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8/13/2019 mHarbi http://slidepdf.com/reader/full/mharbi 1/14 France-Algérie : peut-on réconcilier les mémoires ? Entretien Mohammed Harbi, historien à l université Paris-VIII et ancien responsable du FLN : « Nous sommes victimes des jeux politiques propres à chaque Etat »  Article paru dans l'édition du 21.05.10 - Une réconciliation des mémoires algérienne et française est-elle réaliste ? La priorité est d'établir la vérité historique. C'est le rôle des historiens. On ne peut rien construire sur l'oubli. On se doit de dépouiller les relations entre les deux pays des interprétations nationalistes chauvines et ne pas craindre la vérité, si cruelle fût-elle. - Plus le temps passe, plus cela semble difficile... Comment expliquez- vous ce paradoxe ? Nous sommes encore victimes des jeux politiques propres à chaque Etat. On est dans le registre émotionnel, on rejoue la guerre. Les acteurs politiques qui ont intérêt à ce que la vérité ne s'ouvre pas un chemin ont un poids démesuré dans les institutions par rapport à celui qu'ils ont dans l'opinion. En Algérie, ce ne sont pas les historiens qui occupent le devant de la scène. On leur refuse, par divers procédés, l'accès aux archives. Les  Algériens se passionnent pour le rapatriement de leurs archives qui sont encore en France et à quelques voix près, on omet de dire que les archives disponibles en Algérie sont sous scellés. On condamne les historiens à l'autocensure et on les accuse cyniquement de lâcheté comme l'a fait récemment l'ancien président du HCE (Haut Comité d'Etat), le colonel Ali Kafi. Depuis l'indépendance, l'histoire est sous surveillance. Les pouvoirs successifs croient pouvoir consolider le lien social en occultant nos déchirements passés et présents et en taisant nos errances et nos crimes, ce qui permet à nos adversaires de les mettre sur le même pied que ceux de la colonisation. - Abdelaziz Bouteflika avait dit son souhait de parvenir à une réconciliation. Cette volonté politique existe-t-elle encore ? Lorsqu'il a pris le pouvoir, le président Bouteflika a levé certains tabous avant de s'arrêter brusquement en chemin. Je dois dire que ses ouvertures n'étaient pas toujours appréciées par la nomenclature. Certes la loi de février 2005, en France, a bloqué le dégel mais on se tromperait en laissant croire qu'elle est seule en cause. - Bernard Kouchner a-t-il raison de penser que cela ira mieux après la génération de l'indépendance ? Bernard Kouchner se trompe. Son intervention légitime les crispations.
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Jun 04, 2018

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France-Algérie : peut-on réconcilier les mémoires ?

Entretien

Mohammed Harbi, historien à l université Paris-VIII e tancien responsable du FLN : « Nous sommes victimes des

jeux politiques propres à chaque Etat »

 Article paru dans l'édition du 21.05.10

- Une réconciliation des mémoires algérienne et française est-elleréaliste ?La priorité est d'établir la vérité historique. C'est le rôle des historiens.On ne peut rien construire sur l'oubli. On se doit de dépouiller lesrelations entre les deux pays des interprétations nationalistes

chauvines et ne pas craindre la vérité, si cruelle fût-elle.- Plus le temps passe, plus cela semble difficile... Comment expliquez-vous ce paradoxe ?Nous sommes encore victimes des jeux politiques propres à chaqueEtat. On est dans le registre émotionnel, on rejoue la guerre. Lesacteurs politiques qui ont intérêt à ce que la vérité ne s'ouvre pas unchemin ont un poids démesuré dans les institutions par rapport à celuiqu'ils ont dans l'opinion.En Algérie, ce ne sont pas les historiens qui occupent le devant de la

scène. On leur refuse, par divers procédés, l'accès aux archives. Les Algériens se passionnent pour le rapatriement de leurs archives quisont encore en France et à quelques voix près, on omet de dire que lesarchives disponibles en Algérie sont sous scellés.On condamne les historiens à l'autocensure et on les accusecyniquement de lâcheté comme l'a fait récemment l'ancien président duHCE (Haut Comité d'Etat), le colonel Ali Kafi. Depuis l'indépendance,l'histoire est sous surveillance. Les pouvoirs successifs croient pouvoirconsolider le lien social en occultant nos déchirements passés etprésents et en taisant nos errances et nos crimes, ce qui permet à nos

adversaires de les mettre sur le même pied que ceux de la colonisation.

- Abdelaziz Bouteflika avait dit son souhait de parvenir à uneréconciliation. Cette volonté politique existe-t-elle encore ?Lorsqu'il a pris le pouvoir, le président Bouteflika a levé certains tabousavant de s'arrêter brusquement en chemin. Je dois dire que sesouvertures n'étaient pas toujours appréciées par la nomenclature.Certes la loi de février 2005, en France, a bloqué le dégel mais on setromperait en laissant croire qu'elle est seule en cause.

- Bernard Kouchner a-t-il raison de penser que cela ira mieux après lagénération de l'indépendance ?Bernard Kouchner se trompe. Son intervention légitime les crispations.

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Que les jeunes aient un autre regard sur le passé que leurs aînés ne faitpas de doute mais cela ne va pas jusqu'à sacrifier la mémoire. Lalégende noire des Algériens dans la culture coloniale les en dissuaderaitet cette légende noire est aujourd'hui portée à la connaissance de la jeunesse universitaire.Récemment, on m'a sollicité pour un colloque à l'université de Skikda.J'ai proposé comme thème « Nation, nationalismes et mondialisation ».L'université a préféré celui de «L'image des Algériens sous lacolonisation». Il était clair d'après des échanges que j'ai eus que desdirectives en ce sens venaient d'en haut.

- Est-ce le signe d'un nationalisme croissant ?Le nationalisme algérien se cristallise actuellement sur les rapportsavec la France et avec le Maroc. En France, le réveil d'une droite hostileà l'Algérie empêche ce pays de reconnaître ses responsabilités. Ajoutonsà cela qu'il est difficile de toucher à l'institution militaire française. J'enveux pour preuve la mise au placard du travail confié au professeurCharles Jauffret par le Service historique de l'armée de terre (SHAT).Deux tomes sont déjà parus. Le troisième est bloqué depuis plus d'unedécennie.La responsabilité des historiens algériens et français est de ne pas céderaux exigences des nationalismes d'Etat et de coopérer entre eux. Leurtravail en direction de l'opinion finira par prévaloir. On voit de plus enplus des inspecteurs de l'enseignement, des historiens, plaider pourl'intégration de l'histoire coloniale à l'histoire de France.

C'est aussi pour cette raison que la loi de 2005 a défendu l'option d'unehistoire officielle à l'école, réhabilitant la colonisation.

Propos recueillis par I. M.

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Guerre d Algérie | 50 ans

2 - Un récit, deux voix

 Article paru dans l'édition du 17.03.12

De part et d autre de la Méditerranée, les manuels scolairesne racontent pas la même guerre. En France, le temps a finipar faire son office et peu d épisodes sont occultés. EnAlgérie, l enseignement reste li é à des fi ns politiques, mê mesi les interdits sont peu à pe u levés  

Lorsque débute la guerre d'Algérie en 1954, les appelés français ont unevision particulière de leur destination. Les manuels scolaires de leurenfance leur ont inculqué une image idéalisée de la colonisation - lamise en valeur du pays, l'extension des terres cultivées, l'établissement

d'un réseau moderne de transport et de communication -, loin de laréalité qu'ils vont découvrir sur place. Comme l'a rapporté l'historienDaniel Lefèvre, les livres de classe sont alors « écrits pour remplir unefonction civique (...), transmettre une vérité officielle. La plupart dessoldats du contingent et la masse des Européens d'Algérie ignorent doncson histoire, ses réalités, et vont aborder la guerre d'Algérie avec«bonne conscience» » .Cinquante ans après le cessez-le-feu conclu le 19 mars 1962, aulendemain des accords d'Evian, la perception a évidemment changé dutout au tout. Les enseignants eux-mêmes se sont affranchis desmanuels. En 2004, Le Monde   avait assisté, dans un collège deLongjumeau (Essonne) au questionnement d'élèves de 3e, souventconcernés dans leur environnement familial par la guerre d'Algérie, et àleur soif de témoignages sans parti pris. Seule une collégienne avaitécrit : « Pour moi, les harkis sont des traîtres. »  Huit ans plus tard, leur professeur d'histoire a changé d'établissement,mais n'a pas oublié la leçon. Claire Podetti, qui travaille désormais aucollège Charles-Péguy, à Palaiseau (Essonne), fait venir dans sesclasses Henri Alleg, militant communiste qui témoigna sur la torturedans un livre qui fit date,  La Question   (Editions de Minuit, 1958), le journaliste Claude Sales, ancien appelé, auteur de La Trahison  (Seuil,

2006), ou Fatima Besnaci-Lancou, fille de harkis et avocate passionnéede leur cause. « Avant , souligne Claire Podetti, on enseignait avec noscraintes, nos peurs d'être contestés. Désormais, pour moi, il ne reste plus de tabous, tout est abordé. Et les élèves comprennent bien lacomplexité de cette guerre. »  Thierry Levasseur, enseignant en classe de terminale dans un lycée deGif-sur-Yvette (Essonne), fait lui aussi appel à des témoins et utilisetoutes sortes de documents, des photos aux albums de bande dessinéede Jacques Ferrandez. « L'histoiresert à comprendre » , justifie-t-il,répondant ainsi à la célèbre question de Marc Bloch, « A quoi sertl'histoire ? » « La guerre d'Algérie touche encore une large partie de la population, estime de son côté Kamel Chabanne, professeur au collègeJean-Perrin de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). Les élèves sont contentsde l'aborder pour avoir des réponses à leurs questions, parce que la

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mémoire familiale a souvent véhiculé tout cela. »  Même si le temps estcompté. Deux heures, en moyenne, au collège, dans un vasteprogramme sur la décolonisation et l'histoire de la IVe République, unpeu plus au lycée.De part et d'autre de la Méditerranée, le récit de la guerre a ainsiévolué, mais toujours à deux voix dissonantes. « On retrouve les lieux,

des personnages, mais on n'aborde pas la guerre de la même façon. Leshistoires ne se croisent pas, elles se touchent, elles s'entrechoquent » ,analyse Lydia Aït Saadi-Bouras, chercheuse à l'université Paris-VIII,auteure d'une thèse sur la nation algérienne à travers les manuelsscolaires algériens, soutenue en janvier 2010. D'un côté, on mettra enavant la fin du conflit négociée avec les accords d'Evian, au terme d'une« guerre »   qui ne trouve pas de qualificatif, de l'autre une « révolutionnationale »  et une indépendance arrachée par les armes.En France, il a fallu attendre la loi du 18 octobre 1999 pourqu'officiellement l'expression de « guerre d'Algérie et des combats enTunisie et au Maroc »   se substitue à celle d' « opérations effectuées en Afrique du Nord » . Le politique était en retard. Car, dès la fin desannées 1970, le mot « guerre »   figurait bien, lui, dans les manuelsscolaires.Benoît Falaize, professeur agrégé d'histoire à l'université de Cergy-Pontoise, distingue trois grandes périodes dans l'apprentissage scolairepostcolonial. De 1962 à 1983 - date à laquelle la guerre d'Algérie,enseignée seulement dans les collèges, fait son entrée au lycée -, lesmanuels survolent le conflit. Les documents sont rares, l'année 1962résumée parfois en une phrase lapidaire. « Il y a un évitement, pas decommentaires, comme on tournerait la page au plus vite » , note

l'historien. Les aspects les plus sensibles, comme la sanglanterépression policière de la manifestation du Front de libération nationale(FLN) organisée à Paris, le 17 octobre 1961, sont passés sous silence.Sur seize manuels alors utilisés par les enseignants, un seul évoque latorture et la répression féroce des émeutes du 8 mai 1945 à Sétif, aucours desquelles des milliers d'Algériens furent tués.Dans les années 1984-2003, une mutation s'opère.  « On assiste à unemontée en puissance des témoignages des pieds-noirs » , note BenoîtFalaize. Et la guerre devient une « sale guerre » , avec son cortèged'atrocités évoquées, dans un souci manifeste d'équilibre, des deuxcôtés. Le manuel de 3e Bréal, édité en 2003, reflète cette volonté : «

D'un côté, le vote des pouvoirs spéciaux accorde à l'armée française unemarge de manoeuvre quasi illimitée. En face, les hommes du FLN pratiquent le terrorisme. »   Après 2005, et la loi controversée sur l'héritage de la colonisation, lesmémoires sont de plus en plus sollicitées, qu'il s'agisse des juifs, ou desharkis, jusque-là exclus. Dans la dernière période 2007-2011, les figuresalgériennes jusqu'alors peu connues, en dehors d'Ahmed Ben Bella,premier président de la République algérienne, apparaissent, commeles membres fondateurs du FLN, Mohamed Boudiaf, Hocine Aït-Ahmed,Mohamed Khider, Mostefa Lacheraf. Pour la première fois, les camps deregroupement forcé sont mentionnés (Hatier, 2008) et trois manuels surdix évoquent désormais les massacres de Sétif et de Guelma en 1945. Ala rentrée 2012, une nouvelle étape sera franchie : l'histoire sepoursuivra désormais après la date de l'indépendance de l'Algérie, le 5

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 juillet 1962, dans un programme intitulé : « Des colonies aux Etatsindépendants ».Si l'histoire enseignée devient plus objective, elle ne reste jamaisneutre. En 2005, l'article 4 de la loi du 23 février sur les rapatriésprévoyait, sous la pression de députés, que « les programmes scolairesreconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française

outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire etaux sacrifices des combattants de l'armée française issus de cesterritoires la place éminente à laquelle ils ont droit ». Devant le tollésoulevé, l'article a fini par être retiré, non sans avoir sérieusementperturbé les relations diplomatiques franco-algériennes. Au gré de ces relations, le Kassaman, l'hymne national algérien, écriten 1955 et adopté en 1963, a figuré avec ou sans son cinquième coupletdans les manuels scolaires : « Ô France, le temps des palabres estrévolu/Nous l'avons clos comme on ferme un livre/Ô France, voici venule jour où il te faut rendre des comptes... »   Il est à l'heure actuellerétabli.En Algérie, les manuels scolaires en arabe dépendent exclusivement duministère de l'éducation nationale. Jusque dans les années 1990, la «guerre de libération nationale »  magnifie « un seul héros, le peuple » etlégitime le FLN au pouvoir. Dix-sept biographies de « martyrs » commeMostefa Ben Boulaïd, commandant militaire dans les Aurès, tué en 1956,ou Mourad Didouche, disparu en 1955, qui ont donné leur nom aux grandsboulevards d'Alger, figurent en bonne place. Rien sur les témoins encorevivants. « Les manuels relayaient ce qui tenait lieu d'histoire officielle etmagnifiaient la dimension militaire au détriment du contenu politique, rapporte l'historien Abdelmajid Merdaci, professeur à l'université de

Constantine. L'accent était mis sur le nationalisme islamique, le djihad,alors que les oulémas n'ont rejoint le FLN que sur le tard. »  La violence ducolonisateur est détaillée, pas celle de son départ. « Cela ne concerne plusl'histoire algérienne, on tourne la page »,   note la chercheuse Lydia AïtSaadi-Bouras.Une évolution se dessine à partir de 1991, année qui marque l'ouvertureau multipartisme en Algérie. Les figures nationales proscrites, écartéesdes mémoires, comme Ahmed Ben Bella, Messali Hadj ou Hocine Aït- Ahmed font leur apparition dans les livres de classe, non sans parfoisdonner lieu à de vives polémiques. La réhabilitation de la lutte politiques'affirme à partir des années 2000, à travers la figure de Ferhat Abbas,

qui devint, après la guerre, président de l'Assemblée constituante. Lalevée des interdits se traduit aussi par l'intégration, progressive, de «l'histoire réelle ». Le Mouvement national algérien (le MNA, contre lequelle FLN mènera une lutte fratricide sans pitié) est cité, « dans les pages destraîtres, nuance Lydia Aït Saadi-Bouras, comme les caïds, les porteurs desauf-conduit, les supplétifs, les harkis » . Mais rien n'est dit, pour cesderniers, sur les exactions qu'ils ont subies. Dans un pays déchiré dans lesannées 1990-2000 par une guerre civile, « le but est toujours la concordecivile », souligne l'historienne.L'ouverture, cependant, se mesure aussi au recours à des historiensfrançais et algériens, comme Benjamin Stora, Mohamed Harbi ou GillesManceron. Il reste des tabous, absolus : ainsi de la violence de l'été 1962(notamment le massacre de plusieurs centaines de pieds-noirs à Oran) oudes luttes intestines et meurtrières du pouvoir. « Il n'échappera à aucun

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observateur averti que le régime algérien a positivement censuré, en dépitdes rodomontades et des faux procès de la colonisation, tout examendocumenté des crimes commis durant la guerre et après, assène Abdelmajid Merdaci. Les camps, l'usage du napalm, la torture, les viols,sont plus facilement exposés à Paris qu'à Alger. »« Les acteurs témoignenten leur nom propre, pas au nom du collectif » , observe l'historien, pointant

du doigt ce qu'il nomme, dans la société algérienne, « une absence de désird'histoire » . En particulier chez les jeunes... pour qui sont écrits lesmanuels. I. Mandraud

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1954-2004 : FRANCE, ALGÉRIE MÉMOIRES EN MARCHE

FIGURES

M o h a m m e d H a r b i « L o n g t e m p s , l e s p r i t d e r é s i s ta n c e f i t t a i r em e s c r i ti q u e s »

 Article paru dans l'édition du 28.10.04Historien réputé de l Algérie, réfugié en france depuis 1973,assume son engagement nationaliste, mais il procède à unbilan sévère des dérives autoritaires du pouvoir algérien. Etil s attache à en comprendre les or igines dans le fln  

EN 1954, vous avez 21 an s, vous étudiez l histoire àParis et codirigez le collectif étudiant du MTLD, le partinationaliste de Messali Hadj. Qu avez-vous vécu,ressenti le 1er novembre ?En apprenant le matin à la radio ce qui s'était passé en Algérie, j'airessenti un choc beaucoup plus qu'une surprise, car je savais que laquestion de l'insurrection était en débat : à la fin octobre, deuxdirigeants du parti avaient débarqué à Paris et nous avaient prisdans un coin : « Nous allons tenter de voir les frères au Caire pourles convaincre de reporter la date de l'insurrection, mais ils sontdécidés. Si nous ne les faisons pas fléchir, vous prendrez vosresponsabilités. » Le choc a été d'autant plus vif que le parti vivaitune scission entre les partisans de Messali et ceux qui voulaientpasser immédiatement à l'action armée. Nous pensions que si ondevait aller à l'insurrection, il fallait absolument être unis. Avecmes camarades, j'étais partagé entre une grande inquiétude etl'impatience de vivre des événements que nous attendions depuislongtemps.

Pourquoi étiez-vous favorable au report del insurrection?Le parti était déchiré et je me disais que les choses devaient sefaire de façon ordonnée, rationnelle. Nous avons appris ensuite queles autorités connaissaient nos projets et préparaient une vasteopération de police. Alors, même nous qui étions réservés sur la

date de l'insurrection, nous nous sommes dits : « Heureusementqu'ils sont partis ! » Nous pensions que si le peuple prenait encharge l'insurrection, elle pouvait réussir. Sinon, la répressions'abattrait. Or nous vivions dans le souvenir brûlant de larépression des émeutes du 8 mai 1945 à Sétif et Guelma.

Ces événements ont-ils déterminé votre engagement ?Notre génération est arrivée après de grosses secousses. J'ai perduplusieurs membres de ma famille en mai 1945 à Guelma. Ensuite,il y a eu le trucage des élections d'avril 1948. J'avais 15 ans, j'étaislycéen, je lisais Le Monde et La Tribune des nations et c'est à cemoment-là que je me suis engagé. Mon grand-oncle était candidat,favorable aux assimilationnistes. J'ai volé tous les bulletins de voteet je les ai jetés. Toute ma famille maternelle était engagée depuis

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longtemps dans le nationalisme.

Vous militez aussi par une sorte de fidélité familiale ?Je suis né dans une famille de propriétaires fonciers et je croisavoir connu de très près la misère rurale. Cela me touchaitprofondément car j'étais lié à des enfants qui disparaissaient pour

aller travailler à l'âge de 10 ans. Si les idées socialistes de mesprofesseurs du lycée de Philippeville (aujourd'hui Skikda) ont pristout de suite, c'est que ces références sociales étaient là, sous mesyeux. Nos parents nous avaient élevés dans l'idée de l'égalité, ilspensaient que l'émancipation viendrait par l'éducation. Mais lesgens de ma génération ne croyaient plus aux petits pas. Nousvoulions l'indépendance du pays.

Dans votre lycée, l engagement était la règle ?Le jour de la fête du Mouloud, on nous obligeait à aller en classe.Nous, la minorité d'élèves musulmans, nous faisions grèvemassivement. Le lycée où j'étais interne a été une pépinière dedirigeants nationalistes depuis les années 1930. Nous avions desprofesseurs communistes et trotskistes auxquels je rendshommage, mais notre activité politique était totalementclandestine. Tous les gens avec lesquels je militais étaient fils defonctionnaires ou de propriétaires terriens, les autres n'allaientpas au lycée. La plupart de mes camarades sont morts au maquis,ont séjourné en prison ou dans des camps, tous ont fini par militerau FLN.

La problématique démocratique, essentielle pour vousaujourd hui, était-elle déjà présente ?Nous parlions de démocratie, mais c'était un discours destiné àêtre opposé aux Français, la question des libertés individuellesn'était pas fondamentale. Nous n'admettions pas que des gensaient d'autres opinions que nous, nationalistes. En quelque sorte,nous avions repris à la religion sa démarche. Dans la tête desmilitants, le principe de la souveraineté populaire, que nousdéfendions, signifiait avant tout le rejet de la domination étrangèreet l'exigence d'un Etat.

Quand avez-vous changé ?Nous avons été quelques-uns à changer dès le lycée parce que nousavions des enseignants marxistes qui attiraient notre attention surles limites du nationalisme. Mon professeur d'histoire, PierreSouyri, a été un pilier de Socialisme et barbarie. Mon professeur delettres, Jean Jaffré, était au PC. C'est essentiellement grâce à euxque la problématique démocratique a touché certains élèves. Monmilitantisme en a été profondément marqué.

A quel moment de votre itinéraire avez-vous compris quevous ne seriez pas du côté des vainqueurs ?Longtemps, l'esprit de résistance nous a soudés et fait taire mescritiques. Mais je voyais les clivages s'aggraver et, en 1958 et 1959,mon attitude, l'expression de mes désaccords m'ont valu de passer

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deux fois en conseil de discipline. Lorsque j'ai démissionné de mesresponsabilités au ministère des affaires étrangères, en 1960, j'aiexprimé dans ma lettre mon « refus d'accepter la conceptionpolicière de l'action politique qui prévaut au sein du FLN ».Pourtant, même à cette époque, l'inquiétude restait mêlée à del'espoir. Je me disais que ce n'était pas possible qu'une société se

laisse faire. C'était peut-être un refus de la réalité.Avez-vous attendu d être vous-même incarcéré pourperdre réellement l espoir ?Non, j'ai pensé quitter les sphères du pouvoir dans les années1964, 1965. Mais ensuite, le coup d'Etat de Boumediène est arrivé,et partir aurait signifié abdiquer. Jusqu'au bout, je suis resté dansune posture autoréflexive. Je n'avais aucune haine ni mépris pourmes adversaires. Je souffrais beaucoup de cette culture de la hainequi s'est développée après l'indépendance, comme pour donner uneassise à un sentiment national un peu fragile.

Qu est-ce qui vous a empêché de devenir un apparatchik?Etant donné la famille d'où je venais et les études que j'avaisfaites, je ne cherchais pas dans la politique un moyen d'ascensionsociale. J'ai avalé beaucoup de couleuvres en pensant que, le jouroù nous serions plus nombreux à nous opposer, les choseschangeraient. Malheureusement, la suite m'a montré que lepouvoir qui s'était installé en Algérie avait une capacitéd'intégration ou de désintégration de ses adversaires

exceptionnelle.Quand avez-vous pris conscience de cette capacité duparti à broyer les gens ? A partir du moment où, en 1957, j'ai commencé à me poser laquestion du rapport entre la fin et les moyens. Jusque-là, jemilitais dans l'esprit de 1789, comme un jacobin habité par lanécessité d'assurer le changement. La Révolution française meservait à justifier certaines formes de terreur. Petit à petit, enréfléchissant au cas de l'Union soviétique, je me suis rendu comptequ'une révolution sans assises démocratiques finit par avaler ses

propres enfants.

Pourquoi situez-vous en 1957 cette prise de conscience ?Cette année-là, j'avais demandé à ce qu'on arrête les attentatsentre Algériens, les violences contre les messalistes. J'avaisdemandé aussi que la contribution financière des Algériens à laRévolution repose sur des règles et pas sur des formes de pression.Je n'ai été suivi sur aucun de ces points et cela ne me semblait pasde bon augure.

1957, c est aussi l année de l assassinat d AbbaneRamdane par d autres dirigeants du FLN. Est-ce unévénement qui a compté ?Je l'ai appris en Allemagne, où la fédération de France du FLN

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s'était repliée, presque un an après les faits, en septembre 1958.Des camarades de passage m'ont dit : « Ils ont assassiné Abbane »[lire page VII]. On était au restaurant et ils parlaient à voix basse,regardant de tous côtés comme s'ils étaient épiés. A l'époque, je nesavais pas que le FLN avait déployé un incroyable dispositifpolicier pour espionner. Je les ai crus sur parole parce que c'étaient

des amis, alors que le FLN prétendait qu'Abbane était mort « auchamp d'honneur ». Les Français avaient affirmé qu'il avait étéassassiné mais nous pensions que cette rumeur relevait de l'actionpsychologique. Je savais donc que c'était une éventualité mais j'avais du mal à le croire : Abbane était le dirigeant qui avait réussià faire du FLN l'interlocuteur de la France. Son assassinat a jouéun rôle de catalyseur dans ma démission de la fédération deFrance en 1958.Depuis votre exil en France, en 1973, vous vous êtes imposé commeun historien reconnu. Peut-on être historien de sa propre histoire ?Mon premier livre d'histoire, Aux origines du FLN, était partisan,militant. Par la suite, j'ai vu ces défauts et j'ai tout fait pourdépasser les implications personnelles et faire oeuvre d'historien,n'ajoutant de commentaires personnels qu'en les signalant commetels. J'adopte cette démarche parce que je trouve que la chose laplus dure en Algérie, c'est que chacun fait son discours maispersonne ne dialogue. Les Algériens sont parfaitement capables dediscuter avec des étrangers, mais pas entre eux. Si j'adoptais lamême démarche, je n'aiderais en rien à changer les choses. Ce que je n'ai jamais cessé de rechercher.Propos recueillis par Philippe Bernard

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Quarante ans après, les Français osent regarder e n face la guerre d Algérie

Mohammed Harbi, ancien dirigeant du

FLN, historien « La connaissance del'Histoire permet d'engager unethérapie collective » Article paru dans l'édition du 01.01.02

Le recul du temps suffit-il à expliquer la résurgence de la

mémoire de la guerre d'Algérie en France en 2001 ?- Non, les causes de ce phénomène sont multiples : il y a d'abord eule travail silencieux des anciens appelés, qui, traumatisés par cetteguerre, sont sortis du refoulement, poussés par une nouvellegénération d'historiens. Parallèlement, les archives du servicehistorique de l'armée de terre se sont ouvertes, des colloques ontété organisés, les journalistes ont travaillé. Des déterminantsextérieurs se sont ajoutés, notamment le procès Papon, qui,confrontant la France à la mémoire de Vichy, a buté sur lamémoire algérienne lorsque le rôle de l'ancien préfet de police dansla répression du 17 octobre 1961 a été évoqué. Le fait que les élites

politiques responsables des événements aient cédé la place a sansdoute aidé ce travail de mémoire.- Quel usage les Français peuvent-ils faire de ce débat ?- L'essentiel est d'analyser les faits pour dépasser le stade deslamentations. La connaissance de l'Histoire permet d'engager unethérapie collective afin que de telles horreurs ne se reproduisentpas. Les jeunes ont du mal à imaginer que la patrie des droits del'homme a pu pratiquer la torture. Les manuels scolaires, quin'intègrent pas l'histoire coloniale à l'Histoire de France, ne lesaident guère. Or la France a gardé de son histoire coloniale des

empreintes, notamment la présence de populations qui sontdevenues françaises et dont l'intégration suppose une approchedifférente de son histoire.- La connaissance du passé algérien peut-elle aider ou entravercette intégration ?- Avec le temps, le savoir procure beaucoup plus de sérénité que lerefoulement. Mieux vaut reconnaître le dol pour cautériser lesplaies. Il reste qu'aujourd'hui un jeune Français issu del'immigration peut vivre sa condition comme une continuité du faitcolonial. Dans l'approche que les gouvernements ont des immigrés,

le colonialisme n'est pas mort.- En quoi le débat en cours peut-il nous aider à comprendre lesévénements algériens actuels ?

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- L'Algérie a un rapport à la violence qui provient de lacolonisation. Celle-ci est partie prenante de l'actuel état debarbarie, notamment parce que des élites ouvertes au monde ontété détruites. Pour autant, il serait arbitraire de rattacherpurement et simplement la situation d'aujourd'hui à lacolonisation. La société algérienne a, avec certaines formes de

violence, un rapport qui lui est propre, comme en témoigne sonhistoire précoloniale. » Les débats actuels en France forcent les Algériens à se poser des questions sur eux-mêmes plutôt que detoujours chercher des responsables à l'étranger. Les genscommencent à penser que la société algérienne porte en elle desstigmates qu'elle doit éliminer. La guerre de libération a créé en Algérie un système barbare de représailles et de contre-représailles qui ne pouvait être stoppé par une loi d'amnistie etdont nous vivons encore les conséquences. Après 1962, latransformation du pays a été conçue comme une simplesubstitution : les nouvelles élites ont chaussé les pantoufles ducolonisateur et ont entretenu les mêmes types de rapports avec lapopulation.- Un travail de mémoire peut-il être entrepris en Algérie ?- J'ai toujours pensé que Français et Algériens devaient écrireensemble cette Histoire, comme les historiens français etallemands l'ont fait pour les guerres mondiales. Il est d'ailleursimpossible de faire autrement : si chacun s'enfonce dans l'histoirenationale, nous ne ferons que reculer. »PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE BERNARD

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On ne présente plus Mohammed Harbi, militant et cadre du FLNdevenu historien. Ses Mémoires constituent un modèle d'ego-histoire. Son livre est certes pudique sur la vie privée, mais il nel'élude pas. Toute dominée qu'elle ait été par les charges publiques- cela non sans culpabilité. L'ouvrage court de l'enfance nord-constantinoise, dans l'ambiance patriarcale et communautaire du

village, à l'« implosion » du FLN à l'été 1962 ; en passant par lesengagements adolescents au Mouvement pour le triomphe deslibertés démocratiques (MTLD) (1), puis par la militance dans lemouvement étudiant à Paris. Harbi y fut hostile à la réductioncommunautariste du « M » de l'Ugema (Union générale desétudiants musulmans algériens), la centrale étudiante née en1955.

 Vint ensuite la phase du comité fédéral de la fédération de Francedu FLN, à Paris, puis en Allemagne. Marginalisé comme

intellectuel contestataire, il en démissionna à l'été 1958 quand ilapprit l'assassinat du dirigeant politique Ramdane Abbane par lestrois colonels - les fameux « 3 B » : Belkacem Krim, Lakhdar BenTobbal, Abdelhafid Boussouf - qui avaient pris barre sur le FLN àl'été 1957. Il avait aussi été révulsé par les méthodes employéespar la fédération pour liquider politiquement les esprits libres etpour exterminer les messalistes. Après un entracte studieux àl'université de Genève, on retrouve Harbi au printemps 1959 aucabinet du ministre des forces armées, Belkacem Krim - fief kabyles'il en fut. A l'origine, il y fut recruté essentiellement pour êtrel'oreille de Krim auprès de la direction de l'importante wilaya 2

(région militaire de l'Armée de libération nationale du Nord-Constantinois) : concurrent de Krim au GPRA, le ministre del'intérieur Ben Tobbal venait du sérail de la wilaya 2 ; et sonsuccesseur à la tête de la wilaya, le colonel Ali Kafi, était l'onclematernel de Harbi...Début 1960, lorsque Krim fut nommé ministre des affairesextérieures, il garda Harbi, nommé à la tête du département « paysde l'Est ». Ce fut l'installation en Egypte, le temps des chaudesamitiés et de la fascination pour Le Caire. Après un semestre passéen 1961 à la mission du FLN en Guinée, Harbi fut nommé expert

aux négociations d'Evian avant d'assister, impuissant, à l'été 1962,au déferlement des cliques armées et à la victoire de l'état-majorgénéral, dirigé par le colonel Boumediène. Allié à Ben Bella,Boumediène soutenait ce dernier comme la corde soutient lependu. Les observateurs lucides s'en rendaient déjà compte.COMMUNAUTARISME DU FLNDans la préhistoire du FLN, on voit se dessiner un partiindépendantiste - le MTLD - où « le consensus était culturel etreligieux avant d'être politique », et dont la base se nourrissaitd'attentes messianiques. Issu du MTLD, le FLN n'eut au fond,

pour idéologie et pour levier, guère que le communautarismetraditionnel à soubassements religieux. Ce communautarismedéfinit l'alpha et l'oméga des engagements. Il ne permit guère aux

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 Algériens de s'imaginer décisivement en nation, c'est-à-dired'aborder la modernité.Harbi, lui, était ancré dans l'espace culturel de la gauche françaiseavant de l'être dans celui des démocrates et des internationalisteseuropéens, puis des mouvements anti-impérialistes du tiers-monde. Sans ignorer Max Weber, il était nourri aux bonnes sources

du marxisme : Marx, mais aussi Ernst Bloch et Gramsci. En mêmetemps, il était un libertaire impénitent. Il fut donc sans cesse enporte-à-faux par rapport au FLN. C'est que, au FLN, les soucis decarrière et les réflexes de soumission bureaucratique à l'autoritéétaient souvent plus forts que l'idéal. La misère intellectuelle yétait criante, les méthodes souvent musclées, les moeurs policières,la vie scandée de complots, de répressions et d'intimidationsbrutales. Bref, le FLN, mouvement de libération patriotiqueincontestable, fut en même temps une machinerie de pouvoirviolente. Au dénouement de 1962, sur les décombres du GPRA, la

seule équation, au FLN, se réduisit à : « Quel segment militairedominerait l'Etat ? »L'itinéraire personnel de Harbi nous livre, en négatif, un vrai livred'histoire sur le FLN. En effet, vu le contexte, être un hautfonctionnaire imaginatif et appliqué se révéla être de peu de poids. Avoir des convictions et le sens de l'amitié pouvait vous êtreimputé à charge. Etre rationaliste et révulsé par le messianismen'était pas dans l'air du temps. Vouloir construire la nation au-delàdes communautarismes traditionnels n'était pas la préoccupationdu moment. Etre en même temps algérien pétri d'algérianité,citoyen du monde et internationaliste, était une offense aux replis

obscurantistes qui s'annonçaient. Etre un démocrate, enfin, étaittrop répulsif, dangereux aux yeux du despotisme violent qui seprofilait.Une vie debout pourrait en somme porter en sous-titre : « Etrelibre au FLN, ou la quadrature du cercle ». Un tel livre seraindispensable à ceux qui voudront comprendre, aussi, l'Algéried'aujourd'hui, ses heurts et ses malheurs. Sa constructionnationale et ses espoirs aussi.

GILBERT MEYNIER