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Quart-de-poilageHuit heures du matin, réveil. Joie, fenêtre.La
basilique est rose. Robe de chambre.Escalier, cuisine, les deux
chattes sur lesmollets. France Inter, informations.Musique, Terry
Riley, In C, tonique, répé-titive, lancinante, écran parfait pour
lais-ser la place au vide intérieur. Café, yaourt,tartines.
Remonter en courant, les chattessur les talons, dans l’odeur de
tapis et debois comme une maison d’enfance.
Bureau, ordinateur. Musique bête du démar-rage. Relecture des
textes de la veille. Neufheures au clocher de la basilique.
Silence.Relire. Avancer. Relire mille fois, avancer. Etencore et
encore. Avancer, biffer. Relire pourlisser, reprendre. Rectifier,
avancer. Debout,marcher vers la chambre, respirer, revenirau
bureau. Onze heures, deuxième café.Descendre, remonter. Relire.
Avancer. Prévoirune sortie sur les bords de la rivière pour direla
scène à haute voix en marchant. Midi etdemi, épuisement. Forcer.
Chercher loin, loin.Pousser, pousser. Les gestes s’engluent,
l’écranvacille. Insister, insister encore. Relire, avan-cer,
chercher profond, extirper. Le blanc enva-hit la tête. Aimer le
blanc, entendre sa force,prendre ce qu’il donne, nue, l’essentiel
àportée de doigts. Treize heures trente, jeterle gant. Faire couler
un bain dans l’immensebaignoire, allumer des bougies, verser du
pro-duit moussant, choisir un livre. Détente sousle vasistas où
pointe le clocher de la basilique.Descendre déjeuner en compagnie
deschattes affamées. Couper des légumes, cuirele frichti, chanter,
radio, fenêtre, potins dujournal local, encore un meurtre. Monter
fairela sieste. Quinze heures, sortie, balade, papo-tage de
voisinage, courses dans la rue, petittour à la rivière. Seize ou
dix-sept heures,retour à l’ordinateur. Relecture,
corrections,biffures, ajouts, quart-de-poilage. Avancer,avancer.
Dix-neuf heures trente, c’est le soir.Apéro, téléphone, dîner, film
à la télé. Vingt-deux heures, ordinateur. Relire. Corriger.Laisser
infuser. Vingt-trois heures, un livre aulit, les chattes sur les
fauteuils de la chambre.Semaine après semaine. Et vous, quelle
estvotre organisation du bonheur ? FlorenceDelaporte
n°254 - septembre 2010le mensuel du livre en Rhône-Alpes
en + + + + + + + + +Utopia, le guide culturel Rhône-Alpeslancé
par le regretté Lucien Mazenod,a présenté son édition 2010-2011
audébut de l’été, à l’initiative de GrégoryMazenod et Jérôme
Grange. Plus dequatre cents pages et un tour d’hori-zon du
foisonnement culturel dans larégion : spectacle vivant, arts
plastiques,musique, patrimoine… mais aussi uncahier littéraire avec
des textes de LionelBourg, Patrick Dubost, Patrick Laupin,Michel
Ménaché, Thierry Renard…www.guide-utopia.fr
> www.arald.org
les
écri
vain
s à
leu
r p
lace S’organiser !
Devenues incontournables dans la vielittéraire, les
manifestations sont tou-jours plus nombreuses dans les régionset
bénéficient largement du soutiendes pouvoirs publics. Soucieuses
depermettre à ces acteurs de se structureret de maintenir un
certain niveaud’exigence qualitative, les centresrégionaux du livre
(et en premier lieul’ARALD, dès 2001) ont proposé deschartes de
missions de service public,qui rappellent à ces manifestationsleurs
responsabilités artistiques, profes-sionnelles, territoriales et
sociales.Aujourd’hui, l’ARALD et l’ARL PACApublient Comment
organiser unemanifestation littéraire ?, un guidepratique à l’usage
des organisateurs,« qui vise à aider la construction
oul’évolution d’un projet, en apportant deséléments de réflexion et
d’informationutiles à son inscription dans un
réseauprofessionnel. » De quoi se poser lesbonnes questions,
pour mieux s’organiser.L. B.
3e prix littéraire deslycéens et apprentisrhônalpinsOn connaît
la sélection des ouvragesen lice pour ce prix 2010-2011 de laRégion
Rhône-Alpes : dans la catégo-rie « romans », Zola
Jackson, de Gilles
Leroy (Mercure de France), Jésus et Tito,de Velibor Colic
(Gaïa), Sébastien, de Jean-
Pierre Spilmont (La Fosse aux ours) et LesTreize Desserts, de
Camille Bordas (JoëlleLosfeld) ; dans la catégorie « bande
dessi-née » : L’Homme Bonsaï, de Fred Bernard(Delcourt), La
Maison d’Ether, de ChristianDurieux et Denis Larue (Futuropolis),
Hosni,de Maximilien Le Roy (La Boîte à bulles) etHélas, de Rudy
Spiessert et Hervé Bourhis(Dupuis). Les élèves de 26 classes
serontamenés à se prononcer. Après lecture…
ren
dez
-vo
us
Premier album de bande dessinée de Malik Deshors, L’Été de Luca
(La Boîteà bulles) propose une singulière rêverie autour des
méduses (lire p.9).
images/p.8-9Dans tous les sensLivres d’images en tous genres
avec Philippe Poncet, Sylvie Fontaine,Malik Deshors, Delphine
Perret,Agnès de Lestrade et Anaïs Barnabé.
essai/p.11Le crime et sa mémoireRetour sur un ouvrage de Tal
Bruttmann, aux P.U.G,« Aryanisation » économique et
spoliations en Isère (1940-1944), et sur un livre des Publications
del’université de Saint-Étienne : Exposer les mémoires et
l’histoireBerlin – Ravensbrück.
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rentréelittéraire/p.2-4Le grand bainRomans, premiers
romans,récits… Une présentation de la rentrée littéraire des
auteurs et des éditeurs de Rhône-Alpes.
-
2
Au commencementde ce texte compact,il y a une femme. Elleest
bibliothécaire etarrive comme chaquematin dans son sous-sol, à la
fois sonroyaume et son enfer. Or ce jour-là,elle découvre un
lecteur qui s’estlaissé enfermer pour la nuit. Ellehouspille
l’homme, prend à témoin,offre un café, et avec ce face-à-facela
parole peut s’élancer. « Ce texte »,raconte Sophie Divry,
« c’est en effetd’abord une voix, un monologue quej’avais
pensé pour le théâtre, mêmesi finalement je l’ai retravaillé
avecl’éditeur pour lui donner cette formeplus romanesque ». De
l’intrus, onsaura peu, si ce n’est qu’il traîneordinairement dans
les lieux. Pourl’écrivain, « il reste assez indéterminé,il a
une fonction de miroir : ce sontdeux folies qui se reflètent, dans
ceconcentré d’humanité qu’est labibliothèque. »La
bibliothécaire, en revanche, sedévoile avec amertume et colère
:« Classer, ranger, ne pas déranger,c’est toute ma vie ».
Elle déverse sabile de « taylorisée de la culture »
La Côte 400, premier court romande Sophie Divry donne à vivre
leconcentré d’humanité qu’est labibliothèque. Rencontre
avecl’écrivain et ses personnages.
Attention, ce livre n’est pas à mettreentre les mains d’une
bibliothécairedéprimée ! Elle pourrait y retrouvermille détails lui
rappelant sa condi-tion : l’ordre et la hiérarchie, les que-relles
catégorielles mesquines, leslocaux impossibles, les lecteurs
for-cément coupables. En revanche,avec un minimum de joie de
vivre,difficile de ne pas rire à la lecture decette longue
nouvelle. Rire d’abord,parce que le milieu y est croqué defaçon
délectable, avec force détailsvéridiques. On croise au passage
lesfigures de Melvil Dewey et celled’Eugène Morel (pionnier
méconnude la lecture publique), dans cettelente montée de la
méthode et del’organisation. On apprend aussi quela bibliothèque
est à la fois un hautlieu de drague et un refuge pourmiséreux. «
Tant mieux, souligneavec malice la jeune auteur, si enplus on
apprend quelque chose… »Rire d’abord, mais pas seulement.
rentrée littéraire
Saint-Ours, la narratrice. Deuxhommes, deux femmes, deux
couplesqui se font et se défont, se formentpuis se reforment dans
des confi-gurations changeantes que leurimposent les pas de danse
de leurvie rythmée par le tango. Car cettedanse est la véritable
héroïne duroman de Caroline de Mulder : unedrogue
justement.« Pour tous ceux-là, pour nous tous,le tango est
ersatz plutôt que prélude.Nous y jetons nos corps perdus etil
devient nos jours et nos nuits.Nous couchons dans les milongasles
yeux grands ouverts. Nous y pas-sons nos nuits d’amour et
d’insom-nie. Nous y passons, la nuit, les joursque nous ne vivons
plus. Nous quin’avions le temps de rien. Nous quele temps pressait.
Nous et notre viequi attend. Notre vie attendra. »
Caroline de Mulder : tragédie dansante
On achèvebien le tangoPremier roman singulier, Egotango est une
véritable descenteaux enfers de cette danse si par-ticulière née
dans les abattoirsde Buenos Aires à la fin du XIXe
siècle. Vision d’une passion dévo-rante qui, sous la plume
deCaroline de Mulder, prend laforme d’une sublime déchéance.
La scène ressemblerait à une vieillesalle de bal sordide au
plancherdéfraîchi, un lieu connu des seulsinitiés et que rien ne
signaleraitau monde extérieur. Au centre,quatre personnages : Lou,
Ezequiel,
Ici, le tango fait mal. Il est addiction etviolence, figure
rythmée des pas-sions humaines, gestuelle du sexe.Véritablement
possédée, la narratricese dépossède peu à peu d’elle-mêmecomme de
tous les signes qui font lavie sociale. Ce tango-là est exclusif.
Lespersonnages courent d’une nuit à uneautre, se perdent dans les
regardsattendus ou espérés, mènent desvies de fantômes. Au point
queLou disparaît. A-t-elle décidé defuir ? Est-elle morte sous
lescoups de Saint-Ours ? Ou biena-t-elle été engloutie par
cettedanse, qui captive autant qu’elleronge ses adeptes fanatiques
?« L’histoire du tango est unehistoire de violence. Toutes ces
heures où ton bras de ferdétient mon bras qui résiste mal.Où tu
broies, je cède. Où tu
avances, je recule. Tu me contiens,je me défais. » La
phrase courte etsaccadée de Caroline de Muldertient cette rythmique
obsédante,enferme dans une danse étourdis-sante les mouvements
d’harmonieet de contrainte qui rapprochentet éloignent les
danseurs. Le lec-
teur suit cespas commeautant dec o r p s - à -corps. L. B.
Caroline deMulderEgo tangoChamp Vallon224 p., 16 €ISBN
978-2.87673-533-0
contre « les intellos du rez-de-chaussée »,
« les duchesses ». Ellelaisse entrevoir une existence
pro-vinciale étriquée, surtout depuisqu’un certain Arthur, pour qui
elleavait quitté Paris, lui a préféré« une ingénieure de la
centralenucléaire ». Dans l’espoir vain d’atteindre son «
rayon préféré,l’histoire », cette femme se mor-fond et s’oublie
dans l’amour desvrais livres, et dans la haine deceux qui sont
devenus « juste desproduits de consommation ». Ellerévèle
peu à peu sa souffrance, le« combat homérique » contre
lasolitude. La nuque de Martin, cetrop beau et trop jeune
lecteur.Martin qui ne la regardera jamais,qui peut-être un jour ne
viendraplus. « Oui, à quoi bon Simone deBeauvoir et Eugène
Morel, si Martinne vient pas ? ». Heureusement, on ari avant.
Danielle Maurel
Sophie DivryLa Cote 400Les Allusifs96 p., 11 €ISBN
978-2-923682-13-6
Tout dans la têteQue se passe-t-il dans la tête decelui qui se
découvre gagnantd’un loto à 6 millions d’euros ?Dans celle de Serge
Ledoux, c’est
comme une déflagration silencieuse.Le temps s’étire étrangement
etl’homme revisite ses failles, sesratages, le peu d’élan qui lui
reste. Lerécit circule aussi dans la tête desautres – collègue de
travail traumatisépar une blessure d’enfance, anciennecompagne,
femme de ménage de samère… Et c’est grâce à ces évocationsde
petites vies brûlées ou grisâtres quel’écriture souple de Mano
Gentil sefaufile dans la tête du lecteur. D. M.
Mano GentilDans la têtedes autresCalmann-Lévy190 p., 16 €ISBN
978-2-70214-120-5
par
uti
on
Sophie Divry : un premier roman dans le monde du livre
La solitude de labibliothécaire du fonds
-
L’Italie si j’y suis… Dans votre dernierroman, on sent à quel
point ce pays consti-tue votre « ailleurs ». De quelle
manièreest-ce lié à vos origines et quelle place cela
prend-il dans votre écriture ?Il est très juste de dire que
l’Italie est un « ailleurs ».Elle est le décor idéal et
le point de départ de chaquenouvelle histoire. Bien sûr, elle est
liée à mon histoirefamiliale. Je pense avoir ressenti enfant ce
qu’on ne nom-mait pas, à savoir, le déchirement vécu par une
familledu sud de l’Italie qui a dû quitter son pays, « la
nostraterra », comme on le dit là-bas, en roulant fortementles
« r », pour se retrouver dans un paysage industriel
del’Est de la France. Mon père nous racontait son Italie à lafin
des repas et je l’imaginais sans peine. Je rêvais, toutcomme lui,
d’y retourner, même si on sait bien qu’aprèsl’exil, on ne rentre
pas. Il faut être fort et humble pourretrouver cette terre.
Et vous avez fini par la retrouver…En grandissant, j’ai voulu
m’éloigner de l’Italie de monpère et construire en même temps la
mienne, parce que,dans le fond, je ne pouvais pas la quitter
complètement.
C’est comme choisir de ne plus vivre dans la mai-son de ses
parents mais en bâtir une nouvelledans le fond du jardin. Dans le
cas de L’Italie sij’y suis, j’ai voulu me confronter à cette
tradi-tion littéraire du « Voyage en Italie ». Je me
suisdemandé comment je pouvais raconter ce paysque tout le monde
connaît aujourd’hui, dontnous avons tous des clichés en tête. Il
m’a sem-blé que la seule façon de la raconter serait de l’as-socier
à un voyage sentimental, à la manière deRossellini dans son film
Voyage en Italie, c’est-à-dire un prétexte, une toile, où se
dessinent lesinterrogations d’un couple qui dérive. Parce
quevoyager, c’est cela, dans le fond, partir à la dérive.
Êtes-vous d’accord pour dire que votre Italie est uneItalie
rêvée, presque fantasmée, qui semble avoirtoutes les vertus ou
presque ? Un lieu où l’onpeut à la fois se retrouver et s’évader,
fuir unevie et en recommencer une autre…Elle est une patrie
imaginaire, une patrie idéale où toutest possible. Paradoxalement,
elle s’est avérée bien réelleà plusieurs reprises parce que j’avais
choisi d’y vivre pourpouvoir écrire. Les premières lignes du
Colosse d’argile,je les ai écrites à Rome après trois années de
recherches,de balbutiements en France. Palermo solo a été
entiè-rement écrit dans les Pouilles, où je me suis reconstruitune
année entière après une séparation. Le dernier tiersde L’Italie si
j’y suis, je l’ai écrit l’été dernier dans les envi-rons de Lucca,
où je me suis isolé. L’Italie est un refuge.Elle est le lieu du
travail. Elle est une bulle que jecompose de toutes pièces.
Est-ce que L’Italie si j’y suis est un roman où toutest
possible, y compris la naïveté des sentiments,une sorte de
roman heureux ?Je ne pense pas que ce soit juste de parler de
naïvetédes sentiments. Il y a beaucoup de désillusion chezSandro
dans une bonne partie du roman. Il estmélancolique. Il est pénible
à supporter parcequ’il met sa douleur au centre de tout et c’estson
jeune fils qui le recadre. Enfin, si le romanest heureux, c’est
grâce à l’intervention deDolores, cet ouragan dans leur vie. C’est
elle quiprend la responsabilité du récit, qui l’embarqueavec toute
sa fougue et son naturel jusque chezelle, à Stromboli. Elle est
imprévisible. Elle laisseles deux personnages sans voix et ne leur
cèdeplus la parole. Elle les soûle et nous soûle. Elle
estirrésistible et c’est elle qui est dans le vrai.
Proposrecueillis par L. B.
3
Mon voyage en ItalieDans son dernier roman, L’Italie si j’y
suis,Philippe Fusaro retrouve le pays où, pourlui, tout est
possible. Un très beau voyagesentimental, de Turin à Stromboli.
Sandro porte des mocassins blancs, fume desMuratti et conduit
une Alfa Romeo GiulettaSpider noire. Alors que son couple est en
per-dition, il entreprend « son » voyage en
Italie,accompagné de Marino, son jeune fils, qui nequitte jamais
son costume orange de cosmo-naute, modèle Gagarine. L’expédition
s’emballele temps d’un été : Turin, Modène, Ferrare,Trieste,
jusqu’à Bari et l’embarquement pourl’île de Stromboli.Retrouver des
traces, fuir une histoire, découvrir lapossibilité d’une autre…, à
force de prendre dela distance, Sandro parvient à quitter ses
oripeauxd’homme blessé : « Il m’aura fallu tout cela pour
merendre compte de mon impuissance face à l’échecamoureux. Il
m’aura fallu toutcela pour comprendre quetout est fini entre nous.
»Empli d’une douce mélanco-lie, ce voyage sentimentals’achève à
Stromboli en tech-nicolor, sous le signe du vol-can et des films de
Rossellini.L. B.
Philippe FusaroL’Italie si j’y suisLa Fosse aux ours176 p., 17
€ISBN 978-2-35707-013-4
Yves Bichet a décidément le don demettre en scène des
rencontresamoureuses dans des lieux singu-liers. Dans Le Porteur
d’ombre,Léandra et Jamil se découvraientdans les airs, lors d’un
vol en para-pente. Dans son nouveau roman,c’est dans une pizzeria
miteuse, enlisière du cimetière du Père-Lachaiseoù il est venu
récupérer l’urnecontenant les cendres de son père,que Bertrand, le
narrateur, rencontrela mystérieuse Resplandy. Leur brèveaventure,
mêlée à un geste inexpli-cable de l’amante éphémère, va
plonger Bertrand, profes-seur d’arts plastiques à lavie bien
rangée, dans unprofond chaos intérieur. Caren plus de la mort du
père,de l’infidélité consomméeet de la disparition subite de sa
maî-tresse, Bertrand voit sa femme lequitter et sa mère débarquer
dansl’appartement familial, tandis qu’ilse lance dans la création
d’un pre-mier album jeunesse, intituléGinette Apocalypse…Tout cela
ne pourrait être qu’unebanale histoire de crise de la qua-
rantaine, si Yves Bichet n’avait à cepoint l’art du contrepied,
de lafausse piste et du trompe-l’œil. Carce qu’il met en scène, ce
sontmoins les hésitations d’un hommeau mitan de sa vie, partagé
entre lafascination pour une amante éphé-mère, le désir pour une
amie dela famille et l’amour qu’il voue à sa
entr
etie
n
femme, qu’une profonde réflexionsur la recherche des racines,
lesenjeux du mensonge, de la dissimu-lation et des secrets de
famille.En replongeant dans l’histoirecachée de son père, banal
employéde la SNCF au passé de héros, pèreet mari modèle menant en
réalitéune double vie, Bertrand apprend àses dépens l’ambivalence
de chacun,de chaque chose – chaque senti-ment, chaque histoire,
chaque choixde vie – qui recèle un double fond etune infinité de
vertiges existentiels.Avec son sens habituel du décalagepoétique
(l’ombre de René Charplane sur ces pages), Yves Bichetdonne un
roman sensible sur lesdésillusions de l’homme mûr, lestroubles de
l’identité et la quête desorigines, tout en disant avec force
lesélans du corps, les manifestations dudésir et la fragilité des
sentiments.Yann Nicol
Yves Bichet : un roman de l’ambivalence
Le passé devant soiAprès cinq ans d’absence, Yves Bichet nous
revient avecResplandy, un roman sur les mystères amoureux, les
énigmesdu désir et les secrets de famille à travers la crise du
mitande la vie que traverse son héros, Bertrand, à la mort de son
père.
La patrie imaginaire de Philippe Fusaro
rentrée littéraireYves BichetResplandySeuil240 p., 17 €ISBN
978-2-02102-225-4
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4
rentrée littéraire Lionel Salaün : un premier romandans le sud
américain
RetourgagnantLe Retour de Jim Lamar, pre-mier roman de Lionel
Salaün,se construit dans la touffeur dusud des États-Unis. Une
histoirede guerre, de terre et de famille.
Steinbeck, Caldwell, Twain… LionelSalaün n’a pas à rougir de ces
troisécrivains américains qu’il cite commeréférences (lire
l’entretien ci-contre).Le sud des États-Unis qu’il décrit dansLe
Retour de Jim Lamar est bien celuide ces grands romanciers.
Poisseux,accablé en permanence d’unechaleur lourde, sauf aux
raresmoments où éclatent des oragesd’une violence terrible. C’est
dansce décor étouffant, à peine rafraî-chi par le Mississipi
boueux, quevont se rencontrer les deux person-nages principaux du
roman.Le premier est un homme encorejeune, de retour dans son pays
natalaprès une longue et mystérieuseabsence. Des années passées
aucœur de la guerre du Viêt-Nam,d’autres dans une errance dont
nulne sait rien. Ses parents sont mortset la ferme familiale, qu’il
tient àreprendre, est l’objet de la convoi-tise des voisins.
L’homme n’est pasle bienvenu, d’autant moins qu’ils’isole peu à peu
dans une secrètesolitude. Cet isolement sera brisépar le deuxième
personnageessentiel du roman, un adolescentsuffisamment hardi pour
s’extraired’une famille laborieuse envahie parun oncle alcoolique
et malsain.L’adolescent et l’adulte vont apprendreà se connaître.
Leurs longues conver-sations restituent le parcours del’ancien
soldat et ancrent une ami-tié inattendue et poignante dontchacun
ressortira transformé. N. B.
des clients, des boîtes de nuitimprobables à la chasse au
pigeonqui pourra être tranquillementplumé. Sexe, drogue et fantasme
derock’n roll…, telle est la vie d’Alan,qui rêve du Canada et d’une
autrevie, mais s’enlise dans sa médiocritéet son mensonge. Sa
rencontreamoureuse avec Hibou, ancientueur solitaire et perdu, ne
changerarien à son tragique destin. Un pre-mier roman cruel, qui
met en scèneune jungle urbaine dans laquelle lesplus faibles ne
résistent pas. L. B.
Un matin que son père est deretour à la maison après uneénième
fuite loin de sa femmeet du domicile familial, le jeuneWilly append
que ses parents ontdécidé de prendre du bon tempsdans un mobile
home du côté duPilat. « Après cette conversation,Willy Vial
prit plusieurs résolu-tions. Désormais, il s’appelleraitAlan. Dès
le lendemain ; il montadans un train en direction de lagrande
ville. Là-bas, il ne trouvapas de travail. Il n’en chercha pas
tel-lement non plus. Mais les nuits dela grande ville étaient si
magné-tiques, et Alan si impressionnable.Il préféra errer de
fast-foods enpubs, de mecs en mecs, de taudisen squats. À ce rythme
il eut rapi-dement vingt ans. »Moi comme les chiens, premierroman
de Sophie di Ricci, est lancé.La suite est une longue errance
quiconduit le jeune homme de sachambre d’hôtel minable au
trottoir,où sa beauté attire la convoitise
Trois questions à Lionel Salaün
Vous arrivez sur la scène littéraire à plus de cin-quante ans,
quel a été votre parcours ?C’est assez simple, j’ai commencé à
écrire jeune. Maispendant plus de vingt ans, j’ai écrit sans être
publié.J’ai une belle collection de lettres de refus ! J’aienchaîné
divers petits boulots, pêcheur de sardinesà Sète, par exemple, mais
sans jamais m’investir réel-lement dans ces emplois, qui restaient
alimentaires.En fait, j’ai toujours considéré l’écriture comme
monactivité principale. Et puis, j’ai tout le temps eu du malavec
l’autorité, les hiérarchies, depuis l’école. Mon par-cours doit
aussi découler de cette caractéristique.
Comment vous est venue l’idée de ce livre ?Je suis depuis
longtemps passionné par le trauma-tisme qui hante les hommes ayant
connu la guerre.Ce sont d’ailleurs les séquelles de la guerre qui
m’in-téressent plus que la guerre elle-même. De là est néel’idée de
l’un des deux personnages principaux demon livre : c’est un
Américain, vétéran du Viêt-Nam.Parce que la guerre du Viêt-Nam a
été fortementmédiatisée, parce que Apocalypse Now est un film
quim’a marqué et que j’ai lu beaucoup de ce qui a parusur cette
guerre. Mais il pourrait tout aussi bien avoirfait l’Indochine ou
pris part à un autre conflit. L’autrepersonnage est venu ensuite,
comme pour le faireparler. On m’a fait la remarque, à juste titre,
que le
roman décrivait un doubleapprentissage : celui del’adolescent
qui écoute l’an-cien soldat, et celui de cethomme qui s’est fait
dansla violence de la guerre,dans l’arrachement au réel.
On a en tout cas l’impres-sion de lire un roman écritpar un
Américain…
J’ai été formé par Twain, Steinbeck, Caldwell. Je mesuis immergé
dans ce milieu rural du sud des États-Unis, de l’Amérique profonde.
J’étais là-bas, j’étais surles lieux. Mais par mon imaginaire
seulement : je n’yai jamais été « physiquement ». J’ai
l’impression quec’est une matière littéraire extraordinaire dans
lamesure où tout peut arriver, et de manière très vio-lente. Les
gens que je décris sont différents, et c’est
à leur réalité brute que jevoulais me confronter.Propos
recueillis par NicolasBlondeau
Lionel SalaünLe Retour de Jim LamarLiana Levi240 p., 17
€ISBN 978-2-86746-550-5
Sophie di Ricci : un premier roman noir
Tous les garçons s’appellent Alan
Autres nouveautésannoncées danscette rentréelittéraire…
Le roman de Robert Alexis, Nora(José Corti), celui de
PhilippeNapoletano, Pas comme ça (Éditionsdu Mot Fou) et le
deuxième roman dePhilippe Langenieux-Villard, L’AffaireRattaire
(Éditions Héloïse d’Ormesson).Deux premiers romans sont égalementà
signaler : celui de Nicolas Cano,Bacalao (Arlea) et celui
(historique) deRoland Le Mollé, Pontorno : portraitd’un peintre à
Florence au XVIe siècle(Actes Sud) ; du côté du terroir,
deuxnouveautés : Le Moulin des sources(Calmann-Lévy), de Françoise
Bourdon,et Gus, de Philippe Lemaire (Éditionsde Borée). À suivre en
octobre…
par
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Sophie di RicciMoi comme les chiensMoisson rouge336 p., 18 €ISBN
978-2-914833-94-3
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++++++++++++++http://auteurs.arald.orgconsultez le site des
écrivains, des auteurs et illustrateurs jeunesse de Rhône-Alpes
-
depuis une tren-taine d’années.Cette nouvellehiérarchisationdes
emplois, pilier de la convention,prend en effet en compte la
particu-larité des activités des commercesde librairie et permet
ainsi de redé-finir une filière de mobilité poten-tielle dans ce
secteur. Celle-ci estorganisée autour de cinq typesd’emploi
(vendeur, gestionnaire,responsable de secteur, respon-sable de
magasin, directeur demagasin), avec différents niveauxd’exercice au
sein de chaqueemploi. Une manière d’introduirede l’équité au sein
de l’entrepriseet de reconnaître les compétencesdes personnels.
5
Une nouvelle classification desemplois en librairie
Ça presse !L’arrêté a été publié au Journalofficiel du 28 mai et
l’accord declassification des emplois en librai-rie est donc entré
en vigueur le 1er
juin. Avec lui, l’obligation faite auxlibraires de mettre en
œuvre cettenouvelle grille au sein de leurcommerce, mais aussi
d’appli-quer l’accord de salaires. Unchantier à ouvrir
d’urgence…
L’accord de branche avait été signéen septembre 2009 par le
Syndicatde la librairie française (SLF), laFédération française des
syndicatsde libraires et les organisations syn-dicales de salariés.
Objectif : sortirdu carcan inadapté de l’anciennegrille (des
commerces de détail depapeteries, fournitures de bureau…)et
élaborer une classification adap-tée pour l’ensemble des
salariésactifs dans le domaine de la librai-rie. Un enjeu
considérable en termesd’organisation du travail, mais aussi
dereconnaissance des évolutions vécuespar la librairie – et par son
personnel –
Entrer dansles cases…
Pour cela, leslibraires doiventprocéder à unedescription
pré-
cise de chaque emploi, en s’appuyantsur les emplois-repères (21
au total),qui ont été conçus comme desmodèles et qui, bien
évidemmentne peuvent pas correspondre àtoutes les entreprises.
Ensuite, ils’agit de rapporter les emplois àcette nouvelle grille
de classificationqui va permettre de les hiérarchiserselon un
système de cinq critèresclassants (connaissance, compé-tences
techniques, autonomie,responsabilité, dimension rela-tionnelle),
comportant chacunsept degrés (de 1 à 7). En totalisantles points
qui se rapportent à ces
différents degrés, onpeut donc déterminerla place de
chaqueemploi dans la nou-velle grille de classifi-cation. Et de ce
fait,évaluer aussi le niveaude salaire, qui fait éga-
lement l’objet d’un nouvel accord.Comme on le comprend, il
s’agit làd’une grille posée sur l’organisationdu travail dans la
librairie, une grilledans laquelle il s’agira de faire entrerles
différents postes. Avec les diffi-cultés qu’on imagine pour toutes
leslibrairies existantes…La tâche est considérable et redes-sine
dans les faits les contours d’unenouvelle gestion des
ressourceshumaines. Elle devra être menéeavant le 1er décembre 2010
dans leslibrairies qui emploient moins deonze salariés, et avant le
1er mars2011 dans celles qui dépassent ceseuil. C’est pour aider
les profession-nels dans cette mise en place quel’ARALD a organisé
une série de jour-nées de formation tout au long duprintemps.
Session de rattrapageet dernière opportunité pour enbénéficier : le
27 septembre à Lyon(Villa Gillet). L. B.
L’histoire commenceen 1995. PascalChartier, libraired’ancien et
d’occa-sion à Lyon, met aupoint son propre sitede vente en ligne
delivres. Le marché dece type d’ouvragesreposant alors surd’autres
réseaux, peude libraires sont enmesure de créer leursite web. En
1997, lelibraire dépose lenom de domaine et
propose les services de Livre-rare-bookà d’autres confrères.
Parallèlement, ilparticipe aux réflexions de certainssites
européens de vente en ligne delivres anciens, bien décidés à
sefédérer. C’est ainsi qu’en 2008 naitMarelibri, un méta-catalogue
euro-péen, issu de la coopération decinq sites fondateurs :
Antiqbook,Maremagnum, Antiquariat, Uniliberet Livre-rare-book. La
conceptioninformatique de Marelibri, qui permetd’interroger
simultanément les cata-logues de 6 000 librairies du mondeentier,
soit près de 80 millions delivres, est confiée à l’équipe
lyonnaise.Toutes ces évolutions ont contribuéà faire de
Livre-rare-book un site deréférence dans le monde du livrerare.
Actuellement, il propose unannuaire de 590 librairies,
essentiel-lement francophones (France,Suisse, Belgique, Canada),
unmoteur de recherche pour explorerleurs catalogues et des
actualités dela profession. Pour les libraires lecoût est minime :
une cinquantaine
d’euros pour s’inscrire et une par-ticipation mensuelle fixée en
fonc-tion du nombre d’ouvrages décrits,soit, en moyenne 30 €. Quels
sontles avantages pour l’internaute ? Lapossibilité d’interroger
gratuitementune grande base de données, lagarantie d’être en
relation avec unlibraire professionnel – les transac-tions se font
uniquement entre lelibraire et le client, sans commissionpour le
site –, l’envoi de requêtes àl’ensemble des librairies (via
uneliste de diffusion), la création derecherches favorites ou de
fils RSSpermettant de surveiller les nou-velles entrées, et bien
d’autreschoses ! Parmi les projets en cours,l’équipe travaille à
transformer lesite en un espace professionnelcomplet, ouvert à tous
les métierset passionnés du livre. Un nouveaupetit caillou posé sur
la Toile, enéquilibre. Delphine Guigues
www.livre-rare-book.comwww.marelibri.com
Livre-rare-book.com : une aventure mondiale au cœur de Lyon
Profession : libraire en ligneLivre-rare-book.com. Derrière ce
nom à consonance anglo-saxonnese cache un site internet français -
et même lyonnais ! - de librairesprofessionnels indépendants. Dans
la jungle de la vente de livres enligne, dominée par Amazon et les
autres sites marchands, Livre-rare-book fait office de Petit Poucet
et prouve que même sur Internet,la vente de livres peut rester une
passion et un métier.
Les Croquelinottes,Saint-Étienne
L’Étourdi de Saint-Paul, Lyon
Librairie Garin, Chambéry
Raconte-moi la Terre, Bron
zoom
© L
ivre
-rar
e-bo
ok
-
6
met sur pied une programmationdans un domaine spécialisé :
poé-sie-performance, littérature ado,littérature jeunesse,
essai.D’autre part, à la demande des biblio-thécaires partenaires,
une demi-jour-née de formation professionnelle estmise en place,
autour de la traductionpour cette première édition.Enfin, une
nouvelle ampleur estdonnée à l’idée des Cafés hors lesmurs, à la
demande cette fois desdépartements partenaires (Drômeet Ardèche).
Plusieurs rencontresse passeront donc en dehors deMontélimar. Pour
l’équipe en place,cette ouverture préfigure de nou-velles pratiques
et devance sansdoute une réflexion sur le territoireculturel qui se
posera sous peuaux collectivités concernées.Marion Blangenois
Les Cafés littéraires de Montélimardu 30 septembre au 3
octobrewww.lescafeslitteraires.fr
Voilà 15 ans que les Cafés litté-raires de Montélimar
mettentchaque année la ville au rythme dela littérature. L’an
passé, ce sont5 000 personnes qui ont partagéces rencontres avec
des écrivains,dans les cafés de l’agglomération.
Pour cette nouvelle édition, le prin-cipe reste le même :
proposer unemanifestation exigeante et populaireautour de la
littérature, en invitantune trentaine d’auteurs ayant publiédans
l’année à venir échanger avec lepublic. On citera pêle-mêle
ChristopheClaro, Jean-Pierre Spilmont, FabioViscogliosi, Claude
Pujade-Renaud,Pierre Senges, François Place… Uneliste
non-exhaustive qui donne uneidée de la diversité des genres
convo-qués. Pourtant, à travers ces diffé-rentes formes, le comité
de lecturevoit souvent affleurer des préoccupa-tions communes, «
l’écume desbruits du monde », comme l’ex-plique Odile
Depagne-Roulot, prési-dente de l’association.Mais au-delà de cette
continuité, lesCafés littéraires innovent. Le départde Christine
Carraz, ancienne coor-dinatrice de la manifestation qui sou-haitait
passer la main, a provoqué unquestionnement et, dans la
foulée,quelques changements importants.À commencer par l’embauche
d’unenouvelle coordinatrice, GuillemetteLambert, salariée à temps
partiel del’association, et par l’élargissementdu comité de
lecture, qui réunitquinze personnes. Une carteblanche est aussi
désormais confiéeà l’un des membres du comité, qui
Sébastien Joanniez, auteur, comé-dien et metteur en scène, et
l’as-sociation La Ruche aux livresproposent depuis 2008
d’éton-nantes séances d’Essayages. Cefestival, qui se déroule dans
le paysdes Vans, en Ardèche, invite desécrivains à lire en public
des textesinédits ou inachevés. « C’est unexercice assez
effrayant pour lesauteurs, confie Sébastien Joanniez,directeur
artistique, une véritableprise de risques. Face à eux, lepublic
aussi est en zone inconnue. C’estde la confrontation de ces
fragilités quepeut naître un vrai échange. » Au-delàde la peur
légitime du dévoilementd’une œuvre inachevée, les auteursdécouvrent
bien souvent dans ces ren-contres une matière qui vient enri-chir
leur travail d’écriture.Ouvert à tous les genres littéraires,
lesEssayages sont avant tout attentifs àdes auteurs « qui
savent lire leurs textesde leur propre voix ». L’enjeu est clair
:recréer un lien entre le public etdes « littératures
désertées, commele théâtre ou la poésie. » « Nous, lesauteurs,
les structures culturelles, avonsraté quelque chose et il nous
fautrecommencer, aller vers le publicautrement, oser des formes
pluspérilleuses », explique SébastienJoanniez avec
enthousiasme. Pour lui,le secret est dans le dispositif, dans
lamanière dont on met en contact l’au-teur et l’auditeur afin de
bousculer leshabitudes et les attentes. Cette année,ce sont Marion
Aubert, Corinne LoveraVitali, Claire Rengade, Fabienne Yvert,Aurel,
François Beaune, EmmanuelDarley, Jacques Serena et Jean-Michel
Thiriet qui lèveront un peu le voile surle moment si singulier
de la création.Cette manifestation biennale est por-tée par une
cinquantaine de béné-voles. Elle alterne avec les Collections,série
de quatre rendez-vous (un par sai-son) avec quatre auteurs. Aux
Vans, onfête donc la littérature vivante toutel’année. M. B.
En rachetant cette année la collection« Vinyles » des
éditions Ereme, la mai-son d’édition lyonnaise a complété
soncatalogue déjà consacré aux arts, à lasanté, à la mémoire et
dernièrementaux jouets. Après la réédition de deuxtitres consacrés
aux pochettes devinyles psychédéliques et à celles de
/éditionLes Éditions StéphaneBachès en musique
Essayages : retrouver le goût du texte
La fragilité en partage
actualités /manifestations
Rendez-vous avecles grands hommesVisiter un fonds ancien,
découvrirdes documents d’archives ou parti-ciper à un atelier de
restauration delivres, sont quelques-unes des acti-
vités généralement proposées lors desJournées européennes du
patrimoine parles bibliothèques et services d’archivesde la région.
La thématique de cetteédition « Les grands hommes, quandfemmes
et hommes construisentl’Histoire », les 18 et 19 septembre,
seraégalement déclinée sous forme d’expo-sitions, jeux et lectures.
Découvrez ouredécouvrez Eugénie Brazier et les« mères »
lyonnaises ainsi que les grandshommes du quartier de Perrache,
respec-tivement à la bibliothèque de la Part-Dieu et aux archives
municipales deLyon. Visitez l’exposition des Viennois«
illustrés » à la bibliothèque deVienne ou encore allez
écouter lespoints de vue d’hommes du XIXe siècleaux archives de
Buis-les-Baronnies. Hérosnationaux, personnalités locales,
célèbres
ou ordinaires, ilsvous attendent !Delphine Guigues
Journéeseuropéennes du Patrimoine18 et 19septembre
pat
rim
oin
e
Essayages du 10 au 12 septembreLes Vans
(07)http://festival-essayages.over-blog.com
rock, c’est un ouvrage inédit qui va enri-chir cette collection.
Les Routes du Jazz,du musicien et journaliste Stan Cuesta,rend
compte de l’histoire du jazz depuisla Nouvelle-Orléans jusqu’aux
confinsde l’Europe. Au récit de l’auteur s’ajoutel’enregistrement
des plus grands mor-ceaux de jazz sur six CD. Ainsi, parcou-rant
les courants musicaux, les ÉditionsStéphane Bachès nous font
apprécierun éclairage moderne sur des trésorspatrimoniaux. É.
P.
Dans la collection « Musique » :
Dominique DupuisRock vinyls248 p., 29,50 €ISBN
978-2-35752-089-9
Stan CuestaLes Routes du Jazz160 p. et 6 CD, 39,90 €ISBN
978-2-35752-079-0
Les cafés littéraires de Montélimar
15 ans et du nouveau !
-
7
actualités / librairie
lien avec certitude. Pour faire face àcette concurrence, le
libraire décideà ce moment-là de rénover l’espacede vente, de
développer de nou-veaux rayons ainsi que les relationsavec les
collectivités. Autant d’ac-tions coûteuses qui n’ont pas tou-jours
porté les fruits espérés. Letravail avec les collectivités,
parexemple, s’avérant particulièrementchronophage pour des
rentréesfinancières décevantes.
Moins de livres, plus de vêtements !
Analysant cette fermeture, DanielLemuhot évoque trois autres
fac-teurs, plus profonds : tout d’abord,il a constaté, mais trop
tard, unetransformation de sa clientèlepotentielle. Les acheteurs
étaient au
Librairie généraliste, proposant prin-cipalement des rayons
littérature etjeunesse, ainsi qu’une carterie dequalité, Préface a
compté jusqu’àtrois salariés et proposé 14 000 titressur une
surface de vente de 95 m².La décision de fermeture a été priseen
janvier 2010, suite à d’insolublesproblèmes de trésorerie :
« Travaillerpour rembourser les frais bancaires,cela n’avait
plus de sens », expliqueDaniel Lemuhot. « Il aurait fallu60
000 € pour remettre les comptesà flot. C’était plus que mon
apportinitial et nous n’aurions pas pu rem-bourser un tel emprunt.
»À l’origine de ces difficultés, uneaccumulation de facteurs.
Parmieux, l’ouverture en 2006 de l’espaceloisir d’une grande
surface située àproximité, même si le libraire sou-ligne qu’il est
difficile d’établir ce
départ principalement de jeunesparents avec enfants, fréquentant
lalibrairie au moins trois à quatre foispar mois. Mais Firminy,
sinistrée éco-nomiquement, a subi une baissedémographique
importante : vieillis-sement de la population, départ desjeunes
pour les études ou le travail, lenoyau dur des clients de la
librairiedisparaît peu à peu.En cause également, des
questionsd’aménagement du territoire : leshabitants travaillant
désormais àl’extérieur de Firminy, le centre-villeest moins
fréquenté. La créationd’une autre zone commerciale
àMonistrol-sur-Loire, à quelques kilo-mètres, a également réduit la
zonede chalandise qui s’étendait au sud-ouest. Enfin, la librairie
est touchéepar les effets de la crise écono-mique. Depuis juillet
2009, Daniel
Lemuhot a vu diminuer le prix dupanier moyen, et la baisse
desventes est plus importante que cellede la fréquentation : moins
20 %environ cette dernière année.Deux expertises proposées
parl’Arald et la Région (l’une à partir dufonds, l’autre à
partir des bilans)n’ont pu empêcher la
fermeture,les propositions ébauchées ne pou-vant modifier
l’environnement etassurer la viabilité de l’entreprise àmoyen ou
long terme. C’est un com-merce de vêtements qui remplacerala
librairie… Aujourd’hui, DanielLemuhot estime que ces questionsse
posent à l’ensemble des librairies,de façon plus ou moins
aiguë.« Ramener le public vers le livre et
lalecture est un véritable enjeu pourl’interprofession »,
conclut-il. M. B.
10e Rencontres littéraires de la FACIMSolidement enracinée dans
les ter-ritoires savoyards, la FACIM organise
chaque année ses rencontres littéraires.L’occasion de faire
découvrir des textesd’écrivains mettant en scène des lieux dela
Savoie, et de voir affleurer, à traversl’écriture, une géographie
méconnue,nourrie d’un rapport intime aux sites, à lamémoire des
paysages. Cette année, c’estMaryline Desbiolles qui est l’invitée
de cesrencontres multiformes : promenade lit-téraire en montagne,
échanges, lectures…À cette occasion, la FACIM et Créaphiscoéditent
un texte inédit de cet auteur :Je vais faire un tour. Sortie le 16
sep-tembre.
Le 25 septembreUgine (73)www.fondation-facim.fr
Festival Est-OuestCette année, la Russie est à l’honneurdu
festival Est-Ouest, qui invite à décou-vrir les littératures
est-européennes.Quinze auteurs russes et français invi-tés, un
salon du livre, des tables rondes,des cafés littéraires et une
tournée dansles bibliothèques de la Drôme, mais ausside
nombreuses animations (expositions,films, spectacles) autour du
thème :« Sur les traces du Transsibérien ».Parmi les
propositions, on notera aussile très original
« TransDie’bérien », quitransformera le voyage du train
TERentre Valence et Die en voyage artistiqueet culturel de Moscou à
Vladivostok.
Du 15 septembre au 3 octobreDie et pays diois
(26)www.est-ouest.com
ren
dez
-vo
us
explique Sandrine Charreau. Lapremière est gérante, la
deuxièmesalariée. Mais elles se sententavant tout associées.Un
commerce qui dote désormaisMeyzieu d’une véritable offre enmatière
de livres. Le choix de cetteimplantation ne doit évidemment rienau
hasard : « Nous nous inscrivonsdans un projet de ville.
Meyzieu évolue,sa population aussi. L’ouvertured’une
librairie sur ce territoire étaitsouhaitée et attendue. Cela nous
aaidées à convaincre labanque. » La nouvellelibrairie s’ouvre en
effetdans le cadre du dévelop-pement du centre commer-çant, initié
par la mairie.L’occasion pour les deuxlibraires « d’être
actrices dudynamisme de cette ville ».Au final, après quelquesmois
de travaux dans unlocal dont elles sont pro-priétaires, elles
proposent
Un CoLibrisà MeyzieuSandrine Charreau et SandraGourjon ont
ouvert cet été lalibrairie CoLibris, à Meyzieu,dans l’est lyonnais.
Une aven-ture à deux qui s’inscrit dans ledéveloppement de la
ville.
Sandrine Charreau et Sandra Gourjontiennent aux deux majuscules
de cepresque nom d’oiseau pollinisateur,façon d’affirmer, avec ce
« Co » bienvisible, leur association dans cetteaventure.
Après avoir travaillé plusieursannées dans un laboratoire
pharma-ceutique, elles ont décidé de mettreen commun leurs
compétences et leurenvie de créer une librairie.
« J’apportema formation de libraire (CCI de Lyon,puis trois
ans en librairie, notammentà Vienne, chez Lucioles), et Sandra
sagrande culture littéraire et son inventi-vité. Nous sommes
complémentaires »,
6 000 références dans 75 m², dont unimportant rayon
jeunesse qui répondà un goût personnel mais aussi auxattentes
d’un public familial.Cette création a bénéficié de l’aide dela DRAC
et de la Région Rhône-Alpes(création et informatisation),
decontacts suivis avec l’ADELC(Association pour le développementde
la librairie de création) et du sou-tien du réseau de libraires de
la région.CoLibris sera d’ailleurs accompa-gnée par la librairie La
Parenthèse,
à Annonay,dans le cadred’un tutoratproposé
parl’associationLibraires enRhône-Alpes.M. B.
CoLibris9, rue Antoine-Vacher69330
Meyzieuwww.librairie-colibris.fr
Fermeture de la librairie-imagerie Préface à Firminy
Le mot de la finLa librairie-imagerie Préface avait fêté ses 15
anscette année. Elle a fermé ses portes en juillet, privantFirminy
de sa seule véritable offre de livres. DanielLemuhot, le fondateur,
revient sur les causes de cettefermeture, symptomatique des
problèmes auxquelsle monde de la librairie est confronté
aujourd’hui.
© L
ibra
irie
Pré
face
-
8
abordent chacun d’entreeux selon un angle qui luiest adapté.
Ainsi, le dépliantintitulé Mises à plat pré-sente un panorama
monta-gneux en noir et blanc.Divisé en six vues entrecou-pées de
marges, il est rendupresque abstrait par ce trai-tement. Deux
autres séries,Bien orienté et À l’algérienne, accom-pagnent les
clichés d’un texte. Cesmots, qui sont ceux d’Olivier
Gadet,constituent un contrepoint narratifminimal. Dans Aiguille du
midi, desportraits sont tirés en petits formatscarrés sur du papier
rigide. Les tou-ristes, y posant devant un paysagepresque
entièrement occulté par le
C’est un coffret dont le format etl’épaisseur rappellent ceux
d’uneboîte de papier photographique. Surle couvercle, on peut lire
une listede noms comme Les Filles du bord demer ou
Bécon-Les-Bicêtres, et, au-dessus, le titre : Pataquès. Une sériede
travaux rassemblés en un précieuxfourre-tout, dont le titre semble
avoirété choisi pour prendre le contrepiedde l’esthétique sobre,
presque silen-cieuse et méditative, des images dePhilippe Poncet.
On pourrait lesqualifier d’« écologiques », au sensoù
elles sont sans artifices et pri-vilégient l’absence d’effets.Ces
photographies prennent poursujets des espaces naturels, déser-tés
ou occupés par l’homme, et
cadrage, deviennent de véritablesfigures de cartes à jouer. La
réflexionsur la mise en forme éditoriale, sou-vent menée avec
Philippe Millot,graphiste attitré de Cent Pages, estici aussi
importante que celle liéeà la prise de vue. Par ailleurs, ledesign
des objets ajoute du sens auxvisuels, qui ne sont plus
seulement
à contempler maisbien à s’approprier demanière ludique
ouévolutive. Il nous inviteà reconsidérer le carac-tère tangible,
l’évidencedes éléments du réel quinous sont montrés. Tell’horizon,
entité mou-vante, cette rétrospectiveen boîte est donc unesomme de
points de vuebien (dés)orientés.Si certaines séries serontexposées
à l’Artothèquede Grenoble au prin-temps 2011 et qu’il fau-dra aller
les voir, c’est ense saisissant de Pataquèsque l’on pourra se
faire
la plus juste idée de cette pratiqueartistique et peut-être
aussi des per-sonnalités discrètes et mystérieusesdu photographe et
de son éditeur.Émilie Pellissier
Philippe PoncetPataquèsCent Pages, 40 €ISBN
978-2-9163-9021-5
Après un constat aussi sensiblequ’impitoyable sur l’état
d’unmonde (le nôtre ?), quelque choses’ouvre dans le récit. Quelque
choses’avère nécessaire, au milieu du jeude masques qui tourne en
déconfi-ture. Reconstruire, repartir…, maissur quelle base ?
« La liste des courses,comme celle des renoncements, sera
Un nouvel album dérangeantde Sylvie Fontaine
L’invitationau dedansAprès Calamity et Le Poulet dudimanche,
deux fameux albums,Sylvie Fontaine nous revient avec unnouvel opus.
Au commencement deSous le manteau, il y a un chantier.Déserté. Un
monde aux promessestoxiques, aux pluies de poissonsmorts, où il est
étrangement et tou-jours question de chant (d’amour ?),d’espoirs
(invisibles) et de crépus-cule bien sûr.Politique, le travail de
SylvieFontaine l’est assurément… mais àsa façon. « C’était pas
cher, c’étaitdonné ils disaient. Composantsétranges, gaz délétères,
c’est ton abriqui t’a mangé. » Le ton est donné.La couleur ? On
joue sur une palettede blanc, de noir et de bleu. Lecharme des
textes et des dessins deSylvie Fontaine (ô combien liés lesuns aux
autres) ne doit pas faireoublier leur caractère empoisonné,corrosif
à tout le moins.
bien longue ». Fort bien, mais après ?Après, la rencontre
se fait indispen-sable, le rendez-vous est pris, onparle d’aller à
« Moulinsart dansune Hispano-Suiza décapotable ».Rien ne
saurait arrêter les méta-morphoses en cours.Sylvie Fontaine ne
prend pas sonlecteur pour n’importe qui, mais
pour un « cosmo-naute imparfait »,un
« explorateurdu dessous ». Sesdessins ne sontpas de
simplesimages venuesgrossir l’actueldéluge visuel. Etla série de
ques-tions par laquellese « conclut » sonrécit est la
marquesupplémentaired’une élégance etd’une générositépeu
communes.Frédérick Houdaer
SylvieFontaineSous lemanteauTanibis50 p., 13 €ISBN
978-2-84841-014-2
imagesPhilippe Poncet : rétrospective en boîte
Tout un Pataquès !Olivier Gadet, responsable des éditions Cent
Pages, et PhilippePoncet, photographe, se retournent sur plus de
dix ans de colla-boration en « remont(r)ant » dans une
même boîte une douzainede publications parues sous forme de
dépliants, cartes postalesou livrets. Des productions inédites sont
également à découvrir.
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hili
ppe
Pon
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ylvi
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Tan
ibis
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9
ÉDITIONS DE L’IBIE -ÉDITIONS DU CHASSEL
Préhistoire del’Ardèchede Jean-Louis RoudilCet ouvrage de
vulgarisationdresse le panorama dupatrimoine préhistoriquequ’abrite
l’Ardèche, régionextrêmement riche dans ce domaine. Des cartes, une
échelle chronologique,de nombreusesphotographies de sites,croquis
et reproductionsd’objets ou de gravures,permettent à chacun de
plonger dans le sujet.
200 p., 38 €ISBN 978-2-9509918-4-3
CHRONIQUE SOCIALE
Savoir rédiger : unepossibilité pour tousde Régine BurfinCette
sixième éditionrappelle les principes pourrédiger d’une
manièrecorrecte et adaptée au butrecherché. En cette rentrée,
jeunes étudiants ou adultespeuvent ainsi bénéficier de conseils
pour formulerleurs idées et exceller dans l’art d’écrire.
192 p., 8 €ISBN 978-2-85008-801-8
ELLUG (Éditions littéraireset linguistiques del’université
Stendhal)
La Scène symboliste(1890-1896) : pour unthéâtre spectralde
Mireille Losco-LenaCette étude, qui intéresserales amateurs de
l’histoire duthéâtre et de la mise enscène, dresse le
panoramaartistique d’une époque, de1890 à 1896. Elle évoque
lespoètes, compositeurs,
peintres, qui entouraientalors les dramaturges,metteurs en scène
etacteurs du courantsymboliste.
collection Hors collection240 p., 28 €ISBN 978-2-84310-157-1
EMCC
Vais quitter Rennes. À ce soir. T’embrassed’André EckCe petit
livre rend comptede l’histoire vécue par unefamille française dans
lesannées cinquante, avec letélégramme comme moyende
communication.
collection Apprentissage(s)95 p., 10 €ISBN 978-2-357400-61-0
ÉDITIONS GUÉRIN
Paris, camp de basede Sophie Cuenot etRobert ParagotAvec la vie
mouvementéede Robert Paragot, del’Aconcagua au Makalu,du Jannu au
Huascaran,puis le retour à Paris oùse situe son camp de base,c’est
une grande partie del’histoire de l’alpinisme,notamment des
annéescinquante à soixante-dix,qui est relatée dans ce livre.En
commençant parl’ascension de la Tour Eiffelque Paragot fit le
premier,en mai 1964, à l’occasiondes 75 ans du monument.
263 p., 55 €
ISBN 978-2-352210-41-2
imagesLoup y es-tu ?« Évidemment, un loup à la maison,c’est
pas toujours de la tarte. »Surtout un loup qui fait des
miettespartout en mangeant des biscuits,parle, repère les fautes
dans lesdevoirs et se mêle de tout constam-ment. En fait, le petit
Louis neconnaît pas son bonheur. Mais grâceà son grand-père, il va
le découvrir…Après Moi, le loup et les chocos, voicila suite de
l’aventure dessinée parDelphine Perret avec autant desobriété que
de malice. Un trait fin,une histoire drôle et tendre. Car celoup-là
n’est pas n’importe qui.Vivant habituellement au fond duplacard, il
s’agit ni plus ni moins duGrand Méchant Loup. Silhouettenoire,
discret comme une ombre,cet animal a tout de même très bonfond.
D’ailleurs il est végétarien, c’est
dire. Louis l’a à ce point ama-doué, que l’animal veut à
touteforce l’accompagner à la mer, où
l’enfant passe desvacances avecpépé. Le voyagesuffira à rendrece
trio com-
plice. Car il estdifficile dedire qui est le
plus enfant destrois… Un conte
dessiné plein d’entrainet de subtilité. L. B.
À l’eau,la luneEn route pourla lune ! Dans
cet album coloré et stylisé, sousinfluence africaine, toute une
familleest obligée de quitter sa maison :« Notre village
ressemblait à unchamp de mines à cause des trousqu’on avait creusés
un peu partoutpour trouver de l’eau et des tuber-cules », raconte
la petite fille. La faimet surtout la soif poursuivent leshabitants
de ce village africain, etbien d’autres, tous contraints à
l’émi-gration. Cette fuite, vécue à traversles yeux de l’enfant,
prend l’aspectd’un conte, à la fois naïf et pleind’espoir, raconté
en mots et surtouten images par Agnès de Lestradeet Anaïs Barnabé.
Car même si lalune n’est pas vraiment la lune,bien plutôt un autre
continent del’autre côté de la mer, c’est là quel’eau coule d’un
tuyau mystérieuxet que l’on n’a plus besoin d’allerse servir au
puits. Une façon deretourner aux fondements des vieshumaines, et à
leur élémentairesimplicité. L. B.
Agnès de Lestrade et Anaïs BarnabéTu vois la luneAnna
ChanelAlbum non paginé, 14,50 €ISBN 978-2-917204-31-3
Au premier abord, ce livre sembleêtre une déclinaison du récit
(clas-sique) d’un été de rencontres etd’expériences vécu par un
garçonaux portes de l’adolescence. Mais letrait fin magnifique et
les lavis pleinsde nuances de Malik Deshors don-nent à ce scénario
des tonalités sub-tiles. L’Été de Luca n’est donc passeulement
l’histoire d’un gamin quise confronte à ses parents bientôtséparés
et qui est remis entre lesmains de son grand-père, dans unecampagne
pas si déserte que ça…Luca se frotte à de nouveaux senti-ments,
fabrique sa propre personna-lité et découvre des sensations
Delphine PerretMoi, le loup et les vacances avec pépéÉditions
Thierry MagnierAlbum non paginé, 12 €ISBN 978-2-84420-843-9
nouveautés des éditeurs
presque irréelles, notamment àtravers la passion de ce
grand-père attentif pour… les méduses.Le récit prend sens au fil
despages par le biais des rencontresque fait ce jeune garçon, et
senourrit aussi de séquencesmuettes imposant la contempla-tion. Ces
passages, pleins deforce, ajoutent à l’étrangeté durapport entre
Luca et lesméduses, notamment grâce àl’addition d’une couleur rose
pâledans les planches. La patience(un dessin précis, la
personnalitédes personnages) et la générosité(l’abondance de
sensations et desentiments) de Malik Deshorsemplissent L’Été de
Luca. Antoine
Fauchié
Malik DeshorsL’Été de LucaLa Boîte à bullescollection
« contre-jour »96 p., 14,50 €ISBN 978-2-84953-083-2
© Delphine Perret,Éditions ThierryMagnier
© M
alik
Des
hor
s, L
a B
oîte
à b
ulle
s
Des méduseset des hommes
-
Toute la malice, l’étrangeté et les divers sentiments
quicaractérisent les habitants de ce monde surprenant…
collection La Bibliothèquevoltaïque272 p., 26 €ISBN
978-2-915793-88-8
SYMÉTRIE
Dictionnaire desthéâtres parisiens au XIXe sièclede Nicole
WildEnrichi de notices couvrant la période de 1800 à 1914,
cedictionnaire survole l’histoiredes grandes institutions,
desthéâtres secondaires et desthéâtres parfois éphémères,en
recensant les appellationsde ces salles. Des informations
inédites
de l’objet livre aufoisonnement de motifsvisuels colorés, où
insecteset oiseaux forment unenouvelle
« histoirenaturelle ».
56 p., 53 €ISBN 978-2-911698-58-3
CITÉ DU DESIGN
Azimuts 34 : Imaginairede la mobilitéLes déplacements
virtuelsque nous permetaujourd’hui Internet, mais aussi des
outilscomme la radio ou lejournal télévisé, sont à l’origine de
nouvelles
rencontres qui remodèlentnotre société. Les contributions de
cenuméro partent de cetteconstatation pour envisagerune culture
urbaine du XXIe siècle.
128 p., 13 €
ISBN 978-2-912808-38-7
JEAN-PIERRE HUGUETÉDITEUR
De(s)générations n° 11 : UtopieinsurgeanteDans ce numéro
consacré à la notion d’utopie commeforce qui pousse à la
révolte,
Philippe Roux s’entretientsuccessivement avec MiguelAbensour,
professeur dephilosophie politique, et
– une chronologie historique,un répertoire, la liste
desdirecteurs, chefs d’orchestre,maîtres de ballet, etc. – ont été
rassemblées pourchaque établissement.
608 p., 92 €
ISBN 978-2-914373-48-7
REVUES
ÉDITIONS DES CAHIERSINTEMPESTIFS
Cahiers intempestifsn°25 : Made in BritainCe vingt-cinquième
numéromet à l’honneur le travail de sept artistes de la
jeunegénération britannique,confrontant la sobriété de recherches
textuelles etphotographiques autour
10
regard
Chaque mois, retrouvez Géraldine Kosiak, en texte et en
image,pour un regard singulier, graphique, tendre et impertinent
surl’univers des livres, des lectures et des écrivains…
Au travailLes mursComment transformer les lettres en briques
?Voici quelques années, à la signature d’unnouveau contrat, je me
souviens d’avoir osédemander une augmentation à mon éditeur. Il
m’aregardée en souriant, étonné : « Tu ne comptes pasvivre de
tes livres ? » Puis il a changé de sujet sansm’augmenter d’un
centime.C’est vrai, à bien y réfléchir, quelle prétention
qu’unauteur souhaite vivre de son métier !En 1963, Thomas Bernhard
envisage son avenir plussombre que jamais. Son livre Gel a provoqué
undéluge de critiques, violentes et contradictoires, deséloges les
plus embarrassants aux descentes enflèche les plus féroces. Il ne
veut plus entendreparler de littérature et, pendant quelques
mois,devient chauffeur-livreur pour la brasserie Gösser(il adorera
puis détestera ce travail, l’abandonneradu jour au lendemain pour
se réfugier sous sacouette, chez sa tante).Lorsque lui est attribué
le prix de littérature de laville hanséatique libre de Brême,
Thomas Bernhardest à la campagne, navrante caricature de
lui-même,enchaîné au sentiment paroxystique de sondésespoir
existentiel. Ce n’est pas le prix lui-mêmequi le sauve de son
humeur, mais l’idée de reprendre la maîtrise de sa vie grâce à la
dotation de dix mille marks,
de la rendre à nouveau possible. Son souhait atoujours été
d’avoir une maison, voilà doncl’occasion de prendre contact avec un
marchand
de biens. En un quart d’heure, pour la sommede deux cent vingt
mille schillings, il achète
une ruine, mais selon lui un « objetd’excellentes
proportions ».Le jour de la remise du prix, ThomasBernhard est dans
ses pensées : « Je nevoyais que mes murs et réfléchissaisau
moyen de les payer. »Tout de suite après, il retourne àVienne
: « Naturellement je ne
pouvais plus attendre le moment oùj’allais emménager dans mes
murs
nouvellement acquis de Nathal. Lamanière dont j’ai finalement pu
les
nommer miens, les transformer etagrandir de mes mains, avec
plus
ou moins de réussite, et lesfinancer au fil des années – cen’est
pas ici le lieu d’en parler.Mais le prix de la ville de Brême
a été la première étape endirection de mes murs,
sans lui tout auraitprobablement prisune autre tournurepour moi.
»
Thomas BernhardMes prix littérairesGallimard
chronique Géraldine Kosiak 15/
LES MOUTONSÉLECTRIQUES
Des nouvelles du Tibbarde Timothée ReyDouze textes pour
raconterun continent imaginairedont les populations ont la magie,
noire commeblanche, pour quotidien.
-
La spoliationau quotidienRetour sur un ouvrage de TalBruttmann,
« Aryanisation » écono-mique et spoliations en Isère (1940-1944),
qui conclut les travaux de laCommission d’enquête mise en placepar
la Ville de Grenoble sur la spo-liation des Juifs sous Vichy. Un
docu-ment irremplaçable.
Passionnante enquête que celle réalisée par laCommission
communale sur la spoliation des« biens juifs », créée à
Grenoble dans les traces de laCommission Mattéoli (elle-même lancée
à l’échelonnational en 1997, à l’initiative du gouvernement
fran-çais). À travers plus de deux cents pages de compterendu,
nourri par un travail mené dans les archiveslocales et régionales
ainsi que dans les services cen-traux de l’État, l’historien Tal
Bruttmann démonteles mécanismes juridiques et administratifs de
l’arya-nisation économique visant à « l’élimination de
l’in-fluence juive dans l’économie nationale », commel’annonce le
préambule de la loi du 22 juillet 1941.C’est cette loi « qui
va servir de base et de cadre à lapolitique de spoliation des biens
», qui constitue l’un« des rouages essentiels » de la Solution
finale, commele rappelle l’historien dans son introduction.On
découvre ainsi la précocité de certaines actionsd’aryanisation, y
compris en zone libre, le rôle jouépar l’administration, avant même
la création duCommissariat général aux questions juives, le 29
mars1941. On suit également, étape par étape, la routine infer-nale
de la spoliation qui s’organise : prospection desbiens immobiliers
« juifs », collaboration zélée desnotaires et surtout
des maires du département de l’Isère.
livres & lectures /essais
Répondant à une sollicitation du CGQJ, lemaire de
Villard-de-Lans écrit notamment :« Suite à votre honorée
lettre du 2 courant, jevous informe que Melle B. Rachel Marthe,
pro-priétaire d’un immeuble à usage de pension defamille n’est pas
de race juive, de même queM. W. Léonard. En ce qui concerne les
juifs pro-priétaires à Villard-de-Lans, je puis vous signalerun
nommé B. Fortuné actuellement à Rocheville(Alpes Maritimes). Il se
peut qu’il y en est (sic)d’autres mais que je ne connais pas. »Dans
cette enquête saisissante, Tal Bruttmanntient le registre détaillé
de cette mécanique hon-teuse. La lecture, toujours facile, même si
elleplonge le lecteur dans l’incrédulité, se fait pas àpas. On peut
oublier les chiffres, négliger leslistes, omettre les évaluations…
Reste l’impi-toyable précision de ce mouvement d’ensemblequi
rationalise un pillage racialement organisé.Dans l’Isère, à
Grenoble, Cours Jean-Jaurès, àChamrousse, à Lyon, ailleurs,
partout. L. B.
Tal Bruttmann« Aryanisation »économique et spoliations
enIsère (1940-1944)P.U.G256 p., 20 €ISBN 978-2-7061-1555-4
Actualité dela mémoireC’est un document originalque nous
proposent lesPublications de l’universitéde Saint-Étienne,
puisqu’ilconstitue une sorte de plate-forme de réflexions menéesen
Allemagne tout autantqu’en France autour du tra-vail de mémoire de
la guerreet de la résistance. L’ouvrage,
né d’un séminaire d’étude à Berlin et àRavensbrück sur le thème
« Histoire-Mémoire-Transmission », possède ainsi un
aspect proprementhistorique, qui retrace la constitution du
souvenirdes crimes nazis tel qu’il s’est élaboré en Allemagnede
l’ouest et en Allemagne de l’est ; mais on y trouveégalement des
comptes rendus de visites effectuéesà l’occasion de ce voyage par
des universitaires etpar des professionnels de lieux de mémoire
etd’Histoire de la région Rhône-Alpes. Une rencontrequi a permis
d’« esquisser des perspectives compa-rées des sites,
muséographies, propositions et pra-tiques mémorielles, entre les
deux pays. »Visite du Mémorial de Ravensbrück, gare de
BerlinGrünewald, Maison de la conférence de Wannsee,Mémorial aux
Juifs assassinés d’Europe à Berlin…,ce livre collectif, véritable
mosaïque de regards etde conceptions, propose une documentation
excep-tionnelle autour de cette problématique de lamémoire, y
compris dans ses dimensions les plusactuelles. L. B.
Sous la direction de Alain Battegay,Geneviève Erramuzpé et
Marie-Thérèse Têtu-DelageExposer les mémoires et l’histoireBerlin –
RavensbrückPublications de l’université de Saint-Étienne284 p., 24
€ISBN 978-2-86272-535-2
Michèle Riot-Sarcey,professeur d’histoirecontemporaine, avant
des’exprimer sur le sujet puisde laisser notamment laparole à
l’écrivain etcritique d’art VéroniquePittolo. En guise
decontrepoint visuel, on peut découvrir des vuesd’installations de
deuxartistes contemporains :Melik Ohanian et Laurent Faulon.
96 p., 10 €
ISBN 978-2-35575-106-6
ENS ÉDITIONSÉCOLE NORMALESUPÉRIEURE DE LYON
Tracés n°18 :Improviser. De l’art à l’actionCe numéro regroupe
les contributions dephilosophes,
sociologues,anthropologues,musicologues, ainsi qued’autres
spécialistesuniversitaires, afin de cernerl’improvisation en tant
que pratique artistique et concept à la portéeheuristique.
266 p., 15 €
ISBN 978-2-84788-213-1
Ouïe-voirOn connaît plutôt bien le Heidsieck pionnier dela
Poésie sonore, devenue plus tard Poésie action,qui donna naguère de
la « voix » dans les avant-gardistes années soixante et
suivantes (voir à ce
sujet l’éclairant Bernard Heidsieck, Poésie Action de
Jean-Pierre Bobillot chez Jean-Michel Place). On connaît peut-être
moins le Heidsieck plasticien, auteur-compositeur,si l’on peut
dire, de nombreuses planchesd’« Écritures/Collages »,
comme il les nomme lui-même.Des séries qui font la part belle à la
lettre, tableaux gra-phiques à souhait, comme cet Alphabet coloré
et nerveux(2006) ou encore ces machines-outils qui triturent
etconcassent moult mots (40 machines à mots, 1971).
Des images de caractère qu’il ne faut surtout pas prendreà la
légère et que la préface de François Collet remetintelligemment en
perspective. Comme si le travail plas-tique, et second, de
Heidsieck allait en « intime sym-biose » avec son travail
poétique. Une manière aussi d’af-firmer que la Poésie action trouve
sa source au-delà ouen deçà du texte, dans une sorte deouïe-voir
originel. Roger-Yves Roche
François ColletAvec la participation de JulienBlaine et Michèle
MétailBernard Heidsieck PlastiqueFage Éditions119 p., 20 €ISBN
978-2-84975-175-6
par
uti
on
Sélection des nouveautésdes éditeurs de Rhône-Alpesréalisée par
Émilie Pellissier
Le centre d’information du Mémorial aux Juifs assassinés
d’Europe, à Berlin.
11
Deux publications autour de la Seconde Guerre mondiale
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-
12
portrait
Chronique de littérature buissonnière
Ouvert la nuitC’est bien connu : les écrivainsreviennent
toujours sur les
lieux de leur enfance. Certains plusfréquemment que d’autres. Il
n’estpas vain d’affirmer que Modianorevient toujours sur les lieux
de. Sa
poétique repose tout entière surl’idée de retour, éternel ou
non, unretour qui est d’abord et avant toutune forme de se souvenir
en rond :nommer le passé sans le creuser.Et voici donc que dans
L’Horizon,Margaret, une « fille de rien »,revient à Annecy,
l’espace tempsde quelques pages. C’est bienmoins que dans le
sublime VillaTriste, qui se passe entièrement àAnnecy. C’est vrai :
à peine un ou
deux signes, une seule et brèvelumière : celle du « café de
la Gare,ouvert pendant toute la nuit. » Maiscela suffit pour
réveiller le lecteur,lui redonner le goût de Modiano,ce sentiment
de déjà-vu qui lui vasi bien. R.-Y. R.
Patrick Modiano, L’Horizon, Gallimard, 2010
d’i
ci p
ar a
ille
urs
Livre & Lire : journal mensuel, supplément régional à
LivresHebdo et Livres de France, publié par l’Agence
Rhône-Alpespour le livre et la documentation.
Une vie sample« Barbie tue Rick »… un pseudo à triple
tranchant.Parce que le slam est un jeu, que les scènes sontouvertes
et qu’elle a « la posture d’Antigone dans unesupérette ».
Hélène Accoceberry, une insoumise ?Certainement. Le reste du temps,
elle est bibliothé-caire dans un quartier populaire de Vienne.
Vienne, fin de journée, le Bar du temple. Celui d’Augusteet
Livie écrase la petite place. Il fait chaud et on est déjàen pleine
mythologie. Pas seulement à cause d’Antigone.Barbie tue Rick aime
les contes, les histoires. Celle-ci estplutôt bien : c’est une
femme, la quarantaine, blondepar-dessus le marché, qui pratique la
scène ouvertedepuis à peu près huit ans. Dans l’univers plutôt
mas-culin du slam, ça peut surprendre. Cheveux bouclés eten pétard,
elle assume sa venue tardive sur les scènesde la région, son style
direct, moqueur, son attirancepour le politique plutôt que pour
l’intime, son envie des’adresser au plus grand nombre.Alors on la
regarde et on se dit qu’on peut être doubleet en bonne santé
(quelques centaines d’heures de som-meil en moins cependant). Une
forme de schizophrénie
Dans ses rayons ou sur scène, l’enga-gement est obligatoire. Le
sentimentque Barbie tue Rick rôde sans cessederrière Hélène
Accoceberry, lapousse, la titille. Il est vrai que le slamest une
forme de harangue quipermet aussi de ne pas s’endormir.Barbie
l’aide beaucoup. Tous sestextes partent de ce personnage deblonde
indémodable à la plastiqueparfaite, « idéal pour relayer des
pro-pos décalés ». La slameuse transformel’image de cette
poupée en alliée bur-lesque, détournant la naïveté pourguider son
propos. Souvent politique,« entre guillemets », tendance
fémi-niste moins la case qui lui correspond.« Une sorte
d’héroïne gainsbouriennequi prendrait la parole », pour racon-ter
ses propres histoires, refuser lemoralisme à tout crin mais
aussil’angélisme du socioculturel,
genreje-vais-sauver-la-poésie-dans-mon-centre-social.Une fois de
plus, cette femme esthybride. Lucide mais combative, uni-vers
poétique à tendance romannoir, descendance basque et pay-sanne
mixée bourgeoisie lyonnaise.Un poème… Aujourd’hui HélèneAccoceberry
soigne son aspirationau vagabondage en allant plus loindans sa
recherche d’écriture et de« stratégies non
conventionnellespour atteindre une idée d’absolu ».Passer des
cinq minutes traditionnellesd’intervention sur scène à un
projetartistique plus abouti. Écouter, lire,sampler, écrire,
détourner… Simplecomme une berceuse, Barbie. LaurentBonzon
bienveillante, qui aide à ne pas entrer dans les cases.Hélène
Accoceberry les redoute. D’abord ça oblige à bais-ser la tête et
puis à épouser une forme qui ne vous convientpas. Pas du tout le
genre de la slameuse. Ni de la biblio-thécaire non plus d’ailleurs.
« C’est un métier intéressant àcondition de le rendre
intéressant… », dit-elle.Bibliothécaire, pourquoi pas ?
Finalement, après avoirfui un BTS de secrétariat, elle est bien
devenue profes-seur de tennis… Ce qui lui a donné l’occasion de
voya-ger et le temps de lire, surtout des livres qui n’étaientpas
conseillés pour son âge. Peut-être est-ce pour celaqu’elle va
aujourd’hui droit au but et ne se prend paspour un poète. Une
légèreté utile par les temps qui cou-rent : « Le slam se
construit et devient ce qu’on en fait. Ily a quelque chose de
vivant, de ludique, ce que soulignel’utilisation du pseudo. Et
c’est un milieu qui vit avec trèspeu de règles. C’est
rare. »
Dis, Barbie, pourquoi tue Rick ?
Au début, au tout début, il y a sûrement le goût de la
langueorale, du jeu avec les mots et les sonorités. Celui du
partageaussi, à rebours de la poésie, qui, dit-elle, « s’est
coupéedes milieux populaires. Écrire, pour moi, c’est créer des
liens
entre des formes artistiques classiques, commela mythologie ou
la peinture, et la culture desérie B. » Barbie tue Rick n’en a pas
l’air, maisc’est une adepte du grand écart.Et sa vie aussi, elle la
partage entre son travailde bibliothécaire – « catégorie C,
précise-t-elle,ce n’est pas souvent qu’il y a des portraits de
pro-létaires dans Livre & Lire… » – et son itinérairede
slameuse. Le jour et la nuit. Lorsqu’elle adébarqué dans la BM du
quartier de Gère, il yavait trente lecteurs inscrits. Aujourd’hui,
seuleà bord de cette annexe de quelque 100 m2, elleen revendique
nettement plus. Notamment
depuis qu’elle a créé unfonds de livres en turc.En ce moment,
l’expo-sition consacrée auxdoudous des enfantsfait un malheur…
Directeur de la publication :Geneviève Dalbin
Rédacteur en chef :Laurent Bonzon
Assistante de rédaction :Marion Blangenois
Ont participé à ce numéro :Nicolas Blondeau, FlorenceDelaporte,
Antoine Fauchié,Delphine Guigues, Frédérick Houdaer,Géraldine
Kosiak,Danielle Maurel,Yann Nicol,Émilie Pellissier et Roger-Yves
Roche
Livre & Lire/Arald25, rue Chazière - 69004 Lyontél. 04 78 39
58 87fax 04 78 39 57 46mél. [email protected]
Siège social/Arald1, rue Jean-Jaurès - 74000 Annecytél. 04 50 51
64 63 - fax 04 50 51 82 05
Conception : PerluetteImpression : ImprimerieFerréol
(Imprim’Vert).Livre & Lire est imprimésur papier 100 %
recycléavec des encres végétales
ISSN 1626-1331
Barbie tue Rick fait partie de la Section Lyonnaisedes Amasseurs
de Mots, un collectif fondé en 2002par Marco DSL, alias Vers Sain
Rhétorique. Vient deparaître, aux éditions Asile, S.L.A.M. Session,
unouvrage réunissant des textes de plusieurs
slameurs.www.myspace.com/amasseursdemots
nous écrire > > > >[email protected]
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