LES OBSTACLES AU DEVELOPPEMENT DE LENTREPRENEURIAT FEMININ AU
MAROC
LES OBSTACLES AU DEVELOPPEMENT DE LENTREPRENEURIAT FEMININ AU
MAROCTHE BARRIERS TO MOROCCAN FEMALE ENTREPRENEURSHIP
Hind BOUZEKRAOUI Driss FERHANE Doctorante en sciences de gestion
Professeur HabilitEcole Nationale de Commerce et de Gestion de
Tanger Ecole Nationale de Commerce et de Gestion de Tanger
Universit Abdelmalek Essadi Universit Abdelmalek Essadi
[email protected] [email protected]
RsumLentrepreneuriat fminin est aujourdhui reconnu comme lune des
principales sources de croissance, de cration demplois, dinnovation
et de richesses. Au cours des toutes dernires annes, on a assist un
accroissement considrable du nombre dentreprises cres par des
femmes dans le monde. Le Maroc quant lui, devance plusieurs pays
mergents et simpose comme pays dominant sur le plan Africain.
Cependant, le pourcentage dentrepreneurs fminins reste trs faible
au Maroc.Le prsent article est divis en deux parties. Dans la
premire partie nous prsentons une synthse des diffrents travaux de
recherche mens dans le domaine de lentrepreneuriat fminin. La
deuxime partie a pour objectif de prsenter dans un premier temps,
un tat des lieux de lentrepreneuriat fminin au Maroc, et de
dterminer par la suite les obstacles qui freinent le dveloppement
de la femme entrepreneure marocaine, notamment en matire daccs au
financement, daccs aux rseaux de soutien, conciliation vie
prive/vie professionnelle ou encore en raison de pratiques sociales
et culturelles discriminantes.
Mot cls : Entrepreneuriat fminin, femmes marocaines, femme
entrepreneur, genre, cration dentreprise.
AbstractIn many countries female entrepreneurship is now
considered key to successful economic and social development. In
the last years, the number of women owned businesses has
significantly increased. Morocco advances many emerging countries
especially in Africa. However, female entrepreneurship in Morocco
is still low. This article is divided into two parts. In the first
part, we present a synthesis of the researches conducted in the
area of the woman entrepreneurship. In the second part, we present
the state of women's entrepreneurship in Morocco, and the Barriers
to development of moroccan women entrepreneurs.
Keywords: Female entrepreneurship, Morrocan women, women
entrepreneur, gender, business creation.
Introduction
Lentrepreneuriat des femmes est aujourdhui reconnu comme lune
des sources de la croissance, de la cration demplois, dinnovation
et de richesses. Au cours des dernires annes, on assiste une
croissance du nombre des entreprises cres par les femmes dans le
monde. Plac en 13me position au niveau du dveloppement de
lentrepreneuriat fminin, le Maroc devance plusieurs pays mergents
et simpose comme pays dominant sur le plan Africain. Or, malgr ce
classement, le pourcentage dentrepreneurs fminins reste trs faible
au Maroc.Plus quavantageux, le tissu conomique marocain reprsente
un champ fertile au dveloppement de lesprit entrepreneurial fminin.
Plusieurs atouts viennent pour diligenter lintgration de la femme
dans le domaine des affaires. En effet, dornavant prsente dans
presque tous les secteurs dactivit au Maroc, la femme occupe de
plus en plus un rle intrinsque dans les domaines socio-conomiques
mais aussi et surtout politiques.De plus en plus conscientes de la
place quelles occupent dans la socit, les femmes marocaines sont
plus que jamais dcides faire valoir leur potentiel et participer
activement au dveloppement conomique, social, politique et
institutionnel du pays.Ainsi, les instances marocaines ont certes
mis en place plusieurs programmes pour valoriser la contribution de
la femme au dveloppement du tissu socio-conomique marocain,
cependant plusieurs aspects restent tchs dambigit savoir: Les
difficults rencontres aux diffrents stades de vie conomique, de
lintention dentreprendre au lancement, du dmarrage tout en passant
par la croissance la maturit ou dclin. Selon un rapport de
lAssociation des Femmes Entrepreneurs du Maroc (Afem, 2005), peu de
femmes, mme les diplmes, sont tentes par la cration dentreprises,
le taux de mortalit des jeunes firmes est trop lev: 3 entreprises
sur 5 meurent 3 ans aprs leur cration. En effet, les programmes
dappui et de soutient desservis se sont avrs pauvres et non
aboutis, et plusieurs autres difficults et obstacles sont rencontrs
par la femme dsirant se lancer en affaires ou ayant dj fait un
premier pas en entrepreneuriat.Le prsent article sinscrit dans le
cadre des travaux de recherches que nous menons actuellement sur
lentrepreneuriat fminin au Maroc. Larticle est divis en deux
parties, dans la premire partie nous prsentons une synthse des
travaux de recherche mens travers le monde dans le domaine de
lentrepreneuriat fminin. La deuxime partie a pour objectif de
prsenter dans un premier temps, un tat des lieux de
lentrepreneuriat fminin au Maroc, et de dterminer par la suite les
obstacles qui freinent le dveloppement lentrepreneuriat fminin au
Maroc, notamment en matire daccs au financement, daccs aux rseaux
de soutien, conciliation vie prive/vie professionnelle ou encore en
raison de pratiques sociales et culturelles discriminantes.
1) Lentrepreneuriat fminin: Revue de littrature Lentrepreneuriat
fminin connat un intrt particulier et un dveloppement rapide
travers le monde. Ainsi, les recherches menes dans ce domaine se
sont dveloppes dune manire importante ces dernires annes. Dans la
revue de littrature que ne prsentons ci-dessous, nous nous sommes
focalis sur trois sujets majeurs: les caractristiques
socio-conomiques, les motivations et les obstacles rencontrs.1.1)
Le profil socio-conomique des femmes entrepreneuresLe profil
socio-conomique des femmes entrepreneures est lun des aspects le
plus abord dans la littrature. Ne nous somme intresss lge, la
formation, linfluence familiale et lexprience.LgeLa plupart des
tudes menes sur lge des femmes entrepreneures confirment que les
femmes sont plus jeunes que les hommes au moment de se lancer dans
un projet entrepreneurial. Welsch et Young (Welsch, 1982), Birlyey
et Sandres (BIRLYEY, 1987) ont montr quaux tats unis les femmes
entrepreneures sont plus jeunes que les hommes entrepreneures et
indiquent que lge moyen pour les femmes se situe entre 25 et 40
ans, alors que pour les hommes, cest plus que 43 ans.Une autre tude
mene par Lacasse (Lacasse, 1990), montre que lge moyen des femmes
entrepreneures se situe entre 35 et 44 ans. Cest lge de maturit qui
suscite la dcision dentreprendre tant donn les capacits et les
expriences accumules par les femmes. Cest lge qui va leur permettre
de grer efficacement leurs affaires. Legar et St-Syr (Legar, 2002)
ont galement montr partir dune enqute mene en 2002 au canada, que
les femmes entrepreneures appartiennent une catgorie dge
relativement plus jeune que celle des hommes.Cependant, dautres
recherches effectues par Hisrish et Peters (Hisrish, 1991) viennent
contredire les tudes prcdentes. Elles indiquent que les hommes se
lancent dans une exprience entrepreneuriale partir de 30 ans et que
les femmes plutt autour de 35 ans. Dans ce sens, dautres recherches
indiquent aussi que les femmes sont plus ges que leurs homologues
masculins au dmarrage de leur projet (Watkins, 1984) (Burdette,
1990) et (Hernandez, 1997). Ce dernier aprs avoir men une enqute en
Afrique, a conclu que les femmes entrepreneures en Afrique sont
plus ges par rapport leurs correspondantes europennes et explique
que ce retard est du la valorisation tardive de lentrepreneuriat
fminin dans le continent africain.La formationLa formation des
femmes entrepreneures a fait lobjet de plusieurs recherches. Les
rsultats obtenus semblent contradictoires. Aux tats unis, WATKINS
(Watkins, 1984) a remarqu que les femmes entrepreneures ont un
niveau ducatif moins important que celui des hommes. Par contre,
Hisrish et Brush (Hisrish, 1987) ont constat travers une tude quils
ont mene que le niveau de formation des femmes entrepreneures est
comparable celui des hommes, mis part les domaines dtudes qui
diffrent (ingnierie, gestion, sciences humaines, etc).Une autre
enqute mene aux tats unis par Lee et Rogoff (Lee, 1996) sur 170
hommes et 61 femmes la tte de PME, a confirm lexistence de
diffrences en matire de formation en Gestion entre les deux genres.
Le niveau de formation joue un rle important dans lveil des
entrepreneurs mais il nest pas un lment dterminant. Le niveau de
formation, son contenu et sa qualit, facilite le comportement
entrepreneurial, surtout sil est en relation avec le domaine
dactivit. En Europe, selon une tude mene par Lavoie et Yudkin
(Lavoie, 1985), les femmes europennes ont un niveau dinstruction
plus lev que la moyenne de la population. Une autre tude mene par
Line Robert (Line, 2003) confirme que les femmes entrepreneures
franaises sont parfaitement instruites. Ainsi, parmi les femmes
interroges, 4 femmes entrepreneures sur 5 ont fait des tudes
suprieures. Cependant, dans tous les pays, il existe des diffrences
daccs linformation entre hommes et femmes. En effet, dans de
nombreux pays, les femmes nont mme pas accs lenseignement de base.
Ce problme se pose plus particulirement, dans les conomies
sous-dveloppes. Dans ces pays, lanalphabtisme est souvent
considrablement plus lev chez les femmes que chez les hommes
(Karim, 2000) (Mayoux, 2001) (Ocde, 2004). Cette situation a des
consquences importantes sur les possibilits quont les femmes de se
lancer dans lentrepreneuriat. Lanalphabtisme les exclut presque
totalement du chams de lentrepreneuriat et les oblige devoir
travailler dans le secteur informel. Cest malheureusement ce qui
arrive de nombreuses femmes entrepreneures dans les pays en
dveloppement, tant dAfrique que dAsie. En ralit, les femmes
analphabtes sont pousses vers ce secteur, car elles nont pas dautre
choix. Leurs seules expriences et connaissances sont celles qui
rsultent de leur rle traditionnel de femmes. Elles se trouvent en
dehors du march rglement et disposent dun faible statut social. De
ce fait, la probabilit de survie dune entreprise cre par cette
catgorie de femme est faible (Karim, 2000) (Ocde, 2004).Linfluence
familialeDe nombreux chercheurs ont admis quun pourcentage lev de
femmes entrepreneures ont un parent lui-mme entrepreneur (Cooper,
1982) (Hisrish , 1987). Une tude amricaine ralise auprs de 58
entrepreneures rvle que la femme entrepreneure est quatre fois plus
sujette une influence parentale (pre ou mre) que la population en
gnral (Smith, 1982).Dautres recherches menes par Hisrish et Peters
(Hisrish, 1991), ont montr que la profession des parents des
entrepreneurs marque fortement la personnalit de l'entrepreneur,
cela est galement vrai pour les femmes que pour les hommes. Les
entrepreneures s'habituent ds le plus jeune ge la nature
indpendante et la souplesse d'un statut dont le pre incarne
l'exemple. Hisrish et Peters indiquent galement que la prsence
d'une mre entrepreneure renforce plus le sentiment d'indpendance
chez sa fille et aura une influence sur son dsire lentreprendre par
la suite.Selon une autre enqute ralise par Watkins et Watkins
(Watkins, 1983) sur 58 femmes entrepreneures britanniques, 37%
avaient un pre entrepreneur, 16% avaient une mre propritaire en
tout ou partie d'une entreprise, 10% descendent dun pre dont
l'occupation avait un lien troit avec le monde de l'entreprise. En
droite ligne de ces observations, certains auteurs Dunn et
Holtz-Eakin (Dunn, 1995) ont analys lenqute longitudinale mene aux
tats-Unis sur lexprience relative au march du travail (Longitudinal
Survey of Labour Market Experience). Ils rvlent eux aussi que les
pres influencent les garons et les mres les filles (Ocde,2004).Un
autre aspect de l'influence familiale est le statut matrimonial. Le
statut matrimonial nest pas sans effet sur la prise de dcision
dentreprendre. Dans leur tude, Watkins et Watkins (Watkins, 1984)
dcouvrent que 48% des entrepreneuses sont maries, 29% sont divorces
et 19% sont clibataires. Le rle du mariage stabilisateur nest pas
vrifi pour la femme. Pour le mari, il peut constituer soit un
frein, soit un stimulateur pour la cration dentreprise. Dautres
recherches rcentes se sont intresses au rle que peut jouer le
conjoint dans lentrepreneuriat fminin. Ainsi Gundry et Welsch
(Gundry, 1994) comme Werbel et Danes (Werbel, 2010) rappellent que
le conjoint est une partie prenante indniable puisquil possde un
vritable droit de dcision sur lengagement du capital initial,
souvent issu des fonds de la famille. Daviddson et Honig (Davidson,
2003), dans une analyse qualitative sur lidentification des figures
de soutien social lentrepreneur naissant, mettent en vidence le rle
du conjoint comme facilitateur ou, au contraire, entrave la dcision
de crer une entreprise sans toutefois pouvoir prciser en quoi ce
conjoint peut ou non aider la dmarche entrepreneuriale (Nikina,
2012).Kirkwood (Kirkwood, 2009) relate que la femme consulte son
conjoint avant toute dcision de nature entrepreneuriale. Ce point
serait une spcificit fminine, qui, selon ce dernier auteur, aborde
son travail professionnel dans une perspective relationnelle.
Autrement dit, contrairement son homologue masculin, la femme
entrepreneur changerait avec les parties prenantes, en particulier
avec son conjoint, avant de prendre une dcision sur son activit
professionnelle.
LexpriencePlusieurs recherches ont mis l'vidence l'existence de
liens troits entre l'exprience professionnelle antrieure et le
recours lentrepreneuriat. Plusieurs femmes estiment que la russite
de leur projet entrepreneurial passe ncessairement par l'existence
pralable du salariat. Le salariat leur permettrait en effet
d'acqurir l'exprience technique et relationnelle et de pouvoir
pargner les fonds ncessaires la cration par la suite de leur
entreprise.Les recherches indiquent avec quasi-certitude que la
plupart des crateurs dentreprise optent pour un secteur dans lequel
ils ont dj travaill (Brderl, 1992) (Phillips, 2002) (Romanelli,
1989). Ainsi, une personne qui aura pass sa vie enseigner sera plus
susceptible de reprer une opportunit lie son exprience de
lenseignement plutt quune opportunit ayant trait laronautique ou
linformatique. Autrement dit, plus les femmes exerant une activit
seront nombreuses, plus grande sera la probabilit quelles crent
leur propre emploi. Le secteur dans lequel elles exercent est
galement capital. Cependant, les femmes sont, en gnral,
sous-reprsentes dans les filires scientifiques et techniques, et en
surnombre dans les filires littraires. Il est donc logique que les
entreprises reposant sur des innovations technologiques soient
moins souvent cres par des femmes (Ocde,2004). Correll (Corell,
2001) montre que les diffrences entre hommes et femmes en termes de
perception des comptences spcifiques (pour lentrepreneuriat ou les
mathmatiques par exemple) influencent les dcisions des jeunes
femmes en matire dtudes (et plus tard de carrire). Le processus de
choix de carrire sopre tout au long de la vie, car les individus
prennent une srie de dcisions qui ont des rpercussions sur leur
avenir professionnel. Ces diffrences entre hommes et femmes dans la
slection des activits qui dterminent les possibilits
professionnelles apparaissent souvent tt dans le choix des tudes.
Ainsi, les femmes sont moins nombreuses que les hommes sorienter
vers un diplme dingnierie ou de sciences physiques, ce qui entrave
de toute vidence leur capacit dcouvrir des opportunits dans les
domaines technologiques.Dans cette logique d'ides, plusieurs
recherches (Watkins, 1983) (Hisrich, 1984) ont montr que les femmes
ont souvent de lexprience dans les domaines lis aux services plutt
que dans les domaines industriels, techniques ou
entrepreneuriaux.Dautres chercheurs se sont intresss aux facteurs
qui peuvent avoir une incidence sur les opportunits
entrepreneuriales proposes aux femmes, par comparaison avec les
hommes. Van der Lippe et Van Dijk (Van, 2002) ont identifi trois
facteurs qui peuvent avoir une influence ngative sur les
opportunits prsentes aux femmes : le cadre politique et
institutionnel, la politique familiale et les moyens offerts par le
march.Le cadre politique et institutionnel, qui se traduit par une
exclusion de certains mtiers. En effet, les femmes nont pas la
possibilit daccder toutes les opportunits, car nombre de ces
dernires dpendent du mtier exerc. Lexclusion selon Cahill (Cahill,
2001), Davies (Davies, 1996) et Hitz (Hitz, 1990), qui peut tre de
fait ou de droit, empche certaines catgories de population daccder
certaines professions. LExclusion de droit a considrablement recul
et continue de rgresser dans la plupart des pays dvelopps.
Cependant, dans beaucoup de pays en dveloppement, dimportantes
interdictions juridiques psent toujours sur les femmes dsireuses
dexercer certaines professions et certains mtiers. Cest
actuellement le cas dans bien des pays dAfrique et dAsie.
Cependant, lexclusion de fait mme exerce un impact considrable sur
la capacit des femmes crer et diriger une entreprise. Lexclusion de
fait est responsable de lessentiel de lcart de salaire entre hommes
et femmes au niveau macro, mais lassociation contextuelle se
traduit par une baisse de la rmunration relative pour toutes les
femmes, et pas seulement pour celles qui exercent des professions
domines par les femmes (Ocde, 2004, p 35). Par ailleurs, quelque
que soit lorganisation considre, les femmes sont beaucoup moins
susceptibles dobtenir une promotion que leurs collgues masculins
(Smith, 2002). Dans le milieu universitaire, elles ont par exemple
moins accs des postes de direction ou dencadrement. Dans les tats
membres de lUE, les tudiantes sont lgrement plus nombreuses que les
tudiants (52 pour cent de filles en 1999), mais les femmes ne
reprsentent que 25 pour cent des enseignants du suprieur et moins
de 33 pour cent des chercheurs du secteur public. Les femmes auront
donc moins de possibilits dacqurir une exprience dans lencadrement
et de se constituer des rseaux professionnels de qualit. Elles
auront par consquent accs moins dinformations et de moyens que les
hommes. Or, ces deux lments constituent justement les facteurs qui
leur permettraient de reconnatre et dutiliser pleinement les
opportunits qui soffrent elles.
1.2) La motivation des Femmes Entrepreneures
La littrature dmontre que les femmes comme les hommes
entreprennent par besoin dindpendance et daccomplissement et par
refus de travailler pour une tierce personne. Cependant, nous
pouvons observer des diffrences entre hommes et femmes pour ce qui
est de la motivation dvelopper lentreprise. La principale
motivation des hommes vouloir entreprendre, est le dsir de dtenir
plus dargent et tre maitre de son propre destin. Pour les femmes,
cette raison nest pas primordiale (Zouiten, 2006). Cest plutt le
dsir dindpendance, lpanouissement personnel ou le souci de subvenir
aux besoins familiaux qui priment. Cest encore plus vrai chez les
mres clibataires, veuves ou divorces qui sont contraintes dagir
pour faire face leur situation.Dautres tudes (Cadieux, 2002)
(Holmquist, 1990) (Kaplan ,1988) confirment galement que les femmes
entrepreneures grant des petites entreprises privilgient souvent
les objectifs sociaux, alors que les hommes entrepreneurs ont
tendance accorder une importance aux objectifs conomiques (Kent,
1982). Pour certaines, femme entrepreneure, cela va plus loin :
devenir entrepreneure est une question didentit et destime de soi
(Edwards, 2005) (Moore, 1997). Dautres femmes dcident dentreprendre
afin de concilier vie familiale et vie professionnelle. Selon
Richer et St-Cyr (Richer, 2007), 25 % des entrepreneures qubcoises
mentionnent cette motivation comme tant lorigine de leur projet
entrepreneurial. Le contrle relatif quoffre lentrepreneuriat sur la
gestion du temps, sur le niveau des exigences professionnelles et
le rythme du travail vient fortement influencer le choix des femmes
lancer leur entreprise (Belcourt., 1991) (Edwards, 2005). En effet,
plusieurs tmoignages recenss dans la littrature dmontrent cette
volont des femmes de grer leur temps, notamment pour limiter les
conflits. Ceci signifie videmment avoir un certain contrle sur le
nombre dheures consacres au travail et sur les moments et le lieu o
le travail est ralis. Cela signifie aussi contrler lintensit du
travail raliser selon les cycles de la vie de la famille, et ce,
pour viter ou limiter les priodes de conflit ou lampleur des
conflits entre les exigences de la vie professionnelle et celles du
reste de la vie.Selon Barnard Duchneaut (Duchneaut, 1997), on peut
faire la diffrence entre des facteurs push qui poussent les femmes
vers le travail indpendant sans qu'il y ait relle volont mais plutt
ncessit, et des facteurs pull qui les attirent positivement et
dbouchent sur une vritable volont de cration.Les facteurs ngatifs
Push qui incitent les femmes crer leur propre entreprise
comprennent le besoin dargent, labsence de structure de prise en
charge des enfants en bas ge, des conditions de travail
inacceptables, la rigidit des horaires de travail, une diffrence de
rmunration importante entre hommes et femmes, une sgrgation dans
lattribution des postes, les frustrations d'un avancement bloqu, la
dsillusion quand aux relations traditionnelles des employs et des
employeurs. Dans certains pays, le haut niveau de chmage est un
facteur de pousse. Plusieurs auteurs dont Hisrich et Brush (Hisrich
, 1985) maintiennent cette thse et confirment que le chmage, un
revenu familial faible, linsatisfaction au travail, et le besoin
dune flexibilit encouragent la femme entreprendre.Les facteurs
positifs pull qui attirent les femmes vers la carrire
d'entrepreneures sont les opportunits et les possibilits prsentes
sur le march, lintrt pour un secteur particulier de lconomie, les
objectifs sociaux, le besoin davoir des horaires souples, une
rmunration suprieure et une indpendance financire, lvolution,
laccomplissement et lpanouissement personnel.
1.3) Problmes - obstacles rencontrs par les femmes en
affaires
Laccs au FinancementLaccs au financement reste sans doute le
plus grand obstacle pour les femmes entrepreneures. Selon des tudes
(Aldrich, 1989) (Hurley, 1991) (Scott, 1986) (Forget, 1997), les
divers aspects du financement qui sont dterminants pour les femmes
entrepreneures sont: limportance du capital lors du dmarrage et
pendant la croissance, la provenance des fonds et les attentes des
organismes emprunteurs, la rputation des femmes entrepreneures
comme emprunteuse, la qualit du risque de crdit quelles reprsentent
et les difficults particulires rencontres pour lobtention des fonds
requis. De manire gnrale, les investissements de dmarrage chez les
femmes restent plus faibles que celles des hommes mme si la
rputation des femmes entrepreneures est enviable, en particulier en
ce qui concerne le remboursement demprunts et de crdits.Forget
(Forget, 1997) a constat lors dune tude que les femmes
entrepreneures ont tendance emprunter des sommes moindres que les
hommes. Il explique que les femmes sont considres comme un trs bon
risque par les institutions bancaires en raison de leur manque
dexprience et de comptences.Richer et St-Cyr (Richer, 2007)
prcisent que si les femmes entrepreneures empruntent des sommes
moindres que leurs confrres masculins, cela peut sexpliquer par
diverses raisons: une plus faible tolrance au risque de la part de
lentrepreneure ou du prteur, une croissance de lentreprise moins
rapide, ncessitant donc des investissements moindres, une taille
plus petite que la moyenne des entreprises de leurs confrres
masculins, des besoins moindres cause de la disponibilit dautres
fonds ou des aptitudes de gestion diffrentes. Dautres recherches
prcisent que les femmes entrepreneures prfrent investir dans un
premier lieu leur propre argent dans leur propre projet. Si elles
peuvent, elles choisissent de ne mettre en jeu que largent qui leur
appartient, puis dcident demprunter, et enfin de recourir un
financement extrieur tel que le capital-risque ou le
capital-investissement. Cest ce que lon appelle lordre de priorit
financire (Myers, 1984) (Ocde, 2004).Cependant, trs peu de femmes
pensent ou utilisent le capital-risque, et lorsquelles lutilisent,
cest davantage dans le but de faire crotre leur entreprise que pour
son dmarrage (Lgar, 2000) (Richer,2007). La faible utilisation du
capital de risque par les femmes semble tre lie un manque de
connaissances et de comprhension du march du capital de risque
priv, une mauvaise comprhension des enjeux financiers lis aux
activits de lentreprise, ainsi qu un manque de rseaux et
dinterrelations pour aider les femmes entrepreneures accder aux
marchs financiers (Lee-Gosselin, 2010). Par ailleurs, les femmes
entrepreneures ne profitent pas galement du capital-investissement
(Angel Capital). Ce capital se rfre au capital dinvestissement
provenant dinvestisseurs providentiels qui sert de capital damorage
et de capital de cration aux nouvelles entreprises innovantes.
Contrairement au capital de risque, le capital providentiel fournit
des sommes de moindre importance (Beckert, 2007). Ce type de
capital est frquemment utilis aux tats-Unis et en Grande-Bretagne.
Une tude amricaine mene pendant 4 ans et comparant lattitude des
propritaires dentreprise selon le genre, dmontre que peu de femmes
profitent de ce type de financement. Les auteurs dmontrent que les
femmes sont peu intresses inviter des trangers investir dans leur
entreprise, en particulier si cet investisseur est un homme
(Beckert, 2007). Elles restent trs conservatrices en ce qui
concerne les sources de financement. Malgr le fait que les femmes
ont une bonne rputation de remboursement auprs des institutions
financires et malgr le fait quelles empruntent de plus petites
sommes que les hommes, il arrive souvent que les banques leur
demandent des garanties. Les garanties exiges pour obtenir un
financement extrieur peuvent se rvler inabordables pour la plupart
dentre elles. Il peut sagir de caution de la part dun parent ou du
conjoint, ainsi que de garanties personnelles sur des biens
immobiliers par exemple. Plusieurs chercheurs ont dmontr que ces
demandes de garanties sont un frein potentiel la cration et au
dveloppement des entreprises cres par les femmes (Belcourt, 1991)
(Forget, 1997)(Lgar, 2000). Il est aussi possible que les
institutions financires soient moins intresses faire de petits prts
que des gros prts cause du ratio plus dfavorable des cots danalyse
de dossier et de suivi par rapport la valeur du prt. Le micro-crdit
constitue une solution spcifique aux problmes des petits
financements. Il sagit dun mcanisme financier devenu trs populaire,
particulirement dans les pays en dveloppement. Le micro-crdit est n
de lide quil est possible dallger une grande partie de la pauvret
en apportant des services financiers aux mnages bas revenu. Les
tablissements de micro-crdit sengagent donc servir des clients qui
ont t exclus du secteur bancaire formel. La plupart des emprunteurs
y recourent pour financer des activits indpendantes, et beaucoup
commencent par souscrire des emprunts minimes, rembourss sur
plusieurs mois, voire sur une anne. Rares sont les tablissements
qui demandent une garantie. Ces tablissements sont parvenus
atteindre les individus pauvres, et particulirement les femmes,
difficiles toucher par dautres moyens. Selon (Morduch, 1999), le
micro-crdit semble donc constituer une solution gagnant-gagnant ,
pour les tablissements financiers et les clients pauvres.Cependant,
des recherches montrent que les espoirs considrables placs dans le
micro-crdit ne seront peut-tre pas concrtiss (Milgram, 2001)
(Morduch, 1999) (Ocde, 2004). En effet, le micro-crdit aide
lemprunteur financer la cration dun emploi, il cre rarement des
emplois pour dautres, et son succs est particulirement limit dans
les rgions faiblement peuples o les revenus prsentent une forte
saisonnalit. En somme, le micro-crdit aide les femmes chefs
dentreprise en leur apportant un financement, sans pour autant
rsoudre les problmes lis la situation sociale et les conditions sur
le march.
Le Rseautage
Les auteurs intresss par les rseaux daffaires utiliss par les
entrepreneures sentendent pour confirmer que les femmes ont
tendance se regrouper dans les rseaux fminins comme les hommes
(Lanbrecht, 2003). Cependant, un certain nombre de recherches
signalement que les femmes sengagent moins que les hommes dans les
rseaux. St-Syr (St-Cyr, 2001) signale que les femmes tentent sous
utiliser le rseautage en raison dun manque de temps ou dintrt. Bien
que les donnes naient pas t actualises, ce constat est susceptible
dtre toujours dactualit puisque les entrepreneures sont trs occupes
par lampleur de leurs charges de travail et de famille. Il leur
reste peu de temps consacrer pour saffilier aux rseaux
daffaires.Dautres recherches se sont intresses au rle du rseautage
dans lentrepreneuriat fminin. Selon Bulte (Bulte, 2003), Les
petites entreprises ne peuvent pas crotre delles-mmes parce que
leur croissance dpend de la qualit des renseignements fournis par
leurs partenaires et par les rseaux auxquels elles
appartiennent.Quant aux raisons qui pousseraient les femmes
entrepreneures tablir des rseaux, Baines et Wheelock (Baines,1998)
expliquent que les rseaux peuvent savrer utiles pour recruter de
bons employs, obtenir des conseils, saisir de nouvelles occasions
daffaires ou dnicher des partenaires commerciaux. Andersson et
Evensson (Anderson, 2000) ainsi que Doyle et Young (Doyle, 2001)
arrivent la conclusion que de bons rseaux personnels ont un impact
positif sur le plan de la cration dune entreprise.La littrature
numre deux types de rseaux: les rseaux formels et les rseaux
informels. Pour les rseaux formels, les recherches ralises dans le
pass portent sur la participation des femmes aux rseaux de type
chambres de commerce ou les associations professionnelles.
Plusieurs difficults ont t signales ce qui expliquerait un taux de
participation faible ces rseaux.Par contre, les rseaux informels de
divers types semblent avoir une influence positive sur les femmes
entrepreneurs. Il peut sagir de rencontres informelles, une
certaine frquence, de lentrepreneure avec diverses personnes
(amies, entrepreneures, des proches par des liens de famille ou des
connaissances) qui peuvent tre utiles lentreprise et/ou
lentrepreneure.Selon Mankelow (Mankelow, 2002), les rseaux
informels fournissent aux femmes un soutien moral constant et de
lencouragement lors des phases de dmarrage et de croissance de leur
entreprise, mais ils apportent galement de linformation ainsi que
diverses sources de financement.
La conciliation travail-famille
En ce qui concerne la conciliation entre vie prive et vie
professionnelle, des tudes ont mis en exergue les difficults que
peuvent prouver les femmes entrepreneurs en tant que mres de
famille. Ainsi, Kirkwood (Kirkwood, 2003) montre dans son tude
qualitative auprs de 21 femmes amricaines que celles-ci ne crent
leur entreprise quaprs lentre lcole des enfants. Cela confirme les
rsultats de Fouquet (Fouquet, 2005), selon lesquels les femmes
dirigeantesclibataires (ou veuves ou divorces) crent plus car elles
auraient moins de charges de famille.La famille et lentreprise
interagissent en de multiples endroits et crent des tensions, des
conflits entre le rle au travail et celui la maison, voire des
dilemmes lorsque lentreprise crot (Morrisson, 2010). Gnralement,
les conflits mergent autour de lautonomie, de limplication dans son
travail, de la non-flexibilit de lemploi du temps, de lengagement
dans la famille.Meurs, Pailh et Ponthieux (Meurs, 2010) ont montr
dans leur tude que les femmes trentenaires cumulent activit
professionnelle et vie familiale mais que nanmoins larrive dun
enfant marque une rupture dans leur trajectoire professionnelle
avec gnralement une diminution de lactivit. Minni et Moshion
(Minni, 2010) ont signal galement que le nombre denfants a un
impact rel sur lactivit des femmes salaries, puisque 83% des femmes
continuent de travailler pour le premier enfant, elles ne sont plus
que 64% en activit pour le deuxime et seulement 43% avec un
troisime. Selon dautres chercheurs, la maternit peut tre un facteur
favorisant lentrepreneuriat fminin, car elle pousserait les femmes
vers la sortie du salariat.
2) LEntrepreneuriat fminin au MarocDans la dernire dcennie, le
Maroc a connu dimportantes mutations socioculturelles,
dmographiques, lgisltatives et conomiques. Les entreprises
marocaines ne restent pas en marge de ces mutations, elles aussi
vivent de profonds changements. Elles sont contraintes de sadpater
sans cesse aux nouvelles exigences du march.Dans ce processus, la
femme marocaine a t pendant longtemps marginalise et relgue
larrire-plan. Or tout effort de dveloppement qui exclue la moiti du
potentiel humain dun pays ne pourra aboutir.De manire gnrale et
jusqu une certaine priode (dbut des annes 70) la plupart des femmes
au Maroc subissaient ainsi leur sort, sans ragir: travaux
domestiques, travaux agrigoles et dlevage. Et dans dautres cas
elles travaillaient en dehors de chez elles avec un salaire, ou
excutaient des travaux manuels (broderie, couture, etc) contre une
petite rmunration. Dans les deux cas, elle dpensait ce quelle
gagnait dans le foyer familial sans quelle puisse pargner. Il faut
galement signaler que lancien code du commerce interdisait la femme
dexcercer une activit commerciale sans lautorisation de son
mari.Mais avec la scolarisation progressive des femmes au Maroc,
leur accs par la suite au march de lemploi ainsi que les
changements positifs au niveau juridique (Moudawana, rforme du code
du commerce) ont favoris lmergence de lentrepreneuriat fminin au
Maroc. Dans ce contexte, lentrepreneuriat au fminin au Maroc
apparait comme un phnomne rcent et rares sont les tudes qui ont t
menes dans ce sens.
2.1) Profil des femmes entrepreneures au Maroc
Selon une tude ralise par lAssociation des Femmes entrepreneures
au Maroc (AFEM, 2005), lge moyen des femmes entrepreneures au Maroc
se situe entre 35 et 44 ans. La majorit de ces femmes sont maries.
La situation matrimoniale semble tre un facteur de stabilit sociale
pour ces femmes entrepreneures et un lment dencouragement pour une
meilleure gestion de leurs projets.Selon une autre tude ralise par
Salmane (Salmane, 2011), la majorit des femmes interroges ont plus
dun enfant et dclarent avoir cr leur entreprise lorsque leurs
enfants taient encore jeunes. Elles dclarent galement que le jeune
ge de leur enfant na pas eu une influence ngative sur leur projet
entrepreneurial. Cela peut tre expliqu par lexistence de la
solidarit familiale qui caractrise toujours la socit marocaine ou
la famille peut participer activement la garde des enfants.
Concernant la formation, les femmes entrepreneures marocaines ont
dans leur grande majorit un niveau dinstruction lev. Les deux tiers
dentre elles disposent dun niveau universitaire. Il faut souligner
que les femmes entrepreneures non ou peu instruites ne grent que
des Micros et petites entreprises domicile, essentiellement dans
les activits lies aux secteurs du commerce et de lartisanat
(Bousseta, 2011).Sur le plan de lexprience, les tudes menes au
Maroc ont conclu quune grande continuit existe entre lexprience
antrieure des femmes entrepreneures marocaines et le projet quelles
ont cr. La majorit de ces femmes ont dj travaill avant de dcider de
travailler leur compte. Le plus souvent dans lentreprise prive ou
elles occupaient des postes dencadrement ou de direction (Rachdi,
2006). Elles choisissent ensuite de se lancer de prfrence dans leur
domaine dexpertise.
2.2) Caractristiques des entreprises cres par les femmes au
Maroc
Les entreprises cres et ou gres par les femmes au Maroc sont
dans leur majorit de petite taille, de type TPE (Trs Petites
Entreprises) ou des PME (Salmane, 2011). Les deux tiers dentre
elles emploient moins de 20 salaris. La plupart de ces entreprises
sont relativement jeunes, la moiti de celles-ci a moins de 5 ans
(Rachdi, 2006).La forme juridique majoritaire de ces entreprises
fminines est constitue par des SARL. Le choix de cette forme
juridique est justifi par sa simplicit et son adquation aux PME
ainsi que la souplesse de son statut et du capital social qui reste
moins lev avec des facilits en termes de blocage la cration.Les
entreprises fminines marocaines sont concentres dans le secteur des
services. Il sagit dun secteur qui ncessite moins dinvestissements
ou de formations spcifiques et dont les barrires lentre sont
relativement faibles pour la femme marocaine (Salmane, 2011). En ce
qui concerne la motivation des femmes marocaines quant la cration
de leur entreprise, linsatisfaction professionnelle et la
flexibilit des horaires que procure lentrepreneuriat en seraient
les principales motivations (Salmane, 2011).
2.3) Les obstacles rencontrs par les entrepreneures marocaines
Les entrepreneures marocaines rencontrent beaucoup dobstacles tout
au long de leurs parcours entrepreneurial. Les obstacles identifis
concernent laccs au financement, laccs aux rseaux de soutien, les
pratiques socioculturelles et la conciliation vie prive/vie
professionnelle.
Laccs au FinancementLes femmes entrepreneures marocaines prfrent
financer leurs projets grce leurs pargnes personnelles ou laide
familiale. Ainsi, dans la culture de la PME marocaine, lessentiel
du financement de lentreprise fminine est constitu par lapport
personnel et familial et le recours au crdit bancaire reste trs
faible et demeure une exception (Boussetta, 2011).Cette prfrence
pour les fonds propres sexplique par les difficults rencontres par
les femmes marocaines pour obtenir des crdits bancaires. Ces
difficults peuvent se rsumer en deux points: le cot excessif du
crdit (taux de base, dure, etc) impos aux entrepreneurs de manire
gnrale, quils soient hommes ou femmes ainsi que les garanties
exiges.Dans ce sens, des tudes antrieures confirment les exigences
du systme bancaire marocain en terme de garanties, y compris dans
le cas des programmes de financement proposs par ltat (Crdit Jeune
Promoteur, Moukawalati, etc).Quant la discrimination sexiste
laquelle peut faire face la femme entrepreneure marocaine lors de
la demande dun crdit bancaire, les femmes interroges par Salmane
(Salmane, 2011) rfutent toute discrimination base sur leur sexe et
dclarent que les dcisions bancaires sont fondes essentiellement sur
la solidit de leurs dossiers notamment en terme de garanties. Elles
trouvent que les garanties exiges par les banques marocaines sont
trop leves et que malheureusement les banques ne prennent pas en
considration dautres critres tels que lexprience professionnelle,
les diplmes et les comptences.
Laccs aux rseaux de soutien
Malgr lexistence au Maroc de plusieurs associations et
organismes de soutien et de promotion de lentreprise fminine, on
constate que peu de femmes adhrent ces groupements. Parmi les
associations les plus connues au Maroc, on peut citer en premier
lieu lAssociation des Femmes Entrepreneures du Maroc (AFEM) qui a t
cr en 2000 et dont les missions consistent : encourager et appuyer
la cration dentreprises par les femmes, informer, encadrer et
assister les femmes chefs dentreprises dans la gestion et la
prennisation de leurs entreprises, dvelopper les comptences
managerielles des femmes entrepreneurs en leur assurant des
formations et enfin constituer un rseau afin de jouer un rle de
lobbying auprs des pouvoirs public et des instituions
internationales.Une autre institution importante dans ce domaine
est lassociation Espace de Dpart (ESPOD) fonde en 1991. LESPOD
reprsente un espace de rencontre, dinformation, de formation et de
solidarit visant lamlioration de lenvironnement et de la qualit des
entreprises fminines.Cependant, la faible implication des femmes
entrepreneures marocaines dans ce type de rseaux est due selon
Salmane (Salmane, 2011) leur mconnaissance de ces organismes et
leur manque de temps et dintrt.Sur un autre plan, ladministration
publique ainsi que les formalits ncessaires pour la cration dune
nouvelle entreprise, constituent un autre obstacle majeur pour les
femmes marocaines. La corruption, la lenteur des formalits
administratives ainsi que les attitudes bureaucratiques sont tous
des obstacles lourds supporter pour une jeune
entrepreneure.Pourtant, plusieurs institutions publiques de soutien
la cration dentreprise existent au Maroc. Les Centres Rgionaux
dinvestissement (CRI) ont t crs en 2002 afin de promouvoir
linvestissement et la cration dentreprises. Ces CRI implants dans
les diffrentes villes du royaume sappuient sur un guichet unique.
Lobjectif est de faciliter toutes les formalits et dallger les
procdures en matire de cration dentreprises.La principale mission
dvolue ces centres rgionaux dinvestissement est de rompre avec les
lenteurs et les tracasseries administratives qui sont considres par
les femmes entrepreneures marocaines au Maroc comme la principale
contrainte en matire de cration dentreprises (Boussetta,
2011).Malheureusement, plusieurs femmes qui souhaitent entreprendre
ignorent lexistence de ces structures. Des campagnes dinformation
savrent donc ncessaire pour faire rapprocher ce genre dorganismes
des femmes marocaines.Dautres femmes chefs dentreprise interroges
par Salmane (Salmane, 2011) estiment que ces organismes dappui ne
sont pas suffisamment sensibles la situation des femmes marocaines
qui ont besoin dun accompagnement spcifique.
Les pratiques socioculturelles
Dautres obstacles plus particuliers sont ressenties par les
femmes entrepreneures marocaines avec plus dacuit comme la
discrimination sexiste, notamment au dbut de leur activit ou
lorsquelles sont jeunes clibataires. Ainsi, ltude de Salmane
(Salmane, 2011) rvle que dans leurs rapports quotidiens,
lharclement, le manque de crdibilit et la rticence des diffrents
partenaires (client, fournisseurs, etc) sont les principales
difficults dont souffrent les femmes marocaines au dmarrage de leur
projet. Lentourage familial semble galement tre un obstacle malgr
que, lgalement, la femme marocaine nest plus oblige de demander
lautorisation son pre ou son mari, comme par exemple en cas de
dplacements rptitifs ltranger ou en cas de rencontres avec des
clients des heures tardives.Ces pratiques sociales sont justifies
par les traditions et coutumes caractrisant la socit Marocaine, qui
imposent la femme de respecter certaines rgles de conduite vis--vis
de sa famille et de la socit.
Conciliation Vie prive/vie professionnelleAu Maroc, la
conciliation entre vie professionnelle et vie familiale ne semble
pas poser des problmes aux entrepreneures fminines. La plupart de
ces femmes, dclarent que quelque soit lge de leurs enfants,
concilier le travail et la vie prive demeure une question
dorganisation (Salmane, 2011). Ces femmes dclarent galement
disposer des moyens financiers pour engager une aide-mnagre qui
soccuperait la fois des tches mnagres ainsi que de leurs enfants.
Ces femmes peuvent galement compter sur leur entourage familial
(parents et beaux parents) pour garder leurs enfants pendant
quelles travaillent.
CONCLUSION
Le prsent article constitue une premire tentative pour cerner le
phnomne de lentrepreneuriat fminin au Maroc. Un champ de recherche,
rappelons le, peu investi au Maroc.Lanalyse des dernires tudes
menes au Maroc, nous a permit de dresser un portrait sur les
caractristiques des femmes entrepreneures marocaines et celles de
leur entreprises. Il en rsulte que les chefs dentreprises
marocaines sont assez jeunes, de niveau dinstruction suprieur et
possdent une exprience professionnelle considrable, leurs socits
sont souvent lies aux secteurs des services.Plusieurs obstacles ont
t galement identifis. Le problme daccs au financement, mme si le
mode de financement prdominant des entrepreneures marocaines reste
lpargne personnelle ou laide familiale. Le cot excessif du crdit
impos aux entrepreneurs ainsi que les garanties exiges constituent
les principales difficults rencontres. Au niveau des rseaux de
soutien, les femmes entrepreneures marocaines sont peu impliques,
souvent par manque de temps et aussi par ignorance de ces
structures dappui. Des campagnes dinformation savrent donc
ncessaires pour faire rapprocher ce genre dorganismes des femmes
marocaines.Les entrepreneures marocaines restent galement
confrontes dautres difficults notamment, la lourdeur bureaucratique
et dautres pratiques socioculturelles caractrisant la socit
marocaine.Les tudes qui ont t menes jusqu prsent, concernait
uniquement les femmes entrepreneures du secteur formel. Il serait
donc important quon sintresse davantage dautres catgories de femmes
porteuses de projets notamment dans le secteur informel.
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