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Gaëtan Gorce LES ESSAIS Faire la révolution de l’emploi Faire la révolution de l’emploi
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May 27, 2020

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Faire la révolutionde l’emploi

Gaëtan Gorce

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S O M M A I R E

Introduction .......................................................................... 5

Garantir à chacun un véritable droit à l’avenir ............... 11

D’abord, réformer en profondeurla formation professionnelle .............................................. 12Passer ensuite d’une logique d’assurance chômageà une politique active de retour à l’emploi ........................ 19

Veiller à la qualité de l’emploi ........................................... 24

D’abord, renouveler la problématique de la réductiondu temps de travail ........................................................... 24Faire en sorte que le travail paie ! ..................................... 32

Mettre en place une véritable politiquedes âges au travail ................................................................ 38

Et d’abord les jeunes ! ....................................................... 41Donner la priorité au maintien des seniors dans l’emploi .... 47Enfin, réorienter les financements en directiondes emplois qualifiés ......................................................... 55

Conclusion ............................................................................. 65

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Gaëtan Gorce est député de la Nièvre, vice-président du groupe socialisteà l’Assemblée nationale en charge du travail et de l’emploi et secrétairenational du Parti socialiste en charge de l’exclusion.

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Introduction

L’économie mondiale est entrée dans une phase de crisecomme elle n’en a pas connue depuis les années 1930.Cette crise trouve ses racines dans la suppression deschanges fixes qui a entraîné des bouleversements dansle monde financier, notamment l’apparition despremiers « produits dérivés » qui ont joué un rôledéterminant de stabilisation des changes flottants, avantque leur développement généralisé n’en fasse un facteurtout aussi déterminant d’instabilité. Le systèmefinancier qui a alimenté la croissance du crédit vacille,victime de ses propres excès. Le libéralisme hiertriomphant en appelle aujourd’hui à un État plusprovidentiel que providence.

Cet essai a été rédigé en partenariat avec les experts regroupés au sein duCercle de l’emploi.

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Cette révolution est rendue encore plus nécessaire par lestransformations que connaît le marché du travail sousl’effet des mutations démographiques. Malgré l’annonced’une stabilisation de la population active pour lapremière fois depuis une décennie, la persistance d’unchômage élevé, une fois la reprise venue, reste unehypothèse plausible, en particulier dans les territoires lesplus en difficulté ou pour les actifs les moins qualifiés.

La raison en est simple. L’effort entrepris n’estabsolument pas à la hauteur de l’investissementnécessaire pour corriger le décalage, déjà spectaculaire,entre d’une part la nature et le niveau des formations etd’autre part les besoins des métiers. Rien n’est fait pourcorriger les inégalités entre les salariés selon leurqualification, entre les entreprises selon leur taille, nientre les territoires selon leur richesse. Rien – ou presque –n’est entrepris pour permettre aux millions de jeunes oude seniors trop peu qualifiés ou dont les qualificationssont devenues obsolètes de pénétrer ou de réintégrer lemarché du travail. Rien – ou presque – n’est réalisé pour

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Mais la crise financière s’est aussi nouée dans uncontexte de mutation économique profonde avecl’affirmation de nouvelles puissances économiques– Chine, Inde, Brésil, notamment – et l’affaiblissementde l’économie américaine minée par un endettementcroissant et une désindustrialisation dans les produits degrande consommation. Il est beaucoup trop tôt pour enmesurer les conséquences concrètes. Mais, de manièreinéluctable, la récession dans laquelle sont entrées leséconomies américaine et européenne aura pour premiereffet une augmentation du chômage et l’aggravation dumalaise qui affecte le monde du travail.

Il est donc urgent de s’attaquer à la fois aux causesconjoncturelles mais aussi structurelles du chômage, enveillant à la cohérence de ces deux approches. L’objectifne peut être qu’une révolution de la politique de l’emploi,et pas une simple révision. L’ampleur des moyensmobilisés chaque année dans ce domaine (plus de60 milliards d’euros) rend en effet d’autant pluschoquante l’insuffisance des résultats obtenus.

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sont aussi ceux qui se sentent le plus souvent épuisésaprès une journée de labeur. Si l’on en croit une enquêteeuropéenne, plus de la moitié des actifs sont concernéspar l’intensification du travail3.

Mais la France se distingue aussi par un sentiment dedéclassement beaucoup plus affirmé que dans d’autrespays : non seulement plus de quatre Français sur dixestiment que leur qualification leur permettraitd’effectuer un travail plus exigeant, mais une majoritéde salariés se déclarent mécontents de leurs revenus.Le taux de satisfaction ne dépasse pas 76 %, à l’instar desPolonais ou des Portugais, alors qu’il atteint plus de 90 %dans les pays nordiques ou anglo-saxons4.

Enfin, les niveaux de peur et d’insécurité qu’éprouve lapopulation française sont proches de ceux des pays lesplus pauvres de l’Europe des Vingt-sept. Selon l’Euro-baromètre spécial5 réalisé à l’occasion de la consultation

1. Lucie Davoine et DominiqueMéda,Place et Sens du travail en Europe : une singularité française,Centre d’études de l’emploi, 2008.2. Thomas Philippon, Le Capitalisme d’héritiers, Le Seuil, « La République des idées », 2007.

3. Agnès Parent-Thirion (dir.),Rapport européen sur les conditions de travail, 2007.4. Étude TNS/Commission européenne, 2007.5. Eurobaromètre spécial 273, « La réalité sociale européenne », décembre 2007.

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tarir le flot de jeunes non diplômés que la Francecontinue de présenter chaque année aux portes del’emploi, alors que, trois ans après la fin de leurs études,leur taux de chômage avoisine les 41 %.

À cela s’ajoute un double sentiment – insatisfaction autravail et déclassement – ressenti par les salariés, quipénalise notre économie. Au-delà du formidable gâchishumain que représente un taux de chômage élevé, lemécontentement des Français au travail, l’un des plusforts d’Europe, est d’autant plus paradoxal qu’ilstémoignent un fort attachement à l’emploi et aux valeursqui s’y rattachent1. La faute en incombe à de mauvaisesrelations sociales2, mais aussi à des conditions de travailet d’emploi indignes d’un grand pays riche : selon leProgramme international d’enquêtes sociales (ISSP), laFrance se distingue par une proportion de travailleurssoumis au stress plus importante qu’ailleurs. Les Français

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6. Robert Castel, La montée des incertitudes : travail, protection, statut des individus, Le Seuil, 2009.

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du Bureau des conseillers de politique européenne(BEPA) sur la réalité sociale en Europe, les Français sontles plus nombreux, avec les Polonais, les Lituaniens, lesHongrois et les Slovaques, à douter de leur capacité àgarder leur emploi dans les mois à venir ou à en retrouverun de même niveau.

Tous ces facteurs conjugués ont pour effet de dégradernos relations sociales et la compétitivité de notre pays. Leniveau moyen de formation de la population active estinférieur à celui de beaucoup d’autres pays européens,notamment nordiques ; nos performances éducativessont médiocres ; nos investissements dans le capitalhumain, la recherche et l’enseignement supérieurinsuffisants, le climat social tendu6. Le fait est là : notrepays n’est plus sur le chemin d’une économie de pointe !

L’économie française a donc besoin d’une nouvelle stratégiequi intègre politique de l’emploi et politique du travail, etcette urgence est encore renforcée par la gravité de la crise.

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Garantir à chacun un véritable droità l’avenir

Nos politiques publiques ont depuis trop longtemps pris unmauvais cours. Depuis des décennies, elles semblent, endépit du bon sens, privilégier des exonérations tous azimutset l’augmentation de la durée du travail, là où il faudrait aucontraire mettre l’accent sur la formation, l’élévation desqualifications et l’amélioration des conditions de travail.

Il est temps de rompre avec ces choix et d’établir unecontinuité entre politique de l’emploi et politique du travail,pour remettre notre société en mouvement. Celles-ci sonten effet indissociables. C’est sur l’ensemble de son parcoursprofessionnel que le salarié doit être pris en compte. Il nepeut s’agir de régler la question de l’emploi à un momentparticulier ; il faut au contraire l’envisager dans son contexte,en fonction de l’évolution des métiers et des attentes etcapacités de ceux qui les exercent ou aspirent à les exercer.Replacer ainsi les politiques publiques en perspective, c’estrendre à chacun un droit à l’avenir : pour les jeunes un droit

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à une qualification synonyme d’entrée facilitée sur lemarché du travail et, pour les salariés, un droit à la formationtout au long de la vie. Celle-ci contribue en effet à lamobilité et à la promotion professionnelles, évite ladéqualification et permet d’organiser la transitionprogressive vers la retraite. Ce qui suppose aussi que soitréglée au préalable la question de la pénibilité.

Il ne s’agit rien moins que de passer du « prêt-à-porter »informe et donc inefficace au « sur-mesure », pouraboutir à la fois à une baisse structurelle du chômage, àune durée plus courte de recherche d’emploi, à desperspectives de carrière plus motivantes pour tous et àdes fins de carrière plus satisfaisantes pour les salariés lesplus âgés. Comment y parvenir ?

D’abord, réformer en profondeur la formationprofessionnelle

Les défaillances de notre système de formationprofessionnelle ont été suffisamment étudiées et

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dénoncées, ces dernières années, pour que l’on puisse seconcentrer sur la nature des réformes à conduire.

Se rapprochant d’une logique de sécurité socialeprofessionnelle, le nouveau système devrait être construitautour de l’idée de solidarité, les « bien formés »contribuant à la formation des plus faiblement qualifiés,c’est-à-dire ceux dont l’absence, l’obsolescence ou la non-reconnaissance des qualifications est un frein à l’accès,au retour ou au maintien dans l’emploi. Il s’agirait deconstruire par des réponses collectives une formed’assurance contre la non-qualification ou la déqua-lification. Dans la prise en compte des besoins deformation face au risque de déclassement professionnel,les statuts des personnes (demandeur d’emploi,indemnisé ou non, salarié, indépendant, etc.) devraientêtre sans impact sur les conditions de prise en charge,même si naturellement les modalités pédagogiquespourraient être adaptées. Le système de formationprofessionnelle ainsi refondé comprendrait ensuite undeuxième niveau tourné vers la mobilité professionnelle

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transférables et cumulables, qui pourraient être renforcéspour les personnes les moins qualifiées.

Enfin, le troisième et dernier échelon du systèmecorrespondrait davantage à une logique d’investissementéconomique de la part de l’entreprise dans le capitalhumain, par exemple pour former ses salariés à desnouvelles techniques, aux logiciels récents, etc. Il est àcet égard significatif de constater que les entreprisesconsacrent aujourd’hui en moyenne plus d’argent à laformation de leurs salariés qu’elles n’y sont contraintesfiscalement. Ces besoins vitaux dans le cadre d’uneéconomie de la connaissance n’ont pas vocation à être« sacrifiés » pour la formation des publics les moinsqualifiés. Ils n’ont pas pour autant à primer sur celle-ci età l’évincer de fait au sein d’un système qui conduit àcomptabiliser indistinctement toutes les actions deformation au titre de l’obligation fiscale.

Parallèlement à ces trois niveaux constitutifs d’unsystème de formation professionnelle rénové, l’accent

choisie, au travers d’un appui à des formations répondantà des démarches individuelles de promotion sociale etprofessionnelle.

Ces deux premiers niveaux auraient vocation à être financésà la fois par les collectivités publiques, notamment lesRégions, et par les entreprises pour une part substantiellede l’actuelle obligation fiscale proportionnelle à la massesalariale. En termes d’outils, ils se traduiraient par une offrecollective de formation autour de programmes de remise àniveau sur les savoirs de base, ainsi que par des dispositifsde préparation à la qualification et de formation qualifiante.Ils seraient étroitement articulés avec les contrats enalternance (apprentissage et contrats de professionnali-sation), qui seraient également mobilisés dans un réelobjectif d’insertion professionnelle de publics souventéloignés de l’emploi. L’accès à l’offre de formation seraitégalement facilité par l’usage de droits individuels – droitindividuel à la formation (DIF), congés individuels deformation (CIF), congés bilans de compétences et congéspour validation des acquis de l’expérience (VAE) –

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serait mis sur une logique d’orientation tout au long de lavie, en assurant l’accessibilité et la complémentarité desoffres d’accompagnement, d’information et de conseilexistantes pour les jeunes, et en les développant pour lesactifs. À titre d’exemple, pourrait être ainsi encouragée laconstitution de véritables centres territoriaux de conseilen compétences, à la fois pour les individus et pour lesentreprises. Ces centres joueraient le rôle de « plates-formes ressources humaines » sur un territoire, regroupantpar exemple les capacités d’intervention des Régions, desorganismes qu’elles financent (type Cités des métiers,points d’information-conseil en VAE, etc.), des orga-nismes gérés par les partenaires sociaux (Fonds degestion du congé individuel de formation, actuelsorganismes paritaires collecteurs agréés, etc.), le caséchéant du service public de l’emploi, qui a vocation àdévelopper des services aux salariés.

Ce nouveau système de formation professionnelle nepourrait enfin fonctionner avec efficacité qu’au niveaurégional, le seul pertinent pour conserver une vision globale

et assurer une transversalité avec les formations initiales etles problématiques de développement économique.

La création d’un véritable service public régional serait lagarantie d’une amélioration de la qualité du servicerendu, d’une réduction des délais pour bénéficier desformations et d’une amélioration de l’accompagnementavant, pendant et après, etc.

Cette logique de service public permettrait de fédérer lesdifférents financeurs-décideurs au niveau régional (État,Régions, partenaires sociaux), en recherchant plusieursformes de complémentarité :- entre formation initiale et formation continue : l’accentmis ici sur les politiques d’emploi et de formationprofessionnelle ne saurait dissimuler le rôle primordial dela formation initiale, de « l’école de la première chance »,pour former des individus capables d’accéder à desemplois de qualité et de s’y maintenir durablement. À cetégard, le schéma régional des formations devraitconstituer un outil véritablement co-construit, doté

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d’une dimension prescriptive, et être le support d’undroit à la formation initiale différé pour les individussortis du système scolaire sans qualification ;- entre les différentes strates de la formation professionnellecontinue, organisées selon le statut des personnes : afin deparvenir à la construction progressive des deux premiersétages du futur système, des objectifs régionauxcontractualisés entre la Région et les branchesprofessionnelles pourraient être fixés. Il s’agirait parexemple d’articuler les formations préqualifiantes etqualifiantes des jeunes demandeurs d’emploi, et lesentrées en contrat en alternance (apprentissage et contratde professionnalisation). Cette contractualisation pourraitégalement concerner l’accès au savoir de base, parexemple au titre de la lutte contre l’illettrisme, politiquequi devrait concerner aussi bien des demandeurs d’emploique des salariés ;- entre le service public de l’emploi et les opérateurs deformation : il s’agirait de renforcer, là encore sur une basecontractuelle, le rôle d’interface du service public del’emploi entre une fonction d’orientation-prescription,

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le déploiement d’outils complémentaires d’accompagne-ment des personnes entrant en formation ou en sortant,l’utilisation de la méthode de recrutement par simulationpour favoriser la détection des aptitudes des individuséloignés de l’emploi, etc. ;- entre politique régionale de formation et politiquesdépartementales d’insertion. Pour ce faire, il s’agirait derenforcer l’articulation Région-départements, parexemple en développant conjointement des offres deformation préqualifiante adaptée aux publics eninsertion. La mise en place du RSA (revenu de solidaritéactive) devrait rendre cet objectif prioritaire !

Passer ensuite d’une logique d’assurance chômageà une politique active de retour à l’emploi

La réforme du système d’assurance chômage doitconstituer le second volet d’une politique nouvelle dans lamesure où la couverture chômage devrait être laconséquence moins de droits acquis par la cotisation quedes besoins du reclassement.

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Les demandeurs d’emploi reçoivent aujourd’hui desallocations pour une durée maximale. Ce système estdoublement injuste : il peut éventuellement conduire leschômeurs les plus employables à reculer le moment de lareprise d’emploi s’ils le souhaitent, tandis que lespersonnes les plus éloignées de l’emploi finissent souventprivées de droits.

Il conviendrait donc de revoir le système et de lierl’indemnisation à l’accompagnement personnalisé duchômeur. Toutes les personnes sans activité profes-sionnelle, disponibles et à la recherche d’un travailpourraient prétendre à un revenu de remplacement dèslors qu’elles seraient accompagnées et qu’ellesparticiperaient activement au parcours de retour àl’emploi. Cette garantie de ressources concerneraitl’ensemble des chômeurs ayant travaillé (sans conditionde durée) – y compris les personnes qui étaient établiesà leur compte, les anciens salariés de l’administrationpublique – et les primo-demandeurs. Les contrôless’exerceraient enfin non pas d’un point de vue

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administratif, mais en fonction de la réalité des difficultésauxquelles serait confronté chaque demandeur.

La réussite de ces dispositions supposerait naturellementune transformation profonde du rôle, des missions et dechaque intervention du Service public de l’emploi (SPE).Le cloisonnement des politiques de l’emploi, qui séparentles chômeurs selon leur activité antérieure, leur statutindemnitaire, leur âge, devrait ainsi céder la place à unepolitique globale où chacun disposerait des mêmes droitset des mêmes aides, ces dernières étant différenciéesseulement en fonction des besoins concrets deschômeurs, traduits dans leurs parcours personnalisés.

Dans le même esprit, les politiques de l’emploi devraientêtre territorialisées. Ainsi serait-il proposé que lesRégions et les départements soient associés à l’action des« pôles emploi » à travers des contrats de développementde l’emploi et de la formation traduisant concrètement lesengagements spécifiques de l’État, des Régions et descollectivités locales. Ces contrats permettraient de fixer à

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7. A cet égard, la volonté de l’État de garder le contrôle du dispositif et de refuser d’en partager lepilotage – probablement pour des raisons politiques au regard de l’orientation des Régions – vanuire à l’efficacité de la fusion ANPE-Unedic. Celle-ci n’a de sens que si elle a pour conséquence deplacer tous les acteurs dans unemême perspective et, dans lamesure du possible, sous unemêmeautorité : on en est encore très loin !

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l’échelon régional, puis au niveau de chaque bassin, lesobjectifs communs de la politique de l’emploi et de laformation7.

Enfin, une politique plus personnalisée et plus proche duterrain ne devrait pas remettre en cause les obligationsparticulières qui incombent aux grandes entreprisesquand elles procèdent à des suppressions d’emplois. Ilfaut être d’autant plus exigeant avec ces entreprisesqu’elles disposent de moyens importants et que leursdécisions sont plus souvent motivées par la recherched’une plus grande productivité que par de réellesdifficultés économiques. De même, les salariés despetites entreprises qui perdent leur travail, notamment àla suite d’une liquidation judiciaire, ne bénéficient pasaujourd’hui d’un accompagnement renforcé à l’emploi,alors que bien souvent ils faisaient partie de ces

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entreprises depuis de très nombreuses années sansjamais avoir suivi de formation. C’est pourquoi toutes lespersonnes involontairement privées d’emploi devraient sevoir proposer un contrat de reclassement professionnelqui se caractériserait par sa durée (douze mois), un hautniveau d’indemnisation (90 % du dernier salaire), unmeilleur accompagnement, en contrepartie de quoi lesexigences du SPE seraient naturellement plus élevées.Son financement par l’entreprise serait inversementproportionnel à l’effort de reclassement consentidirectement par celle-ci.

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Veiller à la qualité de l’emploi

Comment ignorer que la performance d’une économie estdirectement liée à la qualité de l’emploi et des conditionsde travail ? La France, de ce point de vue, ne cesse deperdre du terrain. Et les mesures relatives aux heuressupplémentaires ont même contribué un peu plus à cettedégradation en privilégiant la durée du travail sur sa qualitéet sa productivité. C’est une nouvelle approche qu’il fauten conséquence promouvoir. Elle suppose, à gauchecomme à droite, de véritables remises en question.

D’abord, renouveler la problématiquede la réduction du temps de travail

La gauche a fait de la diminution du temps de travail,voici dix ans, une mesure emblématique. La droite en adepuis lors caricaturé les effets, au point de la présentercomme la cause de tous les maux dont souffrirait notreéconomie. Dans un cas comme dans l’autre, il serait bond’en finir avec ces exagérations.

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Le passage de la durée du travail de 39 à 35 heures relevaitd’une analyse juste : il partait du constat de la baisse sécu-laire de la durée du travail qui avait permis, en absorbant lesgains de productivité, de préserver un niveau élevé d’emploi.Il reposait sur une seconde observation : cette baisse s’étaitinterrompue en 1982, sous sa forme générale et négociée,pour ne plus subsister que sous sa forme individualisée etimposée. En effet, au blocage de la négociation collective surla durée du travail dont atteste l’échec de la loi de Robien,adoptée au milieu des années 1990, avait répondu undéveloppement accéléré, et encouragé par la loi, du tempspartiel, le plus souvent contraint.

Les conditions dans lesquelles la réforme a été conduite luiont toujours conservé un caractère passionnel. Ce dernier aété encore accentué par le fait qu’il n’a jamais été possiblede tirer un bilan complet d’un processus mené contre uneforte opposition du patronat, et surtout interrompu très tôt.En effet, à peine votée en 2000, la généralisation de laréduction du temps de travail a cessé par une première puisune seconde loi Fillon, en 2002 et en 2003.

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8. Hervé Novelli (député), Rapport d’information sur l’évaluation des conséquences économiqueset sociales de la législation sur le temps de travail, n° 1544, déposé à l’Assemblée nationale le14 avril 2004. 9. Eurostat, troisième trimestre 2008.

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Ces réserves mises à part, l’impact sur l’emploi de la loisur les 35 heures, au moins à court terme, fut certeslimité mais indéniable : le seuil de 350 000 emplois créésou préservés est une donnée dont même les esprits lesplus critiques s’accommodent8. Son effet sur les progrèsde la négociation sociale a été en outre indiscutable, dansla mesure où elle a permis au dialogue social d’entrerdans des entreprises (les PME) ou des secteurs d’activité(le tertiaire) d’où il était jusqu’alors absent. Enfin, soncoût pour les finances publiques reste raisonnable si l’onveut bien admettre qu’en supprimant le lien entreréduction du temps de travail et exonérations decotisations sociales, le gouvernement Raffarin a aussiexonéré les lois Aubry de cette responsabilité. On peut autotal estimer à 7 à 8 milliards d’euros le coût net de lamesure. Ce montant est à rapprocher de celui, quasiéquivalent, des nouvelles exonérations décidées sur lesheures supplémentaires. Si l’on ajoute que la négociation

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sur la réduction du temps de travail a donné à notreindustrie un temps d’avance en matière d’organisation dutravail, en particulier dans l’automobile, temps d’avancequi explique le peu d’empressement de ces secteurs à larenégocier, on peut conclure que la « RTT » ne mérite niexcès d’éloges, ni condamnation pour indignité.

D’autant que l’idée que la France travaillerait moins queles autres pays européens est en totale contradiction avecles faits. Selon Eurostat9, les salariés français travaillentdavantage en moyenne par semaine (37,5 heures) que lesAllemands (36,3 heures), dont la santé commerciale estexemplaire, les Scandinaves (35,8 heures au Danemark,36,5 heures en Suède et 35,3 heures en Norvège),qui affichent parmi les meilleures performances écono-miques et sociales du monde, les Néerlandais(32,4 heures), et même les Américains (33,9 heures).Il est clair en revanche que nos concitoyens travaillentmoins longtemps sur la durée d’une vie entière, l’emploi

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étant concentré sur les 25-45 ans, ce qui constitue l’unedes principales explications de notre retard de croissancepar rapport à des économies plus dynamiques.

Il faut reconnaître en revanche que la RTT a eu àl’évidence un effet négatif sur le fonctionnement de notreservice public hospitalier, faute d’avoir été anticipée.Enfin, l’ajustement par étapes du Smic qu’elle a provoquéa absorbé les hausses de pouvoir d’achat de la moyennedes salariés. Ce bilan partagé suggère de cesser de fairede la durée du travail l’enjeu de polémiques politiquesstériles, pour privilégier désormais une approchepragmatique qui doit laisser la part belle au dialoguesocial. Fixée à 35 heures, la durée légale du travail estdésormais une donnée à laquelle aucun gouvernement nepourra réellement s’attaquer sans remettre en causel’équilibre d’accords complexes conclus dans la grandeindustrie et sans susciter une très forte réaction de la partdes salariés qui en bénéficient. Son relèvement uniformen’aurait d’ailleurs aucun sens d’un point de vueéconomique et pour l’emploi. Que la droite le reconnaisse

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donc une fois pour toutes ! Il serait possible alors de clorecette querelle pour redéfinir les rôles respectifs de l’Étatet des partenaires sociaux sur le sujet. À l’État de fixer ladurée légale et maximale, comme le nombre de jours decongés ; aux partenaires sociaux de s’occuper de tout lereste, dans le cadre d’accords majoritaires afin de prendreréellement en compte les réalités mouvantes desbranches professionnelles. Ce que la gauche devraitdésormais accepter !

Cette évolution – pour ne pas dire cette révolutionculturelle – sur la question du temps de travail, à droitecomme à gauche, est d’autant plus nécessaire que laquestion des 35 heures n’épuise pas celle de la réductiondu temps de travail, loin s’en faut. On pourrait mêmeaffirmer que, paradoxalement, elle conduit aujourd’hui àl’occulter en la ramenant à une dimension polémiquepolitiquement et socialement datée. Il nous faut enrevenir à une vision à la fois plus précise et plus large dela durée du travail. Plus précise, parce que la définitiond’une durée légale doit avoir pour objectif premier de

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protéger la santé des salariés et relever à ce titre – avecles durées maximales – de la loi, le reste appartenant à lanégociation sociale. Plus large, parce que la durée dutravail soulève la question de la répartition entre tempstravaillé et temps libre, temps consacré à l’activitéprofessionnelle et temps disponible pour se former, sedétendre, s’occuper de sa famille ou mener desengagements politiques, associatifs ou syndicaux. C’estdavantage à ce titre que la réduction du temps de travailfait partie intégrante du patrimoine de la gauche. Il nefaut pas renoncer à l’idée que l’emploi, s’il est le premierfacteur d’intégration sociale (et doit à ce titre rester undroit), ne constitue pas le seul horizon de la vie humaine.

Les 35 heures s’inscrivaient bien dans la perspective d’unemeilleure répartition non seulement de l’emploi, mais ausside ces activités indispensables à la vie commune. Toutes lesenquêtes mettent d’ailleurs en évidence que travailler35 heures a pu permettre aux hommes et aux femmes de seconsacrer très majoritairement aux occupations familiales.Elles soulignent également que les Français continuent,

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plus encore que les citoyens des autres pays européens, àsouhaiter disposer de plus de temps dans ce domaine. Pourune majorité d’entre eux, l’emploi idéal est précisémentcelui qui permettrait de concilier vie professionnelle et viefamiliale.

Aussi conviendrait-il d’aller beaucoup plus loin et de sedonner les moyens de penser le temps de travail surl’ensemble de l’existence, en incluant le temps deformation et en développant des dispositifs garantissant àchaque individu qu’il pourra utiliser, pour un certainnombre d’usages précis et limitativement définis, descomptes-temps appropriés. On pourrait ainsi imaginer, àl’instar du compte-formation, un compte à utiliser en casde maladie de proches et un autre destiné aux soins auxjeunes enfants. Ce second compte pourrait représenterune vingtaine de semaines par parent qui y recourrait demanière extrêmement fractionnée, comme en Suède.

Ce dispositif de comptes ou de capital temps à « usageunique » n’empêche pas une organisation collective de

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ces dispositifs. Outre une ouverture plus large de lanégociation collective à des dérogations possibles à ladurée légale, chaque salarié devrait se voir reconnaître demanière plus nette et plus claire des droits individuels àl’aménagement de son temps : modulation sur la durée devie, en capitalisant du temps pour anticiper par exempleson départ en retraite ; glissement plus facile d’un tempsplein à un temps partiel et inversement ; meilleure priseen compte dans la réglementation du travail desobligations familiales et de formation. Ainsi chaquesalarié devrait-il pouvoir, pour ce motif, refuser desheures supplémentaires…

Faire en sorte que le travail paie !

La concentration de l’emploi sur les 25-45 ans a pourconséquence un chômage élevé et une précarisation desressources d’une partie de la population. Les pouvoirspublics se sont efforcés d’y répondre par la mise en place duRMI, la création de la prime pour l’emploi (PPE) et plusrécemment le RSA. Or, ce dernier est loin d’être la panacée.

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Il utilise deux leviers : d’un côté, un complément deressources pérennisé (alors que l’actuel intéressement duRMI ne dure qu’un an), mensualisé (contrairement àl’actuelle PPE) et d’un montant plus important, de manièreà réduire la pauvreté ; de l’autre, un accompagnement parles services chargés de l’emploi théoriquement plusimportant. Aucun de ces leviers n’est véritablementnovateur. La PPE poursuit le même objectif de complémentde ressources, et un calibrage adéquat aurait sans doutepermis de meilleures avancées dans la lutte contre lapauvreté. Quant à la mobilisation des services chargés del’accompagnement des publics bénéficiaires de minimasociaux, elle n’a pas attendu le RSA : depuis l’acte III de ladécentralisation – qui a au moins permis une clarificationdu pilotage du dispositif, même si elle a indûment pesé surles finances des conseils généraux –, les départementsmènent une action plus efficace auprès des allocataires duRMI afin de construire avec eux un parcours d’insertion.

En revanche, la pérennité de l’aide risque de contribuerà créer de véritables « trappes à bas salaires », dont les

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allocataires auront du mal à sortir, et d’encouragerl’occupation durable d’emplois à temps partiel. Aussi,disons-le tout net : le RSA ne pourra trouver sa pleineefficacité que s’il s’accompagne d’un renforcementconsidérable des moyens consacrés à l’accompagnement,renforcement que les collectivités locales seront bienen peine d’assumer. C’est donc à l’État et au nouveau Pôleemploi que de nouvelles ressources devront être allouéespour leur permettre de prendre en charge cette mission(35 % seulement des allocataires du RMI sont enregistrés àl’ANPE). Dans cette perspective, il conviendrait d’inscrireces personnes dans un véritable parcours vers l’emploi, cequi impliquerait de leur donner un accès systématique àl’offre de services du Pôle emploi. À cette fin, il faudraitavoir le courage d’assumer une hausse du nombre d’inscritscomme demandeurs d’emploi et en finir avec la sous-estimation systématique des chiffres du chômage.

Ensuite, le RSA n’empêchera pas de devoir s’attaquer auxproblèmes qui font obstacle à la reprise d’un emploi pourles bénéficiaires de minima sociaux. Ces problèmes ne

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sont pas tous d’ordre monétaire (certains travaillent enperdant de l’argent !) et découlent de bien d’autrescontraintes : mauvaise santé, absence de solution de gardepour les parents de jeunes enfants (notamment lesallocataires de parent isolé – API), absence de moyen detransport, d’accompagnement vers et dans l’emploi.Remédier à ces difficultés supposera une coordinationattentive des services concernés par ces différentesproblématiques.

Il conviendrait enfin d’agir sur les causes de la précaritéprofessionnelle : c’est le développement du temps partielsubi, du travail atypique et la stagnation des salaires qui aproduit le phénomène des actifs pauvres. Le RSA doitaccompagner une politique de l’emploi décent, qui agit surles causes de la pauvreté au travail et ne se contente pas dela compenser – sans compter naturellement une politiqueactive de formation telle qu’évoquée précédemment.

Ce n’est pas en produisant toujours plus d’emplois précaireset mal rémunérés que la France comblera son retard de

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compétitivité. Des politiques attractives de rémunération etde promotion devraient être mises en place. Encourageonsdans ce contexte le dialogue social au sein des branches quiconnaîtront des difficultés de recrutement dans lesprochaines années, à l’instar de ce qui a été fait dans le BTP.

De même, le travail à temps très partiel devrait êtrefermement découragé par des majorations importantes decotisations sociales, en l’absence d’accord collectif visant àfavoriser sa résolution. Aux Pays-Bas, un travailleur à tempspartiel a le droit de travailler plus s’il le désire, et sonemployeur doit avoir des motifs économiques sérieux pourle lui refuser. Pourquoi un tel système ne serait-il pasenvisageable en France ? Il conviendrait d’aider les branchesoù le temps partiel subi ou l’activité à horaires décalés sontle plus développés à se réorganiser pour proposer du travaildécent dans le cadre d’une réforme du financement despolitiques de l’emploi. Je reviendrai sur ce point.

Il y a peu à attendre en revanche, malgré le consensus quisemble s’être établi sur ce point, du conditionnement des

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exonérations de cotisations sociales à des accordssalariaux. Ce dispositif, qui s’apparente à une machine àgaz, difficilement contrôlable, risque de servir de prétexteà l’absence de politique de long terme. Celle-cisupposerait d’élever le niveau de qualification desdemandeurs d’emploi et des salariés pour les fairebénéficier du point de vue salarial des gains deproductivité liés à l’amélioration de leurs compétences.

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Mettre en place une véritable politiquedes âges au travail

S’il souffre d’une mobilité insuffisante sur le marché dutravail et d’une dégradation de la qualité de l’emploi, notrepays est également pénalisé par une politique de recrutementqui exclut les moins de 25 ans comme les plus de 45 ans :depuis longtemps dénoncée, cette situation n’a jamais étécorrigée. Elle ne pourra l’être que par une action volontariste.Quatre principes d’action semblent devoir structurertoute approche de l’emploi des jeunes et des seniors.

Il est tout d’abord nécessaire de mener une actionpréventive, la plus précoce possible, pour éviter desévénements dont la réparation coûtera cher non seulementà l’ensemble de la société, mais aussi aux entreprises demanière directe ou indirecte. Ou, pour le dire autrement, laclé de l’emploi des seniors réside dans la gestion del’ensemble de la carrière, et celle de l’emploi des jeunesdans la qualité de l’éducation et dans la capacité de cettedernière à préparer tous les jeunes à entrer dans la vie

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active, et même dans la qualité des modes d’accueil de lapetite enfance. En bref, la qualité des premières étapes dela vie conditionne celle des étapes suivantes.

Le second principe clair est que, s’il est essentiel deprévenir (la mauvaise insertion ou le chômage), il importeégalement de réparer, c’est-à-dire de corriger les effetsd’une qualification insuffisante ou obsolète. Décliné selonles âges, ce principe signifie qu’il faut aussi s’occuper despersonnes qui n’ont pas bénéficié d’un traitementpréventif, et donc requalifier ou réhabiliter les seniors dontles compétences n’ont pas été entretenues et se donner lesmoyens de compléter le cursus initial des jeunes tropfaiblement qualifiés ou issus de quartiers en difficulté.

Troisième principe : la qualité est la clé de la quantité. LaFinlande n’est plus aujourd’hui le seul pays à avoircompris que l’emploi pour tous, en particulier celui desseniors, est conditionné par la qualité des conditions detravail et la prise en compte de la santé dans le cadreprofessionnel. Cela signifie, comme l’avaient indiqué des

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que l’absence de reconnaissance dans son emploisuscitait une forte envie de se retirer précocement dumarché du travail. Des études sur les générations autravail et le rapport à l’activité professionnelle desdifférentes générations mettent en évidence que, d’unemanière générale, les attentes postmatérialistes enmatière d’emploi sont très fortes en Europe, et plusencore chez les jeunes. On veut pouvoir s’exprimer et seréaliser dans le cadre professionnel, et collaborer enéquipe dans une ambiance conviviale.

Et d’abord les jeunes !

Le chômage des jeunes dans notre pays estindiscutablement supérieur à la moyenne européenne(environ 22,8 % contre 17,5 % dans la zone euro). Ilcomporte plusieurs caractéristiques. Il est d’abord lié à laconjoncture : parce qu’ils sont en France 26 % à occuperun emploi temporaire (intérim ou contrat à duréedéterminée), contre 7 % des 26-54 ans et 4 % des 55 anset plus, les actifs de moins de 26 ans sont les plus

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travaux pionniers réalisés en Suède10, qu’il faut passerd’une vision de l’activité professionnelle commeconsommatrice de ressources (modèle du travail intensif)à une conception du travail durable dans laquelle cedernier permet de développer et d’entretenir la ressourcehumaine. La santé et les conditions de travail seraient enoutre pleinement prises en compte et deviendraient desfacteurs essentiels permettant la construction d’unrapport positif à l’activité professionnelle. L’organisationdu travail est centrale.

Quatrième principe : améliorer l’emploi des jeunes et desseniors ne consiste pas seulement à remotiver les salariésou à les doter de nouvelles compétences, mais tout autantà rendre le travail attractif, à lui donner du sens et à faireen sorte que les salariés tirent une reconnaissance de leuractivité professionnelle. Ce sont là les enseignementsd’études récentes : l’enquête européenne Share11 a montré

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10. P. Ekman, Organisation et Conditions de travail en Suède, Maison des sciences de l’homme,Paris, 1979.11. Survey on Health Ageing and Retirement in Europe, 2004.

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sensibles aux variations cycliques de l’économie. Ensuite,il n’existe pas un, mais bien des chômages des jeunes,que l’on peut distinguer selon de nombreux critères :- les disparités selon le niveau de formation : une étudeportant sur la génération de jeunes entrés dans la vieactive en 200112 montre par exemple que l’écart dechômage au bout de trois ans de vie active entre lesjeunes les plus formés et ceux les moins qualifiés est detrente points. Cela marque une dégradation générale dela situation de ces derniers, qui ont particulièrementpâti de l’évolution négative de la conjoncture ;- les disparités selon le diplôme : à niveau de formationéquivalent, les diplômés sont moins touchés par lechômage que les non-diplômés. L’évolution sur le longterme du taux de chômage des 15-24 ans sans diplômele révèle : 5 % en 1971, 35 % en 1987, 47 % en 2004 ;- les disparités selon la discipline : quel que soit le niveaude formation, les écarts sont globalement importants entreles jeunes issus de spécialités tertiaires et ceux ayant suivi

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une spécialité industrielle : ces derniers sont en proportionbeaucoup plus nombreux à être intérimaires au bout detrois ans de vie active. De même, concernant la génération2001 et le premier emploi occupé au sortir du systèmeéducatif, au niveau du CAP ou du BEP, les jeunes issusd’une spécialité industrielle ont une probabilité supérieured’entrer dans le monde du travail via l’intérim que ceuxissus d’une spécialité tertiaire ;- l’existence de discriminations : l’avis du Conseil éco-nomique et social de juillet 2005 sur l’insertionprofessionnelle des jeunes issus de l’enseignementsupérieur a montré l’existence de pratiques discrimi-natoires à l’embauche pouvant prendre des formesdiverses : « À diplôme et qualification égaux, les études,notamment de l’Association pour faciliter l’insertion desjeunes diplômés (AFIJ) et du Centre d’études et derecherches sur les qualifications (CEREQ), montrent quecertains jeunes sont victimes, au stade de l’embauche,d’une discrimination raciale liée à la consonance étrangèrede leur nom, à leur origine ou encore à leur nationalité.Cette discrimination touche des jeunes issus de

12. Centre d’études et de recherches sur les qualifications, « Génération 2001 ». Il s’agit d’une étudesurunéchantillonde 10000 jeunes sortis de formation initiale en2001,publiée auprintemps2004.

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l’immigration et dont plus de 80 % sont français, toutcomme des jeunes originaires de l’outre-mer. » Le mêmeavis souligne aussi l’existence d’autres pratiquesdiscriminatoires, liées à la domiciliation dans tel ou telquartier, au sexe ou encore à un handicap. Concernantcette dernière question, il souligne qu’il faut notamment« démystifier au préalable la représentation du handicapque peuvent avoir les employeurs ».

Alors que faire ? Partons d’un constat partagé : les difficultésd’insertion des jeunes proviennent en partie d’une mauvaiseinformation et surtout d’une orientation professionnelledéficiente. Aussi est-il important de donner une prioritéabsolue à une meilleure connaissance des différents métiersprésents sur le territoire. Cela supposera que les partenairessociaux soient associés à une réforme du dispositifd’orientation dont les modalités devront être unifiées, qu’ils’agisse de celles mises en œuvre dans le cadre du systèmescolaire ou des autres. Cette réforme devra s’appuyer sur lasystématisation, en partenariat avec les Régions,d’observatoires des métiers, indispensables pour une

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connaissance fine des besoins et pour des réorientationsprofitables aux moins de 26 ans comme aux entreprises ;cette meilleure connaissance des métiers et des besoinsservirait de socle à un accueil renforcé et à une pré-orientation plus efficace des jeunes en recherche d’emploi.

Ainsi, chaque individu sortant du système scolaire ouuniversitaire et en recherche d’emploi se verraitreconnaître un droit à bénéficier d’un premier accueil,d’un bilan de compétences, d’une préorientation et d’unepremière expérience professionnelle. Appuyé sur laréorganisation et le renforcement du service public del’emploi, assis sur une territorialisation des politiquesd’emploi, ce droit se caractériserait, à la différence de lasituation actuelle, par son universalité : il concerneraittous les jeunes en recherche professionnelle, quel quesoit leur niveau de formation, et serait modulé enfonction de celui-ci.

Après la première phase d’orientation, le jeune seraitaccompagné dans un parcours de formation et d’insertion

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au sein duquel il pourrait bénéficier d’un référent uniqueet, le cas échéant, d’un soutien financier (sous la formed’une bourse), en contrepartie de son obligationd’engagement et d’assiduité. Il pourrait également jouirdes droits sociaux (les prestations en nature del’assurance maladie) s’il n’était pas couvert par ailleurs.Cet accompagnement serait d’autant plus soutenu enintensité comme en durée que le jeune serait éloigné del’emploi.

L’ensemble de ce dispositif d’accueil, d’orientation etd’accompagnement aurait pour objet de le rapprocher leplus possible de l’emploi. L’accès à ce dernier s’opéreraitselon deux modalités : soit par la voie de l’alternance, enparticulier l’apprentissage si le jeune a besoin deconsolider son niveau de formation initiale, soit par lavoie du CDI – on pourrait par exemple développer lerecours aux contrats de professionnalisation ou mettre enplace en début de CDI des actions d’adaptation au postede travail, qui seraient prises en charge par la collectivitépendant la durée nécessaire à leur mise en œuvre. L’effort

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de l’État serait naturellement d’autant plus soutenu queles engagements de l’entreprise seraient durables. Lerecrutement en CDI déclencherait ainsi une aidemaximale. Une telle orientation aurait l’avantage dereplacer l’insertion professionnelle des jeunes dans ledroit commun, en posant le CDI comme principe. Ellepermettrait de « faire le ménage » dans la multiplicité desdispositifs existants qui, à force de dérogations au droitcommun, ont fini par faire de l’aide à l’emploi des jeunesun encouragement à la précarisation.

Donner la priorité au maintien des seniors dansl’emploi

Le taux d’emploi des seniors était en 2006 de 37,6 % enFrance, soit nettement moins que l’objectifcommunautaire pour 2010 fixé lors du sommet deLisbonne, à savoir 50 %. De fait, dans ce domaine, laFrance est au seizième rang sur vingt-cinq. Cettesituation s’explique par la conjonction de troisphénomènes :

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- le recours massif aux cessations anticipées d’activité.Ces dernières années, face au resserrement des dispositifsde préretraite publique, la dispense de recherche d’emploi(DRE) s’est progressivement imposée comme la premièreforme de retraits anticipés. Aujourd’hui, plus de 520 000personnes en France bénéficient d’une préretraite ou sontdispensées de recherche d’emploi ;- les difficultés de maintien dans l’emploi. Celles-ci setraduisent par un taux d’accès à la formationprofessionnelle continue des salariés divisé par près detrois entre 45 et 60 ans. La situation est plus marquéeencore pour les catégories socioprofessionnelles les plusdéfavorisées ou dans les métiers où les conditions detravail sont les plus difficiles. Dans ce dernier cas, lalogique de la réparation de cette pénibilité par un droitau retrait anticipé a pris le pas sur l’amélioration decette pénibilité et sur la prévention des risquesprofessionnels ;- le faible retour à l’emploi. Seuls 10 % des chômeurs deplus de 50 ans ont un travail un an plus tard, contre34 % des chômeurs de 25 à 49 ans.

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Le médiocre taux d’emploi des seniors est d’autant pluspréoccupant que la perspective d’une diminution de lapopulation active à moyen terme serait susceptibled’affecter la croissance de l’économie française en créantdes pénuries de main-d’œuvre. Toutes choses égales parailleurs, on estime ainsi la perte de potentiel decroissance liée aux évolutions démographiques à un demipoint par an. Mieux mobiliser le facteur travail apparaîtdès lors comme une nécessité croissante.

Certes, le débat sur le financement du système de retraitepar répartition, qui a abouti à la prise de consciencecollective de la nécessité de prolonger la durée de cotisationpour assurer la pérennité du régime de retraite, a conduit àréexaminer la préférence nationale pour les départsanticipés. Pourtant, cette prolongation n’a aucun sens si ellen’entraîne pas une élévation parallèle de l’âge moyen decessation d’activité. Or celui-ci demeure aujourd’huiinférieur à 59 ans. La seule conséquence est donc laprécarisation les retraités, car très peu d’entre eux sontcapables de liquider une retraite à taux plein.

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Loin de régler ces questions, la politique menée cesdernières années a consisté principalement à resserrer lesdispositifs de préretraite, sans réellement créer d’outilsfavorables à l’emploi des seniors à la hauteur de l’enjeu.La conséquence majeure de ce resserrement a été la trèsforte augmentation du nombre de seniors dispensés derecherche d’emploi qui, retirés du marché du travail, nebénéficient pas d’un revenu de remplacement dans lesconditions de droit commun et doivent dès lors trèssouvent se contenter de l’allocation de solidarité spécifique(ASS) ou du revenu minimum d’insertion (RMI) avant depouvoir liquider leur retraite (en général le minimumvieillesse). Aujourd’hui, près de 75 % des seniors dispensésde recherche d’emploi perçoivent moins de 1 049 euros parmois, et 41 % moins de 750 euros.

Les branches professionnelles et les entreprises ontégalement été invitées à conclure un accord relatif à lagestion prévisionnelle des emplois et des compétencesavant la fin 2009, sous peine d’être soumises à unesurcotisation retraite à compter de 2010. Ces accords

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devront contenir un engagement chiffré d’amélioration de laplace des seniors dans l’entreprise. On peut craindre que cedispositif peine à produire des résultats significatifs. Demanière générale, il est possible d’affirmer que la politiquemenée actuellement pour l’emploi des seniors prend leproblème à l’envers. Si l’on veut replacer l’action publiquedans le bon sens, il faut faire de l’amélioration notable de lasituation des seniors sur le marché du travail un préalable àun allongement de la durée de cotisation.

Aussi convient-il de préparer une autre politique quireposerait sur les principes suivants :- d’abord, prendre en compte la question de la pénibilitéet de sa réparation. On ne peut œuvrer à l’amélioration dela situation des seniors sur le marché du travail qu’une foiscette question réglée. Il est en effet légitime que ceux quiont été exposés à des conditions de travail difficiles ayantdes conséquences sur leur espérance de vie puissent sevoir reconnaître un droit à la retraite anticipée, de la mêmemanière que les personnes qui ont commencé à travaillertôt. Alors que la loi de 2003 concernant la réforme des

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retraites avait prévu l’ouverture de négociations sur lapénibilité, la majorité actuelle n’a rien fait pour permettrequ’elles aboutissent. Aussi conviendrait-il de mettre sansdélai en place un système de bonification de trimestres decotisation pour les salariés qui ont été exposés à desconditions de travail pénibles, pris en charge par lesentreprises et les branches concernées ;- ensuite, promouvoir une gestion active et concertée detous les âges dans l’entreprise. Pour cela, il conviendraitde faire de l’obligation triennale de négocier sur lagestion prévisionnelle des emplois et des compétences(GPEC)13 une obligation réellement contraignante.Une solution serait de renforcer les moyens d’incitationdes PME et des branches à mener une réelle politiquede gestion de l’emploi à tous les âges. Les pouvoirspublics ont considérablement réduit les crédits qu’ilsconsacrent aux préretraites publiques (1,6 milliard

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d’euros en 1997 contre 300 millions d’eurosaujourd’hui), sans les redéployer vers des mesuresactives d’aide au reclassement ou d’incitation à lagestion prévisionnelle des emplois et des compétences.Le budget de ces mesures actives est au contraire passéde 260 millions d’euros en 1997 à 90 millions d’eurosaujourd’hui. C’est une autre orientation qu’il fautprendre, qui devrait avoir également pour objet unmeilleur accès à la formation professionnelle pour lessalariés en deuxième partie de carrière. Celui-ci seraitfacilité par la reconnaissance dans la loi d’un droit à unbilan de compétences dès 45 ans et par le passage dudroit individuel à un droit universel à la formation ;- se réinterroger sur les pratiques discriminatoires àl’encontre des salariés vieillissants en matière delicenciement et mettre en place un système de bonus-malus. Une solution pourrait être de moduler lescotisations sociales des employeurs en fonction de leurpolitique de l’emploi. Un système de cotation qui feraitintervenir des agences de notation sociale pourrait êtreinstitué. Dans un premier temps, il pourrait de manière

13. La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) doit permettre d’accompa-gner l’évolution des métiers, d’anticiper les restructurations, d’accompagner les salariés et dedévelopper leur employabilité. La loi de cohésion sociale du 19 janvier 2005 a créé une obliga-tion triennale de négocier pour les entreprises et groupes de 300 salariés et plus et pour lesgroupes de dimension communautaire (plus de 1 000 salariés en Europe).

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Par ailleurs, il conviendrait d’encourager le recours au tempspartiel en fin de carrière sur la base d’un système proche duprincipe suédois de 50-80-100 – 50 % de temps de travail,80 % de la rémunération, 100 % de validation au titre del’assurance vieillesse – financé conjointement par l’État, lasécurité sociale et l’employeur.

L’ensemble de ces dispositifs devrait naturellements’intégrer dans une démarche volontariste affirmée, alorsqu’aujourd’hui la politique des seniors manque defermeté et d’ambition. Les Français, comme lespartenaires sociaux, ont du mal à se mobiliser autour d’unsujet pourtant déterminant !

Enfin, réorienter les financements en directiondes emplois qualifiés

La mise en œuvre de ces dispositifs devra s’accompagnerd’une remise à plat des financements consacrés auxpolitiques du travail et de l’emploi, financements quitraduisent des choix aux antipodes de ceux développés

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expérimentale concerner uniquement la place desseniors dans l’entreprise, pour être élargi par la suite àd’autres problématiques ;- mobiliser les contrats aidés pour favoriser le retour àl’emploi des seniors. La majorité actuelle a diminué de faitle nombre de seniors qui en bénéficient. Leur part dansles contrats aidés et insertion dans l’emploi (CIE) devraitêtre portée à 50 %, soit un niveau d’entrées équivalent àcelui de 2006 (65 000 seniors), et il faudrait améliorer ledroit universel à la formation des seniors recrutés en CIEqui utiliseraient ce droit pour se reconvertir ;- aménager les fins de carrière en facilitant une transitionprogressive de l’emploi vers la retraite. Afin de rééquilibrerles comptes de l’assurance vieillesse, il faut encourager laprolongation volontaire d’activité, plutôt que de l’imposer.À cet égard, certaines dispositions symboliques devraientsans doute être renforcées : la surcote n’est pas suffisam-ment incitative (nous proposons de la majorer de 50 %afin de la rendre réellement attractive) et, par ailleurs, iln’est pas normal qu’un employeur puisse mettre à laretraite un salarié qui souhaite encore travailler.

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de cotisations sociales (22 milliards d’euros en 2008), lesexonérations d’heures supplémentaires (3 milliardsd’euros), la prime pour l’emploi (4,5 milliards d’euros,auxquels il faudra désormais ajouter une partie du coûtdu RSA) et les crédits mobilisés par la formationprofessionnelle (environ 20 milliards d’euros en 2007,hors crédits gérés directement par l’État, dont5,4 milliards d’euros au bénéfice des salariés de l’État etdes collectivités publiques et 9,5 milliards d’euros utilisésdirectement par les entreprises pour la formation de leurssalariés).

Malgré l’importance des crédits mobilisés, leur efficacitéest faible, leurs objectifs contradictoires, le pilotageinexistant. Ils entrent notamment en concurrence avecd’autres financements, ceux que l’assurance chômageconsacre elle-même aux formations et à l’indemnisationde chômeurs âgés qui a pris le relais des systèmesde préretraite – on compte aujourd’hui plus de 400 000chômeurs en dispense de recherche d’emploi contre à peine200 000 il y a dix ans – et ceux dédiés à la formation

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dans cet essai. Ces politiques mobilisent des sommesconsidérables, de l’ordre de 60 milliards d’euros, d’impor-tance très inégale.

D'abord, l’État ne gère directement qu’une petite partiedes crédits affectés aux interventions en faveur dela politique de l’emploi, un peu moins d’un cinquième :9,6 milliards d’euros de dépenses d’intervention qui separtagent entre l’accès et le retour à l’embauche,l’accompagnement des mutations économiques et ledéveloppement de l’emploi. Ce montant inclut environ4 milliards d’euros au titre des actions de formation endirection des apprentis, des jeunes en insertion et deschômeurs et près de 3 milliards d’euros de rembour-sement d’exonérations de cotisations sociales ciblées surdes publics en difficulté ou sur certaines zonesgéographiques (hors DOM).

En outre, les quatre cinquièmes des crédits quiconcourent à la politique de l’emploi se partagentquasiment pour moitié entre les exonérations générales

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pourcentage augmenté, cette mesure était réservée auxseules entreprises ayant signé un accord de passage aux35 heures avec les syndicats. Depuis la loi Fillon de 2003,la fusion de la « ristourne Juppé » et des exonérationsAubry marque le retour à l’objectif initial de défense desemplois peu qualifiés. Et, de fait, la France détruit moinsd’emplois peu qualifiés que ses concurrents européens.

Mais cet objectif a eu un effet particulièrement pervers.Malgré un effort financier accru en faveur de laformation, les entreprises n’ont en effet aucune raison defaire évoluer leurs pratiques, qui concentrent l’essentielde la dépense en ce domaine sur les salariés les plusqualifiés. Dès lors, les salariés peu ou pas qualifiés sevoient privés d’accès à la formation alors qu’ils sont lesplus vulnérables aux évolutions des entreprises, et lespremiers à être licenciés en cas de plan social ou defermeture d’usine. Aussi n’accèdent-ils à la formationqu’au pire moment, en situation de chômeurs ! Dans unmonde dominé par l’économie de la connaissance, un telchoix constitue une erreur fondamentale.

professionnelle initiale en lycée et en apprentissage (prèsde 10 milliards d’euros), dont les sortants non qualifiésalimentent le stock des jeunes en difficulté.

Ces incohérences et cette inefficacité ont un nom : l’inca-pacité de la politique de l’emploi à traiter correctement laquestion de la non-qualification, et tout simplementl’inaptitude des pouvoirs publics à savoir s’il faut améliorerles compétences des individus ou maintenir une offresuffisamment abondante d’emplois non qualifiés.

Les exonérations des bas salaires sont au cœur de cetteinterrogation et déteignent sur l’ensemble des autresvecteurs de la politique de l’emploi. Dès leur mise enplace par le gouvernement Juppé, les exonérations ont eupour objectif de défendre les emplois peu qualifiés dansl’espoir de freiner les délocalisations d’industries vers despays à bas salaires. À partir de 1998, le gouvernementJospin a utilisé cet instrument pour amortir l’impact de lamise en place des 35 heures sur le coût salarial. Si laplage d’exonération a été élargie à cette occasion et le

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Au regard des effectifs actuels de ces directions et del’objectif du président Sarkozy de réduire le nombre defonctionnaires durant son mandat, on voit mal commentelles pourraient assumer cette tâche. La mesure paraît doncdifficilement applicable.

Sans doute est-il difficile d’envisager une remise en causebrutale des exonérations sans mettre en difficulté lespetites entreprises, qui représentent la moitié du coût decette mesure. En revanche, il est tout à fait possible deresserrer progressivement le dispositif – qui concerneaujourd’hui plus d’un salarié sur deux – en réduisant laplage à 1,3 ou 1,4 Smic et en gelant le salaire de sortiedes exonérations. Ce resserrement pourrait d’ailleurs allerde pair avec une baisse du taux de cotisation, compenséepar la réintégration de tous les éléments de rémunérationqui ont été sortis de son assiette : stock-options, actionsgratuites, intéressement, participation, indemnités delicenciement et de départ en retraite… qui représententun manque à gagner de 15 à 20 milliards d’euros, soitl’équivalent de 2,5 à 3 points de cotisation maladie.

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Une analyse par secteur et par taille d’entreprise montre parailleurs que les exonérations de cotisations sociales, loind’être une arme anti-délocalisation, bénéficient pour lesdeux tiers à la grande distribution, aux hôtels-restaurants, àl’intérim et aux services de nettoyage ou de sécurité, qui nesont nullement concernés par la concurrence des pays à bassalaires. Le caractère général de la mesure et la largeur dela plage – 1,6 Smic – créent un effet d’aubaine coûteux pourl’État, qui doit compenser la perte de cotisations au régimegénéral de sécurité sociale, et inefficace.

Le gouvernement Fillon propose aujourd’hui de subor-donner les exonérations des bas salaires à l’existence d’unenégociation salariale dans l’entreprise. Mais une tellemesure n’est pas vraiment de nature à réduire le coût desexonérations. Il sera difficile d’en réserver le bénéfice auxseules entreprises qui auront signé un accord salarial avecles syndicats sans porter atteinte à la liberté de négociation.De plus, seules les directions du travail pourraient vérifier lavalidité de l’accord et des signatures avant de le transmettreaux Urssaf qui assurent le recouvrement des cotisations.

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militent pour reconnaître à celles-ci une large respon-sabilité en direction des moins qualifiés, indépendammentdu statut de ces derniers – jeune, chômeur ou salarié. Lesentreprises seraient également mises à contribution.Celles qui ne souhaitent pas former leurs salariés peuqualifiés devraient ainsi déléguer cette mission auxRégions et verser à celles-ci une partie des sommesqu’elles doivent consacrer à la formation de leurpersonnel.

La tâche s’avère titanesque puisque 120 000 jeunescontinuent chaque année de sortir de l’école sans forma-tion ni diplôme. Réduire ce nombre, c’est aussi se donnerles moyens financiers de requalifier ces personnes : on nepourra financer la formation des non-qualifiés que si l’onpeut en réduire le coût. Pour cela, il faut agir en amont,au niveau de l’école primaire. Comme le Haut Conseil del’éducation l’a rappelé en 2007, c’est dès le début del’enseignement que se jouent les acquisitions de base.Autrement dit, si l’on veut réduire les sorties sansqualification – et donc dépenser moins dans la formation

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On le voit, le redéploiement des 60 milliards d’eurosmobilisés par les politiques de l’emploi nécessite deredonner cohérence et efficacité à toute la politique del’emploi, autour d’un but clair et d’une perspectivemobilisatrice. Seul l’objectif de Lisbonne centré sur uneéconomie de la connaissance et du savoir peut yrépondre. Lui seul justifie de consentir un réel effort endirection des personnes peu ou pas formées ; lui seul esten phase avec la finalité affichée par ailleurs d’un jeunesur deux diplômé du supérieur.

Les financements publics pourraient alors être réorientésvers des priorités clairement énoncées. Dans un pays oùun jeune sur deux entrés sur le marché du travail avant1990 – et donc âgés aujourd’hui de moins de 40 ans –avait au mieux le CAP-BEP (alors que notre économierecrute désormais entre le bac et le BTS), l’effort derequalification qui doit être réalisé est considérable. Ilexige que les moyens financiers disponibles y soientconsacrés. Les compétences dévolues aux Régions enmatière de formation professionnelle et d’apprentissage

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Conclusion

Emploi, travail et formation se révèlent ainsi étroitementliés. Leurs financements relèvent du principe des vasescommunicants. Les réorienter, c’est d’abord rééchelonnertoute la chaîne de la dépense publique en fonction d’unobjectif général d’élévation du niveau de formation toutau long de la vie. La France va devoir choisir entre uneéconomie d’emplois peu qualifiés, dominée par lesservices à la personne et concurrencée à la fois par leséconomies à bas salaires et les économies du savoir, etune économie d’emplois à haute valeur ajoutée, aupremier rang dans la compétition des économies dusavoir. Il est encore temps de changer de cap, maisl’heure presse.

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des non-diplômés –, il faut dépenser plus dans le primairepour assurer à tous le socle des apprentissagesfondamentaux. De ce point de vue, des initiatives commecelles qui sont menées dès le cours préparatoire (commeles clubs « coup de pouce » qui consistent à apporter unappui spécifique aux enfants en difficulté d’apprentissageen les regroupant en modules de cinq), souvent financéesà l’initiative des seules communes, devraient êtregénéralisées.

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LES ESSAIS DE LA FONDATION JEAN-JAURES

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LES ESSAIS 10/2009

Gaëtan Gorce

Faire la révolution de l’emploiGaëtan Gorce appelle à faire la révolution de l’emploi. Parce

que le cœur du problème est pour lui culturel, la solution ne

peut reposer sur le seul empilement de mesures techniques.

Il faut penser différemment, c’est-à-dire penser ensemble les

politiques de formation, d’emploi et du travail et considérer

leurs financements comme autant de vases communicants

– qui absorbent aujourd’hui 60 milliards d’euros par an.

Le risque est réel d’emprunter la voie qui mène à une

économie déclassée, reposant sur une main-d’oeuvre peu

qualifiée, alors que celle qui conduit au contraire à l’économie

de la connaissance autour d’emplois à haute valeur ajoutée

est encore à portée de main. Mais le temps presse.

www.jean-jaures.org

ISBN : 2-910461-82-34 €