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L'étude de la langue au secondaire gabonais : Analyse des exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe dans deux manuels officiels de
1re année du secondaire
Thèse
Sabrina Nkone Ekouaga
Doctorat en didactique
Philosophiæ doctor (Ph. D.)
Québec, Canada
i
L’ÉTUDE DE LA LANGUE AU SECONDAIRE GABONAIS
Analyse des exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le
sujet et le verbe dans deux manuels officiels de 1re année du secondaire
Thèse
Sabrina Nkone Ekouaga
Sous la direction de :
Marie-Andrée Lord
DÉPARTEMENT DES ÉTUDES SUR L’ENSEIGNEMENT ET L’APPRENTISSAGE
FACULTÉ DES ÉTUDES SUPÉRIEURES
UNIVERSITÉ LAVAL
ii
RÉSUMÉ
Les difficultés d’appropriation des connaissances sur la langue chez les élèves
gabonais ont soulevé des interrogations sur les moyens mis en œuvre pour favoriser
l’acquisition leurs connaissances. Ce questionnement a conduit à la nécessité d’analyser, par
le biais d’orientations offertes par la recherche, un corpus d’exercices portant sur la relation
sujet-verbe dans deux manuels scolaires officiels utilisés au 1er cycle du secondaire gabonais.
Pour ce faire, suivant une approche qualitative descriptive à caractère exploratoire, quatre
grilles d’analyse ont été élaborées à partir de quatre concepts : 1) l’exercisation dans l’étude
de la langue et les typologies qui en découlent, 2) les connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles, 3) les connaissances implicites et les connaissances
explicites et 4) la métalangue. Sur les 29 exercices analysés dans les deux manuels, les
résultats montrent que ces derniers exigent un niveau de réflexion élevé et tiennent peu
compte des avantages à exercer les élèves progressivement aux connaissances sur la relation
sujet-verbe. Nous avons également noté une forte prédilection pour des types d’exercices
favorisant moins l’appropriation des connaissances sur la relation sujet-verbe et peu
d’exercices concourant à se rapprocher le plus des situations de production écrite des élèves.
En outre, en considérant l’avantage de tenir compte des connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles ainsi que des connaissances implicites et des connaissances
explicites, les résultats laissent entrevoir de nombreuses irrégularités qui pourraient participer
aux difficultés d’appropriation des connaissances sur la relation sujet-verbe. Enfin, l’analyse
des exercices des manuels a permis de relever que ceux-ci sont partiellement en conformité
avec la métalangue préconisée par les textes officiels mais très souvent en inadéquation avec
les avancées actuelles de la recherche, ce qui pourrait entraver une acquisition efficiente des
connaissances sur la relation sujet-verbe.
Mots-clés : didactique du français, étude de la langue, relation sujet-verbe, typologies
d’exercices, connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles, connaissances
implicites et explicites, métalangue.
iii
ABSTRACT
The difficulties of appropriation of knowledge about the language among Gabonese
students have raised questions about the means used to promote the acquisition of their
knowledge. This questioning has led to the need to analyze, through research guidelines, a
corpus of exercises on the subject-verb relationship in two official textbooks used in
Gabonese high school. To do this, using a descriptive qualitative approach of an exploratory
nature, four analyses grids were developed from four concepts: 1) exercise in the study of
language and the types that result from it, 2) knowledge declarative, procedural and
conditional, 3) implicit knowledge and explicit knowledge, and 4) metalanguage. Of the 29
exercises analyzed in the two textbooks, the results show that the two exercises require a high
level of reflection and take little account of the benefits of gradually exercising students to
knowledge about the subject-verb relationship. We also noted a strong predilection for types
of exercises that promote less ownership of knowledge about the subject-verb relationship
and few exercises that contribute to getting as close as possible to students' written production
situations. In addition, considering the benefit of taking into account declarative, procedural
and conditional knowledge as well as implicit and explicit knowledge, the results suggest
many irregularities that may contribute to the difficulties of appropriation of knowledge on
the subject-verb relationship. Finally, the analysis of the textbook exercises revealed that they
are partially in line with the meta-language recommended by the official texts but very often
inconsistent with current research advances, which could hinder efficient acquisition of
knowledge about the subject-verb relationship.
Keywords: French didactic, language study, subject-verb relationship, exercise typologies,
declarative, procedural and conditional knowledge, implicit and explicit knowledge,
metalingual.
iv
TABLE DES MATIÈRES
RÉSUMÉ ............................................................................................................................................ ii
LISTE DES RÈGLES Liste des règles dans le manuel La Nouvelle Méthode De Français 6e
Règle 1: L'accord du verbe avec son sujet, p.113 ........................................................................ 158
Règle 2: Le sujet inversé, p.113 ................................................................................................... 163
Liste des règles dans le manuel Livre Unique Le Français en 6e Règle 3: rubrique grammaire, "Le sujet", p.34 ............................................................................ 211
Règle 4: L'accord du verbe avec son sujet, p.10 .......................................................................... 229
Règle 5: La phrase et ses constituants, p.14 ................................................................................ 233
LISTE DES FIGURES Figure 1: Typologie des exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le
2010; Nadeau et Fisher, 2006; Nadeau et Fisher., 2011);
Les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles (Fayol et
Largy, 1992; Tardif, 1997, S. Dubois, Mohib, Oget, Schenk, et Sonntag, 2005
; Valiquette, 2008; Chartrand, 2009);
Les connaissances implicites et explicites (Fayol et Got, 1991; Huot et
Schmidt,1996; Perruchet et Nicolas, 1998; Pacton, Perruchet, Fayol et
Cleeremans, 2001; Gasparini, 2004; Nadeau, Matute et Gonzales-Reyes,
2005; Gombert, 2006; Brissaud et Cogis, 2011; Nadeau et Fisher, 2011);
La métalangue (Gombert, 1990; Chartrand, 1998; Grossmann, 1998; Boivin,
2009; Chartrand, Lord et Gauvin, 2010; Chartrand, 2012b; Boivin, 2014; Lord
et Elalouf, 2016).
La convocation de ces quatre concepts a conduit à l’émergence de quatre objectifs
spécifiques de recherche. Ces derniers ont été appréhendés par la construction de quatre
grilles d’analyse subdivisées généralement en sous-grilles, correspondant à chacun des
concepts dégagés. Ces grilles d’analyse nous ont permis d’inscrire et d’établir de façon
unique des éléments que nous avons jugés indispensables pour notre étude.
2 Dans le sens d’exposer, énoncer. 3 Nous expliquons plus largement pourquoi nous parlons de phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe
dans le cadre conceptuel.
4
Initiée à l’été 2014, la présente thèse présente le fruit de cinq années de réflexion dont
voici l’organisation.
Le premier chapitre est consacré à la problématique. Il débute par une mise en
contexte qui permet d’avoir un aperçu de la situation de la langue française au Gabon, suivie
d’une brève description de l’enseignement et de l’apprentissage du français au secondaire
gabonais. Ensuite, nous apportons quelques précisions sur le concept d’étude de la langue.
Puis, nous déclinons l’angle d’analyse du problème pour nous pencher sur l’élément
déclencheur de la recherche. Avant d’exposer l’objectif général de notre recherche, nous
présentons la pertinence et les possibles retombées de l’étude.
Le deuxième chapitre est réservé au cadre conceptuel. Il est subdivisé en trois parties.
La première partie débute par la présentation d’une section qui se penche sur la relation sujet-
verbe. Plus précisément, nous définissons les objets à l’étude et justifions notre choix de
parler de phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe (PMSV). Puis, nous
proposons un aperçu des principaux phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe
(PMSV) généralement enseignés aux élèves de 1re année du secondaire et déclinons quelques
orientations pédagogiques et didactiques permettant d’établir correctement la relation sujet-
verbe. Enfin, nous présentons quelques difficultés liées à l’apprentissage des PMSV. La
deuxième partie du chapitre décline les concepts qui nous ont offert des pistes pour qui se
donne pour objectif de décrire et d’analyser des exercices. La troisième partie du chapitre
précise nos objectifs spécifiques.
Le troisième chapitre détaille nos orientations méthodologiques. Il présente les
caractéristiques de notre recherche, la constitution de notre corpus et la description des
différents instruments d’analyse.
Le quatrième chapitre concerne l’analyse proprement dite des exercices sur les PMSV
dans les deux manuels officiels. Il se compose de deux parties : 1) l’analyse du 1er manuel
La Nouvelle Méthode de français 6e et 2) celle du manuel Le français en 6e. Chaque analyse
débute par une brève présentation du manuel, suivie de l’examen des exercices sur les PMSV
sur la base des quatre outils d’analyse. Enfin, un bilan conclut chacune des sections.
Le cinquième chapitre consiste en l’interprétation des résultats de nos analyses. Il
commence par un rappel de notre objectif général de recherche et de nos objectifs spécifiques.
Ensuite, nous poursuivons par la présentation des tendances qui ont émergé de nos analyses.
5
L’étude s’achève par une conclusion générale. Celle-ci résume les principaux
résultats, expose quelques limites et envisage pour y remédier des pistes pour les recherches
futures. En guise de clôture, nous montrons les apports de cette recherche doctorale et
suggérons des améliorations à apporter aux exercices et à leur utilisation pour une meilleure
appropriation des connaissances sur les PMSV chez les apprenants.
6
CHAPITRE 1 : LA PROBLÉMATIQUE
L’objectif de ce premier chapitre est de justifier l’intérêt de notre sujet de recherche.
Il s’agit de cerner le contexte dans lequel évoluent l’enseignement et l’apprentissage du
français au Gabon et de décrire des aspects liés à son enseignement et à son apprentissage au
secondaire4. Ces deux aspects vont nous permettre de décliner l’angle d’analyse du problème
et d’exposer quelques difficultés liées à l’appropriation des connaissances sur les
phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe (PMSV) chez les apprenants
gabonais. Puis, nous justifions la pertinence de mener notre projet de recherche et les
possibles retombées d’une telle étude. Le chapitre se termine par la présentation de notre
objectif général de recherche.
4 Nous estimons ces détours essentiels pour bien comprendre la pertinence de notre projet de recherche.
7
1.1 La mise en contexte
Ce premier point offre un aperçu des enjeux de la langue française au Gabon et décrit
son enseignement et son apprentissage en contexte gabonais. Cette présentation nous
permettra par la suite de traiter d’un aspect de l’apprentissage et de l’enseignement de la
langue française au Gabon, l’étude de la langue au 1er cycle de l’école secondaire.
1.1.1 Le français au Gabon
Au Gabon, la langue française occupe une place prépondérante tant sur le plan social,
économique que personnel. C’est pourquoi il nous a semblé nécessaire d’exposer les
différents statuts qu’elle occupe dans la société gabonaise, la situation ambiguë
qu’occasionne sa position de langue première ou de langue seconde, la traduction de cette
position dans les perceptions et les attitudes des Gabonais5 à son égard et les insuffisances
constatées dans sa maîtrise.
1.1.1.1 Les statuts du français au Gabon
Comme annoncé, le français joue un rôle primordial au Gabon. Cette importance se
traduit d’abord par son statut de langue officielle. En effet, l’article 1er alinéa 8 de la
Constitution gabonaise stipule que « La République gabonaise adopte le français comme
langue officielle de travail » (Direction des publications officielles, 2015: 5). Ce statut de
langue officielle du français6 est corroboré par divers travaux qui attestent que le français est
l’unique langue du pouvoir politique, financier et économique, ainsi que du pouvoir par
l’écrit (Couvert, 1982; Moussirou-Mouyama, 1984; Moussirou-Mouyama, 1996; Boucher et
Lafage, 2000; Makanga-Mboumba, 2007). Il domine7 également dans les médias
audiovisuels.
L’importance du français se traduit également par son statut de langue véhiculaire.
Manifestement, du fait du plurilinguisme et de l’absence d’une langue gabonaise pouvant
jouer le rôle de langue véhiculaire nationale, l’utilisation du français reste massive
(Moussirou Mouyama, 1996). L’usage du français comme langue de communication
5 L’utilisation du masculin ne constitue pas une forme de discrimination. Elle vise à alléger la lecture du texte. 6 Nous entendons par « français langue officielle » le français normé, la norme correspondant aux règles qui régissent les codes de la langue écrite sans faire de distinction avec le français oral. 7 Il arrive que certaines chaines de radio et de télévision aient recours aux langues gabonaises. Ce type de situations arrive uniquement
lorsque l’État veut transmettre à l’ensemble de la population des communiqués d’une importance particulière (inscriptions sur les listes électorales, campagnes de vaccination, épidémies rares…) touchant l’intérieur du pays.
8
exclusive se manifeste dans les lieux marqués par l’intimité comme au sein de la cellule
familiale, avec les amis et le voisinage ainsi que dans tous les lieux publics (Bagouendi-
Bagère Bonnot, 2007).
L’utilisation massive du français peut s’expliquer enfin par une scolarisation totale en
français, pour la quasi-totalité des jeunes générations (Gabon- L’aménagement linguistique
dans le monde, 2014)8. Effectivement, dans le système scolaire, le français est à la fois la
langue d’enseignement et une discipline scolaire. En utilisant le français comme langue
d’enseignement, l’école gabonaise forme des élèves francophones censés maitriser la langue
française au terme d’une scolarité normale, mais aussi des « francographes » dans le sens où
les Gabonais écriront d’abord en français avant de pouvoir maitriser d’autres types
d’orthographe (Pambou, 2011). En tant que discipline scolaire, le français occupe une place
majeure parmi les disciplines enseignées. Dans l’enseignement secondaire par exemple, le
coefficient en français est particulièrement élevé9. On ne peut prendre une dispense pour cette
matière, comme on le fait pour l’éducation physique et sportive ni la choisir en option comme
c’est le cas pour la plupart des langues étrangères enseignées comme l’italien, l’arabe et
l’allemand.
Ces statuts de la langue française laissent place à une forme de confusion qui rend difficile
de déterminer sa position exacte dans l’espace gabonais. Le point suivant traite de cette
question.
1.1.1.2 Le français au Gabon : langue première ou langue seconde?
Le statut privilégié de la langue française engendre une situation ambiguë sur sa
position. Manifestement, la littérature scientifique10 ne s’accorde pas sur sa place au Gabon.
D’une part, pour certains, le français se présente comme une langue première pour plusieurs
raisons. D’abord, parce que c’est la langue exclusivement utilisée dans le cercle familial
(Moussirou Mouyama, 1984; Bagouendi Badère Bonnot,2007; Koumba-Mouity, 2006). De
plus, parce qu’il représente la langue première pour plusieurs citoyens au Gabon (Bagouendi
8 La population gabonaise, selon l’OIF, se situe à un niveau d’éducation parmi les plus élevés des pays d’Afrique subsaharienne avec un
taux de scolarisation actuel de 90 %. 9 Jusqu’à tout récemment et encore en vigueur dans plusieurs établissements secondaires du pays, avant la réforme des coefficients initiée
par le Ministère de l’Éducation Nationale au secondaire gabonais, les disciplines enseignées, notées de 0 à 20, étaient affectées de
coefficients allant de 1 à 6. Les coefficients les plus élevés étaient attribués aux disciplines scolaires considérées comme les plus importantes. Par exemple, le coefficient pour la discipline français au 1er cycle était de 6, à égalité avec les mathématiques. Dans le second
cycle, et ce, jusqu’à maintenant, le coefficient en français reste élevé même dans les filières scientifiques. 10 Les noms gabonais cités dans cette section sont ceux d’enseignants chercheurs gabonais, spécialisées pour la majorité dans le domaine des sciences du langage.
9
Badère Bonnot, 2007; Boucher et al. 2000 ; Italia, 2011 ; 2014). En plus, selon l’OIF11, de
tous les pays africains francophones, le Gabon est aujourd’hui celui où on parle le plus le
français. La même source estime qu’en 2010, 99 % des habitants s’expriment en français
(lire, écrire et parler). Enfin, l’ancrage du français dans la société gabonaise est tel qu’on le
considère comme une langue gabonaise (Pambou, 2011; Italia, 2011; Ndinga-Koumba-
Binza, 200512). Cet ancrage est notamment marqué par un phénomène d’appropriation ou de
« vernacularisation » (Italia, 2011 :63) qui donne à la langue française une
coloration gabonaise (Pambou, 2011). Cette dernière s’opère au moyen de phénomènes
linguistiques divers : des emprunts aux langues gabonaises ou langues africaines « kala-
kala »13 ou « matitis »14, des calques comme « laver le corps » (séance de purification au
cours de laquelle le guérisseur donne au patient un bain de feuilles et d’écorces d’arbre
(jeter un sort à quelqu’un), des abrègements (« asso » pour « associé », synonyme de
personne préférée), des antonomases « Mackjoss15 » pour une espèce de sandale, etc.
D’autre part, les instructions officielles pour l’enseignement et l’apprentissage du
français au secondaire gabonais, ainsi que certains auteurs, estiment que la langue française
devrait être considérée également comme une langue seconde au Gabon. En fait, dans la
Constitution gabonaise, il est fait mention de la nécessité de veiller à « la promotion des
langues nationales » (Direction des publications officielles, 2015: 5). Dès lors, la suggestion
est faite que le français ne devrait être perçu ni comme une langue nationale ni comme une
langue première. Dans le même ordre d’idées, les directives pour l’étude du français au
secondaire rappellent que l’enseignant « n’a pas à faire comme si ses élèves savaient le
français » et « ne doit jamais perdre de vue que le français n’est pas la langue maternelle de
la majorité des élèves » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 2). Par ailleurs, Pambou16
(2011) estime que le français peut être considéré comme une langue seconde dans la mesure
11 Organisation internationale de la francophonie. Données recueillies dans le magazine Jeune Afrique du 06/11/2014. 12Docteur en langues africaines (Stellenbosch) spécialisé en phonétique et phonologie. Il a enseigné dans quelques
universités, notamment l'Université Stellenbosch (Afrique du Sud), l'Université Omar Bongo (Libreville, Gabon) et
l'Université du Nord-Ouest (Potchefstroom Campus, Afrique du Sud). En tant que membre du département de
l'enseignement des langues à l'Université du Cap-Occidental, il est responsable du cours de linguistique éducative (ELD) et
coordinateur des études de troisième cycle. 13 « kala-kala » signifie dans la langue yipunu, une langue gabonaise, « depuis très longtemps ». 14 « matitis » est empruntée au lingala, langue parlée sur les deux rives du fleuve Congo. Il désigne les bidonvilles. 15 Chanteur gabonais. 16 Docteur en sciences du langage de l’Université Aix-Marseille. Il est enseignant chercheur gabonais à l’École Normale Supérieure de Libreville (Gabon), spécialisé dans le domaine de la sociolinguistique et de la didactique du français langue seconde.
10
où « les pays d’Afrique francophones sont généralement placés dans l’espace français langue
seconde » (Pambou, 2011 : 21). En outre, il rappelle que le français est d’abord la langue du
colonisateur français et que, par conséquent, on peut dire qu’elle n’est pas la langue première
des Gabonais. Il soulève également le fait que la langue est considérée comme le véhicule
privilégié de la culture d’un pays. Or, dans certaines situations (mariages traditionnels, rites
pour les défunts, Mvett,17 etc.), lorsque les langues gabonaises sont traduites en français, elles
perdent de leur authenticité et de leur valeur.
Il semble donc difficile de définir la position exacte de la langue française au Gabon.
L’avis de Pambou (1998) à ce sujet nous semble plus approprié. En effet, il propose de parler
de position tripartite du français. Selon lui, « le français pratiqué au Gabon ne présente pas
une caractéristique unique. Ainsi, il est langue seconde pour les uns, langue étrangère pour
les autres et langue de première acquisition pour d’autres encore » (Pambou, 1998 : 147). Il
est tout de même opportun de noter une diglossie18 entre le français, considérée comme une
langue supérieure, et les langues gabonaises qui, quoique maternelles, ne possèdent aucun
statut juridique véritable. D’ailleurs, cette forme de hiérarchisation entre les langues
maternelles et la langue française se manifeste jusque dans les attitudes et les perceptions des
Gabonais. Pour ces derniers, la langue française s’apparente de toute évidence à une langue
à privilégier et à maitriser comme nous allons le montrer dans le point suivant.
1.1.1.3 Les attitudes et les perceptions par rapport à la langue française
Les recherches sur les perceptions et les attitudes des Gabonais à l’égard du français
sont peu nombreuses. Toutefois, dans leurs travaux, certains auteurs (Bagouendi-Bagère
Bonnot, 2007; Matari et Quentin de Mongaryas, 2011a) relèvent le fait que chez de nombreux
Gabonais, la maitrise de la langue française garantit un épanouissement certain dans plusieurs
domaines.
Pour les jeunes comme pour les adultes, le français sert avant tout à communiquer
sur le plan national du fait de l’absence d’une langue nationale commune à tous les Gabonais
et du plurilinguisme qui caractérise le Gabon sur le plan linguistique. Il sert également à
assurer le maintien de la communication avec l’international. En outre, le degré de maitrise
17 Le mvett ou mvet désigne un instrument de musique à cordes connu depuis l’ancienne Égypte, et avec la majuscule, un ensemble de récits guerriers qui se jouent accompagnés de cet instrument, formant la culture fang (groupe ethnique majoritaire au Gabon). 18 La diglossie désigne la situation de deux formes linguistiques situées dans un rapport hiérarchique. On parle généralement d’une variété
haute et d’une variété basse. La diglossie peut se concevoir entre deux langues distinctes. Dans ce cas, les deux langues occupent des places sociolinguistiques opposées : l’une inférieure et l’autre supérieure.
11
du français est généralement considéré comme un des critères les plus importants pour juger
de la compétence d’un individu et de son aptitude à occuper un poste professionnel élevé.
Beaucoup estiment en effet que le français joue un rôle social et instrumental dans la société
gabonaise comme l’attestent les propos de cet enseignant de français :
« (…) un candidat de baccalauréat19 aujourd’hui, une fois son parchemin obtenu,
s’il n’arrive pas à rédiger correctement sans faute une demande d’emploi (…)
aura des difficultés à être embauché (…), c’est dire que l’insertion dans le monde
professionnel aujourd’hui en milieu francophone dépend de plus en plus de la
maitrise du français. » (Matari et al., 2011a :156).
Cette perception du français va de pair avec le jugement sur la valeur intellectuelle d’un
individu en fonction de sa connaissance et de sa maitrise du français. Sur ce point,
Bagouendi-Bagère Bonnot (2007) explique qu’au Gabon, « le français est une langue
discriminante à cause des efforts à fournir pour sa connaissance. L’inégalité qui en découle
est une menace pour le statut social de l’individu » (Bagouendi-Bagère Bonnot, 2007 : 210).
Dès lors, le français apparait également comme l’accès au bien-être social (réel ou
supposé). Il efface les inégalités sociales et fait oublier l’appartenance ethnique en mettant
tous les locuteurs gabonais sur un pied d’égalité. En outre, il est considéré comme un moyen
indispensable dans l’acquisition des connaissances (Bagouendi-Bagère Bonnot, 2007; Ovono
Obame, 2014). À l’évidence, c’est par lui que les élèves apprennent et comprennent les autres
disciplines scolaires tout comme il leur permet d’avoir une maitrise orale et écrite de la langue
de communication en favorisant la compréhension des outils syntaxiques et orthographiques
utiles au maniement de la langue durant toute la scolarité (Matari et al., 2011a).
Si l’utilisation du français et sa maitrise dans la société gabonaise semblent participer au
développement de l’individu aux niveaux personnel et social, des travaux laissent entrevoir
néanmoins des distorsions et des défaillances dans son utilisation.
1.1.1.4 Des difficultés dans la maitrise du français
La maitrise du français écrit et parlé est marquée par des insuffisances dans tous les
ordres d’enseignement (primaire, secondaire, universitaire) et s’étend hors de la dimension
scolaire. En 2003, Tabi Manga20, en parlant de l’appropriation du français en Afrique
19 Diplôme sanctionnant la fin d’études dans l’enseignement secondaire au lycée. 20 Professeur, recteur de l’Université de Yaoundé I (Cameroun).
12
subsaharienne lors des États généraux de l’enseignement du français, organisés à Libreville21
déplorait « le décalage qui existe entre le français de l’école et le français tel qu’il est pratiqué
quotidiennement par les citoyens » (Organisation internationale de la francophonie, 2003:
53). De même, De Sève (2008) constate qu’« en Afrique francophone, malgré les efforts
fournis, l’enseignement du français souffre de lacunes certaines comme l’absence de maitrise
de celui-ci par les enseignants eux-mêmes » (De Sève, 2008 :10). Concernant le Gabon en
particulier, il semble que peu d’études aient traité spécifiquement de la qualité du français
parlé et écrit au Gabon au regard des investigations menées. Toutefois, quelques travaux nous
ont permis de relever différentes distorsions témoignant de difficultés de plusieurs Gabonais
à maitriser la langue française écrite et parlée tant sur les plans syntaxique, morphologique,
lexical, sémantique que phonologique. En voici quelques-uns.
L’étude de Mitchell (2004) est une enquête effectuée auprès de Librevillois issus des trois
ethnies majoritaires au Gabon (Fang, Punu et Nzébi). L’échantillon se compose d’élèves de
6e (première année secondaire, élèves âgés entre 10 et 13 ans), de terminale (dernière année
secondaire, élèves entre 17 et 19 ans) et d’adultes ayant achevé leurs études supérieures. Un
des objectifs de l’enquête consiste à interroger la perception d’un français gabonais à l’égard
de la norme standard. À la lecture des résultats, les élèves perçoivent leur français comme le
plus proche de la norme standard. Une telle perception pourrait justifier le fait que beaucoup
d’entre eux maitrisent difficilement la frontière qui sépare le français gabonais de la langue
enseignée à l’école, au point où ces incursions sont souvent décelables dans leurs travaux
scolaires comme le note le conseiller pédagogique Ovono-Obame (2014). Chez les adultes,
les plus scolarisés admettent l’existence d’une variété endogène. Ils estiment que l’influence
de la langue locale sur le français « affecte la syntaxe aussi bien que le vocabulaire même
chez les personnes instruites » (Mitchell, 2004 :181). Cette influence des langues locales sur
le français est également confirmée par d’autres travaux effectués par Minko (2008) et de
Medjo-Mve22 (2009). En effet, selon eux, le français parlé au Gabon évolue à tous les niveaux
de sa structure linguistique (prononciation, syntaxe, lexique et sémantique) sous l’influence
des langues.
21 Capitale du Gabon. 22 Enseignants universitaires gabonais.
13
La thèse d’Italia (2011) vérifie la validité de la corrélation établie entre le niveau de
scolarisation et la compétence langagière en français au Gabon sur des locuteurs bisalectaux
et des locuteurs mésolectaux. L’auteure rejette la pertinence de la classification rigide de la
tripartition sociolinguistique des locuteurs23 admise par d’autres chercheurs - Couvert (1982),
Boucher et al. (2000), Bagouendi Badère Bonnot (2007) - qu’elle remplace par celui
de continuum. Les résultats de son étude démontrent que la scolarisation ne constitue pas un
rempart à l’intrusion de la variation du verbe (objet d’études de son analyse) du point de vue
morphologique et syntaxique chez les deux groupes d’enquêtés. Le seul critère de
différenciation est le degré de fréquence d’apparition des phénomènes de variations. Sur ce
plan, « le niveau de scolarisation devient pertinent : plus le locuteur a été scolarisé, moins la
variation est présente. » (Italia, 2011 : 484).
Dans un contexte strictement scolaire, l’étude réalisée par le Programme d’Analyse
des Systèmes Éducatifs de la CONFEMEN24 (PASEC, 2008), dont le but est de comparer les
performances des élèves gabonais du primaire en mathématiques et en français avec ceux
d’autres pays d’Afrique francophones vient confirmer la présence de difficultés dans la
maitrise du français écrit. L’investigation révèle que les résultats des élèves gabonais sont
moyens et souligne la présence de lacunes dans le processus d’apprentissage. Une deuxième
étude comparative, celle de Koumba-Mouity (2006), se penche sur l’orthographe d’enfants
gabonais entrés en classe de 1re année du secondaire, dont la langue ou les langues
maternelles sont différentes de la langue française enseignée à l’école (monolingues gabonais
en yipunu25). Le travail réalisé compare le rapport à la langue française standard à partir de
la compétence en dictée en français entre les bilingues gabonais urbains et les monolingues
gabonais en yipunu. La dictée proposée est celle passée en France une première fois en 1873
sous l’égide de l’inspecteur Beauvain puis en 1987 sous la direction de Chervel et Manesse,
chercheurs à l’Institut National de Recherche Pédagogique. L’étude montre que les résultats
en orthographe des deux groupes sont faibles. En outre, parmi les types d’erreurs commises
regroupés en catégories (lexicale, syntaxique, sémantique et phonologique), les erreurs de
syntaxe sont classées les plus nombreuses avec les erreurs lexicales.
23 Cette tripartition recense trois grandes catégories d’utilisateurs du français : les bisalectaux (locuteurs peu ou non scolarisés), les
mésolectaux (locuteurs de niveau collège ou lycée) et les acrolectaux (diplômés de l’enseignement supérieur). 24 CONFEMEN : Conférence des Ministres de l’Éducation nationale des États et gouvernements de la Francophonie. 25 Langue du Sud du Gabon.
14
Les problèmes liés à la maitrise de la langue française perdurent jusqu’à l’université,
haut de la pyramide dans le système scolaire. Ambourhouet-Bigmann (2014), enseignant à
l’université, dans son ouvrage intitulé « Le tableau noir des grands enfants de la
République », relève de nombreuses incorrections et incongruités dans plus de 300 extraits
de copies d’étudiants de 1re et de 2e année universitaire inscrits en Littérature Africaine ainsi
que dans celles d’étudiants de 3e année de Licence et de 1re année de Master. L’auteur
explique que :
« Le nombre élevé d’étudiants en situation d’échec dans ce Département
s’expliquerait aussi par la spécificité du Département. On y fait avant tout de la
littérature…celle qui renvoie au maniement de la langue écrite surtout, c’est-à-
dire la maitrise de l’écriture. Et à l’instar de toutes les structures se proposant
d’enseigner la littérature, celle-ci ne peut occulter les codes et savoirs relevant de
l’écriture. En d’autres termes, l’étudiant qui ignore tout des RÈGLES
ÉLÉMENTAIRES de la grammaire et de la syntaxe ne pourra se faire
« comprendre » par son évaluateur. Un évaluateur qui généralement ne peut
même pas « se consoler », sur la forme et la qualité de la langue, tous deux
Pour résumer, il apparait indéniable que la langue française occupe une position
indispensable dans l’épanouissement des populations gabonaises. Cependant, malgré son
statut de langue seconde particulièrement privilégiée, force est de constater que de
nombreuses difficultés liées à sa maîtrise se perçoivent dans la société et avec acuité dans
tous les ordres d’enseignement au point d’entacher les avantages qu’elle pourrait apporter
aux Gabonais sur les plans social, économique et personnel. Quoique son utilisation soit
omniprésente dans tous les aspects de la vie des populations gabonaises, il demeure que chez
les adultes instruits ou non, comme chez les élèves, la qualité du français laisse à désirer et
se caractérise par divers écueils. Or, comme évoqué plus haut, l’apprentissage du français
commence de façon formelle dans le système scolaire. Dès lors, les constats relevés nous
15
invitent à examiner les moyens mis en œuvre pour son acquisition dans ce domaine. C’est là
tout l’enjeu de notre projet de recherche. En fait, comme le soulignent plusieurs auteurs, il
est essentiel pour les apprenants d’atteindre un niveau de littéracie26 élevé au regard du
développement économique et technologique qui caractérise le XXe et le XXIe siècle et de
veiller à rehausser les exigences en matière de compétence en écriture pour s’épanouir tant
professionnellement qu’individuellement (Deschênes, 1988; Jaffré, 2004; Lord, 2012). Nous
voulons donc, à travers cette étude, tenter de comprendre les raisons qui expliquent cette
difficulté des Gabonais à s’approprier de façon pérenne et effective la langue française en
examinant la part de responsabilité du système éducatif gabonais à travers l’enseignement et
l’apprentissage du français au secondaire.
Notre intérêt pour cet ordre d’enseignement émane d’une raison subjective - notre
expérience professionnelle d’enseignante de français au collège et au lycée - et d’une raison
objective- les difficultés constatées dans la maitrise du français. Toutefois, ne pouvant
examiner les deux cycles qui composent le secondaire gabonais pour des raisons évidentes
de contraintes que confère la rédaction d’un projet doctoral, mais aussi parce que
l’enseignement et l’apprentissage du français commencent au 1er cycle secondaire, nous
avons choisi de restreindre notre recherche aux premières années de cet ordre d’enseignement
et d’apprentissage. Avant d’entrer dans l’analyse de l’une des causes possibles des carences
constatées dans la maitrise du français, il nous a semblé opportun, pour mieux cerner les
enjeux et le contexte de notre étude, de décrire brièvement l’enseignement et l’apprentissage
du français au secondaire gabonais et en particulier celui du 1er cycle secondaire.
1.1.2 L’enseignement et l’apprentissage du français au secondaire gabonais
Ce deuxième point vise à décrire, succinctement, l’enseignement et l’apprentissage du
français au secondaire gabonais et en particulier au 1er cycle. Nous présentons d’abord
l’organisation de l’enseignement et de l’apprentissage du français au secondaire gabonais.
Puis, nous montrons à travers des travaux menés par des chercheurs gabonais que cet
enseignement et cet apprentissage sont en proie à une crise dans plusieurs de ses domaines
de compétence. De cet état de lieux, nous pointons l’importance de nous interroger sur
l’enseignement et l’apprentissage du français au 1er cycle de l’école secondaire.
26 La litéracie ou littératie désigne la socialisation à l'écrit et l'acquisition des connaissances et le développement de compétences variées
en matière de lecture et d'écriture (Jaffré, 2004).
16
1.1.2.1 L’organisation de l’enseignement du français au secondaire gabonais
Le secondaire gabonais dure sept ans. Il se subdivise en deux cycles : le 1er cycle (le
collège) et le second cycle (le lycée). Le collège compte quatre années d’études et est
sanctionné par un examen national, le Brevet d’Études du Premier Cycle (B.E.P.C). Le lycée
dure trois ans et se termine aussi par un examen national, le Baccalauréat de l’enseignement
au secondaire.
Au 1er cycle, l’enseignement du français est subdivisé en quatre sous-disciplines : la
lecture, l’expression écrite, l’expression orale et l’étude de la langue. L’étude de la langue
est elle-même décomposée en quatre rubriques que sont la grammaire, l’orthographe
(lexicale et grammaticale), la conjugaison et le vocabulaire. La répartition du volume horaire
hebdomadaire attribué à chacune des sous-disciplines dépend du programme,
particulièrement chargé dans l’enseignement et l’apprentissage de l’étude de la langue. En
fait, sur les six heures hebdomadaires attribuées à l’enseignement et à l’apprentissage du
français, les instructions officielles suggèrent d’accorder une (1) heure pour la lecture, une
(1) heure pour l’expression écrite, une (1) heure pour l’expression orale et trois (3) heures
pour l’étude de la langue. Sur les quatre classes constituant le 1er cycle, les deux premières
années secondaires (6e et 5e) sont considérées comme des classes d’initiation tandis que
durant les deux dernières années de ce cycle (4e et 3e), les élèves vont apprendre à
perfectionner leur connaissance du français afin de préparer leur entrée dans la vie active ou
poursuivre leurs études dans le second cycle (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995;
Ministère de l'Éducation Nationale, 2015). Dans tous les cas, à l’issue de la 3e, donc de la
dernière année du 1er cycle du secondaire, les élèves devraient posséder une maitrise du
français et des attitudes réflexives leur permettant la poursuite de leurs études ou
l’apprentissage d’un métier.
Le second cycle ou le lycée est défini comme étant un « cycle de détermination »
(Ministère de l'Éducation Nationale , 2015: 8). L’enseignement du français s’y organise
autour de trois activités. La première est désignée sous l’appellation d’exercices littéraires.
Elle est consacrée à la préparation aux trois épreuves de français proposées au baccalauréat :
l’étude du texte argumentatif, le commentaire composé et la dissertation ou l’essai littéraire.
L’enseignement et l’apprentissage de cette activité se déclinent tout au long du second cycle.
17
Elle va de l’initiation en classe de seconde27, au renforcement en classe de première28
jusqu’à la révision en classe de terminale29 (Koumba-Mouity, 2006; Ministère de l’Éducation
Nationale, 1997). La deuxième activité, l’étude d’œuvres intégrales ou de groupements de
textes30, entraîne les élèves à l’examen méthodique des œuvres au programme ou de
groupements de textes (Koumba-Mouity, 2006; Ministère de l’Éducation Nationale, 1997).
Enfin, la troisième activité, la pratique raisonnée de la langue, consiste principalement en
un rappel des points de langue particulièrement sollicités dans les épreuves de français au
baccalauréat. L’objectif est de consolider les acquis du premier cycle par un affinement de
connaissances linguistiques et grammaticales.
En conclusion, les habiletés attendues des élèves se développent de façon progressive au
secondaire gabonais. L’enseignement au collège sert de courroie de transmission entre les
bases élémentaires acquises à l’école primaire et leur mise en pratique plus effective au lycée.
Le premier cycle, notamment les deux premières années du secondaire31, se présente comme
le lieu principal d’acquisition des grandes compétences nécessaires pour la connaissance de
la langue ainsi que pour toutes les disciplines et même au-delà, pour la vie active. Cependant,
des recherches montrent que l’enseignement et l’apprentissage du français au secondaire
gabonais sont traversés par des difficultés dans plusieurs des sous-disciplines qui la
constituent, et ce, aussi bien au premier cycle qu’au second. Le point suivant fait l’objet de
la présentation de cet enseignement et de cet apprentissage du français au secondaire traversé
par divers obstacles.
1.1.2.2 Un enseignement et un apprentissage du français en crise
De l’avis de plusieurs chercheurs gabonais, l’école gabonaise est marquée par un grand
nombre d’élèves en situation d’échec (Ognaligui, 1999; Akoué, 2007; Demba, 2010; Nguema
Endamane, 2011; Matari et Quentin de Mongaryas, 2011b; Immongault, 2014). Les résultats
des examens nationaux du secondaire montrent que les notes obtenues en français pourraient
expliquer pour une grande part la faiblesse des résultats généraux (Nguimbi, 2009;
27 1re année du second cycle. 28 2e année du second cycle. 29 3e et dernière année du second cycle. 30 Les enseignants de français sont libres de choisir les œuvres à étudier sous certaines conditions : 1) Les œuvres appartiennent à la liste des œuvres validées par l’Institut Pédagogique National, 2) les œuvres doivent être de genres différents (roman, recueil de poèmes, pièce
de théâtre), 3) Les enseignants doivent choisir une œuvre gabonaise, une œuvre française et une œuvre d’une autre origine. Il en est de
même pour les groupements de textes. Chaque enseignant est libre de choisir une thématique en particulier pourvu que celle-ci soit conforme à l’éthique et aux prescriptions émises par les textes officiels. 31 Élèves dont la moyenne d’âge varie entre 10 et 12 ans.
18
Ambourhouet-Bigmann, 2014). Selon Nguimbi (2009), « de 2003 à 2007, sur une échelle
d’évaluation de vingt (20) points, la moyenne nationale en français tourne autour de 7/20 »
(Nguimbi, 2009 : 20). Si l’on en juge les statistiques des années suivantes, cette moyenne n’a
pas connu de remontée significative. Celles-ci indiquent que seulement 14,81 % des
candidats au baccalauréat 2017 ont obtenu leur diplôme de baccalauréat d’office32. En 2014,
sur un total de 34 599 candidats, seuls 17,93 %, soit 6204 candidats, ont été admis au Brevet
d’études du premier cycle33 contre 25 173 candidats sur 35 985, soit 69,95 % en 201734. Selon
certains analystes, cette remontée spectaculaire des résultats au B.E.P.C entre 2014 et 2017
est à relativiser dans la mesure où elle reste consécutive à l’application de nouvelles réformes
instaurées dès l’année 2014 qui intègrent le passage à un second tour où les candidats peuvent
choisir une épreuve écrite supplémentaire entre les mathématiques, le français et les sciences
de la vie et de la terre. Même si le site officiel de la Direction Générale des Examens et
Concours (DGEC) ne fournit aucune donnée sur la moyenne obtenue en français aux
examens nationaux durant les années suivantes, les résultats généraux pourraient accréditer
les propos de Nguimbi (2009) sur les notes obtenues en français quand on sait que cette
discipline, avec les mathématiques, est celle qui dispose du coefficient le plus élevé dans les
deux cycles au secondaire gabonais ou dans les différentes séries composant le second cycle
secondaire.
Dans tous les cas, la littérature recensée indique que plusieurs facteurs peuvent expliquer
cette situation d’échec dans l’enseignement et l’apprentissage du français (faible implication
des parents, grèves illimitées et à répétition, classes pléthoriques, absence de matériel
didactique, formation insuffisante des enseignants, etc.). Pour des raisons pratiques, nous
nous intéresserons uniquement aux travaux qui interrogent la responsabilité de
l’enseignement et de l’apprentissage du français dans l’échec général constaté.
Dans l’enseignement et l’apprentissage littéraire, nous avons recensé deux travaux qui
font état de raisons qui pourraient expliquer le faible rendement en français chez les
apprenants gabonais. Le premier est celui de Nguimbi (2009) qui, pour élucider les raisons
du faible rendement des élèves lycéens gabonais dans l’enseignement des textes littéraires,
explore les déclarations et les pratiques d’enseignants de français. Son étude examine leurs
32 Statistiques publiées par le quotidien national L’Union du 02 août 2017. 33 Statistiques publiées par le quotidien en ligne Gabon Review du 08 août 2014. 34 Statistiques publiées par le quotidien national L’Union du10 août 2017.
19
conceptions de la littérature et de son enseignement ainsi que la façon dont ces conceptions
influencent leurs pratiques en classe. Les résultats de son étude établissent que les
enseignants de français ont une conception philologique35 de la littérature et de son
enseignement. Cette tradition serait en partie responsable des échecs des expériences
d’apprentissage des textes littéraires constatés chez les lycéens gabonais. La deuxième étude
est celle de Sima Ndong (2012). Ce dernier analyse l’influence du rapport à la culture des
enseignants de français sur leurs pratiques d’enseignement des textes littéraires et sur la
formation culturelle des élèves gabonais. Ses résultats ont permis de relever diverses tensions
dans le discours des enseignants dont une sur la médiation des connaissances. En effet, son
travail révèle que les enseignants déclarent développer la réflexivité des élèves alors que leurs
pratiques montrent que plusieurs parmi eux semblent souvent imposer leurs points de vue en
favorisant peu l’activité réflexive des élèves à l’égard des savoirs.
Dans l’enseignement et l’apprentissage de l’orthographe, Nze Waghe (2011) constate que
les élèves éprouvent des difficultés à orthographier correctement les mots. Dès lors, sa thèse
s’est donnée pour ambition de repérer et de présenter une typologie des différentes erreurs
d’orthographe commises par les élèves gabonais du 1er cycle dans leurs écrits. Il ressort de
son étude que « la zone morphogrammique, notamment la grammaire, reste celle qui serait
la moins bien maitrisée par les jeunes scripteurs gabonais » (p. ii).
Les thèses de Pambou (2011) et d’Italia (2011), bien qu’elles soient d’orientation
linguistique, attestent de cette difficulté des élèves à maîtriser certains savoirs sur la langue.
Pambou (2011) s’est penché exclusivement sur les constructions prépositionnelles des
apprenants gabonais. Son étude a permis de caractériser ces constructions prépositionnelles
et de suggérer quelques explications face aux écarts constatés, notamment la non-maîtrise
des constructions verbales du fait de confusions entre les catégories grammaticales. Quant à
Italia (2011), elle observe dans le français parlé par les locuteurs scolarisés un phénomène
récurrent, celui de la présence quasi systématique du pronom personnel sujet en plus de la
séquence lexicale. Par exemple, elle constate que les enquêtés prononcent « Les enfants
[ipar]36 en brousse » (Les enfants ils partent/il part en brousse en lieu et place de Les enfants
partent en brousse*) (Italia, 2011: 231). Le genre apparait également problématique, car [il]
35 Relatif à la philologie. Qui renvoie en l’étude d’une langue et de sa littérature à partir de documents écrits. 36 Les modifications ont été transcrites en phonétique par l’auteure de la thèse pour éviter toute interprétation arbitraire et
hasardeuse.
20
peut reprendre une séquence lexicale au féminin comme « ma tante [il vjC] de [murir] à
Bitam37» (Ma mère il vient de mourir à Bitam au lieu de Ma mère, elle vient de mourir à
Bitam*). Enfin, l’étude démontre l’occurrence du genre en concurrence avec le pronom
personnel sujet féminin elle « une femme - à l’âge de trente quarante ans - elle [na] jamais
[dOne] l’enfant depuis sa naissance ».
Au total, nous pouvons retenir que le processus d’acquisition des habiletés dans la classe
de français est entravé par un certain nombre de difficultés. Les études recensées mettent en
lumière les obstacles liés à l’enseignement et à l’apprentissage des textes littéraires et à celui
de l’enseignement et de l’apprentissage de l’orthographe. Un des aspects que nous relevons
particulièrement est la part de responsabilité de points sur la langue dans ces distorsions. Or,
c’est au collège que s’acquièrent les outils essentiels à la maitrise de la langue ainsi que le
développement de l’esprit d’analyse indispensable au second cycle. Pourtant, la consultation
de la littérature scientifique nous a permis de nous rendre compte que les questions liées à
l’enseignement et à l’apprentissage de la langue demeurent le parent pauvre des recherches
sur l’enseignement et l’apprentissage du français au Gabon. C’est en raison de cette pénurie
et des difficultés évoquées que notre recherche souhaite rendre compte de cette sous-
discipline de l’enseignement et de l’apprentissage du français au 1er cycle gabonais qu’est
l’étude de la langue.
1.1.3 Quelques précisions sur le concept d’étude de la langue et le terme
grammaire
Avant de présenter en quoi consiste l’étude de la langue au 1er cycle gabonais et dans le
souci de mieux comprendre notre objet d’études pour en cerner la particularité, il nous a
semblé essentiel de préciser le sens de cette notion. En fait, selon les contextes, l’étude de la
langue peut renvoyer à ce que certains systèmes éducatifs assimilent à la grammaire. Or, la
grammaire renvoie à une des rubriques de l’étude de la langue dans le système éducatif
gabonais comme nous le verrons ultérieurement. Dans ce point, nous présentons les
différentes acceptions attestées du terme grammaire. Puis, nous précisons ce que nous
entendons par grammaire dans le système éducatif gabonais. Nous terminons cette partie en
présentant ce que désigne pour nous l’étude de la langue.
37 Bitam est une ville de la province septentrionale du Gabon.
21
1.1.3.1 La polysémie du terme grammaire
Le mot grammaire est fortement polysémique (Galisson et Coste, 1976;Combettes et
Lagarde, 1982; Legendre, 2005; Chartrand, 2012a). Combettes et al. (1982) en ont regroupé
les différents sens attestés sous sept rubriques.
Le terme grammaire peut désigner l’organisation interne d’une langue (sens 1). Du
point de vue du locuteur, elle pourrait se définir comme « le savoir linguistique qu’il possède
intuitivement sur la langue maternelle » (Combettes et al., 1982 : 14). Selon les auteurs, la
capacité d’un locuteur de produire et de comprendre des énoncés nouveaux ne serait possible
si la langue ne possédait pas une grammaire. La grammaire renvoie également à une
« discipline scientifique dont l’objet est l’étude des langues (…), de leur histoire (…) ou de
leur structure (…) » (Combettes et al., 1982 : 15) (sens 2). La 3e acception que fournissent
Combettes et Lagarde (1982) sur le mot grammaire est qu’elle peut être considérée comme
une branche de la linguistique (sens 3). Cette conception, beaucoup plus courante selon les
auteurs, consiste à limiter le champ de la grammaire à la morphosyntaxe, excluant la
lexicologie et la phonologie. Les auteurs justifient ces exclusions en affirmant que la
grammaire a pour objet les faits de langage en général et qu’elle s’appuie sur des unités
distinctes tandis que la lexicologie s’intéresse à des faits de langage particuliers et la
phonologie s’occupe des unités distinctives. Dans le cadre de la grammaire générative
transformationnelle38, le mot grammaire a un sens technique précis. Il renvoie à un
« ensemble de symboles reliés entre eux par un ensemble ordonné de règles » (Combettes et
al., 1982 :18) (sens 4). « Ce modèle représente une construction hypothétique susceptible de
rendre compte de la structuration de la langue. Il représente un mécanisme fini, c’est-à-dire
un ensemble de symboles limité, capable d’engendrer un ensemble infini de phrases » (Lord,
2012 :46). La grammaire se définit aussi comme « l’art d’écrire et de parler correctement »
(Combettes et al., 1982 :18) (sens 5). Ainsi entendue, la grammaire désigne une discipline
qui a pour objet de définir le maniement correct de la langue et l’ensemble des règles
déterminant le bon usage. Un autre sens attesté du mot grammaire est qu’elle renvoie aussi
à l’enseignement de la langue et à une activité scolaire (sens 6). Pour les enseignants, elle
englobe l’apprentissage de la morphologie, l’appropriation des règles syntaxiques avec leurs
38 La grammaire générative et transformationnelle est une théorie linguistique s’inscrivant dans le courant de la linguistique
générative. Majoritairement présente en Amérique du Nord, elle s’est développée depuis 1957 sous l’impulsion de Noam
Chomsky. Cette théorie tente de caractériser la connaissance de la langue qui permet l'acte effectif du locuteur-auditeur.
22
implications sur l’orthographe, l’acquisition d’une métalangue, les exercices d’analyse et
d’étiquetage, les manipulations linguistiques, la production de discours écrits et le travail sur
le vocabulaire. Enfin, la grammaire représente un produit manufacturé et commercialisé
(Combettes et al., 1982 : p. 47). Il correspond alors à un livre, un traité ou un manuel scolaire
(sens7).
Aux sept acceptions de Combettes et al. (1982), on retrouve celles, plus récentes, de
quelques didacticiens. Selon Cogis (2005), Nadeau et al. (2006), le terme grammaire est
souvent associé à celui d’orthographe. En effet, les liens entre la grammaire et l’orthographe
sont si forts que les territoires de l’une sont souvent confondus avec les territoires de l’autre.
Cogis (2005) affirme qu’elle « tend à prendre une valeur générique dans les nouveaux
programmes de l’école, en intégrant syntaxe, morphosyntaxe, morphologie, conjugaison
orthographe, vocabulaire » (Cogis, 2005 : 326). Aussi, grâce à ces liens, prendre en
considération les représentations orthographiques est, en plus d’une progression des élèves
en orthographe, une chance pour les acquisitions grammaticales. La grammaire peut enfin se
définir comme la description des phénomènes de la langue normée et régulée (Chartrand et
Lord 2013). Envisagées ainsi, la syntaxe, la morphologie, l’orthographe grammaticale, la
combinatoire lexicale, la ponctuation dans sa fonction syntaxique et les anaphores font partie
de la grammaire (Chartrand, 2012a).
1.1.3.2 L’étude de la langue au Gabon
Notre projet de recherche étant destiné à être lu par des lecteurs appartenant à
différents systèmes éducatifs, nous préférons, pour éviter toute confusion, choisir la notion
d’étude de la langue en lieu et place du terme grammaire pour désigner l’ensemble des
contenus pour l’enseignement et l’apprentissage des règles du système d’une langue.
Elle rejoint la conception de la grammaire selon Cogis (2005) en ce sens qu’elle
intègre tout ce qui a trait à la syntaxe, la morphosyntaxe, la morphologie, la conjugaison,
l’orthographe (lexicale et grammaticale) et le vocabulaire. Ainsi entendue, elle renvoie à
l’enseignement et l’apprentissage de la langue et à une activité scolaire. Autrement dit, elle
désigne une sous-discipline du français qui englobe l’enseignement et l’apprentissage du
maniement correct de la langue et l’ensemble des règles déterminant le bon usage,
l’appropriation des règles syntaxiques avec leurs implications sur l’orthographe, l’acquisition
d’une métalangue, les exercices, les manipulations linguistiques, la production de textes
23
écrits et le travail sur le vocabulaire. Enfin, par extension, l’étude de la langue peut également
renvoyer à un manuel scolaire. Dans ce sens, le manuel d’étude de la langue sert à la fois
d’outils d’apprentissage pour les élèves et d’instruments professionnels pour les enseignants.
1.1.4 L’étude de la langue au 1er cycle gabonais
Le Gabon, à l’instar de plusieurs pays d’Afrique francophone, est héritier du système
éducatif du colonisateur français. Les programmes d’enseignement au secondaire restent très
proches des programmes d’enseignement français d’avant 1990. Dès lors, l’organisation de
l’enseignement et de l’apprentissage du français au 1er cycle repose essentiellement sur les
instructions officielles inspirées du modèle français des années 1980.
Cette section a pour but de justifier la nécessité de s’intéresser à l’étude de la langue au
1er cycle gabonais. Pour ce faire, nous présentons au préalable les objectifs de l’enseignement
et de l’apprentissage du français au 1er cycle. La lecture de ces objectifs nous permettra de
montrer la nécessité d’accorder une attention particulière à l’étude de la langue. Puis, nous
déclinons les rubriques constituant l’étude de la langue au secondaire gabonais pour aboutir
aux recommandations des textes officiels quant à la façon dont ces rubriques doivent être
enseignées.
1.1.4.1 Les objectifs généraux de l’enseignement du français au 1er cycle
Les textes officiels stipulent que l’enseignement et l’apprentissage du français au 1er
cycle gabonais poursuivent quatre objectifs. Le premier vise à permettre aux enfants
d’acquérir les compétences nécessaires pour « l’expression orale et écrite dans la langue
utilisée de nos jours et leur permettre de communiquer, c’est-à-dire d’écouter, de parler, de
lire et d’écrire avec rigueur et profit » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995;1). Dans
cette perspective, l’enseignement de l’expression écrite et celui de l’expression orale revêtent
une égale importance. L’enseignant insiste sur les caractéristiques de chaque code (oral et
écrit) en tenant compte de la diversité des situations de communication.
Le deuxième objectif réside dans « l’acquisition des méthodes de réflexion »
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:1). L’enseignement du français exerce à la
réflexion critique personnelle et collective par le contact avec les textes et les autres activités
en français. C’est par ces mêmes moyens que l’élève développe la mémoire, l’attention,
l’imagination, la sensibilité, etc.
24
L’enseignement du français s’adresse à des enfants pour qui cette langue est un
instrument de culture. C’est pourquoi le troisième objectif ambitionne d’« aider chacun à se
situer dans le monde actuel par la transmission et l’élaboration d’une culture vivante »
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:1). Cet objectif s’atteindrait dans les activités de
lecture et d’étude de textes. L’idée est d’apprendre à l’élève à connaitre et aimer une
littérature et une pensée qui contribueront à développer sa réflexion et son esprit critique, à
affermir ses qualités sociales et sa sensibilité.
Enfin, le quatrième objectif des textes officiels souligne que « le professeur de
français39 devra se considérer d’abord comme un professeur de langue. Par conséquent, une
place de choix doit être accordée à l’apprentissage au maniement de la langue,
particulièrement dans le premier cycle » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:1). Ce
quatrième objectif vient donc attester de l’importance qui doit être accordée à l’étude de la
langue. L’enseignant de français du 1er cycle est invité à faire acquérir aux apprenants toutes
les compétences langagières nécessaires pour une réelle appropriation du fonctionnement de
la langue française, et ce, en recourant aux moyens à sa disposition. Ces moyens peuvent être
multiples et de tous ordres : auxiliaires audio-oraux ou audiovisuels, travaux récents sur la
linguistique appliquée, par exemple, multiplication d’exercices sur la langue, etc.
En somme, les objectifs de l’enseignement et de l’apprentissage du français au Gabon
peuvent se caractériser par trois éléments clés : la communication, le développement de
processus cognitifs et celui des compétences langagières. Ces indications montrent que les
élèves du secondaire doivent développer l’habileté à tenir compte, en situation de
communication, du fonctionnement du discours et du fonctionnement de la langue, et ce, tant
en situation de réception (écoute et lecture) qu’en situation de production (expression écrite
et expression orale).
1.1.4.2 Les objectifs de l’étude de la langue
Si l’étude de la langue revêt un caractère primordial dans l’enseignement et
l’apprentissage du français au secondaire gabonais, c’est, comme nous l’avons vu plus haut,
parce que la maitrise de la langue française reste le principal moyen dont disposent les
apprenants gabonais pour leur permettre d’atteindre les exigences de la société en matière de
39 Comprendre enseignant du secondaire.
25
littératie et leur garantir un épanouissement tant professionnel que personnel. Un niveau
insuffisant de connaissances sur la langue constituerait pour eux non seulement un handicap
dans la poursuite de leurs études, mais aussi une entrave pour leur entrée dans la vie active.
Conscients de l’importance d’une réelle maitrise de la langue, les chercheurs, de même que
les instances officielles gabonaises, en reconnaissent les enjeux et les objectifs dans
l’enseignement et l’apprentissage du français.
1.1.4.2.1 Quelques enjeux de l’étude de la langue selon la recherche
De l’avis de nombreux experts, l’étude de la langue occupe une place centrale dans
la classe de français. D’abord, elle participe à la réussite de toutes les activités de la classe de
français au collège (Garcia-Debanc, Paolacci et Boivin, 2014). Par exemple, la maitrise de la
syntaxe est une compétence cruciale en lecture dans la mesure où la lecture nécessite la
maitrise de la relation phonie-graphie, de la segmentation de la phrase, de la délimitation des
blocs syntaxiques en s’appuyant sur la ponctuation. De même, en considérant la lecture
comme une analyse des faits de langue, la maitrise des connaissances sur la langue s’avère
indispensable pour apprécier les écarts par rapport à la norme. En outre, les didacticiennes
Nadeau et al. (2006) affirment que la première finalité de l’étude de la langue est d’atteindre
une réelle compétence à l’écrit. En effet, c’est en situation d’écriture que prennent tous leurs
sens certaines connaissances morphosyntaxiques comme les structures syntaxiques telles les
expansions du nom ou les compléments de phrase. Sur ce point, les connaissances
morphosyntaxiques participent au renforcement des autres activités sur la langue puisqu’une
des justifications de l’importance de l’étude de la langue, c’est bien la difficulté de
l’orthographe du français (Chervel, 1977). En effet, cette dernière se caractérisant par une
morphologie silencieuse, les marques du pluriel, par exemple, ne s’entendent généralement
pas et diffèrent selon les classes grammaticales.
Par ailleurs, les connaissances sur l’étude de la langue en français sont utiles pour
l’apprentissage des langues étrangères (Nadeau et Fisher, 2006; Garcia-Debanc, Paolacci, &
Boivin, 2014) comme l’espagnol, l’anglais, l’italien, l’allemand, etc. Par exemple, en
enseignant le complément du nom en français, on facilite l’approche du datif en allemand.
Enfin, l’étude de la langue permet le développement des capacités intellectuelles
d’abstraction et de formalisation des élèves (Schneuwly, 2007; Chartrand, 2012a). En effet,
26
elle permet à l’élève d’entrer dans un mode de pensée distinct qui transforme « le
fonctionnement cognitif et langagier propre à l’apprenant » (Schneuwly, 2007 : 18).
Dans le point suivant, nous verrons que les textes officiels gabonais rejoignent en
grande partie la recherche quant à l’importance de l’étude de la langue.
1.1.4.2.2 Les objectifs principaux de l’étude de la langue au Gabon
L’implication de l’étude de la langue dans l’enseignement et l’apprentissage du
français se reflète aussi dans les textes officiels gabonais. Sa première finalité est
indéniablement de permettre à l’élève de mieux s’exprimer à l’écrit. En effet, à la lecture des
textes officiels, l’étude de la langue est d’abord au service de l’écriture, considérée comme
un « exercice fondamental dans l’enseignement secondaire » (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995 : 10).
Les instructions officielles insistent également sur la maitrise de la « nomenclature
grammaticale » en faisant vraisemblablement allusion à la maitrise des composantes de la
langue que sont la grammaire, l’orthographe, la conjugaison et le vocabulaire. En effet, on
peut y lire que « le cheminement de la pratique intuitive à la pratique raisonnée est éclairée
par l’étude méthodique du système de la langue » et que l’« on s’efforcera donc d’étudier les
diverses composantes de ce système » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 7). Ainsi,
l’étude de la langue doit permettre d’en comprendre les mécanismes et de maitriser la
terminologie par laquelle on analyse ces mécanismes. Cette érudition terminologique
permettra aux apprenants de nommer les éléments linguistiques, de communiquer et de
discuter de la langue en classe.
Les textes officiels reconnaissent enfin que la connaissance du fonctionnement de la
langue fait appel à l’esprit d’analyse, à des processus cognitifs qui permettent de structurer
la pensée. En effet, ils précisent que les faits de langue doivent être présentés de façon à être
observés et manipulés (déplacements, substitutions, réductions, expansions, transformation,
etc.) « dans le but de faire prendre conscience aux élèves du phénomène et de les amener à
dégager et à énoncer une règle de fonctionnement simple » (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995 : 8).
Pour conclure, la lecture des objectifs assignés à l’étude de la langue dans les textes
officiels gabonais montre qu’elle contribue à atteindre les objectifs assignés à l’enseignement
et à l’apprentissage du français en général en ce sens qu’elle est au service d’une meilleure
27
compétence à l’écrit et permet de développer des habiletés cognitives. À ces objectifs, on
peut ajouter ses spécificités, soit la connaissance de la langue en plus de la compréhension
de son système et de son fonctionnement. Le point suivant décrit les différentes rubriques
constituant l’étude de la langue au secondaire gabonais.
1.1.4.3 Les éléments constituant l’étude de la langue au Gabon
Comme précisé plus haut, l’étude de la langue au 1er cycle gabonais, c’est-à-dire au
collège, comprend quatre rubriques : la grammaire, l’orthographe, le vocabulaire et la
conjugaison (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995; Ngandu, Obolo, et Mabika Mabika,
2011 ; Inspection générale des services, 2016). Il est à préciser que ces quatre composantes,
bien que distinctes du fait de leurs attributions particulières, ne sont pas à considérer comme
cloisonnées. En effet, elles doivent être envisagées comme des rubriques reliées entre elles
et concourant toutes à favoriser l’atteinte des objectifs assignés à l’étude de la langue.
1.1.4.3.1 La rubrique « grammaire »
Les textes officiels ne définissent pas ce qu’ils entendent spécifiquement par la
rubrique grammaire. Pour saisir en quoi elle consiste, une lecture des notions indiquées dans
le programme officiel et dans les progressions nous a permis de cerner les contours de cette
rubrique. Ainsi, si l’on en juge les points abordés dans le programme officiel gabonais et
dans les progressions proposées,1995; Ngandu et al., 2011; Inspection générale des services,
2016), la rubrique grammaire vise à conduire les élèves à comprendre les mécanismes de la
langue, à maitriser la terminologie par laquelle on les analyse, à réutiliser ces connaissances
pour mieux s’exprimer à l’écrit comme à l’oral et mieux lire les textes. Elle prend appui sur
les savoirs grammaticaux acquis à l’école primaire, qu’elle approfondit et complexifie,
rendant ainsi possible l’apprentissage d’autres notions. La connaissance des mécanismes
grammaticaux fait appel à l’esprit d’analyse, à la logique autant qu’à l’intuition : elle
participe par conséquent pleinement à la structuration de la pensée.
Vraisemblablement, lorsqu’on fait allusion à la grammaire en contexte gabonais, on
revendique qu’elle participe à l’étude de la morphologie, de la sémantique et de la syntaxe.
En d’autres mots, elle consiste à étudier les points sur l’étude de la structure interne des mots
et les formes qu’ils peuvent prendre dans le discours. C’est également le fait d’étudier le sens
et la valeur d’emploi des mots dans le discours et d’étudier les relations de construction que
les mots et groupes de mots entretiennent dans le discours. Nous justifions cette analyse par
28
la lecture d’un certain nombre de passages inscrits dans le premier point consacré à
« l’apprentissage de la langue » et intitulé « l’apprentissage de la grammaire » (Ministère de
l’Éducation Nationale ,1995 :25). On peut y lire :
« En 6e et en 5e, on pratiquait une grammaire implicite (pratique intuitive de la
langue) et explicite (pratique raisonnée de la langue). En 4e et en 3e, on insistera
sur la réflexion sur la langue et on privilégiera donc la grammaire explicite. (…)
Une partie du programme prévoit l’étude des bases de la grammaire française.
Une autre insiste sur les substitutions et transformations, exercices fondamentaux
des nouvelles épreuves de français au B.E.P.C. Ces exercices ne doivent pas être
purement mécaniques; ils doivent permettre une réflexion sur la langue. Aussi,
lors des séances de grammaire, on attirera l’attention sur le fait que certaines
transformations sont possibles.
Le programme de 6e-5e était surtout consacré à la grammaire de phrase, qui
consistait essentiellement, à partir de phrases de base pour aboutir à des phrases
transformées et revenir ensuite aux phrases de base. Le programme de 3e-4e
s’orientera davantage vers la grammaire du texte, c’est-à-dire l’utilisation de la
grammaire de la phrase dans les textes. (…) » (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995 : 25-26).
Bref, la rubrique grammaire au secondaire gabonais renvoie à cette activité scolaire
qui s’occupe des aspects morphologiques, des questions liées à l’appropriation des règles
syntaxiques, aux manipulations linguistiques, à la production de discours écrits, etc. Par
ailleurs, les séances consacrées à la grammaire, sans pour autant devenir forcément
autonomes, peuvent n’entretenir qu’un lien relativement souple avec l’objectif majeur que se
donne l’enseignant pour construire sa progression : l’essentiel étant que l’étude des notions
mises au programme soit menée à bien, c’est-à-dire enseignées en classe et apprises par les
élèves. Pour finir, notons que le programme de grammaire au 1er cycle gabonais répartit les
objets d’études par année, pour éviter les répétitions. Il renvoie à des notions telles l’étude
du groupe nominal, l’étude du groupe verbal, l’étude de la phrase (types, formes, simple,
complexe…), les fonctions dans la phrase (sujet, complément, attribut…), les modifications
de la phrase ou les relations entre les phrases dans le texte (les discours rapportés, les
procédés de mise en relief, les notions d’énonciation, d’aspect, la progression textuelle, c’est-
à-dire les formes de reprise, les connecteurs ou mots de liaison ou organisateurs textuels,
etc.).
1.1.4.3.2 La rubrique « orthographe »
La rubrique « orthographe » renvoie aux codes d’écriture des mots composant la
langue. Elle vise à faciliter la compréhension écrite de cette dernière par le biais d’une
29
normalisation chez les élèves. Même si les progressions ne précisent pas clairement ce qui
renvoie à l’une ou l’autre des deux branches, les directives officielles pour l’enseignement
du français au 1er cycle distinguent l’orthographe lexicale de l’orthographe grammaticale
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995).
L’orthographe lexicale ou d’usage concerne la graphie usuelle des mots. Elle
concerne les règles de transcription écrite du mot en dehors de tout contexte de sens. En
d’autres termes, elle renvoie à l’enseignement de la façon d’écrire les mots du lexique, telle
que donnée dans le dictionnaire, indépendamment de leur usage dans la phrase ou le texte,
en conformité avec les conventions de la norme établie. Dans les progressions des textes
officiels, elles concernent par exemple les notions comme le doublement des consonnes, les
adjectifs de couleur, les accents, le tréma et la cédille, les pronoms relatifs composés, les
homophones lexicaux, etc.
L’orthographe grammaticale renvoie à la graphie variable des mots selon leur rôle et
leurs relations à l’intérieur d’une phrase ou d’un texte. Autrement dit, elle définit les
transformations morphosyntaxiques des mots. Dans les progressions des textes officiels,
l’orthographe grammaticale concerne les notions comme les PMSV, les phénomènes
morphosyntaxiques du participe passé lorsqu’il est employé avec l’auxiliaire avoir ou être,
les phénomènes morphosyntaxiques du verbe dans la subordonnée, les phénomènes
morphosyntaxiques de certains mots comme tout, même, etc.
1.1.4.3.3 La rubrique « vocabulaire »
Mentionnons, avant de présenter cette rubrique, que les termes lexique et vocabulaire
ont certains usages quasi synonymes bien qu’il existe une distinction dans leurs attributions
spécifiques, particulièrement en linguistique générale. De façon générale, ils désignent
l’ensemble des mots, des vocables, d’une langue. Plus spécifiquement, le lexique s’étend à
l’ensemble de tous les mots de la langue dont fait usage l’ensemble des locuteurs partageant
ce même mode de communication (Marin, 2009; Centre National de Ressources Textuelles
et Lexicales, 2012). C’est également l’ensemble des unités significatives, des mots et des
idiomes de la langue d’une communauté discursive restreinte, cet ensemble étant considéré
abstraitement comme élément constitutif du code de cette langue (Centre National de
Ressources Textuelles et Lexicales, 2012). Le terme vocabulaire se définit comme
l’ensemble des mots connus par un individu ou l’ensemble des mots contenus dans un texte
30
(Anctil, 2010). On peut également dire que c’est l’ensemble des mots effectivement
employés par une personne dans un acte de parole ou dans un énoncé écrit (Marin, 2009). Le
vocabulaire d’un texte, d’un énoncé ou d’une personne représente un échantillon du lexique.
Il se restreint à l’usage des mots de la langue dont dispose une personne.
Dans tous les cas, les textes officiels gabonais ne semblent pas faire de distinction
entre ces deux termes puisqu’on trouve indifféremment dans plusieurs passages des
directives officielles et dans les progressions l’utilisation des termes lexique ou vocabulaire
pour parler de la rubrique « vocabulaire ». Le terme vocabulaire est par conséquent employé
comme un synonyme du terme lexique.
L’enseignement et l’apprentissage du lexique dans la rubrique vocabulaire renvoient
à l’étude de la maitrise de la langue, entendue comme la capacité à exprimer sa pensée, ses
sentiments et à comprendre autrui, à l’écrit comme à l’oral, par une connaissance précise du
sens des termes utilisés et de leur valeur propre en fonction des contextes. En fait, toutes les
activités en français (expression écrite, expression orale, lecture, éléments de la langue)
concourent à cette rubrique, mais ce volet fait l’objet d’un apprentissage régulier et
approfondi, donnant lieu à des recherches systématiques et à des évaluations.
Le programme associé à cette rubrique fixe les domaines dans lesquels l’élève doit
s’approprier le lexique. La progression définit des contenus par année qui donnent lieu à des
travaux spécifiques approfondis, sans pour autant exclure l’approche à d’autres moments du
cycle. L’usage du dictionnaire, dès les classes de 6e et de 5e, est encouragé par une pratique
constante, tant pour aider à la réalisation des activités menées en classe que pour éveiller la
curiosité des élèves et susciter le goût de l’expression juste.
Les notions contenues dans cette rubrique sont diversifiées et touchent plusieurs
aspects à travailler : familles de mots, étymologie, évolution historique du sens d’un mot,
morphologie, dérivation, champ lexical et champ sémantique, polysémie/dénotation/
connotation, nymies (antonymes, homonymes, paronymes, synonymes), vocabulaire du
récit, de la description, de la parole, de la bande dessinée, de la poésie, du théâtre, de
l’explication et de l’argumentation, les figures de style, l’expression des sentiments et des
sensations, les verbes introducteurs de parole, les mots qui renvoient à la situation de
communication, la nominalisation, la versification, etc.
31
1.1.4.3.4 La rubrique « conjugaison »
La rubrique « conjugaison » a trait à ce qui touche au verbe et à sa conjugaison.
Notons tout de même que cette rubrique est si imbriquée aux trois autres rubriques qu’on y
retrouve plusieurs de ses facettes. Ainsi, si dans les premières progressions de 2011 (Ngandu
et al., 2011), la rubrique « conjugaison » fait mention uniquement de l’étude des modes, des
temps, de la concordance de temps et des voix, on peut également lire dans les trois autres
rubriques des connaissances liées au verbe tels la définition du verbe, les façons de le
reconnaitre, les locutions verbales, les sortes de verbes (état, action, transitifs, intransitifs,
pronominaux, impersonnels), le participe présent et l’adjectif verbal, la conjugaison de «
formes verbales difficiles », c’est-à-dire les verbes en cer-ger-eter-eler-yer, les désinences
du verbe, les verbes introduisant les subordonnées dites complétives, etc. De même, quoique
la rubrique « grammaire » et la rubrique « conjugaison » aient été associées40 dans les
progressions plus récentes, on relève dans la rubrique « orthographe/vocabulaire », des
éléments touchant à la notion de verbe comme la notion d’auxiliaire, de participes passés, de
verbes pronominaux, de verbes irréguliers, d’adjectif verbal et de participe présent, de
désinences verbales, de verbes introducteurs de paroles, etc.
Après avoir décliné les objectifs de l’étude de la langue au secondaire gabonais et les
éléments constituant cette sous-discipline du français, le point suivant décrit ce que les textes
officiels recommandent comme démarche41 pédagogique pour atteindre les finalités
assignées à chacune de ces rubriques. La description de cette démarche pédagogique nous
permettra de mettre à jour l’angle d’analyse de notre problème.
1.1.4.4 Le déroulement d’une leçon d’étude de la langue
Dans les directives officielles et selon les prescriptions fournies par les encadreurs
pédagogiques, le déroulement d’une leçon sur les quatre rubriques susmentionnées se fait
selon une méthode spécifique. Celle-ci s’organise généralement autour de trois principaux
moments que les textes officiels déclinent de la façon suivante : 1) « mise en situation » ; 2)
« présentation du fait dans quelques phrases, observations et manipulations ayant pour but
40 Cette association fait suite à une modification des horaires, des coefficients et des programmes d’enseignement (Inspection générale des
services, 2016). 41 L’emploi des expressions démarche pédagogique ou méthode pédagogique est utilisé dans le présent projet comme des expressions
synonymes pour parler de l’approche pédagogique préconisée par les instructions officielles gabonaises dans le déroulement d’une leçon.
Nous ne faisons pas allusion à une approche particulière, comme par exemple à la démarche active de découverte présentée par Chartrand (1998).
32
de faire prendre conscience aux élèves du phénomène, de les amener à dégager et à énoncer
si possible une règle de fonctionnement de la règle ; 3) « théorisation par induction et
participation active des élèves, retour à la pratique par des exercices de réemploi immédiats
ou différés » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995). Plus simplement, cette méthode est
constituée de trois phases que nous désignerons comme 1) la phase de la découverte, 2) la
phase de la formalisation et 3) la phase de l’évaluation. En voici brièvement la présentation42.
1.1.4.4.1 La phase de découverte
L’étape de la découverte consiste en une étude méthodique du système de la langue.
Elle suit une démarche dite « inductive » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995) qui tend
à dégager les éléments à l’étude (observation des éléments à l’étude par les élèves sur la base
d’un corpus de phrases ou sur un support de texte, jeu de questions-réponses entre
l’enseignant et les élèves, manipulations, etc.). Cette étape s’effectue en deux temps:
l’amorce et la phase manipulatoire.
L’amorce, comme son nom l’indique, sert à introduire la leçon. Les enseignants
opèrent une sorte de mise en route pour faire saisir l’enjeu de la nouvelle leçon. Celle-ci peut
partir de situations de communications de la vie courante et présenter les éléments que
l’enseignant se propose d’étudier dans un contexte précis. Elle peut également débuter par le
rappel de la leçon précédente ou se présenter sous la forme d’un bilan des séances
précédentes. Il s’agit en fait pour l’enseignant de faire entrer les élèves dans la situation
proposée, leur faire comprendre le but à atteindre et les modalités de travail.
Ensuite, l’enseignant et les élèves entrent dans une phase de recherche ou phase dite
manipulatoire. Durant cette phase, les diverses manipulations effectuées ne doivent pas « se
résumer à de simples opérations d’étiquetage », mais donner lieu à « des manipulations
diverses afin de mettre en évidence les variations de sens qui en résultent » (Ministère de
l’Éducation Nationale, 1995). Au cours de cette phase, l’exhortation est faite à l’enseignant
d’utiliser le langage technique en vigueur, ce que la recherche nomme sous le terme de
métalangue43, et de veiller à ce que les élèves l’emploient correctement.
42 Nous tenons à préciser qu’aucun document officiel gabonais ne présente de façon détaillée en quoi consiste chacune de ces trois étapes.
En fait, un des problèmes rencontrés dans le système éducatif gabonais et attesté par certains auteurs est qu’il est généralement ardu de se
procurer des documents officiels (programmes officiels, résolutions de séminaires, textes administratifs, etc.) si tant est qu’ils existent et compte tenu de leur rareté (CENAREST et Idiata, 2010; Quentin de Mongaryas, 2011; Ovono-Obame, 2014). Nous nous sommes donc
vue contrainte de nous appuyer essentiellement sur notre formation à l’École Normale Supérieure, sur notre expérience d’enseignante de
français, sur nos différentes participations aux différents séminaires et sur quelques passages fournis par les directives officielles. 43 Cette notion est expliquée dans le cadre conceptuel.
33
1.1.4.4.2 La phase de formalisation
La deuxième étape consiste en une phase de formalisation de la leçon. Il s’agit, pour
l’enseignant, de faire reformuler à l’écrit aux élèves, sous la supervision de ce dernier, les
éléments essentiels qu’il a voulu faire découvrir au cours de la leçon. Cette forme de
théorisation se caractérise principalement par son caractère économique et fonctionnel. Dans
certains cas, il arrive que les enseignants s’appuient sur les formalisations proposées par les
manuels qu’ils ont à leur disposition. Enfin, précisons que pour les classes de 6e et de 5e, les
inspecteurs et les conseillers pédagogiques exigent que ce résumé de la leçon soit transcrit
intégralement au tableau par l’enseignant pour éviter que ceux-ci ne rédigent des contenus
erronés tandis qu’elle peut faire l’objet d’une simple dictée pour les élèves des classes de 4e
et de 3e au 1er cycle secondaire44, qui eux disposent, a priori, non seulement d’une maitrise
plus poussée de l’orthographe, mais aussi de connaissances plus approfondies par rapport
aux classes antérieures de la notion étudiée.
1.1.4.4.3 La phase d’évaluation
La troisième étape de la démarche pédagogique est celle de l’évaluation. Celle-ci se
fait généralement en deux temps qui font référence à deux formes d’évaluation : l’évaluation
sommative et l’évaluation formative45. L’évaluation sommative se traduit par une note ou
une reconnaissance des acquis. Elle est définie comme « l’évaluation intervenant au terme
d’un processus d’apprentissage afin de mesurer les acquis de l’élève. Elle permet de faire le
bilan de ces acquis quand le professeur considère que l’entraînement est suffisant » (Ngandu
et al., 2011: 1). Cet entraînement, c’est l’évaluation formative. Celle-ci fait partie intégrante
du cours. Généralement, elle survient immédiatement ou en différé après la phase de
formalisation afin de faciliter, pour l’enseignant, la vérification d’un niveau satisfaisant
d’appropriation des savoirs chez ses élèves et de procéder, le cas échéant, à des réajustements.
Ce contrôle des savoirs vise tout aussi à la stabilisation de la notion étudiée chez les élèves.
Enfin, l’évaluation formative peut se présenter sous la forme d’activités collectives en classe,
mais, le plus souvent, au Gabon, elle se résume à proposer aux élèves des exercices tirés des
manuels scolaires.
44 Première année (6e), deuxième année (5e), troisième année (4e) et quatrième année (3e) secondaire. 45 Au Gabon, on parle d’évaluation formative et non de phase d’exercisation comme au Québec.
34
En résumé, nous retiendrons que les deux premières étapes d’une démarche
pédagogique sur l’étude de la langue, la phase de découverte et la formalisation, sont
fortement dépendantes de la liberté pédagogique de l’enseignant. En effet, l’organisation de
la progression et la conduite de la leçon restent du ressort de ce dernier. Quant à l’évaluation
formative, elle présente un cadre commun de référence dans la mesure où les exercices
proposés aux élèves sont principalement puisés dans les manuels scolaires de français dont
disposent les enseignants. Nous en expliquons les raisons dans les points suivants.
1.2 L’angle d’analyse du problème
Cette section vise à présenter les questions soulevées par le recours aux exercices de
manuels scolaires que les enseignants de français gabonais doivent proposer aux élèves
durant l’évaluation formative.
1.2.1 Des directives partielles sur le recours à certains types d’exercices
D’une façon générale, le document officiel portant sur l’enseignement et
l’apprentissage du français dans le 1er cycle du secondaire gabonais exhorte les enseignants
de français à recourir systématiquement à des exercices d’application en vue de renforcer les
aptitudes dans les différentes sous-disciplines du français comme le mentionne ce passage :
« L’enseignant choisit les exercices les plus propres à répondre à ses intentions. Il tient
compte du niveau réel en français des élèves afin de proposer des exercices adaptés à leurs
possibilités. » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 3).
Par exemple, pour l’enseignement et l’apprentissage de l’expression
orale, l’enseignant est invité à proposer « des exercices qui permettront aux élèves de se
familiariser avec diverses situations de la vie courante» (Ministère de l’Éducation Nationale,
1995: 5) entre autres à travers des « exposés et conversations » ( Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995: 28). Les exercices pour l’entrainement à l’expression écrite peuvent être
sous forme de « rédaction collective, (…), de travaux de groupe ou de travaux individuels »
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 10). En ce qui concerne l’enseignement et
l’apprentissage de la lecture, l’enseignant peut utiliser des « exercices d’élocution, de lecture
et de diction » consistant par exemple en des exercices portant sur « la phonation » et
« l’articulation » (alphabet phonétique international, lecture silencieuse et à haute voix, etc.)
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 7). Pour ce qui est des exercices sur l’étude de la
35
langue, les textes officiels suggèrent quelques exercices et activités concourant à
l’appropriation de divers aspects de ses rubriques. Par exemple, les exercices sur le
vocabulaire pourront s’appuyer à la fois sur « les situations de communication orales » dans
lesquelles les enseignants pourront tirer parti des « interventions spontanées ou provoquées
pour confirmer, corriger, compléter le lexique de chacun » (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995: 8) et sur les préparations de « communication écrite » ( Ministère de
l’Éducation Nationale, 1995: 9). À ces moments occasionnels, il est recommandé d’y
adjoindre des exercices « systématiques » tels des « exercices à trous (…) le maniement
méthodique du dictionnaire », etc. (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 9).
Cependant, à la lecture des textes officiels, il apparait que l’exercisation à
l’appropriation de certaines connaissances dans les rubriques de l’étude de la langue est omis,
ignoré ou réduit à des activités ponctuelles. C’est le cas des informations fournies sur les
exercices portant sur l’orthographe. En effet, les instructions insistent uniquement sur des
illustrations renvoyant à des connaissances à exercer en orthographe lexicale tels les
« phonèmes » et « les homonymes » (homophones et homographes) puis proposent aux
enseignants de se référer à « une note circulaire »46 qui présenterait les différents types
d’exercices sur l’orthographe sans préciser si celle-ci contient des exercices qui conviendrait
à l’exercisation à l’orthographe grammaticale (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:
10). Par ailleurs, si aucune indication n’est fournie en ce qui concerne les exercices pour
l’acquisition des connaissances pour la rubrique conjugaison, la même absence d’indications
s’observe également pour l’exercisation aux connaissances pour la rubrique grammaire. En
effet, la consolidation des connaissances pour cette rubrique semble se réduire à des activités
ponctuelles. Selon les directives officielles, celles-ci pourraient être exercées au cours de « la
rédaction de quelques phrases de synthèse » afin de « sensibiliser les élèves à des
particularités spécifiques du code écrit liées à des contraintes grammaticales » ou « lors de
corrections de copies pour permettre à l’élève d’améliorer son expression » ( Ministère de
l’Éducation Nationale, 1995: 11).
46 Comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, la probabilité pour les enseignants de français gabonais d’avoir en leur
possession cette « note circulaire » pourrait relever de l’utopie quand on sait que la majorité des documents officiels ne se
trouvent que rarement dans des banques de données informatisées. En outre, pour les enseignants de français exerçant en
dehors de la capitale, il semble peu probable que ces derniers puissent disposer de documents officiels compte tenu de leur
rareté et de la difficulté pour eux, comme pour ceux de la capitale, de savoir exactement où se les procurer.
36
Pour nous, ces indices révèlent que les instructions officielles fournissent peu
d’orientations sur les dispositions à suivre en ce qui concerne certaines manipulations sur la
langue, particulièrement sur celles relatives aux manipulations de type morphosyntaxiques.
Ce constat conduit à avancer deux hypothèses. La première pourrait être une volonté
manifeste des textes officiels de ne pas entraver la liberté pédagogique des enseignants dans
la conception de leurs propres exercices de type morphosyntaxique. Seulement, cette
hypothèse se trouve vite invalidée par la pluralité des exercices proposés pour les autres sous-
disciplines du français et pour les autres facettes des rubriques constituant l’étude de la
langue. En outre, en nous fiant à notre expérience d’enseignante de français et à notre
participation aux différents séminaires de formation, il convient de signaler que,
généralement, les conseillers et les inspecteurs pédagogiques déconseillent fortement aux
enseignants de français gabonais de concevoir leurs propres exercices, ces derniers estimant
qu’ils ne sont ni outillés ni habilités à le faire47. Si l’on s’appuie sur les propos de Huot (1999)
qui constate l’incomplétude de la formation des enseignants de français en matière d’étude
de la langue en ce sens que très peu d’entre eux sont en mesure de construire seul, sur une
année entière, des exercices adaptés, nous serions tentée de rejoindre ces appréhensions des
conseillers et des inspecteurs pédagogiques gabonais sur l’inhabilité des enseignants de
français à concevoir eux-mêmes les exercices. La deuxième hypothèse, la plus plausible
pour nous, est qu’il serait implicitement suggéré aux enseignants, lorsqu’ils désirent exercer
les élèves à ces configurations d’exercices, d’utiliser les exercices des manuels scolaires. Le
point suivant vient renforcer cette éventualité.
1.2.2 Une formation insuffisante sur certains types d’exercices
Le plan de formation des futurs enseignants de français de collège, en ce qui concerne
le recours aux exercices sur la langue ou leur élaboration, laisse entrevoir également certaines
carences. En effet, la lecture du plan de formation montre que les futurs enseignants de
français du collège au Gabon sont principalement formés pour être capables de « produire
des exercices préparant les élèves à l’épreuve du B.E.P.C48» (École Normale Supérieure ,
1998a: 3). Selon ce plan, cette compétence consiste à « construire un sujet du type épreuve
de langue au B.E.PC », à « formuler des questions de compréhension du texte » et à
47 Le point suivant vient conforter cette recommandation faite aux enseignants. 48 Brevet d’Études du Premier Cycle.
37
« corriger, noter l’épreuve de dictée/questions du B.E.P.C » (École Normale Supérieure,
1998a: 3; École Normale Supérieure, 1998, 1998b). Notre travail portant spécifiquement sur
les exercices de type morphosyntaxique, nous ne retiendrons que le premier point, soit la
capacité à produire des exercices préparant à l’épreuve du B.E.P.C.
D’après le plan de formation, la construction d’un sujet de type épreuve de langue au
B.E.P.C s’accomplit en repérant dans un texte des éléments pertinents pour un
questionnement et en formulant des questions raisonnées de maniement de la langue tenant
compte « des structures de la langue permettant une évaluation incontestable » (École
la formation parait se réduire à une élaboration partielle des exercices puisque les futurs
enseignants ne sont outillés que pour élaborer des consignes d’exercices qui favoriseront
l’évaluation. Or, un exercice doit tenir compte dans sa conception, en plus de l’objectif
pédagogique dans lequel il s’insère, de trois principales dimensions : 1) la clarté,
l’adéquation, la simplicité, la pertinence et la suffisance de la consigne, 2) la matérialité de
l’apport et 3) l’applicabilité de la procédure (Vigner, 1984; Conseil de L’Europe, 2001; Cuq
et al., 2003). Ces trois éléments concourront ou non à la réussite de l’exercice.
Nous relevons également que le plan de formation semble réduire la question des
exercices aux modalités de réalisation des épreuves du B.E.P.C. Or, les futurs enseignants de
français seront amenés à proposer des exercices à la fin de chaque leçon dans le cadre de
l’évaluation formative. Vraisemblablement, de telles restrictions exhortent les enseignants à
consulter systématiquement les exercices qui sont proposés dans les manuels scolaires à leur
disposition. En plus de mettre en évidence le problème de la pertinence des exercices à
utiliser dans un contexte précis d’apprentissage, cette invitation implicite occulte, à notre
avis, des aspects à ne pas négliger, lesquels aspects pourraient expliquer une partie des
problèmes rencontrés par les élèves lors de l’appropriation des connaissances sur les liens
qui s’établissent entre certaines unités d’analyse de la phrase. Les deux prochains points
viennent montrer que ces carences pourraient être amplifiées par les manuels scolaires de
français utilisés au secondaire gabonais.
1.2.3 La particularité des manuels scolaires de français au secondaire gabonais
Le troisième problème que pose le recours aux exercices au cours de la phase
d’évaluation formative pourrait aussi provenir des manuels scolaires de français dont
38
disposent les enseignants gabonais. En plus d’en expliquer les raisons, nous apportons
quelques précisions sur ces manuels.
Les manuels scolaires de français que l’on trouve au Gabon peuvent se regrouper en trois
catégories : les manuels officiels, les manuels complémentaires et les manuels divers. Les
manuels officiels, comme leur nom l’indique, sont ceux reconnus par les inspecteurs et
conseillers pédagogiques. Ils présentent l’avantage d’être distribués et utilisés dans tous les
établissements du Gabon49 (Institut Pédagogique National, 2007). On dénombre trois
collections pour l’enseignement au 1er cycle : La Nouvelle Méthode de français 6e/5e/4e/3e
(Nathan, 1997), Le Livre unique : Le Français en 6e--5e-4e-3e (EDICEF, 2001b) et Indigo
Français 6e-5e-4e-3e (Hatier International, 2001). Le premier écueil provient du fait qu’aucun
de ces manuels officiels n’est élaboré par les acteurs du système éducatif gabonais, mais par
un ensemble d’auteurs africains inconnus et anonymes si l’on se réfère à ce qu’en disent ces
manuels. Concrètement, il faut savoir que le système éducatif gabonais ne dispose pas,
jusqu’à l’heure actuelle, de manuels scolaires de français élaborés soit par les enseignants,
les conseillers ou les inspecteurs pédagogiques, du moins pour l’enseignement du français au
secondaire. Pour compenser ce problème de conception locale, l’Institut Pédagogique
National (IPN) sélectionne un certain nombre d’ouvrages, proposés par des éditeurs
extérieurs tels Hachette, Nathan, EDICEF, Hatier, etc., qui sont censés se rapprocher du
programme officiel gabonais pour l’enseignement du français au collège. Le choix de ces
spécimens serait fait au cours d’une commission dite d’évaluation de manuels et sur la base
d’un certain nombre de critères50.
En plus des manuels officiels, l’IPN suggère quatre manuels dits complémentaires dont
le but est de venir en appui aux manuels officiels : Grammaire française 6e /5e de Mauffrey
et Cohen (1993), Grammaire du français 6e/5e d’EDICEF (2003), Grammaire, discours,
textes, phrases 6e/5e (1997) des éditions Hachette et la Nouvelle grammaire du français
(2003) de Larousse. Il convient cependant de préciser que bon nombre d’enseignants,
particulièrement ceux exerçant loin de la capitale, éprouvent souvent des difficultés à se les
procurer pour diverses raisons : soit parce que la maison d’édition ne les publie plus, soit
49 Nous émettons des réserves sur cette affirmation car nous n’avons pas la certitude que la distribution et l’utilisation de
ces manuels officiels sont effectives dans l’ensemble du territoire gabonais. 50 Ces informations ont été recueillies auprès d’un inspecteur pédagogique gabonais, Nang Mintsa Gabriel, ancien directeur
général de l’enseignement du second degré général durant plusieurs années puis chef de département de français de l’Institut
Pédagogique National au Gabon.
39
parce que la plupart des enseignants affectés loin de la capitale sont le plus souvent de
nouveaux enseignants qui n’ont pas encore de rémunérations conséquentes et ne peuvent
donc pas les acheter (Ovono Obame, 2014).
À côté de ces manuels officiels et complémentaires, l’enseignant dispose de manuels
scolaires que l’IPN identifie comme étant la documentation du professeur. La plupart de ces
manuels proviennent généralement de l’Hexagone. Valérien (2005) fournit quelques raisons
à cet état de fait. Selon lui, la tendance à offrir aux pays de l’Afrique subsaharienne des
ouvrages provenant de France trouve sa justification dans le fait qu’en France, le changement
fréquent des programmes provoque souvent une accumulation de livres neufs ou peu usagés
qui sont pour la plupart condamnés à être détruits. La tentation est donc forte de proposer la
collecte de manuels pour les acheminer vers les écoles déshéritées de l’Afrique
subsaharienne. Le problème, comme on peut s’en douter, c’est qu’aucun de ces ouvrages
n’est adapté au contexte africain et encore moins au contexte gabonais que ce soit au niveau
de la démarche utilisée, de la conformité au programme, de la progression adoptée et des
référents parfois difficilement perçus par bon nombre d’apprenants gabonais (ski, hiver,
automne, métro, camping, etc.). Cette inadaptation n’est d’ailleurs pas propre au Gabon. Au
Congo, par exemple, Kasongo (2013), auteur franciscain d’origine congolaise, dans une
étude consacrée à l’éducation, dénonçait déjà le fait que les modèles, les objets du matériel
didactique sont adaptés à la métropole et donc incompatibles entre les objets, les techniques
d’apprentissage et le milieu culturel des enfants africains et particulièrement des élèves
congolais. Par ailleurs, quand on sait que plusieurs études ont révélé que certains ouvrages
scolaires véhiculent parfois des contenus qui ont été jugés obsolètes, lacunaires ou
incohérents (Chervel,1977; Chartrand, 1996; Nadeau, 2001; Bruillard, 2005; Nadeau et
Fisher, 2011), on est en droit de s’interroger sur la qualité de leurs contenus. Bref, tous ces
manuels scolaires sont censés offrir aux enseignants gabonais les savoirs nécessaires pour
préparer leurs cours de français et singulièrement leur fournir des exercices destinés aux
élèves.
Toutes ces dispositions semblent malheureusement ne pas suffire pour garantir une
certaine crédibilité aux manuels scolaires de français utilisés en contexte gabonais puisque
ce dernier est fréquemment évoqué comme un des facteurs de l’échec scolaire en raison de
son caractère inadapté. Plusieurs travaux et rapports effectués au Gabon estiment en effet que
40
ces manuels posent de nombreux problèmes comme ceux évoqués plus haut (conformité au
programme, référents culturels inadaptés, démarche pédagogique ou idéologie véhiculée,
etc.) (Organisation internationale de la francophonie, 2003; Akoué, 2007; Demba, 2010;
Ministère de l’Éducation Nationale, de l’Enseignement Supérieure et de la Recherche
Scientifique, 2010). À ces critiques, nous pouvons ajouter qu’ils n’ont fait, à notre
connaissance, l’objet d’aucune étude empirique, du moins en ce qui concerne la pertinence
des exercices qui y sont proposés. Cette dernière préoccupation est d’autant plus importante
pour nous dans la mesure où des études scientifiques menées dans d’autres contextes, comme
nous le verrons dans le point suivant, ont montré que de nombreux exercices de manuels
scolaires pourraient affecter négativement non seulement l’appropriation des connaissances
en français chez les élèves, mais aussi celles portant sur l’étude de la langue, notamment par
le biais des exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques.
1.2.4 Quelques critiques autour des exercices dans les manuels scolaires
L’exercice parait indissociable de l’apprentissage et difficilement incontournable
dans l’atteinte d’une maitrise de l’écrit pour automatiser les procédures apprises (Nadeau et
Fisher, 2006). Cependant, de l’avis de certains auteurs (Haas et Lorrot, 1996; Bruillard,
2005), l’organisation systématique selon le schéma leçon-exercice que l’on rencontre dans
plusieurs manuels procèderait souvent à un travail qui favoriserait peu chez les élèves des
situations de réflexion et d’exploration.
Chartrand (1993) s’interroge également sur l’efficacité de certains exercices proposés
dans les manuels scolaires. À travers l’analyse de trois manuels de 3e secondaire proposés au
Québec, la didacticienne déplore par exemple le fait que les manuels proposent plus des
exercices d’étiquetage ou de reconnaissance - exercices peu formateurs dans la mesure où ils
ne viseraient qu’à contrôler l’acquisition du métalangage - au détriment d’activités
d’exploration qui permettraient de faire appel à la rigueur, à la cohérence et à l’esprit critique
chez les élèves. Elle constate par ailleurs que plusieurs exercices de transformation dans ces
trois manuels sont mal conçus. En effet, ces derniers ne sont ni suivis de consignes précises
ni d’un travail de réflexion. En plus, ils évitent systématiquement de proposer plus d’une
manipulation sur une même phrase. En outre, quoique ces exercices de transformation
amènent les élèves à varier les structures de leurs phrases dans le but de leur faire comprendre
les discours, ils ne les obligeraient ni à prendre conscience des opérations syntaxiques ni à
41
découvrir les contraintes liées à une transformation précise. Enfin, Chartrand (1993) déplore
le fait que les exercices de transformation proposés dans ces manuels « confondent
phénomènes syntaxiques et phénomènes sémantiques » (p. 49).
Dans le même ordre d’idées, Bucheton (1999) affirme que les exercices sont utilisés
principalement comme exercices d’application de la leçon et assez peu comme des situations
de recherche et d’exploration. Par conséquent, ils seraient faiblement productifs et
s’apparenteraient à une forme de régression concernant les savoirs morphosyntaxiques à
l’issue des centaines d’heures effectuées durant les quatre ans de collège. Cette « régression »
serait due en partie au fait que « la mise en relation des exercices des manuels avec leur
finalité intellectuelle (comprendre une notion, développer une habileté linguistique ou
cognitive) est souvent escamotée par les enseignants, soit faute de temps, soit parce qu’ils
pensent que cela va de soi » (Bucheton, 1999 :45).
De l’avis de Nadeau (2001), un autre problème causé par les exercices de certains
manuels scolaires est qu’ils seraient souvent inefficaces, puisque plusieurs d’entre eux sont
loin de respecter le cheminement nécessaire pour effectuer les accords en situation de
production d’écriture. Elle constate en effet que dans certains exercices, soit une des étapes
est absente, soit elle est facilitée par un manque de variété des structures. Pour elle, ce
décalage entre ce que les élèves pratiquent dans leurs exercices et la tâche à accomplir en
production de texte ne contribuerait pas à améliorer le transfert des compétences.
D’autres études (Nadeau et Fisher, 2011; Boyer, Lebrun, et Roy, 2017) montrent que
plusieurs exercices de manuels scolaires ne favorisent pas la pratique d’un raisonnement
complet semblable à ceux que les élèves produisent dans la production de leurs écrits ou
encore. Certains de ces exercices exerceraient à des connaissances qui, non seulement
n’offrent que de faibles possibilités de transfert, mais en plus, les connaissances que croient
développer ces exercices le sont à mauvais escient, ce qui permet peu aux élèves d’atteindre
un niveau satisfaisant de réussite sur le plan social et scolaire.
Ajoutons enfin que certains auteurs (Plane ,1999 ; Duchesne, 2011) affirment qu’ une
grande partie des enseignants pensent que le rôle du manuel est de donner des exercices aux
élèves et qu’on peut lire dans cette insistance sur les exercices le simple souci de trouver une
occupation pour les élèves. De façon optimiste, les auteurs supposent que l’exercice est
considéré par les enseignants comme le lieu privilégié de la consolidation des savoirs.
42
Toutefois, on peut aussi y voir le fait que les enseignants ont conscience de la difficulté qu’il
y a à élaborer des exercices dans la discipline « français ».
Pour clore cette section, nous retiendrons que les directives officielles sur
l’enseignement et l’apprentissage du français et le plan de formation des futurs enseignants
au secondaire gabonais offrent peu d’indications sur l’exercisation aux phénomènes
morphosyntaxiques que les enseignants de français devraient proposer aux élèves au cours
de l’évaluation formative. Cette absence d’informations et cette carence dans leur formation
les conduit à puiser dans les manuels scolaires à leur disposition les exercices leur permettant
de procéder à la vérification de l’acquisition des connaissances morphosyntaxiques
enseignées et à s’assurer de leur consolidation par élèves. Or, compte tenu du caractère jugé
inadapté de ces manuels scolaires et des critiques soulevées par la recherche concernant
certains des exercices que l’on trouve généralement dans les manuels scolaires, il semble
indispensable de s’interroger sur les difficultés que pourraient occasionner ces exercices dans
l’appropriation des connaissances sur certains phénomènes morphosyntaxiques chez les
élèves. Ces phénomènes morphosyntaxiques étant variés et divers, nous avons choisi de
n’étudier que ceux relatifs à deux unités d’analyse de la phrase, le sujet et le verbe, dans les
exercices des manuels scolaires utilisés au 1er cycle du secondaire gabonais Les raisons de
ce choix sont présentées dans le point suivant.
1.3. Le problème déclencheur : les difficultés d’appropriation des
connaissances sur les PMSV chez les apprenants gabonais
Cette section a pour but de faire comprendre notre intérêt pour les PMSV. Pour cela,
nous allons montrer, en nous appuyant sur les travaux de Nze Waghe (2011) et d’
d’Ambourhouet-Bigmann (2014), que ce sujet mérite qu’on y accorde une réelle attention.
Autrement dit, nous voulons montrer que les difficultés de connaissances sur les PMSV se
décèlent en contexte gabonais à travers les écrits de nombreux apprenants gabonais tant au
collège qu’au niveau universitaire
La thèse de Nze Waghe (2011) vise l’identification et la présentation d’une typologie
des différentes erreurs d’orthographe commises par les élèves du 1er cycle dans leurs écrits.
Pour ce faire, il propose une dictée à 783 élèves et fait participer 59 d’entre eux à un entretien
43
métagraphique51 par la suite. La correction de la dictée fait ressortir diverses difficultés
morphosyntaxiques, dont celles des phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le
verbe. Par exemple, les élèves devaient orthographier le passage « Les roues de la Toyota
mordaient nerveusement la route tantôt pierreuse… » (PMSV lorsque le sujet est constitué
d’un groupe nominal, dont le noyau est pluriel et d’un complément du nom au singulier) et
le passage « Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie! »
(PMSV lorsque le sujet est le pronom relatif qui) (Nze Waghe, 2011 : 67). Les deux exemples
de verbatim présentés sur ces deux passages indiquent qu’un élève justifie avoir écrit
« mordait » pour le premier passage parce qu’il estime que le verbe est en relation avec le
mot « Toyota » et ne fournit aucune réponse pour expliquer pour quelle raison il a écrit
« bordait » avec « ait » (Nze Waghe, 2011 :194). Un autre élève justifie avoir orthographié
« bordaient » dans la mesure où le PMSV s’établit entre le verbe « bordaient » et le groupe
nominal « les fonds noirs » (Nze Waghe, 2011 : 200). Or, dans ce cas précis, le verbe
« bordaient » n’est pas en relation avec le groupe nominal « les fonds noirs » qui occupe la
fonction de complément d’objet direct du verbe « regarder », mais avec le pronom relatif
qui, antécédent du groupe nominal «les fonds noirs des précipices» et sujet en relation avec
le verbe « bordaient ». Ces deux exemples montrent que soit les élèves éprouvent des
difficultés à mettre correctement en relation la fonction syntaxique de sujet et le verbe, soit
ils ignorent comment s’établit cette relation morphosyntaxique, soit ils le font en s’appuyant
sur des connaissances qui se révèlent erronées ou insuffisantes. Les connaissances peuvent
être en construction, mais lorsque les élèves n’ont pas étudié toutes ou du moins la majorité
des phénomènes particuliers dont il faut tenir compte lorsque les deux unités d’analyse de la
phrase que sont la fonction syntaxique de sujet et le verbe sont en relation sur le plan
syntaxique, il est possible que cela engendre de telles confusions.
L’ouvrage d’Ambourhouet-Bigmann (2014), enseignant de littérature africaine à
l’Université Omar Bongo de Libreville52, présente de nombreuses incorrections et
incongruités émanant de plus de 300 extraits de copies d’étudiants inscrits en 1re et 2e année
universitaire de « Littérature africaine » ainsi qu’en Licence et 1re année de Master. Une
lecture de l’œuvre montre que les mêmes types de difficultés que celles énoncées
51 «L’entretien métagraphique est un entretien centré sur l’orthographe, où l’on demande à l’élève de commenter, dans le
texte qu’il vient d’écrire, certains des graphèmes qu’il a produits» (Brissaud et Cogis, 2011 : 45). 52 Établissement public d'enseignement supérieur situé à Libreville, capitale politique et administrative du Gabon.
44
précédemment et bien d’autres apparaissent chez les étudiants universitaires. Pour
illustration, on peut lire plusieurs passages comme « Les auteurs de la Négritude
dénonce… » (74), « …les policiers qui n’hésite pas à… » (101), « …l’auteur fait la critique
des églises qui devient un lieu d’enrichissement. » (102), « …le noir a toujours été les êtres
inférieure53…qui ne pouvaient pas… » (105), « …le comportement qu’adopte les jeunes… »
(98) (PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe auquel il est en relation), « …le noir ne
devraient pas… » (108) (PMSV en règle générale), « …quand les Africains écrivaient
s’étaient toujours avec une philosophie qui les permettaient à décrire… » (108) (PMSV
lorsque le sujet est le pronom « ce », sujet du verbe « être » et PMSV lorsqu’un pronom est
placé entre le sujet et le verbe), etc.
Bien que ne disposant pas d’assez d’études nous permettant de mesurer les difficultés
d’appropriation des élèves gabonais sur les connaissances relatives aux PMSV en contexte
gabonais, nous pensons qu’à elles seules, ces deux sources montrent à suffisance que non
seulement cette question doit être considérée comme cruciale par la recherche, mais aussi
qu’elle occupe une place majeure dans les écueils des apprenants gabonais à rédiger
correctement leurs écrits. Malheureusement, les deux références recensées en disent peu sur
les raisons de tels écueils. Par exemple, elles semblent occulter la part de responsabilité des
exercices contenus dans les manuels scolaires dans cette difficulté particulière quand on sait
que ceux-ci exercent des effets sur l’apprentissage sur des élèves comme l’affirment Nadeau
et al. (2011). D’un autre côté, même si plusieurs passages présents dans ces deux références
laissent entrevoir que les apprenants gabonais sont tout aussi confrontés à la difficulté
d’établir de façon adéquate la mise en relation entre la fonction syntaxique de sujet et le verbe
tout comme ils perçoivent difficilement les phénomènes morphosyntaxiques qui se
produisent lorsque l’expression et la position de ces deux unités d’analyse diffèrent de celles
couramment utilisées, le fait est qu’ils restent centrés particulièrement sur une forme
d’inventaire des erreurs produites en situation d’écriture sans en expliquer de façon
exhaustive les causes. Nous pensons qu’une analyse des exercices sur les PMSV contenus
dans les manuels scolaires du secondaire gabonais pourrait combler cette absence
53 Nous soulignons ce passage pour signifier que nous constatons la présence d’autres difficultés, mais que celles-ci n’entrent
pas dans le cadre de notre examen.
45
d’explications. Le point suivant vient préciser la pertinence et les possibles retombées d’une
telle étude.
1.4. La pertinence et les retombées de la recherche
Nous voulons justifier ici la pertinence de mener notre projet de recherche. Pour ce
faire, nous présentons tour à tour les répercussions sociales que pourrait avoir notre étude sur
les apprenants à long terme, les raisons pédagogiques propres au système éducatif gabonais
qui justifient la poursuite d’un tel projet et l’intérêt scientifique d’analyser les exercices sur
les phénomènes morphosyntaxiques entre la fonction syntaxique de sujet et le verbe contenus
dans les manuels scolaires utilisés au secondaire gabonais. Pour terminer, nous déclinons les
retombées possibles de la recherche.
1.4.1 La pertinence sociale
Nous avons vu que la langue française occupe une place de choix dans la société
gabonaise. Nous avons également vu que l’habileté à maitriser la langue française au Gabon,
et partant, le fonctionnement de la langue, pourrait contribuer fortement à l’augmentation du
niveau de littéracie de tous les élèves dans le but de garantir à la fois leur épanouissement
professionnel et social. Quand on sait qu’aujourd’hui les exigences de la société en matière
d’écriture ont connu une augmentation exponentielle du fait du développement économique
et technologique, nous pensons que les élèves gabonais se trouvent contraints d’être mieux
outillés pour prétendre satisfaire aux contraintes de la mondialisation.
1.4.2 La pertinence pédagogique
Comme énoncé plus haut, il a été également constaté un certain nombre de difficultés
dans l’enseignement et l’apprentissage du français. Au nombre de ces difficultés apparaissent
celles propres à l’acquisition des savoirs sur les phénomènes morphosyntaxiques. Celles-ci
pourraient participer de l’échec scolaire général du système éducatif gabonais constaté par
plusieurs chercheurs gabonais (Akoué, 2007; Ognaligui, 1999; Demba, 2010; Nguema-
Endamane, 2011; Mbiamany-N’tchoreret, 2011). À la suite de ce constat d’échec, une
dynamique de réformes, en pleine adéquation avec le développement du pays et dont le but
est de transformer le système éducatif gabonais en profondeur, a été engagée au Gabon depuis
plusieurs années déjà. Cette réforme s’est matérialisée depuis 2010 à 2018 par la mise en
place d’une série de réformes initiée par le pouvoir public en vue d’améliorer le rendement
46
du système éducatif gabonais en proie à un rendement plus que préoccupant (Ministère de
l’Éducation Nationale, de l’Enseignement Supérieure et de la Recherche Scientifique, 2010;
Ministère de l’Éducation Nationale, 2013; Ministère de l’Éducation Nationale , 2015; Task
force, 2018).
Nous sommes consciente que plusieurs facteurs pourraient expliquer cette situation :
des facteurs généraux comme la faible implication des parents, les grèves illimitées et à
répétition, les effectifs pléthoriques, la carence de matériel didactique et d’infrastructures, la
formation initiale et continue insuffisante, etc. (Ognaligui, 1999; Akoué, 2007; Demba, 2010;
Nguema-Endamane, 2011; Matari et al., 2011b; Immongault, 2014) tout comme des facteurs
spécifiques à l’enseignement et à l’apprentissage du français telles les conceptions et les
pratiques des enseignants de français gabonais (Nguimbi, 2009; Sima Ndong, 2012), les
difficultés à orthographier correctement les mots (Koumba-Mouity, 2006; Nze-Waghe, 2011;
Ambourhouet-Bigmann, 2014), les difficultés à rédiger selon les normes du français enseigné
à l’école (Ovono Obame, 2014) et les difficultés à s’approprier divers savoirs sur la langue
(courir, entrer, monter…), état ou existence (être, dormir, vivre…), opinion (croire, estimer,
juger…), sentiment (aimer, désirer, mépriser…), parole (dire, confirmer, dévoiler), sensation
(sentir, percevoir, flairer, savourer, heurter…), etc.
2.1.2 Pourquoi phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et verbe?
Nous souhaitons maintenant présenter les raisons pour lesquelles nous avons choisi
de parler de phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe plutôt que d’accord
sujet-verbe, expression couramment employée par les enseignants et généralement présente
dans la majorité des manuels scolaires.
Cette démarche s’appuie sur le fait que s’il est vrai que certains termes et expressions
issus de la tradition grammaticale peuvent paraître parfaitement intelligibles dans les
programmes officiels, dans les manuels scolaires ou pour les enseignants, tant ils sont
familiers, ils peuvent toutefois donner lieu à des interprétations diverses. En outre, rappelons
qu’en tant que discipline de recherche, la didactique du français exige du chercheur de
procéder à un examen critique des contenus utilisés pour l’enseignement et l’apprentissage
du français en général et l’étude d’un volet particulier comme celui de la langue (Simard,
Dufays et Garcia-Debanc, 2010). Vue sous cet angle, notre recherche nous oblige à adopter
une posture rigoureuse et réflexive sur le choix des expressions utilisées lorsque nous faisons
allusion aux contenus d’enseignement, d’autant plus que la discipline de recherche dans
laquelle s’inscrit notre étude se distingue par la préoccupation pour les contenus dont elle fait
la spécificité (Rosier, 2002; Reuter, 2013). Nous ne pouvions donc faire fi des incohérences
relevées par certains didacticiens (Chartrand, Lord, et Gauvin, 2010; Chartrand, Simard,
Aubin et Blain, 2011; Colin, 2011; Lord et Elalouf, 2016) sur le choix de certaines
expressions employées dans l’étude de la langue, comme celui de l’expression accord sujet-
verbe.
Par exemple, Chartrand (2012b) relève certaines imprécisions sur l’utilisation de la
notion d’accord lorsqu’il est associé à la fonction syntaxique de sujet et au verbe. En fait,
bien que présent dans tous les ouvrages consultés - comme c’est le cas dans tous les manuels
scolaires utilisés au secondaire gabonais de même que dans les instructions officielles
53
gabonaises - elle déplore le fait qu’aucun n’en donne une explication claire. Pour elle, le
terme accord, souvent illustré par une flèche qui va d’un donneur à un receveur, ne saurait
désigner la relation morphosyntaxique qui va de la fonction syntaxique de sujet au verbe.
Elle explique que :
« Les notions de donneur et de receveur supposent un transfert de quelque
chose entre deux unités du système d’une langue. Ce quelque chose, ce sont des
traits grammaticaux ; il s’agit du genre et du nombre lorsque le donneur est un
nom ou un pronom et que le receveur est un déterminant, un adjectif ou un
participe passé; et de la personne et du nombre lorsque le donneur est un nom,
noyau du groupe nominal, ou un pronom dans la fonction de sujet, et que le
receveur est un verbe. Les mots, donc, ne donnent ni ne reçoivent un accord ;
ils donnent ou reçoivent plutôt des traits grammaticaux, d’où l’inexactitude
des expressions donneur d’accord et receveur d’accord, qu’on devrait éviter.
Accorder un mot, c’est lui attribuer les marques morphologiques de genre et de
nombre ou de nombre et de personne de son donneur. » (Chartrand, 2012b : 3).
Pour Chartrand (2012b), la notion d’accord devrait être définie explicitement,
comme un phénomène morphosyntaxique par lequel un donneur transfère ses traits
grammaticaux à un autre mot, un receveur, lorsqu’ils sont en relation sur le plan syntaxique.
Partant de ce postulat, nous nous sommes aperçues que les exercices que nous
comptions analyser ne se limitaient pas uniquement à ceux portant sur le phénomène
morphosyntaxique par lequel le sujet (le donneur) attribue ses traits grammaticaux au verbe
(le receveur) lorsqu’ils sont en relation sur le plan syntaxique. Notre analyse s’étend
également aux exercices des manuels scolaires dans lesquels d’autres phénomènes
morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe se réalisent. En fait, comme le note Fauchart
(2001), les exercices portant sur les constituants de la phrase dans les manuels scolaires ont
tendance à porter plus sur l’identification des constituants de la phrase et le métalangage et
plus largement sur l’accord que sur la réalité d’une production langagière. En d’autres
termes, une grande part des exercices proposés dans les manuels scolaires offrent souvent
peu d’opportunité aux élèves de percevoir les effets de style produits lorsque les constituants
de la phrase sont placés d’une façon autre que celle couramment utilisée. De telles restrictions
incitent peu à une réflexion qui permettrait d’interroger l’effet produit par telle ou telle
transformation demandée alors que se situe là aussi un travail réflexif, sur le discours et sur
la façon dont il est produit.
54
Or, comme le montre Fournier (2001) dans son article Expression et place des
constituants dans l’énoncé en français classique : la relation sujet-verbe et la relation verbe-
objet, le sujet et le verbe peuvent être soumis à des contraintes d’expression et de position.
Dans le cas du sujet, on peut relever l’absence du sujet ou le sujet sous-entendu. Par exemple,
dans des phrases injonctives du type Entrez!, le sujet sous-entendu est la 2e personne du
pluriel et dans des phrases du type Ma sœur parle italien et danse très bien la valse, on peut
noter l’effacement ou l’ellipse du sujet « Ma sœur » pour éviter la répétition. Il en est de
même pour la place du sujet par rapport au verbe. En effet, il peut être antéposé au verbe,
comme c’est le plus courant Les étoiles scintillent dans le ciel ou postposé à ce dernier Au
loin apparurent les premières lueurs de l’aube pour exprimer un effet de style particulier.
Ces contraintes d’expression et de position du sujet sont également observées lorsqu’il y a
une insertion entre le sujet et le verbe telle l’insertion d’une subordonnée Les chats qui
miaulent devant la porte sont noirs, d’un pronom L’averse les a mouillées ou dans des
constructions disloquées56 Marie, ne voulant pas manquer son cours de danse, courut pour
rattraper le bus. Pour ce qui est du verbe, outre sa place par rapport au sujet (antéposé ou
postposé au sujet, directement placé après le sujet ou séparé par un élément, proche du sujet
avec lequel il est en relation ou éloigné de ce dernier), il peut tout aussi être effacé pour éviter
la répétition dans certaines productions langagières comme dans Nous aimions manger
devant la terrasse et nous remémorer nos souvenirs d’enfance.
Notre choix de parler de PMSV plutôt qu’accord sujet-verbe s’appuie enfin sur un
constat récurrent. Dans les manuels scolaires utilisés au Gabon, comme dans plusieurs
ouvrages de grammaire relativement récents - Précis de grammaire de Grevisse de 1993, Le
petit guide grammatical de Breton de 1987, Grammaire du français 6e/5e d’ÉDICEF de 2003,
la Nouvelle grammaire du français de Larousse de 2003, etc.- l’étude de la langue reste
encore fortement influencée par la grammaire traditionnelle57. En effet, celle-ci correspond
davantage à un ensemble de savoirs élaboré pour l’enseignement des règles prescriptives du
français normé (Chartrand, 1996). Dès lors, les ouvrages mettent l’accent sur l’apprentissage
des exceptions plutôt que sur les grandes régularités du système de la langue. Ainsi, dans les
manuels scolaires gabonais, à côté de la leçon portant sur l’accord sujet-verbe, tous proposent
56Lorsque le sujet est détaché en prolepse, ou en reprise, hors du cadre strict de la phrase (Fournier, 2001). 57 Elle se distingue de la grammaire scientifique, une discipline scientifique dont l'objet d'étude est la langue, son histoire et
sa structure (Combettes et Lagarde, 1982). À l’instar d'autres activités scientifiques, elle évolue.
55
des leçons sur la relation sujet-verbe comme des phénomènes morphosyntaxiques particuliers
qui devraient faire l’objet d’une attention particulière. Par exemple, le manuel La nouvelle
Méthode de français 6e propose, en plus de la leçon « L’accord du verbe avec son sujet »
(Nathan, 1997 : 14), les leçons « Le sujet inversé » (p.18), « Sujets multiples coordonnés par
et, ou, ni » (p.22) et la leçon « Le sujet qui » (p.110). Il en de même du manuel Indigo français
6e qui, en plus de la leçon «L’accord sujet/verbe » (Hatier international, 2001 :20) présente
plus loin la leçon « L’accord sujet-verbe : quelques cas particuliers » (p.80) et la leçon « La
fonction sujet (2) » (p.100) dans laquelle il est fait allusion à la place du sujet par rapport au
verbe. Ce constat s’observe aussi dans le manuel Le Français en 5e (EDICEF, 2001b) dans
lequel sont proposées les leçons « L’accord du verbe avec son sujet (1) » et « L’accord du
verbe avec son sujet (2)». Si la première leçon présente le PMSV lorsque le sujet est un
adverbe de quantité, un nom collectif et un pronom indéfini, la deuxième leçon montre le
PMSV lorsque le verbe est en relation avec plusieurs sujets, lorsque les sujets sont
coordonnés par ni et lorsque les sujets sont constitués de pronoms de personnes différentes.
Ces observations ont conduit à la conclusion que les manuels distinguent, à côté du
phénomène morphosyntaxique qui renvoie au transfert des traits grammaticaux d’un donneur
(le sujet) à un receveur (le verbe), d’autres phénomènes morphosyntaxiques qui s’opèrent
entre le sujet et le verbe si on examine la relation sujet-verbe sous l’angle de l’expression et
de la place des constituants dans la phrase. Enfin, nous sommes d’avis, comme le suggèrent
Chartrand (2012b), Lord et Elalouf (2016), que si l’on veut éviter que les élèves ne fassent
des interprétations diverses et erronées et qu’ils adoptent une attitude réflexive sur la langue,
il est important que les enseignants, les programmes et les manuels scolaires fassent preuve
de justesse, de constance et de rigueur dans le choix des termes utilisés et veiller à ce qu’ils
soient systématiquement explicités.
Pour clore ce point, nous sommes consciente que l’expression PMSV ne constitue pas
l’expression couramment utilisée. En utilisant PMSV plutôt qu’accord du verbe avec son
sujet, nous avons simplement voulu montrer que dans le cadre de notre recherche, cette
expression reste peu explicite et ne reflète pas suffisamment les exercices que nous avons
choisi d’analyser.
56
2.1.3 Un aperçu de quelques PMSV
Après avoir précisé ce que nous entendons par PMSV, nous pensons être en mesure
de présenter une sélection d’un certain nombre de connaissances permettant d’avoir une
vision globale des PMSV généralement enseignés aux élèves. Ces PMSV se trouvent la
plupart du temps déclinés dans des manuels, des ouvrages de grammaire, les programmes et
les progressions, les instructions officielles, etc. Les PMSV ci-dessous ont été rassemblés et
présentés sous forme de tableau (cf. tableau 1) sur la base d’une variété de documents : des
ouvrages présentant les programmes de grammaire du Québec (Bray et al., 1982; Langelier,
1987; Piccard et Hénault, 1991; Villers, 2004; Villers et al., 2009; Chartrand et al., 2011),
des ouvrages généraux sur la grammaire de France (Dubois et al., 1979; Lagane, 1995;
Hamon, 1995) et les textes officiels gabonais (progressions et programme) (Ministère de
l’Éducation Nationale, 1995; Ngandu et al., 2011; Ministère de l’Éducation Nationale, 2016).
Ce tableau n’a pas pour visée de détailler de façon exhaustive tous les PMSV. Il vise
principalement à rappeler quelques connaissances sur les PMSV exercées dans les manuels
de français.
Tableau 1 Principaux phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe
1. Le PMSV de façon générale.
Il s’agit ici du transfert des traits du sujet au verbe dans les phrases. En règle générale, le verbe
reçoit les traits du sujet.
Exemples : Les chiens dorment la nuit. – Les chiens sont sortis.
2. Le PMSV lorsque le verbe est conjugué à un temps composé :
au passif : l’auxiliaire du verbe reçoit les traits (personne et nombre) du sujet ; le
participe passé reçoit les traits (personne, nombre, genre) du sujet: Ex : Les souris
sont chassées de la maison.
à l’actif : l’auxiliaire du verbe reçoit les traits (personne et nombre) du sujet.
Exemple : Les chats avaient chassé les souris.
3. Le PMSV lorsque le sujet est sous-entendu :
Dans le cas où le verbe est au mode impératif : la relation s’établit selon la personne
(2e personne du singulier, 1re personne du pluriel et 2e personne du pluriel), du contexte
57
et des règles de conjugaison au mode impératif. Exemples : Lave tes vêtements.-
Mangeons des fruits.- Venez nous voir maintenant.
Dans une énumération de verbes: Le sujet transfère ses traits à tous les verbes
énumérés en relation avec lui. Exemples : Les enfants s’amusent, jouent, dansent,
sautent et crient.- Les élèves aiment bavarder, refusent d’étudier et préfèrent courir.
4. Le PMSV lorsque, dans la phrase, le sujet est :
Le sujet du participe : le participe reste invariable. Exemple : Tes efforts aidant, tu…
Le sujet de l’infinitif : l’infinitif reste invariable. Exemple : J’ai entendu les enfants
crier.
5. Le PMSV lorsque:
Le sujet est placé après le verbe : le sujet transfère ses traits au verbe. Exemple : Sur
la table, étaient disposés divers mets. -Dans l’église, prient les fidèles de Saint-
Mathieu.
Le sujet est éloigné du verbe dans la phrase : le sujet transfère ses traits au verbe
avec lequel il est en relation. Ex : Les amis de Pauline, ceux qui vivent à l’étranger,
ceux avec qui elle pratique son anglais, viennent la voir.
6. Le PMSV lorsqu’il y a une énumération de sujets : le verbe se met à la 3e personne du
pluriel. Exemple : Le sujet, le complément, le verbe, l’adjectif et le nom appartiennent à la
métalangue.
7. Le PMSV lorsqu’il y a une énumération de verbes ou de groupes verbaux : les verbes
reçoivent les traits du sujet. Exemple : Les enfants jouent, dansent sur de belles mélodies,
regardent les oiseaux et sourient aux passants.
8. Le PMSV lorsque, dans la phrase, le sujet est le pronom impersonnel « il »58 : le verbe
est à la 3e personne du singulier. Exemple : Il reste deux douzaines d’œufs.
9. Le PMSV lorsqu’un pronom est placé entre le sujet et le verbe : le verbe reçoit les traits
du sujet. Exemple : Le concierge les voit tous les matins- Les garçons lui offrent des fleurs.
58 Mentionnons que dans certains ouvrages, on désignera le pronom impersonnel « il » qui a la fonction de sujet sous
l’appellation sujet apparent ou sujet grammatical tandis qu’on parlera de sujet réel ou sujet logique pour désigner le mot
ou groupe de mots considéré comme le sujet, sur le plan sémantique, du verbe utilisé. Dans notre illustration, on dira par
exemple que le pronom impersonnel « il » est le sujet apparent ou le sujet grammatical et « deux douzaines d’œufs » est le
sujet réel ou le sujet logique.
58
10. Le PMSV lorsque le verbe a pour sujet un nom ou plusieurs noms et un pronom ou
deux pronoms de personnes différentes : le verbe se met au pluriel et prend la marque de la
personne qui a la priorité (la 1re personne a la priorité sur la 2e, et la 2e, sur la 3e).
Exemples : Les enfants, Sarah et moi lavons nos mains. - Mes amis et moi lavons nos mains.
– Toi et moi lavons nos mains. - Elle et toi lavez vos mains.
11. Le PMSV avec les sujets unis par une conjonction de comparaison ou un
coordonnant exprimant l’addition (comme, ainsi que, de même que, avec…) : le verbe se
met au pluriel, sauf si le sujet est séparé de l’autre sujet et du verbe par une virgule.
Exemples : Mon ami ainsi que mon enfant lavent des vêtements. - Mon ami, ainsi que mon
enfant, lave des vêtements.
12. Le PMSV lorsque le sujet est :
un nom collectif accompagné d’un complément du nom au pluriel:
a) le verbe reçoit les traits du nom collectif si ce dernier est accompagné d’un
déterminant défini. Exemple : Le groupe d’amis lave des vêtements.
b) le verbe reçoit les traits du nom collectif ou du complément du nom si ce dernier est
accompagné d’un déterminant indéfini. Exemple : Un groupe d’amis lavent/lave des
vêtements.
une expression collective accompagnée d’un complément du nom au pluriel:
a) le verbe reçoit les traits de l’expression collective si cette dernière est accompagnée
d’un déterminant défini. Exemple : La grosse meute de chiens aboie sur les passants.
b) le verbe reçoit les traits de l’expression collective ou du complément du nom si
l’expression collective est accompagnée d’un déterminant indéfini.
Exemple : Une grosse meute de chiens aboie/aboient sur les passants.
13. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom relatif « qui » : le verbe reçoit les traits du mot
ou de l’expression auquel renvoie le pronom relatif « qui » sujet. Exemples : C’est toi qui
laves les mains- Moi qui suis le moins gentil, je…- Voilà que c’est nous qui sommes dans
l’univers.
14. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom personnel « on » :
a) le verbe est toujours au singulier. Exemple : On se lave les mains.
b) le verbe reçoit les traits appropriés lorsque le sujet « on » est utilisé à la place de « nous »
et est accompagné d’un participe passé employé avec « être » et d’un adjectif.
59
Exemples : On est rentrées satisfaites de notre journée. - On est rentrés satisfaits de notre
journée.
15. Le PMSV lorsque le sujet est :
un adverbe de quantité (trop, combien, moins de, plus d’un, un de ceux qui...) :
le verbe reçoit les traits selon l’adverbe utilisé. Ex: Trop viennent…- Plus d’un vient…
un adverbe de quantité accompagné d’un complément du nom : le verbe reçoit les
traits selon l’adverbe utilisé. Ex : Trop de citoyens voteront. - Plus d’un homme vient…
16. Le PMSV lorsque les sujets sont synonymes ou placés en gradation : le verbe est au
singulier. Exemples : Laver et nettoyer suffit pour…- Mon camarade, mon ami lave…
17. Le PMSV lorsque le sujet est un mot résumant une énumération (nul, rien, tout,
aucun, chacun, etc.) : Le verbe est au singulier. Exemple : Les parents, les amis, les
connaissances, les collègues, nul n’est parfait.
18. Le PMSV avec « ou » ou « ni »:
les sujets au singulier sont unis par la conjonction « ou » exprimant un choix : le
verbe est au singulier. Exemple : Mon ami ou ma camarade lave…
les sujets au singulier sont unis par les conjonctions « ou » ou « ni » exprimant
l’addition : le verbe se met au pluriel. Exemples : Mon frère ou moi lavons…- Ni mon
frère ni mon ami ne lavent…
19. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom « ce », sujet en relation avec le verbe « être » :
le verbe reçoit ou non les traits du mot auquel renvoie le pronom « ce » sujet. Exemples : Ce
sont des laveurs. - C’est des laveurs.
20. Le PMSV dans certaines expressions : le verbe reçoit ou non les traits du sujet ou du
noyau du sujet en fonction de l’expression. Exemples : Qu’importent/qu’importe les sommes
empruntées! - Peu importe/peu importent vos raisons, vous êtes inexcusables.
21. Le PMSV lorsque, dans la phrase, le verbe est mis en relation avec deux sujets unis
par la conjonction de coordination « et ».
le verbe se met au pluriel ou au singulier en fonction des sujets qui sont reliés.
Si les sujets sont synonymes, le verbe se met au singulier. Exemple : Laver et
nettoyer suffit pour…
Si les sujets ont des sens différents, le verbe se met au pluriel.
60
Exemple : Ma mère et ma sœur sont parties en ville …
Exposés de cette manière, nous sommes consciente que les PMSV exposés ci-
dessous semblent assez complexes et laborieux pour des élèves de 1re année du secondaire,
ce qui pourrait mener à la conclusion que leur enseignement et leur apprentissage exigent
plus de temps pour tous les mémoriser pour être en mesure de les effectuer correctement.
C’est du reste ce que certains didacticiens tels Roubaud et Touchard (2004) suggèrent. Pour
eux, il serait plus judicieux de les enseigner en passant par exemple des régularités pour
ensuite décliner leurs particularités. Le point suivant vient renforcer cette impression de
complexité.
2.1.4 Quelques orientations pour réaliser les PMSV
L’apprentissage de la langue nécessite de développer, de mobiliser et de coordonner
un ensemble de connaissances déclaratives et procédurales afin d’effectuer un raisonnement
sur un fait de langue (Nadeau et Fisher, 2006). Dans cette perspective, mentionnons certaines
des connaissances déclaratives et procédurales59 généralement enseignées aux élèves pour
leur permettre d’effectuer correctement les PMSV. L’intention ici est d’offrir un aperçu des
méthodes pédagogiques et didactiques généralement préconisées pour permettre aux
apprenants d’établir la mise en relation entre la fonction syntaxique de sujet et le verbe. Pour
ce faire, nous nous sommes appuyée sur notre expérience d’enseignante de français, sur les
instructions des textes officiels gabonais (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995;
Inspection générale des services, 2016) dans la mesure où notre étude s’appuie sur le contexte
du système éducatif gabonais, sur divers ouvrages traitant de cette relation morphosyntaxique
(Jaffré, 2002; Villers, 2004; Grevisse et Goosse, 2008; Villers et al., 2009; Brissaud et Cogis,
2011; Chartrand et al., 2011) et sur les avancées actuelles de la recherche (Nadeau et al.,
2006; Gauvin et al., 2013; Gourdet et al., 2016; Elalouf, Gourdet, et Cogis, 2016).
Cela dit, avant d’établir les PMSV, il nous semble utile de rappeler que les élèves du
primaire ou du secondaire disposent, a priori, avant l’institutionnalisation des savoirs60, d’un
59 Pour ce qui est des connaissances conditionnelles, l’élève devrait être capable de repérer à coup sûr tous les verbes
conjugués de son texte pour pouvoir les mettre en relation avec le sujet et par la suite reconnaitre les contextes linguistiques
où ces règles s’appliquent. 60 Le concept d’institutionnalisation est introduit par Brousseau (1998) en didactique des mathématiques afin d’illustrer que
le savoir, dans l’interaction didactique, se voit fixer à certains moments. Elle peut être collective ou individuelle, informelle
ou ritualisée, écrite ou orale, schématique ou textuelle, etc. L’institutionnalisation collective en classe distingue les moments
qui la précèdent (préinstitutionnalisation) de ceux qui suivent (postintitutionnalisation).
61
certain nombre de connaissances déclaratives, procédurales et marginales plus ou moins
valides (Gauvin et al., 2013) auxquelles s’ajoutent celles acquises au cours de
l’institutionnalisation des savoirs. Ces connaissances regroupent celles relatives à la notion
de verbe, celles concernant la fonction syntaxique de sujet et celles en rapport avec leur
relation. Dans le cas du verbe, on pourrait partir du principe que l’élève maitrise les
caractéristiques syntaxiques, morphologiques et sémantiques du verbe pour être en mesure
de le repérer correctement dans une phrase. Pour parvenir à cette identification, l’élève est
censé recourir à des connaissances tant déclaratives – Le verbe est le seul mot qui se
conjugue, le verbe est receveur d’accord et reçoit l’accord du sujet, le verbe est transitif,
intransitif ou attributif, a une construction pronominale et impersonnelle, possède différentes
valeurs sémantiques, est formé d’un radical et d’une terminaison, etc.- que procédurales. Ces
dernières peuvent être décisives (ajout de ne…pas autour du verbe, conjugaison :
remplacement du mode, du temps de la personne ou du nombre) ou non décisives (le verbe
ne s’efface ni ne se déplace). Pour ce qui est du sujet, il est également nécessaire pour les
élèves de disposer d’un certain nombre de connaissances déclaratives et procédurales pour
effectuer adéquatement les PMSV. Pour ce qui est des connaissances déclaratives, on s’attend
par exemple, a priori, à ce que l’élève soit en mesure de définir ce qu’est un sujet, qu’il
sache que le sujet peut être composé d’un ou de plusieurs mots de classe grammaticale
différentes (Marie/Elle regarde la télévision→ nom propre/ pronom ; Le chat dort→
déterminant +nom ; Paul et moi allons à la plage→ nom+ coordonnant+ pronom
personnel ;Les petits élèves de la maternelle vont à la cantine→ GN constitué d’un
déterminant, d’un adjectif et d’un nom + préposition+ GN constitué d’un déterminant et
d’un nom), etc.), qu’il sache quels sont les mots ou groupes de mots pouvant exercer la
fonction syntaxique de sujet (pronom, groupe du verbe à l’infinitif, groupe nominal, nom
commun ou propre, subordonnée complétive.), qu’il sache qu’il peut être sous-entendu (dans
les cas des verbes conjugués au mode impératif, dans les phrases où il y a une énumération
d’actions, lorsqu’il y a ellipse, etc.), qu’il sache que le sujet peut être placé avant, après ou
éloigné du verbe avec lequel il est en relation dans une phrase, qu’il sache que le mot exerçant
la fonction de sujet dans une phrase est donneur d’accord, etc. Quant aux connaissances
procédurales concernant le sujet, l’élève devrait être capable de repérer le sujet dans une
phrase. Pour cela, il dispose de plusieurs stratégies : recourir à la manipulation syntaxique
62
d’encadrement « c’est…qui» pour trouver le sujet; poser la question « Qui est-ce
qui…/qu’est-ce qui…» après le verbe; réduire la phrase en une phrase minimale pour repérer
les éléments qui ne peuvent être supprimés (sujet, verbe et complément essentiel); remplacer
le sujet par un pronom personnel, etc. Détenteur de ces préalables, l’élève pourra par la suite
nommer et comprendre la règle d’accord appropriée en fonction du phénomène
morphosyntaxique en jeu. Une fois cette étape franchie, il lui faudra examiner les traits
grammaticaux de l’élément qui remplit la fonction de sujet pour s’assurer que ceux-ci sont
en conformité avec ceux qu’il va attribuer au verbe.
Pour conclure, retenons que la diversité des nombreuses stratégies décrites ci-dessus
pourrait, tout comme les différents PMSV exposés plus haut, expliquer les écueils rencontrés
par les élèves gabonais. Le point suivant montre que ces obstacles se perçoivent aussi chez
les élèves d’autres contextes éducatifs.
2.1.5 Les difficultés liées à l’apprentissage des PMSV
Notre intérêt pour les PMSV se justifie également par le fait que de nombreuses
études se sont penchées sur des difficultés que rencontrent les élèves pour s’approprier les
connaissances relatives à la notion de verbe, à la fonction syntaxique de sujet et aux
phénomènes morphosyntaxiques qui s’opèrent lorsqu’ils sont en relation (Fayol et al., 1991;
Hupet, Schelstraete, Demaeght et Fayol, 1996; Negro et Chanquoy, 2000; Largy et Dédéyan,
2002; Brissaud et Cogis, 2004; Pellat et Teste, 2004; Roubaud et Touchard, 2004; Brissaud,
Chevrot et Lefrançois, 2006; Lefrançois, 2009; Duchesne, 2011; Geoffre et Brissaud, 2012).
Ces travaux montrent que tout autant que les apprenants gabonais, les élèves francophones
québécois et français en fin de cycle primaire, ceux au début du secondaire et même les
adultes rencontrent des obstacles généralement identiques à ceux des Gabonais.
En France, dans le cadre d’une recherche dont le but est d’étudier la construction de
la notion du verbe chez des élèves de sept ans, Roubaud et Touchard (2004) observent que
les élèves se heurtent à de nombreux obstacles d’ordre linguistique pour repérer le verbe. En
effet, en demandant individuellement aux élèves de rechercher des verbes dans un extrait de
texte, les auteurs constatent que les élèves éprouvent des difficultés liées au lexique, à la
longueur du mot et à la syntaxe. En ce qui concerne les difficultés attachées à la syntaxe par
exemple, les auteurs notent que les élèves ont de la difficulté à repérer le verbe lorsque ce
dernier est éloigné du sujet avec lequel il est en relation, lorsqu’il se présente sous la forme
63
d’un participe passé employé comme adjectif comme dans la phrase « Je ne l’ai fait que
contraint et forcé » ou en présence de syntagmes verbaux du type « Tu oses venir me voler
de mes doucettes! » et lorsque le verbe est conjugué à un temps composé « Je ne l’ai fait que
…. » (Roubaud et Touchard, 2004: 263). Par ailleurs, en présence de verbes du type avoir
envie de, être pauvre, être en colère, les élèves ont tendance à repérer envie, pauvre et colère
comme étant le verbe dans la séquence syntagmatique. Selon les auteurs, la même
observation a été faite chez des élèves en fin de cycle primaire (CM2) même si le pourcentage
d’erreur de repérage du verbe est moins important. Pour surmonter ces difficultés, les pistes
envisagées par les deux chercheurs renvoient entre autres à étaler les apprentissages sur une
période de temps, à affiner le travail sur les indices afin de favoriser chez les jeunes élèves
un repérage sûr et de travailler de façon plus systématique sur les obstacles qui empêchent
l’identification correcte du verbe dans l’optique d’aider les élèves à les contourner.
Une autre étude, réalisée par Gauvin et Boivin (2013), confirme cette difficulté des
apprenants à repérer le verbe. En observant à la fois les connaissances mobilisées par les
élèves pour repérer le verbe avant et après l’institutionnalisation des savoirs en classe et celles
leur permettant de réussir l’identification, il ressort que les élèves de 1re année secondaire
utilisent plus les connaissances procédurales que déclaratives pour repérer le verbe, mais ont
du mal à se doter de critères d’identification fiables et stables, et ce, peu importe les verbes
et les contextes syntaxiques. Les auteures notent également que les apprenants utilisent, à
côté de ces connaissances déclaratives et procédurales, de nombreuses connaissances
qu’elles identifient comme des « connaissances marginales » ou « non décisives » (Gauvin
et Boivin, 2013 : 555). Ces connaissances seraient à considérer comme ne faisant pas partie
du savoir institutionnalisé. Elles proviendraient de connaissances élaborées depuis la
scolarité primaire. Selon Gauvin et Boivin, le problème de ces types de connaissances est
qu’elles peuvent se révéler exactes, inexactes ou partiellement exactes. Par exemple, certains
élèves utilisent comme connaissances marginales pour repérer le verbe des connaissances
déclaratives marginales exactes du type « un mot qui est précédé de un n’est pas un verbe »,
des connaissances procédurales exactes du type « pour repérer le verbe, il est possible de
mettre il devant lui », des connaissances procédurales inexactes telles « l’ajout de ne …pas
autour du verbe ne fonctionne pas toujours », des connaissances déclaratives inexactes
comme « un verbe ne peut pas être le dernier mot d’une phrase », des connaissances
64
procédurales partiellement exactes du type « il est possible de repérer le verbe en remplaçant
le nom placé devant le verbe par un pronom » et des connaissances déclaratives partiellement
exactes comme « il y a un pronom devant un verbe ». Pour les chercheures, ces connaissances
marginales se révèlent assez peu efficaces pour repérer le verbe durant la phase de
préinstitutionnalisation des savoirs et durant la phase de postintitutionnalisation (phase
d’exercisation) car elles présentent des limites à plusieurs reprises. Pour surmonter cette
difficulté, elles suggèrent la nécessité de mettre en place un dispositif d’enseignement qui
ferait comprendre aux élèves que ces connaissances sont restreintes, peu opérationnelles et
parfois invalides.
Ainsi, chez les élèves en fin de cycle primaire et chez ceux au début du secondaire,
l’identification du verbe reste problématique, ce qui constitue un handicap certain étant donné
la place importante qu’occupe cette notion dans l’apprentissage de la langue. En effet, le
verbe est à la fois le noyau du groupe verbal et fait partie des constituants obligatoires de la
phrase. Son identification est donc essentielle sur le plan syntaxique, pour la compréhension
de la structure de ce groupe, pour la structure de la phrase et pour permettre d’effectuer
correctement la mise en relation entre le sujet et le verbe (Roubaud et Touchard, 2004). En
outre, Nadeau et al. (2006) rappellent que l’apprentissage de la langue nécessite de
développer, de mobiliser et de coordonner un ensemble de connaissances déclaratives et
procédurales afin d’effectuer un raisonnement grammatical complet. Ainsi envisagée, la
connaissance sur la langue inclut la capacité à nommer une règle, une classe de mots, etc.
Toutefois, le fait de nommer des règles, des classes de mots ou des fonctions syntaxiques ne
signifie pas nécessairement une compréhension totale de la notion. D’où la nécessité que les
connaissances déclaratives soient transformées en connaissances procédurales pour être
utilisées fonctionnellement. Ce sont elles qui permettront aux apprenants de poser des actions
et d’utiliser diverses stratégies.
D’autres travaux mettent en évidence le fait que les conceptions des élèves diffèrent
grandement de ce que l’on croit qu’ils savent. C’est le cas du travail effectué par Gourdet et
Roubaud (2016), en appui avec les travaux de Brissaud et Cogis (2002). L’étude dévoile qu’il
existe un écart entre ce que les enseignants croient que les élèves maitrisent et ce que les
élèves connaissent véritablement dans l’enseignement de la langue, notamment en ce qui
concerne l’enseignement du verbe à l’école chez les élèves à l’entrée du collège.
65
Concrètement, en interrogeant les enseignants sur la façon dont ils définiraient le verbe aux
élèves et en demandant aux élèves de définir le verbe, les auteurs relèvent de nombreux
écarts. Par exemple, les résultats montrent que si les connaissances des enseignants sur
l’enseignement du verbe sont tributaires de leurs propres connaissances linguistiques et de
leur réflexion métalinguistique, le savoir grammatical des élèves serait le « résultat d’un
processus d’assimilation et de réélaboration » (Gourdet et Roubaud ; 2016: 5). Les auteurs
notent également des écarts sur le choix des propriétés des verbes entre les deux groupes. Si
les enseignants mettent majoritairement en avant l’entrée sémantique en se référant à l’idée
d’action61, suivie des entrées morphologiques et syntaxiques, les élèves perçoivent le verbe
surtout d’un point de vue morphologique du fait de la conjugaison. Sur la base de réponses
fournies par des élèves de 10-11 ans sur la question « Qu’est-ce qu’un verbe? », les auteurs
observent que la dimension morphologique domine chez la grande majorité d’entre eux62 (78
%). Signalons toutefois que dans une étude de Gourdet, Cogis, et Roubaud (2016), il ressort
que les enseignants mettent en avant l’aspect morphologique au détriment de la syntaxe
contrairement à l’étude de Gourdet et Roubaud (2016) où la dimension sémantique est
majoritaire. Un autre point relevé est que les propriétés morphologiques diffèrent des
enseignants et des élèves. En effet, les enseignants perçoivent deux désinences, celle du
temps et celle liée au sujet alors que les élèves se montrent plus sensibles à l’aspect formel
du verbe63. Enfin, l’étude révèle aussi des propriétés syntaxiques différemment sollicitées
dans les deux groupes. En fait, si une proportion plus élevée des enseignants définit le verbe
en utilisant une propriété syntaxique, celle autour de la référence au sujet, les élèves, eux,
identifient principalement le verbe dans le lien avec les pronoms de conjugaison. Tous ces
éléments pourraient expliquer les déperditions entre enseignement et apprentissage,
puisqu’elles mettent à jour ce que les élèves retiennent et/ou comprennent de ce que les
enseignants, et partant les manuels scolaires, pensent enseigner. Pour conclure, les auteurs
insistent sur la nécessité de réinterroger l’enseignement du verbe et de réduire ces décalages
entre enseignement et apprentissage. Pour ce faire, une des propositions est de penser une
approche articulant les pratiques scolaires d’enseignement, les usages et les besoins
langagiers des élèves. Ce changement, selon les auteurs, « ne peut se réaliser sans une
61 Ce trait sémantique d’action est également perçu dans l’étude de Gourdet, Cogis, et Roubaud (2016). 62 Le corpus était constitué de 491 réponses écrites venant de 32 classes d’élèves de 10-11 ans. 63 Les aspects formels renvoient aux réponses mentionnant l’infinitif et les groupes du verbe.
66
formation initiale et continue de qualité, étayée par des savoirs linguistiques et didactiques
rénovés » (Gourdet et Roubaud, 2016 :13).
Une autre catégorie d’études examine les PMSV. Par exemple, Teste (2004) mène
une recherche-action qui s’attache à l’acquisition de chaînes morphographiques d’accords
par les élèves de cycle III64 entre la fonction syntaxique de sujet et le verbe65. L’intérêt de
cette étude découle d’un constat : la difficulté des élèves en fin d’école primaire et en 1re
année de secondaire « à mobiliser un savoir-faire précis en situation de production écrite » et
à mettre en relation cette tâche « avec les leçons et exercices qui ont permis la découverte et
la structuration de ce point précis du fonctionnement de la langue » (Teste, 2004 : 335). Pour
expliquer ces difficultés, l’auteur part de la logique mise à l’œuvre dans une leçon de
structuration (observation →induction d’une règle→ application par déduction→
détachement du savoir-faire et du savoir) et y perçoit plusieurs zones d’ombres. Par exemple,
pour ce qui est de l’étape de l’application par déduction, celle des exercices d’application
standardisés et systématiques, l’auteur note que même si ces derniers sont relativement bien
réussis « en raison de leur apprêté et de leur grande proximité à la forme du savoir mis sous
forme de règle dans la phase précédente, ils ne garantissent en rien une appropriation
satisfaisante de la logique du fonctionnement régulier » (Teste, 2004 : 337). Une autre zone
d’ombre se perçoit dans le détachement du savoir acquis, notamment lors des moments
d’orthographe en actes de production écrite. Pour Teste (2004), les savoir-faire à mobiliser
ne seraient pas reconnus en raison du caractère très contextualisé des activités de découverte
et de structuration et du fait qu’ils n’auraient pas été suffisamment mis en mots par l’élève,
à sa manière et selon son niveau de compréhension. Signalons que cette étude s’appuie sur
les apports de Jaffré et Bessonnat (1993) concernant l’analyse des causes dominantes
d’erreurs commises par les élèves et les adultes. Ces derniers font intervenir trois critères
pour prévoir les risques potentiels d’erreurs : le critère de dynamique, le critère de position
et le critère de rupture. Le premier considère qu’étant donné le mouvement de l’écriture qui
va vers la droite en français, les éléments placés à droite pourront s’accorder plus
naturellement que ceux qui sont placés à gauche parce qu’ils demandent une anticipation de
64 Le cycle III regroupe les classes du CM1, CM2 et de 6e. 65 L’étude s’est intéressée, en ce qui concerne les PMSV, à la chaine d’accord entre le groupe nominal en position de sujet
et le verbe d’un groupe verbal et à la chaîne d’accord entre le groupe nominal en position de sujet, le verbe de type être, et
le groupe nominal en position d’attribut du sujet.
67
l’accord et donc une plus grande attention, même chez les scripteurs experts. Le critère de
position s’appuie sur le fait que la redondance de l’accord en nombre sur plusieurs segments
de phrase oblige à le conserver en mémoire tout au long de la chaîne écrite. Or, plus cette
conservation est longue, plus les jeunes élèves, qui écrivent lentement et dont la mémoire de
travail peut être rapidement saturée, risquent d’oublier d’accorder les mots éloignés. Le
troisième critère, celui de rupture, s’appuie sur l’interruption d’une succession des éléments
d’une chaîne morphographique par un autre élément, « un rupteur »66, qui obéit à d’autres
lois morphologiques et qui « introduit inévitablement une perturbation supplémentaire,
même pour un adulte expert » (Teste, 2004 : 334).
En 2009, Lefrançois mène une étude dont l’un des objectifs est de décrire la
conception qu’ont des élèves francophones de 3e, 4e et de 5e années du primaire du pluriel
des verbes. Les résultats révèlent que la notion de pluriel est vue généralement comme une
relation entre différents mots de la phrase, que les arguments des élèves pour justifier le
pluriel de chaque classe de mots reposent sur des déductions qui leur sont propres et que leur
variété pour expliquer des cas de figure différents à l’intérieur d’une même classe de mots
révèle que la notion de pluriel verbal n’est pas finalisée même en 5e année. En fait, quoique
les élèves parviennent à justifier les PMSV en recourant à différents arguments syntaxiques
(l’encadrement par c’est…qui, le remplacement du sujet par un pronom, l’identification du
donneur d’accord, etc.), l’auteure considère que ces relations morphosyntaxiques ne sont pas
toujours exprimées dans le sens attendu de la théorie grammaticale généralement admise,
celle de Grevisse et Goosse (2008) ou de celle de Riegel et Pellat, et Rioul (2009). En outre,
même si les élèves sont capables de comprendre les sens des marques du pluriel verbal avant
de pouvoir les produire (Fayol et al., 1991), les études montrent que ces derniers ont du mal
à justifier le pluriel des verbes, et ce, parce que la notion de sujet n’est pas encore construite
et que peu de critères syntaxiques sont disponibles pour justifier les accords, même en 5e
année primaire (Brissaud et Cogis, 2002; Guyon, 2003). Ces difficultés à justifier le pluriel
des verbes pourraient d’ailleurs expliquer qu’en 1re année secondaire, les élèves ont du mal
à maitriser les PMSV. En effet, des résultats statistiques des évaluations nationales effectuées
66 Le rupteur peut être simplement « désactivant » quand il ne porte aucune marque particulière : un adverbe Les enfants,
rapidement, terminent l’exercice ou un pronom relatif simple Les enfants qui jouent… Il peut être également considéré
comme « distracteur lorsqu’il porte des marques différentes de la chaine d’accord dans laquelle il s’insère « À Nothalten les
viticulteurs du village* pourchasse les grives à l’époque des vendanges tardives ». (Teste, 2004 : 334)
68
en France révèlent que seulement 45,7 % des élèves de 6e parviennent à effectuer
correctement la mise en relation entre le sujet et le verbe dans la phrase Les roses jaunes
parfument le salon (Cogis et Brissaud, 2003).
En somme, il apparait que les PMSV sont une notion difficile à maitriser pour la
grande majorité des élèves et que ce problème reste majeur dans la maitrise du français écrit.
En effet, bon nombre d’entre eux ont du mal non seulement à repérer les deux unités que sont
la fonction sujet et le verbe mais en plus il semble difficile pour les élèves de saisir les
subtilités des PMSV puisque celles-ci ne sont pas totalement acquises jusqu’au début de
secondaire. Par ailleurs, nous avons noté qu’il s’avère également difficile pour les élèves
d’acquérir les connaissances sur les PMSV, puisque ceux qui sont censés leur faciliter cette
appropriation, notamment les enseignants et les manuels scolaires, semblent souvent en
décalage avec ce que les élèves comprennent. Face à toutes ces difficultés, il nous a semblé
primordial d’interroger les recherches afin qu’elles puissent nous offrir des pistes qui
pourraient contribuer à endiguer ce problème. Les difficultés sur les PMSV étant nombreuses
et diverses, nous avons choisi de convoquer des concepts qui nous offriraient des moyens
d’analyser les exercices sur les PMSV dans les manuels scolaires.
2.2 Des orientations sur l’enseignement et sur l’apprentissage de
la langue
Les recherches en psychologie cognitive et en didactique du français nous fournissent
différentes indications dans la perspective d’une analyse des exercices sur les phénomènes
morphosyntaxiques. Ce point vise à en décliner certaines sur l’apprentissage en général et
sur l’apprentissage de la langue en particulier. Les concepts examinés nous ont permis
d’analyser les exercices sur les PMSV selon notre objectif général de recherche.
2.2.1 Les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles
Les recherches en psychologie cognitive montrent qu’il faut tenir compte de trois
grandes catégories de connaissances dans une perspective pédagogique : les connaissances
déclaratives, les connaissances procédurales et les connaissances conditionnelles (Tardif,
1997).
69
Les connaissances déclaratives sont des connaissances qui renvoient aux savoirs
théoriques reconnus par une communauté de pratique à un moment déterminé. Pour Fayol et
Largy (1992), ce sont des connaissances qui traitent des « savoir que ». Relativement à
l’étude de la langue, par exemple, les connaissances déclaratives concernent deux types de
faits : « d’une part, la maîtrise de l’orthographe des mots (savoir que apéritif ne prend qu’un
p, qu’ habit commence par h et se termine par t) et d’autre part la connaissance de règles
telles que le participe passé employé avec avoir s’accorde en genre et en nombre avec le
C.O.D. si celui-ci est placé avant le verbe. Il s’agit là de la mémorisation de la règle elle-
même, non de son utilisation » (Fayol et al., 1992 : 81). Dans un autre cas de figure sur la
maîtrise des règles, les connaissances déclaratives concernent des règles générales dont
l’élève a besoin pour pouvoir effectuer la très grande majorité des accords dans les textes
qu’il écrits (Chartrand, 2009). Les connaissances déclaratives peuvent être aussi considérées
comme des connaissances relatives aux faits (Dubois, Mohib, Oget, Schenk, et Sonntag, 2005
; Valiquette, 2008). Ce sont « des connaissances théoriques associées au quoi. Elles
représentent les savoirs, les faits de connaissance, les concepts. Ces connaissances
emmagasinées dans la mémoire à long terme se présentent sous la forme d’un réseau de
connaissances organisées, hiérarchisées et interreliées. Plus ce réseau est vaste et organisé,
plus il permet d’interpréter, de comprendre et d’apprendre. » (Valiquette, 2008: 70). Ces
connaissances sont fondamentalement des connaissances statiques plutôt que dynamiques et
doivent, pour permettre l’action, être traduites en procédures et en conditions (Tardif, 1997).
Par conséquent, un élève qui a pour tâche d’établir une relation entre des unités d’analyse
d’une phrase doit au préalable connaître la ou les règles qui s’y rattachent.
Les connaissances procédurales correspondent aux différentes étapes permettant de
réaliser une action établissant, de façon effective, le ou les phénomènes entre les différentes
unités d’analyse d’une phrase. Il s’agit de savoir comment faire (Nadeau, 1995). Autrement
dit, ce sont des connaissances qui correspondent à des « savoir-faire » de niveaux divers et
renvoient à la mise en œuvre effective des règles (Fayol et al., 1992). Elles sont considérées
comme des connaissances permettant de développer des habiletés, puisqu’elles permettent
de traiter des informations particulières acquises (Legendre, 2005). Elles portent sur des
opérations à exécuter pour atteindre un but. C’est pourquoi elles sont dites dynamiques, car
elles se manifestent dans leur exécution même. Cette exécution va entrainer leur
70
automatisation et permettre à l’élève, dans le cas de l’écriture d’un texte, de diriger son
attention vers d’autres aspects comme l’expression des idées ou vers une autre règle moins
bien maitrisée (Nadeau et Fisher, 2006).
Quant aux connaissances conditionnelles, elles concernent les connaissances requises
pour savoir quand avoir recours aux autres connaissances. En d’autres termes, elles
favoriseraient la distinction des meilleures conditions pour utiliser telle stratégie plutôt
qu’une autre (Tardif, 1999). Elles permettent de connaître les conditions d’application de
telle ou telle connaissance, et surtout de savoir reconnaître ces conditions dans une situation
nouvelle (Nadeau, 1995). Par rapport à la langue, il s’agit pour l’élève de reconnaitre tous les
contextes linguistiques où la règle s’applique (Chartrand, 2009). Enfin, selon Tardif (1997),
elles seraient responsables du transfert des connaissances même si, dans le milieu scolaire,
elles restent la catégorie de connaissances la plus négligée. Dans tous les cas, sans elles, les
connaissances déclaratives restent des connaissances inertes et les connaissances
procédurales ne peuvent être activées ou le sont à mauvais escient.
En somme, et selon l’avis de didacticiens telle Chartrand (2009), les élèves doivent
être mis en situation de mettre en pratique ces trois types de connaissances à travers une
phase d’exercisation qui leur offrira tous les cas possibles sur lesquels ils auront à réfléchir
et à mener, de façon optimale, toutes les opérations nécessaires à l’établissement des relations
entre les unités d’analyse dans une phrase.
2.2.2 Les connaissances implicites et les connaissances explicites
Dans l’optique d’une analyse d’exercices des manuels scolaires, outre les
connaissances précédemment citées, on peut également tenir compte des connaissances
implicites et des connaissances explicites. En effet, les recherches en psychologie cognitive
sur les connaissances implicites et les connaissances explicites et sur leur mode
d’apprentissage et les recherches en didactique du français écrit montrent que ces deux types
de connaissances pourraient avoir des conséquences sur l’appropriation de phénomènes
morphosyntaxiques. Par ailleurs, il semblerait que de nombreux exercices de manuels
scolaires ne favorisent pas l’appropriation de certains phénomènes morphosyntaxiques
durablement du fait qu’ils ne développent bien ni les connaissances implicites ni les
connaissances explicites (Nadeau et Fisher, 2011).
71
2.2.2.1 Les caractéristiques des connaissances implicites et explicites
Avant de décliner les principales caractéristiques des connaissances implicites et
celles des connaissances explicites et leur mode d’apprentissage, mentionnons que l’usage
des termes implicite ou explicite se retrouve dans de nombreux travaux. Dès lors, cela
pourrait susciter une source de confusion en raison de la variété de noms auxquels ils sont
associés tels connaissance, apprentissage, mémoire, grammaire, condition ou règle. Une
autre source de confusion sur ces termes s’explique également par le fait que les auteurs
n’utilisent pas les mêmes termes selon la même acception. Par exemple, Huot et Schmidt
(1996) rapportent que Reber entend par apprentissage explicite « les incitations données aux
sujets pour découvrir les règles sous-jacentes au système linguistique, alors que Hulstijn
utilise cette opposition pour décrire des conditions d’expérimentation où on étudie des sujets
qui ont reçu des explications grammaticales alors que d’autres n’y ont pas été exposés »
(Huot et Schmidt, 1996 : 3). D’un autre côté, Gauthier, Bissonnette, et Richard (2013) parlent
d’enseignement explicite pour désigner une méthode d’enseignement consistant à présenter
la matière de façon fractionnée, à vérifier la compréhension, et à s’assurer d’une participation
active et fructueuse de tous les élèves. Les auteurs expliquent que cette méthode
d’enseignement se révèlerait particulièrement adaptée pour l’apprentissage de la lecture, des
mathématiques, de la grammaire, de la langue maternelle, des sciences, de l’histoire et, en
partie, des langues étrangères. Elle serait également appropriée pour les jeunes élèves, pour
tous ceux qui présentent des difficultés d’apprentissage, pour les élèves des milieux
défavorisés, mais aussi pour des élèves performants. Enfin, une troisième source de confusion
pourrait provenir des traductions faites sur ces terminologies. Sur ce point, Huot et Schmidt
(1996) s’interrogent sur les difficultés à traduire en français des notions comme
consciousness, awareness, noticing, ou des combinaisons comme conscious awareness.
L’objectif ici n’étant pas de détailler toutes les ambiguïtés liées à ces terminologies,
nous retiendrons celles reconnues dans le domaine de la psychologie. Celle-ci stipule que les
termes implicite et explicite se distinguent principalement par ce qui s’appuie ou non sur une
prise de conscience. En d’autres termes, les connaissances implicites s’opposent aux
connaissances explicites en ce sens qu’elles sont considérées comme intuitives et ne peuvent
être verbalisées tandis que les connaissances explicites correspondent à une prise de
72
conscience des propriétés formelles de la langue et à la possibilité de les verbaliser (Bialystok
(1981), Sherwood Smith (1981), Ellis (1993), Paradis (1994) dans Huot et Schmidt, 1996).
Nous caractérisons donc les connaissances implicites comme des connaissances dont
un individu n’a pas conscience, non verbalisables, et donnant généralement lieu à un puissant
sentiment d’intuition (Huot et Schmidt, 1996; Nadeau et Fisher, 2011). Ces connaissances
ont également pour particularité d’être durables, car peu affectées par le temps ou par une
tâche secondaire (Gasparini, 2004). Leur apprentissage se ferait selon « un mode adaptatif
dans lequel le comportement d’un sujet devient sensible à la structure d’une situation, sans
que cette adaptation soit imputable à l’exploitation intentionnelle de la connaissance explicite
de la structure » (Perruchet et al., 1998: 19). Toutes ces caractéristiques s’appliqueraient dans
des domaines du langage et de l’orthographe. Par exemple, en proposant une tâche de tri de
mots potentiellement corrects en français auprès d’élèves de 1re année, Pacton, Perruchet,
Fayol et Cleeremans (2001) ont démontré que la majorité d’entre eux (82 %) se trouvent très
tôt sensibles à des régularités de leur langue écrite - comme le fait qu’une consonne n’est
jamais doublée en début de mot en français - alors que celles-ci ne leur avaient pas été
explicitement enseignées (Nadeau et Fisher, 2011).
Quant aux connaissances explicites, retenons que ce sont des connaissances qu’un
individu est capable de verbaliser et de contrôler intentionnellement (Nadeau et Fisher,
2011). Cette conscience de savoir augmenterait le niveau de performance dans les tâches et
se trouverait corrélée positivement au degré de certitude qu’a un individu à propos de sa
réponse (Gasparini, 2004). Par exemple, dans une étude menée par Fayol et ses
collaborateurs comme celle de Fayol et Got (1991), il a été constaté que les scripteurs adultes
ne font pas d’erreurs dans des phrases où il n’y a pas d’accord de proximité comme dans Le
chien des voisins arrive ou Les chiens du voisin arrivent ou dans des tâches simples d’écriture
comme dans une dictée. Cependant, des erreurs apparaissent chez ces adultes lorsque la tâche
se complexifie par l’ajout d’une tâche secondaire (comme compter des bips en même temps
qu’écrire), ce qui s’expliquerait par le fait que l’adulte se retrouve alors en surcharge
cognitive. Pour expliquer comment les adultes évitent l’accord par proximité dans des
situations sans surcharge cognitive, les chercheurs postulent l’existence d’un mécanisme de
contrôle dans lequel les connaissances morphosyntaxiques sollicitées et les habiletés
73
d’analyse joueraient un rôle important. Selon Nadeau et al. (2011), il s’agirait là de
manifestations des connaissances explicites.
2.2.2.2 L’apprentissage des connaissances implicites et explicites
L’apprentissage des connaissances implicites peut se produire grâce à la fréquence
d’association de certains éléments comme dans la mise en relation de plusieurs mots (Fayol
et al., 1991). Par exemple, le PMSV lorsqu’il y a la présence de « les » ou « des » et qui
consiste à ajouter un –s à la fin du mot qui suit est une illustration de ces connaissances
implicites, ce qui peut occasionner des erreurs du type « il les portes ». L’influence de l’oral
dans la réussite des phénomènes morphosyntaxiques est également une manifestation des
connaissances implicites. En effet, des recherches ont montré qu’en présence d’une trace
orale du pluriel, le transfert des traits morphosyntaxiques est mieux réussi en français (Largy
et Fayol, 2001; Nadeau et al., 2005; Nadeau et Fisher, 2009). Comme exemple, la liaison
dans « ils arrivent » permet de distinguer oralement le pluriel du singulier. Enfin, les
apprentissages implicites se produisent par une exposition fréquente à des exemples positifs
seulement (Perruchet et al., 1998). Selon Rey, Pacton, et Perruchet (2005), une exposition à
des exemples positifs seulement pourrait éviter des conséquences comme dans le cas du
traitement des erreurs. En fait, selon les auteurs, l’identification et l’explication des erreurs
aux élèves risquent d’entraîner leur enregistrement en mémoire implicite. Abondant dans ce
sens, Largy et Dédéyan (2002) jugent qu’il n’est pas judicieux de proposer aux élèves certains
exercices qui présentent, de façon répétée, deux mots qui, à terme, devront être distingués
comme c’est le cas des exercices qui demandent aux élèves de choisir entre « et/est »,
« ou/où », « ces/ses », « a/à », etc.
Les connaissances implicites présentent cependant des limites importantes. En effet,
il semblerait que certaines règles résistent à un apprentissage implicite, que leurs possibilités
de transfert soient limitées et que le mode d’apprentissage des connaissances implicites ne
permette pas d’atteindre un niveau satisfaisant en écriture chez les élèves. La première limite
qui affecte l’apprentissage implicite concerne la distance des éléments à associer (Perruchet
et Pacton, 2004). Grosso modo, toutes les structures ne pourraient pas être détectées par
apprentissage implicite telle l’application des PMSV67, qui, bien que fréquents, requièrent
67 Exceptée la règle générale de la mise en relation entre le sujet et le verbe qui pourrait être apprise de façon implicite, du
moins à l’oral.
74
une analyse à cause de la variété des structures que les élèves produisent. Pour réussir de tels
accords, il faudrait que ce type de structures soit analysé et que la procédure soit appliquée
consciemment (Nadeau et Fisher, 2011). Une deuxième limite des apprentissages implicites
est qu’ils offriraient de faibles possibilités de transfert à d’autres situations (Gasparini, 2004).
En effet, concernant la réussite des accords en français écrit, il semblerait que les élèves
soient confinés aux accords de proximité, c’est-à-dire aux accords les plus simples (Pacton
et Perruchet, 2006; Nadeau et Fisher, 2011). Enfin, selon Nadeau et al. (2011), une troisième
limite affectée aux connaissances implicites résiderait dans le fait que le niveau de réussite
atteint par ce mode d’apprentissage peut être satisfaisant pour le chercheur tout en étant
socialement et scolairement peu satisfaisant. Les chercheures expliquent que, dans les
recherches sur les apprentissages implicites, on considère qu’il y a eu apprentissage lorsque
le taux de réussite au test des chercheurs est supérieur à ce que le hasard permettrait
d’attendre. Dans les recherches sur les apprentissages implicites en orthographe et en
grammaire, ces taux de réussite se situeraient généralement autour de 70 % alors qu’un taux
attribuable au pur hasard se situerait entre 50 et 80 % dans la mesure où ces tests présentent
un choix de réponse binaire. Or, la réussite de l’orthographe grammaticale dans un texte en
français est une tâche infiniment plus difficile et complexe qu’un test à choix de réponse
binaire. Par exemple, dans un examen national de 6e année en France, une question consiste
à écrire un texte d’environ 50 mots; l’orthographe grammaticale y est jugée réussie si le texte
contient au maximum trois erreurs, soit 94% de réussite chez les élèves de 11-12 ans (Nadeau
et Fisher, 2011).
L’apprentissage des connaissances explicites impliquerait l’application de processus
conscients telle la conceptualisation ou, dans le domaine du langage, la conscience
métalinguistique68. Sur ce dernier point, plusieurs didacticiens s’accordent sur l’importance
de discuter sur la langue et de la comprendre à l’école, autrement dit de développer des
habiletés à comprendre de façon explicite le fonctionnement de la langue (Chartrand, 1996 ;
Brissaud et Bessonnat, 2001 ; Cogis, 2005; Nadeau et Fisher, 2006; Brisssaud et Cogis,
2011). D’ailleurs, des travaux ont permis de déterminer des liens entre les performances dans
la réussite de PMSV à l’écrit et les connaissances explicites des élèves (Nadeau, Matute, et
68 La conscience métalinguistique peut renvoyer à la capacité à porter son attention sur les formes de la langue et la capacité
à manipuler ces formes (Huot et Schmidt, 1996).
75
Gonzales-Reyes, 2005; Nadeau et al., 2009). Enfin, El Euch (2016) rappelle que l’importance
de la conscience métalinguistique a été reconnue par l’Union européenne comme une des
clés de la réussite dans le domaine de la langue et de la création de matériel didactique car
elle permet à l’apprenant d’approcher les situations d’apprentissage avec un plus haut niveau
de confiance. L’auteure ajoute qu’une carence en conscience métalinguistique est un
indicateur d’un déficit d’abstraction et peut avoir des répercussions sur certains résultats
scolaires ou universitaires.
Pour résumer, retenons que les connaissances implicites présentent l’avantage de
requérir peu d’attention une fois apprises. Néanmoins, elles présentent des limites
importantes dans la mesure où elles se révèlent peu efficientes dans certains domaines,
particulièrement pour les PMSV. C’est pourquoi elles doivent être complétées par un
apprentissage mobilisant des connaissances explicites. Ces dernières, malgré qu’elles exigent
une application coûteuse sur le plan cognitif, surtout au début de l’apprentissage d’une langue
écrite comme le français (Gombert, 2006), restent, selon la recherche, incontournables et
finissent par s’utiliser de plus en plus facilement et exigent moins d’attention.
2.2.3 La métalangue
L’intérêt porté à ce dernier concept se justifie entre autres par le fait que quiconque a
pour ambition de travailler dans le domaine de l’enseignement et de l’apprentissage du
français, particulièrement dans celui de l’étude de la langue, se doit de s’interroger sur la
consistance et les finalités des savoirs à enseigner (Colin, 2011). Le but de ce point est de
nous interroger sur des aspects précis de la métalangue. Après avoir défini la notion de
métalangue, nous tentons d’expliquer pourquoi il est important d’utiliser une métalangue
conforme et juste. Par la suite, nous présentons les moyens, dans le cadre de notre projet
d’études, dont il faut tenir compte pour favoriser une acquisition effective de la métalangue.
Nous concluons en montrant que la métalangue contribue à favoriser la réflexion chez les
élèves.
2.2.3.1 De quoi s’agit-il?
Dans l’enseignement et l’apprentissage du français en général et particulièrement
dans le domaine de l’étude de la langue, il est aisé de constater que les enseignants, les élèves,
les instructions officielles, les programmes, les progressions et les manuels scolaires utilisent
76
différentes dénominations pour désigner l’ensemble des termes par lequel ils nomment les
phénomènes relatifs à la langue rencontrés et pour livrer les observations les concernant.
Notons que ces appellations peuvent être variées selon les contextes et sont souvent
désignées sous les termes terminologie et/ou nomenclature. Par exemple, Lord et Elalouf
(2016) expliquent qu’au Québec, les acteurs du réseau scolaire emploient souvent le terme
terminologie lorsqu’ils font référence à la Terminologie grammaticale officielle du
programme d’études de 1995 pour parler de l’ensemble des termes grammaticaux utilisés
lors de l’implantation de la grammaire rénovée dans le programme d’études du secondaire,
que ce terme est aussi employé en Belgique en parlant du Code terminologique de 1985 et
en France avec la Terminologie de 1997. Dans les directives officielles du Gabon, les termes
nomenclature et terminologie semblent être employés comme synonymes. En effet, celles-ci
utilisent « Nomenclature grammaticale pour l’enseignement du français dans le second
degré » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 71) pour présenter l’ensemble
des notions à adopter dans l’enseignement et l’apprentissage du français dans les
établissements scolaires du Gabon dès la rentrée scolaire 1978 pour permettre « une approche
de la langue différente de celle qui était jusqu’à maintenant pratiquée69» (Ministère de
l’Éducation National, 1995: 72). Plus loin dans le même document, on peut lire que « pour
guider » l’enseignement et l’apprentissage du français, les enseignants devront utiliser les
notions et dénominations que leur offre cette « terminologie» (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995: 73). Il est toutefois important de signaler que ces deux désignations ont un
sens différent. Lord et Elalouf (2016) précisent que le terme terminologie renvoie à
« l’ensemble des termes qui correspondent à un système de notions dans un même domaine
scientifique » alors que le mot nomenclature correspond à « l’ensemble des termes employés
dans une science, lesquels sont organisés selon les classes d’objets qu’ils désignent » (Lord
et al. , 2016: 66). Dans tous les cas, pour éviter toutes ces ambiguïtés, il est de plus en plus
fréquemment recommandé d’utiliser l’appellation métalangue pour désigner tous les termes
permettant de décrire le fonctionnement de la langue dans l’étude de la langue.
De façon précise, la métalangue (du préfixe méta : sur la langue pour parler de la
langue) renvoie au langage technique permettant de décrire le fonctionnement de la langue
69 Selon les textes officiels, cette réforme fait suite à des avancées dans des travaux en linguistique appliquée, « travaux qui
ont permis de renouveler la pédagogie des langues .» (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 72).
77
sur le plan grammatical (Chartrand, 1998). On peut également la désigner comme
« l’ensemble des termes techniques descriptifs du système et du fonctionnement de la langue
-les termes accord, complément direct, sujet, subordination, par exemple, en font partie »
(Chartrand, 2012b:1). Autrement dit, c’est le système des termes qui servent à nommer les
unités, les structures et les mécanismes d’une langue telle qu’elle est décrite (Lord et al. ,
2016).
2.2.3.2 De l’importance de la conformité et de la justesse de la métalangue
Le point précédent nous a permis de relever le fait qu’il est crucial d’utiliser des
termes appropriés lorsque l’on veut nommer des concepts ou des notions. Cette nécessité est
également incontournable lorsqu’on veut employer un vocabulaire approprié pour désigner
les phénomènes langagiers que l’on rencontre dans le cadre de l’étude de la langue. En effet,
les recherches dans différents domaines comme en sciences cognitives, en
psycholinguistique et en didactique du français ont mis en lumière la pertinence d’une
utilisation rigoureuse de la métalangue dans le développement des connaissances sur la
langue (Chartrand, Lord, et Gauvin, 2010; Chartrand, 2012b; Lord et al. , 2016). Comme le
rappelle Chartrand (2012b), pour que la métalangue joue son rôle, il est important que les
enseignants et tout particulièrement les manuels fassent preuve de constance et que le sens
des termes sur la langue soit explicité le plus rigoureusement possible. Ceci implique que
dans les manuels scolaires utilisés dans les différents systèmes éducatifs, il est primordial
que la métalangue utilisée soit conforme aux directives des instructions officielles établies
dans ce contexte ou mieux encore, qu’elle réponde également aux exigences de justesse
fournies par la recherche. Cette exigence s’appuie sur un constat fait par différents travaux.
Par exemple, une enquête effectuée par Chartrand et Lord (2009) portant sur l’État des lieux
de l’enseignement du français au secondaire au Québec et une étude du matériel didactique
le plus utilisé dans les classes du secondaire du Québec (Chartrand et al., 2010) ont démontré
que l’on ne parle pas toujours de la langue en recourant à des désignations cohérentes.
Chartrand (2012b) estime par exemple que certaines dénominations ou sigles associés au mot
sujet (Groupe sujet, sujet de P, sujet du verbe, etc.) dans plusieurs ouvrages sont
problématiques. De même, l’utilisation du terme accord sous différentes formes (verbe
accorder), accompagné ou non de compléments (accord dans le GN, accord dans le groupe
78
du verbe, etc.) bien que présent dans tous les manuels consultés, pose problème, car aucun
n’en donne une définition claire.
Ces constats nous amènent à considérer le fait que si l’on veut que les élèves
construisent des connaissances sur la langue qui soient à la fois solides, utiles, pérennes et
opératoires, les manuels scolaires devraient éviter de modifier sans cesse les termes de la
métalangue et adopter un vocabulaire spécifique commun à la fois juste et conforme, pour
nommer les phénomènes langagiers, et ce, afin de garantir une activité qui soit réellement
formatrice.
2.2.3.3 Des outils pour acquérir la métalangue
Selon Chartrand (1998), l’acquisition de la métalangue constitue une des activités
principales sur la langue menées en classe, voire une des activités principales de son
enseignement. Les travaux recensés nous fournissent des informations utiles sur la possibilité
de s’assurer d’une réelle acquisition de la métalangue dans les exercices sur les phénomènes
morphosyntaxiques contenus dans les manuels scolaires en nous appuyant sur trois
indicateurs : la métalangue que pourrait utiliser l’élève pour désigner le phénomène
morphosyntaxique pour réaliser l’exercice, les manipulations syntaxiques que pourrait
entrainer l’exécution de l’exercice et les jugements de grammaticalité que pourraient
exprimer les élèves en exécutant l’exercice (Boivin, 2009; Chartrand et al., 2010; Chartrand,
2013; Boivin, 2014; Nadeau et al.,2006; Thibeault, et Larouche, 2016).
En fait, comme évoqué plus haut, le recours à la métalangue permet d’envisager la
langue comme un système qui est l’objet d’une réflexion et d’une analyse sur la langue et
permet ainsi aux élèves de livrer leurs observations concernant les phénomènes
grammaticaux (Chartrand, 2012b). Les manipulations syntaxiques (effacement,
déplacement, substitution et ajout) permettent de dégager la structure de la phrase et d’établir
les propriétés syntaxiques des divers groupes qui la composent (Chartrand, 1996; Canelas-
Trévisi, 1997; Grossmann, 1998; Nadeau et al.,2006; Thibeault, et al., 2016). C’est donc en
ayant recours aux manipulations syntaxiques que les élèves sont amenés à nommer,
explicitement ou implicitement, les différents phénomènes langagiers rencontrés (Boivin,
2009; Boivin, 2014 ; Lord et Élalouf, 2016). Leur utilisation permet de voir si les élèves
utilisent ou non le métalangage dans leurs raisonnements. Sur ce dernier point, Boivin (2014)
rappelle qu’« une intervention métalinguistique peut être effectuée à l’aide du métalangage
79
propre à la grammaire pédagogique moderne (on va essayer d’encadrer par c’est…qui; il a
eu un ajout, etc.), ou sans métalangage (c’est les parents de mon copain qui…; on n’a plus
de phrase70, etc.) » (Boivin, 2014 : 135). Concernant les jugements de grammaticalité, ils
permettent au locuteur de déterminer si une phrase fait partie ou non de sa langue. Ils reflètent
également ses connaissances implicites sur sa langue ou sa compétence linguistique (Boivin,
2014). Le travail sur la langue, notamment l’utilisation des manipulations syntaxiques, exige
des élèves qu’ils posent un jugement de grammaticalité sur le résultat obtenu (Boivin, 2009;
Thibeault et Larouche, 2016). Ajoutons enfin que les jugements de grammaticalité s’avèrent
utiles dans le travail grammatical suite à l’application d’une manipulation syntaxique
(Boivin, 2014). Autrement dit, « l’élève qui est appelé à opérer de manière méthodique des
modifications sur une phrase pour vérifier une hypothèse ayant trait à son fonctionnement
doit sans contredit juger de la grammaticalité de l’énoncé résultant de la manipulation
utilisée » (Thibeault, et Larouche, 2016 : 8). Il doit déterminer, à l’aide de ses connaissances,
si la phrase obtenue à la suite de la manipulation est conforme aux normes qui caractérisent
le français. Dès lors, les jugements de grammaticalité peuvent être envisagés comme moyens
pour valider ou invalider les hypothèses émises par les élèves au cours de l’exercisation.
2.2.3.4 La contribution de la métalangue à l’instauration d’un raisonnement structuré
Les recherches actuelles montrent que l’une des spécificités de l’étude sur la langue
au secondaire est d’amener les élèves à réfléchir sur la langue et sur son fonctionnement pour
des activités grammaticales « analytiques et intellectuelles » (Beacco, 2010 :50). Cette
classification laisse suggérer un modèle de typologie d’exercices qui sous-tend l’idée qu’il
91
n’y aurait pas de rupture entre les exercices morphosyntaxiques, mais plutôt une forme de
continuité. Dès lors, les exercices de type morphosyntaxiques pourraient être classés selon
des niveaux d’appropriation des connaissances morphosyntaxiques.
Au total, nous retiendrons que toutes ces typologies ont leur pertinence car elles
proposent des typologies dans lesquelles sont précisées diverses caractéristiques relatives aux
exercices. La plupart nous ont permis de relever que les exercices accordent une place
privilégiée à la pratique de la langue, et/ou à la réflexion sur la langue et à la connaissance
du fonctionnement de la langue. Toutefois, aucune d’elles n’entre avec exactitude dans le
champ d’une typologie répondant à nos besoins, à savoir les exercices sur les PMSV. En fait,
ces typologies proposent des catégorisations qui englobent soit l’ensemble des exercices dans
la classe de français ou se limitent à proposer des exercices qui permettent le travail sur un
fait de la langue. C’est pourquoi, pour rester dans le cadre de notre étude, nous avons opté
pour un modèle de typologie d’exercices sur les PMSV, fruit de celles consultées, qui tienne
compte des spécificités des PMSV. Le point suivant présente ce modèle de typologie.
2.3.2.2 Une proposition d’une typologie des exercices sur les PMSV
Nous rappelons que la présente typologie résulte des différentes typologies
d’exercices décrites plus haut. Toutefois, malgré leur diversité et la pertinence de leurs
critères de classification, aucune ne permet d’atteindre notre objectif de recherche. Dès lors,
il nous a semblé plus approprié d’établir une classification des exercices répondant mieux à
nos attentes. Elle s’appuie dès lors sur notre objectif général de recherche, sur la spécificité
de la relation morphosyntaxique sujet-verbe, sur notre contexte d’études et sur les
orientations de la recherche.
Cela dit, le modèle de typologie d’exercices construit propose de regrouper les
exercices sur les PMSV en deux grands groupes. Concrètement, nous pensons que les
exercices pourraient être catégorisés selon le niveau de réflexion qu’ils exigent des élèves
pour parvenir à une meilleure appropriation des connaissances dans l’étude de la langue,
précisément sur celles liées aux connaissances sur les phénomènes morphosyntaxiques73. En
fait, plusieurs études démontrent entre autres que chez les élèves, notamment chez ceux à la
73 Précisons que cette position s’appuie, comme mentionné dans la présente section, sur les nombreuses recherches en
didactique du français citées dans la présente section, mais particulièrement sur celle de Beacco (2010) et sur les orientations
fournies par Nadeau et al. (2006) et Nadeau et al. (2011).
92
fin de leur parcours au primaire et ceux dans les premières classes d’années du secondaire,
la construction des notions reste incomplète (Lefrançois, 2009; Gauvin et al., 2013; Gourdet
et al., 2016) et que, par conséquent, il serait judicieux, voire nécessaire, que l’on privilégie
une progression des apprentissages (Brissaud et al., 2001; Pellat et al., 2004; Roubaud et
Touchard, 2004). Par exemple, l’étude de Lefrançois (2009), dont l’objectif est de décrire la
conception qu’ont les élèves francophones de 3e, de 4e et de 5e année du primaire du pluriel
des noms, des adjectifs et des verbes, démontre que si le pluriel de chaque classe de mots est
justifié à l’aide d’arguments qui lui sont propres et qui sont cohérents avec la théorie
grammaticale, il demeure que la variété des arguments utilisés pour justifier des cas de figure
différents à l’intérieur d’une même classe de mots montre que, jusqu’en 5e année,
l’acquisition de la notion de pluriel n’est pas finalisée. Par ailleurs, la maitrise de l’usage des
marques du pluriel à l’écrit, nombreuses en français74, évolue graduellement chez les élèves
entre la 2e et la 7e année (Guyon, 2003) tout comme les conceptions qu’ils en ont (Brissaud
et al., 2002; Geoffre et al., 2012). Notre position se base également sur les travaux actuels
qui accordent un intérêt nouveau pour l’orthographe et son acquisition. Par exemple, la
psychologie cognitive, dont l’un des objets est l’étude des processus mentaux des sujets dans
les activités de production ou de compréhension du langage tente de cerner les mécanismes
sous-jacents à la réalisation des accords orthographiques et aux erreurs qu’on rencontre. Ce
domaine met en lumière, par exemple, que « les enfants apprennent les accords nominaux et
verbaux à des rythmes différents » et que « des mécanismes différents sont responsables
d’erreurs chez les scripteurs novices et chez les scripteurs experts » (Fisher, 2004: 386).
Enfin, tout comme Beacco (2010), qui oppose aux activités grammaticales75 « intuitives
/automatiques » des activités grammaticales « analytiques et intellectuelles » (Beacco,
2010 :50), nous sommes d’avis qu’il n’existe pas de rupture entre les exercices, chaque
exercice pouvant être pertinent, tout dépendant du contexte dans lequel il est proposé. C’est
d’ailleurs pourquoi il propose de parler de « continuum entre les plus intuitifs/automatiques
et les plus analytiques/intellectuelles ».
74 En dehors des classes de mots invariables (préposition, conjonction, adverbe), la plupart des classes de mots en français
prennent la marque du pluriel (noms, pronoms, la plupart des déterminants, les adjectifs, les verbes conjugués, les participes
passés, etc.). De plus, ces classes de mots ne prennent pas toutes la marque du pluriel pour les mêmes raisons. En dehors
des noms et des pronoms qui sont des donneurs d’accord et dont la marque du pluriel dépend de ce que veut communiquer
le locuteur, les autres classes de mots variables sont toutes receveurs d’accord (Grevisse et al., 2008; Riegel et al. 2009). 75 Les activités grammaticales font référence aux exercices sur la langue.
93
En somme, nous pensons qu’il serait pertinent pour les élèves de s’exercer
progressivement aux connaissances sur les PMSV d’autant plus qu’il a été démontré que
leurs conceptions sur les phénomènes langagiers évoluent avec le niveau scolaire
(Lefrançois, 2009). Dès lors, notre typologie d’exercices se propose de classer les exercices
selon un continuum76 d’exercices de type morphosyntaxique intuitif/automatique/réflexe vers
des exercices de type analytique/intellectuel/réflexif.
2.3.2.2.1 Les exercices de type morphosyntaxique intuitif/automatique/réflexe
Les exercices de cette catégorie sont ceux qui, pour nous, sollicitent peu d’attention
chez les apprenants. En plus de faire appel à des connaissances implicites, ils se caractérisent
par le fait que les élèves peuvent les réaliser en ayant recours à des automatismes, des réflexes
et en s’appuyant en grande partie sur leurs intuitions. Nous incluons dans cette catégorie les
exercices structuraux, ceux sur lesquels l’apprenant peut s’appuyer sur l’oral pour répondre
aux questions, ceux qui portent davantage sur les phrases que sur les textes et tous ceux qui
peuvent se réaliser grâce à des automatismes ou des réflexes.
Les exercices structuraux auxquels nous faisons allusion sont ceux dont l’objectif est
de faire acquérir la maitrise d’une structure morphosyntaxique par le développement
d’automatismes ou de réflexes à partir d’un modèle proposé (Galisson et al., 1976). Ils sont
économiques en métalangage et sont conçus de telle sorte qu’il y ait une seule réponse
possible (Cuq, 1996; Vigner, 1984). Dans ce type d’exercice, « la tâche de l’élève est une
tâche de production qui prend appui sur un modèle à imiter » (Vigner, 1984:68). Ils sont
généralement constitués d’une phrase de départ (Je mange du pain et du poulet) qui, par
l’ajout ou la substitution d’un élément, sera modifiée (c’est moi qui mange du pain et du
poulet). Dans le cas des exercices portant sur les phénomènes morphosyntaxiques, on peut
relever dans cette catégorie les exercices de substitution et certains exercices de
transformation. Dans les premiers, les élèves sont invités à opérer des substitutions à
l’intérieur d’un schéma structural donné, ces schémas pouvant entrainer des modifications
entre des mots par l’attribution de marques morphologiques (exemple : récrire au passé un
texte rédigé au présent ou l’inverse). Ces exercices permettent l’assimilation d’une structure
(Avram, 2006). Les seconds, les exercices de transformation, sont formés d’une série de
76 Mentionnons que ce continuum n’exclut pas la possibilité d’un mouvement dialectique entre les deux catégories
d’exercices.
94
phrases ayant la même structure dont le principe consiste à procéder à des transformations -
qui peuvent être multiples - de façon identique (exemple : Les montagnes sont très hautes;
tu les vois à l’horizon →Les montagnes que tu vois à l’horizon sont très hautes).
Nous incluons également dans cette catégorie les exercices où l’apprenant peut
s’appuyer sur l’oral. Ces derniers s’observent lorsque l’apprenant s’appuie essentiellement
sur sa compétence d’usager pour répondre (Nadeau et Fisher, 2011). La réussite de ce type
d’exercices peut se faire sans recourir à l’analyse ou à la notion morphosyntaxique
convoquée. C’est le cas par exemple de certains exercices à choix de réponses du type « Les
élèves (doit-doivent) être attentifs en classe »; des exercices de type « (avoir) Je ne sais pas
si elle…le temps de vous voir » où l’élève se fie simplement à sa connaissance de la langue
orale, sans réfléchir consciemment à la règle que l’on voulait exercer ; ou enfin des exercices
qui travaillent les relations morphosyntaxiques dans une structure répétitive et qui permettent
en plus de répondre de manière mécanique tels « Nous (mesurer)… de 14 à 24 mètres- Nous
(chanter)… tous les matins- Nous (avoir)…plusieurs jouets ».
En somme, les exercices de cette catégorie offrent à l’apprenant la possibilité
d’acquérir de la spontanéité et de la souplesse dans l’appropriation des formes
morphosyntaxiques et pourraient notamment participer à la détection spontanée d’erreurs.
Néanmoins, si on leur reconnait une certaine efficacité, on connait aussi leurs risques et leurs
nombreuses limites : le large discrédit attribué aujourd’hui à la théorie de l’acquisition sur
laquelle s’appuient les exercices structuraux, le béhaviorisme; leur caractère mécaniste; le
choix des exemples, jugé invraisemblables; la nature des exercices limités à la phrase et
décontextualisés; le fait que l’apprentissage de la langue ne peut être ramené à celui d’un
ensemble de structures et sur des batteries d’exercices répétitifs, parfois rébarbatifs pour les
élèves, etc. Par conséquent, ils doivent être accompagnés et renforcés par des exercices qui
sollicitent des processus cognitifs plus propices à une appropriation efficiente des
connaissances sur les phénomènes morphosyntaxiques.
2.3.2.2.2 Les exercices de type morphosyntaxique analytique, intellectuel ou réflexif
Les exercices que nous incluons dans cette catégorie sont ceux qui font appel à des
habiletés intellectuelles et à des processus cognitifs divers plus complexes pour favoriser
l’appropriation consciente des connaissances sur les phénomènes morphosyntaxiques. Ils se
caractérisent par le développement d’un raisonnement satisfaisant et par une appropriation
95
plus consciente des phénomènes morphosyntaxiques. L’assimilation des phénomènes
morphosyntaxiques peut être graduelle et viser une meilleure acquisition de la métalangue.
Cette catégorie regroupe les exercices qui développent partiellement ou de façon complète
l’appropriation des phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe tout en
favorisant l’acquisition de la métalangue.
Les exercices qui développent partiellement l’appropriation des phénomènes
morphosyntaxiques sont ceux dans lesquels les connaissances morphosyntaxiques
convoquées sont restreintes ou facilitées par divers moyens: éléments en gras ou soulignés,
annonce de la difficulté dans la consigne, reproduction de la règle ou de la procédure
impliquée dans l’exercice sur la même page que l’exercice, etc. Ce sont également des
exercices où les habiletés requises pour établir les relations des différentes unités d’analyse
de la phrase ne sont pas toutes réunies (Nadeau, 2001). En outre, en plus de ne pas développer
un raisonnement semblable à celui que les élèves doivent mettre en œuvre dans la production
de leurs propres écrits, ce sont des exercices qui ne favorisent pas le transfert. Nous incluons
dans cette catégorie les exercices de repérage qui permettent de repérer un phénomène
morphosyntaxique dans des phrases ou un texte « Repérer les cas d’accord sujet-verbe dans
lesquels le sujet n’est pas situé immédiatement devant un verbe » (Nadeau et Fisher, 2006).
Nous y intégrons également les exercices à trous. Ces derniers permettent à l’élève d’activer
la règle qui concerne un mot, de repérer le donneur et le receveur, de choisir les marques
appropriées à porter sur le mot qui reçoit les traits grammaticaux. Toutefois, les exercices à
trous épargnent à l’élève le travail consistant à repérer quel mot est à mettre en relation avec
un autre (exemple : Combien Paul a-t-il de (le bras)?). Enfin, nous considérons aussi les
exercices à choix de réponse binaire du type « Les conférenciers ont (conclut-concluent)
leurs présentations » alors que la présentation de plusieurs formes fautives que l’élève
pourrait choisir serait beaucoup plus pertinente « Les conférenciers ont (conclut-concluent-
conclu-conclus) leurs présentations ».
Les exercices qui favorisent un raisonnement complet sur les phénomènes
morphosyntaxiques concernent les exercices qui mettent en œuvre ceux semblables à ce que
les élèves produisent dans la rédaction de leurs écrits. L’efficacité de ce type d’exercices
réside dans le fait que rien n’est identifié d’avance pour l’élève, qui devra rechercher en
mémoire la marque adéquate selon les caractéristiques et ainsi mobiliser autant ses
96
connaissances que la nouvelle connaissance que l’on veut exercer (Nadeau et Fisher, 2006).
En outre, ces exercices peuvent demander des traces d’analyse comme preuve que la
réflexion a bien été réalisée. On trouve toutes ces caractéristiques dans les exercices de
recherche et de correction d’erreurs. En effet, ils obligent l’élève à vérifier tous les cas
d’application de la règle (fautifs ou non) dans un texte. Non seulement la consigne doit
indiquer la présence d’erreurs dans le texte, mais en plus, les erreurs présentes doivent être
semblables à celles que les élèves commettent. Cette catégorie d’exercices inclut également
les exercices de transformation de texte « qui favorisent la capacité de mobiliser et de
reconnaître des formes de langue ou des structures » (Nadeau et Fisher, 2006 :127). Ces
exercices obligent l’élève à repérer, parmi les mots du texte, ceux affectés à la transformation
(Exemple : « Récris ce texte en faisant comme si Canaille est une fillette. Apporte tous les
changements requis. Vérifie l’accord des participes passés en laissant des traces »). Les
exercices de rédaction avec contraintes ou exercices de production de texte entrent aussi dans
cette catégorie, car ils contribuent à la production consciente d’une structure. Il s’agit des
exercices qui proposent aux élèves de composer des phrases ou un court texte en demandant
diverses contraintes morphosyntaxiques (Exemple : Compose un texte de cinq à dix lignes
dans lequel tu insèreras cinq sujets dont trois qui mettent en relation le sujet et le verbe
lorsque le sujet est constitué d’un nom collectif au singulier et d’un complément d’attribution
au pluriel et deux qui mettent en relation le sujet et le verbe lorsque le sujet est le pronom
relatif « qui »). Ce type d’exercices se rapproche encore plus d’une véritable situation
d’écriture.
Enfin, nous incluons dans la catégorie des exercices de type analytique, intellectuel ou
réflexif, des configurations d’exercices permettant aux apprenants de faire émerger
l’expression de leurs réflexions métalinguistiques. Ces exercices sont désignés par Beacco
(2010 :50) comme étant des exercices de conceptualisation. Ce sont des exercices dont le but
principal est de contribuer à l’appropriation de la métalangue dans la mesure où ils suscitent
chez eux des réflexions métalinguistiques sur le plan morphosyntaxique. En fait, pour
certains auteurs comme Vigner (1984) et Cuq (1996), les exercices de conceptualisation ne
sont pas à proprement parler des exercices, mais plutôt des activités grammaticales de
conceptualisation, car ils découleraient de l’effort de l’ensemble de la classe - contrairement
aux exercices traditionnels qui peuvent être effectués individuellement - et se rapprocheraient
97
plus de l’activité de résolution de problèmes. Pourtant, Beacco (2010) estime que certaines
configurations d’exercices, considérés comme des exercices de conceptualisation, sont
susceptibles de faire émerger les représentations métalinguistiques des apprenants, sans se
substituer aux activités de conceptualisation. Ces exercices présentent des traits spécifiques.
Ils s’appuient sur « des consignes qui font appel à des réponses ouvertes, non aléatoires parce
qu’elles sont contextuelles77. » (Beacco, 2010 :53). En voici un exemple : Complétez la
phrase par très ou trop : Demain, les températures seront…élevées dans le Sud-Est. Dans
cet exemple, la forme de l’item invite à l’interpréter comme un extrait de bulletin
météorologique, ce qui impliquerait l’emploi de très puisque dans ce genre discursif, les
journalistes ne sont pas censés porter des jugements personnels sur le temps qu’il fait. Mais,
quelles que soient les réponses admissibles, les exercices de ce type comprennent
nécessairement des explications par les apprenants des choix qu’ils ont effectués. Ces
explications serviront de point de départ à des comparaisons entre les apprenants, l’ensemble
de l’activité permettra de créer un espace ouvert de réflexion métalinguistique. Ces
configurations d’exercices sont susceptibles de rendre les élèves actifs sur le plan cognitif et
donnent du sens aux apprentissages78. Quoi qu’il en soit, pour éviter toute ambiguïté, nous
avons choisi d’éviter de les désigner sous l’étiquette d’exercices de conceptualisation, mais
d’en parler comme des configurations d’exercices pouvant susciter l’expression de
représentations métalinguistiques chez les apprenants.
Pour clore cette deuxième partie du chapitre, retenons que pour atteindre notre
objectif général de recherche, nous avons choisi d’utiliser quatre concepts offerts par la
recherche : 1) les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles, 2) les
connaissances implicites et les connaissances explicites, 3) la métalangue et 4) l’exercisation
en grammaire. Ce dernier concept nous a permis, grâce à des typologies d’exercices
existantes, d’élaborer une typologie d’exercices sur les PMSV répondant le mieux à nos
attentes. Ces concepts ont été convoqués pour nous mener aux orientations méthodologiques
qui vont suivre. Avant de les décrire, précisons les objectifs spécifiques que nous nous
sommes fixés pour atteindre notre objectif général de recherche.
77 Les énoncés qui servent de cadre à une activité de manipulation de ce type ne sont pas de simples supports inertes, mais
leur sens et leur identité discursive sont déterminants pour le choix des réponses possibles. 78 Un graphique résumant cette catégorisation se trouve dans le chapitre suivant.
98
2.4 Les objectifs spécifiques de la recherche
Rappelons que notre objectif général de recherche consiste à décrire et analyser les
exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe (PMSV) dans deux
manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de 1re année du secondaire au Gabon. Cet
objectif général de recherche s’appuie sur les objectifs spécifiques suivants :
1. Décrire et analyser les exercices sur les PMSV suivant la typologie élaborée dans deux
manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e au Gabon;
2. Décrire et analyser les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans les
exercices sur les PMSV dans deux manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e
au Gabon;
3. Décrire et analyser les connaissances implicites et les connaissances explicites dans les
exercices sur les PMSV dans deux manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e
au Gabon;
4. Décrire et analyser la métalangue dans les exercices sur les PMSV dans deux manuels
scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e au Gabon.
Pour conclure, ce chapitre fait apparaitre un certain nombre de complexités et de
subtilités sur les PMSV. Les études recensées attestent que tout en occupant une place
majeure dans l’appropriation des connaissances sur la langue, les PMSV constituent une
réelle préoccupation dans la recherche au regard des difficultés qu’ils occasionnent chez les
élèves, et ce, quels que soient les contextes éducatifs. En outre, les différentes stratégies
généralement enseignées aux élèves démontrent que les élèves sont amenés à mémoriser et à
enclencher divers processus cognitifs pour effectuer correctement les PMSV. De même, les
élèves doivent tenir compte d’une multiplicité de PMSV qui se décline à côté du phénomène
morphosyntaxique qui renvoie à l’attribution des traits grammaticaux du sujet au verbe. S’il
est sans doute avantageux que toutes ces connaissances soient acquises en ce sens qu’elles
permettent de favoriser une attitude réflexive sur le fonctionnement de la langue, on pourrait
tout de même s’interroger sur les répercussions d’une telle charge cognitive lorsqu’on fait
apprendre un trop grand nombre de règles à des élèves de 1re année du secondaire. Sur un
autre plan, les différentes typologies d’exercices existantes recensées ont montré toute la
difficulté à établir une classification unique et rigide des exercices, puisque, comme énoncé
précédemment, non seulement les critères de classement peuvent être de différente nature
99
selon la perspective choisie, mais qu’en plus les caractéristiques de tout exercice dépendent
de choix théoriques, méthodologiques et psychologiques.
Au regard de tous ces constats et pour que les orientations méthodologiques qui vont
suivre soient mieux perçues, précisons, pour clore ce chapitre, que notre recherche n’a pas
pour visée de dresser un répertoire d’exercices sur les PMSV contenus dans les deux manuels
scolaires analysés. Nous souhaitons plutôt proposer une analyse d’exercices sur les PMSV
en fonction d’un certain nombre de thèmes qui ont émergé des concepts retenus. Enfin, notre
étude n’a pas pour première ambition de déterminer la pertinence d’un exercice sur les PMSV
dans son entièreté, puisque, selon nous, un exercice peut être pertinent, tout dépendant de son
objectif, du contexte dans lequel il est utilisé, du moment choisi pour l’effectuer et de
l’accompagnement que l’enseignant fournit à l’élève pour le réaliser. Autrement dit, à l’instar
de Bessonnat (1997), nous ne pensons pas qu’il y ait de bons ou de mauvais exercices en soi,
il n'y a que des exercices en situation.
100
CHAPITRE 3 : LA MÉTHODOLOGIE
Rappelons, avant de présenter nos orientations méthodologiques, notre objectif
général de recherche ainsi que nos objectifs spécifiques de recherche.
Objectif générale de recherche :
Décrire et analyser les exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre la
fonction syntaxique de sujet et le verbe contenus dans deux manuels scolaires utilisés dans
les classes de 1re année du secondaire.
Objectifs spécifiques :
1. Décrire et analyser la typologie des exercices sur les PMSV dans deux manuels scolaires
officiels utilisés dans les classes de 6e au Gabon;
2. Décrire et analyser les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans
les exercices sur les PMSV dans deux manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de
6e au Gabon;
3. Décrire et analyser les connaissances implicites et les connaissances explicites dans les
exercices sur les PMSV dans deux manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e
au Gabon;
4. Décrire et analyser métalangue dans les exercices sur les PMSV dans deux manuels
scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e au Gabon.
Notre problématique nous a permis d’offrir un aperçu du contexte éducatif gabonais
dans l’enseignement et l’apprentissage du français, et, plus précisément, de repérer un
problème potentiel lié au recours aux exercices permettant de consolider les acquis des élèves
sur les PMSV. À travers le cadre conceptuel, nous avons pu, dans un premier temps, préciser
ce que nous entendons par phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe et, dans
un second temps, nous familiariser avec des concepts offerts par la recherche pour nous
permettre d’analyser les exercices contenus dans les manuels scolaires utilisés au Gabon.
Ce troisième chapitre présente les orientations méthodologiques qui nous ont permis
de mener à bien notre projet de recherche. Il est constitué de trois sections. D’abord, nous
décrivons les caractéristiques de la recherche. Ensuite, nous déclinons les critères de sélection
de notre corpus d’analyse. Enfin, nous présentons nos instruments d’analyse.
101
3.1 Les caractéristiques de la recherche
Avant de traiter des questions d’ordre méthodologique, il nous a semblé opportun de
préciser les caractéristiques de notre recherche. Pour ce faire, nous présentons la nature de
notre méthodologie pour aboutir aux types de recherche qui s’y insèrent.
3.1.1 Une approche qualitative
La recherche que nous menons est une recherche qualitative. Elle a pour ambition de
produire et d’analyser des données descriptives (Deslauriers, 1991; Fortin et Gagnon, 2016).
En fonction de nos objectifs de recherche, nous souhaitons étudier en profondeur, le sens et
l’observation d’un phénomène dans un contexte particulier, nous limiter à l’étude de corpus
restreints (Thouin, 2014; Fortin et Gagnon,2016) et produire des représentations théoriques,
fruit des postulats épistémologiques adoptés par les chercheurs. Ces représentations sont
« temporaires, heuristiques, datées, dépendantes de leur contexte, donc contingentes »
(Deslauriers, 1991:15).
L’occasion nous est offerte de préciser certaines caractéristiques spécifiques de toute
recherche qualitative que la plupart des chercheurs s’accordent à lui attribuer. La recherche
qualitative est une méthode de recherche qui traite des données difficilement quantifiables,
c’est-à-dire qu’elle se caractérise par le fait de se constituer fondamentalement à partir d’un
matériau empirique qualitatif (comme les contenus), donc non traité sous la forme de chiffres
(Poupart et Groupe de Recherche Interdisciplinaire sur les Méthodes Qualitatives, 1997;
Thouin, 2014). Elle recourt à une méthode d’analyse davantage inductive et se caractérise
par sa souplesse d’ajustement pendant son déroulement et sa souplesse dans la construction
progressive de l’objet même de l’étude (Fortin et Gagnon, 2016). Elle est donc ouverte à la
découverte de « faits inconvénients » ou de « cas négatifs » qu’elle tend à valoriser par la
créativité et la solution de problèmes théoriques (Poupart et al., 1997: 52). En plus de
combiner différentes techniques de collecte de données, la recherche qualitative permet de
sélectionner et d’interpréter ce que le chercheur aura jugé pertinent de considérer tout en
restant critique face à l’information recueillie.
Toute méthode de recherche est soumise aux questions portant sur la façon dont elle
conduit la vérité, donc sur la validité de ses résultats et la fidélité de ses techniques. La
validité signifie que la méthode de recherche utilisée est capable de répondre aux questions
posées tandis que la fidélité désigne la capacité de reproduire la recherche en observant les
102
mêmes résultats. Précisons que si les chercheurs effectuant une recherche qualitative se sont
préoccupés davantage de la validité de leurs travaux, ce n’est pas parce qu’ils ont négligé la
précision de leurs techniques, mais parce que la façon de faire de la recherche qualitative
mesure tout simplement autre chose (Deslauriers, 1991). Autrement dit, les recherches
qualitatives ne cherchent ni obligatoirement à retrouver les mêmes résultats ni à reproduire
plusieurs études similaires pour arriver à des résultats semblables. Cela dit, nous pouvons
rappeler qu’un certain nombre de critères est exigé pour garantir la validité d’une recherche
qualitative. D’abord, la validité d’une recherche qualitative se conforme au fait que « la
théorie déduite rend compte du domaine étudié » (Deslauriers, 1991:100). Dans le cadre de
notre recherche, cela renvoie à être capable d’atteindre nos objectifs de recherche quant à
l’étude des exercices sur les PMSV dans deux manuels officiels des classes de 6e. Ensuite,
selon Deslauriers (1991), la validité d’une recherche qualitative s’appuie également sur sa
capacité à être accessible non seulement pour les personnes qui travaillent dans ce domaine,
pour les chercheurs d’autres domaines, mais aussi pour le grand public. Transposée à notre
cas, cette affirmation signifie qu’il faille présenter nos analyses de sorte qu’elles soient aisées
à être comprises par tous. Toutefois, elle doit se distinguer suffisamment, sans négliger d’être
applicable à d’autres situations. Ce qui signifie que le dispositif d’analyse que nous allons
proposer dans le cadre de notre recherche, bien que menée dans un contexte particulier doit
pouvoir être mis en pratique sur les exercices sur les PMSV (ou d’autres phénomènes
morphosyntaxiques) contenus dans les manuels utilisés dans d’autres contextes éducatifs ou
dans des manuels scolaires autres que ceux choisis. La validité d’une recherche qualitative
repose enfin sur des principes de crédibilité, de fiabilité, de validation, c’est-à-dire que le
chercheur examine minutieusement les données en les vérifiant et en attestant que les
résultats obtenus concordent avec les données recueillies (Deslauriers, 1991; Poupart et al.,
1997; Fortin et Gagnon, 2016). Ce dernier critère suppose l’exigence d’élaborer des outils
d’analyse précis et cohérents et de sélectionner un corpus d’exercices suffisamment
représentatif de ceux portant sur les PMSV.
Nous sommes consciente que les éléments pouvant être source de biais au cours d’une
recherche qualitative sont nombreux (la méthode de collecte de données, le corpus, les
données elles-mêmes, la subjectivité du chercheur, etc.). L’incidence que les chercheurs
d’une telle étude peuvent avoir sur le déroulement de leurs travaux a depuis longtemps été
103
examinée dans la littérature en sciences humaines. Toutefois, ces travaux montrent aussi que
le jugement du chercheur ne se forme pas seulement à partir de connaissances formelles ou
d’analyses théoriques, mais se construit aussi en fonction de son expérience personnelle
(sentiments, intuitions, valeurs, etc.) (Poupart et al., 1997; Fortin et Gagnon., 2016). Par
conséquent, pour accroitre l’intégrité de notre recherche, nous avons, en tant que chercheur
« qualitatif »79, fait appel à une certaine réflexivité80 pour nous prémunir des biais personnels
étant donné notre implication dans l’étude (Poupart et al., 1997; Fortin et Gagnon., 2016).
Autrement dit, nous nous sommes tenue, autant que faire se peut, de veiller à une prise de
conscience et une documentation systématique de l’effet de cette subjectivité sur l’évolution
de la recherche. Cette analyse réflexive comprend une évaluation critique continue des
réponses subjectives et du processus de recherche lui-même. Elle permet de démontrer
comment la recherche peut être améliorée ou vue sous un autre angle. Pour nous, ce qui
importe, c’est de nous nous assurer de la justesse des informations recueillies en vérifiant
systématiquement leur solidité dans le temps et en expliquant les divergences constatées, le
cas échéant, entre les observations et les interprétations.
3.1.2 Une recherche descriptive à caractère exploratoire
Notre étude est une recherche descriptive qui présente un caractère exploratoire
(Fortin et Gagnon,2016) dans la mesure où nous la considérons comme la phase initiale d’un
processus de recherche, puisque notre revue de littérature a dévoilé que les recherches au
Gabon se sont peu intéressées à l’examen des contenus des manuels scolaires, à fortiori des
exercices sur les PMSV que l’on trouve dans les manuels scolaires. Rappelons que la
recherche exploratoire vise à combler un vide (Van der Maren, 1996) et favorise la
découverte de nouvelles connaissances dans des domaines peu étudiés pour obtenir une
meilleure connaissance d’un phénomène en vue de recherches ultérieures (Legendre, 2005).
En outre, la recherche descriptive permet au chercheur d’analyser des phénomènes dans un
contexte particulier et peut avoir pour point de départ une pratique éducative (Thouin, 2014),
à l’instar du recours aux exercices des manuels scolaires. Elle fournit ainsi des informations
contextuelles qui pourront servir à des recherches explicatives plus poussées (Poupart et al.
79 Deslauriers (1991) désigne par ce terme les personnes qui font de la recherche qualitative. 80 La réflexivité est une introspection critique sur ce qui a été pensé et fait dans une recherche qualitative (Fortin et Gagnon,
2016).
104
1997). En outre, une recherche descriptive peut utiliser différentes stratégies d’observation
comme l’étude de cas et l’analyse de contenu (Astolfi, 1993). Cette particularité convient à
notre recherche, car nous avons examiné les exercices sur les PMSV non seulement dans un
nombre déterminé de manuels scolaires utilisés dans l’enseignement et l’apprentissage du
français au Gabon, mais aussi nous avons limité l’analyse à ceux destinés à un niveau
d’enseignement. En plus, notre étude porte essentiellement sur des contenus que nous avons
choisi d’analyser. Nous ajoutons à cette considération celles postulant que la recherche
descriptive dont l’approche méthodologique est qualitative peut consister en l’ « analyse de
contenu des manuels scolaires » (Thouin, 2014:132) et qu’elle peut être utilisée pour
caractériser des éléments sans se référer à une méthodologie qualitative distincte (Thouin,
2014; Fortin et Gagnon,2016).
Enfin, selon Sandelowski (2009), une recherche descriptive peut servir de véhicule pour
présenter des méthodes qui n’entrent pas nécessairement dans une classification. Cette
caractéristique de la recherche descriptive nous a offert la possibilité d’organiser et de traiter
d’une façon qui nous est propre l’analyse des exercices sélectionnés.
3.2 La constitution du corpus d’analyse
Ce point présente les différents critères de sélection de notre corpus d’analyse ainsi
que leurs justifications. Nous présentons d’abord les critères de sélection des manuels d’où
nous avons puisé les exercices sur les PMSV, suivis des critères de sélection des niveaux
d’enseignement du 1er cycle et ceux liés au choix des exercices. Mentionnons que ces critères
tiennent comptent de paramètres particuliers : 1) notre objectif général de recherche et nos
objectifs spécifiques, 2) les spécificités de l’étude de la langue, notamment l’étude sur les
PMSV au Gabon et 3) quelques spécificités inhérentes à la recherche qualitative.
3.2.1 Les considérations liées à la sélection des manuels
Comme spécifié dans la problématique (cf. 1.2.3), le manuel de français au secondaire
gabonais présente une singularité. L’absence de manuels élaborés par les acteurs scolaires
gabonais fait que les enseignants peuvent avoir accès à des manuels divers. Il semble évident
que nous ne pouvions tous les examiner dans le cadre du présent projet. En effet, non
seulement il est presque impossible d’établir la liste de tous les manuels utilisés par les
enseignants de français gabonais, surtout en ce qui concerne ceux dont disposent chaque
105
enseignant, nous avons fait le choix de n’analyser que les exercices sur les PMSV contenus
dans les manuels scolaires officiels. Cette restriction se justifie également par le fait que les
manuels officiels sont les seuls qui, a priori, sont distribués gratuitement aux élèves et aux
enseignants dans la grande majorité des établissements scolaires, tant au niveau de la capitale
provinciale que des autres provinces à l’intérieur du territoire national.
Quoi qu’il en soit, rappelons que les manuels scolaires officiels de français au 1er
cycle du secondaire gabonais comptent trois collections d’ouvrages. En concertation avec
les différents départements de français, chaque établissement opte pour l’une ou l’autre de
ces collections. Le tableau ci-dessous en fait la présentation.
Tableau 2 Manuels scolaires officiels de français au 1er cycle du secondaire gabonais
Comme le montre le tableau 2, les trois collections d’ouvrages approuvées par l’IPN81
sont : La Nouvelle Méthode de Français (Nathan, 1997), Livre Unique (EDICEF, 2001a) et
Indigo (Hatier International, 2001). Chacune des trois collections comprend un total de quatre
manuels pour les quatre (4) niveaux d’enseignement au 1er cycle du secondaire gabonais (6e,
5e, 4e et 3e), ce qui fait un total de douze manuels scolaires. Il est vrai que tous auraient pu
potentiellement servir de supports pour analyser les exercices sur les PMSV. Toutefois, nous
avons fait le choix de n’examiner que ceux contenus dans deux de ces manuels: La Nouvelle
Méthode de français 6e (Nathan, 1997) et le manuel Livre Unique : Le français en 6e. Le
choix de deux manuels comme supports se justifie pour certaines raisons.
D’abord, il nous a semblé que l’examen de tous les exercices sur les PMSV contenus
dans les douze manuels aurait constitué un nombre trop volumineux d’exercices à analyser
dans le cadre d’une thèse de doctorat. D’ailleurs, un premier décompte des exercices sur les
PMSV dans les seuls manuels officiels des deux premières années du 1er cycle du secondaire
81 Institut Pédagogique National
106
gabonais (6e et 5e) nous a permis de répertorier près de 475 exercices impliquant les PMSV
réparties dans les rubriques grammaire, orthographe (grammaticale) et conjugaison : 150
pour la collection La Nouvelle Méthode de Français, 200 pour la collection Le Livre Unique
et 124 pour la collection Indigo français (124). Ensuite, nous avons envisagé qu’analyser les
exercices sur les PMSV contenus dans deux manuels suffirait largement pour nous permettre
de mesurer la fiabilité des thèmes retenus ainsi que l’opérationnalisation des instruments
d’analyse élaborés pour analyser les exercices sur les PMSV dans d’autres manuels scolaires.
Une autre raison s’appuie sur le principe de saturation de l’information d’une recherche
qualitative : la taille du corpus d’analyse est considérée comme suffisante si l’ajout de
documents n’apporte plus de nouvelles informations (Poupart et al., 1997; Thouin, 2014;
Fortin et Gagnon, 2016). Enfin, bien que cela ne soit pas la visée principale de notre étude,
nous avons pensé que, dans une large mesure, l’analyse de deux manuels aurait l’avantage
de mettre en lumière les éventuels points de convergence et de divergence entre deux
collections différentes de manuels scolaires officiels utilisés dans les classes de 6e. Le point
suivant vient justifier notre choix pour ce niveau d’enseignement.
3.2.2 Les considérations liées au niveau d’enseignement
Nous avons choisi de limiter notre analyse aux manuels scolaires officiels d’un niveau
d’enseignement du secondaire, ceux destinés aux classes de 1re année du secondaire (6e)
d’une part, du fait des raisons précédemment évoquées, particulièrement pour celle
concernant le décompte des exercices dans les manuels officiels de 1re et 2e année du
secondaire et celle relative au principe de saturation de l’information. D’autre part, dans les
instructions officielles pour l’enseignement du français au 1er cycle du secondaire gabonais,
le programme de la classe de 6e est associé à celui de la classe 5e (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995) tandis que celui de la classe de 4e est associé à celui de 3e au 1er cycle
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995). Cette répartition trouve son explication, comme
énoncé dans la problématique (cf. 1.1.2.1) par le fait que les classes de 4e et de 3e sont des
classes dites de perfectionnement. En matière d’exercices, elles sont envisagées comme des
classes de préparation au B.E.P.C et mettent surtout l’accent sur des propositions d’épreuves
semblables à celles auxquelles les élèves seront soumis. Par ailleurs, ce sont des classes où
l’objectif est surtout de permettre aux élèves de consolider leurs connaissances sur l’étude de
la langue afin de préparer leur entrée dans la vie active ou de poursuivre leurs études au
107
second cycle. Quant aux classes de 6e et de 5e, ce sont des classes dites d’initiation (Ministère
de l’Éducation Nationale, 1995). C’est dans ces deux classes que l’accent est particulièrement
mis sur l’enseignement et l’apprentissage de la langue, qui y est plus réflexive (par rapport
au primaire), et où l’acquisition des bases élémentaires pour la maitrise de la langue est plus
approfondie. Par conséquent, le recours aux exercices sur les PMSV y est systématique.
Signalons enfin que la classe de 5e peut être perçue comme une sorte de prolongement de la
classe de 6e, une sorte de classe « bilan » en ce sens que les notions qui y sont étudiées
constituent en quelque sorte une forme de rappel de ce qui a été vu en 6e. D’ailleurs, dans la
progression officielle de 5e, la plupart des notions à enseigner sont à envisager comme des
rappels de celles vues en classe de 6e, comme l’atteste ce passage : « il est nécessaire de
reprendre en 5e des notions déjà vues en 6e pour les approfondir, les développer. » (Ministère
de l’Éducation Nationale, 1995: 24). Fort de ce qui vient d’être énoncé, nous avons estimé
qu’il n’était pas nécessaire de choisir les manuels officiels des classes de 4e et de 3e comme
supports ni ceux des classes de 5e.
3.2.3 Les considérations liées au choix des exercices
Pour choisir les exercices sur les PMSV à analyser, nous nous sommes appuyée
concomitamment sur le programme officiel des classes de 6e (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995), sur les progressions établies par l’I.P.N (Ngandu et al., 2011; Inspection
générale des services, 2016) et sur l’aperçu des PMSV présentés dans le cadre conceptuel
(Cf. tableau 1 du point 2.1.3)82. Après examen de ces trois éléments, nous avons sélectionné
tous les exercices exigeant dans leur réalisation que soient appliqués des PMSV.
Toutefois, en tenant compte de cette exigence, nous nous sommes vite aperçue que
deux difficultés apparaissent. D’abord, tous les exercices portant sur la vérification des
connaissances dans la rubrique conjugaison du type « Conjugue les verbes à x temps du mode
y… », exigent d’une certaine façon que soit effectué un PMSV et doivent logiquement faire
partie de notre corpus. De même, certains exercices comme celui-ci, extrait de La Nouvelle
Méthode de Français 6e, rubrique grammaire et portant sur la leçon La phrase et ses
82 Nous nous sommes appuyée en cela sur les instructions officielles qui reconnaissent qu’il est difficile d’établir une
progression stricte pour l’étude de la langue. Elles accordent par conséquent aux enseignants de français gabonais la liberté
d’adapter leur enseignement en fonction des difficultés particulières que rencontrent leurs élèves tout en tenant compte du
programme établi. Par conséquent, divers points sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe, en dehors
de ceux spécifiés dans le programme et les progressions officiels, peuvent être abordés d’un enseignant à un autre.
108
constituants : « Compose le plus de phrases possible avec les éléments suivants, en variant
l’ordre des mots : fabriquent-dans la rue-devant l’atelier-une voiture-les enfants-
soigneusement-surveillés par leur cousine-petite-du mécanicien-avec du fil de fer. » (Nathan,
1997:10), bien que visant d’abord à exercer à d’autres connaissances que celles faisant l’objet
de notre étude, auraient pu permettre aux élèves d’effectuer implicitement un PMSV. Pour
assurer une certaine cohérence à notre corpus, nous nous sommes restreinte aux exercices
portant exclusivement et explicitement sur les PMSV. Néanmoins, nous avons adjoint
certains exercices qui impliquaient dans leur réalisation que l’élève passe inévitablement par
la mise en relation entre le sujet et le verbe83 pour que l’exercice soit considéré comme réussi.
Enfin, pour analyser la conformité de la métalangue utilisée dans les exercices sur les PMSV
des manuels avec celle reconnue par les textes officiels gabonais, comme nous le verrons
plus loin, nous avons également exclu tous les exercices qui ne mentionnaient pas
explicitement, dans leurs consignes ou dans le titre de la leçon, le sujet, le verbe ou un PMSV.
3.3 La présentation des instruments d’analyse
Quatre instruments d’analyse ont été élaborés pour atteindre notre objectif général de
recherche et les objectifs spécifiques qui y sont associés. Les objets de notre étude étant des
contenus précis, nous avons construit quatre grilles d’analyse. Avant de les présenter,
énonçons quelques considérations liées à leur l’élaboration.
3.3.1 Les considérations liées à l’élaboration des instruments d’analyse
Rappelons que l’élaboration de nos grilles d’analyse s’est faite en fonction de nos
objectifs de recherche, des orientations de la recherche en didactique du français et de
certaines de ses disciplines contributoires (dont la psychologie cognitive et la linguistique)
ainsi que sur la base de la typologie d’exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques
proposée dans le cadre conceptuel. Les éléments qui les constituent représentent donc des
choix épistémologiques et théoriques. Les contenus de ces grilles d’analyse nous ont permis
de tenir compte des éléments dont la pertinence nous a semblé incontournable pour notre
étude.
83 Ces configurations d’exercices seront présentées dans l’analyse proprement dite.
109
Notre étude envisageant le traitement de données qualitatives dont les supports sont
des manuels scolaires, nous avons construit nos quatre grilles d’analyse en nous appuyant sur
les principes de l’analyse de contenu (Bardin, 2013). En plus de favoriser une grande
diversité d’applications, l’élaboration de nos grilles nous a permis de classer nos contenus
par thèmes et sous-thèmes84. Après avoir construit nos grilles d’analyse, nous avons établi
une façon unique de consigner les éléments du contenu tout en procédant à un contrôle
(Laporte, 2003). Ce contrôle, comme nous le verrons ultérieurement, se manifeste par la
description détaillée, pour chacune des grilles élaborées et des sous-grilles émanant de ces
grilles, d’un ou de plusieurs exemples d’exercices justifiant nos résultats.
Soulignons enfin que l’élaboration de nos grilles d’analyse de contenu ne s’est pas
faite de façon linéaire. Elles ont émergé tout au long de notre processus d’analyse (Thouin,
2014). Elles ont été modifiées, améliorées et complétées tout au long de l’évolution de la
recherche pour pouvoir examiner avec plus de précision les éléments qui la constituent.
3.3.2 La grille sur la typologie d’exercices
La grille d’analyse sur la typologie d’exercices vise à atteindre le 1er objectif
spécifique de notre recherche. Son élaboration s’appuie essentiellement sur la typologie
d’analyse d’exercices suggérée dans le cadre conceptuel (cf. 2.3.2.2). Elle nous a permis de
conserver les éléments dont la pertinence nous semblait incontournable pour déterminer les
types d’exercices suggérés par les deux manuels pour l’évaluation des connaissances sur les
PMSV. Ces éléments concernent la catégorie de l’exercice, la forme de l’exercice et le type
d’exercice. Signalons que nous avons intégré dans le type d’exercice, les configurations
d’exercices permettant d’aboutir à l’émergence des représentations linguistiques des
apprenants. Pour ce dernier élément, nous avons choisi de construire une grille particulière
quoique ces configurations d’exercices appartiennent à la catégorie des exercices de type
analytique/intellectuel/réflexif. En fait, nous avons considéré ces exercices de type
analytique, intellectuel ou réflexif particuliers, puisque leur but est avant tout de favoriser de
façon plus spécifique l’acquisition de la métalangue et le développement d’une activité
métalinguistique.
84 En classant les contenus par thèmes et sous sous-thèmes dans la grille d’analyse de contenu, l’intention n’est pas tellement
de se prononcer sur la qualité du contenu mais plutôt d’en dégager les caractéristiques en fonctions de nos objectifs de
recherche (Thouin, 2014).
110
La figure ci-contre (figure 1) présente sous forme de graphique les distinctions à faire
sur chacun de ces éléments85. Elle est suivie de précisions sur ces distinctions.
Figure 1: Typologie des exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe
1) la catégorie à laquelle appartient l’exercice sélectionné vise à déterminer si ce dernier
fait partie de la catégorie d’exercices dits intuitifs, automatiques, réflexes ou de la catégorie
des exercices présentés comme analytiques, intellectuels ou réflexifs;
2) la forme de l’exercice précise s’il s’agit, en fonction de la catégorie, des exercices
structuraux, d’un exercice s’appuyant sur l’oral pour la première catégorie ou plutôt d’un
exercice développant partiellement l’appropriation des PMSV ou d’un exercice favorisant un
raisonnement grammatical complet pour la deuxième catégorie;
3) le type d’exercice établit s’il s’agit, en fonction de cette forme, d’un exercice de
substitution, de transformation, à choix de réponse, d’un exercice recourant à une structure
répétitive pour le premier groupe de forme ou d’un exercice de repérage, à trous, à choix de
85 Les flèches tournantes visent à rappeler que quoique les deux catégories soient envisagées comme un continuum, il n’est
pas exclu la possibilité d’un mouvement dialectique entre les deux.
111
réponse binaire, de recherche ou de correction d’erreurs, de transformation de texte et de
rédaction avec contraintes ou de production de texte, etc. pour le deuxième groupe de forme
d’exercices;
4) les exercices permettant de susciter l’émergence de représentations métalinguistiques
des apprenants. Il s’agit de cerner si l’exercice, dans sa réalisation, comprend
nécessairement des explications par les apprenants des choix qu’ils ont effectués.
Concrètement, l’idée est de déterminer si l’exercice pourrait être assimilé à ce que Beacco
(2010) désigne sous l’appellation « exercices de conceptualisation »86.
Le tableau ci-dessous (tableau 3) présente, sous forme de questions, les quatre
éléments que nous avons voulu examiner.
Tableau 3 : Questions pour la grille d’analyse sur la typologie d’exercices
1. À quelle catégorie appartient l’exercice proposé?
2. À quelle forme appartient l’exercice proposé? 3. À quel type appartient l’exercice proposé?
4. Les exercices proposés permettent-ils de susciter des réflexions métalinguistiques chez
les apprenants?
Pour répondre à ces quatre questions, nous avons décomposé cette première grille en
quatre sous-grilles, chacune ayant pour objectif de répondre avec précision à chacun des
éléments que nous voulions examiner. En voici la présentation.
3.3.2.1 La sous-grille pour déterminer la catégorie à laquelle appartient l’exercice
La colonne « catégorie de l’exercice » nous a permis de déterminer si l’exercice
sélectionné est de type intuitif, automatique, réflexe ou de type analytique/intellectuel/réflexif
Tableau 4 : Catégorie d’exercices sur les PMSV dans le manuel
Page Rubrique N0 Titre de la leçon Catégorie de l’exercice
3.3.2.2 La sous-grille pour déterminer la forme de l’exercice
La colonne « forme de l’exercice » nous a permis de distinguer les exercices
développant partiellement l’appropriation des PMSV de ceux favorisant un raisonnement
grammatical complet sur les PMSV.
86 Cf. 2.3.2.2.2.
112
Tableau 5 : Formes des exercices
Forme de l’exercice Page Rubrique Numéro Titre de la leçon
Exercices développant
partiellement l’appropriation
du PMSV
Exercices favorisant un
raisonnement complet sur le
PMSV
3.3.2.3. La sous-grille pour déterminer le type d’exercice
Les réponses dans la colonne « type de l’exercice » nous ont permis de préciser si
l’exercice sélectionné était un exercice de substitution, de transformation, à choix de réponse,
recourant à une structure répétitive, de repérage, à trous ou à choix de réponse binaire pour
le 1er groupe de formes ou un exercice de recherche ou de correction d’erreurs, de
transformation de texte et de rédaction avec contraintes ou de production de texte, etc. pour
le 2e groupe de formes d’exercices.
Tableau 6 : Type des exercices
Page Rubrique Numéro Règle abordée Type de l’exercice
3.3.2.4 La sous-grille pour déterminer les configurations d’exercices pouvant susciter
l’expression de représentations métalinguistiques
Selon les orientations fournies par Beacco (2010), nous avons construit cette sous-
grille en nous appuyant sur trois points. Nous nous sommes demandé si 1) les consignes
proposées appelaient à des réponses ouvertes, c’est-à-dire si elles permettaient aux élèves de
fournir des réponses autres que « oui » ou « non », 2) si les consignes appelaient à des
réponses contextuelles, autrement dit si les réponses potentielles seraient fournies en tenant
compte du contexte des énoncés et enfin 3) si les réponses admissibles comprenaient
nécessairement des justifications sur les choix effectués.
Tableau 7: Expression de l’émergence de représentations métalinguistiques
Page
Rubrique
N0 de
l’exercice
Les exercices proposés permettent-ils de susciter des réflexions
métalinguistiques chez les apprenants?
La consigne proposée
appelle-t-elle à des
réponses ouvertes?
La consigne proposée
appelle-t-elle à des
réponses contextuelles?
Les réponses
admissibles
comprennent-elles
nécessairement des
justifications sur les
choix effectués?
113
3.3.3 La grille sur les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles
La deuxième grille d’analyse concourt à atteindre le 2e objectif spécifique de notre
recherche. Plus précisément, elle nous permet de déterminer la considération faite aux
connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans les exercices sur les PMSV
sélectionnés. Rappelons que celles-ci sont fondamentales dans toute perspective pédagogique
(Tardif, 1997). L’opérationnalisation de cette grille s’est basée sur les apports de la
psychologie cognitive (Tardif, 1999) et de la didactique du français (Nadeau, 2001; Nadeau
et al. 2006; Chartrand; 2009).
Comme le montre le tableau, nous avons opté pour l’analyse de deux aspects de ces
connaissances (cf. Tableau 8). Nous nous sommes demandé si 1) les exercices sélectionnés
convoquent à la fois87 les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles et si 2)
les exercices sélectionnés tiennent compte des caractéristiques de chacune de ces
connaissances.
Tableau 8: Questions pour l’analyse des connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles 1. Les exercices sélectionnés convoquent-ils à la fois les connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles?
2. Les exercices sélectionnés tiennent-ils compte des caractéristiques de chacune des
connaissances?
Comme pour la grille précédente, pour répondre à ces questions, nous avons
décomposé la grille en deux sous-grilles. La première cerne la capacité des exercices
sélectionnés à convoquer les trois types de connaissances et la seconde sous-grille examine
si ces derniers tiennent compte des caractéristiques de chacune des connaissances
susmentionnées. Voici leur présentation.
3.3.3.1. La sous-grille pour cerner la convocation des connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles dans les exercices sélectionnés
Comme l’indique le tableau 9, nous avons subdivisé cette première question en deux
sous-questions. La première permet de déterminer si l’exercice offre une variété de cas
possibles sur lesquels les élèves pourraient réfléchir et la seconde si l’exercice permettrait
87 Dans le cadre des PMSV, nous pensons qu’il est nécessaire que les exercices proposés permettent aux élèves de traiter
les trois types de connaissances à la fois. En fait, pour effectuer correctement la majorité des PMSV, nous pensons que
l’apprenant doit connaitre au préalable la règle qui se rattache au PMSV abordé pour pouvoir exécuter les procédures de
façon adéquate et distinguer la stratégie qu’il est préférable d’utiliser.
114
aux élèves de mener toutes les opérations nécessaires à l’établissement des relations
morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe (Chartrand, 2009). Précisons que pour cette
seconde sous-question, il s’agit d’observer la probabilité de l’exercice de permettre à l’élève
de réaliser toutes les habiletés requises pour effectuer les accords en situation d’écriture, soit
l’identification de l’unité d’analyse à accorder (le sujet et/ou le verbe), la recherche de l’unité
d’analyse avec lequel il est en relation (le sujet ou le verbe) et l’inscription de la marque
d’accord appropriée (Nadeau, 2001).
Par la suite, les résultats ont été regroupés par catégorie d’exercices ayant obtenu les
mêmes réponses. Cette catégorisation a permis d’éviter la présentation de tous les exercices
analysés et de synthétiser les observations faites par l’illustration d’un ou de deux exercices.
Nous avons jugé opportun de procéder ainsi pour éviter d’avoir à proposer un trop grand
nombre de données qui auraient pu être répétitives, l’essentiel étant de justifier nos résultats.
Tableau 9: Convocation des connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles
Page
Rubrique
N0 de
l’exercice
Les exercices sélectionnés convoquent-ils à la fois
les connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles? L’exercice offre-t-il une
variété de cas possibles
sur lesquels les élèves
auront à réfléchir?
L’exercice permet-il de mener
toutes les opérations
nécessaires à l’établissement
des relations
morphosyntaxiques entre le
sujet et le verbe?
3.3.3.2. La sous-grille pour déterminer la prise en compte des caractéristiques des
connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans les exercices sélectionnés
Cette seconde sous-grille (tableau 10) examine si les exercices sélectionnés tiennent
compte des exigences des chacune des trois connaissances. Pour ce faire, nous nous sommes
référée aux informations fournies par la recherche sur chacune d’elles (Tardif, 1997; Désilets,
1997; Tardif, 1999; Nadeau et Fisher, 2006; Chartrand, 2009) en décomposant la question en
différentes sous-questions. Pour les connaissances déclaratives, nous avons examiné si
l’exercice permet d’établir le PMSV en faisant appel à la ou aux règle (s) qui s’y
rattache/rattachent88. Pour les connaissances procédurales, nous nous sommes demandé 1)
88 Il s’agit ici de déterminer si la réalisation de l’exercice exige de l’élève de connaitre au préalable les règles qui s’y
rattachent pour l’exécuter. Nous nous sommes appuyée pour cela sur les règles proposées dans le manuel.
115
si l’exercice permet le déclenchement d’une procédure, 2) si cette procédure se produit dans
l’exécution de l’exercice même et 3) si l’exécution de la procédure permet à l’élève de diriger
son attention vers d’autres aspects (respect de la ponctuation, conjugaison des verbes
irréguliers, règles de rédaction d’un récit, etc.). Pour les connaissances conditionnelles,
nous nous sommes demandé si l’exercice offre une variété de conditions pour pouvoir le
réaliser. Concrètement, il s’agit de voir si, pour s’approprier des connaissances sur différents
PMSV, l’élève dispose de plusieurs cas de PMSV dans l’exercice. Nous avons envisagé que
la présence de plusieurs cas de PMSV dans un exercice participerait à une appropriation plus
efficiente dans la mesure où les élèves, en situation de production écrite, sont généralement
amenés à produire des PMSV variés. Pour les mêmes raisons que la sous-grille précédente,
les résultats ont été regroupés par catégorie d’exercices ayant obtenu les mêmes réponses.
Tableau 10 : Prise en compte des caractéristiques des connaissances
P
R
N0
Les exercices sélectionnés tiennent-ils compte des caractéristiques de
chacune des connaissances?
L’exercice permet-il
d’établir le PMSV en
faisant appel à la règle
ou aux règles qui s’y
rattache (ent)?
L’exercice
permet-il de
déclencher
une
procédure?
La
procédure se
produit-elle
dans
l’exécution
de l’exercice
même?
L’exécution de
la procédure
pourrait-elle
permettre à
l’élève de
diriger son
attention vers
d’autres
aspects?
L’exercice
offre-t-il une
variété de
conditions?
3.3.4 La grille sur les connaissances implicites et explicites
Dans le même ordre d’idées que la grille précédente, la troisième grille d’analyse
aspire à atteindre le troisième objectif spécifique de notre recherche. Elle porte sur les
connaissances implicites et les connaissances explicites. Comme indiqué dans le cadre
conceptuel, la recherche montre que ces deux connaissances ont des effets sur l’apprentissage
des élèves, notamment sur l’acquisition des phénomènes morphosyntaxiques (Largy et al.,
2001; (Perruchet et al., 2004; Gasparini, 2004; Nadeau et al. , 2005; Gombert, 2006; Nadeau
et al. 2011). En outre, les travaux de Nadeau et al. (2011) ont démontré que certains exercices
des manuels scolaires ne favorisent pas l’appropriation de certains phénomènes
morphosyntaxiques durablement du fait qu’ils ne développent bien ni les connaissances
implicites ni les connaissances explicites.
116
Dès lors, nous avons étudié si, dans les exercices sur les PMSV sélectionnés, les
caractéristiques des connaissances implicites et celles des connaissances explicites étaient
présentes. Nous avons également voulu déterminer si les exercices sur les PMSV favorisaient
l’acquisition du PMSV par le recours au mode d’apprentissage des connaissances implicites
et des connaissances explicites. L’élaboration de la grille s’est appuyée essentiellement sur
les apports de la didactique du français (Fayol et al., 1991 ; Largy et al., 2002; Nadeau et
Fisher, 2011) et des sciences contributoires (Perruchet et al., 1998; Gasparini, 2004 ; Rey et
al., 2005). Pour répondre à ces préoccupations, nous avons scindé l’analyse en deux étapes
comme le montre le tableau ci-dessous (Tableau 11). La première consiste à interroger les
connaissances implicites et la seconde les connaissances explicites.
Tableau 11 : Questions sur les connaissances implicites et explicites
1. a. L’exercice considère-t-il les caractéristiques des connaissances implicites?
1. b. L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au mode
d’apprentissage des connaissances implicites?
2. L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au mode d’apprentissage
des connaissances explicites?
3.3.4.1 L’examen des caractéristiques et du recours au mode d’apprentissage des
connaissances implicites
Dans un premier temps, nous avons examiné la présence de caractéristiques des
connaissances implicites dans les exercices sélectionnés. Puis, nous avons observé si les
exercices favorisent le recours au mode d’apprentissage des connaissances implicites dans la
façon dont ils sont conçus pour permettre l’appropriation du PMSV à l’étude. Pour ce faire,
nous avons construit une sous-grille (tableau 12) inspirée des orientations de la recherche.
Concrètement, nous avons choisi de nous appuyer sur trois observables : la présence d’une
fréquence d’association de certains éléments d’association dans le PMSV (par exemple GN
au pluriel, sujets multiples composés de déterminants de même nature, etc.), l’influence de
l’oral pour réaliser le PMSV et l’exposition unique ou fréquente à des exemples positifs.
117
Tableau 12: Analyse du recours au mode d’apprentissage des connaissances implicites
P
R
N0
L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au
mode d’apprentissage des connaissances implicites?
Y a-t-il la présence d’une
fréquence d’association de
certains éléments dans le
PMSV?
Y a-t-il influence de l’oral
pour réaliser le PMSV
abordé?
L’exercice
expose-t-il
uniquement/
fréquemment à
des exemples
positifs?
3.3.4.2 La sous-grille pour examiner les caractéristiques et le recours au mode
d’apprentissage des connaissances explicites89
Par la suite, nous avons construit une sous-grille (tableau 13) pour nous permettre
d’observer à la fois des caractéristiques et des indices nous permettant de démontrer que les
exercices sélectionnés ont recours au mode d’apprentissage des connaissances explicites.
Pour la réaliser, nous nous sommes appuyée sur quatre indicateurs : 1) la capacité de
l’exercice à offrir la possibilité de verbaliser et de contrôler intentionnellement des
connaissances sur le PMSV à l’étude, 2) la possibilité que l’exercice implique l’application
de processus conscients, 3) la possibilité que l’exercice implique l’application d’une
conscience métalinguistique et 4) la capacité de l’exercice à suggérer l’application
d’exigences secondaires, autre que le PMSV abordé.
Tableau 13: Analyse des caractéristiques des connaissances explicites
P
R
No
L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au mode
d’apprentissage des connaissances explicites?
L’exercice offre-t-il
la possibilité de
verbaliser et de
contrôler
intentionnellement
des connaissances
sur le PMSV abordé?
L’exercice
implique-t-il
l’application de
processus
conscients?
L’exercice implique-t-il
l’application d’une
conscience
métalinguistique?
L’exercice
suggère-t-il
l’application
d’exigences
secondaires, autre
que le PMSV
abordé?
Enfin, comme pour les précédentes sous-grilles, nous avons regroupé les résultats
obtenus en catégories et avons présenté un ou plusieurs exercices en guise d’illustrations de
nos analyses.
89 Pour ce point, nous avons combiné les points sur les caractéristiques des connaissances explicites et le recours à leur
mode d’apprentissage.
118
3.3.5 La grille sur la métalangue
Notre dernière grille d’analyse concourt à l’atteinte du quatrième objectif spécifique
de notre recherche. Elle porte sur la métalangue. Comme expliqué dans le cadre conceptuel
(cf. point 2.2.3), une utilisation rigoureuse, pertinente, cohérente, conforme et juste de la
métalangue dans les manuels scolaires, notamment dans les exercices, favorise le
développement des connaissances sur la langue chez les élèves en plus de contribuer à
l’instauration d’un raisonnement structuré. À travers cette grille, nous avons voulu examiner
toutes ces conditions dans les exercices sur les PMSV contenus dans les deux manuels
choisis. D’une façon concrète, cette grille vise à analyser la conformité et la justesse de la
métalangue utilisée dans les exercices. Elle vise également à déterminer si les exercices
sélectionnés favorisent, outre une utilisation efficiente de la métalangue, l’instauration d’un
raisonnement structuré qui permette de construire des connaissances métalinguistiques
pérennes et opératoires. Son élaboration s’est faite en tenant compte de la métalangue
recommandée par les instructions officielles du Gabon, mais aussi des directions de la
recherche, tant de la didactique du français que des sciences connexes (Grossmann, 1998;
Dolz, 1998, Chartrand, 1998; Lord et Élalouf, 2016).
Pour ce faire, nous nous sommes posé quatre questions (cf. tableau 14). Nous nous
sommes demandé si 1) les exercices sur les PMSV utilisent la métalangue instituée par le
programme officiel gabonais, si 2) l’exercice adopte une métalangue juste sur les PMSV
répondant aux exigences de la recherche, si 3) l’exercice favorise une acquisition efficiente
de la métalangue en ce qui concerne les PMSV et enfin si 4) l’exercice favorise l’instauration
d’un raisonnement structuré (écrit ou oral) qui contribue à la construction de connaissances
métalinguistiques pérennes et opératoires sur les PMSV. Les points suivants déclinent la
méthodologie adoptée pour répondre à ces quatre questions.
Tableau 14: Questions pour l’analyse de la métalangue
1. L’exercice utilise-t-il la métalangue conforme à celle instituée par le programme officiel
gabonais?
2. L’exercice adopte-t-il une métalangue juste répondant aux exigences de la recherche?
3. L’exercice favorise-t-il une acquisition efficiente de la métalangue?
4. L’exercice favorise-t-il l’instauration d’un raisonnement structuré qui contribue à la
construction de connaissances métalinguistiques pérennes et opératoires?
119
3.3.5.1 L’analyse de la conformité de la métalangue
Pour analyser la conformité de la métalangue, nous avons choisi de nous limiter à
l’examen de la conformité des dénominations utilisées pour désigner non seulement les
PMSV, mais aussi les deux éléments d’analyse qui font l’objet de notre étude, le sujet et le
verbe, dans les exercices sélectionnés et dans les titres des leçons affiliés à ces exercices, en
fonction de celle reconnue par les textes officiels gabonais. Ce choix s’explique
essentiellement par le fait que notre recherche est d’abord une étude qui vise ultimement à
améliorer l’enseignement et l’apprentissage de l’étude de la langue en contexte gabonais. Il
nous a donc paru logique de tenir compte des appellations reconnues par les instructions de
ce contexte éducatif. Nous avons ensuite analysé si ces appellations étaient identiques ou
différentes d’un exercice ou d’un titre de leçon90 à un autre.
3.3.5.2 L’analyse de la justesse de la métalangue
Nous avons estimé essentiel par la suite d’analyser la justesse de la métalangue
utilisée dans le manuel en fonction des avancées de la recherche. Cette analyse a consisté à
déterminer si celle-ci répondait aux exigences de ce que les travaux dans ce domaine ont
démontré. Comme pour l’analyse de la conformité de la métalangue, nous avons restreint
l’observation aux exercices sur les PMSV sélectionnés et aux titres des leçons annonçant la
série de ces exercices. L’idée était de vérifier que les termes employés pour désigner le verbe,
le sujet et les PMSV étaient justes, cohérents, exacts, fidèles et précis avec les indications de
la recherche. L’observation s’est faite seulement lorsque les trois éléments de notre étude
étaient explicitement identifiés. Pour analyser la justesse des termes utilisés pour désigner le
verbe, nous nous sommes appuyée sur les caractéristiques du verbe fournies dans le cadre
conceptuel (cf. 2.1.1). Pour des raisons de commodité, cette observation s’est faite au moyen
d’un tableau (tableau 15) dont voici la présentation91.
90 Il ne s’agit pas d’analyser les leçons proposées dans le manuel mais d’examiner les titres inscrits avant chaque série
d’exercices. 91 L’analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner le sujet ne nécessitait pas la construction d’un tableau.
120
Tableau 15: Analyse de la justesse de la métalangue pour désigner le verbe
P
No
Caractéristiques du verbe
Consigne de l’exercice
et exemple de phrase
Renvoie/
peut renvoyer
à une unité de
la phrase
Situe dans le
temps les
faits ou
évènements
dont il est
question
dans la
phrase.
Peut avoir
différentes
valeurs (état
ou existence,
action,
opinion,
sensation,
etc.)
Possède / peut
posséder des
caractéristiques
morphologiques
et syntaxiques
3.3.5.3 L’analyse sur la capacité des exercices à favoriser une acquisition de la métalangue
L’analyse sur l’acquisition de la métalangue s’est réduite à l’étude de la possibilité
que pourrait offrir l’exercice à favoriser une utilisation effective de la métalangue puisque
nous ne pouvions le vérifier en pratique auprès des élèves. Pour observer cette probabilité,
nous nous sommes basée sur trois indicateurs : la métalangue que pourrait utiliser l’élève
pour désigner les PMSV, les manipulations syntaxiques que pourrait entrainer l’exécution de
l’exercice et les jugements de grammaticalité que pourraient exprimer les élèves en exécutant
l’exercice. Celles-ci s’inspirent de trois observables métalinguistiques proposées par Boivin
(2014)92 dans son article portant sur une analyse d’interventions métalinguistiques d’élèves
du secondaire.
Concrètement, nous avons élaboré un tableau (cf. tableau 16) pour pouvoir examiner
les exercices sur les PMSV sélectionnés. Puis, nous avons réparti les résultats en catégories
d’exercices présentant les mêmes réponses. Enfin, un exercice a permis de faciliter
l’illustration des observations effectuées.
Tableau 16: Analyse d’une acquisition efficiente de la métalangue dans les exercices Page Rubrique N0 L’exercice permet-il une acquisition efficiente de la
métalangue?
L’exercice pourrait-il
favoriser l’utilisation de la
métalangue?93
L’exercice
pourrait-il
nécessiter le
recours à des
manipulations
syntaxiques?
L’exercice pourrait-il
permettre d’exprimer
un jugement de
grammaticalité?
92 Nous y faisons allusion dans le cadre conceptuel sur le point portant sur la métalangue. 93 Il est évident que les sous-questions sont à envisager sous l’angle de l’hypothèse car nous ne pouvions observer
l’exécution de l’exercice en contexte.
121
3.3.5.4 L’analyse sur l’instauration d’un raisonnement structuré contribuant à la construction
de connaissances métalinguistiques sur les PMSV
Dans le même ordre d’idées que le point précédent, il nous a semblé opportun
d’observer si les exercices sur les PMSV sélectionnés peuvent favoriser chez les élèves
l’instauration d’un raisonnement structuré, autrement dit d’une activité métalinguistique au
sens où l’entend Gombert (1990) (cf. 2.2.3.4). Pour vérifier cette éventualité, nous avons
subdivisé cette question en trois sous-questions qui ont été utilisées comme indicateurs. Nous
nous sommes demandé, si 1) l’exercice peut amener l’élève à réfléchir sur les PMSV et sur
leur fonctionnement (SQ1), si 2) l’exercice peut permettre à l’élève de tenir un raisonnement
cohérent et structuré sur les PMSV (SQ2) et si 3) l’exercice peut favoriser la construction de
connaissances solides, pérennes, utiles et opératoires sur les PMSV94 (SQ3). De façon
détaillée, la première sous-question analyse la capacité de l’exercice à susciter la réflexion
d’une façon générale sur les PMSV, la deuxième sous-question examine la faculté de
l’exercice à favoriser chez l’élève un travail cognitif à la fois cohérent et structuré sur les
PMSV et la troisième sous-question étudie si la réflexion suscitée par l’exercice peut
contribuer à développer des connaissances métalinguistiques sur les PMSV pertinentes. Pour
vérifier ces hypothèses, nous avons élaboré le tableau qui suit (tableau 17). Par la suite, nous
avons regroupé les résultats selon le nombre de catégories qui se sont dégagées. Un exercice
de chacune des catégories dégagées a permis d’illustrer nos constatations.
Tableau 17: Analyse sur l’instauration d’un raisonnement structuré
P
R
N0
L’exercice favorise-t-il l’instauration d’un raisonnement structuré qui
contribue à la construction de connaissances métalinguistiques pérennes et
opératoires?
L’exercice pourrait-il amener l’élève à
réfléchir sur les PMSV et sur leur
fonctionnement?
L’exercice pourrait-il
permettre à l’élève de
tenir un raisonnement
cohérent et structuré
sur les PMSV?
L’exercice pourrait-il
favoriser la
construction de
connaissances solides,
pérennes, utiles et
opératoires95 sur les
PMSV?
94 Cette sous-question s’appuie sur les trois observables mentionnés plus haut (métalangue utilisée, utilisation de
manipulations syntaxiques et expression d’un jugement de grammaticalité). 95 Relatif aux moyens et aux processus mis en œuvre pour atteindre un but.
122
Pour clore ce chapitre, disons que ce dispositif d’analyse, loin d’être exhaustif, nous
a paru comme l’une des voies possibles pour atteindre nos objectifs de recherche. Nous
pensons que l’application de ces grilles d’analyse pourrait doter les futurs enseignants de
français ou les enseignants en exercice, d’un mécanisme qu’ils pourront transférer dans leurs
pratiques. Le chapitre suivant vise à matérialiser l’application de ces grilles d’analyse
conformément aux caractéristiques de notre recherche et aux critères que nous avons retenus.
123
CHAPITRE 4 : L’ANALYSE DES EXERCICES
Ce chapitre présente l’analyse des exercices sur les PMSV dans les deux manuels
scolaires officiels sélectionnés. Il se subdivise en deux grandes parties : l’analyse des
exercices dans le manuel La Nouvelle Méthode de français 6e (Nathan, 1997) et l’analyse
des exercices dans le manuel Livre Unique : Le Français en 6e (EDICEF, 2001).
L’analyse de chaque manuel s’organise en quatre sections. Chaque section débute par
un préambule qui décline succinctement quelques caractéristiques organisationnelles du
manuel, rappelle les critères de sélection des exercices, précise le nombre d’exercices
sélectionnés et les PMSV répertoriées.
Les quatre sections correspondent à l’analyse proprement dite des exercices sur les
PMSV - et ceux obligeant l’application des PMSV pour que l’exercice soit considéré comme
réussi96 - selon l’ordre de présentation de nos quatre instruments d’analyse. Chacune des
sections se termine par un bilan. Concrètement, nous nous penchons d’abord sur l’analyse de
la typologie des exercices. Ensuite, nous poursuivons avec l’analyse des connaissances
déclaratives, procédurales et conditionnelles. Puis, nous enchainons avec celle des
connaissances implicites et les connaissances explicites. Enfin, nous terminons par l’analyse
de la métalangue.
96 Pour des raisons de commodité et pour éviter les répétitions, nous parlerons d’exercices sur les PMSV.
124
4.1 L’analyse des exercices sur les PMSV dans La Nouvelle
Méthode De Français 6e
Présentation du manuel
La Nouvelle Méthode de français 6e des Éditions Nathan, rédigée par une équipe
d’auteurs africains en 1997, comprend 127 pages réparties en 3 volets : Leçon, Bilan et
Mémo. Le manuel est destiné aux élèves de la 1re année du secondaire.
Le volet intitulé Leçon comprend vingt-cinq (25) leçons comportant chacune quatre
pages. Les quatre pages peuvent être subdivisées à leur tour en cinq sections. La 1re section
(Lecture) propose deux textes à lire. Le premier texte est accompagné d’une série de
questions dont le but est de vérifier la compréhension du texte et de permettre un
approfondissement de la lecture. Cette activité est suivie par une activité dénommée Lecture
rapide, dont le but est d’exercer l’apprenant à devenir un bon lecteur par la pratique
d’exercices de lecture en un temps limité. Le deuxième texte, proposé à la fin du volet, est
intitulé en regard parce qu’il présente des points communs avec le premier texte. Ces deux
textes viseraient à mettre l’élève en présence de la pluralité des genres littéraires et des types
de textes. La 2e section (Expression orale) vise l’amélioration de la prononciation et
l’enrichissement de l’expression par le biais de saynètes et de débats. La troisième section
est réservée à l’étude de la langue. Elle regroupe des exercices sur la grammaire, la
conjugaison, l’orthographe et le vocabulaire portant sur des leçons distinctes dont les règles
se trouvent à la fin du manuel. Chacune des rubriques s’ouvre sur des exemples inspirés du
premier texte de lecture et est suivie de deux ou trois exercices d’entrainement. La quatrième
section est réservée à l’Expression écrite. Elle contient des exercices qui visent à faire manier
les procédés tirés du premier texte. Elle peut aussi consister en des exercices permettant de
réutiliser ce qui a été appris dans l’Atelier d’écriture. Cette dernière, Atelier d’écriture,
renvoie à la 5e section du volet Leçon. Elle offre à l’apprenant l’occasion de rédiger un récit
complet qu’il pourra retravailler tout au long de l’année scolaire.
Le volet Bilan apparait après chaque bloc de cinq leçons. Le manuel en propose
quatre. Il a pour but de permettre à l’élève de faire le point sur les connaissances acquises. Il
propose des exercices portant sur la grammaire, la conjugaison, l’orthographe, le vocabulaire
et le style. Il est clos par deux points. Le premier, intitulé Méthodes de travail personnel,
propose à l’apprenant différents moyens pour améliorer son travail personnel (tests, faire un
125
brouillon, se servir du dictionnaire, prendre des notes, etc.). Le second point, la Grille
d’Autocorrection, invite l’apprenant, par le biais d’activités diverses, à apprendre à se relire
et à réécrire.
Enfin, le volet Mémo reprend, en fin de volume, l’ensemble des règles et des leçons
proposés dans les exercices des trois rubriques de l’étude de la langue, à savoir la grammaire,
la conjugaison et l’orthographe. On y trouve également quelques définitions supplémentaires
et trois pages présentant la conjugaison de quelques verbes.
Sélection des exercices
La sélection des exercices sur les PMSV sur la base des critères retenus (Cf. 3.2.3)
nous a permis de répertorier quatorze exercices97.
Connaissances sur les PMSV dans La Nouvelle Méthode de français 6e
Sur les 21 PMSV répertoriés dans le cadre conceptuel (cf. tableau 2.1.3), nous avons
observé que le manuel exerce à la connaissance de neuf d’entre eux. Le tableau ci-dessous
(tableau 18) résume les PMSV présents dans les exercices sélectionnés.
Tableau 18: PMSV dans le manuel La Nouvelle Méthode de Français 6e
1. Le PMSV de façon générale.
2. Le PMSV lorsque le verbe est conjugué à un temps composé au passif ou à l’actif.
3. Le PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe.
4. Le PMSV lorsqu’un pronom est placé entre le sujet et le verbe.
5. Le PMSV lorsque le verbe a pour sujet un nom ou plusieurs noms et un pronom ou deux
pronoms de personnes différentes.
6. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom relatif qui.
7. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom personnel on.
8. Le PMSV avec ou ou ni .
9. Le PMSV lorsque le verbe a deux sujets unis par les conjonctions de coordination et, ou.
Précisons que plusieurs de ces PMSV ne se trouvent pas exclusivement dans des
exercices consacrés à l’appropriation des connaissances sur les PMSV. Autrement dit,
certains exercices nécessitent que soient appliqués des PMSV bien que la leçon porte sur une
autre notion. C’est le cas par exemple des exercices portant sur les leçons La phrase et ses
constituants, La voix passive et Le complément d’objet direct.
97 Cf. Annexe 1.
126
4.1.1 L’analyse sur les typologies d’exercices
Rappelons que la première grille d’analyse, subdivisée en quatre sous-grilles,
examine les exercices proposés selon la typologie d’exercices élaborée suivant les questions
suivantes :
1. Quelle catégorie d’exercices propose le manuel?
2. À quelle catégorie appartient l’exercice proposé?
3. À quelle forme appartient l’exercice proposé?
4. À quel type appartient l’exercice proposé?
5. Les exercices proposés permettent-ils de susciter des réflexions métalinguistiques chez les
apprenants?
4.1.1.1 L’analyse sur les catégories d’exercices proposés dans le manuel
Nous avons répertorié 13 exercices de type analytique, intellectuel ou réflexif et 1
exercice combinant les deux catégories retenues. Le tableau ci-dessous présente les résultats
obtenus.
Tableau 19: Catégorie des exercices sur les PMSV dans La Nouvelle Méthode de Français 6e Page Rubrique Numéro Titre de la leçon Catégorie de l’exercice
1 10 Grammaire 3 La phrase et ses constituants Analytique/ intellectuel/ réflexif
2 14 Orthographe 1 L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
3 14 Orthographe 2 L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
4 18 Orthographe 1 Le sujet inversé98 Analytique/ intellectuel/ réflexif
5 18 Orthographe 2 Le sujet inversé Analytique/ intellectuel/ réflexif
6 18 Orthographe 3 Le sujet inversé Analytique/ intellectuel/ réflexif
7 22 Orthographe 1 Sujets multiples coordonnés
par et, ou, ni
Analytique/ intellectuel/ réflexif
8 22 Orthographe 2 Sujets multiples coordonnés
par et, ou, ni
Analytique/ intellectuel/ réflexif
9 24 Orthographe 1 Bilan Analytique/ intellectuel/ réflexif
10 32 Orthographe 1 On/ On n’99 Analytique/ intellectuel/ réflexif
11 32 Orthographe 2 On / On n’ Analytique/ intellectuel/ réflexif
12 36 Grammaire 2 La voix passive100 Analytique/ intellectuel/ réflexif
14 110 Orthographe 1 Le sujet qui Analytique/ intellectuel/ réflexif
Intuitif / automatique/réflexe
98 Sujet placé après le verbe 99 Le PMSV lorsque le sujet est le pronom « on ». 100 Le PMSV lorsque le verbe est conjugué à un temps composé au passif ou à l’actif. 101 Le PMSV lorsqu’un pronom est placé entre le sujet et le verbe.
127
Comme le montre le tableau, le manuel La Nouvelle Méthode de français 6e propose
des exercices majoritairement de type analytique/intellectuel/réflexif. Compte tenu du niveau
d’enseignement de la classe, il semble que le manuel tienne peu compte du fait que le niveau
d’appropriation des connaissances sur les PMSV présente des avantages à être graduel. Les
apprenants sont directement soumis à un niveau de complexité qui fait qu’ils se trouvent
directement soumis à une assimilation raisonnée et réflexive des connaissances sur les
PMSV. Or, comme nous l’avons expliqué dans le cadre conceptuel, les exercices de type
morphosyntaxique intuitif/automatique/réflexe restent des auxiliaires de l’enseignement de
la langue malgré les risques qu’ils peuvent engendrer et les limites qui leur sont reprochées.
En effet, en plus de permettre aux apprenants d’acquérir une certaine spontanéité dans
l’emploi des formes morphosyntaxiques, facilitant ainsi le passage à l’expression libre
(Avram, 2006) et d’offrir une souplesse qui permette de les utiliser à tous les niveaux, les
exercices de cette catégorie pourraient être non seulement une source d’apprentissage par
l’exposition répétée à une structure, mais pourraient également participer à la détection
d’erreurs d’accord (Nadeau et Fisher, 2011). En outre, nous pensons que l’appropriation des
connaissances ne devrait pas être considérée comme une rupture entre des exercices qui
favorisent la mise en œuvre de processus cognitifs rigoureux et ceux qui sollicitent peu
d’attention des apprenants dans leur application. Ces deux catégories devraient être perçues
comme un continuum. Autrement dit, les deux catégories sont pour nous complémentaires et
utiles pour une appropriation conséquente des PMSV.
Pour illustrer le fait qu’ils appartiennent bien à la catégorie d’exercices répertoriés,
nous avons choisi trois exercices Chaque exemple présente l’exercice et son analyse, laquelle
vise principalement à montrer que l’exercice est conforme aux indications fournies dans la
typologie élaborée dans le cadre conceptuel.
Exemple d’exercice de type analytique/intellectuel/réflexif
Exercice 1 : rubrique grammaire, No 3, « La phrase et ses constituants », p.10
128
L’exercice ci-dessus porte sur l’appropriation des connaissances dans la leçon La
phrase et ses constituants. Nous observons que ce dernier convoque des habiletés
intellectuelles dans la mesure où il suscite chez l’apprenant l’appropriation consciente du
PMSV. En effet, on constate par exemple que rien n’est repéré par avance dans l’apport102
pour l’élève, qui devra trouver non seulement les mots ou groupes de mots ayant la fonction
syntaxique de sujet, mais aussi les verbes contenus dans chacune des phrases proposées par
l’exercice.
Nous relevons néanmoins le fait qu’une partie de la consigne de l’exercice
« …souligne le GN sujet et le verbe » n’est pas suffisamment claire quant aux verbes à
souligner dans les phrases. Manifestement, aucune précision n’est faite sur le fait que
l’exercice suggère vraisemblablement de ne souligner que les verbes en relation avec les
sujets contenus dans les phrases proposées. Par exemple, si l’on observe la phrase Chaque
soir, la jeune fille parcourt des kilomètres pour rentrer chez elle, on constate la présence de
deux verbes, parcourt et rentrer . Comme le rappellent Cuq et al., (2003) toute consigne
devrait permettre à l’apprenant de saisir le message, de comprendre le but et d’estimer les
procédures à mettre en œuvre pour effectuer la tâche au risque de concourir au fait que
l’exercice ne soit pas intégralement réussi. La consigne aurait pu, pour être plus explicite,
mentionner qu’il s’agit de ne souligner que les verbes en relation avec la fonction syntaxique
de sujet dans les phrases.
Exemple d’exercice combinant les deux catégories
Exercice 2 : rubrique orthographe, « Le sujet qui », No 1, p.110
102 Contenu de l’exercice.
129
L’exercice ci-dessus, qui porte sur le PMSV lorsque le sujet est le pronom relatif qui,
combine diverses caractéristiques des deux catégories d’exercices. D’une part, il présente des
traits d’un exercice de type intuitif/automatique/réflexe. Les phrases proposées travaillent la
relation morphosyntaxique dans des structures quasiment identiques. Sur les cinq (5) phrases
proposées, trois des phrases obéissent à la structure GN à la 3e personne + qui+ verbe
terminant en -ir Les dames qui (venir)…, La mangue qui (pourrir)…, Les élèves qui
(vêtir)… . Les deux autres phrases sont élaborées selon le modèle proposition principale103
constituée d’un pronom personnel à la 1re personne + verbe+ COD104 suivi de la
proposition subordonnée relative introduite par qui constituée du pronom relatif qui et
du verbe à accorder mis entre parenthèses Je garderai la clé qui (casser) et J’entends les
enfants qui (applaudir). Toutefois, de telles constructions, même si elles peuvent présenter
une certaine efficacité (acquisition d’une certaine spontanéité dans l’appropriation des
formes par exemple), ont été largement discréditées du fait entre autres de leur caractère
mécaniste, de la nature des exercices limités à la phrase et décontextualisés ou des exercices
qui pourraient être rébarbatifs pour les élèves (Cobo, 2000). D’autre part, l’exercice incite
l’élève à une certaine réflexivité dans la mesure où il développe un raisonnement partiel pour
permettre à l’élève de s’approprier le PMSV mis en évidence. En effet, bien que le verbe à
accorder soit déjà repéré pour l’élève, il lui permet néanmoins de se familiariser avec la
morphologie exercée en plus d’activer la règle qui concerne le PMSV lorsque le sujet est le
pronom relatif qui, de repérer le donneur et le receveur et de choisir les marques appropriées
à porter sur le mot receveur d’accord.
Ce type d’exercices combinant à la fois les caractéristiques d’exercice
intuitif/automatique/réflexe et d’exercice analytique/intellectuel/réflexif présente un certain
avantage dans la mesure où ils peuvent servir d’exercices de transition pour accéder aux
exercices uniquement analytique/intellectuel/réflexif. Proposés à un moment opportun, ils
pourraient contribuer à la conceptualisation des PMSV traités.
103 Au Gabon, certains termes issus du courant didactique de la grammaire traditionnelle sont toujours présents dans les
manuels et dans l’enseignement comme c’est le cas de proposition principale, complément d’objet direct, etc. 104 Complément d’objet direct.
130
4.1.1.2 L’analyse des formes des exercices
Le point précédent nous a permis d’observer que, sur les quatorze exercices portant
sur les PMSV sélectionnés, la majorité est de type analytique/intellectuel/réflexif. Seul l’un
d’entre eux combine à la fois certaines caractéristiques d’exercices de type
analytique/intellectuel/réflexif et les caractéristiques d’exercices de type intuitif/
automatique/réflexe.
Ce point analyse les exercices contenus dans le manuel selon leurs formes. Comme
le montre le tableau ci-dessous (tableau 20), nous avons observé que parmi les quatorze
exercices sélectionnés, cinq développent partiellement l’appropriation des PMSV, sept
favorisent un raisonnement complet sur les PMSV et deux associent plusieurs formes.
Tableau 20 : Formes des exercices dans La Nouvelle Méthode de Français 6e
Forme de l’exercice Page Rubrique Numéro Titre de la leçon
Exercices développant
partiellement
l’appropriation des
PMSV
1 10 Grammaire 1 La phrase et ses constituants
2 14 Orthographe 1 L’accord du verbe avec son sujet
3 14 Orthographe 2 L’accord du verbe avec son sujet
4 18 Orthographe 3 Le sujet inversé
5 22 Orthographe 2 Sujets multiples coordonnés
par et, ou, ni
Exercices favorisant un
raisonnement complet sur
les PMSV
1 18 Orthographe 2 Le sujet inversé
2 22 Orthographe 1 Sujets multiples coordonnés
par et, ou, ni
3 24 Orthographe 1 Bilan
4 32 Orthographe 1 On/ On n’
5 32 Orthographe 2 On / On n’
6 36 Grammaire 2 La voix passive
7 84 Grammaire 2 Le complément d’objet direct
Exercices combinant
plusieurs formes
1 18 Orthographe 1 Le sujet inversé
2 110 Orthographe 1 Le sujet qui
Nous avons choisi trois exercices parmi les quatorze répertoriés pour montrer que
l’exercice choisi correspond aux orientations présentées dans le cadre conceptuel.
131
Exemple d’exercice développant partiellement l’appropriation des PMSV
Exercice 3 : rubrique orthographe, « Sujets multiples coordonnés par et, ou, ni, No 2, p.22.
L’exercice porte sur l’appropriation du PMSV lorsque les sujets sont coordonnés par
et, ou, ni. Il est constitué de quatre phrases : deux phrases avec et, une phrase avec ni et une
phrase avec ou. Comme objectif secondaire, on note également qu’il exerce au PMSV
lorsque les sujets sont constitués d’un nom et d’un pronom Ma sœur et moi… , Ta copine et
toi… . Il développe partiellement l’appropriation du PMSV dans la mesure où les
connaissances morphosyntaxiques convoquées sont facilitées par l’identification du verbe
devant être mis à la personne qui convient (le verbe est mis entre parenthèses). Pour une
appropriation plus effective, l’exercice aurait pu ne pas repérer le verbe pour l’élève, ce qui
lui aurait permis de faire appel à d’autres connaissances en plus de celles du PMSV étudié.
De même, les trois étapes du cheminement nécessaire pour effectuer les accords en
situation de production écrite sont peu réunies (Nadeau, 2001). En effet, bien que
l’identification de la catégorie des mots exerçant la fonction syntaxique de sujet ne soit pas
effectuée pour l’élève et que ce dernier devra inscrire lui-même la marque d’accord
appropriée, il reste que le travail consistant à rechercher les mots avec lesquels ils devront
s’accorder, en l’occurrence le verbe, est déjà fait pour l’apprenant. Une telle omission, selon
Nadeau (2001), pourrait entraver le développement d’un raisonnement semblable à celui que
les élèves doivent mettre en œuvre dans la production de leurs propres écrits.
132
Exemple d’exercice favorisant un raisonnement complet sur les PMSV
Boivin, 2014 ; Lord et Élalouf, 2016). Elle s’appuie sur les questions suivantes :
179
1. L’exercice utilise-t-il la métalangue conforme à celle instituée par le programme officiel
gabonais?
2. L’exercice adopte-t-il une métalangue juste répondant aux exigences de la recherche?
3. L’exercice favorise-t-il une acquisition efficiente de la métalangue?
4. L’exercice favorise-t-il l’instauration d’un raisonnement structuré qui contribue à la
construction de connaissances métalinguistiques pérennes et opératoires?
Avant de répondre à ces questions, nous avons identifié les passages qui mentionnent
explicitement les trois éléments faisant l’objet de notre étude. Comme le montre le tableau
ci-dessous (tableau 27) et conformément à nos critères de sélection, l’observation des
quatorze exercices nous a permis de dégager 10 exercices qui, soit dans le titre de la leçon
annonçant la série d’exercices d’entrainement, soit dans la consigne mentionnent
explicitement le verbe, le sujet ou un PMSV.
Tableau 27 : Exercices mentionnant un PMSV, le sujet et/ou le verbe dans La Nouvelle
Méthode de Français 6e
Page No de
l’exercice
Titre de la leçon Consigne de l’exercice
10 3 - Recopie les phrases suivantes dans ton
cahier, puis souligne le GN sujet et le verbe
14 1 L’accord du verbe avec son
sujet
Mets les terminaisons des verbes en respectant
les règles d’accord
14 2 L’accord du verbe avec son
sujet
Remplace les infinitifs par le présent de
l’indicatif
18 1 Le sujet inversé Trouve le sujet des verbes contenus dans les
phrases ci-dessus. Que remarques-tu
concernant la place de certains sujets?
18 2 Le sujet inversé Justifie l’inversion du sujet dans les phrases
suivantes
18 3 Le sujet inversé Mets les verbes entre parenthèses au présent
de l’indicatif
22 2 Sujets multiples coordonnés
par et, ni, ou
Mets le verbe entre parenthèses à la personne
qui convient au présent de l’indicatif
32 1 - Remplace les sujets de ces verbes par « on »
ou « on n’ »
32 1 - Avec cette liste de verbes, élabore un petit
récit dans lequel tu emploieras on et on n’
110 1 Le sujet qui Dans les phrases suivantes, accorde le verbe
de la subordonnée relative en choisissant le
temps et la forme qui conviennent
180
4.1.4.1 L’analyse de la conformité de la métalangue utilisée dans les exercices en
fonction de celle instituée par les textes officiels gabonais
Dans un souci de clarté, nous avons trouvé plus opportun d’analyser la conformité de
la métalangue utilisée pour chaque élément faisant l’objet de note étude. Ainsi, nous
présentons une analyse de la métalangue relative au verbe, au sujet et aux PMSV.
La conformité de la métalangue utilisée pour désigner le verbe
Pour analyser la conformité de la métalangue utilisée pour désigner le verbe dans les
consignes des exercices et les titres de leçon annonçant les séries d’exercices, nous nous
sommes limitée à la définition qu’en donnent les textes officiels gabonais puisque, dans le
manuel, aucune des leçons rattachées au verbe ne propose une définition de ce dernier. Les
leçons concernant le verbe proposent plutôt des règles liées aux caractéristiques d’ordre
morphologique et sémantique du verbe. Par exemple, certaines règles présentent la valeur ou
l’emploi des modes du verbe comme la règle C2 du manuel qui propose la règle sur L’infinitif,
C65 Le participe présent et C74 L’impératif (emploi) ou la valeur de certains temps comme
C17 et C20 Les valeurs du présent, C26 et C29 Le passé composé des verbes du 1er et du 2e
groupe et Le passé composé des verbes du 3e groupe et C56 Les valeurs du futur. D’autres
encore mettent l’accent sur la distinction entre les temps du récit tels C32 Le couple
imparfait/passé composé ou C35 Le couple imparfait/passé composé. D’autres règles
présentent la conjugaison des groupes du verbe comme C5 Les verbes du 1er groupe, C8 Les
verbes du 2e groupe et C11 Les verbes du 3e groupe. Certaines règles sont consacrées à la
présentation de la conjugaison de verbes irréguliers comme O6 Les verbes en –cer, -ger, -
eler, -eter, C14 Valoir, vouloir, pouvoir ainsi que O24 Les verbes en –ger et –yer. Enfin, à la
fin du manuel, on trouve un tableau de conjugaison de quelques verbes.
Cela dit, signalons que les textes officiels gabonais définissent le verbe de la façon
suivante :
« Le verbe… est le constituant essentiel du groupe verbal … [Il] exprime
une action, un état ou un changement d’état ... [Il] se caractérise à partir d’un
radical qui lui-même peut changer, par des variations qui peuvent être marquées
par le jeu des terminaisons et par l’emploi d’auxiliaires; l’ensemble de ces
variations porte le nom de conjugaison... La conjugaison donne ses spécifications
par : la tournure…, le mode…, le temps…, la personne…, le nombre. »
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 77).
181
L’observation des exercices (tableau 28) montre que les éléments pour désigner le
verbe dans les exercices sélectionnés du manuel correspondent tous à cette définition.
Autrement dit, dans la majorité des exercices qui exigent de manipuler des verbes dans leurs
consignes, on peut observer que ces derniers sont clairement identifiés dans l’apport, soit ils
sont mis entre parenthèses, soit seul le radical est mis en évidence comme le montre le tableau
ci-dessous. Seule une des consignes d’un exercice substitue au terme « verbe » une de ses
caractéristiques en le désignant sous l’appellation infinitifs.
Tableau 28 : Consignes et contenu des exercices identifiant explicitement le verbe
P No Consigne de l’exercice Exemple de contenu de l’exercice
14 1 Mets les terminaisons des verbes en
respectant les règles d’accord
Je remerc…les invités.
14 2 Remplace les infinitifs par le présent
de l’indicatif
Le chauffeur et l’apprenti (taquiner les
vendeuses.
18 3 Mets les verbes entre parenthèses au
présent de l’indicatif
Quand (arriver) les vacances, il (se
produire) comme un vide à l’internat.
22
2
Mets le verbe entre parenthèses à la
personne qui convient au présent de
l’indicatif
Ma sœur et moi (préférer) aller nous
baigner.
32
1
Avec cette liste de verbes, élabore un
petit récit dans lequel tu emploieras
on et on n’
Imaginer-affirmer-obliger-envoyer-
émettre-apporter-être-aimer-écouter-
examiner.
110
1
Dans les phrases suivantes, accorde
le verbe de la subordonnée relative
en choisissant le temps et la forme
qui conviennent
Je garderai la clé qui (casser).
La conformité de la métalangue utilisée pour désigner le sujet
Pour analyser la conformité de la métalangue utilisée pour désigner la fonction
syntaxique de sujet dans les exercices, nous nous sommes également référée à la définition
que fournissent les textes officiels en analysant sa conformité avec la définition et les
caractéristiques que propose le manuel dans les consignes des exercices, dans les titres des
leçons annonçant la série d’exercices ainsi que dans les règles proposées concernant le sujet,
comme le montre le tableau ci-dessous (tableau 29).
182
Tableau 29 : Titre des leçons et consignes utilisant le terme sujet
Page No de
l’exercice
Titre de la leçon Consigne de l’exercice
10 3 - Recopie les phrases suivantes dans ton cahier,
puis souligne le GN sujet et le verbe
18 1 Le sujet inversé Trouve le sujet des verbes contenus dans les
phrases ci-dessus. Que remarques-tu sur la
place de certains sujets?
18 2 Le sujet inversé Justifie l’inversion du sujet dans les phrases
suivantes
22 - Sujets multiples coordonnés par
« et », « ni », « ou »
-
32 1 - Remplace les sujets de ces verbes par « on » ou
on « n’»
110 - Le sujet qui -
Dans les directives officielles, le sujet est défini comme une fonction « exercée par
un mot ou un groupe de mots qui, sur le plan sémantique, désigne l’être ou la chose dont on
dit ce qu’ils sont, ce qu’ils font ou ce qu’ils subissent et qui, sur le plan syntaxique, commande
l’accord du verbe » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 80). Une précision est
également faite sur le sujet qui peut, dans une tournure impersonnelle, être un sujet
logique et un sujet grammatical (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 80). Par
exemple, dans la phrase il a été trouvé un parapluie, le pronom impersonnel il est considéré
comme le sujet grammatical, puisque c’est par lui que le verbe a été trouvé reçoit les traits
morphosyntaxiques appropriés, tandis qu’un parapluie est désigné comme le sujet logique
dans la mesure où, dans la phrase, c’est le parapluie qui fait l’objet de l’action exprimée par
le verbe.
En ce qui concerne le manuel La Nouvelle Méthode de Français 6e, diverses
spécificités du sujet sont présentées dans plusieurs règles sur les PMSV réparties tout au long
du manuel ainsi qu’une définition dans une des leçons. La leçon La phrase et ses constituants
définit le sujet comme un constituant obligatoire de la phrase simple et indique qu’il peut être
composé de plusieurs mots. Dans ce dernier cas, il est appelé groupe nominal sujet 112
(Nathan, 1997:112). S’ensuit la présentation de diverses propriétés du sujet dans les leçons
qui traitent la fonction syntaxique de sujet. Pour exemples, dans la leçon L’accord du verbe
112 Le point sur la justesse de la métalangue utilisée apportera des nuances à cette appellation.
183
avec le sujet , le manuel rappelle le fait que « deux ou trois sujets au singulier entrainent le
pluriel » (Nathan, 1997:113), qu’« en français, le sujet est souvent placé avant le verbe, mais
il peut y avoir inversion » dans la leçon Le sujet inversé (Nathan, 1997:113), que le « le sujet
du verbe peut être constitué de plusieurs noms au singulier » et que « dans une phrase à la
forme négative, lorsque les sujets font la même action, ils sont séparés par ni dans la leçon
Sujets multiples coordonnés par et, ou, ni (Nathan, 1997:114).
Dans les titres des leçons annonçant les exercices sélectionnés, la dénomination sujet
est utilisé trois fois : pour parler de l’ensemble des PMSV « L’accord du verbe avec son
sujet » (Nathan, 1997:14), pour exercer à une de ses spécificités « Sujets multiples
coordonnés par et, ou, ni » (Nathan, 1997:22) et pour exercer à une des classes grammaticales
du sujet « Le sujet qui » (Nathan, 1997:110).
Dans les consignes des quatorze exercices, le terme sujet est utilisé dans quatre
exercices. Deux consignes retiennent particulièrement notre attention. En effet, une des
consignes indique GN sujet pour dénommer la fonction syntaxique de sujet (Nathan,
1997:10). À l’évidence, cette dénomination correspond à l’appellation faite de la fonction
syntaxique de sujet dans la règle affiliée à cet exercice. D’ailleurs, le contenu de l’exercice
propose, sur les quatre phrases de l’exercice, trois phrases dont les sujets sont constitués de
plusieurs mots (ce grand garçon athlétique, Ma vraie rencontre avec lui et la jeune fille.
Dans un autre exercice réservé à la leçon Le sujet inversé, le terme sujet est complément du
nom « inversion »113 pour indiquer le fait que seuls les sujets placés après le verbe devront
faire l’objet de la manipulation.
Enfin, nous notons qu’aucun des exercices n’identifie explicitement les sujets dans
son apport. Autrement dit, tous les exercices obligent l’élève à repérer et à reconnaitre les
sujets qui feront l’objet de la manipulation dans les phrases proposées.
En somme, le manuel La Nouvelle Méthode de Français 6e adopte partiellement les
dénominations reconnues par les textes officiels gabonais pour désigner la fonction
syntaxique de sujet. En effet, les textes officiels ne mentionnent pas dans les documents
consultés le fait qu’un sujet composé de plusieurs mots porte l’appellation de groupe nominal
sujet comme semble le suggérer le manuel. En fait, les instructions officielles présentent,
113 Cette désignation de la fonction syntaxique de sujet lorsqu’il est placé après le verbe fera également l’objet
d’une analyse dans le point sur la justesse de la métalangue utilisée.
184
sous forme d’exemples, des groupes de mots pouvant exercer la fonction de sujet qui ne sont
pas des groupes nominaux telles des subordonnées (Qui vivra verra. - Que tu te plaises ici
m’est très agréable.), bien que les sujets de ces exemples ne soient pas explicitement
désignés. Or, un groupe nominal, comme son nom l’indique, est un groupe de mots dont le
mot noyau est un nom ou un mot considéré comme tel en fonction du contexte. Par
conséquent, un groupe nominal sujet se présenterait sous la forme d’un groupe de mots ayant
la fonction syntaxique de sujet et dont le mot noyau serait un mot qui aurait pour catégorie
grammaticale un nom. On pourrait d’ailleurs ajouter aux exemples proposés par les textes
officiels un autre exemple comme Courir dans la nature reste mon passetemps favori, où le
groupe de mots exerçant la fonction syntaxique de sujet n’est pas un groupe nominal, mais
un groupe de mots dont le mot noyau « courir » est un verbe à l’infinitif.
La conformité de la métalangue utilisée pour désigner les PMSV
Pour analyser la conformité de la métalangue utilisée pour désigner un PMSV en
particulier dans les exercices sélectionnés, conformément aux appellations reconnues par les
textes officiels gabonais, nous nous sommes appuyée sur les informations fournies par les
documents officiels consultés pour les comparer avec les désignations présentes dans les
titres annonçant les exercices ainsi que dans les consignes des exercices.
Nous avons observé que le manuel propose des appellations identiques à celles
proposées par les textes officiels. Pour désigner le PMSV de façon générale, c’est-à-dire pour
parler de l’attribution des traits morphosyntaxiques du sujet au verbe dans les phrases en
règle générale, le manuel utilise, comme dans les textes officiels, l’appellation L’accord du
verbe avec son sujet (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:57; Nathan, 1997:14 ;
Ngandu et al., 2011:1; Inspection générale des services, 2016:1). De même, pour désigner le
PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe, le manuel utilise comme dans les textes
officiels, l’appellation sujet inversé (Ministère de l’Éducation Nationale: 57-60-61, 1995;
Nathan, 1997:18). Seule la dénomination Sujets multiples coordonnés par et, ou, ni
n’apparait pas dans les textes officiels. En revanche, on peut lire sujets multiples (Ministère
de l’Éducation Nationale : 60-61), ce qui pourrait impliquer le PMSV lorsque les sujets sont
reliés par les conjonctions de coordination et, ou et ni.
En conclusion, nous pouvons considérer que la métalangue utilisée pour désigner le
verbe, le sujet et le(s) PMSV dans le manuel La Nouvelle Méthode de Français 6e reste, dans
185
la majorité des cas, conforme à la métalangue utilisée de ces éléments dans les textes officiels
gabonais et tout le long du manuel.
4.1.4.2 L’analyse de la justesse de la métalangue utilisée dans les exercices
Si le manuel est majoritairement en conformité avec la métalangue utilisée dans les
textes officiels gabonais, il convient néanmoins d’analyser la justesse de certains termes
utilisés pour en examiner leur pertinence en fonction des avancées de la recherche. Ce point
vise donc à examiner si la métalangue adoptée dans le manuel répond aux exigences de la
recherche. Autrement dit, il s’agit d’analyser si, dans les titres des leçons annonçant les séries
des exercices, les consignes des exercices et le contenu des exercices, le manuel adopte une
utilisation rigoureuse de la métalangue en nous demandant si les termes employés pour
désigner le verbe, le sujet et les PMSV sont justes, cohérents, exacts, fidèles et précis avec
les indications de la recherche. Comme dans le cas de l’analyse sur la conformité, nous avons
choisi d’analyser la justesse de la métalangue utilisée pour chaque élément faisant l’objet de
note étude.
L’analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner le verbe
Pour analyser la justesse des termes utilisés pour désigner le verbe, nous nous sommes
appuyée sur les caractéristiques morphologiques, syntaxiques et sémantiques du verbe
fournies dans le cadre conceptuel (cf. 2.1.1). Nous avons restreint l’analyse de la justesse de
la métalangue utilisée pour désigner les verbes à ceux qui étaient explicitement identifiés
dans les exercices.
Comme le montre le tableau ci-dessous (tableau 30), dans les exercices où le verbe
est explicitement identifié, les mots désignant le verbe nous ont paru justes, exacts et
cohérents avec les caractéristiques préalablement dégagées dans le cadre conceptuel.
Autrement dit, dans les phrases, les éléments identifiés comme étant des verbes renvoient à
une unité de la phrase, situent dans le temps des faits ou évènements, ont différentes valeurs
et possède des caractéristiques morphologiques et syntaxiques.
186
Tableau 30 : Justesse de la métalangue pour désigner le verbe dans La Nouvelle
Méthode de Français 6e
P
N0
Caractéristiques du verbe
Consigne de l’exercice et
exemple de phrase
Renvoie/
peut
renvoyer à
une unité
de la
phrase
Situe dans le
temps les faits
ou évènements
dont il est
question dans
la phrase.
Peut avoir
différentes
valeurs (état
ou
existence,
action,
opinion,
sensation,
etc.)
Possède / peut
posséder des
caractéristiques
morphologiques
et syntaxiques
14
1
Oui
Oui
Oui
Oui
Mets les terminaisons des verbes en
respectant les règles d’accord.
Ex : Tu éteindr…le feu.
14
2
Oui
Oui
Oui
Oui
Remplace les infinitifs par le présent
de l’indicatif.
Ex : À droite (se trouver) les
boubous et les peaux.
18
3
Oui
Oui
Oui
Oui
Mets les verbes entre parenthèses au présent de l’indicatif.
Ex : Le dimanche (se répandre) sur
les places et les jardins publics les
groupes des promeneurs.
22
2
Oui
Oui
Oui
Oui
Mets le verbe entre parenthèses à la
personne qui convient au présent de
l’indicatif.
Ex : Ni son père ni sa mère ne
(être) d’accord.
32
1
Oui
Oui
Oui
Oui
Avec cette liste de verbes, élabore un
petit récit dans lequel tu emploieras
on et on n’.
Ex : Affirmer-émettre
110
1
Oui
Oui
Oui
Oui
Dans les phrases suivantes, accorde
le verbe de la subordonnée relative
en choisissant le temps et la forme
qui conviennent.
Ex : J’entends les enfants qui
(applaudir).
L’analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner le sujet
Pour analyser la justesse de la métalangue utilisée pour désigner le sujet dans le
manuel, précisément dans les titres des leçons annonçant les séries d’exercices et les
consignes des exercices sélectionnés, nous nous sommes appuyée principalement sur les
indications fournies par la recherche. Sur les éléments choisis qui utilisent le terme sujet,
deux des dénominations utilisées, en dehors du terme sujet lui-même, sont jugés
problématiques par la recherche. Il s’agit des appellations GN sujet et sujet des verbes/sujets
de ces verbes.
187
Dans le premier cas, dont l’exercice est présenté ci-dessous, la consigne demande à
l’élève de souligner le GN sujet. Une telle formulation pour désigner l’élément de la phrase
ayant la fonction syntaxique de sujet pourrait non seulement entrainer des confusions sur les
différentes catégories grammaticales d’un sujet chez les apprenants en plus de poser des
difficultés pour la conceptualisation de cette importante notion chez les élèves. D’abord, la
consigne, telle que présentée, laisse suggérer que le sujet, lorsqu’il est composé de plusieurs
mots a pour dénomination groupe nominal sujet. Ce qui signifierait que l’élément central
constituant le GN comme dans le GN un repas de fête ou dans le GN une souris qui mange
sur la table serait obligatoirement un mot ayant pour catégorie grammaticale un nom.
Pourtant, dans des phrases comme Manger des pommes serait bon pour la santé ou Qui part
à la chasse perd sa place, on peut observer que l’élément ayant la fonction syntaxique de
sujet n’a pas pour mot noyau un nom, mais plutôt un verbe Manger dans le premier cas et
une subordonnée relative Qui part à la chasse dans le second cas. De plus, Chartrand (2012b)
explique que « la notion de sujet ne désigne pas un groupe, le terme groupe étant réservé à
une unité de la langue dont le noyau appartient à une classe de mots. Le terme sujet désigne
une fonction syntaxique, et le groupe nominal en est la réalisation la plus courante »
(Chartrand, 2012b :2). Pour Lord et Elalouf (2016), cette façon de nommer et de concevoir
la fonction syntaxique de sujet conduit à construire une conception erronée non seulement de
la notion de sujet qui est une relation syntaxique, mais aussi de celle de groupe nominal, qui
n’assume pas toujours la fonction de sujet. Enfin, un autre élément de la consigne, qui
pourrait accentuer les confusions chez les élèves, est qu’elle n’indique pas le fait que toutes
les phrases n’ont pas de GN sujet comme c’est le cas dans la phrase Tu n’oublieras pas ton
cahier de maths! , où le sujet est un pronom personnel. Les élèves, dans de tels cas, pourraient
croire qu’on leur demande de souligner tous les sujets contenus dans l’exercice et que les
sujets portent donc la dénomination « groupe nominal sujet ». Si l’on conçoit que les rapports
entre la réflexion métalinguistique et les autres types d’activités sur la langue, comme
plusieurs exercices sur les PMSV, leur confèrent un statut d’activité réflexive, il nous parait
important que les manuels fassent preuve de rigueur dans le choix des termes utilisés pour
désigner unités d’analyse de la langue. En outre, il convient de tenir compte du fait que les
manipulations métalinguistiques « permettent de faire fonctionner de manière méthodique,
et non plus seulement intuitive, la compétence linguistique, afin d’en tirer des conclusions
188
concernant la manière dont tel ou tel élément (morphème ou syntagme) morphosyntaxique,
peut être considéré du point de vue de son fonctionnement dans la phrase » (Grossmann,
1998).
Exercice 1 : rubrique grammaire, La phrase et ses constituants, No 3, p.10
Le second cas dont la désignation pose problème sur la façon de nommer la fonction
syntaxique de sujet est celui de sujet des verbes/ sujets de ces verbes dans deux exercices du
manuel. Ici, la formulation pose problème dans la mesure où elle laisse entendre que la
fonction syntaxique de sujet appartient au verbe. Or, ces deux unités que ce sont le sujet et le
verbe, deux constituants obligatoires de la phrase, n’entretiennent pas une relation
d’appartenance, mais plutôt en relation d’interdépendance (Chartrand, 2012b). Par ailleurs,
dans certains systèmes éducatifs, comme c’est le cas au Québec et récemment en France, le
sujet désignera la fonction syntaxique et le GV aura la fonction de prédicat. Par contre, dans
d’autres systèmes éducatifs, comme au Gabon, le GV n’aura pas la fonction de prédicat, mais
sera constitué de compléments dits essentiels comme le complément d’objet direct, le
complément d’objet indirect, le complément d’objet second, etc.
L’analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner les PMSV
Notre analyse de la justesse de la métalangue utilisée dans le manuel pour désigner
les PMSV avec les orientations de la recherche s’est appuyée sur trois dénominations
inscrites soit dans les titres des leçons annonçant les séries d’exercices, soit dans les
consignes des exercices. Il s’agit du PMSV en règle générale désigné par L’accord du verbe
avec son sujet (Nathan, 1997 :14), du PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe nommé
le sujet inversé/l’inversion du sujet (Nathan, 1997 :14) et du PMSV lorsque, dans la phrase,
les sujets sont reliés par les conjonctions de coordination et, ou et ni sous l’appellation Sujets
multiples coordonnés par « et », « ou », « ni » (Nathan, 1997 :22).
Premièrement, concernant l’appellation L’accord du verbe avec son sujet, bien que
présentée dans les programmes officiels gabonais, les indications de la recherche montrent
189
que le terme accord est problématique. D’une part, parce qu’il n’est généralement pas
clairement défini dans la majorité des manuels scolaires. Cette affirmation vaut également
pour le manuel La Nouvelle Méthode de Français 6e. En effet, comme le montre la règle ci-
dessous, la règle concernant le PMSV en règle générale inscrite dans le manuel ne fournit
aucune information sur ce que l’on entend par le terme accord. Or, il est nécessaire que les
manuels explicitent le sens des termes grammaticaux utilisés et le plus rigoureusement
possible pour que la métalangue puisse jouer son rôle (Chartrand, 2012b). D’autre part, parce
que l’utilisation de la dénomination accord du verbe avec son sujet est jugé problématique.
En effet, selon Chartrand (2012), « les mots ne donnent ni ne reçoivent un accord », mais
« donnent ou reçoivent plutôt des traits grammaticaux » (Chartrand, 2012b :3). Par
conséquent, il serait plus pertinent de désigner le transfert ou l’attribution des traits
grammaticaux du sujet au verbe par une expression qui signifierait qu’un donneur transfère
ses traits grammaticaux ou ses marques morphologiques de genre et de nombre ou de nombre
et de personne de son donneur à un autre mot, le receveur, lorsqu’ils sont en relation sur le
plan syntaxique. Par ailleurs, comme on peut le voir dans la règle ci-dessous, il n’est pas fait
exclusivement allusion à l’attribution de ses marques morphologiques du verbe au sujet. En
effet, la leçon souligne également certaines particularités entre le sujet et le verbe lorsqu’ils
sont en relation, ce qui explique notre choix d’opter pour l’expression PMSV. Pour nous,
cette dénomination intègre, en plus du sens susmentionné, les contraintes d’expression et de
position du sujet et du verbe dans les phrases relevées par Fournier (2001). Pour rendre de
façon plus cohérente le rôle de la métalangue, dont l’activité principale est de susciter une
réflexion sur la langue et sur son fonctionnement dans la perspective d’une meilleure maitrise
(Chartrand, 1998; Grossmann, 1998; Lord et Élalouf, 2016), une telle posture est à adopter
lorsqu’on a pour objectif d’apprendre et de se servir de la langue.
190
Deuxièmement, dans l’un des titres annonçant la série d’exercices et dans la consigne
d’un des exercices rattachés au PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe, le terme sujet
est associé à inversé et inversion. Si les textes officiels gabonais reconnaissent cette
appellation, il reste que certains auteurs l’ont remise en cause, comme c’est le cas dans un
article paru dans la revue Le Français aujourd’hui (Colin, 2011). L’auteur affirme que les
terminologies héritées de l’étiquetage des grammaires scolaires traditionnelles, qui pour le
rappeler, sont le produit d’une sédimentation de couches théoriques et de surdéterminations
sociales, nécessitent que l’on concilie cet héritage terminologique avec les apports des
linguistiques. Pour lui, on se devrait « d’être attentif au fait que les fondements
philosophique, sémantique, logique de la grammaire traditionnelle se reflètent dans des
dénominations non pertinentes par rapport aux fonctionnements linguistiques » comme
l’emploi de l’expression inversion du sujet, entres autres dénominations (démonstratif,
substantif, pronoms), « significatif d’une grammaire qui pose (rait) un ordre canonique à
partir des arguments de la Logique et de L’Usage » (Colin, 2011:124). L’auteur préconise de
choisir en lieu et place de inversion/inversé le terme postposition/postposé ou expliquer le
schéma des interrogatives totales simples à partir de l’antéposition du verbe comme suggéré
par Tamba-Mecz (1984).
Enfin, la troisième dénomination concerne le PMSV lorsque, dans une phrase, les
sujets sont reliés par certaines conjonctions de coordination. Ce PMSV est désigné par
l’appellation Sujets multiples coordonnés par et, ou, ni dans le manuel. Cette désignation
parait exacte, cohérente, fidèle et précise en fonction des indications de la recherche.
Autrement dit, tous les termes utilisés répondent aux critères de dénomination de
phénomènes que l’on rencontre au cours des manipulations sur les phénomènes langagiers
lorsque les sujets sont unis par des coordonnants.
4.1.4.3 L’analyse sur une acquisition efficiente de la métalangue dans les
exercices
Cette troisième question vise à examiner les exercices sélectionnés en interrogeant
leur capacité à favoriser une acquisition efficiente de la métalangue sur les PMSV. Pour ce
faire, nous avons examiné les exercices sélectionnés en nous demandant s’ils permettaient à
l’élève d’acquérir la métalangue utilisée dans le PMSV exercé et, par conséquent, s’ils
assureraient le développement de connaissances sur la langue.
191
Comme l’indique le tableau ci-dessous (tableau 31), pour réaliser cette analyse, nous
nous sommes appuyée sur trois observables métalinguistiques114 : la métalangue que pourrait
utiliser l’élève pour désigner le PMSV, les manipulations syntaxiques que pourrait entrainer
l’exécution de l’exercice et les jugements de grammaticalité que pourraient exprimer les
élèves en exécutant l’exercice.
Tableau 31 : Analyse d’une acquisition efficiente de la métalangue dans les exercices
sur les PMSV
Page Rubrique N0 de
l’exercice
L’exercice permet-il une acquisition efficiente de la
métalangue?
SQ1 SQ2 SQ3
L’exercice pourrait-
t-il favoriser
l’utilisation de la
métalangue?
L’exercice
pourrait- t-il
nécessiter le
recours à des
manipulations
syntaxiques?
L’exercice
pourrait- t-il
permettre
d’exprimer un
jugement de
grammaticalité?
1 10 G 3 Oui Non Non
2 14 O 1 Non Oui Oui
3 14 O 2 Non Oui Non
4 18 O 1 Oui Non Non
5 18 O 2 Oui Non Non
6 18 O 3 Non Oui Oui
7 22 O 1 Non Oui Oui
8 22 O 2 Oui Oui Oui
9 24 O 1 Non Oui Non
10 32 O 1 Non Oui Oui
11 32 O 2 Oui Oui Oui
12 36 G 2 Oui Oui Oui
13 84 G 2 Non Oui Oui
14 110 O 1 Non Oui Oui
Sur les quatorze exercices sélectionnés, six exercices peuvent favoriser chez l’élève
l’utilisation de la métalangue pour le réaliser, huit peuvent être faits sans désigner les
phénomènes langagiers rencontrés, onze peuvent nécessiter le recours à des manipulations
syntaxiques et trois peuvent être effectués sans avoir besoin d’utiliser des manipulations
syntaxiques, et enfin neuf pourraient offrir à l’élève la possibilité d’exprimer un jugement de
grammaticalité alors que cinq ne permettent pas véritablement d’exprimer un jugement de
grammaticalité. Ci-contre, un exemple d’exercice pour illustrer chacune de ces observations.
114 Ces trois observables nous ont été inspirés par Boivin (2014).
192
Exemple d’exercice favorisant l’utilisation de la métalangue
Dans cet exercice, la consigne demande à l’élève de souligner l’élément qui a la
fonction syntaxique de sujet et le mot ayant pour catégorie grammaticale le verbe dans les
phrases proposées. Pour réaliser cette tâche, implicitement, l’élève pourrait être amené à
nommer les termes mis en jeu ainsi que le phénomène morphosyntaxique dont il est question.
Il est vrai qu’il aurait été souhaitable que la consigne lui demande de justifier sa réponse pour
être certain qu’il sera amené à désigner les termes mis en jeu. Par exemple, dans la phrase,
Ma vraie rencontre avec lui s’est produite plus tard , pour souligner le sujet, l’apprenant
pourra s’interroger sur l’élément de la phrase qui a la fonction syntaxique de sujet (Ma vraie
rencontre avec lui) en examinant la particularité de sa composition, donc en nommant les
éléments dont il est constitué, à savoir un déterminant ou un adjectif possessif à la 1re
personne du singulier+ un adjectif qualificatif au féminin singulier+ un nom au féminin
singulier+ un complément du nom constitué d’une préposition et d’un pronom personnel
à la 3e personne du singulier. De même, il devra observer la particularité de l’élément ayant
pour catégorie grammaticale le verbe « s’est produite » dans la phrase. Il constatera et
désignera ce dernier comme un verbe pronominal à la voix active conjugué au passé
composé. Par ailleurs, la consigne, telle que formulée, engage l’élève à un travail liée à la
compréhension de la métalangue. En effet, on peut lire que celle-ci mentionne explicitement
les éléments qui devront faire l’objet d’une manipulation : « le GN sujet et le verbe ». Ce qui
mènera l’apprenant à désigner les mots ou groupes de mots qui, dans la phrase, renvoient à
ces deux dénominations.
193
Exemple d’exercice ne favorisant pas l’utilisation de la métalangue
Il nous a semblé que l’exécution de l’exercice ci-dessus n’oblige pas l’élève à utiliser
la métalangue. En fait, pour repérer les compléments d’objet direct pour les remplacer par la
suite par un pronom personnel, l’élève pourrait ne pas être obligé de désigner les termes
affectés à la manipulation. Par exemple, dans la phrase J’embrasse mon frère, il pourrait se
limiter à repérer le COD115 mon frère en posant la question J’embrasse qui? et le remplacer
par le pronom personnel l’, qui équivaut à celui que l’on emploie pour un groupe nominal au
masculin singulier pour obtenir la phrase Je l’embrasse*. Le même procédé pourra être
employé pour la phrase La voisine vend des beignets. La différence sera de remplacer le COD
des beignets par le pronom personnel les pour les groupes nominaux au pluriel en identifiant
le COD (La voisine vend quoi?) pour le remplacer par les et obtenir la nouvelle phrase La
voisine les vend *.
Exemple d’exercice pouvant nécessiter des manipulations syntaxiques
Nous observons que pour réaliser cet exercice qui porte sur le PMSV lorsque les sujets
sont unis par les conjonctions de coordination et, ou, ni, l’élève sera amené à procéder à au
moins deux manipulations syntaxiques. D’une part, pour mettre le verbe au présent de
l’indicatif, l’élève devra au préalable appliquer une des stratégies apprises pour pouvoir
repérer le sujet en relation avec le verbe entre parenthèses. Celle-ci pourrait consister à
recourir à la manipulation syntaxique d’encadrement par c’est…qui. Par exemple, pour
trouver le sujet en relation avec le verbe entre parenthèses dans l’item Ta copine et toi
(pouvoir) venir au cinéma, il encadrerait les sujets ta copine et toi. D’autre part, pour mettre
115 Complément d’objet direct.
194
le verbe entre parenthèses à la personne qui convient du présent de l’indicatif, il devra
procéder au remplacement du verbe entre parenthèses à l’infinitif pour le substituer à une de
ses formes au présent de l’indicatif à la personne qui convient. De même, pour trouver la
personne adéquate, l’apprenant pourrait substituer à l’élément ayant la fonction de sujet un
pronom personnel pour inscrire le verbe à la personne appropriée. Par exemple, dans l’item
Ni son père ni sa mère ne (être) d’accord, après avoir appliqué la procédure d’identification
des sujets (Ni son père ni sa mère), il pourrait, pour être certain de la terminaison à inscrire
au verbe, substituer à ces sujets le pronom personnel ils à la 3e personne du pluriel pour écrire
sont, 3e personne du pluriel du verbe être au présent de l’indicatif.
Exemple d’exercice ne nécessitant pas de manipulations syntaxiques
L’observation de la consigne montre que, dans cet exercice, l’élève n’est pas
explicitement amené à procéder à des manipulations syntaxiques (effacement, déplacement,
remplacement/substitution et ajout). Les tâches consisteront à repérer les différents sujets116
contenus dans les phrases pour livrer des observations concernant leur place par rapport aux
verbes avec lesquels ils sont en relation. Ces observations pourront se résumer à observer que
les sujets peuvent être placés soit avant le verbe (Je voulais-je note), soit après le verbe (De
la boite, devenue coffre, coulait un sang épais.- Je voulais savoir ce que contenait votre
mystérieuse boite.- Ne vois-tu pas que je note toutes les questions?). Notons tout de même
que l’élève pourrait livrer comme observation dans ce dernier cas le fait que le sujet placé
après le verbe se trouve dans une phrase interrogative, ce qui reviendrait à dénommer
explicitement le type de phrase. Mais, dans tous les cas, aucune manipulation syntaxique
n’est requise pour livrer cette constatation.
116 Pour repérer les sujets, l’élève pourrait poser la question Qu’est-ce qui? /qui est ce qui? ou recourir à la manipulation
d’encadrement par c’est…qui.
195
Exemple d’exercice offrant la possibilité d’exprimer un jugement de grammaticalité
Nous pensons que l’exemple ci-dessus pourrait susciter chez l’élève l’expression d’un
jugement de grammaticalité pour établir correctement le PMSV lorsque le sujet est le pronom
relatif qui. Ces jugements de grammaticalité pourraient survenir notamment sur la
particularité des verbes à accorder. Dans les cinq phrases proposées, l’accord adéquat de trois
verbes à l’infinitif entre parenthèses (venir, applaudir et vêtir) pourrait obliger l’élève à
déterminer si l’établissement du PMSV obtenu est correct ou non. L’inscription de ces verbes
au temps et à la forme qui conviennent pourrait amener l’élève à mettre en œuvre ses
compétences linguistiques. Par exemple, ce dernier pourrait inscrire comme résultat les
élèves qui vêtent* ou qui vêtissent* au lieu des élèves qui sont vêtus pour respecter la
concordance de temps avec le verbe de la proposition principale sont exclus. En fait, on
pourrait s’attendre à ce que les élèves pensent être en présence du verbe se vêtir au lieu du
verbe vêtir dont l’usage nous parait être peu courant pour des élèves de première année du
secondaire, surtout qu’en consultant le logiciel Antidote par exemple, le verbe vêtir est
présenté comme un verbe appartenant à un registre de langue soutenu.
Exemple d’exercice offrant peu de possibilités d’exprimer un jugement de grammaticalité
196
En nous référant à la définition fournie sur le jugement de grammaticalité mentionné
plus haut, nous pensons que dans cet exercice, l’élève n’est pas véritablement amené à
déterminer si une phrase fait partie de sa langue ou non, du moins en ce qui concerne les
PMSV contenus dans le texte à corriger. En examinant les PMSV fautifs dans le texte, nous
constatons que le fait que les verbes à corriger soient tous du premier groupe (…se jète des
millions de campagnards… .- Les paysans,…arrive.- Leur famille et leur maigre bien les
accompagne… -...un garçon de banlieue,…, rêvent …- …ni les organisations humanitaires
ni le simple citoyen n’arrive… .- Et l’espoir que redonnent…) pourrait conduire l’élève à
penser que les mises en relations entre les sujets et les verbes sont correctes puisque,
prononcées oralement, elles pourraient ne pas susciter de doute quant à leur inscription dans
le texte. Une intervention métalinguistique plus approfondie aurait pu conduire les élèves à
réaliser que les accords effectués sont erronés.
4.1.4.4 L’analyse sur l’instauration d’un raisonnement structuré contribuant à
la construction de connaissances métalinguistiques sur les PMSV
Cette dernière question sur la métalangue dans les exercices sur les PMSV
sélectionnés vise à examiner la capacité des exercices à favoriser l’instauration d’un
raisonnement structuré chez les élèves ou d’une activité métalinguistique. Pour y parvenir,
nous avons décomposé la question y afférant en trois sous-questions comme le décline le
tableau ci-dessous (tableau 32). De façon concrète, nous nous sommes posé les questions
suivantes :
1) L’exercice pourrait-il amener l’élève à réfléchir sur les PMSV et sur leur
fonctionnement?
2) L’exercice pourrait-il permettre à l’élève de tenir un raisonnement cohérent et structuré
sur les PMSV?
3) L’exercice pourrait-il favoriser la construction de connaissances solides, pérennes,
utiles et opératoires117 sur les PMSV?118
Le tableau ci-dessous (tableau 32) renvoie à l’observation des exercices. Il montre
que sur les quatorze exercices, dix exercices, soit 71,43 %, pourraient favoriser une activité
métalinguistique.
117 Relatif aux moyens et aux processus mis en œuvre pour atteindre un but. 118 Pour répondre à cette question, nous nous sommes appuyée sur les résultats obtenus grâce aux trois observables du point précédent.
197
Les quatre exercices restants présentent certaines particularités. Soit la réponse à l’une
des sous-questions est Oui, soit la réponse à l’une des sous-questions est Oui/Non. En fait,
nous avons constaté que trois exercices pourraient offrir de façon insuffisante le
développement de connaissances métalinguistiques sur les PMSV qui soient véritablement
pertinentes. C’est ce qu’expriment pour nous les réponses Oui/non. Elles indiquent que
l’exercice répond modérément à la sous-question. Plus précisément, puisque l’exercice
suscite nécessairement une réflexion de la part de l’élève pour le réaliser, comme le fait de
repérer les éléments à manipuler pour réussir la tâche demandée par la consigne, nous ne
pouvions pas répondre totalement par la négative à la sous-question. Toutefois, ce travail
cognitif demeure insatisfaisant pour affirmer que l’exercice permet une véritable réflexion
sur la langue et son fonctionnement, notamment sur le PMSV exercé. Nous insisterons par
conséquent, dans l’analyse, sur les raisons qui nous ont menée à répondre Non à la sous-
question.
En outre, l’analyse d’un des exercices119 indique que ce dernier pourrait ne pas
favoriser de façon satisfaisante la construction de connaissances métalinguistiques solides,
pérennes, utiles et opératoires pour certaines raisons. En effet, quoique les phrases proposées
présentent une diversité de PMSV, les verbes à l’infinitif entre parenthèses à mettre au
présent de l’indicatif pour établir adéquatement le PMSV exercé sont non seulement tous du
premier groupe (se trouver, travailler, taquiner, s’opposer), mais en plus, la plupart des sujets
inscrits sont des groupes nominaux quand ils ne sont pas déjà au pluriel, ce qui réduit
considérablement l’effort cognitif de l’élève (les boubous et les peaux/ Le chauffeur et
l’apprenti/ Ni mon père ni ma mère). Seule une des phrases présente un sujet dont la catégorie
grammaticale pourrait entrainer chez l’élève une plus grande réflexivité (Toi qui (travailler)
bien en classe…).
Enfin, dix exercices offrent l’instauration d’un raisonnement structuré contribuant à
une construction de connaissances métalinguistiques pertinente pour l’élève.
119 L’accord du verbe avec son sujet, Exercice No 2, p. 14.
198
Tableau 32 : Analyse sur l’instauration d'un raisonnement structuré dans les
exercices du manuel La Nouvelle Méthode de Français 6e
P
R
N0
L’exercice favorise-t-il l’instauration d’un raisonnement
structuré qui contribue à la construction de
connaissances métalinguistiques pérennes et opératoires? SQ1 SQ2 SQ3
L’exercice pourrait-il
amener l’élève à
réfléchir sur les PMSV
et sur leur
fonctionnement?
L’exercice pourrait-
il permettre à
l’élève de tenir un
raisonnement
cohérent et
structuré sur les
PMSV?
L’exercice pourrait-il
favoriser la
construction de
connaissances
solides, pérennes,
utiles et
opératoires120 sur les
PMSV?
1 10 G 3 Oui Oui Oui
2 14 O 1 Oui/Non Oui/Non Oui/Non
3 14 O 2 Oui Oui Oui/Non
4 18 O 1 Oui Oui Oui
5 18 O 2 Oui Oui Oui
6 18 O 3 Oui/Non Oui/Non Oui/Non
7 22 O 1 Oui/Non Oui/Non Oui/Non
8 22 O 2 Oui Oui Oui
9 24 O 1 Oui Oui Oui
10 32 O 1 Oui Oui Oui
11 32 O 2 Oui Oui Oui
12 36 G 2 Oui Oui Oui
13 84 G 2 Oui Oui Oui
14 110 O 1 Oui Oui Oui
Voici un exemple de chacune des deux grandes catégories dégagées pour illustrer nos
observations, c’est-à-dire 1) Oui pour les trois sous-questions et 2) Oui/non pour les trois
sous-questions.
Exemple d’exercice favorisant l’instauration d’un raisonnement structuré contribuant à
la construction de connaissances métalinguistiques sur les PMSV
120 Relatif aux moyens et aux processus mis en œuvre pour atteindre un but.
199
Dans cet exemple, tiré des exercices consacrés à la leçon sur le PMSV lorsque le
sujet est le pronom indéfini on, la tâche de l’élève consiste à rédiger un récit avec une liste
de verbes imposée et la contrainte d’utiliser on et on n’. D’abord, nous pensons que l’exercice
favorise la réflexion sur le PMSV exercé et sur son fonctionnement dans la mesure où l’élève
sera amené à rechercher en mémoire toutes les marques adéquates d’accord selon les
caractéristiques et ainsi mobiliser autant ses connaissances préalables telles les règles pour
rédiger un récit, les règles pour établir correctement les mises en relations entre les sujets et
les verbes, les marques de genre et de nombre, la conjugaison des verbes et la concordance
des temps, etc. que la nouvelle connaissance que l’on veut qu’il exerce (l’emploi de on et de
on n’). Nous avons répondu oui pour SQ2, car la réalisation de l’exercice permettra à l’élève
de tenir un raisonnement qui soit à la fois cohérent et structuré. Par exemple, l’élève devra
examiner quand utiliser l’un des verbes de la liste imposée ou quand employer le pronom
exercé à l’affirmatif et au négatif, l’obligeant par conséquent à vérifier tous les cas
d’application de la règle. Enfin, cet exercice favorise la construction de connaissances
métalinguistiques pertinentes parce qu’en employant plusieurs fois on et on n’dans le récit
qu’il va rédiger, l’élève pourra appliquer de plus en plus aisément, dans ses futures
productions, toutes les règles relatives au PMSV lorsque le sujet est le pronom on à
l’affirmatif et au négatif.
Exemple d’exercice favorisant peu l’instauration d’un raisonnement structuré
contribuant à la construction de connaissances métalinguistiques sur les PMSV
L’exercice ci-dessous, extrait de la leçon Le sujet inversé qui a pour but d’entrainer
les élèves à manipuler les PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe, offre modérément
un travail cognitif pour l’élève. Bien que la consigne oblige l’élève à repérer les différents
sujets contenus dans les phrases proposées pour mettre les verbes entre parenthèses au présent
200
de l’indicatif, nous constatons que lesdits sujets présentent des caractéristiques qui
restreignent la sollicitation d’une réflexion plus approfondie. En effet, tous les verbes à
accorder, sauf un (se produire), seront à mettre en relation avec des sujets qui, soit sont des
sujets multiples où l’un est déjà au pluriel (le directeur et les surveillants), soit le sujet à
mettre en relation avec le verbe est déjà au pluriel (les groupes de promeneurs, les vacances,
ces sandales). Nous pensons que ces caractéristiques réduisent l’utilisation de la métalangue
chez l’élève puisqu’une simple observation des sujets lui permettra de mettre mécaniquement
les verbes à accorder à la troisième personne du pluriel. Cette situation suscitera par
conséquent un raisonnement cohérent et structuré peu rigoureux sur le PMSV exercé et
contribuera faiblement à développer des connaissances métalinguistiques solides, pérennes,
utiles et opératoires.
4.1.4.5 Le bilan de l’analyse
Au terme de l’analyse de cette 4e grille sur la métalangue dans le manuel La Nouvelle
Méthode de français 6e, diverses observations apparaissent.
L’examen de la conformité et de la justesse de la métalangue utilisée pour désigner
les éléments mis en jeu dans le cadre du présent projet, soit le verbe, le sujet et les PMSV,
dans les exercices sélectionnés avec celle instituée par le programme officiel gabonais ainsi
qu’avec les exigences de la recherche nous révèle que si le manuel reste conforme aux
désignations assignées au verbe et aux PMSV dans les programmes officiels gabonais et
globalement avec la recherche, la fonction syntaxique de sujet quant à elle reste quelque peu
problématique. Selon le manuel, un sujet composé de plusieurs mots aurait comme
dénomination groupe nominal sujet. Ce que les textes officiels gabonais ne semblent pas
affirmer puisque ces derniers rappellent, sous forme d’exemples, qu’on peut trouver des
fonctions syntaxiques de sujet sous forme de proposition subordonnée Qui vivra verra
(Ministère de l’Éducation Nationale, 1995). De même, plusieurs chercheurs (Grossmann,
1999; Chartrand, 2012b; Lord et Élalouf, 2016) remettent en cause la justesse d’une telle
formulation. Suggérer qu’un groupe de mots ayant la fonction syntaxique de sujet serait
systématiquement désigné sous l’appellation groupe nominal sujet pourrait entraver la
conceptualisation de cette notion chez les apprenants. En plus, affirmer que la notion de sujet
désigne un groupe est erronée puisque le terme groupe renvoie à une unité de la langue dont
le noyau appartient à une classe de mots tandis que celle de sujet désigne une fonction
201
syntaxique (Chartrand, 2012b). De plus, insinuer que tous les groupes de mots ayant la
fonction syntaxique de sujet seraient constitués d’un mot noyau dont la catégorie
grammaticale serait un nom ne saurait être exact, puisque l’on peut avoir des exemples de
type Marcher trente minutes chaque jour diminue le risque d’accident cardiovasculaire* où
le groupe de mots ayant la fonction syntaxique de sujet n’a pas pour mot noyau un nom, mais
plutôt un verbe (marcher). Enfin, selon le manuel, tout mot ayant la fonction syntaxique de
sujet serait désigné sous la même appellation. Or, dans certaines phrases des exercices, le
mot ayant la fonction syntaxique de sujet n’est ni un groupe ni un nom quoique la consigne
demande à l’élève de souligner les sujets dans les phrases « Souligne le GN sujet… : Tu
n’oublieras pas ton cahier de maths!» (Nathan, 1997 :10). Une autre formulation, sujet des
verbes/sujet de ces verbes, fréquemment employée dans le manuel, est jugée inexacte par
certains chercheurs en particulier parce qu’elle laisserait entendre que la fonction syntaxique
de sujet appartiendrait au verbe. Or, ces deux éléments entretiendraient non pas une relation
de dépendance, mais une relation d’interdépendance (Chartrand, 2012b).
L’analyse des exercices sélectionnés en ce qui concerne leur capacité à favoriser une
acquisition efficiente de la métalangue sur les PMSV nous a permis également de noter
quelques observations. En nous appuyant sur nos observables métalinguistiques121, les
résultats montrent que sur les quatorze exercices sur les PMSV sélectionnés, 43 % d’entre
eux contre 57 % pourraient obliger les élèves à recourir à la métalangue pour réaliser
l’exercice, 79 % des exercices contre 21 % pourraient nécessiter le recours à des
manipulations syntaxiques et 64 % des exercices sur les PMSV contre 36 % pourraient
permettre à l’élève d’exprimer un jugement de grammaticalité.
Enfin, notre examen sur la métalangue a porté sur la capacité des exercices à favoriser
l’instauration d’une activité métalinguistique chez les élèves ou, dit autrement, une activité
de réflexion sur les PMSV et leur fonctionnement. Les résultats ont montré que sur les
quatorze exercices sur les phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe
sélectionnés, la majorité d’entre eux, soit 71 % contre 29 %, offrait aux élèves la mise en
place d’un raisonnement structuré contribuant à une construction de connaissances
métalinguistiques pertinente pour l’élève.
121 La métalangue que pourrait utiliser l’élève pour désigner le PMSV, les manipulations syntaxiques que pourrait entrainer
l’exécution de l’exercice et les jugements de grammaticalité que pourraient exprimer les élèves en exécutant l’exercice.
202
4.2 L’analyse des exercices sur les PMSV dans Le Français en 6e
Présentation du manuel
Le manuel Le Français en 6e : lecture, grammaire, orthographe, conjugaison,
vocabulaire, expression écrite des Éditions EDICEF, publié en 2001, comprend 151 pages
et est destiné aux apprenants de 1re année du secondaire. Il est constitué de 10 dossiers
thématiques dont le but est d’assurer l’articulation entre la lecture, l’étude de la langue et
l’expression écrite. Chaque dossier constitue une séquence pédagogique et comprend quatre
volets : un volet Testez votre compréhension lié à un autre volet Pour approfondir, un volet
sur l’étude de la langue et un volet consacré aux exercices de révision intitulé Entrainez-
vous!
Le volet Testez votre compréhension est composé de textes accompagnés de
questions. Il vise à vérifier la lecture que les élèves ont faite des textes à travers un relevé
d’un certain nombre d’indices. Le volet suivant, Pour approfondir, s’appuie sur ces indices
pour amener les élèves à élaborer des synthèses.
Le volet sur l’étude de langue comprend deux leçons de grammaire, deux leçons
d’expression écrite et en alternance des leçons d’orthographe, de conjugaison et de
vocabulaire. Le manuel privilégie l’étude des faits de langue à partir de textes courts. En
expression écrite, l’accent est mis sur l’apprentissage des techniques qui demandent des
savoir-faire variés. Chacune des leçons des éléments constitutifs de l’étude de langue se
décomposent en trois rubriques : une rubrique proposant des exercices et des questions pour
l’observation et l’analyse que le manuel désigne sous le terme Observez, analysez, une
rubrique présentant un résumé des points importants de la leçon et une rubrique proposant
des exercices d’exploitation et de réemploi regroupés sous l’appellation Exploitez,
réemployez.
Sélection des exercices
La sélection des exercices sur les PMSV sur la base des critères retenus (cf.3.2.3)
nous a permis de répertorier 15 exercices122.
122 Les exercices sélectionnés se trouvent dans quatre divisions du manuel : 1) « Observez, analysez » que nous avons
abrégé en « OA », 2) « Exploitez, réemployez » en abrégé « OE », 3) « Savoirs croisés » abrégé en « SC » et dans des
pages d’exercices de révision intitulées « Entrainez-vous! ».
203
Connaissances sur les PMSV abordées dans Le Français en 6e
Sur les 21 PMSV répertoriées dans le cadre conceptuel (cf. tableau 2.1.3), nous avons
observé que le manuel exerce à 14 d’entre eux. Le tableau ci-dessous (tableau 33) indique
les PMSV présents dans les exercices sélectionnés.
Tableau 33 : PMSV dans le manuel Le Français en 6e
1. Le PMSV de façon générale.
2. Le PMSV lorsque le verbe est conjugué à un temps composé au passif ou à l’actif.
3. Le PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe.
4. Le PMSV lorsqu’un pronom est placé entre le sujet et le verbe.
5. Le PMSV lorsque le verbe a pour sujet un nom ou plusieurs noms et un pronom ou
deux pronoms de personnes différentes.
6. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom relatif qui.
7. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom personnel on.
8. Le PMSV lorsque le verbe a deux sujets unis par les conjonctions de coordination
et, ou.
9. Le PMSV lorsque le sujet est un nom collectif ou une expression collective
accompagnés d’un complément du nom au pluriel.
10. Le PMSV lorsque le sujet est un adverbe de quantité
11. Le PMSV lorsque le sujet est un pronom indéfini exprimant la totalité d’une
manière distributive (exemple : chacun) accompagné d’un complément du nom.
12. Le PMSV lorsque le sujet est sous-entendu
13. Le PMSV lorsque le sujet est un pronom démonstratif (exemples : cela, ce, ceci).
14. Le PMSV lorsque le sujet est le pronom indéfini tout
Bien évidemment, nous rappelons qu’il revient à l’enseignant d’insister sur un PMSV
en particulier en fonction des difficultés de ses élèves. En effet, quoique certains PMSV
exercées dans le manuel ne soient pas mentionnés parmi les 21 sur les PMSV présentés à
titre indicatif dans le cadre conceptuel (voir tableau 2.1.3), comme c’est le cas du PMSV
lorsque le sujet est le pronom démonstratif cela, ce, ceci, ils peuvent être enseignés par les
enseignants et donc exercés au cours de la phase d’évaluation formative.
En outre, plusieurs de ces PMSV ne se trouvent pas exclusivement dans des exercices
consacrés à l’appropriation de connaissances sur les PMSV. Autrement dit, certains exercices
nécessitent que soient appliqués des PMSV bien que la leçon porte sur une autre notion. C’est
le cas par exemple des exercices portant sur les leçons « La phrase et ses constituants » et
« La voix passive » comme nous le verrons ultérieurement.
204
4.2.1 Analyse sur les typologies d’exercices
Rappelons que la 1re grille d’analyse est subdivisée en quatre sous-grilles. Elle étudie
les exercices proposés par le manuel selon la typologie d’exercices élaborée. Elle vise à
répondre aux questions suivantes :
1. Quelle catégorie d’exercices propose le manuel?
2. À quelle catégorie appartient l’exercice proposé?
3. À quelle forme appartient l’exercice proposé?
4. À quel type appartient l’exercice proposé?
5. Les exercices proposés permettent-ils de susciter des réflexions métalinguistiques
chez les apprenants?
4.2.1.1 L’analyse sur les catégories d’exercices proposés dans le manuel
Comme le montre le tableau 34, dans le manuel Le Français en 6e, nous avons observé
que sur les 15 exercices répertoriés, tous sont de type analytique/intellectuel/réflexif.
Tableau 34 : Catégories d'exercices sur les PMSV dans le manuel
P R Div/ No Titre de la leçon Catégorie de l’exercice 1 10 Orthographe OA L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
2 10 Orthographe ER L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
3 14 Grammaire ER-1 La phrase et ses constituants Analytique/ intellectuel/ réflexif
4 14 Grammaire ER-2 La phrase et ses constituants Analytique/ intellectuel/ réflexif
5 16 Grammaire 4 La phrase et ses constituants Analytique/ intellectuel/ réflexif
6 17 Orthographe 12 L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
7 17 Orthographe 13 L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
8 17 Orthographe 14 L’accord du verbe avec son sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
9 34 Grammaire OA-a Le sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
10 34 Grammaire OA-b Le sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
11 44 Grammaire 2 Le sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
12 45 Grammaire SC-22 Le sujet Analytique/ intellectuel/ réflexif
13 94 Conjugaison OA-a La voix passive Analytique/ intellectuel/ réflexif
14 94 Conjugaison OA-b La voix passive Analytique/ intellectuel/ réflexif
15 94 Conjugaison ER La voix passive Analytique/ intellectuel/ réflexif
Au regard du niveau d’enseignement de la classe, il aurait été également pertinent que
le manuel tienne compte du fait que le niveau d’appropriation des connaissances sur les
PMSV présente des avantages à suivre une certaine progression. Les apprenants sont
directement soumis à un niveau de complexité tel qu’ils se trouvent immédiatement soumis
à une assimilation raisonnée et réflexive des connaissances sur les PMSV. Pourtant, la
recherche a démontré que les exercices de type intuitif/automatique/ réflexe restent des
205
auxiliaires de l’enseignement de la langue en ce qu’ils permettent de faire acquérir la maitrise
d’une structure morphosyntaxique par le développement d’automatismes en plus d’être
économiques en métalangage (Galisson et al., 1976;Cuq, 1996). En outre, en plus de
permettre aux apprenants d’acquérir une certaine spontanéité dans l’emploi des formes
morphosyntaxiques, facilitant ainsi le passage à l’expression libre (Avram, 2006) et d’offrir
une souplesse qui permette de les utiliser à tous les niveaux, les exercices de cette catégorie
pourraient être non seulement une source d’apprentissage par l’exposition répétée à une
structure, mais pourraient également participer à la détection d’erreurs d’accord (Nadeau et
Fisher, 2011).
Pour montrer en quoi les exercices sélectionnés du manuel Le Français en 6e
s’insèrent dans la catégorie des exercices de type analytique/intellectuel/réflexif, deux
exemples d’exercices servent d’illustration. Rappelons que chaque exemple présente
l’exercice et une analyse de l’exercice.
Exemple 1 d’exercice de type analytique/intellectuel/réflexif
Exercice 14 : rubrique orthographe, division OA « L'accord du verbe avec son sujet », p.10
L’exercice porte sur l’appropriation des connaissances sur la leçon L’accord du verbe
avec son sujet. Nous l’avons classé comme exercice de type analytique/intellectuel/réflexif
dans la mesure où il offre à l’élève la possibilité de développer divers raisonnements. Comme
on peut le voir, la consigne demande à l’élève de justifier le choix de la terminaison des
206
verbes qu’il devra inscrire en indiquant de façon précise l’élément qui, dans la phrase, a la
fonction syntaxique de sujet. Pour y parvenir, il devra repérer les mots ou groupes de mots
ayant la fonction syntaxique de sujet en faisant appel à ses connaissances, notamment celles
reliées aux moyens de reconnaitre un sujet dans une phrase. En plus, l’inscription des
marques d’accord appropriées s’appuie sur la maitrise de connaissances sur des PMSV qui
nécessitent une induction particulière. Par exemple, dans l’item Le tas de fèves avai…la
forme d’une pyramide à base énorme…, l’élève devra mobiliser des habiletés intellectuelles
puisqu’il devra être attentif au fait que le groupe de mots ayant la fonction syntaxique de
sujet « le tas de fèves » est constitué d’un nom collectif précédé d’un déterminant défini et
d’un complément du nom au pluriel. Le travail cognitif pourrait consister à observer que
selon que le nom collectif est précédé d’un déterminant défini ou indéfini, la mise en relation
entre le sujet et le verbe diffère. Enfin, l’apprenant devra également être vigilant sur divers
points de conjugaison pour inscrire les marques d’accord adéquates entre le sujet et le verbe
comme les terminaisons des verbes selon le temps (imparfait/passé simple), la personne (3e
personne du singulier ou 3e personne du pluriel), le groupe. En somme, nous estimons que la
réalisation de cet exercice pourrait conduire au déclenchement de divers processus cognitifs
qui favoriseront une appropriation consciente des règles sur les PMSV chez l’élève.
Exemple 2 d’exercice de type analytique, intellectuel ou réflexif
Exercice 15 : rubrique orthographe, division ER, « L'accord du verbe avec son sujet », p.10
De même que l’exemple précédent, nous avons classé l’exercice ci-dessus comme un
exercice de type analytique/intellectuel/réflexif. En effet, nous observons qu’outre le fait de
207
mettre les verbes au temps indiqué par la consigne, l’exercice offre une variété de cas sur les
PMSV, ce qui favorise une certaine réflexion de l’élève pour le réaliser. Chacune des six
phrases proposées invite l’élève à faire appel à différentes connaissances sur les PMSV.
L’élève devra faire appel aux connaissances sur 1) le PMSV lorsque le verbe a pour sujet un
nom et un pronom personnel à la 1re personne du singulier Pierre et moi (refuser)… , 2) le
PMSV en règle générale Les inondations (détruire)… , 3) le PMSV lorsque le sujet est placé
après le verbe De l’horizon (arriver) de gros nuages , 4) le PMSV lorsque le sujet est un nom
collectif au singulier précédé d’un déterminant indéfini et accompagné d’un complément du
nom au pluriel Un amas de livres… (encombrer)…, 5) le PMSV lorsque le verbe a des sujets
unis par une conjonction de coordination Un amas de livre et de journaux (encombrer)…,
6) le PMSV lorsque le sujet est un pronom exprimant la totalité d’une manière distributive
accompagné d’un complément du nom au pluriel Chacun de nous (vouloir)… et 7) le PMSV
lorsque le sujet est un pronom La plupart (espérer)… . La réalisation de la mise en relation
entre le sujet et le verbe devra nécessiter de l’élève de faire appel à diverses habiletés
intellectuelles. Par exemple, l’item Chacun de nous (vouloir)… nécessite de l’élève qu’il
puisse repérer l’élément de la phrase ayant la fonction syntaxique de sujet, la catégorie
grammaticale des mots qui le constituent, qu’il fasse appel à ses connaissances sur le PMSV
impliqué pour pouvoir inscrire correctement le verbe au présent de l’indicatif.
4.2.1.2 L’analyse des formes des exercices
Le point précédent a montré que tous les 15 exercices sélectionnés sont de type
analytique/intellectuel/réflexif. Pour rappel, cette catégorie d’exercices intègre deux formes
d’exercices : les exercices développant partiellement l’appropriation des PMSV et ceux
favorisant un raisonnement complet sur les PSMV : les premiers regroupent les exercices
dans lesquels les connaissances morphosyntaxiques sont restreintes ou facilitées par divers
moyens et les seconds regroupent les exercices sur les PMSV qui favorisent un raisonnement
semblable à ce que les élèves produisent dans la rédaction de leurs propres textes.
Ce point examine les exercices contenus dans le manuel selon ces deux formes.
Comme le pointe le tableau (tableau 35), sur les 15 exercices sélectionnés, six développent
partiellement l’appropriation des PMSV, huit exercices favorisent un raisonnement complet
sur le PMSV exercé et un exercice associe les deux formes.
208
Tableau 35: Résultats des formes des exercices dans Le Français en 6e
Forme de l’exercice P R Division/No Titre de la leçon
Exercices
développant
partiellement
l’appropriation du
PMSV
1 10 O OA L’accord du verbe avec son sujet
2 10 O ER L’accord du verbe avec son sujet
3 17 O 13 L’accord du verbe avec son sujet
4 17 O 14 L’accord du verbe avec son sujet
5 34 G OA-a Le sujet
6 94 C OA-a La voix passive
Exercices favorisant
un raisonnement
complet sur le PMSV
1 14 G ER-1 La phrase et ses constituants
2 14 G ER-2 La phrase et ses constituants
3 16 G 4 La phrase et ses constituants
4 17 O 12 L’accord du verbe avec son sujet
5 44 G 2 Le sujet
6 45 SC 22 Le sujet
7 94 C OA-b La voix passive
8 94 C ER La voix passive
Exercice combinant
les deux formes
1 34 G OA-b Le sujet
Les trois exemples qui suivent montrent que ces exercices peuvent être considérés
comme des exercices développant partiellement l’appropriation des PMSV et comme des
exercices favorisant un raisonnement complet sur le PMSV.
Exemple d’exercice développant partiellement l’appropriation des PMSV
Exercice 16 : rubrique orthographe, No 13, « L'accord du verbe avec son sujet », p. 17
209
L’exercice choisi est un exercice bilan qui apparait après que le manuel ait présenté
la leçon L’accord du verbe avec son sujet (EDICEF, 2001: 10). Il est demandé à l’élève
d’inscrire les terminaisons des verbes et de justifier cette terminaison en indiquant l’élément
ayant la fonction syntaxique de sujet avec lequel le verbe est mis en relation. Comme on peut
le voir dans l’apport, l’élève est amené à établir plusieurs connaissances sur les relations
morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe. Par exemple, l’item Entouré de ses pagnes et
des griots qui chantai…ses louanges, Kabrin Kabra sorti…de son palais. porte sur le PMSV
lorsque le sujet est le pronom relatif qui et sur le PMSV en règle générale qui indique que le
verbe reçoit les traits morphosyntaxiques du sujet avec lequel il est en relation. On peut
également voir que dans les items 1) Le coba, malgré les efforts des guerriers, rompi… (…),
2) la grande voix du coba dominai…le tumulte et 3) paralysai… la foule », sont exercés 1)
le PMSV lorsque le verbe est éloigné du sujet avec lequel il en relation dans la phrase, 2) le
PMSV en règle générale et 3) le PMSV lorsque le sujet est sous-entendu.
Néanmoins, si l’exercice permet à l’élève d’activer les règles concernant les PMSV
exercés puisqu’il devra repérer les éléments de la phrase ayant la fonction syntaxique de sujet
et déterminer les marques appropriées à porter au verbe, il fait partiellement appel à des
opérations mentales dans la mesure où les connaissances sollicitées sont facilitées par le fait
que les verbes à accorder sont déjà repérés pour l’élève. Non seulement ces derniers sont mis
en italique, mais en plus il est aisé pour l’élève de les repérer puisque les points de suspension
à la fin des verbes montrent que ce sont eux qui doivent faire l’objet de la manipulation. Dès
lors, l’élève n’est pas entrainé à rechercher en mémoire ses connaissances sur les PMSV.
Exemple d’exercice favorisant un raisonnement complet sur le PMSV
Exercice 17 : rubrique orthographe, No 12, « L'accord du verbe avec son sujet », p.17.
210
L’exercice ci-dessus porte sur l’appropriation du PMSV lorsque le sujet est placé
après le verbe. Dans le manuel, il apparait comme exercice bilan après la leçon L’accord du
verbe avec son sujet (EDICEF, 2001: 10). La consigne demande à l’apprenant de repérer tous
les cas d’inversion du sujet présents dans l’extrait de texte proposé. Ce dernier est constitué
de trois longues phrases. Dans la 1re phrase, on observe la présence d’un sujet inversé (ou
postposé) éloigné du verbe avec lequel il est en relation : Il y a longtemps, très longtemps,
vivait dans cette contrée florissante un peuple heureux et prospère. La 2e phrase comporte
un cas d’inversion où le sujet est immédiatement placé après le verbe avec lequel il est en
relation : Guerriers, chasseurs, et cultivateurs, pour tous, la vie s’écoulait douce et paisible
quand arriva l’avènement de Kabrin Kabra. . La 3e phrase ne comporte aucun cas
d’inversion de sujet.
L’exercice favorise un raisonnement complet sur le PMSV exercé pour plusieurs
raisons. D’abord, parce que son apport ne se présente pas sous forme de phrases
décontextualisées, mais sous la forme d’un extrait de texte, ce qui oblige l’élève à vérifier
tous les cas d’application des PMSV présents dans le texte (Nadeau et Fisher, 2006). De plus,
toutes les phrases ne comportent pas des cas d’inversion du sujet, ce qui se rapproche encore
plus de la situation dans laquelle se trouvent les élèves lorsqu’ils rédigent leurs propres écrits.
Enfin, nous estimons que l’exercice favorise un raisonnement complet dans la mesure où rien
n’est identifié d’avance pour l’élève qui devra à la fois rechercher en mémoire la marque
adéquate selon les caractéristiques et ainsi mobiliser autant toutes ses connaissances sur le
PMSV que le PMSV que l’exercice veut faire appliquer.
Mentionnons néanmoins que l’exercice aurait pu faire preuve d’une plus grande
rigueur si la consigne avait demandé aux élèves des traces d’analyse comme preuve que la
réflexion a bien été menée. En outre, le fait de n’exercer qu’une seule difficulté à la fois ne
permet pas aux élèves de solliciter plusieurs connaissances à la fois ni de leur offrir la capacité
à discriminer des configurations comme dans les situations d’écriture où les difficultés
potentielles sont diversifiées (Nadeau et Fisher, 2011). Dans notre exemple, le fait de
demander aux élèves de ne relever que les sujets inversés n’aide pas les élèves à percevoir la
langue comme un système, comme si le PMSV exercé ici est un cas réputé comme difficile
ou comme s’il s’agissait d’une nouvelle règle sur les PMSV.
L’exercice ci-dessus est un exercice proposé dans le manuel dans le but de faire
acquérir aux apprenants l’appropriation des connaissances sur la fonction syntaxique de sujet.
Nous estimons que les deux formes retenues pour repérer les exercices appartenant à la
catégorie des exercices de type analytique/intellectuel/réflexif s’y retrouvent pour deux
raisons principales.
D’une part, nous considérons que l’exercice développe partiellement l’appropriation
des connaissances sur la fonction syntaxique de sujet dans la mesure où les connaissances
morphosyntaxiques convoquées sont facilitées par un moyen en particulier. En fait,
l’exercice présente l’inconvénient d’être situé sur la même page que la règle impliquée dans
ce dernier (cf. règle 3). Sachant que ce moyen ne peut être présent en situation d’écriture, une
telle facilitation n’entraine pas l’élève à rechercher en mémoire ses connaissances sur le
PMSV impliqué. Sa mémoire est par conséquent insuffisamment sollicitée. En outre, si l’on
examine cette règle et les exemples proposés pour l’illustrer, on constate que l’exercice
contient dans son apport des exemples similaires à ceux proposés dans la règle. Par exemple,
il est indiqué dans la règle que l’élément ayant la fonction syntaxique sujet peut être un
groupe nominal. L’exemple qui suit propose un groupe nominal constitué d’un déterminant
défini au pluriel suivi d’un nom commun au pluriel Les élèves écoutent. Dans l’exercice,
plusieurs sujets présentent une configuration quasi identique à celle de l’exemple de la règle,
à la seule différence que le déterminant défini est soit au singulier, soit au pluriel (le repas
212
de midi, les hommes, la pesanteur). De même, la règle annonce que le sujet peut être un
infinitif. Ce dernier est illustré par un verbe du 1er groupe à l’infinitif Fumer nuit à la santé.
Dans l’exercice, le mot occupant la fonction de syntaxique de sujet et ayant pour catégorie
grammaticale un infinitif est également un verbe du 1er groupe Protéger la flore est devenu
l’objectif prioritaire du gouvernement. Néanmoins, l’exercice présente une certaine
pertinence puisqu’il propose des sujets ayant pour catégorie grammaticale des pronoms
différents de l’exemple proposé dans la règle. En effet, si l’exemple de la règle propose un
sujet ayant pour catégorie grammaticale un pronom personnel (Elle arrive), le contenu de
l’exercice propose des sujets ayant des pronoms différents (C’est pourquoi… , Cela signifie
que…).
Hormis cet aspect facilitant, l’exercice pourrait d’autre part être considéré comme un
exercice favorisant un raisonnement complet sur les PMSV. Si l’on s’en tient à l’exercice
sans considérer le fait que la règle (cf. règle 3) se trouve sur la même page que ce dernier, on
observe qu’il présente des caractéristiques d’un exercice exigeant de l’élève un raisonnement
semblable à celui qu’il devra mettre en œuvre dans la rédaction/ révision/correction de ses
propres écrits. Comme le mentionne la consigne, il est demandé à l’élève de repérer tous les
sujets présents dans les phrases proposées. L’exercice permet de faire appel à un
raisonnement complet puisqu’aucun des éléments en jeu (la fonction syntaxique de sujet et
le verbe) n’est identifié pour l’élève qui doit les rechercher dans des phrases complètes pour
ensuite mettre en relation le donneur et le receveur et rechercher en mémoire la marque
adéquate selon les caractéristiques. Ces moyens, selon plusieurs didacticiens permettent de
développer une réelle compétence à l’écrit (Chartrand, 1996; Cogis, 2005; Nadeau et Fisher,
2006).
4.2.1.3 L’analyse des exercices selon leur type sur le plan morphosyntaxique
Après avoir analysé les exercices sur les PSMV selon leurs formes, il s’agit
maintenant de déterminer les types des exercices sur les PMSV contenus dans le manuel. Le
tableau qui suit (tableau 36) indique les types d’exercices sur les PMSV repérés dans le
manuel Le Français en 6e.
213
Tableau 36: Types des exercices dans Le Français en 6e
P R Div/N0 Règle abordée Type de l’exercice
1 10 O OA L’accord du verbe avec son sujet Exercice à trous
2 10 O ER L’accord du verbe avec son sujet Exercice à trous
3 14 G ER-1 La phrase et ses constituants Exercice de repérage
4 14 G ER-2 La phrase et ses constituants Exercice de repérage
5 16 G 4 La phrase et ses constituants Exercice de repérage
6 17 O 12 L’accord du verbe avec son sujet Exercice de repérage
7 17 O 13 L’accord du verbe avec son sujet Exercice à trous+ exercice de repérage
8 17 O 14 L’accord du verbe avec son sujet Exercice à trous+ exercice de repérage
9 34 G OA-a Le sujet Exercice de repérage
10 34 G OA-b Le sujet Exercice de repérage
11 44 G 2 Le sujet Exercice de repérage
12 45 SC SC-22 Le sujet Exercice de repérage
13 94 C OA-a La voix passive Exercice de transformation
14 94 C OA-b La voix passive Exercice de transformation
15 94 C ER La voix passive Exercice de transformation
Le tableau 36 indique que sur les quinze exercices sur les PMSV sélectionnés, nous
avons répertorié deux exercices à trous, huit exercices de repérage, trois exercices de
transformation de texte et deux exercices combinant à la fois un exercice à trous et un
exercice de repérage. Afin d’illustrer nos constats, un exemple pour chacun des types
répertoriés est analysé dans les lignes qui suivent.
Exemple d’exercice à trous
Pour rappel, l’exercice à trous ou exercice lacunaire est un exercice dans lequel il est
demandé de compléter un énoncé ou des mots où il manque des éléments pour permettre aux
214
élèves de se familiariser avec la morphologie (Gobbe, 1978; Beacco, 2010). L’exemple
d’exercice à trous exposé ci-dessus présente la particularité d’offrir à l’élève une variété de
cas possibles sur la mise en relation entre la fonction syntaxique de sujet et le verbe123. Il
permet à l’élève non seulement de se familiariser avec le PMSV exercé, mais aussi de
reconnaitre au préalable le ou les élément (s) de la phrase ayant la fonction syntaxique de
sujet dans la phrase pour pouvoir inscrire les marques appropriées à porter au verbe qui
recevra les traits morphosyntaxiques du/des sujet (s) avec lequel (s) ce (s) dernier (s)
sera/seront mis en relation. Toutefois, il épargne à ce dernier le travail consistant à repérer
quel mot est à accorder. En effet, dans les phrases proposées, les verbes sont déjà repérés
pour l’élève puisqu’ils sont mis entre parenthèses (Un amas de livres et de journaux
(encombrer) la salle. - Chacun de nous (vouloir) réussir. , etc.)
Exemple d’exercice de repérage
Rappelons que l’exercice de repérage consiste en une activité d’identification ou de
reconnaissance dans un texte ou dans des phrases d’une catégorie grammaticale ou d’une
fonction morphosyntaxique qu’il est pertinent de proposer immédiatement après une activité
d’apprentissage (Nadeau et Fisher, 2006; Bouguerra, 2013).
Exercice 19 : rubrique grammaire, division ER, No 1, « La phrase et ses constituants », p.14
123 Le PMSV lorsque le verbe a pour sujet un nom et un pronom personnel à la 1re personne du singulier « Pierre et moi (refuser)… », le
PMSV en règle générale « Les inondations (détruire)… », le PMSV lorsque le sujet est placé après le verbe « De l’horizon (arriver) de
gros nuages », le PMSV lorsque le sujet est un nom collectif au singulier précédé d’un déterminant indéfini et accompagné d’un complément du nom au pluriel « Un amas de livres… (encombrer)… », le PMSV lorsque le verbe a des sujets unis par une conjonction de
coordination « Un amas de livre et de journaux (encombrer)… », le PMSV lorsque le sujet est un pronom exprimant la totalité d'une
manière distributive accompagné d’un complément du nom au pluriel « Chacun de nous (vouloir)… » et le PMSV lorsque le sujet est un pronom « La plupart (espérer)… ».
215
Dans l’exercice ci-dessus, la consigne demande à l’élève, après avoir recopié les
phrases proposées, de souligner les mots qui ont la fonction syntaxique de sujet et les groupes
verbaux124, en l’occurrence le verbe. Une des particularités de l’exercice réside dans le fait
que les sujets à souligner devront vraisemblablement être constitués de plusieurs mots
puisque la consigne indique explicitement de souligner les groupes sujets125, donc les sujets
composés de plusieurs mots et les groupes verbaux (verbes accompagnés de compléments
dits essentiels126). Dans le contenu de l’exercice, on peut observer que certains éléments ayant
la fonction syntaxique de sujet contenus dans les phrases proposées ne sont pas constitués de
plusieurs mots. On y trouve des sujets composés d’un seul mot Marie127 a acheté… (sujet
dont la catégorie grammaticale est un nom propre) et (…) elle organise… (sujet dont la
catégorie grammaticale est un pronom personnel). Ces particularités offrent à l’élève de
mettre en œuvre des habiletés intellectuelles puisqu’il devra, selon toute logique, faire
attention à ne pas les souligner. De même, toutes les phrases proposées ne comportent pas de
groupes verbaux, du moins tel que défini par le manuel. En effet, ce dernier définit le groupe
verbal comme « un groupe constitué des mots qui en dépendent » (EDICEF, 2001b :147).
Par exemple, dans la phrase Les murs de la maison seront repeints en blanc, en blanc étant
un complément facultatif, précisément un complément circonstanciel de manière, il n’y a
donc pas de groupe verbal, mais un verbe conjugué au futur simple passif. De même, dans
la phrase L’équipe de football de notre quartier a été battue, n’y a pas de groupe verbal mais
un verbe conjugué au passé composé passif.
124 Nous avons sélectionné les exercices mentionnant l’expression « groupe verbal » volontairement. En fait, bien que les
exercices sélectionnés ici visent à faire acquérir aux apprenants les connaissances sur les constituants de la phrase, il nous
a paru pertinent de les sélectionner dans la mesure où ils permettent également d’établir les relations entre le sujet et le
verbe. 125 Cette dénomination est analysée dans la section portant sur la métalangue. 126 Dans le système éducatif gabonais, on distingue les compléments essentiels que sont essentiellement le complément
d’objet direct, le complément d’objet indirect, le complément d’objet second et le complément d’agent. Ces derniers se
distinguent des compléments non essentiels, c’est-à-dire que l’on peut supprimer sans qu’ils ne nuisent à la compréhension
de la phrase. Ce sont généralement des compléments circonstanciels. Signalons toutefois que certains compléments
circonstanciels sont essentiels dans une phrase et ne peuvent être supprimés. Par exemple, dans la phrase « Je vais à
l’école. », on ne peut ni supprimer ni déplacer le complément circonstanciel de lieu « à l’école » sans que cela ne nuise à la
compréhension de la phrase. Précisions enfin que la notion complément circonstanciel a été retirée du corps notionnel du
courant didactique de la grammaire rénovée étant donné cette « incohérence » liée au caractère tantôt facultatif, tantôt
essentiel. C’est le complément de phrase qui, lui, est facultatif, qu’on utilise maintenant en grammaire rénovée. 127 Mentionnons que dans la description de la langue effectuée dans la grammaire rénovée, un groupe de mots peut être
constitué d’un seul mot. Toutefois, dans le système éducatif gabonais, l’expression groupe de mots est entendue comme un
ensemble constitué de plus d’un mot.
216
Exercice de transformation
L’exercice de transformation se distingue des exercices structuraux de
transformation. Dans les exercices structuraux de transformation, le principe consiste
généralement à procéder à des transformations (qui peuvent être multiples) de façon
identique dans une série de phrases ayant la même structure. Dans le cas que nous avons
présentement, l’exercice consiste à repérer, parmi les mots des phrases, ceux qui seront
affectés à la transformation. Ce type d’exercice favorise la capacité à « mobiliser et à
reconnaitre des formes de langue ou des structures » (Nadeau et Fisher, 2006: 127).
Exercice 20 : rubrique conjugaison, division ER, « La voix passive », p.94
Dans l’exercice ci-dessus qui porte sur l’appropriation des connaissances sur la voix
passive, l’élève, en passant de la voix active à la voix passive, devra veiller à reconnaitre tous
les mots qui vont être transformés. Par exemple, dans la phrase Les touristes envahirent le
marché artisanal, le passage du groupe nominal au masculin singulier le marché artisanal de
COD dans la phrase à la voix active à sujet dans la phrase à la voix passive et le passage du
GN au masculin pluriel les touristes de sujet dans la phrase à la voix active à complément
d’agent dans la phrase à la voix passive obligent l’élève à procéder à plusieurs
transformations : le passage du verbe au passé simple envahirent dans la phrase à la voix
active au passé antérieur dans la phrase à la voix passive fut envahi* et le nombre du sujet
va passer du pluriel au singulier les touristes vs le marché artisanal*.
217
Exercice associant deux types d’exercices
Exercice 21 : rubrique orthographe, No14, « L'accord du verbe avec son sujet », p.17
Dans notre exemple proposé par le manuel pour la leçon L’accord du verbe avec son
sujet, il nous a semblé que deux types d’exercices sont combinés. L’exercice associe à la fois
un exercice de repérage (Repère bien le sujet de chaque verbe!) et un exercice à trous (Les
verbes sont notés en phonétique). Selon Verdelhan-Bourgade (1982), l’exercice à trous est
présent dans l’enseignement du français sous différentes formes, que ce soit dans les
pratiques orales128 aussi bien que dans les exercices consacrés à l’enseignement de
l’orthographe, du vocabulaire ou de la grammaire. L’extrait ci-dessous vise à justifier
pourquoi nous estimons que nous sommes bien en présence d’une forme d’exercice à trous.
Le fait que la consigne indique que les verbes à orthographier sont les mots écrits en
phonétique dans le texte correspond à la description des exercices à trou, puisque « ce qui est
noté phonétiquement est à transcoder comme tout ce qui est dicté » (Verdelhan-Bourgade,
1982 :36).
128 Les pratiques orales peuvent se présenter sous différentes formes : 1) technique de l’enseignant consistant, par
l’intonation ou le geste, à demander aux élèves de compléter ses phrases d’un mot ou d’une expression, lors des explications
de textes. 2) Lorsque l’enseignant, par une question bien formulée ou une phrase en suspens, obtient le terme qui lui
permettra d’enchainer sur la remarque suivante, 3) Dans certaines activités des manuels, lorsqu’on demande aux élèves le
récit oral puis écrit des actions présentées sous forme d’images ou de dessins, etc. (Verdelhan-Bourgade, 1982).
218
Verdelhan-Bourgade, 1982 : 36
4.2.1.4 L’analyse des configurations d’exercices suscitant des réflexions
métalinguistiques
Rappelons qu’il s’agit d’analyser les exercices dont le profil pourrait contribuer à
susciter chez les apprenants des réflexions métalinguistiques, c’est-à-dire les amener à
apporter des explications sur les choix effectués. En nous appuyant sur la sous-grille élaborée
à cet effet dans les orientations méthodologiques (cf. 3.3.2.4), nous avons observé que les
quinze exercices sélectionnés n’offrent pas la possibilité aux apprenants de faire émerger des
représentations métalinguistiques.
En fait, les consignes des quinze exercices proposent des manipulations qui entravent
l’expression de verbalisations des représentations des élèves. Soit les exercices demandent
de repérer un élément dans une phrase ou un texte (exemples : les exercices 14, 17 ou 21), de
transformer des phrases (exemples : les exercices 20 ou 28), de transcrire des mots (exemple :
l’exercice 21) ou de compléter des mots (exemples : les exercices 14 ou 16) dont certains
sont presque intégralement déjà écrits comme c’est le cas de l’exercice 14 (Il aperçu…/ le
tas de fève avai…/ il éprouvai…).
219
4.2.1.5 Le bilan de l’analyse
Le manuel Le Français en 6e présente des exercices sur les PMSV exclusivement de
type analytique/réflexif/intellectuel sur les PMSV. Cette absence de croissance dans le niveau
de difficulté des exercices sur les PMSV pourrait entraver une appropriation durable des
connaissances sur les PMSV puisque les élèves sont immédiatement soumis à une réflexion
complexe et élevée. En ne proposant que des exercices faisant appel à des processus cognitifs
complexes, le manuel pourrait réduire les possibilités d’établir une transition valable entre la
phase d’apprentissage et celle du transfert en production de texte chez les élèves. Autrement
dit, si le degré d’expertise exigé est dès le départ assez élevée, les élèves pourraient non
seulement ne pas acquérir suffisamment de connaissances sur les PMSV, mais aussi
accumuler des lacunes importantes d’un ordre d’enseignement à un autre en plus d’avoir des
difficultés à appliquer leurs connaissances sur les PMSV dans les situations d’écriture de
leurs propres textes.
L’analyse des formes d’exercices montre que sur les 15 exercices, six exercices, soit
40 %, pourraient participer au développement partiel de l’appropriation des PMSV, car les
connaissances morphosyntaxiques sollicitées sont restreintes ou facilitées par divers moyens
(mise entre parenthèses des verbes, identification par avance pour l’élève de l’un des
éléments à analyser, mots soulignés, reproduction de la règle impliquée dans l’exercice sur
la même page que l’exercice, absence d’une des habiletés requises pour établir le PMSV
abordé). Par ailleurs, huit exercices, soit 53 %, pourraient favoriser un raisonnement complet
sur les PMSV, principalement parce que la majorité (80 %) propose des exercices où rien
n’est identifié d’avance pour l’élève. Une telle proportion est satisfaisante dans la mesure où
cela participe à stimuler chez les élèves la recherche en mémoire de connaissances sur les
PMSV. Enfin, un seul exercice (7 %) pourrait être considéré comme un exercice associant
les deux formes. En fait, bien que ce dernier se caractérise par le fait que rien ne soit identifié
par avance pour l’élève, ce qui participe au développement d’un raisonnement grammatical
complet, la reproduction de la règle impliquée dans l’exercice se trouve sur la même page
que l’exercice.
En ce qui concerne les types auxquels appartiennent les exercices sélectionnés, le
manuel Le Français en 6e suggère majoritairement des exercices dont les types appartiennent
à ceux qui développent partiellement l’acquisition des connaissances sur les PMSV. En effet,
220
67 % des exercices sont des exercices de repérage et 27 % sont des exercices à trous. Ces
deux types d’exercices sont considérés comme des exercices qui ne développent pas un
raisonnement semblable à celui que les élèves doivent mettre en œuvre dans la production de
leurs propres écrits en plus de ne pas favoriser suffisamment le transfert des connaissances
(Gobbe, 1978; ;Nadeau, 2001; Nadeau et Fisher, 2006). Seuls trois exercices (20 %) des
exercices sélectionnés appartiennent aux types d’exercices favorisant un raisonnement
grammatical complet. Ce sont exclusivement des exercices de transformation. Ils obligent
l’élève à repérer, parmi les mots du texte, ceux affectés à la transformation et « favorisent la
capacité de mobiliser et de reconnaitre des formes de langues ou des structures » (Nadeau et
Fisher, 2006 :127).
Enfin, l’examen nous a amenée à constater qu’aucun des exercices ne permet de faire
émerger des réflexions métalinguistiques chez les apprenants. En effet, en nous référant à
nos critères, les résultats montrent que les consignes proposées n’appellent pas à des réponses
ouvertes, que les réponses potentielles des élèves peuvent se passer du contexte des énoncés
pour être émises et qu’elles n’exigent pas nécessairement de l’élève que des explications
soient fournies pour justifier leurs choix.
4.2.2 L’analyse des connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles dans les exercices
La deuxième grille d’analyse porte sur les connaissances déclaratives, procédurales
et conditionnelles. Pour rappel, elle vise à déterminer la considération faite à ces trois types
de connaissances dans les exercices sur les PMSV sélectionnés. Elle s’appuie sur les
questions suivantes :
1. Les exercices sélectionnés convoquent-ils à la fois les connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles?
2. Les exercices sélectionnés tiennent-ils compte des caractéristiques de chacune des
connaissances?
Ces deux questions ont été décomposées en sous-questions dont voici les résultats.
221
4.2.2.1 L’analyse sur la convocation des connaissances déclaratives, procédurales
et conditionnelles dans les exercices sélectionnés
À titre de rappel, nous avons décomposé la première question en deux sous-
questions :
1) l’exercice offre-t-il une variété de cas possibles sur lesquels les élèves auront à réfléchir?
2) l’exercice permet-il de mener toutes les opérations nécessaires à l’établissement des
relations morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe?
Le tableau ci-dessous (tableau 37) présente les résultats obtenus en ce qui concerne la
convocation des connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles.
Tableau 37: Convocation des connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles dans Le Français en 6e
P
R
Div/N0
Les exercices sélectionnés convoquent-ils à la
fois les connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles?
SQ1 SQ2
L’exercice offre-t-il une variété de cas possibles sur
lesquels les élèves auront à réfléchir?
L’exercice permet-il de
mener toutes les
opérations nécessaires à
l’établissement des
relations
morphosyntaxiques
entre le sujet et le verbe?
1 10 Orthographe OA Oui Non
2 10 Orthographe ER Oui Non
3 14 Grammaire ER-1 Non Non
4 14 Grammaire ER-2 Non Non
5 16 Grammaire 4 Non Non
6 17 Orthographe 12 Oui Non
7 17 Orthographe 13 Oui Non
8 17 Orthographe 14 Oui Non
9 34 Grammaire OA-a Oui Non
10 34 Grammaire OA-b Non Non
11 44 Grammaire 2 Oui Non
12 45 Grammaire SC-22 Oui Non
13 94 Conjugaison OA-a Oui Non
14 94 Conjugaison OA-b Oui Non
15 94 Conjugaison ER Oui Oui
Les résultats nous ont amenée à répartir les exercices en trois catégories. La 1re catégorie,
composée de quatre exercices, renvoie aux exercices répondant par la négative aux deux
sous-questions. La 2e catégorie correspond à l’exercice répondant par l’affirmative aux deux
sous-questions. Enfin, la 3e catégorie désigne les dix exercices répondant « oui » pour la 1re
sous-question et « non » pour la 2nde sous-question. Afin d’illustrer nos analyses, nous avons
222
sélectionné un exercice pour les deux premières catégories et deux exercices pour la 3e
catégorie.
Exemple d’exercice de la 1re catégorie
Nous avons observé que non seulement les exercices de cette catégorie n’offrent pas
une variété de cas possibles sur lesquels les élèves auront à réfléchir mais en plus, ils ne
permettent pas de mener toutes les opérations nécessaires à l’établissement des relations
morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe. Voici un exemple de ces exercices.
Exercice 22 : rubrique grammaire, No 4, « La phrase et ses constituants », p. 16
L’exercice ci-dessus fait partie des exercices consacrés à la révision des
connaissances sur la leçon La phrase et ses constituants (EDICEF, 2001 :14). La consigne
demande aux élèves de repérer dans l’extrait de texte proposé les groupes nominaux qui ont
la fonction syntaxique de sujet et de repérer les groupes verbaux129 contenus dans chacune
des phrases du texte. L’examen montre que l’exercice offre peu de cas possibles dans la
mesure où sur les quatre phrases du texte, seuls deux PMSV sont exercés :1) le PMSV lorsque
les sujets sont coordonnés par et (Alberto et sa sœur marchent gaiement) et le PMSV en règle
générale pour les trois autres phrases (…de gros nuages apparaissent… - La lumière
commence à… - …le vent se lève. - Un orage se prépare… - Les éclairs vont… - Les éclairs
sont…).
129 Pour les besoins de notre étude, nous limiterons notre analyse exclusivement aux PMSV dans chacun des exemples sans
tenir compte du complément essentiel qui le compose.
223
Par ailleurs, en considérant le fait que l’exercice s’appuie sur la capacité de l’élève à
décomposer la phrase en constituants, spécifiquement à distinguer les éléments ayant la
fonction syntaxique de sujet et les groupes verbaux, le contenu de l’exercice offre peu de cas
dans lesquels se trouvent des groupes verbaux, du moins tels que définis dans la leçon. En
effet, celle-ci indique que « la phrase simple est généralement constituée d’un groupe
nominal sujet (ou pronom qui le remplace) et d’un groupe verbal » suivi de l’exemple « Les
indigènes appréciaient le discours » où « Les indigènes » est identifié comme étant le GNS
(groupe nominal sujet) et «appréciaient le discours » est identifié comme le GV (groupe
verbal). Dès lors, pour réaliser cet exercice, l’élève se trouve peu soumis à des situations où
il aura à mettre en pratique les trois types de connaissances, et sa réflexion est sollicitée de
façon insuffisante.
Exemple d’exercice de la 2e catégorie
Dans cette catégorie, nous avons observé que l’exercice offre une variété de cas
possibles sur lesquels les élèves auront à réfléchir et permet de mener toutes les opérations
nécessaires à l’établissement des relations morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe. Voici
l’analyse de cet exercice.
L’exercice porte sur le passage de la voix active à la voix passive. Comme
précédemment expliquées dans l’analyse du 1er manuel, les transformations qui vont
s’effectuer au cours de la réalisation de l’exercice nécessitent de l’élève qu’il manipule les
deux éléments faisant l’objet de notre analyse, à savoir le sujet et le verbe. Pour réussir les
manipulations demandées- le COD de la phrase à la voix active devient le sujet de la phrase
224
à la voix passive, le verbe de la phrase à la voix active se trouve modifié en passant de la voix
active à la voix passive, etc.- l’élève se trouve face à au moins deux PMSV : ceux impliquant
les contraintes de position du sujet et l’attribution des traits grammaticaux appropriés au
verbe.
Dans cet exercice, nous avons répondu par l’affirmative aux deux sous-questions.
Pour SQ1, nous pensons que l’exercice offre une variété de cas possibles. D’abord, parce
que les COD présents dans les phrases à l’actif - et qui deviendront les sujets des phrases à
la voix passive - sont des GN dont le genre et le nombre varient : la foule théâtrale (féminin
singulier), le marché artisanal (masculin singulier) / un champ de maïs (masculin singulier),
des légumes (masculin pluriel). De plus, les verbes sont conjugués au présent (accueille,
vend), à l’imparfait (cultivait), au futur simple (soignera) et au passé simple (envahirent).
Ces caractéristiques variées des sujets et des verbes permettront à l’élève de faire appel à
plusieurs connaissances relatives aux PMSV, quoique le seul PMSV exercé sera celui du
PMSV en règle générale. Par exemple, en mettant la phrase à l’actif Ngono vend des légumes
à la voix passive, le sujet ne sera plus le nom au masculin singulier Ngono, mais le GN au
masculin pluriel des légumes. De même, le verbe à la 3e personne du singulier du présent de
l’indicatif dans la phrase à l’actif vend passera à la 3e personne du pluriel du passé composé.
Pour SQ2, nous avons répondu oui dans la mesure où l’élève sera amené à effectuer
toutes les opérations nécessaires pour établir les relations morphosyntaxiques entre le sujet
et le verbe (identification du verbe et du COD, recherche du mot à accorder et inscription de
la marque d’accord appropriée). L’élève devra repérer le COD des phrases à l’actif pour
réécrire la phrase de sorte que ce dernier devienne le sujet de la phrase à la voix passive,
repérer le verbe de la phrase à l’actif pour repérer à quel temps il est conjugué, faire appel à
ses connaissances sur les règles relatives aux correspondances des temps lorsqu’on a à
effectuer la conjugaison d’un verbe dans une phrase à l’actif au passif et inscrire les marques
d’accord appropriées entre le sujet et le verbe.
Exemples d’exercices de la 3e catégorie
Nous avons observé que les exercices de cette catégorie offrent une variété de cas
possibles sur lesquels les élèves auront à réfléchir, mais ne permettent pas de mener toutes
les opérations nécessaires pour effectuer les PMSV. Ci-dessus, la présentation de deux
L’exercice est proposé dans la leçon Le sujet. Dans cet exercice, il est demandé aux
élèves de donner la catégorie grammaticale et la fonction de mots et groupes de mots
soulignés dans le texte. Bien que tous les mots et groupes de mots soulignés occupent la
fonction syntaxique de sujet, nous pouvons relever le fait que l’exercice propose des sujets
dont les catégories grammaticales sont variées : nom propre (Samba), groupe infinitif
(s’enfuir à toutes jambes), pronom indéfini (on), GN (le redoutable fauve). En offrant aux
élèves la possibilité de réfléchir sur la fonction syntaxique de sujet, nous pensons que cela
favorise une acquisition pertinente sur les différentes catégories grammaticales que peut
avoir le sujet en plus de les amener à procéder aux manipulations appropriées pour le
reconnaitre dans des phrases.
Notons que l’exercice aurait été davantage pertinent sur le plan de la réflexion si
aucun des sujets n’avait été souligné et que la consigne avait demandé aux élèves de souligner
tous les sujets contenus dans le texte proposé. Dans ce cas de figure, l’élève aurait également
relevé le sujet il, le seul sujet non souligné dans le texte. Dans le même sens, en ne soulignant
pas les sujets contenus dans le texte, la particularité de certains sujets aurait pu susciter de la
part des élèves plus d’attention. Par exemple, dans la 1re phrase, nous notons la présence de
PMSV qui auraient pu occasionner des difficultés chez les élèves : le PMSV lorsque le sujet
est éloigné du verbe avec lequel il est en relation dans la phrase (Un jour, Samba, revenant
seul des champs, trouva un lion couché sur son chemin…) et le PMSV lorsqu’un pronom est
situé entre le sujet et le verbe (…s’enfuir à toutes jambes lui apparut être… » / « …on le vit
disparaître…).
226
Pour SQ2, nous avons trouvé que l’exercice ne permet pas de mener toutes les
opérations nécessaires pour établir la relation sujet-verbe, puisque le texte est déjà
correctement rédigé pour l’élève. L’élève n’a aucune marque d’accord à inscrire même s’il
doit, pour le réaliser, préciser la fonction des mots soulignés (tous des sujets) et repérer les
verbes avec lesquels ils sont en relation pour trouver ladite fonction.
Exemple 2
Exercice 24 : Section "Savoirs croisés", No 22, p.45
L’exercice se trouve dans les exercices que l’on trouve dans la section Savoirs
croisés 130 du manuel. Il interroge les élèves sur leur capacité à repérer la fonction syntaxique
de sujet dans un poème et à donner leurs différentes catégories grammaticales. Signalons que
l’exercice demande par la suite de classer lesdits sujets selon qu’ils désignent le personnage
principal ou les autres personnages du poème. Nous avons exclu cette partie de la consigne
dans la mesure où elle n’entre pas dans le cadre de notre projet de recherche.
Pour SQ1, l’exercice offre une variété de cas possibles sur les différentes catégories
grammaticales du sujet. Dans le poème, on observe la présence de sujets GN (le nomade),
pronom démonstratif (ceux), pronom relatif (qui) et pronom personnel (il). L’exercice permet
130 Ces sections sont brièvement présentées dans la présentation du manuel.
227
également à l’élève la possibilité de s’exercer sur différents PMSV : le PMSV de façon
générale (le nomade entre… - il quitte… - il n’entend que…) , les PMSV lorsque le sujet est
éloigné du verbe avec lequel il est en relation, lorsqu’il y a une énumération de verbes ou de
groupes verbaux et lorsqu’un pronom est placé entre le sujet et le verbe (ceux … lui
crachent…, lui jettent dans le dos les os de ses moutons…), le PMSV lorsque le sujet est le
pronom relatif qui (qui vénèrent…) et le PMSV lorsque le sujet est sous-entendu dans le cas
où le verbe est au mode impératif (sois maudit nomade… ). Tous ces éléments nous invitent
à conclure que dans cet exercice, les élèves sont mis en situation de mettre en pratique à la
fois les connaissances déclaratives, procédurales, et conditionnelles.
Toutefois, l’exercice ne permet pas à l’élève de mener toutes les opérations
nécessaires pour effectuer la mise en relation entre le sujet et le verbe. En effet, une des
opérations à réaliser par l’élève est absente dans la réalisation de l’exercice. Quoique
l’exercice oblige à repérer les sujets et à rechercher les verbes avec lesquels ils sont en
relation dans le poème, il ne lui donne pas l’occasion d’inscrire les marques d’accord
appropriées puisque le texte est déjà correctement rédigé pour l’élève. C’est pourquoi nous
répondons non pour SQ2.
4.2.2.2 L’analyse de la prise en compte des caractéristiques des connaissances
déclaratives, procédurales et conditionnelles dans les exercices sélectionnés
Pour information, nous avons décomposé cette seconde question en différentes sous-
questions.
1. Sous-question pour les connaissances déclaratives : l’exercice permet-il d’établir
le PMSV en faisant appel à la règle ou aux règles qui s’y rattache (ent)?
2. Sous-questions pour les connaissances procédurales :
L’exercice permet-il de déclencher une procédure?
La procédure se produit-elle dans l’exécution de l’exercice même?
L’exécution de la procédure pourrait-elle permettre à l’élève de diriger son attention
vers d’autres aspects?
3. Sous-question pour les connaissances conditionnelles : l’exercice offre-t-il une
variété de conditions?
228
Le tableau qui suit (tableau 38) présente un récapitulatif des réponses obtenues pour
la prise en compte des caractéristiques des connaissances dans le manuel Le Français en 6e.
Les réponses obtenues nous ont amenée à regrouper les exercices sélectionnés en sept
catégories. Les lignes qui suivent exposent à quoi renvoie chacune de ces catégories et
présentent, à titre d’exemple, l’analyse d’un exercice correspondant à chacune de ces
catégories.
Tableau 38: Prise en compte des caractéristiques des trois connaissances dans Le
Français en 6e
P
R
No
Les exercices sélectionnés tiennent-ils compte des caractéristiques de
chacune des connaissances?
L’E permet-il
d’établir le
PMSV en
faisant appel
à la règle ou
aux règles qui
s’y rattache
(ent)?
L’E permet-
il de
déclencher
une
procédure?
La
procédure se
produit-elle
dans
l’exécution
de l’E
même?
L’exécution
de la
procédure
pourrait-elle
permettre à
l’élève de
diriger son
attention vers
d’autres
aspects?
L’E offre-t-
il une
variété de
conditions?
SQ1 SQ2 SQ3 SQ4 SQ5
1 10 O OA Non Oui Oui Non Oui
2 10 O ER Non Oui Oui Non Oui
3 14 G ER-1 Non Oui Oui Non Non
4 14 G ER-2 Non Oui Oui Non Non
5 16 G 4 Non Oui Oui Non Non
6 17 O 12 Oui Oui Oui Non Oui
7 17 O 13 Non Oui Oui Non Oui
8 17 O 14 Non Oui Oui Oui Oui
9 34 G OA-a Oui Oui Oui Non Oui
10 34 G OA-b Oui Oui Oui Non Oui
11 44 G 2 Oui Oui Oui Non Non
12 45 G SC-22 Non Oui Oui Non Oui
13 94 C OA-a Oui Oui Oui Oui Oui
14 94 C OA-b Non Oui/Non Oui/Non Oui Non
15 94 C ER Oui Oui Oui Oui Oui
Exemple d’exercice de la 1re catégorie
Dans la cette catégorie, constituée de quatre exercices, nous avons constaté que les
exercices ne permettent ni d’établir le PMSV en faisant appel à la règle qui s'y rattache ni de
favoriser que l’exécution de la procédure puisse permettre à l’élève de diriger son attention
vers d’autres aspects. Toutefois, les exercices de cette catégorie favorisent non seulement le
229
déclenchement d’une procédure, mais aussi le fait que la procédure se produise dans
l’exécution de l’exercice même. Enfin, les exercices de cette catégorie offrent une variété de
conditions. L’exercice ci-dessous est une illustration des exercices de cette catégorie.
Règle 3: L'accord du verbe avec son sujet, p.10
L’exercice choisi est un exercice de révision portant sur L’accord du verbe avec son
sujet. Nous pensons qu’il ne permet pas d’établir le PMSV en faisant appel à la règle qui s’y
rattache. Ceci s’explique d’abord par le fait que plusieurs connaissances sur les PMSV ne
sont pas mentionnées dans la leçon (règle 4) qui y est rattachée, mais sont présentes dans
l’exercice. En effet, celle-ci mentionne trois connaissances sur les PMSV que les élèves
devraient retenir :
230
1) le PMSV de façon générale. Sur ce PMSV, l’exercice insiste131 sur le fait que le sujet peut
être éloigné du verbe avec lequel il est en relation dans la phrase et peut également être placé
après ce dernier.
2) le PMSV lorsque le verbe a plusieurs sujets. Sur cette connaissance, la leçon insiste sur
le fait que dans ce cas, les sujets coordonnés par ou expriment un choix. Ce qui nous parait
limité comme indication quand on sait que les sujets coordonnés par ou peuvent exprimer
aussi une addition. En outre, les exemples de phrase proposés pour illustrer cette règle
présentent des PMSV qui auraient pu être l’objet d’indications précises. Dans l’une des
phrases présentées comme illustration, nous constatons la présence du PMSV lorsque les
sujets sont unis par et (Le chien, le chat et l’oiseau s’épient dans la cour) sans que la leçon
ne fasse allusion à ce cas précis, en précisant le fait que lorsque les sujets sont unis par ni,
forme négative du et, le verbe exprime l’addition et se met au pluriel. Dans un autre exemple,
on observe le PMSV lorsqu’un pronom est placé entre le sujet et le verbe (Le chien ou le chat
nous débarrassera de cette carcasse) sans que là encore, la leçon n’y fasse allusion. Or,
comme nous l’avons vu dans la problématique, il arrive que les apprenants, quel que soit
l’ordre d’enseignement, éprouvent des difficultés à effectuer correctement la mise en relation
entre le sujet et le verbe dans ce cas. D’aucuns pourraient penser que le verbe est en relation
non pas avec le sujet, mais avec le pronom complément nous et inscrire le verbe à la 1re
personne du pluriel débarrasserons*.
3) le PMSV lorsque le verbe a des sujets de personnes différentes. Sur ce point, la leçon ne
présente que le cas où l’un des sujets est le pronom personnel moi accompagné d’un sujet
GN précédé d’un déterminant possessif (ou adjectif possessif132) à la 1re personne (Mon frère
et moi allons au marché et le cas où l’un des sujets est le pronom personnel toi accompagné
d’un GN précédé d’un déterminant possessif à la 2e personne Ton frère et toi, restez ici.
Quoique justes, nous pensons que ces deux exemples ne relèvent pas la particularité annoncée
de façon satisfaisante. Pour permettre à l’apprenant de s’approprier la connaissance
déclarative présentée, le manuel aurait pu proposer des exemples où les sujets accompagnés
des pronoms « moi » ou « toi » ne présentent pas des traits identiques aux déterminants
possessifs. En nous appuyant sur les travaux de Perruchet et al. (1998), de Perruchet et al.
131 Les mots « éloigné » et « inversé » sont en gras dans la leçon. 132 Dans les manuels scolaires ainsi que dans le système éducatif gabonais l’expression adjectif possessif (grammaire
traditionnelle) est celle qui est la plus couramment utilisée au lieu de déterminant possessif (grammaire rénovée).
231
(2004) et de Gombert (2006), nous pensons que l’exposition à de telles fréquences
d’exemples pourrait entrainer une acquisition intuitive et non réflexive de la règle présentée.
Pour une acquisition plus efficiente, la leçon aurait pu proposer des exemples diversifiés de
type ses amis et toi irez au marché *, leur copain et moi mangeons des légumes*, elle, toi et
moi chantons l’hymne national*, etc. pour que les élèves saisissent surtout le fait que le verbe
prend la marque de la personne qui a la priorité (la 1re personne a la priorité sur la 2e ou la 3e
personne et la 2e sur la 3e).
Toutes ces connaissances sur les PMSV auraient gagné à être exercées par l’élève.
Or, l’exercice propose dans son apport d’autres PMSV qui nécessitent que les élèves
connaissent les règles sur les PMSV qui s’y rattachent pour le réaliser. C’est le cas des
connaissances déclaratives sur le PMSV lorsque le sujet est constitué d’un nom collectif
accompagné d’un complément du nom au pluriel une haie de guerriers maintinrent… .
Quoique ce cas ne soit pas à traiter dans l’exercice, l’élève aurait pu s’interroger sur le fait
que le verbe soit au pluriel et non au singulier puisque le nom noyau une haie est au singulier.
On observe également que les verbes à compléter impliquent les connaissances sur le PMSV
lorsque le sujet est le pronom relatif qui (le roi qui devait… - Entouré de ses pages et des
griots qui chantai… - …une grande ombre qui se profilai… .
Ensuite, nous avons répondu non à SQ1 parce que dans la consigne, il est demandé
aux élèves d’indiquer le sujet des verbes à compléter. Or, la leçon portant sur la fonction
syntaxique de sujet se trouve plus loin dans le manuel (à la page 34). Il semblerait donc
complexe pour les élèves de reconnaitre les sujets des verbes à compléter puisque, selon la
logique du manuel, cette connaissance n’a pas encore été enseignée.
Malgré ces insuffisances sur les connaissances déclaratives à connaitre pour réaliser
l’exercice, l’élève pourrait déclencher certaines procédures, du moins en ce qui concerne
certains verbes à compléter. En effet, parmi les verbes à compléter, on trouve des PMSV
mentionnés dans la leçon rattachée à l’exercice. Dans les items …le ciel s’assombri…, Le
coba, …, rompi…,…les éléments se déchainai… , … la grande voix du coba dominai… qui
font appel au PMSV de façon générale, l’élève pourrait inscrire les terminaisons appropriées.
Non seulement les verbes sont presque totalement déjà inscrits, mais en plus les sujets en
relation avec ces verbes se trouvent immédiatement placés avant les verbes à compléter, ce
qui facilite l’identification du sujet et l’inscription de la terminaison appropriée. Ces
232
proximités d’accord auront l’avantage d’automatiser la procédure d’accord du PMSV de
façon générale. Enfin, l’exercice ne donne pas l’occasion à l’élève de diriger son attention
vers d’autres aspects du texte, l’exercice ne demandant rien d’autre que de compléter les
terminaisons des verbes.
Enfin, nous trouvons que l’exercice offre une variété de conditions sur les PMSV
même si plusieurs d’entre elles pourraient ne pas être réalisées. Comme nous l’avons relevée
plus haut, l’apport propose plusieurs cas possibles sur l’établissement des PMSV. Ces
diverses possibilités permettraient à l’élève de mettre en œuvre les meilleures stratégies pour
établir correctement le PMSV exercé, à condition que ces PMSV aient été vus par l’élève au
préalable.
Exemple d’exercice de la 2e catégorie
Dans la 2e catégorie, nous avons observé que trois exercices ne permettent ni d’établir
le PMSV en faisant appel à la règle qui s’y rattache ni de favoriser que l’exécution de la
procédure puisse permettre à l’élève de diriger son attention vers d’autres aspects ni d’offrir
une variété de structures. Néanmoins, ces exercices permettent de déclencher une procédure
et de faire en sorte que cette procédure se produise dans l’exécution même de l’exercice.
L’exemple choisi est un exercice proposé pour s’exercer à la leçon sur la phrase et ses
constituants. Nous l’avons sélectionné puisque pour réaliser cet exercice, l’élève est amené
à repérer dans les phrases les éléments d’analyse ayant pour fonction syntaxique sujet et à
repérer le verbe.
Exercice 25 : rubrique grammaire, division ER, N02, « La phrase et ses constituants», p.14
L’observation de l’exercice nous a amenée à répondre non pour SQ1, car la consigne
demande de distinguer les GN sujets, comme si cette fonction syntaxique ne pouvait se
233
présenter que par ce groupe de mots. Comme nous l’avons déjà expliqué dans l’analyse du
1er manuel, cette tendance à désigner cette fonction syntaxique comme « GN sujet » s’avère
erroné dans plusieurs cas dans les exercices. Dans le texte proposé par le manuel, nous
observons que tous les sujets ne sont pas des GN comme le laisse suggérer le manuel. En
effet, dans la phrase Bien avant Dakar, Saint-Louis a été la plus grande des villes de la côte
occidentale de l’Afrique, l’élément ayant la fonction syntaxique de sujet n’est pas un GN
mais bien un nom133. Or, le manuel semble affirmer que cette fonction se présente
uniquement sous la forme d’un groupe nominal ou d’un pronom, comme l’indique la règle
rattachée à la leçon (règle 5). En affirmant que le sujet est un GN ou le pronom qui le
remplace, nous pensons que les élèves pourraient ne pas établir correctement le PMSV en
faisant appel à la règle qui s’y rattache. Plus précisément, ils pourraient omettre de distinguer
dans les phrases les éléments d’analyse qui ne se présentent pas sous la forme d’un GN ou
d’un pronom.
Règle 4: La phrase et ses constituants, p.14
L’exercice permet le déclenchement d’une procédure dans la mesure où il nécessite,
pour encadrer les GN sujets et les GV comme demandé par la consigne, que l’apprenant fasse
appel aux manipulations relatives à l’identification des sujets et des verbes dans une phrase.
De même, la production de ces procédures ne pourrait se faire qu’en exécutant l’exercice.
Toutefois, comme l’exemple précédent, l’exercice n’exige qu’une seule tâche, celle de ne
distinguer que les éléments d’analyse demandés. Par conséquent, l’élève n’aura pas à diriger
133 Mentionnons que dans la grammaire rénovée, un nom propre est considéré comme un groupe de mots (GN).
234
son attention vers d’autres aspects du texte, d’autant plus que ce dernier est déjà correctement
rédigé pour l’élève.
Enfin, l’exercice offre peu de variété de conditions, les sujets présents dans le texte
n’ayant pour catégorie grammaticale soit un GN Cette ville de pêcheurs ou un nom Saint-
Louis soit un pronom elle. On peut aisément comprendre les raisons de cette carence de cas
puisque la leçon ne saurait aller à l’encontre de ce qu’elle avait préalablement annoncé,
notamment que « la phrase simple est généralement constituée d’un groupe nominal sujet
(ou d’un pronom qui le remplace) » (Edicef, 2001 : 14).
Exemple d’exercice de la 3e catégorie
La 3e catégorie regroupe également trois exercices. Elle appartient aux exercices dont
les réponses sont « oui » pour SQ1, SQ2, SQ3 et SQ5 et non pour SQ4. Concrètement, nous
trouvons que ces exercices permettent d’établir le PMSV en faisant appel à la règle qui s’y
rattache, favorisent le déclenchement de la procédure et sa production dans l’exécution de
l’exercice, et offrent une variété de structures. Cependant, ils ne permettent pas à l’élève de
diriger son attention vers d’autres aspects. L’exemple choisi est un exercice proposé pour
s’exercer à la leçon portant sur la fonction syntaxique de sujet.
L’exemple est un exercice proposé dans le cadre de l’exercisation sur la leçon Le Sujet
du manuel. L’examen nous a permis de constater que l’exercice permet d’établir le PMSV
en faisant appel à la règle qui s’y rattache, donc de faire appel aux connaissances déclaratives
dans la mesure où il demande à l’élève de déclencher ses connaissances sur la fonction
syntaxique de sujet. Comme l’énonce la règle située sur la même page de l’exercice, l’élève
235
devra observer tous les mots et repérer ceux qui présentent les caractéristiques de ce qu’il
sait de la fonction syntaxique de sujet. Comme on peut le voir dans l’apport, les phrases
comportent diverses configurations de sujets. En effet, on note la présence de sujets ayant
pour catégorie grammaticale un nom propre (Tokyo…est…), des sujets sous forme de groupes
nominaux (un enfant sur trois ne prend pas… - le repas de midi est très important. - les
hommes sont attirés …), des sujets sous la forme de pronoms cela signifie…) ou de sujets
dont le mot noyau est un infinitif (protéger la flore est devenu…). Seul bémol, aucune des
phrases proposées dans l’apport ne sollicite la connaissance déclarative selon laquelle le
groupe nominal ayant la fonction syntaxique de sujet peut être remplacé par un pronom
comme l’indique la règle affiliée à l’exercice. Par contre, on constate la présence de sujets
reprenant l’idée énoncée dans la phrase précédente comme c’est le cas de ce passage : « Sur
la Lune, la pesanteur est 6 fois plus faible que sur la Terre. Cela signifie que les hommes y
sont 6 fois plus légers! ». Nous pensons qu’il aurait été pertinent que la règle énoncée
présente également ce cas de figure au lieu de se limiter à l’affirmation selon laquelle « Le
groupe nominal peut être remplacé par un pronom ». Une telle restriction pourrait induire
les élèves en erreur et les laisser croire que le pronom ici remplace un groupe nominal, ce qui
n’est pas le cas.
Nous avons également estimé que l’exercice permet le déclenchement d’une
procédure et sa production dans l’exécution de l’exercice même puisque pour repérer les
différents sujets contenus dans les phrases, l’apprenant sera amené à accomplir les différentes
actions permettant leur identification dans les phrases. Par exemple, la phrase À Tahiti, une
plante rapportée d’Amérique, le miconia, détruit la forêt est particulièrement intéressante,
car nous trouvons qu’elle pourrait être source de confusion chez l’élève quant à l’élément
ayant la fonction syntaxique de sujet. Concrètement, dans cette phrase, le verbe est conjugué
à la 3e personne au singulier (détruit). Or, il se trouve que trois éléments sont également à la
3e personne du singulier (Tahiti, une plante rapportée d’Amérique, le miconia). Pour
déterminer avec exactitude le sujet qui est en relation avec le verbe détruit , il est nécessaire
que l’élève pose la question Qu’est ce qui détruit la forêt?* ou qu’il reformule la phrase en
utilisant le présentatif c’est…qui (C’est x qui détruit la forêt ) pour comprendre que c’est
bien le GN une plante rapportée d’Amérique qui occupe la fonction syntaxique de sujet dans
la phrase et non Tahiti (complément circonstanciel de lieu dans la phase) ni le miconia (mis
236
en apposition). Toutefois, nous trouvons que l’exercice ne permet pas à l’élève de diriger son
attention vers d’autres aspects, puisque non seulement le texte est déjà intégralement et
correctement rédigé pour lui, mais en plus il ne lui est demandé que de repérer les sujets.
Enfin, comme nous l’avons déjà évoqué plus haut, l’exercice offre une variété de cas
possibles puisque son contenu présente des sujets ayant des classes grammaticales
différentes.
Exemple d’exercice de la 4e catégorie
Dans la 4e catégorie, composée de deux exercices, les réponses sont « oui » pour
toutes les sous-questions. Nous avons trouvé que ces exercices permettent d’établir le PMSV
en faisant appel à la règle qui s’y rattache, favorisent le déclenchement de la procédure et son
exécution dans la réalisation même de l’exercice et permettent à l’élève de diriger son
attention vers d’autres aspects tout en offrant une variété de structures.
L’exemple ci-dessus est extrait de la première leçon consacrée à la voix passive. Le
but est d’amener les élèves à s’approprier la règle de la correspondance des temps lorsque la
phrase est à la forme passive. Pour ce faire, l’un des exercices proposés, notamment celui qui
nous sert d’exemple, demande à l’élève de remplacer le sujet des verbes soulignés en utilisant
le pronom on. Quoique l’exercice ne porte pas directement sur les PMSV, il exige de l’élève
de recourir à sa manipulation pour le réaliser. En fait, indirectement, on demande à l’élève
de réaliser le PMSV lorsque le sujet est le pronom on. Or, comme décrit dans le cadre
conceptuel, ce PMSV nécessite de l’élève certaines connaissances comme celle de savoir que
lorsque le sujet est le pronom on, le verbe peut être au singulier (On lave les mains) ou
recevoir les traits appropriés lorsque le sujet est utilisé à la place de nous et accompagné
d’un participe passé employé avec être et suivi d’un adjectif (On est rentrés satisfaits de
notre journée/ On est rentrées satisfaites de notre journée). Même si cette connaissance ne
s’applique pas dans l’exercice, nous pensons qu’il aurait été pertinent de préciser aux élèves
cette particularité pour les amener à une attitude plus analytique de l’usage du pronom on
comme sujet dans cet exercice.
241
Concernant le recours aux connaissances procédurales, il se trouve que si les
opérations nécessaires pour utiliser le pronom on comme sujet du verbe souligné peuvent se
faire dans la première phrase (Ce procédé est utilisé pour isoler le sel de l’eau de mer → On
utilise ce procédé pour isoler le sel de l’eau de mer. *), il nous semble difficile de le réaliser
dans la deuxième phrase puisque seul l’auxiliaire est souligné (Des marais salants sont
aménagés le long les côtes). De façon optimiste, on peut envisager qu’il s’agit d’une erreur
involontaire. Dans le cas contraire, il s’agirait là d’une manipulation qui pourrait entraver le
processus d’appropriation de la règle que l’on veut faire acquérir à l’apprenant quand on sait
que les exercices visent l’automatisation des procédures. Bref, en supposant la présence
d’une erreur involontaire, il est permis d’envisager que l’attention de l’élève pourrait être
dirigé vers d’autres aspect comme celui de déterminer s’il peut inscrire le verbe au présent
de l’indicatif (On utilise ce procédé pour isoler le sel de l’eau de mer*/ On aménage des
marais salants le long des côtes*) ou au passé composé (On a utilisé ce procédé pour isoler
le sel de l’eau de mer*. /On a aménagé des marais salants le long des côtes*).
Enfin, l’exercice aurait pu faire preuve d’une plus grande pertinence s’il avait offert
à l’élève un plus grand nombre de contextes linguistiques où la règle aurait pu s’appliquer
(Chartrand, 2009). En effet, rappelons que selon Tardif (1997), les connaissances
conditionnelles favorisent le transfert des connaissances et participent à l’activation des
connaissances procédurales.
4.2.2.3 Le bilan de l’analyse
Au terme de cette analyse sur les exercices sur les PMSV contenus dans le manuel Le
Français en 6e en ce qui concerne les connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles, nous pouvons retenir plusieurs points. D’abord, nous avons observé que sur
les 15 exercices sur les PMSV sélectionnés, seul un exercice (6,66 %) permet de convoquer
à la fois les trois connaissances susmentionnées. Comme nous l’avons fait remarquer dans
l’analyse du premier manuel, ce nombre est largement insuffisant quand on sait que pour
garantir une acquisition efficiente des connaissances sur les PMSV, la recherche suggère que
ces trois connaissances soient exercées en même temps (Nadeau et Fisher, 2006b). De façon
plus précise, sur la base de deux indicateurs, la majorité des exercices (66 %) offrent une
variété de cas possibles sur lesquels les élèves auront à réfléchir mais ne permet pas de mener
toutes les opérations nécessaires à l’établissement des relations morphosyntaxiques entre le
242
sujet et le verbe. En revanche, 26 % des exercices, soit quatre exercices, ne permettent ni l’un
ni l’autre.
L’analyse de la prise en compte des caractéristiques de chacune des connaissances
indique que 66,66 % contre 33,33 % ne sollicitent pas les connaissances déclaratives
évoquées dans le manuel quoiqu’ils fassent appel à des savoirs théoriques pertinents pour
leur réalisation. En d’autres termes, les exercices sur les PMSV sélectionnés dans Le
Français en 6e reconnaissent que les élèves ont besoin de règles pour pouvoir effectuer les
manipulations qui leur sont demandé mais ne fournissent pas suffisamment aux apprenants
les savoirs théoriques pour pouvoir effectuer les exercices. Sur les connaissances
procédurales, nous avons noté que si tous les exercices permettent le déclenchement d’une
procédure et la production de cette procédure dans l’exécution de l’exercice même, en
revanche, 73 % des exercices ne permettent pas aux élèves de diriger leur attention vers
d’autres aspects autre que le PMSV convoqué. Cette particularité pourrait être préjudiciable
pour les élèves puisqu’on sait que dans les situations de rédaction de leurs propres écrits, la
mémoire des élèves est sollicitée pour effectuer plusieurs tâches en même temps (expression
des idées, maitrise de plusieurs autres règles, etc.). Enfin, l’étude des exercices a montré que
73 % des exercices sélectionnés permettent aux élèves d’avoir recours aux connaissances
conditionnelles puisqu’ils offrent une variété de cas possibles, ce qui favorise chez les élèves
la distinction des meilleures conditions pour utiliser telle stratégie plutôt qu’une autre, la
reconnaissance de conditions d’application des connaissances et surtout la réutilisation de
ces conditions dans une situation nouvelle (Tardif, 1999; Nadeau, 1995; Chartrand, 2009).
4.2.3 L’analyse des connaissances implicites et explicites dans les
exercices
La troisième grille porte sur l’analyse des connaissances implicites et explicites dans
les exercices répertoriés. Rappelons qu’elle a pour but d’examiner si, dans les exercices sur
les PMSV sélectionnés, on observe non seulement les caractéristiques mais aussi le recours
au mode d’apprentissage des connaissances implicites et celles des connaissances explicites.
Elle vise à répondre aux questions suivantes :
1. L’exercice considère-t-il les caractéristiques des connaissances implicites?
243
2. L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au mode d’apprentissage
des connaissances implicites?
3. L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au mode d’apprentissage
des connaissances explicites?
4.2.3.1 L’analyse des caractéristiques des connaissances implicites
L’analyse des quinze exercices sélectionnés nous a fait observer que l’exercice ci-
dessous présentait des caractéristiques des connaissances implicites. Pour rappel, ces
caractéristiques se manifestent principalement par l’application d’une règle de façon
intuitive, sans prise de conscience comme le fait pour les jeunes enfants de produire des
phrases sans connaitre les règles de la langue qu’ils utilisent (Nadeau et Fisher, 2011). Nous
avons donc observé les exercices en examinant si, parmi eux, certains favorisent le fait d’être
« sensibles à la structure d’une situation, sans que cette adaptation ne soit imputable à
l’exploitation intentionnelle de la connaissance explicite de la structure (Perruchet et al.,
1998 :19).
Il nous a semblé que dans l’exercice ci-dessus, les élèves pourraient compléter les
verbes, tel que demandé par la consigne, en s’appuyant principalement sur leur intuition. La
présentation des verbes à compléter de l’extrait de texte est telle qu’il serait aisé pour l’élève
d’inscrire les terminaisons attendues sans réelle prise conscience. Non seulement tous les
verbes à compléter sont presque intégralement rédigés pour l’élève, mais en plus ils sont tous
à la 3e personne du singulier. En plus du fait que la tâche de l’élève se réduise simplement à
l’inscription mécanique de la lettre t, il est aisé de constater que tous les verbes, à l’exception
d’un seul aperçu… se terminent par la même occurrence en ai (s’échappai…, avai…,
244
élevai…, ne pouvai…que, éprouvai…). En exposant les élèves à de telles régularités,
signalons que l’on court le risque de générer une forme d’automatisation ou un
conditionnement qui pourraient à la longue conduire les élèves à commettre des erreurs de
procédure (Fayol et Got,1991; Guyon, 2003).
4.2.3.2 L’analyse du recours au mode d’apprentissage des connaissances
implicites
Pour rappel, pour analyser le recours au mode d’apprentissage des connaissances
implicites dans les exercices sur les PMSV sélectionnés, nous nous sommes posé trois
questions :
1) Y-a-t- il la présence d’une fréquence d’association de certains éléments dans le PMSV?
2) Y a-t-il influence de l’oral pour réaliser le PMSV?
3) L’exercice expose-t-il uniquement/ fréquemment à des exemples positifs?
Le tableau ci-dessous (tableau 39) indique les résultats obtenus. Ces résultats ont
permis de regrouper les exercices en six catégories. Les lignes qui suivent présentent
l’analyse d’exercices pour chaque catégorie dégagée.
Tableau 39: Analyse du recours au mode d'apprentissage des connaissances implicites
dans Le Français en 6e
P
R
N0
L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours au
mode d’apprentissage des connaissances implicites?
Y-a-t- il la présence
d’une fréquence
d’association de certains
éléments dans le PMSV?
Y a-t-il influence de
l’oral pour réaliser le
PMSV abordé?
L’exercice expose-t-il
uniquement/
fréquemment à des
exemples positifs?
SQ1 SQ2 SQ3
1 10 O OA Oui Non Oui
2 10 O ER Non Non Non
3 14 G ER-1 Non Oui Non
4 14 G ER-2 Non Non Non
5 16 G 4 Oui Oui Non
6 17 O 12 Non Non Non
7 17 O 13 Non Non Non
8 17 O 14 Non Non Non
9 34 G OA-a Non Non Oui
10 34 G OA-b Non Oui Oui
11 44 G 2 Non Non Non
12 45 G SC-22 Non Non Non
13 94 C OA-a Non Oui Non
14 94 C OA-b Non Non Oui
15 94 C ER Non Non Oui
245
Exercice de la 1re catégorie
La 1re catégorie contient un seul exercice (exercice ci-dessus). Dans cet exercice, nous
avons constaté la présence d’une fréquence d’association de certains éléments dans le PMSV
ainsi que le fait que l’exercice expose uniquement à des exemples positifs même si sa
réalisation ne peut être effectuée en recourant à l’influence de l’oral. Comme indiqué plus
haut, l’exercice consiste à compléter les terminaisons des verbes, particulièrement à inscrire
la dernière lettre de la terminaison. Nous notons que tous les verbes à inscrire sont à la 3e
personne et qu’il suffit pour l’élève d’inscrire dans presque tous les cas la lettre t et une seule
fois la marque de la 3e personne du pluriel -ent (apercut, avait, élevait, ne pouvait…que,
conduisaient, éprouvait). Par ailleurs, en dehors d’un seul verbe apercu…, nous observons
l’occurrence de la terminaison en ai, ces derniers étant conjugués à l’imparfait de l’indicatif.
Ces fréquences d’association dans l’exercice pourraient permettre à l’élève d’automatiser la
procédure consistant à inscrire la lettre t aux verbes conjugués à la 3e personne du singulier
à l’imparfait et à ceux conjugués à la 3e personne du singulier au passé simple. Toutefois,
cela pourrait également engendrer des erreurs dans la mesure où tous les verbes à la 3e
personne du singulier ne prennent pas obligatoirement un t dans leurs terminaisons lorsqu’ils
sont conjugués au passé simple, comme les verbes du 1er groupe par exemple parla, mangea,
chanta, etc.
Exemple d’exercice de la 2e catégorie
La 2e catégorie regroupe sept exercices présentant les mêmes caractéristiques. Dans
ces exercices, il n’y a ni fréquence d’association d’éléments dans le PMSV ni influence de
l’oral pour réaliser le PMSV ni exposition à des exemples positifs seulement. En voici un.
246
Dans cet exercice, nous notons l’absence d’une fréquence d’association de certains
éléments dans le PMSV car le contenu de l’exercice présente des sujets - que l’apprenant
devra relever - dont les catégories grammaticales sont variées (Le nomade entre…
(GN)- Ceux qui …lui crachent au visage, lui jettent … (Pronom démonstratif) - Ceux qui
vénèrent le béton… (Pronom relatif) - Il quitte le marché… / il n’entend que le son de ses pas
(Pronom personnel)). Ce qui permet à l’élève de s’approprier non seulement la connaissance
selon laquelle les éléments ayant la fonction syntaxique de sujet peuvent avoir différentes
catégories grammaticales, mais aussi la connaissance relative aux pronoms divers qui
peuvent être sujets.
Par ailleurs, l’apprenant ne pourrait recourir à l’oral pour réussir à repérer les sujets
puisqu’il n’y a aucun indice sur la marque d’accord écrite en fin de mot. En effet, celle-ci
demeure silencieuse (Le nomade entre… - Ceux qui vénèrent …lui crachent au visage, lui
jettent … - Il quitte le marché… - il n’entend que le son de ses pas).
Enfin, l’exercice n’expose pas à des exemples positifs seulement. En effet, le poème
présente la particularité de proposer un vers constitué d’une phrase nominale Hurlement de
la ville et un vers comportant une phrase dans laquelle le sujet est sous-entendu puisque
conjugué au mode impératif (Sois maudit nomade).
Exemple d’exercice de la 3e catégorie
Dans la 3e catégorie, constituée de deux (2) exercices, l’analyse révèle l’absence
d’une fréquence d’association d’éléments dans le PMSV et l’absence d’une exposition à des
247
exemples positifs uniquement. Néanmoins, le PMSV pourrait être réussi grâce à l’influence
de l’oral. L’exercice ci-dessous appartient à cette catégorie.
L’exemple montre que les éléments ayant la fonction syntaxique de sujet sont de
catégorie grammaticale différente ou constitué de groupes nominaux de diverses
configurations : GN → Cette nouvelle machine (adjectif démonstratif 134+ adjectif
qualificatif+ nom commun), Les murs de la maison (article défini135 ou déterminant au
pluriel+ nom commun+ préposition+ GN composé d’un déterminant et d’un nom), L’équipe
de football de notre quartier (article défini au singulier + nom+ préposition+ nom +
préposition+GN composé d’un déterminant et d’un nom); nom propre (Marie); pronom
personnel (elle). De même, la quasi-totalité des verbes en relation avec ces sujets sont
conjugués à des temps différents : présent de l’indicatif (est, organise), passé composé (a
acheté), futur antérieur passif (seront repeints), passé composé passif (a été battue). Ces
particularités offrent à l’élève de multiples occasions de recourir à des habiletés réflexives
diverses.
Toutefois, il est possible pour l’élève d’user de sa compétence d’usager pour
reconnaitre les éléments ayant la fonction syntaxique de sujet et les verbes comme le
demande la consigne. En fait, la particularité de certains des verbes est telle que nous pensons
qu’il lui serait aisé de souligner les sujets et les verbes. Par exemple, le fait que le verbe être
soit le verbe dans la phrase Cette nouvelle machine est très performante quand on sait la
variation orale du verbe être à presque toutes les personnes au présent de l’indicatif (suis, es,
134 Déterminant en grammaire nouvelle. 135 Terminologie associée à la grammaire traditionnelle utilisée dans le système éducatif gabonais.
248
est, sommes, êtes, sont) et que cette phrase ne présente que des mots au singulier, comme
l’adjectif démonstratif cette qui se distingue oralement de son pluriel ces, ou, dans un certain
sens, l’adjectif qualificatif136 nouvelle qui se distingue au masculin pluriel nouveaux* facilite
à notre avis la distinction orale du sujet et du verbe. De même, la production langagière de la
phrase Les murs seront repeints en blanc pourrait également permettre à l’élève de repérer
le sujet et le verbe puisqu’un seul groupe nominal est au pluriel les murs et que seront
équivaut à une trace orale du pluriel de être.
Enfin, l’exercice n’expose pas uniquement à des exemples positifs puisque toutes les
phrases proposées ne comportent pas de groupes verbaux. Comme le mentionne la règle du
manuel, les groupes verbaux sont constitués du verbe et de compléments essentiels tels les
compléments d’objet, l’attribut du sujet et le complément d’agent et parfois de compléments
circonstanciels qui ne peuvent être soit supprimés soit déplacés sans que cela ne nuise à la
compréhension de la phrase (Je vais à l’école*/ ce livre coûte dix mille francs CFA*137).
Dans le cas de notre exercice, nous pouvons voir que certaines phrases ne disposent pas de
ce type de compléments telles les phrases L’équipe de football de notre quartier a été battue
qui n’a qu’un verbe et Les murs de la maison seront repeints en blanc où le complément
circonstanciel de manière en blanc 138 peut être supprimé.
Exercice de la 4e catégorie
La 4e catégorie est constituée d’un exercice (exercice ci-dessous). Ce dernier révèle
la présence d’association de certains éléments pour établir le PMSV ainsi que la
manifestation de l’influence de l’oral pour réaliser le PMSV. Toutefois, l’exercice n’expose
pas uniquement à des exemples positifs.
136 En grammaire rénovée, on parle d’adjectif qualifiant. Dans le système éducatif gabonais, on parle d’adjectif qualificatif
(grammaire traditionnelle). 137 Le franc CFA est la monnaie utilisée au Gabon. 10.000 francs CFA équivaut à environ 20 dollars canadien. 138 En grammaire rénovée, ce groupe de mots n’est pas considéré comme tel. Au Gabon, cette notion est toujours présente.
249
L’exercice est proposé dans les pages consacrées aux exercices de révision. Il porte
sur l’identification des éléments qui occupent la fonction syntaxique de sujet et à reconnaitre
les groupes verbaux dans une phrase. Les six phrases proposées dans l’apport sont construites
selon une configuration identique. En effet, tous les GN occupant la fonction syntaxique de
sujet se trouvent immédiatement placés juste avant le verbe ou le GV. Pourtant, selon
l’organisation du manuel, les élèves ont déjà acquis plusieurs connaissances sur les PMSV
puisque la leçon L’accord du verbe avec son sujet (p.10) se trouve avant celle de
l’identification des constituants de la phrase (La phrase et ses constituants, p.14). En tant
qu’exercice bilan, il aurait été davantage pertinent de proposer divers agencements de
phrases, d’autant plus que la leçon L’accord du verbe avec son sujet y fait allusion (voir règle
4). Par exemple, le contenu de l’exercice aurait pu proposer des phrases où les sujets sont
situés après les verbes (ou les GV) et des phrases où le sujet est éloigné du verbe (ou du GV)
avant ou après.
Par ailleurs, l’identification du GN sujet et du GV dans certaines phrases de l’exercice
pourrait être réussie en recourant simplement à l’oral. Par exemple, la trace orale du pluriel
dans la phrase Mais soudain, de gros nuages apparaissent à l’horizon pourrait faciliter la
reconnaissance des deux éléments à repérer. De façon précise, la prononciation du
verbe apparaissent »→[ɑpɑrɛs] pourrait simplifier la détection du GN sujet et du verbe ainsi
que l’identification du verbe apparaissent si l’on considère la variation du radical du verbe
apparaitre à la 3e personne il apparait→ ils apparaissent bien que la marque d’accord écrite
à la du mot apparaissent demeure silencieuse. Dans le même ordre d’idées, la forme
conjuguée du verbe aller dans l’item Les éclairs vont tomber… et celle du verbe être dans Les
éclairs sont l’un des phénomènes… pourraient favoriser le repérage du GN sujet et du GV.
Enfin, en tenant compte des caractéristiques du GV précédemment énoncées,
l’exercice n’expose pas uniquement à des exemples positifs, puisque toutes les phrases de
l’apport ne comportent pas de groupes verbaux selon la logique du manuel (Mais soudain,
de gros nuages apparaissent à l’horizon - …le vent se lève. - Un orage se prépare. ), ce qui
favorise le traitement de l’erreur chez les apprenants (Rey, Pacton et Perruchet, 2005; Nadeau
et Fisher, 2011).
250
Exemple d’exercice de la 5e catégorie
La 5e catégorie contient trois exercices. Dans ces derniers, il n’y a ni présence
d’association de certains éléments dans le PMSV ni influence de l’oral pour réaliser la mise
en relation entre le sujet et le verbe. Cependant, les exercices exposent fréquemment ou
uniquement à des exemples positifs. L’exemple qui suit fait partie de cette catégorie
d’exercices.
L’exemple porte sur la leçon Le sujet. La consigne demande de préciser la fonction
syntaxique et la catégorie grammaticale des éléments soulignés dans l’extrait de texte qui sert
de support à l’exercice. En nous appuyant sur ces directives, l’examen des éléments soulignés
nous a fait répondre par la négative sur la présence d’une fréquence d’association des
éléments puisque les mots soulignés, bien qu’occupant tous la fonction syntaxique de sujet,
sont de catégorie grammaticale différente. En effet, les quatre éléments soulignés sont
respectivement un nom propre (Samba), un groupe infinitif (S’enfuir à toutes jambes), un
pronom (on) et un groupe nominal (le redoutable fauve).
Nous avons également répondu non pour la 2e sous-question car nous estimons que
la réussite de l’exercice ne pourrait être réalisée en recourant à l’influence de l’oral. En dehors
du verbe trouva en relation avec le sujet Samba qui pourrait éventuellement facilement être
détecté grâce à la compétence d’usager par le fait que la conjugaison des verbes au passé
simple est assez variée à presque toutes les personnes dans leur prononciation ([tryve]-
[truvɑ]-[truvɑ]- [truvam]- [truvat]- [truvɛr]), les trois autres verbes en relation avec leurs
quatre sujets (S’enfuir à toutes jambes lui apparut… - …on le vit… - Pourtant, le redoutable
fauve digérait…) obligent l’élève à recourir à des habiletés intellectuelles pour déterminer la
fonction syntaxique des mots soulignés.
251
Enfin, l’exercice expose les élèves à des exemples positifs seulement puisque tous les
mots dont ils doivent fournir la fonction syntaxique sont des sujets. De façon optimiste, on
pourrait supposer que cette exposition est volontaire puisque selon l’organisation du manuel,
la fonction syntaxique de sujet est la première fonction présentée par le manuel. Néanmoins,
si l’on s’appuie sur l’idée que les élèves des classes de 1re année du secondaire au Gabon et
dans d’autres systèmes éducatifs ont déjà, - en toute logique - rencontré durant leur scolarité
au primaire certaines autres fonctions (compléments circonstanciels, complément d’objet,
par exemple), cela aurait été une transition intéressante de souligner également des mots ou
groupes de mots n’ayant pas la fonction syntaxique de sujet tels que les groupes de mots dans
les items suivants : Un jour*, Samba, revenant seul des champs, trouva un lion couché* sur
son chemin*… - Pourtant, le redoutable fauve digérait tranquillement* son précédent
repas*… .
Exercice de la 6e catégorie
Dans cette dernière catégorie, constituée d’un seul exercice, l’analyse nous a amenée
à déterminer qu’il y a, d’une part absence d’une fréquence d’association d’éléments dans le
PMSV et d’autre part, une possible influence de l’oral pour réaliser le PMSV et une
exposition uniquement à des exemples positifs.
En dehors du fait que plusieurs mots ou groupes de mots occupant la fonction
syntaxique de sujet soient des GN139 (cinq sur onze) et que tous les sujets sont placés avant
139 Nous avons jugé cet aspect circonstanciel dans la mesure où ces GN étaient de construction différente : « un enfant sur trois »
(déterminant indéfini au masculin singulier+ nom+ préposition + adjectif numéral cardinal), « le repas de midi » (déterminant
défini+ nom+ préposition+ nom), « les hommes » (déterminant défini au masculin pluriel+ nom), « la pesanteur » (déterminant défini
252
le verbe, l’exercice ne présente pas de fréquence d’association d’éléments dans le PMSV.
Les sujets que les élèves auront à relever dans les phrases proposées ont la particularité
d’avoir des compositions différentes : on observe la présence de GN différents, d’un groupe
de mots dont le mot noyau est un adjectif numéral cardinal140 (26,8 millions de personnes),
de pronoms démonstratifs distincts (ce/cela), d’un groupe infinitif (Protéger la flore) et d’un
nom propre (Tokyo). En plus, dans deux phrases (Tokyo, au Japon, est la ville la plus peuplée
du monde. - À Tahiti, une plante rapportée d’Amérique, le miconia, détruit la forêt. ), la
place du sujet par rapport au verbe avec lequel il est en relation est telle que cela nécessite
une certaine attention de l’élève.
Puis, la réussite de l’exercice pourrait se faire en recourant majoritairement à
l’influence de l’oral dans la mesure où, sur les onze verbes en relation avec un sujet,
seulement deux verbes (habitaient et signifie) présentent la particularité de ne produire
aucune distinction significative à l’oral qui indiquerait la marque d’accord141. Toutefois,
comme déjà évoqué, les autres verbes, particulièrement la présence de être, tels qu’ils sont
conjugués, pourraient être un indicateur pour détecter les sujets des phrases proposées. Par
exemple, les verbes détruit situé dans l’avant dernière phrase du corpus et le verbe
prend dans l’item Un enfant sur trois ne prend pas… présentent la particularité de voir leur
radical varier lorsqu’ils sont au pluriel (détruisons, détruisez, détruisent/ prenez, prenons,
prennent). De telles variations pourraient servir d’indicateur pour faire comprendre aux
apprenants que les sujets en relation avec ces verbes sont forcément au singulier.
Enfin, l’exercice expose uniquement à des exemples positifs dans la mesure où toutes
les phrases du corpus contiennent au moins un élément qui a la fonction syntaxique de sujet.
Cette disposition du manuel pourrait avoir des conséquences pour les élèves qui pourraient
éventuellement penser que toutes les phrases ont systématiquement un sujet, ce qui n’est pas
le cas comme dans le cas des phrases où le sujet est sous-entendu (Sois une femme digne*),
ou les phrases nominales (Attention, risque d’éboulement*), des phrases sans verbe ni nom
(Fantastique!* - Bravo!*), etc.
au féminin singulier + nom), « une plante rapportée d’Amérique » (déterminant indéfini au féminin singulier+ nom+ adjectif
qualificatif + préposition+ nom propre). 140 En grammaire rénovée, il s’agit d’un déterminant numéral. 141 Dans ces deux cas, seules les 1re et 2e personne du pluriel pourraient se distinguer à l’oral. Or, du fait de leur absence
dans les phrases, nous pouvons penser qu’il serait improbable que les élèves s’appuient sur leur compétence d’usager pour
distinguer les sujets qui sont en relation avec les verbes.
253
4.2.3.3 L’analyse sur les connaissances explicites
Rappelons que, pour analyser les caractéristiques et le recours au mode
d’apprentissage des connaissances explicites dans les exercices sur les PMSV sélectionnés,
nous nous sommes appuyée sur quatre questions :
1) L’exercice offre-t-il la possibilité de verbaliser et de contrôler intentionnellement ses
connaissances sur le PMSV abordé?
2) L’exercice implique-t-il l’application de processus conscients?
3) L’exercice implique-t-il l’application d’une conscience métalinguistique?
4) L’exercice suggère-t-il l’application d’exigences secondaires, autre que le PMSV abordé?
Comme le montre le tableau ci- dessous (tableau 40), les résultats obtenus nous ont
permis de regrouper les exercices en six catégories.
Tableau 40: Analyse des caractéristiques des connaissances explicites
P R N0
L’exercice favorise-t-il l’acquisition du PMSV par le recours
au mode d’apprentissage des connaissances explicites?
L’exercice offre-t-il
la possibilité de
verbaliser et de
contrôler
intentionnellement
ses connaissances
sur le PMSV
abordé?
L’exercice
implique-t-il
l’application
de processus
conscients?
L’exercice
implique-t-il
l’application
d’une
conscience
métalinguistique
?
L’exercice
suggère-t-il
l’application
d’exigences
secondaires,
autre que le
PMSV abordé?
SQ1 SQ2 SQ3 SQ4
1 10 O OA Non Non Non Non
2 10 O ER Oui Oui /Non Oui Non
3 14 G ER-1 Oui Oui Non Non
4 14 G ER-2 Oui Oui Oui Oui
5 16 G 4 Oui Oui /Non Oui /Non Non
6 17 O 12 Oui Oui /Non Oui Non
7 17 O 13 Oui Oui Oui Oui
8 17 O 14 Oui Oui Oui Oui
9 34 G OA-a Oui Oui /Non Oui /Non Non
10 34 G OA-b Oui Oui /Non Oui /Non Non
11 44 G 2 Oui Oui Oui Oui
12 45 G SC-22 Oui Oui Oui Non
13 94 C OA-a Oui Oui Oui Oui
14 94 C OA-b Oui Oui Oui Non
15 94 C ER Oui Oui Oui Non
254
Exercice de la 1re catégorie
La 1re catégorie correspond à l’exercice dont les réponses sont non aux quatre sous-
questions. De façon précise, nous considérons que les items, tels que présentés, n’offrent pas
la possibilité à l’apprenant de verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances
sur les PMSV. Comme déjà indiqué, le fait que la réussite de l’exercice soit réduite à
l’inscription de la dernière lettre de la terminaison (la lettre t) implique l’absence d’une réelle
prise de conscience de la règle que l’on veut faire acquérir à l’apprenant. Les connaissances
explicites, reconnues comme étant des connaissances qui concernent les procédures que le
sujet applique consciemment, supposent, comme l’affirme Jaffré (1995), que le sujet est
capable d’analyser la structure d’un mot pour en maitriser la variation graphique. Or, dans
cet exercice, la tâche de la consigne consistant à compléter les verbes est réduite à une
opération mécanique.
En outre, nous pensons que l’exercice entrave l’application de processus conscients.
En effet, la simple inscription de la lettre t pourrait faire obstruction à une attention
particulière sur certaines phrases qui auraient pu susciter le déclenchement de processus
conscients. Par exemple, dans l’item Le tas de fèves avai…, le fait que le sujet soit constitué
d’un nom collectif au singulier et d’un complément au pluriel aurait pu provoquer le
déclenchement de processus conscients pour effectuer correctement la relation entre ledit
sujet et le verbe. De même, dans l’item Le feu ou la fumée qui s’en élevai…ne pouvai… , le
fait qu’il y ait deux sujets unis par la conjonction de coordination ou aurait pu être une
occasion de pousser l’élève à s’interroger sur le sens de la conjonction en se demandant si ce
dernier exprime un choix ou une addition.
255
Par ailleurs, l’exercice n’implique pas véritablement l’application d’une réflexion
métalinguistique dans la mesure où ce dernier réduit la capacité de l’élève à aller au-delà de
la compréhension implicite pour justifier son choix. Si l’on observe les sujets en relation avec
les verbes à compléter, l’on s’aperçoit que la majorité d’entre eux est précédée de pronoms
personnels il ou de déterminants (le, les), ce qui favorise un traitement automatique de
l’exercice. Autrement dit, l’élève pourrait indiquer le sujet de façon spontanée sans
véritablement mettre en œuvre la procédure qui permet de le repérer dans une phrase. Seule
la présence du pronom relatif qui comme sujet du verbe élevai… dans l’item Le feu ou la
fumée qui s’en élevai…ne pouvai… pourrait nécessiter un traitement contrôlé, donc explicite,
de l’identification du sujet. Toutefois, nous trouvons ce cas largement insuffisant d’autant
plus que l’exercice est proposé pour acquérir les PMSV.
Enfin, nous trouvons que l’exercice ne suggère aucune application d’exigences
secondaires puisque la tâche de l’exercice ne consiste finalement qu’à mettre en relation les
sujets et les verbes, le reste du texte étant déjà correctement rédigé pour l’élève.
Exemple d’exercice de la 2e catégorie
La 2e catégorie compte deux exercices. Nous y avons observé qu’il était offert à
l’apprenant la possibilité de verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances
sur les PMSV. S’ils impliquent l’application d’une conscience métalinguistique,
l’application de processus conscients est néanmoins partielle. Par ailleurs, ils ne suggèrent
aucune application d’exigences secondaires autre que le PMSV abordé. L’exemple suivant
présente l’analyse d’un des exercices appartenant à cette catégorie.
L’analyse de l’exercice ci-dessus a montré qu’il offre à l’apprenant la possibilité de
verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances sur les PMSV, précisément
256
sur le PMSV lorsque le sujet est postposé au verbe avec lequel il est en relation pour les
raisons suivantes. D’abord parce que pour relever les différents sujets inversés contenus dans
l’extrait de texte, l’apprenant sait de quoi il s’agit et peut ainsi prédire sa performance puisque
le PMSV lui a été présenté explicitement dans la règle affiliée à la leçon. En plus, pour
répondre à la tâche qui lui est demandée, il sera amené à appliquer la procédure consistant à
repérer les sujets dans une phrase, ce qui exige un traitement contrôlé, c’est-à-dire savoir
comment approcher et résoudre des problèmes impliquant des composantes linguistiques.
L’exercice implique également l’implication de processus conscients dont la
conscience métalinguistique. En effet, en plus de l’application de la procédure d’accord,
l’élève est soumis à diverses configurations qui nécessitent l’intervention de processus où
l’élève devra prendre conscience de ses facultés et activités cognitives. Par exemple, dans le
texte, la présence d’un sujet postposé et immédiatement placé après le verbe avec lequel il
est en relation (…quand arriva l’avènement de Kabrin Kabra) et celle d’un sujet postposé
et éloigné du verbe avec lequel il est en relation (Il y a longtemps, très longtemps, vivait dans
cette contrée florissante un peuple heureux et prospère ) offre à l’élève la possibilité de
s’approprier consciemment le fonctionnement de la langue. D’un autre côté, l’exercice
présente l’avantage de présenter dans son contenu une phrase qui ne comporte pas de sujet
postposé, comme c’est le cas de la dernière phrase, ce qui favorise une attention particulière
et non un traitement mécanique de l’exercice. Il aurait été également opportun de demander
à l’élève de relever tous les sujets contenus dans le texte et d’indiquer la particularité de
chacun d’entre eux au lieu de restreindre la tâche au seul repérage des sujets postposés. Ces
consignes supplémentaires auraient permis à l’élève d’être plus conscient des réalités de
production langagière comme celles liées à l’expression et à la position du sujet et du verbe
(Fauchart, 2001). Comme mentionné dans le cadre conceptuel, la conscience
métalinguistique est reconnue comme une des clés de la réussite dans le domaine de la langue
et de la création de matériel didactique, puisqu’elle permet à l’apprenant d’approcher les
situations d’apprentissage avec un plus haut niveau de confiance (El Euch, 2016).
Enfin, l’exercice ne suggère aucune application d’exigences secondaires autre que
l’identification du sujet postposé. En effet, le texte est intégralement et correctement rédigé
pour l’élève. La consigne aurait pu proposer comme tâche secondaire par exemple de réécrire
le texte en utilisant le présent de narration qui est également un autre temps utilisé pour le
257
récit ou encore de réécrire le texte en utilisant un autre registre de langue, d’autant plus que
l’exercice est un exercice de révision situé après la présentation de la leçon sur les registres
de langue.
Exercice de la 3e catégorie
La 3e catégorie contient un exercice, présenté ci-dessous. Celui-ci offre la possibilité
de verbaliser et de contrôler intentionnellement les connaissances sur les PMSV, puisque
pour souligner les sujets et les GV, l’élève est amené à mettre en œuvre ses connaissances
sur les règles des PMSV et à les appliquer consciemment. Dès lors, l’enclenchement de ces
connaissances implique l’application de processus conscients et ce d’autant plus que toutes
les phrases du texte ne comportent pas de GV. C’est le cas notamment des phrases Les murs
de la maison seront repeints en blanc et L’équipe de football de notre quartier a été battue
où nous notons la présence d’un verbe seront repeints et d’un groupe facultatif142 en blanc
dans la première phrase et un verbe dans la seconde phrase a été battue. L’exercice aurait été
encore plus productif s’il avait choisi de présenter également des phrases à construction
particulière comme des phrases à présentatif (Voici mes enfants*), des phrases comportant
des sujets sous-entendus (Soyez conscients du danger*), des phrases où le verbe est sous-
entendu (La première avait une magnifique chevelure brune; la deuxième, une crinière
flamboyante; la troisième, une tignasse blonde*), etc.
Toutefois, l’exercice n’implique pas l’application d’une conscience métalinguistique.
Autrement dit, nous trouvons que l’exercice favorise peu la mise en œuvre de capacités
mentalisées et intentionnellement appliquées (Gombert, 2006). En guise d’exemple,
l’absence de la nécessité de correction de la syntaxe, notamment des PMSV dans les phrases
proposées, puisque celles-ci sont correctement rédigées pour l’élève. En outre, si l’on observe
les items, nous constatons que toutes présentent des structures identiques en ce sens que
toutes les fonctions syntaxiques de sujet sont placées immédiatement juste avant les verbes
avec lesquels ils sont en relation. Dans le même ordre d’idées, comme nous l’avons déjà
indiqué, nous avons remarqué que la majorité des verbes en relation avec les sujets sont
construits de sorte qu’il pourrait être aisé pour l’élève de repérer spontanément quel élément
est le verbe (est, a acheté , seront repeints , a été battue), et par conséquent de souligner les
142 Dans le système éducatif gabonais, « en blanc » a pour fonction syntaxique complément circonstanciel de manière.
C’est donc un complément non essentiel. Il ne fait pas partie du groupe verbal.
258
groupes verbaux. Or, la conscience métalinguistique devrait pouvoir permettre à l’élève
d’être conscient des caractéristiques et des problèmes linguistiques afin de mieux l’utiliser
dans différents contextes, d’avoir une plus grande capacité d’analyse et d’approcher les
situations d’apprentissage avec un plus haut niveau de confiance (Nadeau et Fisher, 2011; El
Euch; 2016). Par ailleurs, l’exercice ne suggère aucune exigence secondaire143 en dehors de
la tâche consistant à souligner les éléments demandés car les phrases sont intégralement
rédigées pour l’apprenant.
Exemple d’exercice de la 4e catégorie
Nous avons regroupé cinq exercices dans cette catégorie dont les réponses sont oui à
toutes les sous-questions. L’analyse montre que ceux-ci offrent la possibilité de verbaliser et
de contrôler intentionnellement les connaissances sur le PMSV, impliquent l’application de
processus conscients ainsi que celle d’une conscience métalinguistique et enfin suggèrent
l’application d’exigences secondaires autre que le PMSV. En voici un exemple.
143 La tâche consistant à recopier les phrases ne constitue pas pour nous une exigence nécessitant le déclenchement de
processus cognitifs significatifs compte tenu du niveau d’enseignement auquel appartient l’exercice. Elle pourrait être
réalisée sans réelle prise de conscience de l’acte d’écriture.
259
L’exercice est proposé dans les exercices de révision. Il porte sur la leçon L’accord
du verbe avec son sujet. La consigne exige deux tâches : La première consiste à transcrire les
verbes qui ont été inscrits en phonétique et la seconde à repérer les sujets en relation avec
les verbes notés en phonétique. L’exercice offre à l’élève la possibilité de verbaliser et de
contrôler intentionnellement ses connaissances, puisque l’exercice sollicite nombre de ses
connaissances. Celles-ci l’obligent à prédire le degré de certitude à propos des réponses qu’il
devra apporter. Pour réussir cet exercice, l’élève sait ce qu’il serait capable de faire et ce dont
il serait moins sûr. Par exemple, il pourrait ou ne pourrait pas maitriser pleinement les
procédures d’attribution des traits grammaticaux du sujet au verbe ou méconnaitre ou savoir
les règles de transcription des verbes notés en phonétique.
L’exercice implique l’application de processus conscients, car l’élève sera amené à
faire appel à ses connaissances sur les règles concernant la mise en relation entre le verbe et
le sujet, à appliquer consciemment les procédures d’accord et à transcrire adéquatement les
verbes notés en phonétique. Par exemple, pour orthographier correctement les verbes et pour
repérer les sujets, l’élève est amené à faire appel à plusieurs connaissances déclaratives :
mobiliser ses connaissances sur la façon dont l'alphabet phonétique international (API)
représente la prononciation française; savoir que le verbe reçoit les traits du sujet avec lequel
il est en relation (personne, nombre); savoir que le sujet peut se repérer dans une phrase en
posant la question « Qu’est-ce qui/que…? » ou en recourant aux marqueurs d’emphase
« c’est …qui »; savoir que le pronom relatif qui est une reprise d’un antécédent, soit le mot
qui le précède, et savoir que, par conséquent, il possède les mêmes traits que cet antécédent;
savoir que le pronom relatif peut occuper la fonction syntaxique de sujet dans une
subordonnée relative; etc. Puis, il devra transcrire les verbes notés en phonétique, appliquer
les procédures d’accord en repérant les sujets pour pouvoir inscrire les marques d’accord
appropriées sur les verbes.
Nous pensons également que l’exercice implique l’application d’une conscience
métalinguistique. En effet, l’exercice intègre plusieurs types d’activités sur la langue portant
sur la phonologie, la morphologie, sur la syntaxe, sur la sémantique, sur la phonétique et il
oblige l’élève à porter une attention particulière, un traitement contrôlé de ses connaissances
sur la langue. La réalisation de l’exercice requière de l’élève qu’il soit conscient des
caractéristiques (et des problèmes liés à la langue), particulièrement celles relatives à la
260
phonétique et à la morphosyntaxe et qu’il sache comment approcher et résoudre ces
problèmes impliquant des composantes linguistiques. D’ailleurs, il aurait été encore plus
judicieux que la consigne ne signale pas le fait que seuls les verbes sont notés en phonétique
ou encore qu’en plus de ces verbes, des mots de catégorie grammaticale différente avaient
été également notés en phonétique. Ces particularités auraient renforcé la capacité de
l’exercice à faire réfléchir l’élève sur la nature de chacune des composantes du message et
sur les relations qu’ils entretiennent. Ainsi, les verbes notés en phonétique [saly], [vø]ou
[ɑ̃tr] auraient pu susciter un état de conscience focalisée, c’est-à-dire que l’élève aurait pu se
demander si ces mots sont des verbes ou des noms ([saly]→ saluent/salut*; [vø] →veut/
vœu*;[ɑ̃tr] →entrent/antre*).
Enfin, outre le PMSV, nous avons répondu par l’affirmative sur la présence
d’exigences secondaires vu que l’exercice amène l’élève à mobiliser ses connaissances sur
une autre règle, celle portant sur la phonétique des mots en langue française.
Exemple d’exercice de la 5e catégorie
La 5e catégorie comporte trois exercices. Ces derniers offrent la possibilité à l’élève
de verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances sur les PMSV. Ils
impliquent partiellement l’application de processus conscients ainsi que celle d’une
conscience métalinguistique. Enfin, ils ne suggèrent aucune application d’exigences
secondaires autre que les PMSV. En voici un exemple.
261
L’exercice ci-dessus se trouve dans la partie réservée à la révision d’une séquence
pédagogique du manuel. Il vise à vérifier les acquis sur la leçon La phrase et ses constituants.
L’examen de l’exercice nous a permis d’observer que ce dernier offre la possibilité à
l’apprenant de verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances sur les PMSV.
En effet, il propose, sur les six phrases du texte, trois phrases nécessitant de l’élève qu’il
prenne conscience de ses processus cognitifs. Par exemple, dans la phrase Alberto et sa sœur
marchent gaiement, l’élève est amené à mobiliser ses connaissances sur le PMSV lorsque
dans la phrase, le verbe est en relation avec plusieurs sujets unis par une conjonction
coordination d’autant plus que la marque d’accord du verbe marchent demeure silencieuse.
De même, deux autres phrases présentent des configurations où les marques d’accord sont
silencieuses comme dans les phrases La lumière commence à baisser, le vent se lève et Un
orage se prépare. Ces trois phrases favorisent chez l’élève la capacité de prédire sa
performance et donc de manifester la capacité d’aller au-delà d’une réalisation intuitive de
l’exercice.
Par ailleurs, l’exercice implique l’application partielle de processus conscients. En
effet, pour repérer les GN sujet et les GV, l’élève devra nécessairement procéder au
déclenchement des connaissances déclaratives à avoir sur les PMSV et appliquer
consciemment les procédures les concernant. En plus de ces préalables, nous notons que sur
les six phrases, l’intervention de processus cognitifs nous parait particulièrement
significative dans l’une d’entre elles pour repérer correctement les GN sujet et les groupes
verbaux. En effet, dans la 1re phrase, Alberto et sa sœur marchent gaiement, comme déjà
énoncé, les marques d’accord demeurent silencieuses et la particularité de l’agencement des
mots occupant la fonction syntaxique de sujet contenus dans cette phrase impliquent, à notre
avis, que l’élève soit attentif à la présence ou non de GN sujet. En fait, en s’appuyant sur la
définition d’un groupe nominal, qui stipule que ce dernier se définit comme un groupe de
mots qui tourne autour d’un mot noyau dont la catégorie grammaticale est un nom comme
dans Les élèves du collège/ Des habits propres/ La petite fille qui danse, etc.*, l’élève devra
déterminer si les sujets Alberto et sa sœur constituent un groupe nominal ou un groupe de
mots constitués de deux noms. Les cinq autres phrases présentent des GN sujets dont la tâche
d’identification nous parait plus coutumière de ce que les élèves rencontrent
généralement : De gros nuages, la lumière, le vent , un orage , les éclairs. Par ailleurs, si l’on
262
tient compte de la particularité des verbes « vont », et « sont », l’on facilite encore davantage
la tâche d’identification des GV dans le contenu de l’exercice. C’est principalement pour ces
mêmes raisons que nous trouvons que l’exercice implique partiellement l’application d’une
conscience métalinguistique.
Enfin, puisque le texte est intégralement et correctement rédigé pour l’élève et que la
seule exigence se réduit à repérer les GN sujet et les GV, il nous a paru que l’exercice ne
suggère aucune exigence secondaire autre que celle d’établir les PMSV.
Exemple d’exercice de la 6e catégorie
Dans la 6e et dernière catégorie, constituée également de trois exercices, nous avons
observé que les exercices offrent la possibilité de verbaliser et de contrôler
intentionnellement les connaissances de l’élève sur les PMSV. Ils impliquent également
l’application de processus conscients ainsi que celle d’une conscience métalinguistique.
Cependant, ils ne suggèrent aucune application d’exigences secondaires autre que le PMSV.
L’exercice qui suit est représentatif de cette catégorie.
263
L’exercice apparait dans la partie réservée aux exercices de révision. Il fait partie de
ces exercices qui exercent sur l’ensemble des leçons présentées de chaque séquence
pédagogique. Il est constitué de quatre questions portant chacune sur une des leçons
présentées dans la séquence pédagogique. La 3e question, celle qui nous intéresse, porte sur
la leçon Le sujet (cf. Règle 3). Dans cet exercice, nous pensons qu’il est offert à l’élève la
possibilité de verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances sur les PMSV
puisque ce dernier, pour relever les sujets contenus dans le poème, devra être conscient des
connaissances qu’il est amené à mobiliser pour réussir l’exercice. Celles-ci renvoient
principalement aux connaissances déclaratives à avoir et aux connaissances procédurales que
l’élève devra appliquer. Le déclenchement de la mobilisation de ces connaissances entraine
de fait l’application de processus conscients puisque la mise en relation entre le sujet et le
verbe, comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, fait intervenir des habiletés intellectuelles.
De même, l’exercice implique l’application d’une conscience métalinguistique, c’est-à-dire
que la mobilisation des savoirs théoriques et l’exécution des procédures nécessitent de l’élève
un traitement contrôlé de ses connaissances. Par ailleurs, l’exercice permet à l’élève d’être
conscient des caractéristiques propres à la langue si l’on s’appuie sur le fait que le poème
propose un vers sans sujet (Sois maudit nomade) , sujet sous-entendu puisque le verbe est
conjugué au mode impératif, trois vers composés de phrases nominales (Hurlement de la
ville, sauvage compagnon de l’araignée , frère du chameau ) et un vers constitué d’une
succession de noms renard voleur pillard traitre . De telles configurations de phrases
permettent à l’élève de mieux comprendre comment la langue peut être utilisée selon le genre
de texte et d’avoir une plus grande capacité d’analyse ainsi qu’un meilleur contrôle sur le
message véhiculé (El Euch, 2016).
Toutefois, nous trouvons que l’exercice ne suggère pas d’application d’exigences
secondaires en même temps que l’identification des sujets dans le poème puisque, comme
nous l’avons indiqué plus haut, les trois autres questions sont distinctes les unes des autres et
consistent à vérifier et consolider les acquis sur des connaissances précises. La 1re question
demande à l’élève de relever les mots ou les expressions de sens négatif et de déterminer le
champ lexical auquel ils appartiennent en fonction d’une série de thèmes présentée. La 2e
question demande à l’élève de relever les noms qui n’ont pas de déterminants dans le poème
et d’en donner les raisons. Enfin, la 3e tâche consiste à citer des exemples de sons qui se
264
répètent d’un vers à l’autre dans le poème. Si ces trois questions sont sans doute justifiées
puisqu’elles visent à vérifier et consolider les acquis sur les leçons portant sur le champ
lexical (question 1), le nom (question 2) et la versification (question 4), elles auraient gagné
à être reliées les unes aux autres pour que l’élève puisse mieux savoir comment approcher et
résoudre des problèmes impliquant des composantes linguistiques.
4.2.3.4 Le bilan de l’analyse
Au terme de notre analyse sur les connaissances implicites et les connaissances
explicites dans le manuel Le Français en 6e, nous retiendrons que les exercices sur les
phénomènes morphosyntaxiques entre le sujet et le verbe sélectionnés présentent des
caractéristiques des deux types de connaissances.
Nous avons observé qu’un seul des exercices sélectionnés, soit 6,66 %, présente
quelques caractéristiques des connaissances implicites. En effet, ce dernier peut être réalisé
en recourant à l’intuition du fait que la tâche de l’élève se réduit en grande partie à inscrire
mécaniquement la même lettre en fin de verbe. Pour ce qui est du recours au mode
d’apprentissage des connaissances implicites, une grande majorité des exercices ne
permettent pas de recourir à la fréquence d’associations d’éléments (87 % contre 13 %),
seulement 27 % des exercices peuvent être réalisés en s’appuyant sur la compétence d’usager
de l’élève et seulement 33 % exposent à des exemples positifs uniquement ou fréquemment.
En ce qui concerne les connaissances explicites, nos résultats montrent qu’en dehors
d’un seul exercice, tous les exercices sélectionnés (93 %) offrent la possibilité à l’élève de
verbaliser et de contrôler intentionnellement ses connaissances sur le PMSV abordé. En
interrogeant la capacité de l’exercice à faire intervenir l’application de processus conscients,
nous avons constaté que 27 % le font plus ou moins, 60 % permettent l’intervention de
processus cognitifs conscients et seulement un exercice favorise plutôt la réalisation intuitive
et mécanique de l’exercice. Pour ce qui est de la capacité des exercices à permettre
l’application d’une conscience métalinguistique, nos observations révèlent que 60% des
exercices pourraient faire intervenir inévitablement une activité métalinguistique contre
seulement 13%. Enfin, 67% ne suggèrent aucune application d’exigences secondaires, autre
que le PMSV en question.
265
4.2.4 L’analyse de la métalangue dans les exercices
Rappelons que la quatrième grille d’analyse sur les exercices vise à analyser la
conformité de la métalangue utilisée en ce qui concerne les PMSV dans les exercices
sélectionnés avec celle instituée par le programme officiel gabonais, notamment les
directives officielles sur l’enseignement et l’apprentissage du français au 1er cycle et les
différentes progressions proposées par l’Institut Pédagogique National du Gabon (Ministère
de l’Éducation Nationale, 1995; Ministère de l’Éducation nationale, 2010 ; Ngandu et al.,
2011; Inspection générale des services, 2016). Elle vise également à examiner la justesse de
cette métalangue en fonction des orientations fournies par la recherche, en plus de déterminer
si les exercices pourraient favoriser, outre une utilisation efficiente de la métalangue,
l’instauration d’un raisonnement structuré qui permette de construire des connaissances
métalinguistiques pérennes et opératoires sur les PMSV exercés (Grossmann, 1998; Dolz,
1998; Chartrand, 2012b; Chartrand et Lord, 2013; Boivin, 2014 ; Lord et Élalouf, 2016).
Pour atteindre ces objectifs, nous nous sommes appuyées sur les questions suivantes :
1. L’exercice utilise-t-il la métalangue conforme à celle instituée par le programme officiel
gabonais?
2. L’exercice adopte-t-il une métalangue juste répondant aux exigences de la recherche?
3. L’exercice favorise-t-il une acquisition efficiente de la métalangue?
4. L’exercice favorise-t-il l’instauration d’un raisonnement structuré qui contribue à la
construction de connaissances métalinguistiques pérennes et opératoires?
Pour répondre à ces questions, nous avons au préalable répertorié les passages
mentionnant de façon explicite les trois éléments faisant l’objet de notre étude, à savoir, le
verbe, le sujet et les PMSV.
Comme l’indique le tableau 41, l’examen des 15 exercices sélectionnés nous a permis
de dégager 14 exercices qui, soit dans le titre de la leçon annonçant la série d’exercices
d’entrainement ou d’application, soit dans la consigne mentionnent explicitement le verbe,
le sujet ou les PMSV.
266
Tableau 41: Exercices mentionnant un PMSV, le sujet et/ou le verbe dans Le Français
en 6e
P No/section Titre de la leçon Consigne de l’exercice
1 10 OA L’accord du verbe
avec son sujet Complète les verbes. Justifie ton choix en
indiquant très précisément quel est leur
sujet.
2 10 ER L’accord du verbe
avec son sujet
Mets les verbes au présent de l’indicatif.
3 14 ER-1 - Recopie les phrases suivantes puis
souligne d’un trait les groupes sujets et
de deux traits les groupes verbaux.
4 14 ER-2
-
Dans le texte suivant, distingue les G.N.
sujets, les G.V. et les G.N. circonstanciels.
Quel groupe nominal est remplacé par un
pronom?
5 16 4 - Identifie le G.N. sujet et le G.V. dans
chacune des phrases du texte suivant.
6 17 12 - Relève les sujets inversés.
7 17 13 - Complète la terminaison des verbes et
justifie-la en indiquant leur sujet.
8 17 14 - Les verbes sont notés en phonétique.
Orthographie-les correctement. Repère
bien le sujet de chaque verbe.
9 34 OA-a Le sujet -
10 34 OA-b Le sujet Dans le texte suivant, relève les sujets.
11 44 2 - Dans l’une des phrases de ce texte, le
sujet est sous-entendu : lequel? Quel mot
utiliserais-tu comme sujet, pour éviter
une répétition?
12 45 SC-22 - Relève les sujets des verbes du poème ci-
dessus et précise leur nature.
13 94 OA-a - Réécris le texte suivant en prenant pour
sujet de la phrase les G.N. soulignés.
14 94 OA-b - Réécris la suite du texte, en utilisant
« on » comme sujet des verbes soulignés.
267
4.2.4.1 L’analyse de la conformité de la métalangue utilisée dans les exercices en
fonction de celle instituée par le programme officiel gabonais
Comme annoncé plus haut, cette section analyse la conformité de la métalangue
utilisée pour le verbe, le sujet et les PMSV. Pour plus de clarté, nous avons présenté
séparément les observations effectuées sur chacun de ces éléments.
La conformité de la métalangue utilisée pour désigner le verbe
Pour rappel, l’analyse de la conformité de la métalangue utilisée pour désigner le
verbe s’est limitée à la définition qu’en donnent les textes officiels gabonais et celle proposée
par le manuel. Dans les textes officiels gabonais, le verbe est défini comme étant le
constituant essentiel du groupe verbal. Il vise à exprimer une action, un état ou un
changement d’état (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995). Il se caractérise à partir d’un
radical - qui peut changer -, par des variations qui peuvent être marquées par le jeu des
terminaisons et par l’emploi d’auxiliaires. L’ensemble de ces variations porte le nom de
conjugaison. Celle-ci donne ses spécifications par : la tournure, le mode, le temps, la
personne et le nombre. (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995).
Dans le manuel Le Français en 6e, quelques caractéristiques syntaxiques du verbe
sont présentées dans trois leçons en lien avec les exercices sélectionnés. Dans la leçon
L’accord du verbe avec son sujet144 , le manuel mentionne que « le verbe s’accorde en
personne et en nombre avec son sujet » (EDICEF, 2001b:10). Toutefois, dans la leçon Le
Sujet, si le manuel réitère le fait que le verbe s’accorde en nombre avec son sujet, la mention
de l’accord en personne est omise dans la règle y afférant145. À la place, on peut lire que « le
verbe s’accorde en genre*et en nombre avec son sujet » (EDICEF, 2001b:34). Il pourrait
s’agir d’une erreur involontaire des éditeurs. Toutefois, nous estimons qu’en glissant de telles
affirmations inexactes, on court le risque de voir s’installer ces connaissances erronées dans
la mémoire des élèves, ce qui pourrait à long terme constituer une entrave à leur
compréhension sur les relations qu’entretiennent la fonction syntaxique de sujet et le verbe.
Qu’à cela ne tienne, d’autres informations sur le verbe sont données dans la leçon L’accord
du verbe avec son sujet, particulièrement celle indiquant que le verbe peut avoir plusieurs
144 cf. règle 4. 145 cf. règle 3.
268
sujets et que, dans ce cas, il se met au pluriel. Dans la même règle, le manuel précise à quelle
personne doit se mettre le verbe lorsque les sujets sont de personnes différentes en indiquant
le cas où l’un des sujets est moi et le cas où l’un des sujets est toi. D’autres leçons sans lien
avec les leçons des exercices sélectionnés rappellent quelques caractéristiques syntaxiques
du verbe. C’est le cas de la leçon Le verbe : infinitif et groupe qui mentionne que « le verbe
est un mot variable » (EDICEF, 2001b:10) et la leçon Les verbes du dialogue (105) qui
indique que ces derniers peuvent être placés « avant ou après une phrase de dialogue ou encre
entre deux virgules, à l’intérieur d’une phrase » (EDICEF, 2001b:105).
D’autres leçons en lien avec les exercices sélectionnés portent sur la présentation de
traits morphologiques du verbe. Par exemple, la leçon portant sur la voix passive rappelle la
règle de conjugaison d’un verbe à un temps simple de la voix passive. Celle-ci indique qu’il
faut employer l’auxiliaire être suivi du « participe passé accordé avec le sujet » (EDICEF,
2001b:94). On trouve également des leçons sans lien avec les exercices sur les PMSV
sélectionnés portant spécifiquement sur la conjugaison des verbes. La leçon Le verbe :
infinitif et groupe (10) précise que l’ensemble des formes que peut prendre le verbe s’appelle
la conjugaison puis se termine par une brève description des trois groupes du verbe. Les
leçons Les verbes en -eler et eter (21) et Les verbes en -cer et -ger (24) portent sur la
conjugaison de ces verbes irréguliers. La leçon Le participe passé : terminaisons des 2e et 3e
groupes (80) indique les terminaisons des participes passés des verbes de ces deux groupes.
Diverses leçons proposent la conjugaison des verbes à des temps différents : Les autres temps
simples de l’indicatif (38), Être ou avoir (52), Les temps composés : passé composé et plus-
que-parfait (66), Les temps composés : passé antérieur et futur antérieur (80), la conjugaison
des verbes aux temps simples (94) et aux temps composés (108) à la voix passive, Le
conditionnel (122) et le subjonctif présent (136). Enfin, le manuel consacre deux pages à la
description d’un tableau de conjugaison dédié à la conjugaison des auxiliaires avoir et être,
de deux verbes du 1er groupe, de deux verbes dits réguliers du 1er groupe en -eler et -eter,
d’un verbe du 2e groupe et de onze verbes du 3e groupe.
Enfin, quelques leçons sans lien avec les exercices sur les PMSV sélectionnés
présentent des caractéristiques d’ordre sémantique du verbe. Par exemple, la leçon Les temps
du récit (98) rappelle une valeur du présent, du passé composé et de l’imparfait dans un récit
au présent et une valeur du passé simple et de l’imparfait dans un récit au passé. La leçon Les
269
verbes du dialogue (105) propose deux sens de certains verbes dits de dialogue, celui du
sentiment et de la nature de la réplique. Le manuel présente aussi la valeur de certains modes
et temps : L’emploi du conditionnel (126), L’emploi du subjonctif (132) et une courte
description des valeurs des temps composés (pages 66 et 80).
En nous appuyant sur les indications de ces deux références, l’examen des exercices,
comme l’illustre le tableau 42, nous montre que les éléments identifiés comme étant des
verbes dans les exercices sélectionnés correspondent tous, excepté un des éléments, à la
définition qu’en donnent les textes officiels gabonais. Plus précisément, lorsque dans les
consignes des exercices sélectionnés, il est demandé explicitement aux apprenants de
manipuler des verbes, ces derniers sont généralement correctement identifiés dans l’apport.
Cette identification se fait soit par une mise entre parenthèses, soit par l’inscription de la
presque totalité du verbe, soit par un marquage phonétique.
Cependant, une des phrases de l’un des exercices s’avère problématique. En effet,
dans la consigne, il est demandé à l’élève de substituer des sujets en relation à des verbes
soulignés en les remplaçant par le pronom on. Or, nous constatons que ce n’est pas le verbe
dans son intégralité qui est souligné mais uniquement son auxiliaire. Concrètement, dans la
phrase Des marais salants sont aménagés le long des côtes, seul l’auxiliaire sont est souligné
alors que le participe passé aménagés qui l’accompagne n’est pas souligné. On pourrait
penser qu’il s’agit encore là d’une erreur du manuel. Encore une fois, nous insistons sur le
fait qu’une telle profusion d’écueils dans un manuel ne pourrait être que préjudiciable pour
les élèves. Non seulement ceux-ci pourraient ne pas réussir à réaliser l’exercice mais en plus
de tels accrocs pourraient entrainer une forme de régression des savoirs sur les connaissances
sur les temps composés. En outre, en exposant les élèves à ce type d’irrégularités, on court
le risque d’entraver le processus d’acquisition sur la composition des temps composés. Or, si
l’on veut que les élèves construisent des connaissances solides sur la langue, il faudrait,
comme le souligne Chartrand (2012b), que les manuels fassent preuve de rigueur dans leur
contenu pour permettre aux élèves d’adopter une posture réflexive qui soit véritablement
formatrice.
Le tableau ci-dessous (tableau 42) résume les consignes et le contenu des exercices
identifiant ou mentionnant explicitement le verbe.
270
Tableau 42: Consignes et contenu des exercices identifiant explicitement le verbe P N0 Consigne de l’exercice Exemple de contenu de
l’exercice
10 OA Complète les verbes. Justifie ton
choix en indiquant très précisément
quel est leur sujet.
Il aperçu…soudain le monceau de
fèves d’où s’échappai…la fumée
10 ER Mets les verbes au présent de
l’indicatif.
Pierre et moi (refuser) votre
proposition.
17 13
Complète la terminaison des verbes
et justifie-la en indiquant leur sujet.
Entouré de ses pages et des griots
qui chantai…ses louanges,
Kabrin Kabra sorti…de son
palais.
17 14 Les verbes sont notés en phonétique.
Orthographie-les correctement.
Repère bien le sujet de chaque verbe.
« Que les voyageurs qui nous
[saly]… ainsi [ɑ̃tr].»
94 OA-b Réécris la suite du texte, en utilisant
« on » comme sujet des verbes
soulignés.
Des marais salants sont
aménagés le long des côtes.
La conformité de la métalangue utilisée pour désigner le sujet
Pour analyser la conformité de la métalangue utilisée pour désigner la fonction
syntaxique de sujet dans les exercices, nous nous sommes également appuyée sur la
définition qu’en fournissent les textes officiels en analysant sa conformité avec la définition
et les caractéristiques que propose le manuel dans les consignes des exercices, dans les titres
des leçons annonçant la série d’exercices ainsi que dans les règles proposées concernant le
sujet, comme le montre le tableau ci-dessous (cf. tableau 43).
271
Tableau 43: Titre des leçons et consignes utilisant le terme sujet dans Le Français en 6e
Page No/ section Titre de la leçon Consigne de l’exercice
10 OA - Complète les verbes. Justifie ton choix en
indiquant très précisément quel est leur sujet.
14 ER-1
L’accord du verbe avec son sujet
Recopie les phrases suivantes puis souligne d’un
trait les groupes sujets et de deux traits les
groupes verbaux.
14 ER-2
L’accord du verbe avec son sujet
Dans le texte suivant, distingue les G.N. sujets, les
G.V. et les G.N. circonstanciels. Quel groupe
nominal est remplacé par un pronom?
16 4 - Identifie le G.N. sujet et le G.V. dans chacune des
phrases du texte suivant.
17 13 - Complète la terminaison des verbes et justifie-la
en indiquant leur sujet.
17 14
-
Les verbes sont notés en phonétique.
Orthographie-les correctement. Repère bien le
sujet de chaque verbe.
34 OA-a Le sujet -
34 OA-b Le sujet Dans le texte suivant, relève les sujets.
44 2
-
Dans l’une des phrases de ce texte, le sujet est
sous-entendu : lequel? Quel mot utiliserais-tu
comme sujet, pour éviter une répétition?
45 SC-22 - Relève les sujets des verbes du poème ci-dessus et
précise leur nature.
94 OA-a - Réécris le texte suivant en prenant pour sujet de
la phrase les G.N. soulignés.
94 OA-b - Réécris la suite du texte, en utilisant « on »
comme sujet des verbes soulignés.
Avant d’énoncer les constats relevés, rappelons que les instructions officielles pour
l’enseignement et l’apprentissage du français au 1er cycle du secondaire gabonais définissent
le sujet comme étant une fonction exercée par un mot ou un groupe de mots qui, sur le plan
sémantique, désigne l’être ou la chose dont on dit ce qu’ils sont, ce qu’ils font ou ce qu’ils
subissent et qui, sur le plan syntaxique, commande l’accord du verbe. Les directives
officielles distinguent également, dans une tournure impersonnelle, le sujet logique et le sujet
grammatical146 (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:80) et évoquent les notions de
sujet inversé et de sujet éloigné147 (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995: 57).
146 Dans la phrase « il a été trouvé un parapluie », le pronom il est considéré comme le sujet grammatical puisque c’est lui
le donneur d’accord et le groupe nominal un parapluie est désigné comme sujet logique. 147 Le sujet inversé désigne l’élément ayant la fonction syntaxique de sujet lorsque ce dernier est postposé au verbe avec
lequel il est en relation. Le sujet éloigné désigne un sujet qui n’est pas directement placé avant ou après le verbe avec lequel
il est en relation.
272
Dans le manuel Le Français en 6e, diverses informations sur la fonction syntaxique
de sujet se retrouvent dans trois règles. La leçon L’accord du verbe avec son sujet mentionne
que le sujet peut être éloigné ou inversé du verbe avec lequel il est en relation (EDICEF,
2001b: 10). Dans la règle sur La phrase et ses constituants, on peut lire que « la phrase simple
est généralement constituée d’un groupe nominal sujet (ou du pronom qui le remplace) et
d’un groupe verbal » (EDICEF, 2001b: 14). Dans la leçon Le sujet, le manuel présente les
différentes catégories grammaticales que peut avoir la fonction syntaxique de sujet. Ce
dernier peut être un groupe nominal, un pronom et un verbe à l’infinitif. Plus loin, la règle
indique que ce « groupe nominal simple comprend un déterminant …et un nom » et qu’il
« peut être aussi un nom propre » (EDICEF, 2001b: 34). Dans les titres des leçons dans
lesquels se trouvent les exercices sélectionnés, la dénomination sujet est utilisé deux fois :
pour désigner quelques PMSV (L’accord du verbe avec son sujet) et pour désigner la
fonction syntaxique de sujet lui-même (Le sujet). Dans les consignes des exercices, la
fonction syntaxique de sujet est désignée douze fois. Elle est employée sous quatre formes :
sujet (5 fois), groupes sujets (1 fois), G.N. sujet (2 fois), sujet de chaque verbe ou sujet des
verbes (3 fois) et sujet de la phrase (1 fois).
En examinant l’exercice désignant la fonction syntaxique de sujet par l’étiquette
groupes sujets dans la consigne, et dans laquelle il est demandé à l’élève de souligner les
éléments ayant la fonction syntaxique de sujet dans des phrases, signalons que sur les cinq
éléments occupant cette fonction, au moins deux d’entre eux sont constitués d’un mot : Marie
a acheté des verres, des assiettes à fleurs et serviettes en papier : elle organise une fête. Dans
un autre exercice où il est demandé à l’élève de distinguer les G.N. sujets dans un texte, nous
notons, sur les cinq éléments ayant la fonction syntaxique de sujet, que quatre d’entre eux
sont constitués de mots qui ne sont pas des groupes nominaux (Bien avant Dakar, Saint-
Louis a été la plus grande des villes…- Elle fut, jusqu’en 1957, la capitale de la Mauritanie
et du Sénégal. - Aujourd’hui, elle a perdu de son importance…- elle compte près de cent
mille habitants…).
Ces observations mettent en lumière quelques discordances entre ce qui est énoncé
par les textes officiels gabonais et ce que propose le manuel en ce qui concerne la
dénomination qui doit être attribuée à la fonction syntaxique de sujet. D’abord, en dehors du
mot sujet et de la désignation sujet inversé, les dénominations groupes sujets, G.N. sujet,
273
sujet de chaque verbe ou sujet des verbes et sujet de la phrase n’apparaissent nulle part dans
les textes officiels gabonais pour désigner la fonction syntaxique de sujet comme c’est le cas
dans les consignes des exercices du manuel. En outre, le manuel semble ne pas distinguer un
groupe de mots d’un mot lorsqu’il évoque la classe grammaticale que peut avoir la fonction
syntaxique de sujet puisque selon lui, un nom propre ou un pronom ayant la fonction sujet
est aussi appelé groupe nominal sujet. Or, dans le programme proposé pour les classes de 6e
et de 5e, cette distinction entre un groupe nominal et un nom, quoiqu’implicite, est faite dans
les textes officiels comme l’illustre le passage suivant :
Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:22
Cette impression se confirme dans l’exercice ci-dessous. En effet, même s’il n’est pas
indiqué dans la consigne que les mots ou groupes soulignés dans l’apport sont des sujets,
puisque l’enjeu consiste pour l’élève à déterminer lui-même qu’il s’agit tous de sujets, l’on
note que l’un des mots soulignés (Samba), occupe la fonction syntaxique de sujet. Or, selon
la logique de la règle affiliée à l’exercice (cf. Règle 3), l’on s’attend selon toute vraisemblance
à ce que l’élève le désigne sous l’appellation groupe nominal sujet. Ce qui serait inexact,
puisqu’il ne s’agit pas ici d’un groupe nominal mais d’un nom148.
Un autre cas problématique dans le contenu du même exercice apparait. En effet,
parmi les trois éléments soulignés ayant la fonction syntaxique de sujet, l’un des sujets est
un groupe infinitif s’enfuir à toutes jambes. Or, la règle ne mentionne nulle part que le sujet
peut être également un groupe infinitif. Seul le fait que le sujet peut être un infinitif est
mentionné.
148 Encore une fois, précisons que cette distinction entre groupe nominal et nom ne s’applique pas dans certains systèmes
éducatifs comme au Québec ou en Suisse.
274
Enfin, le manuel réduit les éléments pouvant être des sujets à trois catégories
grammaticales quoique, comme nous l’avons observé, les éléments occupant cette fonction
dans les contenus de certains exercices appartiennent à d’autres catégories grammaticales.
Or, les textes officiels présentent, sous la forme d’exemples, plusieurs autres groupes de mots
pouvant exercer la fonction syntaxique de sujet comme des subordonnées.
La conformité de la métalangue utilisée pour désigner les PMSV
L’observation des titres annonçant les exercices et les consignes des exercices dans
le manuel Le Français en 6e montre que les appellations utilisées pour parler des PMSV sont
conformes à celles préconisées par les textes officiels gabonais. Pour parler de l’attribution
des traits grammaticaux du sujet au verbe, le manuel utilise le terme accord, comme on peut
le voir dans le titre L’accord du verbe avec le sujet (EDICEF, 2001 :10). Les textes officiels
recourent également à cette appellation. Par exemple, on peut lire la même appellation parfois
avec quelques variantes : « Accord du verbe avec le sujet » (Ministère de l’Éducation
Nationale, 1995:22) , « le sujet (accord) » (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:57),
« Accord du verbe avec son sujet » ( Ngandu et al., 2011 : 1), Accord sujet-verbe (Inspection
général des services, 2016 :1). De même, pour désigner le PMSV lorsque le sujet est placé
après le verbe, le manuel parle de sujet inversé (EDICEF, 2001 : 10; EDICEF, 2001 : 17)
tout comme les instructions officielles (Ministère de l’Éducation Nationale, 1995:57-60-61).
275
4.2.4.2 L’analyse de la justesse de la métalangue utilisée dans les exercices
Après avoir analysé la conformité de la métalangue utilisée pour désigner le verbe, le
sujet et les PMSV dans le manuel Le Français en 6e avec celle instituée par les directives
officielles pour l’enseignement et l’apprentissage du français au 1er cycle du secondaire
gabonais, la présente section a pour but de déterminer la justesse de cette métalangue avec
celle préconisée par la recherche.
Pour ce faire, rappelons que nous avons opté d’examiner si, dans les titres des leçons
annonçant les séries d’exercices sélectionnés, dans leurs consignes et dans leurs contenus,
les termes employés pour désigner les éléments à l’étude sont utilisés de façon rigoureuse.
Comme pour le point précédent, la justesse de la métalangue pour chacun des éléments à
l’étude est analysée séparément.
Analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner le verbe
Notre analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner le verbe s’appuie sur les
caractéristiques du verbe fournies dans le cadre conceptuel. Évoquons de nouveau que
l’examen s’est restreint aux verbes explicitement identifiés dans les exercices.
Les résultats de nos observations se trouvent résumés dans le tableau ci-dessous
(tableau 44). Comme l’indique le tableau, nos observations montrent que, de façon générale,
le manuel adopte une métalangue juste, exacte, et cohérente avec les principales
caractéristiques du verbe.
Toutefois, un des exercices, l’exercice OA-b page 94, reste problématique. La
consigne indique que des verbes sont soulignés. Ce qui est partiellement exact puisque dans
l’une des phrases (Des marais salants sont aménagés le long des côtes) où le verbe est censé
être souligné, seul l’auxiliaire sont est souligné et le participe passé aménagés ne l’est pas.
Or, dans cette phrase, le verbe être n’est pas le verbe de la phrase. Il s’agit plutôt du verbe
aménager, conjugué au passé composé passif.
276
Tableau 44: Justesse de la métalangue pour désigner le verbe dans Le Français en 6e
P N0
Caractéristiques du verbe Consigne de l’exercice et
exemple de phrase
Renvoie/
peut
renvoyer
à une
unité de
la phrase
Situe dans
le temps
les faits ou
évènement
dont il est
question
dans la
phrase.
Peut avoir
différentes
valeurs
(état ou
existence,
action,
opinion,
sensation,
etc.)
Possède / peut
posséder des
caractéristiques
morphologiques
et syntaxiques
10
OA
Oui
Oui
Oui
Oui
Complète les verbes. (…)
Pendant que les gardes régionaux
le conduisai…au commissariat
de police, il éprouvai…un
profond, très profond sentiment
de frustration.
10
ER
Oui
Oui
Oui
Oui Mets les verbes au présent de
l’indicatif.
Chacun de nous (vouloir) réussir.
17
13
Oui
Oui
Oui
Oui Complète la terminaison des
verbes (…)
Tout à coup, le ciel s’assombri…
17
14
Oui
Oui
Oui
Oui Les verbes sont notés en
phonétique. (…)
On lui [repɔ̃di]
94
OA-b
Oui/Non
Oui/Non
Oui/Non
Oui/Non
Réécris la suite du texte, en
utilisant « on » comme sujet des
verbes soulignés.
Ce procédé est utilisé pour isoler
le sel de l’eau de mer. Des marais
salants sont aménagés le long des
côtes.
L’analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner le sujet
L’analyse de la justesse de la métalangue utilisée pour désigner la fonction syntaxique
de sujet s’est faite en nous appuyant sur les titres des leçons annonçant les séries d’exercices
et les consignes des exercices sélectionnés. Comme relevé plus haut, la fonction syntaxique
de sujet est désignée sous cinq formes dans le manuel : 1) sujet, 2) groupes sujets, 3) G.N.
sujet, 4) sujet de chaque verbe ou sujet des verbes et 5) sujet de la phrase. Notons qu’en
dehors des désignations sujet et G.N sujet, aucune des règles évoquant les caractéristiques du
sujet ne mentionne que la fonction syntaxique de sujet peut être appelée groupes sujets, sujet
des verbes ou sujet de la phrase. Ces désignations n’apparaissent que dans les consignes des
exercices. Apparemment, le manuel les considère comme des synonymes des deux
appellations annoncées dans les règles. Ceci dit, toutes ces dénominations, excepté le terme
sujet lui-même, pose problème pour plusieurs raisons.
277
Dans l’exercice présenté ci-dessous, il est demandé à l’apprenant de souligner les
groupes sujets. Telle que formulée, la consigne semble suggérer à l’apprenant de repérer dans
les phrases tous les éléments ayant la fonction syntaxique de sujet. Or, sur les cinq sujets
présents dans l’apport, deux des sujets - Marie et elle - ne sont pas des groupes mais un nom
pour le premier cas et un pronom pour le second cas. Non seulement le manuel semble ne
pas dissocier le mot du groupe, mais en plus il suggère que la fonction syntaxique de sujet
s’associe au terme groupe. Or, associer systématiquement à la fonction syntaxique de sujet
le terme groupe est erroné et est susceptible de semer la confusion entre ce qui est désigné
par groupe et ce que l’on désigne par fonction. Comme le rappellent plusieurs didacticiens,
la notion de sujet ne désigne pas un groupe mais une fonction syntaxique ou une relation
syntaxique (Chartrand et al., 2010;Chartrand, 2012b : Lord et Élalouf, 2016). Le mot groupe
renvoie à un groupe de mots, un constituant ou une unité de la langue dont le mot noyau
appartient à une classe de mots. Enfin, en utilisant ce type de formulations, si l’on considère
la phrase Les murs de la maison seront repeints en blanc, le manuel met sur le même pied un
groupe de mots (le groupe nominal Les murs de la maison, par exemple) et sa fonction
grammaticale (sujet) dans la dénomination groupe sujet. Or, si le groupe sujet tient son nom
de la fonction qu’occupe ce groupe, il en est autrement pour le groupe verbal seront repeints
en blanc qui, lui, tient son nom de la classe de son noyau.
D’autres exercices, comme l’exercice ci-dessous, emploient G.N sujet pour désigner
la fonction syntaxique de sujet. Même si le GN est la réalisation la plus courante de la
fonction syntaxique de sujet, il n’assume pas toujours cette fonction. Par exemple, dans les
phrases Qui vivra verra* ou Faire du sport m’a aidé à perdre du poids*, l’élément ayant la
fonction sujet n’est pas un groupe nominal mais une subordonnée pour le premier cas et un
278
groupe infinitif pour le second cas. D’ailleurs, dans le texte proposé pour distinguer les G.N
sujets dans l’exercice, sur les cinq éléments ayant la fonction sujet (Cette ville de
pécheurs, Saint-Louis, elle (3 fois)), quatre d’entre eux ne sont pas des groupes nominaux.
Les élèves pourraient une fois de plus penser qu’on leur demande de repérer tous les sujets
contenus dans le texte et que ces sujets portent l’appellation G.N sujet, puisque la consigne
n’attire pas l’attention de l’apprenant sur ce fait. Ce qui pourrait accentuer les confusions des
élèves. Encore une fois, cette façon de nommer et de concevoir la fonction syntaxique de
sujet pourrait conduire à une conception erronée de la notion de sujet.
Ensuite, trois exercices recourent aux expressions sujet des verbes ou sujet de chaque
verbe pour désigner la fonction syntaxique de sujet comme le montre l’exercice ci-dessous.
Formulée ainsi, la consigne laisse entendre que le verbe et le sujet sont dans une relation de
dépendance. Or, comme l’explique Chartrand (2012b), le verbe reçoit la personne et le
nombre du nom sujet, du noyau du GN sujet ou du pronom sujet. De ce fait, ce n’est pas le
sujet qui détermine ou influence le verbe mais le nom, le noyau du GN ou le pronom qui
remplit la fonction sujet. En plus, en utilisant ce type de formulation, le manuel mélange deux
notions qui ne se situent pas sur le même paradigme : la notion de catégorie grammaticale
(verbe) et celle de fonction (sujet).
279
Dans le même ordre d’idées que la désignation précédente, l’appellation sujet de la
phrase pour nommer la fonction syntaxique de sujet, comme c’est le cas dans l’exercice ci-
dessous semble ne pas convenir pour parler de cette fonction. D’abord parce que si l'on étudie
l'usage que les grammairiens font du terme phrase, l’on constate les hésitations et les
confusions que suscite sa définition. En effet, selon Marchello-Nizia (1979), la grammaire
traditionnelle ou rénovée a recours, pour définir la phrase, à différents critères, donnés soit
comme absolus, soit comme complémentaires. Toutefois, l’analyse de chacun de ces critères
fait ressortir le fait qu’aucun d’eux ne peut constituer un critère absolu de reconnaissance de
la notion de phrase. Dès lors, il serait difficile de déterminer ce que l’on entend par sujet de
la phrase. Ensuite, en désignant ainsi la fonction syntaxique de sujet, on laisse entendre que
toutes les phrases comportent systématiquement un sujet en relation avec un verbe. Par
exemple, les phrases constituées d’un seul mot (Bravo!, Formidable!*) ou les phrases dont
le verbe est conjugué au mode impératif (Faites attention à cette formulation*) ne comportent
pas de sujet. En plus, en utilisant cette formulation, on mélange deux notions qui ne se situent
sur le même plan, la notion de phrase et la notion de fonction. La phrase fait partie du discours
ou du texte et peut être considérée comme un ensemble autonome porteur de sens tandis
qu’une fonction syntaxique établit une relation de dépendance, d’indépendance ou
d’interdépendance entre deux unités à l’intérieur d’une phrase. Enfin, l’expression sujet de
la phrase est ambigüe, car dans ce cas, de la phrase signifie que le sujet est une fonction de
la phrase. Le sujet désigne une fonction syntaxique d’une unité en relation d’interdépendance
avec une autre unité de la phrase, le verbe ou le groupe verbal149.
149 Ce verbe ou ce groupe verbal, dans d’autres pays de la francophonie, comme au Québec, occupe la fonction syntaxique
de prédicat.
280
En attribuant à la fonction syntaxique de sujet toutes ces variations terminologiques,
le manuel crée des amalgames qui pourraient nuire à la compréhension du système de la
langue. Si l’on veut que les élèves construisent des connaissances sur la langue qui soient
solides, il faudrait que le manuel Le français en 6e fasse preuve de constance et de rigueur et
évite de modifier sans cesse les termes de la métalangue.
L’analyse de la justesse des termes utilisés pour désigner les PMSV
L’examen de la justesse de la métalangue pour nommer les PMSV avec les
orientations de la recherche s’est basé sur deux dénominations : L’accord du verbe avec son
sujet (présent comme titre de leçon et de séries d’exercices portant sur les PMSV) et sujets
inversés (présent dans une des consignes des exercices).
Quoique présent dans les programmes officiels gabonais pour désigner l’attribution
des traits grammaticaux du sujet au verbe ou pour faire allusion aux contraintes d’expression
et de position du sujet et du verbe, l’emploi de la dénomination accord du verbe avec son
sujet reste problématique pour certaines raisons. Une des raisons est que les ouvrages n’en
donnent aucune définition claire (Chartrand, 2012b). Or, il est nécessaire pour les manuels
d’expliciter le sens des termes grammaticaux utilisés pour que la métalangue puisse jouer
son rôle comme celle de faire comprendre aux élèves les propriétés d’une notion. Ce constat
est visible dans le contenu de la règle consacrée aux PMSV dans le manuel Le Français en
6e (cf. Règle 4). Quoiqu’inscrit en gras dans la règle, le mot accord150 n’est associé à aucune
définition, ce qui ne permet pas aux élèves d’effectuer un véritable travail de
conceptualisation de cette notion d’accord. En fait, il ne suffit pas de mémoriser les
dénominations des notions pour en comprendre le sens. Il faut surtout que les apprenants
150 Précisons que le terme accord est écrit est présenté sous forme de verbe.
281
aient la capacité de connaitre et de comprendre les caractéristiques de ces notions, de saisir
comment elles sont liées à d’autres notions et être en mesure de justifier leur utilisation (Lord
et Élalouf, 2016). Par ailleurs, l’emploi du terme accord se révèle également inexact dans la
mesure où « les mots ne donnent ni ne reçoivent un accord; ils donnent ou reçoivent plutôt
des traits grammaticaux » Chartrand (2012b :3). En fait, les notions de donneur et de receveur
supposent un transfert de traits entre deux unités du système de la langue. Ces traits peuvent
être ceux du genre et du nombre lorsque le donneur est un nom ou un pronom et que le
receveur est soit un déterminant ou un adjectif. Ces traits peuvent aussi être ceux de la
personne et du nombre lorsque le donneur est un nom, noyau du groupe nominal, ou un
pronom ayant la fonction de sujet et que le receveur est un verbe. Ainsi, dans le groupe
nominal la fillette impatiente*, le nom fillette donne ses traits de genre (féminin) et de nombre
(singulier) aux receveurs que sont le déterminant la et l’adjectif impatiente. De même, dans
la phrase Vous marchez sous la pluie, le pronom personnel sujet vous donnent ses traits de
personne et de nombre (2e personne du pluriel ez) au verbe receveur marcher.
Règle 5: L'accord du verbe avec son sujet, p.10
Également présent dans de nombreux manuels scolaires et reconnu par les textes
officiels gabonais, il semble que la dénomination sujet inversé ou inversion du sujet soit
largement contestée par plusieurs chercheurs (Fuchs, Guimier, Fournier, et Le Querler, 1997;
Tamba-Mecz,1984; Haff, 2000; Fuchs,2006; Colin, 2011). Colin (2011) qui estiment que
cette appellation est non pertinente par rapport aux fonctionnements linguistiques et résulte
282
d’une sédimentation de couches théoriques et de surdéterminations sociales. Il propose dès
lors de choisir le terme postposition pour parler du PMSV lorsque le sujet est placé après le
verbe. En plus, cette formulation serait - entre autres - issue d’une grammaire qui pose un
ordre canonique à partir des arguments de la Logique et de L’usage évoqués par G. et R. Le
Bidois (1967) dans leur Syntaxe du français moderne comme le montre ce passage repris par
Tamba-Mecz : « l’arrangement typique du français S(sujet)-V(verbe) est conforme à la
logique ou tout au moins à l’usage le plus constant » (Tamba-Mecz, 1984:8).
En outre, Tamba-Mecz (1984) s’interroge sur l’emploi de cette terminologie qui
semble être consacrée dans la métalangue grammaticale alors que les termes d’antéposition
et de postposition sont couramment utilisés dans le cas de l’adjectif qualificatif par exemple.
En fait, selon Tamba-Mecz (1984), parler d’inversion du sujet laisse suggérer que lorsqu’on
parle d’inversion du sujet ou de sujet inversé, c’est non seulement dire que le sujet est
postposé au verbe mais aussi suggérer que cet ordre est « anormal » par rapport à l’ordre
inverse, qui lui serait régulier : sujet suivi du verbe ou sujet précédant le verbe. C’est
pourquoi elle préfère utiliser les termes antéposition et postposition. Cette opinion est
également partagée par Haff (2000), du moins en partie. En effet, elle ne partage pas l’idée
de Tamba-Mecz (1984) de rejeter le terme inversion du sujet/sujet inversé et même la notion
d’inversion du sujet sur le fait que les données sur lesquelles est fondée l’ordre S-V-O
comme étant régulier ou canonique sont contestables dans la mesure où seules les phrases
déclaratives sont prises en compte et en plus les « pronoms clitiques »151 (Haff, 2000 :21) ou
« pronoms personnels conjoints » (Tamba-Mecz,1984:10) et leur place dans la phrase sont
négligés. Par contre, Haff (2000) est d’avis avec Tamba-Mecz (1984) sur le fait que la notion
d’inversion du sujet présente l’inconvénient d’exclure la possibilité de considérer l’ordre
V(verbe) –S (sujet) comme une antéposition du verbe. Cette conviction s’appuie notamment
sur les travaux de Korzen (1996) qui démontre que l’inversion du sujet non conjoint152 est en
fait le résultat d’une transformation qui place le verbe minimal avant le sujet. Par conséquent,
151 Un pronom personnel est dit clitique ou conjoint lorsqu’il ne peut être séparé du verbe auquel il se rattache. Il est à la
fois libre morphologiquement et dépendant du point de vue syntaxique. C’est le cas des pronoms personnels sujets et
compléments dits faibles ou atones je, tu, il, elle, on, nous, vous, ils, elles, me, te, se, le, la, les, lui, leur, en, y. Ils s’opposent
aux formes disjointes dites toniques : moi, toi, lui, elle (s), eux, soi. (Source : http//fr.wiktionary.org/wiki/clitique). 152 Le français moderne distingue deux sortes de sujets différents : les sujets conjoints (je, tu, il, elle, nous, vous, ils, elles,
ce, on) et les sujets non conjoints (toutes les autres entités pouvant fonctionner comme sujet). Exemple de sujet conjoint
dans une construction inversée : Quand partira-t-elle? / Exemple de sujet non conjoint dans une construction inversée : À
quelle heure partira votre cousine? (Korzen, 1996 :59)
283
elle estime que le terme d’antéposition du verbe convient mieux lorsque c’est le syntagme
verbal qui est déplacé. Enfin, sur un autre plan, Fuchs (2006) réfute l’appellation inversion
du sujet/sujet inversé du fait de la pluralité des types d’énoncés où le sujet est placé après le
verbe même si dans les énoncés assertifs du français moderne, l’antéposition du sujet par
rapport au verbe ( ordre S-V) est statistiquement plus fréquente que sa postposition (ordre V-
S).
4.2.4.3 L’analyse sur une acquisition efficiente de la métalangue dans les
exercices
Pour rappel, ce troisième point consiste à examiner les exercices sélectionnés en
interrogeant leur capacité à favoriser l’acquisition de la métalangue sur les PMSV. Pour ce
faire, nous avons examiné les exercices sélectionnés en nous demandant s’ils permettent à
l’élève d’acquérir la métalangue utilisée dans le PMSV exercé et, par conséquent, de
permettre le développement de connaissances sur la langue.
Pour réaliser cette analyse, nous nous sommes appuyée sur trois
observables métalinguistiques153: 1) la métalangue que pourrait utiliser l’élève pour désigner
les PMSV dans la mesure où le recours à la métalangue au cours des exercices permet aux
élèves de livrer leurs observations concernant les phénomènes grammaticaux en plus de
permettre une réflexion et une analyse sur la langue (Chartrand, 2012b), 2) les manipulations
syntaxiques que pourrait entrainer l’exécution de l’exercice puisqu’ils permettent de
déterminer si les élèves utilisent ou non le métalangage dans leurs interventions (Lord et
Élalouf, 2016) et 3) les jugements de grammaticalité que pourraient exprimer les élèves en
exécutant l’exercice parce qu’ils reflètent la compétence linguistique des usagers et s’avèrent
utiles dans le travail sur la langue suite à l’application d’une manipulation syntaxique dans
la mesure où ils permettent de valider ou d’invalider les hypothèses émises par les élèves au
cours de l’exercisation ( Boivin, 2014).
Comme l’indique le tableau ci-dessous (tableau 45), les résultats obtenus indiquent
que sur les 15 exercices retenus, neuf exercices pourraient favoriser chez l’élève l’utilisation
de la métalangue et six pourraient être effectués sans désigner les phénomènes langagiers
présents dans les exercices. Nous avons observé en outre que 13 exercices pourraient
153 Ces trois observables nous ont été inspirés par Boivin (2014).
284
nécessiter le recours à des manipulations syntaxiques, un seul pourrait difficilement y
parvenir et un pourrait plus ou moins le permettre. Enfin, sur les 15 exercices, nos analyses
montrent que dix exercices pourraient offrir à l’élève la possibilité d’exprimer un jugement
de grammaticalité contre cinq. Pour justifier nos réponses, un ou deux exemples illustrent ces
observations.
Tableau 45: Analyse d'une acquisition efficiente de la métalangue dans les exercices
sur les PMSV
P R No L’exercice permet-il une acquisition efficiente de la
métalangue? SQ1 SQ2 SQ3
L’exercice
pourrait-t-il
favoriser
l’utilisation de la
métalangue?
L’exercice
pourrait- t-il
nécessiter le
recours à des
manipulations
syntaxiques?
L’exercice
pourrait- t-il
permettre
d’exprimer un
jugement de
grammaticalité?
1 10 O OA Non Oui Non
2 10 O ER Oui Oui Oui
3 14 G ER-1 Oui Oui Non
4 14 G ER-2 Oui Oui Non
5 16 G 4 Oui Oui Non
6 17 O 12 Oui Oui Non
7 17 O 13 Oui Oui Non
8 17 O 14 Non Oui Oui
9 34 G OA-a Oui Oui Non
10 34 G OA-b Non Non Non
11 44 G 2 Oui Oui Non
12 45 G SC-22 Oui Oui Non
13 94 C OA-a Non Oui/Non Oui
14 94 C OA-b Non Oui Oui
15 94 C ER Non Oui Oui
Exemples d’exercices favorisant l’utilisation la métalangue
Dans l’exemple 1, il est demandé à l’apprenant de relever les éléments ayant la
fonction syntaxique de sujet contenus dans le poème et de préciser en plus leur catégorie
grammaticale, ce qui pourrait favoriser le recours à la métalangue. En réalisant cette tâche,
l’élève est obligé de désigner explicitement les mots ou groupes de mots occupant la fonction
syntaxique de sujet. Ce qui contribue à favoriser le développement d’une attitude réflexive,
analytique et critique sur la notion de sujet et permet ainsi à l’élève de s’approprier les
285
connaissances sur la catégorie grammaticale des mots ou groupes de mots qui, dans une
phrase, peuvent occuper la fonction syntaxique de sujet. D’ailleurs, l’exercice offre
l’opportunité à l’élève de s’approprier le fait qu’un sujet peut se présenter sous plusieurs
formes : un groupe nominal (Le nomade entre), un pronom démonstratif
(Ceux…crachent…jettent…), un pronom relatif (ceux qui vénèrent…154 ), un pronom
personnel (Il quitte… - il n’entend que…).
Dans l’exemple 2, en examinant certains sujets, les élèves seront amenés à nommer,
du moins implicitement, leur catégorie grammaticale ou leur particularité pour réussir à
établir correctement le phénomène morphosyntaxique entre le verbe et le sujet. C’est le cas
du pronom moi dans l’item Pierre et moi (refuser)…, de la place du sujet dans la phrase
De l’horizon (arriver) de gros nuages, postposé au verbe avec lequel il est en relation, du
pronom chacun, noyau d’un groupe dans l’item Chacun de nous (vouloir)… et du pronom la
plupart dans « la plupart (espérer)… ».
154 Soulignons que pour certains didacticiens, la structure ceux qui vénèrent est un groupe pronominal. Il est constitué du
pronom noyau ceux et du complément du pronom qui vénèrent.
Exemple 2
Exemple 1
286
Exemple d’exercice ne favorisant pas l’utilisation de la métalangue
En analysant l’exercice ci-dessus, il nous a semblé que l’élève n’est pas véritablement
amené à désigner les notions grammaticales impliquées dans la réalisation de l’exercice
lorsqu’il exécutera ce qui est demandé par la consigne. En effet, en limitant la tâche de l’élève
à un relevé des éléments qui occupent la fonction syntaxique de sujet, rien ne l’oblige, a
priori, à désigner la fonction syntaxique de sujet au cours de la manipulation qu’il aura à
effectuer. En fait, nous pensons qu’il pourrait se limiter à l’identification du sujet en recourant
simplement aux procédures d’identification des sujets. Par exemple, pour trouver le sujet
dans la phrase Un enfant sur trois ne prend pas de petit déjeuner le matin, l’élève pourrait
simplement être amené à repérer le sujet en posant la question Qui est ce qui ne prend de
petit déjeuner le matin? * pour repérer le groupe nominal un enfant sans que cette
manipulation syntaxique ne l’invite nécessairement à préciser que un enfant occupe la
fonction sujet dans la phrase. Pour être amené à nommer les termes impliqués dans la
manipulation, la consigne aurait pu demander à l’élève de justifier sa réponse en expliquant
la procédure utilisée pour trouver le sujet. Dans ce cas, il aurait été obligé par exemple de
nommer ses connaissances tant déclaratives que procédurales pour repérer les verbes dans
les phrases puisqu’il aurait à justifier comment il a pu les reconnaître : Pour trouver le verbe,
j’ai cherché les mots qui se conjuguent… je les ai encadrés par ne…pas…j’ai essayé de les
effacer ou de les déplacer dans la phrase, etc. De même, il aurait à expliquer comment il a
procédé pour repérer les sujets dans les phrases soit en mentionnant ses connaissances
déclaratives sur cette fonction (je sais que le sujet peut être composé de plusieurs mots…je
287
sais que le sujet peut être un nom, un groupe nominal, un pronom, un groupe infinitif, une
subordonnée, …je sais qu’il peut être placé avant ou après le verbe, qu’il peut être éloigné
du verbe avec lequel il est en relation, etc.), soit en expliquant la procédure utilisée pour
trouver le sujet de la phrase : j’ai recouru à la manipulation syntaxique d’encadrement c’est
…qui pour trouver le sujet… », « J’ai posé la question qui est ce qui ne prend pas de petit
déjeuner? pour repérer le sujet », « J’ai réduit la phrase en une phrase minimale pour
repérer les éléments qui ne peuvent être supprimés », etc.
Exemple d’exercice pouvant nécessiter des manipulations syntaxiques
En examinant l’exercice ci-dessus, nous pensons que l’élève pourrait être amené à
recourir à des manipulations syntaxiques. Celles-ci surviendraient principalement dans la
procédure d’identification des sujets contenus dans le texte comme le demande la consigne.
Pour trouver le sujet sous-entendu comme demandé dans la consigne, l’élève pourrait avoir
recours à la manipulation syntaxique d’ajout pour trouver la phrase qui contient un sujet sous-
entendu. Pour ce faire, il devra repérer tous les verbes conjugués et déterminer les sujets en
relation avec lesdits verbes. Ces procédures d’identification des sujets pourraient conduire
l’élève à constater que dans une des phrases (Plonge tout entière dans sa minérale fraicheur),
le sujet en relation avec le verbe Plonge n’est pas mentionné. Ce qui l’amènerait à déterminer
avec quel sujet le verbe Plonge est en relation en posant par exemple la question qu’est ce
qui plonge…? * pour déterminer que c’est le groupe nominal ma main qui est sous-entendu.
288
Pour être certain de son analyse, il pourrait recourir à la manipulation syntaxique d’ajout
« Ma main* Plonge tout entière dans sa minérale fraicheur. ». En plus de cette manipulation
syntaxique d’ajout, l’élève pourrait recourir à la manipulation syntaxique d’encadrement
c’est…qui pour relever toutes les expressions qui ont la fonction sujet dans le texte. En plus,
en sachant, a priori, que dans une phrase, ni le sujet, ni le verbe ni le complément essentiel
ne peuvent être supprimés dans une phrase sans nuire à leur sens, il pourrait également utiliser
la manipulation syntaxique d’effacement en réduisant en une phrase minimale les phrases du
texte pour repérer les éléments qui ne peuvent être supprimés. Par exemple, l’effacement des
éléments non essentiels dans la phrase Dans le ciel violet, une lune énorme jette sa clarté
crue sur une mer de sable sans limite, pour obtenir la phrase minimale une lune jette sa
clarté*, permettrait à l’élève de déterminer que l’élément qui occupe la fonction syntaxique
de sujet dans la phrase est le groupe nominal une lune.
Exemple d’exercice ne nécessitant pas de manipulations syntaxiques
L’examen de l’exercice intitulé Observez, analysez/A, nous a amenée à considérer
que ce dernier pourrait ne pas nécessiter de l’apprenant le recours à des manipulations
syntaxiques. Lorsque la consigne demande à l’apprenant de préciser la fonction et la nature
des mots soulignés dans le texte alors que l’exercice se situe sur la même page que la règle,
nous trouvons que cette directive ne permet pas à l’apprenant de procéder à de réelles
interventions métalinguistiques, d’autant plus que l’exercice semble avoir pour but d’amener
289
les élèves à repérer et à nommer explicitement non seulement la fonction syntaxique de sujet
mais aussi à désigner les mots ou groupes de mots qui peuvent occuper cette fonction.
Comme indiqué dans le cadre conceptuel, les manipulations syntaxiques sont l’occasion de
savoir si les élèves utilisent ou non le métalangage dans leurs interventions (Boivin, 2014).
Pourtant, le fait que l’exercice soit disposé à côté de la règle pourrait entraver l’activité
métalinguistique de l’élève. Ce dernier pourrait se contenter de déterminer de façon intuitive
que les mots ou groupes de mots soulignés dans le texte occupent tous la fonction syntaxique
de sujet. En plus, tous les éléments soulignés occupent la fonction syntaxique de sujets et
sont, de surcroît, antéposés au verbe avec lesquels ils sont en relation. Pour favoriser une
attitude plus critique, l’exercice aurait pu proposer des cas où le sujet est postposé au verbe,
par exemple. Cela aurait pu susciter de l’élève une attention particulière dans la mesure où il
aurait été amené à recourir aux procédures d’identification des sujets pour s’assurer que les
mots et groupes de mots soulignés sont effectivement des sujets. Enfin, l’exercice aurait pu
souligner des mots ou groupes de mots qui n’ont pas tous la fonction sujet d’autant plus que,
a priori, les élèves de 1re année du secondaire ont déjà rencontré d’autres fonctions
syntaxiques au cours de leur scolarité au primaire, comme celle de compléments
circonstanciels, de complément d’objet, d’épithète, etc. Par exemple, souligner le groupe
nominal un jour situé en début de phrase dans Un jour, Samba, revenant seul des champs,
trouva un lion couché sur son chemin… aurait pu être une occasion d’amener l’élève à
procéder à un examen critique de l’identification du sujet en relation avec le verbe trouva
sans compter que le sujet Samba avec lequel le verbe trouva est en relation en est éloigné,
détaché et séparé du verbe par le groupe participe revenant seul des champs. Une telle
démarche aurait pu conduire les apprenants à comprendre que les mots antéposés au verbe
n’occupent pas systématiquement la fonction syntaxique de sujet. Une autre occasion de
conduire l’élève à une attention particulière sur la fonction des mots ou groupes de mots dans
une phrase aurait pu être de ne souligner que l’adjectif qualificatif redoutable en lieu et place
du groupe nominal le redoutable fauve, sujet en relation avec le verbe digérait. En procédant
de cette façon, l’élève aurait pu être amené à comprendre qu’un mot qui suit directement un
déterminant comme dans le redoutable fauve n’est pas obligatoirement le noyau d’un groupe
nominal. Toutes ces manipulations auraient pu contribuer à favoriser l’acquisition d’une
posture métalinguistique chez les élèves.
290
Exemple d’exercice offrant la possibilité d’exprimer un jugement de grammaticalité
Nous avons jugé que l’exercice ci-dessus fait partie de ceux qui offrent la possibilité
à l’élève d’exprimer un jugement de grammaticalité. Le fait que l’exercice porte sur le
passage de la voix active à la voix passive nécessite de l’élève qu’il apporte des modifications
sur le temps des verbes, sur l’élément occupant la fonction syntaxique de sujet et sur le
complément d’objet direct. Pour que l’exercice soit considéré comme réussi, il est nécessaire
pour lui de s’assurer de non seulement utiliser le temps correspondant à la voix passive mais
aussi d’être certain que l’aspect sémantique de la phrase ne soit pas modifié. En fait, s’il est
évident que dans la phrase à la voix passive le sujet subira l’action, il n’en demeure pas moins
que l’agent actif restera le même. Dès lors, pour l’élève, il ne s’agira pas de limiter la
transformation de la voix active à la voix passive en prenant pour sujet le complément d’objet
de la voix active et d’attribuer au verbe les marques d’accords appropriés, mais il devra veiller
à ce que le temps choisi exprime bien l’idée que le sujet de la phrase passive subisse l’action
et que l’élément agissant reste le même. Par exemple, dans la phrase Ngono vend des
légumes, le passage de la voix active à la voix passive entraine le fait que le groupe nominal
des légumes devienne le sujet de la phrase à la voix passive et que le sujet Ngono devienne
le complément d’agent. Dès lors, l’élève devra s’assurer de ne pas limiter la modification du
verbe en passant simplement de la 3e personne du singulier à la 3e personne du pluriel : Des
légumes vendent Ngono*. A priori, cette manipulation syntaxique de l’élève exigera de
l’élève qu’il pose un jugement de grammaticalité sur le résultat obtenu. Autrement dit, il
devra déterminer si cette phrase est jugée correcte dans sa langue. L’obtention d’un tel
résultat l’amènera à réaliser que cette phrase pose un problème sur le sens de la phrase et le
conduira à invalider cette hypothèse. Dès lors, pour obtenir un résultat tel que le GN Ngono
soit toujours l’élément agissant dans la phrase à la voix passive, il lui faudra envisager de
291
transformer le verbe de tel sorte qu’il le demeure. Ce qui l’amènera à proposer Des légumes
se vendent par Ngono, Des légumes seront vendus par Ngono, Des légumes sont vendus par
Ngono*, etc. Il ne lui resterait plus qu’à faire appel à ses connaissances sur la concordance
des temps.
Exemple d’exercice n’offrant pas la possibilité d’exprimer un jugement de grammaticalité
Nous estimons que cet exercice n’offre pas la possibilité à l’apprenant la possibilité à
l’apprenant d’exprimer un jugement de grammaticalité en partant du principe que cette
intervention survient lorsque, après une manipulation syntaxique, le locuteur éprouve le
besoin de déterminer si le résultat obtenu fait partie ou non de sa langue. En fait, l’élaboration
de l’exercice, ainsi que la tâche demandée par la consigne, pourrait ne pas obliger l’élève à
avoir recours à l’expression d’un jugement de grammaticalité. D’abord parce que le contenu
de l’exercice est déjà correctement rédigé pour l’élève et que rien n’indique dans la consigne
la présence d’erreurs. En plus, parce que l’élève pourrait limiter l’identification des éléments
occupant la fonction syntaxique de sujet en utilisant la stratégie qui consiste à repérer le sujet
en posant la question Qui est ce qui…?. Cette stratégie ne faisant pas intervenir l’application
d’une manipulation syntaxique, l’élève pourrait ne pas avoir besoin de valider ou d’invalider
ses hypothèses. D’ailleurs, la configuration de la plupart des phrases contenues dans
l’exercice pourrait inciter l’élève à recourir à cette stratégie. En effet, non seulement tous les
éléments occupant la fonction syntaxique de sujet sont antéposés au verbe mais en plus ils
sont placés juste avant les verbes avec lesquels ils sont en relation : Alberto et sa sœur
marchent gaiement ; Mais soudain, de gros nuages apparaissent à l’horizon ; La lumière
commence à baisser, le vent se lève ; Un orage se prépare ; Les éclairs vont tomber d’un
moment à l’autre ; Les éclairs sont l’un des phénomènes les plus impressionnants de la
nature.
292
4.2.4.4 L’analyse sur l’instauration d’un raisonnement structuré contribuant à
la construction de connaissances métalinguistiques sur les PMSV
Cette dernière question sur la métalangue dans les exercices sur les PMSV
sélectionnés vise à examiner si les exercices sur les PMSV sélectionnés pourraient favoriser
l’instauration d’un raisonnement structuré chez les élèves ou d’une activité métalinguistique.
Pour ce faire, nous avons décomposé la question principale en trois sous-questions comme
le décline le tableau ci-dessous (tableau 46).
De façon concrète, nous nous sommes posé les questions suivantes :
1) L’exercice pourrait-il amener l’élève à réfléchir sur les PMSV et sur leur
fonctionnement?
2) L’exercice pourrait-il permettre à l’élève de tenir un raisonnement cohérent et
structuré sur les PMSV?
3) L’exercice pourrait-il favoriser la construction de connaissances solides, pérennes,
utiles et opératoires155 sur les PMSV?156
Comme l’indique le tableau ci-dessous (tableau 46), à la question de savoir si les
exercices sur les PMSV sélectionnés pourraient favoriser chez les élèves l’instauration d’un
raisonnement structuré qui contribuerait à la construction de connaissances métalinguistiques
pérennes et opératoires, les observations suivantes se sont dégagées.
D’un côté, nous avons observé que sur les 15 exercices sélectionnés, quatre d’entre
eux contre trois pourraient contribuer véritablement à instaurer chez les apprenants le
développement d’un raisonnement structuré concourant à la construction de connaissances
métalinguistiques. Autrement dit, quatre exercices pourraient nécessiter de l’apprenant
l’intervention d’une activité métalinguistique tandis que les trois autres n’exigent pas de
l’apprenant une activité de réflexion sur le langage.
D’un autre côté, huit des exercices sélectionnés pourraient modérément parvenir à
instaurer chez l’élève un raisonnement structuré qui puisse lui permettre d’élaborer des
connaissances métalinguistiques sur les PMSV exercés. En fait, ces huit exercices peuvent
se subdiviser en deux sous-groupes : le 1er sous-groupe, constitué de quatre exercices,
155 Relatif aux moyens et aux processus mis en œuvre pour atteindre un but. 156 Pour répondre à cette question, nous nous sommes appuyées sur les résultats obtenus grâce aux trois observables du point
précédent.
293
regroupe les exercices dont la particularité est qu’ils ne répondent pas par l’affirmative à
l’une des sous-questions. Le 2e sous-groupe, composé de quatre exercices, rassemble ceux
dont la réponse à au moins une des trois sous-questions est Oui/Non, cette dernière réponse
exprimant que l’exercice peut, dans un certain sens, répondre par l’affirmative et dans un
autre sens par la négative.
Tableau 46: Analyse sur l'instauration d'un raisonnement structuré dans les exercices
du manuel Le Français en 6e
P
R
N0 L’exercice favorise-t-il l’instauration d’un raisonnement
structuré qui contribue à la construction de connaissances
métalinguistiques pérennes et opératoires?
SQ1 SQ2 SQ3
L’exercice pourrait-il
amener l’élève à réfléchir
sur les PMSV et sur leur
fonctionnement?
L’exercice pourrait-il
permettre à l’élève
de tenir un
raisonnement
cohérent et structuré
sur les PMSV?
L’exercice pourrait-
il
favoriser la
construction de
connaissances
solides, pérennes,
utiles et
opératoires157 sur
les PMSV?
1 10 O OA Oui Oui Oui
2 10 O ER Oui Oui Oui
3 14 G ER-1 Oui Oui/Non Oui/Non
4 14 G ER-2 Non Non Non
5 16 G 4 Non Non Non
6 17 O 12 Oui Non Non
7 17 O 13 Oui Oui Oui
8 17 O 14 Oui Oui Oui
9 34 G OA-a Oui/Non Non Oui/ Non
10 34 G OA-b Oui Oui Oui/ Non
11 44 G 2 Oui Oui Non
12 45 G SC-22 Oui Oui Non
13 94 C OA-a Oui Oui Non
14 94 C OA-b Non Oui/ Non Non
15 94 C ER Non Non Non
Les points suivants servent à illustrer les résultats des observations effectuées. Les
deux premiers points présentent un exemple d’exercice favorisant l’instauration d’un
raisonnement structuré et un exemple d’exercice ne favorisant pas l’instauration d’un
raisonnement structuré. Le dernier point décrit deux exemples d’exercices favorisant peu
l’instauration d’un raisonnement structuré, un pour chaque sous-groupe.
157 Relatif aux moyens et aux processus mis en œuvre pour atteindre un but.
294
Exemple d’exercice favorisant l’instauration d’un raisonnement structuré contribuant à
la construction de connaissances métalinguistiques
L’exemple ci-dessus est un exercice bilan proposé dans le cadre de l’appropriation
des connaissances sur la leçon L’accord du verbe avec son sujet. La tâche de l’élève consiste
à inscrire les terminaisons appropriées des verbes en italique et à les justifier en désignant les
sujets en relation avec ces verbes. Nous pensons que l’exercice favorise l’instauration d’un
raisonnement structuré contribuant à la construction de connaissances métalinguistiques pour
les raisons suivantes.
D’abord, pour ce qui est de la capacité de l’exercice à favoriser la réflexion chez
l’élève, nous avons répondu par l’affirmative pour deux raisons. La première s’appuie sur le
fait que sur les trois phrases contenant les verbes à compléter, deux d’entre elles présentent
la particularité d’être longues et enrichies d’expansions (Entouré de ses pages et des griots
qui chantai…ses louanges, Kabrin Kabra sorti…de son palais et Le coba, malgré les efforts
des guerriers, rompi…ses entraves et, génie, devin…une grande ombre qui se profilai…sur
le ciel sombre, tandis que les éléments se déchainai…et que la grande voix du coba
dominai…le tumulte et paralysai…la foule). Ces caractéristiques pourraient nécessiter de la
part de l’apprenant un effort cognitif considérable pour déterminer avec certitude les mots ou
groupes de mots occupant la fonction syntaxique de sujet en relation avec les verbes à
compléter. La deuxième raison s’appuie sur le fait que la construction même de certaines
phrases contenant les verbes à compléter nécessite de la part de l’élève une attention
particulière. Par exemple, si l’on examine les verbes à compléter dans Entouré de ses pages
295
et des griots qui chantai…ses louanges, …, l’indication du sujet en relation avec le verbe à
compléter chantai… pourrait obliger l’élève à procéder à un travail cognitif s’il veut
déterminer avec certitude avec quel sujet il est en relation. En l’absence de la deuxième
exigence de la consigne, notamment celle de justifier la terminaison inscrite en indiquant le
sujet avec lequel le verbe est en relation, l’élève aurait pu inscrire mécaniquement la marque
d’accord -ent en raison de la présence des deux groupes nominaux au pluriel (ses pages et
des griots) et ne pas réaliser que ce ne sont pas ces groupes nominaux qui occupent la fonction
sujet en relation avec le verbe chantai…mais plutôt le pronom relatif qui.
En plus des raisons évoquées plus haut, l’exercice favorise la tenue d’un raisonnement
qui soit structuré et cohérent dans la mesure où l’élève sera amené à appliquer les procédures
de mise en relation entre les sujets et les verbes à compléter pour pouvoir réussir à inscrire
les marques d’accord appropriées. Celles-ci peuvent consister à procéder
à la réduction des phrases en phrases minimales pour déterminer les sujets qui sont en relation
avec les verbes à compléter. Toutefois, nous trouvons que l’exercice aurait pu contribuer à la
mise en œuvre d’un raisonnement encore plus cohérent et structuré s’il avait exigé de l’élève
de rédiger correctement l’intégralité des verbes à compléter au lieu de lui suggérer d’avance
à quel temps les verbes sont conjugués puisque ces derniers laissent place à l’intuition de
l’élève qui sait d’avance qu’il lui faut inscrire les terminaisons du passé simple et de
l’imparfait.
Enfin, la présence de nombreux PMSV mis en jeu dans les phrases contenant les
verbes à compléter (PMSV lorsque le sujet est le pronom qui …qui chantai… ; PMSV en
règle générale …le ciel s’assombri… ; PMSV lorsque le sujet est éloigné du verbe avec
lequel il est en relation Le coba…rompi…ses entraves et, génie, devin… ; PMSV lorsque le
sujet est en relation avec plusieurs verbes …la grande voix du coba dominai…le tumulte et
paralysai…la foule) favorisent chez l’élève l’appropriation des diverses connaissances qui y
sont liées. Nous pensons que le fait d’amener les élèves à manipuler divers PMSV dans un
même texte pourrait contribuer à faire en sorte que les apprenants y recourent plus
fréquemment dans leurs propres écrits et ainsi contribuer à construire des connaissances qui
soient solides, pérennes, utiles et opératoires.
296
Exemple d’exercice ne favorisant pas l’instauration d’un raisonnement structuré
contribuant à la construction de connaissances métalinguistiques
L’analyse de l’exemple choisi, dont le but est entre autres de repérer les éléments
occupant la fonction syntaxique de sujet dans le texte proposé, nous a amenée à considérer
que l’exercice offrait de façon insatisfaisante l’instauration d’un raisonnement structuré
contribuant à la construction de connaissances métalinguistiques. Cette conclusion émane du
fait que nous avons constaté que les différents sujets contenus dans l’extrait de texte proposé
sont peu variés. En effet, sur les cinq sujets présents dans le texte, le pronom personnel elle
occupe trois fois la fonction syntaxique de sujet en plus des sujets Cette ville de pêcheurs et
Saint-Louis158. En outre, tous les sujets du texte sont immédiatement antéposés au verbe avec
lesquels ils sont en relation. Ce qui, à notre avis, restreint la sollicitation d’une réflexion
approfondie et pourrait conduire les élèves à un repérage réflexe plutôt que réflexif. Ces
particularités pourraient avoir une incidence sur une exécution raisonnée et cohérente de
l’exercice. Plusieurs travaux, comme ceux de Nadeau et al. (2011), rappellent que les élèves
sont très tôt sensibles à de telles régularités. Les élèves pourraient par conséquent avoir
tendance à écrire le pronom elle au singulier, même dans un contexte où il devrait être au
158 Rappelons que le manuel attribue à la fonction syntaxique de sujet au moins cinq dénominations dont celle de groupe
nominal sujet. Dès lors, aucune distinction n’est faite entre un nom sujet, un pronom sujet ou un groupe nominal sujet
lorsque le manuel fait allusion à la dénomination G.N sujet pour désigner la fonction syntaxique de sujet.
297
pluriel. En exposant les élèves à des configurations de phrases où les sujets sont
systématiquement placés immédiatement après le verbe avec lequel ils sont en relation ou
identiques, configurations qu’ils ont tendance à produire le plus souvent dans la rédaction de
leurs écrits, nous pensons que l’exercice n’oblige pas les élèves à appliquer les procédures
d’identification des éléments occupant la fonction syntaxique de sujet. Or, ces procédures
obligent l’élève à fournir un effort cognitif pour les réaliser correctement. Enfin, l’exercice
pourrait difficilement permettre à l’élève de construire des connaissances métalinguistiques
sur les PMSV qui soient solides et utiles non seulement parce que l’appellation groupe
nominal sujet n’est applicable que pour un seul des éléments occupant la fonction syntaxique
de sujet (Cette ville de pêcheurs ) mais aussi parce que les éléments occupant la fonction
syntaxique de sujet (groupe nominal, nom, pronom personnel) sont ceux que les élèves
maitrisent généralement le mieux.
Exemples d’exercices favorisant peu l’instauration d’un raisonnement structuré
contribuant à la construction de connaissances métalinguistiques
Exemple 1 : exercice ne répondant pas par l’affirmative pour au moins une des sous-
questions
298
Nous pensons que l’exercice ci-dessus aurait pu favoriser chez l’apprenant
l’instauration d’un raisonnement structuré qui aurait contribué à la construction de
connaissances métalinguistiques sur les PMSV et leur fonctionnement. En demandant aux
apprenants de ne relever que les sujets postposés aux verbes avec lesquels ils sont en relation
dans le texte, la consigne oblige l’élève à recourir à un effort cognitif, notamment celui du
déclenchement des procédures d’identification des sujets pour toutes les phrases. En plus,
l’exercice présente l’avantage de présenter des phrases où le sujet en relation avec le verbe
n’est pas postposé au verbe mais antéposé au verbe (…la vie s’écoulait… - … les courtisans
vinrent …). Ce qui lui permet de faire attention à ne distinguer que les sujets qu’on lui
demande de relever et à ignorer les sujets antéposés. Toutefois, nous trouvons que l’un des
sujets postposés à relever ne sollicite pas de l’apprenant de faire appel à un raisonnement
structuré et cohérent satisfaisant puisqu’il est directement postposé au verbe avec lequel il en
relation (…quand arriva l’avènement de Kabrin Kabra). Seul l’autre sujet postposé nécessite
véritablement un examen minutieux dans la mesure où, en plus d’être postposé au verbe avec
lequel il est en relation, il présente la particularité d’en être éloigné (…vivait dans cette
contrée florissante un peuple heureux et prospère). Dans cette phrase, pour déterminer avec
certitude le groupe nominal en relation avec le verbe vivait, nous pensons que l’élève pourrait
être obligé de mettre en œuvre un effort cognitif plus poussé en appliquant nécessairement
les procédures d’identification du sujet acquises. Par ailleurs, nous trouvons l’effort cognitif
de l’élève réduit lorsque la consigne indique explicitement à l’élève la présence de sujets
postposés dans le texte. L’exercice aurait pu demander à l’élève de relever tous les sujets
présents dans le texte et demander à l’élève d’exprimer ses constatations quant à leur place.
Une telle directive aurait pu favoriser de façon plus satisfaisante plus d’analyse de la part de
l’élève et l’amener de ce fait à noter la présence de sujets antéposés et de sujets postposés
aux verbes avec lesquels ils sont en relation. Un autre inconvénient de l’exercice est que
l’apport présente peu de cas où les sujets sont postposés aux verbes avec lesquels ils sont en
relation. Ce qui limite, selon nous, les occasions pour l’élève de s’exercer au PMSV lorsque
le sujet est postposé au verbe avec lequel il est en relation. Dès lors, nous trouvons que cet
exercice ne permet pas véritablement à l’apprenant de construire des connaissances sur les
PMSV qui soient solides, pérennes, utiles et opératoires.
299
Exemple 2 : exercice dont la réponse à au moins une des trois sous-questions est
Oui/Non
L’exercice ci-dessus a pour but d’entrainer les élèves à repérer la fonction syntaxique
de sujet dans une phrase et à déterminer les différentes classes grammaticales que cette
fonction peut occuper. En proposant l’exercice sur la même page que la règle, nous pensons
qu’il sollicite peu les connaissances de l’élève sur les procédures d’identification du sujet et
partant ne permet pas véritablement à l’élève de mettre en œuvre les stratégies acquises pour
pouvoir correctement repérer la fonction sujet dans une phrase. En fait, une telle disposition
pourrait entrainer de la part de l’élève une exécution mécanique de la tâche qui lui est
demandée puisqu’il pourrait, en s’appuyant sur la logique du manuel, présumer que les mots
et groupes de mots soulignés occupent tous la fonction syntaxique de sujet. Néanmoins, cette
exécution pourrait ne pas être systématique puisque les mots ou groupes soulignés, bien que
tous des sujets, ont la particularité de ne pas tous appartenir aux catégories grammaticales
proposées dans la règle. En effet, dans la règle, il y est fait mention que la fonction syntaxique
de sujet peut être un groupe nominal, un pronom et un infinitif. Lorsqu’on examine les mots
ou groupe de mots soulignés, les sujets soulignés ont pour catégorie grammaticale en plus du
pronom (on) et du groupe nominal (le redoutable fauve), un nom (Samba) et un groupe
infinitif (S’enfuir à toutes jambes).
Ce sont d’ailleurs ces distinctions qui nous ont conduite à considérer que l’exercice
entrave la tenue d’un raisonnement cohérent et structuré sur les appellations appropriées à
attribuer aux classes grammaticales que la fonction sujet peut occuper. En fait, l’examen du
contenu de la règle affiliée à l’exercice et les éléments soulignés dans le contenu de l’exercice
laissent croire que le manuel ne fait pas de distinction entre le groupe nominal et le nom et
300
l’infinitif et le groupe infinitif. Nous nous expliquons. Dans la règle (cf. Règle 3), on peut lire
que « le groupe nominal simple comprend un déterminant et un nom » suivi d’un exemple
(Le troupeau avance lentement) où le groupe nominal Le troupeau est mis en gras pour
montrer qu’il désigne ce que le manuel entend par groupe nominal simple. Sur ce point, nous
nous sommes interrogée sur le sens attribué à l’étiquette groupe nominal simple en nous
demandant si le manuel estime qu’il existe d’autres formes de groupes nominaux puisqu’il
semble qu’un groupe nominal se définit comme un groupe de mots dont le mot noyau est un
nom quelle que soit sa composition. Il semblerait dès lors que pour le manuel, dans la phrase
Donne-moi le stylo rouge qui est sur la table*, le groupe nominal le stylo rouge qui est sur
la table soit une forme particulière de groupe nominal. Malheureusement, il serait difficile
de vérifier cette hypothèse puisque le manuel ne parle que de groupe nominal simple. Nous
notons par la suite que le manuel affirme que le groupe nominal peut être aussi un nom propre
en proposant comme exemple Mandela était radieux, le nom Mandela mis également en
gras. À l’évidence, pour le manuel, Le troupeau et Mandela sont tous deux des groupes
nominaux. L’idée que le manuel ne distingue pas le groupe nominal du nom est renforcée
par le fait que la règle se limite à affirmer que la fonction sujet peut être occupée par un
groupe nominal sans mentionner qu’elle peut aussi être occupée un nom. Dès lors, il serait
permis de penser que le manuel considère qu’un infinitif est également un groupe infinitif
puisque dans la règle, on peut lire que la fonction sujet peut être un infinitif Fumer nuit à la
santé alors que l’un des éléments soulignés dans le texte propose non pas un infinitif mais un
groupe infinitif (S’enfuir à toutes jambes lui apparut la seule attitude sensée…).
Pour finir, nous considérons que la présence de toutes ces affirmations floues,
incohérentes et inexactes sur la distinction entre les notions groupe/mot, nom/groupe nominal
et infinitif/ groupe infinitif sur les catégories grammaticales que peuvent occuper la fonction
syntaxique de sujet notamment, ne pourraient favoriser la construction de connaissances
solides, pérennes, utiles et opératoires. À cela s’ajoute le fait que les mots ou groupes de mots
soulignés dans le contenu de l’exercice occupent tous la même fonction syntaxique. Or, en
variant les fonctions à trouver, l’exercice aurait pu favoriser chez l’apprenant l’intervention
de plusieurs connaissances métalinguistiques.
301
4.2.4.5 Le bilan de l’analyse
L’examen de la quatrième grille dans le manuel Le français en 6e indique divers
résultats. En ce qui concerne la conformité de la métalangue utilisée dans le manuel en
fonction de celle utilisée par les textes officiels gabonais, plusieurs points sont apparus.
D’abord, pour ce qui est de la conformité de la métalangue utilisée pour désigner le verbe,
l’analyse montre que les éléments désignant les verbes correspondent dans la grande majorité
des cas aux caractéristiques énoncées par les textes officiels. Toutefois, dans un exercice, le
manuel présente une erreur en ne soulignant que l’auxiliaire d’un verbe conjugué à un temps
composé. De telles maladresses peuvent entraver l’identification exacte des verbes lorsqu’ils
sont conjugués à un temps composé d’autant plus que les enseignants et surtout les élèves
manifestent très souvent une foi naïve pour les contenus des manuels scolaires. En effet,
parce qu’ils sont traditionnellement produits par d’autres enseignants, ces derniers ne
sauraient en suspecter la compétence disciplinaire et pédagogique. La conformité de la
métalangue pour désigner la fonction syntaxique de sujet laisse également apparaitre
plusieurs discordances. En effet, le manuel propose des désignations qui n’apparaissent nulle
part dans les textes officiels gabonais comme celles de groupes sujets, G.N. sujet, sujet de
chaque verbe ou sujet des verbes et sujet de la phrase pour nommer la fonction sujet. En
outre, le manuel limite les éléments pouvant occuper la fonction syntaxique de sujet à trois
catégories grammaticales alors que les textes officiels font allusion, en plus de ceux cités par
le manuel, à d’autres éléments pouvant occuper cette fonction. Seule la métalangue utilisée
pour désigner les PMSV reste conforme à celle préconisée par les textes officiels gabonais
puisqu’on y retrouve, en plus d’autres appellations présentées comme synonymes, la
dénomination accord du verbe son sujet.
Pour ce qui est de la justesse des termes utilisés en fonction des orientations de la
recherche, les observations sont similaires à celles constatées pour désigner la conformité des
termes utilisés pour désigner le verbe et la fonction syntaxique de sujet avec les textes
officiels gabonais. En effet, la dénomination faite d’un verbe dans le manuel reste inexacte
puisque le manuel désigne comme étant un verbe un auxiliaire en le dissociant du participe
passé avec lequel il est relié. De même, la plupart des termes utilisées pour désigner le sujet,
en dehors du mot sujet lui-même, s’avère problématique. En effet, le manuel attribue à cette
fonction une multitude d’appellations : groupes sujets, groupe nominal sujet, sujet de verbe
302
et ses dérivés et sujet de la phrase. L’appellation groupe sujet est problématique, puisque le
manuel associe à la fonction sujet le terme groupe. Or, ces deux termes ne se situent pas sur
le même plan. La dénomination groupe nominal sujet reste inexacte car le GN n’assume pas
toujours cette fonction de même que le sujet n’est pas systématiquement un GN. En recourant
à la désignation sujet du verbe et ses équivalents, le manuel laisse suggérer que le verbe et le
sujet sont dans une relation de dépendance. Or, le sujet ne détermine ni n’influence le verbe :
c’est plutôt le nom, le noyau d’un groupe ou le pronom qui remplit cette fonction. Appeler la
fonction syntaxique de sujet sujet du verbe revient à associer deux notions qui ne se situent
pas sur le même paradigme, celle de notion et celle de fonction. Enfin, l’appellation sujet de
la phrase est problématique car, d’une part, la notion même de phrase est source de
confusions, puisque sa définition s’appuie sur différents critères qui ne peuvent être
considérés comme critères absolus de reconnaissance de la notion de phrase et, d’autre part,
on laisse ainsi suggérer que toutes les phrases comportent systématiquement un sujet.
L’étude sur la capacité des exercices à favoriser une acquisition efficiente de la
métalangue sur les PMSV montre les résultats suivants. Sur les 15 exercices, 60 % contre 40
% pourraient obliger l’élève à recourir à la métalangue pour réaliser l’exercice, 86 %
pourraient nécessiter des élèves qu’ils emploient nécessairement des manipulations
syntaxiques pour effectuer l’exercice, 6,66 % pourrait plus ou moins obliger les élèves à
recourir à des manipulations syntaxiques et 6,66 % ne pas exiger des apprenants qu’ils
recourent à des manipulations syntaxiques. Sur la possibilité d’exprimer un jugement de
grammaticalité, les résultats montrent que 33,33 % des exercices pourraient conduire
l’apprenant à l’expression d’un jugement de grammaticalité contre 66,66 %.
Enfin, l’analyse sur la capacité des exercices à favoriser l’instauration d’un
raisonnement structuré et cohérent contribuant à la construction de connaissances
métalinguistiques a montré que si l’on considère le nombre de réponses totalisées, soit 45 au
total, pour les trois sous-questions utilisées pour les 15 exercices sur les PMSV sélectionnés,
il ressort que 22 % des exercices pourraient déclencher de façon satisfaisante une activité de
réflexion sur les PMSV et leur fonctionnement, 13 % pourraient modérément y parvenir et
47 % favorisent peu l’instauration d’une activité métalinguistique.
303
CHAPITRE 5 : L’INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS
Ce chapitre présente une interprétation des résultats obtenus dans le chapitre
précédent. Avant de procéder à l’interprétation proprement dite, nous rappelons notre objectif
général de recherche ainsi que nos objectifs spécifiques afin de mieux cerner les réflexions
qui vont suivre. Les quatre sections qui suivent sont organisées selon l’articulation faite pour
analyser les exercices sur les PMSV dans les deux manuels scolaires. La première consiste
en une synthèse des résultats sur la typologie des exercices sur les PMSV dans les deux
manuels scolaires analysés. La deuxième section est réservée à la considération faite aux
connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans les deux manuels. La
troisième section s’emploie à présenter les faits saillants en ce qui concerne les connaissances
implicites et les connaissances explicites dans les deux manuels. Enfin, la quatrième et
dernière section porte sur l’analyse de la métalangue. Ce sera l’occasion de faire ressortir,
outre des profils analogues entre les exercices sur les PMSV des deux manuels, certaines
caractéristiques distinctives.
304
5.0 Le rappel des objectifs de recherche
Objectif général de recherche : Décrire et analyser les exercices sur les phénomènes
morphosyntaxiques entre la fonction syntaxique de sujet et le verbe contenus dans deux
manuels scolaires utilisés dans les classes de 1re année du secondaire.
Nous avons examiné la capacité des exercices sur les PMSV à favoriser une
acquisition effective des connaissances sur les PMSV dans deux manuels officiels analysés.
Pour ce faire, nous nous sommes appuyée essentiellement sur les orientations de la recherche.
Notre recherche étant une recherche à caractère exploratoire, nous ne pouvions à l’avance
déterminer les moyens qui nous permettraient de parvenir à l’atteinte de notre objectif
général. Les investigations nous ont conduite à retenir quatre approches permettant
d’analyser des exercices sur les PMSV et contribuer à une acquisition des PMSV. Ces quatre
approches ont fait émerger quatre objectifs spécifiques dont voici le rappel.
Objectif spécifique 1 : décrire et analyser les exercices sur les PMSV suivant la typologie
élaborée
Ce 1er objectif spécifique a permis de déterminer, selon une classification élaborée à partir
de typologies d’exercices existantes, une typologie d’exercices sur les PMSV dans deux
manuels scolaires officiels utilisés au Gabon. Nous avons d’abord déterminé la catégorie à
laquelle appartiennent les exercices sur les PMSV dans les manuels afin de savoir s’ils entrent
dans la catégorie des exercices sur les PMSV de type intuitif/automatique/réflexe ou s’ils
appartiennent à la catégorie des exercices sur les PMSV de type analytique/
intellectuel/réflexif. Ensuite, nous avons examiné la forme à laquelle correspondent les
exercices. Il a s’agit d’observer si les exercices permettent de développer partiellement
l’appropriation du PMSV ou s’ils favorisent un raisonnement complet sur le PMSV exercé.
Les résultats obtenus ont permis d’établir le (s) types auxquels appartiennent les exercices
sur les PMSV. Enfin, nous avons observé des configurations d’exercices sur les PMSV qui,
selon la recherche, permettent aux apprenants d’acquérir des connaissances satisfaisantes sur
les phénomènes morphosyntaxiques dans la mesure où, d’une part, ils contribuent à faire
réfléchir les élèves et, d’autre part, ils permettent une appropriation efficace de la métalangue.
Ces exercices se sont distingués par leur capacité à faire émerger les représentations
métalinguistiques des apprenants.
305
Objectif spécifique 2 : décrire et analyser les connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles dans les exercices sur les PMSV.
Le deuxième moyen auquel nous avons eu recours a été de nous appuyer sur les
apports des connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles. Ce choix s’est
principalement justifié par le fait que ces trois connaissances sont considérées comme
fondamentales dans toute perspective pédagogique (Tardif, 1997; Nadeau et Fisher, 2006).
Concrètement, nous avons examiné dans les exercices sur les PMSV la considération faite à
ces trois connaissances en étudiant d’une part, celles convoquées dans les exercices et en
observant, d’autre part, dans quelle mesure leurs caractéristiques sont prises en compte.
Objectif spécifique 3 : décrire et analyser les connaissances implicites et les connaissances
explicites dans les exercices sur les PMSV
Le troisième objectif spécifique a été de considérer la présence des caractéristiques et
du recours au mode d’apprentissage des connaissances implicites et des connaissances
explicites. Selon la recherche (Rey, Pacton et Perruchet, 2005 ; Nadeau et Fisher, 2011), elles
ont non seulement un effet sur l’apprentissage des élèves mais aussi sur l’acquisition des
connaissances sur les phénomènes morphosyntaxiques.
Objectif spécifique 4 : décrire et analyser la métalangue dans les exercices sur les PMSV
Enfin, le quatrième objectif spécifique a consisté à étudier la métalangue dans les
exercices sur les PMSV dans les deux manuels. L’adoption de cet outil s’explique entre autres
par le fait qu’utilisée d’une façon rigoureuse, pertinente, cohérente et juste, elle constitue un
moyen efficace pour développer chez les élèves des connaissances sur la langue qui soient
solides, pérennes, utiles et opératoires, en plus de contribuer à l’instauration d’un
raisonnement structuré (Chartrand, 2012b; Lord et Élalouf, 2016). Concrètement, nous avons
examiné certaines conditions de son utilisation en étudiant : 1) sa conformité avec celle
instituée par les textes officiels gabonais, 2) sa justesse en fonction des orientations de la
recherche, 3) la capacité des exercices à favoriser une acquisition de la métalangue sur les
PMSV et 4) la capacité des exercices à instaurer un raisonnement structuré contribuant à la
construction de connaissances métalinguistiques sur les PMSV.
Les sections qui suivent présentent une interprétation de nos analyses.
306
5.1 La typologie des exercices sur les PMVS dans les manuels
scolaires analysés
5.1.1 Une nette propension d’exercices de type analytique/intellectuel/réflexif
Comme l’indiquent les figures 2 et 3, la catégorie d’exercices qui prédomine dans les
deux manuels est celle des exercices sur les PMSV de type analytique/intellectuel/réflexif
Figure 2 : Catégorie des exercices dans La Nouvelle Méthode de français 6e
Figure 3 : Catégorie des exercices dans Le français en 6e
Le manuel La Nouvelle Méthode de français 6e se distingue du manuel Le français en
6e par le fait que l’un des exercices combine les deux catégories. En effet, la particularité de
cet exercice (exercice 2) est qu’il présente une des caractéristiques répertoriées des exercices
de type intuitif/automatique/réflexe en ce sens que les phrases proposées dans le contenu de
l’exercice travaillent le PMSV dans des structures répétitives. Sur les cinq phrases, trois
phrases obéissent à la structure GN à la 3e personne + qui+ verbe se terminant par la
même occurrence en –ir et deux phrases sont construites selon le modèle proposition
principale constituée d’un pronom personnel à la 1re personne + verbe + COD suivi de
la proposition subordonnée relative introduite par qui constituée du pronom relatif qui
et du verbe à mettre en relation mis entre parenthèses. Employée dans les premiers temps
de l’apprentissage, ce type de construction pourrait permettre à l’élève de développer des
automatismes qui leur permettront d’acquérir une certaine souplesse et de la spontanéité dans
l’appropriation de combinaison de phrases par exemple (Avram, 2006 : Nadeau et Fisher,
Exercices sur les PMSV de typeanalytique/intellectuel/réflexifExercices sur les PMSV de typeintuitif/automatique/réflexeExercices combinant les deux catégories
Exercices sur les PMSV de typeanalytique/intellectuel/réflexifExercices sur les PMSV de typeintuitif/automatique/réflexeExercices combinant les deux catégories
307
2011). Cela pourrait également profiter à la détection d’erreurs d’accord puisque, de l’avis
de Largy, Cousin et Dédéyan (2005), celle-ci se fait sous la dépendance d’un contrôle ou
d’une surveillance dont le rôle est de repérer des configurations susceptibles d’être erronées.
Hormis cette particularité, l’exercice entre également dans la catégorie des exercices de type
analytique, intellectuel et réflexif puisque sa réalisation nécessite de l’apprenant qu’il fasse
preuve d’une certaine réflexivité. En effet, la consigne de l’exercice oblige l’élève à activer
la règle concernant le PMSV exercé, à repérer les donneurs (les sujets en relation avec les
verbes mis entre parenthèses) et à inscrire les marques d’accord appropriées (le temps et la
personne) sur le mot receveur d’accord (les verbes à l’infinitif entre parenthèses).
Une telle prééminence des exercices sur les PMSV de type analytique/intellectuel/
réflexif dans les deux manuels montre que les concepteurs des manuels sont préoccupés par
la mise en œuvre de processus cognitifs chez les élèves. Ce qui ne peut être qu’avantageux
puisqu’ils entrent dans la ligne droite des missions dévolues à l’enseignement et à
l’apprentissage du français au secondaire gabonais dont l’un des objectifs principaux est
d’amener les élèves à « l’acquisition des méthodes de réflexions » (Ministère de l'Éducation
Nationale, 1995:1). En outre, la présence d’exercices de type analytique/intellectuel/ réflexif
permet d’envisager que les manuels considèrent les exercices non pas comme de simples
exercices d’application de la leçon mais comme des lieux de situations de recherche et
d’exploration. Ainsi, la finalité intellectuelle des exercices n’est pas escamotée, les exercices
proposés pouvant permettre aux apprenants de comprendre les PMSV et de développer les
habiletés linguistiques ou cognitives relatives à leur mise en relation.
Toutefois, associer, en plus des exercices de type analytique/intellectuel/ réflexif des
exercices de types intuitif/automatique/réflexe n’aurait pas été superflu si l’on tient compte
du fait que les exercices sur les PMSV proposés sont destinés à des élèves de 1re année du
secondaire. Rappelons que les études actuelles tendent à montrer que la construction des
notions sur la langue reste incomplète chez les élèves en fin de parcours au primaire et dans
les classes de 1re année secondaire (Lefrançois, 2009; Gauvin et al., 2013; Gourdet et al.,
2016) et qu’il serait également pertinent, voire nécessaire, que l’on privilégie une progression
des apprentissages (Brissaud et al., 2001; Pellat et al., 2004; Roubaud et Touchard, 2004;
Fisher, 2004; Chartrand, 2016). En tenant compte des avantages des deux catégories, on
pourrait envisager une meilleure appropriation des connaissances sur les phénomènes
308
morphosyntaxiques d’autant plus que les erreurs commises par les apprenants gabonais sur
les PMSV, comme nous l’avons vu dans la problématique, se retrouvent également dans les
situations où les éléments à associer sont à proximité (…le noir ne devraient
pas… )(Ambourhouet-Bigmann, 2014 :108).
5.1.2 Un penchant significatif pour des exercices favorisant un raisonnement
complet
Conformément à la typologie d’exercices élaborée sur les PMSV, nous avons dégagé
deux formes d’exercices de type analytique/intellectuel/ réflexif : les exercices permettant de
développer partiellement l’appropriation des PMSV et ceux favorisant un raisonnement
complet sur le PMSV exercé. Cette subdivision nous a amenée au constat selon lequel la
tendance dominante dans les deux manuels, comme le montrent les figures 4 et 5, est que les
exercices sur les PMSV contenus dans les deux manuels penchent de façon significative vers
des exercices sur les PMSV favorisant un raisonnement complet sur les PMSV.
Figure 4 : Formes dans La Nouvelle Méthode de français 6e
Figure 5 : Formes dans Le Français en 6e
Dès lors, il est permis d’envisager qu’une grande part des exercices sur les PMSV
contenus dans les deux manuels sollicitent de la part des élèves un raisonnement complet sur
les PMSV. Rappelons que selon plusieurs auteurs, notamment Nadeau et al. (2006), les
exercices qui permettent aux élèves de développer ce type de raisonnement s’avèrent
bénéfiques, car ils se rapprochent le plus des situations de productions écrites des élèves.
Exercices développant partiellementl'appropriation du PMSV
Exercices favorisant un raisonnement completsur le PMSV
Exercices développant partiellementl'appropriation du PMSV
Exercices favorisant un raisonnement complet surle PMSV
309
Dans les faits, certains des exercices analysés exigent des élèves que soient effectuées des
traces d’analyse pour attester qu’une réflexion a bien été réalisée. Comme le rappellent
Nadeau et al. (2006), pour s'assurer que les élèves utilisent adéquatement les outils
d'apprentissage, il faut exiger des traces de révision du raisonnement grammatical. Celles-ci
permettent en outre de repérer facilement les difficultés particulières des élèves et les cas
d’analyse qu’il serait pertinent de travailler. C’est le cas par exemple de l’exercice 4 dont la
consigne demande aux élèves de justifier les cas de postposition de la fonction syntaxique de
sujet dans les phrases. D’autres cas d’exercices (exercice 5) nécessitent un raisonnement
complet puisqu’ils exigent de l’apprenant qu’il s’interroge sur une particularité du sujet,
comme celle d’observer la position que peut occuper cette fonction syntaxique par rapport
au verbe avec lequel elle est en relation dans une phrase. Plusieurs exercices concourent
également à la mise en œuvre d’un raisonnement complet sur les PMSV, puisque ni dans la
consigne, ni dans le contenu de l’exercice, aucune indication susceptible d’orienter les élèves
n’est fournie tels les exercices 17 et 18. Le déclenchement d’un raisonnement complet peut
également se percevoir dans certains autres exercices ( exercices 17) du fait que le contenu
de l’exercice présente l’avantage de se présenter sous la forme d’un texte et non de phrases
décontextualisées, ce qui oblige les élèves à vérifier tous les cas d’application des PMSV
présents dans le texte pour repérer les cas qui lui sont demandés de repérer. En plus, toutes
les phrases des textes ne comportent pas les cas de PMSV exigés par la consigne. Enfin, bon
nombre d’exercices permettent aux élèves de mettre en œuvre autant les connaissances visées
par l’exercice que des connaissances antérieures en lien ou non avec les PMSV. C’est le cas
par exemple de l’exercice 8. Non seulement cet exercice présente l’avantage d’amener les
élèves à vérifier que tous les cas de mise en relation entre la fonction sujet et le verbe sont
correctement orthographiés dans l’extrait de texte proposé, mais en plus il présente quelques
erreurs autres que celles relatives aux PMSV, permettant ainsi à l’élève de faire le point sur
ses connaissances antérieures. On peut y déceler des erreurs fautives portant sur les accents
(chaque annee…), sur l’orthographe des verbes en –eter (… se jète* des millions de
campagnards…), sur les homophones de tout (…tous les enfants de la rue).
Néanmoins, les manuels n’excluent pas de proposer aux élèves des exercices
développant partiellement l’appropriation des PMSV. Soulignons qu’une telle tendance
pourrait être préjudiciable pour les élèves. Pourquoi? Parce qu’en mettant entre parenthèses
310
l’élément à manipuler (exercices 3, 11, 12 et 15), en soulignant l’élément à manipuler
(exercice 26), en indiquant explicitement avec quel élément un autre doit être manipulé
(exercice 28), en annonçant la difficulté dans la consigne (exercices 5, 7, 17 et 27) ou en
produisant la règle impliquée sur la même page que l’exercice (exercices 14, 15,18,19,20,
23, 25,26 et 28), les manuels restreignent ou facilitent la convocation des connaissances sur
les PMSV. Parce qu’en ne réunissant pas systématiquement dans les exercices toutes les
habiletés requises pour établir les relations entre la fonction sujet et le verbe, l’importance
pour les apprenants de respecter le cheminement nécessaire pour effectuer ces accords en
situation d’écriture est ignorée (1- l’identification de la catégorie grammaticale du mot à
accorder; 2- la recherche du mot avec lequel il s’accorde; 3-l’inscription de la marque
d’accord appropriée). Par exemple, de nombreux exercices évitent à l’élève le travail
consistant à déterminer la catégorie grammaticale du mot à accorder, puisque ces derniers
sont clairement désignés dans la consigne et identifiés dans le contenu de l’exercice
(exercices 1,3, 11,12, 26). D’autres exercices facilitent la recherche de la fonction sujet parce
que les manuels utilisent soit les déterminants les plus fréquents le, la, les, un, une (exercices
4,7, 11, 12,18, 20, 22), soit le mot occupant la fonction sujet est systématiquement placée au
début de la phrase, comme on peut le voir dans l’exercice du manuel La Nouvelle Méthode
de français 6e ci-dessous :
Exercice 29: rubrique orthographe, « On/on n’», No 1, p.32
D’autres enfin épargnent l’inscription des marques d’accord, puisque le contenu de l’exercice
est déjà correctement et intégralement rédigé pour les élèves (voir les exercices 1, 4, 17, 18,
19, 22, 23,24, 25, 27). Or, ce décalage entre ce que les élèves pratiquent dans les exercices et
les tâches de mise en relation entre la fonction sujet et le verbe que les élèves produiront
inévitablement dans leurs futurs écrits pourrait contribuer à ne pas améliorer le transfert des
compétences sur les PMSV. Il est certes vrai qu’il peut être tout à fait pertinent dans certains
cas - l’appropriation d’une procédure d’accord par exemple - de proposer aux élèves des
311
exercices ne nécessitant de réaliser toutes les étapes d’un raisonnement grammatical complet.
Il est tout autant vrai qu’en ignorant le danger de n’exposer les élèves qu’à des exercices
présentant des facteurs facilitants, les manuels ne permettent pas aux élèves de développer
un raisonnement semblable à celui qu’ils doivent mettre en œuvre dans la production de leurs
écrits en plus de réduire les possibilités de transfert (Nadeau, 1995; Nadeau, 2001; Nadeau
et al. 2011). Les manuels gagneraient donc à proposer, en complément de ces exercices
développement partiellement l’appropriation des PMSV, davantage d’exercices sur les
PMSV qui contribuent à favoriser un raisonnement grammatical complet s’ils désirent que
les exercices proposés se rapprochent encore plus des situations réelles d’écriture des élèves
et que les apprenants puissent transférer les connaissances acquises dans d’autres situations.
5.1.3 Une variété de type d’exercices et une prédilection pour les exercices de
repérage
L’analyse sur les types d’exercices sur les PMSV présents dans les manuels laisse
apparaitre deux tendances. D’une part, le manuel La Nouvelle Méthode de français 6e,
comme le résume la figure 6, se caractérise par une variété de types d’exercices sur les PMSV
marquée par une inclination pour les exercices à trous, les exercices de recherche et de
correction d’erreurs et les exercices réflexifs de transformation.
Figure 6 : Types d'exercices sur les PMSV dans La Nouvelle Méthode du français 6e
Une telle diversité des exercices sur les PMSV pourrait se traduire par une volonté de
proposer aux élèves des exercices présentant différentes exigences dans le but d’instaurer des
situations analogues à ce que les élèves produisent lorsqu’ils rédigent leurs propres écrits.
Rappelons que c’est au cours des rédactions de leurs propres écrits que les élèves sont amenés
à gérer plusieurs tâches sur le fonctionnement de la langue. Dès lors, les exercices de
repérage favoriseront la tâche consistant à repérer les mots qui devront être mis en relation.
Les exercices à trous pourront contribuer au travail d’activation des règles concernant un
Exercices à trous
Exercices de repérage
Exercices de réflexion
Exercices réflexifs de transformation
Exercice de recherche et de correction d'erreurs
Exercice de rédaction avec contraintes
Exercices associants plusieurs types
312
mot, d’identification des donneurs et des receveurs et du choix des marques appropriées à
porter sur le mot receveur d’accord. Les exercices de réflexion accoutumeront les élèves à
adopter une attitude réflexive par rapport à leurs écrits en leur permettant, par exemple, à la
fois de rechercher en mémoire les marques adéquates selon les caractéristiques et à mobiliser
leurs connaissances. L’efficacité des exercices réflexifs de transformation de texte pourra se
faire ressentir lorsque les apprenants devront, au cours des activités d’écriture, mobiliser et
reconnaitre des formes de langues ou de structures. Les exercices de rédaction avec
contraintes pourront contribuer à la production consciente de structures et les exercices de
recherche et de correction d’erreurs concourront à favoriser chez les élèves le déclenchement
systématique des processus de révision/correction de leurs écrits puisque ces derniers
présentent l’avantage d’obliger les apprenants à vérifier tous les cas d’application de la règle
(fautifs ou non) dans un texte.
D’autre part, le manuel Le français en 6e se distingue par la proposition de types
d’exercices sur les PMSV peu diversifiés. En effet, le manuel se démarque par une
prédilection marquée pour les exercices de repérage comme l’indique la figure 7.
Figure 7 : Types d'exercices dans Le Français en 6e
Une telle disposition à proposer davantage d’exercices de repérage pour favoriser
l’acquisition des connaissances sur les PMSV pourrait s’appuyer sur quelques hypothèses.
Une première hypothèse pourrait s’expliquer par le fait que tout comme plusieurs auteurs tels
Fayol et ses collaborateurs (Fayol et Got, 1991; Hupet, Schelstraete, Demaeght et Fayol,
1996), les concepteurs pourraient avoir conscience des difficultés que pose l’acquisition des
connaissances sur ces phénomènes morphosyntaxiques dans la maitrise du français écrit,
notamment pour les élèves en fin de cycle de primaire et ceux au début du secondaire.
Rappelons que plusieurs auteurs notaient déjà les obstacles auxquels se heurtent les élèves
Exercices à trous
Exercices de repérage
Exercices de transformation
Exercices associant plusieurs types
313
pour repérer le verbe. Par exemple, Roubaud et Touchard (2004), constatent que les élèves
n’arrivent pas à repérer le verbe lorsque ce dernier est éloigné du sujet avec lequel il est en
relation ou lorsque le verbe est conjugué à un temps composé, comme c’est le cas dans
l’exercice 18 : A Tahiti, une plante rapportée d’Amérique, le miconia, détruit la forêt et
l’exercice 19 Les murs de la maison seront repeints en blancs. Gauvin et Boivin (2013)
observent également que de nombreux élèves de 1re année du secondaire se dotent de critères
d’identification du verbe parfois peu fiables et instables pour repérer le verbe comme le fait
de recourir à des connaissances marginales pouvant s’avérer erronées comme cette
connaissance déclarative inexacte « un verbe ne peut pas être le dernier mot d’une phrase »
alors qu’une phrase de l’exercice 19 montre le contraire L’équipe de football de notre
quartier a été battue.
Une seconde hypothèse tendrait vers la supposition que, conscients de la complexité
d’acquisition des connaissances sur les PMSV, les concepteurs préconisent un étalage des
apprentissages, d’autant plus que cette piste est envisagée par plusieurs auteurs (Roubaud et
Touchard, 2004; Gourdet et al., 2016). En multipliant les exercices de repérage, l’idée serait
d’affiner le travail sur les indices de repérage des éléments mis en jeu dans le PMSV afin de
garantir une détection plus systématique et plus sûre. En partant de l’évidence que le savoir
sur la langue est « le résultat d’un processus d’assimilation et de réélaboration » (Gourdet et
al., 2016 :5), les concepteurs partiraient sur le principe qu’à ce stade du niveau
d’enseignement des élèves (1re année du secondaire), il serait plus judicieux de proposer en
priorité des exercices qui permettraient de repérer les éléments d’analyse mis en jeu.
Enfin, une dernière explication à cette prédilection pour les exercices de repérage
dans le manuel Le Français en 6e pourrait trouver sa justification dans les travaux de
Lefrançois (2009), Brissaud et Cogis (2002) et Guyon (2003). En effet, ces auteurs relèvent
que chez les élèves de 1re année du secondaire, les connaissances relatives aux PMSV ne sont
pas finalisées. En effet, quoique ces derniers parviennent relativement à justifier la relation
morphosyntaxique entre le sujet et le verbe, la notion de sujet, par exemple n’est pas
totalement construite parce que les élèves disposent de peu de critères syntaxiques pour
justifier les accords. Dès lors, en mettant l’accent sur les exercices de repérage, les
concepteurs optent volontairement sur un type d’exercices.
314
5.1.4 Une faible considération pour des exercices favorisant l’émergence des
réflexions métalinguistiques
Comme dernier aspect sur la typologie des exercices sur les PMSV contenus dans les
manuels analysés, nous avons observé la présence de type d’exercices favorisant l’émergence
de représentations métalinguistiques des apprenants. Les résultats, illustrés par les figures 8
et 9, nous ont amenée à considérer que les deux manuels semblent peu considérer ces formes
d’exercices.
Figure 8 : Expressions de l'émergence de représentations métalinguistiques dans La Nouvelle Méthode de français 6e
Figure 9 : Expressions de l'émergence de représentations métalinguistiques dans Le Français en 6e
Rappelons tout d’abord que notre volonté d’observer la présence de ces types
d’exercices que Beacco (2010 : 50) désignent sous l’appellation d’exercices de
« conceptualisation » s’explique par le fait qu’ils ont pour but principal de contribuer
favorablement à une appropriation pratique de la métalangue. Ces exercices présentent des
traits spécifiques susceptibles de faire émerger les représentations métalinguistiques des
apprenants en ce sens qu’ils s’appuient sur des consignes qui font appel à des réponses
Émergence de représentations métalinguistiques
Absence de représentations métalinguistiques
Émergence de représentationsmétalinguistiques
Absence de représentations métalinguistiques
315
ouvertes et non aléatoires parce que contextuelles comme dans l’exemple suivant :
« Complétez la phrase par très ou trop : Demain, les températures seront …élevées dans
le Sud-Est. » (Beacco, 2010 :53). En fait, dans ces exercices, quelles que soient les réponses,
les apprenants sont amenés à expliquer le choix effectué, ce qui pourrait créer un espace
ouvert de réflexion métalinguistique.
Nous avons pu noter la présence de ces traits dans l’exercice 4 et l’exercice 5 ainsi
que dans une phrase de l’exercice 3 du manuel La Nouvelle Méthode de français 6e. En
demandant aux apprenants de donner leur avis sur la place des éléments occupant la fonction
syntaxique de sujet dans les exercices 4 et 5, les possibles explications émises par les élèves
pourraient porter sur l’intention du locuteur de placer la fonction sujet après le verbe avec
lequel il est en relation, de s’interroger sur l’effet produit si le sujet avait été antéposé au
verbe dans la phrase ou encore de s’interroger sur le registre de langue le plus adapté à ce
type de configuration. Quant à la phrase de l’exercice 3 (Gbazai ou Koussou (devoir)
préparer le diner), dont la directive est de mettre le verbe entre parenthèses à la personne qui
convient du présent de l’indicatif, le fait de proposer aux élèves des phrases décontextualisées
aurait pu entrainer une explication du choix de la marque d’accord effectuée. En effet, la
particularité du PMSV impliqué- le PMSV lorsque des sujets multiples sont coordonnés par
la conjonction ou – fait en sorte que l’élève devrait expliquer pour quelle raison il aurait écrit
Gbazai ou Koussou doit préparer le diner* (la conjonction ou exprime le choix, donc le
verbe se met au singulier) ou Gbazai ou Koussou doivent préparer le diner* (la conjonction
ou exprime l’addition, donc le verbe se met au pluriel).
En dehors de ces trois cas, voire deux, si l’on considère que la consigne de l’exercice
3 n’invite nullement l’élève à émettre une justification, aucun autre exercice dans les deux
manuels n’offre l’occasion à l’élève de faire émerger ses représentations métalinguistiques.
Ce peu d’intérêt pour ces formes d’exercices par les concepteurs pourrait s’expliquer par le
fait que, tout comme de nombreux auteurs (Vigner, 1984; Cuq, 1996), les concepteurs des
manuels estiment que ces formes d’exercices devraient plutôt être considérées comme des
activités sur la langue qui devraient découler de l’effort de l’ensemble de la classe et non être
considérés comme des exercices traditionnels qui eux peuvent être effectués
individuellement.
316
5.2 Une infime considération pour les connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles
En ce qui concerne la considération faite aux connaissances déclaratives,
procédurales et conditionnelles dans les exercices sur les PMSV des deux manuels, la
tendance qui se dégage est que les deux manuels ne prennent pas suffisamment en compte
les connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles. Nous en expliquons les
raisons dans les points qui suivent.
5.2.1. Une perception plutôt négative sur la convocation des trois connaissances
Avant d’interpréter les résultats observés, mentionnons que dans notre recherche,
nous sommes partie du principe suivant : si l’on considère qu’une des premières finalités de
l’étude de la langue est d’atteindre une réelle compétence à l’écrit, et ce, d’autant plus que
c’est en situation d’écriture que certaines connaissances morphosyntaxiques prennent tout
leur sens (Nadeau et Fisher, 2006), l’idéal type d’un exercice sur les PMSV est qu’il devrait
convoquer les trois types de connaissances à la fois pour que les élèves s’approprient de façon
effective les connaissances sur les PMSV. Nous nous expliquons. En exposant les difficultés
d’acquisitions des connaissances sur les PMSV des apprenants gabonais, nous avons vu qu’il
pouvait arriver qu’un apprenant sache inscrire la marque d’accord appropriée sans être
capable d’expliquer les raisons pour lesquelles cet accord est juste. C’est le cas notamment
de cet élève qui orthographie correctement le verbe bordaient dans la phrase Quelle peur de
regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie! et qui justifie la marque
d’accord au pluriel - ent par le fait qu’il est en relation avec le groupe nominal les fonds noirs
(Nze Waghe, 2011 :200) alors que le verbe est en relation avec le pronom relatif sujet qui.
Une telle affirmation indique, à notre avis, que soit l’apprenant n’a pas fait attention à la
présence du pronom relatif sujet qui et qu’il a réalisé l’accord sur une base sémantique, soit
il n’a pas mémorisé la connaissance déclarative qui stipule qu’en présence d’un pronom
relatif, le verbe n’est pas en relation avec le mot dont le pronom relatif est le substitut mais
avec le pronom relatif lui-même. Pourtant, comme l’explique Chartrand (2009), les
connaissances déclaratives sont nécessaires, car elles concernent les règles générales dont
l’apprenant a besoin pour pouvoir effectuer la très grande majorité des accords dans les textes
qu’il écrit. Par conséquent, il lui faut, pour établir correctement les PMSV et surtout
317
comprendre le fonctionnement de ce phénomène, disposer du plus grand nombre de
connaissances déclaratives sur les PMSV pour pouvoir les interpréter correctement
(Valiquette, 2008). Nous avons également montré que la mise en relation entre la fonction
sujet et le verbe implique le déclenchement de plusieurs opérations à exécuter pour pouvoir
la réaliser adéquatement : procédures d’identification du verbe, procédures d’identification
du sujet, inscription des marques d’accords, etc. (Nadeau et Fisher, 2006; Grevisse et al.,
2008; Chartrand et al, 2011; Elalouf, Gourdet et Cogis, 2006). Ces procédures renvoient à la
mise en œuvre effective des règles, donc des connaissances déclaratives, et au traitement des
informations particulières acquises (Fayol et al., 1992; Legendre, 2005). Enfin, dans de
nombreux cas, pour établir correctement la mise en relation entre la fonction sujet et le verbe,
nous avons observé que dans certaines situations, il est nécessaire pour l’apprenant de
déterminer les conditions d’application de telle ou telle connaissance sur le PSMV. Par
exemple, pour qu’un apprenant détermine à quel moment le verbe se met au pluriel lorsque
ce dernier est en relation avec des sujets unis par des conjonctions de comparaison ou des
coordonnants exprimant l’addition (comme, ainsi que, de même que, avec, etc.), il lui faut
observer si le sujet précédé du coordonnant est séparé de l’autre sujet et du verbe par une
virgule (Mon enfant ainsi que mes amis lavent des vêtements/ Mon enfant, ainsi que mes
amis, lave des vêtements). Par ailleurs, nous avons indiqué que l’apprentissage de la langue
nécessite de développer, de mobiliser et de coordonner un ensemble de connaissances
déclaratives et procédurales afin d’effectuer un raisonnement sur un fait de langue (Nadeau
et Fisher, 2006). À ces deux connaissances, nous jugeons qu’il est également opportun
d’adjoindre les connaissances conditionnelles. En effet, rappelons qu’elles présentent de
nombreux avantages : elles permettent à l’apprenant de reconnaitre tous les contextes
linguistiques où la règle s’applique (Chartrand, 2009); elles sont considérées comme
responsables du transfert des connaissances (Tardif, 1999) ; sans elles, les connaissances
déclaratives restent des connaissances inertes et les connaissances procédurales ne peuvent
être activées ou le sont à mauvais escient.
C’est donc en considérant tous ces aspects que nous avons une perception plutôt
négative sur la convocation des connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles
dans les manuels, puisque la plupart des exercices convoquent partiellement les trois
connaissances à la fois. Concrètement, tel que le montrent les figures 10 et 11, sur les 29
318
exercices sur les PMSV analysés, 17 exercices convoquent partiellement les trois
connaissances à la fois, trois exercices convoquent les trois connaissances à la fois et neuf
exercices ne permettent pas de convoquer les trois connaissances à la fois.
Figure 10 : Convocation des connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans La Nouvelle Méthode de
français 6e
Figure 11 : Convocation des connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles dans Le français en 6e
Cette tendance à convoquer partiellement les trois connaissances à la fois dans 17
exercices répartis dans les deux manuels se particularise par une inclinaison pour les manuels
à proposer des exercices sur les PMSV offrant une variété de cas possibles sur lesquels les
apprenants auraient à réfléchir (14), mais ne permettant pas de mener toutes les opérations
nécessaires à l’établissement des PMSV (14). Dans les faits, les exercices offrent une variété
de cas possibles pour plusieurs raisons. Certains des exercices présentent une diversité de
PMSV à manipuler dans les phrases (exercices 3, 12, 14, 15, 16, 24). D’autres exercices
proposent une variété de configurations de verbes ou de sujets d’une phrase à l’autre : verbe
conjugué à divers temps (exercices 20 et 28), verbe conjugué à des personnes variées
(exercices 3, 27, 28), verbe appartenant à des groupes différents quoique très souvent du 1er
et du 2e groupe (exercices 11, 14,15); sujets de diverses catégories grammaticales (exercices
3, 15, 16, 19, 23). D’autres enfin présentent la particularité de proposer des phrases où le
sujet est éloigné, proche, antéposé ou postposé avec le verbe avec lequel il est en relation
(exercice 16, 24).
Comme indiqué plus haut, ces exercices présentent en revanche l’inconvénient de ne
pas offrir l’opportunité de mener toutes les opérations nécessaires que les apprenants
0 1 2 3 4 5 6 7 8
Convocation des connaissances déclaratives,…
Absence de convocation des connaissances…
Convocation partielle des connaissances déclaratives,…
0 2 4 6 8 10 12
Convocation des connaissances déclaratives,…
Absence de convocation des connaissances…
Convocation partielle des connaissances déclaratives,…
319
effectuent en situation d’écriture lorsqu’ils sont amenés à établir la mise en relation entre le
sujet et le verbe : identification du verbe dans les phrases proposées - recherche du mot ou
du groupe de mots sujet avec lequel il est en relation - inscription de la marque d’accord
appropriée159. La première étape du cheminement est absente dans plusieurs exercices
puisque le verbe à mettre en relation avec le sujet est déjà repéré pour l’élève soit parce qu’il
est mis entre parenthèses comme c’est le cas des exercices 3, 12, ou 15, soit parce que la
tâche consiste à inscrire simplement la terminaison qui convient dans les verbes tels dans les
exercices 14 ou16 ou soit parce que la consigne indique explicitement la nature des mots
inscrits d’une façon particulière comme dans l’exercice 21 (Les verbes sont notés en
phonétique. Orthographie-les correctement…). La deuxième étape du cheminement est
facilitée dans de nombreux exercices parce que l’exercice propose un manque de variétés de
structures des sujets avec lesquels les verbes doivent s’accorder. Ainsi, les éléments occupant
la fonction syntaxique de sujet font le plus souvent partie de groupes nominaux sous la forme
déterminant + nom ou par une fréquence d’emploi des déterminants les plus fréquents. C’est
le cas par exemple de l’exercice 4 qui suggère dans la plupart des cas des sujets sous forme
de groupes nominaux au pluriel avec une fréquence d’emploi du déterminant les ( les groupes
des promeneurs ; les vacances ; le directeur et les surveillants ; ces sandales ), tout comme
dans l’exercice 17 où tous les sujets présents dans le texte sont des groupes nominaux (un
peuple heureux et prospère ; la vie ; l’avènement de Kabrin Kabra ; les courtisans ). Enfin,
la troisième étape du cheminement est ignorée dans de nombreux exercices, notamment dans
le manuel Le français en 6e, car l’apport est déjà correctement et intégralement rédigé pour
l’apprenant (exercices 17, 23 ou 27).
5.2.2 Une prise en compte peu systématique des caractéristiques des
connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles
La deuxième tendance qui se dessine dans la considération faite aux connaissances
déclaratives, procédurales et conditionnelles est que même lorsque les exercices sur les
PMSV des deux manuels pourraient manifester la présence des trois connaissances dans leur
exécution, leurs caractéristiques pourraient ne pas systématiquement être prises en compte.
Les figures 12 et 13 résument cette tendance.
159 Pour rappel, ces opérations s’inspirent du cheminement requis pour effectuer les accords en situation d’écriture préconisé
par Nadeau (1995) : identification de la catégorie grammaticale du mot à accorder- recherche du mot avec lequel il
s’accorde-inscription de la marque d’accord appropriée.
320
Figure 12 : Prise en compte des caractéristiques des caractéristiques des connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles dans La Nouvelle Méthode de français 6e
Figure 13 : Prise en compte des caractéristiques des caractéristiques des connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles dans Le français en 6e
Dans les faits, sur les 29 exercices sélectionnés, il ressort que seulement sept exercices
pourraient véritablement prendre en compte les caractéristiques reconnues de chacune des
trois connaissances dans l’exécution de l’exercice, contre 22 exercices. Rappelons que les
exercices pouvant prendre en compte les caractéristiques des trois connaissances se
manifestent pour les raisons suivantes : 1) leur exécution suggère que l’apprenant pourrait
établir le PMSV en faisant appel à la règle ou aux règles qui s’y rattachent pour les
connaissances déclaratives; 2) la réalisation de l’exercice déclencherait une procédure, cette
procédure se produirait dans l’exécution de l’exercice même et que cette exécution
permettrait à l’élève de diriger son attention vers d’autres aspects autre que le PMSV étudié
pour les connaissances procédurales; enfin 3) l’exercice pourrait favoriser la distinction des
meilleures conditions pour utiliser diverses stratégies pour les connaissances conditionnelles.
Par exemple, pour réaliser l’exercice 9, l’apprenant aurait été amené faire appel à la règle
selon laquelle lorsque le sujet est le pronom indéfini on, le verbe se met au singulier. Par la
suite, il aurait été amené à déclencher divers savoir- faire, notamment celui de choisir un des
verbes de la liste imposée par la consigne, le mettre en relation avec le sujet on à l’affirmatif
ou au négatif, pour enfin procéder à l’inscription de la marque d’accord appropriée au temps
qui convient à la phrase qu’il aura construite. En exécutant ces procédures, l’élève pourrait
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Prise en compte des connaissances déclaratives,procédurales et conditionnelles
Absence de prise en compte des connaissancesdéclaratives, procédurales et conditionnelles
Prise en compte partielle des connaissancesdéclaratives, procédurales et conditionnelles
0 2 4 6 8 10 12 14
Prise en compte des connaissances déclaratives,procédurales et conditionnelles
Absence de prise en compte des connaissancesdéclaratives, procédurales et conditionnelles
Prise en compte partielle des connaissancesdéclaratives, procédurales et conditionnelles
321
diriger son attention vers d’autres aspects, autre que le PMSV lorsque le sujet est le pronom
on à l’affirmatif ou au négatif. Par exemple, il devrait faire attention au choix des temps dans
un récit ou aux étapes du récit. Enfin, la réalisation de l’exercice permettrait à l’élève de
déclencher les connaissances conditionnelles dans la mesure où, par rapport à la langue,
l’exercice nécessiterait de ce dernier de reconnaitre tous les contextes linguistiques où telle
ou telle règle s’applique.
Toutefois, les occasions de prendre en compte les propriétés des trois connaissances
se sont révélées insuffisantes puisque, comme nous l’avons mentionnée plus haut, une grande
majorité des exercices ne le permet pas. Autrement dit, ces exercices avaient pour défaut soit
de ne pas permettre de tenir compte des spécificités des connaissances déclaratives, des
connaissances procédurales ou des connaissances conditionnelles. Par exemple, une des
difficultés perçues pour réaliser l’exercice 16 est que la leçon affiliée à l’exercice ne fait
aucune allusion à plusieurs règles sur les PMSV pourtant présentes dans l’exercice. Le même
exercice a rendu difficile la prise en compte de certaines des propriétés des connaissances
procédurales car l’un des savoir-faire à appliquer, à savoir les procédures de reconnaissance
de la fonction syntaxique de sujet dans des phrases, selon la logique d’organisation du
manuel, n’avait pas encore été présenté. Enfin, on peut se référer à l’exercice 27 pour illustrer
que bon nombre d’exercices pourraient ne pas favoriser pas chez les apprenants la distinction
des meilleures conditions pour utiliser telle stratégie plutôt qu’une autre puisque l’exercice
ne suggère que les catégories grammaticales occupant fonction syntaxique de sujet les plus
fréquents comme le nom ou le groupe nominal et le pronom personnel à la 3e personne.
En somme, le constat est que plusieurs exercices sur les PMSV dans les deux manuels
sont loin de convoquer de façon satisfaisante les trois types de connaissances à la fois dans
les exercices sur les PMSV des manuels scolaires. En plus, toutes leurs caractéristiques ne
sont pas systématiquement prises en compte. Ces résultats pourraient expliquer la propension
des apprenants gabonais, quel que soit le niveau d’enseignement, à produire les nombreuses
incorrections sur la relation sujet-verbe décrites plus haut, lorsqu’ils se trouvent dans des
situations de production écrite. Si les exercices proposés dans les manuels utilisés au
secondaire gabonais ne permettent pas aux élèves de les mettre suffisamment en situation de
recourir à ces trois types de connaissances considérées comme fondamentales dans toute
perspective pédagogique comme l’ont démontré les recherches en psychologie cognitive, il
322
semble plus compréhensible que bon nombre d’entre eux n’arrivent pas à mener de façon
optimale toutes les opérations nécessaires à l’établissement des relations entre les unités
d’analyse dans une phrase. Dès lors, il devient indispensable que les concepteurs des manuels
scolaires veillent à ce que les élèves soient en situation de mettre en pratique ces trois types
de connaissances dans les exercices qu’ils proposent pour leur offrir, comme le suggère
Chartrand (2009), tous les cas possibles sur lesquels ils auront à réfléchir.
5.3 Une considération peu systématique des connaissances
implicites et explicites
Ce troisième point présente une interprétation des faits saillants qui se sont dessinés
au cours de l’analyse de la présence des connaissances implicites et explicites.
5.3.1 Des connaissances implicites et explicites mal exploitées
La première tendance qui se dessine est que de nombreux exercices sur les PMSV
dans les deux manuels font une exploitation inadéquate des connaissances implicites et des
connaissances explicites. D’une part, nombre d’entre eux sollicitent des connaissances
implicites dans des exercices censés développer des connaissances explicites. D’autre part,
lorsque certains de ces exercices font appel à des connaissances explicites, ils ne le font que
partiellement. Les deux points qui suivent viennent justifier cette réflexion.
5.3.1.1 Une sollicitation inopportune des connaissances implicites
Mentionnons d’abord que les connaissances implicites se distinguent des
connaissances explicites principalement par le fait que les premières sont considérées comme
intuitives et peuvent difficilement être verbalisées tandis que les secondes s’appuient sur une
prise de conscience des propriétés formelles de la langue et offrent à l’apprenant la possibilité
de les verbaliser (Huot et Schmidt, 1996; Nadeau et Fisher, 2011). Pourtant, une des
observations qui émerge de notre analyse est que, sous l’apparence de développer des
connaissances explicites dans la manière dont les exercices pourraient être exécutés, bon
nombre d’exercices sur les PMSV des deux manuels laissent une large part à l’exploitation
des caractéristiques des connaissances implicites. C’est le cas des exercices 2, 6 et 14.
L’exercice 2 est un exercice à trous dont l’objectif est de mettre le verbe entre parenthèses
de la subordonnée relative au temps qui convient. Bien que développant partiellement
323
l’acquisition de connaissances sur les PMSV (Nadeau et Fisher, 2006), il fait partie de la
catégorie des exercices de type analytique/intellectuel/réflexif selon la typologie élaborée.
On s’attendrait donc à ce qu’il permette à l’élève de recourir majoritairement aux
connaissances explicites. Toutefois, la composition des phrases constituant le contenu de
l’exercice montre que celles-ci sont construites de telle sorte qu’il serait aisé pour l’élève de
le réaliser en s’appuyant principalement sur son intuition. La récurrence des déterminants au
féminin ou au pluriel (Les dames qui (venir)… - La mangue qui (pourrir) - la clé qui
(casser)…- les enfants qui (applaudir)… - Les élèves qui (vêtir)…) pourrait conduire les
élèves à accorder les verbes sans l’aide d’un raisonnement, caractéristique propre aux
connaissances implicites. De même l’occurrence des verbes en -ir à laquelle l’apprenant est
exposé pourrait le conduire à inscrire les verbes à accorder mécaniquement de la même façon
avec le risque d’erreurs que cela pourrait engendrer. La sollicitation des connaissances
implicites se perçoit également dans l’exercice à trous 6. Pour rappel, ce dernier demande
aux élèves d’inscrire les finales des verbes contenus dans les items proposés (Vous ten… - Je
remerc… - Le jardinier protèg… - Tu éteindr…). En fait, il a été démontré que l’enfant
commence à acquérir implicitement des connaissances sur les caractéristiques structurales de
l’écrit dès qu’il lui porte une attention répétée bien avant le début des apprentissages scolaires
(Gombert, 2006). Ces capacités initiales lui permettent de développer par apprentissage
implicite une habituation aux régularités relatives aux configurations visuelles, donc à
l’orthographe pour ce qui concerne les mots écrits. Dès lors, les terminaisons à inscrire sur
les verbes pourraient s’appuyer sur les connaissances linguistiques acquises à l’oral que
l’enfant possède bien avant ses premiers contacts avec l’écrit sans que cela ne nécessite le
recours aux connaissances explicites. Enfin, l’exercice à trous 14 sollicite aussi fortement le
recours à des connaissances implicites puisque l’élève peut s’appuyer simplement sur son
intuition pour inscrire les terminaisons des verbes à compléter. À l’exception du verbe de la
phrase …les gardes régionaux le conduisai… , tous les verbes à compléter sont à la 3e
personne du singulier (Il aperçu…d’où s’échappai…la fumée - le tas de fèves avai… - …le
feu ou la fumée qui s’en élevai…, ne pouvai… - …il éprouvai… ), ce qui pourrait réduire la
tâche de l’élève à une inscription mécanique de la lettre t. En plus, tous les verbes, à
l’exception de aperçu…, se termine par la même occurrence en -ai, ce qui expose l’élève à
une régularité de configuration visuelle et structurale de l’écrit telle que l’élève pourrait
324
intuitivement inscrire la même terminaison, avec le risque que cela ne génère une forme de
conditionnement qui pourrait le conduire à commettre des erreurs de procédure (Fayol et al.,
1991; Fayol, Huppet et Largy, 1999) du type (…les gardes régionaux le conduisait*) d’autant
plus que le sujet les gardes régionaux est séparé du verbe avec lequel il est en relation par le
pronom au singulier le.
En somme, la présence inopportune de toutes ces caractéristiques des connaissances
implicites dans ces trois exercices qui semblent pourtant destinés à développer des
connaissances explicites dans la manière de répondre pourraient avoir une portée très réduite
dans la mesure où elles limitent fortement l’activité cognitive attendue de l’élève.
5.3.1.2 Une propension à faire partiellement appel à des connaissances explicites
La deuxième exploitation inadéquate qui émerge de notre analyse est que plusieurs
exercices sur les PMSV des deux manuels ont une propension à faire partiellement appel aux
connaissances explicites.
D’abord, un assez grand nombre d’exercices font appel à des connaissances explicites
mais sans exiger un raisonnement grammatical complet semblable à celui qu’il faut mettre
en œuvre dans la révision/correction de ses propres écrits (Nadeau et Fisher, 2011). Ce
raisonnement implique que le scripteur doute de l’accord d’un mot, qu’il reconnaisse la classe
de ce mot, qu’il active la règle qui le concerne, qu’il identifie le mot donneur d’accord et
qu’il choisisse les marques appropriées à porter sur le mot receveur d’accord (Nadeau, 1995).
De l’avis de nombreux didacticiens, la pratique de ce raisonnement complet sur la langue
s’avère indispensable pour favoriser les compétences liées à l’écrit (Chartrand, 1996; Haas,
2002; Cogis, 2005, Nadeau et Fisher, 2006). Or, sur les 29 exercices sur les PMSV analysés,
les deux manuels comptabilisent 22 exercices sur les PMSV appartenant aux types
d’exercices développant partiellement l’appropriation des PMSV, soit neuf exercices à trous
et 13 exercices de repérages. Rappelons que les exercices à trous épargnent à l’apprenant le
travail consistant à repérer le mot qui est à mettre en relation avec un autre, tandis que les
exercices de repérage ne se limitent qu’à l’la reconnaissance du donneur et/ou du receveur
dans des phrases ou des textes. D’autres facilitent l’atteinte de la réponse, puisque l’élève n’a
pas à mobiliser toutes ses connaissances, lui simplifiant ainsi la tâche et lui évitant certaines
interrogations. Par exemple, dans certains exercices, non seulement les mots ou les groupes
de mots à manipuler sont déjà soulignés pour l’élève mais en plus la consigne indique
325
explicitement la nature des mots soulignés comme c’est le cas pour les exercices 26 et 28
produits ci-dessous. Comme le suggèrent Nadeau et Fisher, (2011), en proposant ce type
d’exercices, il est probable que les concepteurs soient motivés par le désir de réduire le temps
nécessaire pour réaliser l’exercice.
Exercice 26 Exercice 28
Un autre exercice, l’exercice 4, demande à l’élève non pas d’écrire une marque d’accord,
mais d’analyser les cas de postposition du sujet présents dans le texte sans que le lien entre
cette justification et cette particularité du PSMV ne soit établi. Une telle consigne pourrait
aboutir à ce que le raisonnement demandé fasse défaut dans la mesure où l’élève pourrait
émettre des justifications sur des sujets que la consigne ne demande pas d’analyser. Pour aller
vers une explication plus complète, la consigne aurait pu demander à l’apprenant de repérer
tous les sujets contenus dans le texte, de relier tous les donneurs et tous les receveurs ou
d’expliquer le choix des terminaisons et de demander d’analyser la particularité des sujets
par rapport aux verbes. Une autre particularité d’un des manuels, singulièrement Le Français
en 6e, est de restreindre les connaissances que l’élève doit mobiliser dans les exercices
proposés par le fait que la règle impliquée dans l’exercice et l’exercice lui-même se trouvent
systématiquement sur la même page, excepté pour les exercices 16, 17, 21, 22 et 27 qui, eux,
se trouvent dans les volets Entrainez-vous! du manuel. En procédant ainsi, on sollicite peu
l’effort cognitif des élèves, puisque l’élève n’est pas entrainé à rechercher en mémoire ses
connaissances explicites. En plus, de tels facteurs facilitants ne peuvent être présents en
situation d’écriture.
Un autre moyen de faire partiellement appel aux connaissances explicites dans les
exercices des manuels se retrouve dans l’exercice 21 (Les verbes sont notés en
phonétique… et l’exercice 27 (Dans l’une des phrases de ce texte, le sujet est sous-
entendu…), puisque la difficulté est annoncée dans la consigne. Il convient sans doute
d’orienter l’attention des élèves pour éviter qu’ils ne soient totalement désemparés devant la
tâche à accomplir. Néanmoins, si l’on s’appuie sur l’avis des didacticiennes Nadeau et al.
(2011), dans la perspective d’une progression, les concepteurs des manuels pour le
326
secondaire devraient concevoir que ces éléments d’aide soient peu à peu retirés lorsqu’on
passe du primaire au secondaire. Une autre caractéristique présente dans certains exercices
est que certains n’exercent qu’une seule difficulté à la fois. C’est le cas par exemple de
l’exercice 13 où sur les trois phrases proposées, on demande à l’élève de ne mettre que l’une
d’entre elles à la forme affirmative alors qu’une autre phrase aurait pu être mise à contribution
(Celui qui n’a rien à faire ou celui qui a fini son travail peut danser ). C’est le cas aussi de
l’exercice 17 où la consigne ne demande de ne relever que les sujets postposés dans l’extrait
de texte proposé. Pourtant, en combinant différentes difficultés, les concepteurs
solliciteraient davantage les connaissances des élèves, exerceraient leur capacité à
discriminer les configurations et se rapprocheraient des situations d’écriture où les difficultés
potentielles sont logiquement plus diversifiées. Enfin, si l’on s’en tient aux reproches faits
par Nadeau et al. (2011) sur certains exercices des manuels scolaires, certains des exercices
sur les PMSV des manuels rendent lacunaire la sollicitation des connaissances explicites en
raison de leur mode de présentation. En effet, certains PMSV sont présentés comme des
exceptions, comme s’ils étaient plus difficiles que les autres ou comme s’il s’agissait d’une
nouvelle règle au lieu de montrer que la procédure générale permet de trouver la solution.
Cela s’illustre dans l’exercice 2 portant sur le PMSV lorsque le sujet est le pronom qui ou
dans les exercices 9 et 29 qui exercent au PMSV lorsque le sujet est le pronom indéfini on à
l’affirmatif ou au négatif.
En résumé, ces éléments tendent à montrer que dans de nombreux exercices sur les
PMSV des deux manuels, les connaissances explicites sont insuffisamment sollicitées. Dès
lors, on peut en déduire que les élèves se retrouvent très souvent fort éloignés des tâches
qu’ils retrouvent dans la rédaction de leurs écrits.
5.3.2 Quelques exercices orientés vers le recours aux connaissances explicites
La seconde tendance qui émerge de notre examen laisse poindre la présence de six
exercices sur les PMSV qui permettent, de façon satisfaisante, de solliciter des connaissances
explicites. Il s’agit des exercices 9, 16, 21, 25, 26 et 27. Pour montrer que ces exercices
sollicitent favorablement les connaissances explicites, nous nous appuierons sur les exercices
9 et 27.
327
Ces exercices se caractérisent d’abord par le fait que leur réalisation offre la
possibilité aux élèves de verbaliser et de contrôler intentionnellement leurs connaissances sur
le PMSV détecté. Soulignons que cette conscience de savoir fait en sorte que le niveau de
performance dans des tâches qui sollicitent des connaissances explicites se trouve
généralement corrélé positivement au degré de certitude qu’a un sujet à propos de sa réponse
(Gasparini, 2004). Dans l’exercice 9, dont la tâche consiste à rédiger un court récit sur la
base d’une liste imposée de verbes et en employant on et on n’, la possibilité est offerte à
l’élève de verbaliser et de contrôler de façon consciente ses connaissances, puisque ce dernier
devra déclencher plusieurs processus cognitifs tels que réfléchir à l’élaboration d’un récit
cohérent, songer à la manière dont il devra intégrer dans ses phrases on et on n’, considérer
les accords qui vont nécessairement être présents dans le récit, penser à utiliser tous les verbes
de la liste, etc. En ce qui concerne l’exercice de révision 27, quatre tâches sont attendues de
l’apprenant : 1) repérer dans le texte proposé la phrase dont le sujet est sous-entendu, 2)
déterminer le sujet, 3) remplacer ce sujet par un autre pour éviter la répétition et 4) repérer
tous les éléments ayant la fonction syntaxique de sujet dans le texte. Pour remplir toutes ces
exigences, l’élève devra être amené à déterminer à l’avance ce qu’il connait bien ou ce dont
il est moins sûr pour pouvoir prédire adéquatement sa capacité à réaliser l’exercice. Par
exemple, il pourrait ne pas être capable de faire appel aux connaissances déclaratives par
rapport aux mots ou groupes de mots pouvant occuper la fonction sujet, ce qui ne
l’empêcherait pas d’accomplir la troisième tâche. Il pourrait à l’inverse maitriser pleinement
les procédures d’identification du sujet dans les phrases et ainsi prédire avec certitude qu’il
répondra de façon juste à la quatrième tâche.
Ces six exercices orientés vers l’explicite dans les deux manuels impliquent en outre
l’application de processus conscients considérables. Dans l’exercice 9, par exemple,
l’accomplissement des différentes tâches demandées nécessitera de l’élève de déclencher
plusieurs efforts cognitifs : repérer le sujet sous-entendu, déterminer quel mot serait
approprié pour éviter la répétition de ce sujet, appliquer consciemment les procédures
d’identification de la fonction syntaxique de sujet dans une phrase, etc. Pour réussir à repérer
le sujet sous-entendu comme demandé dans la consigne de l’exercice 27, il est nécessaire
pour l’élève de comprendre le sens du texte qui lui est proposé. En effet, Gaux et Gombert
(1999) ont montré que la conscience morphosyntaxique joue un rôle dans la compréhension
328
en lecture. Cette compréhension du texte lui permettra de saisir que dans la phrase Plonge
tout entière dans la minérale fraicheur, il s’agit de la main du narrateur puisque la phrase
précédente Ma main erre sur le sable, évoque une première action accomplie par cette main.
Un autre processus conscient pourrait également intervenir en réalisant cet exercice dans la
mesure où les connaissances explicites impliquent la formulation d’hypothèses et leur
vérification (Nadeau et Fisher, 2011). La présence de l’adjectif qualificatif au féminin
singulier entière pourrait amener l’élève à formuler comme hypothèse que cette qualification
appartient à la main du narrateur et vérifier cette hypothèse par exemple en discriminant tous
les éléments de la phrase précédente qui pourraient être en relation avec cet adjectif
qualificatif.
En plus, ces six exercices sont également orientés vers l’explicite puisqu’ils
pourraient impliquer l’application d’une conscience métalinguistique. Rappelons que dans le
domaine du langage, les connaissances explicites renvoient à l’intervention d’une conscience
métalinguistique (Nadeau et Fisher, 2011), c’est-à-dire à la capacité à porter une attention
particulière sur les formes de la langue et la capacité à manipuler ces formes (Huot et
Schmidt, 1996). Pour le cas de l’exercice 9, on pourrait supposer que la rédaction du récit
offrira l’occasion à l’élève de développer ses habiletés à comprendre de façon explicite le
fonctionnement du PMSV lorsque le sujet est le pronom on à l’affirmatif ou au négatif. En
ce qui a trait à l’exercice 27, cette conscience métalinguistique pourrait intervenir sur la
notion de sujet sous-entendu ou encore sur la particularité de l’accord de tout dans Plonge
tout entière…. En effet, sur ce dernier point, l’élève pourrait être amené à s’interroger sur les
raisons pour lesquelles tout n’est pas au féminin singulier, puisque relié à un adjectif
qualificatif au féminin singulier.
Enfin, la particularité de ces exercices est qu’ils suggèrent l’application d’exigences
secondaires, autre que le PSMV étudié. Rappelons que l’exercice 9 est proposé dans le cadre
de la leçon portant sur le pronom on à l’affirmatif et au négatif. Il vise donc en premier à
l’acquisition des connaissances sur le PMSV lorsque le sujet est le pronom on ou on n’. Or,
comme on peut le voir, la réalisation de l’exercice implique, outre la manipulation du PMSV
impliqué, d’autres connaissances, par exemple toutes les connaissances en lien avec la
rédaction d’un récit (les étapes du récit, les temps du récit, l’insertion d’un dialogue dans un
récit, la présentation des personnages, etc.). Quant à l’exercice 27, quelques exigences
329
secondaires, en plus de l’acquisition des connaissances sur le PMSV lorsque le sujet est sous-
entendu, interviennent dans la mesure où l’élève est amené à faire appel à ses connaissances
sur les mots pouvant être substituts d’un nom et sur les catégories grammaticales que peuvent
occuper la fonction syntaxique de sujet.
Force est de constater que les exercices sur les PMSV des deux manuels répondent
insuffisamment aux exigences pouvant contribuer à une appropriation efficiente des
connaissances sur les PMSV si l’on considère la considération faite aux connaissances
implicites et aux connaissances explicites. Les concepteurs des deux manuels semblent
ignorer les apports des connaissances implicites. Rappelons que celles-ci rendent service au
scripteur dans la mesure où elles requièrent peu d’attention une fois acquises et aussi parce
que certaines règles peuvent être apprises implicitement. D’un autre côté, lorsque les
concepteurs proposent des exercices dont la configuration répond à celle supposée faire appel
à des connaissances explicites, il est désolant de constater que ces derniers peuvent être
réalisés implicitement. Dès lors, ils ne sollicitent bien ni les connaissances implicites, ni les
connaissances explicites. En outre, en proposant un trop grand nombre d’exercices sur les
PMSV faisant partiellement appel aux connaissances explicites au détriment d’exercices plus
orientés vers l’explicite, les concepteurs des deux manuels contribuent à réduire la capacité
des élèves à réussir à appliquer adéquatement certaines règles complexes de notre système
d’écriture dans leur tâche de production écrite. Or, le niveau de compétence des élèves
gabonais sur les mises en relation entre le sujet et le verbe serait probablement plus élevé si
les concepteurs veillaient à faire exercer aux élèves l’ensemble des habiletés requises. Cela
pourrait expliquer que les élèves gabonais aient du mal à transférer leurs connaissances en
contexte d’écriture comme nous l’avons observé.
5.4 Des efforts à fournir sur l’utilisation de la métalangue
Comme pour le point précédent, cette section décline une interprétation des analyses
qui ont émergé sur l’analyse de la métalangue.
330
5.4.1 Une métalangue partiellement en conformité avec les textes officiels et peu
en adéquation avec les orientations de la recherche
La tendance qui se dessine sur l’usage qui est fait de la métalangue dans les exercices
sur les PMSV dans les manuels laisse percevoir que celle-ci est relativement en conformité
avec celle instituée avec les textes officiels gabonais mais demeure plutôt en inadéquation
avec les orientations de la recherche. Les lignes qui suivent tendent à justifier ces perceptions.
Dans le cas du verbe, la métalangue utilisée est, dans la plupart des cas, en conformité
avec celle préconisée par les instructions officielles gabonaises et employée globalement
avec justesse si l’on s’appuie sur les caractéristiques attribuées au verbe par la recherche (cf.
2.1.1). Toutefois, la présence de quelques affirmations inexactes et non conformes,
notamment dans le manuel Le français en 6e, pourrait semer une forme de confusion chez les
élèves et même chez certains enseignants. En affirmant que « Le verbe s’accorde en genre
et en nombre avec son sujet *» (Edicef, 2001 :34) dans la leçon Le sujet, l’on court le risque
de voir s’installer des affirmations erronées sur les relations qu’entretiennent la fonction sujet
et le verbe. De même, en identifiant l’un des éléments comme étant le verbe dans l’exercice
28 alors que seul l’auxiliaire du verbe, conjugué à un temps composé, est souligné (Réécris
la suite du texte, en utilisant « on » comme sujet des verbes soulignés → Des marais salants
sont aménagés le long des côtes), les concepteurs entravent l’appropriation des
connaissances sur la composition des temps composés.
La métalangue utilisée pour nommer la fonction syntaxique de sujet est encore plus
problématique dans les deux manuels. D’une part, la plupart des termes utilisés pour désigner
la fonction syntaxique de sujet, en dehors du terme sujet lui-même et de la dénomination
sujet inversé, sont peu conformes avec les instructions officielles gabonaises. Ces derniers
ne reconnaissent pas les appellations groupe nominal sujet, groupe sujet, sujet du verbe,
sujet de la phrase pour désigner cette fonction. Pour preuve, les textes officiels proposent
des exemples où l’élément occupant la fonction syntaxique de sujet n’est ni un groupe
nominal ni un groupe de mots. On peut lire par exemple un pronom (Elle chante), une
subordonnée (Qui vivra verra), un groupe infinitif (Trop parler nuit.) (Ministère de
l'Éducation Nationale, 1995 :88). D’autre part, toutes ces appellations attribuées à la fonction
syntaxique de sujet dans les deux manuels, en dehors du terme sujet, sont contestées par
plusieurs didacticiens. Par exemple, associer systématiquement à la fonction syntaxique de
331
sujet le terme groupe est inexact, puisque la notion de sujet ne désigne pas un groupe mais
une fonction syntaxique (Chartrand et al, 2010; Chartrand, 2012b; Lord et Élalouf, 2016). De
même, appeler la fonction syntaxique de sujet sujet du verbe laisse entendre que le verbe et
le sujet entretiennent une relation de dépendance au lieu d’une relation d’interdépendance
(Chartrand, 2012b). En plus, en recourant à cette formulation, les concepteurs semblent situer
sur le même paradigme la notion de catégorie grammaticale (le verbe) à celle de fonction
(sujet). Enfin, la dénomination sujet de la phrase semble difficilement convenir pour
désigner la fonction syntaxique de sujet si l’on considère toutes les hésitations et les
confusions que suscite la définition même de la notion de phrase. Selon Marchello-Nizia
(1979), la grammaire traditionnelle ou rénovée a recours, pour définir la phrase à divers
critères qui ne peuvent être considérés comme des critères absolus de la notion de phrase.
En ce qui concerne la métalangue utilisée pour désigner les PMSV, la tendance
montre que les manuels utilisent des termes globalement conformes à celles qu’emploient les
instructions officielles. En effet, tout comme dans les deux manuels, l’attribution des traits
grammaticaux du sujet au verbe est nommée dans les instructions officielles par la
désignation Accord du verbe avec son/le sujet et ses équivalents comme Accord sujet-verbe,
Le sujet (accord). De même, pour parler de certains phénomènes morphosyntaxiques qui se
réalisent lorsque le sujet et le verbe sont en relation, comme le PMSV lorsque le sujet est
placé après le verbe avec lequel il est en relation, les instructions officielles parlent de sujet
inversé/inversion du sujet tout comme dans les manuels. Néanmoins, de nombreux
chercheurs jugent contestables ces deux formes d’appellations. Pour ce qui est de la première,
certains didacticiens jugent inadéquate l’utilisation du terme accord (Chartrand, 1998;
Grossmann, 1998; Chartrand, 2012b; Lord et Élalouf, 2016) parce qu’il n’est pas souvent
clairement défini dans les manuels scolaires et aussi parce que cette appellation suggère que
les mots donnent et reçoivent un accord. Pour être précise, selon Chartrand (2012b), les
notions de donneur et de receveur supposent, comme énoncé plus haut, un transfert de
quelque chose entre deux unités du système d’une langue. Ce quelque chose, ce sont des
traits grammaticaux. Dès lors, la didacticienne explique que « les mots, donc, ne donnent ni
ne reçoivent un accord ; ils donnent ou reçoivent plutôt des traits grammaticaux » (Chartrand,
2012b : 3). L’appellation sujet inversé/ inversion du sujet est également contestée du fait
qu’elle provient de la grammaire scolaire traditionnelle et qu’elle s’appuie en plus sur les
332
arguments de la Logique et de L’usage évoqués par G. et R. Le Bidois (1967). Il est vrai que
d’un point de vue de transposition didactique, les termes inversion/inversé pourraient paraitre
plus transparents pour les élèves qui percevraient la caractéristique de certaines constructions
de phrase dans lesquelles le sujet et le verbe ne seraient pas placés selon le modèle de la
phrase de base. Mais, de l’avis de Colin (2011), cette désignation tient peu compte des
apports de la linguistique et reste peu pertinente si l’on considère certains fonctionnements
linguistiques et propose, à l’instar d’autres auteurs (Fuchs et al., 1997; Tamba-Mecz, 1984;
Korzen, 1996; Haff, 2000; Fuchs, 2006), de choisir les termes postposé/ postposition en lieu
et place de inversion/inversé.
Pour terminer, disons que compte tenu des résultats obtenus, les concepteurs des
manuels scolaires gabonais gagneraient à veiller à utiliser une métalangue qui soit à la fois
rigoureuse et cohérente pour parler de la langue s’ils souhaitent que les apprenants
construisent des connaissances sur les PMSV qui soient solides et utiles. Pour ce faire, il est
nécessaire, comme le recommande Chartrand (2012b), de faire preuve de constance et
d’éviter de modifier sans cesse les termes de la métalangue pour que les exercices sur les
PMSV soient des activités véritablement formatrices. Dans le même ordre d’idées, Lord et
Elalouf (2016) insistent sur le fait que le développement des connaissances grammaticales
passe par une utilisation fréquente, juste et cohérente des termes de la métalangue et leur
emploi durant les activités faciliteraient la conceptualisation. Rappelons que le manuel
scolaire constitue le principal outil pédagogique dont disposent les enseignants et les élèves
(Legendre, 2005). Pour un très grand nombre d’enseignants, il est perçu comme « une valeur
sûre, le lieu où sont déposées des vérités incontestables (Vargas, 2006 :19). Même si certains
enseignants peuvent se passer des manuels scolaires et les dépasser pour mettre en œuvre une
pédagogie efficace, d’autres, dont l’expertise est moins affirmée, considèrent le manuel
comme l’outil indispensable (Bruillard, 2005) qui permet d’éclaircir ou de renforcer leurs
connaissances (Braun, 2010). Dès lors, leurs contenus sont généralement utilisés pour
préparer leur cours. Au Gabon, de nombreux enseignants sont recrutés sans avoir au préalable
suivi une formation dans les institutions spécialisées comme à l’École Normale Supérieure.
Dès lors, le manuel scolaire devient pour eux un recours quotidien qui offre un soutien
théorique et constitue pour eux un support didactique. Il conviendrait donc que les
élaborateurs des manuels tiennent compte, avant de procéder à toute modification
333
terminologique, de cette catégorie d’enseignants. Enfin, pour que la métalangue dans les
exercices sur les PMSV ou dans les leçons qui y sont affiliées joue efficacement son rôle,
nous pensons qu’il reste essentiel que les concepteurs des manuels, de même que ceux qui
ont la charge du choix de ces manuels officiels gabonais, s’emploient à examiner
rigoureusement si la métalangue adoptée est conforme aux directives officielles établies en
contexte gabonais ou mieux encore, de s’assurer qu’elle réponde également aux exigences
pertinentes de justesse fournies par la recherche.
5.4.2 Une acquisition partiellement efficiente de la métalangue dans les exercices
sur les PMSV
Comme l’illustrent les figures 14 et 15, la tendance qui semble émerger du troisième
aspect analysé sur la métalangue indique que la majorité des exercices sur les PMSV des
manuels officiels de 1re année du secondaire gabonais favorisent partiellement l’acquisition
de la métalangue. Concrètement, sur les 29 exercices sur les PMSV analysés, les résultats
montrent que 24 offrent insuffisamment la possibilité aux apprenants d’acquérir de façon
productive la métalangue sur les PMSV contre seulement quatre qui le permettent
véritablement. Comme le rappellent Lord et Elalouf (2016), l’acquisition de la métalangue
se manifeste dans et par l’activité sur la langue. C’est pourquoi, nous avons mesuré cette
capacité à offrir l’opportunité aux apprenants d’acquérir la métalangue à partir de trois
observables métalinguistiques: la métalangue que pourrait utiliser l’élève pour désigner le
PMSV, les manipulations syntaxiques que pourraient entrainer l’exécution de l’exercice et
les jugements de grammaticalité que pourraient exprimer les élèves en exécutant l’exercice
(Canelas-Trévisi, 1997; Nadeau et Fisher, 2006; Boivin, 2009; Boivin, 2014). Rappelons que
c’est au cours des manipulations syntaxiques que les élèves sont amenés à nommer,
explicitement ou implicitement, les phénomènes langagiers rencontrés (Boivin, 2009;
Boivin, 2014). Elles sont dès lors l’occasion de savoir si les élèves utilisent ou non le
métalangage dans leurs interventions. Quant aux jugements de grammaticalité, ils
interviennent à la suite de manipulations syntaxiques pour permettre aux élèves de poser un
jugement sur le résultat obtenu (Boivin, 2009). Ils sont par dès lors envisagés comme des
moyens pour valider ou invalider les hypothèses émises par les élèves au cours de
l’exercisation.
334
Figure 14 : Acquisition de la métalangue dans La Nouvelle Méthode du français 6e
Figure 15 : Acquisition de la métalangue dans Le Français en 6e
De façon précise, la réalisation des exercices 3, 7, 9 et 15 pourrait permettre aux
apprenants non seulement d’utiliser la métalangue sur les PMSV, de procéder à des