui permet de penser, vivre et
agir ensemble est urgenteet doit se faire au niveau national.
La finalit de lthique consiste savoir comment chaque personne
peut devenir meilleure,quelles sont les actions qui sont bonnes
pour elle et qui peuvent lui faire du bien. Lthique engage
pratiquer quotidiennement pour se former le caractre et apprendre
bien vivre mais cettepratique doit galement transcender lindividu,
pour devenir une pratique collective, vivreensemble et partager
affection et solidarit. Do limportance de donner des finalits
dedpassement de soi, dordre individuel et collectif et ce, depuis
le plus jeune ge. Survivre dansun monde de brutes nest pas
suffisant. Nous devons nous engager vers ce qui est juste et
bon,quitter notre conformisme et notre confort pour nous permettre
de vivre pleinement. Donc, gardons le moral !
Fernand SCHWARZPrsident de la Fdration des Nouvelle Acropole
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ED I T OR I A L
Nouvelle Acropole Revue - Hors srie N1 - ISSN 0396-7387 - Dpt
lgal aot 2011. dit par la Fdration Franaise Des Nouvelle Acropole,
association franaise rgie par le dcret loi du 1er juillet 1901.Sige
social Administration : La Cour Ptral, D941, 28340
Boissy-ls-PercheRdaction : 6, rue Vronse 75013 Paris - 01 42 50 08
40 Internet : http://www.nouvelle-acropole.frDirecteur de
Publication : Fernand SCHWARZ - Rdacteur en chef : Isabelle
OHmANNSecrtariat de rdaction : marie-Agns LAmBERT - maquette :
Sylvie COTSCrdit photo : Nouvelle Acropole - Impression : Print24 -
Prix de vente : 5 Reproduction interdite sans autorisation.
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Sommaire
ditorial Le retour la morale pratiquePar Fernand SCHWARZ
............................................................3Socit
Philosophie pour temps de crisePar Dlia STEINBERG
GUZmAN................................................5Le monde
change si les humains changent Par Beatrice DIEZ CANSECO
....................................................6Socit
Transformons les catastrophes en opportunitsPar Fernand SCHWARZ
............................................................7Civilisations
Apocalypse ou renaissance ? Par Laura WINCKLER
..............................................................8Socit
Peut-on sinspirer des valeurs anciennes pourvivre aujourdhui ? Par
Fernand SCHWARZ ....................14Civilisations Lapport
culturel de Rome aux problmesdu monde actuel Par Jorge Angel
LIVRAGA......................16Civilisations Le souffle du
renouveau en AlsacePar michle FLORIANGE
........................................................20Environnement
Le mystre de la disparition des abeillesPar Anne
NOTARAS................................................................23Philosophies
Confucius, lidal de lhomme de bienPar Brigitte BOUDON
..............................................................24Question
philo Peut-on apprivoiser la solitude ?Par Lonie BEHLERT
............................................................28Art
et symbolisme Regards sur Kannon, le grand com-patissant Par Laura
WINCKLER........................................30Philosophies
Montaigne, une pense en perptuellevolution Par Brigitte
BOUDON..........................................34Art et
philosophie veiller le potentiel artistique et spirituel Par V. V.
KARENINE ........................................39Art et
philosophie Lamour au cinma aujourdhuiPar Lionel TARDIF
..................................................................43A
Lire
..................................................................................45
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24
30
39
8
16aNToNY1, rue Madeleine 92160
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rond-point de lEurope
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Havre30, rue du Marchal Joffre
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[email protected] 37 37 54
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Nouvelle acropole eN fraNce
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iDune part nous avons dcouvertquen raison du modle
socio-cono-mique des dernires dcennies, lescycles du progrs matriel
avaientplus dinfluence sur nos vies que nousne laurions imagin ou
dsir.Dautre part, la crise a t une oppor-tunit intressante pour
dcouvrir quenous, les tres humains, avons dau-tres valeurs sur
lesquelles nousappuyer dans les moments difficiles.Prcisment, la
philosophie en tantquart de vivre nous a permis de nousposer
nouveau les questions de tou-jours et de revenir aux rponses
vala-bles auxquelles le passage du tempsna retir aucune valeur,
bien aucontraire. Un grand point dinterroga-tion continue de planer
sur la connais-sance de qui nous sommes, pourquoinous sommes dans
le monde et quelest notre rle dans cette histoire quise tisse jour
aprs jour. Il serait troptriste de croire que notre unique
fonc-tion est de survivre mdiocrement ou,en tout cas, de nous
efforcer de par-venir un meilleur niveau de survie,avec plus de
richesses quon ne peuten mettre profit. Les biens
matrielsessentiels sont absolument indispen-sables. mais il y a
beaucoup de gensqui possdent plus que le ncessaire
sans avoir pour autant russi limi-ner ni la douleur ni le
malheur. Parcontre, il y en a qui nont que le strictncessaire et
parfois moins, et qui ontatteint une grande paix intrieure
endveloppant dauthentiques valeurshumaines. En tant que
philosophesqui aspirons la droite connaissance,nous avons constat
que le Bon, leBeau, le Vrai et le Juste continuent tre des lments
indispensablespour atteindre le bonheur. Philoso -phie et bonheur
ont beaucoup dechoses en commun. Les crises sont des situations
particu-lires, dans lesquelles dcouvrir cesconcidences peuvent nous
aider surmonter les difficults et nousdpasser nous-mmes pour
grandirmoralement et spirituellement. Ilconvient de rappeler ici la
clbrecitation du savant et philosophe AlbertEinstein sur le sens de
la vie : Unecrise peut tre la plus grande bn-diction qui puisse
arriver aux gens etaux nations parce que toute criseengendre des
progrs. La crativit
nat de langoisse comme le jour natde la nuit obscure. Cest dune
situa-tion de crise que naissent linventivit,les dcouvertes et les
grandes stratgies. Qui surmonte une crise, se dpasse lui-mme sans
tredpass. Qui attribue la crise seschecs et ses lacunes fait
violence son propre talent et a plus de consid-ration pour les
problmes que pourles solutions... Sans crise, il ny a pasde dfi et
sans dfi la vie est une rou-tine, une lente agonie. Sans crise,
ilny a pas de mrite... Finissons-enune fois pour toutes avec
luniquecrise qui nous menace, savoir la tra-gdie de ne pas vouloir
lutter pour lasurmonter. Nouvelle Acropole, enharmonie avec ces
ides, parie pourle talent et la crativit et les opportu-nits
offertes par une philosophievitale, pour que llan individuelpuisse
tourner au bnfice de lhuma-nit tout entire
Dlia STEINBERG GUZMANPrsidente internationale de Nouvelle
Acropole
SOC I T
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Philosophie pour temps de crise
Il est invitable, en faisant le bilan de lanne,de se rfrer la
crise conomique qui, sousune forme ou une autre, a touch tant
degens dans le monde.
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Il est certain que dans un contextede crise, dinstabilit, de
catas-trophes naturelles, de violence etde chmage, il est difficile
de garder foi en lavenir. Toutefois,perdre courage et ne pas
fairedefforts pour susciter un relchangement nous rend en
partieresponsables du problme et nousconduit dautant plus vite
latotale dsintgration de nos soci-ts. Nous voudrions tous un
avenirmeilleur mais ce sur quoi noussommes en dsaccord est la
faondy parvenir. Nouvelle Acropole,nous pensons que les
systmesdoivent changer mais noussommes convaincus que cestdabord
ltre humain de chan-ger. quoi bon rnover les outilsde la socit sans
objectifs nobleset bons ?Pour contribuer de faon dcisive
lamlioration du monde, cela faitcinquante trois ans que nous
tra-
vaillons au renouvellement int-rieur des tres humains et de
laculture, travers une ducationphilosophique qui veille lesvaleurs
les plus leves, qui dve-loppe lintelligence, le courage etla force
intrieure pour pouvoirfaire face lpoque difficile quilnous incombe
de vivre etpour construire un avenir meilleur,par-del toutes les
adversits. Les pages de notre bilan annuel (1)contiennent un bref
rsum denotre intense activit dans lemonde entier et se veulent
unehumble contribution pour amlio-rer les individus et le monde.
Quelesprit inspire et unifie des actionsaussi diverses, dans les
domainesde la culture, de la philosophie etdu volontariat ?Un idal
philosophique qui nousrapproche de la connaissance pro-fonde de
nous-mmes et de la vie ;qui nous permet de comprendre la
valeur de notre temps et nouspousse quitter une attitude
pas-sive afin de devenir des leaders dechangements positifs dans
notresocit ; un idal qui promeut unart qui touche lme, une
sciencequi nous soit vraiment bnfique ;une technologie qui ne
pollue pasnotre plante - tel est lidal deNouvelle Acropole et, dans
plus dequatre cents villes travers lemonde, nous le faisons dj
deve-nir ralit. Des milliers dhommeset de femmes, travers
chaquecours de philosophie, chaque ate-lier artistique, chaque
actionsociale ou cologique, apprennent vivre avec courage,
fraternit,gnrosit, enthousiasme, espoir. Notre mission est
denseigner auxgens vivre et apprendre de cequi est vcu
Beatriz DIEZ CANSECO
(1)www.nouvelle-acropole.fr/institutions/nouvelle-acropole/bilan-international.html
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Le monde change si lestres humains changentQuand commence une
nouvelle anne, nous esprons tous quelle serameilleure que la
prcdente. Cest un beau dsir qui vient du fond de notrecur, au-del
des circonstances ngatives qui nous entourent.
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Depuis plus dun sicle, lOccidenta russi imposer son modle
laplante, saffirmant comme le sou-ligne trs bien Stphane Foucart(1)
comme tant la civilisationtechno-scientifique par
excellence,proposant ou imposant au reste dumonde un mode de
dveloppementfond sur linnovation technolo-gique comme principal
moteur decroissance conomique Le pro-grs technique prime sur
touteautre considration politique,sociale, morale. Cette
fabuleusepromesse de domination de laNature et de la matrise du
mondefinira par sduire tous les peuples de la Terre. mais un
accident de civilisation est intervenu :Fukushima. Il a rveill
partout lapeur de voir sa promesse nontenue et propage la crainte
que lescratures des techno-scientifiquesnchappent leur contrle.
Lacrature a pris une vie autonome.Les matres de latome ne saventmme
pas ce qui se passe dansson cur car personne ne peutsen approcher
sans prir. Cest lemythe du progrs et de la scuritqui seffondre avec
son lot de peursirrationnelles et de fatalit. Les hommes commencent
pren-dre conscience que le plus granddanger auquel il faut faire
face vientdeux-mmes, comme le montrentles changements climatiques,
lescrises financires, le 11 septem-bre Le nuclaire na fait que
cris-talliser ces lments. mais cetteprise de conscience collective
peuttre aussi une opportunit pourremettre plat nos fondamentauxet
rcuprer le got de la vie. Lacourse effrne de lindividualismeest
probablement la source de la
grande tension nerveuse que vitnotre socit : 40 % des Franaisse
sentent abandonns. Ellepourrait peut-tre nous conduire sortir du
chacun pour soi pourembrasser lide de vivre ensem-ble. Comme le
disait le Gnral deGaulle Quand les Franais croienten la grandeur de
la France, ils fontde grandes choses ; quand ils sesentent
abandonns, ils font depetites choses.
Il y a quelques mois, Jean-PaulDelevoye, dernier mdiateur de
laRpublique a remis son rapportannuel. Face au constat de lasocit
franaise qui se fragmenteet o selon lui, on devient de plusen plus
consommateur deRpublique plutt que citoyen, ilsonne lalarme sur la
ncessit deretrouver le got de mieux vivreensemble. Il constate que
notresystme administratif globalchoue sur sa capacit dinclusionet
devient une machine exclure. Ilnest plus capable daider au
bonmoment, devenant complice delinstauration dune spirale de
fata-lisme. Les politiques, aujourdhui,suivent lopinion plus quils
ne laguident, tandis que les opinions,soumises aux motions plus
quaux
convictions, sont volatiles (2)On croirait lire Platon dans
LaRpublique lorsquil dit Il faut du-quer un peuple, non par la
satisfac-tion de ses dsirs mais par des res-ponsabilits. Notre
socit doitretrouver le chemin des valeurs,sinon ses tensions
internes serontsuicidaires. Il insiste sur le fait,quil faut
quitter la culture du conflitqui ne fait quaccrotre nos
fai-blesses, instaurer le dialogue, et
proposer un projet soutenu par desvaleurs qui mritent
lengagement.Construire sur un socle de convic-tion et non btir sur
le sable desmotions. Le courage de Jean-PaulDelevoye est pour nous
une notedencouragement et chacun dentrenous doit exercer sa lucidit
pourdceler des pistes cratrices etenthousiasmantes pour lavenir
etle futur que nous voulons construireensemble. Le modle du
citoyenphilosophe nest plus une utopiemais une inspiration suivre
pourse librer de la fatalit
Fernand SCHWARZPrsident de la Fdration Des Nouvelle Acropole
(1) Fukushima, un accident de civilisation,Le journal Le monde
du 10 avril 2011(2) Sindigner cest une bonne chose maisse mobiliser
cest encore mieux, Jean-Paul Delevoye, mission de France Inter,24
mars 2011
SOC I T
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Transformons les catastrophes en opportunits
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2012apocalypseou renaissance ?
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Depuis quelque temps, lactualit, la littrature, lascience, des
films documentaires et mme des filmsdaventures parlent de 2012
comme dune catastrophesans nom, nourrissant les peurs ancestrales
delhumanit. Quen est-il vraiment ? En tant quephilosophe, quoi ce
thme nous invite-t-il rflchir ?
C I V I L I S AT I ONS
recommencement, une volution,une maturit et une naissance versun
nouveau cycle de vie. Le Tzolkinassocie les nombres de 1 13 avecune
squence de 20 signes appe-ls glyphes qui sentremlent et serptent
sans cesse. (Un cycle de20 jours combin avec un cycle de13
jours).
Les 20 jours du Calendrier mayaLe Haab est bas sur un
cyclesolaire de 365 jours comme notrecalendrier grgorien (le cycle
secompose de 18 mois de 20 jours etdun mois de 5 jours appel les
dor-meurs).Les mayas employaient lpoqueclassique un troisime type
dedatation extrmement prcis : lecompte long. Le point de dpart
decette datation (confirme par lesinvestigations de ric
Thompson(2)) est la date 0.0.0.0.0 du comptelong maya qui
correspond au 11 aot 3114, sensiblement par-tir du lever du soleil
sur un fuseauhoraire pour lAmrique. Cette datefigure sur la stle C
trouve Quirigua et aussi sur une stle deTikal. Selon les
conceptions cos-mogoniques que les mayas parta-geaient avec les
autres civilisationsmsoamricaines, les dieux fai-saient et
dfaisaient rgulirementle monde. Il ny a donc pas une seulecration
mais une suite vraisembla-blement ouverte de crations.
pour mesurer le temps. Ceux-ci for-ment des cycles rcurrents
basssur les rythmes du cosmos et quisenchanent comme les
rouagesdune montre. Les scribes mayasdvelopprent un systme
vigsi-mal (1) dunits de mesure dutemps (les glyphes de priode)dont
lunit principale fut le tun oupriode de 360 jours. Le systmedes
multiples du tun est ouvert etparfaitement vigsimal : 1 katun =20
tun, 1 baktun = 20 katun, etc. Ilsdvelopprent aussi un sous-sys-tme
dunits de mesure de temps,luinal (1ere partie du tun) et le kin(20e
partie du uinal). Les calendriers mayas les plusconnus de nos jours
sont le Tzolkinet le Haab. Le Tzolkin ou calendrier sacr estbas sur
un cycle de 260 jours (13mois de 20 jours). Ce cycle corres-pond la
gestation humaine, souslinfluence de la Lune. Il induit un
Le thme de 2012 a t abord pardes civilisations anciennes, dont
lesmayas.La civilisation maya a connu sonapoge la priode
classique,entre 300 et 1000 aprs J.-C. Ellepossdait de grandes
richesses etdes connaissances et, son apo-ge, son influence
stendaitdepuis la Pninsule du Yucatan etle Guatemala jusquau
Salvador etau Honduras. Il subsiste encoredes ruines imposantes de
certainesde leurs cits-tat comme ChichenItza, Uxmal, Bonampak,
Tikal,Copan ou Palenque (o lon atrouv dans la pyramide des
BellesInscriptions le tombeau intact du roiPacal). Les mayas
croyaient en lin-fluence du cosmos comme activa-teur de lesprit
humain. Grce leurs observations astronomiqueset leurs connaissances
mathma-tiques, ils ont dvelopp un sys-tme de calendriers trs
complexes
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Pour les mayas, chacune dure 13baktun (cycle de 13 x 20 x 20
=5125 ans). Pour les scribes duClassique, la cration en coursavait
commenc un 4 Ahau 8Cumku (date dans le Calendrierrituel de 18 980
jours). Dans la version actuellementaccepte de la corrlation
deGoodman-martnez Hernndez-Thompson, la date du 21 dcembre2012
correspond celle o lecompte ltong a termin un cycle(commenc
0.0.0.0.0 en - 3114de notre re) et recommence 13.0.0.0.0. Cette
anne sera alors
un moment de grande transition etde transformation, car elle
marquela fin dun cycle de 5 125 ans etdun cycle de 13 ans. Dans le
cycledes crations mayas, elle corres-pond la fin de la cinquime
re,car leurs textes cosmogoniques,comme le Popol Vuh, parlent
dequatre res prcdentes, chacunedtruite par un cataclysme produitpar
un excs de lun des lments :le vent, la terre, le feu et leau.Toute
fin de cycle saccompagne decertaines catastrophes produitespar la
nature ou par les astres.
Les cycles de lHistoireDe nombreuses civilisations an -cien nes
concevaient la relationentre les cycles de lhistoire et lescycles
cosmiques au rythme dumouvement des toiles et des pla-ntes ainsi
que par le cycle terres-tre des saisons. Elles ont constatlvolution
cyclique de la vie avecdes phases de naissance, pa-nouissement,
mort et renaissanceet ont dduit quil en tait de mmepour lhumanit.
Cette visioncyclique ne nie pas lide de pro-gression, profondment
ressentiepar lhomme comme besoin de se
dpasser et daller toujours plusvhaut et plus loin. mais cette
pro-gression se fait, comme il arrive notre plante Terre ou au
Soleil, entournant autour dun centre. Cedouble mouvement courbe
etascensionnel est celui de la spiraleou le septime mouvement
dontparlait dj Platon. Il conduit las-cension de lHlicon, la
montagemagique au sommet de laquellerside laccomplissement de
lhu-manit dans la Sagesse.Ainsi, bien que concevant la nais-sance
et la mort des systmes
vivants, les civilisations ne serontjamais porteuses de la
conceptionde la fin des temps comme unabsolu irrductible, que lon
trou-vera plus tard partir des religionsmonothistes en particulier
dans lechristianisme avec sa conceptiondu millnium.
Les cycles dans les civilisationsDans lInde classique, nous
retrou-vons le cycle du Maha Yuga, com-pos de quatre ges, ge dOr,
gedArgent, ge de Cuivre et ge deFer. Ils sont symboliss par le
tau-reau du Dharma qui a 4, 3, 2 et 1patte(s) selon les poques, ce
quiindique la dure respective desges. La dure totale de ce
grandcycle est de 4.320.000 annes. En msopotamie, on concevaitsous
une base sexagsimale descycles qui senchanaient aussi lesuns dans
les autres, depuis le sosde 60 ans jusquau Grand Saros de216 000
ans, reprsentant une ins-piration qui avec une expirationdonnait la
vie totale de lunivers, de432.000 ans.En gypte, on clbrait tous les
1 460 ans, le retour du Benben Hliopolis, tablissant le
rajuste-ment entre le calendrier solaire etltoile Sirius qui se lve
laube, lhorizon annonant la crue du Nil etle dbut de lanne. Ce
grand cyclepermet de rajuster galementlcart entre lanne vague de
365jours et lanne tropique de 365,25jours. Ce retour fut clbr
autemps de Djeser, lors de laconstruction de la pyramide
deSaqqarah, sous Ramss Ier et sousAntonin le Pieux. Cette
civilisation afait preuve dune longue cons -cience historique fonde
sur saconception des cycles malgr les
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hauts et les bas de ses empires.En Grce, on retrouve la
traditiondes quatre ges dOr, dArgent, deCuivre et de Fer rapporte
parHsiode et reprise par la suite parCicron et Virgile Rome.
Platonparlera de lAnne Parfaite quirecouvre la vie de lUnivers
dunedure de 36 000 annes. La religion zoroastrienne, prsenteun
cycle de lunivers de 12.000 ansdans lequel la Lumire (Ormuz) sebat
contre les Tnbres (Ahriman),jusqu sa victoire. Les stociens parlent
galement decet ternel retour des astres unpoint initial de
convergence. maiscet achvement comporte unernovation, avec
opportunit de seprojeter dans le futur enrichis de
lexprience clture.La Grande anne prcessionnelleest base sur le
phnomne astro-nomique de la prcession desEquinoxes, ce qui donnera
un cyclede 25.920 ans, donc chaque moiscorrespond une constellation
duZodiaque. Ainsi, nous sommes entrain dachever lre des
Poissonspour rentrer dans lre du Verseau
(3). noter que les Cinq res desmayas correspondent 25.625 ans,ce
qui est trs proche de la dure dece grand cycle et nous permet
depenser des correspondancesastronomiques dans ses calculs,tout
comme les autres grandscycles des civilisations classiques.
Rsurgence du catastrophismeen temps de criseDans un monde en
crise et dbous-sol, des peurs ancestrales mer-gent et des augures
annoncent lespires catastrophes, dans un lan-gage
pseudo-scientifique qui faitautorit aujourdhui. Ainsi
ressurgis-sent les dates du calendrier mayaet les anciennes
prophties dechangement des res, enrichies augot du jour. Il ne
sagit plus de sim-ples inondations (source de luni-versel mythe du
Dluge), de trem-blements de terre ou druptionsvolcaniques ou
dextinction desespces mais dautres catas-trophes plus
extraordinaires et met-tant en jeu non seulement notreplante mais
aussi son environne-ment spatial.
Nous reprendrons les sept scna-rios catastrophes annoncs
pour2012 et les rponses que lascience leur donne (4).
Premier scnario : Serons-nousvictimes dun alignement galac-tique
fatal ? On se rfre un alignement duplan galactique et de celui
delcliptique qui se confond avec ladirection du solstice dhiver,
maiscet aspect dure dix-huit ans entre1980 et 2016 et nimplique
aucuneanomalie astronomique.
Second scnario : Quadviendra-t-il lors du transit perturbateurde
Venus, attendu pour la nuitdu 5 au 6 juin 2012, quand ellepassera
devant le Soleil ? On verra depuis la Terre une minus-cule tache
noire. Ce type daligne-ment, correspondant uneconjonction Soleil
Venus Lunequivalente la Nouvelle Lune quiparfois correspond des
clipses,se reproduit rgulirement. Simple -ment, par rapport laxe de
Venus,on ne la voit pas souvent passerdevant le Soleil. mais, cela
ne peuttre source dinquitude car mmeau niveau astrologique, la
conjonc-tion Soleil Venus a une significationplutt bnfique.
Troisime scnario : Le risque de collision avec un astrodegantLes
astronomes nont identifi aucunastrode de ce type prt croiser
laTerre dans les cent prochainesannes. Et les petits astrodes
croi-sant lorbite de la Terre, nommsgocroiseurs, ont t recenss etle
risque calcul, au moins pour2012, est presque de zro.
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Quatrime scnario : La Terresera-t-elle expulse de sonorbite ?
Pour parvenir ceci, un corps demasse terrestre devrait nous
frler.Il changerait de lnergie avecnotre plante, prendrait sa place
etnous jecterait dans lespace. maisun tel objet baladeur nexiste
pasdans le systme solaire, donc lerisque est inexistant. Et mme
sitoutes les bombes atomiques exis-tantes explosaient en mme
temps,lhumanit serait morte mais laTerre continuerait tre sur
sonorbite.
Cinquime scnario : Le soleilconnatra-t-il une surchauffehors du
commun ?Il existe un cycle de onze ans, aucours duquel des taches
sombresapparaissent sa surface et sonactivit devient plus intense.
Cescycles sont rpertoris depuis leXVIIIe sicle et lon a pu
constaterque, lors des cycles plus calmes, latemprature terrestre a
diminu for-tement, tablissant un lien entrelactivit solaire et le
climat. Les
taches jectent des flots de parti-cules charges du vent solaire
quiperturbent la magntosphre de laTerre, provoquant des
perturba-tions au niveau des communica-tions et des satellites.
Bien que lepic dactivit soit prvu pour 2012 2013, on ne peut pas
encore antici-per son intensit et il ne sagit nulle-ment dun
phnomne nouveau ouexceptionnel. Par ailleurs, les cher-cheurs
calculent quun ralentisse-ment de lactivit solaire se produiradans
les prochaines dcennies.
Sixime scnario : Assisterons-nous une inversion des
plesterrestres en 2012 ? Pour commencer, ce qui peut sin-verser ce
sont les ples magn-tiques de la terre (la direction poin-te par la
boussole) et non pas lesples gographiques. Ce type din-version sest
dj produit par lepass, la dernire remontant environ 800 000 ans. Le
phno-mne nest pas priodique etdpend de la source du champmagntique
terrestre qui est le ferfondu au cur de la terre, agit
parfois par des mouvements deconvection turbulents. On
constateune dcroissance du champmagntique depuis 3 000 ans, maison
ne peut dterminer si cetteinversion se produira dans 1 000 ou2 000
ans. En tout cas, on naobserv aucune corrlation entrelinversion du
champ magntique etlextinction des espces. Uneconsquence constate
est laffai-blissement de la protection natu-relle contre les
particules solaires.
Septime scnario : Y a-t-il uneplante fantme qui risque denous
frler ? Certains parlent dune planteNibiru, derrire lorbite de
Pluton,dont lorbite excentrique croiseraitchaque 3 600 ans lorbite
terrestre,en provoquant des tsunamis,sismes, ruption volcaniques,
etc.Jusqu prsent, aucun observa-toire terrestre ou spatial na vu
tracede cette gante de laves. Et uncorps cleste avec une telle
excen-tricit serait plus proche dunecomte que dune plante.Est-ce
dire quaucun danger nenous menace ? La rponse est nonet
malheureusement, nous savonsquune grande partie de cesgrandes
menaces (rchauffementclimatique, destruction de la biodi-versit,
pnurie deau et de nourri-ture, pollution de toute sorte,
surpo-pulation, guerres, etc.) est le pro-duit dune activit humaine
fondeplus sur lignorance, la soif du profitgoste et la vision court
termedune nature-objet exploiter, quedune vision globale dun
Universvivant. Homo lupus hominis :lhomme est un loup pour
lhomme.Ce modle de lhomme arrogant,matre absolu de la Nature et
capa-
1 2
-
cent par le changement de chaqueindividu. Nous devons aspirer
lUnion qui est la trame indivisiblede lEnergie. Pour parvenir
rendrepossible ce qui semble impossible,il faut une vritable et
profondeouverture de la conscience. Cestpar notre imagination
cratrice quenous forgerons ce monde plusbeau et plus juste auquel
noscurs aspirent.
Agir au niveau individuel et collectif, une
ncessitIndividuellement, nous devons deve-nir les acteurs de
transformation, enpermettant une authentique mer-gence de
lindividu, capable de seconnatre intimement lui-mme etde connatre
les lois de la nature.Nous devons appliquer une thiquede la
reliance, qui nous permette dedcouvrir le trsor cach dans lau-tre.
Nous devons promouvoir leretour une ducation initiatique
dudpassement des peurs, commesource dune vritable fraternit.Nous
devons adopter une visiondunicit, de cohrence dans ladiversit,
dorganicit et rassembler
ce qui est pars et tisser le multiple.Nous devons dvelopper un
senti-ment dappartenance notre mai-son-mre Gaa, commune tous,dans
un Univers vivant. Nousdevons mettre en avant les valeurspratiques
par le hros, courage,authenticit, gnrosit, responsa-bilit et
confiance.Collectivement, il nous faut passerde lillusion de
labondance la ra-lit de la raret. Nous devons pr-server la
biodiversit et nous adap-ter. Nous devons tre conscientsde notre
communaut de destinhumain et terrestre, concevoir unprogrs
organique qui allie cyclicitet progression, changer nos menta-lits
au niveau de nos penses,paroles et actions pour changer laralit.
Enfin, nous devons promou-voir un nouvel humanisme
Laura WINCKLER(1) vigesimal : base 20(2) Sir John Eric Sidney
Thompson (1898 1975) : archologue britanniquespcialiste des
inscriptions mayas pr-colombiennes (3) Lre du Verseau, Laura
WINCKLER,Editions des 3 Monts(4) Dossier paru dans la revue
Sciences etAvenir, n 753, novembre 2009
ble par sa seule raison de lexploiter outrance, est arriv
puisementet montre ses limites. Le XXIe siclene tient pas toutes
les promessesde paix, bonheur et progrs promisdepuis le XVIIIe
sicle par lesgrands visionnaires de lOccident.Nous sentons quun
modle estarriv son terme et que nousdevons changer de paradigme.
Lesnouvelles dcouvertes de lascience vont dans ce sens et
nousdevons entirement repenser dansune logique de vie, nergie,
solida-rit et interaction et non pas de mort,matire, inertie et
sparation.
Changer notre vision delhomme et de la NatureSi on se mettait
esprer limpro-bable comme le conseille Edgarmorin, et comprendre
avec SrenKierkegaard que ce nest pas lechemin qui est difficile,
cest le diffi-cile qui est le chemin. Il est urgentde changer notre
vision de lhommeet de la nature et dans ce domaine,les Anciens en
ont beaucoup nous apprendre. Les mayas pen-saient que les systmes
fonds surla peur entrent en crise et que nousdevions faire natre
une humanitplus libre, plus courageuse etmoins dogmatique. Les
change-ments rapides qui arrivent, nousobligent prouver la ncessit
denous renouveler tous les niveaux.Le temps est une source de
trans-formation et assumer les cyclescest transformer lexprience
enSagesse. Il faut chercher des chan-gements profonds dans lesprit
et lecur de lindividu et celui-ci doit sesentir partie dun Tout
vivant etorganique et pas dun univers mortet insignifiant (sans
sens). Leschangements du monde commen-
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1 3
-
Peut-on sinspirer des valeursanciennes pour vivre aujourdhui ?Se
renraciner pour le futur Rendre le monde habitable. Telle tait la
qute desgyptiens. Il sagit de sinspirer des valeurs et racinesdu
pass afin de les ractualiser laide des apportscontemporains. Une
ncessit pour la socit actuelleen panne de valeurs.
dernires recherches en scienceshumaines, notamment celles
quiconcernent le fonctionnement dessocits traditionnelles et la
fonc-tion du sacr dans les socitshumaines en gnral. Ces nou-velles
connaissances nous am-nent nous interroger et revoirnos ides sur
les notions de tradi-tion, de spiritualit, dintriorit,dinitiation,
de rite, de symbole et demythe, de hirarchie, dhonneur, dedvotion,
de foi. Nous avons eneffet la surprise de constater queces
principes, loin de contreveniraux notions de libert, de
respect,dautonomie et de dveloppementde lindividu, les servent,
tout commeelles servent une vie collective elle-mme au service de
la justice.Ce nest pas sans raison que tantde chercheurs
contemporains comme le psychologue Carl G.Jung ou le physicien
Fritjof Capra(1) se sont inspirs ou sinspirentde ces civilisations
et de leurs tradi-tions, donnant ainsi une nouvelleactualit des
socits dont onpensait quelles ne pouvaient riennous apporter. Parce
que nous avons accept derviser nos ides reues dans lesdomaines de
la physique ou de labiologie, notre vie en a t chan-ge. Les
dcouvertes qui ont suiviont trouv dinnombrables applica-tions dans
la vie quotidienne et lefonctionnement de notre socit,apportant un
changement profondet acclr de notre environne-ment : confort dcupl,
longvitaccrue, etc.
individuels que collectifs. Afin de mieux comprendre la ralitet
de mieux agir sur elle, nousavons accept de rviser des idesreues
sur le fonctionnement delunivers, sur lorigine de lhomme,sur la
biologie et la sant...Aujourdhui, aprs la crise finan-cire qui a
secou toute la plante,le rchauffement du climat et sesconsquences
sur lcosystme,face au dsarroi dans lequel sontplonges les socits
occidentalespour amnager une socit habita-ble et harmonieuse, nous
devonsaccepter de rviser nos ides sur lemode de fonctionnement
dessocits humaines. La situationactuelle du monde exige de nousune
refonte complte de notre grillede lecture de la ralit. Nous
constatons en effet quelcole ne prpare plus travaillerni penser,
que la famille ne pr-pare plus une vie affective pa-nouie qui ouvre
sur les autres, quela socit ninspire plus un compor-tement civique
et que les religionsdfendent davantage leur chapelleque
lthique.
Revenir la notion du sacrDepuis quelques dcennies, uncertain
nombre dides reues surle fonctionnement de la socit ontt balayes
par les rsultats des
Lpoque est rvolue o le progrsnapparaissait possible qu
condi-tion de faire table rase de tout cequi nous avait prcd.
Noussavons quon ne peut crer exnihilo et que le tenter entrane
lhu-manit sur le chemin de lauto-muti-lation et de
lauto-destruction. Ilnous apparat que le seul moyenque nous ayons
aujourdhui de fon-der un avenir qui ne soit ni unergression aveugle
vers la barbarieni une tentative dsespre darr-ter lHistoire au nom
dun pas-sisme strile consiste nousrconcilier avec nos racines,
lesrefconder et les ractualiser laide des apports des
sciencescontemporaines.
Rviser nos connaissances et nos ides ?Notre poque a dgag, tant
auniveau des sciences exactes quedes sciences humaines comme
lapsychologie et lanthropologie, desmoyens que lhumanit a peu,
voirejamais connus. Ces dcouvertes,inestimables, sont cependant
insuf-fisantes, telles quelles, pour rpon-dre aux besoins
daujourdhui.Disparates, elles doivent tre int-gres dans un ensemble
cohrent ;il nous faut par ailleurs trouver lesmoyens de transformer
ces apportsen comportements efficaces, tant
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SOC I T
la conscience en mme temps quele savoir-faire, pour nous
rappro-prier cette comptence. Sans tom-ber videmment dans le
passismequi consisterait croire quil fautnous cantonner dans la
rptitiondes savoir-faire des socits tradi-tionnelles. Il sagit non
pas derecrer le pass mais de se rap-proprier les moyens universels
quiappartiennent lespce et quinous manquent actuellement. Nombreux,
aujourdhui, sont ceuxqui pensent quil nous faut, au-delde lidentit
locale, nous renracinerau niveau de lhumanit, et retrou-ver une
dimension universelle
Fernand SCHWARZ
Cet article est extrait de Mat, gyptemiroir du ciel", Fernand
SCHWARZ,ditions des 3 Monts, 2009
(1) Physicien amricain dorigineautrichienne, auteur de
nombreuxouvrages dont Le Tao de la Physiqueparu en 2004 chez Sand,
Le Temps duchangement, paru en 1994 aux ditionsdu Rocher
de la transmission. Un des grandsdfis du XXIe sicle consistera
rendre le monde habitable et trou-ver un fonctionnement social
quipermette de vivre les valeurs desolidarit et de fraternit.Le
changement radical de notreregard sur le monde et le balayagedes
ides reues que nous devons la science sont rests striles auniveau
des comportements. Si,paradoxalement, nous sommesplongs dans une
barbarie crois-sante, cest que nous ne parvenons transmettre et
diffuser cesdcouvertes ni au niveau du savoircollectif ni au niveau
de la sensibilitet des murs. Lexistence dunpareil foss entre la
connaissance etla vie quotidienne est due la naturede lunivers
culturel qui est le ntreet qui a dissoci le savoir-tre
dusavoir-faire, la pense de laction.
Se rapproprier les valeurs des AnciensAussi avons-nous tout
intrt essayer de comprendre commentles Anciens ont russi
transmettre
La socit contemporaine en panne ?malheureusement, dans le domai
-ne qui nous intresse, celui de lap-port des socits traditionnelles
aufonctionnement de la socitcontemporaine, nous sommes endfaut.
Nous ne dveloppons pasles comportements ou les ides quipourraient
nous aider mieux grerles rapports humains dans notresocit. Lapport
de ces socitstraditionnelles, longtemps dcries,est fondamental dans
le domainede la transmission des connais-sances et des
comportements.Domaine particulirement sensible lheure actuelle o la
ruptureentre les gnrations saccentue etalors que le dficit
dducation nestignor de personne. Au cur denos socits, des rseaux
entierspermettant la rgulation et la forma-tion sont en panne. Une
rvisionurgente des ides reues sur laquestion simpose, la lumire
delhritage que nous ont lgu lescultures et civilisations qui ont
dleur russite au savoir-faire dans lart
1 5
Cest une cole pour les Grandsque lhomme sage ; ceux
quiconnaissent son savoir ne latta-quent pas, aucun mal ne
survientdans son voisinage. La vrit et la justice (Mat) vien-nent
lui, dj brasses, conform-ment aux conseils que les anctresont
dit... Cherche galer tes pres,ceux qui ont vcu avant toi...
vois,leurs paroles persistent dans leslivres ; ouvre ceux-ci :
lhommehabile devient alors un homme ins-truit. Enseignement du roi
Kheti III son fils Merikar, la fin du troi-sime millnaire avant
J.-C. Textes sacrs et textes profanesde lancienne Egypte,
ClaireLalouette, Gallimard.
-
Lorsquon parle de Rome en tantquEmpire, on dit souvent quelle
aeu pour mission de reconstruire ourestituer pour le futur une
sriedlments artistiques, littraires etmme scientifiques de la
culturehellnistique. Ceci est nuancer. Siles lments de la Rome
antiquesont effectivement en partie hell-nistiques, il faut
galement recon-natre quen dehors de la vieillepninsule, ils
prennent des formesautochtones qui font que leurapport est original
et fondamental.Non seulement Rome puise sesracines de peuples peu
connus,comme les Tyrrhniens ou lesSabins mais elle les puise
gale-ment dun grand empire comme lefut lempire trusque. Nous
avonspeu traces crites des trusquesmais cela nenlve en rien de
leurlinfluence sur les civilisations.
Lempreinte de Rome en EuropeEn Europe, ce qui est
remarquable
cest qu nimporte quel endroit olon se trouve, on dcouvre
uneempreinte de Rome : un arc, unmur, une dalle, avec ce
contenuprofondment humain que Rome asu leur donner. En partant
dumonde hellnistique qui tait unmonde fragment, du mondedAlexandre
qui sest divis en cou-rants, Rome sut assembler les mor-ceaux et
raliser un creuset capa-ble de fondre divers mtaux pourformer un
alliage qui fut la civilisa-tion romaine. Segbriga, sur lameseta de
Castille, jai trouv unegrande plaque de marbre cassecrite en latin
et qui disait :Voyageur, regarde, ici sont pas-ses les lgions
dAuguste. Toi quime vois, souviens-ten, nous pas-sons comme passe
le vent.
Des hommes dieuxSouvenons-nous de ce vieil exem-ple, aux
premiers temps de Rome,vers 507 avant J.-C., alors que lavieille
monarchie tait en train deseffondrer. Lors dune attaque, leroi
trusque Porsenna sest trouvdans limpossibilit dentrer dans cequon a
plus tard appel la Villeternelle et il entreprit un sigerude. Un
jeune Romain, aid dunpetit groupe (on dirait aujourdhuiun commando
tactique), tenta detuer le toi assigeur. Ce jeune fitune erreur car
il y avait des fonc-tionnaires qui taient mieux vtusque le roi.
Cest une chose quon nesait peut-tre pas de nos jours : centaient
pas les vtements ni lesbijoux qui faisaient les rois delAntiquit
mais lautorit et lamour
1 6
Lapport culturel de Romeaux problmes du monde actuel
La Rome antique a laiss ses empreintes dans toutelEurope. Elle a
su crer une civilisation qui culminaavec la Paix Auguste. Que
reste-t-il de ses valeurs ?
-
quils avaient pour leur peuple. Cejeune Romain se trompa. Il tua
lesecrtaire du souverain. Il fut faitprisonnier et dit quil tait
dcid tuer le roi. On lui demanda alors dervler le nombre et le nom
de ceuxqui voulaient tuer le roi. Le jeunehomme refusa de rpondre.
On lemenaa de mettre sa main sur lefeu jusqu ce quil avout.
Caiusmucius Scvola mit lui-mme samain sur le feu, la laissa sur
lesbraises jusqu ce quil nen resttplus que quelques os carboniss.
Ildit alors au roi quil y avait troiscents jeunes qui, comme
lui,avaient jur de le tuer. Le roiPorsenna lui rpondit alors
quiltait venu pour combattre deshommes, pas des dieux et que
siltait vrai quil y avait des centainesde jeunes comme lui, il
valait mieuxque lui, le roi, sen allt. Il relcha leprisonnier.
La paix AugusteCette action est lorigine du sym-bole de la main
quAuguste arbo-rera plus tard pour la Paix Auguste.Qutait donc
cette Paix Auguste etqui tait Auguste ? En tant que phi-losophe, je
vais tenter dexpliquer lamerveilleuse folie dAuguste,celle dunir
des hommes et despeuples de races, croyances etlangues
diffrentes.Il y a deux mille ans, Auguste taitune sorte de citoyen
du monde. Ilrigea Rome un autel, lAraPacis, lautel de la Paix,
avecune main ouverte, comme symbolede paix et de concorde pour
tousles hommes. Auguste convoquatous les rois, toutes les religions
dumonde entier pour construire ungrand tat dont la plaie du cur
se refermerait. Il proclama laConcorde, comme la marque dusceau
de lgalit le plus brillant, leplus rationnel, le plus humain et
leplus naturel. Pour lui, la Concordeconsistait, comme lindiquait
le motlui-mme, mettre un cur avecun autre coeur (Con-cordia, uncur
avec un autre). De nosjours, nous qui essayons dunir leshommes sur
la base de lgalit,nous oublions que les choses sem-blables se
repoussent et que cesont les opposs qui sattirent. LaConcorde de la
Paix Auguste tait
la mise en commun, lunion deschoses diffrentes. Auguste
ladcouvert sans tuer lindividu ni lin-dividualisme, sans enlever la
forceni le message particulier de cha-cun. Avant tout, il a donn
lhomme la capacit de vivre lhon-neur.Cette union, mme les esclaves
lapossdaient parfois. lpoquedAuguste, il y eut une cit romainequi
fut encercle par les barbares.Les troupes sortirent, combattirent
etfurent dfaites. lintrieur de la cit,restaient les femmes, les
enfants et
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les esclaves. Les esclaves se pr-sentrent devant les matrones et
lesfemmes en leur demandant decombattre avec les armures et
lesarmes de leurs hommes. Des cata-pultes lancrent des
messagesexpliquant que si la cit tombait, lesfemmes et les enfants
seraient mis la disposition des esclaves etceux-ci pourraient
piller les mai-sons et dtruire tout ce quils vou-draient. Les
esclaves insistrentdans leur demande de dfendre lacit. Finalement
la permission leurfut accorde. Ils sarmrent, sorti-rent,
combattirent, triomphrent etrevinrent dans la cit. Ils se
dbar-rassrent de leurs armes et les ras-semblrent en une forme de
pyra-mide de bronze au milieu de la cit.Les femmes leur demandrent
laraison de ce geste. Ils rpondirentquils prfraient tre esclave
Rome plutt qutre libre dans unmonde barbare.
La parole donneQuel est lenseignement de cettehistoire ? Il
sagit du sens de lhon-neur, de la parole donne, mmevenant des
esclaves. De nos jours,la parole nest plus engage, laparole est
perdue. Ces esclavesconnaissaient le secret de la paroledonne.
Souvenons-nous gale-ment de ce gardien des portes dePompi, qui,
alors quil voyait lalave du volcan le Vsuve avancer,resta son poste
parce quil navaitpas reu lordre de labandonnermais de surveiller
les portes. Laconsigne navait pas t leve. Onle trouva ainsi, les
pieds carboni-ss, devant la porte, face la lavedu Vsuve.Dans
lHistoire, on trouve deshommes et des esclaves qui ont
dfi des rois et des armes, desgardiens qui nont pas reculdevant
les forces de la Nature.
Rome, un idal Rome nest pas une ville ni un lieu.Rome est un
foyer, un foyer puis-sant qui illumine le monde. Romeaccueille,
emprunte tous les peu-ples ce qui est le plus valable. Biensouvent,
on parle de Rome defaon errone. On parle de sa cor-ruption, de sa
dcadence, et cestvrai ; Rome a connu de grandescorruptions, est
tombe en dca-dence mais, pourquoi est-elletombe ? Elle est tombe
parcequun jour, elle a reprsentquelque chose.
Lidal de Nouvelle Acropoleconsiste recueillir le meilleur,
lescimes et non pas les abmes, sesouvenir des grands hommes, pasdes
petits, recueillir les grandstriomphes et pas les checs. Nousavons
lidal dune grande citoyen-net du monde, o tous leshommes pourraient
tre Romains,non par leur naissance mais parleur niveau culturel,
moral et par unsentiment profond. Rome nous a appris quil peut
yavoir une capitale du monde, quetous les chemins mnent Romeet que
tous les chemins peuventmener un centre de force et uncentre
spirituel. Sur les chemins deRome, comme ctait le cas des
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-
anciens chemins qui partaient de laVille jusquen Amrique, ceux
quirevenaient de Rome avaient la prio-rit. Les hommes leur cdaient
lepassage parce quils rapportaientlesprit de la grande
Capitale.Aujourdhui personne ne cde lepassage celui qui rapporte
les-prit. Aujourdhui tout est techniquemais la technique nous tue.
Latechnique nous permet de voyageret de communiquer. La seule
chosequi ait progress ce sont lesmachines mais pas lhomme.Lhomme
qui, aujourdhui, conduitles engins spatiaux nest pas meil-leur que
celui qui conduisait hier unnavire romain. Lhomme bon estcelui qui
doit crotre et se retrouver.
Le pouvoir de la ConcordeCest pour cela que nous propo-sons un
nouvel humanisme quisinspire de Rome ; un humanismenon pas bas sur
des intrts pas-sagers mais qui vive au fond delHistoire, qui nous
permette devivre la Concorde, un cur avecun cur, non seulement
commeune position intellectuelle mais plusencore, comme une union
descurs. Lhumanisme que nous pro-posons est une Concorde qui
nouspermette de considrer comme un
frre, lhomme qui a la peau noireou celui qui est dune autre
religioncar ils ont le mme dsir deconstruire.Rome nous a appris que
ce nestpas lor qui prime mais la qualit delme ; que nous pouvons
vaincreles abmes en accumulant despierres en quilibre ; que nous
pou-vons parfois convertir des hommesapparemment briss en tres
quiont la force daller partout dans lemonde. Et Rome nous a
enseignle pouvoir divin de la parole, ceVerbe mentionn dans toutes
lesreligions dont Cicron a dit quelletait la force la plus grande,
quellemarchait au-devant des armes etquelle se tenait blottie sous
lespouvoirs des rois. Quand il arriva Alexandrie, legrand
marc-Aurle, que toussaluaient avec le bras lev commepour un Csar,
regardant les com-pagnons qui lavaient accompagndans lart oratoire,
dit : Jauraisprfr que vous me saluiez avecune accolade. Ses
camarades luidemandrent pourquoi : parceque les Csars passent mais
lartoratoire, lui reste. Lart oratoire,venu de Rome est un grand
art ora-toire de triomphe et de pouvoir.
Les traces dun gant Rome, les hommes taient desgants. Les femmes
taienthroques, comme celle qui, envoyant passer Csar, lui dit :
Oh,Csar ! jai six fils dans la lgion ;dis-moi, comment vont-ils ?
Csarretint sa bride et lui rpondit : Oh,matrone ! Je tapporte de
mau-vaises nouvelles. Tes fils sontmorts, je le regrette. La
matronelui rpondit : Csar, je ne tedemande pas sils sont vivants
oumorts, je te demande sils ont faitleur devoir ! Csar lui
rponditalors : Oui, matrone, ils ont faitleur devoir. Ils sont
morts de faonhroque pour leurs aigles, ils sontmorts pour ce en
quoi ils croyaient,dune faon digne et vraie. Alors,la matrone, les
larmes aux yeux etune lumire dans le cur seretourna et dit sa
famille et sesesclaves : marchez, ce soir il yaura une fte dans ma
maison,parce que mes fils sont morts pourla patrie. Rome, ctait
tout cela :ces hommes, ces femmes, cetidal, cette sensation de
laigleimprial qui a la force de sleversur lhorizon, le regard
fixe.L o vous irez, vous rencontrerezde grands restes de
constructions,des paroles sages, des traces im -menses de
murailles. Ce sont lestraces dun gant : par l un gant estpass, par
l, Rome est passe
Jorge Angel LIVRAGAFondateur de Nouvelle Acropole
Article extrait dune confrence donnepar Jorge Angel Livraga
lInstitutChileno-italien Santiago du Chili (Chili)en 1972. Traduit
de lespagnol parGuilhem Le Grand.N.D.L.R. : Les intertitres ont t
rajoutspar la rdaction
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La Renaissance fut une priode decrise essentiellement
religieuseinduite par la dissolution desmurs des clercs et de la
curieromaine, la richesse excessive desprlats et lhistoire des
indulgences.La ville de Strasbourg nchappapas la rgle avec le
passage pro-gressif aux ides de la Rforme,leffondrement de
lenseignementalors sous la frule de lglisecatholique, le tout
exacerb par lesproblmes politiques lis la suc-cession de diffrents
empereurs la tte de lEmpire. Ces diffrentescrises engendrrent un
profond
questionnement, entranant unevolution des murs et des
idesfavorables lavnement du mou-vement humaniste.
La naissance de lhumanisme en AlsaceLe mouvement humaniste
stras-bourgeois sintressa ltude deslangues et de la culture
grco-latinede lAntiquit classique, commefondement de la
connaissance. Ilmit au centre de ses proccupa-tions lhomme et sa
place dans lemonde. Les humanistes menrentun triple combat,
religieux, ducatif
et pdagogique et politique. Ils ten-trent dincarner, chacun
leurniveau et selon leurs attributs sp-cifiques les valeurs de
lhonntehomme, du citoyen et du philo-sophe. Ils menrent des
actionsaussi bien personnelles et indivi-duelles que publiques et
collec-tives. Ils publirent leurs proprescrits, forts nombreux et
parcouru-rent inlassablement lEurope larecherche du savoir et des
ensei-gnements des matres. Ils rencon-trrent dautres humanistes
pourconfronter leurs savoir et leursides, nhsitant pas changer
entreeux une correspondance suivie.
La diffusion des ides humanistesLes ides humanistes se
diffus-rent en Alsace et plus particulire-ment Strasbourg grce au
dve-loppement de limprimerie typogra-phique sous limpulsion
deJohannes Gensfleisch (1399-1468)plus connu sous le nom de
JeanGutenberg. Son objectif tait deproduire des ouvrages des
prixavantageux et accessibles tous.En dix ans, limprimerie connut
unessor trs rapide et Strasbourgdevint un centre de formation et
dediffusion de cette nouvelle tech-nique en Europe. Les
premiresuvres dites furent religieuses,rapidement suivies par des
publica-tions dauteurs classiques puishumanistes (Erasme en
particulier)et par des manuels scolaires.Devant un tel succs, le
magistratet lEpiscopat mirent en place unecensure. Cest aussi
cettepoque que furent cres desbibliothques dont deux devinrentles
plus clbres : celle de BatusRhnanus Slestat et celle de
2 0
Entre le XV et XVIe sicle, Strasbourg fut au cur dunmouvement
philosophique et culturel qui aprofondment marqu le renouveau de la
socit : le mouvement humaniste.
Le souffle du renouveau en Alsace
-
Jacques Spiegel, secrtaire de lar-chiduc Ferdinand. Le mouvement
humaniste stras-bourgeois gagna toutes les stratesde la vie
publique : la culture, la lit-trature, lenseignement, lart,
lapolitique, la diplomatie et bien vi-demment la religion avec
lavne-ment de la Rforme.
La vie littraireJacques Wimpfeling, SbastienBrant et Jean Geiler
de Kaysersbergfondrent en 1510 une socit litt-raire, sorte dacadmie
la modeplatonicienne, la sodalitas literariaqui invita Erasme en
1514. Elleregroupait de jeunes intellectuelshumanistes, lacs ou
clercs, dsi-rant cultiver et diffuser les lettresclassiques pour
relever le niveauintellectuel et moral de leurs conci-toyens et
dnoncer les dysfonction-nements de la socit de lpoque.Ils firent
diter en latin et en languevernaculaire (1) (en allemand),
desauteurs classiques, des ouvragesreligieux et surtout bon nombre
descrits des humanistes de lpoque. Quand arriva la Rforme,
celle-citrouva un cho favorable dans lesesprits strasbourgeois,
imprgnsdes rquisitoires souvent violentsdes humanistes. Ceux de la
premire gnration, linstardErasme, prnaient une rgnra-tion de
lglise, sans rvolution, etles suivants furent gagns auxides de la
Rforme.Les animateurs de la sodalitas lite-raria proposrent avant
toute chosedes faons dagir et surtout dtrequi allaient rvolutionner
la socit :Jacques Wimpfeling (1450-1528),pdagogue et un historien
taitdsireux damliorer la qualit et lecontenu de lenseignement, de
ren-
dre au clerg sa dignit, de formerune gnration dhommes
instruits,vertueux et capables de diriger leurvie et celle de leur
cit.Jean Geiler de Kaysersberg (1445-1510), prdicateur trs
populaire Strasbourg tenta de rtablir unemoralit de type humaniste
aussibien au sein de lglise que dans lacit et mena une lutte
incessantecontre le vice. Sbastien Brant (1457-1521),juriste et
crivain fut clbre pourson ouvrage le Narrenschiff, la Nefdes fous,
Ce pome recensait lesdiffrents types de folie, brossantun tableau
de la condition humainehumaine, sur un ton satyrique. Lelivre
obtint un grand succs, tant cause du thme de la folie lamode depuis
le moyen-ge que parla prsence des illustrationsdAlbrecht Drer, qui
permettaientaux moins instruits de comprendrele message. Enfin
Batus Rhnanus (1485-
rupture entre Erasme et martinLuther. Il fut reconnu pour
lareconstitution rigoureuse demanuscrits anciens, pour sesuvres
historiques GermaniaeRerum Germanicum Libri et pour laconstitution
dune bibliothque deplus de mille livres lgus sa villede
Slestat.
La rforme de lducation et de la pdagogieAu milieu du XVe sicle,
la ville deStrasbourg, qui ne possdait ni uni-versit ni cole latine
fut supplantepar la cration dune cole latine Slestat sous
linfluence des deuxgrands courants humanistes rh-nan et italien et
de la DvotioModerna (2). Elle devint un centreducatif clbre. La
rforme de lenseignement Strasbourg, largement inspire parla
pdagogie rasmienne, dbutaavec Jacques Sturm par la crationdune
commission des trois sco-larques. Celle-ci modifia complte-ment le
paysage ducatif et pda-gogique de la cit, mettant laccentsur le
passage de la Rforme et lesvaleurs humanistes. Ainsi furentcres au
sein de la cit des coleslatines, des collges-internats,
desbibliothques et mme des boursespour tudiants mritants mais
ds-argents. En 1537, Jean Sturm(1507-1589), disciple
dErasmerhtoricien, pdagogue et diplo-mate, jeta les bases de
lenseigne-ment suprieur en fondant la Hautecole qui devint une
acadmie puisune universit en 1621 ainsi que leGymnase... La renomme
de lta-blissement servira de modle demultiples tablissements
danstoute lEurope du Nord. Il a laissde nombreux ouvrages de
rhto-
C I V I L I S AT I ONS
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1547), souvent dsign comme lal-ter ego dErasme dont il fut
lamifidle et qui linitia Platon et auxno-platoniciens, ctoya les
rfor-mateurs strasbourgeois jusqu la
-
rique et des manuels scolaires trsbien conus.
La vie politiqueJacques Sturm (1489-1553) fut leplus grand homme
politique quaitconnu la ville libre de Strasbourg etincarna bien
des carts les vertusde la Renaissance : tolrance,modration,
recherche de paix etdunit dans le respect de lautre.Sa sagesse fut
reconnue aussi bienpar les humanistes que par le pou-voir politique
en la personne delempereur Charles Quint qui futpourtant son
adversaire. Il menaune carrire politique prestigieusedans les
affaires intrieures de lacit, en tant que stettmeister (3).Sur le
plan de la politique ext-rieure, il mena une grande
carrirediplomatique, notamment commereprsentant de Strasbourg
laDite (4). Il joua un rle de premierplan dans la constitution de
la liguede Smalkalde (5), participa lardaction de la Ttrapolitaine,
textevisant exposer les points essen-tiels de la Rforme la
Dite.
La RformeSi certains humanistes avaientprn une rforme interne
delglise, dautres, gagns aux idesde martin Luther, se sparrent
delglise catholique. La messe futabroge Strasbourg en 1529 et lacit
devint un refuge pour les rfor-
ms trangers perscuts. Lafigure de proue de la Rforme Strasbourg
fut martin Bucer (1494-1551). Il est considr aujourdhuicomme le pre
de lcumnisme. Ilsvertua concilier les courantsdivergents au sein de
la Rforme etavec la curie romaine. Aux cts deJacques Sturm il
participa la liguede Smalkalde et la rforme delenseignement. Il
prit galementpart de nombreux dbats tholo-giques, appels disputes,
au seinde toute lEurope. Il fut habit parlide dune Europe unie,
dunechrtient rnove, par le dialogueentre les glises et par lamour
duprochain.Avec lhumanisme, un souffle derenouveau a travers
lAlsace, ten-tant de rtablir des valeursthiques, dans une socit en
proieaux drives morales et religieuses.Les humanistes ont mis au
premierplan de leurs proccupations ledveloppement des qualits
essen-tielles de ltre humain ncessairespour lui-mme comme pour
laconduite en socit et dans la ges-tion de la cit. Leur grand force
futdincarner ces valeurs dans leur viepersonnelle et publique
Michle FLORIANGE (1) Langue parle couramment au seindune
communaut(2) Courant religieux du XIXe sicle restclbre pour les
mthodes pdagogiquestrs progressistes pratiques dans leurscoles
(3) Fonctionnaire du pouvoir excutif dansles villes libres du
Saint Empire romaingermanique(4) Anctre du parlement allemand(5)
Union militaire des princes protestantsdAllemagne du nord en guerre
contreCharles Quint, le catholique.
Cet article est extrait dun articleLhumanisme en Alsace du XVe
au XVIe
sicle. Pour le consulter www.revue-acropolis.fr,rubrique
Actualits
2 2
IIIe colloque de la revueAcropolis
Dans le cadre des journesmondiales de la philosophiedcrtes par
lUNESCO, du 18 au 20 novembre 2010 sest tenu Strasbourg, letroisime
colloque de la revueAcropolis sur le thme delhumanisme en Alsace.
Le publica pu dcouvrir les humanistesalsaciens qui ont marqu
laRenaissance et contribu renouveler les valeurs morales et
religieuses. Denis Marquet,auteur de lments dephilosophie anglique,
paru auxditions Albin Michel a montrcomment lhomme pouvaitdevenir
vritablement humain, en se librant du pass, enapprenant aimer sans
limite, dire oui la vie.
-
Labeille est un animal essentielpour la survie de lhomme sur
laterre. Elle nest pas seulement unfacteur de biodiversit mais par
sonrle de pollinisation (1), elle est unagent agricole essentiel.
Sans lesabeilles, de nombreux arbres etplantes ne pourraient
produire lesfruits dont nous nous nourrissons.
Les abeilles menaces par les pesticidesDepuis une vingtaine
dannes, lesabeilles sont en danger. Leffon -drement des colonies
dabeilles estlongtemps rest un mystre, ali-ment par des tudes
contradic-toires sur les causes de la mortalitet par la difficult
observer larelle activit des abeilles en pleinchamp. cela il faut
ajouter la com-plexit et sophistication de lorga-nisme de labeille
qui le rendent dif-ficile tudier.La premire mise en cause
despesticides date de la fin des annesquatre-vingt dix en
France.Lutilisation du pesticide Gaucho,puis Rgent sur le mas et le
tour-nesol, associe leffondrementdes colonies dabeilles dans
cer-taines rgions a conduit, au nom duprincipe de prcaution, leur
inter-
diction. Depuis les colonies sontrevenues leur tat initial et
pros-prent, comme dans le dparte-ment du Lot.Ces pesticides ont tv
commercia-liss dans dautres pays dEurope,comme lAllemagne ou
lItalie, pro-voquant des taux de mortalitnormes dans les
coloniesdabeilles de ces pays.Les firmes chimiques ont
ripost,arguant que les nouvelles tech-niques appliques aux
rcentesgnrations de produits phytosani-taires, qui consistent
enroberdirectement la semence et non plus pulvriser les champs,
contien-nent des doses infinitsimales depesticides, nettement
infrieuresaux normes considres commeltales pour les abeilles.malgr
cela, leffondrement descolonies a continu. Finalement, en2009, des
chercheurs amricainspuis franais de lINRA ont mis envidence
lexistence de plusieurs
facteurs de mortalit des abeilles,notamment le fait que ces
pesti-cides nouvelle gnration, mme des doses infinitsimales,
favori-saient le dveloppement de virusmortels pour les
abeilles.
et par leur exploitationindustrielle ceci sajoute lexploitation
indus-trielle des abeilles, comme auxtats-Unis o la moiti des
coloniesdabeilles amricaines sont trans-portes une fois par an,
durant troissemaines, dans une valle deCalifornie, pour polliniser
desamandiers sur des dizaines de mil-liers dhectares. Cette
exploitationindustrielle a eu pour effet daffaiblirla sant des
colonies dabeilles, enles exposant une monoculture et des
regroupements massifs deplusieurs origines, favorisant la
dis-smination de virus et de dangersde toutes sortes. Afin dtre
mainte-nues en vie, les abeilles sont dsor-mais alimentes par des
nutrimentsartificiels incluant des antibiotiquesleur permettant de
rsister auxmaladies. Labeille reste irremplaable. Sanslabeille, les
facteurs de pollinisationnaturels comme le vent ou les bour-dons
procurent des rsultatssoixante-dix fois infrieurs. Si lesabeilles
disparaissaient, certainesespces vgtales ne pourraientplus se
reproduire et certainesespces animales risqueraientelles aussi de
disparatre. La nature est notre fondement,nous devons agir pour
elle si nousvoulons vivre
Anne NOTARAS
(1) Action de rendre fertile
EN V I RONNEMENT
2 3
Le mystrede la disparitiondes abeilles
Au-del des polmiques autour de certains insecticides,que se
passe-t-il rellement sur la plante des abeilles ? Et si elles
venaient disparatre ?
Si les abeilles venaient disparatre, lhomme naurait plusque
quatre annes devant lui. Sans abeilles, plus de pollinisation,plus
de plantes, plus danimaux, plus dhommes. Albert Einstein
-
matre Kong (Kong Zi, devenuConfucius en Occident), vcutentre 551
et 479 av. J.-C., unepoque trouble nomme Printempset Automnes,
priode de chaos etde luttes entre les souverains desdiffrentes
provinces de Chine. Onle dit contemporain de Lao Tseuquil aurait
rencontr lors duneentrevue devenue lgendaire et deBouddha. La Chine
de Confucius
se caractrise par la dcadence dupouvoir central et le cynisme
poli-tique. Cest dans ce bouleverse-ment politique quil faut
replacer lesprincipales proccupations deConfucius et, en
particulier, soninsistance sur la perte du mandatcleste, la perte
de la Voie.Confucius se sent charg dunemission essentielle, celle
de faireretrouver au monde la Voie perdue.
De ses enseignements oraux com-pils par ses disciples,
subsistenten particulier les Entretiens (1). Samission, celle
dveiller le mondecomme un gong, le conduit pra-tiquer la vertu et
enseigner toutau long de sa vie. La porte de sesenseignements
grandit avec letemps et subit tous les alas delhistoire mais
continue nous tou-cher par sa grande actualit.La lgende lui
attribue des caract-ristiques exceptionnelles, une viede gloire et
de pouvoir, un nombretrs important de disciples. Or, lavie de
Confucius nous le prsenteplutt comme un ducateur,entour dun petit
nombre de disci-ples fidles. De son propre aveu, ilnaquit dans des
circonstancesmodestes et y resta toute sa viedurant. Confucius
nourrit certes degrandes ambitions politiques, cher-
2 4
Philosophe et minentpdagogue, Confucius adonn naissance
unedoctrine politique etsociale qui a t appliqueds la dynastie
Han.Considr comme lepremier ducateur dela Chine, premier dessages
et modle de dixmille gnrations saconception de lcole etde lducation
aveclapplication de la vertuest encore dactualit denos jours.
Confucius, lidal de lhomme de bien
-
chant dsesprment le Princecapable dappliquer sa doctrine,mais il
mourut sans avoir pu vrai-ment les raliser.
Une vie denseignantSon pre se marie 70 ans avecune trs jeune
femme. Il nat en551 avant J.-C. Qu Fu, village dupays de Lu, lEst
de la Chine,sous la dynastie des Zhou. Il perdson pre lge de trois
ans et sepassionne trs jeune pour lestudes. Bien que
doriginemodeste, il frquente les collgespour les nobles o est
enseigne lavie militaire et celle de cour. Il yapprend lhistoire,
la littrature, lecalcul, la musique et le tir larc.Employ en tant
quintendant desgreniers publics, il est remarqupour son exactitude
et sa prcision.Il devient un grand rudit et 22ans, il ouvre une
cole Lu o ilenseigne lhistoire. Il est consultpar un grand nombre
de souverainset certains lui proposent despostes, quil accepte ou
refuseselon lthique du souverain. Il estnomm gouverneur du district
deLu, puis ministre de la Justice. Ondit que le pays connut une
priodede paix inconnue jusqualors. Puis,il quitte son district pour
entrepren-dre de multiples voyages dans
dautres Etats afin de faire coutersa voix. Il ne reoit pas
lcouteespre, et aprs quatorze annesde tribulations, il rentre dans
sonancienne province. Il constate queson enseignement reoit
toujoursune grande coute mais jamais uneapplication correcte. Il
consacrealors le reste de sa vie enseigner quelques disciples et
meurt lge de 72 ans.On le prsente souvent comme unhomme doux et
ferme, grave etsouriant. Il aimait beaucoup lamusique et tait
prudent dans lac-tion. Partisan avant tout de lquili-bre et de la
mesure.Sa pense fut trs souvent utilisepar les hommes politiques
qui luiont succd, soit pour reprendrecertains aspects de son
enseigne-ment (la pit filiale notamment),soit pour le combattre en
le prsen-tant comme un homme conserva-teur et uniquement attach
aupass (exemple de la campagneanti-confucenne dclenche lorsde la
Rvolution culturelle).
Un idal thique pour lhommeComme lcrit marcel Granet dansLa pense
chinoise (2), la doctrinedu matre parat avoir t une doc-trine
daction. Il enseignait unemorale agissante, et la lettre des
principes lintressait moins quelaction morale quil entendait
exer-cer. Cest en tant que directeur deconscience quil semble
avoirmrit son prestconseillait de nerien faire sans consulter pre
etfrre an.La pense de Confucius proposeun idal thique pour lhomme.
Sipour les taostes, le Tao ou la Voieest la grande communion
quirgnait lorigine entre les tres etles choses et quil sagit de
retrou-ver, pour Confucius, la Voiedsigne plus spcifiquement laVoie
des Anciens, cest--dire celledes mythes et des Sages Rois
delAntiquit. Il est conscient que lapriode chaotique que connat
laChine est due la perte de cetteVoie. Il estime ncessaire de
pas-ser par cette voie pour retrouver unquilibre politique stable,
comme ilfaut passer par la porte pour sortirdune maison. La
politique nestpour lui pas une question de tech-nique mais de
qualits thiques.On a parfois parl de son agnosti-cisme cause de son
thiqueessentiellement fonde sur laffir-mation des valeurs humaines.
Sarponse un disciple qui luidemande comment servir lesesprits, est
caractristique cetgard : Tant que lon ne sait pas
PH I L O SOPH I E S
2 5
Ecole de Confucius - QuFu
-
servir les hommes, comment peut-on servir leurs mnes
?(Entretiens livre XI, 11).Lenseignement de Confucius estcentr sur
un idal pratique, fondsur une certaine conception delhomme et de sa
nature thique.Lidal quil propose, contenu dansle terme chinois
jun-zi, signifiant lit-tralement fils de souverain et,par
extension, descendant dunefamille noble, est surtout lhommede bien.
Lhomme de bien doit ten-dre vers la ralisation du Bienquest le ren.
Le ren est le matremot de lthique confucenne. Leren est une vertu
dhumanit. Il nedsigne pas un Bien abstrait,absolu, mais le bien
quun hommepeut faire un autre. Vertu dhuma-nit si rare, toutefois,
queConfucius ne juge personne dignede cette qualification !Voici un
homme avec qui tu peuxparler ; tu ne lui parles pas : tuperds un
homme. Voil un hommeavec qui tu ne dois pas parle ; tu luiparles :
tu perds une parole. Sageest celui qui ne perd ni un hommeni une
parole.
Le renLes composantes du ren concer-nent les relations de
lhommeconfucen : parents, souverain,amis. La pit filiale y est
consid-re comme le ciment des rapportssociaux et hirarchiques.Etre
bon fils, tre simplement bonfils et bon frre, cest dj prendrepart
au gouvernement. (Entre -tiens, II, 21).Entrent galement dans la
composi-tion du ren deux vertus dhonntet :- Zhong, la loyaut envers
soi-mme et les autres ;- Xin, la fidlit la parole donnequi rend un
homme digne deconfiance. Cest une forme deloyaut o la parole na de
valeurque si elle saccompagne de lac-tion qui y correspond.Lhomme
de bien doit enfin poss-der deux qualits sans lesquelles ilne
saurait assumer de responsabi-lits politiques : zhi, le
discerne-ment et yong, le courage.Le discernement permet de
pren-dre les dcisions judicieuses, lecourage doit tre tempr par
lesautres vertus.
Le rle de lducationLes prceptes de la morale indivi-duelle
guident dj lattitude poli-tique. Lhumanisme confucenplace une
grande foi dans lduca-tion comme facteur damliorationconstante.
tudier doit treentendu dans un sens pratique, devoir faire,
entendre dire, cest--dire apprendre par exprience.Si jai seulement
deux hommesavec moi, je suis sr davoir unmatre, disait-il.Le grand
souci de Confucius estdonc de marquer que la vie encommun est, avec
le contrlequelle entrane des moindresdtails de la conduite, le
principe deperfectionnement qui fait dun indi-vidu humain un homme
accompli.Lenseignement de Confucius estdonc une morale agissante et
cesten tant que directeur de consciencequil sest fait le plus
connatre.Pour ajouter lefficacit de sonenseignement, il avait souci
de lin-flchir en fonction de son interlocu-teur. Les tranards, je
les pousse ;les fougueux, je les retiens.Lducation est directement
orien-te vers les responsabilits poli-tiques mais elle revt
chezConfucius une dimension pluslarge, en devenant la
mthodedirectrice de lart de gouverner.Toute la pense de Confucius
estfonde sur le rapport entre le matreet le Prince. Un souverain ne
peutgouverner que sil est lui-mmedroit, digne dtre un exemple etune
norme pour ses sujets. Cestcette rectitude, cette exemplaritdans la
personne mme du souve-rain qui lui permet de simposercomme tel, qui
justifie son pouvoiret son autorit.Confucius ne condamne pas
seule-
2 6
-
ment la poursuite de lintrt, maistout esprit de comptition
vulgaire.Lhonnte homme ne cherche quse surpasser lui-mme.
Le rle fondamental du rituelAu rle primordial du souverain,
ilfaut cependant ajouter, pour que seralise le gouvernement idal,
lerle non moins essentiel du rituel,du li. Cl de vote de ldifice
socialet marque suprme de civilisation,le rituel constitue en Chine
le traitdistinctif entre barbares et civili-ss. Le caractre chinois
li repr-sente un vase sacrificiel contenantdes objets prcieux
destins auxesprits, et par extension, dsigne lerituel du sacrifice
offert par le sou-verain ou ses vassaux aux mnesde leurs anctres.
Le rituel doit treaccompagn de musique et dedanses qui constituent
lharmonieet lefficacit du geste. Ce rituel,pour Confucius, en vient
marquertoutes les activits humaines. De lprovient lide que cest de
laccom-plissement rigoureux des ritesroyaux que dpend la
bonnemarche de lEtat mais aussi la paixet le bonheur du peuple, la
fertilitdes champs, lordre social.Leffort de Confucius pour revenir
la vision authentique du rituel nestpas un rflexe de
conservateur,mais la tentative de retrouver uneforme dquilibre
social. Le ritueljoue dans le bon fonctionnement dugouvernement un
rle fondamen-tal, puisquil canalise les nergieset les instincts
individuels dans descomportements harmonieux, facili-tant ainsi les
relations politiques etsociales. Cest lesprit, et non la let-tre du
rituel que Confucius tente deretrouver. Loin de prner une adh-sion
aveugle, dogmatique une
forme quelconque dtiquette ou dergles arbitraires, il accorde
unegrande importance lexprienceet au jugement de chacun. Le yi
estce sens du Juste, cette capacit dejuger ce quil est quitable de
fairedans telle circonstance.Dans les affaires du monde,lhomme de
bien na pas une atti-tude rigide de refus ou daccepta-tion. Le
juste est sa rgle(Entretiens IV, 10). Il ny a donc pasdans la pense
de Confucius decritres absolus, de valeurs abs-traites mais plutt
un rapport com-plexe entre les situations environ-nantes et le sens
du Juste.Lhomme de bien est impartial etvise luniversel ; lhomme de
peu,ignorant luniversel, senferme dansle sectaire (Entretiens II,
14).
La vie en socit linstar du Bouddha, Confuciusrejetait toute
spculation sur luni-vers et faisait de lhomme lobjetpropre du
savoir. Cest grce lavie de socit que se constituepour lui la dignit
humaine.Confucius cherche rendre sensi-ble lunit dun principe
dordreunissant, la manire dun courantrversible, des groupements
hirar-chiss (les amis, les parents, ledomaine, lEtat) mais
troitementsolidaires qui vont de lindividu lUnivers. Pour lui, la
vie en socit
est ltape obligatoire entre lhom -me et lUnivers, la diffrence
de lavision taoste, philosophie plus cos-mique o la voie du sage
nest pasforcment une voie sociale. Quine reconnat le Dcret Cleste
nesaurait tre homme de bien. Qui nepossde les rites ne saurait
saffir-mer. Qui ne connat la valeur desmots ne saurait connatre
leshommes (Entretiens XX, 3).Lhomme de bien a souci de neufchoses :
il sapplique bien voir cequil regarde, bien entendre cequil coute.
Il a souci de respirer labienveillance dans son expression,la
dfrence dans ses manires,lhonntet dans ses paroles, lesrieux dans
son travail. Dans ledoute il demande conseil ; dans unaccs de
colre, il pense auxconsquences ; dans la perspec-tive dun profit,
il garde le souci duJuste Entretiens, XVI, 10.Confucius affirme que
cest au seinde la socit que lhumanit delhomme saccomplit. Cest en
celaque sa vision est complmentairede celle de Lao Tseu qui
prnedavantage une fuite du monde pourmieux rintgrer lunit
Brigitte BOUDON
(1 )Entretiens, Confucius, traduit duchinois par Anne Cheng,
Seuil, 2004(2) La pense chinoise, Marcel GRANET,Albin Michel,
1999
PH I L O SOPH I E S
2 7
-
Un sentiment mtaphysique
Quel que soit son tat lindividu estseul ; la solitude exclut la
notiondge, de sexe - elle est un senti-ment mtaphysique. Chacun a
djprouv la sensation de se sentirseul au sein dune foule, ou
mme,parmi ses proches. Nous avonstous fait lexprience, heureuse
oudouloureuse, de notre propre uni-cit et partant, de notre
solitudeirrductible.Dans les mythes, les contes et leslgendes, le
hros est toujours irr-mdiablement seul lorsquil sagitdaffronter le
dragon, la situationprilleuse ou le dieu vengeur ; aumoment
crucial, celui du combatdcisif qui engage le hros sur savie et son
me, celui-ci ne peutcompter que sur lui-mme. Car cest au moment de
la plusgrande vulnrabilit, de la plusgrande solitude que peut se
rveil-ler la force qui sommeille en cha-cun de nous. Dpouills de
nosartifices, dlests de tout ce qui neconstitue pas nos pouvoirs
vrita-bles, nous voil enfin dans ltat de
solitude rayonnant, cest--dire,paradoxalement, pleinement
pr-sents nous-mmes, authentiqueset profonds - prts dcouvrir
nosressources intrieures.
La solitude est bonne aux grands esprits et mau-vaise aux
petits. La solitude trouble les cerveaux quellenillumine pas.Victor
Hugo, Choses vues
Une source de crativitNe pouvoir compter que sur soi-mme, ce
nest pas mpriser lepouvoir des autres mais apprendre dpendre de soi
avant de dpen-dre dautrui, sortir de la passivitpour entrer dans
laction et dans lavie. tre seuls face nous-mmesnous permet de faire
linventaire denos propres ressources intrieures.Jacqueline Kelen
dit : La solitudeoffre chacun le recul et le rassem-blement des
forces indispensables
pour uvrer. Elle permet de sedgager des contingences et
frivoli-ts du quotidien et de faire linven-taire de ses ressources
person-nelles. Dans la solitude on amassedes munitions. Si de ces
provisionson ne cre rien, on ne parcourtquune partie du chemin. La
soli-tude est un dtachement qui mne un dbordement. Si elle ne
fructi-fie pas, elle nest quisolement (1).Du vide apparent peut
ainsi natreun plein, si nous prenons cons -cience que nous sommes
dposi-taires dun trsor. mais ce trsor nenous est pas rvl demble,
ilnous incombe de partir sarecherche en apprenant dvelop-per une
vie intrieure qui nousmette en contact avec linfini quenous portons
en nous.
Les fruits sacrs de la solitudeLa solitude est donc loin dtre
uneposition hautaine et misanthrope.Elle incarne plutt la volont
depoursuivre une dmarche intrieureen toute lucidit : [] il existe
aussi
2 8
La solitude est le plussouvent connotengativement, synonymede
tristesse etdisolement. Pourtant elleest injustement mprisecar
lorsque nousparvenons lapprivoiser,elle se rvle exaltante
etfructueuse
Peut-on apprivoiser la
solitude?
-
des hommes et des femmes excep-tionnels qui, ayant parfait leur
exp-rience, ont besoin de la rflexion etde la mditation profondes,
loin duva-et-vient du monde ; pour eux, ilest lgitime de se sparer
dumonde. mais cest une sparationsilencieuse et humble, crative
etfertile car ils retourneront dans lemonde, dans leur vie prsente
oudans une autre, pour apporter auxautres hommes les divins
trsorsdcouverts dans les profondeursde leur propre tre (2).En
effet, la vritable solitude ninvitepas se perdre dans notre
laby-rinthe intrieur mais bien aucontraire en trouver le centre
afindaider ensuite nos semblables apprivoiser leur propre solitude,
toutcomme nous sommes parvenus le faire pour nous-mmes : Si
lemonde, avec ses changements, estun adversaire ou une adversit,
levrai philosophe doit laffronter et levaincre ; non pas en
schappant,mais en transformant ce monde, outout au moins en le
dominant (3). Et cest bien de cet unique mouve-ment, partant de
notre cur enrichides fleurs cueillies dans la solitudefructueuse et
allant la priphriede nous-mmes, que se situe lefondement de notre
action de philo-sophes
Lonie BEHLERT
(1) Jacqueline Kelen, LEsprit desolitude, Editions Albin Michel
2005,p.132(2) Jorge A. Livraga, Lettres Dlia etFernand, Editions
Nouvelle Acropole1994, p.93
(3) Ibid. p.91-92
2 9
6
6Dernires parutions
50
En ventedans le centre
Nouvelle Acropole le plus proche de chez vous !
QUES T I ON P H I L Oditions
Nouvelle Acropole
Pour plus dinformationssur nos dernires parutions,consulter la
rubriqueA Lire page 45 et 46
-
Incarnation de la compassion uni-verselle, Kannon est un
boddhi-sattva et la divinit la plus populairedans toute lAsie.
Connue sous dif-frents noms (1), figure majeure dubouddhisme du
Mahayana ouGrand Vhicule (2), on linvoqueaujourdhui encore pour
recevoir saprotection dans toutes les difficults
de la vie (catastrophes naturelles,agressions), demander la
nais-sance des enfants et galementpour tre accompagn par lui
dansson voyage vers les Terres puresde lOccident, au moment de
lamort. Capable de prendre de multiplesformes pour se manifester en
notre
monde, il est lobjet dune iconogra-phie abondante, de type aussi
bienrituel que populaire.
De multiples formes de manifestationsLe bodhisattva est un tre
(sattva)qui uvre pour librer tous lestres des prisons des passions
etde lignorance. Les pouvoirs quil aacquis par ses propres mrites
luipermettent de se manifester soustoutes sortes de formes
poursadapter aux circonstances.Kannon est lunique bodhisattva
quipeut prendre tantt la forme mas-culine, tantt la forme
fminine.Celle-ci, tout particulirement auJapon et en Chine est
connue sousle nom de Guanyin, o elle favorisela demande denfants si
importantepour prserver la continuit rituellefamiliale. Le Sutra du
Lotus (3) nu-mre trente-trois de ces formes, quivont dun corps de
bouddha jusquceux dune pouse ordinaire enpassant par toutes sortes
de per-sonnages daspects divins ouhumains. Au XVIIe sicle,
leButsuzo zui de Gizan reproduit unesrie des Trente trois
incarnationsde Kannon prsentes avec dtaildans louvrage de Jrme
Ducor (4).
3 0
Il existe une grande figuredans le bouddhisme qui se dresse pour
aider toutepersonne en difficult, chaque fois que lonprononce son
nom. Ilsagit de la dit Kannon(nom japonais de la
ditAvalokiteshvara) trsconnue en Asie.
Regards sur KannonLe grand compatissant
-
Kannon, autre nom de Avalokitasvara lorigine, en Inde (5), le
nom dubodhisattva Kannon tait Avalo -kitasvara, de Avalokita
(seigneurqui observe) et de svara (le son),do celui qui considre
lesappels, ce qui dsigne le rledmissaire quil remplit auprs
desbouddhas Shakyamuni et Amitabhadans le Krandavyha Stra (6).
Lenom de Avalokitasvara voque soninfinie compassion qui lui fait
scru-ter les cris de tous les tres plongsdans la souffrance, afin
dintervenirpour soulager leurs peines.Avalokitasvara est sans doute
legrand bodhisattva, le plus vnr etle plus populaire parmi les
boud-dhistes du Mahayana. Bodhisattvaprotiforme et syncrtique, il
peutreprsenter tous les autres bodhi-sattvas et incarne la
compassionultime. Au Tibet, le Dala lama estconsidr comme une de
ses ma-nations. galement nomm Padmaiou mipadm Avalokitasvara est
invo-qu par le clbre mantra (7) OmManipadme hum (8). Limportance de
son regard vientdu fait quen Orient, la vision a unrle actif car
les yeux projettent dela lumire sur lobjet observ.Lorsque Kannon
scrute de sonregard les voix du monde, il balayelunivers de sa
lumire de compas-sion, tel un phare sur la mer. Doson nom de
Vigie-des-voix-du-monde.
uvrer pour le bien des hommesLune des lgendes les plus cl-bres
est dorigine tibtaine.Avalokitasvara/kannon (Chen rezig en tibtain)
serait n dun rayon
de lumire mis par un ildAmitabha, le Bouddha Lumire-infinie qui
prche sur sa Terre purede lOuest. Lorsquil voulut uvrerpour le bien
de tous les tres, il fiten prsence dAmitabha le vusuivant : Aussi
longtemps quunseul tre naura atteint lveil, ju-vrerai pour le bien
des tres. Si jevenais manquer cet engage-ment, que ma tte clate en
dixmorceaux, que mon corps se briseen mille parties. Amitabha
accueil-lit cette promesse et promit de lai-der laccomplir. Pendant
unedure incalculable, le corpsdAvalokitasvara/chenrenzig mitsix
rayons de lumire qui produisi-rent dinnombrables manationspour
soulager les souffrances dessix classes dtres (dieux, demi-dieux,
humains, animaux, espritsaffams, enfers). Aprs de nom-breux kalpas
(9), il prit un momentpour regarder sil restait encorebeaucoup
dtres librer dans lesamsara (10). Hlas, il lui semblaque le nombre
avait peine dimi-nu. Dcourag, il jugea sa tcheinutile ; mieux
valait se reposerdans la paix du Nirvana (11).Ruinant par cette
pense sa pro-
messe, sa tte et son corps se bri-srent. La douleur fut grande
et ildemanda laide dAmitabha. Celui-ci lexhorta continuer sa tche
etpour rendre sa puissance plusgrande, il recomposa sa tte, en
luidonnant dix visages, neufs paisi-bles et un irrit, pour quil
post sonregard de compassion sur tous lestres la fois et couronna
lensem-ble de sa propre image pour rappe-ler sa prsence en lui.
Prenant lesmorceaux de son corps, il en fit unnouveau corps do
rayonnaientmille mains marques par milleyeux de compassion.
La symbolique des mainsAvalokitasvara/Kannon, dit auxmille mains
est nomme parfoisRoi de lespace et ses attributssont canoniquement
reprsents.Parmi eux, on distingue les yeuxsur les paumes des mains,
poursignifier ce regard attentif toute lasouffrance du monde. Dix
mainsprincipales symbolisent son corpsessentiel (dharmakaya),
racine desa ralisation. Les deux premiresmains sont jointes sur la
poitrine etabritent le Joyau qui exauce lesdsirs. Les autres mains
gauches
ART & SMBOL I SME
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Le Sutra des contemplations de Vie infinieLumire immacule et trs
pure,Ce soleil de sagesse brise toutes les tnbres,Subjugue le vent
et le feu calamiteuxEt, partout, claire brillamment le monde.La
compassion quil incarne prvientTel un coup de tonnerre.Et la
bienveillance qui lanime,Merveilleuse comme une nue,Rpand en douce
rose la pluie de la Loi,Qui teint la flamme des passions.Fragment
du Pome du Vnr-du-monde, in opus cit
-
tiennent : le lotus blanc de la puresagesse, le pot du nectar de
la lon-gvit, le joyau qui exauce volont, larc de la connaissance
etla flche des moyens adapts ladlivrance des tres. Les autresmains
droites tiennent : le chapeletdu mantra dAvalokitasvara, la rouede
la Loi bouddhique, le geste dudon de labsence de crainte, unbouddha
de transformation. Lestrente-huit mains suivantes, avecdivers
accessoires, symbolisentson corps de gloire (sambhoga-kaya), par
lequel il se rend visibleaux autres bodhisattvas. Les neufcent
cinquante-deux mains res-tantes symbolisent ses corps
detransformation (nirmanakaya), quilmanifeste auprs des tres
ordi-naires plongs dans la souffrance.Ses onze ttes sont disposes
enpyramide : les six premires sontsouriantes, les quatre
suivantesfurieuses, car elles se tournentcontre les passions ; la
dernire, ausommet, est celle de BouddhaAmitabha.
Les six formes de KannonAu Japon, en tant que protecteurdes
vivants, il peut prendre sixformes particulires pour uvrerdans les
six mondes. On les
nomme dans ce cas les sixKannon. 1. Kannon le Saint :
reprsentationla plus simple, quivalent Padmapani, le porteur du
lotus,indien. Il est associ aux enfers. 2. Kannon aux onze faces :
les dixpremires reprsentent son ubi-quit et la onzime, le
BouddhaAmitabha. Elle correspond la des-tine des titans.3. Kannon
aux mille mains : sareprsentation la plus spectaculaireest dans le
temple de Sanju -sangendo Kyoto, o la statueprincipale est entoure
de mille sta-tues grandeur nature de Kannon. Ilintervient dans le
monde desesprits affams.4. Kannon la roue et la gemmeexauant volont
: sa premiremain droite fait le sceau de larflexion et la premire
gauchesappuie sur le mont Potalaka, sarsidence. Les quatre autres
por-tent la gemme, un chapelet, unlotus et la roue de la loi. Il
est pr-sent dans le monde des dieux.5. Kannon la tte de cheval
:seule forme laspect furieux. Il estassoci la destine des
animaux.6. Kannon au lasso infaillible :forme associe la destine
deshommes. Le lasso signifie quil pos-
sde les moyens infaillibles dattra-per les ignorants pour les
conduiresur le chemin de la libration.
Des adaptations surprenantesde KannonEn Chine, la fminisation
deKannon lui a valu dtre rcuprpar les catholiques de lEmpire
dumilieu pour reprsenter la Viergemarie dans des temps o ils
taientperscuts. Ils ont vnr demanire clandestine une forme demarie
Kannon.Au Japon, le crateur des appareilsphotos, Yoshida Gor, fidle
deKannon, donna son nom lamarque, dabord par le nom deKwanon,
ensuite Kyanon, pourdevenir en anglais, le fameuxCanon. Il choisit
comme logotype
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une de sept formes de Kannon,celle de Cundi dix-huit bras,
maiscet usage na pas perdur.Incarnation de la compassion,
lin-vocation du bodhisattva Kannonest dautant plus dactualit, que
leJapon est entrain de connatredepuis le 11 mars 2011 des
boule-versements sans prcdents danslhistoire, du tremblement de
terre,en passant par le tsunami et lamenace nuclaire. Que
Kannonpuisse apaiser les souffrances etdonner force spirituelle,
morale etphysique ce vieux peuple de sur-monter les obstacles et de
retro verla paix et la srnit
Laura WINCKLER
(1) En hindi Avalokitasvara, en chinoisGuanshyin ou Guanyan, en
japonaisKannon, en tibtain Chenrezig, envietnamien Qun The m, en
indonsienKwan Im, en khmer, Lokevara(2) En sanscrit, Mahayana,
doctrine dubouddhisme qui prne le fait que tout trevivant peut
atteindre lillumination etrecevoir de laide pour veiller le
Bouddhaqui est en lui.
(3) Le sutra est un canon, un livre, un critspculatif ou
philosophique, rdig sousforme daphorisme. Cest sur le Sutra duLotus
quont t fondes les colesTiantai en Chine et Tendai et Nichiren
auJapon.(4) Le regard de Kannon, Jrme DUCOR,ditions Infolio et Meg,
2010(5) Le bodhisattva Avalokitasvara apparatdans le Sutra du
cur