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Master Reference L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons SCHNYDER, Manon Abstract Cette recherche questionne l’intérêt des filles et des garçons face aux différentes disciplines scientifiques. Au niveau des études secondaires et supérieures, nous remarquons que la répartition des sexes dans les filières scientifiques varie fortement d’une discipline à l’autre. Par exemple, la présence des filles est largement majoritaire en Biologie, minoritaire en Physique et très rare en Informatique. Ces disparités sont-elles le fruit d’une différence d’intérêt naturelle entre les sexes ou le résultat d’une influence sociale marquée par des stéréotypes sexués ? Ce travail apporte un éclairage à ces questions en interrogeant les intérêts scientifiques d’élèves âgés entre huit et dix ans. SCHNYDER, Manon. L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons. Maîtrise : Univ. Genève, 2014 Available at: http://archive-ouverte.unige.ch/unige:35423 Disclaimer: layout of this document may differ from the published version. [ Downloaded 11/06/2015 at 22:49:12 ] 1 / 1
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L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

Apr 30, 2023

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Master

Reference

L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

SCHNYDER, Manon

Abstract

Cette recherche questionne l’intérêt des filles et des garçons face aux différentes disciplines

scientifiques. Au niveau des études secondaires et supérieures, nous remarquons que la

répartition des sexes dans les filières scientifiques varie fortement d’une discipline à l’autre.

Par exemple, la présence des filles est largement majoritaire en Biologie, minoritaire en

Physique et très rare en Informatique. Ces disparités sont-elles le fruit d’une différence

d’intérêt naturelle entre les sexes ou le résultat d’une influence sociale marquée par des

stéréotypes sexués ? Ce travail apporte un éclairage à ces questions en interrogeant les

intérêts scientifiques d’élèves âgés entre huit et dix ans.

SCHNYDER, Manon. L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les

garçons. Maîtrise : Univ. Genève, 2014

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:35423

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L’intérêt pour les disciplines scientifiques

chez les filles et les garçons

Mémoire réalisé en vue de l’obtention de la Maîtrise en

Enseignement Primaire (MAEP)

PAR

Manon SCHNYDER

DIRECTRICE DU MÉMOIRE JURY

Isabelle Collet Christine Del Notaro

Anne Perréard Vité

Genève, février 2014

UNIVERSITÉ DE GENÈVE INSTITUT UNIVERSITAIRE DE FORMATION DES ENSEIGNANTS

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RÉSUMÉ

Cette recherche questionne l’intérêt des filles et des garçons face aux

différentes disciplines scientifiques. Au niveau des études secondaires et

supérieures, nous remarquons que la répartition des sexes dans les filières

scientifiques varie fortement d’une discipline à l’autre. Par exemple, la

présence des filles est largement majoritaire en Biologie, minoritaire en

Physique et très rare en Informatique. Ces disparités sont-elles le fruit d’une

différence d’intérêt naturelle entre les sexes ou le résultat d’une influence

sociale marquée par des stéréotypes sexués ? Ce travail apporte un

éclairage à ces questions en interrogeant les intérêts scientifiques d’élèves

âgés entre huit et dix ans.

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Remerciements

Avant tout, je tiens à remercier ma directrice de mémoire, Isabelle

Collet, pour son encadrement, sa flexibilité et ses conseils riches et

pertinents.

J’adresse aussi un très grand merci à Christine Del Notaro et Anne

Perréard Vité d’avoir accepté de faire partie de mon jury et de

consacrer du temps à la lecture de cet écrit.

Merci aussi aux enseignantes des différentes écoles genevoises qui ont

fait passer les questionnaires dans leur classe et ont ainsi contribué à

la réalisation de ce travail.

Pour finir, je remercie du fond du cœur ma famille, mes collègues et

ma directrice d’école qui par leur compréhension, leurs

encouragements et leurs petits mots de soutien m’ont permis de

surmonter mes doutes et de croire en ce projet jusqu’au bout.

Page 5: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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Table des matières

I. INTRODUCTION p.6

1.1 Introduction thématique p.6

1.2 Motivations personnelles p.8

II. CADRE THÉORIQUE p.10

2.1 Introduction p.10

2.2 Définition des concepts sexe, genre et identité sexuée p.10

2.3 Construction de l’identité sexuée et socialement différenciée p.12

2.4 Rôle de l’école dans la reproduction sexuée p.15

2.5 Orientation scolaire sous l’emprise du genre p.18

2.5.1 Politiques publiques p.18

2.5.2 Cycle d’Orientation p.19

2.5.3 Études secondaires p.19

2.5.4 Études supérieures p.22

2.5.5 Professions sexuées p.23

2.5.6 Éléments conclusifs p.26

2.6 Les filles et les sciences p.26

2.6.1 Historique p.26

2.6.2 Stéréotypes scientifiques p.28

2.6.3 Constats internationaux p.29

2.6.4 Les filles et l’informatique p.29

2.6.5 Les filles, les sciences et l’école p.30

2.6.6 Les femmes et les professions scientifiques et techniques p.31

2.6.7 Les sciences à l’école p.32

III. PROBLÉMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE p.35

3.1 Problématique p.35

3.2 Questions et hypothèses de recherche p.36

3.2.1 Principale question de recherche p.36

3.2.2 Autres questions traitées à partir du questionnaire p.36

3.2.3 Hypothèses de recherche p.36

3.2.4 Pertinence de la recherche p.37

Page 6: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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IV. CADRE MÉTHODOLOGIQUE p.38

4.1 Échantillon p.38

4.2 Choix de l’instrument p.39

4.2.1 Méthode p.39

4.2.2 Questionnaire quantitatif p.39

4.2.3 Informations supplémentaires sur le questionnaire et limites p.40

4.2.4 Mise en œuvre p.43

4.3 Procédure de traitement et analyse des données p.43

4.3.1 Procédure de traitement des données p.43

4.3.2 Axes d’analyse du questionnaire p.44

V. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ET ANALYSE p.45

5.1 Présentation des résultats du questionnaire p.45

5.1.1 Introduction p.45

5.1.2 Tendances générales p.45

5.1.3 Description des résultats par question p.50

5.1.4 Choix des élèves selon les disciplines p.61

5.2 Analyse p.64

5.2.1 Discussion et synthèse des résultats p.64

5.2.2 Réponses à la question de recherche p.73

5.2.3 Réponses aux autres questions p.75

5.2.4 Réponses aux hypothèses p.77

5.2.5 Difficultés rencontrées p.78

VI. CONCLUSION p.80

VII. BIBLIOGRAPHIE p.82

ANNEXES :

Questionnaire quantitatif

Regroupement des propositions du questionnaire par discipline scientifique

Graphiques et résultats statistiques du questionnaire

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L’intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

I. INTRODUCTION

1.1 Introduction thématique

« Félicitations, c’est une fille ! »

Maternité de Genève, 3 novembre 1986. Il est une heure cinq du matin et je

viens de naître. Mes parents qui ont souhaité maintenir le suspens jusqu’au

bout découvrent le sexe de leur premier enfant. Cette annonce fatidique,

attendue depuis de longs mois, bouleversa sans doute leur existence. Le

doute disparaît enfin, la pression s’envole : ils sont désormais en mesure de

définir leurs rôles et de penser leur éducation. Le mot « parents » prend un

nouveau sens, se précise, il devient « parents d’une fille ». Une porte vient de

s’ouvrir, celle de la projection.

Mes parents pouvaient aussitôt laisser libre cours à leur imagination en

m’inventant une vie conforme à leurs représentations. Peut-être

s’imaginaient-ils déjà émerveillés et fières à applaudir devant mes spectacles

de ballet classique ? Ou projetaient-ils d’agrandir la bibliothèque pour

aiguiser mon goût pour la lecture ? Parallèlement, ils ont sans doute, à cet

instant, chassé de leur esprit bon nombre d’autres images qui auraient pris

sens si j’avais été un garçon.

Vingt-sept ans plus tard, devenue jeune adulte, je tente de prendre un peu

de recul sur le parcours accompli : élève studieuse, quinze ans de danse en

guise d’activité extrascolaire, filière « littéraire » au collège, goût prononcé

pour les langues et finalement enseignante à l’école primaire parmi 85% de

filles exerçant cette profession (BPE, 2012).

Je m’aperçois donc que ma vie a jusqu’à présent suivi le sentier balisé qui

aurait pu naître des espoirs de mes parents dès mon premier jour d’existence.

En d’autres termes, je suis « en adéquation parfaite » avec les représentations

liées à mon sexe.

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Toutefois, je m’interroge sur les autres chemins que j’aurais pu empruntés et

sur la détermination de certaines personnes, filles ou garçons, qui osent

s’éloigner des sentiers battus pour embrasser une carrière dans un domaine

injustement attribué à l’autre sexe. De la volonté, il en faut, car même si les

écarts entre les sexes tendent à s’atténuer au niveau de la participation

professionnelle et des choix d’études, certaines filières de formation restent

largement plus prisées par l’un ou l’autre sexe.

En 2013, l’Office fédéral de la statistique indique que 76% de la population

masculine âgée de 15 ans ou plus exerce une activité professionnelle ou est

en quête d’emploi, contre 61% de la population féminine ; soit une répartition

d’environ 45% de femmes contre 55% d’hommes sur le marché du travail. La

différence de taux de participation professionnelle entre les sexes est donc

relativement modérée. Celle-ci s’explique en partie par l’abandon

professionnel provisoire de certaines femmes entre 30 et 45 ans pour fonder

une famille et éduquer les enfants en bas âge, ainsi que par leur départ à la

retraite plus précoce. Ainsi, au cours des vingt dernières années, l’égalité des

sexes en matière d’emploi a beaucoup progressé, (même si des efforts sont

encore à fournir, notamment au niveau de l’équité salariale).

En revanche, le choix de la profession et de la branche d’études reste

fortement lié au sexe. Alors que les Sciences humaines et sociales dans les

hautes écoles universitaires sont largement plus choisies par les femmes qui

représentent 71,9% des étudiants, les Sciences exactes, économiques et

techniques sont nettement plus prisées par les hommes (OFS, 2013).

Quelle est l’origine de telles différences ? Choix délibérés face à des intérêts

sexués bien distincts ou ancrage des stéréotypes de sexe qui conditionnent

nos parcours professionnels ?

L’objectif de ce travail de mémoire est d’apporter un éclairage à ces

questions en interrogeant les intérêts scientifiques d’enfants qui se trouvent

encore relativement loin de toute prise de décision quant à leur avenir

professionnel.

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1.2 Motivations personnelles

Je porte depuis longtemps un intérêt particulier pour les questions relatives

aux différences interpersonnelles. Je me questionne sur les sources qui

influencent nos goûts et nos choix dans un monde où le paraître et le regard

d’autrui semblent avoir tant d’importance. Quelles valeurs façonnent les êtres

que nous sommes et guident nos parcours respectifs ? Quelle influence ont

l’éducation familiale et l’instruction scolaire dans la construction de ces

valeurs ? Quel poids ont la société et la culture dans la composition de nos

représentations et de nos attentes ? Finalement, quelle marge reste-t-il pour la

réalisation de nos volontés propres lorsque nous évoluons sous le joug d’une

société exigeante ?

Ces questions aux multiples tenants et aboutissants sont intéressantes à

aborder sous la perspective du genre (entendu au sens d’un système de

normes de sexe différenciatrices hiérarchisant le féminin et le masculin). Filles

et garçons subissent dès l’enfance une pression de conformisme liée à des

attentes différenciées selon leur sexe et grandissent dans un carcan de

représentations dont il est difficile de sortir.

Initialement, je souhaitais réaliser un travail sur les représentations des garçons

et des filles à l’école primaire face aux différents métiers et questionner

l’impact du genre sur les choix d’orientation scolaire et professionnelle. Cette

thématique étant très large et ouvrant bon nombre de pistes de recherche,

j’ai décidé, en discussion avec ma directrice de mémoire, de focaliser mon

projet sur les intérêts variés des élèves face aux Sciences. Le domaine des

Sciences est particulièrement intéressant pour questionner l’influence du

genre, car nous observons au sein des études et métiers scientifiques une

forte disparité des représentations féminines et masculines selon les disciplines.

Par exemple, au niveau des études supérieures à Genève, les filles sont

largement majoritaires en Biologie, un petit peu moins nombreuses que les

garçons en Chimie et en Sciences de la Terre et de l’Environnement,

clairement minoritaires en Physique et Mathématiques et finalement très peu

présentes en Informatique (Université de Genève, 2013).

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Mon projet de recherche a pour premier objectif de vérifier s’il existe dès

l’enfance (8-10 ans) des intérêts différenciés entre filles et garçons face aux

différentes disciplines des Sciences. Dans un second temps, j’expliciterai les

résultats obtenus en émettant des hypothèses sur les origines des différences

ou similitudes observées.

Ce projet de recherche m’intéresse vivement, car il met en relief les intérêts

personnels des élèves dans un domaine donné. Par ailleurs, cette étude

s’effectue dans un cadre familier, celui de l’enseignement primaire genevois

où j’enseigne depuis un an et demi. En effet, elle cherche à définir les intérêts

des élèves sur la base d’activités scientifiques en lien avec le plan d’études

romand. Ainsi, ce travail impliquera également le rôle des sciences à l’école

primaire dans l’élaboration de leurs représentations auprès des élèves.

Au semestre de printemps 2012, j’ai suivi le cours Genre et Éducation de

Mme Isabelle Collet pendant lequel j’ai appris bon nombre de concepts liés

à cette thématique. Ce cours m’a également permis de me confronter à

plusieurs problématiques dérivées des stéréotypes de sexe. C’est à la suite

d’une expérience marquante que j’ai vécue dans le cadre du cours : me

travestir pendant une journée dans la peau d’un garçon, que mon intérêt

pour les questions liées aux différences selon le sexe s’est vu confirmé.

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II. CADRE THÉORIQUE

2.1 Introduction

Pour comprendre l’enjeu de ma recherche, il est nécessaire, dans un

premier temps, d’approfondir certains points théoriques en liens étroits avec

ma thématique.

Tout d’abord, quelques concepts centraux seront définis dans le cadre du

mémoire. Puis, j’expliciterai de quelle manière se construit l’identité sexuée et

socialement différenciée et quelles sont ses diverses implications. Ensuite, je

me plongerai dans l’univers scolaire pour pointer le rôle de l’école dans la

reproduction sexuée. Depuis l’école primaire, je gravirai les échelons de la

scolarité pour porter un regard sur l’école secondaire et les différents choix

qu’elle implique au niveau de l’orientation scolaire surtout lorsque celle-ci est

placée sous l’emprise du genre. Finalement, je ferai le point sur l’évolution du

couple, dont la compatibilité est souvent remise en cause, formé par les filles

et les sciences. Plusieurs ponts seront établis entre ces différents sujets qui sont

tous étroitement liés.

2.2 Définition des concepts sexe, genre et identité sexuée

Plusieurs concepts-clefs sont à définir dans le cadre de ma recherche. Tout

d’abord, il est essentiel d’établir la différence entre les termes de sexe et de

genre.

Le terme sexe se rapporte au sexe biologique, attribué à chaque être humain

en fonction de ses organes sexuels visibles dès la naissance (ou même avant).

En revanche, lorsque nous parlons de genre, nous faisons référence au sexe

social. Carnino précise : « Le genre est une question de culture : il se réfère à

la classification sociale en « masculin » et « féminin ». » (2005, p.13). Par ailleurs,

les caractéristiques attribuées aux deux sexes varient selon les cultures et

évoluent avec le temps. Ainsi, le genre n’est pas un concept figé, mais « les

hommes et les femmes voient leurs comportements construits et appris tout

au long de leur vie » (pp. 6-7). En outre, Collet et Mosconi attribuent au

concept de genre l’idée d’un « rapport social de pouvoir du groupe des

hommes sur le groupe des femmes, qui institue des normes de sexe

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différenciatrices et hiérarchisantes » (2010, p.101). Ces normes, précisent-elles,

ne concernent pas un rapport de domination directe des individus masculins

sur les femmes, mais relèvent d’un ensemble de normes organisées et

imposées par notre société. Celle-ci contribue donc à perpétuer un rapport

inégal entre les hommes et les femmes en attribuant aux hommes des

qualités et des compétences supérieures à celles des femmes et en les

plaçant comme modèles de l’humanité.

Sexe et genre sont donc étroitement liés mais se différencient sensiblement :

Le genre précède le sexe, il permet de faire la distinction entre les rapports

sociaux de sexe qu’il traduit et les données biologiques ou naturelles qui se

rapportent au sexe.

Néanmoins, comme le soutient Collet (2011), la bi-catégorisation du sexe

relève elle aussi d’une construction sociale plutôt que d’un fait purement

biologique. En effet, nous ne pouvons pas réduire systématiquement les êtres

humains en deux catégories selon la présence dans leur code génétique de

chromosomes XX pour les femmes et XY pour les hommes : « Il existe des

personnes XY qui ont des caractères sexuels féminins, des personnes XX avec

des organes reproducteurs féminins potentiellement féconds et des organes

génitaux externes masculins » (p.18). Même si ces personnes intersexes ne

représentent qu’une minorité de la population, leur existence (plus fréquente

qu’on l’imagine) questionne la pertinence de l’attribution de compétences

aux individus selon leur sexe, car « avant de savoir si les hommes et les

femmes ont des compétences différentes de part leur nature, il faudrait

pouvoir les différencier biologiquement et sans ambigüité » (Collet, 2011,

p.20).

L’attribution à un sexe n’est de ce fait pas toujours évidente et le sentiment

d’appartenance au genre associé à son sexe biologique ne l’est encore

moins. En effet, le genre se construit à travers un processus d’identification

sexuée.

L’identité sexuée est « le sentiment intime que chacun a d’appartenir à l’un

des sexes que la biologie et la culture distinguent » (Baudelot & Establet, 2007,

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p. 41). Cette identité sexuée se construit à travers la socialisation et le rapport

à autrui.

Par ailleurs, l’identité sexuée ne se réduit pas au sexe anatomique et

physiologique. Il faut également la considérer d’un point de vue

psychologique :

Ce qui est premier pour l’individu, c’est la constitution dans son Inconscient

d’une bisexualité psychique liée aux identifications à ses deux parents. Puis,

[…] l’enfant va prendre conscience de son sexe anatomique et découvrir la

discordance entre sa bisexualité psychique et son appartenance à un seul

sexe anatomique. Il va alors constituer son identité sexuelle psychique à

travers la double grille des identifications aux parents et des rôles sociaux de

genres. (Mosconi, 1994)

Cette identité sexuée s’achèvera normalement à la puberté, lorsque la

fonction sexuelle génitale apparait. La construction de l’identité sexuée et

socialement différenciée sera plus amplement détaillée dans la suite de ce

mémoire.

2.3 Construction de l’identité sexuée et socialement différenciée

Dès l’âge de deux ans, les enfants sont en mesure de distinguer le féminin

et le masculin. À cet âge-là, la différence entre les sexes relève davantage

d’un constat et elle n’est pas entachée d’un sentiment de supériorité d’un

sexe sur l’autre. En revanche, ces jeunes enfants ont tendance à valoriser leur

sexe d’appartenance en préférant nettement jouer avec des camarades de

leur groupe sexuel (Lorenzi-Cioldi, 1998).

Pourtant, la construction de l’identité sexuée commence bien plus tôt : dès la

naissance de leur progéniture, les parents ont des perceptions variées et

montrent des attentes différenciées à l’égard de leurs bambins. Par exemple,

un bébé garçon qui pleure sera en colère, alors qu’un bébé fille en larmes

aura peur. Ainsi, dès leur plus jeune âge, les enfants se voient attribués des

émotions différentes par leurs parents en fonction de leur sexe. Ces derniers

vont d’ailleurs adopter des réactions divergentes selon s’ils jugent le

comportement de leurs chères têtes blondes en phase ou non avec leur

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groupe sexuel : « [ils] renforcent ou découragent les activités de jeu de leurs

enfants, en fonction de ce qu’il a été convenu d’appeler une adéquation

entre le sexe biologique et le genre culturel » (Lorenzi-Cioldi, 1998, p.99). À

force de recevoir des signaux d’encouragement ou de dissuasion face à ses

comportements et à ses choix d’activités, l’enfant se forgera progressivement

une idée de ce qui est attendu de lui et sera petit à petit en mesure de

catégoriser ce qui appartient ou non à son groupe sexuel.

Lorenzi-Cioldi explique d’ailleurs que vers 2-3 ans, les enfants sont capables

d’associer des prénoms masculins ou féminins à des métiers stéréotypés. Ainsi,

les stéréotypes de genre sont mis en place bien avant l’entrée à l’école, mais

ils seront encore davantage renforcés pendant le cursus scolaire, comme

j’aurai l’occasion de le développer ultérieurement.

Un article publié dans la presse locale fin 2012 a retenu toute mon attention, il

s’intitulait « Sexistes, les enfants ? ». Celui-ci relevait l’engouement quasi

systématique des enfants pour se tourner vers des activités et des jeux

appartenant traditionnellement à leur sexe, malgré la volonté grandissante et

de plus en plus déterminée de certains parents à exercer une éducation

« neutre » dépourvue de connotation sexuée. Sabrina Sinigaglia-Amadio,

donne son point de vue de sociologue : « on constate chez les enfants des

représentations stéréotypées de ce que sont et font les hommes et les

femmes » (Migros-Magazine, 2012). L’une des explications pourrait être « le

caractère cumulatif » des messages dans l’environnement des enfants. En

effet, ceux-ci sont entourés de livres, publicités, chansons, vêtements, etc. qui

véhiculent des stéréotypes de sexe et qui font « qu’au fil des mois et des

années les enfants associent des espaces, des couleurs, des places, des

métiers, des sentiments, etc. à un sexe et arrivent difficilement à penser que

l’autre sexe puisse également faire, dire, penser, agir dans les mêmes

espaces. ». L’enfant, baignant dans un milieu rempli de stéréotypes sexués,

va inconsciemment retenir et catégoriser les activités selon le sexe. C’est

principalement en s’appuyant sur ces catégories que l’enfant se forgera son

identité sexuée.

Page 15: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

14

Une autre sociologue, Christine Détrez, s’est intéressée au rôle de la

représentation du corps dans la propagation des stéréotypes : « Le corps est

un construit social : les mises en jeu répétées du corps le forment, le

déforment, le conforment, incorporant en quelques sortes les marquages

sociaux. » (2006, p.2). En outre, elle s’interroge sur le terme de construction

sociale : « La notion de construction sociale semble établir une distinction

entre un donné « naturel » et inaliénable et ce qui relèverait ensuite de la

socialisation » (Détrez, 2006, p.2).

Sur cette base, elle s’est intéressée au corps humain en analysant comment il

est présenté aux enfants. Elle a mené une étude cherchant à établir

comment est représenté le corps dans les encyclopédies pour enfants, avec

l’idée que les encyclopédies sont des ouvrages scientifiques qui doivent

transmettre des informations de manière objective- notamment sur le

fonctionnement du corps humain. Le résultat est pourtant interpellant : alors

que le corps de la science est un corps dit neutre, le modèle utilisé pour

expliquer et comprendre tous les corps est presque toujours un corps

d’homme blanc. La représentation quasi systématique d’un corps d’homme

pose problème dans la mesure où celui-ci s’inscrit peu à peu comme étant la

norme, le modèle sur lequel tout le monde doit s’aligner.

Par ailleurs, dans les ouvrages présentant des modèles mixtes, les personnes

sont généralement représentées dans des situations fortement stéréotypées

(les hommes faisant des activités mobilisant la force, les femmes dansent,

préparent à manger, etc.). En outre, plusieurs encyclopédies placent des

figures féminines uniquement dans les pages consacrées à la reproduction et

à l’appareil génital féminin, celui-ci est d’ailleurs souvent représenté comme

étant un appareil génital masculin renversé. Détrez en conclut donc que

« non seulement la femme ne peut être pensée que par rapport à une norme

masculine, mais elle représente un état inachevé, inaccompli de celle-ci. »

(p.16). Cette étude apporte une nouvelle illustration de la manière dont se

construisent les représentations sexuées inégales. Ses conclusions sont

choquantes, car elles pointent la diffusion des stéréotypes de sexe au cœur

même de la science.

Page 16: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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Si l’identité sexuée et socialement différenciée se construit au fil des années,

sa revendication est très forte à l’adolescence, en particulier au moment où

les jeunes doivent prendre des décisions quant à leur orientation scolaire et

professionnelle. Nous aurons l’occasion de développer ce point dans une

prochaine rubrique.

Pour terminer ce chapitre sur l’identité sexuée et socialement différenciée,

notons qu’il n’existe pas de définition formelle et universelle du féminin et du

masculin, mais comme le relève Collet « chaque société institue sa propre

définition de ce qu’est être un homme ou une femme » (2009).

2.4 Rôle de l’école dans la reproduction sexuée

Depuis que l’école a été décrétée mixte à partir des années soixante, les

élèves - en dépit de leur sexe ou de leur origine sociale - sont supposés

recevoir un enseignement équivalent. Néanmoins, il fallut peu de temps pour

réaliser que mixité ne rimait pas avec égalité. En effet, comme le soutient

Mosconi « La mixité est sûrement une condition nécessaire de l’égalité, mais

pas une condition suffisante. » (2004, p.29). Comme nous allons le développer

dans ce chapitre, l’école est un milieu qui, sans le vouloir, véhicule et renforce

les stéréotypes de sexe.

L’existence de stéréotypes de sexe très ancrés dans le milieu scolaire a une

double fonction : d’une part, les stéréotypes sexués vont différencier les

groupes de sexe masculin et féminin ; d’autre part, ils vont les hiérarchiser.

Mosconi précise « Ils sont valorisants pour le groupe masculin et dévalorisants

pour le groupe féminin » (2004, p.29). Ces stéréotypes intériorisés par tous

auraient un impact décisif sur les perceptions, les attentes et les

comportements des acteurs de l’école, au niveau des relations entre élèves

et des interactions entre enseignant et élèves. Ainsi, les garçons prennent

deux fois plus la parole que les filles en classe et n’hésitent parfois pas à leur

couper la parole pour s’exprimer, sous l’œil, souvent inconscient, mais

bienveillant de leur enseignant. Les comportements des garçons et des filles

se construiraient donc en respectant une forme d’accords tacites entre les

différents acteurs de l’école. Par exemple, les filles s’approprient plus

Page 17: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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facilement les règles scolaires en étant plus calmes et « dociles » alors que les

garçons rejettent plus souvent les normes scolaires et cherchent les limites en

adoptant un comportement plus perturbateur. Cet effet de prédilection

autoréalisatrice appelé « effet pygmalion » naît des croyances des

enseignants.

Dès le début de mon cursus académique en Sciences de l’Éducation, j’ai été

sensibilisée à la question du genre dans le domaine scolaire.

Inconsciemment, l’enseignant contribue à la construction de la

catégorisation des sexes, en marquant des différences entre filles et garçons

et en véhiculant des stéréotypes. Sur la base de certaines croyances

socialement partagées, il va attribuer aux filles et aux garçons des

caractéristiques propres à leur sexe ; par exemple, les filles sont plus bavardes,

les garçons sont plus compétitifs, les filles s’intéressent plus à la littérature, les

garçons sont meilleurs en mathématiques et en sciences… Ainsi, nous

sommes, dès le début de nos études, mis en garde des dérives que peut

provoquer notre comportement implicite lorsque nos attentes varient de

manière discriminante à l’égard des élèves.

Pourtant, comme je l’ai souligné, les instituteurs n’ont généralement pas

conscience des différenciations sexuées qu’ils réalisent. Tout se joue sur un

plan plus subtil, sous-jacent à la vie scolaire. Vouillot élargit d’ailleurs ce

sentiment à un champ plus large : « Les différents acteurs de l’école

(enseignant-e-s, élèves, parents) sont souvent peu conscients des inégalités

de sexe à l’école et de la division sexuée de l’orientation » (2007, p.99) En

effet, plusieurs études établissent que les enseignants sont persuadés que « la

question de l’égalité entre les sexes est résolue dans leur propre univers »

(SRED, 2012).

Collet (2009) identifie, entre les murs de l’école, l’existence d’un curriculum

caché –en dehors des apprentissages pédagogiques- qui naît à partir des

interactions produites en classe, des manuels scolaires et des modèles

culturels implicites véhiculant les modèles traditionnels du féminin et du

masculin. Celui-ci impose aux élèves à leur insu « des conduites et des choix

de vie conformes à l’image que la société a de leur sexe ». Trois vecteurs sont

Page 18: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

17

ainsi pointés comme renforcement et diffuseur des inégalités : les interactions

en classe, les manuels scolaires et les modèles culturels.

L’analyse des manuels scolaires montre que nombre d’entre eux sont encore

fortement stéréotypés du point de vue du genre. Nous avions cité

précédemment l’étude de Détrez réalisée sur les encyclopédies scientifiques

plaçant les hommes comme modèles sur le plan physique et intellectuel.

Dans une autre enquête basée sur les activités rattachées aux deux sexes

dans les manuels scolaires, Collard (2007) relève que les hommes sont non

seulement deux à trois fois plus représentés que les femmes dans le monde du

travail, mais qu’ils se répartissent dans cinquante-trois occupations différentes,

alors que les femmes se concentrent essentiellement parmi dix. Les femmes

apparaissent d’une part dans des occupations moins variées, mais aussi et

surtout moins valorisées. Les filles ont donc plus de mal à se projeter dans des

carrières ambitieuses par manque de modèles féminins.

Les interactions scolaires ont fait l’objet de plusieurs études de genre-

notamment sur la répartition de la parole entre filles et garçons lors des

moments collectifs (Jarlégan, 2011). Les conclusions révèlent que les

enseignants ont tendance à interroger plus les garçons que les filles pendant

les leçons de mathématiques.

Duru-Bellat (2010) défend également l’idée que les écarts de comportements

et d’attentes des enseignants auprès des élèves de sexe féminin ou masculin

jouent un rôle déterminant sur le manque de confiance des filles en leurs

capacités (SRED, 2012). En effet, plusieurs études démontrent un effet négatif

des stéréotypes de genre sur les performances des filles, en particulier dans

les domaines scientifiques, tels que les mathématiques.

L’une de ces études (Huguet, Brunot & Monteil, 2001) révèle qu’une tâche de

géométrie sera réussie différemment par les élèves si elle est présentée

comme un exercice de dessin ou comme un exercice de mathématiques ;

dans le premier cas, les filles se montrent plus performantes que les garçons et

cette tendance est inversée dans le second cas. Cette célèbre étude est une

Page 19: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

18

bonne illustration de l’influence des stéréotypes dévolus aux deux sexes par la

société sur les comportements scolaires adoptés par les élèves.

Isabelle Cabat-Houssais (2004), institutrice, met en garde les professionnels de

l’éducation sur certaines de leurs pratiques discriminatoires : « les enseignants

font plus souvent appel à la mémoire des filles – en leur demandant, par

exemple, de rappeler le cours précédent- et sollicitent les garçons autour des

notions nouvelles pour construire le savoir. » (p.57) Pour promouvoir l’égalité à

l’école, il faut d’abord que les enseignant-e-s s’attachent à répartir

équitablement les interventions orales entre les sexes dans toutes les

disciplines.

2.5 Orientation scolaire sous l’emprise du genre

2.5.1 Politiques publiques

Selon Vouillot, l’émergence d’une volonté politique de lutte contre les

inégalités entre les sexes s’est produite relativement tard en France. C’est

seulement à partir des années quatre-vingt que de réelles actions sont mises

sur pied pour promouvoir l’égalité des sexes dans le domaine de formation et

qu’une prise de conscience se réalise sur le rôle de l’école pour y parvenir.

Dès lors, plusieurs conventions vont se succéder dans le but d’encourager les

filles à s’inscrire dans des filières scientifiques et techniques considérées

jusqu’alors comme « masculines ». Ces actions étaient sans doute également

motivées par un motif économique lié à un manque de main d’œuvre dans

les domaines techniques et d’ingénierie. Comme le souligne cette auteure, il

est intéressant de noter que tous ces mouvements étaient quasiment

exclusivement destinés à convaincre les filles de prendre le pas sur les

garçons en osant s’affirmer dans « leurs » filières, mais qu’il n’y avait que très

peu de volonté manifestée à encourager les garçons à suivre des filières dites

« féminines ».

À la lumière de ces éléments, les garçons apparaissent donc comme le

modèle à suivre sur lequel les filles doivent s’aligner, comme si eux-seuls

« savent » s’orienter.

Page 20: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

19

À Genève, l’égalité de formation entre les filles et les garçons figure parmi les

« 13 priorités pour l’instruction publique genevoise » soutenues par Charles

Beer et dans les recommandations de la Conférence suisse des directeurs

cantonaux de l’instruction publique. Pourtant, comme nous allons le voir,

cette mission est loin d’être achevée.

2.5.2 Cycle d’orientation

Au niveau du Cycle d’Orientation, des écarts de parcours scolaire se

dessinent déjà entre filles et garçons selon des données datant de 2007 : en

ancienne 9ème (actuellement 11P HarmoS) les garçons étaient surreprésentés

en option « Sciences » en représentant 62% des élèves contre seulement 39%

des filles.

2.5.3 Études secondaires

À la fin de la scolarité obligatoire, les divergences de parcours se

renforcent encore entre filles et garçons : 63% des filles choisissent de

poursuivre leurs études dans la formation générale (Collège ou École de

culture générale), tandis que la majorité des garçons se dirigent dans les

filières de formation professionnelle (34% d’entre eux seulement vont au

Collège) (SRED, 2005). En 2003, le domaine d’étude « Mathématiques et

sciences expérimentales » était le plus prisé par les garçons (43,2%) alors qu’il

arrivait en deuxième position (après les langues modernes) pour les filles (25%

y étaient inscrites). En revanche, la quasi-totalité d’entre elles choisissaient

l’option « Biologie et Chimie » contre une répartition équitable des garçons

entre ces disciplines et l’option « Physique et application des maths » (SRED,

2007).

Les divergences d’orientation scolaire entre filles et garçons nettement

visibles à partir des études secondaires s’expliquent par la volonté des jeunes

à confirmer leur identité sexuée via leur choix d’études. En effet, en tant

qu’adolescent ou jeune adulte, « il faut se prouver à soi-même et aux autres

qu’on est bien une fille féminine ou un garçon masculin [et ainsi] on se

compare soi-même avec les personnes constituant le prototype du métier et

Page 21: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

20

on regarde si les deux images sont compatibles. » (Collet, 2009). L’orientation

scolaire est donc avant tout un projet identitaire.

Ce projet identitaire s’inscrit toujours dans un contexte social. L’orientation

scolaire englobe ainsi deux aspects : un enjeu social, économique et

politique ; et un enjeu personnel et identitaire. Ainsi, « comme les filières de

formation et les professions sont hiérarchisées et sexuées, le projet énoncé

situe le niveau d’ambition du sujet, ce qu’il pense valoir, ses goûts, mais aussi

son degré de conformité ou d’excentricité vis-à-vis des normes et attentes

sociales qui lui sont adressées selon son statut social et son sexe. » (Vouillot,

2007, pp.93-94).

Vouillot soutient aussi que la considération de formations ou professions

comme étant « féminines » ou « masculines » ne dépend pas uniquement de

la façon dont elles sont investies par les garçons ou les filles, mais que cette

image est également influencée par tous les éléments contextuels qui leur

sont associés tels que les critères d’aptitudes, d’intérêts, de personnalité, de

caractéristiques physiques requises, etc. (2007, p.94)

Elle précise aussi que ce sont essentiellement les compétences associées aux

différents domaines d’études qui conditionnent les choix de formation : « La

division sexuée de l’orientation n’est pas une question d’aptitudes, mais de

sentiment de compétences ! Les compétences sont perçues comme

sexuées. Les filles et les garçons ont donc tendance à s’attribuer les

compétences reconnues à leur sexe et à se sentir pas ou peu de

compétences pour les activités de l’autre sexe. » (Vouillot, 2004, p.52) Ces

sentiments de compétences sont intimement rattachés à l’identité sexuée de

chaque personne.

Une étude a été menée en 2007 par le SRED sur les intérêts des filles et des

garçons du secondaire face aux différentes disciplines. Pour plusieurs

disciplines, l’intérêt ne diffère pas de manière significative, par exemple on

relève un intérêt général faible pour le latin et le grec, moyen pour le droit et

la chimie et élevé pour l’anglais et la biologie. La biologie est d’ailleurs « la

seule matière scientifique qui intéresse vraiment les filles » (en étant choisi par

Page 22: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

21

près d’un tiers d’entre elle). D’autres disciplines sont en revanche fortement

marquées par les stéréotypes de sexe : les filles sont davantage tournées vers

les langues, les arts et la pédagogie, tandis que les garçons se distinguent à

travers la physique, l’informatique, l’économie, les mathématiques et le sport.

Il paraît aussi important de porter un regard sur le choix de niveau de

mathématiques des élèves selon leur sexe : en 2002, 18% des collégiennes

suivent le niveau avancé contre 40% des collégiens. Si on se penche sur les

intérêts manifestés pour cette discipline, seules 36% des filles prétendant

beaucoup s’y intéresser suivent le cursus avancé contre 64% des garçons

dans la même situation. Comme nous l’avons développé précédemment,

cette différence significative peut être le reflet d’un manque de confiance

apparent des filles en leurs compétences à déployer dans cette discipline,

conforté par les stéréotypes de sexe (Duru-Bellat, 2004).

Si nous considérons l’option spécifique : les filles sont beaucoup plus

nombreuses dans le domaine des langues modernes et les garçons dans

celui des mathématiques et des sciences expérimentales. Force est de

constater que les filières scientifiques connaissent un engouement

principalement masculin. (SRED, 2007)

Toutefois, la lecture de statistiques peut être trompeuse et nécessite la prise

en compte de certaines précautions. Une erreur courante pointée par

Vouillot concerne une lecture incomplète des chiffres qui peut conduire à un

raisonnement erronée sur la répartition des filles et des garçons dans les filières

d’études. Il s’agit du « processus d’attraction/désertion de certains champs

de savoirs et de compétences » (2007, p.91). Par exemple, en France, au

niveau du secondaire, « les filles n’ont pas […] un problème de diversification

des choix d’orientation » (Vouillot, 2007, p.92), elles se répartissent de manière

plus équilibrée que les garçons dans les différentes filières et si leur nombre est

important dans certaines disciplines ; par exemple dans la série « littérature »

où elles représentent 81% des étudiants, ce n’est pas parce que toutes les

filles y sont inscrites (c’est au contraire la série qu’elles choisissent le moins),

mais c’est l’absence de garçons qui augmente considérablement leur

pourcentage.

Page 23: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

22

En résumé, « l’écrasante présence d’un des deux sexes dans une filière est

généralement due à l’évitement par l’autre sexe et non systématiquement à

un choix massif. »(Vouillot, 2007, p.93). D’où l’importance de tenir compte de

tous les chiffres, à la fois ceux représentatifs des filles et des garçons, pour

comprendre avec justesse la problématique de l’orientation sexuée.

À la lumière de ces propos, ce n’est pas le manque de diversification des

choix des filles qui crée une division sexuée de l’orientation, mais celle-ci

apparaît « parce que filles et garçons ignorent en les évitant soigneusement

les champs de savoirs et de compétences qui sont perçus comme

convenant à l’autre sexe. » (Vouillot, 2007, p.104).

2.5.4 Études supérieures

Vouillot relève qu’au niveau international, aux Etats-Unis comme en

Europe, malgré une augmentation importante au cours des trente dernières

années du nombre de diplômées de l’enseignement supérieur (les femmes

étant d’ailleurs plus nombreuses que les hommes), il existe toujours une

répartition des sexes déséquilibrée avec des filières principalement

empruntées par les filles (enseignement, lettres, arts, communication et santé)

et d’autres par les garçons (mathématiques, sciences de l’ingénieur,

architecture, etc.) (Vouillot, 2007, p.88).

L’Office fédéral de la statistique nous fournit des détails concernant les choix

d’études supérieures en Suisse :

Les jeunes hommes choisissent très souvent et nettement plus fréquemment

que les jeunes femmes des professions techniques et des domaines d’études

comme l’ingénierie, l’architecture et le bâtiment, la technique et

l’informatique. Les jeunes femmes optent en revanche très souvent et

nettement plus fréquemment que les jeunes hommes pour des formations

professionnelles et des études dans la santé, les sciences humaines et sociales,

le travail social et l’enseignement (OFS, 2013).

Elisabetta Pagnossin (2008) a examiné l’évolution de la présence des filles

dans les filières universitaires en Suisse depuis le début des années quatre-

vingt. À titre général, elle note tout d’abord que les femmes s’engagent de

Page 24: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

23

plus en plus dans des études universitaires. Elles demeurent majoritaires dans

les filières de langues et littératures en représentant les trois-quarts des

étudiants (74,4%). Néanmoins, elles investissent aussi de plus en plus les filières

scientifiques : leur nombre augmente passablement en Sciences de la terre

et en Chimie. En Biologie, elles passent de 43,3% en 1980 à 59,9% en 2007

devançant ainsi le quota masculin. En revanche, l’Informatique semble

toujours échapper à leur intérêt, car elles ne représentent qu’un faible 10%

des étudiants.

Au niveau de la répartition des choix d’études, nous notons une diminution

féminine en Sciences humaines et sociales, car 55,6% des étudiantes

universitaires s’inscrivaient dans ces filières en 1980, contre 43,5% en 2007 ; de

leur côté les étudiants y passent de 25,3% en 1980 à 20,2% en 2007. En

Sciences exactes et naturelles, les filles restent minoritaires en étant 9,1% en

1980 et 11,6% en 2007, tandis que les garçons présentent aussi une légère

augmentation avec 20% d’inscrits en 2007 contre 17,3% en 1980.

En conclusion à ses analyses, Pagnossin relève une légère progression des

choix d’orientation des filles « non conformes » à leur sexe :

Du fait de leur présence quantitativement plus importante que dans le passé,

les filles investissent plus facilement quelques domaines autrefois considérés

comme masculins, ou tout simplement plus étudiés par les garçons (…).

L’inverse ne se produit pas encore, car les garçons n’investissent pas

massivement des domaines féminins, même si quelques tendances se

dessinent par une diminution des écarts (2008, p.129).

Cette dernière remarque rejoint la position de Vouillot (2007) qui soutient que

« La division sexuée n’est pas le seul fait des choix des filles » (p.88) et que

« Les garçons sont tout aussi frileux –sinon plus- à s’engager dans les filières

dites « féminines ». »( p.91).

2.5.5 Professions

Dès la fin du Cycle d’Orientation, les intérêts des élèves commencent à se

stabiliser et des préférences professionnelles se dessinent.

Page 25: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

24

En 2012, le Service de la recherche en éducation (SRED) s’interroge : « Les

parcours scolaires et les aspirations professionnelles des filles et des garçons :

choix individuel ou respect des normes ? »

Plusieurs études confirment que « les jeunes choisissent leur orientation

professionnelle en fonction des normes encore fortement soumises au genre

et qu’un processus de socialisation conditionne progressivement les filles et les

garçons à s’investir dans des formations et des professions sexuées. » (SRED,

2012).

Duru-Bellat affirme d’ailleurs que « ce sont ces inégalités d’orientation, bien

plus que les inégalités de réussite, qui modèlent les inégalités de carrière entre

les sexes. » (2004).

Une enquête menée par l’OCDE (2012) dévoile que les filles et les garçons

choisissent encore leur orientation professionnelle selon l’idée qu’il existe des

métiers de femmes et d’autres réservés à la gent masculine. En effet, les

disparités d’orientation sont souvent perçues comme des différences

« naturelles » entre les sexes, liées à des compétences féminines et masculines

bien distinctes. Ainsi, les femmes auraient des aptitudes innées dans le

domaine des soins et de l’éducation, métiers dans lesquels elles sont

largement représentées. Tandis que les hommes perçus comme plus

intellectuels, inventifs et ambitieux viseront des carrières plus valorisées et

socialement mieux reconnues.

Collet renforce cette idée : « Les travaux de femmes sont généralement vus

comme une extension du travail domestique ou maternel », dans lesquels

leurs qualités considérées comme « innées » peuvent se déployer (2011, p.91).

Nous constatons donc que les professions fortement féminisées se fondent sur

les vertus prétendument attribuées aux femmes : « leurs compétences

domestiques à travers les métiers du commerce et de travail domestique, leur

savoir-faire éducatif (institutrices et auteures de livre pour enfants) ainsi que

leurs aptitudes esthétiques en tant que danseuses ou bijoutières. » (Collard,

2007, p.82).

Page 26: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

25

En outre, il est intéressant de constater que même des activités considérées

comme féminines, telles que la cuisine ou l’enseignement, se masculinisent

lorsqu’elles sont exercées à un niveau élevé et reconnu. Ainsi, il existe une

grande majorité de chefs cuisiniers et de professeurs hommes dans les études

supérieures. Les hommes ont donc plus de chance d’évolution de carrière

dans les domaines investis par les femmes que ces dernières.

Par ailleurs, les choix professionnels des femmes sont également motivés par

d’autres raisons que les simples intérêts ou ambition de carrière. La volonté

d’exercer un métier qui permet de concilier vie familiale et vie professionnelle

est présente très tôt dans le discours des jeunes filles. Au cycle d’orientation,

près des deux tiers des femmes projettent déjà de travailler plus tard à temps

partiel pour s’occuper de leur future famille contre environ un tiers des

garçons (OFS, 2011). Le projet de carrière est beaucoup plus central chez les

garçons. Ainsi, adolescentes et adolescents intègrent rapidement les

schémas familiaux traditionnels.

L’existence de modèles féminins au sein des corps de métiers envisagés

constitue un autre facteur décisif qui influe les choix de professions. Nous

constatons en effet que les femmes ont tendance à choisir des métiers dans

lesquels il existe déjà une forte présence de leur sexe. Les filles demeurent de

ce fait très nombreuses dans les métiers où elles l’étaient déjà il y a vingt ans.

Vouillot exprime les conséquences de ce processus : « La diversité des filières

professionnelles et des métiers connotés « masculins » est plus étendue que

celle des filières et professions connotées « féminines ». » (2007, p.91).

Les filles envisagent donc avec peine d’exercer des métiers peu connus et

dans lesquels elles ne sont pas représentées. Collet explique : « On ne peut

s’orienter que vers un métier que l’on connaît (ou que l’on croit connaître),

qui semble désirable, accessible et dans lequel on peut se projeter. [Or,]

parmi les métiers, la gamme des possibles est fortement contrainte par le sexe

et la classe sociale. » (2011, p.89). À titre d’exemple, « seules 3% des filles –

contre 15% des garçons- envisagent une carrière dans les métiers de

l’ingénierie ou de l’informatique » (OCDE, 2012), car ces métiers ont une forte

connotation masculine.

Page 27: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

26

Permettre aux jeunes filles et garçons de découvrir une gamme variée de

métiers apparaît donc comme un levier essentiel pour promouvoir l’égalité

des sexes face aux carrières professionnelles. Durant ces dix dernières années,

plusieurs journées et programmes comme « Futur en tous genres », « Élargis tes

horizons » ou « Cité-Métiers » ont vu le jour en Suisse pour encourager les

jeunes à découvrir des métiers au-delà de leurs stéréotypes sexués.

2.5.6 Éléments conclusifs

Comme nous avons pu le détailler dans ce chapitre, les préférences et les

intérêts scolaires significativement différents selon le sexe sont les fruits d’idées

profondément ancrées sur des rôles distincts tenus par les deux sexes.

Pour agir sur ces préjugés et réduire les inégalités entre les sexes, il convient

de faciliter une orientation plus égalitaire entre filles et garçons. Pour

permettre à celle-ci de se réaliser, il est important que le corps enseignant soit

sensibilisé à la question de l’égalité des sexes et de qu’il veille à utiliser un

matériel scolaire non-sexiste (SRED, 2007).

Terminons sur une note de l’Office fédéral de la statistique qui rappelle le rôle

central des études pour permettre à l’égalité de se déployer :

La formation est l’un des principaux moyens permettant de réaliser l’égalité entre

les sexes. Les personnes disposant d’un bon niveau de formation ont

généralement une marge de manœuvre plus large pour aménager leurs

activités quotidiennes et professionnelles et sont mieux à même d’affronter de

nouveaux défis sur les plans familial, professionnel et politique. En outre, les

personnes plus qualifiées occupent généralement des postes mieux rémunérés

(2013).

2.6 Les filles et les sciences

2.6.1 Historique

Les filles et les sciences sont un couple, incompatible pour certains, qui ose

de plus en plus s’affirmer, même si plusieurs obstacles restent encore à

franchir pour lui permettre d’obtenir une meilleure reconnaissance et une plus

grande évolution…

Page 28: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

27

Collet (2007) explique comment historiquement l’idée d’incompatibilité entre

femmes et sciences est conçue : « les femmes peuvent être réduites (et sont

donc limitées) à leur sexe biologique et donc à la nature féminine, alors que

les hommes ont la possibilité de s’en affranchir, de le transcender et de

pouvoir alors maîtriser la nature (y compris la leur). » (p.15).

Nicole Hulin, maître de conférences honoraire à l’Université et chercheuse

titulaire d’une agrégation scientifique « masculine » (obtenue par dérogation

spéciale) revient sur les différences instituées au niveau des programmes

scientifiques dans les écoles normales pour futures institutrices en 1881 en

comparaison aux écoles normales pour futurs instituteurs. En mathématiques,

« le programme est un peu moins étendu, en ce qui concerne

l’arithmétique » ; en physique, « le programme est moins complet […]

l’enseignement doit avoir un caractère simple et expérimental » ; en sciences

naturelles, « le temps consacré aux sciences naturelles dans les deux

catégories d’écoles normales n’est point tout à fait le même, et les

programmes destinés aux élèves-maîtresses […] ne sont pas aussi étendus

que ceux que doivent suivre les élèves-maîtres. »1 (2002, p.2). À la fin du 19ème

siècle, le ton est donné : les études scientifiques ont une moindre importance

pour les femmes, celles-ci « bénéficient » donc d’un programme scientifique

allégé !

Bien des années plus tard, au milieu des années nonante, Nadine Plateau

explicite pourquoi le modèle d’enseignement pratiqué à l’école primaire

pouvait être considéré comme inadéquat et un obstacle à l’égalité. Elle

souligne que malgré un changement majeur dans l’éducation avec la mise

en place de la mixité scolaire (tant sur un plan social que sexué) « les

contenus et les modes de transmission des savoirs n’ont pas été repensés en

fonction d’un projet de société égalitaire ». En d’autres termes,

l’enseignement « conçu pour une élite » s’adressait toujours à un élève de

sexe masculin et de milieu social aisé (Plateau, 1995, p.61). Marie Duru-Bellat

illustre cette idée en expliquant que les programmes de physique, par

exemple, valorisaient des domaines traditionnellement considérés comme

1 Bulletin administratif, t.24, 1881, p.1640-1666.

Page 29: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

28

masculins (mécanique, électricité, magnétisme…) alors que « l’étude

d’autres champs de la physique comme […] les phénomènes

météorologiques, les applications de la physique aux domaines médical ou

artistique susciterait un intérêt accru chez les filles » (2004, p.78). Cette vision

peut paraître aujourd’hui comme étant marquée par les préjugés, car nous

savons désormais qu’il est possible et répandu d’aborder le thème de

l’électricité en classe en éveillant un intérêt équivalent chez les filles et les

garçons.

2.6.2 Stéréotypes scientifiques

Duru-Bellat (1995) apporte un éclairage concernant l’influence sexuée sur

les choix d’études dans les filières scientifiques : « Les différences entre sexes

dans les filières apparaissent comme la résultante de processus d’auto-

sélection (moindre confiance des filles dans leur niveau scientifique), d’image

des disciplines scientifiques et de motivations professionnelles davantage

tournée vers l’utilité sociale que le prestige et la rémunération » (p.97). De

plus, « [les filles] se sentent à la fois moins compétentes dans les matières

scientifiques, et perçoivent les professions scientifiques comme difficiles (pour

elles) et masculines » (Duru-Bellat, 1995, p.97). Ces attitudes se forgent à

travers des processus sociaux variés : les attentes stéréotypées des parents en

matière de réussite, les attitudes plus ou moins implicites des enseignant-e-s

qui s’expriment par des attentes différenciées qu’ils communiquent

inconsciemment aux élèves (effet pygmalion) et les interactions entre élèves

dans un contexte mixte à un âge où le conformisme sexuel domine (Duru-

Bellat, 1995, p.98).

L’association femme-nature en opposition à homme-culture contribue

également à rendre plus difficile la projection des femmes dans le domaine

scientifique. Comme le défend Collet (2009), la description du scientifique

type : « ambitieux, combatif, audacieux, froid, indépendant, à l’esprit

logique, rationnel, obsédé de l’objet au détriment de la relation, excluant de

la sensibilité » s’apparente pour de nombreux traits au stéréotype masculin. Le

stéréotype féminin quant à lui se compose essentiellement « de

caractéristiques affectives, peu valorisées socialement, rapportant les

Page 30: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

29

femmes à leur rôle d’épouse et de mère : docilité, sensibilité, émotivité,

préoccupation des sentiments d’autrui. » (Collet, 2009). Ces traits de

caractère décrétés féminins se conjuguent difficilement avec la hargne, la

déduction et l’autonomie attendues d’un scientifique.

À la lumière de ce qui précède, Duru-Bellat (1995) soulève une question

intéressante : promouvoir l’accès des filles à la culture scientifique, n’est-ce

pas une manière de les contraindre à se couler dans un moule masculin, alors

qu’on pourrait tout aussi bien défendre « l’égalité dans la différence » ? Selon

elle, « si les orientations moins nombreuses des filles vers les études

scientifiques sont perçues comme une discrimination, c’est parce qu’elles

sont assorties à des professions moins gratifiantes » (1995, p.99.) Ainsi, le but est

avant tout de favoriser aux filles l’accès à « tous les possibles » en les plaçant

dans une situation d’égalité de choix par rapport aux diverses professions.

2.6.3 Constats internationaux

Selon Vouillot (2007), la minorité des filles dans les filières scientifiques relève

d’un constat international : En Amérique 48% des filles étudient les

mathématiques et 41% les sciences physiques et technologiques. En Europe,

le pourcentage de filles en Sciences, mathématiques et informatique est de

37%. Certaines exceptions sont à relever, par exemple le Portugal, l’Italie, la

Bulgarie et la Roumanie où le taux de filles varie entre 50% et 58% dans ces

filières.

De manière globale, les filles sont très peu représentées en informatique.

Curieusement, ce domaine apparaît comme premier choix auprès des

garçons suisses lorsqu’ils doivent citer le métier de leur rêve quand ils auront

environ 30 ans. 7% des garçons répondent : « Informaticien de niveau

supérieur » (SRED, 2012).

2.6.4 Les filles et l’informatique

Collet débute son ouvrage « L’informatique a-t-elle un sexe ? Hackers,

mythes et réalités » (2007) en exposant des chiffres pour le moins surprenants

en rapport au taux d’utilisation d’internet selon le sexe. En 2006, les femmes

Page 31: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

30

ne constituaient que 25% des usagers d’Internet en Europe, 18% au Japon et

4% au Moyen-Orient. Même si ce « gender gap » est moins marqué dans les

pays nordiques et les Etats-Unis où l’utilisation d’Internet est plus fréquente,

ces chiffres suscitent un certain nombre d’interrogations.

En 2003, Lafortune et Solar réalisent une étude au Québec sur les

mathématiques, les sciences, les technologies et leur utilisation par les

garçons et les filles. À la question : « Pensez-vous que les garçons sont

meilleurs que les filles en informatique ? » Plus du tiers des garçons et des filles

répondent par l’affirmative. Les filles justifient ce choix par l’intérêt porté à

cette technologie : « pour une fille, un ordinateur est plus une ressource qu’un

passe-temps » ou bien en affirmant « les filles se contentent pour certaines

choses de simplement savoir l’utiliser sans savoir comment il fonctionne »

(p.64.) Les garçons soutiennent de leur côté qu’ils sont plus aptes à

comprendre la technologie et ses outils et que l’informatique nécessite

parfois d’être « rude et persévérant » alors que les filles ont un caractère « plus

doux qu’eux » (p.65).

2.6.5 Les filles, les sciences et l’école

Lafortune et Solar relèvent que les diverses recherches menées jusqu’au

milieu des années nonante soutenaient certaines idées préconçues et

croyances stéréotypées, telles que « le domaine des mathématiques est

considéré comme un domaine réservé aux hommes », « les filles ont moins

tendance à croire que les mathématiques sont utiles », « les enseignant-e-s

accordent plus d’attention aux garçons qu’aux filles pendant les classes de

mathématiques », « il existe une différence entre les perceptions des filles et

des garçons face aux mathématiques : si ceux-ci réussissent, c’est parce

qu’ils sont brillants, s’ils échouent, c’est parce qu’ils n’ont pas assez travaillé. Si

les filles réussissent, c’est parce qu’elles ont travaillé dur et si elles échouent,

c’est parce qu’elles ne se sont pas intelligentes. », etc. Ces auteures se

réjouissent pourtant de constater que ces tendances évoluent avec le temps

et s’améliorent peu à peu (2003, p.83). Soulignons, par exemple, que dans

l’étude présentée plus haut, les deux tiers des filles et des garçons considèrent

Page 32: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

31

que les compétences des filles et des garçons en informatique sont jugées

équivalentes.

À l’instar de l’étude menée par Détrez (2006), citée dans un précédent

chapitre, qui analysait les rôles du corps masculin et féminin dans les

encyclopédies scientifiques, Collet a mené en 2007 une étude sur les livres

documentaires de sciences, afin de relever quelle place avaient les filles dans

les supports utilisés pour enseigner cette discipline. Celle-ci révèle que les

femmes sont quasiment absentes des livres documentaires qui traitent des

sciences, autant au niveau des noms des scientifiques de renom qui ont fait

avancer la technologie que sur les images servant à illustrer des expériences.

Et très souvent lorsqu’elles sont présentes, « le ressort comique joue toujours sur

les stéréotypes de sexes » ou alors elles observent les garçons à la tâche. Ainsi,

trop d’ouvrages scientifiques demeurent encore sexistes en s’adressant plus

volontiers aux garçons qu’aux filles et contribuent ainsi aux stéréotypes de

sexes et à l’inégalité des représentations féminines dans ce domaine.

2.6.6 Les femmes et les professions scientifiques et techniques

Alaluf & Al. (2003) citent les travaux menés par Catherine Marry (2004) pour

comprendre les facteurs qui jouent un rôle dans l’orientation professionnelle

des femmes : dès leur enfance, celles-ci vont naturellement « intérioriser les

normes et les comportements stéréotypés attendus des futures ménagères,

des futures mères et des futures travailleuses » (p.21). Conscientes de

l’investissement temporel et psychique que requièrent ces différents rôles à

assumer, les femmes vont rapidement considérer maternité et carrière

comme des projets entrant en contradiction. Alors que de leur côté, les

hommes jugent les emplois « à responsabilité » comme « un prolongement de

leur socialisation familiale et scolaire », conception facilitée de surcroît par

l’idée que les tâches éducatives et domestiques sont assumées par les

femmes. Il semble que le « coût de la transgression » soit « particulièrement

élevé face aux professions scientifiques et techniques, dominées par les

hommes et dans lesquelles les femmes ne seraient acceptées qu’à condition

de s’aligner sur le modèle masculin. » (Marry, 2004, citée par Alaluf & Al., 2003,

p.22).

Page 33: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

32

Une autre approche retenue par Marry pour justifier la marginalisation des

femmes dans les métiers scientifiques et techniques se base sur la dynamique

de la féminisation, qui établit bien souvent un lien de cause à effet entre

féminisation et dévalorisation d’une profession.

2.6.7 Les sciences à l’école

Avant tout, je souhaite m’attarder sur la notion de Science qui occupe

une place particulière dans ce travail. Le Larousse en ligne lui prête plusieurs

significations. La Science peut être défini comme un « ensemble cohérent de

connaissances relatives à certaines catégories de faits, d'objets ou de

phénomènes obéissant à des lois et/ou vérifiés par les méthodes

expérimentales. » ; ce terme se rapporte également à « chacune des

branches de la connaissance, du savoir (souvent pluriel) : Les sciences

mathématiques. » et plus largement, au niveau littéraire, il s’applique à une

« connaissance approfondie d'un domaine quelconque, acquise par la

réflexion ou l'expérience : La science du cœur humain. ». Dans le cadre de

ce travail, les Sciences sont abordées comme des disciplines distinctes

recouvrant les domaines des Sciences exactes et expérimentales.

À l’école publique genevoise, les mathématiques et les sciences occupent

une place importante dans l’horaire scolaire. À raison d’environ six périodes

hebdomadaires de Mathématiques et deux périodes de Sciences de la

nature, les élèves consacrent un peu plus du quart de leurs apprentissages au

domaine scientifique. Si nous nous penchons du côté du Plan d’études

romand, les intentions générales pour ce domaine sont les suivantes :

Dans une société fortement marquée par les progrès scientifiques et

technologiques, il est important que chacun possède des outils de base lui

permettant de comprendre les enjeux des choix effectués par la

communauté,[…]. Face aux évolutions toujours plus rapides du monde, il est

nécessaire de développer chez tous les élèves une pensée conceptuelle,

cohérente, logique et structurée, d’acquérir souplesse d’esprit et capacité de

concevoir permettant d’agir selon des choix réfléchis. (PER)

Page 34: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

33

Pour remplir ces intentions et développer les compétences recherchées, les

enseignants sont tenus d’aborder les mathématiques et les sciences à travers

un enseignement avant tout expérimental, basé sur la recherche et la

réflexion. Les élèves doivent apprendre à développer une démarche

expérimentale en formulant des hypothèses, en imaginant des stratégies

d’exploration, d’expérimentation. Le but est d’éveiller l’intérêt de tous les

élèves en leur proposant des situations d’apprentissages à la fois ludiques et

concrètes qui les aident à comprendre les mécanismes et phénomènes qui

fondent notre monde.

Certains sites internet, très bien conçus, offrent un panel d’activités

scientifiques intéressantes et variées. L’association « Les Petits Débrouillards »2,

par exemple, propose aux enfants des activités scientifiques et techniques et

participe de manière significative aux débats de société sur l’éducation et la

culture depuis 1984. Leurs lignes d’actions rejoignent les attentent du PER :

Faire découvrir la science en s’amusant, afin de créer une relation durable

entre l’enfant et la culture scientifique.

Cultiver le plaisir de comprendre, d’échanger, de s’exprimer et de débattre.

Donner à l’enfant le goût de la démarche scientifique, faite de curiosité, de

recherche de vérité, de liberté et d’initiative ; démarche qui se veut

expérimentale, se référant au quotidien, invitant à prendre conscience de la

portée et des limites de ses propres affirmations ; une démarche autorisant à

tout remettre en question, faite de doute, d’ouverture et de générosité.

Développer le sens du partage, de la solidarité et du respect de l’autre, en

favorisant l’implication active dans la vie de la société et dans un esprit

d’ouverture au monde.

Une autre célèbre fondation de coopération scientifique pour l’éducation à

la science, « La main à la pâte3 » dispose également d’un site internet riche

en ressources. Son objectif principal est « d’aider les enseignants à découvrir

et à enseigner la science et la technologie en mettant en œuvre une

pédagogie d’investigation permettant de stimuler chez les élèves esprit

scientifique, compréhension du monde et capacités d’expression ». 2 http://www.lespetitsdebrouillards.org/

3 http://www.fondation-lamap.org/

Page 35: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

34

Ces quelques exemples montrent que les enseignants, dès le primaire, ne

manquent pas de ressources pour proposer des leçons de sciences

suffisamment attrayantes et captivantes pour susciter l’intérêt de tous les

élèves au-delà de leur appartenance sexuelle.

Page 36: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

35

III. PROBLÉMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE

3.1 Problématique

Si les filles ont toujours été moins nombreuses que les garçons dans les

filières scientifiques et techniques, nous observons de plus une disparité d'une

filière à l'autre. En effet, comme nous avons pu le voir dans le cadrage

théorique, au niveau des choix d'options de maturité à Genève, un quart des

filles choisissent "mathématiques et sciences expérimentales" contre 43% de

garçons. Dans le détail, la quasi totalité des filles sera en "Biologie et chimie"

alors que les garçons se répartissent presque équitablement entre "Physique

et application des maths" et "biologie et chimie" (SRED, 2007). Par ailleurs,

selon les statistiques 2012-2013 de l’Université de Genève, dans la faculté des

Sciences, certaines disciplines sont plus ou moins proportionnellement mixtes

(Sciences de la Terre et de l’Environnement, Chimie), d’autres montrent une

majorité féminine (Biologie, Biochimie), tandis que d’autres ont une plus rare

représentation féminine (Informatique, Physique).

Sur la base de ce contexte et des diverses observations que nous avons

réalisées dans le champ scientifique, nous allons chercher à définir s’il existe

une différence sensible d’intérêts et de goûts chez les filles et les garçons face

aux différentes disciplines scientifiques qui justifieraient les représentations

variées des sexes dans ces filières. Si ce n’est pas le cas, nous nous

demanderons si c’est effectivement le cadre social qui influence les choix

d’orientation en Sciences au détriment de l’intérêt porté à ces disciplines.

Nous évaluerons les intérêts pour les sciences chez les filles et les garçons en

interrogeant par questionnaire des élèves de huit à dix ans. Ceux-ci devront

émettre des choix parmi des activités proposées dans des contextes les plus

neutres possibles. Nous pourrons ainsi relever s’il existe dès l’enfance des

intérêts différenciés selon le genre face aux différentes disciplines des

Sciences exactes.

Page 37: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

36

3.2 Questions et hypothèses de recherche

3.2.1 Question de recherche

Garçons et filles ont-ils des champs d’intérêt différents face aux Sciences

qui prédisposent leur futur choix professionnel dans ce domaine ?

3.2.2 Autres questions traitées à partir du questionnaire

Les élèves optent-ils individuellement et globalement pour des choix

appartenant au même domaine scientifique ?

Est-ce que certains domaines sont beaucoup plus sollicités par les élèves que

d’autres ?

Distinguons-nous une ou plusieurs différence(s) marquée(s) entre filles et

garçons face aux disciplines scientifiques? Quelles sont-ces différences ?

Pouvons-nous mettre en liens ces différences avec le taux de garçons et de

filles étudiant dans ces disciplines au niveau des études supérieures ?

Comment expliquer/justifier les différences ou similitudes parmi les choix

réalisés par les filles et les garçons dans le cadre de ce questionnaire ?

3.2.3 Hypothèses de recherche

Dans le cadre de ce mémoire, je m’attendais à observer des différences

d’intérêts portés aux disciplines scientifiques en imaginant que certains

domaines seraient globalement plus sollicités par les élèves que d’autres. En

revanche, l’aspect à la fois neutre et attractif des propositions à choix

multiples complexifie l’élaboration d’un pronostic. Il était donc difficile pour

moi d’anticiper les domaines scientifiques qui séduiraient le plus les élèves.

Par ailleurs, je n’imaginais pas relever des différences très marquées entre les

choix des filles et des garçons. Le cadrage théorique a largement relevé

l’influence des préjugés sociaux sur le choix de formation. J’avais donc

tendance à penser que les intérêts des deux sexes pour les disciplines

scientifiques seraient plus ou moins comparables. Néanmoins, j’imaginais que

les garçons opteront plus facilement que les filles pour les propositions

appartenant à l’informatique et les filles choisiront peut-être davantage

Page 38: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

37

celles se rapportant au domaine de la biologie. Ainsi, je pense qu’il existe une

légère différence d’intérêts entre filles et garçons pour certaines disciplines

scientifiques, ces intérêts étant déjà en partie modelés par les attentes

sociales et les stéréotypes sexués associés aux disciplines mentionnées.

3.2.4 Pertinence de la recherche

Ce travail pourrait apporter une explication possible aux fortes disparités

des présences masculines et féminines dans les diverses filières scientifiques si

les résultats démontrent des goûts et des intérêts différenciés selon les sexes

dès l’enfance. À l’inverse, si garçons et filles présentent des intérêts communs

et similaires pour les mêmes domaines scientifiques, nous pourrions alors

questionner l’impact des représentations sociales qui justifierait le décalage

constaté entre les intérêts manifestés pour des disciplines scientifiques et la

minorité d’un sexe ou de l’autre représentée dans ces mêmes filières.

Page 39: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

38

IV. CADRE MÉTHODOLOGIQUE

4.1 Échantillon

Questionnaire quantitatif

Un questionnaire à choix multiples a été passé auprès de huit classes

allant de la 4P à la 6P HarmoS (enfants âgés entre sept et dix ans). En tout,

162 élèves (dont 74 filles et 88 garçons) inscrits dans les écoles publiques

genevoises ont été interrogés. Notons que sur les huit classes qui ont participé,

il y a deux classes de 4P-5P, cinq classes de 5P et une classe de 5P-6P. Trois

écoles sur les huit appartiennent au Réseau d’Enseignement Prioritaire. Par

ailleurs, trois écoles sont en campagne, tandis que les cinq autres se situent

en ville. Ainsi, l’échantillon de cette étude représente un panel varié et

représentatif des diversités de l’école genevoise.

Afin de nous focaliser sur un échantillon plus ciblé, nous avons décidé de

laisser de côté les données des élèves de 4P, ce qui réduit de 21 sujets (13

garçons et 8 filles) notre étude. Cette décision a été prise, car plusieurs élèves

de 4P ont eu recours à de l’aide pour remplir leur questionnaire en raison de

difficulté en lecture ou en compréhension de vocabulaire. Ainsi, le caractère

neutre du questionnaire est remis en cause pour ces derniers, qui auraient pu

être influencés par les explications de leur enseignant. En effet, le caractère

autonome du questionnaire occupe une place essentielle pour garantir des

réponses spontanées et dénuées de toute influence. Le total de sujets retenus

pour cette étude s’élève finalement à 141 élèves (66 filles et 75 garçons). Le

tableau ci-dessous fournit des détails sur l’âge, le degré et le sexe des élèves

composant l’échantillon de cette recherche.

Tableau des effectifs selon le sexe, le degré et l’âge des élèves interrogés

Garçons

Tota

l

ga

rço

ns

Filles

Tota

l

fille

s

Tota

l

Su

jets

ÂGE

(ans)

DEGRÉS

8 9 10 8 9 10

5P 32 37 1 70 30 31 1 62 132

6P 0 1 4 5 0 2 2 4 9

TOTAL 32 38 5 75 30 33 3 66 141

Page 40: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

39

Plusieurs éléments peuvent être pointés à partir du tableau détaillé des sujets.

Tout d’abord, relevons que la très grande majorité des élèves interrogés sont

en 5P (94% des sujets) et la plupart d’entre eux sont âgés de 8 ans (44%) ou 9

ans (50%).

En outre, les participants garçons sont un peu plus nombreux que les filles (75

contre 66). Il faudra donc privilégier une analyse des données en

pourcentage afin de faciliter la comparaison des sexes.

4.2 Choix de l’instrument : Questionnaire quantitatif

4.2.1 Méthode

La méthode choisie dans le cadre de ce mémoire est l’enquête par

questionnaire. Celle-ci permet d’interroger un grand ensemble de sujets (141

élèves), puis de traiter les résultats sous forme statistique afin de confirmer ou

d’infirmer les hypothèses émises. Le traitement quantitatif des informations est

possible grâce au nombre limité de réponses à choix proposées (quatre

réponses possibles par question). Les élèves doivent donc obligatoirement

choisir leurs réponses parmi les propositions, ce qui facilite l’analyse des

résultats, la comparaison entre les sujets et l’observation de corrélations entre

variables.

4.2.2 Le questionnaire

Le questionnaire quantitatif créé comporte cinq questions à choix

multiples et porte sur les intérêts des élèves face aux sciences dans cinq

contextes différents.

Tout d’abord, cinq disciplines scientifiques distinctes ont été dégagées pour

créer le questionnaire : 1) Physique 2) Biologie 3) Informatique 4) Chimie

5) Sciences de la terre et de l’environnement.

Ces cinq disciplines font partie de la Faculté des Sciences de l’Université de

Genève. Précisons également que dans le cadre de ce mémoire

l’Astronomie sera considérée comme partie intégrante de la Physique.

Page 41: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

40

Le questionnaire comporte cinq questions à choix multiples s’inscrivant

chacune dans un contexte différent : sujet d’un DVD ; activité de course

d’école ; expérience à réaliser en classe ; explication à recevoir et choix

d’une image.

Chaque question propose quatre réponses à choix représentant chacune un

domaine scientifique distinct. Ainsi, au total, parmi les vingt propositions de

réponses chaque domaine scientifique apparait quatre fois (sous quatre

questions différentes).

Le questionnaire comporte deux types de questions : soit classer les

propositions de 1 à 4 selon le goût (question 1), soit désigner un choix parmi

les quatre propositions (questions 2, 3, 4 et 5).

Celui-ci étant anonyme seuls le sexe, le degré scolaire et l’âge devait être

précisé par les participants.

4.2.3 Informations supplémentaires sur le questionnaire et limites

La composition des propositions tient compte des objectifs du Plan

d’étude romand (relatifs au domaine scientifique) à viser dans les degrés

scolaires concernés par le questionnaire.

La plupart des activités proposées sont tirées de fiches pédagogiques,

manuels de Sciences ou sites internet pour l’enseignement des Sciences. Elles

représentent ainsi des activités scientifiques classiques et réalisables dans le

canton de Genève.

La formulation des propositions se veut être la plus neutre possible pour éviter

d’orienter les élèves dans leur choix. De plus, chaque activité cherche à

s’inscrire dans un cadre équivalent et attractif.

Les propositions en lien à chaque domaine scientifique sont variées afin de

représenter au mieux l’étendue et la diversité de chacune des disciplines.

Précisons toutefois que la composition des propositions a été difficile à

élaborer pour plusieurs raisons que je vais relever ici. Tout d’abord, les cloisons

entre les disciplines scientifiques sont parfois très fines et il n’est pas toujours

Page 42: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

41

évident de les scinder en groupes distincts. Par exemple, la réponse à la

question 1 : « les téléphones portables » se rapporte au domaine de la

physique en lien aux ondes nécessaires à son utilisation; pourtant son usage

actuel en particulier avec les Smart-Phones se rapproche également du

domaine de l’informatique. Ainsi, certaines ambiguïtés peuvent apparaître en

fonction des représentations que nous avons des diverses propositions. Pour

atténuer cette erreur de représentation, je réalise après coup qu’il aurait été

plus judicieux d’apporter une précision à l’item en formulant : « la

communication via téléphone portable ».

Une autre grande difficulté naît du fait que la séparation entre les sciences

est encore arbitraire et très abstraite à cet âge-là. En outre, les élèves ne font

pas les liens entre les divers pans de chaque discipline. Ils émettent donc leurs

choix sans savoir à quels domaines scientifiques ils appartiennent. Ce

phénomène est renforcé par les cloisonnements possibles entre disciplines,

comme nous avons pu le voir entre la Physique et l’Informatique.

Une dernière difficulté à pointer en lien étroit avec la précédente est la

contrainte de devoir formuler des propositions simples et compréhensibles par

des élèves de cette tranche d’âge qui n’ont des représentations que limitées

des Sciences.

Voici donc quelques exemples de la manière dont ont été élaborées les

propositions pour chacun des domaines scientifiques :

La Physique : elle est composée de deux propositions appartenant à

l’Astronomie et de deux propositions en rapport au fonctionnement d’objet

ou machine (locomotive et téléphone portable). Cette dernière proposition,

bien que ambiguë, a été la dernière ajoutée au questionnaire, car il a été

particulièrement difficile de trouver une proposition intéressante se rapportant

à la Physique pour la question1 : sujet d’un DVD. J’avais d’abord proposé « les

circuits électriques », puis « les centrales nucléaires », enfin « les ondes radios »,

mais ces items étaient trop complexes ou pas assez attrayants pour des

élèves. Nous pouvons aussi questionner la présence de l’Astronomie à

l’intérieur de la Physique, qui aurait pu trouver sa place ailleurs.

Page 43: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

42

La Biologie : elle comporte deux propositions en lien au monde animal (ours

et papillon) et deux autres qui traitent du fonctionnement du corps humain. Il

était important d’établir un équilibre entre ces deux versants de la Biologie.

L’Informatique : elle constitue le domaine dont les propositions sont sans

doute les plus explicites face à la discipline scientifique qu’elles représentent.

Trois d’entre elles sont en lien direct avec un ordinateur. Un item aborde

néanmoins ce thème de manière plus large : « visiter une exposition sur

l’évolution des moyens de communication et découvrir les premières radios,

téléphones, télévisions, etc. » (à la question 2) ; cette proposition permet

d’évaluer l’intérêt général pour les moyens de communication. Pour cette

question uniquement, le domaine de l’Informatique a été modifié en

Électronique/informatique afin d’être plus cohérent avec l’item qui lui est

associé.

La Chimie : cette discipline présente des propositions variées, telles qu’une

expérience de mélange de substances, « la visite d’une fabrique de

médicaments » pour couvrir le pan pharmaceutique de cette discipline et

également « la fabrication d’un parfum ». Pour cette dernière proposition, un

terme meilleur aurait été « arome », mais celui-ci aurait été incompréhensible

par les élèves (nous rejoignons ici une limite soulevée). Le terme « parfum » se

rapporte effectivement plus au cosmétique et crée ainsi un petit biais dans le

questionnaire. Il a donc fallu adapter les propositions au public ciblé.

Les Sciences de la Terre et de l’Environnement : les réponses à choix qui

représentent ce domaine sont diversifiés : « partir à la découverte d’un

glacier », « construire un volcan miniature », regarder un dvd sur « les tornades

et les tremblements de terre », comprendre « comment prédire la météo » :

toutes ces propositions cherchent à s’inscrire dans un contexte attractif

susceptible d’éveiller l’intérêt des élèves. La proposition « construire un volcan

miniature » par exemple, est une expérience souvent réalisée en classe et qui

obtient généralement un certain succès auprès des élèves.

Page 44: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

43

4.2.4 Mise en œuvre

Les questionnaires ont été directement transmis manuellement aux

enseignants pour qu’ils les fassent remplir à leurs élèves avant de me les

renvoyer complétés par courrier. Les enseignants avaient pour consigne

d’informer les élèves du caractère anonyme de ce sondage et d’insister sur

son aspect personnel et sur l’importance d’indiquer leur proposition préférée

parmi les différents choix. Pour la dernière question, les enseignants avaient

tous en leur possession les quatre images en couleurs et format A4 à afficher

au tableau pour qu’elles soient visibles de tous.

Ayant fait passer ce questionnaire dans ma propre classe de 5P, j’ai pu

observer que quelques minutes suffisaient aux élèves pour le remplir. Il est

intéressant de relever les commentaires de plusieurs d’entre eux qui

n’hésitaient pas à dire : « c’est trop difficile de choisir, il y a tout qui me fait

envie ! ». Ces remarques valident d’une certaine manière la dimension

attractive recherchée par les activités proposées.

Tous les questionnaires ont été complétés et me sont parvenus en retour entre

les mois d’avril et mai 2013.

4.3 Procédure de traitement et analyse des données

4.3.1 Procédure de traitement des données

Les réponses au questionnaire sont traitées avec Excel sous forme

d’analyses statistiques en pointant le pourcentage d’élèves interrogés, de

filles et de garçons ayant choisi chacune des disciplines scientifiques. Des

comparaisons peuvent alors être établies pour vérifier si certains domaines

scientifiques éveillent significativement davantage l’intérêt de l’un ou l’autre

sexe. Des analyses plus profondes permettent aussi d’identifier quels types

d’activités ont le plus séduit les élèves et si des différences significatives sont à

relever concernant chacune des questions posées. Finalement, des parallèles

peuvent également être pointés entre les résultats du questionnaire et le taux

de présence des deux sexes dans ces mêmes filières aux études supérieures.

Page 45: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

44

Les résultats statistiques seront présentés sous forme de tableaux et

graphiques afin de faciliter leur lecture.

4.3.2 Axes d’analyse du questionnaire quantitatif

Tout d’abord, en analysant statistiquement les données, nous pourrons

rapidement pointer quels sont les domaines scientifiques les plus sollicités par

les élèves et quels sont ceux qui remportent un succès plus mitigé. Les

éventuelles différences d’intérêt entre filles et garçons seront également

observées pour chacune des disciplines scientifiques.

Nous chercherons aussi à définir si les élèves ont tendance individuellement à

opter pour des réponses appartenant au même domaine scientifique ou si

leurs choix divergent selon les questions. Par ailleurs, nous analyserons si des

tendances générales sont à observer, par exemple si une ou plusieurs

activités particulières remportent un franc succès auprès d’une majorité

d’élèves.

Dans un second temps, nous tenterons de mettre en lien les résultats

statistiques avec le taux de garçons et de filles étudiant dans ces disciplines

au niveau des études secondaires et supérieures.

Finalement, nous chercherons à expliquer les différences ou similitudes

constatées parmi les choix réalisés par les filles et les garçons dans le cadre

de ce questionnaire.

Page 46: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

45

V. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ET ANALYSE

5.1. Présentation des résultats

5.1.1 Introduction

Pour exposer les résultats de ma recherche, je partirai d’abord du général

en examinant la popularité globale des domaines parmi les choix des élèves.

Puis je porterai un regard plus aiguisé sur les différences entre filles et garçons

en traitant séparément chacune des questions du questionnaire. À ce stade

chaque proposition sera considérée au regard des choix émis par les élèves

selon leur sexe. Finalement, je dresserai un aperçu du nombre de domaines

scientifiques sélectionnés par élève pour pointer si les sujets de l’étude ont

tendance individuellement à réaliser des choix appartenant au même

domaine ou si ceux-ci se répartissent parmi les disciplines scientifiques

proposées et divergent selon le contexte énoncé.

5.1.2 Tendances générales

Tout d’abord, si nous considérons les résultats du questionnaire dans leur

globalité au-delà de la différenciation sexuée, nous remarquons que

certaines disciplines scientifiques ont remporté plus de succès auprès des

élèves que d’autres. Si nous observons le tableau 1 qui informe en

pourcentage du nombre de réponses accordées à chacune des disciplines,

nous constatons que le domaine Sciences de la Terre et de l’Environnement

rassemble un tiers des réponses à lui seul ; tandis que l’Informatique en queue

de liste n’a conquis qu’un dixième des choix d’élèves.

Tableau 1 : Pourcentage des réponses par discipline.

Somme de PHYSIQUE

Somme de BIOLOGIE

Somme d’INFORMATIQUE

Somme de CHIMIE

Somme des Sciences TERRE et ENV.

TOTAL % 23.9 % 17.7 % 11.5 % 13.9 % 33.0 %

La mise en graphique de ces données (cf. Graphique 1) fait clairement

ressortir l’intérêt manifesté pour les Sciences de la Terre et de l’Environnement

qui surpasse largement les autres disciplines. La Physique apparaît en

seconde position en réunissant près d’un quart des réponses. La Biologie et la

Page 47: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

46

Chimie suivent avec respectivement 17,7% et 13,9% des choix. Comme

annoncé, l’Informatique relève un moindre intérêt en comptabilisant trois fois

moins de réponses que le premier domaine choisi.

Désormais si nous nous intéressons à la répartition des choix selon le sexe, nous

remarquons que les taux consacrés à chaque discipline diffèrent de manière

significative entre les sexes (cf. Tableau 2). Les filles sont plus de deux fois plus

nombreuses à opter pour la Biologie et trois fois plus nombreuses à choisir la

Chimie. Les garçons de leur côté se distinguent en Physique : 28,3 % de leurs

choix contre 19,5 % des choix féminins et en Sciences de la Terre et de

l’Environnement qui constitue 40 % de leurs réponses. Par ailleurs, ils choisissent

presque deux fois plus l’Informatique que les filles.

Tableau 2 : Pourcentage des réponses par discipline selon le sexe.

Somme de PHYSIQUE

Somme de BIOLOGIE

Somme d’INFORMATIQUE

Somme de CHIMIE

Somme des Sciences TERRE et ENV.

FILLES 19.5 % 24.7 % 8.5 % 21.1 % 26.2 %

GARCONS 28.4 % 10.7 % 14.4 % 6.7 % 39.8 %

Le graphique 2, basé sur ces données et présenté ci-dessous illustre les

tendances observées. Premier constat intéressant que nous pouvons faire : le

0

5

10

15

20

25

30

35

TOTAL %

Graphique 1: Pourcentage des réponses par discipline

Somme de PHYSIQUE %

Somme de BIOLOGIE %

Somme de INFORMATIQUE %

Somme de CHIMIE %

Somme de TERRE et ENV. %

Page 48: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

47

domaine Sciences de la Terre et de l’Environnement apparait comme

premier choix à la fois pour les filles et pour les garçons. Toutefois, alors que

celui-ci a une certaine longueur d’avance sur les autres disciplines chez les

garçons (39,8 % des choix réalisés), il se rapproche plus du pourcentage des

autres domaines chez les filles (26,2 % des sélections). Une autre différence

marquée entre les sexes concerne les domaines de la Biologie et de la

Chimie. Alors que ces domaines sont les moins prisés par les garçons, en

apparaissant en quatrième (10,7 %) et dernière position (6,7 %), les filles leur

accordent une importance particulière en choisissant 24,7 % des réponses

dans le domaine de la Biologie, ce qui représente le deuxième domaine le

plus plébiscité et 21,2 % dans celui de la Chimie qui se place donc en

troisième position. Il est pertinent de relever aussi le niveau de l’Informatique

qui tient la troisième place chez les garçons avec 14,4 % des choix et se

place nettement en dernière position chez les filles avec 8,5 % des réponses.

Par ailleurs, si on porte un regard comparatif global sur les graphiques féminin

et masculin, nous relevons que les taux rattachés aux différents domaines

scientifiques sont beaucoup plus disparates chez les garçons. En effet, ces

derniers consacrent leurs choix principalement à deux domaines : Les

Sciences de la Terre et de l’Environnement (39,8 %) et la Physique (28,4 %),

tandis que les trois autres domaines constituent des taux beaucoup plus bas.

Les filles, quant à elles, répartissent leurs choix de manière plus régulière, en

combinant des totaux situés entre 19,5 % et 26,2 %. La seule distinction

majeure concerne l’Informatique qui représente une sélection plu limitée.

Page 49: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

48

Pour comprendre ces divergences de choix entre les sexes, il est nécessaire

de se pencher sur chacune des questions posées en considérant les différents

items proposés.

Le tableau 3 indique le total de réponses rassemblées par domaine pour

chacune des questions énoncées. Il offre ainsi une vision d’ensemble des

résultats du questionnaire que nous allons analyser par la suite.

Tableau 3 : Total de réponses obtenues par domaine pour chaque question

Question 1 Question 2 Question 3 Question 4 Question 5 TOTAL

Total Physique ♂ 14 31 - 15 46 106

Total Physique ♀ 7 23 - 4 30 64

TOTAL PHYSIQUE 21 54 - 19 76 170

Total Biologie ♂ 11 - 6 13 10 40

Total Biologie ♀ 23 - 22 28 8 81

TOTAL BIOLOGIE 34 - 28 41 18 121

Total Informatique ♂ - 6 18 21 9 54

Total Informatique ♀ - 5 5 11 9 30

TOTAL INFORMATIQUE - 11 23 32 18 84

Total Chimie ♂ 3 3 8 - 10 24

Total Chimie♀ 20 11 19 - 19 69

TOTAL CHIMIE 23 14 27 - 29 93

Total Terre et Env. ♂ 47 35 43 25 - 150

Total Terre et Env. ♀ 16 27 20 23 - 86

TOTAL TERRE et ENV. 63 62 63 48 - 236

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

FILLES GARCONS

Graphique 2: Pourcentage des réponses par discipline selon le sexe

Somme de PHYSIQUE %

Somme de BIOLOGIE %

Somme de INFORMATIQUE %

Somme de CHIMIE %

Somme de TERRE et ENV. %

Page 50: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

49

Dans le tableau 3, ci-dessus, nous pouvons d’une part comparer le nombre

de réponses récoltées par discipline pour chacune des questions, en

observant l’axe horizontal. Ainsi, il nous est possible de pointer quelles ont été

les propositions qui ont remporté le plus de succès pour chaque domaine

scientifique. D’autre part, en considérant l’axe vertical du tableau, nous

pouvons non seulement comparer les résultats obtenus par sexe pour

chacune des questions, les totaux se retrouvant sous les symboles ♂ pour les

garçons et ♀ pour les filles ; mais aussi confronter les domaines scientifiques

entre eux en mesurant la répartition des choix parmi les disciplines selon les

questions posées. Notons également que chaque colonne comprend une

partie grisée qui correspond à l’absence de réponse possible dans le

domaine concerné. En effet, il convient de rappeler ici que chaque question

offre quatre possibilités de réponses appartenant à quatre domaines

différents et donc que chaque discipline scientifique n’est pas représentée

sous l’une des questions du questionnaire.

Plusieurs éléments peuvent être pointés à partir du tableau 3 : tout d’abord,

nous remarquons que le pourcentage final de choix par discipline relève

d’une somme composée de totaux très variables d’une question à l’autre.

Par exemple, le domaine de la Physique récolte 19 voix sur un total de 141

sujets (filles et garçons confondus) à la question 4, alors qu’elle en rassemble

76 à la question 5. L’intérêt manifesté pour la Physique varie donc selon le

contexte et les propositions à choix. En revanche, le domaine Sciences de la

Terre et de l’Environnement obtient des résultats plus réguliers en accumulant

63 réponses totales à la question 1, 62 réponses à la question 2, à nouveau 63

réponses à la question 3 et finalement 48 à la question 4. Néanmoins, si nous

nous penchons sur la composition de ces chiffres, nous distinguons une

certaine variabilité entre les choix des filles et des garçons : alors que trois fois

plus de garçons que de filles choisissent les Sciences de la Terre et de

l’Environnement à la question 1 (47 garçons contre 16 filles), la répartition

filles-garçons est plus ou moins comparable aux questions 2 et 4

(respectivement 35 garçons face à 27 filles pour la question 2, et 25 garçons

face à 23 filles pour la question 4). Un autre constat mérite d’être dégagé en

rapport à la Biologie : alors que ce domaine est deux à trois fois plus

Page 51: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

50

sélectionné par les filles aux questions 1, 3 et 4, il séduit plus les garçons à la

question 5 en rassemblant 10 garçons contre 8 filles.

Une description plus complète et plus fine sera réalisée dans la suite de ce

travail.

5.1.3 Description des résultats par question

Nous allons désormais reprendre les résultats du questionnaire en

considérant les réponses question par question afin de relever quels ont été

les domaines privilégiés par les élèves selon le contexte énoncé et les items à

choix.

Question 1 :

Question 1 : DVD

Si tu pouvais regarder un dvd sur l’un des sujets suivants, lequel choisirais-tu ?

Numérote de 1 à 4 tes choix. Le 1 est le sujet que tu préfères, le 4 celui qui

t’intéresse le moins.

(a) Les tornades et les tremblements de terre.

(b) Le comportement de l’ourse polaire avec ses petits.

(c) La fabrication d’un parfum.

(d) Les téléphones portables.

La question 1 se distingue du reste du questionnaire, car elle a pour consigne

de numéroter les propositions de 1 à 4 selon la préférence. Toutefois, par

souci de simplification du traitement des données, j’ai finalement décidé de

ne tenir compte que du premier choix émis afin de faciliter sa comparaison

avec les questions suivantes.

Les domaines scientifiques associés aux propositions sont les suivants :

(a) Sciences de la Terre et de l’Environnement

(b) Biologie

(c) Chimie

(d) Physique

Page 52: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

51

Le tableau 4, reproduit ci-dessous, indique dans les colonnes deux à quatre,

le nombre de garçons, de filles et le nombre total de sujets qui ont opté pour

chacune des propositions. Dans les colonnes cinq à sept, ces mêmes

données ont été mises sous forme de pourcentage. La discipline scientifique

grisée n’apparaît pas parmi les propositions à choix.

Tableau 4 : Résultats de la question1

Garçons Filles TOTAL Garçons % Filles % Total %

PHYSIQUE (d) 14 7 21 18.67% 10.61% 14.64%

BIOLOGIE (b) 11 23 34 14.67% 34.85% 24.76%

INFORMATIQUE - - - - - -

CHIMIE (c) 3 20 23 4.00% 30.30% 17.15%

TERRE ET ENV. (a) 47 16 63 62.67% 24.24% 43.45%

TOTAL 75 66 141 100.00% 100.00% 100.00%

Les données en pourcentage nous permettent de créer un graphique

comparatif des résultats des filles et des garçons.

Le tableau 4 et le graphique 3 exposent de manière éloquente un certain

contraste entre les réponses sélectionnées par les filles et celles choisies par

les garçons.

Une très grande majorité de garçons (62,67 %) placent en première position

la « réponse a » : Les tornades et les tremblements de terre associée aux

0.00%

10.00%

20.00%

30.00%

40.00%

50.00%

60.00%

70.00%

Graphique 3 Résultats de la question 1

% Garçons

% Filles

Page 53: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

52

Sciences de la Terre et de l’Environnement. Cette même réponse est choisie

par environ une fille sur quatre et apparaît en troisième choix derrière la

Biologie et la Chimie. En effet, un tiers des filles privilégient la « réponse b » : Le

comportement de l’ourse polaire avec ses petits et 30,30 % « la réponse c » :

La fabrication d’un parfum. Seuls 3 garçons sur 75 ont d’ailleurs opté pour

cette dernière réponse appartenant au domaine de la Chimie et ils sont deux

fois moins nombreux que les filles à avoir choisi « la réponse b » rattachée à la

Biologie. La « réponse d » illustrant la Physique : Les téléphones portables est le

deuxième choix le plus populaire auprès des garçons (18,67 %) alors qu’il

arrive en dernière position chez les filles (10, 61 %).

Si nous portons un regard d’ensemble sur les choix portés à la question 1 (cf.

Graphique 4), nous constatons que la « réponse a » des Sciences de la Terre

et de l’Environnement (43% des premières sélections) se distingue clairement

des autres propositions, principalement grâce au choix massif des garçons. La

Biologie suit avec 25 %, cette fois-ci grâce à l’appui des filles. La « réponse

d » : Les téléphones portables apparaît comme la moins populaire avec

seulement 15 % des votes.

15%

25%

0% 17%

43%

Graphique 4 Total des réponses de la question 1 par

domaine

PHYSIQUE

BIOLOGIE

INFORMATIQUE

CHIMIE

TERRE ET ENV.

Page 54: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

53

Question 2 :

Question 2 : Sortie

Tu pars en course d’école et tu peux choisir l’activité que tu feras pendant cette

journée. Entoure la lettre de la proposition que tu préfères.

a) Observer les étoiles et les planètes avec un télescope.

b) Visiter une exposition sur l’évolution des moyens de communication et

découvrir les premières radios, téléphones, télévisions, etc.

c) Visiter une fabrique de médicaments pour découvrir comment les

médicaments sont conçus.

d) Partir à la découverte d’un glacier.

Les domaines scientifiques associés aux propositions sont les suivants :

(a) Physique

(b) Électronique/Informatique

(c) Chimie

(d) Sciences de la Terre et de l’Environnement

Dès la deuxième question, la consigne se simplifie : les élèves doivent choisir

une seule proposition parmi les quatre qui sont proposées. Le tableau 5, ci-

dessous, expose les résultats de cette question.

Tableau 5 : Résultats de la question 2

Garçons Filles TOTAL Garçons % Filles % Total %

PHYSIQUE (a) 31 23 54 41.33% 34.85% 38.09%

BIOLOGIE - - - - - -

INFORMATIQUE (b) 6 5 11 8.00% 7.58% 7.79%

CHIMIE (c) 3 11 14 4.00% 16.67% 10.33%

TERRE ET ENV. (d) 35 27 62 46.67% 40.91% 43.79%

TOTAL 75 66 141 100.00% 100.00% 100.00%

Le graphique 5, basé sur les pourcentages de réponses par domaine, rend

mieux visible la comparaison entre filles et garçons.

Page 55: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

54

Excepté pour la Chimie, nous remarquons que les choix entre filles et garçons

divergent moins sur cette question que sur la question 1. La « réponse d » :

Partir à la découverte d’un glacier obtient le plus de succès auprès des filles

et des garçons. De même la « réponse a » appartenant à la Physique :

Observer les étoiles et les planètes avec un télescope se place en deuxième

position également pour les deux sexes. L’Électronique/Informatique relève

un intérêt plus faible chez les filles (7,58 %) et les garçons (8 %) qui se montrent

plus réticents à visiter une exposition sur l’évolution des moyens de

communication et découvrir les premières radios, téléphones, télévisions,

etc.(« réponse b »). Comme annoncé, la « réponse c » : Visiter une fabrique

de médicaments pour découvrir comment les médicaments sont conçus

reste très impopulaire du côté des garçons et remporte un succès timide chez

les filles (16,67 %) bien que cette réponse soit quatre fois plus choisie par

celles-ci que les garçons.

Le graphique 6, ci-contre, dégage

clairement les deux domaines scientifiques

qui remportent le plus de succès pour

cette question : les Sciences de la Terre et

de l’Environnement et la Physique.

0.00%

5.00%

10.00%

15.00%

20.00%

25.00%

30.00%

35.00%

40.00%

45.00%

50.00%

Graphique 5 Résultats de la question 2

% Garçons

% Filles

38%

0% 8% 10%

44%

Graphique 6 Total réponses question 2 par domaine

PHYSIQUE

BIOLOGIE

INFORMATIQUE

CHIMIE

TERRE ET ENV.

Page 56: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

55

Question 3 :

Question 3 : Expérience à réaliser

En classe, nous te proposons de participer à l’une des activités suivantes, laquelle

choisis-tu ?

a) Démonter un ordinateur (pour voir comment il est construit à

l’intérieur), puis le remonter.

b) Observer en classe la transformation de chenilles en papillons.

c) Créer un volcan miniature.

d) Transformer la couleur de l’eau en la mélangeant à différentes

substances liquides et solides.

As-tu déjà fait l’activité choisie ? oui / non

Les domaines scientifiques associés aux propositions sont les suivants :

(a) Informatique

(b) Biologie

(c) Sciences de la Terre et de l’Environnement

(d) Chimie

Cette question place les élèves dans un contexte connu en cours de

Sciences, celui de la réalisation d’une expérience. Les élèves doivent choisir

l’expérience qu’ils préféreraient mener parmi les propositions.

Le tableau 6 présente les résultats obtenus pour cette question, complété par

le graphique 7 qui transmet visuellement les tendances qui se dessinent.

Tableau 6 : Résultats de la question 3

Garçons Filles TOTAL Garçons % Filles % Total %

PHYSIQUE - - - - - -

BIOLOGIE (b) 6 22 28 8.00% 33.33% 20.67%

INFORMATIQUE (a) 18 5 23 24.00% 7.58% 15.79%

CHIMIE (d) 8 19 27 10.67% 28.79% 19.73%

TERRE ET ENV. (c) 43 20 63 57.33% 30.30% 43.82%

TOTAL 75 66 141 100.00% 100.00% 100.00%

Page 57: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

56

Les réponses à la question 3 présentent des divergences notables entre filles

et garçons. Le contraste le plus frappant concerne la Biologie, qui est le

domaine le plus apprécié par les filles (un tiers d’entre elles) à travers la

« réponse b » : Observer en classe la transformation de chenilles en papillons,

alors qu’il représente le domaine le moins choisi par les garçons (8 % d’entre

eux). Dans la même lignée, les filles ont opté presque trois fois plus que les

garçons pour la proposition de Chimie : Transformer la couleur de l’eau en la

mélangeant à différentes substances liquides et solides. À l’inverse, les

garçons souhaitent trois fois plus que les filles démonter un ordinateur (pour

voir comment il est construit à l’intérieur), puis le remonter (« réponse a » liée à

l’Informatique). Finalement, le domaine scientifique qui demeure le grand

gagnant auprès des garçons est toujours les Sciences de la Terre et de

l’Environnement qui rassemble plus de la moitié d’entre eux (57,33 %) et séduit

également beaucoup les filles (30,30 %) avec sa proposition : Créer un volcan

miniature.

Le graphique 8 résume la répartition des

réponses dans les quatre domaines à choix

pour cette question. Les Sciences de la Terre et

de l’Environnement obtiennent donc deux à

trois fois plus de votes que les autres domaines.

0.00%

10.00%

20.00%

30.00%

40.00%

50.00%

60.00%

70.00%

Graphique 7 Résultats de la question 3

% Garçons

% Filles

0%

20%

16%

20%

44%

Graphique 8 Total réponses question 3 par domaine

PHYSIQUE

BIOLOGIE

INFORMATIQUE

CHIMIE

TERRE ET ENV.

Page 58: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

57

Question 4 :

Question 4 : Explication

Que choisirais-tu, si l’on pouvait t’expliquer l’un des sujets suivants ?

a) Comment marche une locomotive ?

b) Comment fonctionne notre système digestif : Que se passe-t-il dans

notre corps avec les aliments que nous avalons ?

c) Comment prédire la météo ?

d) Comment fonctionne un ordinateur ?

Les domaines scientifiques associés aux propositions sont les suivants :

(a) Physique

(b) Biologie

(c) Sciences de la Terre et de l’Environnement

(d) Informatique

La question 4 concerne une explication à recevoir sur le fonctionnement d’un

objet ou d’un processus scientifique. À nouveau, les résultats ont été

synthétisés dans un tableau et dans un graphique.

Tableau 7 : Résultats de la question 4

Garçons Filles TOTAL Garçons % Filles % Total %

PHYSIQUE (a) 15 4 19 20.27% 6.06% 13.17%

BIOLOGIE (b) 13 28 41 17.57% 42.42% 30.00%

INFORMATIQUE (d) 21 11 32 28.38% 16.67% 22.52%

CHIMIE - - - - - -

TERRE ET ENV. (c) 25 23 48 33.78% 34.85% 34.32%

TOTAL 74 66 140 100.00% 100.00% 100.00%

Page 59: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

58

Un premier point intéressant à relever dans ces résultats touche les Sciences

de la Terre et de l’Environnement, alors que ce domaine était jusqu’à présent

largement plus désigné par les garçons, les filles se montrent ici légèrement

plus nombreuses qu’eux à opter pour la « réponse c » : Comment prédire la

météo ? Toutefois, leur premier choix se distingue quand même de l’autre

sexe en préférant la « réponse b » : Comment fonctionne notre système

digestif : Que se passe-t-il dans notre corps avec les aliments que nous

avalons ? pour 42,42 % d’entre elles contre 17,57 % des garçons choisissant la

Biologie. Par ailleurs, seulement quatre filles aimeraient connaître en priorité

comment fonctionne une locomotive, « réponse a » associée à la Physique

alors que quinze garçons s’intéressent à cette question. Finalement,

l’Informatique remporte un succès un peu plus important que dans les

précédentes questions. En effet, 28,38 % des garçons choisissent la « réponse

d » : comment fonctionne un

ordinateur ?, ce qui place ce domaine

en deuxième position. Ainsi, cette

discipline comptabilise au total 23 %

des choix (cf. graphique 10), même si la

différence filles/garçons reste marquée

dans ce domaine.

0.00%

5.00%

10.00%

15.00%

20.00%

25.00%

30.00%

35.00%

40.00%

45.00%

Graphique 9 Résultats de la question 4

% Garçons

% Filles

13%

30%

23% 0%

34%

Graphique 10 Total réponses question 4 par domaine

PHYSIQUE

BIOLOGIE

INFORMATIQUE

CHIMIE

TERRE ET ENV.

Page 60: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

59

Question 5 :

Question 5 : Image

Quelle est ton image préférée ? Coche ton choix.

(a) (b)

(c) (d)

Les domaines scientifiques associés aux propositions sont les suivants :

(a) Informatique

(b) Chimie

(c) Physique

(d) Biologie

Le questionnaire se termine par une question singulière : les élèves doivent

sélectionner leur image préférée parmi quatre possibilités. La consigne ne

donne aucune autre indication. Les élèves sont donc amenés à choisir leur

image de manière spontanée en indiquant laquelle les « attirent » le plus. Le

but de cette question est d’éveiller chez eux un processus d’association

d’idées à partir des images. Celui-ci va susciter chez eux des sentiments

positifs ou négatifs rattachés à un intérêt ou désintérêt plus ou moins grand

qui leur permettra de trancher en pointant l’image attirant le plus leur faveur.

Page 61: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

60

Tableau 8 : Résultats de la question 5

Garçons Filles TOTAL Garçons % Filles % Total %

PHYSIQUE (c) 46 30 76 61.33% 45.45% 53.39%

BIOLOGIE (d) 10 8 18 13.33% 12.12% 12.73%

INFORMATIQUE (a) 9 9 18 12.00% 13.64% 12.82%

CHIMIE (b) 10 19 29 13.33% 28.79% 21.06%

TERRE ET ENV. - - - - - -

TOTAL 75 66 141 100.00% 100.00% 100.00%

En nous basant sur le tableau 8 et le graphique 11, force est de constater

qu’une image sort du lot auprès des deux sexes : « l’image c » qui représente

une vue spatiale des planètes et du soleil en association au domaine de la

Physique. Cette image remporte 61,33 % des voies des garçons et 45,45 % des

filles. L’image scientifique d’un corps humain (« image d ») illustrant la Biologie

et « l’image a » correspondant à un ordinateur et donc, par extension, au

domaine de l’Informatique remportent un succès beaucoup plus mitigé, mais

similaire aux deux sexes. Finalement, « l’image b », symbole de la Chimie

séduit deux fois plus les filles que les garçons en remportant 28,79 % des

sélections féminines.

Les résultats totaux de chaque discipline font largement transparaître le

triomphe de la Physique (53 %) avec son « image c » (cf. Graphique 12).

0.00%

10.00%

20.00%

30.00%

40.00%

50.00%

60.00%

70.00%

Graphique 11 Résultats de la question 5

% Garçons

% Filles

Page 62: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

61

5.1.4 Choix des élèves selon les disciplines

Parmi les données récoltées au travers du questionnaire, il convient de

porter également un regard plus individuel sur les élèves en observant si au-

delà de leur appartenance sexuelle, les sujets ont tendance à choisir

individuellement des réponses appartenant au(x) même(s) domaine(s)

scientifique(s) ou si leurs choix varient selon le contexte et les propositions

suggérées. Le tableau 9 indique quelles sont les répartitions des réponses des

élèves parmi les domaines scientifiques. Ainsi, l’entrée « 4 –1 » indique le

nombre de sujets- garçons, filles et totaux- qui ont choisi 4 réponses dans un

domaine et 1 réponse dans un autre. Par exemple, si nous observons la ligne

« 3 –1 – 1 », nous constatons que 18 garçons et 17 filles ont sélectionné 3

réponses appartenant à un domaine, une autre appartenant à un deuxième

domaine et une dernière appartenant à un troisième domaine. Cette

configuration de réponses correspond donc à 24 % des garçons et à 25,76 %

des filles.

Par ailleurs, les lignes 9 à 12 renseignent sur le nombre de domaines

scientifiques sélectionnés par les élèves, sachant que chacun d’eux a choisi

au minimum deux domaines (étant donné que chaque discipline n’est

représentée que sous quatre questions) et au maximum cinq domaines si

chaque réponse configurait un domaine différent.

53%

13%

13%

21%

0%

Graphique 12 Total réponses question 5 par domaine

PHYSIQUE

BIOLOGIE

INFORMATIQUE

CHIMIE

TERRE ET ENV.

Page 63: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

62

Finalement, la dernière ligne du tableau comptabilise le nombre d’élèves

ayant choisi au minimum trois réponses appartenant au même domaine.

Cette donnée nous permet de connaître le nombre d’élèves présentant un

profil fortement orientée dans une discipline, car les sujets concernés auront

choisi au moins 75% des réponses associées à un domaine scientifique sur

quatre questions donc 100% de réponses possibles.

Tableau 9 : Répartition des domaines par élève

Garçons Filles Total Garçons % Filles % Total %

4 – 1 3 3 6 4.00% 4.55% 4.27%

3 – 2 24 6 30 32.00% 9.09% 20.55%

3 -- 1 – 1 18 17 35 24.00% 25.76% 24.88%

2 -- 2 – 1 16 27 43 21.33% 40.91% 31.12%

2 - 1 - 1 – 1 12 10 22 16.00% 15.15% 15.58%

1 - 1 - 1 -1 -1 2 3 5 2.67% 4.55% 3.61%

TOTAL 75 66 141 100.00% 100.00% 100.00%

2 domaines 27 9 36 36.00% 13.64% 25.53%

3 domaines 34 44 78 45.33% 66.67% 55.32%

4 domaines 12 10 22 16.00% 15.15% 15.60%

5 domaines 2 3 5 2.67% 4.55% 3.55%

Min. 3 rép. 45 26 71 60.00% 39.39% 49.70%

Le graphique 13, ci-dessous, permet de visualiser la répartition des domaines

sélectionnés par les élèves filles et garçons et de porter un regard comparatif

entre les sexes.

0.00%

5.00%

10.00%

15.00%

20.00%

25.00%

30.00%

35.00%

40.00%

45.00%

4 -- 1 3 -- 2 3 -- 1 -- 1 2 -- 2 -- 1 2 - 1 - 1 - 1 1 - 1 - 1 -1 -1

Graphique 13 Répartition des domaines par élève

% Garçons

% Filles

Page 64: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

63

Tout d’abord, le graphique 13 révèle qu’il y a très peu de participants filles ou

garçons qui ont choisi toutes les propositions appartenant à un domaine,

répondant à la configuration « 4 – 1 » (4,27% uniquement) ou qui au contraire

ont sélectionné uniquement des disciplines différentes « 1-1-1-1-1 » (5 élèves

au total). En outre, les garçons se sont plus focalisés sur certains domaines

que les filles. En effet, 36% d’entre eux n’ont répartis leurs choix que dans deux

domaines scientifiques contre 13,64 % des filles dans le même cas (Cf.

Graphique 14a ci-dessous). Les filles en revanche sont plus nombreuses à

avoir réparti leur choix parmi 3 domaines et en particulier en respectant « le

schéma 2 – 2 – 1 » (Cf. Graphique 13).

Les graphiques 14b et 14c expriment la répartition des filles et des garçons

selon le nombre de domaines qu’ils ont sélectionnés. Nous percevons que les

différences majeures se situent au niveau du taux ayant opté pour 2

domaines (bleu) et pour 3 domaines (rouge).

0.00%

10.00%

20.00%

30.00%

40.00%

50.00%

60.00%

70.00%

2 domaines 3 domaines 4 domaines 5 domaines

Graphique 14a Nombre de domaines sélectionnés par élève

% Garçons

%Filles

2 domaine

s 14%

3 domaine

s 67%

4 domaine

s 15%

5 domaine

s 4%

Graphique 14c % Filles

2 domaine

s 36%

3 domaine

s 45%

4 domaine

s 16%

5 domaine

s 3%

Graphique 14b % Garçons

Page 65: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

64

Le dernier graphique 15 se base sur les chiffres de la dernière ligne du tableau

9. Il rapporte le pourcentage de sujets qui ont choisi au minimum trois

réponses appartenant à la même discipline scientifique et qui de ce fait

peuvent être considérés comme ayant un intérêt majoritairement orienté

pour celle-ci. Une différence sensible entre les sexes est à noter : alors que les

garçons ont pour 60% d’entre eux choisi trois réponses ou plus appartenant à

un domaine scientifique particulier, seules près de 40% des filles partagent

cette situation. La moyenne générale se situe donc à environ 50%, soit un

sujet sur deux dont l’intérêt peut être rattaché à une discipline en particulier.

5.2. Analyse des résultats

5.2.1 Discussion et synthèse des résultats

La présentation des résultats du questionnaire a pointé plusieurs

différences significatives entre les réponses des filles et celles des garçons. Il

existerait donc manifestement certaines divergences d’intérêt pour les

disciplines scientifiques selon les sexes. Il faut toutefois considérer ces

conclusions avec grande précaution. L’enjeu de cette partie de mon travail

sera d’analyser et de chercher à comprendre l’origine de ces disparités en

me basant notamment sur le cadrage théorique réalisé en première partie

de ce travail.

0.00%

10.00%

20.00%

30.00%

40.00%

50.00%

60.00%

70.00%

% Garçons %Filles % Total

Graphique 15 Pourcentage d'élèves ayant choisi au moins 3 réponses

appartenant au même domaine scientifique

Min. 3 rép.

Page 66: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

65

Synthèse par domaine scientifique

Tout d’abord, j’effectuerai une synthèse par domaine scientifique des

données présentées en portant un regard interprétatif sur les résultats. Dans

un second temps, je tirerai des conclusions générales à partir de mon travail

réflexif.

La Physique

Sur la base des données récoltées, la Physique ne fait pas l’objet d’un très

grand contraste entre les choix des filles et des garçons. Même si les garçons

présentent toujours un pourcentage un peu plus élevé à choisir cette

discipline que les filles, ces dernières restent plus ou moins dans la même

gamme d’intérêt, à l’exception de la question 4 sur laquelle nous allons

revenir.

En revanche, nous notons que l’intérêt porté à cette discipline n’est pas très

régulier et semble facilement varier en fonction des propositions à choix. Alors

que filles et garçons se montrent peu intéressés à regarder un reportage sur

les téléphones portables à la question 1 (seuls 21 votes sur 141 sujets) et se

passent volontiers de comprendre comment fonctionne une locomotive à la

question 4 (proposition sélectionnée seulement 19 fois au total), les élèves

souhaitent pour 38% d’entre eux observer les étoiles et les planètes avec un

télescope dans le cadre d’une sortie de classe (question 2) et plus de la

moitié d’entre eux se ruent sur l’image représentant une vue de l’espace à la

question 5. Ainsi, la Physique apparaît comme le domaine scientifique le

moins populaire aux questions 1 et 4, puis obtient la proposition qui décoche

le plus de choix du questionnaire à la question 5. En effet, l’image

représentant la Physique à la question 5 est la proposition qui suscite le plus

grand engouement chez les élèves parmi tous les choix du questionnaire, en

étant choisie par 76 élèves (cf. Tableau 3, p.48).

Au vue des deux réponses à succès remportées par la Physique, force est de

constater que l’aspect le plus apprécié par les élèves dans cette discipline se

rapporte à l’Astronomie, domaine qui ne représente finalement qu’un pan

isolé de cette discipline.

Page 67: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

66

Revenons toutefois sur la proposition de la question 4, qui constitue le seul

contraste pertinent entre les sexes que nous pouvons relever dans cette

discipline. Celui-ci s’ancre dans le contexte d’une explication scientifique à

recevoir. Même si les garçons se montrent peu nombreux à choisir la

proposition appartenant à la Physique : Comment marche une locomotive ?

(20 % d’entre eux), les filles optent encore trois fois moins qu’eux pour cette

réponse en étant seulement quatre à la choisir. Comment justifier ce

décalage ? Nous ne pouvons pas exclure qu’une majorité de filles aient

éliminé spontanément cet item en lui prêtant une valeur masculine, soit en

lien à la portée « mécanique » de la proposition, domaine largement investi

par les hommes, comme nous avons pu le voir dans le cadrage théorique ou

alors par association de la proposition aux véhicules et transports qui sont

aussi fortement connotés masculins.

Désormais, portons un regard sur la répartition des sexes dans cette discipline

au niveau des études. Comme nous avons pu le pointer dans le cadrage

théorique, la Physique est un domaine beaucoup moins étudié par les filles.

En effet, rappelons qu’en 2003 au collège, sur 25 % de filles inscrites en

« Mathématiques et Sciences expérimentales », la quasi-totalité d’entre elles

choisissaient d’étudier la « Biologie et Chimie » en évitant l’option « Physique

et Application des Maths » (SRED 2007). Au niveau des études supérieures, en

2012-2013, seules 52 étudiantes étaient inscrites dans la section Physique de la

Faculté des Sciences de l’Université de Genève contre 152 étudiants inscrits

(Université de Genève, 2013). Notons également que beaucoup d’étudiants

s’intéressant à cette discipline préfèrent l’étudier à l’EPFL qui a une valeur plus

prestigieuse et compte beaucoup plus d’étudiants.

En conclusion, si nous faisons l’hypothèse que c’est principalement

l’Astronomie qui a attiré les filles en Physique à travers ce questionnaire, il est

peu surprenant qu’elles soient peu présentes dans cette filière, comme ce

sous-domaine ne représente qu’un faible pourcentage des études de

Physique. Par ailleurs, il semble que les filles sont effectivement plus

représentées dans les études d’Astrophysique en France.

Page 68: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

67

La Biologie

Dans cette étude, la Biologie est l’un des domaines qui relèvent une forte

différence d’intérêt entre les filles et les garçons. Globalement, c’est une

discipline qui a été fortement choisie par les filles et très peu par les garçons.

Sur les quatre propositions couvertes par ce domaine, trois apparaissent

comme premier choix féminin. De leur côté, les garçons ne sont toujours

qu’une poignée à opter pour ce domaine avec un maximum de 13 voix

rassemblées à la question 4 (cf. Tableau 3, p.48). Ainsi, les filles sont deux à

trois fois plus nombreuses à choisir la Biologie aux questions 1, 3 et 4.

L’écart d’intérêt entre les sexes le plus frappant apparaît aux questions 3 et 4,

où la proposition de la Biologie est la plus choisie par les filles et la moins

sélectionnée par les garçons. Dans le cas de la question 4, les écolières sont

42 % à choisir la Biologie contre 18 % des écoliers. Ainsi, une majorité de filles

face à une minorité de garçons souhaiteraient comprendre en priorité

comment fonctionne notre système digestif et ce qui se passe dans notre

corps avec les aliments que nous avalons. Le faible intérêt des garçons sur

cette question, qui reste néanmoins loin d’une désertion de leur part, peut

s’expliquer par une répartition plus équilibrée entre les différentes propositions

et un intérêt manifestement plus accru pour les autres items proposés.

En réponse à la question 3, un tiers des filles contre 8% des garçons voudraient

réaliser l’expérience d’observer en classe la transformation de chenilles en

papillons. La préférence des garçons se porte majoritairement sur la

construction d’un volcan miniature propre au domaine des Sciences de la

Terre et de l’Environnement. Les filles favorisent donc une expérience

« contemplative », là où les garçons optent pour une expérience « pratique ».

Ce constat rappelle le début du titre d’un article de Collet (2008) : « Il

expérimente, elle regarde…». Rappelons que dans cet article, Collet présente

les résultats d’une étude démontrant le contraste entre le caractère « actif »

des garçons face à la « passivité » des filles dans les livres documentaires pour

enfants. Ainsi, les différences observées entre les sexes pour cette question 3,

seraient-elles l’ombre d’un ancrage inconscient sur les rôles à tenir par les

deux sexes face aux Sciences ?

Page 69: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

68

Par ailleurs, nous pouvons aussi proposer une explication s’appuyant sur les

stéréotypes de sexe pour justifier l’écart d’intérêt entre filles et garçons face à

la proposition de la question 1. Celle-ci portant sur le sujet d’un dvd à

visionner : Le comportement de l’ourse polaire avec ses petits oppose une

sélection de 35% des filles à 15% de garçons. Il est possible que les écolières se

soient senties plus concernées par ce choix en accordant une importance

particulière à la dimension maternelle sous-jacente dans cette proposition.

Les garçons de leur côté souhaitaient peut-être davantage affirmer leur

« virilité en devenir » en choisissant massivement (à 63 %) la proposition des

Sciences de la Terre et de l’Environnement : Les tornades et les tremblements

de terre évoquant une pointe d’aventure et de courage. Nous constatons

donc qu’au travers de leur première réponse, les filles et garçons semblent

intégrer les schémas traditionnels attribués aux représentations de leur sexe

en s’appuyant sur des compétences sexuées. Comme cité dans le cadrage

théorique, Vouillot défend cette idée : « Les compétences sont perçues

comme sexuées. Les filles et les garçons ont donc tendance à s’attribuer les

compétences reconnues à leur sexe et à se sentir pas ou peu de

compétences pour les activités de l’autre sexe. » (2004, p.52).

À la lumière de ces premières réponses, tout prête à croire que seules les filles

sont « vouées » à être sensible au domaine de la Biologie. Toutefois, la

question 5 bouscule les préjugés : les garçons, qui étaient jusqu’à présent en

retrait par rapport aux filles dans les réponses ayant trait à la Biologie,

dépassent légèrement ces dernières en étant un petit peu plus nombreux à

choisir l’image représentant l’intérieur squelettique d’un corps humain. Mais

peut-être que cette infime avance relève uniquement du fait que le corps

représenté est celui d’un homme auquel les filles ont eu sans doute plus de

peine à s’identifier ?

En somme, l’intérêt féminin pour la Biologie fortement démontré dans cette

étude peut être mis en relation avec la présence majoritaire de ces dernières

dans les études consacrées à cette discipline scientifique. En 2013, la section

de Biologie de la Faculté des Sciences accueillait, à Genève, 232 filles et 177

Page 70: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

69

garçons (Université de Genève, 2013) ; une majorité féminine qui ressort

largement dans notre enquête.

L’Informatique

Les résultats de cette recherche accordent à l’Informatique la place du

domaine remportant globalement le moins de succès auprès des élèves

avec seulement 11,5 % des réponses totales (cf. Tableau 1, p.45). Une

certaine différence d’intérêt entre les filles et les garçons est à relever avec

8,5 % de choix attribués à cette discipline par les filles face à 14,4 % des choix

masculins. Tout l’écart d’intérêt entre les sexes se situe en fait sur sa cote de

popularité face aux autres domaines scientifiques : alors que l’Informatique

constitue le domaine le moins populaire chez les filles, il arrive en troisième

place du côté des garçons, devant la Biologie et la Chimie.

Les élèves manifestent un faible intérêt commun pour cette discipline aux

réponses 2 et 5, en accordant ainsi peut de valeur à l’excursion permettant

de visiter une exposition sur l’évolution des moyens de communication et

découvrir les premières radios, téléphones, télévisions, etc.et en choisissant

très peu l’image d’un ordinateur (9 filles et 9 garçons). En revanche,

l’Informatique se place en deuxième choix de popularité auprès des garçons

aux questions 3 et 4.

À la question 3, 24 % des écoliers souhaiteraient démonter un ordinateur

(pour voir comment il est construit à l’intérieur), puis le remonter, alors que

cette expérience n’emballe que 7,5 % des écolières, ce qui représente un

score nettement inférieur aux autres propositions présentées. En outre, 28%

des garçons voudraient comprendre comment fonctionne un ordinateur à la

question 4 ; une explication qui n’éveille la curiosité que de 17% des filles et

place cette proposition en avant-dernière position.

Quelle explication pouvons-nous avancer pour trouver un motif à ce manque

d’intérêt manifesté par les filles à l’égard de cette discipline ? Les filles ne se

sentent-elles pas en possession des compétences requises pour être aptes à

maîtriser la technologie et ses outils, comme l’avançaient certains garçons

interrogés dans une étude menée en 2003 par Lafortune et Solar ?

Page 71: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

70

D’ailleurs, ce faible intérêt se reflète également dans les études supérieures

où seules 17 filles sur 151 étudiants étaient inscrites en Informatique à

l’Université de Genève pendant l’année 2012-2013 (Université de Genève,

2013).

Du côté des garçons, nous pouvons nous étonner du faible intérêt manifesté

pour cette discipline, alors que, par la suite, les métiers rattachés sont très

prisés par les garçons scientifiques. Nous pouvons justifier cet écart en

supposant que ce qui attire les hommes dans l’Informatique, ce sont l’emploi

et les salaires, intérêts qui n’ont pas encore de valeur à cet âge-là. Ainsi, ce

questionnaire exclut toute la dimension liée aux stratégies de carrière qui sont

sexuées et viendront se greffer par la suite en creusant encore davantage les

écarts entre les sexes.

La Chimie

Avec la Biologie, la Chimie est le deuxième domaine qui présente un

décalage particulièrement important entre les choix féminins et masculins de

cette étude. Occupant la place du domaine remportant le moins de succès

auprès des garçons en rassemblant seulement 24 voix réparties sur les quatre

propositions du domaine, il réunit pourtant 21,1 % des choix des écolières en

se plaçant en troisième position, derrière la Biologie (cf. Tableau 2, p.46).

Cet écart d’intérêt entre les sexes mérite une attention particulière, car il est

visible sur les quatre propositions appartenant à la Chimie.

La divergence la plus frappante se découvre à la question 1 : 30 % des filles,

désirent visionner un reportage sur la fabrication d’un parfum, alors que cette

proposition ne séduit que 4% des garçons. Rappelons cependant que la

désertion des écoliers sur ce choix peut se justifier en partie par leur choix

massif déployé (à 62%) pour les tornades et tremblements de terre comme

nous avons pu l’interpréter précédemment. Cet écart peut également être

expliqué par les projections des enfants sur l’objet du « parfum » qui subit

peut-être une association féminine basée sur des stéréotypes, tels que « une

fille doit sentir bon, se faire belle, être désirable », au même titre que la

proposition mettant en scène une maman ourse s’adressait peut-être

Page 72: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

71

prioritairement aux filles dans la tête des garçons. Si les élèves avaient ces

aprioris en tête en remplissant le questionnaire, il n’est pas étonnant d’obtenir

un résultat si important pour la proposition des Sciences de la Terre et de

l’Environnement. En effet, une bonne partie des garçons éliminaient peut-être

d’emblée les deux réponses qu’ils considéraient inconsciemment comme

féminines.

En ce qui concerne les trois autres propositions, les filles se montrent toujours

deux à quatre fois plus intéressées que les garçons que ce soit pour visiter une

fabrique de médicaments ou pour mélanger des substances afin de réaliser

une expérience de Chimie. L’intérêt pour cette dernière proposition peut

aussi s’apparenter à certaines représentations : la Chimie se rapproche des

potions magiques et comme les sorcières représentent des personnages

positifs dans les histoires modernes, il ne serait pas surprenant que les filles

soient attirées par ce type d’activités se rapprochant de personnages

merveilleux.

Même si les garçons montrent un intérêt relativement limité pour ce domaine,

ils sont tout aussi nombreux, voire davantage, dans les études supérieures de

Chimie. Les chiffres statistiques de l’année 2012-2013 révèlent que 157

garçons et 123 filles étaient inscrits dans cette filière (Université de Genève,

2013). En revanche, si nous nous penchons sur le détail de ces chiffres, nous

constatons que la grande majorité des étudiantes dans cette discipline sont

en Biochimie (98 d’entre elles contre seulement 22 hommes) et que la plupart

des hommes suivent le cursus de Chimie basique (115 d’entre eux contre 45

femmes).

Les Sciences de la Terre et de l’Environnement

Le domaine des Sciences de la Terre et de l’Environnement dont j’ai déjà pu

largement exposer le succès obtient de loin la première place parmi les

intérêts des élèves. S’il totalise un tiers des réponses accordées au

questionnaire, son succès est encore plus imposant du côté des garçons

avec 40 % des réponses qui lui sont consacrées. Les filles quant à elles lui

octroient 26 % de leurs choix et ne lui accordent la place de proposition la

Page 73: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

72

plus populaire qu’à la question 2 avec la sortie de classe à la découverte

d’un glacier. Les écoliers garçons en revanche lui accordent leur préférence

à toutes les questions où cette discipline apparaît.

Comment expliquer l’engouement remarquable pour cette discipline, en

particulier auprès des garçons ?

Si nous examinons les réponses qui lui sont associées, nous remarquons que

trois propositions parmi les quatre présentées se rattachent à des

représentations communes, sans doute recherchées par les garçons. En effet,

les propositions suivantes : les tornades et les tremblements de terre (question

1), partir à la découverte d’un glacier (question 2) et créer un volcan

miniature (question 3) évoquent toutes des idées « d’aventure », « de

courage » et «d’ambition ». Ces caractéristiques s’apparentent beaucoup

aux représentations des qualités définissant à la fois le « scientifique-type » et

le stéréotype masculin selon Collet (2009) : « ambitieux, combatif, audacieux,

froid, indépendant, à l’esprit logique, rationnel, obsédé de l’objet au

détriment de la relation, excluant de la sensibilité ». Vu sous cet angle, il n’est

pas étonnant que ces propositions séduisent particulièrement les garçons et il

est même plutôt encourageant de constater qu’un grand nombre de filles

optent aussi pour ces choix.

Pour terminer, faisons un petit détour du côté des études consacrées à cette

discipline où nous constatons que la répartition hommes-femmes est

globalement assez homogène en accueillant 159 étudiantes et 183 étudiants

durant l’année 2012-2013 (Université de Genève, 2013).

Constats généraux

De manière globale, nous avons pu constater à travers la présentation des

résultats et l’analyse du questionnaire que les filles présentent des choix plus

diversifiés que les garçons. Les garçons se concentrent généralement sur une

ou deux propositions à choix- souvent les Sciences de la Terre et de

l’Environnement et la Physique. Les filles quant-à elles se répartissent de

manière plus équilibrée entre les disciplines (excepté pour la question 4) et

accordent plus facilement leur choix à des domaines scientifiques qui varient

Page 74: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

73

d’une question à l’autre. En somme, les filles s’intéressent globalement à plus

de domaines scientifiques différents. D’ailleurs, alors que les garçons ont en

moyenne toujours opté en priorité pour les propositions des Sciences de la

Terre et de l’Environnement, les filles ont accordé leur préférence trois fois à la

Biologie, une fois à la Physique et une autre aux Sciences de la Terre et de

l’Environnement.

Par ailleurs, comme nous l’avons relevé, les plus grands contrastes entre filles

et garçons relèvent des domaines de la Biologie et de la Chimie qui

rencontrent un fort engouement féminin et une réticence masculine.

La Physique peut être mise en opposition au domaine des Sciences de la

Terre et de l’Environnement en raison de son succès très irrégulier selon les

questions alors que ce dernier obtient un triomphe constant.

L’Informatique se distingue principalement des autres disciplines par le faible

intérêt qu’elle suscite chez les deux sexes, en particulier auprès des filles.

Il est intéressant de relever que pour chacune des questions, il y a souvent

une ou deux propositions qui sortent du lot, qui sont d’ailleurs rarement les

mêmes entre les sexes.

La proposition qui remporte le plus de succès est l’image des planètes à la

question 5, qui est rattachée à la Physique. Elle rassemble 76 choix d’élèves,

donc plus de la moitié des participants du questionnaire. Par ailleurs, la

question 5 est celle qui met le plus d’élèves d’accord en montrant très peu

de divergences entre les sexes. La réponse qui obtient le plus grand succès

auprès des garçons est les tornades et les tremblements de terre de la

question 1 avec 47 votes ; du côté des filles il s’agit de l’image de Physique

(30 votes), suivie du fonctionnement de l’appareil digestif de la question 4 (28

choix) dans le domaine de la Biologie. Les deux réponses qui récoltent le

moins d’intérêt sont la visite de l’exposition sur l’évolution des moyens de

communication (11 sélections) et la visite d’une fabrique de médicaments

(14 sélections) de la question 2 qui confirment le désintérêt porté aux visites

par rapport aux activités et expériences physiques tellement plus stimulantes

pour des élèves.

Page 75: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

74

5.2.2 Réponses à la question de recherche

Garçons et filles ont-ils des champs d’intérêt différents face aux Sciences qui

prédisposent leur futur choix professionnel dans ce domaine ?

Suite à l’étude réalisée, je constate que les filles et les garçons présentent

manifestement quelques champs d’intérêt différents face aux disciplines

scientifiques, mais que ces différences sont certainement liées aux

représentations sexuées associées à ces mêmes disciplines. Ainsi, les

propositions qui ont dévoilé les plus grands écarts entre les intérêts des filles et

des garçons pouvaient éveiller chez les sujets des connotations féminines ou

masculines susceptibles d’influencer leur choix.

Ce phénomène n’est d’ailleurs pas surprenant, car comme nous avons

cherché à illustrer les disciplines avec des éléments compréhensibles pour cet

âge, les représentations que nous avons trouvées étaient souvent sexuées.

Par exemple, l’observation de la transformation de chenilles en papillons n’est

pas sexuée en soi, mais elle constitue une expérience passive qui remplit une

attente stéréotypée féminine. L’ourse et ses petits se rattachent à la

maternité. La fabrication du parfum éveille l’idée des cosmétiques et donc

penche aussi du côté féminin. Les tornades et les tremblements de terre ou le

volcan illustrent le danger, l’aventure et appellent donc le « courage

masculin ».

Ces observations nous font prendre conscience que l’univers connu des

enfants est très sexué et en conséquence, tout ce qui s’y rapporte a

tendance à aussi être sexué. En outre, les associations courantes que nous

faisons spontanément avec les disciplines scientifiques s’ancrent dans des

stéréotypes sexués : la Biologie, c’est la vie et donc la maternité ; les Sciences

de la Terre, ce sont des phénomènes gigantesques et impersonnels, donc par

extension « masculins ». La matière même des Sciences se trouve être sexuée.

Ainsi, nous relevons un intérêt féminin beaucoup plus fort pour la Biologie,

discipline qui au niveau de études supérieures est justement davantage

investi par les femmes. La Chimie et les Sciences de la Terre et de

l’Environnement qui ont également récolté un important succès auprès des

Page 76: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

75

filles s’avèrent être des filières scientifiques également plus féminisées, où le

nombre d’étudiantes est comparable à celui des hommes. La Physique qui

regroupe un pourcentage de choix légèrement plus faible mais quand

même significatif n’illustre pas le peu de femmes présentent dans ces filières,

mais ce constat s’explique certainement par l’attirance principale des filles

pour l’Astronomie qui ne concerne qu’un faible pan de ce domaine. Pour

finir, l’Informatique qui dénote un très faible intérêt des filles est assez

représentatif de la réalité du champ d’études de cette discipline, où la

présence des filles est plutôt rare. Toutefois, le succès très mitigée remporté

aussi par cette discipline auprès des garçons peut laisser penser que les

propositions à choix pour ce domaine étaient tout simplement moins

attrayantes que les autres et donc pas forcément révélatrices de l’intérêt

porté à cette discipline. Ou alors, comme relevé précédemment, le faible

intérêt des garçons s’explique ici, car les principales motivations pour ce

domaine intégrant les questions de salaires et d’emploi n’apparaissent que

par la suite.

Du côté des garçons, la percée d’intérêt impressionnante qu’ils ont montré à

l’égard des Sciences de la Terre et de l’Environnement ne se vérifie pas

particulièrement dans les études supérieures qui concernent ce domaine. En

effet, les étudiants y sont à peine plus nombreux que les femmes. Ainsi, il faut

comprendre cet intérêt massif en examinant les propositions sous l’angle des

projections sexuées qui leur sont attribuées en termes d’attentes et de

compétences associées.

5.2.3 Réponses aux autres questions

Les élèves optent-ils individuellement et globalement pour des choix

appartenant au même domaine scientifique ?

La majorité des garçons (60%) ont tendance à opter pour des choix

appartenant au même domaine scientifique. En revanche, les filles ont plus

facilement varié leurs sélections en fonction du contexte d’énonciation et

des propositions à choix. Elles présentent ainsi un intérêt plus diversifié à

l’égard des Sciences.

Page 77: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

76

Est-ce que certains domaines sont beaucoup plus sollicités par les élèves que

d’autres ?

Le domaine le plus choisi par les filles et les garçons en termes de choix portés

à cette discipline est les Sciences de la Terre et de l’Environnement.

Néanmoins, les filles ont plus souvent choisi la Biologie comme premier choix

et elles ont souvent opté aussi pour les réponses se rapportant au domaine

de la Chimie. Les garçons de leur côté ont aussi accordé un grand nombre

de leurs choix à la Physique.

Distinguons-nous une ou plusieurs différence(s) marquée(s) entre filles et

garçons face aux disciplines scientifiques? Quelles sont-ces différences ?

Les principales différences entre les filles et les garçons concernent les

domaines de la Biologie et de la Chimie, dans lesquels les filles ont beaucoup

plus dirigé leurs choix que les garçons. Ces derniers ont pour leur part souvent

été plus nombreux que les filles à opter pour les Sciences de la Terre et de

l’Environnement et la Physique.

Pouvons-nous mettre en liens ces différences avec le taux de garçons et de

filles étudiant dans ces disciplines au niveau des études supérieures ?

Les conclusions de la recherche présentent globalement un intérêt féminin

pour les disciplines scientifiques qui correspond aux domaines où les femmes

sont les plus représentées dans les études supérieures.

Comment expliquer/justifier les différences ou similitudes parmi les choix

réalisés par les filles et les garçons dans le cadre de ce questionnaire ?

Comme je l’ai évoqué précédemment, je considère que les principales

différences observées entre filles et garçons résident dans les représentations

que les élèves se font des propositions, celles-ci pouvant être plus ou moins

sexuées selon les indices textuels des items et les connotations sexuées

associées aux éléments. Les élèves ont donc tendance à choisir des

propositions dans lesquelles ils sont en mesure de se projeter et qui

correspondent à l’image qu’ils ont d’eux-mêmes. Ils se basent notamment sur

Page 78: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

77

les compétences et les attentes qu’ils associent aux différents choix à

disposition.

5.2.4 Réponses aux hypothèses

Comme je l’avais présagé, certains domaines scientifiques ont remporté

un succès beaucoup plus considérable auprès des élèves que d’autres. Ainsi,

le domaine des Sciences de la Terre et de l’Environnement se distingue

clairement des autres disciplines.

Par ailleurs, j’ai été surprise de constater autant d’écarts d’intérêt entre les

filles et les garçons selon les questions posées et les propositions à choix. Je

m’attendais à des positions plus ou moins variées parmi les élèves, mais sans

différence majeure entre les sexes. En effet, le cadrage théorique ayant

largement exposé l’influence des représentations sexuées et des stéréotypes

de sexe dans les choix d’études, je pensais qu’il n’existait pas ou peu de

différence de goût ou d’intérêt marqué entre les sexes face aux disciplines

scientifiques. Je restais donc persuadée que les parcours scolaires étaient

principalement conditionnés par la valeur accordée à l’identité sexuée et le

besoin plus ou moins fort de se conformer aux représentations qui lui sont

associées.

Je me suis donc étonnée dans un premier temps de relever parfois des choix

diamétralement opposés entre filles et garçons et des intérêts qui semblaient

si marqués entre les sexes.

Puis, c’est en cherchant à comprendre l’origine des différences d’intérêt

entre filles et garçons que j’ai constaté que le contexte d’énonciation et les

propositions à choix que j’avais élaborés n’étaient pas entièrement neutres et

dénués d’influence sexuée comme je l’aurais initialement souhaité. En effet,

j’ai rapidement pu relever que les items pour lesquels les intérêts des filles et

des garçons se différenciaient, voire s’opposaient le plus farouchement,

étaient ceux qui pouvaient le plus facilement être associés à des

représentations sexuées ou des stéréotypes de sexe. J’ai ainsi pu réaliser

l’impossibilité de créer un contexte entièrement neutre. Comme je l’ai pointé

dans le cadrage théorique, en évoluant dans un environnement fortement

Page 79: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

78

stéréotypé, l’enfant est depuis sa naissance conditionné à catégoriser et

associer des attitudes, des attentes et des compétences différentes aux deux

sexes.

Je constate donc finalement qu’ à défaut d’être en opposition avec les

éléments théoriques que j’ai pu exposer en première partie de ce travail,

l’analyse de ma recherche est au contraire une bonne illustration des

influences que peuvent avoir les représentations sexuées sur la prise de

décision d’élèves dans le champ scientifique.

Cette recherche permet donc d’apporter un éclairage sur certains éléments

à l’origine des différences de choix- et par extension d’orientation- dans les

domaines scientifiques.

5.2.5 Difficultés rencontrées

J’ai rencontré plusieurs difficultés en menant ce travail de recherche.

Tout d’abord, comme j’ai pu l’annoncer en formulant les limites du

questionnaire, les cloisons entre les disciplines scientifiques sont parfois très

fines et il existe des champs communs entre elles. En plus, comme les élèves

ont une connaissance et une compréhension encore limitée des Sciences à

cet âge, leur distinction peut être parfois très arbitraire et abstraite. Ainsi,

certaines ambiguïtés pouvaient apparaître selon les représentations que les

élèves avaient des diverses propositions.

Par ailleurs, l’objet-même de cette étude est délicat à traiter. En effet, je

cherche à définir s’il existe des différences d’intérêts naturelles chez les filles et

les garçons face aux disciplines scientifiques qui justifieraient le taux inégal de

représentations masculine et féminine dans ces filières et métiers ou si c’est

l’influence et les stéréotypes sexués de la société qui créent ces disparités. Or,

comme nous l’avons vu, il est très probable que les enfants interrogés soient

déjà influencés par ces mêmes stéréotypes liés au genre. Pour cette raison,

même si j’ai cherché à soumettre des propositions les plus neutres possibles, il

a été nécessaire de tenir compte des éventuelles projections sexuées pour

interpréter les résultats avec la plus grande justesse possible. Ainsi, j’ai pu

Page 80: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

79

réaliser à quel point il est difficile, voire impossible, de savoir si les enfants

émettent leurs choix selon leur intérêt scientifique ou selon leur adhésion à

leur rôle de sexe. En effet, il paraît très probable et pertinent au vue des

résultats de ce questionnaire, que les représentations scientifiques communes

soient déjà empreintes de stéréotypes sexués. Ces « stéréotypes scientifiques »

sont, comme nous l’avons présenté, basés sur des compétences et des

caractéristiques sexuées projetées sur les éléments caractérisant les activités

scientifiques (la passivité, la maternité, la beauté, la contemplation pour les

filles, le danger, l’aventure, l’action, la manipulation pour les garçons). Ceux-

ci sont donc fortement liés à l’identité sexuée de chacun ; ils ont ainsi été

intégrés par les enfants dès leur plus tendre enfance.

Finalement, cette étude me permettait de comparer les intérêts portés aux

disciplines scientifiques entre elles, sans pour autant être en mesure de définir

le réel degré d’intérêt accordé à chacune des disciplines. Par exemple, il est

probable que certains élèves de l’étude s’intéressaient vivement aux

Sciences et souhaitaient choisir plusieurs propositions présentées mais

devaient se rabattre sur une seule en éliminant certains de leurs intérêts. À

l’inverse, plusieurs élèves n’étaient peut-être séduits par aucune des

propositions à choix et devaient se contenter de désigner la moins

repoussante pour eux. Ainsi, ce travail m’a permis de pointer les taux de

préférences accordées aux différentes disciplines scientifiques sans pouvoir

juger si ces intérêts sont plutôt forts ou faibles.

Page 81: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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VI. CONCLUSION

Ce travail de longue haleine a été très enrichissant pour moi et parsemé

de découvertes intéressantes et insolites.

Réalisant un mémoire axé principalement sur l’influence des stéréotypes de

sexe et après avoir effectué, à travers mon cadrage théorique, une longue

mise en garde des nombreux pièges qu’ils recèlent, j’ai été, ironie du sort, la

première surprise à découvrir qu’ils œuvraient au cœur même de mon travail.

Ma naïveté de croire que les différences naturelles pouvaient être facilement

détectées s’est vite évanouie en constatant l’impossibilité de démêler

l’intérêt né d’une attirance naturelle et celui qui est suscité par le besoin de

conformisme à un rôle sexué.

Ma recherche m’a toutefois permis de dégager un certain nombre de

conclusions quant aux différences d’intérêt porté par les filles et les garçons

face aux disciplines scientifiques. Même si j’ai conscience aujourd’hui que

ces différences d’intérêt sont probablement moins naturelles que motivées

par l’univers inconscient et coriace des stéréotypes sexués, elles demeurent

quand même présentes et guident nos décisions en traçant les chemins de

nos vies.

Il aurait été intéressant je pense (dans le cadre d’un travail de plus grande

ampleur) de compléter les données du questionnaire par quelques entretiens

d’élèves qui nous auraient permis de mieux saisir la portée des

représentations, sexuées ou non, associées aux différentes propositions ayant

pu avoir un impact sur le choix des élèves.

D’où vient ce besoin si oppressant de répondre à des normes et de se plier à

des attentes imposées pour toujours reconfirmer son identité ? Vouillot répond

en soutenant que « notre identité n’est jamais complètement assurée et a

sans cesse besoin d’être confirmée par le regard d’autrui » (2007, p.95).

Ainsi, puisque la plupart d’entre nous revêtons spontanément notre costume

social avec son lot de stéréotypes et préjugés, nous pouvons alors considérer

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comme Lorenzi-Cioldi que « tout le monde est en quelque sorte le véhicule

de la production et de la reproduction des stéréotypes de sexe » (1998).

Pourtant, mon naturel optimisme me pousse à ne pas perdre espoir et à

croire que nous pouvons encore agir sur les stéréotypes de sexe afin de les

réduire, à défaut de pouvoir les détruire. Mon champ de bataille est déjà tout

trouvé : ce sera l’école. Mes armes seront la prévention des stéréotypes dans

les manuels scolaires, la sensibilisation auprès de mes collègues enseignants

pour éviter les traitements différenciés à l’égard des filles et des garçons,

l’ouverture des élèves aux métiers de tout horizon sans stigmate sexué, pour

permettre aux jeunes de s’orienter dans les domaines professionnels de leur

choix sans être bousculés par une pression insufflée par les normes sociales.

Ainsi, nous parviendrons peut-être à changer progressivement les mentalités.

La guerre aux stéréotypes sexués ne fait pour moi que commencer !

Page 83: L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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