Mme Benyahia-Taïbi Ghalia Université d’Oran Introduction : Dans ce travail, nous allons approfondir les notions de concurrence et d’innovation tout en insistant sur le rôle des MDD et l’existence de l’imitation dans le secteur. Ce travail analyse les thèmes relatifs à l’innovation et à l’imitation : la R&D dans le secteur, la marque et la stratégie de communication, la qualité, les relations et les accords inter-firmes, l’emploi et les ressources humaines ainsi que la propriété industrielle et sa protection. Enfin, nous présenterons les quelques apports théoriques sur l’imitation dans le secteur agroalimentaire. I. Le produit alimentaire : Le produit alimentaire est la combinaison entre les caractéristiques intrinsèques et extérieures de celui-ci (aspect, saveur, originalité, plaisir attendu, etc.), les facteurs de production (origine, âge, mode de production, etc.) qui ont contribué à son élaboration et sa fabrication, ainsi que ses identifiants (prix, marque, signes distinctifs, etc.). Les attributs d’un produit alimentaire sont sa texture, son goût et son odeur (flavour) ainsi que sa couleur. Les 1 L’innovation et l’imitation dans le secteur agroalimentaire
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L'innovation et l'imitation dans le secteur agroalimentaire
Ghalia TAIBI, "L'identification de l'imitation dans le secteur agro-alimentaire français", Thèse de Doctorat en Stratégie et Management des Organisations, IAE de Lille, juillet 2005.
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Mme Benyahia-Taïbi Ghalia
Université d’Oran
Introduction :
Dans ce travail, nous allons approfondir les notions de concurrence et d’innovation tout en
insistant sur le rôle des MDD et l’existence de l’imitation dans le secteur.
Ce travail analyse les thèmes relatifs à l’innovation et à l’imitation : la R&D dans le secteur,
la marque et la stratégie de communication, la qualité, les relations et les accords inter-firmes,
l’emploi et les ressources humaines ainsi que la propriété industrielle et sa protection. Enfin,
nous présenterons les quelques apports théoriques sur l’imitation dans le secteur
agroalimentaire.
I. Le produit alimentaire :
Le produit alimentaire est la combinaison entre les caractéristiques intrinsèques et extérieures
de celui-ci (aspect, saveur, originalité, plaisir attendu, etc.), les facteurs de production
(origine, âge, mode de production, etc.) qui ont contribué à son élaboration et sa fabrication,
ainsi que ses identifiants (prix, marque, signes distinctifs, etc.). Les attributs d’un produit
alimentaire sont sa texture, son goût et son odeur (flavour) ainsi que sa couleur. Les qualités
organoleptiques d’un produit sont sa texture, son goût et son odeur (B. Yvon, 1996).
D’autres attributs sont à ajouter tels que l’aspect général et la forme notamment l’emballage et
le conditionnement, l’hygiène (conformité à la réglementation), la commodité d’emploi, le
prix, la nutrition prise sous l’aspect de santé et la bonne forme. Cet ensemble comporte quatre
composantes essentielles pouvant interagir. Il s’agit de (P. Aurier et L. Sirieix, 2004) :
Le produit physique (ou le « cœur du produit ») : il représente la partie ingérée par le
consommateur (le jus de fruits par exemple).
Le packaging : c’est son emballage et son conditionnement. Un jus sera conditionné dans
une bouteille en verre, avec une étiquette, il peut être mis en briques de 25cl chacune et
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L’innovation et l’imitation dans le secteur agroalimentaire
entouré de film plastique, etc. Le packaging inclut également la mise en palette permettant
le transport.
Le service associé au produit : tel que les informations sur les étiquettes du produit, sur le
mode de conservation, la composition nutritionnelle, des conseils d’utilisation et de
présentation, l’adresse et le numéro de téléphone du service consommateurs, etc.
La marque : les bénéfices apportés par cet élément sont subjectifs et ne peuvent être
apportés par aucun autre élément. La marque portée par le produit est très importante pour
le consommateur ; elle permet une sorte de sécurité, elle peut faire référence au bon choix,
à la bonne qualité, au sentiment d’accéder à ce qu’il y a de meilleur sur le marché, de plus
innovant, de plus en vogue, etc.
Le produit alimentaire se caractérise par une consommation en état impeccable et une
production agricole saisonnière. Le secteur agroalimentaire a comme matières premières des
denrées alimentaires. Le produit fini n’a pas de service après-vente. Les degrés de liberté de
l’entreprise sont limités mais la qualité est maîtresse.
Pour devenir un produit alimentaire, un produit agricole peut subir les quatre transformations
suivantes (B. Yvon, 1996) :
1. Une transformation physique : le lait devient du fromage.
2. Une transformation de taille de lot (ou un fractionnement) : un bovin devient un
morceau de viande de 250g.
3. Une transformation dans le temps : le blé récolté en juillet devient de la brioche offerte
à la vente sur toute l’année. C’est un allongement du temps de mise à disposition.
4. Une transformation dans l’espace : les petits pois récoltés dans l’Aisne sont
disponibles dans le supermarché Delhaize de Louvain ; c’est un déplacement.
Les consommateurs préfèrent les nouveautés. C’est ce qui confirme la tendance aux produits
transformés même une transformation légère. Cette transformation permet l’apport d’une
régularité, d’un service, d’une disponibilité, d’une reconnaissance et d’une identification
facile.
Le service dans le produit alimentaire est crucial. Il est en évolution constante avec des
déterminants de plus en plus strictes : gain de temps, gain de place, praticité dans l’achat, le
stockage et l’utilisation, des durées de DLC plus longues, etc.(J-M. Bouquery et C. Renault,
1996). Le produit est devenu un service lui-même d’où la notion « produit- services ».
Les produits issus des IAA peuvent avoir comme composantes en services les six aspects
suivants (Déméter 2000, 1999) : 2
1. L’innocuité des produits : c’est le premier service attendu.
2. L’homogénéité et la régularité des caractéristiques du produit (physiques et
biochimiques).
3. La variété de l’offre : la qualité est un service.
4. La connaissance du produit et les informations sur le processus productif dont il est
issu
5. Les prestations de services associés au produit : délais de livraison, réactivité, taux de
services, etc.
6. Les garanties portant sur les produits (les prestations d’assurances).
L’acte d’achat reste l’arbitre entre les différents produits existants. Les critères minimaux
d’acceptabilité d’un produit dans le marché sont fondamentalement : un bon rapport
qualité/prix (ou le respect de la qualité minimale) et un conditionnement adapté. Les produits
qui ne satisferont pas ces critères seront rejetés par l’acte d’achat. Il reste alors à sélectionner
entre les différents produits restants, répondants différemment aux besoins et attentes des
consommateurs ; des nouveaux produits engendrant de nouvelles habitudes de consommation
ou répondant à une tendance, des produits classiques ou des produits anciens rajeunis (J-M.
Bouquery et C. Renault, 1996).
Les services permettent également la fidélisation de la clientèle. La gamme de services dans
les produits devient alors très étendue. Même les produits agricoles disposent d’un certain
éventail (relativement limité) de possibilités d’innovations de produits. Tel est le cas du signe
AB par exemple.
La clé du succès de l’innovation semble être la connaissance du marché final. L’agriculture
de par son éloignement du marché final ne peut réussir ses innovations qu’à travers des
partenariats qui permettent d’accéder aux connaissances requises et offrir des produits-
services adaptés à la demande finale. L’innovation est monopolisée par les acteurs d’aval.
Cependant, ces derniers font face à d’autres types de problèmes en termes d’innovation. C’est
l’un des sujets traités dans le présent travail.
II. La R&D et l’innovation dans le secteur agroalimentaire :
Jusqu’à la seconde guerre mondiale, les IAA n’avaient pas de recherches spécifiques. Toutes
leurs avancées étaient dues à celles des autres secteurs. En 1951, le génie alimentaire (« food
engineering ») est apparu aux Etats-Unis pour devenir un domaine de recherche spécifique. Il
vise le traitement et la transformation des matières premières agricoles. Le génie alimentaire
est arrivé en France à partir de 1961 avec les ouvrages de Loncin et l’établissement de la 3
CERDIA1. Les IAA, comme d’autres secteurs, dépendent et bénéficient encore des progrès
dans les autres secteurs tels que : la physique, la chimie, la biologie ou l’informatique, ainsi
que de l’application des découvertes scientifiques à leur propre domaine (effet de spillovers).
Le secteur a été révolutionné par l’apparition de nouvelles techniques de cuisson,
d’emballage, de transport et de stockage.
Le marketing agroalimentaire s’est développé à la fin des années 60 (B. Yvon, 1996). Le rôle
du marketing dans le secteur pour la génération des innovations est plus important que celui
de la R&D. Le marketing prend de plus en plus d’ampleur surtout avec l’essor des GMS et le
développement des marques.
II.1. Les acteurs de l’innovation dans le secteur :
Globalement, et en matière d’innovations, cinq pôles d’offre et d’initiative peuvent être
distingués. C’est les pôles d’innovation (J-M. Bouquery et C. Renault, 1996) :
1. Les fournisseurs d’équipements des ménages : ils sont un pôle structurel et à long
terme. L’innovation des micro-ondes par exemple a induit des produits micro-
ondables dans leurs emballages, permettant un temps de cuisson plus rapide.
2. Le commerce de détail alimentaire : de part sa participation à la production, la
sélection et la communication, sans oublier ses fonctions logistiques, artisanales et
semi- artisanales sur le point de vente.
3. La restauration : elle a une forte contribution à la diffusion des modes, des nouveaux
goûts et des marques.
4. L’industrie alimentaire : c’est un pôle plus visible. L’industrie alimentaire possède des
capacités d’analyse de la demande, de progrès technologique et de communication.
Elle reflète la nécessité du maintien des parts de marché et des profits des grandes
entreprises. L’innovation est une réponse à la concurrence ou pour la concurrence.
5. Les fournisseurs de l’industrie alimentaire tels que les fournisseurs en équipements. Ils
sont des stimulants de l’innovation grâce à leur proposition pour de nouvelles
techniques de production, de nouveaux champs d’application pour des techniques
existantes, de nouveaux procédés ou process. Les fournisseurs d’emballage sont très
influents.
Pour innover ou gérer son innovation dans les IAA, quatre types de partenariats s’offrent pour
les entreprises (P. Albert, M. Martin et C. Tanguy, 2003).
1 Centre d’Etudes, de Recherche et de Documentation Internationale des IAA. 4
D’abord, les CRITT et les autres centres techniques. Leur rôle principal est d’assurer la
demande en termes de compétences nécessaires.
Ensuite, le syndicat professionnel. Il a un rôle important en matière :
1. Juridique : par la normalisation ou la législation.
2. Technique : sur des technologies standards.
3. De veille et de transmission des informations sur les marchés.
En troisième lieu, les instituts de recherche et les universités. Ces relations sont plutôt
réduites. Dans la majorité des cas, les relations établies avec ce type de partenariat se font
plutôt avec les laboratoires de l’INRA.
Enfin, les écoles, et qui sont très diverses. Elles ont un rôle important dans la filière
concernée. C’est le cas des ENIL (Ecole Nationale de l’Industrie Laitière)dans l’industrie
laitière. Les ENIL ont permis de développer des compétences en matière de recherche
appliquée et de transfert de technologie. Toutefois, divers changements tendent à réduire leur
rôle sur le long terme. Tel est le cas des contraintes réglementaires et des normes sanitaires
plus dures, la concentration de la distribution ou le rôle grandissant des centrales d’achat.
II.2. La R&D dans le secteur agroalimentaire :
Les IAA se situent parmi les plus innovantes des industries traditionnelles. C’est un secteur
où on innove beaucoup sans pour autant consacrer des dépenses énormes en matière de R&D.
En 2003, le budget privé de R&D est trois fois moins que le budget alloué au marketing et à la
promotion des produits (C. Ton Nu, 2004). Ceci peut être expliqué par plusieurs facteurs.
D’abord, la petite taille des entreprises et le manque de moyens en outre, financiers et
humains. En effet, beaucoup d’entreprises ne possèdent pas de services de R&D. La recherche
est cantonnée dans les grandes structures ou dans les organismes publics et privés de
recherche.
Ensuite, les transferts de technologie des fournisseurs. La technologie est une ressource
capitale du processus d’innovation dans certains secteurs. Dans d’autres secteurs tels
l’agroalimentaire, la technologie est plutôt un moyen de construire un avantage concurrentiel
durable. La R&D est généralement concentrée dans les industries et les forces en amont qu’ils
soient fournisseurs de l’agroalimentaire (chimie, mécanique, ingénierie, etc.) ou les services
publics. Les entreprises réalisent plutôt les développement de produits finis, et peuvent
profiter d’un transfert surtout que les industries amont sont de taille mondiale. Les
équipementiers, le secteur des ingrédients ou du génie chimique par exemple, font bénéficier
5
le secteur agroalimentaire de leurs innovations. Sans oublier les centres techniques et les
différents organismes de recherche publique (C. Ton Nu, 2004).
Enfin, la diversité des acteurs internes dans l’innovation explique aussi la faiblesse des
dépenses en R&D dans le secteur. Le service de fabrication et d’entretien par exemple, assure
de nombreuses innovations de détails sans budget identifié.
Les grandes entreprises possèdent leurs propres laboratoires de recherche et se dissocient des
organismes publics de recherche. Généralement, les efforts de R&D des entreprises tendent à
s’intensifier surtout chez les grands groupes de l’agroalimentaire. Le Groupe Danone par
exemple a consacré 0.8% de son chiffre d’affaires à la R&D en 1995 ; le groupe Nestlé a
consacré 1.2% en 1992. Toutefois, on notera le rôle de certaines PME de moins de 250
salariés dans la R&D. Ces entreprises dépensent quasiment autant, au total, que les entreprises
de 250 à 500 salariés ou les entreprises de plus de 1000 salariés. La part des dépenses de R&D
dépasse souvent les 1% du chiffre d’affaires dans les industries PAI (produits alimentaires
intermédiaires) ou des équipements.
Selon l’enquête annuelle du Ministère en charge de la recherche, en 1999, on dénombre 309
entreprises agroalimentaires de plus de 20 salariés qui déclarent exercer une activité de R&D.
Elles représentent 10% du nombre total des entreprises de plus de 20 salariés du secteur et
37.5 % du chiffre d’affaires.
Le tableau suivant donne une vision sur la R&D dans le secteur.
1995 1996 1997 1998 1999
Nombre de chercheurs dans les IAA 1026 1398 1365 1496 1488
Dépenses intérieures en M€ 192.0 304.9 308.3 328.9 328.1
Dépenses extérieures en M€ 16.2 30.2 28.0 29.9 33.8
Tableau n°1 : La R&D des IAA. D’après le Ministère chargé de la recherche in Ministère de
l’Agriculture, de la pêche, de l’alimentation et des affaires rurales, 2002.
Remarques : Les dépenses intérieures se rapportent au financement de structures de recherche
internes à l’entreprise. Les dépenses extérieures sont affectées à des structures externes, telles
que les crédits incitatifs du ministère de l’agriculture.
En 2001, les dépenses intérieures en R&D s’élèvent à 0,7% du chiffre d’affaires. Les
entreprises ont dépensé 351 millions d’euros pour la R&D en 2001. Ce budget est en baisse
de 7% par rapport à 2000.
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Le poids des IAA dans les dépenses intérieures des entreprises françaises toutes industries
confondues, se chiffre à 1.7% du total des dépenses intérieures de R&D. Les dépenses
extérieures de R&D se chiffrent à 32 millions d’euros en 2001 (C. Ton Nu, 2004). En somme
le budget total de R&D dans les IAA s’élève à 383 millions d’euros en 2001 soit moins 22%
par rapport à l’an 2000. Ce chiffre représente dix fois moins que celui de l’industrie
pharmaceutique qui dépense près de 3360 millions d’euros.
Le budget de R&D total des IAA (soit 383 millions d’euros) se divise comme suit (C. Ton
Nu, 2004) : 141 millions d’euros pour le développement, 197 millions d’euros pour la
recherche appliquée et 13 millions d’euros pour la recherche fondamentale. Les dépenses en
R&D des IAA reflètent ainsi davantage des efforts de développement.
La recherche appliquée et les pré-développements sont souvent assurés collectivement dans
des combinaisons diverses selon le financement et l’organisation pratique. L’intervention de
l’état est notable à travers ses établissements de recherche et d’enseignement supérieur. Les
relations entre la recherche et l’université sont souvent d’ordre informel fondées sur des
réseaux qui véhiculent l’information. Ces corps développent à leur tour la recherche
contractuelle (cf. le rôle de la proximité). L’effort de R&D des entreprises dans le secteur
reste modeste comparé à d’autres industries françaises ou à des acteurs européens notamment
aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.
Selon l’enquête du SCEES menée en 1997 sur l’innovation (SCEES, 1998), environ 46% des
entreprises dans le secteur ont réalisé avec succès des innovations technologiques dans la
période allant de 1994 à 1996. Le facteur qui explique la tendance à l’innovation n’est pas
l’activité principale d’une firme mais c’est plutôt sa taille. En effet, 77% des entreprises de
plus de 200 personnes ont innové sur des produits ou procédés de fabrication, contre 37% des
entreprises de moins de 50 salariés. Seulement 9% des innovations réalisées représentent
vraiment des produits porteurs d’une technologie nouvelle pour l’entreprise et le marché
(Ministère de l’Agriculture, 2000). Ce dernier joue un rôle moteur pour l’innovation dans le
secteur.
Plusieurs organismes publics encouragent l’innovation dans le secteur. Parmi lesquels citons
d’abord l’ANVAR.
L’agence accorde des aides pour les projets d’innovations des entreprises. En 1998, l’Agence
a primé 215 projets pour un montant de 106 millions de francs (plus de 16 millions d’euros).
Le Crédit d’Impôt Recherche a fait bénéficier les entreprises innovantes avec un montant de
56 milliards de francs (plus de 8.5 milliards d’euros) en 1996. 7
L’ANVAR a soutenu en 2000 environ 227 initiatives. Le montant global d’aides s’élève à
13,2 millions d’euros. Les principaux bénéficiaires de ces aides sont des entreprises de moins
de 50 salariés, âgées de plus de 10 ans. La moitié de ce chiffre (des 227 initiatives) est dédié à
de nouveaux clients de l’ANVAR. Les secteurs les plus innovants sont surtout (par ordre) : les
équipements, les fabricants d’ingrédients, la confiserie, la boulangerie, la pâtisserie, les fruits
et les légumes. Parmi ces aides, 119 aides sont consacrés à la faisabilité et au développement
de projets d’innovations. Environ 39% de ce nombre (des 119 aides) relèvent d’un état de l’art
français, 40% d’un état de l’art européen et 21% sont une rupture (représentent une première
européenne ou mondiale). Il faut noter aussi la montée des innovations de conditionnement.
L’innovation de produit est de plus en plus financée par les entreprises elles-mêmes. Les
perspectives d’innovation futures dans le secteur relèvent : des ingrédients et aliments à
bénéfice santé, le conditionnement et les innovations liées à la sécurité (traçabilité,
technologies de décontamination) (C. Ton Nu, 2000).
En 2003, l’ANVAR a soutenu 212 initiatives dans les IAA avec un montant total d’aide de
15,7 millions d’euros toutes procédures et tous budgets confondus, sur la base des aides
décidées en 2003. Ce nombre est en baisse de 17% par rapport à 2002. Le montant des aides
est en baisse de 12%. Le montant total de programmes s’élève à 50.75 millions d’euros. Il
faudra souligner ici les aides allouées par les actions déléguées des tiers (ADT) qui
correspondent au quart des montants attribués et au tiers des projets en nombre. Les fonds
Feder Objectifs représentent la moitié des ADT en nombre et en montant. Les aides attribuées
par les conseils régionaux représentent 26% des ADT en nombre et 36% en montant (C. Ton
Nu, 2004).
Ensuite, les Centres Techniques et l’ACTIA sont également des organismes publics aidant les
entreprises de l’agroalimentaire (notamment les PME) dans la réalisation de leurs
programmes d’innovation.
Les Centres Techniques et de recherche ont pour mission la conduite des recherches
collectives. Celles-ci permettront aux filières ou plus généralement, aux acteurs
agroalimentaires, d’avoir une meilleure efficacité économique. Ils assurent également la
validité et la diffusion des résultats. Ces centres apportent leur aide dans la mise au point de
nouvelles techniques. Ils contribuent aussi au développement de la connaissance sur la filière
et la consommation des produits associés. Le rôle de ces centres est triple : observatoire,
analyse des marchés et promotion.
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Enfin, l’Union Européenne de son côté, a prévu des actions spécialement conçues pour l’aide
des PME sous l’égide de son 4ème Programme Cadre de Recherche et Développement (PCRD).
Le 5ème PCRD (couvrant la période 1999-2003) réserve 10% de son budget aux PME. Un
financement spécifique est réservé à la problématique de qualité et de sécurité dans le cadre
du 6ème PCRD.
EUREKA, un programme intergouvernemental qui regroupe 26 pays européens, vise
également le soutien de l’innovation. La Commission de l’Union Européenne soutient des
projets d’innovations qui sont communs à plusieurs états.
Selon le rapport d’information sur l’avenir du secteur agroalimentaire (1999 in C. Ton Nu,
2000), 1500 références de nouveaux produits sont lancées chaque année en France. Ce chiffre
croît de 10 à 15%. Le budget de lancement d’un produit par une grande marque nationale
varie entre 760.000 euros et 3.05 millions d’euros rien que pour la publicité. L’investissement
industriel compte 760.000 euros à 4.57 millions d’euros. Le référencement coûte entre 300 et
760 mille euros. Les études marketing coûtent environ 150.000 euros. La R&D et les essais
coûtent entre 460 et 610 mille euros.
Les ministères de l’agriculture et de la recherche lancent des appels à projets de recherche au
niveau national1. Les différentes offices lancent aussi de leur côté des appels à projets afin de
favoriser et promouvoir l’innovation dans les différentes filières. L’INRA reste le premier
contributeur à la recherche publique pour les IAA. Le tableau suivant récapitule la répartition
des aides à l’innovation de l’ANVAR consacrées aux IAA.
1998 1999 2000 2001
Phase de faisabilité 04.9 10.2 13.2 10.04
Phase de développement 64.4 77.3 72.77 78.92
Recrutement pour l’innovation 10.7 12.5 14.1 11.04
Tableau n°2: Répartition des aides à l’innovation de l’ANVAR (en pourcentage du montant).
D’après ANVAR in Ministère de l’Agriculture, de la pêche, de l’alimentation et des affaires
rurales, 2002.
II.3. Les contraintes et les risques de l’innovation dans le secteur :
La R&D ne garantit pas le succès du produit ni son intégration dans les linéaires (J-M.
Bouquery et C. Renault, 1996) et ce, pour les raisons suivantes :
1 Tel que le projet Aliment Qualité Sécurité lancé par l’ANVAR. 9
1. Le processus d’innovation est aléatoire : la vague des produits terroir montre que
certains produits sont privilégiés parce que issus de fabrication artisanale (développés
au stade industriel).
2. Les risques d’échec des produits : un seul produit nouveau réussi parmi deux. Environ
30% des produits qui réussissent survivent pendant deux ans (C. Ton Nu, 2000).
3. L’essor des MDD et des comportements d’imitation : les rentes de l’innovateur est
réduite. La plupart des technologies alimentaires restent plutôt simples et accessibles.
4. La culture de nombreuses entreprises : celles-ci ne favorisant pas la R&D et
l’innovation. Ces entreprises sont parfois d’assez grandes tailles surtout celles
appartenant à des filières dites « traditionnelles ».
5. Les efforts des entreprises se concentrent autour du développement des produits finis.
Comme nous l’avons vu précédemment, les efforts de R&D sont plutôt réalisés par les
forces amont (industries de fourniture, services publics, outils collectifs).
L’innovation fait face à ceux types de risques dans le secteur agroalimentaire. Les risques de
l’innovation dans le secteur sont le risque de recherche et le risque de gestionnaire (B. Yvon,
1996).
Le risque de recherche est celui de ne pas trouver. L’innovation fait face au problème
« d’application » puisque « trouver » n’est pas « appliquer ». Il faut surmonter les obstacles
pour son application ; des obstacles de tous genres de l’industrialisation jusqu’à son
marketing et son lancement sur le marché. Selon C. Ton Nu (2000), sur 500 nouvelles idées,
50 concepts émergent et seulement six études technico-marketing sont entamées.
Le second type de risques est celui du gestionnaire. Selon la disponibilité de l’information
scientifique et technique, des critères d’opportunités sont retenus et les programmes de
recherche sont ainsi sélectionnés. Le chef de projet gestionnaire (disposant de toutes les
informations) doit avoir la maîtrise de trois types de risques : la durée de recherche, l’avance
du produit par rapport aux concurrents ainsi que la valeur de la technologie.
La durée de recherche est généralement de trois à cinq ans, jusqu’à même dix ans dans les
filières très innovantes comme l’amidonnerie. Au-delà de ces durées, l’entreprise ne peut
s’engager à très long terme dans des projets risqués. Puisque l’entreprise est rarement lieu de
recherche fondamentale, celle-ci est souvent sous-traitée par des universités et des
laboratoires publics mais le risque de la perte de la confidentialité du projet persiste dans ces
cas. Si la durée de la recherche est inférieure de trois ans, le projet serait alors relativement
facile. Dans le cas d’une recherche qui prend moins de deux ans : le projet consiste en une
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déclinaison d’un produit dans sa gamme ou une résolution d’un problème précis pour un
produit donné. Il faut éviter à tous prix la sous-évaluation d’un projet. Des budgets
supplémentaires peuvent s’avérer utiles pour continuer, sinon le produit pourra subir un rejet
et manquera une vraie opportunité.
Les deux types de risques sont agrémentés par des exemples.
L’innovation est également contrainte par la réglementation. L’environnement juridique est de
plus en plus contraignant. Cet environnement est construit par : le droit de l’alimentation
(avec l’ensemble des textes juridiques applicables au secteur), la doctrine administrative (des
administrations telles que la DGCCRF, l’AFSSA ou l’Agence Européenne de Sécurité des
Aliments) ainsi que la jurisprudence (nationale ou communautaire). Les négociations dans le
cadre de l’OMC et du Codex Alimentarius1 génèrent de nouvelles normes au niveau mondial
et réglementent les accès aux marchés internationaux.
Ces données juridiques représentent un corpus immense en perpétuel changement.
L’innovation est très présente en agroalimentaire. De 20 à 25% des variétés de produits
proposés sont renouvelées chaque année (Les Echos 12/01/2000). Il ne s’agit pas toujours
d’innovation à fondement scientifique comme c’est le cas des O.G.M ou des alicaments. Les
nouveaux produits peuvent être des adaptations, des rénovations ou des extensions.
La confrontation permanente entre les produits et les procédés d’un côté, et les goûts des
consommateurs d’un autre se fait d’une manière collective. Quasiment tous les acteurs des
filières agroalimentaires y participent, ceux qui appartiennent à la filière ou même les
professionnels du marché. Dès les premières phases de conception du produit, la
confrontation débute avec les représentants de consommateurs, les panels de dégustation, des
expertises sur la composition du produit, des tests comparatifs avec les produits concurrents,
des analyses de la structure du marché, des études psychosociologiques sur les réactions des
consommateurs face au produit et à son packaging, etc. Cette confrontation est continuelle.
Les tests se font aussi dans les phases d’industrialisation avec de nombreux acteurs (salariés
de l’entreprise, consommateurs, chercheurs de l’entreprise, chercheurs des centrales, les
journalistes ou les clients des supermarchés où sont menées des actions de promotion).
L’innovation est un travail collectif. La confrontation permet la modification des produits
1 Codex Alimentarius : cette commission a été créée en 1963 par la FAO et l’OMS afin d’élaborer des normes alimentaires, des lignes directrices et d’autres textes, tels que des Codes d’usages, dans le cadre du Programme mixte FAO/OMS sur les normes alimentaires. Les principaux objectifs de ce programme sont la protection de la santé des consommateurs, la promotion de pratiques loyales dans le commerce des aliments et la coordination de tous les travaux de normalisation ayant trait aux aliments entrepris par des organisations aussi bien gouvernementales que non gouvernementales.
11
mais aussi la génération de nouvelles idées pour une meilleure réponse aux besoins des
consommateurs.
II. 4. Les facteurs de succès et d’échec des nouveaux produits alimentaires :
L’étude menée par Secodip basée sur son outil Scannel (un panel composé de 6 000 ménages)
ainsi que sur le suivi de nombreux nouveaux produits pendant une période de deux ans, a
permis de déterminer les facteurs de succès et d’échec des nouveaux produits alimentaires (P.
Aurier et L Sirieix, 2004). Ces facteurs sont résumés dans le tableau suivant.
Facteurs de succès ou d’échec (échec= produit disparu deux ans après
Tableau n°3: Les facteurs de succès et d’échec des nouveaux produits dans le secteur
agroalimentaire. D’après P. Aurier et L. Sirieix, 2004, p241, in J-L. Guyot, Colloque
Tendancia (Bercy Expo, juin 1998).
La lecture du tableau ci-dessus permet de dégager un ensemble de constats que nous pouvons
diviser entre : les facteurs neutres, les facteurs de succès absolu, les facteurs d’échec absolu et
enfin, les facteurs à forte influence sur l’échec et le succès à la fois.
Les facteurs neutres sont ceux qui n’influencent pas le succès ou l’échec d’un produit. Ainsi,
le dynamisme du marché ne suffit pas pour réussir. Tel a été le cas de « Soif ! » de Yop qui a
été retiré du marché des boissons lactées aux fruits, un marché pourtant assez dynamique, à
cause des faibles ventes. Le choix de la marque ne semble pas être un facteur déterminant.
12
L’innovation technologique n’est suffisante que lorsqu’elle est perçue par le consommateur et
traduite en termes de bénéfices réels.
Les facteurs de succès semblent être la nouveauté du concept (le beurre anti-cholestérol) et
l’amélioration de l’usage (les différentes innovations de packaging : sachets refermables doté
d’un zip, emballages réutilisables, etc.).
Le facteur d’échec réside dans le choix d’une cible trop étroite.
Les facteurs susceptibles d’engendrer le succès ou l’échec sont (P. Aurier et L. Sirieix, 2004) :
La stratégie marketing : un produit lancé avant que le marché soit prêt (comme ça a été le
cas de Dan’up) ; une erreur de positionnement ou un positionnement flou, risquent de
faire échouer le produit ;
L’entreprise : l’entreprise elle-même, ses capacités financières et son dynamisme sont
importants. Cela n’empêche pas que les PME sont également innovatrices. Le succès et
l’échec ne peuvent pas être affectés à la taille d’une entreprise et ses capacités financières;
La gestion du lancement : une mauvaise maîtrise du mix marketing telle qu’une
communication tardive par exemple ou des problèmes de logistique peuvent affecter le
lancement ;
Le rôle du distributeur : l’intéressement du distributeur au produit et son implication, peut
jouer en faveur de la réussite.
Les nouveaux produits réussis ne remplacent pas nécessairement les produits existants. Les
consommateurs s’attachent à leurs produits et préfèrent ne pas les changer pour des raisons
culturelles, par goût, par fidélité ou par nostalgie.
II.5 Le rôle de la proximité :
Plusieurs chercheurs (INRA, 2000) ont exploré une nouvelle vision des mécanismes de
transferts des connaissances et de savoir-faire entre la recherche académique et les PME de
l’agroalimentaire. Ce nouveau mécanisme est constitué par les stages de formation et
l’embauche d’ingénieurs disposant d’une compétence spécifique dans le secteur agricole et
agroalimentaire. Les chercheurs de l’INRA (2000) ont étudié le rôle des ingénieurs (pas
forcément chercheurs) issus d’école d’agronomie et d’agriculture dans le transfert des
connaissances vers les PME. Ces ingénieurs, à travers leur passé étudiant dans ces écoles,
restent en contact avec les enseignants, les étudiants, et acquièrent de ce fait de nouvelles
connaissances pour les intégrer dans la PME d’une façon informelle. Ils représentent ainsi un
« trait d’union » entre la PME et les laboratoires de recherche académique. Ces PME profitent
en quelques sortes des spillovers de la recherche académique grâce aux institutions de
13
formation d’ingénieurs. Ces spillovers sont plus fertiles lorsqu’ils sont combinés avec une
proximité géographique : les ingénieurs issus d’une école à proximité de l’entreprise. Les
écoles peuvent jouer ainsi un rôle proche de celui des CRITT1.
De ce fait, la proximité géographique est à l’origine de transferts de connaissances et de
savoir-faire notamment dans les PME à faible capacité de recherche (INRA, 2000).
La proximité géographique joue un rôle important dans le processus de circulation des
technologies et des savoirs. Elle permet les relations (formelles et informelles) nécessaires à la
constitution d’une base de connaissances (D. Gallaud et A. Torre, 2001). Toutefois, il ne
suffit pas d’être localisé à proximité des universités pour innover. L’entreprise devrait
entretenir aussi des relations étroites en termes de coopération avec les scientifiques au niveau
local ou régional afin de capter les spillovers. C’est ce qui permet l’innovation et fait accéder
l’entreprise à la performance. Un renforcement des liens entre entreprises et universités
faciliterait les transferts de technologie, de connaissances et de compétences.
D. Gallaud et A. Torre (2001) supposent l’existence d’une complémentarité entre la proximité
géographique et organisationnelle. L’activation et la mise en œuvre de cette complémentarité
sont permises grâce aux réseaux d’innovation. Les relations informelles d’échange de
connaissances technologiques nécessitent une proximité géographique permanente.
La proximité géographique est un facteur clé considéré en premier lieu par les plus petites
firmes. Cette prise en compte apparaît dans leurs choix de localisation. On peut remarquer
alors que les réseaux de petites firmes ont un caractère local plus prononcé que ceux
constitués d’entreprises de tailles plus importantes. La localisation à proximité des entreprises
et des laboratoires (sources de connaissances) est un choix dû à la faiblesse de leurs capacités
humaines et financières. Ainsi, les PME de l’agroalimentaire utilisent la proximité dans
l’espoir de bénéficier d’une transmission de savoir. Et pourtant, cette transmission se fait
souvent par des rencontres temporaires. La proximité remplace la faible capacité de recherche
de ces PME. Ces dernières ne sont souvent pas incluses dans les programmes publics de
subvention et de soutien à la recherche tels que le crédit-impôt par exemple. L’innovation
peut être promue par ces externalités de recherche académique. Les écoles d’ingénieurs avec
une stratégie d’implantation locale sont les grands acteurs de ce transfert. Elles forment un
1 Les CRITT sont des structures de transfert de technologies fondées pour permettre une meilleure diffusion de l’innovation et assurer le lien entre le monde industriel et la recherche universitaire. Ils ont aussi le rôle d’incubateur par la création d’entreprise à travers ses projets. Leurs principaux objectifs sont : être à l’écoute de l’ensemble des entreprises agroalimentaires de la région ; répondre aux besoins technologiques des entreprises par l’établissement d’un cahier des charges en identifiant les bons partenaires et en assistant l’entreprise dans sa recherche de financement ; favoriser le recrutement des cadres techniques dans les entreprises.
14
personnel capable de transférer des savoirs et savoir-faire et de les diffuser dans les PME à
faible intensité de recherche. Si une telle fonction existe, les pouvoirs publics devraient
harmoniser leurs efforts pour la promotion d’une telle diffusion de l’innovation.
Une autre analyse a été conduite autour de la participation des ingénieurs à la diffusion des
connaissances dans le tissu économique local des PME de l’agroalimentaire. Cette analyse a
porté sur l’insertion professionnelle des ingénieurs de trois écoles d’agronomie situées à
Dijon, Lille et Lyon. Les chercheurs (D. Gallaud et A. Torre, 2001) ont trouvé que
l’innovation du tissu de PME agroalimentaire autour de l’école est dynamisée et favorisée par
cette localisation. Les chercheurs ont posé la question du renforcement des structures internes
de recherche par le rôle de cette proximité « les politiques publiques de soutien à l’innovation
dans les secteurs peu intensifs en recherche devraient-elles s’adapter pour soutenir non pas
seulement la recherche, mais aussi l’innovation en tant que telle et l’ensemble des PMI/ PME
qui innovent sans avoir des structures de recherches ? »1
III. La stratégie de marque et la communication dans le secteur :
En 1998, le montant des dépenses des entreprises alimentaires en publicité et en relations
extérieures s’élèvent à 39.5 milliards de francs (plus de 6 milliards d’euros) soit 5.6% de leurs
chiffre d’affaires et presque le double des investissements corporels (SCEES, 1998 in
Ministère de l’agriculture, 2000). Les budgets marketing et de promotion des produits sont
colossaux. Les dépenses en publicités télévisées s’élèvent à 1.3 milliards d’euros en 2003
avec une hausse de 12% par an (C. Ton Nu, 2004). Les IAA sont le 1er contributeur dans la
publicité et la communication. De son côté, la grande distribution de sont côté a dépensé en
2003 près de 854 millions d’euros, soit 14% de plus que l’année précédente.
Les investissements des IAA en communication sont ainsi considérables. Le rôle de la
communication est important vu l’abondance des marques et des nouveautés. La
communication génère et protège les parts de marché et les marges. Cette communication
touche plusieurs supports : la télévision, les campagnes d’affichage, la publi-promotion, la
presse magazine, etc. Elle a pour buts l’augmentation de la pression publicitaire,
l’introduction de nouveaux produits, le gain de parts de marché et/ou la vente de produits peu
différenciés sensibles aux prix. Elle représente une réponse au besoin d’information des
1 INRA, « Le rôle local des écoles d’agronomie et d’agriculture dans l’innovation réalisée par les PME du secteur agroalimentaire », Symposium « Recherches pour et sur le développement territorial », Montpellier, 2000.
15
consommateurs. C’est un outil de fidélisation surtout que la mémoire des consommateurs peut
être défaillante même avec des achats répétés.
Les IAA se classent parmi les plus grands annonceurs au niveau national. Toutefois, et si l’on
s’attache à analyser filière par filière, des différences existent. En effet, on distingue trois
grandes catégories de filières selon la communication (J-M. Bouquery et C. Renault, 1996) :
1. Les grands communicateurs : avec des dépenses dépassant ou approchant un taux de
8% du chiffre d’affaires. C’est de grands annonceurs appartenant à des filières
concentrées où l’impact de la communication est important.
2. Les filières absentes : c’est des filières où le marketing n’est pas très important. Tel est
le cas des industries intermédiaires telles que la meunerie ou la malterie.
3. Les situations intermédiaires : elles représentent des cas divers. Dans l’industrie
laitière par exemple on retrouve : de faibles communicateur (l’amalgame de lait), de
grands communicateurs (l’ultra-frais) et des cas intermédiaires en termes de
communication (de la fromagerie).
La marque est un patrimoine, un avantage compétitif, une obligation de résultats et une charge
lourde. La marque est l’unité de base du langage du marché. Sa performance est mesurée par
sa capacité à parler mieux et plus rapidement que ses concurrentes. La marque est un langage
exprimant un savoir-faire, une performance technique de production ainsi qu’une sémiotique.
La France dispose d’un large éventail de marques régionales mais elle ne compte que sept
marques sur les 84 marques alimentaires (hors boissons) en Europe (J. Marseille, 1997).
La marque est le fruit d’une démarche marketing de différenciation. C’est un message avec un
support, un émetteur et un récepteur. Le support est physique. L’émetteur est le fabricant. Le
récepteur est l’acheteur potentiel. Pour que le message transmis ait une valeur, il faut qu’il soit
mémorisé. Il doit donc être mémorisable. La marque permet la reconnaissance des produits et
services d’un offreur ainsi que la différenciation par rapports à ceux de la concurrence. Elle
indique la provenance d’un produit et protège le producteur et le client. C’est un vecteur de
communication.
En réponse à l’hyper-segmentation et à cause de la prise en compte de l’importance de la
fonction marketing, on note une prolifération des marques et des références dans le secteur
agroalimentaire. Ainsi, la majorité des marques déposées est issue des IAA. Les innovations
sont souvent accompagnées de nouvelles marques (telles que les sous-sous marques de
Chambourcy comme la Laitière de Chambourcy, la Laitière aux fruits, etc.) ou des prénoms
associés à un nom de famille (tels que Danone, Danette double saveur, Danao, etc.) (J-F.
16
Audroing, 1995). La marque protège l’innovateur et lui attribue une exclusivité, certes
provisoire, mais elle le récompense de sa prise de risque. L’accumulation de ces différences
provisoires pour une firme constitue à travers le temps « le sens révélateur de la marque et sa
fonction économique » selon l’expression de J-N. Kapfefer (1991). Le nom de marque est un
élément qui peut faire prolonger l’avantage de différenciation ainsi que la rente de l’entreprise
innovatrice.
La marque distingue le produit mais elle ne le décrit pas. La marque n’est pas le produit.
La stratégie de marque est une stratégie offensive. Lorsque l’aspect extérieur des produits est
semblable, il serait plus avantageux d’utiliser une marque par produit, pour faciliter la
perception par les consommateurs.
Certaines firmes innovatrices utilisent des noms de marques différents et indépendants du
nom de l’entreprise. Chaque marque serait indépendante des autres. De ce fait, le succès ou
l’échec de l’une n’affecterait pas la ou les autres marques de l’entreprise ni l’entreprise elle-
même.
Les marques de produits nécessitent de lourds investissements en publicité et en promotion.
La distribution alourdie ceci par des primes de référencement. La prolifération des marques,
des noms ou des références est une nuisance au concept de marque lui-même dans la mesure
où elle fausse la lisibilité des offres des produits. Elle nuit à la première vocation de la marque
en tant que véhicule d’informations différenciées au consommateur. Cette prolifération
montre la volonté des acteurs dans le secteur d’éviter une guerre des prix en basant leurs
efforts sur une hyper-différenciation.
IV. La qualité dans le secteur :
Le secteur agroalimentaire est le secteur le plus soumis à une réglementation stricte. Les
objets de la réglementation sont divers (J-M. Bouquery et C. Renault, 1996) : la nature du
produit, la provenance, le mode de production, l’agrément des installations, des matériels, des
conditions d’exploitation et des matériaux de contacts, la dénomination, la composition, la
conservation, la durée de vie, le calibrage et l’étiquetage du produit, la signalisation des lieux
de vente et de restauration, les obligations fiscales, douanières, et statistiques, les conditions
de travail, l’impact environnemental de la production et de la consommation, etc.
La volonté de protection des consommateurs (sécurité alimentaire) s’affirme par les
différentes lois qui réglementent le secteur. La réglementation a donné naissance au
« marketing réglementaire ».
17
Différents facteurs sont utilisés pour distinguer les produits issus d’une même filière. Les
niveaux de qualité sont précisés par un classement. Cette classification se fait selon des
critères simples, complexes, traditionnels (caractérisant le degré d’achèvement, la pureté, la
richesse, la finesse, la maturation ou le perfectionnement). Il existe alors des termes utilisés
pour la qualification des produits (supérieur, extra, vieux, indices ou degrés de compositions
et de forme, etc.) ainsi qu’une codification des produits selon des catégories ou des grades
(grade A, catégorie 1, etc.). Ces indices de qualités sont généralement normalisés.
Par ailleurs, des spécifications ont été créées afin de définir les niveaux de qualité. Ces
spécifications peuvent préciser les usages et/ou souligner les caractéristiques d’intérêt
nutritionnel ou fonctionnel. Elles peuvent être des prescriptions (quasi-pharmaceutiques) dans
le cas des aliments pour bébés, une alimentation sous contrôle médical ou pour besoins
diététiques (allégés en sel, en matières grasses ou en sucres ; enrichis en vitamines, en oligo-
éléments, en acides aminés, etc.) par exemple.
Afin de combattre la banalité de certains produits, répondre au besoin de qualité du
consommateur et représenter au mieux la tradition culinaire française au niveau international,
plusieurs solutions existent. Les systèmes officiels d’identification de la qualité relèvent
principalement de trois approches (P. Aurier et L. Sirieix, 2004).
D’abord, l’approche territoriale, en France (les Appellations d’Origine Contrôlée AOC et la
dénomination « montagne ») et en Europe (les Appellations d’Origine Protégée AOP, les
Indications Géographiques Protégées IGP et les spécialités traditionnelles garanties). Le
terroir est ainsi considéré comme une zone géographique et historique. C’est un patrimoine
historique et culturel. On parle alors d’économie « spatiale » vu le lien entre l’activité
économique et le terroir. La fabrication de produits de terroir constitue un axe stratégique
déterminant pour les petites entreprises agroalimentaires (PEAA). C’est une stratégie de
différenciation (H. Remaud et A. Falque, 2001). Le terroir est une ressource stratégique. Le
terroir, l’enracinement et l’imprégnation territoriale sont des facteurs clés dans la qualification
des produits agroalimentaires.
Ensuite, l’approche qualité par le label rouge et le certificat de conformité et de qualité. Nous
pouvons remarquer que l’Europe du Sud est très attachée à ses labels d’origine porteurs
d’image et d’identité (culturelle et historique). Ces labels permettent ainsi la valorisation des
produits.
Enfin, l’approche relative au mode de production : agriculture biologique (AB) ou
traditionnelle.
18
Ces différents signes sont définis dans le Glossaire (page 558).
Un signe de qualité est donc une marque collective d’ordre public. Ce signe peut souligner
une qualité supérieure tel que le Label Rouge ; indiquer une spécificité relative à
l’appartenance géographique liée au mode ou aux facteurs de production (J-M. Bouquery et
C. Renault, 1996).
D’autres signes sont également utilisés dans le secteur : les attestations de spécificité, la
marque CE ou le label Bioéquitable par exemple.
Les signes de qualité et d’identification sont un environnement complexe. Ils permettent à une
entreprise de se différencier des concurrents notamment dans les industries où les occasions
d’innover sont rares et/ou limitées. Dans la filière fruits par exemple, la qualité est devenue un
mot clé depuis quelques années. Dans ce type de filières plutôt agricoles, le but d’une
stratégie axée sur la qualité est de contrecarrer la diminution tendancielle de la consommation.
Cette stratégie répond également aux exigences des consommateurs pour plus de goût, de
sécurité et d’identité des produits (D. Hassan et ali, 2004).
Les différentes réglementations pour les protections des origines des produits confirment
également la volonté des pouvoirs publics et communautaires, de protéger le consommateur et
défendre le droit de différenciation des fabricants industriels. L’utilisation croissante de ces
signes a fait intervenir l’état pour la régulation de leur attribution et de leur utilisation.
V. Les relations inter-firmes dans le secteur :
Le secteur agroalimentaire est animé par des forces antagonistes, rythmé par un jeu complexe
de concurrence, de coopération et de conflits (Eurostaf, 1996). Les partenariats permettent de
réduire les risques, les délais et les coûts des investissements. Le coût de développement sur
un nouveau marché et le prix de la croissance externe incitent l’échange de savoir-faire dans
le cadre des coopérations entre les entreprises. L’innovation est un facteur de compétitivité
dans le secteur. C’est ce qui incite aussi les entreprises à coopérer de plus en plus.
Le tableau suivant résume les principales opérations entre les différents acteurs du secteur
agroalimentaire.
Opérations 1996 1997 1998 1999 2000 Total
Rachat
Prise de participation majoritaire
47
36
37
23
56
10
67
25
52
07
257
101
Total prise de participation 83 60 66 92 59 358
19
Prise de participation minoritaire 19 23 10 19 04 84
Filiale commune
Fusion
Autres alliances
Total alliances
32
04
14
79
18
05
08
54
11
06
07
34
16
04
07
45
07
05
07
23
84
24
43
235
Cessions 24 18 21 21 15 235
Total toutes opérations 185 132 124 158 97 696
Tableau n° 4 : Natures des opérations de 1996 à 2000 dans les IAA. D’après IMIA-ESSEC,
« Typologie et valorisation des fusions, acquisitions et alliances dans l’agroalimentaire depuis
1996 », février 2002 in Ministère de l’agriculture, de la pêche et des affaires rurales, 2002.
Pour l’année 2003, on relève 145 accords inter-firmes contre 120 en 2002 (C. Ton Nu, 2004).
Ces accords ne sont généralement pas de grande ampleur. Les principales filières touchées par
ces opérations sont celles de la charcuterie-traiteur, la panification, les vins et les champagnes.
Les vagues de restructurations sont de plus en plus transfrontalières de 1996 à 2001 (C. Ton
Nu, 2004). Près de 50% des opérations durant cette période étaient des rachats d’entreprises.
Moins de 5% de ces opérations étaient des fusions. Les filières les plus concernées sont
surtout les boissons alcoolisées et les produits laitiers.
Les différents accords dans le secteur peuvent réunir une entreprise agroalimentaire avec :
1. Une entreprise du secteur.
2. Un acteur de la grande distribution.
3. Une entreprise appartenant à un autre secteur.
4. Un organisme public ou privé de recherche ou finançant ces recherches dans le
secteur. Dans ce type d’accords, le but qui prime c’est l’innovation.
En général, ces partenariats sont complémentaires (sur le produit ou sur le marché) et ont pour
but l’accroissement de l’avantage compétitif. Ils sont par nature temporaires. Leurs issues sont
une plus grande intégration ou une indépendance.
Dans les IAA, le groupe Nestlé est exemplaire avec ses divers partenariats : croissance
externe, association avec Danone pour l’achat de Perrier (France) ; implantation dans des pays
où les investissements étrangers sont contingentés tels que le Moyen Orient et la Chine ;
recherche commune avec l’Oréal ; nouveaux métiers de boissons prêtes à boire (Coca-Cola) ;
sans oublier l’accord entre Nestlé et General Mills pour la création de « cereals partners »
pour une action conjointe sur le marché des petits déjeuners à base de céréales ; la gestion des 20
marques et communication avec Eurodisney ; l’optimisation de logistique et trade marketing
avec la distribution (Eurostaf, 1996 ; J-M. Bouquery et C. Renault, 1996) Ces accords
peuvent être circonstanciels ayant pour but la réalisation d’une opération structurelle
d’envergure, même entre firmes rivales. Tel a été le cas de Danone et Nestlé qui ont coopéré
ensemble à maintes reprises (ISMEA, 1992) :
La reprise en commun par les deux entreprises de la grande firme tchécoslovaque
Cokaladovny : Nestlé pour la branche chocolat et Danone pour la branche biscuit.
La réponse commune à l’offensive du groupe Agnelli sur Perrier : Danone a gagné
dans l’affaire concernant la source Volvic complétant Evian.
L’année 2003 a été marquée par une vague d’alliances sur l’eau conditionnée en bonbonnes.
Nestlé Waters est ainsi devenue n°1 en Russie puis en France et en Europe, Danone a pris le
leadership aux Etats-Unis. Les opérations de croissance externe se poursuivent pour les
multinationales. Elles touchent les pays de l’Europe de l’Est ainsi que l’Asie.
Les alliances entre coopératives en 2003 ont augmenté. On dénombre 68 opérations en 2003
contre 57 en 2002 (C. Ton Nu, 2004). Les principaux facteurs qui poussent les coopératives à
plus de coopération et d’alliances sont : la recherche de taille critique, réaliser des économies
d’échelle et/ou construire des politiques de marques.
Les accords de partenariats entre les groupes de l’agroalimentaire ou leurs composantes, et
des acteurs de la grande distribution sont souvent fondées sur le trade marketing (relations
fournisseurs/clients). Dans ce contexte, Nestlé a passé un accord avec Casino pour
l’exploitation des codes-barres sur l’optimisation des flux logistiques.
On trouve aussi d’autres types de coopération tels que le co-branding. Le co-branding est un
partenariat autour de nouveaux produits. C’est le fait que deux marques décident de s’associer
pour intensifier leur impact avec des variations dans les règles de ces contrats. En général, ces
contrats exigent le partage des coûts de R&D, les frais de référencement de la distribution, et
les budgets de publicité et de promotion. Tel a été le cas de Gerblé et Yoplait pour fabriquer
« Gerlinéa » ; Slim Fast et Knorr pour quatre soupes Slim Fast en 2002 ; Mont Blanc avec
Pépites de Lion pour « Mont-Blanc Pépites », etc.). Les IAA s’associent également avec des
acteurs du secteur beauté pour la création de nouveaux produits. Les compléments
alimentaires Innéov par exemple sont issus de la coopération entre L’Oréal et Nestlé (P.
Aurier et L. Sirieix, 2004). Le co-branding est un argument de vente très fort. Ceci est dû au
fait que les consommateurs estiment que le produit commun devrait allier les avantages
respectifs des deux marques.
21
Les exemples sur le partenariat pour l’innovation entre un acteur du secteur agroalimentaire et
des organismes de recherche ont été présentés dans la partie réservée à l’innovation dans le
secteur. Notons également les cessions de licences de l’INRA. La dernière en cette date,
concerne la mise au point d’un nouveau produit très innovant à base de blé dur immature. Il
devrait être lancé début 2005 par une société créée par trois coopératives céréalières (C. Ton
Nu, 2004).
Les entreprises ne sont pas les seules à coopérer. Les différents organismes dans le secteur
coopèrent eux aussi pour atteindre certains objectifs. Tel est le cas de l’ACTIA et l’INRA. Les
deux parties ont signé une convention de coopération pour une durée de trois ans
renouvelable, le 07 décembre 2000. Ce contrat avait pour but la promotion de l’innovation, la
diffusion des connaissances et le transfert technologique vers les entreprises notamment les
PME/ PMI. Cette convention a permis l’élaboration d’un modèle de contrat de recherche entre
un laboratoire INRA et un centre ACTIA, et le cas échéant, avec une société tierce. Le contrat
contient plusieurs dispositions quant à la confidentialité, la propriété intellectuelle et la
valorisation des résultats obtenus. Ce modèle pourra servir de référence pour l’élaboration
d’accords particuliers.
La coopération entre l’INRA et l’ACTIA débouche sur l’intégration de chacune des parties, et
sa participation, dans les conseils scientifiques de l’autre. Elle peut prendre la forme
d’échange d’informations, de prestations de services et d’accueil réciproque de personnel
scientifique et technique.
En résumé, les coopérations sont plutôt fréquentes et de différentes formes. Elles peuvent lier
des entreprises, des organismes ou des centres de recherches.
VI. L’emploi et les ressources humaines dans le secteur :
La situation de l’emploi dans l’agroalimentaire se détériore depuis 1985. Elle s’est améliorée
en 1997. L’emploi a progressé dans les IAA de 0,2% tandis que les effectifs dans l’industrie