Stratégies de planification et d’anticipation pour la gestion opérationnelle des inondations L’exemple de la gestion des crises inondation dans le département du Gard Sous l’encadrement de : MM. F. VINET et F. LEONE -- Enseignants-chercheurs, Co-directeurs du Master GCRN Cdt. O. GUILLAUME -- Adjoint au chef de groupement Prévision-Opérations - SDIS30 Rapport de stage Effectué au sein du Service Prévision-Opérations du Service Départemental d’Incendie et de Secours du Gard (30) Université Paul Valéry - Montpellier III Jean-Guy Audéoud - Soutenu le 18 Septembre 2012 Département de Géographie Filière GCRN - Gestion des Catastrophes et des Risques Naturels Mémoire de Master 2
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Mémoire - Gestion opérationnelle des inondations dans le Gard - stratégies de planification et d'anticipation
Stratégies de planification et d'anticipation pour la gestion opérationnelle des inondations dans le Gard
- Jean-Guy Audéoud - Mémoire M2 GCRN (2012), Université Paul Valéry, Montpellier III
- Méthodes de création de 9 Plans de Prévision de Crues sur les principaux cours d'eaux du Gard, documents de planification opérationnelle spécifiques aux sapeurs-pompiers - Développement d'un outil d'anticipation des crues sur le Gard (SECTOP) pour pré-positionnement des moyens sapeurs-pompiers sur le département du Gard.
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Stratégies de planification et d’anticipation pour la gestion opérationnelle des inondations
L’exemple de la gestion des crises inondation dans le
département du Gard
Sous l’encadrement de :
MM. F. VINET et F. LEONE -- Enseignants-chercheurs, Co-directeurs du Master GCRNCdt. O. GUILLAUME -- Adjoint au chef de groupement Prévision-Opérations - SDIS30
Rapport de stage Effectué au sein du Service Prévision-Opérations du Service
Départemental d’Incendie et de Secours du Gard (30)
Université Paul Valéry - Montpellier III
Jean-Guy Audéoud - Soutenu le 18 Septembre 2012
Département de GéographieFilière GCRN - Gestion des Catastrophes et des Risques Naturels
Mémoire de Master 2
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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REMERCIEMENTS
En terminant ce mémoire de Master 2, mes plus sincères remerciements s’adressent à tous
ceux ayant contribué à la réalisation de ce travail, et particulièrement :
Au Cdt. Olivier Guillaume, mon tuteur de stage ; pour m’avoir accordé sa confiance
dans le cadre de ces missions au SDIS30 et pour ses conseils et ses encouragements
constants, tout au long de ces six mois.
A MM. Vinet et Leone, co-directeurs du Master 2 GCRN de l’Université Paul Valéry
(Montpellier III), pour m’avoir permis d’intégrer cette formation.
A toute l’équipe du groupement Prévision-Opérations dirigée par le Lt-Col. BOURELY,
pour son soutien et sa sympathie pendant le stage, et spécialement à Patrice Moulin,
Responsable Cartographie au groupement Prévision-Opérations, pour son aide technique
régulière et ses conseils très appréciés.
A mes parents, pour leur soutien constant, qui seul a permis le prolongement pratique
du stage au SDIS au cours des mois d’août et septembre.
A tous ceux qui m’ont aidé et encouragé au cours de ces six mois, et notamment à
Vincent, mon collègue stagiaire, pour son aide régulière sur les trajets ; à Yann Visserot pour
ses réponses éclair à mes SOS-Qgis, au Gremlin pour ses coups de pouce sur les ondes, à
Dalon et mes camarades de GCRN côtoyés tout au long de l’été.
To the USA, you know why. :)
Et finalement,
A la SNCF, pour les challenges réguliers aimablement proposés sur les trajets quotidiens entre
Montpellier et Nîmes, ne doutant pas qu’ils visaient à améliorer de nécessaires qualités
d’organisation, de patience et de course à pied.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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SOMMAIRE
Page de garde ................................................................................................................ 1
La vulnérabilité est distincte pour chaque forme de présence humaine et pour chaque
type d’aléa concerné. Complexe à définir et à quantifier avec précision, la vulnérabilité
a fait l’objet d’une évolution de sa définition. Depuis une dizaine d’années, on ne la
définit plus seulement comme un simple état des lieux des enjeux exposés, mais
comme la capacité à surmonter la crise provoquée par l’aléa (Dauphine, 2001, dans
Brilhac, 2009). Vinet (2009) fait remarquer que la vulnérabilité est elle-même multiple
et non simple : on peut différencier vulnérabilité structurelle (ou physique, matérielle),
humaine, et enfin sociale et institutionnelle. Elle est également directement liée aux
concepts de résistance (capacité d’un individu, d’une infrastructure, d’une société ou
plus géénralement de tout type de système à subir un phénomène sans dommages,
capacité d’une société à subir un évènement sans perturbation majeure), de résilience
(capacité à absorber des dommages ou à minimiser les dommages d’un traumatisme)
et de régénération (capacité à retrouver un équilibre ou revenir à un état initial, après
un traumatisme ou des dommages). Ces trois capacités sont dépendantes les unes
des autres : une capacité de résistance, résilience ou régénération faible tendra à
définir une vulnérabilité élevée.
Au final, on en retiendra la définition évoquée par Ruin (2007), fruit du travail d’un
groupe interdisciplinaire, qui précise et affine la définition de l’ISDR selon le principe
suivant :
(Risque) = f (A, E, V, I t:s)
Avec E comme l’élément soumis à l’impact d’un évènement, V la vulnérabilité et I la
résilience de l’élément, et A l’évènement lui-même, cousant des dommages dans une
sphère spatiale (s) et temporelle (t). A défaut de constituer avec certitude la meilleure
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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définition possible du risque, elle est certainement l’une des plus adaptée à l’approche
géographique, grâce à sa prise en compte des variables de temps et d’espace.
Evènement et Situation de crise
L’évènement est la réalisation de ce qui n’était jusque-là qu’une éventualité, c’est-à-
dire l’occurrence du phénomène (ou de la conjonction de phénomènes). Le terme
évènement extrême découle d’une très forte intensité de l’agent naturel en cause.
Selon le contexte d’utilisation et le type d’aléa en jeu, on peut rencontrer deux sens de
ce terme. L’évènement peut soit désigner uniquement le phénomène naturel à l’origine
de la perturbation, soit s’appliquer à l’ensemble du laps de temps écoulé entre le début
du phénomène et le retour à la normale.
On peut remarquer que l’évènement, bien qu’utilisé ici comme un concept homogène,
est en réalité la traduction ponctuelle d’évènements complexes, déclenchés non par
une raison précise mais par une série de causes inter-reliées. Les principes de
l’intrication systémique s’y appliquent donc (Jousse, 2009). C’est aussi le cas pour les
enjeux humains considérés comme des systèmes – sociétés, infrastructures, réseaux
– et leur réaction vis-à-vis d’un évènement. Bien que ce ne soit pas le sujet principal de
cette étude, il est nécessaire de conserver ce principe de complexité à l’esprit, dans
l’étude et la mise en place de plans de gestion de crise. Ces dispositifs étant destinés à
fournir aux acteurs de la gestion des risques des outils d’aide à la décision, ils tendent
naturellement à être schématiques, mais doivent cependant éviter toute simplification à
outrance.
On parle de crise en cas de situation non maîtrisable par les moyens habituels et
nécessitant des prises de décision rapides pour limiter les dommages. Il est également
à noter qu’un évènement (naturel ou non) ne suppose pas obligatoirement une
situation de crise, celle-ci n’existe en effet que si l’évènement n’est plus maîtrisable
techniquement, économiquement ou socialement, c’est-à-dire à partir du moment où
les capacités de gestion de l’entité concernée par la crise1 sont dépassée.
La gravité d’une situation de crise peut lui valoir différentes qualifications. Dans l’ordre,
on parlera d’incident, d’accident de gravité variable, de catastrophe ou catastrophe
majeure dans le cas de risques naturels. L’utilisation de termes gradués pose alors la
question des critères utilisés pour définir la gravité d’une situation. Son intérêt n’est pas
1 Soit dans la mesure où cette entité (individu, structure, société, système anthropique) subit la crise, soit
dans la mesure où elle est appelée à la gérer sans forcément avoir subi les dommages.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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seulement sémantique : la définition d’un état de catastrophe naturelle, par exemple,
aura des conséquences directes sur la gestion post-crise (régime d’assurance,
indemnisations de l’Etat, etc.)
Une définition quantitative est possible, comme l’échelle de gravité utilisée par le
Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement
(MEDDTL, sur portail gouvernemental Prim.net). Reproduite en Tableau 1 - Echelle de
gravité d'un évènement (MEDDTL, 2008), elle regroupe risques naturels et
technologiques sur une seule échelle, en utilisant des mesures quantitatives de
dommages humains et matériels.
Tableau 1 - Echelle de gravité d'un évènement (MEDDTL, 2008)
Code Classe Dommages humains Dommages matériels
0 Incident Aucun blessé Moins de 0,3 M€
1 Accident 1 ou plusieurs blessés Entre 0,3 M€ et 3 M€
2 Accident grave 1 à 9 morts Entre 3 M€ et 30 M€
3 Accident très grave 10 à 99 morts Entre 30 M€ et 300 M€
4 Catastrophe 100 à 999 morts Entre 300 M€ et 3 000 M€
5 Catastrophe majeure 1 000 morts ou plus 3 000 M€ ou plus
D’autres systèmes de définition existent cependant. La Croix-Rouge, par exemple,
préfère utiliser une méthode plus qualitative, en définissant un état de catastrophe sur
des critères à la fois fonctionnels et matériels. Elle le définit comme un « événement
brutal, d'origine naturelle ou humaine, grave interruption du fonctionnement d’une
société causant des pertes matérielles, humaines ou environnementales, situation
désastreuse exigeant une intervention d’urgence extraordinaire pour sauver ou
préserver des vies humaines et/ou l’environnement » (Grunewald, 2005).
Enfin, il est possible de définir la catastrophe sur une base uniquement fonctionnelle,
comme la définition de l’Organisation des Nations Unies : « grave interruption de
fonctionnement d’une société causant des pertes matérielles, humaines et
environnementales que la société affectée ne peut affronter avec ses ressources
propres » (Laborde, 2009).
Ces définitions ne s’excluent pas mutuellement. Elles correspondent à des besoins
différents : plus un acteur ou une institution doit juger rapidement de l’état d’une
situation de crise, plus les définitions utilisées sont schématiques et se basent sur des
indicateurs chiffrés.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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1.1.2. Maîtrise du risque, maîtrise des risques
Si le risque découle de la confrontation des aléas et des enjeux, il est donc possible de
porter une action sur l’un ou l’autre de ces deux facteurs.
Agir directement sur l’aléa signifie prendre des mesures pour réduire la fréquence et
l’intensité des évènements. Ce mode d’action suppose de tenir compte des possibilités
techniques de la société actuelle. Force est de reconnaître que la majorité des risques
naturels relèvent de processus naturels qui se situent actuellement hors des
possibilités d’intervention humaine. En revanche, il est possible d’agir sur l’aléa dans le
cas des risques technologiques, en maximisant les mesures visant à diminuer la
fréquence et l’intensité des accidents technologiques. Dans tous les cas, une
connaissance de l’aléa aussi complète que possible doit y être recherchée.
L’acquisition des savoirs théoriques (recherche fondamentale), ainsi que l’acquisition et
la mise à jour des informations (données d’évènements) demeurent indispensables à
toute tentative d’action. Par ailleurs, la nécessité de prendre en compte les chaînes
causales à l’œuvre dans ces processus a conduit à appliquer de nombreux principes
de l’approche systémique à leur étude.
Agir sur les enjeux, en revanche, vise à réduire la vulnérabilité des personnes, biens
ou structures humaines menacées. Les possibilités d’action y sont plus larges, car plus
proches des possibilités techniques actuelles. Leur mise en application n’est
cependant pas moins complexe. En effet, si toute forme de présence, d’organisation ou
d’activité humaine exposée à un aléa constitue un enjeu en soi, cela suppose de
considérer les sociétés humaines comme des ensembles. En conséquence, même si
les mesures d’actions prises sur les enjeux peuvent être ponctuelles, elles doivent être
replacées dans un contexte plus large, qui tient compte des conséquences à plusieurs
degrés sur les différents domaines de l’activité anthropique.
Contrairement à une définition souvent donnée, c’est la prise en compte de
d’interdépendance de ces deux composantes du risque (et de leurs mécanismes
respectifs) qui donne son sens et sa raison d’être au terme d’approche globale pour la
maîtrise des risques, et non simplement le fait d’agir simultanément sur les enjeux et
sur les aléas.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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En France, cette gestion se décline en quatre axes majeurs : prévision, protection,
prévention et gestion de crise. Plusieurs propositions one été réalisées pour tenter de
décliner ces axes en principes pratiques. Celle proposée par la DDRM Maine-et-Loire
en 2008 en constitue un excellent exemple, en ce qu’il place la crise comme point de
départ de l’ensemble (Figure 2 - Principes de la gestion des risques en France : la
crise comme catalyseur (DDRM49, 2008)). On ne s’étendra pas ici sur les variations
des politiques de gestion des risques en France.
Figure 2 - Principes de la gestion des risques en France : la crise comme catalyseur (DDRM49, 2008)
On se penchera plus spécifiquement au cours de cette étude sur la dimension
opérationnelle de la gestion de crise. Parfois désignée sous le terme de réponse, elle
regroupe deux démarches complémentaires et l’ensemble des moyens de coordination
nécessaire pour permettre à toutes deux de remplir leur objectif premier de protection
des populations.
La démarche de secours : le secours relève d’une intervention directe sur les
enjeux (victimes, biens vitaux) afin de mettre fin à une situation de crise. En cas
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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d’impossibilité technique de stopper la crise, elle doit permettre d’en atteindre la
fin sans dégâts supplémentaires. Ce rôle est réservé à des acteurs formés et
équipés pour intervenir en situation dangereuse, le plus souvent des services
de secours institutionnalisés (SMUR, SDIS, voire renforts d’armée en situation
extrême) ou des acteurs de la protection civile.
La démarche de sauvegarde : la démarche de sauvegarde n’a commencé à
exister en tant que démarche indépendante qu’assez récemment. Elle se place
en appui de la démarche de secours, en déchargeant celle-ci de toutes les
tâches qui peuvent être effectuées par des personnes sans formation ni
équipement. La démarche de sauvegarde n’inclut donc pas (en principe)
d’intervention qui exposerait directement ses acteurs au danger.
Lorsqu’elles sont évoquées pour décrire les missions d’un acteur ou d’’une institution,
on parle alors de compétence de sauvegarde ou de secours (voir Figure 3 -
Complémentarité des compétences de sauvegarde et de secours (IRMA, 2011)).
Figure 3 - Complémentarité des compétences de sauvegarde et de secours (IRMA, 2011)
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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1.2. Acteurs et échelles de la gestion opérationnelle de crise : le défi de
la coordination
1.2.1. La Sécurité Civile : principes et fondements
La gestion de crise – et tout spécialement lorsqu’on considère son volet opérationnel –
tend à un double objectif. En premier lieu, elle vise à minimiser, et si possible
supprimer, les dommages humains et matériels subis lors de l’évènement. En second
lieu, elle vise à organiser les moyens disponibles pour retarder, et si possible éviter
que la situation ne dépasse à nouveau les capacités de gestion des acteurs en place.
Devant cette double mission, il n’existe pas un acteur unique, simultanément pour des
raisons de compétences et de moyens d’une part, et parce que tout élément humain
englobé dans les sphères spatiales et temporelles du risque devient de fait un acteur
de la gestion de crise d’autre part2. Dautun (2004) identifie six types d’acteurs divisés
en trois catégories complémentaires. Parmi elles, on se penchera plus spécifiquement
pour cette étude sur les acteurs de la Sécurité Civile (Figure 4 - La sécurité civile
parmi les acteurs de la gestion de crise (d’après Dautun, 2004)).
Figure 4 - La sécurité civile parmi les acteurs de la gestion de crise (d’après Dautun, 2004)
Avant d’aborder plus en avant les problématiques de la gestion de crise opérationnelle
par la Sécurité Civile, il est nécessaire de bien la distinguer de la Protection Civile. La
première désigne uniquement la mission régalienne de l’Etat et les organes
administratifs chargés de son maintien, la DGSCGC (Direction Générale de la Sécurité
2 Ce postulat en admettant qu’excepté de rares cas d’impossibilité mentale ou physique, aucun individu impliqué dans
une crise n’est totalement passif, agissant au minimum pour sa propre sauvegarde (d’après Ruin, 2007).
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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Civile et de la Gestion des Crises) et le CNSC (Conseil National de la Sécurité Civile),
alors que le terme de « protection civile » peut désigner :
- La fonction régalienne elle-même,
- Les services remplissant les missions d’application de la politique de sécurité
civile à l’échelon départemental: le SIDPC (Service interministériel de défense
et protection civile) ou, plus récemment, le SIACEDPC, (Service Interministériel
des Affaires Civiles et Economiques de Défense et de Protection Civile),
- Tout type d’acteur participant à des missions contribuant au maintien de la
sécurité civile, mais à condition d’avoir été reconnue d’utilité publique et agréée
Sécurité Civile par un représentant de l’Etat au vu des critères formulés par la
loi du 13 août 2004 (il s’agit essentiellement d’associations civiles, la plus
importante d’entre elle étant d’ailleurs simplement désignée comme la «
Protection Civile »).
Le texte législatif lui-même signale explicitement que la Sécurité Civile « diffère
également de la défense civile, qui est constituée de l'ensemble des mesures tendant
à l'ordre public, à la protection matérielle et morale des personnes et à la « sauvegarde
des installations et ressources d'intérêt général, et de la sécurité intérieure, tout en
étant liée à ces dernières. » (Sénat Français, Projet de Loi de Modernisation de la
Sécurité Civile, Rapport Introductif à la Loi n°2004-809 du 13 août 2004).
Les principes fondamentaux de la Sécurité Civile en tant que structure étatique sont se
trouve dans une série de texte législatifs. La Constitution Française du 4 octobre 1958,
texte fondateur de la Ve République, définit les droits inaliénables de tout citoyen
français, incluant celui à la sûreté de sa personne et de ses biens, et les fonctions
régaliennes de l’Etat, au nombre desquelles figure le maintien de la sécurité civile. La
loi n°87-565 du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile, à la
protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs, fixe les
modalités d’intervention des services publics d’assistance et de secours et les premiers
documents de planification (ORSEC, Plan Rouge). Le Code Général des Collectivités
Territoriales (CGCT) et ses mises à jour successives (loi numéro 96-142 du 21 février
1996) définissant le rôle et les missions des collectivités territoriales, entre autres
celles en rapport avec la protection des populations et, in extenso, leur participation au
financement des structures chargées de cette protection. La Loi n°96-369 du 3 mai
1996 relative aux services d'incendie et de secours a participé à fixer le cadre et les
missions des SDIS. Enfin, la loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative à la
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modernisation de la Sécurité Civile, qui actualise et remplace la loi n°87-565, renforce
l’organisation de la gestion de crise.
1.2.2. Les Services Départementaux d’Incendie et de Secours comme fer de
lance de la Sécurité Civile
Les Services Départementaux d’Incendie et de Secours (SDIS) constituent la
manifestation physique la plus concrète des actions de la Sécurité Civile. Il regroupe
l’ensemble des Sapeurs-Pompiers d’un département. Parmi eux, le Bataillon de
Marins-Pompiers de Marseille et de la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris, corps
de pompiers militaires sont rattachés respectivement à la Marine Nationale et à
l’Armée de Terre. Les SDIS sont chargés du volet opérationnel de la gestion de crise,
c’est-à-dire l’intervention physique et directe sur le théâtre des évènements, pour une
série de missions parmi lesquelles vient en tout premier lieu le secours aux personnes.
Comme l’indique leur nom, les SDIS, sont à l’origine chargés de la prévention, de la
protection et de la lutte contre les incendies, mais leurs missions sont en réalité plus
larges (SDIS30, 2010, in DOS SANTOS, 2012):
- Prévention et évaluation des risques de sécurité civile
- Préparation des mesures de sauvegarde et organisation des moyens de
secours,
- Protection des personnes, des biens et de l’environnement,
- Secours d’urgence et évacuation des personnes victimes d’accidents, de
sinistres ou de catastrophes
Tableau 2 - Part des différentes catégories d'interventions SDS (SDIS30, 2010)
INTERVENTIONS PART
Secours à victimes: (accidents domestiques, malaises, etc) 59%
Incendies 10%
Accidents de la circulation 10%
Autres (luttes contre les pollutions, inondations, etc) 21%
Total 100%
Total d’environ 3 500 000 interventions/an
Les effectifs de la globalité des SDIS français s’élèvent à environ 255 000 pompiers
civils et militaires, dont 95% (244 000) sont des civils. Sur cette part, environ 80% sont
des volontaires, la part restante correspondant à des pompiers civils mais exerçant
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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cette activité de manière professionnelle. Cette part de volontariat très importante
constitue une spécificité française. Une autre des particularités des SDIS est d’être
placés sous une double autorité, l’une administrative (le Président du Conseil
d’Administration, lié au Conseil Général, principal financeur du SDIS), et l’autre
opérationnelle (Préfet de Zone, Préfets ou Maires dans le cas d’interventions
communales). Cette « double commande » n’est d’ailleurs pas sans poser certains
défis en termes de cohérence des politiques de gestion et de direction.
D’un point de vue organisationnel et spatial, s’intègrent à la structure de la Sécurité
Civile, selon une logique hiérarchique très prononcée, similaire à l’organisation militaire
par sa recherche première de l’efficacité. Elle suit un ensemble d’échelons
hiérarchiques défini en fonction de l’échelon spatial, telle qu’exposé ci-
dessous (Tableau 3 - Echelons principaux de la Sécurité Civile (Ministère de la
Défense, 2008)). On y distinguera le Directeur des Opérations de Secours (DOS)
chargé de la direction générale des Opérations de Secours, et le Commandant des
Opérations de Secours (COS) chargé de la mise en œuvre des décisions
correspondantes sur le terrain. Au contraire du DOS, qui ne fait pas partie du
personnel SP, le COS est obligatoirement un gradé sapeur-pompier disposant de la
formation nécessaire à ce type de tâche.
Tableau 3 - Echelons principaux de la Sécurité Civile (Ministère de la Défense, 2008)
ECHELON RESPONSABLE (DOS) STRUCTURE DE COMMANDEMENT
National Ministère de l’Intérieur COGIC
Zonal Préfet de Zone COZ
Départemental Préfet de département COD
Communal Maire PCC
Intervention Officiers SP PC Terrain
On s’attardera principalement ici sur l’échelon départemental, qui constitue l’organe de
coordination principal de l’activité opérationnelle des SDIS. Actif 24/24, informé en
permanence de la totalité des opérations en cours de déroulement, il coordonne et
organise les actions des sapeurs-pompiers sur le terrain et les relations avec toutes les
autorités et organismes de secours amenées à interagir avec ces derniers. Le SDIS
est également le nœud opérationnel chargé de recevoir et de traiter l’alerte, via le CTA
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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(Centre de Traitement de l’Alerte), vers lequel sont redirigés notamment les numéros
d’appels d’urgence français et européen (18 et 112).
Pendant une opération terrain, le commandement est assuré à la base par le chef de
bord du premier véhicule engagé, appelé Chef d’Agrès. Lorsque deux à quatre
véhicules sont engagés sur une même intervention, on parle alors de Groupe, la
coordination et le commandement de ces moyens étant effectués par l’officier de garde
local, appelé Chef de Groupe (du grade de major ou lieutenant, exceptionnellement
capitaine par défaut). Quand une intervention nécessite l’engagement de plusieurs
groupes, on parle alors de Colonne (deux à quatre groupes). Un officier de
permanence de groupement du niveau de Chef de Colonne prend alors le
commandement, du grade de capitaine ou commandant au minimum. Dans ce cas, un
Poste de Commandement (PC Colonne) est activé sur le terrain, sous la forme d’un
lieu fixe ou d’un véhicule spécifique. Il a pour fonctions principales de permettre au
Commandant des Opérations de Secours (COS) de gérer l’intervention et les moyens
sur place, en mettant en place les structures d’aide à la décision et de raisonnement
tactique, et de rester en liaison directe avec le CODIS. Enfin, au-delà de deux
Colonnes engagées simultanément, le PC Colonne évolue en PC Site, et le
commandement est transféré à un officier supérieur, qui prend alors le statut de Chef
de Site (voir Erreur ! Source du renvoi introuvable.). Les moyens engagés, en
termes physiques, sont fournis par les Centre d’Incendie et de Secours (casernes de
pompiers), divisés en Centre de Secours et Centres de Secours Principaux, qui
assurent la couverture permanente du département (SDIS30, 2010).
Enfin, dans le cas où des interventions réclament des compétences particulières, la
plupart des services départementaux d’incendie et de secours disposent d’Unités
Spécialisées formées de sapeurs-pompiers spécialement formés et pouvant être
engagés en cas de besoin. On peut citer pour exemple les groupes d’intervention
subaquatique, la CMIC (Cellule Mobile d’intervention Chimique), les unités RAD
(spécialisées en intervention en milieu radiologique), les équipe cynotechniques, etc.
Concernant l’inondation dans le Gard, par exemple, les GIS (Groupes Inondation
Sauvetage) rassemblent des personnes des unités spécialisées GRIMP (Groupe de
Recherche et d’Intervention en Milieu Périlleux) et SEV (Sauvetages en Eaux Vives).
Ils sont complétés par les Groupes d’Intervention Inondation, formées de personnels
classiques mais spécialement équipés pour intervenir en environnement de crue. Les
missions des GII incluent la mise en sécurité des personnes, les sauvetages ou
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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évacuations des victimes isolées, le ravitaillement, la sauvegarde des biens inondés
(opérations d’assèchement, de pompage ou de nettoyage). Les GIS interviennent sur
des problématiques plus techniques, quand les conditions sont trop périlleuses pour
engager un GII : reconnaissance des zones d’habitations isolées, sauvetages et mises
en sécurité par hélitreuillage, interventions au sol en eaux vives, et sécurisation des
équipes de sapeurs-pompiers traditionnelles (SDIS30, 2010, in DOS SANTOS, 2010).
1.3. Les échelles spatiales et temporelles comme clés de gestion
opérationnelle : l’exemple des crises inondation
1.3.1. L’échelle temporelle : l’anticipation comme enjeu opérationnel principal
En considérant à nouveau l’objectif principal de l’action des Sapeurs-Pompiers, à
savoir minimiser les dommages humains et matériels d’une crise inondation, il apparaît
comme évident que plus tôt les services de secours peuvent être informés d’une
situation sensible, plus grandes sera la marge de manœuvre disponible pour une
intervention, et par conséquent, meilleure sera la qualité de la réponse.
Gestion des temporalités pendant l’évènement
Dans la perspective de réduire au maximum tout délai entre l’évènement et
l’intervention elle-même, les SDIS ont mis en place un système visant à une efficacité
de déploiement maximale. Lorsqu’un appel d’urgence est transmis au CTA, l’opérateur
y renseigne la localisation et la nature du besoin de secours. Un système informatique
automatisé, maintenu informé en permanence des moyens disponibles, suggère alors
à l’organe de commandement la structure technique et organisationnelle des moyens
adaptés pour répondre à ce besoin. Concrètement, ces moyens sont « puisés » dans
les différents Centres de Secours qui maillent le territoire départemental. Ces centres
sont contactés par ordre de proximité à l’accident et par ordre de priorité selon les
différents secteurs de premier appel couvrant la zone de l’évènement (voir Figure 9 -
Cours d’eaux principaux, aperçu du relief et de l’organisation spatiale des Centres
d’Incendie et de Secours du Gard). En effet, si le centre le plus proche est indisponible,
ses moyens étant d’ores et déjà engagés, le second centre le plus rapproché sera
contacté à son tour, et ainsi de suite.
Une fois la décision validée par l’officier en charge, l’opération est engagée, les
personnels et les véhicules se mettant immédiatement en route. Le premier gradé
arrivé sur les lieux devient Commandant des Opérations de Secours, statut qui sera
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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transmis au fur et à mesure de l’arrivée d’officiers plus gradés. Ce relai de la
compétence de commandement permet de réduire pratiquement à zéro le délai
d’intervention, exception faite du résidu temporel incompressible que constitue le
temps de transfert physique (trajet) pour arriver sur les lieux de l’intervention. Pour
réduire celui-ci, plusieurs moyens sont alors possibles :
- Faire évoluer le maillage territorial vers un niveau plus resserré (en d’autres
termes, augmenter le nombre de Centre de Secours, mais une telle pratique est
difficilement compatible avec les capacités pratiques et financières du SDIS)
- En remplaçant les astreintes par des gardes lorsque la situation laisse prévoir
une probabilité d’interventions plus nombreuses (afin d’éliminer le temps de
trajet domicile-CIS des personnels) ; c’est le principe du renforcement de la
Chaîne de commandement, existante pour la période feux de forets dans le
Gard et appliquée depuis 2012 à l’inondation pendant la période des crues.
- Améliorer le traitement des alertes par le biais d’opérateurs mieux formés ou
d’outils informatiques plus performants,
- Renforcer la présence des moyens SP sur le terrain afin de diminuer le temps
résiduel incompressible.
En cas d’inondation, notamment, les conditions météorologiques peuvent rendre les
déplacements plus difficiles, et donc faire augmenter exponentiellement les délais
d’intervention. Cette dernière possibilité de pré-positionnement des moyens a fait
l’objet d’une étude, au cours de la seconde mission de stage au SDIS (voir partie 2.4).
Anticipation
Toutes les méthodes et outils mis en œuvre pour accélérer l’intervention ne trouvent
réellement leur sens que si elles sont complétées d’une démarche dont l’origine se
trouve, non lors de l’alerte uniquement, mais également – et surtout – en amont de
l’évènement lui-même. On regroupe sous le nom d’anticipation deux approches
complémentaires : la prévision et la planification.
La prévision, telle que définie par l’Académie Française (2012), peut être considérée
comme « l’étude générale d'une situation donnée, dont on peut, par déduction, calcul
et mesure scientifique, connaître par avance l'évolution ». Appliquée au risque et aux
évènements (les crues, dans le cas d’exemple choisi pour cette étude), il s’agit de la
mise en capacité des services de secours à savoir à l’avance et de manière aussi
précise que possible, la localisation, le moment de déclenchement et les particularités
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
20
d’un phénomène de crue. La prévision telle que pratiquée dans les SDIS dépend
essentiellement des systèmes météorologiques et hydrologiques :
MétéoFrance, qui fournit l’information sur les conditions météorologiques plusieurs
heures, ou jours, à l’avance (depuis 1999, on en retiendra la mise en place de la
procédure « vigilance météo » et l’édition quotidienne de cartes de vigilance nationales
par département à 6h et 16h). Ces cartes sont à l’usage des services de secours, mais
également du public, par le biais de diffusion des consignes de sécurité.
Cette information est complétée par la démarche de prévision spécifique aux crues
opérée par l’ex-Service d’Annonce des Crues (SAC), aujourd’hui connu sous le nom de
SPC (Service de Prévision de Crues) chargés d’entretenir une vigilance inondation
permanente sur les bassins des cours d’eau surveillés par l’Etat. Les SPc disposent
d’un réseau dense d’appareils de mesure équipant ces cours d’eau, et de la capacité à
traiter les données récoltées sous la forme de modèles hydrologiques de prévision des
crues, couplés à un ensemble d’informations météorologiques. Sur la base de mesures
de débits, le SPC est en mesure de placer certains cours d’eau (ou tronçons de cours
d’eau ) en état de vigilance spécifique inondations. Cet état de vigilance est ensuite
transmis via le SCHAPI (Service Central Hydrométéorologique d’Appui à la Prévision
des Inondations), sous la forme de cartes accessibles sur internet (voir Figure 5 -
Exemple de carte de vigilance SPC (SPC/SCHAPI, septembre 2012)) et mises à jour
toutes les 24h, et de bulletins détaillés fournis à intervalles réguliers. Les SPC
disposent de quatre niveaux de vigilance, ordonnés de vert (pas de risque de crue) à
rouge (risque de crue majeure, menace directe et généralisée des personnes et des
biens). Les hauteurs d’eau et les mesures de précipitations sont en outre publiées en
ligne et en direct, à un rythme de mise à jour d’environ 15m, afin de permettre
d’accéder à une information plus détaillée.
De nombreux autres systèmes de prévisions viennent compléter l’action de ces deux
entités, de manière plus ou moins régulière dans le Gard, où le besoin d’une
information temporelle plus précise se fait cruellement sentir (notamment en raison du
caractère brutal des crues-éclair qui accompagnent régulièrement les épisodes
cévenols). On peut citer, dans l’ordre :
- Le système d’alarme intégré ALTHAIR (Alarme Hydrologique Territoriale
Automatisée par Indicateurs de Risque), développé par la DDE30.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
21
- Le développement de nombreux modèles plus performants, comme les modèle
ISBA et AIGA (Adaptation d’Information Géographique pour l’Alerte de Crue),
développés par le Cemagref et MétéoFrance.
Figure 5 - Exemple de carte de vigilance SPC (SPC/SCHAPI, septembre 2012)
Planification
La planification est une forme de l’anticipation qui diffère de la prévision. Selon
GRUNEWALD (2005), elle correspond à la conception et à l’application de schémas
prédéfinis guidant les acteurs dans la réalisation des actions secours et de
sauvegarde, tout en leur fournissant à un instant T une information aussi précise que
possible sur l’état global de la situation sur laquelle ils sont appelés à intervenir.
Ce second volet de l’anticipation se décline en deux types d’approche : la planification
des secours et la planification opérationnelle. La planification des secours est partie
intégrante du rôle de l’Etat, garant des droits citoyens à la protection des personnes et
bien et par conséquent autorité supérieure à tous les services amenés à intervenir sur
ce thème. Le rôle de chaque acteur, selon ses compétences et ses moyens, est défini
par un certain nombre de plans globaux, appliqués par les Préfets en tant que
représentants locaux de l’Etat. On peut parler citer notamment le « Plan ORSEC »
(Organisation de la Réponse de la SEcurité Civile), qui remplace les anciens plans
d’urgence depuis la loi de modernisation de la Sécurité Civile du 13 août 2004.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
22
La planification opérationnelle, en revanche, est a priori interne à chacun des acteurs
(bien qu’elle puisse faire l’objet d’actions de coopération et de coordination). Elle vise à
améliorer la préparation des moyens humains, matériels et d’encadrement à faire face
à la crise. Le Service Départemental d’Incendie et de Secours du Gard a notamment
mis en place un système de planification opérationnelle pour faire face à des
évènements de crue de grande ampleur : l’Ordre d’Opérations Inondation. Celui-ci, mis
à jour annuellement, est composé de nombreux éléments structurant la réponse
opérationnelle selon des structures pré-établies. On reviendra sur deux de ses aspects
en particulier dans la partie 2 :
- Les Plans de Prévision de Crues, outils d’information et de guidage
opérationnels à l’échelle d’un bassin versant.
- La Sectorisation Opérationnelle, qui planifie le pré-positionnement des moyens
à l’échelle du département.
1.3.2. Echelles spatiales de la gestion de crise, entre recherche d’un optimum spatial
et approche multi-scalaire
L’échelle spatiale constitue en soi un défi à gérer chaque jour dans la réalité pour les
sapeurs-pompiers : on l’a vu, l’une des priorités de la gestion des temporalités des
secours consistait à gérer les délais précisément générés par la distance à l’opération.
Toutefois, cette prise en compte de l’échelle spatiale, non plus de fait, mais comme un
élément défini et tangible, trouve sa source dans la départementalisation des services
de secours telle que définie par la loi n°96369 du 3 mai 1996 (Viret J. & Queyla J-L.,
2008). Lorsqu’elle impose le transfert aux départements de cette compétence de
secours et de sauvegarde, elle a par la même occasion officialisé des échelles
spatiales qui n’étaient jusque là que, selon DOS SANTOS (20120), une « organisation
territoriale de la protection des personnes » à valeur informelle.
Or il n’est pas possible de gérer à l’échelle d’un département l’ensemble des
interventions locales physiquement délimitées dans l’espace, sans envisager une
sous-sectorisation de celui-ci sur la base d’un maillage territorial spécifique au risque.
Ce maillage territorial a correspondu de fait au découpage en Groupements
Territoriaux puis en Secteurs de Premier Appel, chacun gérés au niveau local par un
Centre d’Incendie et de Secours et coordonnés par le CODIS au niveau global. Pour
assurer une couverture à une échelle plus rapprochée, des Postes Avancés peuvent
également être déployés sur un site ou un autre, réduisant l’échelon de maillage. A
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
23
l’inverse, dans le cas d’évènements de grande ampleur ou de secteurs difficiles
d’accès, des renforts sapeurs-pompiers peuvent intervenir depuis l’extérieur du
département, élargissant ainsi l’échelle spatiale de gestion (Deschamps S., 2009).
Mais ces clivages spatiaux existant de fait, de nombreuses approches sont
actuellement à l’étude pour mettre en place une politique volontariste de gestion
spatiale des interventions de secours. On peut citer comme exemple, parmi les
SDACR (Schéma Départemental d’Analyse et de Couverture des Risques), celui mis
en place par le SDIS38 sur le département de l’Isère (Dos Santos L., 2010 et SDIS38,
2009). Celui-si utilise le découpage départemental en « bassins de vie » tel que défini
par l’INSEE (25 bassins par département environ) après une phase d’analyse et de
diagnostic territorial prenant en compte la vulnérabilité des communes concernées.
Toutefois, la finesse de cette approche constitue en soi les limites de son application à
une catastrophe majeure, cette sectorisation étant spécifiquement définie pour des
interventions fines, sur des accidents ou des désastres de petite ampleur.
On peut également citer, bien qu’il ne s’agisse pas d’une sectorisation opérationnelle
des services de secours, la récente évolution du découpage administratif
commune/département vers des entités de type bassin versant (syndicats de cours
d’eau comme celui du Vidourle, EPTB, etc). Ces nouveau découpages tendent à une
approche globale et intégrée de l’eau (et donc du risque inondation), et dénotent une
évolution d’une vision des cours d’eau ponctuelle et statique vers une vision
dynamique et linéaire (Vinet, 2007). Toutefois, leur définition se fait exclusivement sur
des critères hydrologique, ce qui a valu à ces nouveaux découpage une remise en
question de leur cohérence, notamment en ce qui concerne les stratégies d’acteurs
(Vinet, 2007, et Veyret, 2004, principalement).
En 2012, le Département du Gard va mettre en place l’une des premières
Sectorisations Opérationnelles spécifiquement liées à l’inondation, clivée en SOI
(Secteurs Opérationnels Inondation). Ceux-ci sont définis sur la base de critères à la
fois hydrologiques, puisqu’inspirés de la sectorisation par bassins versants utilisée par
le Service de Prévision des Crues Grand Delta, mais également de critères
opérationnels, en intégrant dans leur définition la conservation des accès routiers,
l’isolation des secteurs les uns par rapport aux autres, la prise en compte de possibles
crues concomitantes, etc. C’est également la première sectorisation de ce type en
France qui soit doublée d’une chaîne de commandement sapeurs-pompiers spécifique
à l’inondation et définie en fonction de ce nouvel échelon spatial.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
24
2. STAGE 2012 : DEVELOPPEMENT D’OUTILS DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION
OPERATIONNELS POUR LE SDIS30 (GARD)
2.1. Chronogramme général
REMARQUE : Pour des raisons de lisibilité, le Chronogramme
général du stage peut être consulté en Annexe 1.
Ce chronogramme retrace les principales phases des missions de stage. Pour la
bonne compréhension de l’ensemble, il est nécessaire de préciser ici que la convention
a fait l’objet d’une prolongation pendant le mois d’août. Le stage se prolongera par une
période de volontariat fin septembre après la fin du Master, portant la durée totale des
missions à six mois et demi.
Bien qu’assez proche de la réalité, il ne la retrace pas exactement. En effet, les deux
missions de stage (PPC et SECTOP) se sont partiellement déroulées en même temps
pendant les mois de juillet et août. Par ailleurs, plus que le planning fixé en début de
stage, ce sont les disponibilités des interlocuteurs sapeurs-pompiers et extérieurs qui
ont fixé les différentes phases du projet, particulièrement pendant les périodes d’été,
en raison des congés et d’un rythme d’opérations feux de forêts plus intense au
SDIS30. La présentation sous cette forme permettra également de se servir du
diagramme de Gantt comme support pour expliciter certaines des difficultés
rencontrées au cours du stage (voir partie 2.5.2)
2.2. Présentation du terrain d’étude
2.2.1. Généralités : le Gard comme type du département méditerranéen
Maillon du découpage territorial français depuis 1789, composante de la région du
Languedoc-Roussillon, le département du Gard regroupe 353 communes et 46
cantons, organisés autour de la préfecture de Nîmes et des sous-préfectures d’Alès et
Le Vigan. D’une superficie de 5800 km² environ, il abrite une population estimée à 704
000 habitants en 2011. (Conseil Général du Gard, 2012 et INSEE, 2011)
Le département du Gard compte trois grands ensembles géographiques : le massif des
Cévennes recouvrant l’ensemble du quart Nord-Ouest ; les plaines de la Cèze, du
Gardon et du Vidourle/Vistre alternant avec des zones de plateaux sur toute la partie
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
25
centrale ; et la vallée du Rhône comportant notamment une partie de la Camargue à
son embouchure, située à l’extrême sud du département.
Figure 6 - Limites principales du département du Gard
Le relief du Gard culmine à 1567m (Mont Aigoual, Cévennes) et son point le plus bas
se trouve à 0m, à l’embouchure du Rhône. Les risques naturels principaux présents
sur le département sont, dans l’ordre, l’inondation (sept cours d’eau principaux
susceptibles d’inondations régulières3, problématiques de ruissellement intense et
particularités météorologiques cévenoles), et les feux de forêts, avec 48% environ du
département recouvert de végétation (Corine Land Cover, 2010).
2.2.2. Conditions climatiques
La totalité du département, exception faite de quelques zones d’altitude dans les
Cévennes, connaît un climat de type méditerranéen à tendances continentales sur les
Cévennes et le Nord du département.
3 Voir Figure 2 : Cours d’eaux principaux, relief et organisation spatiale des Centres d’Incendie et de
Secours du Gard.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
26
Ce type de climat est caractérisé par un ensoleillement annuel élevé (supérieur à 2 600
heures par an pour le Gard), et par des étés de chauds à très chauds. Pour indication,
le record de température français, s’élevant à 44.10°C, a été enregistré le 12 août 2003
sur la commune de Conqueyrac (Gard), et les températures moyennes estivales
gardoises oscillent entre 30 et 31°C pendant les mois de juillet et août sur la période
1971-2000 (Rapport MétéoFrance, 2000). Les étés y sont particulièrement arides en
comparaison de la moyenne française, les précipitations y descendant jusqu’à une
moyenne légèrement inférieure à 25mm/mois en juillet sur la même période. Les
sécheresses d’été peuvent également être aggravées par le vent, le Gard étant y
exposé jusqu’à 250 jours par an, simultanément au mistral (Nord/Nord-ouest) et à la
tramontane (Ouest-Nord-Ouest).
En revanche, les hivers y sont particulièrement doux, les températures minimales y
descendant rarement sous -5°C, et on y enregistre seulement 24 jours de gel sur la
période 1960-2005 (Servaire, 2007). Janvier est le mois le plus froid, principalement en
raison des masses d’air froides déplacées par les vents continentaux.
On relève en moyenne de 640 à 850 mm de précipitations par an sur le département,
même en tenant compte de la zone cévenole, beaucoup plus arrosée (MétéoFrance,
2012). La moyenne interannuelle des précipitations atteint 800 mm/an à Nîmes et
608,5 mm/an à Aigues-Mortes. Les précipitations y sont donc peu abondantes et
concentrées sur un nombre de jours de pluie relativement restreint, de 60 à 70 environ
selon la localisation.
Outre ces caractéristiques quantitatives générales, il est nécessaire de souligner la
grande variabilité des précipitations gardoises, qui s’exprime sous plusieurs formes. En
effet, la variation interannuelle des précipitations peut y être de très forte amplitude,
avec un minimum de 390 mm en 1967 et un maximum de 1191 mm en 1972 sur la
période 1960-2005 (Servaire, 2007).
Le régime pluviométrique présente en outre des variations saisonnières et spatiales.
Les précipitations sont particulièrement abondantes en automne, particulièrement sur
les mois de septembre et d’octobre, s’opposant à une période sèche s’étendant
généralement de mai à août. En termes spatiaux, la pluviométrie varie également,
puisque le Mont Aigoual, situé dans le département du Gard, compte parmi les lieux
les plus arrosés de France, avec un record de 4015 mm annuels en 1930
(MétéoFrance, Observatoire Météorologique du Mont Aigoual, 2011).
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
27
Le climat du département du Gard comporte par ailleurs une spécificité bien connue,
sous le nom d’épisodes cévenols, type particulier d’épisodes méditerranéens. On
entend par ce dernier terme, selon E. Wesolek et P. Mahieu (2010), des « périodes de
plusieurs jours durant lesquels des précipitations abondantes (supérieures à 100 mm
sur la période considérée, mais parfois plus de 500 mm sur des étendues spatiales
réduites) s'abattent sur une grande partie des régions qui bordent la mer
Méditerranée ».
Figure 7 - Représentation simplifiée des conditions climatiques générales lors d'un épisode
cévenol (MEDD, 2009)
Les épisodes cévenols se produisent le plus souvent lors d’un début d’automne,
particulièrement si un refroidissement brutal a suivi un été particulièrement chaud. Le
modèle météorologique précis et les détails de développement de tels phénomènes
sont complexes et demeurent partiellement connus, mais en revanche, son principe
peut être résumé à trois conditions principales apparaissant sur la figure ci-dessus. On
y observe trois phénomènes concordants :
Un centre dépressionnaire se forme sur l’Atlantique, à proximité des côtes
franco-britanniques.
La circulation de dépression d’altitudes secondaires autour du centre
dépressionnaire principal entraîne la création d’un flux d’air froid Sud / Sud-
ouest en haute altitude sur les régions méditerranéennes.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
28
La température de la Mer Méditerranée est élevée après la période estivale,
entraînant une évaporation intense et la formation d’entrées maritimes (vents
marins en direction de la côte, dans les basses couches de l’atmosphère, de
0m à 300m).
Cette configuration météorologique générale, volontairement simplifiée, aboutit à une
advection d’air chaud et humide à basse altitude, circulant en direction du Nord. En
raison de la présence de relief sur la région des Cévennes, massif montagneux
relativement élevé (plusieurs ensembles supérieurs à 1500m), il se crée un puissant
effet orographique. Les masses d’air, butant sur le relief cévenol, entrent en
ascendance et se heurtent aux courants d’altitude, plus froids. Il en découle une
condensation rapide des masses d’air et le déclenchement de précipitations intenses
(voir Figure 8 - Coupe simplifiée d'un épisode cévenol sur le département du Gard)
Le phénomène peut également se trouver aggravé en cas de remontées de masses
d’air froides et humides en flux Nord/Nord-est en provenance de l’Auvergne : bien que
la majorité des précipitations qu’elles entraînent s’abatte sur les versants nord des
Cévennes, elles contribuent à augmenter l’intensité de l’épisode cévenol,
particulièrement sur le Gard (Martin, 2004).
Figure 8 - Coupe simplifiée d'un épisode cévenol sur le département du Gard
On remarquera enfin que les épisodes cévenols provoqués par les phénomènes
décrits ci-dessus peuvent être divisés en deux types (Wesolek et Mahieu, 2010) :
- Les épisodes diluviens par forçage orographique direct, ont comme cause
principale la présence du relief des Cévennes. Les précipitations y sont
relativement peu orageuses (convections peu profondes), modérées à fortes
sur un à plusieurs jours, continues et d’une intensité croissante, avec des
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
29
cumuls de 400mm en 24h mais des intensités horaires rarement supérieures à
50mm, et une disparité spatiale relativement faible.
- Les épisodes diluviens par structures convectives à régénération arrière n’ont
pas uniquement le relief comme cause. Même si celui-ci y participe, ils sont
caractérisés par des formations météorologiques particulières entraînant une
reformation continue des systèmes de précipitations sur les Cévennes
(systèmes convectifs stationnaires ou à déplacement lent, caractéristiques
multicellulaires, phénomènes de régénération arrière). On en retiendra
simplement les conséquences : présence d’orages violents, forte disparité
spatiale des précipitations, cumul pluviométrique de plusieurs centaines de mm
et intensités horaires pouvant largement dépasser les 100mm.
L’un comme l’autre de ces deux types d’épisodes cévenols peuvent être très rapides
(quelques heures), mais également connaître des manifestations plus longues, qui
entraînent alors des pluies torrentielles et prolongées, particulièrement s’ils se
combinent. Ces deux dynamiques peuvent en effet cohabiter sur des étendues
spatiales et temporelles limitées.
La situation peut alors rapidement évoluer de manière catastrophique sur le plan
hydrologique, déclenchant des crues torrentielles sur les bassins versants des
Cévennes exposés au sud, connues sous le nom de crues cévenoles. Cette
configuration a été à l’origine des évènements de crues dévastatrices de septembre
2002 dans le Gard (687mm en 24h).
On notera enfin que l’usage du terme d’épisode cévenol s’est généralisé, s’étendant de
plus en plus souvent à tout type de précipitations intenses (particulièrement lorsqu’elles
orageuses) frappant les côtes méditerranéennes à proximité des Cévennes, même si
ces reliefs n’ont pas directement été à l’origine du phénomène.
2.2.3. Hydrologie
Le réseau hydrographique très développé qui caractérise le département du Gard
compte plus de 5000 km de cours d’eau (DDE 30, in. DOS SANTOS, 2010). Leur rôle
d’irrigation et de fertilisation des terres alluviales qu’ils arrosent constituent l’une des
raisons historiques de l’occupation humaine sur le département du Gard depuis le XIIIe
siècle avant JC environ.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
30
Figure 9 - Cours d’eaux principaux, aperçu du relief et de l’organisation spatiale des Centres d’Incendie et de Secours du Gard
La Figure 9 - Cours d’eaux principaux, aperçu du relief et de l’organisation spatiale des
Centres d’Incendie et de Secours du Gard présente de manière simplifiée les cours
d’eau principaux du Rhône, mis en relation avec le relief et la distribution spatiale des
CIS (Centres de Secours) du Gard. Ce réseau hydrographique peut y être décomposé
en sept cours d’eau principaux et deux catégories. La première concerne les affluents
du Rhône :
Le Gardon, affluent rhodanien, présente le bassin versant le plus étendu sur le
Gard (exception faite du Rhône), d’environ 2000km². Il se décompose en
plusieurs affluents dans sa partie amont, conservant la dénomination
« Gardons » mais qualifiés selon les villes principales traversées (Gardon
d’Alès, Gardon d’Anduze, Gardon du Miallet).
La Cèze, au nord du département, s’étend sur 128,4km (SANDRE, 2012) avant
sa confluence avec le Rhône.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
31
L’Ardèche longe le Gard sur 24 kilomètres à proximité de Pont-Saint-Esprit et
rejoint le Rhône au terme de ce parcours.
D’autres cours d’eau s’organisent selon des logiques légèrement différentes :
Le fleuve Vidourle, long de 90km environ, prend sa source dans le massif de
l’Aigoual s’étend vers l’aval en direction sud-est, et se jette dans la
Méditerranée à proximité de la commune du Grau Du Roi, à la frontière entre
l’Hérault et le Gard.
L’Hérault et l’Arre (affluent amont principal du précédent) constituent un cas à
part. Ils s’étendent sur la partie extrême ouest du département, et
correspondent à un bassin versant entièrement indépendant de celui du Rhône.
L’Hérault quitte le département du Gard après 42km de parcours et continue
sur le département du même nom.
Le Vistre, affluent du Canal du Rhône à Sète.
Enfin, le Rhône constitue un cas à part. Prenant sa source à l’extérieur du
département, qu’il rejoint aux environs de Rochegude, à proximité d’Orange, il en
constitue grossièrement l’ensemble de la limite est. Il longe le département sur environ
120km, et englobe la majorité du territoire gardois dans son bassin versant.
Figure 10 - Profil en long de la Cèze (d’après SOGREAH, 2008)
Exception faite du Rhône, de l’Hérault et du Vistre, ces cours d’eau partagent des
caractéristiques de structure hydrologique assez similaires, notamment des bassins
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
32
versants orientés N-O/S-E. Ils partagent également des profils en long assez
reconnaissables (voir Figure 10 - Profil en long de la Cèze (d’après SOGREAH,
2008)) : un quart à un cinquième du tracé en dénivelé important, situé dans les massifs
montagneux où ces cours d’eau prennent leur source (Cévennes principalement) ; puis
un tronçon de longueur supérieure à 50% de l’ensemble du profil, comprise entre
0,09% et 0,4% en pente moyenne ; et une dernière partie où les valeurs de pentes
diminuent brutalement dans la plaine alluviale, juste avant les confluence ou les
embouchures. Le cours de la Cèze, rivière la plus au nord du département, constitue
un exemple remarquablement proche du profil-type du département des cours d’eau
du département.
En termes de régime, la majorité des cours d’eau4 présentent un type hydrologique
pluvial méditerranéen, caractérisés par une amplitude particulièrement forte des débits
entre les périodes sèches et pluvieuses. Ils sont également singularisés par des temps
de réponse particulièrement courts, liés à la structure du cours d’eau et du bassin
versant, mais également aux particularités météorologiques du département (voir
partie 2.2.3). Les débits d'étiage y sont de faibles à très faibles : les tarissements
complets et prolongés n’y sont pas rares, en témoigne l’épisode du 17 juillet au 6
septembre 2010 sur le Gardon de Saint-Jean. En effet, les rivières gardoises sont très
peu réalimentés par les nappes, et leurs caractéristiques souvent karstiques sur leurs
parties centrales (plateaux calcaires) ont comme conséquence des pertes régulières.
REGIME PLUVIAL CEVENOL Description :
Alimentés par les eaux des massifs de l’Aigoual, Lozère
et de la Montagne Noire, ces cours d’eaux situés sur le
versant méditerranéen dévalent de fortes pentes dans
leur partie supérieure. Après de hautes eaux hivernales
d’origine pluviale, les pluies de printemps et la fonte des
neiges certaines années viennent alimenter les fleuves
et rivières jusqu’aux parties les plus aval. Les fortes
pluies cévenoles d’automne entraînent une hausse
subite des débits après la sécheresse estivale
méditerranéenne.
Module moyen : 28 l/s/km2 soit 880 mm
Débit journalier de crue biennale : 570 l/s/km2
Coefficients de variation saisonnière : 58 %
Inter annuelle : 41 %
Ensemble géographique : Massif de l’Aigoual,
Cévennes (Gard), Uzégeois, Vallée de l’Hérault,
Vallée de l’Orb et du Jaur Biterrois, Lodévois.
Altitude moyenne : 610 mètres
Pente moyenne : 13 degrés
4 Le Rhône, ici encore, doit être regardé comme relevant d’un fonctionnement entièrement différent.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
33
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Régime Hydrologique
Type
Des cours d’eau
cévenols
Figure 11 – Caractérisation du régime pluvial cévenol par la DREAL (RDD, 2000)
Cas particuliers parmi les cours d’eau méditerranéen, les cours d’eau du Gard, et
principalement ceux descendant des Cévennes, présentent des caractéristiques
suffisamment prononcées pour avoir reçu une identification propre, afin de mieux
désigner leur fonctionnement affecté par les épisodes cévenols évoqués en partie
2.2.2. On parle à leur sujet de régime cévenol. Il est caractérisé par une série de
critères repris comme référence par la DREAL (2000), visibles en Figure 11 –
Caractérisation du régime pluvial cévenol par la DREAL (RDD, 2000).
Si les précipitations cévenoles sont l’explication première de la plupart des
phénomènes de crues spectaculaires observables sur le territoire gardois, il serait
erroné de négliger la part qu’y prennent les caractéristiques des bassins versants eux-
mêmes. Les rivières cévenoles, et parmi elles celles du Gard, sont en effet le théâtre
de phénomène hydrologiques particuliers, donc un grand nombre tendent vers le
même résultat : la formations d’ondes de crues à réponse très rapide.
On citera, à titre d’exemple, les observations de Martin, Cosandey et Didon-Lescot
(1999, 2003, 2004) sur les bassins versants d’altitude des deux massifs dominés par le
Mont Lozère et le Mont Aigoual. Cosandey en particulier note que lors de crues suivant
une période de sécheresse, où les nappes d’eau sont drainées par les cours d’eau les
traversant, une saturation des sols s’y produit du haut vers le bas des versants (voir
Tableau 4 - Zones actives et zones contributives de Cosandey), entraînant un
phénomène de ruissellement inhabituellement élevé. En conséquence, l’ensemble du
bassin versant devient surface contributive pendant un bref laps de temps, entraînant
un pic de crue particulièrement marqué.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
34
Tableau 4 - Zones actives et zones contributives de Cosandey
Lorsqu'il ne pleut pas, la nappe de fond de vallon est drainée par le cours d'eau qu'elle alimente.
Une faible quantité de pluie peut suffire à faire affleurer la nappe en fond de vallon: l'écoulement rapide se forme à partir des précipitations sur cette surface saturée.
Si la pluie continue, des volumes saturés apparaissent là où les sols sont les plus minces, en haut de versant. Mais l'eau qui y ruisselle s'infiltre immédiatement en aval; si elle contribue à l'alimentation de la nappe et à l'extension des surfaces saturées, elle ne contribue pas à l'écoulement rapide, et les débits demeurent très faibles.
Si la pluie continue encore, la saturation de haut de versant gagne rapidement vers l'aval et finit par rejoindre les zones saturées de fond de vallon. À partir de ce moment, il n'y a plus de zone tampon et le ruissellement se produit sur l'ensemble du versant et rejoint le cours d'eau. La montée de crue est rapide et importante.
Ce mécanisme n’est pas directement applicable à l’ensemble des bassins versants du
Gard, car les cours d’eau de plus grande taille connaissant des processus de
saturation moins rapides. Le phénomène d’extension de la surface contributive à tout
le bassin versant pendant un bref laps de temps ne s’y produit donc pas. Toutefois, en
considérant que les petits bassins d’altitude communiquent généralement au niveau de
l’exutoire avec des cours d’eau de plus grande taille, les ondes de crues brutales
identifiées par Cosandey continuent donc vers les parties aval du réseau
hydrographique, contribuant à expliquer la soudaineté et l’intensité des crues se
produisant en aval du massif cévenol.
Premier risque naturel du département en termes de pertes humaines et matérielles,
l’inondation est connue comme régulière dans le Gard. On trouve des traces précises
de crues intenses dans les archives historiques remontant jusqu’en 1225, soit 500
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
35
crues en 800 ans environ (ORIG, 2008). Des mentions plus vagues relatent de
violentes crues jusqu’au Haut Moyen Âge, et l’on notera, sans s’y attarder, que les
crues gardoises (bien que de manière plus nuancée que les crues du Nil par exemple),
font régulièrement l’objet d’une dualité de perception, entre phénomènes dévastateurs
et fertilisants des terres cultivées (DOS SANTOS, 2010). Toujours selon l’ORIG, le
Rhône totalise 42% des crues enregistrées sur la période 1225-2001. Les Gardons
tiennent la seconde place (34%), puis le Vidourle (32%), la Cèze (25%), le Vistre -
Rhony (18%). Les autres cours d’eau (Hérault, Ardèche et le bassin du Tarn – Dourbie)
totalisent environ 15% du total5.
Figure 12 – Comparaison d’épisodes de
crue de la Cèze ; de haut en bas, sur le
cours amont (photo Parc National des
Cévennes, 2002), à mi-parcours au pont
submersible de Saint-Ambroix (photo
Edouard Chaulet, 2011), et à Codolet, à
proximité de la confluence avec le Rhône
(photo BLOT, 2002).
Les cours d’eau du Gard sont
régulièrement le théâtre d’évènements
de crue spectaculaires. Le 29
septembre 1900, tandis que 950mm
sont enregistrés en 10 heures à
Valleraugue (Nagy, 2001). En automne
1958 (29 septembre au 4 octobre), une
inondation d’une rare violence cause
36 morts et plus de 5 milliards de
francs de dégâts (MétéoFrance, 2012).
Le 3 octobre 1988, Nîmes est
violemment touchée par une vague de
précipitations intense (plus de 420mm)
qui cause 10 victimes.
Depuis les années 2000, on compte
plusieurs évènements d’ampleur
exceptionnelle : 8-9 septembre 2002
5 Le total calculé par l’ORIG prend en compte les crues s’étant produites sur plusieurs bassins, ce qui
explique une valeur supérieure à 100%.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
36
(sur l’ensemble du Gard), 2-3 décembre 2003 (sur l’ensemble du Gard), 6-7 septembre
2005 (Hérault et Gard). 2002 et 2005 sont souvent pris en référence en ce qui
concerne les crues gardoises. La première a en effet enregistré des valeurs de
précipitations exceptionnellement élevée, même parmi la série d’épisodes cités ci-
dessus (543 mm en un jour à Saint-Christol-Les-Alès, vaste zone de précipitations
maximales supérieures à 500mm, 24 victimes et 419 communes sinistrées selon les
statistiques Pluies Extrêmes de MétéoFrance). L’épisode de 2005, bien que moins
intense, a entraînés des dégâts particulièrement lourds en conséquence de la
survenue de deux épisodes de
crues très rapprochés (6-7 et 8-9 septembre 2005),
qui ont mis en évidence les effets cumulatifs dus à
la saturation des sols et l’augmentation
exceptionnelle de la vulnérabilité humaine après
une première inondation (Ruin, 2007). Bien que
moins violents en termes de dégâts, les épisodes
plus récents de novembre 2010 et 2011 sont
également à classer parmi les crues d’intensité rare.
Les zones inondables du Gard sont estimées à
environ 1226 km² par la l’Observatoire du Risque
Inondation dans le Gard (2009), soit environ 21% de
la surface départementale, où le Rhône, le Gardon
et le Vistre-Rhôny tiennent la première place en
totalisant 90% environ des surfaces en Zone
Inondable (voir tableau ci-dessous).
Tableau 5 - Zones Inondables du Gard (ORIG, 2011)
BASSIN VERSANT (BV)
SUPERFICIE DU
BASSIN VERSANT
SUPERFICIE
TOTALE EN ZI (HA)
% SUPERFICIE ZI/ SUPERFICIE BV
Gardons 167 088 20 322 12,16%
Figure 13 - Crues de 2002 sur le département du Gard, de
bas en haut : surverse du barrage écréteur de crues de
Rouvières (CG30, 2002) ; le Pont du Gard sous les eaux
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
37
Cèze 114 332 9 096 7,96%
Rhône 90 360 62 515 69,18%
Ardèche 12 322 1 356 11,00%
Vistre - Rhony 76 816 28 048 36,51%
Hérault 56 220 1 912 3,40%
Tarn- Dourbie 22 170 561 2,53%
Vidourle géographique
67 183 16 994 25,29%
Vidourle inondation 61 983 8 527 13,76%
GARD 586 400 122 667 20,92% Sources : L.WATEAU, B.SEGALA, Observatoire du Risque Inondation dans le Gard, mai 2011. Etude CG30 sur Atlas Hydro-géomorphologique du Gard 2010 et Zone Inondable de la DREAL
LR 2008.
2.3. Mission 1 : mise à jour des Plans de Prévision de Crues, outils
d’anticipation des crues
2.3.1. Les PPC : état de fait et objectifs de la mission
Les Plans de Prévision des Crues dont dispose le SDIS30 ont été créés pour répondre
à un besoin spécifique lié à la fréquence particulièrement élevée des crises
d’inondations de grande ampleur sur le département du Gard. Ils visent à exploiter les
informations acquises par les personnels sapeurs-pompiers lors de crises inondation
passées. Cette accumulation d’expériences chez les personnels, entre autres les
gradés d’encadrement (chaîne de commandement SP), constitue en effet un fonds
d’information précieux, dont la bonne utilisation a un effet positif immédiatement
perceptible sur les performances des services de secours. En revanche, la
transmission de cette expérience de terrain, informelle de par sa nature même, s’avère
particulièrement malaisée en cas de renouvellement des personnels ou d’intervention
de renforts extérieurs au département.
De 2005 à 2010, le SDIS30 et plus particulièrement le groupement Prévision-
Opérations, ont fourni un effort constant pour capitaliser cette expérience. Plusieurs
stagiaires successifs6 ont mené un travail de fond pour recueillir auprès des personnels
sapeurs-pompiers les informations rassemblées lors des crues gardoises en général,
et particulièrement lors des évènements de grande ampleur comme octobre 1988,
septembre 2002, décembre 2003 et septembre 2005. A l’époque, cette démarche
s’inscrivait à la fois dans le cadre de REX opérationnels (Retours d’Expériences)
6 Entre autres Sébastien DESCHAMPS et Lucile DOS SANTOS, ex-étudiants du Master GCRN, respectivement en
2009 et en 2010).
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
38
rendus obligatoires par les Ordres d’Opérations Inondations du SDIS30, mais
également dans celui de fixer les résultats de ces retours sous une forme directement
exploitable, non seulement sous la forme de recommandations pré-crises, mais
également sous la forme d’outils de gestion de crise.
Menée sur le long terme, cette approche impliquait de passer par des phases
successives de rassemblement, de tri, de vérification et de traduction de l’information
fournie. Une fois ce premier traitement effectué, celle-ci a pu être spatialisée et jointe à
des repères spatiaux simplifiés, afin de produire un support connu sous le nom de
cartographie opérationnelle au sein des services du SDIS30. La synthèse des
informations ainsi traitées aboutit à la création des Plans de Prévisions des Crues.
Ils se présentent sous la forme de documents papier et numériques de 60 à 100
pages, chacun centrés sur un ou deux cours d’eau formant un ensemble opérationnel
cohérent. Ils sont au nombre de neuf : Cèze, Rhône, Petit Rhône, Gardon, Arre-
Hérault, Vidourle, Vistre-Rhôny, Uzès et Nîmes.
Figure 14 - Aperçu du contenu des anciens Plans de Prévision de Crues, exemple tirés du PPC Rhône (SDIS30, 2005)
Comme on peut le remarquer en Figure 14, ces plans sont conçus selon une structure
très simple. Chaque cours d’eau est divisé en sites particuliers touchés par
l’inondation, le plus souvent en isolant une commune ou un ensemble de communes. A
chacun de ces sites a été attribuée une fiche opérationnelle répertoriant les
informations acquises au cours des évènements de crue de référence : seuils de
vigilance et d’alerte, recommandations opérationnelles sur les actions à entreprendre,
historique des moyens engagés précédemment, observations sur les coupures
d’accès, etc. Cette fiche est couplée à une cartographie vouée à localiser toutes les
indications opérationnelles, tout en les complétant d’un fond-repère et d’un ensemble
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
39
d’indications cartographiques choisies en fonction de leur pertinence au regard des
nécessités locales.
* * *
La particularité la plus importante de ces Plans de Prévisions de Crues est sans doute
la hiérarchisation des informations qui les composent. Alors que la plupart des études
techniques traitant de l’inondation prennent comme point de départ soit le volet
hydrologique (et ses déclinaisons hydro-géomorphologiques, météorologiques, etc)
soit le volet des enjeux impactés par l’évènement (victimes, dégâts matériels, etc), les
PPC ont adopté lors de leur réalisation une base entièrement différente, spécifique aux
services de la Sécurité Civile.
L’importance des informations y est catégorisée directement selon leur intérêt
opérationnel direct, évalué de manière empirique par les personnels l’ayant constaté
directement sur le terrain. Il ne s’agit pas simplement ici d’une nuance de définition,
mais d’une ligne de conduite qui affecte directement les contenus de ces plans, autant
en termes de fond (choix des données incluses dans le document et des traitements
qui leur sont appliqués), ou en termes de forme et de présentation (choix des échelles
spatiales utilisées, présentation des informations textuelles, présentation graphique,
etc).
L’intérêt d’une telle démarche est évident dans le cadre des opérations des pompiers.
Elle permet de recenser et d’identifier directement les nécessités d’informations
opérationnelles lors des interventions, et d’y répondre de manière aussi précise et
exhaustive que possible, sans l’action d’un quelconque intermédiaire. Leur pertinence
s’est également fait sentir d’un point de vue relationnel et humain, en ce que leur
dimension participative contribue à tendre vers une vision commune de la situation de
crise et minimise les risques d’erreurs de communication. Il est à noter que les Plans
de Prévision de Crues, comme leur nom l’indique, servent uniquement de support pour
l’aide à la décision. Ils mentionnent explicitement ne pas prétendre retracer avec
exactitude une réalité qui évolue d’un évènement à l’autre, mais constituer une
référence historique commune permettant d’évaluer la situation de crise.
Il a rapidement été constaté que cette réalisation individuelle de chaque Plan (à rythme
d’environ un par an) et leur extrême individualisation comportait également des
faiblesses. Le fait que chacun d’entre eux vise à s’adapter de manière aussi souple
que possible aux nécessités de chaque cours d’eau concerné a abouti à un manque de
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
40
cohérence entre les différents plans. Les repères et références utilisées diffèrent en
effet d’un cours d’eau à l’autre, et les priorités opérationnelles selon les sensibilités
individuelles des personnels ayant contribué à leur réalisation.
Après quelques années, il est également apparu qu’une mise à jour régulière de ces
plans posait des difficultés en l’absence de méthodologie commune clairement établie.
Dans le même temps, la nécessité de remise à jour de l’information de fond se faisait
plus pressante, qu’il s’agisse d’informations ponctuelles (numéros de contacts
obsolètes, modifications des ouvrages de protection, accès routiers, extension des
enjeux, etc) ou de modifications des rôles des différents acteurs amenés à intervenir
durant une situation de crise inondation (modification des moyens SP, du rôle des
communes via notamment les PCS et les RCSC, etc). En ce qui concerne la
cartographie, les SIG ayant servi de support à la création des différents plans avaient
été conçus de manière totalement indépendante, et malgré un premier regroupement
effectué par L. DOS SANTOS en 2010, une restructuration en profondeur s’imposait.
Suite à ces constats, la décision a été prise à la Direction Départementale du SDIS
d’opérer une remise à jour globale des plans de prévision de crues, dans le cadre d’un
stage de M2 se déroulant entre mars et août 2012. Les objectifs de cette mission, tels
que définis en accord avec le tuteur au cours du mois de mars 2012, s’édictent ainsi :
GROUPEMENT
PREVISION
OPERATIONS
DETAIL DES
OBJECTIFS DE LA
MISSION PPC
•Remettre à jour les informations contenues au départ dans les PPC, qu’elles soient cartographiques ou qualitatives.
1
•Répondre aux demandes d’améliorations des PPC formulées par les Chefs de Centre dans chaque CIS du Gard.
2
•Les rendre entièrement compatibles avec le système d’alerte des crues du SCHAPI (Vigicrues/SPC).
3
•Y intégrer les informations sur les actions civiles liées à la sauvegarde des personnes (principalement les PCS)
4
•Développer une méthodologie d’actualisation des PPC, réutilisable pour de futures remises à jour.
5
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
41
Figure 15 - Objectifs minimum de la mission PPC tels que définis en début de stage (Source : SDIS30, 2012)
2.3.2. Démarche générale
Sur la base de ces objectifs, le choix des méthodes et des phases de travail a été
laissé à la libre appréciation du stagiaire. De même, il a été spécifié que la liste des
objectifs n’était pas exhaustive et qu’une première phase de travail consisterait
également à identifier tout autre amélioration possible des Plans de Prévisions de
Crues et à proposer une méthode pour les y intégrer.
Dans la pratique, ces améliorations ont été identifiées soit spontanément, soit au cours
d’entretiens avec les Chefs de Centre. Au fur et à mesure, elles ont été intégrées au
processus de remise à jour des plans, en revenant si nécessaire sur les plans déjà
édités. Le tableau ci-dessous résume la démarche adoptée pour la mise à jour de ces
plans (voir également le chronogramme général pour un meilleur aperçu de
l’organisation successive des tâches).
Tableau 6 - Démarche de mise à jour des PPC
Indications Opérationnelles
qualitatives Données Cartographiques
Outil opérationnel
(aide à la décision)
Mise à jour simple et compléments
- Phénomènes manifestés (aléa) - Enjeux et Enjeux prioritaires - Descriptions des difficultés de terrain exprimées sur évènements de référence - Consignes et Recommandations Opérationnelles - Contacts téléphoniques
Totalité des couches SIG sauf: - Accès Coupés - Dispositif Opérationnel SP - Informations spécifiques Rhône - Cartographie spécifique "Cadereaux de Nîmes"
Adaptation aux nouveaux
documents PPC (liens)
Graphique
Adaptation de l'information
Dispositifs d'observation et de mesure, seuils d'alerte (mise en compatibilité SPC)
Carroyages Aucune
(Structure conservée)
Ajouts - Extraction d'informations des plans ETARE vers les recommandations PPC - Synthèse des informations PCS
Plan ETARES, STEPs, Axes d'intervention PCS, Cellules Municipales de Crise (partiellement),
Hyperliens cartographiques
pour version numérique
TEMPS
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
42
2.3.3. Cartographie et SIG
En considérant la nature même des outils PPC et les documentations laissées lors de
leurs créations successives, la cartographie s’est d’elle-même imposée comme l’une
des nécessités de mise à jour les plus urgentes. En effet, neuf supports SIG distincts
avaient été édifiés pour la création des plans. Aucune démarche de cohérence n’ayant
été établie, et très peu de métadonnées ayant été jointes à la documentation de
chaque PPC, leurs contenus étaient difficilement exploitables de manière commune,
en raison des problèmes suivants :
- Données obsolètes suite à l’évolution rapide des données de référence au fil
des années.
- Contradictions entre les différentes versions
- Doublons, les cartographies ayant souvent été réalisées à l’échelle du
département puis exportées uniquement sur une petite zone).
- Données absentes en raisons de besoins identifiés récemment, comme la
nécessité de spatialiser les actions communales (PPC) sur les cartographies
opérationnelles.
En 2010, une première tentative de standardisation avait consisté à regrouper 8 des
SIG supports (exception faite de Nîmes, voir tableau ci-dessous) sous la forme d’un
seul fichier Géoconcept. Cette opération a eu l’avantage de simplifier le stockage des
données, mais sans mise en cohérence de l’information spatiale. De plus, au cours de
l’opération, certaines données furent écrasées ou corrompues, rendant les SIG
supports des PPC Vidourle et Vistre-Rhôny en grande partie inutilisables.
Tableau 7 – Etat des supports SIG construits pour la création des PPC de 2005 à 2009 (SDIS30, 2012)
PPC SUPPORTS SIG
Arre-Hérault, Cèze, Rhône, Uzès, Petit Rhône, Gardons
Information à remettre à jour, doublons
Vistre-Rhôny, Vidourle Majoritairement incomplets, information à reconstituer et remettre à jour.
Nîmes Support à jour, conservé tel quel
Une exception est à noter dans ce tableau : le SIG support au PPC Nîmes, réalisé
assez récemment (2009), répondait pleinement aux critères de qualité exigés pour la
mise à jour des Plans. Sa seule mise à jour réellement pertinente aurait été d’y intégrer
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
43
les modifications opérationnelles liées aux travaux réalisés sur les Cadereaux de
Nîmes suite aux inondations catastrophiques de septembre 2002. Toutefois, tant
qu’une crise similaire ne s’est pas produite sur Nîmes, ces modifications auraient
relevé, au mieux, de la supposition. En accord avec le Chef du Centre de Secours
Principal de Nîmes (Lt-Col. JOSEPH) et avec les encadrants du stage, il a donc été
choisi de conserver la cartographie du PPC Nîmes telle quelle.
Après examen des huit autres SIG, il a été choisi de les refondre entièrement sous la
forme d’un SIG commun. La procédure de mise à jour s’est déroulée sur environ
quatre mois, en huit étapes décrites ci-dessous :
I. Définition de la structure de données commune
II. Extraction des couches depuis les SIG 2005-2009
III. Vérification et tri des données, suppression des doublons et des
incohérences
IV. Reconstitution des données endommagées (saisie manuelle depuis les
anciennes cartographies)
V. Mise à jour des données et compléments manuels sur les couches
traduisant les informations opérationnelles au fil des entretiens avec les
chefs de centres de secours
VI. Ajout de nouvelles couches de données (données SDIS et DDTM7)
VII. Redéfinition des symbologies en cohérence avec la charte graphique
nationale SDIS.
VIII. Redéfinition des carroyages d’export
Afin de donner un aperçu du résultat de la restructuration finale du Système
d’Information Géographique PPC, il a été choisi d’utiliser une représentation sous la
forme de carte heuristique, réalisée sous le logiciel libre FreeMind® (voir Figure 16 -
Adaptation de la structure du SIG PPC (carte heuristique)). A l’origine, ce type
d’illustration était destiné à un tout autre usage, mais il est rapidement apparu qu’en y
important les icônes de Géoconcept® et en choisissant un mode de représentation
sobre, il était possible d’obtenir un rendu visuel simple et efficace. Il a été testé avec
succès lors de plusieurs réunions (DDTM, SPC, encadrement de stage SDIS30, Chefs
7 La collaboration entre les services SDIS et DDTM du Gard, notamment depuis la prise en charge de la
compétence inondation par le DDTM en 2012, a en effet permis d’accéder à de nombreux ensembles de données récentes.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
44
de Centre) et a permis d’exprimer efficacement les nécessités d’alimentation d’un
système d’information géographique, même auprès d’interlocuteurs non spécialistes.
La démarche de restructuration complète du support SIG s’est opérée en tenant
compte de deux priorités d’égale importance. La première a été de tendre vers une
base de données spatiale aussi cohérente et actualisée que matériellement possible,
la seconde de toujours conserver comme critère de décision principal l’intérêt
opérationnel de la cartographie obtenue à l’export et destinée à être intégrée aux
versions papier et numériques des Plans de Prévisions de Crues.
L’équilibre entre ces deux nécessités a parfois supposé de déroger aux règles
classiques de la cartographie. On citera ici l’exemple de la cartographie des zones
inondables (ZI) : pour des raisons soit d’existence des données, soit de sa pertinence
en termes d’opérations terrain, les ZI diffèrent d’un cours d’eau à l’autre : la Cèze
utilise par exemple des zonages de type hydrologique strict (lit majeur, lit mineur), alors
que le Vidourle se base sur l’enveloppe de crue classique de septembre 2002, et le
Rhône sur une Zone Inondable Opérationnelle distinguant de préférence des zones
inondées supérieures ou inférieures à deux mètres en 2002.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
45
Carte du Système d’Information Géographique PPC (2012)
SDIS30
Légende
Conception : JG.Audéoud, 2012 (via Freemind®)
Figure 16 - Adaptation de la structure du SIG PPC (carte heuristique)
Le nombre important de couches SIG est lié à la diversité des nécessités
opérationnelles. Il a été réduit autant que possible (de 150 à 110 couches de données)
en fusionnant les couches aux thématiques très proches (Ecoles, Collèges et Lycées
ont par exemple été regroupés sous la thématique Etablissements Scolaires), mais le
nombre d’objets demeure très élevé, supérieur à 240 000 objets sur l’ensemble des
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
46
couches, afin de répondre aux besoin des différentes cartographies, selon leurs
échelles et leurs vocations opérationnelles distinctes.
Figure 17 - Aperçu des sommaires cartographiques du PPC Uzès (SDIS, 2012)
Les produits cartographiques finaux intégrés dans les Plans de Prévisions de Crues
ont été également prévus pour s’intégrer à la structure du document lui-même,
particulièrement dans leurs versions numériques. Il a par exemple été possible de
gagner en simplicité en regroupant les légendes au début du document, et en
développant un système d’hyperliens reliant d’un clic la légende générale, les tableaux
d’assemblage, les vues générales des secteurs et sous-secteurs et les planches
cartographiques elles-mêmes. On trouvera en annexe un aperçu des cartes utilisées
en sortie, directement telles qu’intégrées dans l’outil opérationnel PPC.
L’ensemble des cartes a été mis en page sous Géoconcept puis retouché sous
Illustrator et Photoshop en conservant celles-ci au format vectoriel chaque fois que
possible. On note sur certaines planches (voir Figure 17 - Aperçu des sommaires
cartographiques du PPC Uzès (SDIS, 2012)) la présence de mentions de pages
précédées du symbole « », signe de la présence d’un hyperlien cliquable
permettant d’accéder directement aux planches cartographiques concernées. Les liens
dynamiques dans la version finale ont été ajoutés après l’export cartographique, lors
de la mise en page.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
47
2.4. Mission 2 : la Sectorisation Opérationnelle comme application de
l’anticipation de la gestion de crise inondation
2.4.1. Présentation du projet
Parallèlement à la mission de réactualisation des Plans de Prévision de Crue, la
seconde mission fixée par le SDIS30 au cours du stage 2012 s’intègre directement
dans la problématique de la gestion opérationnelle de crise.
Au travers des Ordres d’Opérations Inondations (OOI) successivement éditées au fil
des années, le SDIS30, et plus particulièrement le groupement fonctionnel Prévisions-
Opérations, poursuit une démarche de recherche et d’applications de méthodes
permettant de maximiser l’efficacité et la rapidité de la réponse opérationnelle face aux
situations de crises inondation majeures. En termes d’opérations, les crues
(particulièrement les crues cévenoles, dont l’occurrence est fréquente sur le
département) posent en effet une problématique triple :
- Des nécessités d’intervention, urgentes et nombreuses, impliquant directement
des enjeux humains (mises en sécurité et sauvetages), et supposant par
conséquent de pouvoir mobiliser rapidement des moyens d’intervention
classiques et spécifiques à l’inondation.
- Un fonds d’interventions « classiques » incompressible (accidents, incendies,
incidents technologiques ou de santé) pendant qui ne diminue pas pendant la
crise, mais qui au contraire se trouve renforcé et amplifié par la contrainte
supplémentaire supportée par l’ensemble des enjeux.
- La nécessité de mener de front les deux objectifs précédents en situation où les
accès routiers sont fréquemment ralentis ou coupés, isolant de larges portions
du territoire des moyens de secours.
Afin de répondre à ce défi organisationnel et technique, le SDIS s’est doté de plusieurs
organes et outils spécifiques au cours des années 2000 (Ordre d’Opérations
Inondation, SDIS30, 2011). On notera entre autres :
- La mise en place d’officiers spécialisés inondations intervenant en conseil au
CODIS, nœud de coordination des opérations,
- La création des Plans de Prévisions de Crue et la prise en compte des
problématiques inondation dans les plans ETARES,
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
48
- En termes de moyens opérationnels, le renforcement des groupes
d’intervention inondation (GII) classiques par des unités à compétences
spécifiques, notamment les unités SEV (Sauvetages en Eaux Vives).
Enfin, des avancées récentes ont été réalisées pour une meilleure coopération et
coordination entre les différents services de l’Etat pour la gestion de crise (Equipement,
DDTM, SPC, etc) ; ainsi que pour la coordination avec les communes dans le cadre
des actions civiles. Sur ce thème, l’intégration des Plans Communaux de Sauvegarde
et des systèmes de surveillance et d’alerte civils (ESPADA à Nîmes par exemple) dans
les tactiques d’intervention sapeurs-pompiers en constituent les manifestations les plus
récentes.
Toutefois, les retours d’expériences sur les événements de crue au cours des dix
dernières années (SDIS30, REX inondations 2005 et 2002) ont permis de cerner un
besoin pressant de développer une organisation opérationnelle permettant de mieux
répondre aux trois objectifs pré-cités, et particulièrement de mieux gérer les
problématiques d’accès coupés et d’isolement (clusterisation) du territoire gardois. En
effet, les inondations 2002 ont particulièrement mis en évidence qu’un important gain
d’efficacité pouvait être obtenu en anticipant le déploiement sur les zones susceptibles
d’être isolées de manière plus ou moins prolongée, et ce aussi tôt que possible avant
l’entrée en crise. D‘autre part, une seconde nécessité concerne
Cette réflexion a été menée en tirant profit des expériences réalisées sur le thème de
la gestion de feux de forêts dans le Gard, où de telles pratiques sont en usage depuis
plusieurs années (Ordre d’Opérations Feux de Forêt, SDIS30, 2011). Une première
analyse a permis d’identifier deux axes prioritaires de travail :
Le développement d’une stratégie de pré-positionnement des moyens sapeurs-
pompiers sur le terrain avant la coupure des accès par la crue.
La mise en place d’une chaîne de commandement renforcée spécifique à
l’inondation, à l’image de celle spécifique aux feux de forêts, actuellement en
activité pendant les deux mois d’été.
Ce travail, à l’origine d’ordre prospectif, avait été entamé en 2010 par le Commandant
Guillaume (adjoint au Chef de Groupement Prévision-Opérations) et Lucile DOS
SANTOS, à l’époque stagiaire au SDIS30. Il s’était traduit par l’identification de
secteurs hydrologiques cohérents pouvant servir de base à une réflexion ultérieure, et
une première évaluation des localisations de Postes de Commande et de Points de
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
49
Rassemblement des Moyens utilisables en cas d’inondation. Il a été décidé de confier
à un stagiaire les objectifs suivants au cours des mois d’été 2012.
GROUPEMENT PREVISION
OPERATIONS
DETAIL DES OBJECTIFS
DE LA MISSION SECTOP
2.4.2. Démarche et méthode employée
Après discussion avec le Cdt Guillaume, il a été décidé de réaliser la mission en six
étapes de travail successives permettant de répondre aussi pleinement que possible
aux objectifs fixés. Avant d’aborder dans le détail l’ordre de ces étapes de travail, il est
bon de rappeler l’approche choisie. Tout comme la remise à jour des plans de
prévision de crue, cette définition d’une Sectorisation Opérationnelle a été pensée
comme devant tout particulièrement se pencher sur la réalité du terrain lors
d’opérations d’intervention, et toujours placer les problématiques pratiques, concrètes,
comme priorités d’organisation.
Etape n°1 : Analyse et validation des travaux préparatoires 2010
La première phase de ce travail a consisté à s’imprégner de la documentation
opérationnelle du SDIS30, plus spécifiquement liée aux moyens d’intervention et à la
structure de la chaîne de commandement : Ordres d’Opérations Inondations et Feux
de Forêt, REX 2002, fiches synthèses et comptes rendus d’opérations, etc. En effet,
une prise en main de ces concepts peu familiers aux personnels extérieurs à la
hiérarchie sapeurs-pompiers étant nécessaire avant d’envisager un contact efficace
•Proposer et valider une présectorisation opérationnelle du Gard avec les référents inondation (personnel SP terrain)
1
•Etablir avec les référents une sous-sectorisation des SOI (4 à 5 sous-secteurs par ensemble) 2
•Définir avec les encadrants les nécessités d'encadrement et les points potentiels de positionnement des moyens (PRM)
3
•Evaluer les moyens minimums d'intervention nécessaires pour chaque sous-secteur 4
•Editer les informations sous forme d'un SIG, de cartes et d'un rapport intégrable à l'Ordre d'Opérations Inondation 2012
5
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
50
avec les référents de terrain. Cette phase, commencée début juillet, a également
donné lieu à une analyse du travail exploratoire mené par L. DOS SANTOS en 2010.
Figure 18 – Pré-Sectorisation en 14 secteurs sur le département (DOS SANTOS, 2010)
Ces travaux avaient en effet eu un double but :
- Identifier des secteurs territoriaux cohérents (strictement en termes
hydrologique dans un premier temps) permettant de disposer d’une « grille
d’alerte » pertinente pouvant servir de base à une réflexion ultérieure plus axée
sur les problématiques opérationnelles.
- Réaliser une première évaluation des localisations potentielles de Postes de
Commande (Colonne ou Site) et de Points de Rassemblement des Moyens
utilisables en cas d’inondation.
Au terme de ces travaux, il avait été défini 14 secteurs préparatoires listés ci-dessus
(Figure 18 – Pré-Sectorisation en 14 secteurs sur le département (DOS SANTOS,
2010)), ainsi que 32 PC et 34 PRM possibles, basés sur les Centre de Secours du
Gard et les Postes Avancés prévus à l’époque en cas de situation inondation
(Valleraugue et Bagnols-sur-Cèze principalement).
Etape n°2 : Création de la structure SIG et de la proposition de sectorisation
générale
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
51
Une fois cette prise en main effectuée, une seconde étape a consisté à créer une
proposition de sectorisation opérationnelle destinée à se calquer sur la première grille
et à être proposée auprès du personnel de terrain. Afin de répondre à cet objectif, il a
été nécessaire de reprendre la cartographie 2010 et de lui apporter quelques
modifications mineures (reprise des limites exactes, examen de la raison d’être des
secteurs urbains et notamment de la possibilité de création d’un sous-secteur Uzès,
finalement considéré comme non pertinent).
Cette étape fut également celle de la création du SIG spécifique Sectorisation
Inondation et de la documentation jointe (utilisable non seulement pour les productions
cartographiques propres à la mission de stage, mais destiné à être réutilisable
ultérieurement). Tout comme pour le SIG PPC, le SIG SECTOP dispose d’une
structure prévue pour fournir une information à la fois synthétique et pertinente pour
l’aide à la décision concernant toute future mise à jour de la Sectorisation
Opérationnelle. Cette structure est détaillée en Figure 19 - Structure du SIG SECTOP
(JG Audéoud, 2012) :
Figure 19 - Structure du SIG SECTOP (JG Audéoud, 2012)
Etape n°3 : Entretiens avec référents, validation des SOI et sous-sectorisation
Afin de rester en cohérence avec l’approche définie au début de la mission, l’étape
suivante a consisté en un contact direct avec le personnel sapeur-pompier de terrain,
sur la base d’une liste de référents primaires et secondaires pour chaque secteur
opérationnel proposé. Les critères retenus dans les choix des référents ont été la
connaissance des secteurs (particulièrement pour la gestion de crise inondation) et un
grade minimum pour bénéficier de leur part de l’expérience des nécessités liées à la
Chaîne de Commandement. Ces contacts ont également été complétés par des
rencontres avec un personnel plus spécialisé (unités SEV et GRIMP notamment).
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
52
Les entretiens se sont déroulés soit au SDIS30, soit directement sur les secteurs
concernés (Centres de Secours ou Groupements Fonctionnels/Territoriaux). Ils avaient
pour objectif d’obtenir des référents :
- La validation des limites générales du S.O.I. et de la raison d’être du secteur
(éventuellement l’étude des possibilités de division ou de fusion des secteurs).
- L’adaptation de ces limites à des repères visuels sur terrain plutôt qu’aux limites
communales utilisées dans la sectorisation 2010.
- La définition précise de 3 à 5 sous-secteurs opérationnels, avec comme critère
principal la conservation de l’accès routier à la totalité de chaque sous-secteur
depuis un ou plusieurs points centraux (PRM, PC).
- Toute remarque ou suggestion constructive pouvant contribuer à améliorer la
démarche elle-même (la nécessité de la conservation de la communication a
radio, par exemple, a été intégrée à cette étape).
On notera que dans deux cas au moins, ces entretiens ont conduit à réviser
complètement la proposition de SOI faite au départ. C’est par exemple le cas pour les
secteurs Alès-Ville et Gardon d’Alès, fusionnés en un seul secteur « Gardon d’Alès »
pour mieux répondre aux problématiques d’accès sur ce secteur en cas de crue ou de
rupture de barrage, en s’appuyant sur une sectorisation inspirée du Plan Particulier
d’Intervention du barrage de Sainte-Cécile. Ce fut également le cas pour les secteurs
Rhône Amont et Cèze Aval (zone de Pont Saint-Esprit), où une réunion commune
entre les chefs de centre et référents locaux a permis de redéfinir et sous-sectoriser les
deux secteurs en un seul.
REMARQUE : Un exemple de Secteur Opérationnel Inondation
peut être consulté en Annexe 5.
Etape n°4 : Spatialisation du pré-positionnement et de la structure
d’encadrement
L’étape suivante, objet d’un contact supplémentaire avec les référents, a consisté à
fixer les points de rassemblement des moyens ou PRM. Concrètement, un PRM
désigne un lieu précisément défini, répondant à un certain nombre de critères
précisément définis, où il est possible de pré-positionner des moyens sapeurs
pompiers avant le début de la crise, afin d’anticiper les coupures d’accès sur les
secteurs d’intervention. La liste de critères suivants a donc été communiquée aux
référents (Tableau 8 - Critères de définition des PRM et PC (SDIS30, 2012)) :
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
53
Tableau 8 - Critères de définition des PRM et PC (SDIS30, 2012)
CRITERE DESCRIPTION
Conservation des accès
Le PRM doit conserver un accès routier à l’ensemble du sous-secteur, utilisable même en cas de précipitations intenses et pour un nombre de moyens conséquent.
Accès Radio
En cas de nécessité de recourir à la RDS (Radio Derniers Secours), points conservant des conditions de communication radio correcte. Une localisation des points où le déploiement de relais radio est nécessaire a également été réalisée.
Hors d’eau PRM connu comme à l’abri d’une submersion, situé en dehors des zones inondables officielles (sauf raison justifiant une absence de risque).
Parking PRM avec capacité de stocker de manière prolongée et sécurisée un nombre de véhicules correspondant aux moyens prévus pour un positionnement prévento-curatif.
Structure d’abri
PRM en capacité d’abriter de manière prolongée (jusqu’à 24h) les personnels correspondant aux moyens prévus pour un positionnement en prévento-curatif par conditions météorologiques hostiles (structure bâtie « en dur », possibilité de restauration ou d’accès par l’unité logistique de cantine, suffisamment spacieuse, concernée par un accord au moins informel avec l’organisme propriétaire, et possédant si possible des moyens d’hébergement).
Alimentation en énergie
Alimentation en énergie électrique si possible indépendante du réseau EDF (groupe électrogènes)
Non-perturbation des capacités du CIS
En cas de positionnement du PRM dans un CIS, ce critère confirme que le centre a la capacité non seulement d’accueillir le PRM, mais également de le faire sans remettre en case sa propre capacité opérationnelle à répondre aux besoins d’intervention courants.
Pour les PC, qu’ils soient de niveau Site ou Colonne, les critères sont similaires, à ceci
près que les besoins en espace et en capacités de personnes sont plus limités. Au
final des deux mois d’entretiens avec les référents (pour la plupart des Chefs de
Centres ou des personnels SP de la hiérarchie du SDIS30), il a été possible de
cartographier 12 Secteurs Opérationnels Inondation, ainsi que leurs PRM et PC
correspondants (voir Figure 20 - Structure globale de la Sectorisation Opérationnelle
Inondation (JG.Audéoud, SDIS30, 2012)).
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
54
Figure 20 - Structure globale de la Sectorisation Opérationnelle Inondation (JG.Audéoud, SDIS30, 2012)
Etape n°4 : Estimation des moyens nécessaires pour déploiement prévento-
curatif
La quatrième étape, toujours menée avec les référents inondation, s’est portée sur une
démarche d’évaluation visant à identifier les quantités de moyens nécessaires sur les
sous-secteurs en cas d’intervention. Il est très vite apparu que ce premier objectif
n’était pas réalisable, en raison de d’incertitudes liées au phénomène d’inondation lui-
même (forte disparité spatiale des précipitations, inondations possibles sur un seul
affluent d’un bassin, variation de la vulnérabilité humaine face à l’inondation, dimension
aléatoire des nécessités d’intervention suite à des accidents).
Plutôt que de quantifier exactement les besoins nécessaires au sous-secteur en cas
d’inondation, une autre démarche a été choisie en accord avec les référents. A chaque
sous-secteur identifié a été associée une estimation d’un Minimum Opérationnel,
variable selon les problématiques et les localisations dans le Gard. Ce minimum est
défini en prenant comme base un scénario d’inondation généralisée isolant totalement
le secteur considéré. Il évalue les moyens minimum en personnel, véhicules et
matériels à déployer sur le secteur en cas d’inondation pour faire face aux
interventions en cas de crue, en constituant un « socle opérationnel » complété a
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
55
posteriori en cas de besoin. Il se décompose en un déploiement prévento-curatif et un
déploiement curatif complémentaire.
Figure 21 - Détails de structuration d'un SOI : l’exemple du secteur Vidourle Amont (SDIS30, 2012)
Les moyens déployés s’expriment généralement en utilisant les « briques »
opérationnelles déjà existantes, notamment les unités spécialisées, GIS (Groupes
Inondation Sauvetage) et GII (Groupes d’Intervention Inondation). Ceux-ci peuvent être
complétés par des remarques spécifiques (les secteurs cévenols signalent notamment
qu’ils n’auront pas l’usage des embarcations faisant habituellement partie intégrante
des GII) ou des nécessités particulières (demande d’attribution prioritaire d’hélicoptères
sur les SOI Alès et Vidourle Amont par exemple). La Figure 21 - Détails de
structuration d'un SOI : l’exemple du secteur Vidourle Amont (SDIS30, 2012) propose
un aperçu de cette répartition des moyens sur le secteur Vidourle Amont.
2.4.3. Résultats et perspectives de la Sectorisation Opérationnelle
Intégration de la Sectorisation Opérationnelle à l’Ordre d’Opération Inondation
2012
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
56
A la fin du stage, en septembre 2012, la structuration de la sectorisation opérationnelle
a pu être intégrée à l’Ordre d’Opérations Inondation 2012. Sur cette base, une
traduction de cette structuration en termes d’encadrement et de commandement a pu
être développée par le Cdt. Guillaume, aboutissant à la création d’une Chaîne de
Commandement spécifique Inondation. Sa mise en application est déclenchée par les
niveaux de réponse globaux définis par l’OOI sur le département, et elle inclut, entre
autres :
- Les actions immédiates à effectuer au CODIS (mise en place d’officiers
spécialisés inondation en salle de crise en fonction du niveau de réponse, par
exemple).
- Le renforcement progressif de la chaîne de commandement classique sur
l’ensemble du département (augmentation du personnel encadrant d’astreinte
et de garde notamment)
REMARQUE : Voir Annexe 3, Chaîne de Commandement
Inondation telle que définie lors de la production de l’OOI 2012.
Exploration d’indices de vigilance SOI possibles
Parallèlement à ces réalisations, un travail exploratoire a été réalisé en vue de
développer des indices capables de faire varier le niveau de vigilance des SOI
identifiés, afin d’y anticiper le déclenchement de la réponse opérationnelle. Il est bon
de rappeler ici que les secteurs Opérationnels Inondation ne peuvent pas être activés
sur la base de niveaux d’alerte instantanés, basés une montée du niveau des eaux,
comme le sont la majorité des actions prévues dans le cadre des Plans de Prévision
de Crues. En effet, plus encore que ces derniers, la sectorisation opérationnelle
s’inscrit dans un contexte d’anticipation du phénomène de crue avant sa manifestation,
pour préparer sapeurs-pompiers à répondre instantanément et efficacement, en pré-
positionnant à l’avance les moyens et les structures de commandement nécessaires.
L’objectif de ce travail a été d’identifier un ensemble d’indices pouvant définir un niveau
de vigilance attribué à chaque SOI, tout en tenant compte des nécessités suivantes :
- cohérence sur l’ensemble des secteurs8
8 L’information SPC, notamment, est ici insuffisante à elle seule, car elle ne couvre pas de manière
pertinente la totalité des secteurs. Elle demeure cependant une source d’information à ne pas négliger.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
57
- prise en compte de l’ensemble des problématiques inondations (y compris une
rupture de barrage accidentelle ou provoquée, et donc sans lien direct avec les
informations de précipitation)
- simplicité suffisante pour être intégrée aux outils inondations sans leur faire
perdre leur vocation d’opérationnalité
Sur cette base, 4 indicatifs ont été suggérés pour définir le niveau de vigilance de
chaque secteur inondation et la réponse opérationnelle qui en découlera: SPC,
PLUVIO, SPEC, CONC et ANTICIP (voir Tableau 9 - Indicateurs de vigilance SOI
(JG.Audéoud, SDIS30, 2012)).
Tableau 9 - Indicateurs de vigilance SOI (JG.Audéoud, SDIS30, 2012)
Indicatif SPC
Niveau de vigilance globale Vigicrues pour le tronçon principal du
secteur.
Exprimé en 4 niveaux : vert, jaune, orange, rouge
Indicatif PLUVIO
Mesure (SP, MétéoFrance) ou estimation du cumul pluviométrique sur
un secteur. Cf PPC Uzès ou Vidourle pour des exemples de cet
indicateur
Exprimé en Xmm en Xheures.
Indicatif SPEC
Permet de prendre en compte, pour un secteur donné, la présence d’un
risque hydrologique intense et spécifique (rupture de barrage à Sainte-
Cécile concernant les SOI Gardons d’Alès, Gardons Réunis et Alès ;
information d’une rupture de digue, etc.).
Indicatif CONC
Evalue la possibilité, sur certains secteurs, d’un scénario de crue
concomitante avec le cours d’eau d’un secteur voisin. CONC varie donc
pour tenant compte du niveau de vigilance des SOI voisins.
Indicateur ANTICIP
Anticipe l’évolution de la situation météorologique de manière simplifiée
(source : MétéoFrance).
(stable / en cours d’aggravation / en cours d’amélioration).
Il est rare que les 5 indicateurs soient disponibles sur un même secteur. Certains ne
sont pas mesurables sur certains secteurs (indicateur SPC sur secteur Uzès par
exemple), d’autres peuvent être fusionnés dans certains cas. En réalité, la majorité des
secteurs disposeront en permanence de 3 à 4 indicateurs. Selon sa disponibilité sur le
secteur, sa précision, et sa pertinence pour évaluer le risque de crue, chacun se verra
attribuer une pondération, cette pondération étant variable entre chaque secteur.
- Indicateurs absolus : à caractère officiel ou ayant trait à une source de danger
spécifique et intense, le niveau d’alerte global pour le secteur est
obligatoirement aligné au minimum sur leur niveau.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
58
- Indicateurs standards : à caractère général, ils constituent une évaluation
globale du niveau de vigilance inondation pour chaque secteur.
- Indicateurs secondaires : sur certains secteurs, la pertinence relative d’un des
indicateurs peut faire passer celui-ci au point de vue d’indicateur secondaire.
Dans ce cas, il participe à nuancer et détailler une situation, mais sans
participer directement à faire varier le niveau de vigilance général.
Figure 22 - Principe de fonctionnement final de la sectorisation Organisationnelle (JG.Audéoud, SDIS30, 2012)
Pour doter le système de sectorisation d’un organe d’activation simplifié mais
opérationnel dès 2012, ce travail a été réalisé en supplément des objectifs fixés pour la
mission de stage, sous la forme d’un travail prospectif. A cette phase du travail, il ne
s’agit pas à proprement parler d’indices, mais plutôt d’indicateurs simplifiés. Son
évolution en système prévisionnel effectif est prévue pour 2013 (quantification des
indices et des seuils de vigilance, modalité de collecte de l’information, construction
d’un applicatif informatique destiné à équiper le CODIS en période de crise). Pour
l’année 2012, l’activation des SOI se fera sur intervention d’un opérateur humain,
généralement un officier de la Chaîne de Commandement doté de l’expérience des
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
59
inondations gardoises, qui se guidera sur les indices suggérés ci-dessus pour faire
évoluer le dispositif prévento-curatif comme illustré en Figure 22 - Principe de
fonctionnement final de la sectorisation Organisationnelle (JG.Audéoud, SDIS30,
2012).
2.5. Bilan du stage SDIS30
2.5.1. Apports personnels
Ce stage de six mois au SDIS30 a été extrêmement profitable sur un plan personnel.
Son implication directe dans les problématiques de gestion de crise inondation, au
cœur d’une structure directement impliquée à part égale dans les plusieurs volets
complémentaires de la gestion des risques (prévention, prévision, gestion de crise) a
permis de se familiariser directement sur terrain avec les défis que posent la gestion
des crues.
Il a également permis d’acquérir une connaissance de la structure générale des SDIS
et d’y observer directement sur place les outils professionnels de gestion de crise. Ces
travaux ont également amené à prendre contact avec plusieurs acteurs privés et
publics de la gestion du risque inondation : le bureau d’étude Predict Services, le
service SCHAPI-SPC Grand Delta, la DDTM du Gard et les communes ont constitué
des interlocuteurs à part entière et des partenaires d’échange très constructifs.
Une mention particulière peut être faire au sujet de la DDTM30, fortement impliquée
dans la gestion depuis sa récente prise de compétence de référent inondation auprès
du Préfet. En effet, durant le printemps de 2012, une volonté de coopération entre le
SDIS et la DDTM du Gard ont conduit à la création d’un Groupe de Contact Inondation,
initié par M.Marty (DDTM30) et le Cdt. Guillaume (Groupement Prévi-Ops), dont les
services respectifs ont composés le noyau de ce groupe de contact voué à rassembler
un nombre de service de l’Etat aussi large que possible et à faciliter les échanges
d’information entre eux. Dans le cadre de cette démarche, il a été possible de
participer directement aux réunions de mise en place de cette structure inter-services.
Sur un plan plus technique, le stage a nécessité un usage très intense du logiciel de
système d’information géographique Géoconcept, tout en disposant d’un. La présence
d’un spécialiste de ce logiciel dans le service même a permis une formation
exceptionnellement rapide et efficace. Un mois environ a été nécessaire pour atteindre
un niveau d’autonomie, deux mois pour une maîtrise plus complète du logiciel, incluant
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
60
les fonctions avancées spécifiques à Géoconcept: synchronisation des modes de
visualisation, gestion des symboles par échelles, gestion des données dynamiques sur
serveur notamment.
Le stage et le mémoire ont également fourni, pour des nécessités de licence et
d’efficacité, l’occasion de se former à l’utilisation de logiciels libres en compléments de
Géoconcept : parmi eux, la solution SIG libre QuantumGIS, les logiciels de conception
de cartes heuristiques Freemind et de planification de projet GanttProject ont fait partie
des plus couramment utilisés. Enfin, les compétences d’utilisation de la suite Adobe
(Illustrator et Photoshop) ont également bénéficié de cette expérience.
2.5.2. Difficultés techniques et scientifiques rencontrées
Lors de l’exposé du déroulement d’un projet, on oppose habituellement les difficultés
scientifiques (difficultés de fond traitant entre autres des limites de la démarche) et
fonctionnelles (de forme ou d’organisation, plus liées à des contraintes d’ordre
organisationnel et humain). Toutefois, dans le cadre de la mission de stage SDIS30
2012, cette opposition est moins nette. En effet, en considérant la très forte dimension
opérationnelle des objectifs à atteindre, il ne serait pas justifié de lui donner un
caractère scientifique au sens strict. Même si l’organisation utilisée suppose une
certaine similarité dans les méthodes et les réflexes, le stage ne s’est pas déroulé
selon les critères du questionnement scientifique (fonctionnement en hypothèses-
vérifications et linéarité de la démarche). A plusieurs reprises, il a été jugé plus
pertinent d’admettre des dérogations à la méthodologie de départ utilisée, s’il devenait
évident que la rigueur de cette démarche ne contribuait plus à obtenir un résultat
optimal, mais au contraire l’éloignait de la réalité du terrain.
Un excellent exemple concret en est le processus de définition précise des limites de
secteurs opérationnels. A l’origine, la méthodologie prévue avait été de fixer les limites
de secteurs sur les limites communales et les talwegs de cours d’eau, afin de
conserver une cohérence dans les critères de définition, dans le but de produire une
méthodologie de mise à jour réutilisable automatiquement.
Or, au fur et à mesure des entretiens avec les référents inondation, il est apparu
régulièrement que des tracés routiers ou de chemin de fer, des lignes électriques, etc.
constituaient des repères spatiaux plus visibles, et donc plus pertinents en termes
opérationnels, que les limites fixées a priori. Au fil du temps, ces modifications de
tracés sont devenues la règle plutôt que l’exception (rappelons que la référence
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
61
principale utilisée a toujours été les expériences opérationnelles sapeurs-pompiers
précédemment enregistrées). Le résultat final propose donc des tracés à fort potentiel
opérationnels, compréhensibles et utilisables rapidement par le personnel de terrain ;
mais en revanche, cette définition par l’expérience ne permet conserver l’unicité qui
permettait une mise à jour rapide et automatisée. En d’autres termes, toute redéfinition
des limites des secteurs devra passer par les mêmes phases de consultation du
personnel de terrain.
On peut donc considérer qu’en soit, l’une des principales difficultés de ces missions a
été rendre les méthodes utilisées simultanément rigoureuses et suffisamment souples
pour s’adapter à la première nécessité de toute approche sapeur-pompier : considérer
la réalité de terrain comme critère premier, même si cela implique de réviser la totalité
d’une démarche.
Sur le plan technique, les difficultés rencontrées ont été principalement liées à la
complexité de la gestion des Systèmes d’Information Géographiques fonctionnant
comme support aux outils opérationnels que sont les Plans de Prévision de Crues et le
projet SECTOP. En effet, les huit SIG présentaient des structures difficiles à
synchroniser et un nombre de données important (total de 240 000 objets environ). Ils
comptaient également de nombreux problèmes structurels sous-jacents : les conflits
de géométrie et les doublons en ont constitué la part le plus importante.
La résolution de ces problèmes faisait partie des objectifs principaux de la mission, et
une solution à la majorité d’entre eux a pu être trouvée à court ou moyen terme
pendant le stage, à l’exception notable des carroyages, où il s’est avéré impossible de
faire coïncider les nécessités de s’adapter aux carroyages officiels SDIS et DFCI sans
multiplier le nombre de planches au-delà des limites du raisonnable pour des plans
opérationnels.
Par ailleurs, le planning réalisé en début de stage a très largement sous-estimé le coût
en temps de la refonte complète en un seul ensemble (voir figure XX, Chronogramme
en diagramme de Gantt). Au final, cinq des six mois de stage ont été nécessaires pour
terminer la refonte complète des SIG et l’harmonisation des bases de données.
2.5.3. Suggestions et perspectives
Les perspectives sur lesquelles s’achève ce stage se portent principalement sur les
aspects de la Sectorisation Opérationnelle (les PPC venant d’être mis à jour, une
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
62
modification à court terme n’est pas a priori à l’ordre du jour, sauf manifestation d’un
besoin spécifique).
Si le projet SECTOP est d’ores et déjà opérationnel et intégré aux directives de l’Ordre
d’Opérations 2012, il demeure néanmoins perfectible (certains PRM et emplacements
de PC restent en effet à vérifier ou assurer ultérieurement). D’une part, la définition des
indicateurs hydrologiques, météorologiques et pratiques qui déclencheront l’activation
des SOI doivent à présent être complétés et développés sous la forme d’un modèle
décisionnel. D’autre part
A ce sujet que, l’essentiel de la dimension opérationnelle ayant été traité, on peut
suggérer de donner au prochain stage une thématique portée de manière plus
approfondie sur le lien entre mécanismes hydrologiques et réponses opérationnelles.
En effet, à plusieurs reprises, lors des entretiens avec les référents, il a été pris note
d’une demande concernant une connaissance plus précises des mécanismes de crue,
et notamment une estimation temporelle de la durée de la crue et des temps de
transfert. Ces éléments comptant certes parmi les plus difficiles à quantifier, mais ils
présentent un intérêt opérationnel de tout premier plan.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
63
CONCLUSION GENERALE
Variée et complète, l’expérience de stage au SDIS30 s’est révélée extrêmement
bénéfique, à la fois d’un point de vue personnel et scientifique. Le travail sur un
ensemble d’outils pré-existants a permis de pousser plus loin que la moyenne la
réflexion liée à la pertinence de la donnée géographique, spatialisée, dans la gestion
opérationnelle de crise. Il a été possible d’affiner cette approche sur les Plans de
Prévision de Crues en y modifiant l’échelle d’approche, et plus encore de l’utiliser pour
participer à la construction d’un système opérationnel départemental innovant et
concret (projet SECTOP).
Sur le plan technique, outre la familiarisation avec plusieurs nouveaux logiciels,
l’expérience d’une refonte complète d’un Système d’Information Géographique
complexe a également été très profitable. La redéfinition de sa structure, la recherche
des données, leur manipulation, leur validation et leur transformation sous une mise en
forme exploitable selon des critères opérationnels précis, constitue une expérience de
géomatique très utile et d’un intérêt personnel certain.
Bien que les outils constituent une part non négligeable des compétences acquises
pendant ce stage, l’expérience du choix des données en fonction de leur potentiel
opérationnel a également été fortement bénéfique. Enfin, sur le plan humain, la
dimension opérationnelle très forte qui caractérisait ce stage (Offre de stage 2012,
SDIS30) a été profitable en ce qu’elle s’inscrivant pleinement dans une démarche de
complémentarité avec les connaissances et compétences acquises au cours du Master
2 GCRN. L’organisation et la rigueur indispensables pour la bonne réalisation de ce
travail, la capacité d’adaptation à des interlocuteurs très différents (personnel terrain,
services de l’Etat) ont contribué à construire et nourrir le profil polyvalent qui compte
parmi les atouts principaux de la formation en Gestion des Catastrophes et des
Risques Naturels de l’Université Montpellier III.
D’un point de vue plus général, ce stage a également permis de disposer d’un exemple
de l’évolution progressive de conception des échelles spatiales au sein des structures
et des acteurs de gestion des risques en France. Cette évolution vers une pratique de
gestion de l’espace plus souple, plus individualisée, se heurte encore à la spécificité
française d’une gestion encore cloisonnée, même à l’échelle locale, et majoritairement
centrée sur l’aléa. En effet, la définition d’un territoire directement lié au risque devra
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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obligatoirement passer, à terme, par la prise en compte de la répartition spatiale des
enjeux et des acteurs du risque, et non seulement des aléas.
Toutefois, cette innovation pourrait être l’une des premières formes d’une future
intégration améliorée des différentes échelles spatiales et fonctionnelles dans
lesquelles s’inscrivent les enjeux, les aléas et les mécanismes de gestion. Si cette
tendance se confirme, la concrétisation d’un véritable « territoire du risque »
deviendrait alors possible, illustration d’une nouvelle évolution des pratiques de gestion
spatiales en France.
STRATEGIES DE PLANIFICATION ET D’ANTICIPATION POUR LA GESTION OPERATIONNELLE DES INONDATIONS
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ANNEXES
Liste des Annexes
Annexe 1 : Chronogramme détaillé du stage (Diagramme de Gantt) ....................... 65
Annexe 2 : Organigramme fonctionnel général du SDIS30 ...................................... 66
Annexe 3 : Aperçus des planches principales des PPC 2012 : l’exemple du PPC