[desarmi.org/]. Document sous License Crea6ve Commons (byncsa). ACADEMIE DE PARIS Année 2016 MEMOIRE Pour l’obtention du DES D’Anesthésie-Réanimation Coordonnateur : Monsieur le Professeur Benoît Plaud Par Marianne ANNONAY Présenté et soutenu à Paris Le 09 Septembre 2016 Quel est le pourcentage d’orifice glottique observable seuil pour accéder à la trachée avec une sonde d’intubation ou un long mandrin béquillé ? Une étude randomisée en simulation d’intubation difficile Travail effectué sous la direction du Professeur Gilles Dhonneur
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ACADEMIE DE PARIS
Année 2016
MEMOIRE
Pour l’obtention du DES
D’Anesthésie-Réanimation
Coordonnateur : Monsieur le Professeur Benoît Plaud
Par
Marianne ANNONAY
Présenté et soutenu à Paris
Le 09 Septembre 2016
Quel est le pourcentage d’orifice glottique observable seuil pour
accéder à la trachée avec une sonde d’intubation ou un long
mandrin béquillé ? Une étude randomisée en simulation
d’intubation difficile
Travail effectué sous la direction du Professeur Gilles Dhonneur
1- Les POGO déclarés………………………………………………………………………...19
2- Le succès ou l’échec de l’accès trachéal rapide……………………………………...…….20
3- L’expérience des intervenants……………………………………………………..………22
4- Le POGO-Echec pour SIT…………………………………………………………………23
5- La sélection du modèle…………………………………………………………………….23
6- Les limites de l’étude………………………………………………………………………24
V- CONCLUSION……………………………………………………………………………25
BIBLIOGRAPHIE……………………………………………………………………………26
ANNEXE……………………………………………………………………………………..29
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ABRÉVIATIONS
POGO : Pourcentage d’Orifice Glottique Observable
SIT : Sonde d’Intubation Trachéale
LMB : Long Mandrin Béquillé
CL : Cormack et Lehane
LM : Laryngoscope de Macintosh
BEG : Bougie Élastique en Gomme de caoutchouc
SID : Score d’Intubation Difficile
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RÉSUMÉ
Introduction : La sélection de modèles d’intubation simple et difficile pour des études de simulation nous a permis d’analyser l’impact de la qualité de la vision glottique en laryngoscopie directe, évaluée par le pourcentage observable de l’orifice glottique (POGO), sur la capacité d’opérateurs plus ou moins expérimentés à accéder rapidement à la trachée dans un temps contraint (<15 s) avec une sonde d’intubation trachéale (SIT) ou un long mandrin béquillé (LMB). Matériels et méthodes : Etude prospective réalisée sur mannequin d’intubation difficile par 15 médecins expérimentés (Séniors) et 15 médecins internes en formation (Juniors) informés et préparés. La création de POGO variables permettait de moduler la difficulté d’accès trachéal croissante selon 4 Situations standardisées. La capacité des opérateurs à accéder à la trachée dans un temps limité (< 15 s) avec SIT ou LMB était évaluée. Le choix de l’outil d’accès trachéal (SIT ou LMB) et les Situations (1 à 4) étaient randomisés. Après chaque tentative d’accès trachéal avec SIT ou LMB, indépendamment du succès ou de l’échec, les participants devaient énoncer à voix haute le grade de Cormack et Lehane ainsi que le POGO observés. Le critère principal de jugement était le score POGO minimal ayant permis un accès trachéal en moins de 15 s (POGO-Seuil). Les autres critères étaient les POGO-Succès et Echec correspondant respectivement aux valeurs moyennes des POGO obtenus lors des accès trachéaux réussis en <15 s et aux valeurs moyennes des POGO associés aux échecs d’accès trachéaux. Le nombre d’échec était également colligé. Notre hypothèse principale était que le POGO-Seuil de SIT devait être au moins deux fois plus élevé que celui de LMB. Résultats : Au total 240 tentatives d’accès trachéal ont été chronométrées. Le POGO-Seuil est 3,6 fois plus élevé avec SIT qu’avec LMB. Les Séniors ont un POGO-Seuil plus bas que les Juniors pour SIT et LMB. Le POGO-Succès de LMB est systématiquement inférieure à celui de SIT pour les Situations 1, 2, et 3. En Situation 3, le taux de réussite de l’accès trachéal < 15 s est 3 fois plus élevé avec LMB qu’avec SIT. Le POGO-Echec moyen avec SIT et LMB est identique pour les Juniors et les Séniors. Pour la Situation 3, près de 50% des participants sont incapables d’accéder à la trachée en moins de 15 s avec SIT, alors que 83% d’entre eux (100% des Séniors et 66% des Juniors) le sont avec LMB. Conclusion : L’accès trachéal en urgence avec LMB est réalisable pour des conditions de laryngoscopie moins bonne que celles requises pour placer SIT. Quand la laryngoscopie est difficile (Situation 3), le choix de l’outil est déterminant du succès de l’accès trachéal rapide et SIT est plus difficile à utiliser que LMB par les intervenants moins expérimentés. Ce travail nous a permis de sélectionner les modèles d’intubation trachéale simple et difficile auxquels nous souhaitions confronter les médecins urgentistes lors d’études de simulation.
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I- INTRODUCTION
L’origine du laryngoscope remonte à 1855, où un professeur de chant M. Garcia, cherchant à
observer ses cordes vocales, eu l’idée d’utiliser deux petits miroirs prélevés sur des outils de
dentistes pour visualiser indirectement, par un jeu de lumière et de réflexion, ses cordes
vocales. Il fit un mémoire qu’il intitula « observations physiologiques sur la voie humaine »
[1]. Ce mémoire resta dans l’oubli et il fallut attendre 1895 pour que le Dr A. Kirstein
fabrique un instrument qu’il nomma le « glottiscope » permettant une visualisation directe de
la glotte [2]. Ce glottiscope était composé d’un manche et d’une lame droite (en une seule
pièce), associé à une source de lumière artificielle externe. En 1913, le Dr P. Jackson de
Philadelphie (USA) rapportait l’utilisation du glottiscope pour introduire, sous contrôle de la
vue, un tube dans la trachée [3]. En 1943, Sir Robert R. Macintosh brevetait une lame
métallique avec une courbure continue, articulée sur un manche droit, créant ainsi le
laryngoscope de Macintosh (LM) [4]. Ce laryngoscope facilitait l’insertion trachéale, sous
contrôle direct de la vue, d’un tube chez les patients anesthésiés. Comparé aux outils existants
munis d’une lame droite, le LM permettait alors de diminuer l’incidence des traumatismes
pharyngolaryngés et surtout des bris dentaires lors de la mise en place d’une sonde
d’intubation trachéale (SIT).
En 1949, Sir Robert R. Macintosh rapportait dans une série de cas publiée dans le BMJ [5],
l’intérêt d’une bougie élastique en gomme de caoutchouc (BEG), utilisée par les urologues
pour dilater les sténoses urétrales, pour faciliter l’introduction de la SIT quand l’accès trachéal
était compliqué ou impossible avec son laryngoscope. Inspiré par le rapport de Sir Robert R.
Macintosh, Paul H. Venn [6], médecin anesthésiste exerçant au Royaume-Uni, a conçu un
introducteur trachéal qui fut utilisé dans les années 1970. Il était alors le consultant
anesthésiste pour la firme britannique Eschmann Bros & Walsh, Ltd (Shoreham-by-Sea, West
Sussex, UK). Cette compagnie accepta, en Mars 1973, de fabriquer et de commercialiser le
brevet du docteur Paul. H Venn appelé : long mandrin béquillé d’Eschmann (LMB) [6]. Le
matériau composant cet introducteur nouvellement conçu était différent de celui de la BEG
[7]. En effet, il était composé de deux structures: 1- un noyau central tubulaire tissé à partir de
fils de polyester et 2- une couche de résine synthétique externe. Cette conception particulière
permettait d’obtenir une certaine rigidité liée à l’armature interne tout en gardant une certaine
flexibilité. Par ailleurs, la couche externe en résine permettait d’avoir une surface glissante.
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En dehors du matériau, d'autres détails différenciaient le LMB conçu par Paul H. Venn et la
BEG : la taille et la forme béquillée de son extrémité distale. La longueur du LMB était de 60
cm, bien plus importante que celle de BEG, ce qui facilitait le guidage de la SIT sur
l’introducteur poussé en butée dans l’arbre bronchique. Enfin, l’extrémité béquillée fut
travaillée pour constituer un angle de 35° sur une longueur de 1,5 cm permettant d’orienter
l’introducteur trachéal et de lui faire passer des obstacles [7].
Par la suite, le LMB est resté pendant de nombreuses années un outil d’accès trachéal très
usité par les médecins anesthésistes du Royaume-Uni. Ses performances et sa réputation
cantonnée à la Grande Bretagne eurent du mal à franchir la Manche. Avec les progrès de la
pharmacologie, le développement des respirateurs d’anesthésie, et la mise à disposition des
cliniciens des moyens de monitorage des effets des agents de l’anesthésie, l’intubation
trachéale devenait dans les pays développés, dans les années 1990-95, la technique de gestion
des voies aériennes la plus fréquemment utilisée lors de l’anesthésie générale. Cette période
coïncidait en Europe avec la publication de nombreux rapports et études scientifiques
démontrant que le LMB était un outil d’aide à l’accès trachéal performant [8, 9].
Simultanément, aux USA, les médecins anesthésistes validaient l’utilisation d’un mandrin
métallique malléable recouvert d’un film plastique en polyvinyle carbone pour faciliter
l’accès trachéal.
C’est le développement des algorithmes de gestion des voies aériennes difficiles qui donna au
LMB ses lettres de noblesses et sa reconnaissance internationale. En effet, à partir des années
2000, le LMB est intégré dans les algorithmes d’intubation difficile [10-16]. L’intubation est
difficile quand la visualisation de la glotte est partielle ou impossible et que la sonde
d’intubation est introduite dans l’œsophage deux fois de suite. Dans cette situation, le LMB
est proposé en seconde ligne pour tenter d’accéder à la trachée. Quand le LMB est placé dans
la trachée et avancé en butée dans l’arbre bronchique, alors, il sert de guide pour placer la SIT
dans la trachée.
Les performances du LMB pour l’intubation trachéale sont maintenant reconnues au bloc
opératoire, mais aussi en médecine d’urgence et dans les unités de réanimation [11-16]. Le
LMB est inséré dans la trachée et permet d’y insérer une sonde d’intubation dans plus de 80%
des situations où le LM seul ne permettait pas de le réaliser cette manœuvre [14]. Cette
performance est remarquable, ce d’autant que la manœuvre d’intubation avec le LMB permet
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de s’assurer de la quasi-certitude du placement dans l’arbre bronchique de l’introducteur. En
effet, sous laryngoscopie directe, l’introduction trachéale du LMB permet de ressentir lors de
sa descente dans la trachée : 1- des ressauts (clics), traduisant la butée de l’extrémité angulée
sur les anneaux trachéaux successifs, et 2- le blocage distal bronchique (hold-up) de
l’extrémité angulée entre 35 et 40 cm des arcades dentaires.
Les études cliniques démontrent que le LMB est très performant dans l’intubation trachéale
difficile et plus particulièrement dans les situations où la glotte n’est que partiellement ou pas
du tout visible en laryngoscopie directe. Le score le plus souvent utilisé pour mesurer la
difficulté de l’intubation (IDS) [17] intègre la qualité de la vision glottique sous laryngoscopie
directe estimée par la classification de Cormack et Lehane (CL) selon 4 grades (1, 2, 3 et 4)
comme l’élément déterminant de la difficulté. En cas de CL=1, la glotte est visible dans son
ensemble, l’intubation est simple. Quand la glotte n’est pas visible dans son ensemble (CL=2,
3 et 4), l’intubation est plus difficile. Cependant, en situation clinique, les situations d’accès
trachéal difficile sont très majoritairement associées aux CL= 2. Or, le CL= 2 correspond à un
vaste continuum de qualité d’exposition glottique (certaines où la glotte est visible à 90% et
d’autres où elle n’est visible qu’à 5%) correspondant à des difficultés d’intubation très
variables. L’accès trachéal est simple avec un CL=2 si 90% de la glotte est visible. A
l’opposé, pour les CL=2 avec seulement 1% de la glotte visible, l’intubation est difficile. Le
CL=2 comme grade unique de difficulté d’exposition glottique peut générer une intubation
relativement simple ou très difficile, ce qui nuit à la qualité de la mesure de la difficulté
d’intubation.
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Pour mieux coller avec la réalité, le CL a été modifié au cours des années pour qualifier la
difficulté de la laryngoscopie. Ainsi, des grades intermédiaires ont été ajoutés pour refléter la
difficulté d’intubation avec notamment les CL=2A, CL=2B, CL=3A et CL=3B.
Plus récemment, le score POGO (POGO : pourcentage d’orifice glottique observable ; Figure
2) [18], décrivant la qualité de la vision glottique lors de la laryngoscopie avec le LM, a été
proposé pour mesurer la difficulté de l’intubation trachéale. Lorsque la fente glottique est
visible dans son ensemble en laryngoscopie directe, le POGO est à 100%, l’exposition
glottique est parfaite et l’intubation trachéale est simple a priori. A l’opposée, lorsque la fente
glottique n’est pas visible, alors le POGO est à 0%, l’exposition glottique est impossible,
l’intubation trachéale est difficile, parfois irréalisable. Il est ainsi possible avec le POGO de
grader de manière quasi linéaire la difficulté d’intubation rencontrée en pratique clinique. Le
POGO est maintenant largement utilisé en pratique clinique pour juger la qualité de la
laryngoscopie et mesurer la difficulté de l’intubation trachéale.
Figure 2
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L’apprentissage de l’intubation trachéale est depuis une quinzaine d’années possible sur
mannequin standard, mais aussi sur mannequin d’intubation difficile [19, 20]. Ces derniers
permettent de moduler la difficulté d’intubation et de simuler une gamme de situation où
l’intubation est simple avec un CL=1, puis d’augmenter progressivement la difficulté
d’intubation en plaçant un collier cervical et en utilisant différents moyens mécaniques
induisant une rigidité du rachis cervical (fixation de l’axe tête-cou), réduisant l’ouverture de la
bouche (simulation de trismus ou ankylose mandibulaire), diminuant le volume de la cavité
buccale (augmentation du volume de la langue), rétrécissant le volume du pharynx (induction
d’une voussure pharyngée postérieure) et finalement fermant la glotte (compression
extrinsèque des cordes vocales). Par ailleurs, l’intubation peut être rendue plus difficile par
d’autres stratégies comme le placement du mannequin au sol ou dans un espace contraint ou
en imposant une position d’intubation non conventionnelle (de face par exemple ou en
position latérale) à l’opérateur.
Les mannequins d’intubation difficile permettent à des opérateurs d’apprendre la manœuvre
d’intubation trachéale avec le LM (mais aussi avec des vidéo-laryngoscopes) dans des
conditions simples et standard, puis dans des situations de plus en plus difficiles en modulant
le POGO ou les positions relatives de l’opérateur et du mannequin. Par la suite, les opérateurs
qui maitrisent la manœuvre d’intubation peuvent être placés en conditions simulant une
intubation difficile au bloc opératoire, au sol comme en médecine d’urgence, en position
assise sur un lit d’hospitalisation ou de réanimation. Il est possible sur les mannequins
d’intubation difficile de créer des scénarii mimant des situations cliniques d’intubation mais
aussi de ventilation au masque facial difficiles. Les opérateurs sont alors jugés sur leur faculté
à appliquer des algorithmes prédéfinis par les sociétés savantes. Il est par ailleurs possible
d’induire un environnement stressant en simulation de gestion des voies aériennes en utilisant
un marquage sonore des variations affichées de la fréquence cardiaque et de la saturation en
oxygène (SaO2). La simulation permet aussi d’évaluer la faisabilité et l’intérêt de nouvelles
stratégies de gestion des voies aériennes supérieures.
Notre laboratoire est équipé d’une dizaine de mannequins standards adultes dont trois
mobilisables d’intubation difficile (Airman® Ambu). Nous avons, dans ce laboratoire, réalisé
de nombreuses formations des personnels médicaux et paramédicaux (IADE) du bloc
opératoire et du SMUR à la gestion des voies aériennes difficiles. Nous avons préparé la
validation des algorithmes de gestion des voies aériennes avant de les appliquer en clinique.
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Nous avons aussi analysé la courbe d’apprentissage de nombreux outils de gestion des voies
aériennes comme les masques laryngés et les vidéo-laryngoscopes.
Il y a deux ans, nous avons décidé de modifier notre algorithme de gestion des voies aériennes
difficiles en SMUR. Notre objectif était de réduire le délai de sécurisation des voies aériennes
en rendant la manœuvre d’intubation plus simple, plus confortable, particulièrement dans les
situations cliniques reconnues pour être difficiles. Nous avons décidé de réaliser une étude en
simulation d’intubation difficile en SMUR. Notre intention était de modifier la position du
LMB dans l’algorithme que nous avions validé préalablement en situations cliniques. Nous
nous posions la question de la pertinence d’utiliser le LMB en première intention (plutôt
qu’en seconde) pour l’intubation en SMUR dans les situations cliniques où une intubation
difficile était anticipée, soit du fait du patient qui présentait des critères prédictifs de
difficulté, soit parce que la situation/position du patient par rapport à celle de l’intervenant
laissait présager des difficultés soit du fait de la combinaison de ces facteurs [21].
Avant de débuter l’étude en simulation, nous avons décidé de valider les modèles
d’intubation. Nous devions proposer deux conditions d’intubation trachéale standardisées
pour la médecine d’urgence : une simple et l’autre difficile. Ce schéma méthodologique nous
permettait de valider l’utilisation première de LMB dans l’algorithme de gestion difficile des
voies aériennes et de comparer l’impact de cette nouvelle stratégie par rapport à la
recommandation qui est d’utiliser le LMB en seconde intention après l’échec de l’intubation
avec la SIT [10]. Nous avons donc décidé de réaliser une étude de validation des modèles
d’intubation simple et difficile. La sélection du modèle d’intubation étant réalisée sur les
mannequins placés en position conventionnelle, la difficulté d’accès trachéal était modulée
par la création de POGO variables. La capacité des opérateurs à accéder à la trachée dans un
temps limité avec une SIT ou un LMB était évaluée. Ce travail avait pour objectif de
sélectionner les modèles d’intubation simple et difficile que nous allions utiliser dans la suite
de nos études. Pour réaliser cette sélection des modèles d’intubation, nous avons décidé de
calculer de manière prospective la qualité de la vision glottique quantifiée par le POGO
permettant à des opérateurs plus ou moins expérimentés d’accéder rapidement à la trachée
dans un temps contraint (<15 sec) avec SIT ou LMB proposés de manière aléatoire. Nous
avons défini pour chaque opérateur et pour l’ensemble des modèles d’intubation proposé de
manière aléatoire, le POGO seuil (POGO-Seuil) comme le score POGO le plus bas ayant
permis à l’opérateur un accès trachéal réussi en moins de 15 s.
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II- MATÉRIELS ET MÉTHODES
1- Ethique Notre travail a été soumis à l’avis du comité d’éthique qui a émis un avis favorable à la
réalisation de cette recherche en simulation gestion des voies aériennes supérieures difficiles.
Par ailleurs, les 35 participants : médecins anesthésistes (n=5), médecins urgentistes (n=15),
internes du SMUR (n=10), et interne d’anesthésie (n=5) ont donné un accord écrit de
participation à cette recherche.
2- Les participants Cinq médecins anesthésiste-réanimateurs (MAR) ayant plus de 10 ans d’expérience en
clinique, mais aussi en recherche, dans le domaine de la gestion des voies aériennes, ont été
impliqués dans la conception et le suivi de l’étude. Ils étaient chargés de valider les méthodes,
de réaliser l’éducation aux protocoles et procédures, de valider les apprentissages et enfin de
monitorer la réalisation des études.
Trente participants ont été impliqués dans le choix des modèles d’intubation. Il s’agissait
d’abord de 15 médecins urgentistes ayant entre 10 et 15 ans d’expérience en médecine
d’urgence préhospitalière. Tous considérés comme des « Séniors », ils avaient déjà participé
à des études cliniques dans le domaine de la gestion des voies aériennes. Enfin, 15 internes en
formation dans deux spécialités : la médecine d’urgence et l’anesthésie-réanimation étaient
considérés comme des « Juniors ». Les Juniors en anesthésie et réanimation étaient dans leur
second semestre de spécialisation. Les Juniors en médecine d’urgence étaient dans leur
seconde année de spécialisation.
3- Les situations d’accès trachéal simples et difficiles L’étude était réalisée sur le mannequin SimMan® Ambu. Il était positionné à plat dos sur un
brancard placé à hauteur modulable simulant ainsi des conditions d’intubation au bloc
opératoire. Ce mannequin d’intubation difficile permettait de moduler la difficulté
d’intubation en utilisant 5 moyens (M) différents, associables. Ainsi, il est possible pour M1-
de placer un collier cervical, M2- de créer une rigidité rachidienne en fixant le rachis cervical,
M3- de réduire l’accès à la cavité buccale en réalisant l’équivalent d’un trismus, M4- de
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diminuer l’espace de la cavité buccale et rétro-basi-linguale en gonflant la langue, et M5- de
réduire le volume pharyngé en créant une voussure pharyngée postérieure.
L’option qui consistait à créer sur le mannequin un laryngospasme (M6) n’a pas été retenue
dans ce travail préliminaire dans la mesure où cette éventualité générait plus souvent des
problèmes ventilatoires que d’accès trachéal.
Les 5 MAR avaient la mission de quotter le CL et le POGO en fonction des moyens utilisés
pour rendre l’intubation trachéale difficile. Lorsque le mannequin d’intubation difficile était
dépourvu des M, l’ensemble des MAR quottaient le CL à 1 et le POGO à 100%. Il était alors
décidé d’adjoindre systématiquement un collier cervical au mannequin nu (Situation 1) avec
pour principaux objectif de simuler des conditions d’intubation en SMUR et de majorer
légèrement la difficulté des conditions d’intubation, même si, dans la position d’intubation
conventionnelle proposée, M1 n’affectait pas le CL (1) ni le POGO (100). Quand M2 était
associé à M1 (Situation 2), les 5 MAR retrouvaient un CL=2A avec un POGO variable proche
de 50 %. Quand M1, M2 et M4 étaient combinés (Situation 3), les 5 MAR décrivaient un CL=
2B avec un POGO=0. Quand M1, M2, M3 et M4 étaient associés (Situation 4), les MAR
décrivaient un CL=3A avec un POGO=0. Quand M1, M2, M3, M4 et M5 étaient appliquées
simultanément (Situation 5), les MAR décrivaient un CL= 3B-4 avec POGO=0. Il était décidé
arbitrairement de ne pas proposer ce dernier modèle (Situation 5) d’accès trachéal difficile
aux participants. La qualification de la difficulté de laryngoscopie évaluée par les MAR était
strictement reproductible pour les Situations 1 à 5.
4- Education des participants Tous les participants avaient déjà réalisé une formation sur mannequin standard à l’intubation
trachéale et avaient déjà réalisé des intubations en SMUR ou au bloc opératoire. Avant de
débuter le protocole de l’étude, les MAR s’assuraient que les participants connaissaient les
outils de mesure de la difficulté de la laryngoscopie en utilisant le CL et le POGO. La
classification des grades de CL (1, 2A, 2B, 3A, 3B, et 4) était rappelée. Des photos
standardisées de POGO variables (0, 10, 25, 50, 75, 90 et 100%) étaient proposées
visuellement aux participants pendant quelques secondes dans un ordre aléatoire, après
lesquelles ils devaient donner (pour chaque photo présentée) la valeur du POGO qu’ils
estimaient avoir observé. Dès lors que cette éducation était finalisée et que les participants
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étaient jugés, par les MAR moniteurs de l’essai clinique, capables de mesurer de manière
fiable le CL et le POGO, l’information sur le déroulement du protocole était apportée.
5- Déroulement du protocole Dans la mesure où les études de simulation qui découleraient de cette sélection des modèles
seraient réalisées dans des conditions de médecine d’urgence, les MAR avaient décidé de
limiter la durée de l’accès trachéal (DAT) à 15 s. Cette DAT permettait dans nos différentes
simulations d’intubation de sécuriser les voies aériennes dans un délai proche de 20 s. La
durée de sécurisation des voies aériennes de 20 s représentait la médiane de la mesure réalisée
dans le laboratoire de simulation quand l’intubation était réalisée par les MAR lors des
Situations 2 et 3. Au-delà de 15 s de tentative, l’essai d’accès trachéal était considéré comme
un échec.
Les participants avaient à leur disposition un laryngoscope de Macintosh standard contrôlé
pour la qualité de l’illumination glottique avec une lame métallique à usage unique de taille 4
comme celle proposée aux MAR moniteurs de l’essai.
La sonde d’intubation (Rüsh, Endotracheal Tube, Teleflex®, France) avait un diamètre
interne de 7.0 mm. Le LMB que nous avons utilisé était le même pour tous les participants
(Frova, Intubating Catheter, Cook®, France). Dès qu’un LMB était anormalement déformé, il
était remplacé par un neuf. Tous étaient remplacés à chaque séance.
Les participants étaient convoqués par groupe de 10 indépendamment de leur qualité : Junior
ou Senior.
La DAT était chronométrée par un des MAR moniteur de l’étude. Le chronomètre était
déclenché dès que l’extrémité de la lame franchissait les arcades dentaires.
L’accès trachéal était considéré comme un succès si l’extrémité distale de SIT ou de LMB
franchissait la sous-glotte observée de manière endoscopique par voie rétrograde (fibroscope
bronchique défalqué et sa colonne vidéo) dans un délai inférieur ou égal à 15 s après le
déclenchement du chronomètre. Au-delà de 15 s de tentative, l’essai était considéré comme un
échec.
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Le choix de l’outil d’accès trachéal (SIT ou LMB) et des Situations (1 à 4) était randomisé
pour les participants selon des listes créées sur le site de l’Université de Tours
(biostat.med.univ-tours.fr) utilisant 6 strates avec 30 sujets. Les participants se voyaient
attribuer un numéro identifiant (1 à 30), puis les différentes strates de randomisation étaient
appliquées et consignées pour chaque participant dans des enveloppes cachetées qui étaient
ouvertes par les MAR qui chronométraient et réalisaient les réglages du mannequin pour les
Situations (1 à 4).
Après chaque tentative d’accès trachéal avec SIT ou LMB, indépendamment du succès ou de
l’échec, les participants devaient énoncer à voix haute le POGO et le CL observés lors de la
tentative d’accès trachéal <15 s.
6- Les Critères de l’étude Le POGO-Seuil était considéré comme le critère principal de jugement. Il était défini pour
chaque participant et pour chaque outil d’accès à la trachée (SIT et LMB) comme le POGO
minimal ayant permis un accès trachéal en moins de 15 s au cours des situations S1 à S4. Les
valeurs moyennes de POGO lors des accès trachéaux réussis en <15 s (POGO-Succès) et le
nombre d’échec pour les Situations S1 à S4 étaient comparées selon que l’intervenant utilisait
la SIT ou le LMB. Les POGO associés à un échec d’accès trachéal <15 s (POGO-Echec) avec
SIT et LMB étaient comparés entre les Séniors et les Juniors.
7- Analyse statistique Nous avons émis l’hypothèse réaliste que lors de l’intubation difficile avec un POGO
inférieur à 100% en laryngoscopie directe, le POGO-Seuil découlait directement du rapport
des diamètres externes de SIT et LMB (en faisant abstraction du caractère béquillé de LMB).
Pour calculer précisément le nombre d’intervenants nécessaires pour valider notre hypothèse,
nous avons calculé pour chaque geste des 5 MAR placés en Situation 2, les rapports
théoriques suivants R (SIT) = hauteur de la glotte du mannequin (25 mm) x POGO Situation 2
(50/100) / Diamètre externe de SIT (9,3 mm). Nous avons réalisé la même procédure en
calculant R (LMB) = hauteur de la glotte du mannequin (25 mm) x POGO Situation 2 /
Diamètre externe de LMB (4,6 mm). Nos calculs retrouvent un R (SIT) moyen égal à 1,3 et
un R (LMB) moyen à 2,7. Pour valider notre hypothèse que le POGO-Seuil de LMB est au
moins deux fois plus élevé que celui de SIT avec un risque alpha de 0,05 et une puissance de
[desarmi.org/]. D
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s (by-‐nc-‐sa).
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0,9, nous avons calculé (http://marne.u707.jussieu.fr/biostatgv/) que nous devions proposer à
30 intervenants d’utiliser SIT ou LMB dans un essai randomisé.
Les POGO-Seuil et POGO-Succès ont été comparés entre SIT et LMB avec un test t de
Student. Un test du Chi² (χ2) avec correction de Bonferroni a été utilisé pour comparer les
performances des Juniors et des Seniors et valider les modèles d’intubation. Un P < 0.05 était
considéré comme significatif.
[desarmi.org/]. D
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III- RÉSULTATS
L’âge et le nombre d’années d’expérience des Séniors étaient de 37 ans et 11 années
respectivement. Les Juniors d’anesthésie ont 26 ans en moyenne, ceux du SMUR 27 ans.
Après s’être familiarisé avec le matériel et le mannequin d’intubation difficile nu, les 30
participants ont tous tenté à 4 reprises d’accéder à la trachée du mannequin en moins de 15
secondes avec SIT ou LMB. Au total, 240 tentatives d’accès trachéal ont été chronométrées.
L’accès trachéal n’était pas réalisé dans les 15 s imparties dans 77 cas, soit 32% des tentatives
d’accès trachéal. Si l’on fait abstraction de la Situation 4, les échecs des Juniors sont deux fois
plus importants que ceux des Séniors. Aucun échec de Sénior n’a été observé avec LMB.
Les POGO déclarés par les participants après chaque tentative d’accès trachéal en moins de
15 s sont présentés dans le Tableau 1.
Tableau 1 : POGO déclarés après chaque tentative d’accès trachéal avec SIT et LMB