N° d’ordre : 2002-14 Année 2002 THESE Présentée devant L’ECOLE CENTRALE DE LYON Pour obtenir LE GRADE DE DOCTEUR Spécialité : Matériaux Polymères et Composites par Young Kuk CHOI Ingénieur Corée REALISATION ET CARACTERISATION DE COMPOSITES HYBRIDES VERRE/EPOXY/NI-TI ADAPTATIFS Soutenue le 24 juin 2002 devant la commission d’examen JURY : Mme Suzanne DEGALLAIX-MOREUIL Rapporteur M. Rolf GOTTHARDT Rapporteur M. Gérard GUENIN Président M. Pierre GUIRALDENQ Mme Michelle SALVIA M. Léo VINCENT
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N° d’ordre : 2002-14 Année 2002
THESE
Présentée devant
L’ECOLE CENTRALE DE LYON
Pour obtenir
LE GRADE DE DOCTEUR Spécialité : Matériaux Polymères et Composites
par
Young Kuk CHOI Ingénieur Corée
REALISATION ET CARACTERISATION DE
COMPOSITES HYBRIDES VERRE/EPOXY/NI-TI
ADAPTATIFS
Soutenue le 24 juin 2002 devant la commission d’examen
JURY : Mme Suzanne DEGALLAIX-MOREUIL Rapporteur
M. Rolf GOTTHARDT Rapporteur
M. Gérard GUENIN Président
M. Pierre GUIRALDENQ
Mme Michelle SALVIA
M. Léo VINCENT
REMERCIEMENTS
Ce travail a été réalisé au sein du laboratoire Ingénierie et Fonctionnalisation des Surfaces,
groupe Matériaux Mécanique Physique (IFoS-MMP) de l’Ecole Centrale de Lyon. Je tiens à
en remercier son Directeur, le Professeur D. TREHEUX, pour m’avoir accueilli au dans son
laboratoire.
Je remercie vivement Madame M. SALVIA pour avoir accepté de suivre mes travaux en tant
que directeur de thèse. Sa disponibilité et ses encouragements n’ont jamais fait défaut.
J’exprime ma profonde gratitude à R. GOTTHARDTS, professeur à EPFL et à
DEGALLAIX-MOREUIL, professeur à Ecole Centrale de Lille, qui ont accepté d’être les
rapporteurs de ce mémoire. Je tiens à remercier G. GUENIN, professeur à l’INSA de Lyon, P.
GUIRALDENQ, professeur de émérite à l’ECL et L. VINCENT, professeur directeur adjoint
à l’ECL pour leur participation dans mon jury.
Je remercie tout particulièrement Monsieur M. MORIN, Maître de Conférences à l’INSA de
Lyon pour les discussions toujours enrichissantes.
Je tiens également à remercier la société WEG en Belgique, pour l’approvisionnement en
alliages à mémoire de forme et la société HEXCEL composites, pour l’ approvisionnement en
composites préimprégnés type de VICOTEX XE12.
Je ne saurais terminer ces remerciements sans une pensée pour tous les membres du
laboratoire avec lesquels j’ai passé l’ensemble de ces trois années. J’ai énormément apprécié
la bonne ambiance qui règne au sein de l’équipe de MMP, grâce à laquelle cette thèse a pu
être réalisée dans d’excellentes conditions. Merci aux permanents : Henri, Cécile, André
Bernard, Bernard, Du.et aux thésards, nouveaux, en cours ou anciens : Olivier, Laurent,
Merci chaleureusement à mes amis de l’INSA de Lyon, notamment les Coréens ainsi que
Fadila, Emmanuelle, Rachid, Enriqué, Cézar, Carlos, Christelle et les autres, vous êtes
vraiment formidables.
Il serait difficile d’oublier mes remerciements à Jean-Michel. V, Denyse. J et Bernard. C pour
leur gentillesse et leur disponibilités.
Enfin, je voudrais associer pleinement à la réussite de ce travail celle qui a partagé tous les
instants de cette thèse, et qui a toujours été présente à mes côtés, même dans les périodes de
relative tension de fin de rédaction ou d’avant soutenance merci ma chérie Mi-Kyung pour ta
présence et ton soutien de tous les moments et mes enfants adorée Woo-Sun, Woo-Soo et
Woo-Ri pour m’avoir pas trop réveillée la
nuit. Je tiens à remercier tout particulièrement mes chers parents, mes chers beau parents et
mes belles sœurs qui m’ont tant encouragé et aidé pendant les moments les plus difficiles
émaillés de déceptions et de désespoir. Mon père, tu sais je pleurais beaucoup car, ça fait
longtemps tu n’étais pas à côté de moi mais je savais très bien tu me regarde tout le temps au
ciel. Je ne sais pas ton amour mais je t’aime énormément. Alors je te donne ma thèse devant
toi avec mon cœur.
Finalement, je tiens à remercier les familles de M et Mme DUBOIS et de Monsieur
AMARGER qui m’ont accueilli toujours avec amour et amitié.
Louange à Dieu le tout puissant de m’avoir donné santé, patience et courage tout au long mes
études.
SOMMAIRE Introduction 1
Chapitre I Utilisation de l’effet mémoire de forme :
structures et matériaux intelligents I- Les alliages à mémoire de forme (AMF) 7 I.1- Introduction 7 I.2- Définitions 8 I.2.1- Matériaux et structures "intelligents" 8 I.2.2- Les alliages à mémoire de forme 10 I.3- Transformation martensitique 12 I.3.1- Définition 12 I.3.2- Caractérisation géométrique 13 I.3.3- Effet de la température 15 I.3.4- Effet d’une contrainte appliquée 16 I.4- Aspect microstructural 18 I.4.1- Réorientation des variantes par l’application d’une contrainte 18 I.4.2- Phase de transition prémartensitique (Phase R) 19 I.5- Propriétés thermomécaniques des alliages à mémoire de forme 20 I.5.1- Effet superélastique 20 I.5.2- Effet caoutchoutique 21 I.5.3- Les effets mémoire de forme (EMF) 23 I.5.3.1- Effet mémoire de forme simple sens (EMFSS) 23 I.5.3.2- Effet mémoire de forme double sens assisté (EMFDSA) 24 I.5.3.3- Effet mémoire de forme double sens (EMFDS) 25 I.6- Présentation de l’alliage à base TiNi 27 I.6.1- Diagramme d’équilibre et structures 28 I.6.2- Effet du cuivre en substitution au nickel (Ti50 Ni50-x Cux) 29 I.6.3- Effet des traitements thermiques 31 I.7- Domaines d’application 35 II- Intérêt du thème et principe de la structure composite hybride 38
Chapitre II Matériaux et techniques expérimentales de caractérisation
I- Choix du matériau 42 I.1- L’alliage à mémoire de forme de type TiNiCu 42 II- Techniques de caractérisation du fil de TiNiCu 43 II.1- Matériau étudié et traitement thermique 43 II.2- Caractérisation thermique de la transformation 44 II.3- Caractérisation mécanique par essai de traction 46 II.3.1- Essai mécanique 46 II.3.1.1- Procédés expérimentaux 46 II.3.1.2- Résultats et discussion 47 II.3.2- Propriétés électriques 50 II.3.2.1- Introduction 50 II.3.2.2- Procédés expérimentaux et résultats 50 II.4- Education pour l’effet mémoire double sens et force de recouvrement 54 II.5- Comportement électro-thermomécanique 57 II.5.1- Détermination de la variation de résistivité 57 II.5.1.1-Rôle du suivi en résistivité 57
II.5.1.2- Technique de mesure et résultats 59 II.5.1.3- Analyse des résultats 66 III- Choix et caractérisation de la "matrice" époxy-verre du composite "hybride" 68 III.1- Caractérisation de la ‘matrice’ composite 69 III.1.1- Caractéristiques structurales 69 III.1.2- Caractérisation thermomécanique (spectrométrie mécanique) 70 III.1.2.1- Technique expérimentale 70 III.1.2.1.1- Principe 70 III.1.2.1.2- Protocole expérimental 71 III.1.2.1.3- Résultats 71
Chapitre III Mise en œuvre et caractérisation mécanique
du matériau composite hybride I- Réalisation du composite hybride 77 I.1- Procédé 77 II- Etude du matériau composite hybride 79 III- Propriété des interfaces 81 III.1- Introduction 81 III.2- Principe du test de déchaussement (Pull - out test) 82 III.3- Préparation des échantillons et expérimentation 85 III.4- Résultats expérimentaux et interprétation 86 III.5- Conclusion 92 IV- Essai d’évaluation de mise en action d’une poutre cantilever 94 IV.1- Caractéristiques des échantillons réalisés 94 IV.2- Matériaux : procédés d’élaboration des échantillons 94 IV.3- Essais et résultats de la poutre cantilever 95 IV.3.1- Estimation des températures de transition de phase pendant l’essai 100 IV.3.2- Evolution de la flèche : influence des conditions d’élaboration 102 IV.3.3- Evolution de la flèche maximale avec le cyclage thermique 104 IV.4- Conclusion 105
Chapitre IV Modélisation et interprétation des résultats
I- Rappels des modèles 109 I.1- Modèle de Tanaka (1986) 109 I.2- Modèle de Liang et Rogers (1990) 111 I.3- Modèle de Brinson (1993, 1996) 112 I.4- Modèles divers 113 II- Application du modèle phénoménologique unidirectionnel 113 II.1- Analyse mécanique du composite hybride assimilé à un bilame 114 II.2- Application du modèle phénoménologique et discussion des résultats 116 III- Conclusion 123 Conclusion générale 125 Références bibliographiques 130 Annexes 146
1
INTRODUCTION
2
INTRODUCTION
La recherche de nouveaux matériaux occupe une place importante dans l'histoire de la
technologie. Les industriels utilisent de plus en plus de matériaux composites à fibres
renforçantes. En particulier, ils cherchent à concevoir, développer et caractériser de nouveaux
matériaux destinés à être utilisés aussi bien dans des secteurs de haute technologie tels que
l'aéronautique et le militaire que dans des domaines plus quotidiens comme l’automobile les
loisirs et l’habitat.
Les objectifs de recherche en matière de nouveaux matériaux sont : gain de
performances, baisse du coût de fabrication des produits, et sauvegarde ou même amélioration
de la fiabilité,.…
Au début des années 80 est apparue comme un rêve de technologues le concept de matériaux
et de systèmes aux propriétés évolutives dits "intelligents" ou "smart" capables de remplir au
mieux leur missions dans un environnement changeant et , mieux encore, d’assurer leur
survie !.
Ce concept a d’abord été avancé dans le cadre de la conception "biomimétique" des
précurseurs où le matériau intelligent posséderait des ‘nerfs’ représentés par un réseau de
capteurs ou un matériau intrinsèquement sensible, des ‘muscles’ simulés par des matériaux
"actifs" et un "cerveau" ou un dispositif analysant les données fournies par le matériau
sensible pour choisir la bonne réponse et modifier les caractéristiques globales. Cette
conception "biomimétique" a ainsi tout naturellement conduit au plus difficile des challenges ,
celui de l’auto-réparation des dommages.
Ce concept ambitieux qui implique naturellement la multi-fonctionnalité s’est assez
rapidement structuré et on a coutume de distinguer aujourd’hui plusieurs niveaux de
difficultés croissantes où la distinction entre matériaux ‘stricto sensu’, mélanges de matériaux
et systèmes n’est pas toujours claire :
• Matériaux simplement "sensibles" capables de fournir une information sur leur
environnement et/ou leur propre état structural .(à la fonction primitive on ajoute une
composante "information"’
• Matériaux dits "adaptables" capables de faire évoluer une de leurs caractéristiques
essentielles (forme, module, viscosité, transparence, ….) sous l’effet d’une
3
sollicitation localement appliquée (champ électrique, magnétique, température, …) à
la fonction primitive on ajoute une composante ‘action’.
• Matériaux dits "adaptatifs" ou "intelligents" à la fois "sensibles" et "adaptables" et
susceptibles de réagir par eux-mêmes et dans le bon sens à l’évolution des variables
externes ou internes. On peut distinguer entre matériaux adaptatifs et matériaux
intelligents par la prise en compte du niveau de traitement de l’information. Un
matériau serait adaptatif s’il n’est susceptible de réagir qu’à un type de sollicitation
suivant une loi programmée. Un matériau "intelligent" posséderait toute une gamme
de sensibilités à des sollicitations diverses et serait susceptible d’un choix dans la
réponse ou même d’un éventuel autoapprentissage.
Dans ce travail nous nous intéresserons à la réalisation d’un matériau "adaptable"
élaboré à partir d’un composite à matrice organique renforcée par des fibres de verre.
L’introduction dans ce matériau classique de fils d’alliage à mémoire de forme agissant
comme "actionneurs" fait de ce composite désormais ‘hybride’ un matériau adaptable
susceptible de modifier réversiblement sa forme.
En fait l’ajout de fils d’alliage à mémoire peut conduire à trois types d’utilisation (au
moins potentielles) :
1. le développement de contraintes internes dans les structures en composites
adaptatifs appliqué au contrôle des vibrations et pouvant entraîner par exemple
le glissement d’une fréquence de résonance. (Ce type d’application est envisagé
pour le traitement des dérives verticales des aéronefs)
2. La diminution des concentrations de contraintes en fond de fissure sur une
structure endommagée. (les études sont dans ce domaine beaucoup plus
prospectives)
3. Le contrôle de forme permettant d’adapter la structure à de nouvelles conditions
d’usage. C’est le sujet de cette recherche.
La première partie de ce travail présente une revue bibliographique concernant les
définitions de la transformation martensitique, les propriétés thermomécanique des alliages à
mémoire de forme (AMF) et une présentation des AMF à base de Ti-Ni
Nous présenterons également quelques domaines d'application du matériau et le
principe de la structure composite hybrides adaptables. Cette partie bibliographique nous
4
permettra de situer nos résultats expérimentaux dans le cadre de l’évolution de ces nouveaux
composites
Les matériaux utilisés ainsi que les conditions expérimentales sont décrites dans le
chapitre II.
Nous élaborerons trois types d'échantillons traités différemment (au niveau thermique et
mécanique). Nous étudions leurs comportements électro-thermomécaniques ce qui permet le
tracé des diagrammes de Clausius Clapeyron dont la connaissance nous permettra d’estimer
l'évolution de l'état de contrainte interne dans le fil nitinol.
Le troisième chapitre concerne la mise en œuvre et la caractérisation mécanique du
matériau composite hybride.
Nous caractériserons en particulier l'interface fil d’alliage-matrice composite du
composite hybride pour estimer la transmission des forces de recouvrement au composite
hybride.
Enfin, un essai d'évaluation de mise en action d'une poutre cantilever nous permettra de
contrôler l’évolution réversible de la forme du matériau composite hybride en fonction de la
température et de la confronter à un modèle.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
5
CHAPITRE I
Utilisations de l'effet mémoire de forme :structures et matériaux
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
6
Chapitre I :
UTILISATION DE L'EFFET MEMOIRE DE FORME : STRUCTURES ET MATERIAUX
INTELLIGENTS
I- LES ALLIAGES A MEMOIRE DE FORME (AMF).................................................................................... 7 I.1- INTRODUCTION .............................................................................................................................................. 7 I.2- DEFINITIONS .................................................................................................................................................. 8
I.2.1- Matériaux et Structures "intelligents".................................................................................................... 8 I.2.2- Les alliages à mémoire de forme ......................................................................................................... 10
I.3- TRANSFORMATION MARTENSITIQUE ............................................................................................................ 12 I.3.1- Définition ............................................................................................................................................. 12 I.3.2- Caractéristiques géométriques ............................................................................................................ 13 I.3.3- Effet de la température......................................................................................................................... 15 I.3.4- Effet d'une contrainte appliquée .......................................................................................................... 16
I.4- ASPECT MICROSTRUCTURAL ........................................................................................................................ 18 I.4.1- Réorientation des variantes par l'application d'une contrainte ........................................................... 18 I.4.2- Phase de transition prémartensitique (phase R) .................................................................................. 19
I.5- PROPRIETES THERMOMECANIQUE DES ALLIAGES A MEMOIRE DE FORME ..................................................... 20 I.5.1- Effet superélastique.............................................................................................................................. 20 I.5.2- Effet caoutchoutique ............................................................................................................................ 21 I.5.3- Les effets mémoire de forme (EMF)..................................................................................................... 23
I.5.3.1- Effets mémoire de forme simple sens (EMFSS)..............................................................................................23 I.5.3.2- Effets mémoire de forme double sens assisté (EMFDSA)...............................................................................24 I.5.3.3- Effets mémoire de forme double sens (EMFDS).............................................................................................25
I.6- PRESENTATION DE L'ALLIAGE A BASE TINI.................................................................................................. 27 I.6.1- Diagramme d'équilibre et structures ................................................................................................... 28 I.6.2- Effet du cuivre en substitution au nickel (Ti50 Ni50-x Cux) ................................................................ 29 I.6.3- Effet des traitements thermomécaniques.............................................................................................. 31
I.7- DOMAINES D'APPLICATION .......................................................................................................................... 35 II- INTERET DU THEME ET PRINCIPE DE LA STRUCTURE COMPOSITE HYBRIDE ADAPTABLE ...................................................................................................................................................... 38
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
7
Chapitre I : Utilisations de l'effet mémoire de forme : structures
et matériaux intelligents
I- Les alliages à mémoire de forme (AMF)
Historiquement, les AMF sont découverts par hasard en 1938 (Perkins 1975) mais les
premières études ont été réalisées en 1962 (Buehler et Wiley 1965). Les recherches débutèrent
sérieusement cette année-là sur des NiTiNOL (Nickel Titane Naval Ordonnance Laboratory).
Effets furent commandés par le Laboratoire de la Marine américaine. Puis en 1969 est
apparue la première application industrielle avec l'utilisation de manchons en alliage TiNi
pour raccorder des tuyauteries hydrauliques sur des chasseurs F14.
Il existe de nombreux alliages que l’on peut actuellement classer pour l’essentiel en
trois grandes familles : Les alliages à base de Ti-Ni (TiNiCu, TiNiFe, TiNiAl ….)., Les
alliages à base de Cu (CuZnAl, CuAlNi, CuAlBe ….).,Les alliages à base de Fe (FePt,
FeMnSi, …..).
I.1- Introduction
Ce chapitre donne des informations générales sur les alliages à mémoire de forme et
leur comportement.
Il est nécessaire de développer des nouveaux matériaux susceptibles de remplir des
fonctions de plus en plus complexes. Pour cela on a effectué des recherches sur les matériaux
adaptatifs ou intelligents. Ces nouveaux matériaux ont des fonctions et des capacités spéciales
par rapport aux matériaux traditionnels.
Une propriété remarquable observée dans les alliages à mémoire de forme (AMF) est un
phénomène physique nommé effet à mémoire de forme (EMF). Ces alliages sont
généralement faciles à déformer de façon apparemment plastique à une température
relativement basse, et peuvent récupérer totalement leur forme initiale par simple chauffage
(EMF). Cette déformation récupérable peut atteindre jusqu’à 8% en traction.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
8
I.2- Définitions
I.2.1- Matériaux et Structures "intelligents"
Nous resterons dans le domaine des matériaux structuraux, mais, aucune définition
universelle n'est donnée pour les matériaux dits "intelligents".
En fait, des "structures intelligentes " sont formées par l'assemblage de deux fonctions
principales. Ces deux fonctions sont :
Le capteur
L'actionneur
Ces deux fonctions sont souvent assurées par des matériaux différents ce qui introduit
la notion de matériau-système.
Pour expliquer ce qu'est une structure intelligente, il semble important de préciser les
différents types de structures existantes. Elles sont définies sous les quatre formes suivantes :
La structure dite "sensible" : elle comprend des capteurs ou senseurs susceptibles
d'apporter au système des informations sur l'environnement ou elle-même et de les
transmettre à son utilisateur.
La structure dite "adaptable" : elle comprend des actionneurs pouvant modifier leurs
caractéristiques. Ainsi, la structure s'adaptera à l'environnement.
Le but recherché est de combiner les deux afin d'augmenter les caractéristiques de la
nouvelle structure. Les deux dernières structures sont :
La structure dite "adaptative" : le matériau est à la fois sensible et adaptable. Il réagit
à un seul type de sollicitation suivant une loi de comportement bien définie. Ce type de
réaction nécessite la présence d’un processeur assurant un lien entre la fonction capteur et
la fonction actionneur.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
9
La structure dite "intelligente" qui réagit à un ensemble de sollicitations en fonction
de sensibilités qui lui seront propres. Elle aura, par exemple, la possibilité de choisir la
réponse la mieux adaptée parmi un ensemble de solutions possibles si la structure du
processeur le permet, d'où la notion d'intelligence. En fait, un matériau réellement
"intelligent" n'existe pas car il serait alors capable d'intuition créative devant une situation
inattendue.
On considère classiquement que les cinq types de matériaux suivants sont les
constituants essentiels des matériaux systèmes et des structures "intelligentes" (Davidson
1992) :
les fluides électro-rhéologiques
les matériaux céramiques piézo-électriques
les matériaux électrostrictifs et magnétostrictifs
les fibres optiques
les alliages à mémoire de forme.
Ces matériaux pourront jouer le rôle soit de senseur soit d’actionneur.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
10
Si nous résumons sous forme d'un schéma les différents types de structures intelligentes,
Figure I-14 : Le diagramme de phase des alliages de TiNi (Massalki 1968).
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
29
La température Ms d'un alliage TiNi équiatomique se situe autour de 60 à 70°C. Les
températures de transformation sont très largement dépendantes de la composition( figure I-
15).
En effet, la température Ms évolue en fonction de la composition, particulièrement pour
les alliages riches en Ni.
-40
0
40
80
49 50 51 Ni (at %)
Ms (°C)
Ti-Ni
Figure I-15 : Evolution de la température Ms de l'alliage Ti-Ni avec la concentration en Ni
(Patoor et Berveiller 1994).
I.6.2- Effet du cuivre en substitution au nickel (Ti50 Ni50-x Cux)
L'étude de l'influence des éléments d'addition sur les alliages TiNi a été conduite depuis
de nombreuses années. Ces éléments d'addition peuvent être d'intérêt industriel et permettent
de modifier les caractéristiques de la transformation, en particulier les températures de
transformation. Autrement dit, l'intérêt majeur est de baisser ou d'augmenter les températures
de transformation suivant le domaine d'application.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
30
L'effet des additions a été étudié par Kolomytsev (1994).
Dans le cas de l'ajout de cuivre, on observe que celui-ci influe assez peu sur la
température de transformation martensitique. La figure I-16 montre l'évolution de température
de transformation de l'alliage avec la teneur en Cu.
Tem
péra
ture
(°C
)
Cuivre (%at)0 5 10 15 20 25 30 35
0
20
40
60
80
100
Ms
As
==
Figure I-16 : Evolution de température de transformation de TiNi avec la teneur en cuivre
(Funakubo 1987).
On s’intéresse à ce diagramme pour des concentrations de cuivre inférieures à 5%, car
notre fil de NiTi contient moins de 5% du Cu.
On observe que lorsque la concentration de cuivre contenue est inférieure à 5%, la
température Ms est presque constante. Cependant, lorsque le cuivre contenu est supérieur à
5% (jusqu'à 10%), la température Ms diminue légèrement et évolue entre 60 et 70°C selon la
teneur en Cu.
Enfin, on n'observe pas de phase R, et ce résultat est important pour notre étude car cela
simplifie la séquence austénite-martensite.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
31
I.6.3- Effet des traitements thermomécaniques
Nous avons déjà expliqué précédemment que les alliages NiTi sont très sensibles à la
composition chimique.
Plusieurs méthodes de fusion existent dans la littérature (Jackson et al. 1972). Ces
auteurs discutent de leurs avantages et inconvénients par rapport à l'homogénéité chimique et
le contrôle de composition du matériau obtenu. Toutefois, les propriétés des alliages
dépendent aussi de leur histoire thermomécanique.
En effet, la mise en forme des alliages TiNi se fait à chaud et à froid. Ces deux procédés
englobent la réaction de restauration et de recristallisation puis les températures de
transformation de phase.
Treppmann et Hornbogen (1997) ont déterminé les différents comportements des AMF
pendant les traitements thermiques.
Nous nous intéresserons plutôt aux traitements thermomécaniques de type déformation
suivi d'un traitement thermique de recuit ou recristallisation, car nos fils de NiTi ont été
fournis par un industriel, et mis en forme par filage à froid. Miyazaki et al. (1990) ont montré
que la déformation à la température Ms donne l'élongation maximale.
Si on travaille aux basses températures, la déformation conduit à un écrouissage du
matériau. Ceci induit une augmentation de sa dureté (Wu et al. 1996). La figure I-17 montre
les traitements de recuit qui permettent la restauration ou la recristallisation du matériau.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
32
1400
1200
1000
800
600
400
200
0
Stre
ss (M
Pa)
Strain
σyM
σyM
σyM
σyM
σyM
σRM
σRM
σRM σR
M
(b)(a)
(c)
(d)
(e)
as-rolled 1 reverse transformed(RMT)
400°C×1h
600°C×1h
800°C×1h
6%
Figure I-17 : Effets des recuits sur le comportement en traction du TiNi équiatomique
(déformé à 31%*, Lin et Wu 1994).
Les traitements de recuit permettent de réorganiser et d'éliminer des défauts dans le fil
de NiTi. On constate que durant le traitement de recuit à 400°C pendant 1h, les dislocations
peuvent être soit réarrangées soit partiellement éliminées. Cette évolution incomplète entraîne
la restauration partielle du plateau sur la figure I-17 (en effet σRM est la contrainte pour
laquelle apparaît une réorientation des variantes de martensite ; σYM serait la limite
d’écoulement plastique de la martensite ). Il y a recristallisation si la température de
traitement du recuit est supérieure à 600°C, autrement dit si la martensite revient à son état
original non déformé.
Lin et Wu (1994) ont déterminé l'effet des traitements de recuits sur les propriétés
mécaniques. Ils ont trouvé trois zones de températures représentées sur la figure I-18.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
33
100 200 300 400 500 600 700 800 900
200
400
600
800
1000
1200
Température (°C)
Con
trai
nte
(MPa
)Il existe des
variantes
de martensite
stabilisé
Elimination de la
martensite stabilisée
Il existe encore des
dislocations induites
par déformation à froid
Recristallisation
I II III
σyM
σRM
Figure I-18 : Evolution des contraintes σRM et σY
M en fonction des températures de recuit
pour l’alliage TiNi équiatomique (déformé à 31%, Lin et Wu 1994).
La zone I correspond à un recuit inférieur à 200°C. On constate qu'on ne voit pas de
changement visible et il y a toujours des variantes de martensite stabilisée. En effet, on ne
peut pas éliminer les variantes de martensite stabilisées lors des recuits à des températures
inférieures à 200°C.
Dans la zone II, les températures de recuits se font de 200°C à 600°C. On observe que
des variantes de martensites stabilisées sont totalement éliminées, mais il existe encore des
dislocations induites par la déformation à froid. Dans cette zone, on a également observé
l'apparition d'une transformation de phase R. Cette transformation de phase apparaît dans les
alliages TiNi équiatomiques.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
34
Dans la zone III, une recristallisation du matériau se produit à une température
supérieure à 600°C. Pour optimiser les traitements, il est nécessaire d'avoir une meilleure
connaissance du comportement de la transformation martensitique dans un large éventail de
temps de recuit et de températures.
Aujourd'hui, le traitement le plus utilisé est un recuit entre 420°C et 500°C pendant des
temps de l'ordre de 1 à 2 heures.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
35
I.7- Domaines d'application
De par leurs propriétés mécaniques, les alliages à mémoire de forme sont utilisés dans
une grande variété d'applications. D'une part, le phénomène de mémoire de forme est à
l'origine de plusieurs types d'activateurs thermiques :
Réalisation d'une antenne de satellite par la NASA : les antennes des satellites sont
très grandes. Ce qui crée des difficultés lors de leur mise en orbite. Pour les emporter plus
facilement, on a inventé l'antenne en alliage à mémoire de forme (figure I-19). On
fabrique l'antenne à haute température, puis on l'entasse en rond à basse température pour
la transporter facilement dans le navire spatial. Une fois en orbite, on utilise la chaleur
produite par le soleil pour que l'antenne retrouve sa forme initiale.
Projet de fabrication des ailes intelligentes par l'Air Force Wright Laboratory. Sur
un avion en plein vol, on peut faire varier les caractéristiques aérodynamiques des ailes et
ainsi avoir les meilleures performances selon le type de vol (figure I-20).
Systèmes de fermeture automatique de porte coupe-feu
Systèmes de fermeture de sécurité en électroménager
Système de régulation en température
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
36
1-Beta phase
Colled
2-Martensite starts to form
3-Martensite transformation complete
4-Antenna fabricated 5-Antenna deformed
Heated
6-Austenite starts to form
7-Austenite transformation complete
Figure I-19 : Shape memory alloy memoryzation process for the satellite applications (Gandhi
et Thompson 1992)
Fiber optic sensorsFiber optic sensors
SMA torque tubes
Contoured controlsurfaces using SMAs
SMA wire
Center lamination (G/E)
Core (phenolic)Face sheets (silicone)
Termination strip (torlon)
Wire termination (M /E)
M/E = Mechanical /Electrical
Termination strip (torlon)
Tailcap
T
G/E = Glasse /Epoxy
Figure I-20 : Smart wing model using SMA (Kudva et al. 1996).
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
37
D'autre part, concernant le phénomène de pseudoélasticité, citons :
Les micromanipulateurs
Les applications biomédicales (orthodontie, cardiologie, miniaturisation des
implants)
Les confections d'armature de soutien-gorge etc...
D'autres secteurs d'activité notamment l'industrie automobile et nucléaire (amortissement
sismique) commencent également à manifester un intérêt croissant à l'égard de ces matériaux.
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
38
II- Intérêt du thème et principe de la structure composite hybride
adaptable
Les excellentes propriétés mécaniques des matériaux composites à fibres renforçant une
matrice polymérique ont conduit depuis une vingtaine d'années à leur utilisation dans nombres
d'applications de haute technologie. En particulier, les industries de l'aéronautique et de
l'automobile s'orientent de plus en plus vers des solutions technologiques comme le contrôle
des paramètres responsables de la qualité de pièces. Il est vrai que leur rapport tenue
mécanique / poids est des plus intéressants.
Les fibres de verre ou de carbone renforçant les résines sont utilisées pour des pièces
nécessitant des propriétés mécaniques élevées, notamment dans les cas des pales d'hélicoptère
ou même de certaines parties d'ailes d'avion.
Actuellement, les industriels aéronautiques ont de nombreux projets de recherche pour
construire des appareils dotés de système de détection signalant une anomalie grave dans le
comportement d'une pièce, ceci pour identifier l'endommagement de la structure et pour
ralentir ou éviter une rupture catastrophique.
Nous nous intéressons ici à un matériau-système adaptable, et étudierons la faisabilité
d'un tel concept puis nous nous concentrerons sur sa fabrication afin d'obtenir la meilleure
reproductibilité.
Nous nous proposons donc de réaliser quatre types de composites verre-époxy contenant à
proximité d'une surface des fils d'alliage à mémoire de forme. Ces différents types de
composite hybride se distinguent uniquement par les fils avant leur insertion :
Fil pré-étiré à 8% sous forme martensitique pour obtenir la martensite fortement
orientée,
Fil pré-étiré à 8% puis maintenu sous contrainte pendant la cuisson pour éviter la
transformation austénitique,
Chapitre I : Utilisation de l'effet mémoire de forme : Structures et matériaux intelligents
39
Fil éduqué sous forme martensitique,
Fil éduqué maintenu sous contrainte pendant la cuisson,
On rappelle que l'éducation permet d'obtenir un effet mémoire double sens après un
cyclage termique de Mf >T°< Af. Ces matériaux sont nommés matériaux composites hybrides.
Des auteurs se sont intéressés à ces matériaux au niveau de leurs propriétés mécaniques.
Messanotti et Salvia 1998, Choi et Salvia 1999, 2001 ont montré le principe de l'essai de
poutre cantilever (figure I-21). Si on chauffe les fils en phase austénitique par un courant
électrique, les états de contrainte et de déformation locaux sont modifiés dans le composite
hybride, parce que les fils retrouvent leur forme initiale. En effet, les fils NiTi se sont
contractés.
Fléc
hiss
emen
t
Avant chauffage
Après chauffageFil de TiNiCu
Figure I-21 : Principe de l'essai de poutre cantilever
On observe que des contraintes de compression apparaissent et créent un moment de
flexion dans le sens des fils NiTi positionnés dans le matériau composite hybride. Ces
contraintes de compression induisent une courbure, et ceci est bien représenté dans l’exemple
d’une configuration de poutre cantilever.
Deux applications semblent intéressantes dans le cadre des problèmes industriels
fondamentaux.
Premièrement, on peut contrôler la forme du composite hybride grâce aux fils d'alliages
à mémoire de forme insérés à proximité de la surface du matériau.
Deuxièmement, les fils de NiTi judicieusement positionnés dans les composites
hybrides pourraient permettre d'améliorer la tenue en service de certaines structures.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
40
CHAPITRE II :
Matériaux et techniques expérimentalesde caractérisation
CHAPITRE II :
Matériaux et techniques expérimentalesde caractérisation
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
41
Chapitre II :
matériaux et techniques expérimentales de caractérisation
I- CHOIX DU MATERIAU................................................................................................................................ 42 I.1- L'ALLIAGE A MEMOIRE DE FORME DE TYPE TINICU ..................................................................................... 42
II- TECHNIQUES DE CARACTERISATION DU FIL DE TINICU............................................................ 43 II.1- MATERIAU ETUDIE ET TRAITEMENT THERMIQUE ........................................................................................ 43 II.2- CARACTERISATION THERMIQUE DE LA TRANSFORMATION ......................................................................... 44 II.3- CARACTERISATION MECANIQUE PAR ESSAI DE TRACTION........................................................................... 46
II.4- EDUCATION POUR L’EFFET MEMOIRE DOUBLE SENS ET FORCE DE RECOUVREMENT.................................... 54 II.5- COMPORTEMENT ELECTRO-THERMOMECANIQUE ....................................................................................... 57
II.5.1- Détermination de la variation de résistivité ................................................................................... 57 II.5.1.1- Rôle du suivi en résistivité .............................................................................................................................57 II.5.1.2- Technique de mesure et résultats ...................................................................................................................59 II.5.1.3- Analyse des résultats ......................................................................................................................................66
III- CHOIX ET CARACTERISATION DE LA "MATRICE" EPOXY-VERRE DU COMPOSITE HYBRIDE............................ 68 III.1- CARACTERISATION DE LA ‘MATRICE’ COMPOSITE................................................................. 69
Figure II-4 : courbe classique de contrainte-déformation avec quatre domaines
-Domaine I, déformation élastique et module initial (Ei).
-Domaine II, réorientation de variantes de martensite.
-Domaine III, nouvelle déformation réversible et module second (Es).
-Domaine IV, déformation plastique et rupture.
D'après les résultats présentés dans ce chapitre, nos conclusions sont les suivantes :
Après un recuit sous air, la contrainte à la rupture est plus faible que pour un recuit sous
vide.
Dans le cas du traitement thermique à l'air et sous vide, le plateau de réorientation des
variantes de martensite horizontal apparaît respectivement à partir d'une contrainte d'environ
38.2MPa (σmRO) et 54.2MPa (σm
RO). Mais ce dernier n'apparaît pas lorsque l'échantillon n’a
subi aucun traitement thermique.
Par la suite, nous allons utiliser principalement le traitement thermique sous vide.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
50
II.3.2- Propriétés électriques
II.3.2.1- Introduction
Nous avons mesuré la variation des propriétés électriques lors de l'essai mécanique. Au
cours de ces essais mécaniques, nous avons effectué des mesures de variation de la résistance
électrique (RE) des fils en courant continu. Nous avons effectué les mesures sur chaque type
de fil.
Dans une première partie, nous présenterons les formules que nous utiliserons lors des
essais, puis nous verrons ensuite les résultats obtenus lors d'essais de traction sur les fils
TiNiCu.
II.3.2.2- Procédés expérimentaux et résultats
Le fil a été collé entre deux plaquettes de cuivre (25x10x0.08)mm. Il est ensuite rabattu
sur une plaquette pour pouvoir être relié à l’ohmmètre HP 3458. L'ensemble est entouré de
ruban adhésif pour être isolé des mors. Le montage est schématisé sur la figure II-5.
LoPlaque de cuivre -1
Plaque de cuivre -2NiTinol
R
Force
Figure II-5 : schéma du Montage expérimental pour essai de traction et mesure de résistance
électrique.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
51
Ce montage nous permet de bien fixer le fil afin d'éviter tout glissement. Nous
travaillons avec des longueurs L0 comprises entre 60 et 80mm. Tous les essais sont réalisés
avec une vitesse de déplacement constante de 2mm/min.
Il faut noter que le point d'attache représente un point de concentration de contrainte
évident. Donc, si l'échantillon casse en ce point, l'essai ne peut pas être considéré comme
significatif. Généralement les échantillons cassent soit vers le milieu soit près du mors
mobile.
Pour mesurer la valeur de la résistance électrique nous avons appliqué un courant
constant de 1mA sur nos fils et nous avons utilisé l'appareil HP 3458A qui nous permet de
mesurer la résistance électrique (RE).
Nous allons définir la formule qui permet de calculer la variation de résistance
électrique d’un fil conducteur isotrope soumis à un essai de traction
Lσχσχ
En effet, pour un fil de longueur (L) de rayon (r), de module d’Young(E) et dont le
coefficient de poisson est (ν), la déformation longitudinale (εx), relative à l'application d'une
contrainte axiale (σx ), est donnée par la relation (1), et la déformation radiale εr par la
relation (2)
εx = E
xσ (1) εr = -νεx (2)
Or εx = LL∆
, εr = rr∆
et R = 2rL
πρ où ρ et π sont des constantes.
Donc, RR∆ =
LL∆
-r
r∆2 = εx - 2εr = εx-2(-νεx).
Nous avons finalement obtenu l'équation (3) suivante :
RR∆ = (1+2ν)εx = (1+2ν)
LL∆ (3)
Cette formule ne prend en compte que les variations associées aux modifications
dimensionnelles et les éventuelles modifications de la résistivité ρ sont négligées.
Il peut cependant être intéressant de prendre en compte de telles variations et la formule
3 devient 3’
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
52
RR∆ =
ρρ∆ + (1+2ν)
LL∆ (3’)
Cette expression appelle quelques commentaires dans le cas des alliages à mémoire :
(Airoldi & al 1995). Pour les matériaux traditionnels le coefficient de Poisson est inférieur à
0,5 dans le domaine élastique et égal à 0,5 dans le domaine plastique. Pour un alliage à
mémoire utilisé en mémoire double sens (TWSME) la déformation est essentiellement une
déformation associée à la transformation réversible martensite-austénite. Les coefficients de
Poisson des phases haute et basse température dans le domaine élastique sont respectivement
0,43 et 0,32..Par ailleurs le processus de croissance sélective des variantes à l’origine de
l’effet mémoire se produit très vraisemblablement à volume constant, ce qui suggère une
valeur de ν = 0,5 pour la déformation de transformation. Il est intéressant de prendre en
compte de telles variations. Dans ces conditions l’expression (3’), devient (3’’) :
RR∆ =
ρρ∆ + 2ε (3’’)
La résistance croît quasi linéairement avec la déformation, presque indépendamment de l’état
de départ (pré-écroui brut de réception, recuit sous vide ou à l’air) mais les variations relatives
sont plus importantes dans le cas des états recuits. Pour une déformation de 8% la formule (3)
prévoit dans les trois cas une variation relative de la résistance de l’ordre de 0, 13. Les valeurs
mesurées sont respectivement 0,17 pour l’état brut de réception et 0,22 pour les états recuits
sous vide ou sous air.
Comme l’essentiel de la déformation s’effectue en phase martensitique, les variations de
la résistivité ne peuvent être attribuées qu’à l’orientation des variantes de martensite ou à
l’écrouissage. La comparaison des figures II-6 a, b et c indique que l’orientation des variantes
de martensite qui se produit au plateau des courbes effort-déformation n’a pas apparemment
d’influence notable. Dans ces conditions l’écrouissage est pratiquement seul en cause. Cette
hypothèse est du reste en accord avec la différence constatée entre le comportement du
matériau brut de réception qui s’écroui peu et celui du matériau recuit où la variation relative
de résistance associée à la création de défauts linéaires est évidemment supérieure.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
53
0 2 4 6 8 10
0
200
400
600
800
1000
Déformation(%)
Con
train
te(M
Pa)
(a)
11,5
12,0
12,5
13,0
13,5
14,0
Résistance(O
hm)
0 2 4 6 8 10 12 14
0
200
400
600
800
Déformation(%)
Con
train
te(M
Pa)
(b)
10
11
12
13
14
15
Résistance(O
hm)
0 2 4 6 8 10 12
0
200
400
600
800
1000
Déformation(%)
Con
train
te(M
Pa)
(c)
10
11
12
13
Résistance(O
hm)
Contrainte Résistance électrique
Figure II-6 : variation de la contrainte et de la résistance électrique en fonction de la
déformation a- sans traitement thermique (S.T.T) ; b- T.T à l'air ; c- T.T sous vide
Les figures II-6 a à c représentent les variations de la contrainte et de la RE en fonction
de la déformation sur le fil TiNiCu. Ces résultats sont en ANNEXE 2.
Nous avons conclu qu’il y a un fort écrouissage dans le cas des fils traités
thermiquement contrairement au cas du le fil brut.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
54
II.4- Education pour l’effet mémoire double sens et force de recouvrement Comme nous l’avons rappelé au chapitre précédent, les alliages à mémoire de forme peuvent
être déformés à l’état martensitique de manière permanente. Cette déformation réversible par
chauffage, est due à la réorientation sous contrainte des variantes de martensite. Elle ne
s’accompagne pas (du moins en première approximation) de la création irréversible de défauts
de réseau et permet l’effet de mémoire de forme simple sens. Après traitement thermique, le
fil a mémorisé sa forme simple sens. On peut dire que le fil est stable à haute température. En
revanche, il n'est pas stable à basse température où plusieurs états de déformation sont
possibles en fonction de la fraction volumique de martensite orientée.
En fait, nous souhaitons contrôler de façon réversible la forme d’échantillons hybrides et ceci
implique que les alliages utilisés présentent un effet mémoire double sens. L’existence de cet
effet suppose un échange spontané et réversible entre les formes haute et basse température.
Ce comportement nécessite certains traitements thermomécaniques spéciaux. Nous les
appellerons "éducation".
Il existe plusieurs types de traitements thermomécaniques qui peuvent conduire à l'éducation
des alliages à mémoire de forme double sens (Perkins et Hodgson 1990, White et al. 1995,
Hebda 1995) pour la réalisation de composites hybrides.
Nous nous sommes basés sur les travaux de WHITE et al. car il est plus simple par cette
méthode de procéder à l'éducation du fil. De plus les prédécesseurs (Grando 1995,
Mezzanotti 1998 et 2000) ont bien adapté cette méthode à leurs expérimentations. Donc, c'est
cette manipulation que nous adapterons à notre problème.
Par ailleurs, lorsque nous bridons les fils de TiNiCu soit partiellement soit totalement pendant
un cycle d’effet mémoire ils ne reviennent pas entièrement à leur état initial mais il y a
génération de contraintes liées au changement de structure ; c’est l’origine de la force de
recouvrement.
Nous allons donc éduquer notre fil pour obtenir une stabilisation de la mémoire double sens
et de la force de recouvrement
Nous donnons maintenant les détails du montage et de la procédure d'essai pour traiter
les fils.
La figure II-7 présente le positionnement du fil entre deux barreaux céramiques. Les
quatre étapes nécessaires à l'éducation sont les suivantes :
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
55
1) Les fils d'alliage sont installés autour de deux barreaux de céramique à la
température ambiante. Les fils sont espacés d'environ 2mm.
2) Chaque barreau est posé dans un mors de la machine de traction. Puis nous étirons
le tout de façon à produire une importante déformation (8% , déformation maximum pratique
avant rupture du fil) sous l'état martensitique.
Fil de Ni-Ti-Cu
Barreau de céramique
F F
Figure II-7 : Positionnement du fil TiNiCu entre les deux barreaux céramiques
Les fils ont alors une structure martensitique fortement orientée.
La figure II-8 montre le système qui permet de déterminer la force de recouvrement.
L'ensemble fil barreau est positionné dans une enceinte thermique contenant de l'azote
liquide.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
56
Générateur de courant
Fil de TiNiCu
F
Barreau
Enceinte pourl'azote liquide
Figure II-8 : Montage pour déterminer les forces de recouvrement
3) Le générateur de courant continu est relié aux extrémités du fil que nous chauffons
au-dessus de la température de Af.
4) Pour refroidir, nous coupons le courant. La température devient inférieure à la
température Mf. Puis nous reproduisons plusieurs fois ce cycle en température de T > Af à T <
Mf. Pour obtenir une température de 130°C, nous appliquons au fil un courant d'environ 0,4A.
Les forces de recouvrement des fils de NiTi sont obtenues à partir de la courbe II-9.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
57
0
100
200
300
400
500
600
700
800
900
1000
1100
1200
1300
1400
0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06 0,07 0,08 0,09
Déformation
Con
trai
nte
(MPa
)
Figure II-9 : L'essai de traction pour le pré-étirement avant d'éducation.
Nous avons constaté que la force de recouvrement baisse fortement pendant les
premiers cycles puis tend à se stabiliser. Nous nous sommes limités dans ce travail à 9 cycles
et nous avons mesuré une force de recouvrement de 120MPa.
II.5- Comportement électro-thermomécanique
Dans cette partie de l’étude, nous présentons le comportement mécanique et électrique
de nos alliages en fonction de la contrainte et de la température. Puis dans le plan contrainte
température nous tracerons les limites des domaines d’existence des phases (diagramme de
Clausius –Clapeyron).
II.5.1- Détermination de la variation de résistivité
II.5.1.1- Rôle du suivi en résistivité
Ces manipulations sont primordiales pour la suite de notre étude pour éviter la
transformation austénitique pendant la cuisson et permettre de connaître les contraintes
internes dans le matériau.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
58
Nous avons réalisé trois types d'échantillons respectivement soumis aux traitements
(thermiques et mécaniques) suivants :
Premier échantillon - traitement thermique 425°C /1H.
Deuxième échantillon - traitement thermique 425°C /1H + déformation jusqu'à 8%
dans l'état martensitique.
Troisième échantillon - traitement thermique 425°C /1H + éducation dans les
conditions d’obtention de l’effet mémoire double sens.
Grâce à ces manipulations nous avons pu déterminer les températures de transformation
martensitique directe et inverse.
Les alliages à mémoire de forme obéissent à la loi de Clausius – Clapeyron rappelée au
chapitre précédent car les températures de changement de phase augmentent de façon linéaire
avec la contrainte appliquée.
La connaissance des domaines d’existence des phases dans le plan contrainte
/ température sera d'une double utilité :
En ajustant la contrainte nécessaire, on évite la transformation austénitique des fils
du matériau hybride lors de la cuisson à 120°C.
Les valeurs des températures de changement de phase du fil dans le composite,
déterminées par un test de résistivité, permettent de connaître les contraintes internes dans
le matériau hybride.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
59
II.5.1.2- Technique de mesure et résultats
Nous avons conçu et fabriqué une machine de traction pour caractériser mécaniquement
nos fils (Figure II-10)
Figure II-10 : Schéma de la machine thermomécanique.
1- poulie; 2- fil en nylon; 3- poids; 4- source de courant; 5- mors fixe; 6- mors mobile;
7- tiges de céramiques; 8- fil du NiTiCu; 9- thermocouple; 10- enceinte d'azote liquide;
11- axe de traction en céramique; 12- capteur de force; 13- capteur de déplacement;
14- ordinateurs.
La figure II-10 montre le schéma de principe de la machine. Celle-ci permet de tester le
fil NiTi. Notre machine de traction est basée sur celle utilisée par Araujo (1999), bien qu'elle
soit plus simple.
1
i
RE, T°, t
V,T°
2
3
4
5
6
7
8
10
1213
1411
σ
Ι
T°
σ
C9
1
i
RE, T°, t
V,T°
2
3
4
5
6
7
8
10
1213
1411
σ
Ι
T°
σ
C9
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
60
Le fil de NiTi est positionné entre des mors identiques à ceux utilisés pour les essais de
traction
Un mors mobile est solidaire de l'axe de traction et l'autre fixe est solidaire de la tige
principale. Nous avons appliqué une pré-charge minimale nécessaire pour maintenir le fil de
NiTi tendu dans les mors de la machine. Celle-ci est de 0.016kg, ce qui correspond à environ
14.2MPa. Cette charge (14.2MPa) est comprise dans toutes nos valeurs.
Le thermocouple est positionné à côté du fil et la source de courant est reliée aux
extrémités du fil.
L'ensemble du dispositif est constitué d'une enceinte à double paroi. A l'intérieur il y a
une résistance chauffante et à l'extérieur une circulation d'azote liquide. La combinaison des
deux (chaud et froid) permet une variation de la température de degré en degré.
Pour les essais nous avons augmenté progressivement la température de 1°C/min en
commençant à 10°C pour monter à 140°C. Inversement, nous avons diminué la température
de 1°C/min de 140°C à 10°C.
Nous avons constaté que la température diminue régulièrement jusqu'à 40°C mais à
partir de cette valeur la linéarité n'est pas respectée jusqu'à 10°C.
Nous avons vérifié également la température en trois positions du fil. C'est à dire que
nous avons fixé trois thermocouples à différentes hauteurs, un en haut, un au milieu et un en
bas du fil de NiTi. Finalement, les températures des trois positions sont presque similaires.
Tous les résultats sont enregistrés avec une carte d'acquisition qui permet de déterminer
les températures de transformation de phase. Les figures II-11a, II-11b, II-11c représentent les
résultats obtenus respectivement sur des fils neutres, pré-étirés à 8% et éduqués. Pour
l’établissement du diagramme de Clausius-Clapeyron nous avons appliqué successivement
cinq niveaux de contrainte : 0MPa, 77MPa, 134MPa, 178MPa et 222MPa.
Les résultas de ces manipulations sont regroupés en ANNEXE 3.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
61
0 20 40 60 80 1004,90
4,95
5,00
5,05
5,10
5,15
5,20
Af=74.4°C
As=55.5°C
Ms=54.5°C
Mf=36.7°C
Rés
ista
nce
élec
tris
ue (
Ohm
)
Température (°C)
(a)0 MPa
0 20 40 60 80 100 120 1403,2
3,3
3,4
3,5
3,6
3,7
Af=81.1°C
As=70.9°C
Ms=52.4°C
Mf=41.6°C
Rés
ista
nce
élec
triq
ue (
Ohm
)
Température (°C)
(b) 77.11MPa
0 20 40 60 80 100 120 140
3,7
3,8
3,9
4,0
4,1
4,2
4,3
4,4
4,5
Mf=107.7°C
As=86.9°C
Mf=56.6°C
Ms=76.4°CRés
ista
nce
élec
triq
ue (
Ohm
)
Température (°C)
(c) 133.73MPa
0 20 40 60 80 100 120 140 1603,9
4,0
4,1
4,2
4,3
4,4
4,5
4,6
4,7
4,8
Mf=108.2°C
Mf=89.1°C
Ms=77.2°C
Mf=59.8°C
Rés
ista
nce
élec
triq
ue (
Ohm
)
Température (°C)
(d) 177.68MPa
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
4,0
4,2
4,4
4,6
4,8
5,0
Af=125.7°C
As=102.4°C
Ms=90.1°C
Mf=69.4°C
Rés
ista
nce
élec
triq
ue (
Ohm
)
Température (°C)
(e) 221.88MPa
Figure II-11a : Boucle d'hystérésis RE-T° sur les fils neutres. (a) σ = 0MPa;
Les propriétés rhéologiques de la matrice jouant un rôle essentiel sur le comportement
des composites, en particulier au niveau de l'interface, leurs caractéristiques anélastiques ont
été déterminées par spectrométrie mécanique.
III.1.2.1- Technique expérimentale
III.1.2.1.1- Principe
Cette technique d’analyse permet la caractérisation du comportement viscoélastique d’un
matériau. Elle donne accès à l’évolution du module complexe en fonction de la température
ou de la fréquence et permet l’étude des phénomènes de relaxations moléculaires. De
nombreuses informations peuvent être obtenues à partir de ce type d’essais outre la
détermination des températures de transition mécanique, on peut à partir d’essais isochrones
ou isothermes, construire des courbes maîtresses par application du principe d’équivalence en
température. L’exploitation de ces courbes donne accès à des grandeurs définissant la mobilité
moléculaire au sein du matériau ( énergie d’activation, temps caractéristiques de relaxation...),
informations primordiales à une bonne compréhension des relations structure / propriétés,
donc du comportement macroscopique d’un matériau.
Nous avons utilisé dans notre cas le spectromètre "Micromécanalyseur" commercialisé par la
société METRAVIB. Il s’agit d’un pendule de torsion inversé travaillant en oscillations
forcées hors résonance à basses fréquences. Il donne accès à l’étude du comportement
viscoélastique par analyse automatique des spectres de frottement interne (tan δ) et de module
dynamique complexe (G’) sur une très large gamme de mesure. Ces analyses viscoélastiques
permettent la caractérisation du comportement rhéologique du matériau dans un domaine de
faibles déformations excluant la formation d’endommagements.
Le principe et le schéma de l’appareillage sont donnés en ANNEXE 6.
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
71
III.1.2.1.2- Protocole expérimental
La caractérisation du comportement viscoélastique du matériau composite est réalisée par
mesures isochrones. Ces essais donnent accès à l’évolution des modules réel (G’), et
imaginaire (G’’), à la tangente de l’angle de perte ('"tan
GG
=δ ) représentative de l’énergie
dissipée par frottement (donc de la mobilité moléculaire) en fonction de la température. Ils
permettent la détermination des températures de relaxation mécanique (associées aux
transitions vitreuse et sous-vitreuse(s)). Les essais ont été menés dans la gamme de fréquence
(10-2; 1Hz) et pour des températures variant de -50°C à + 250°C en chauffant.
III.1.2.1.3- Résultats
La Figure III-14 représente les spectres thermomécaniques du composite unidirectionnel
sollicité autour d’un axe perpendiculaire aux fibres, à trois fréquences (rampe de montée en
température :dT/dt = 10K/h). L’analyse des spectres de frottement intérieur met bien en
évidence les phénomènes de relaxation classiquement observés dans le cas des réseaux
époxydes dans la gamme de température étudiée:
• la relaxation sous-vitreuse β’ (ou ω) qui apparaît vers 80° à 1Hz. L’origine
moléculaire de cette relaxation est incertaine et très contreversée. Elle est attribuée soit
à la présence d’eau (Ploen, 1996) soit à des mouvements de segments de chaîne
n’ayant pas réagi (Ochi, 1985), (Cavaillé, 1987). En effet, son amplitude a tendance à
diminuer après un traitement thermique entraînant soit un séchage soit un avancement
de la réaction.
• La relaxation α (≈ 170°C à 1 Hz) associée à la transition vitreuse et due à des
déplacements généralisés de chaînes macromoléculaires. Elle se manifeste par une
chute importante du module de conservation G’, et par une forte amplitude du pic en
tanδ. On note également la présence d'un "épaulement" de ce pic principal (aux
environs de 150°C) qui suggèrent la présence d'entités différentes (relaxant à plus
basse température). Cette singularité est probablement liée à un état de sous-
réticulation du réseau thermodurcissable. Afin de corroborer cette hypothèse, nous
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
72
avons réalisé deux balayages successifs à la fréquence de 1Hz ((dT/dt = 1°K/min.) (Figure
II-15). On constate que sur le spectre associé au second balayage, l’épaulement a disparu,
et que le pic est plus étroit. Ces deux observations nous amènent donc à penser que le
traitement thermique réalisé lors du premier balayage a permis une réticulation
supplémentaire de la matrice. Par ailleurs, l’obtention d’un pic plus étroit suggère une
distribution plus homogène de la taille moyenne entre segments de chaîne. En outre, on
remarque que l'augmentation du taux de réticulation conduit à une diminution de la
relaxation ω (Ochi, 1985), (Cavaillé, 1987).
Remarque :
Plus la fréquence de sollicitation est faible (donc plus le temps d’observation est long), plus la
probabilité de voir les phénomènes de relaxation moléculaire est grand. Par conséquent, une
diminution de la fréquence conduit à une augmentation de l’amplitude des pics de relaxation,
ainsi qu’à leur décalage vers les basses températures.
-50 0 50 100 150 200 250 300
1E9
-50 0 50 100 150 200 250 300
1E9
-50 0 50 100 150 200 250 300
1E9
-50 0 50 100 150 200 250 300
0,01
0,1
-50 0 50 100 150 200 250 300
0,01
0,1
-50 0 50 100 150 200 250 300
0,01
0,1
-50 0 50 100 150 200 250 300
0,01
0,1
-50 0 50 100 150 200 250 300
0,01
0,1
-50 0 50 100 150 200 250 300
0,01
0,1
Log
(G')
Log
(tan
δ)
Température (°C)
0.01Hz 0.1Hz
α
ω
1Hz
Figure II-14 : Spectres thermomécaniques du composite UD 0° (dT/dt = 10°K/h)
Chapitre II : Matériaux et techniques expérimentales
73
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240
0,01
0,1
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240
0,01
0,1
Log
(tan
δ)
second passage
αα
ωω
Température (°C)
premier balayage
Figure II-15 : Mise en évidence par spectrométrie mécanique de l'état de sous-réticulation du
matériau initial (f°=1 Hz ; dT/dt = 1°K/min).
Ces manipulations nous ont permis de déterminer une température maximale de travail. En
fonction des résultats obtenus, nous avons décidé de travailler à une température maximale de
120°C. En effet, au-delà le fluage au niveau fil / matrice qui risque d’intervenir aura un effet
néfaste sur le transfert de charge.
Chapitre III : Mise en œuvre et caractérisation mécanique du matériau composite hybride
74
CHAPITRE III :
Mise en œuvre et caractérisation du matériau composite
Chapitre III : Mise en œuvre et caractérisation mécanique du matériau composite hybride
75
CHAPITRE III : Mise en œuvre et caractérisation mécanique du
matériau composite hybride
I- REALISATION DU COMPOSITE HYBRIDE............................................................................................ 77 I.1- PROCEDE ..................................................................................................................................................... 77
II ETUDE DU MATERIAU COMPOSITE HYBRIDE .................................................................................. 79
III- PROPRIETE DES INTERFACES ............................................................................................................. 81 III.1- INTRODUCTION ......................................................................................................................................... 81 III.2- PRINCIPE DU TEST DE DECHAUSSEMENT (PULL-OUT TEST) : ..................................................................... 82 III.3- PREPARATION DES ECHANTILLONS ET EXPERIMENTATION ........................................................................ 85 III.4- RESULTATS EXPERIMENTAUX ET INTERPRETATIONS ................................................................................. 86 III.5- CONCLUSION............................................................................................................................................. 92
IV- ESSAI D'EVALUATION DE MISE EN ACTION D'UNE POUTRE CANTILEVER ......................... 94 IV.1- CARACTERISTIQUES DES ECHANTILLONS REALISES................................................................................... 94 IV.2- MATERIAUX : PROCEDES D'ELABORATION DES ECHANTILLONS................................................................. 94 IV.3- ESSAIS ET RESULTATS DE LA POUTRE CANTILEVER ................................................................................... 95
IV.3.1- Estimation des température de transition de phase pendant l’essai 100 IV.3.2- Evolution de la flèche : influence des conditions d’élaboration 102 IV.3.3- Evolution de la flèche maximale avec le cyclage thermique 104
Figure III-23 : Evolution de la flèche en fonction de la température dans le cas de matériau D.
Chapitre III : Mise en œuvre et caractérisation mécanique du matériau composite hybride
105
Echantillon A, B, C et D pour 4ème cycle
-0,1
0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0 20 40 60 80 100 120 140
Température (°C)
Flèc
he (m
m) Echantillon A
Echantillon BEchantillon CEchantillon D
ABC
D
Figure III-24 : Evolution de la flèche en fonction de la température pour les différents
systèmes au quatrième cycle
Unité : mm
CYCLE 1 CYCLE 2 CYCLE 3 CYCLE4
Echantillon A 0.552 0.479 0.432 0.427
Echantillon B 0.525 0.496 0.411 0.389
Echantillon C 0.465 0.399 0.373 0.368
Echantillon D 0.634 0.519 0.46 0.457
Tableau III-6 : Valeurs de la flèche pour les essais de poutre cantilever
IV.4- Conclusion
Les comportements des matériaux A, B, C et D sont globalement parallèles et les
déformations maximales obtenues dépendent peu des conditions thermomécaniques même si
l'échantillon D (éducation + contrainte de 500 MPa) présente la flèche maximale la plus
importante.
Chapitre III : Mise en œuvre et caractérisation mécanique du matériau composite hybride
106
Dans le cas de l'échantillon A, le fil a été pré-étiré à 8% et cuit sans contrainte. Nous
avons observé une évolution de flèche dans la même direction (positive) que celle donnée par
les autres échantillons. Dans ce cas nous sommes en principe à l’origine dans une situation
d'effet à mémoire de forme simple (EMFS); mais l’expérience montre qu’un effet
d’autoéducation permet une déformation réversible pour les activations suivantes.
L'échantillon B a été réalisé en maintenant les fils de NiTi sous contrainte pendant la
cuisson afin d'empêcher le déclenchement de la transformation austénitique. Concernant
l'évolution de la flèche sur l'éprouvette B qui satisfait dès sa fabrication à une situation d'effet
mémoire double sens assisté (EMSA), nous pouvons constater que nous avons obtenu des
résultats identiques aux précédents.
Les résultats obtenus sur les échantillons C et D ne sont pas étonnants dans la mesure où
ils ont été élaborés pour présenter un effet mémoire de forme double sens.
Par ailleurs, la flèche maximale obtenue dans le cas D est supérieure à celle observée sur
l’échantillon C pour les raisons rappelées au paragraphe précédent. Dans le cas de
l'échantillon D les fils ont été maintenus sous contrainte pendant la cuisson .et la résistance au
cisaillement de l’interface est maximale (tableau III-3). Il est probable que les forces de
recouvrement sont mieux transmises à la matrice.
Dans le cas D, nous avons fait un essai d'activation rapide, on observe au début de
l’évolution une évolution de la flèche dans le sens négatif causée par la dilatation de la
martensite avant la température As.
Nous avons constaté que les valeurs de flèches des échantillons A, B, C, et D ont
diminué petit à petit au cours des cyclages successifs. Ce phénomène a pour conséquence une
perte substantielle de l'effet mémoire global du composite hybride.
Il est probable que l'interface fil d’alliage - matrice s’est dégradé au cours des cyclages,
et ceci a pour conséquence une décroissance du transfert de charge du fil à la matrice
organique renforcée de fibres de verre.
Chapitre IV : Modélisation et interprétation des résultats
107
CHAPITRE IV :
Modélisation et interprétation des résultats
CHAPITRE IV :
Modélisation et interprétation des résultats
Chapitre IV : Modélisation et interprétation des résultats
108
Chapitre IV :Modélisation et interprétation des résultats
I Rappels des modèles ....................................................................................................................................................... 109I-1 Modèle de Tanaka (1986).........................................................................................................................................109I-2 Modèle de Liang et Rogers (1990)..........................................................................................................................111I-3 Modèle de Brinson (1993, 1996).............................................................................................................................112I-4 Modèles divers ...........................................................................................................................................................113
II Application du modèle phénoménologique unidirectionnel............................................................................... 113II-1 Analyse mécanique du composite hybride assimilé à un bilame .....................................................................114II-2 Application du modèle phénoménologique et discussion des résultats ..........................................................116
III Conclusion...................................................................................................................................................................... 123
Chapitre IV : Modélisation et interprétation des résultats
109
Chapitre IV :Modélisation et interprétation des résultats
La prévision du comportement des alliages à mémoire implique l’établissement de modèles
décrivant l’état du matériau à partir des trois variables essentielles : la contrainte, la
déformation et la température. Nous rappellerons brièvement ici quelques-uns uns parmi les
plus simples des très nombreux modèles qui ont été proposés (et qui continuent de l’être)
décrivant raisonnablement ce comportement.
Nous développerons les modèles phénoménologiques unidimensionnels basés sur l’hypothèse
que l’état du matériau ne dépend que de l’état initial et de l’état final et que les paramètres qui
entrent dans le modèle sont expérimentalement accessibles. Ces modèles ignorent en
particulier l’effet, de la vitesse de sollicitation dont on a pu montrer cependant qu’elle n’était
pas toujours négligeable. (H.. Prahlad & I. Chopra 2000), mais nous montrerons qu’ils sont
suffisants pour décrire nos résultats.
I Rappels des modèles
I-1 Modèle de Tanaka (1986)
Tanaka a, le premier, proposé de représenter le comportement thermomécanique des alliages à
mémoire de forme pendant les transformations de phase directe austénite-martensite et inverse
martensite-austénite par la relation unidimensionnelle suivante :
))(()TT())((E 0000 ξ−ξξΩ+−Θ+ε−εξ=σ−σ (IV-1)
où l’indice 0 se rapporte à l’état initial. ξ est la fraction volumique de martensite ; E est le
module d’élasticité, Θ le coefficient thermoélastique et Ω une constante appelée "coefficient
de transformation". On suppose que le module du composite formé par le mélange des deux
phases austénite et martensite est donné par une loi des mélanges :
Figure III-19 : évolution de la flèche et de la température de la poutre cantilever en fonction
du temps, évolution de la température de transformation de phase dans le cas du matériau C
(activation lente).
0 20 40 60 80 100 120 140
70
71
72
73
74
75
Af=67°C
As=37°C
Ms=56°C
Mf=28°C
Rés
ista
nce
élec
rique
(Ohm
)
Température (°C)
(d)
Thèse soutenue devant l’Ecole Centrale de LYON Young Kuk CHOI Date de soutenance : 24 Juin 2002
Thèse de doctorat : Matériaux Polymères et Composites N° d’ordre : 2002-14
Titre : Réalisation et caractérisation de composites hybrides verre/époxy/Ni-Ti adaptatifs
Résumé : L’évolution des composites à matrice organique et renfort fibreux vers des matériaux actifs
peut être réalisée par l’introduction d’alliage à mémoire de forme. Dans le cadre de cette thèse, nous avons réalisé un matériau "adaptable" élaboré à partir d’un composite à matrice époxyde renforcée par des fibres de verre par insertion de fil de Ni-Ti.
Dans un premier temps, l’étude du comportement électro-thermomécanique de l’alliage a permis de tracer les diagrammes de Clausius-Clapeyron. A partir de ces essais, nous avons constaté que l’application d’une contrainte de 500MPa au fil d’alliage recuit à 425°C, pré-étiré à 8% ou éduqué, permet la mis en œuvre du composite à 120°C en évitant la transformation martensite-austénite.
Il n’est pas possible de contrôler la forme globale du composite et par conséquent d’utiliser l'alliage à mémoire de forme comme actionneur si la résistance au cisaillement à l’interface fibre/matrice est plus faible que la contrainte de cisaillement à l’interface. Il est donc absolument indispensable d’assurer la cohésion de l’interface fibre-matrice.
La qualité de l'interface entre l’alliage à mémoire de forme et la matrice a été déterminée au moyen du test de pull-out pour différents états structuraux du Ni-Ti. Les essais de pull-out nous ont montré que si le fil est déformé, l'interface entre le fil de Ni-Ti et la résine possède une bonne résistance. En effet, la déformation de la martensite destinée à promouvoir l’effet mémoire ou l’éducation, crée une rugosité superficielle susceptible d’assurer un bon accrochage entre les fils d’alliage à mémoire et la matrice et de transmettre les forces de recouvrement au composite verre-époxy.
La méthode de la poutre encastrée libre a été utilisée pour évaluer l'effet d'activation provoqué par l'effet Joule des fils de SMA incorporés dans le composite. Les résultats obtenus montrent que le maximum de flexion est atteint lorsque les fils sont maintenus sous contrainte pendant la cuisson avec la création d’un effet mémoire de forme double sens (EMFDS). Enfin, le modèle de Liang & Rogers a permis d’approcher le comportement du composite hybride. Son usage met en évidence l'effet de la vitesse de transformation sur les contraintes de déformation du matériau global. Ce phénomène semble ne pas avoir été évoqué à ce jour dans la littérature. Cet effet de la vitesse est probablement lié à un phénomène de relaxation de contrainte au niveau du fil de l’interface composite alliage. Mots clés: AMF, Transformation martensitique, Composites hybrides adaptables, Diagramme de
Clausius-Clapeyron, Test de pull-out, EMFDS (TWSME)
Laboratoire de Recherche : Ingénièrie et Fonctionnalisation des surfaces
UMR 5621 Ecole Centrale de LYON -BP 163- 69131 ECULLY cedex
Directeur de recherche : Michelle SALVIA
Composition du jury : Suzanne DEGALLAIX-MOREUIL, EC Lille Rapporteur