-
rudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif
compos de l'Universit de Montral, l'Universit Laval et l'Universit
du Qubec
Montral. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la
recherche. rudit offre des services d'dition numrique de
documents
scientifiques depuis 1998.
Pour communiquer avec les responsables d'rudit :
[email protected]
Article
Jean DelisleMeta: journal des traducteurs/ Meta: Translators'
Journal, vol. 50, n 3, 2005, p. 831-850.
Pour citer cet article, utiliser l'information suivante :
URI: http://id.erudit.org/iderudit/011599ar
DOI: 10.7202/011599ar
Note : les rgles d'criture des rfrences bibliographiques peuvent
varier selon les diffrents domaines du savoir.
Ce document est protg par la loi sur le droit d'auteur.
L'utilisation des services d'rudit (y compris la reproduction) est
assujettie sa politique
d'utilisation que vous pouvez consulter l'URI
http://www.erudit.org/apropos/utilisation.html
Document tlcharg le 6 August 2014 04:51
Les nouvelles rgles de traduction du Vatican
-
Les nouvelles rgles de traduction du Vatican1
jean delisleUniversit dOttawa, Ottawa,
[email protected]
RSUM
Aprs avoir rappel brivement lattitude de lglise catholique lgard
des traductionset des traducteurs au cours de son histoire et en
particulier aux ive et xvie sicles, nousexaminons les principaux
documents manant du Vatican depuis 1943 afin de dgager laconception
de lglise lgard de la traduction. Nous analysons en dtail la
cinquimeinstruction post-conciliaire, Liturgiam authenticam (2001),
vritable trait de traduc-tion dans lequel Rome dicte des rgles
prcises et contraignantes pour la traductionde la Bible et des
textes liturgiques. En conclusion, nous portons un jugement
critiquesur la vision de la traduction qui se dgage de ce
trait.
ABSTRACT
After a brief look at the attitude of the Catholic Church
towards translation andtranslators throughout history, and
particularly in the 4th and 16th centuries, we willexamine the key
Vatican documents published since 1943, with the intention of
showingthe Churchs notions of translation. Particular attention
will be given to the fifth post-Vatican II instruction, Liturgiam
authenticam (2001), which is actually a treatise on trans-lation,
in which Rome has laid down precise and stringent rules for
translating the Bibleand liturgical texts. We will conclude by
casting a critical eye on the conceptions (ormisconceptions) of
translation found in the treatise.
MOTS-CLS/KEYWORDS
histoire de la traduction, rgles de traduction, glise
catholique, Vatican, instructionspost-conciliaires
La Bible a t et demeure lambassadrice auprs des nations
occi-dentales de la sagesse orientale. Les ambassadeurs qui restent
troplongtemps loin de leur patrie risquent, on le sait, den oublier
levrai visage. Ainsi en a-t-il t de la Bible.
(Andr Chouraqui, Lamour fort comme la mort, 1990)
Rappel historique
Depuis ses origines, lglise catholique a partie lie avec la
traduction, tel point quelon a pu crire que traduire est le
mouvement originel du christianisme (Boyer2002 : 120), que traduire
la Bible cest toujours traduire de la traduction (ibid. :69) et que
la traduction de la Bible est une activit typiquement chrtienne2
(Rabin 1972 : 16). Les textes fondamentaux du christianisme publis
en langues verna-culaires sont, on le sait, des traductions de
traductions dont loriginal nexiste plus.Donc des traductions de
copies de copies. On comprend ds lors que lglise catho-lique ait
toujours fait preuve de vigilance et de prudence, voire dune
certaine mfiance lgard des traductions, pourtant indispensables sa
mission : pas dvanglisation
Meta, L, 3, 2005
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:23831
-
832 Meta, L, 3, 2005
sans traduction. On se souvient quau ive sicle circulaient dans
la chrtient plu-sieurs traductions en langues syriaque, armnienne,
thiopienne, grecque et latine,dont la Vetus latina. Cette
traduction, la plus ancienne en cette langue, fut raliseentre 200
et 250 en Afrique proconsulaire par des communauts chrtiennes qui
necomprenaient pas le grec, langue de lglise primitive. Comme ces
versions diver-geaient entre elles et renfermaient de nombreuses
erreurs, un travail de rvision sim-posait. Le pape Damase Ier (v.
305-384) confia alors Eusebius Hieronymus (Jrme,v. 347-420), la
redoutable tche de rviser la Bible. Son travail, ralis
Bethlem,aboutit la Vulgate3. Le docteur de Stridon tait lhomme de
la situation ; il runis-sait toutes les comptences linguistiques et
philologiques ncessaires pour accomplircette rvision. la fois
philosophe, rhteur, grammairien, dialecticien et traducteur,Jrme
avait une connaissance approfondie de lhbreu, du grec et du latin.
Il est nonseulement le premier traducteur-rviseur de la Bible, mais
aussi le premier vritablethoricien de la traduction. Ses nombreux
crits renferment une conception coh-rente de la traduction (Kelly
1975 : 162-163 ; Kelly 1976). Dans les sicles qui ontsuivi, lglise
fit de sa Vulgate un livre canonique.
Au xvie sicle, les rformistes protestants en Europe multiplient
les traductionsen langues vulgaires pour que les fidles puissent
lire et interprter la Bible par eux-mmes, sapant par le fait mme le
monopole de linterprtation des critures quelglise romaine stait
arrog4. La contre-rforme et lInquisition furent les manifes-tations
de la raction de Rome, qui sopposait farouchement cette
prolifration detraductions, considre comme source derreurs et de
division. Au plus fort de laRforme5, lglise a jug ncessaire, lors
du concile de Trente (1545-1563) au coursduquel furent examins tous
les points fondamentaux de la doctrine catholique, deproclamer
officiellement ldition de la Vulgate comme la seule version
authentiquedes Saintes critures, dclaration qui du coup discrditait
aux yeux des catholiquestoutes les versions en langues vulgaires et
les rendaient nulles et non avenues. Lors desa sance du 8 avril
1546, le Concile
a considr quil pourrait tre dune grande utilit pour lglise de
Dieu de savoir,parmi toutes les ditions latines des livres saints
qui sont en circulation, celle que londoit tenir pour authentique :
aussi statue-t-il et dclare-t-il que la vieille dition de
laVulgate, approuve dans lglise mme par un long usage de tant de
sicles, doit tretenue pour authentique dans les leons publiques,
les discussions, les prdications et lesexplications, et que
personne nait laudace ou la prsomption de la rejeter sous quel-que
prtexte que ce soit (Denzinger 2001 : no 1506).
Lglise ne tolra que les traductions accompagnes dannotations
fiables tires descrits des pres et docteurs de lglise
catholique.
Si elle se montrait mfiante lgard des traductions, Rome, jalouse
de son pri-vilge exclusif dinterprtation des critures, ne voyait
pas dun bon il non plus queles fidles, le commun ignorant selon
lexpression de Pie VII, sadonnent la librelecture des Saintes
critures. En 1816, ce souverain pontife crivait : Si la sainteBible
est admise en langue vulgaire en tous lieux, sans discrimination,
il en rsulteplus de dommage que dutilit (Pie VII 1816). Les
traductions en langues vernacu-laires tant forcment diffrentes les
unes des autres il est dans la nature mme dela traduction de faire
diffrent , les chefs de lglise ont toujours craint que cesmultiples
traductions branlent limmutabilit du tmoignage divin et fassent
chanceler la foi (ibid.). Plus que toute autre institution, lglise
catholique souffre
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:23832
-
de la maldiction de Babel. Cest pourquoi elle a toujours
entretenu une relationambivalente lgard de la traduction et a
souvent tenu les traducteurs pour hr-tiques . Elle a tendance les
souponner de vouloir propager insidieusement deserreurs doctrinales
en ditant la Bible dans des langues que les fidles peuvent lire
etcomprendre, ce qui a pour effet de saper son pouvoir. Sans tre
dpositaire des livresoriginaux (la Bible hbraque est antrieure au
christianisme), lglise sestime nan-moins dpositaire de plein droit
de lorthodoxie chrtienne. Aussi traduire la Biblepeut-il devenir un
acte prilleux, une activit subversive. Les censeurs
ecclsiastiquesse tiennent aux aguets pour traquer les traducteurs
qui osent dfier lautorit romaineen proposant de nouvelles versions
des critures. Plusieurs de ces traducteurs coura-geux ont pri sur
le bcher (Dolet, Tyndale, Hus), dautres ont t emprisonns (FrayLuis
de Len), perscuts ou contraints de sexpatrier (Calvin, Lefvre
dtaples,Marot, Robert Estienne), dclars hrtiques et excommunis
(Wyclif, Luther), mis lindex (Littr, Renan et combien dautres), ou
encore ont vu leurs crits subir unautodaf ou tre abondamment
caviards (rasme). Les moyens de rpression dontdispose lglise et
dont les traducteurs ont t victimes au cours de lhistoire
sontnombreux. Si un traducteur doit payer son travail de sa vie ou
de sa libert, cest queles enjeux de son activit sont parfois plus
levs quon ne le croit (Pym 1997 : 12).
On peut dire que lglise catholique na jamais t tendre envers les
traducteurs,pourtant indispensables son rayonnement universel. En
1844, le pape Grgoire XVIporte un jugement svre sur eux et rappelle
les dangers que reprsentent les traduc-tions en langues vulgaires
quand elles ne portent pas le sceau de Rome :
Vous nignorez pas, crit-il, quelle diligence et quelle sagesse
sont requises pour traduirefidlement dans notre langue les paroles
du Seigneur, puisque aussi bien rien ne seproduit plus facilement
que ces erreurs trs graves introduites dans les
traductionsmultiplies par les socits bibliques, et qui proviennent
de la sottise et de la tromperiede tant de traducteurs ; et ces
erreurs, le grand nombre mme et la diversit de cestraductions les
occultent pendant longtemps au dtriment de beaucoup. ces
socitselles-mmes il importe peu ou pas du tout quen lisant ces
bibles traduites en languevulgaire les hommes tombent dans telles
erreurs plutt que dans dautres, pourvu quilssaccoutument peu peu
revendiquer pour eux- mmes un libre jugement concer-nant le sens
des critures, mpriser les traditions divines gardes dans lglise sur
labase de la doctrine des Pres, et rejeter le magistre de lglise
elle-mme (GrgoireXVI 1844).
Deux ans plus tard, Pie IX revient la charge et accuse les
perfides socitsbibliques de renouveler les artifices odieux des
anciens hrtiques et de produire contre les rgles si sages de
lglise, les livres des saintes critures traduits en touteespce de
langues vulgaires, et souvent expliques [sic] dans un sens pervers
, et deles rpandre parmi les fidles les moins instruits (Pie IX
1846). Le point de vue ex-prim par les trois papes susmentionns
correspond assez bien lattitude historiquede lglise lgard de la
traduction et des traducteurs.
Depuis 1943, le Vatican a t amen, par la force des
circonstances, prciser defaon plus nuance sa position en ce qui
concerne la traduction de la Bible et des textesliturgiques. Un
certain nombre de documents officiels manant de Rome traitent,
eneffet, de traduction et tmoignent de limportance cruciale que
lglise accorde cettequestion :
les nouvelles rgles de traduction du vatican 833
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:23833
-
834 Meta, L, 3, 2005
1943 Divino Afflante Spiritu (Pie XII) Lettre encyclique sur les
tudes bibliques
1963 Sacrosanctum Concilium Constitution conciliaire sur la
sainte liturgie
1964 Inter cumenici Premire instruction. Principes pour
lapplication de la constitu-tion sur la liturgie
1967 Tres abhinc annos Deuxime instruction. Nouvelles
adaptations des rites de lamesse
1970 Liturgicae instaurationes Troisime instruction. Directives
sur le rle de lvquepour le renouveau liturgique
1979 Nova Vulgata Promulgation par Jean-Paul II de la No-Vulgate
(dition typique6
latine)
1988 Vicesimus Quintus Annus Lettre apostolique de Jean-Paul II,
publie loccasion du25e anniversaire de la promulgation de la
Constitution Sacrosanctum Concilium
1994 Varietates legitimae Quatrime instruction. Sur
linculturation et la liturgie romaine
2001 Liturgiam authenticam Cinquime instruction. De lusage des
langues vernaculairesdans ldition des livres de la liturgie
romaine
Dans la suite du prsent article, nous tcherons de cerner
lvolution de la pense delglise en matire de traduction au cours des
quelque soixante dernires annes.
La traduction-inculturation
Le coup denvoi est donn en 1943 par Pie XII, qui publie sa
lettre encyclique DivinoAfflante Spiritu. Ce document marque une
volution par rapport la position tradi-tionnelle de lglise, qui
souvre davantage aux tudes bibliques et aux traductions. propos de
la rvision des livres sacrs, le pape affirme que sils renferment
deserreurs, les seuls responsables en sont les copistes (et les
traducteurs), car ces livressont dinspiration divine et
linspiration divine exclut toute erreur (art. 6). Lestudes
exgtiques peuvent bnficier des progrs raliss dans plusieurs
sciencesauxiliaires, dont lhistoire, larchologie, lethnologie et la
philologie. Lexgte con-temporain est ainsi mieux arm pour chercher
saisir religieusement et avec le plusgrand soin les moindres dtails
sortis de la plume de lhagiographe sous lEsprit Divin (art. 20). Il
peut donc semployer purifier de ses altrations le texte primitif
critpar lauteur sacr lui-mme et le dlivrer des gloses, lacunes,
inversions de mots,rptitions et des fautes de tout genre qui ont
coutume de se glisser dans tous lescrits transmis travers plusieurs
sicles (art. 21). Dans cette encyclique, le papesouhaite galement
dissiper [le] prjug selon lequel lglise voit dun mauvais ilet
entrave la lecture de lcriture7 (art. 13). Il se montre favorable
la publicationde nouvelles traductions de la Bible en langues
vernaculaires8, condition que cestraductions soient faites partir
des langues originales9 et de la Vulgate, qui estabsolument exempte
de toute erreur en ce qui concerne la foi et les murs (art. 26).Pie
XII prcise que les traducteurs-exgtes doivent mettre le plus grand
soin dcouvrir [le] sens littral des mots10 (art. 27). Sil reste des
obscurits, cest quellessont voulues par lauteur divin : Dieu a
parsem dessein de difficults les LivresSaints quil a inspirs
lui-mme, afin de nous inciter les lire et les scruter avecdautant
plus dattention et pour nous exercer lhumilit par la constatation
salu-taire de la capacit limite de notre intelligence (art. 41). Il
faut la foi pour croirecela Lencyclique Divino Afflante Spiritu
reconnat, en somme, que les livres sacrs
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24834
-
peuvent tre rviss et quil est possible den proposer de nouvelles
traductions. Cenest pas un hasard si elle fut promulgue un 30
septembre, jour anniversaire de lamort de saint Jrme, qui a consacr
la moiti de sa vie prcisment ce travail.
Le Concile Vatican II (1962-1966) ouvre encore davantage la
porte la traduction.En 1963, Paul VI promulgue la Constitution sur
la sainte liturgie, SacrosanctumConcilium, afin de faciliter
lapplication du renouveau liturgique souhait par les
presconciliaires. Dans ce document important, puisquil incarne
lesprit de renouveauqui souffle alors sur lglise, Rome autorise (
concde est le mot employ dans laversion franaise de la
Constitution) lusage dautres langues que le latin pour lamesse,
ladministration des sacrements, les prires et autres actes rituels.
Toute nou-velle traduction des textes bibliques ou liturgiques doit
toutefois recevoir laval duSige apostolique. Depuis la publication
de ce document, le Saint-Sige a rendu pu-bliques cinq Instructions
pour la bonne application de la Constitution sur la sainteLiturgie
du Concile Vatican II : Inter cumenici (1964), Tres abhinc annos
(1967),Liturgicae instaurationes (1970), Varietates legitimae
(1994), Liturgiam authenticam(2001). Toutes ces instructions
comportent des dispositions concernant la traduc-tion. Les deux
dernires portent plus spcifiquement sur la rvision des livres
liturgi-ques en langue latine et sur leur traduction dans les
diffrentes langues modernes.
Varietates legitimae traite de la dlicate question de
linculturation. On entendpar ce terme la prsentation et la
rexpression de la bonne parole dans des formes etdes termes propres
une culture. Linculturation est indissociable de la
dmarchevanglisatrice de lglise, puisque la culture est un aspect
essentiel de la personnehumaine. Elle est le prisme par lequel ltre
humain fait lexprience du monde, ycompris lexprience spirituelle.
Avec la publication de Sacrosanctum Concilium,Rome accepte que le
rite romain sassouplisse quelque peu et adopte diverses
autresformes11, lintrieur de certaines limites, bien entendu.
Plus intressant encore, de notre point de vue : linstruction
Liturgiam authen-ticam, la dernire en date, porte exclusivement sur
la traduction en langues vernacu-laires. Sans doute pour la premire
fois de sa longue histoire, Rome y expose endtail, sous forme de
rgles prcises, sa conception de la traduction et ses
exigencesparticulires pour la traduction des textes bibliques et
liturgiques. Vritable trait detraduction , ce document, qui
remplace toutes les normes et directives prcdentes lexception de
celles figurant dans Varietates legitimae, pose des balises
destines encadrer le travail des traducteurs. En fait, il sagit
davantage dun rglement , carcet ensemble de prescriptions est
coercitif. Ces rgles ne sont pas donnes simplement titre indicatif.
Elles dcoulent directement de lexprience acquise au cours des
trentedernires annes, caractrises par ladaptation des textes
bibliques et liturgiquesdans diverses langues et cultures.
Il importe de prciser que, dans le sillage de laggiornamento que
les vquesconciliaires appellent de leurs vux, le successeur de Jean
XXIII, Paul VI, cre unecommission spciale ds 1965 et lui confie le
mandat de rviser la Vulgate, la lumiredes progrs modernes raliss
par lrudition biblique12. Une version prliminaire dece quil est
convenu dappeler la Nova Vulgata ou No-Vulgate parat en 1970.
Laversion finale est promulgue par Jean-Paul II en 1979, mais le
Vatican ne ferme paspour autant la porte toute amlioration de ce
texte canonique13. dition typique, laNo-Vulgate ne remplace pas les
textes en langues originales, mais constitue un docu-ment de
rfrence auxiliaire pour la traduction en langues vernaculaires.
Cette dition
les nouvelles rgles de traduction du vatican 835
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24835
-
836 Meta, L, 3, 2005
offre lavantage, selon Rome, de maintenir la tradition en matire
dinterprtationdes textes fondateurs. Certains livres de la Bible,
dont ceux de Samuel, nous ont ttransmis en plusieurs versions
hbraques et grecques divergentes. Quelle traditionchoisir lorsquil
faut les traduire ? Dsormais le traducteur naura plus le choix : il
luifaudra suivre linterprtation retenue dans la No-Vulgate. Dans ce
contexte bienparticulier, la traduction sert de point de rfrence
doctrinal.
Depuis Vatican II, on peut dire quen matire de traduction Rome
ntait pasoppose en principe aux traductions qui appliquaient la
technique de ladaptation etdes quivalences dynamiques , ce qui
allait tout fait dans le sens de lincultura-tion et facilitait la
comprhension des textes par les fidles. Le latin, langue
officielledes affaires de lglise, tait, hors des officines de la
hirarchie catholique, une languemorte, incomprise de la masse des
croyants. Dans la liturgie, aprs deux mille ans dergne sans
partage, le latin cdait enfin la place aux langues vivantes ; le
clbrant netournait plus le dos au peuple, mais lui faisait face. Ce
retournement est symbolique.
Le retour du balancier
Vingt-cinq ans peine aprs la promulgation de la Constitution
Sacrosanctum Conci-lium (1963), Jean-Paul II publie en 1988 une
lettre apostolique, Vicesimus QuintusAnnus, dans laquelle
transparat son inquitude au sujet de lvolution des rformesen matire
de liturgie et de traduction :
Les Confrences piscopales ont eu la lourde charge de prparer les
traductions deslivres liturgiques. Les ncessits du moment ont
parfois conduit utiliser des traduc-tions provisoires, qui ont t
approuves ad interim.
Mais le temps est venu de rflchir certaines difficults prouves
depuis, de rem-dier certaines faiblesses ou inexactitudes, de
complter les traductions partielles, decrer ou dapprouver les
chants utiliser dans la liturgie, de veiller au respect des
textesapprouvs, de publier enfin des livres liturgiques dans un tat
quon peut considrercomme acquis durablement et dans une prsentation
qui soit digne des mystres cl-brs. Pour le travail de traduction,
mais aussi pour une concertation plus large lchelle du pays entier,
les Confrences piscopales devaient constituer une Commis-sion
nationale et sassurer le concours de personnes expertes dans les
diffrents secteursde la science et de lapostolat liturgique. Il
convient de sinterroger sur le bilan, positifou ngatif, de cette
Commission, sur les orientations et sur laide quelle a reues de
laConfrence des vques dans sa composition ou son activit. Le rle de
cette Commis-sion est beaucoup plus dlicat quand la Confrence veut
traiter de certaines mesuresdadaptation ou dinculturation plus
profondes : cest une raison de plus pour veiller y placer des
personnes vraiment expertes (Jean-Paul II 1988, art. 20).
Pourquoi ce temps darrt et de rflexion ? Que sest-il pass en
vingt-cinq ans ? Doprovient linquitude du souverain pontife ? La
hirarchie romaine, dpositaire etgardienne de la Vrit rvle, a-t-elle
jug quil y a eu dbordement, drapage dogma-tique, non-respect de la
tradition ? Tout porte croire que cette manire de traduirequi fait
place une forme de crativit contenue na pas produit les rsultats
escomp-ts. Certaines initiatives dinculturation (donc de
traduction) ne semblent pas avoireu lheur de plaire au Sige
apostolique. On peut facilement imaginer que cest le casdes
nouvelles traductions qui associent des spcialistes des critures
bibliques (pourle fond) et des crivains contemporains (pour la
forme), des traductions o Dieuest prsent sous les traits dune
femme, o la Vierge Marie est de race noire, aux
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24836
-
traductions en langue basique, familire, argotique14, aux
versions idologiques,fministes15, potises, paraphrases (Living
Bible), aux traductions-calques ruditeset autres productions
similaires. Cette prolifration quelque peu anarchique de ver-sions
tendancieuses qui malmnent, aux yeux de lautorit romaine, la
doctrinetraditionnelle nest pas sans rappeler la situation qui
rgnait au temps de Jrme etplus encore lpoque de la Rforme, comme
nous lavons voqu prcdemment.Chaque fois quil y a pril en la
demeure, Rome ragit. Cette fois, ce nest pas encrant des tribunaux
dInquisition ni en rigeant des bchers quelle neutralisera les
traducteurs hrtiques . Sa stratgie consiste agir de lintrieur en
tablissant descritres svres de slection des traducteurs, en
promulguant des rgles coercitives detraduction et en mettant en
place des procdures rigoureuses dapprobation des seu-les
traductions sur lesquelles elle peut apposer son estampille d
authenticit .Rome reprend donc linitiative et redfinit
unilatralement les rgles du jeu. Une foisde plus la bataille se
dplace sur le champ de la traduction, une fois de plus les
tra-ducteurs sont dans la mire de lglise. Ltau se resserre sur eux.
Comme sur tous cescroyants de bonne volont qui, par conviction,
rcrivent la Bible, en tout ou en partie,dans un langage accessible
au commun ignorant .
La traduction-tradition
En vingt-cinq ans, lglise et la socit ont connu des mutations
profondes et rapides.Le phnomne dinculturation de mme que les
traductions en langues vernaculairesqui lont accompagn ont soulev
de nouveaux problmes, imprvus lorigine. Lesnouvelles rgles de
traduction rendues publiques par le Vatican visent remdier
lasituation.
En gnral, la traduction supporte mal la camisole de force
quimposent desrgles contraignantes. Le traducteur voudrait-il les
appliquer la lettre que les parti-cularits et subtilits des textes
len empcheraient. Il ne peut exercer convenable-ment son art sans
une certaine libert de rexpression, sans faire appel
auxindispensables ressources de la recration. Traduire na rien dun
banal processus desubstitution. Le travail traductif requiert un
sujet libre, libre dans son choix fonda-mental de traduction, libre
dans ses choix ponctuels, libre dans la matrise de cettechane de
coup par coup (J.-R. Ladmiral) quest le traduire dans sa pratique
ras detexte. Cette libert-l se confond avec la fidlit, et il
appartient chaque traducteur,non sans risque, de dlimiter lespace
de jeu de cette libert-fidle16 (Berman 1995 :42). Cest pourquoi, de
toutes les rgles consignes dans les traits et les arts de
tra-duire, bien peu, vrai dire, ont eu une relle utilit pratique.
Aucun traducteur, notre connaissance, na jamais indiqu avoir
appliqu dans son travail lensemble desrgles dun trait de
traduction. Une rgle de traduction ne sera jamais une rgle
degrammaire ; un trait de traduction ne sera jamais un manuel
dinstructions. Latraduction est une activit o lon suit des rgles
sans disposer de rgles pour appli-quer les rgles , a crit fort
pertinemment Christian Berner (1999 : 18). Les rglesqui composent
ces traits sont nonces a posteriori et tmoignent dune
conceptionparfois trs personnelle de la manire de traduire, quand
elles ne codifient pas toutsimplement des gnralits ou des pratiques
tablies.
Il en va tout autrement des rgles contenues dans linstruction
Liturgiam authen-ticam, qui porte en sous-titre : De lusage des
langues vernaculaires dans ldition
les nouvelles rgles de traduction du vatican 837
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24837
-
838 Meta, L, 3, 2005
des livres de la liturgie romaine. Ces directives sont dictes
par une institutionpuissante, autocratique, qui est en mesure
dimposer dautorit ses traducteurs desnormes et des pratiques de
traduction rigoureuses. Faute de les appliquer, les tra-ducteurs
verront leur traduction refuse par le Saint-Sige, qui naccordera
pas sonimprimatur17. Nous sommes aux antipodes de la libert
cratrice dont jouissent lestraducteurs littraires. De ce point de
vue, on aurait tort dassimiler la traductionreligieuse, telle que
la conoit le Vatican, la traduction littraire, du seul fait
ducaractre profondment littraire des livres qui composent la Bible.
Ses rgles, commenous le verrons, faussent la donne. On peut
traduire une uvre littraire en la pri-vant de sa littrarit. Que
vaut, par exemple, un pome dpouill de son rythme, desa musicalit,
de sa signifiance ? Cest un corps sans vie.
Examinons de plus prs les principes qui devront tre suivis
dsormais dans lesfutures traductions (art. 71) pour que ces
versions puissent tre certifies confor-mes la doctrine de lglise.
Linstruction Liturgiam authenticam18 comporte cinqgrandes
subdivisions :
I Le choix des langues vernaculaires en vue de leur introduction
dans la liturgieII La traduction de textes liturgiques dans les
langues vernaculairesIII La prparation des traductions et
ltablissement des commissionsIV La publication des livres
liturgiquesV La traduction des textes liturgiques propres19.
Lobjet de linstruction est clairement expos : Rflchir de nouveau
sur la notionjuste de traduction liturgique, de telle sorte que les
traductions de la sainte Liturgieen langue vernaculaire soient dune
manire certaine la voix authentique de lglisede Dieu (art. 7).
Le texte original latin renferme une note de bas de page trs
significative. On yindique que le latin possde plusieurs mots pour
dsigner lacte de traduire, notam-ment versio, conversio,
interpretatio, redditio, mutatio, transductio. Ces termes
syno-nymes sont couramment employs dans la Constitution
Sacrosanctum Concilium etdans de nombreux autres documents
contemporains. Mais les auteurs de linstruc-tion les cartent demble
au profit de translatio et des mots de la mme famille, mme si
lusage de ces mots est un peu dur quant au style en latin, et entre
dans lacatgorie des nologismes (art. 2, note 2). Ce qui peut
sembler une banale simpli-fication terminologique est en fait
lindice dun parti pris thorique sur la manire detraduire. Toutes
les autres expressions sont cartes, car elles comportent la
notiondune divergence ou variation du texte nouveau par rapport au
sens du texte original (ibid.). Elles laissent croire que des
modifications porteuses dventuelles erreursdoctrinales ont t
apportes aux textes. Ainsi, ds le dpart, les auteurs annoncentleurs
couleurs : ils se dclarent adeptes de la traduction littrale, et
entretiennent lillu-sion quil est possible, en passant dune langue
une autre, de raliser des copiesconformes , sans gauchissement,
sans changement, sans transformation aucune. Ilsconoivent la
translatio plus ou moins comme un acte de report non dformant.La
rflexion thorique moderne nous a appris que cela est un mythe. Le
report, telque nous avons dfini ce concept20, porte uniquement sur
certains lments dun textede dpart et il nest pas applicable
indistinctement toutes les parties du discours.Le processus de la
traduction implique linterprtation du sens, et la rexpression dece
sens apprhend se fait soit par le rappel de formules plus ou moins
consacres,donnes davance dans la langue darrive (cest la
remmoration ), soit par la
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24838
-
postulation dune quivalence lexicale, syntagmatique ou mme
phrastique, imprvi-sible hors discours (cest la cration discursive
). Concevoir la traduction commeune opration assimilable un
transvasement garant dexactitude, cest avoir uneconception
rductrice et errone de cette activit complexe. Les littralistes
purs etdurs, les Chateaubriand21, Nabokov, Newmark22 et autres,
manifestent une vritableobsession lgard de lexactitude ; leur
erreur est de chercher cette exactitude dansles mots, alors que le
sens mane du discours. Traduire, ce nest pas singer, ce nestpas une
opration de clonage de mots. Lexactitude nest que du sens.
Cest--direseulement une partie du sens. Puisquelle oublie que le
sens na lui-mme quunepart dans le mode de signifier (Meschonnic
2004 : 173). En traduction, et a fortiorien traduction biblique, on
ne peut pas faire lconomie de la potique des textes si onveut
rellement les traduire. Une traduction est un acte de langage
spcifique. Elle nepeut pas se nier elle-mme, se prsenter comme si
elle nexistait pas et prtendredonner directement lire le texte
quelle traduit, comme la bien vu Arno Renken : Un texte bien
traduit est un texte qui serait identique loriginal, ce qui nest
passeulement une impossibilit pratique, mais encore une aberration
thorique puisquecela implique une alination de la traduction au
moment mme de sa ralisation (Renken 2002 : 17).
Toutes les langues naturelles du monde se valent en droit et en
dignit. Toutes,cependant, ne psent pas du mme poids quant leur
pouvoir de communication etde diffusion. De ce point de vue, il y a
une hirarchie des langues. Linstruction limitele nombre de celles
quil est licite dadmettre dans les clbrations liturgiques, doncde
traduire. Sont exclues les langues qui demeurent seulement un objet
dintrtculturel (art. 10) et dont les chances de survie sont minces.
Il se fera donc dorna-vant moins de traduction dans des dialectes
ou des parlers locaux vous disparatre.Les auteurs du document
reconnaissent et lhistoire leur donne raison quelintroduction, par
lglise, des langues vernaculaires dans la liturgie peut avoir
uneffet dterminant sur le sort de ces langues. Il nempche que le
choix des languesdans lesquelles se feront les traductions est un
choix idologique.
Rome raffirme haut et fort les vertus du littralisme. Dsormais,
ce sera au lecteur faire leffort de comprendre loriginal. Alors que
les pres conciliaires prnaient unelangue simple, concise, claire et
exempte de rptitions inutiles, linstruction Liturgiamauthenticam
bannit toute forme de crativit (art. 20) et impose la traduction la
pluslittrale possible, mme si les mots utiliss traditionnellement
sont obsoltes, archa-ques ou obscurs. Les articles 19 69 de
linstruction noncent en dtail les rgles etcontraintes diverses
auxquelles les traducteurs devront se soumettre pour traduire le
texte original ou primitif [] intgralement et trs prcisment (art.
20), sansomissions, ajouts, paraphrases ou gloses. Quelques brefs
exemples serviront illus-trer le genre de littralisme que les
auteurs de linstruction prconisent. la formulecourante de
salutation Dominus vobiscum traduite en anglais par The Lord be
withyou, les fidles avaient lhabitude de rpondre par And also with
you. Dsormais, illeur faudra dire (comme en franais) : And with
your spirit, car cette formule calquele latin Et cum spirito tuo.
Autres exemples : le Credo doit tre traduit obligatoirement la
premire personne du singulier, et les mots rsurrection de la chair
, traduitslittralement (art. 65). Est bannie la formulation : la
rsurrection des morts .
On ne veut plus dun style trop simplifi do sont limines les
subordonnes, lesfigures de rhtorique et les rptitions. La langue
sacre et solennelle doit maintenant
les nouvelles rgles de traduction du vatican 839
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24839
-
840 Meta, L, 3, 2005
reprendre ses droits et se substituer la langue courante que
parle la masse des fid-les. Pourtant, dans lhistoire, la Bible a t
le creuset dune intense crativit linguis-tique et littraire, de
jeux de langage rendus ncessaires par la tche complexe de
latransmission des crits polyphoniques, vritables millefeuilles
dexpressions religieu-ses et culturelles, dexpriences de sens.
Vouloir aujourdhui arrter cette crativit,dnoncer le travail de
translation, cest en ralit se faire les embaumeurs hypocritesde ce
que lon prtend admirer et vouloir continuer transmettre (Boyer 2002
: 41).Une langue qui refuse de se renouveler sopacifie, se fige, se
dsincarne. Les mots dela Bible finissent par devenir des coquilles
creuses, par ressembler dimprenablesforteresses vides (ibid. : 46)
et paraissent, aux yeux de certains, insubstituables,
in-traduisibles. Fixisme asphyxiant. Les mots pch, grce, foi,
rsurrection ne supporte-raient pas dautres traductions quelles-mmes
(ibid.). Ces mots portent le sceaudun hritage et dune tradition,
celle de la langue du religieux chrtien.
Sil faut crer des termes nouveaux ou largir laire smantique de
mots dj enusage dans les langues vernaculaires, ces nouveauts
doivent rpondre aux vraies exi-gences culturelles et pastorales et
ne pas tre introduites simplement pour faire neufou diffrent (art.
21, 22). On retiendra de prfrence les termes traditionnels de
laNo-Vulgate, tels que Alleluia, Amen, Kyrie eleison. Seraient
rejetes par les censeursecclsiastiques des quivalences revisites
telles que veiller (Cor. 15,4) au lieude ressusciter (Boyer 2001),
Les Psaumes rendus par Gloires , Amen explicitet paraphras en Cest
ma foi , pch et pcheur par garement et gar (Meschonnic 2001) ; les
anges renomms griffons , messagers ou kroubim ou encore Le Nouveau
Testament rebaptis Un Pacte neuf (Chouraqui 1989).Les traducteurs
travaillant au service du Vatican doivent sen tenir le plus
possible la langue chrtienne de transmission des critures, au
vocabulaire du religieux chr-tien traditionnel, tout comme les
traducteurs dune grande entreprise sont tenusdutiliser la
terminologie maison de lentreprise. De ce point de vue, lglise
catholique,une et universelle, ne diffre gure des grandes
multinationales aux ramificationstentaculaires et au sein
desquelles luniformisation de la terminologie en usage dansles
communications crites et la description des produits et procds de
fabricationsont une proccupation constante. De toute vidence, en
dictant cette cinquimeinstruction, Rome na aucunement lintention de
dcaper le langage de la Bible, de lerajeunir, de le nettoyer des
couches culturelles qui sy sont superposes au fil dessicles. Et
pourtant, ny a-t-il pas dchristianiser, dshellniser, dlatiniser,
dbondieuser [], dfranciser ce quon nous donne lire comme des
traductionsen franais de la Bible (Meschonnic 2004 : 149) ? Il faut
rhbraser la Bible. Enfranais. Et dans toutes les langues o on la
traduit. O on traduit. Aprs des sicles la fois ddulcoration et
dannexion langagire, mais aussi de perversion idologique (ibid. :
151). Rhbraser, certes, mais en faisant en sorte que le message
biblique neperde pas sa signification ni sa pertinence pour ceux
qui il sadresse. Toutes lestraductions franaises de la Bible me
font mal au cur, crivait Paul Claudel (1966 :13). Mais Rome reste
obstinment attache la langue du discours chrtien qui sestforme au
cours des sicles et sa dernire instruction ne va aucunement dans le
sensdun renouvellement de cette langue.
Il est dsormais interdit de faire des traductions partir dautres
traductions, cequi est une rgle dthique tout fait valable et qui
figure galement dans les codes dedontologie des associations de
traducteurs professionnels23. Compte tenu du contexte
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24840
-
gnral dans lequel linstruction a t labore, il est permis de
penser que lobjectifnon avou de cette rgle vise aussi rduire le
nombre de traductions en circulation.Les traductions des textes
liturgiques seront dornavant effectues uniquement partir des
versions officielles latines, tandis que les Saintes critures
seront traduites partir de lhbreu, de laramen ou du grec, tout en
tenant compte, pour les usagesliturgiques, de lincontournable
No-Vulgate, tmoin privilgi de la tradition delglise (art. 24).
Les mots employs dans les traductions doivent respecter la
dignit et la beautdu contenu doctrinal exact des textes. Ces
termes, prcise-t-on, doivent tre libresde toute adhsion trop troite
des modes dexpression du moment (art. 27). Soi-gneusement choisis,
ils doivent contribuer la formation dun style sacr de cettelangue
du religieux chrtien voque plus haut : Une traduction liturgique
quitransmet lautorit et lintgrit du sens des textes originaux sert
former une languesacre vernaculaire, dont le vocabulaire, la
syntaxe et la grammaire sont approprisau culte divin, sans pour
autant perdre la force et lautorit quont ces lments dansle langage
quotidien, comme cela fut le cas dans les langues des peuples
dantiquevanglisation (art. 47). Les expressions obsoltes ou
inlgantes en usage danscertains passages de la Bible seront
conserves. Cette rgle implique, semble-t-il, danslesprit de ses
auteurs que la stabilit du vocabulaire reflte la stabilit et,
partant, lacrdibilit de linstitution et de sa doctrine. Il en va de
mme pour les symboles, lesimages et les actes rituels qui doivent
parler deux-mmes . On vitera d explicitergrossirement toutes les
subtilits des allusions bibliques (art. 49). Les archasmes etles
mots vieillis seront prfrs aux nologismes au destin incertain et
parfois ph-mre. Finies donc les traductions rapprochantes,
explicatives ou ethnocentriques. Lamme rgle sapplique aux mots
concrets qui dcrivent les actions des tres clestesreprsents sous
des traits humains, tels que marcher, bras, doigt, main, visage
deDieu, chair, corne, bouche, germe, visites, etc. Tous ces mots
relevant de lanthropo-morphisme, il est prfrable de ne pas les
aplatir, ni de les rendre dans les languesvernaculaires par des
termes plus abstraits ou vagues (art. 43). Toujours ce mmeculte
idoltre rendu aux mots traditionnels de lexpression de la foi
chrtienne.Sacralisation, en fait, de traductions anciennes dont le
vocabulaire sest sdiment,ptrifi. Glorification dun tat de langue
pass. Refus de croire aux possibilits expres-sives des langues
modernes pour faire entendre le message divin. Refus des risquesque
comporte le travail sur la langue.
Deux articles, 30 et 31, portent sur la dlicate question du
genre grammatical desnoms et des pronoms. Faut-il reprsenter Dieu
comme un homme ou une femme ?Le mot homme peut-il dsigner le genre
humain ? Quel est le sexe des anges ? Lesauteurs de linstruction
tranchent : [] si le texte originel emploie un mot uniquepour
exprimer le lien entre un seul homme et lunit, ainsi que
luniversalit de lafamille ou la communaut humaine (comme les mots
hbreu adam, grec anthropos,latin homo), il faut conserver cette
manire de sexprimer (art. 30). Nen dplaiseaux fministes : le mot
homme est inclusif et continuera dsigner lensemble destres humains.
Larticle suivant (32) renferme les consignes dordre grammatical
:
a) Dieu et les membres de la Sainte Trinit sont de sexe
masculin, leur genre grammaticaltant masculin.
b) La locution compose Filius hominis, en raison de son
importance christologique, seratraduite obligatoirement par une
locution similaire (Fils de lhomme).
les nouvelles rgles de traduction du vatican 841
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24841
-
842 Meta, L, 3, 2005
c) Le mot Patres (Pres) sera toujours rendu par un mot
masculin.d) Lglise sera toujours dsigne par un pronom fminin (cf.
notre Sainte Mre lglise).e) Ce sera le genre grammatical du mot du
texte original qui dterminera en langues ver-
naculaires le genre des anges, des dmons, des desses et des
dieux paens.
Cette dernire consigne est une autre preuve de la force
dattraction quexercent lestextes originaux. Cela sapplique mme aux
majuscules, dont lemploi en languedarrive se modlera sur ldition
typique en langue latine.
Afin dassurer uniformit et stabilit (art. 36), une seule
traduction approuvesera autorise sur un mme territoire. Il est
demand aussi aux traducteurs dviterdemployer un vocabulaire ou un
style que les catholiques pourraient confondre avecdes manires de
sexprimer dautres communauts religieuses non catholiques. LeVatican
souhaite galement, dans un souci vident de prserver la cohrence,
luni-formit et lharmonisation de lensemble du corpus doctrinal,
quil y ait une concor-dance troite entre les textes des prires, des
lectionnaires24 et de la liturgie romaine,et le texte de la
No-Vulgate. Les traducteurs feront en sorte que leur manire
detraduire favorise cette correspondance (art. 49), ce qui est une
contrainte suppl-mentaire venant sajouter celle-ci : veiller ce que
la traduction exprime le senstraditionnel christologique,
typologique ou spirituel, et que soient manifests lunitet le lien
entre lAncien et le Nouveau Testament (art. 41). On demande ni plus
nimoins aux traducteurs de christianiser lAncien Testament en
montrant quil pr-figure le Nouveau. En histoire, cela sappelle un
anachronisme ; en sciences sociales,une idologie.
Ce mme article propose une rgle dinterprtation lorsquun texte
donne lieu des interprtations multiples : le sens du passage
difficile traduire sera lucid,notamment, la lumire de la
No-Vulgate, de la tradition, des crits des pres delglise et, ce qui
tonne, des anciennes traductions des Saintes critures, dont
laSeptante ou Bible dAlexandrie25. On sait que la Septante est une
mauvaise traduction-calque maille derreurs grossires et coule dans
un grec trs hbras. On peutpenser quelle figure dans cette rgle
dinterprtation surtout en raison de son littra-lisme excessif qui
la rapprocherait des textes primitifs, de cette veritas hebraica
queprnait saint Jrme. En traduction religieuse, plus on est
littral, plus on est, croit-on,prs de la vrit scripturaire , plus
on a limpression dtre le fidle porte-parolede lauteur initial.
Indracinable mythe ! quoi quen pense le littraliste bon
teintVladimir Nabokov pour qui lexpression traduction littrale est
tautologique, carune traduction qui nest pas littrale nest pas une
vritable traduction, mais uneimitation, une adaptation ou une
parodie (Nabokov 1955 : 504 ; notre traduction).Cest faire bien peu
de cas de toute la dimension discursive et potique des textes.Cest
thoriser la traduction en termes de langue et de signifiants en
oubliant quuntexte a aussi une signifiance. Le traducteur nest pas
un eunuque qui lon confie lagarde des mots.
Les auteurs de Liturgiam authenticam, document dans lequel sont
abords laplupart des aspects fondamentaux de la traduction, nont
pas jug bon dutiliser lemtalangage moderne servant dcrire les
concepts et les oprations de la traduc-tion. Ils nemploient aucune
expression spcialise telle que langue de dpart , langue darrive ,
texte cible , texte source , procd de traduction , strat-gie de
traduction , intertextualit , etc. Ils y traitent, nanmoins, de
dnotation etde connotation, de lattitude adopter lgard des termes
latins difficiles traduire,
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24842
-
des cas o lemprunt se justifie et o la cration nologique est
licite, des registres dediscours et des multiples niveaux de
signification des textes. Les articles 57, 58 et 59portent sur la
syntaxe, les procds de style et les genres littraires.
Aux nombreuses contraintes imposes aux traducteurs sen ajoutent
deuxautres : traduire le texte pour quil puisse tre mis en musique
(art. 60) et tenircompte du temps ncessaire pour prononcer le
texte, soit en le rcitant, soit en lechantant (art. 62). Enfin, les
dernires sections de linstruction (70 130) concernentles aspects
dordre technique et juridique entourant la prparation des
traductions, lademande de recognitio (approbation) pour garantir
leur authenticit, la compositiondes commissions charges des
traductions et la publication des livres liturgiques.
La traduction de la Bible et des documents liturgiques selon le
Vatican requiertdes qualits et des comptences trs particulires. On
exige beaucoup du traducteur.Outre la connaissance de lhbreu, du
grec et du latin, il lui faut avoir un esprit deprire et la
confiance en laide de Dieu (art. 75) ; tre profondment croyant,
docileet soumis au Magistre de lglise ; avoir la conviction que les
textes sacrs ontt composs sous linspiration divine et quils cachent
la rvlation du mystre dusalut ; adhrer pleinement aux dogmes
catholiques ; croire aux miracles ; accepterde traduire
littralement certains passages sans les comprendre, car les paroles
dela Sainte criture [] expriment des vrits qui dpassent les limites
imposes parle temps et le lieu (art. 19) ; croire que les obscurits
dans les textes sont voulues parDieu (art. 41) ; tre conscient de
contribuer la propagation de la doctrine catholique ;traduire le
plus littralement possible et en fonction de la tradition
multisculaire delglise ; accepter que son travail soit rvis (art.
75) par des personnes verses dansles questions de doctrine, mais
qui ne connaissent pas forcment les arcanes de latraduction.
Avant dtre admis dans une commission, les traducteurs devront
montrer patteblanche et obtenir au pralable le Nihil obstat de la
Congrgation pour le culte divinet la discipline des sacrements, qui
considrera leur formation, leur comptence et lalettre de
recommandation de leur vque diocsain. Qui plus est, ils devront
accepterdaccomplir leur travail confidentiellement et dans le plus
strict anonymat. Il semblebien rvolu le temps o lon dsignait les
Bibles du nom de leur traducteur : Bible deWyclif, de Luther, de
Tyndale, dOlivtan, de Crampon, de Chouraqui, etc. La traduc-tion
ntant pas perue comme un acte de cration, contrairement lopinion
admisedans les milieux traductologiques, le traducteur doit
seffacer devant le texte sacr.Comment dailleurs pourrait-il faire
acte de prsence dans un texte entirement investide la prsence
divine ? Il y a une certaine logique dans cette exigence
danonymatpour ceux qui croient la thse de linspiration. La
traduction sera donc collective etanonyme ou elle ne sera pas.
Conclusion
Depuis lAntiquit, chaque tentative de nouvelle traduction de la
Bible suscite descritiques. Mme la Vulgate fut critique par saint
Augustin qui mit en doute lautoritde Jrme. Pour lglise catholique,
les textes bibliques et liturgiques ne constituent pasdes documents
dintrt purement historique ou culturel. Dinspiration divine,
ilsrenferment le mystre du salut . La nature trs particulire de ce
corpus doctrinalexigeait donc llaboration dun ensemble de rgles de
traduction appropries. Ces
les nouvelles rgles de traduction du vatican 843
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24843
-
844 Meta, L, 3, 2005
rgles, qui tmoignent de la nostalgie dun texte unique, immuable
et intemporel,nont pas t conues en fonction de normes rgissant la
traduction de textes littrairesou pragmatiques, ni la lumire de la
rflexion moderne en traductologie, tant senfaut, mais en fonction
de la mission traditionnelle de lglise catholique et dans unsouci
vident de prserver intacte la doctrine, menace par la
multiplication de tra-ductions juges tendancieuses et non conformes
lenseignement officiel de lglise.Les comptences exiges des
traducteurs sont de nature refroidir lardeur des plusfervents
adeptes du proslytisme. Tout un chacun ne pourra pas simproviser
traduc-teur pour se faire ouvrier dans la vigne du Seigneur Il
faudra ni plus ni moinsrunir les qualits dun saint Jrme pour se
faire agrer comme traducteur par leVatican.
Quelle conception de la traduction et du traducteur se dgage de
cette cinquimeinstruction post-conciliaire ? En plus de leurs
dictionnaires et de leurs ressourcesinformatiques, les traducteurs
de textes religieux peuvent-ils rellement compter surlaide de
lEsprit Saint pour accomplir leur travail, comme lont t, croit-on,
lesauteurs des textes sacrs ? Les deux cosignataires de
linstruction en ont la fermeconviction : La traduction des livres
liturgiques requiert [] un esprit de prire etla confiance en laide
de Dieu, qui nest pas accorde seulement aux traducteurs, mais
lglise elle-mme, durant tout le processus qui conduit lapprobation
dun textestable et dfinitif (art. 75 ; cest nous qui soulignons).
Le scepticisme est de miseToute doctrine religieuse entretient une
croyance en lexistence dtres surnaturels, etles traducteurs des
commissions de traduction cres par les vques sont certainementanims
dune foi profonde qui les porte croire sans doute cette inspiration
divine.Se pose alors le problme des erreurs qui maillent les
traductions des traducteursinspirs . Mme le vnr saint Jrme na-t-il
pas commis plusieurs contresens danssa Vulgate ? Par exemple,
lorsque Mose descend du Sina, ne la-t-il pas affubl de cor-nes,
alors quil aurait d crire que la peau de son visage rayonnait (Ex
34,29) ?Jrme ntait-il pas guid par lEsprit ? Le grand rhabilitateur
du travail des traduc-teurs que fut Didier rasme (1467-1536) avait
combattu en son temps cette ide,sans grand succs, semble-t-il, car
ce mythe sest maintenu jusquau xxe sicle sous laplume de papes,
dvques et darchevques : Pourquoi Jrme aurait-il eu besoindenseigner
la mthode de traduire les saintes lettres, crit lhumaniste lucide,
si ledon en est accord par inspiration divine ? Allons-nous faire
remonter nos erreurs auSaint-Esprit et dire quil en est lauteur ?
(rasme 1967, t. I : 385-386). rasme deRotterdam est demeur croyant
jusqu la fin de sa vie, sans jamais abdiquer pourautant son
jugement critique ; il savait distinguer croyance, crdulit et
mythe.
Ce quon demande en fait aux traducteurs ce nest pas de rexprimer
dans unelangue moderne le sens purement conceptuel ou culturel des
textes bibliques ouliturgiques, mais leur sens doctrinal et
thologique (art. 50), leur sens religieux telque lenseigne lglise
catholique. Cest pourquoi, par exemple, seuls des croyantssont en
mesure dexprimer une vraie notion thologique de causalit divine
(art.54), l o des non-croyants seraient tents demployer des mots
qui rendraient lidedune aide purement extrieure ou profane. Il nest
pas donn tout le monde decroire aux miracles et aux interventions
divines dans les affaires de la vie couranteQuoi quil en soit,
dornavant, seuls des croyants convaincus et reconnus tels par
lahirarchie ecclsiastique pourront participer aux projets de
traduction dont les vquesprendront linitiative.
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24844
-
Les rgles qui composent linstruction Liturgiam authenticam
reprsentent lor-thodoxie catholique en matire de traduction. Ce
dcalogue destin aux traducteursrepose sur un certain nombre de
prsupposs :
les textes bibliques et doctrinaux sont dinspiration divine ;
ils renferment une Vrit ternelle et immuable ; lglise a la mission
de garder intact le message divin ; elle est la seule comptente
pour interprter les textes de sa doctrine ; elle a reu la mission
de les faire connatre tous les peuples de la Terre ; la traduction
est un mal ncessaire ; elle est dangereuse, car elle altre les
textes ; elle risque de falsifier la doctrine en pervertissant le
sens des textes ; les quivalences dynamiques de la traduction libre
(cratrice) dforment le sens des
textes ; lglise doit donc encadrer troitement le travail des
traducteurs ; elle seule peut juger de la validit doctrinale dune
traduction ; le traducteur lesprit critique est un hrtique en
puissance ; le traducteur croyant, docile et soumis au Magistre de
lglise peut, lui, compter sur
laide de lEsprit Saint ; il est possible de traduire le sens
exact et authentique des textes bibliques et doctri-
naux ; la traduction est une translatio, une forme de report non
dformant ; les obscurits des textes sont voulues par Dieu ; il ne
faut pas chercher les claircir ; la traduction littrale est la
seule stratgie apte rendre lauthenticit des textes ; il existe une
langue du religieux chrtien distincte du langage commun ; il est
impratif de respecter cette langue particulire ; ce faisant, on
maintient la doctrine, la tradition et la crdibilit de lglise ; il
est plus important dtre fidle la tradition que de renouveler la
langue du religieux
chrtien ; lobjet de la traduction est le sens doctrinal des
textes ; la traduction doit tre une uvre collective ; le traducteur
peut et doit tre absent de ses traductions ; seul un croyant
convaincu peut traduire la Bible et les textes liturgiques
comme
lentend lglise catholique.
En y regardant de plus prs, on constate que bon nombre de ces
prsupposs sont desdogmes (ou croyances institutionnalises non
fondes), des prjugs lgard destraducteurs, des ides reues (fausses)
sur la nature de la traduction, ou des mythes.Cette mthode idoine
dnote dans lensemble une mconnaissance des vritablesenjeux de la
traduction ou, si lon prfre, des enjeux de la vritable
traduction.Lattachement obstin que ses auteurs portent la langue du
religieux chrtien estcontraire lessence mme de la dmarche de
traduction qui est, pour une bonnepart, rinvention dans la langue
daccueil et non mimtisme de la langue dorigine. trop vouloir
dfendre les formes figes du langage de la tradition, les mots de
nospres, nous ninventons plus les conditions dune transmission
possible (Boyer2002 : 124) du vritable message chrtien. Ce
conservatisme est contre-productif.
Par ailleurs, bien que les auteurs de linstruction insistent sur
le fait que les traduc-tions doivent tre exemptes de toute
arrire-pense idologique (art. 3, 32), il nendemeure pas moins quils
demandent explicitement aux traducteurs de christianiserlAncien
Testament en montrant que le Nouveau donne un sens lAncien. Cela
est
les nouvelles rgles de traduction du vatican 845
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24845
-
846 Meta, L, 3, 2005
en soi une distorsion idologique. Dire, par exemple, dans Isae
que cest une vierge qui a enfant pour faire davance allusion la
Vierge mre du Christ estabusif, car le texte original dit alma (une
jeune femme) et non betoula (une vierge).De mme, vox clamantis in
deserto : Une voix parle dans le dsert / ouvrez un che-min au
Seigneur est une formulation qui fausse le sens rel de ce passage
dont lasignification exacte est : Une voix appelle / dans le dsert
ouvrez le chemin (Isae40,3)26. Nous avons vu, galement, que le
choix des langues dans lesquelles pourrontse faire les traductions
est aussi dordre idologique.
La cinquime instruction expose on ne peut plus clairement les
nouvelles dis-positions adoptes par lglise en matire de traduction.
Si lencyclique de Pie XIIet plus encore la Constitution conciliaire
manifestaient une ouverture lgard destraductions, que lon
souhaitait adaptes aux fidles daujourdhui
(traductions-inculturation), force est de constater, un demi-sicle
plus tard, un retour du balancierdu ct du traditionalisme et du
conservatisme (traductions-tradition). Le littralismepeut tre vu
comme une forme dexpression du conservatisme, voire un dsir
dimmo-bilisme, une idalisation du pass. Dans Liturgiam authenticam,
les qualificatifs authentique , exacte , fidle , intgrale , juste ,
prcise , sre appli-qus la traduction sont autant de synonymes de
lexpression
traduction-littrale-conforme--la-doctrine-et--la-tradition . Rome
a, semble-t-il, mis un frein aumouvement dinculturation, ce que
beaucoup de croyants actifs dans lglise dplo-rent. Son nouveau
trait de traduction porte lempreinte de ce revirement. Ce
traitconservateur bride les traducteurs et leur impose un ensemble
de rgles rigides. Lacrativit inhrente au processus de traduction
est crase sous la chape de plomb dudogmatisme catholique et de la
tradition. Faut-il sen tonner quand on sait que leprfet de la
Congrgation pour le culte divin et la discipline des sacrements,
cosigna-taire de linstruction, le cardinal Jorge A. Medina Estvez,
dorigine chilienne, est unultraconservateur ? Personne ne
contestera non plus que le pontificat de Jean-Paul IIse
caractrisait par un retour aux valeurs dfendues bec et ongles par
la droite catho-lique, attitude qui contraste singulirement avec le
vent de renouveau que Jean XXIIIavait fait entrer dans lglise en
convoquant Vatican II. Cela prouve une fois de plusque la manire de
traduire suit de prs lvolution des mentalits, des socits,
desinstitutions et des idologies. Les rgles de la traduction
religieuse ne font pas excep-tion cette loi universelle de lart de
traduire. Elles changent elles aussi au gr descirconstances, des
ralits nouvelles, des virages idologiques ou des courants de
pensequi dominent un moment donn au sein dune institution
religieuse. La traductionsera toujours un bon baromtre du
changement. De ce point de vue, elle ne trahitjamais.
NOTES
1. Lauteur tient remercier Sybil Brake (Ottawa), Carmen Gloria
Garbarini (Temuco, Chili), PaulHorguelin (Roxton Falls, Qubec) et
Christiane Lafond (Gatineau, Qubec) pour avoir relu son texteet lui
avoir fait part de leurs judicieux commentaires.
2. Bible translation is a typical Christian activity. 3. Ce nest
quau xiiie sicle que lon a commenc dsigner la traduction latine de
Jrme sous le
nom de Vulgate , cest--dire texte commun , texte populaire .4.
En fait, en Angleterre deux sicles plus tt, le thologien John
Wyclif (v.1320-1384), en prnant la
sparation de lglise et de ltat, en sattaquant au pape et en
faisant de la Bible la base de la foi, faitfigure de prcurseur de
la Rforme. On la dailleurs surnomm le premier des protestants .
Sa
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24846
-
traduction de la Bible publie en 1382 est probablement la plus
importante uvre traduite en anglaisau xive sicle.
5. La Rforme [na-t-elle] pas t avant tout une querelle de
traducteurs ? (Cary 1963 : 7).6. On appelle dition typique un livre
publi en vertu dun dcret de la Congrgation pour le culte
divin et la discipline des sacrements. Les ditions typiques
publies avant la cinquime instruction(2001) taient diffuses par
lImprimerie Polyglotte Vaticane ou par la Libreria Editrice
Vaticana ; lavenir, elles seront normalement imprimes par
lImprimerie vaticane et leur diffusion sera rser-ve de droit la
Libreria Editrice Vaticana (Liturgiam authenticam, 2001, art.
109).
7. Voir plus haut lopinion contraire exprime par ses
prdcesseurs.8. Ses prdcesseurs, Pie X et Pie XI, ne staient pas
opposs la rvision de la version latine de la
Vulgate, mais sans aller jusqu recommander sa traduction en
dautres langues.9. Strictement parlant, on ne peut gure parler de
textes originaux dans le cas des textes bibliques,
car seules des copies des textes primitifs sont parvenues jusqu
nous. Les textes les plus traduits aumonde demeurent toujours sans
originaux.
10. Lauteur de cette encyclique est conscient que lopration de
traduction exige du traducteur quilconnaisse le caractre
particulier de lcrivain sacr et ses conditions de vie, lpoque
laquelle il avcu, les sources crites ou orales quil a employes [et]
sa manire dcrire (art. 34), afin de mieuxconnatre le sens rel de ce
que lhagiographe a voulu exprimer. Cest l un point de vue trs
moderne.Les thoriciens actuels prnent aussi la connaissance des
complments cognitifs : auteurs, style, con-texte social,
influences, etc.
11. On peut considrer que la traduction de lAncien Testament en
grec, la Septante, ralise au iiie
sicle av. J.-C., est, dun point de vue historique, la premire
forme dinculturation subie par lestextes bibliques.
12. Cette commission est prside par lvque de Fulda (Allemagne),
Edward Schick.13. La preuve en est que cette editio typica connatra
pas moins de quatre rditions et rvisions entre
1984 et 1992. Comme quoi il ny a jamais de traduction dfinitive.
Compagnons dinfortune deSisyphe, les traducteurs sont condamns
rviser sans fin leurs propres traductions et refaire cellesde leurs
prdcesseurs.
14. ou, au Qubec, en joual , comme il sen est publi dans les
annes 1990. Voir ce propos Lvangile selon Ti-Marc ! (Anonyme 1991),
Le mpris du peuple (Gagnon 1991) et La Bibletraduite ou
labrutissement la qubcoise (Martin 1991).
15. Peu de femmes ont traduit la Bible. Au xixe sicle,
lAmricaine Julia E. Smith (1792-1886) est, notre connaissance,
lunique femme lavoir fait, seule, partir du grec et de lhbreu. Sa
traductiontrs littrale, Holy Bible Containing the Old and New
Testaments ; Translated Literally from the Origi-nal Tongues, fut
publie en 1876. Sa compatriote Elizabeth Cady Stanton (1815-1902),
fougueuseactiviste, publia en 1895, sous le titre The Womans Bible,
une relecture fministe des passages de laBible faisant rfrence aux
femmes. Voir Von Flotow 2002.
16. Samuel Butler (1835-1902) avait exprim une opinion
similaire, lui qui fait dire lun de ses per-sonnages : Je traduirai
tout avec cette libert sans laquelle aucune traduction ne slve
au-dessusdu mot mot (Butler 1924 : 56. Traduction : Valery
Larbaud).
17. Cela sest produit rcemment. La version anglaise ralise
grands frais pour le compte dvques deonze pays anglophones dans les
annes 1980 et soumise pour approbation en 1996, fut rejete par
leVatican qui a estim que cette traduction ne transmettait pas
fidlement certains points importantsde la doctrine catholique. Roma
locuta, causa finita (Lavis de Rome prvaut toujours).
18. Cosigne par le cardinal Jorge A. Medina Estvez, prfet de la
Congrgation pour le culte divin et ladiscipline des sacrements, et
par larchevque secrtaire, Francesco Pio Tamburrino.
19. lment de clbration qui est propre un saint, un temps, un
lieu, et ne fait partie ni de lordi-naire ni du commun (Le Petit
Robert, 2000).
20. Dans notre manuel dinitiation la traduction, La Traduction
raisonne (Delisle 2003 : 165-172),nous utilisons ce terme pour
dcrire le premier des trois niveaux dinterprtation de
loprationtraduisante, les deux autres tant la remmoration et la
cration discursive . Le report estl opration du processus de la
traduction par laquelle certains lments dinformation du texte
dedpart qui ne ncessitent pas une analyse interprtative sont
transcods tels quels ou non dans letexte darrive (Delisle, Cormier,
Lee-Jahnke 1999 : 68).
21. Lauteur du Gnie du christianisme ne cache pas sa prdilection
pour le littralisme dans son Essaisur la littrature angloise : La
traduction littrale me parat toujours la meilleure : une
traductioninterlinaire serait la perfection du genre, si on lui
pouvait ter ce quelle a de sauvage (Chateau-briand 1837 : 4), et
dans ses Remarques qui prcdent sa traduction du Paradis perdu de
Milton :
les nouvelles rgles de traduction du vatican 847
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24847
-
848 Meta, L, 3, 2005
Cest une traduction littrale dans toute la force du terme que
jai entreprise, une traduction quunenfant et un pote pourront
suivre sur le texte, ligne ligne, mot mot, comme un
dictionnaireouvert sous leurs yeux (Chateaubriand 1871 : ix) ; Jai
calqu le pome de Milton la vitre, peut-tre en rsultera-t-il cette
conviction que la version littrale est ce quil y a de mieux pour
faireconnatre un auteur tel que Milton (ibid. : xi).
22. I am somewhat of a literalist, because I am for truth and
accuracy (Newmark 1988 : ix). [] wedo translate words because there
is nothing else to translate ; there are only the words on the page
; thereis nothing else there (ibid. : 73).
23. Cest le cas notamment de lAssociation des Traducteurs
Littraires de France (ATLF) : Le traduc-teur sabstient de traduire
une uvre partir dune autre traduction en langue trangre, dite
tra-duction-relais, moins que lauteur ne ly autorise (art. 3).
24. Livre dans lequel se trouvent les textes de la Bible
(lectionnaire proprement dit) ou des Pres(lectionnaire patristique,
ou autrefois sermonnaire ou homliaire) qui doivent tre lus la messe
et loffice (Le Grand dictionnaire terminologique de lOffice qubcois
de la langue franaise ).
25. Bible des communauts juives dgypte, elle fut aussi la Bible
des pres de lglise et la seule Bibledes chrtiens pendant des sicles
(Cousin 1990 : 5).
26. Ces deux exemples sont emprunts Henri Meschonnic (2001 : 13
; 2004 : 157).
RFRENCES
Anonyme (1991) : Lvangile selon Ti-Marc ! , dans LActualit, 1er
juin, p. 11 (Reproduit sur le cdromDelisle et Lafond 2005).
Association des Traducteurs Littraires de France (ATLF) : Code
de dontologie du traducteurlittraire (, site consult le
15-11-2004).
Berman, A. (1995) : Pour une critique des traductions : John
Donne, Paris, Gallimard, coll. NRF .Berner, C. (1999) : Le penchant
traduire , dans F. Schleiermacher, Des diffrentes mthodes du
traduire, Paris, ditions du Seuil, coll. Points. Essais , no
402, p. 11-26.Boyer, F. (2001) : La Bible, trad. sous la dir. de
Frdric Boyer, Jean-Pierre Prvost et Marc Sevin, Paris,
Bayard / Montral, Mdiaspaul.Boyer, F. (2002) : La Bible, notre
exil, Paris, P.O.L.Butler, S. (1924) : Nouveaux voyages en Erewhon
accomplis, vingt ans aprs la dcouverte du pays, par le
premier explorateur et par son fils, trad. par Valery Larbaud,
4e d., Paris, ditions de la NouvelleRevue franaise.
Cary, E. (1963) : Les Grands traducteurs franais, Genve,
Librairie de lUniversit.Chateaubriand, Fr. R. de (1837) : Essai sur
la littrature angloise. Avertissement , dans uvres
compltes, Paris, Pourrat Frres, t. XXIII, p. 3-15 (Reproduit sur
le cdrom Delisle et Lafond 2005).Chateaubriand, Fr. R. de (1871) :
Remarques , dans Le Paradis perdu, Paris, Garnier Frres, xx-579
(Reproduit sur le cdrom Delisle et Lafond 2005).Chouraqui, A.
(1989) : La Bible, Bruxelles, Descle de Brouwer.Chouraqui, A.
(1990) : Lamour fort comme la mort, Paris, Robert Laffont, coll.
Vcu .Chouraqui, A. (2002) : Traduire la Bible et le Coran au xxe
sicle , dans Circuit, no 77, p. 6-9 (Reproduit
sur le cdrom Delisle et Lafond 2005).Claudel, P. (1966) :
Psaumes. Traductions 1918-1953, texte tabli et annot par Rene
Nantet et Jacques
Petit, Paris, Descle de Brouwer.Congrgation des rites (1964) :
Inter cumenici (, site consult le 28-12-2004) (Reproduit sur le
cdrom Delisle et Lafond2005).
Congrgation des rites (1967) : Tres abhinc annos (, site consult
le 28-12-2004) (Reproduit sur le cdrom Delisle et Lafond 2005).
Congrgation pour le culte divin (1970) : Liturgicae
instaurationes, (, site consult le 28-12-2004) (Reproduit sur le
cdrom Delisle et Lafond2005).
Congrgation pour le culte divin et la discipline des sacrements
(1994) : Varietates legitimae, (, site consult le 28-12-2004)
(Reproduit sur le cdromDelisle et Lafond 2005).
Congrgation pour le culte divin et la discipline des sacrements
(2001) : Liturgiam authenticam, (, site consult le 28-12-2004)
(Reproduit sur le cdrom Delisle et Lafond 2005)
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24848
-
Cousin, H. (dir.) (1990) : La Bible grecque. La Septante , dans
Service biblique vangile et vie, Cahiersvangile, Paris, ditions du
Cerf, supplment au no 74.
Delisle, J. (1990) : Le froment du sens, la paille des mots ,
dans tudes traductologiques en hommage Danica Seleskovitch, textes
runis par Marianne Lederer, Paris, Minard, coll. Lettres modernes
,p. 61-72.
Delisle, J. et J. Woodsworth (dir.) (1995) : Les Traducteurs
dans lhistoire, Ottawa, Les Presses delUniversit dOttawa / Paris,
Les ditions UNESCO, coll. Pdagogie de la traduction , no 2,
publisous les auspices de la Fdration internationale des
traducteurs.
Delisle, J., M. C. Cormier et H. Lee-Jahnke (dir.) (1999) :
Terminologie de la traduction / Translationterminology /
Terminologa de la traduccin / Terminologie der bersetzung,
Amsterdam, JohnBenjamins, coll. FIT Monograph / Collection FIT , no
1.
Delisle, J. (2001) : Compte rendu de Gloires. Traduction des
psaumes par H. Meschonnic, dans TTR,vol. 14, no 1, p. 235-245
(Reproduit sur le cdrom Delisle et Lafond 2005).
Delisle, J. (2003) : La Traduction raisonne, 2e d., Ottawa, Les
Presses de lUniversit dOttawa, coll. Pdagogie de la traduction
.
Delisle, J. et G. Lafond (2005) : Histoire de la traduction
(cdrom pour PC), Gatineau (Qubec),dition restreinte aux seules fins
denseignement par J. Delisle, professeur, cole de traduction
etdinterprtation, Universit dOttawa.
Denzinger, H. (2001) : Titre Symboles et dfinitions de la foi
catholique, dit par Peter Hnermann pourldition originale et par
Joseph Hoffmann pour ldition franaise, Paris, ditions du Cerf,
2001, li-1283 p. (, site consult le 28-12-2004)
rasme, D. (1967) : Lettre Christophe Fisher, Paris, vers mars
1505 , dans La correspondance drasme,traduite et annote sous la
dir. dAlos Gerlo et de Paul Foriers daprs lOpus epistolarum de P.
S.Allen, H. M. Allen et H. W. Garrod, Bruxelles, Presses acadmiques
europennes, 1967, t. 1, p. 385-386 (Reproduit sur le cdrom Delisle
et Lafond 2005).
Gagnon, L. (1991) : Le mpris du peuple , dans La Presse, 15
juin, p. B-3 (Reproduit sur le cdromDelisle et Lafond 2005).
Grgoire XVI (1844) : Inter praecipuas machinationes, lettre
encyclique contre les socits
bibliques(www.jesusmarie.com/denzinger.html, site consult le
28-12-2004).
Ivereigh, A. (2004) : The Battle over the Translations of the
Catholic Mass , dans Translating Today,no 1, p. 14-15.
Kelly, J. N. D. (1975) : Jerome : His Life, Writings, and
Controversies, Londres, Duckworth.Kelly, Louis G. (1976) : To
Pammachius : On the Best Method of Translating (St. Jerome Letter
57), traduite
et annote par L. G. Kelly, Universit dOttawa, cole de
traducteurs et dinterprtes, coll. WorkingPapers in Translatology ,
no 1, 26 p. (Reproduit sur le cdrom Delisle et Lafond 2005).
Martin, S. (1991) : La Bible traduite ou labrutissement la
qubcoise , dans Le Devoir, 19 juin,p. B-8 (Reproduit sur le cdrom
Delisle et Lafond 2005).
Medina Estvez, J. A. (2001) : Cardinal Estvez Response to
Criticism of Liturgiam Authenticam , dansNotitiae, vol. 37
(Reproduit sur le site ,consult le 6 janvier 2005).
Meschonnic, H. (2001) : Gloires. Traduction des psaumes, Paris,
Descle de Brouwer.Meschonnic, H. (2004) : Un coup de Bible dans la
philosophie, Paris, Bayard.Nabokov, V. (1955) : Problems of
Translation : Onegin in English , dans Partisan Review, vol. 22, no
4,
p. 496-512.Newmark, P. (1988) : A Textbook of Translation,
Londres / New York, Prentice Hall.Paul VI (1963) : Sacrosanctum
Concilium, Constitution sur la sainte liturgie (, site consult le
28-12-2004) (Reproduit sur le cdrom Delisle et Lafond 2005).
Pie VII (1816) : Lettre Magno et acerbo larchevque de Moghilev ,
3 septembre 1816 (, site consult le 28-12-2004).
Pie IX (1846) : Qui pluribus, lettre encyclique sur la foi et la
religion (membres.lycos.fr/lesbonstextes/pixquipluribus.htm, site
consult le 28-12-2004)
Pie XII (1943) : Divino Afflante Spiritu, lettre encyclique sur
les tudes bibliques (, site consult le 28-12-2004) (Reproduit sur
le cdrom Delisle et Lafond 2005)
Pym, A. (1997) : Pour une thique du traducteur, Ottawa, Les
Presses de lUniversit dOttawa, coll. Regardssur la traduction .
les nouvelles rgles de traduction du vatican 849
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24849
-
850 Meta, L, 3, 2005
Rabin, C. (1972) : Cultural Aspects of Bible Translations , dans
Babel, vol. XVIII, no 3, p. 11-20.(Reproduit sur le cdrom Delisle
et Lafond 2005)
Renken, A. (2002) : La Reprsentation de ltranger. Une rflexion
hermneutique sur la notion de traduc-tion, Lausanne, Universit de
Lausanne, Cahiers du Centre de Traduction Littraire, no 42.
Renouveau de la liturgie pastorale en France aprs 1950 (, site
consult le 28-12-2004)
Shorter, A. Inculturation of African Traditional Religious
Values in ChristianityHow Far ? (, site consult le 31-12-2004)
(Reproduit sur le cdrom Delisleet Lafond 2005)
Von Flotow, L. (2002) : Julia E. Smith, traductrice de la Bible,
la recherche de la vrit par lelittralisme , dans Jean Delisle
(dir.), Portraits de traductrices, Ottawa, Les Presses de
lUniversitdOttawa / Arras, Artois Presses Universit, p.
291-319.
01.Meta 50/3 13/08/05, 17:24850