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LES LIENS DE LA MÉMOIRE
Sociabilité et visibilité à travers un blog d’anciens habitants des cités de transit deNanterre
Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-sociologie-2017-1-page-23.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Les liens de la mémoire Sociabilité et visibilité à travers un blog d’anciens habitants des cités de transit de Nanterre
Memory links Sociabilities and mobilizations through a blog created by slum children in Nanterre (France)
par Margot Delon*
Enquêtes
* Doctorante en sociologie, Observatoire sociologique du changement (Sciences Po/CNRS, Paris) ; boursière Marie Curie, ITN INTEGRIM, Instituto de Geografia e de Ordonamento do Territorio (Universidade de Lisboa, Portugal)
OSC, Sciences Po, 98 rue de l’université, 75007 Paris, [email protected]
R É S U M É
À partir d’une enquête de terrain multi‑méthodes sur
un blog de souvenirs des bidonvilles et cités de tran‑
sit de Nanterre de l’après‑guerre en France, cet article
décrit les différentes dynamiques constitutives d’une
entreprise de mémoire en ligne et hors ligne. Support
de légitimation de trajectoires d’ascension sociale pour
ses initiateurs, ce dispositif numérique favorise la re‑
constitution d’un groupe plus large d’anciens habitants
des cités de transit nanterriennes. Alors qu’ils avaient
été dispersés lors de la résorption des cités de tran‑
sit, les anciens habitants qui s’impliquent dans le blog
accèdent à un espace collectif de remémoration qui
réactive les sociabilités. Cette structuration des liens
est également le produit de la façon dont le blog a été
administré. Les pratiques de gestion, d’animation et de
modération du site ont favorisé l’unification des récits
autour de l’hommage à un jeune habitant de la cité de
transit assassiné dans les années 1980, ainsi que la
construction d’un public prêt à se mobiliser pour dé‑
fendre cette cause auprès de la Ville de Nanterre. Cohé‑
sion et consensus ne doivent cependant pas être sures‑
timés : en fonction de leur trajectoire, ces enfants des
bidonvilles et cités de transit, tous immigrés et enfants
d’immigrés originaires d’Algérie et du Maroc, n’ont pas
la même capacité et le même intérêt à se mobiliser pour
rendre cette histoire plus légitime à l’échelle locale.
A B S T R A C T
Based on a multi‑methods investigation, this article fo‑cuses on a blog dedicated to the memories of slums and transit camps in Nanterre in post‑war France. The article deals with the various dynamics constitutive of memory crusades. While the digital device was initially built to support the legitimization of the upwardly mobile trajectories of its administrators, it also helped a larger group of inhabitants to reconstitute itself and overcome the physical dispersion brought on by rehousing proce‑dures. By engaging themselves in the blog, the former inhabitants access a space in which it is possible to remember and reconnect with each other. The man‑aging practices of the webmasters have also built and organized bloggers’ relationships: They contributed to the unification of narratives around a tribute to a young inhabitant murdered in the 1980s and to the mobiliza‑tion of a public ready to lobby the City Hall of Nanterre to gain recognition. However, internal group cohesion and consensus should not be overestimated. Accord‑ing to their trajectories, these slum children –migrants from Algeria and Morocco and their descendants– do not have the same capacities and interests to mobilize to make this past more legitimate at the local level.
MOTS‑CLÉS : mémoire, blog, liens sociaux, bidonvilles, immigration
KEYWORDS: Memory, blog, social ties, slums, immigration
« Ouvrez le grand livre de vos souvenirs ! » En avril 20121,
deux frères, Karim et Ali, créent un espace en ligne
consacré à la mémoire de la cité de transit dans laquelle ils
ont grandi, la cité du Viaduc2 à Nanterre (voir Encadré 1).
Tous deux ont eu l’idée de ce projet après l’anniversaire de
leur mère, au cours duquel ils disent s’être rendus compte que
leurs enfants « n’avaient peut‑être pas un dixième de l’histoire
de leurs grands‑pères et grands‑mères » (Karim). Ils pensent
initialement écrire un livre, avant de songer à la forme du blog
qui leur permettrait de disposer d’un « outil commun à tous » et
de « partager » leurs souvenirs avec d’autres anciens habitants
âgés, comme eux, de 40 ans à 60 ans.
Ce blog connaît dans les deux années qui suivent3 un succès
important. D’avril 2012 à décembre 2014, ce sont plus de
5 700 commentaires qui sont rédigés pour environ 200 articles4.
Avec l’aide d’un comité qui se constitue rapidement autour
d’eux (une dizaine de blogueurs), les deux frères organisent
1. Je tiens à remercier Yannick Savina pour son aide précieuse dans l’ex‑traction des données du blog. Je remercie également pour leurs relectures les évaluateurs de ce numéro ainsi que Lorraine Bozouls, Louise Caron, Clémentine Gaide, Gaspard Lion et Alice Olivier.
2. Le nom de la cité (et donc du site), ainsi que des enquêtés, a été changé.
une petite dizaine d’événements à Nanterre, réunissant jusqu’à
plusieurs centaines de personnes. Une mobilisation d’anciens
habitants se constitue également à partir du blog afin d’obtenir
de la municipalité qu’elle nomme un bâtiment ou une artère
en hommage à un jeune tué par un voisin de la cité en 1982,
Abdenbi Guemiah.
À plusieurs égards, ce dispositif numérique en ligne présente
des particularités intéressantes. Ni blog affinitaire, politique
ou de spécialistes, ni journal intime, « Cite‑du‑viaduc.com »
occupe déjà une place relativement à part dans la blogosphère
férentes formes d’énonciation, il comporte très peu de liens
externes vers le web et repose sur un ancrage hors ligne et
local. Tout en s’organisant de manière très classique selon la
loi de puissance (un très grand nombre d’articles et de com‑
mentaires est publié par un très petit nombre d’auteurs), il per‑
met la participation de profils d’usagers ordinairement très peu
3. Cette période correspond à celle pendant laquelle l’enquête a été menée (voir Encadré 2).
4. Annexe électronique, Graphiques 1 et 2 : https://sociologie.revues.org/2990.
5. Pour une revue des études sur Nanterre, voir par exemple l’annexe de la thèse de Victor Collet (2013, p. 877) « l’ascension de la nanterrologie ».
ENCADRÉ 1. LES BIDONVILLES ET CITÉS DE TRANSIT À NANTERRE, UN ENJEU DE MAÎTRISE DU TERRITOIRE ET DU PEUPLEMENT
Le cas de Nanterre occupe une place singulière parmi les municipalités qui ont dû faire face à l’arrivée des bidonvilles et de leurs habitants. Il s’agit en effet d’une ville très étudiée5 et très visible à l’échelle nationale, du fait des événements historiques qui s’y sont déroulés et de sa position importante dans la métropole parisienne. Gérée depuis 1935 par des maires communistes et de différents partis de gauche, la ville compte en 2015 plus de 90 000 habitants (80 000 personnes en 1962). Dès le début des années 1950, de nombreux bidonvilles, peuplés prin‑cipalement de travailleurs et de familles d’origine algérienne, marocaine et portugaise, se constituent sur le territoire de la ville, comme ailleurs en France (Gastaut, 2004 ; Sayad, 1995). À la fin des années 1960, les baraques sont détruites et les habitants relogés dans plusieurs cités de transit, construites dans l’urgence, comme dans celle du Viaduc, qui a accueilli de 1971 à 1985 près de 200 familles issues des bidonvilles de Nanterre. Gérées par des bailleurs spécialisés, ces cités étaient censées favoriser l’« assimilation » de leurs habitants par le logement (Cohen, 2013). Ces ensembles de bâtiments préfabriqués se dégradent cependant rapidement et perpétuent une forte ségrégation aux marges de la ville jusqu’au milieu des années 1980. Comme dans le cas des bidonvilles, les procédures de relogement sont ralenties par un conflit important entre la municipalité, la préfecture et différents bailleurs sociaux autour de la responsabilité de ces populations et de leur « juste » répartition entre plusieurs communes (Blanc‑Chaléard, 2012 ; De Barros, 2005). Par ailleurs, certains des habitants des cités de transit se politisent et militent pour obtenir un relogement. En 1982, un voisin de la cité du Viaduc tire sur Abdenbi Guemiah, un jeune habitant qui succombe quelques jours plus tard à ses blessures. L’événement, relayé par la presse nationale, entraîne une très forte mobilisation des habitants et accélère le processus de relogement, à Nanterre ou dans des logements sociaux d’autres villes de la région parisienne.
Cette enquête s’inscrit dans le cadre d’une thèse portant sur les incidences biographiques de l’expérience des bidonvilles et cités de transit de Nanterre et Champigny‑sur‑Marne (Delon, 2017). Plusieurs méthodes ont été mises en œuvre dans la collecte de matériaux pour cet article : des observations des commémorations et de leurs coulisses ; un travail d’aspiration et d’analyse du texte de tous les articles (n = 206) et commen‑taires (n = 5 750) publiés de 2012 à 2014 sur le blog ; des entretiens avec les administrateurs et les blogueurs (n = 10).En parallèle de mon terrain « hors ligne » (Pastinelli, 2011), je me suis rendue pendant cette période plusieurs fois par semaine sur le site pour prendre connaissance des nouveaux articles et commentaires, et j’ai consigné de façon régulière des remarques sur l’évolution du design et sur les interactions en ligne. J’ai également appliqué plusieurs analyses de statistique textuelle à un corpus constitué par les articles et les commen‑taires, à l’aide des logiciels R.TeMiS et Iramuteq : une analyse de classification descendante hiérarchique, des statistiques descriptives et des calculs de spécificités*. Grâce à ces données, j’ai pu cerner les contours des différents usages du blog et des formes prises par la mémoire de ce passé des bidonvilles et des cités de transit. La CDH a notamment permis d’identifier quatre grands registres de narration et d’interaction en ligne7 : Le récit distancié du passé (Classe 4, 27,8 % des segments), L’hommage municipal (Classe 3, 15,8 %), Les retrouvailles des anciens
habitants (Classe 2, 26,1 %) et Le récit collectif du quotidien (Classe 1, 30,3 %). Des analyses de statistiques descriptives et des calculs de spécificité ont ensuite servi à identifier les dynamiques d’évolution temporelle de ces usages ainsi que les lignes de fracture qui les séparent. En étudiant les écarts entre les registres, j’ai pu saisir des différences de contexte temporel (les premiers mois suivant la création du blog, la mobilisation, la période postérieure au vote du conseil municipal sur le baptême des rues), de contexte de rédaction (article ou commentaire) et de profil des blogueurs (sexe, trajectoire socio‑résidentielle et intensité de la participation). Cette phase d’observation et d’analyse des articles et commentaires a été déterminante dans la construction de l’argumentaire de cet article. Elle m’a également permis de repérer et de contacter différents profils de participants. J’ai conduit avec eux des entretiens très peu directifs, abordant à la fois leur parcours, leur rapport à la mémoire et leur implication dans le blog8. Six hommes et quatre femmes ont été rencontrés, tous nés entre 1958 et 1968. Majoritairement originaire d’Algérie, le groupe de ces enquêtés est constitué à la fois d’immigrés et d’enfants d’immigrés (pour plus de la moitié d’entre eux, ils sont nés en France). La plupart de leurs pères étaient ouvriers, aucune mère n’a travaillé. Les fratries sont de taille relativement grande (rarement moins de cinq enfants). Si les deux créateurs du blog ont connu une très forte ascension sociale (après des études dans le supérieur, ils ont atteint des positions d’encadrement dans le privé et le public), les autres blogueurs occupent une diversité de professions : agent de nettoyage, assistante maternelle, conducteur de travaux, secrétaire, agent administratif à la retraite, travailleur social, chauffeur‑livreur… Plusieurs d’entre eux, notamment ceux qui s’impliquent le plus dans la mobilisation, ont des capitaux militants importants, acquis au cours d’expériences syndicales, associatives et politiques. Enfin, ces enquêtés ont tous passé entre quinze et vingt‑cinq années dans les bidonvilles et cités de transit de Nanterre, et notamment à la Cité du Viaduc. Aujourd’hui, ils sont locataires dans des ensembles HLM de différentes communes de la banlieue ouest de Paris et trois d’entre eux sont restés à Nanterre9.Se concentrer sur un seul blog restreint sans doute la portée « représentative » de l’enquête, mais ce choix densifie considérablement l’analyse (Small, 2009). Il préserve l’unité de contexte d’énonciation, tout en étant attentif aux liens potentiels avec d’autres espaces numériques ainsi qu’aux pratiques hors ligne. En combinant plusieurs méthodes d’enquête et d’analyse et en adoptant une approche localisée des faits sociaux (Briquet & Sawicki, 1989 ; Laferté, 2014), l’étude d’un espace numérique en particulier permet de tenir compte de la pluralité des usages du dispositif ainsi que de ses dynamiques d’insertion dans des configurations socio‑politiques particulières.
* Ces analyses et leurs résultats sont présentés de façon détaillée en annexe électronique (https://sociologie.revues.org/2990).
48 ans, a pour sa part créé sa propre entreprise de conseil. Tous
deux ont obtenu un baccalauréat général et ont poursuivi leurs
études supérieures jusqu’au niveau de la maîtrise. Ils résident
aujourd’hui dans les Hauts‑de‑Seine, l’un comme locataire en
8. À l’exception d’Ali, l’un des deux frères, rencontré une première fois en 2013, les entretiens avec les blogueurs ont tous été réalisés en 2015‑2016, soit après le pic d’activité le plus important du blog.
voie d’accession à la propriété, l’autre comme propriétaire,
non loin de leur famille et de l’ancien emplacement du bidon‑
ville et de la cité dans lesquels ils ont passé leurs enfance
et adolescence.
9. Ces caractéristiques sont globalement similaires à mes autres interviewés de Nanterre (n = 20), si ce n’est que ces derniers sont un peu plus âgés et qu’ils ont connu des trajectoires résidentielles plus diversifiées.
enfants des cités de transit, et que c’était une volonté municipale,
puisque j’avais retrouvé un ancien numéro de Nanterre‑Info où Yves
Saudmont, qui était maire à cette époque, où il parlait de quota, que
ce soit dans les HLM, dans les écoles, etc. (Karim).
Le design même de « Cite‑du‑viaduc.com » reflète cette forte
exigence de sérieux. La palette de couleurs employée est ini‑
tialement sobre (du bleu et du blanc), et le design s’affine
dans les premiers mois d’existence du blog avec la création
de rubriques, d’un logo ou encore d’un fond de page spécia‑
lement dessinée autour de l’hommage à Abdenbi Guemiah
(une rue avec une plaque à son nom). Ali soigne particuliè‑
rement l’image d’indépendance et d’objectivité de l’entreprise,
en finançant lui‑même l’hébergement du site par une plate‑
forme de blogs, pour éviter tout soupçon de « récupération
politique ». Il rachète d’ailleurs le nom de domaine afin de faire
disparaître la mention de « blog » dans l’adresse. L’affirmation
d’une expertise passe enfin par un travail d’institutionnalisation
du blog. À partir de mi‑juillet 2012, « la Rédaction » s’adresse
directement aux lecteurs pour promouvoir un certain modèle
de participation. Des élections du « meilleur blogueur » récom‑
pensant l’« assiduité et la contribution » sont organisées trois
mois de suite, un « questionnaire de satisfaction » est passé,
plusieurs articles incitent à davantage d’implication des blo‑
gueurs et une « charte de bonne conduite » est rédigée. Ces
pratiques incitent à considérer de plus près les contraintes qui
pèsent sur cet espace, du point de vue de Karim et d’Ali qui
ont besoin de recruter un public correspondant à leur quête de
reconnaissance, et du point de vue des blogueurs qui investis‑
sement progressivement cet espace.
R e c r u t e r u n p u b l i c « s é r i e u x »
Dès les premiers mois d’existence du blog, Karim et Ali sont
confrontés à la nécessité de recruter une audience afin de
donner une assise à leur entreprise. Dans un contexte où la
ressource rare est l’attention des destinataires (Beaudouin,
2009), ils ont cherché à construire un espace en ligne qui
puisse être suffisamment attractif pour que d’autres inter‑
nautes s’y investissent de façon durable. Cela s’est traduit par
un important travail d’animation nécessaire à la fidélisation
11. Il faut préciser que, contrairement à un modèle d’intercitation où les auteurs forment des « nébuleuses » de contacts possibles à travers des blo‑grolls étendues (Cardon & Delaunay‑Teterel, 2006, p. 35), l’ouverture sur l’extérieur du blog est très limitée.
de l’audience (avec par exemple une actualisation pluri‑
hebdomadaire du blog durant la plus grande partie de la
période étudiée) mais aussi par un effort soutenu de recru‑
tement, par le bouche‑à‑oreille, fondé sur les liens préexis‑
tants à l’entreprise (familiaux, de voisinage ou d’amitié sur
des réseaux sociaux) et par la sollicitation des habitants des
bidonvilles et cités qui se sont manifestés sur d’autres sites11.
Les premiers articles et commentaires sont ainsi porteurs de
nombreuses injonctions à participer : les lecteurs sont appelés
de manière répétée à « raviver la mémoire de la cité » (article,
juin 2012), à travers le don de photographies et surtout à tra‑
vers le récit écrit du passé.
Très inclusive, cette démarche repose sur de fortes attentes
envers les internautes qui consulteraient le blog. Dans l’esprit
de Karim et d’Ali, les participants qui sont uniformément qua‑
lifiés de « blogueurs » doivent contribuer significativement,
de manière qualitative et quantitative, à l’émergence d’un
récit collectif destiné à une plus large audience. De ce point
de vue, l’entreprise rencontre un succès qui restera toujours
mitigé aux yeux des administrateurs. Ils sont surpris et se
réjouissent de la massification rapide de la participation (dès
le mois de juillet 2012, 433 commentaires sont publiés12),
mais ils regrettent sa forme restreinte et le fait que, malgré
leurs encouragements, très peu d’auteurs de commentaires
rédigent des articles13.
Le maintien d’une distinction forte entre auteurs d’articles et de
commentaires, entre Karim, Ali et les autres, n’est pas anodin.
Il fait intervenir plusieurs types de « rapports sociaux de pro‑
duction et de reproduction » d’histoires sur le passé et de récit
de soi en ligne. Comme l’a montré Baptiste Brossard (2013,
p. 193) en se référant aux travaux de Claude Poliak sur les
manières profane de se raconter, la « perception de sa propre
légitimité à écrire “quelque chose d’intéressant” » n’est pas
uniformément répartie dans la population. Karim et Ali inter‑
disent en outre l’anonymat dans les commentaires, ce qui a pu
accroître les réticences à parler de soi en ligne. L’investissement
dans le blog et plus largement dans l’entreprise mémorielle dont
il est le support dépend ainsi de trajectoires et de compétences
particulières14. La majeure partie des articles, d’un niveau de
langage élevé, sans fautes d’orthographe ou presque15, est
rédigée par des auteurs masculins, diplômés du supérieur, qui
occupent des positions d’encadrement. Dans l’espace même
des commentaires, leurs textes sont sensiblement plus fournis
et ils intègrent davantage de mots longs et très longs16.
Si Karim et Ali deviennent de la sorte des « porte‑paroles »
des anciens habitants des bidonvilles et cités de transit de
Nanterre17, ce n’est cependant pas seulement du fait de leurs
études supérieures. À l’instar des membres du comité qui se
constitue autour d’eux pour négocier avec la municipalité, ils
ont connu des expériences associatives, professionnelles ou
politiques au cours desquelles ils ont acquis des dispositions
susceptibles d’être « réactualisées » dans l’action militante
(Lahire, 1998). Ali, qui a créé sa propre entreprise, adopte par
exemple une posture de chef de projet : il s’agit d’établir un
« plan de route », de mettre en place un « comité de travail »,
de ne pas laisser d’autres personnes « prendre le lead » ou
encore de bien évaluer « l’envergure des travaux ». Il prend
cependant assez peu la parole publiquement et s’investit moins
dans le récit généralisant du passé que Karim, son frère. Cadre
supérieur, ancien soutien d’un candidat d’opposition aux élec‑
tions municipales, ce dernier fait montre de véritables capa‑
cités d’écriture et d’animation, s’exprimant sans embarras au
micro et rédigeant rapidement articles sur le blog et discours
pour les cérémonies.
La plupart des anciens habitants des bidonvilles et cités de
transit ne disposent pas d’autant de dispositions favorables à un
tel investissement. Confrontés à ce public, Karim et Ali tentent
donc de le transformer, tout en reconsidérant leurs aspirations
initiales. Ils instaurent dès le mois de juillet une « charte de
bonne conduite » : « 1/ Un principe fondamental : pensez à
ceux qui vous lisent ; 2/ Évitez les commentaires anonymes ;
3/ Privilégiez la bonne humeur et la pertinence des commen‑
taires ! ; 4/ Ne postez pas un commentaire sans aucun rapport
14. Un certain nombre de personnes a ainsi participé au blog tout en ayant très peu de ressources culturelles et informatiques (Rabia n’a par exemple pas d’adresse électronique). De ce fait, l’espace des commentaires se trans‑forme souvent en espace de formation et de résolution des problèmes tech‑niques par les modérateurs.
17. Sur les mobilisations des descendants d’immigrés en quartier popu‑laire, voir les travaux d’Abdellali Hajjat (2013) et de Samir Hadj Belgacem (2016).
sociabilités de se structurer : les commentateurs se répondent,
parfois d’une page à l’autre, s’excusent quand ils s’absentent
pour une période prolongée. Ainsi, l’espace des commentaires
fortement investi vient participer à l’entrelacement d’autres
formes de communication qui se déploient dans le voisinage21
ou dans les réunions familiales, au téléphone, sur les réseaux
sociaux ou plus rarement par courrier électronique (Cardon
et al., 2005).
Peu de blogueurs semblent cependant avoir pris l’habitude
de se revoir en dehors des cérémonies et réunions organisées
autour du blog, hormis ceux qui entretenaient déjà des rela‑
tions. Il faut également préciser que si les espaces numériques
contribuent parfois à la déségrégation des sociabilités résiden‑
tielles, en faisant se rencontrer des personnes issues d’univers
hétérogènes (Oppenchaim, 2011), le blog peine à recruter
au‑delà des frontières de l’expérience partagée et parfois même
de la Cité du Viaduc.
En fin de compte, c’est un petit noyau de commentateurs qui
s’investit dans la vie du blog. Alors que l’aspiration des don‑
nées fait apparaître plus de 500 auteurs différents, le recodage
et l’analyse montrent que les commentateurs uniques repré‑
sentent une très faible part des commentaires (moins de 4 %),
et que 65 % des commentaires ont été rédigés par quinze
auteurs seulement22. À la différence du groupe des auteurs
d’articles, les femmes sont bien plus présentes (6 sur 15) et les
profils socio‑économiques plus diversifiés.
Pour ces participants, le blog se charge de significations
davantage liées à la force protectrice d’un groupe construit
sur le modèle familial, qui permet de se protéger d’un monde
extérieur hostile. Cette densité des liens (affirmer la cohésion
du groupe, le défendre lorsqu’il est attaqué) crée des condi‑
tions particulièrement favorables à la réussite de l’entreprise
de mémoire. Elle encourage d’autres habitants à s’exprimer
et à se lancer, eux aussi, dans le récit des bidonvilles et cités
de transit.
21. À l’échelle locale, ces sociabilités se sont développées autour d’espaces publics tels que les grands marchés alimentaires – pour lesquels des habi‑tants des villes voisines se déplacent souvent de façon hebdomadaire – ou encore les cafés. Pour une analyse du rapport entre trajectoires résidentielles des enfants des bidonvilles, mémoire et espace des sociabilités, voir Delon (2016, 2017).
L e s f i l s d e c o m m e n t a i r e s c o m m e e s p a c e d e d i c i b i l i t é
Ça nous permet aussi de nous retrouver quelque part, tout en restant
chacun dans son intimité si tu veux, t’es… t’es pas… Derrière un
écran, c’est sûr que c’est plus facile de… Quand t’es insomniaque,
par exemple à deux heures du matin, tu te lâches plus facilement
que si t’es devant un parterre d’anciens camarades (Samir).
Ainsi que le montre cet extrait d’entretien, les espaces
numériques peuvent favoriser l’émergence de récits de soi.
Si la littérature a mis en avant le rôle de l’anonymat dans
le fait de se livrer à une introspection en ligne (Cardon
& Delaunay‑Teterel, 2006), je voudrais ici défendre une
perspective différente : c’est parce que les auteurs de com‑
mentaires se sont trouvés dans un milieu rassurant qu’ils ont
autant investi cet espace et que certaines barrières « struc‑
turelles » (Lepoutre, 2005) à la participation des moins
diplômés d’entre eux ont pu être levées.
Ce milieu n’a pas émergé spontanément. Il est l’œuvre d’un
petit nombre de commentateurs et surtout de commentatrices
qui, comme on l’a vu, reconstruisent petit à petit un réseau
d’échange dense et familier et qui ouvrent la voie au récit
collectif du passé dans l’espace des commentaires. Dans la
classe Le récit collectif du quotidien23, on retrouve ainsi très
peu les deux administrateurs, Karim et Ali (ou leur avatar
« La Rédaction »), qui figurent dans les antiprofils. Ce sont
(à l’exception de Fred) des auteures féminines qui sont sur‑
représentées. Les textes de Latifa, par exemple, se concentrent
sur les souvenirs du quotidien, de la famille et sur la descrip‑
tion des conditions de vie matérielle, autant d’aspects repré‑
sentatifs du rapport au passé souvent dévolu aux femmes. À
l’instar des configurations familiales décrites par Sybille Gollac
et Solène Billaud (Billaud et al., 2015), l’espace numérique
du blog a aussi été construit de manière moins ostensible par
des femmes qui ont pris en charge certains aspects de la vie
collective du groupe, et notamment la création de références
L e b l o g c o n t r e l a m a i r i e d e N a n t e r r e
Pour beaucoup d’anciens habitants des bidonvilles et cités de
transit, le rapport à Nanterre est ambivalent. L’affirmation d’un
fort enracinement local – y compris pour ceux qui sont partis
(« je suis ni Algérien, ni Français, moi. Je suis Nanterrien » dit
par exemple Hakim) – n’empêche pas la tenue d’un discours
très critique envers la façon dont la municipalité a géré cette
histoire (Masclet, 2006). Les souvenirs des injustices subies
sont nombreux : stigmatisation par certains élus, concentra‑
tion dans des écoles ségrégées, absence d’entretien par la
Ville de l’environnement des cités de transit ou encore refus
d’accès à certains équipements municipaux.
Ces tensions au long cours ont animé plusieurs mobilisations
antérieures centrées sur la reconnaissance de la guerre d’Algé‑
rie et plus spécifiquement du 17 octobre 1961 (Collet, 2012),
sans que ce passif entre la municipalité et les habitants des
bidonvilles et cités qu’elle a refusé de reloger soit explicité. La
commémoration du trentième anniversaire de la disparition
d’Abdenbi Guemiah a ainsi pu être vécue par l’ensemble des
habitants – et non plus seulement ceux qui connaissent une
ascension sociale – comme un moyen d’obtenir la reconnais‑
sance des discriminations passées et l’intégration dans l’his‑
toire officielle locale.
L’ancrage de l’entreprise, et par là du dispositif numérique qui
la supporte, est donc résolument local. C’est par rapport à la
municipalité et à un ensemble de concurrents municipaux que
le comité de blogueurs mené par Karim et Ali se positionne. Peu
insérés dans les réseaux clientélaires traditionnels de l’équipe
municipale en place, héritière de la gestion communiste, ils
sont soupçonnés de faire le jeu des candidats de droite, d’au‑
tant que les élections municipales sont alors toutes proches25.
Conscients de ces rapports de concurrence politique et mémo‑
rielle, Karim et Ali ont, en tant qu’administrateurs, verrouillé
l’espace du blog. Certains noms, remarque un commentateur,
dans un échange aujourd’hui supprimé, sont « rayés de l’his‑
toire » portée par le blog alors qu’ils ont joué un rôle important
dans la mobilisation autour du relogement des habitants de la
25. On peut faire l’hypothèse que c’est cette posture d’« outsiders » qui favorise le recours à Internet faute d’autres moyens de se rendre visibles (Bué, 2011).
cité. Lorsque nous abordons la question de ses pratiques de
modération, Ali m’explique ne pas valider un certain nombre de
messages injurieux de personnes « jalouses ». Il a en outre fait
en sorte que le blog soit très protégé : le « clic droit » est interdit
et un copyright avec l’adresse du site est superposé au centre
de nombreuses photographies.
Lors du premier hommage à Abdenbi Guemiah commémorant
les trente ans de sa disparition, ces rapports concurrentiels
sont à leur comble : deux demi‑journées sont organisées, l’une
par le blog, l’autre par des acteurs mémoriels avec qui la muni‑
cipalité a l’habitude de travailler (l’un d’entre eux est d’ailleurs
conseiller municipal). Face au succès rencontré par le premier
hommage, le deuxième groupe s’efface néanmoins, laissant
dans les mois qui suivent le comité de blogueurs seul face à
la municipalité pour revendiquer le fait que le nom d’Abdenbi
Guemiah soit donné à une artère ou à un bâtiment de la ville.
Pendant près de six mois, le dispositif technique devient le sup‑
port d’une intense campagne de pression sur la municipalité. À
l’hiver 2012‑2013, le design du site est modifié, avec un comp‑
teur intégré sur la page d’accueil mentionnant le « nombre de
jours en attente d’un rendez‑vous avec M. Patrick JARRY, Maire
de Nanterre ». Dans les commentaires, les adresses directes
au Maire sont nombreuses : « Je vous en prie Monsieur le
maire, réfléchissez ! » (Fatima, février 2013). C’est néanmoins
dans l’espace des articles que s’incarne le plus explicitement
la mobilisation, en particulier dans les segments que regroupe
la classe L’hommage municipal 26. La mention d’Abdenbi
Guemiah est étroitement liée à cette entreprise politique locale,
en témoignent les termes « Nanterre », « maire », « munici‑
pal », « élu », « boulevard », « ville », « hommage », « cérémo‑
nie », « inscrire », « Jarry », « conseil » ou encore « initiative ».
On peut également noter qu’alors que le terme de « mémoire »
est peu présent ailleurs, il fait partie des termes qui contribuent
le plus à définir cette classe27. La mobilisation apparaît comme
essentiellement portée par « La Rédaction » qui s’attache à
promouvoir une image de neutralité politique et d’objectivité
derrière cette figure anonyme (on note aussi le sous‑emploi
des pronoms personnels, qui figurent dans les antiprofils de
la classe). « Dans un souci de transparence et de démocratie
26. Annexe électronique, Figure 1, Classe 3, 15,8 % des segments classés : https://sociologie.revues.org/2990.
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