*Cette recherche a reçu le soutien financier de l’ANR-08-VULN-001-PRAS-GEVU I NTERNATIONAL JOURNAL OF VIOLENCE AND SCHOOL, 12, SEPTEMBRE 2011, 26-58 SPORTIFS DE HAUT NIVEAU ET DOUBLE PROJET ENTRE BONNES INTENTIONS ET FAISABILITE * SOPHIE JAVERLHIAC A , FRANÇOIS LEYONDRE A ET DOMINIQUE BODIN A A VIP&S, UNIVERSITE EUROPEENNE DE BRETAGNE. ABSTRACT Alors que le double projet, c'est-à-dire le fait de mener de front carrière sportive à haut niveau et formation universitaire et/ou professionnelle, semble être une priorité dans les discours politiques, sa mise en œuvre reste problématique à bien des égards. Les contraintes propres à l’organisation du sport de haut niveau et le manque d’engagement des sportifs eux-mêmes ne suffisent pas expliquer cette difficulté. Au-delà des bonnes intentions et de l’investissement des cadres pour le favoriser c’est tout à la fois la question de la transformation des discours en actes et de la faisabilité qui se trouvent posés. MOTS-CLES Sportifs de Haut Niveau, Double projet, Formation, Politiques de formation.
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*Cette recherche a reçu le soutien financier de l’ANR-08-VULN-001-PRAS-GEVU
INTERNATIONAL JOURNAL OF VIOLENCE AND SCHOOL, 12, SEPTEMBRE 2011, 26-58
SPORTIFS DE HAUT NIVEAU ET DOUBLE PROJET ENTRE BONNES INTENTIONS ET FAISABILITE *
SOPHIE JAVERLHIACA, FRANÇOIS LEYONDREA ET DOMINIQUE BODIN A AVIP&S, UNIVERSITE EUROPEENNE DE BRETAGNE.
ABSTRACT
Alors que le double projet, c'est-à-dire le fait de mener de front carrière
sportive à haut niveau et formation universitaire et/ou professionnelle,
semble être une priorité dans les discours politiques, sa mise en œuvre reste
problématique à bien des égards. Les contraintes propres à l’organisation du
sport de haut niveau et le manque d’engagement des sportifs eux-mêmes ne
suffisent pas expliquer cette difficulté. Au-delà des bonnes intentions et de
l’investissement des cadres pour le favoriser c’est tout à la fois la question de
la transformation des discours en actes et de la faisabilité qui se trouvent
posés.
MOTS-CLES
Sportifs de Haut Niveau, Double projet, Formation, Politiques de
formation.
Sportifs de haut niveau et double projet
27
INTRODUCTION
Quels que soient les Ministres, Secrétaires d’Etats ou institutions tous sans
exception se sont attachés à évoquer la nécessité de préparer l’avenir des
Sportifs de Haut Niveau (SHN). Ainsi Dominique de Villepin avait indiqué,
lors d’une conférence, le 19 septembre 2006 que le gouvernement étudiait des
mesures visant à offrir de « véritables perspectives de carrière » pour la
reconversion des SHN, en particulier chez les femmes1.Affirmant cela il
pointait du doigt les inégalités perceptibles dans le sport de haut niveau mais
également la nécessité pour l’Etat de se préoccuper d’un problème de société.
Peut-on en effet continuer à demander à une partie de la population de
représenter la France, de rapporter des médailles et des titres, cherchant,
politiquement, à travers le sport à valoriser l’Etat, une politique, une société
sans s’intéresser aux sacrifices personnels, professionnels ou plus simplement
au devenir des athlètes qui se sont engagés dans cette voie pour accéder au
niveau international ? La réalité, nous l’avons évoquée précédemment, est, en
effet, beaucoup moins idyllique que certains discours politiques le laissent
entendre à l’image de la déclaration de Roselyne Bachelot peu de temps après
sa prise de fonction en tant que Ministre de la Santé, de la Jeunesse, des
Sports et de la Vie Associative2 :
« Concernant le sport de haut niveau, le quinquennat qui s’achève aura
permis à la France de demeurer parmi les plus grandes nations en se plaçant
au 7ème rang pour les médailles obtenues aux Jeux Olympiques d’Athènes de
2004 et au 4ème rang pour ce qui concerne les 25 sports les plus médiatisés
en France, avec cette particularité française d’atteindre l’excellence dans des
disciplines très diverses : de l’aviron à l’escrime, du canoë-kayak au handball,
du judo à la natation. Au-delà des moyens financiers supplémentaires
accordés aux fédérations pour des actions spécifiques en faveur du haut
niveau dans le cadre du FNDS, je voudrais saluer le soutien actif mené depuis
2006 au double projet sportif et professionnel de nos athlètes de haut
niveau » (Intervention de Mme Roselyne Bachelot-Narquin devant le Comité
National Olympique et Sportif Français [CNOSF] à Paris le 23 mai 2007)3.
et soutenu à l’Université Européenne de Bretagne (Rennes 2) en juin 2008.
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« Oui peut être oui, peut être que c’est un problème de formation mais bon
je pense que c’est plutôt un problème d’état d’esprit parce que si vous voulez
rentrer là dedans, si vous avez la fibre et, si vous vous dites que votre sportif
doit être… ici j’ai des anciens entraîneurs qui se sont mis au boulot, ils
réussissent très bien, Marc [inaudible], Jérôme Dreyfus, des gens qui
connaissent très bien le problème, Liliane Bonvin etc…. enfin des gens,
Frédérique Paulet, ils ont été entraîneurs et ils sont capables de regarder le
problème quoi ! Ils se sont mis dans le truc quoi ! Parce que le problème c’est
toujours la même chose, ils sont pas formés mais si vous voulez faire vous
vous formez, c’est une réalité, c’est pas… ce qui fait la différence entre deux
individus c’est souvent le fait qu’il y en a un qui a envie, qui est motivé et celui
qui a envie et qui est motivé, il a zéro problème, il y arrivera parce qu’il ira
chercher les connaissances qu’il n’a pas et qu’il aura » (Responsable de la
formation à l’INSEP).
Le suivi socioprofessionnel des SHN et l’efficience du système pourraient
néanmoins être grandement améliorés si les cadres référents dépendaient
directement, et recevaient leur lettre de mission, du Secrétariat d’Etat aux
Sports. Où, encore, s’il s’agissait de cadres du Secrétariat d’Etat aux Sports
détachés pour cette mission spécifique sur une fédération, voire plusieurs,
dans le cadre des petites fédérations en nombre de SHN. Le système ne peut
être opérationnel et efficace que s’il est piloté et que de réels moyens lui sont
affectés. A défaut, les déclarations politiques empreintes de bonnes intentions
perdureront et la préparation sportive continuera à se faire au détriment du
double projet. Ainsi, se pose une question simple : à quoi sert le CNOSF ? Il
semble préoccupé par la question de l’insertion professionnelle des SHN
puisque dans la plaquette, « Le guide de l’athlète de haut niveau »43, qu’il a édité,
le CNOSF insiste sur la nécessité de construire le double projet. En tant
qu’organe, a priori, indépendant, en charge, entre autres, de l’organisation et
de la direction de la délégation française aux Jeux Olympiques et aux
compétitions patronnées par le CIO44, il pourrait intervenir en tant
qu’interlocuteur privilégié de l’Etat. Comment expliquer son mutisme face à
l’abandon du projet de retraite, aux problèmes de sécurité sociale ou encore
aux obstacles rencontrés par les SHN pour développer un double projet ?
Comment l’expliquer alors que dans le même temps le CNOSF a amplement
soutenu auprès des responsables politiques le projet de reconnaissance du
statut de dirigeants bénévoles ? Mutisme d’un côté, action de l’autre,
comment ne pas penser aux propos de Bambuck, déjà cités en introduction,
pour qui les SHN représentent « une classe ouvrière qui a exactement les
mêmes problèmes qu’avait la classe ouvrière à la fin du 19ème siècle c'est-à-
43
CNOSF (2007). Le guide de l’athlète de haut niveau. Paris, éditions du CNOSF, CDRom disponible
également sur le site http://www.franceolympique.com/
44 Pour les autres missions et objectifs du CNOSF : http://www.franceolympique.com/index.phtml.
Sportifs de haut niveau et double projet
51
dire la précarité, la non reconnaissance des employeurs, le fait que l’on
consomme, que l’on cueille, que l’on presse et après que l’on jette »45
rejoignant ainsi les affirmations des tenants de la sociologie critique faisant
du sport un moyen d’aliénation de l’homme.
LES SHN AU CŒUR DU SYSTEME
Mais comment parler de l’avenir des SHN, de leur insertion
socioprofessionnelle sans prendre en compte les athlètes eux-mêmes. Un
constat s’impose : leur trop grande passivité. Alors que la fédération d’Escrime
est, pour le Secrétariat d’Etat aux Sports, une fédération « modèle », en
matière de conduite du double projet, Srecki, DTN adjoint en charge de cette
question, rappelle que la fédération ne doit pas se substituer à la motivation
de l’athlète à s’engager dans le double projet. Dans tous les cas, l’athlète doit
être le moteur essentiel du projet professionnel. Sans volonté, motivation ou
intérêt des athlètes rien n’est possible. A l’inverse, la FFE joue un rôle
d’accompagnant, d’informateur, voir d’incitateur. Dans tous les cas cet
appoint se fait dès l’entrée en structure :
« Un rôle de soutien de la fédération mais c’est pas à la fédération de
décréter un grand plan de reconversion si les athlètes ne sont pas intimement
convaincu de la nécessité […] c’est toute la réflexion qui est commune à
l’ensemble des pôles…c’est toute la logique des pôles ou…ou en plus du sport
de haut niveau il y a un souci particulier apporté aux études […] on ne met pas
en place un programme spécifique, on se contente et c’est déjà à mon
avis…euh…suffisant pour peut être couvrir 90% à 95% des…des besoins, on
se contente d’être des relais efficaces des dispositifs ministériels, Insep ou
autres. Cela a toujours été…euh…une…priorité des athlètes eux-mêmes […] la
spécificité de l’Escrime en tous cas c’est d’avoir peut être cette prise de
conscience…personnelle ».
Le constat est identique à la fédération d’Aviron. Si la volonté est politique
l’acteur principal doit être l’athlète lui-même. Reste les aspects culturels. Le
problème est celui de la progressive acculturation monosportive dans un
milieu qui se révèle trop souvent annihilant et anesthésiant. S’investir dans le
double projet revient en effet, dans les fédérations qui valorisent le mono
45 Bambuck, op. cit. p.140.
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projet, à donner des signes de désinvestissement et signe la marginalisation
de l’athlète.46
Les acteurs de la formation de l’INSEP ne peuvent que constater les freins
inhérents aux sportifs eux-mêmes. Le premier est la différence de milieu
socioculturel :
« C’est le premier point après si vous allez voir en fonction de la culture
dans le sport, si vous allez voir un rameur jamais il vous dira qu’il arrête tout
pour faire de la rame, le canoë kayak non plus… euh il y a pleins de sports
comme ça, l’escrime ils ne vont pas vous dire, « moi je vais pas… je suis
forcément des études en même temps et je fais forcément un travail en même
temps que mon sport, c’est incontournable ». […] Après il y a d’autres sports
où les gens vont dire…euh j’ai cité ceux là parce que évidemment ils vont tous
devenir ingénieurs, en général ce sont des tronches là plupart du temps,
globalement ça tire un peu vers le haut… après il y a des sports comme je vous
disais tout à l’heure la boxe, la lutte, le judo… des sports de combat… euh le
niveau… le niveau… le niveau de scolarité, de formation est moins important
globalement et, à partir de ce moment là, il faut qu’ils trouvent d’autres
projets professionnels qui correspondent le mieux à… » (Responsable de la
formation de l’INSEP).
Cette différence implique donc de concevoir des projets individualisés qui
satisfassent tout à la fois les désirs mais également les possibilités de chacun.
Là encore il serait intéressant d’observer si, dans le cas de milieux sociaux
moins favorisés, le sport de haut niveau a joué ou non un rôle d’ascenseur
social.
Le deuxième est le manque d’implication et d’autonomie des SHN. Trop
entourés certains sont immatures :
« Il y en a qu’on est obligé de traîner, de porter parce qu’ils ne savent même
pas faire une déclaration de sécu, prendre un billet d’avion etc. etc. Ils sont
complètement, ils ne sont même plus… ils sont supplantés par le système.
Donc il y a le mec qui se démerde et qui fait tout et puis il y a le mec qui est
complètement supplanté par le système parce qu’on lui a pris sa chambre, il
sait qu’il va aller s’entraîner là, on va aller manger là, il sait que quand il va
prendre l’avion, il y a le taxi qui va le prendre devant mais, si un jour il doit
téléphoner au taxi, il aura du mal, si un jour il doit prendre un billet d’avion il
ne sait pas comment ça se passe etc. Donc moi j’aimerais bien qu’à terme on
travaille sur l’autonomie du sportif, il faut qu’ils apprennent à se gérer parce
46
Javerlhiac, S. (2007). Les freins à la (re)conversion des athlètes de haut niveau en France étude de cas
de jeunes pongistes des équipes de France en rupture sportive. Esporte e socidedad. 3-7, pp. 1-52, p. 11
et passim.
Sportifs de haut niveau et double projet
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que… en plus ça sera un plus en compétition quoi ! » (Responsable de la
formation de l’INSEP).
La différence est flagrante à ce niveau entre hommes et femmes d’un côté
et sportifs qui peuvent vivre de leur sport et les autres. Bien évidemment les
femmes cumulent tous les handicaps. Moins aidées au niveau des aides
personnalisées que leurs homologues masculins, gagnant moins d’argent dans
leur sport qu’eux également lorsqu’elles ont la chance d’évoluer dans un sport
qui rétribue les SHN, elles s’engagent davantage dans le double projet :
« Les filles sont plus inquiètes que les garçons parce que… parce que…
parce qu’ y a pas… il y a pas la même somme d’argent qu’elles soient
rémunérées, salariées peut être d’un club ou simplement dans les primes
qu’elles peuvent avoir, c’est pas tout à fait les mêmes sommes et puis… euh
donc… et puis il y a certaines inquiétudes pour les filles par rapport à la
maternité qui peut arriver aussi donc en fait les stratégies… sont différentes
elles sont plus impliquées dans le projet de formation… dans le double
projet… euh on voit les différences par rapport à ça… après c’est plus délicat
quand elles sont vraiment… quand certaines sont en projet olympique je
dirais…euh je dirais qu’on ne voit pas de différences » (Manager du
département de l’orientation et de la formation et de l’emploi à l’INSEP).
L’argent agit, en effet, comme un annihilateur du projet professionnel des
garçons :
« Euh je veux dire c’est un peu comme Pascal Gentil47, c’est des mecs qui ne
font jamais d’études sérieuses parce qu’ils gagneront 4 fois ce qu’on gagne
quoi ! Donc autant qu’ils fassent à fond leur sport, que peut être ils fassent de
l’informatique ou de l’anglais, des trucs qui vont leur servir de bagage et puis
une fois qu’ils arriveront à la fin de leur carrière, ils se remettent dans leurs
études… » (Responsable de la formation INSEP).
Le troisième problème tient, chez les SHN, dans leur « inconscience » de
leurs réelles compétences. Cette question rejoint celle de l’autonomie et du
système sportif qui les survalorise et les surprotège. Ils peuvent parfois gagner
beaucoup d’argent, même si les sommes sont très loin de correspondre à celles
empochées par les footballeurs, golfeurs ou autres tennismen. Quel que soit le
sportif ils sont adulés par leurs fans. Bref les SHN manquent très souvent de
repères. D’un côté ils se survalorisent et font preuve tout à la fois
47
Pascal Gentil champion de taekwondo.
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« d’égocentration »48 s’estimant très souvent au centre d’événements
exceptionnels, et de « bénefficience », en mettant en avant davantage leurs
réussites que leurs échecs, d’un autre, ils ne sont pas conscients des
compétences acquises à travers l’exercice du sport de haut niveau et qui
peuvent être transférables ou utiles dans/à l’entreprise.
« X a du vous dire qu’elle a travaillé sur ce dossier là quand elle est venu à
l’Insep donc elle, elle a été un peu précurseur de ça, de ce truc là et maintenant
elle est partie au ministère et on continue à travailler ensemble et on a même
fait un truc, on a réalisé une étude qui est disponible d’ailleurs sur les
compétences49 que développent des…je parlais des compétences que
développent les sportifs de haut niveau dans le contexte du sport de haut
niveau, transférables en termes de capacités ou d’aptitudes, je mesure bien
mes mots dans le milieu de l’entreprise. […]. Il faut pas rêver…euh un très bon
sportif n’est pas forcément un très bon salarié, il faut pas le croire, en
revanche je suis sûr qu’il a développé dans le monde du sport des…un certain
nombre d’aptitude, peut être la rigueur dans le travail, l’organisation, au goût
de l’effort, au travail…partage…un peu d’équipier, toutes ces choses là font
que… à mon avis, il a déjà développé des caractéristiques qu’on trouve dans le
monde du travail ». (Responsable de la formation INSEP).
Ce travail de référencement est destiné d’abord à faire prendre conscience
aux SHN des compétences acquises dans l’exercice du sport de haut niveau et
de savoir les valoriser pour les transférer en entreprise ou tout simplement
mieux savoir se vendre aux entreprises. Parallèlement à cette finalité
première, le document réalisé50 permet aussi aux personnels du département
formation de discuter des qualités et profils des SHN avec les entreprises
susceptibles de les recruter ou de les intégrer en stages ou dans le cadre de
CIP.
Si les sportifs doivent bien être au cœur du projet et si le système doit
s’investir à leur service pour tenter de les accompagner vers une amélioration
de leurs performances en leur permettant de réussir leur double projet, force
est de reprendre à notre avantage les propos de Srecki rien ne peut se faire si
les athlètes ne sont pas intimement convaincu de la nécessité de mener à bien
le double projet. Cette prise de conscience et cette projection dans un au-delà
qui marque, de fait, la finitude de leurs ambitions sportives n’est cependant
pas un allant de soi. Les athlètes qui rentrent à l’INSEP sont jeunes, souvent
48
Reprenant en cela la terminologie de Greenwald, A. G. (1992). L’égo totalitaire, ou comment chacun
fabrique et révise sa propre histoire in Le soi, recherches dans le champ de la cognition sociale.
Lausanne, Delachaux et Niestlé.
49 Référence de compétences des sportifs de haut niveau fait par le DOFE, INSEP 2008
50 INSEP. (2008). Référentiel de compétences des sportifs de haut niveau. Paris, INSEP. Document du
Département de l’Orientation et de la Formation et de l’accès à l’Emploi.
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mineurs, et de fait culturellement influençables. Si les fédérations ne peuvent
pas les obliger à, du moins peuvent elles influer sur, la construction du double
projet.
CONCLUSION
Si le double projet semble être une priorité maintes fois réaffirmée il est
évident que sa mise en œuvre reste problématique voire aléatoire du moins
soumis à la bonne volonté des acteurs fédéraux, entre autres. La
transformation des discours en actes reste à faire et il revient au Secrétariat
d’Etat de mettre en œuvre une réelle stratégie de développement du double
projet afin de passer des effets d’annonces aux actions concrètes. Pour cela le
double projet doit devenir un des éléments clefs des PES. Comment en effet
affirmer que le double projet soit une priorité et que sa mise en œuvre ne soit
pas une obligation inscrite dans les PES et dont les effets seront contrôlés en
tant que tels ? Ce qui veut dire que le Secrétariat d’Etat doit recourir à des
indicateurs de réalisation et de performance pour contrôler les actions et la
réussite des objectifs annoncés en matière de formation et de double projet.
Les fédérations doivent en corollaire avoir l’obligation de tout mettre en
œuvre pour favoriser le double projet. Aucun athlète ne devrait se retrouver
sans formation ou sans emploi. Certes, il faut individualiser les parcours en
fonction des sportifs, de leurs carrières et des sports. Tous les sports ne
pourront développer un « modèle type conciliation » encore que l’exemple de
l’Aviron vienne contredire les tenants d’un jusqu’au-boutisme de
l’entraînement quantitatif. Il s’agit bien de mettre le SHN au cœur du projet
avec la réussite de cet athlète comme unique finalité. Le Secrétariat d’Etat
devrait soit, détacher des cadres référents compétents en matière d’aide et
d’accompagnement aux SHN soit, mettre en œuvre des formations pour les
cadres en place. L’objectif est bien évidemment de faciliter l’information et
l’accompagnement des sportifs. Mais pas seulement. Il s’agit aussi de réguler
les actions et de faire en sorte que tous travaillent et concourent pour le
même but avec les mêmes « méthodes ». Le double projet devrait concerner
tous les sportifs dès lors qu’ils entrent dans des filières d’accès au haut niveau.
Ce n’est pas le cas aujourd’hui et l’absence de renseignements concernant les
entrants/sortants des filières est un élément fondamental et révélateur de
l’absence de politique d’accompagnement de l’ensemble des SHN.
Constater les défauts du système revient à pointer ce qui manque
aujourd’hui : la réelle mise en œuvre d’une politique d’aide et
d’accompagnement au double projet. Mais la volonté politique existe-t-elle
réellement ? Le monde sportif lui-même n’a-t-il pas intérêt à avoir des
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athlètes totalement investis dans le mono projet sportif ? A avoir des athlètes
corvéables et malléables à merci ?
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