N° 41 septembre 20 SCÉNARIOÉCO SG Études économiques et sectorielles Achevé de rédiger le 24/09/2020 Merci de consulter le disclaimer à la fin du document La phase III est plus difficile pour les politiques économiques La résurgence de Covid19 a conduit à de nouvelles restrictions sur la mobilité, et le rebond économique est en perte de vitesse dans plusieurs pays, donnant lieu à ce que nous appelons la phase III de la crise Covid19. Les deux premières phases ont été caractérisées par un effondrement de l’activité en raison de confinements stricts suivi d’un rebond lorsque les mesures ont été assouplies. Cette troisième phase se caractérise par un virus toujours actif et des mesures restrictives plus localisées, mais qui pourraient durer longtemps. La crise sanitaire se prolonge et des mesures conçues comme temporaires ont été étendues à divers degrés, mais cela n’a pas été sans frictions. Il est néanmoins encourageant de voir émerger un consensus politique dans de nombreuses économies avancées pour mettre en place des programmes d’infrastructure axés sur les transitions numériques et écologiques. Pourtant, cette nouvelle phase de réponse à la crise comporte des risques plus importants de mise en œuvre et d'un risque d’interruption prématurée. Les pays les plus fragiles sur le plan budgétaire sont moins capables de financer des programmes nécessitant une injection importante de fonds publics. Pour la plupart des pays, nous prévoyons un rebond du PIB après une forte récession en 2020, mais le niveau du PIB à la fin de 2021 sera généralement inférieur à son niveau de fin 2019. La reprise devrait être plus prononcée dans les pays en développement. Pourtant, nous ne nous attendons pas à un véritable « découplage » en termes de croissance étant donné les faibles perspectives des prix des produits de base et l’absence d’un moteur de croissance dans l’économie mondiale. Toutes les grandes banques centrales devraient maintenir une politique très accommodante à l’horizon de nos prévisions.
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N° 41 septembre 20 SCÉNARIOÉCO...Scénario Éco N 41 | septembre 20 6 la déflation. Dans notre scénario central, nous prévoyons une contraction du PIB de -5,3% en 2020 et un
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N° 41 septembre 20
SCÉNARIOÉCO SG Études économiques et sectorielles
Achevé de rédiger le 24/09/2020
Merci de consulter le disclaimer à la fin du document
La phase III est plus difficile pour les
politiques économiques La résurgence de Covid19 a conduit à de nouvelles restrictions sur la
mobilité, et le rebond économique est en perte de vitesse dans plusieurs
pays, donnant lieu à ce que nous appelons la phase III de la crise
Covid19. Les deux premières phases ont été caractérisées par un
effondrement de l’activité en raison de confinements stricts suivi d’un
rebond lorsque les mesures ont été assouplies. Cette troisième phase se
caractérise par un virus toujours actif et des mesures restrictives plus
localisées, mais qui pourraient durer longtemps.
La crise sanitaire se prolonge et des mesures conçues comme
temporaires ont été étendues à divers degrés, mais cela n’a pas été sans
frictions. Il est néanmoins encourageant de voir émerger un consensus
politique dans de nombreuses économies avancées pour mettre en
place des programmes d’infrastructure axés sur les transitions
numériques et écologiques. Pourtant, cette nouvelle phase de réponse
à la crise comporte des risques plus importants de mise en œuvre et d'un
risque d’interruption prématurée. Les pays les plus fragiles sur le plan
budgétaire sont moins capables de financer des programmes
nécessitant une injection importante de fonds publics.
Pour la plupart des pays, nous prévoyons un rebond du PIB après une
forte récession en 2020, mais le niveau du PIB à la fin de 2021 sera
généralement inférieur à son niveau de fin 2019. La reprise devrait être
plus prononcée dans les pays en développement. Pourtant, nous ne
nous attendons pas à un véritable « découplage » en termes de
croissance étant donné les faibles perspectives des prix des produits de
base et l’absence d’un moteur de croissance dans l’économie mondiale.
Toutes les grandes banques centrales devraient maintenir une politique
Dette publique, % du PIB 135 162 166 158 169 162 168 165 171
Cent. = Central Prol. = Prolongé
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ESPAGNE
Le confinement a eu un impact sans précédent sur l'activité
économique, en particulier dans les services liés au tourisme.
Les mesures prises par le gouvernement permettent d’amortir le
choc sur le revenu des ménages et des entreprises, mais pas de
relancer la croissance. Le plan d’aide européen sera donc crucial.
La fragmentation du paysage politique avec l’absence de majorité au
parlement limitera encore les moyens d’action du gouvernement.
La pandémie de Covid-19 a généré une chute du PIB sans précédent en Espagne, de
-18% en T/T au T2-20 après -5% au T1-20. Le rebond « mécanique » attendu au
second semestre 2020 ne permettra pas un retour rapide au niveau de PIB antérieur
à la crise. Il faudra attendre fin 2023 dans le scénario central et fin 2024 dans le
scenario de crise sanitaire prolongée pour que l’activité retrouve son niveau du T4-
19.
Parmi les composantes de la demande, la consommation des ménages sera la plus
dynamique : elle reviendra au T4-20 à 95% de son niveau du T4-19. Les trois mois de
confinement ont généré une forte hausse de l’épargne des ménages qui sera
progressivement résorbée. Les régimes de chômage partiel (appelés « ERTE »)
utilisés en grand nombre ont soutenu le revenu des ménages pendant la récession.
Ainsi sur l’ensemble de l’année 2020, la consommation connaîtrait une chute de 12%
tandis que le revenu des ménages ne se contracterait que de 4%. La hausse du taux
d’épargne serait corrigée dès 2021 avec un fort rattrapage de la consommation.
Pas de retour à la trajectoire pré-crise Vers de nouvelles mesures de confinement ?
Source : SG Études économiques et sectorielles Source: Université d’Oxford
Sur le front de l’emploi, environ un tiers des destructions d’emplois observées sur
les mois de mars et avril 2020 (1,1 million de personne, principalement en contrats
temporaires) ont été effacées en juillet-août. On attend une deuxième vague de
destructions d’emplois en fin d’année 2020 et début 2021, du fait de faillites
d’entreprises ou de réajustement des business plans aux nouvelles conditions de
marché. Le taux de chômage connaîtrait un pic à 19,5% fin 2021 dans le scénario
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Espagne - Niveaux de PIB
Baseline Prolongé Consensus T4190
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janv.-20 févr.-20 mars-20 avr.-20 mai-20 juin-20
Espagne - Intensité des restrictionsEn rouge comparé aux autres économies en gris
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central et à 21% dans le scenario prolongé. Il resterait durablement élevé dans un
contexte d'incertitude élevée, de bilans affaiblis des entreprises, avec un impact
amplifié de la crise sur les secteurs à forte intensité de main-d'œuvre, tels que le
commerce de détail et l'hôtellerie/restauration. Ce secteur est responsable de plus
de la moitié des pertes d’emploi au premier semestre.
Les dépenses des touristes étrangers en Espagne représentent 6% du PIB, et l’on
estime que la crise actuelle pourrait coûter près de 4% de PIB cette année. La forte
contraction des exportations conduira également à une dégradation du solde
courant, qui passera en territoire négatif et ne se résorbera que lentement.
Mesures adoptées Taille Mds EUR
Marché du travail : protection des travailleurs vulnérables et des travailleurs indépendants, exonérations de charges sociales, régimes de travail temporaire (ERTE)…
26,2
Financement des secteurs de la santé et de la recherche : augmentation de l'allocation au ministère de la santé, transferts de fonds aux régions, taux de TVA de 0% sur les fournitures médicales
5,3
Introduction d’un revenu minimum universel : revenu garanti destiné aux foyers les plus modestes, compris entre 461 euros par mois pour une personne seule et 1,105 euros pour une famille
3,5
Assurer la viabilité des entreprises : possibilité d'adapter les paiements d'impôt sur le revenu des sociétés et des particuliers
1,1
Total 36,1
% du PIB 3,2 %
Du côté de l’investissement des entreprises le tableau est plus sombre. Après une
contraction record au T2-20 (-25% en T/T pour la construction, -27% pour les biens
d’équipement), le rattrapage ne sera que partiel. Les mesures visant à soutenir les
entreprises vont limiter le nombre de faillites, mais la faiblesse de la demande,
l'incertitude élevée, les contraintes de liquidités et la baisse de la rentabilité
limiteront la reprise de l’investissement. Selon les secteurs, il faudra attendre entre
un et trois ans pour que les entreprises retrouvent des capacités de financement.
Dans ce contexte, le plan d’aide européen baptisé Next Generation EU sera crucial
pour soutenir la croissance économique. L’Espagne s’est vu alloué un plafond de
71Mds€ de subventions européennes (6% du PIB espagnol et 20% du total des
subventions), qui seront versées sur la période 2021-2024.
Le total des mesures de soutien adoptées par le gouvernement espagnol est proche
de 3% du PIB, soit dans la fourchette basse des plans d’aide nationaux. Néanmoins,
la forte contraction du PIB aura un impact très négatif sur les finances publiques. La
contraction des assiettes fiscales conduira à une baisse sensible des recettes, tandis
que l'augmentation du chômage et le recours généralisé aux régimes de chômage
partiel («ERTE») vont entraîner une forte augmentation des transferts sociaux. De
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plus, les dépenses de santé augmentent considérablement. Ces facteurs, ainsi que
les augmentations déjà en vigueur des pensions et des salaires du secteur public,
devraient faire grimper le déficit en 2020. Il devrait ensuite se réduire en 2021, sans
changement de politique, à mesure que l'activité économique reprendra et parce
que la plupart des mesures mises en place pour répondre à la crise du COVID-19
n’auront qu’une durée temporaire.
Le paysage politique reste très fragmenté en Espagne, où il n’y a pas de majorité au
Parlement et la prise de décision reste difficile. Cela continuera d'empêcher le
gouvernement de prendre des mesures rapides et efficaces et limitera l'ampleur du
soutien public à l'économie. Les spreads resteront contenus grâce au soutien massif
Avec l'un des taux de mortalité les plus élevés d'Europe et l’un des
plus longs confinements, le Royaume-Uni est sévèrement touché
par l'épidémie de Covid-19.
Des mesures budgétaires et monétaires audacieuses n'amortiront
que partiellement le choc et la dette publique et privée augmentera
fortement.
L'UE et le Royaume-Uni ont toujours des positions très divergentes
concernant l'accord post-Brexit, ce qui ajoute d’importantes
incertitudes.
En réponse à l'épidémie de Covid-19, le gouvernement britannique a annoncé le 23
mars un confinement strict dans tout le pays. Cette mesure a eu un impact immédiat
sur l’activité. Par rapport au premier semestre 2019, le Royaume-Uni a enregistré une
baisse cumulée de 22,1 % au cours du premier semestre de 2020 (la deuxième plus
forte baisse en Europe après l'Espagne). L'économie a commencé à se redresser
grâce à l'assouplissement des mesures en juin. Si l'on examine le profil mensuel, le
PIB a rebondi de 8,7 % en juin 2020, après une croissance de 2,4 % en mai et une
chute record de 20,0 % en avril 2020.
Effets durables sur le PIB Les restrictions persistent
Source : SG Études économiques et sectorielles Source: Université d’Oxford
Pour atténuer l'effet de ces mesures sur l'activité économique, les autorités
britanniques ont mis en place un ensemble de mesures de soutien aux ménages, aux
entreprises et aux services publics d'une ampleur sans précédent au Royaume-Uni.
Sur le plan fiscal (voir tableau), la réponse comprend un financement
supplémentaire pour le NHS, les services publics, les organisations caritatives et les
services culturels (51 Mds GBP), le renforcement du filet de sécurité, notamment en
augmentant les paiements dans le cadre du régime de crédit universel ainsi qu'en
étendant d'autres prestations (8 Mds GBP) et des mesures de soutien direct aux
entreprises, comme des exonérations de l'impôt foncier, des subventions pour les
petites entreprises et les entreprises des secteurs les plus touchés, et une
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compensation pour les congés maladie (30 Mds GBP). Par le biais du programme de
soutien au revenu des travailleurs indépendants (SEISS) et du programme de
maintien dans l'emploi (CJRS), le gouvernement verse 80 % des revenus - jusqu'à un
maximum de 2 500 GBP par employé et par mois - des travailleurs indépendants et
des employés en chômage partiel (69 Mds GBP).
En juillet, le chancelier a annoncé un nouveau train de mesures visant à préserver
l'emploi. Ce plan devrait coûter jusqu'à 30 Mds GBP cette année. La principale
mesure est la prime de maintien dans l'emploi, qui consiste en un paiement unique
de 1 000 GBP aux employeurs britanniques pour chaque employé licencié qui reste
employé de façon continue jusqu'à la fin janvier 2021 (jusqu'à 9 Mds GBP).
Mesures adoptées Taille Mds GPB
Dépenses publiques : - Services de santé, autorités locales, mesures sociales pour les personnes vulnérables, mesures à destination du rail
51
Dispositif de sauvegarde l’emploi : - Chômage partiel
99 - Mesures d'aide pour les indépendants - Bonus de maintien dans l’emploi
Paquet de mesures sociales : - Crédit universel - seuil de revenus minimaux - Augmentation du crédit universel de 20£ - Suppression du délai de carence - Modification de l'allocation logement
8
Mesure de soutien aux entreprises - Transferts directs aux PME
30 - Annulation de l'impôt foncier des entreprises - Différés de TVA
Total 188
% du PIB 9%
Le gouvernement a également lancé des programmes visant à faciliter l'accès des
entreprises au crédit. Trois programmes de prêts distincts sont actuellement
disponibles : le Coronavirus Business Interruption Loan Scheme pour soutenir les
PME et le Coronavirus Large Business Interruption Loans Scheme pour soutenir les
grandes entreprises, qui comportent une garantie de 80 % pour les prêts allant
jusqu'à 5 Mn GBP pour le premier et jusqu'à 200 Mn GBP pour le second. Pour faciliter
encore davantage l'accès au crédit des petites entreprises en difficulté, le
gouvernement a également mis en place le programme de prêts « Bounce Bank »
pour les PME, avec une garantie à 100 % pour des prêts d'un montant maximal de 50
000 GBP.
L'Office for Budget Responsibility, l'organisme britannique de surveillance des
finances publiques, estime que l'impact direct de ces nouvelles mesures sur les
emprunts de l’État pour l'exercice 2020-21 sera de 192 Mds GBP, soit près de 9 % du
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PIB. En raison de la baisse concomitante des recettes publiques, il semble désormais
plausible que l’emprunt avoisine 322 Mds GBP sur l'exercice fiscal 2020-21, soit 15 %
du PIB, un niveau qui n'a pas été atteint depuis la seconde guerre mondiale.
Malgré l'ampleur sans précédent de l'intervention des pouvoirs publics, il convient
de noter que les mesures annoncées interagissent avec le système de prestations
préexistant. À cet égard, le Royaume-Uni se distingue en offrant un niveau
relativement faible de soutien aux salariés qui se retrouvent au chômage,
notamment par rapport à d'autres pays européens disposant d’un système
d’assurance chômage plus protecteur pour les ménages. Il est donc peu probable
que les mesures budgétaires annoncées s'avèrent suffisantes pour éviter des effets
de long terme sur l’économie. Une enquête récente a révélé que 11 % des travailleurs
au chômage partiel sont convaincus qu'ils seront licenciés lorsque le dispositif
s’interrompra et 14 % pensent que c'est assez probable. En supposant que la
proportion de conversion sera de 10 %, le taux de chômage devrait atteindre un pic
de 9,7 % en 2020.
L'économie britannique est également soutenue par des politiques monétaires
extrêmement accommodantes visant à préserver l'accès des entreprises et des
ménages au financement et à assurer la liquidité de marché. La Banque d'Angleterre
(BoE) a réduit son taux principal de 65 pb à 0,1 % en mars. La BoE a augmenté de 300
Mds GBP la part des obligations du gouvernement britannique et des obligations de
sociétés non financières détenue par la banque centrale (soit une augmentation de
67 % par rapport au montant détenu en mars). La BoE a également introduit un
nouveau programme de financement à terme pour les banques commerciales afin
de renforcer la transmission de la baisse des taux, avec des incitations
supplémentaires pour les prêts à l'économie réelle, et en particulier aux PME. Le
Trésor et la Banque d'Angleterre ont lancé la Covid Corporate Financing Facility qui,
avec les programmes Coronavirus Business Interruption mentionnés ci-dessus, met
à la disposition des entreprises 330 Mds GBP de prêts garantis. Le Trésor et la BoE
sont également convenus d'étendre temporairement l'utilisation du découvert du
compte du gouvernement à la BoE afin de fournir une source de financement à court
terme supplémentaires si nécessaire.
Ces politiques ont efficacement soutenu l'accès des entreprises à la dette. Les
derniers chiffres indiquent que les entreprises du secteur privé britannique ont levé
un total de 69 Mds GBP auprès des banques et des marchés financiers de mars à juin,
ce qui a entraîné une augmentation de 9,2 % de l'encours de la dette au cours des 12
derniers mois à la fin juin.
Le Royaume-Uni a officiellement quitté l'UE, mais les termes de sa relation future
avec l'Union doivent encore être fixés, et le temps presse pour parvenir à un accord
avant l'expiration des accords de transition en décembre. L'UE insiste sur le fait
qu'un accord final doit être conclu avant la fin du mois d'octobre afin de donner
suffisamment de temps au Parlement européen et au Conseil pour avaliser l’accord.
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Jusqu'à présent, les négociations ont abouti à une impasse sur les droits de pêche
et les demandes de l'UE concernant des normes communes en matière d'aides
d'État, de droits des travailleurs et d'environnement. Le Royaume-Uni est également
réticent à l’idée d’inclure un mécanisme horizontal de règlement des différends
demandés par l'UE. Un Brexit sans accord reste par conséquent une possibilité très
sérieuse.
Notre hypothèse de travail concernant l'accord sur les futures relations entre le
Royaume-Uni et l'UE27 est néanmoins qu'un accord sur les marchandises sera
trouvé pour permettre le commerce futur sans quotas ni droits de douane à
condition que le Royaume-Uni s'aligne sur l'UE27 en matière de réglementation. En
ce qui concerne les services financiers, l'UE a entrepris des évaluations
d'équivalence du régime britannique, mais a déjà déclaré qu'elle n'évaluerait pas le
Royaume-Uni dans certains domaines, notamment la fourniture directe de services
bancaires d'investissement transfrontaliers, à court ou moyen terme. Cela risque de
réduire les exportations britanniques de services financiers en obligeant le
Royaume-Uni à rechercher un régime d'équivalence dans chaque juridiction de l'UE.
Pour le clearing, la Commission européenne envisage l'adoption d'une décision
d'équivalence temporaire pour le cadre réglementaire des CCP britanniques. Cette
décision est néanmoins susceptible d'être révoquée. En ce qui concerne les autres
services, nous nous attendons à ce qu'ils soient soumis à diverses restrictions. Par
exemple, alors que les transporteurs britanniques devraient pouvoir transporter
librement des marchandises entre le Royaume-Uni et l'UE27, nous ne nous
attendons pas à ce qu'ils soient autorisés à opérer librement au sein de l'UE27.
L’impact à court terme d'un éventuel "no deal" Brexit devrait être atténué par le fait
que les entreprises ont eu plus de temps pour se préparer à un tel résultat. En outre,
le Royaume-Uni a récemment annoncé que les contrôles frontaliers complets sur les
marchandises entrant au Royaume-Uni n'entreront pas en vigueur avant juillet 2021.
À moyen et long terme, nous considérons que le Brexit réduira de 0,8 point de
pourcentage le potentiel de la tendance par rapport à celle affichée avant le
referendum sur le Brexit, ce qui ramène ce chiffre à 1,0 % selon notre hypothèse de
Dette publique, % du PIB 85 107 110 109 117 110 117 111 118
Cent. = Central Prol. = Prolongé
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ÉTATS-UNIS
La reprise économique devrait être lente dans un contexte de crise
sanitaire continue et de fin de relance budgétaire.
La Fed a décidé de changer son objectif pour cibler une inflation
moyenne. Ce changement se traduira par des taux directeurs bas
dans les années à venir.
Les principaux risques sont une augmentation du nombre de
victimes liées au Covid-19 et une augmentation des tensions
sociales et politiques autour des élections générales du 3 novembre.
L'activité économique et les conditions du marché du travail restent gravement
affectées par la crise du Covid-19. Le PIB réel s'est contracté de 32% en rythme
annualisé au T2-20, la consommation privée et l’investissement des entreprises
affichant des baisses importantes. Le marché du travail s'est également fortement
dégradé. Le taux de chômage est passé de 14% en avril à 8% en août, un niveau qui
reste toutefois supérieur au niveau le plus élevé atteint lors de la crise de Lehman.
La reprise de l'activité et du marché du travail devrait être progressive car la crise
sanitaire persistante s'est accompagnée de tensions sociales croissantes et
d'incertitudes politiques concernant les élections générales de novembre. En effet,
un indicateur de haute fréquence comme le nombre de passagers dans les aéroports
a calé à 40% de son niveau d'avant la crise dans un contexte de résurgence du
nombre de cas de Covid-19 et de mise en œuvre ou d'extension de mesures
sanitaires par certains États. Les créations d'emplois ont également stagné, ce qui
indique que le taux de chômage devrait rester élevé dans les mois à venir.
Enfin, certains indicateurs de consommation ont retrouvé leurs niveaux d'avant la
crise, soutenus par les transferts budgétaires importants mais temporaires aux
ménages. La plupart de ces transferts ayant expiré ou ayant considérablement
diminué, il est probable que la reprise de la consommation privée stagnera. Au total,
le PIB devrait se contracter de 6% en 2020 et augmenter de 3,7% en 2021. En cas de
prolongation de la crise sanitaire dans les mois à venir, l'économie devrait se
contracter de 7% en 2020 et croître de seulement 1% en 2021.
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L’économie devrait retrouver son niveau de
2019 jusqu’en 2023
Les mesures de distancement ont été en partie
réimplémentés
Source: SG Economic and Sector Research Source: Oxford Economics
La Fed a annoncé des modifications importantes de ses objectifs à long terme et de
son cadre de politique monétaire. Dans le nouveau cadre, la Fed « cherchera à
atteindre une inflation moyenne de 2% dans le temps» et évaluera également «les
déficits d'emploi par rapport à leur niveau maximum plutôt que par des écarts par
rapport à leur niveau maximum» pour déterminer l'orientation de la politique
monétaire. En termes pratiques, cela signifie que la Fed tolérera que l’ inflation de
base du PCE dépasse 2% pendant un certain temps après des périodes où l'inflation
est en dessous des 2% alors que le faible chômage lui-même ne justifiera plus une
politique plus stricte en l'absence de pressions inflationnistes claires comme c’était
le cas auparavant.
Ce changement de cadre intervient après une longue période au cours de laquelle
l'inflation sous-jacente de l'indice PCE a constamment évolué sous les 2% (la
moyenne mobile sur 5 ans s'établit à 1,5%) tandis que le taux de chômage a atteint
un creux historique avant la crise du Covid-19. Le bilan de la Fed s’est stabilisé à 7
mds USD. Les achats de bons du Trésor et de MBS onnt ralenti, la volatilité des
marchés financiers ayant considérablement diminué. Les autres achats d'actifs
comme la facilité de crédit aux entreprises (750 milliards USD autorisés) ou la facilité
de prêt Main Street (500 milliards USD autorisés) restent largement inutilisés. Dans
l'ensemble, la Fed devrait maintenir sa fourchette de taux de politique monétaire à
0% - 0,25% dans les années à venir, tandis que le bilan devrait également rester
important.
Sur le plan fiscal, le Congrès américain et l'exécutif ne sont pas parvenus à un accord
pour prolonger plusieurs mesures de relance. À savoir, les allocations de chômage
hebdomadaires supplémentaires de 600 USD versées par le gouvernement fédéral
ont expiré fin juillet, le délai d'application des prêts PPP (prêts-remises aux petites
et moyennes entreprises en échange d'un maintien de la masse salariale) a
également expiré en juillet et les suspensionss des’expulsions de logement en cas de
loyers impayés se terminent en septembre. Ces mesures se sont jusqu'à présent
avérées fructueuses car malgré le taux de chômage élevé, le revenu disponible des
ménages a augmenté au T2-20 tandis que les prêts PPP ont permis de lisser la baisse
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Etats-Unis - Niveaux de PIB
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Etats-Unis - Intensité des restrictionsEn rouge par rapport aux autres économies en gris
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des bénéfices des entreprises. En conséquence, la fin de ces mesures devrait se
traduire par une reprise plus douce de la demande intérieure. Compte tenu du
calendrier électoral, il est peu probable qu'un autre projet de loi de relance
important soit voté au Congrès.
Mesures annoncées Montant Mds USD
Transferts de liquidités du Trésor aux ménages 1200 USD (2400 USD par couple) + 500 USD par enfant
293
Paycheck protection program (Prêts bancaires pouvant s'élevant jusqu'à 10 millions et qui peuvent ne pas être remboursés si l'entreprise maintient sa masse salariale constante deux mois après l'origination du prêt)
670
Extension des allocation chômage (la période d'éligibilité aux allocations chômages est entendue de 13 semaines, le gouvernement fédéral abonne 600 USD par semaine jusqu'au 31 juillet)
268
Transferts aux collectivités locales 150 Hausse des dépenses de santé 121 Baisse d'impôts temporaires 161 Autres dépenses 347
Total 2010
% du PIB 11.2%
Les principaux risques pour les perspectives restent l'extension de la crise sanitaire
et la montée des tensions sociales et politiques. Le nombre croissant de cas a
contraint certains États à réimposer à nouveau certaines mesures NPI, retardant
ainsi la reprise.
Les élections du 3 novembre se dérouleront également dans un environnement
social et politique dégradé. Le chômage important et les tensions raciales (le
chômage afro-américain est de 15%) se sont traduits par différentes
manifestationsobligeant certaines villes à appliquer le couvre-feu. De plus, le
président Trump a fait plusieurs déclarations suggérant qu'il pourrait ne pas
reconnaître rapidement le résultat de l'élection si elle lui était défavorable. Un
résultat serré ientrainerait sans doute un long retard. Ces incertitudes politiques,
freineraient probablement les perspectives d'investissement.
Dette publique, % du PIB 38 45 46 45 47 45 47 45 47
Cent. = Central Prol. = Prolongé
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INDE
Lourdement frappée par la Covid-19, la croissance reprendra très
graduellement.
La relance fiscale étant limitée, une fine marge de manœuvre est
possible du côté monétaire.
La vulnérabilité du système financier s’accroît avec la forte baisse
de la croissance.
La croissance du PIB est très lourdement frappée par la Covid-19, elle reprendra
seulement graduellement au cours des prochains trimestres. Le risque d’entrer dans
un régime de croissance bien plus faible que la dernière décennie tend à augmenter.
Entrée dans un régime de croissance faible Absence d’amélioration de crise sanitaire
Source : SG Études économiques et sectorielles Source: Université d’Oxford
Le pays a enregistré une contraction violente du PIB au T2 2020, de -24% en GA, en
raison des extensions répétitives du confinement. Les données de mobilité semblent
montrer un retour à la normale. Mais dans certaines activités, la fréquentation reste
encore bien en-dessous de la période pré-crise, c’est le cas de la distribution de
détail et des loisirs qui sont à -40% en fin août. Le contexte sanitaire n’est en effet
pas favorable à une vraie normalisation de la vie économique et sociétale, le nombre
de cas de contamination ne montre toujours pas de signe baissier (plus de 80 000 par
jour en début septembre). Les incertitudes sanitaires constituent ainsi le premier
facteur qui contraint la reprise économique.
Le deuxième facteur est la capacité réduite de relance, tant du côté fiscal que
monétaire. Du côté fiscal, le plan de relance est marqué par la contrainte budgétaire,
le ratio de dettes publiques sur PIB s’avoisinant 70%. D’abord, certaines mesures de
relance ne sont que des mesures existantes reprises dans le plan ; ensuite, une
grande majorité des mesures concerne des facilités de crédit, des garanties ou des
extensions de délais de paiement, elles n’impliquent pas de dépenses fiscales
supplémentaires ; enfin, les « vraies » mesures impliquant une réduction de recettes
d’Etat ou une hausse de dépenses ne devraient représenter que 1,2% du PIB alors
que le plan tel qu’il est annoncé monte jusqu’à 11% du PIB. Le soutien fiscal n’est
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Inde - Niveaux de PIB
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Inde - Intensité des restrictionsEn rouge par rapport aux autres économies
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donc pas suffisant face à l’ampleur de l’effondrement économique, ni pour aider à la
reprise de l’appareil économique.
Mesures adoptées Taille* Mds INR
Stimulus annoncé en mars basé sur Pradhan Mantri Garib Kalyan Package (un programme visant à soutenir les ménages à faible revenu, par ex versement de liquide ou en nature)
910
Paiement de contribution à l'EPF (Employment Provident Fund) par le gouvernement pendant 6 mois. Baisse du taux de contribution obligatoire.
93
Réduction de 25% des taux d'imposition sur TDS (Tax Deducted at Source) & TCS (Tax Collection at Sources)
500
Distribution des aliments aux travailleurs migrants (80 mn concernés) 35
Proposition dans le cadre du CAMPA (Compensatory Afforestation Fund Management and Planning Authority) pour créer des postes de travail aux tribus
60
Investissement en agriculture 150
Investissement dans 8 secteurs critiques (charbon, minerais, défense, espace aérien, infrastructure sociale, distribution d'électricité, aéronautique et énergie nucléaire)
481
Total 2229 % du PIB 1,2%
Du côté monétaire, l’efficacité de l’assouplissement est compromise par une
transmission très partielle de la politique monétaire. En effet, la banque centrale a
baissé son taux d’intérêt directeur de 115 points de base de mars en mai, mais le taux
prêteur des banques appliqué à leurs meilleurs clients (prime rate) est resté
inchangé par rapport à son niveau de mars. L’écart entre le taux directeur et le taux
des banques s’est creusé de façon inédite.
Même si le taux repo est déjà à son niveau historiquement bas, à 4%, il existe encore
une fine marge à la baisse. Parmi les outils de politique économique, celui-ci est
encore manœuvrable tandis qu’un stimulus budgétaire risque d’affaiblir encore les
finances publiques, avec un ratio de dettes sur PIB qui devrait monter d’environ 10
points de pourcentage en année fiscale 2020/2021 sans budget supplémentaire.
La vulnérabilité du système financier constitue le troisième facteur faisant obstacle
à la reprise. Le pays a déjà connu une série de défaillances des institutions
financières, en commençant par celles des institutions non bancaires en 2018, qui
s’est élargie par la suite avec la reprise de Yes Bank, la quatrième banque privée du
pays, par la banque centrale en mars 2020. Les banques publiques ont un taux de
prêts non performants plus élevé (plus de 10%) que les banques privées, mais elles
doivent soutenir les institutions fragilisées ou défaillantes.
Sous le moratoire de remboursement de prêts en vigueur entre mars et août, la
détérioration de la qualité de crédit ne s’est pas encore matérialisée. Le moratoire
ayant pris fin le 31 août, les micro, petite et moyenne entreprises seront les plus
impactées par la crise sanitaire et pourraient se retrouver en situation de stress si la
reprise économique n’est pas suffisamment au rendez-vous. La vulnérabilité du
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système financier serait aggravée, et sa capacité à soutenir la croissance encore plus
réduite.
Transmission monétaire quasi-absente Normalisation lente de l’activité
Source : RBI, SG Études économiques et sectorielles Source : RBI, Central Statistics Office, SG Études économiques et