LE ROLE DU LANGAGE DANS LES PROCESSUS PERCEPTUELSParALFRED
KORZYBSKI1THE INTERNATIONAL NON-ARISTOTELIANLIBRARY PUBLISHING
COMPANYNEW YORK
AVANT-PROPOS"The Role of Language in the Perceptual Processes"
["Le rle du langage dans les processus perceptuels"] est le premier
des ouvrages d'Alfred Korzybski tre publi en langue franaise. Il
fut crit pour un symposium de psychologie clinique tenu l'Universit
du Texas durant l'anne universitaire 1949-1950. Douze autres
auteurs ont fourni leur contribution ce symposium; celui-ci fut
organis et dirig par les professeurs Robert A. Blake et Glenn V.
Ramsey. Le livre qui naquit de ce symposium, "Perception: An
Approach to Personality" ("Perception: une approche de la
personnalit"], fut publi tous droits rservs par la Ronald Press
Company, New York, en 1951. Le prsent article en constitue le
chapitre 7. Il est traduit et publi sparment par autorisation de
Ronald Press.La traduction est de Yuri (Georges Psheradsky).Cet
article est le dernier crit par Alfred Korzybski; nombreuses sont
les personnes qui le considrent comme le meilleur condens de son
oeuvre.Charlotte Schuchardt ReadLiterary ExecutorAlfred Korzybski
EstateNew YorkOctobre, 1965
N'tant pas moi-mme un spcialiste dans le domaine de la
psycho-logique2, je considre comme un privilge particulier le fait
de participer ce symposium dont l'objet prsente un caractre
tellement vital. Le thme et les divisions principales de ce
chapitre m'ont t suggrs par les organisateurs du symposium et c'est
avec plaisir que je me conforme leurs conseils.Au cours de mes
travaux, j'ai dcouvert que quelques principes simples constituent
le fondement de mon sujet, et je vais tenter de les communiquer
ici. Pour plus de dtails, je renvoie le lecteur la bibliographie
donne la fin de cet article et au grand nombre d'autres ouvrages
disponibles qui se rapportent la question.L'objet de mes tudes ne
concernant pas directement le problme de la "perception",
j'utiliserai ce terme ici dans son sens vernaculaire. Je ne me sens
pas qualifi pour le dfinir, et, par consquent, j'emploierai des
guillemets pour indiquer ma faon non-technique de traiter ce type
de ractions humaines. Je ne puis viter de toucher indirectement aux
problmes de la "perception", mais je le ferai sous un angle
diffrent.L'effet du Langage, en tant que Systme, sur les Processus
PerceptuelsPeut-tre l'histoire que voici extraite de la
clandestinit europenne au temps d'Hitler sera-t-elle une bonne
illustration de mon propos. Une grand-mre amricaine et sa jeune et
ravissante petite-fille, taient, avec un officier roumain et un
officier nazi, les seuls occupants d'un compartiment de chemin de
fer. Le train traversait un tunnel sombre et, la seule chose que
l'on entendit fut le bruit d'un baiser sonore suivi d'une gifle
vigoureuse. Lorsque le train dboucha du tunnel, personne ne souffla
mot, mais la grand-mre se disait en elle mme: "J'ai quand mme bien
lev ma petite-fille. Elle saura se dbrouiller dans la vie. Je suis
fire d'elle." La petite-fille, elle, se disait "Allons, grand-mre
est assez ge pour ne pas s'offusquer d'un petit baiser. D'ailleurs
ces garons sont gentils. Tout de mme, je ne lui savais pas la main
si lourde." L'officier nazi mditait: "Ces roumains quand mme, comme
ils sont astucieux. Ils volent un baiser et s'arrangent pour que ce
soit le voisin qui reoive la gifle." L'officier roumain, lui,
contenait mal son hilarit: "Comme je suis malin," pensait-il, "je
me suis bais la main et j'ai flanqu une gifle au nazi."De toute
vidence il s'agissait d'un problme de "perception" limite, o
principalement l"'audition" entrait en jeu avec diffrentes
interprtations. Un autre exemple de "perception" peut tre offert et
chacun peut en faire personnellement l'exprience. En fait, je
suggre que cette dmonstration facile soit rpte par tous les
lecteurs de cet article. Il faut deux personnes pour effectuer
cette exprience. La premire, l'insu de l'autre, dcoupe des en-ttes
d'articles de mme dimension, extraits de diffrents numros d'un
journal. Le sujet ne doit pas changer de place d'un bout l'autre de
l'exprience. Un des en-ttes lui est prsent partir d'une certaine
distance. S'il est capable de le lire, on met cet en-tte de ct.
Ensuite, on lui en prsente un autre, diffrent, une distance un peu
plus grande. Si, de nouveau, il est capable de le lire, on met cet
en-tte galement de ct. Cette manoeuvre est rpte jusqu' ce que le
sujet ne soit plus capable de lire l'entte prsent. Le dmonstrateur,
lui en lit alors, le contenu. Le fait surprenant de l'histoire est
que le sujet est alors en mesure devoir et de lirel'en-tte ds
l'instant qu'il "sait" ce qu'il contient.De telles illustrations
peuvent tre multiplies indfiniment. Ces exemples suffisent pour
illustrer l'impossibilit de sparer rigoureusement la "perception",
la "vision", l'"audition" etc., de la "connaissance"; c'est une
division qui ne peut pas tre faite, sinon superficiellement des
niveaux verbaux.Dans une orientation non-aristotlicienne, nous
tenons pour acquis que tous les "processus perceptuels" impliquent,
de la part de notre systme nerveux, l'activit d'abstraire des
niveaux de complexit diffrents. L'exprience en neurologie montre le
caractre slectif des rponses de l'organisme aux situations
globales, et les communications prsentes au cours de ce symposium
corroborent galement l'opinion que les mcanismes de "perception"
rsident dans la facult de notre systme nerveux d'abstraire et de
projeter.Abstraire, par ncessit, implique valuer, consciemment ou
non, et par consquent, le processus d'abstraire peut tre considr
comme unprocessus d'valuation de stimuli,qu'il s'agisse d'un "mal
de dents", d'une "migraine" ou de la lecture d'un "trait de
philosophie". Un grand nombre de facteurs entrent en jeu dans la
"perception" comme le suggre le contenu de ce symposium. Comme ce
phnomne semble tre un processus circulaire, il est considr ici aux
niveaux de complexit infrieurs et suprieurs (voir page 38).Les
Processus d'abstraction.Dans l'tat actuel de nos connaissances nous
pouvons dire que toute vie est de caractre lectro-collodal, le
fonctionnement du systme nerveux y compris. Nous en ignorons jusqu'
prsent les mcanismes intrinsques, mais d'un point de vue
lectro-collodal, chaque partie du cerveau est connecte avec chacune
des autres parties et avec notre systme nerveux dans son ensemble.
Sur une telle base, mme s'il devient ncessaire d'examiner en dtails
les diffrents aspects des processus d'abstraction des fins
d'analyse, il nous faudrait raliser que ces diffrents aspects
constituent les parties d'un seul processus global et continu de la
vie humaine dans des conditions normales.Considrons le comportement
de notre systme nerveux lorsque nous "percevons" quelque chose qui
se produit ou un vnement quelconque. Le terme "vnement" est utilis
ici dans le sens que lui donne Whitehead: comme une coupe
instantane d'un processus. Laissons tomber, par exemple, une bote
d'allumettes. Il s'agit ici d'un vnement d'ordre premier qui se
produit des niveauxnon-verbaux, ou ce que l'on appelle les niveaux
"silencieux" ou "in-dicibles". La lumire rflchie frappe l'oeil et
nous obtenons dans le cerveau des sortes de configurations
lectro-collodales; ensuite, puisque nous sommes des organismes
sensibles, nous pouvons ragir ces configurations par des sortes de
"sentiments", des valuations, etc., aux niveaux "silencieux".
Finalement, aux niveaux verbaux, nous pouvons parler propos de ces
ractions "organismales". Newton, par exemple, aurait pu dire sur la
chute de la bote d'allumettes: "gravitation". Einstein pouvait
dire: "courbure de l'espace-temps". Mais quoi que nous
puissionsdire ce sujet, l'vnement d'ordre premier reste aux niveaux
silencieux. La manire dont nous enparleronspourra changer d'un jour
l'autre, d'une anne l'autre, ou d'un sicle l'autre. Toutes nos
"sensations", nos "rflexions", nos "amours", nos "haines" etc.se
produisent des niveaux silencieux in-dicibles mais peuvent tre
affects par les niveaux verbaux grce une interaction continue. Nous
pouvons employer des mots leur sujet, pour nous-mmes ou pour les
autres, nous pouvons les intensifier, les diminuer, etc., mais ceci
constitue un problme diffrent.Le diagramme suivant (Figure I)
reprsente une analyse extensionnelle du processus d'abstraction
d'un point de vue lectro-collodal non-aristotlicien. Cette analyse
est simplifie l'extrme et pourrait tre plus approfondie. Toutefois
elle nous suffit pour expliquer brivement les aspects les plus
gnraux et les plus importants du problme.
La plupart d'entre nousidentifient en valeurles niveaux I, II,
III et IV et ragissentcomme sinos expressions verbales proposdes
trois premiers niveaux taient le "a" de l'vnement (voir page 17 et
suivantes). Quoi que nous puissionsdireque quelque chose "est", il
tombe sous le sens que cen'est pasle "quelque chose" des niveaux
silencieux. En effet, comme l'a crit Wittgenstein: "ce quipeuttre
montrne peut pastre dit." Par exprience, j'ai dcouvert qu'il est
pratiquement impossible de communiquer la diffrentiation entre les
niveaux silencieux (indicibles) et les niveaux verbaux autrement
qu'en priant l'auditeur ou le lecteur de se pincer avec une main,
un doigt de l'autre main. C'est alors qu'il ralise d'une manire
"organismale" que les expriences psycho-logiques directes d'ordre
premier ne sont pas verbales. La simplicit de cette constatation
pourrait nous induire en erreur si nous ne prenions conscience de
ses implications, car dans nos ractions en tant qu'tres vivants, la
plupart d'entre nous identifient en valeur les niveaux
entirementdiffrents,avec souvent des consquences
dsastreuses.Malheureusement, les gens en gnral, y compris de
nombreux scientifiques,ngligent compltement les niveaux II et IIIet
ragissent comme s'ils n'avaient pas conscience que IV "n'est pas"
I. En d'autres termes nous ne prenons pas en considration les
mcanismes du systme nerveux humain, ou bien, ne "pensons pas de
manire lectro-collodale" propos de nos ractions. Une telle
ngligence conduit des incomprhensions, d'orageux dbats bivalents
("soit-soit"), des hostilits, des prjugs, l'amertume, etc. Dans
l'histoire de la "philosophie", par exemple, le combat mtaphysique
propos du "solipsisme" cesse tout simplement d'tre un problme
lorsque nous prenons conscience du fait que la seule connexion
possible entre les niveaux silencieux (non-verbaux) et les niveaux
verbaux, lesquels sont par inhrence diffrents les uns des autres,
se trouve dans leur similarit de structure, exprime en termes de
relations, et sur laquelle le systme non-aristotlicien actuel est
fond.Une prise de conscience des processus d'abstraction clarifie
lastructured'un grand nombre de nos difficults interpersonnelles,
professionnelles etc., difficults qui peuvent se changer en
bagatelles ou mme ne plus exister, si nous devenons conscients des
identifications en jeu. Des problmes qui se sont crs d'eux-mmes se
rvlent souvent par la suite ne pas en tre du tout.Toute assertion
est verbale; elle n'est jamais le "a" silencieux. Quelqu'un dans un
cauchemar peut rver qu'il "est" un Staline. Cela peut tre bien
innocent. Quelqu'un, en plein jour, peut rver qu'il est un Staline;
cela c'est plus: srieux. Quelqu'un peut proclamer consciemment "Je
suis Staline," etle croire,et commencer tirer sur ceux qui ne sont
pas d'accord avec lui; en gnral un tel individu est enferm dans un
asile et son cas d'ordinaire est sans espoir.Nous voyons comment le
diagramme ci-dessus indique les mcanismes smantiques humains
(d'valuation) de l'individu moyen qui oscille entre la sanit et les
troubles smantiques. Il est bien connu que ce qui serait seulement
un rve pour une personne "normale", "est la ralit" pour un sujet
atteint de dmence prcoce et qui se comporte et vit en accord avec
cette "ralit".Ces mcanismes fonctionnent galement de faon
pathologique chez les adultes infantiles qui vivent dans un monde
imaginaire construit sur des identifications.Les niveaux verbaux
sont, par ailleurs, d'une importance unique pour l'homme parce que
nous sommes capables de passer d'abstraction en abstraction des
niveaux verbaux de plus en plus levs partir de I - II - III, etc.
Dans la vie humaine, IV reprsente les moyens d'inter-communiquer et
de transmettre d'individu individu et de gnration gnration, les
expriences accumules par les individus et par la race. J'appelle
cette capacit humaine la caractristique "time-binding".3Les niveaux
symboliques de comportement diffrencient de faon trs nette les
ractionshumainesd'avec les ractions-signal des formes de vie
infrieures et moins complexes. Si ces expriences accumules ne sont
pas traduites en mots convenablement, le dveloppement humain risque
d'tre srieusement dvi ou mme suspendu.Ce graphique trs simple
reprsente des processus extrmement complexes mettant en jeu la
"perception" diffrents niveaux, les problmes d'interprtation, le
formalisme verbal, etc. Chaque type de raction humaine, des niveaux
les plus bas aux niveaux les plus levs, engage ces mcanismes; ne
pas en tre conscient peut conduire des valuations errones
perturbatrices, gnratrices de frustrations ou d'autres consquences
dsastreuses. Nous verrons plus tard, comment ce diagramme
s'applique aux structures de langage primitives et
aristotliciennes.J'ai soulign ici l'aspect srieux ou tragique de
nos processus d'abstraction parce que je m'efforce de faire saisir
l'norme valeur-vitale de ce qui pourrait autrement paratre trop
simple et vident."Pense" Verbale et Non-verbale.On remarquera que
j'ai mis le mot "pense" entre guillemets. Ce terme implique
gnralement une activit plutt "corticale", ce qui indiquerait
verbalement une sorte de scission entre le fonctionnement
desrgionscorticales et thalamiques de notre systme nerveux, alors
qu'en fait il n'existe aucune rupture de ce genre, mais bien
interaction et intgration diffrents niveaux."Est-ce que toute pense
est verbale?" Certains disent "oui", d'autres disent "non". Si
toutefois nous nous limitons une "pense" verbale, nous retombons
dans nos vieilles ornires linguistiques des gnrations d'autrefois
lesquelles ont t socio-culturellement styles et neurologiquement
canalises dans les formes de reprsentation hrites du pass. Dans de
telles conditions, nous sommes incapables ou inadapts pour voir le
monde intrieur ou extrieur d'un oeil neuf, et, par ce fait, nous
affligeons d'un handicap les activits scientifiques et les autres
activits cratrices. Nous parlons avec tant de faconde de "libert"
et nous ne prenons jamais en considration lesdegrs de libertde
Willard Gibbs desquels dpend toute notre progression. Un systme
non-aristotlicien comprend cette nouvelle orientation et celle-ci
finalement entrane "penser" d'une faon cratrice. Ainsi, une
automobile a indfiniment plus de degrs de libert qu'un tramway
lequel est "canalis" sur ses rails. Malheureusement, tragiquement
peut-tre, et faisant montre d'une caractristique particulirement
notoire de l'orientation aristotlicienne du sujet-prdicat, la
plupart d'entre nous pensent verbalement, ce qui donc handicape ou
bloque nos possibilits de "pense" cratrice. La manire
physico-mathmatique et donc scientifique de "penser" a permis de
surmonter ces handicaps; elle se trouve ainsi la base de l'oeuvre
scientifique cratrice qui procure l'humanit tant de bienfaits.Il y
a une diffrence norme entre le "penser" en termes verbaux d'une
part, et d'autre part, le "contempler", intrieurement silencieux,
des niveaux non-verbaux, suivi d'une recherche minutieuse de la
structure de langage propre s'adapter la structure, suppose dj
dcouverte, des processus silencieux que la science moderne
s'efforce de dvoiler. Si nous "pensons"verbalement,nous agissons
comme des observateurs de parti pris et projetons sur les niveaux
silencieux la structure du langage que nous utilisons; en agissant
ainsi nous restons embourbs dans notre routine d'anciennes
orientations lesquelles rendent pratiquement impossibles aussi bien
les observations ("perception"?) rigoureuses et sans parti pris,
que tout travail crateur. Par contre, lorsque nous "pensons" sans
mots, ou par images ou par visualisations (ce qui implique une
structure et donc, des relations), il nous est possible de dcouvrir
de nouveaux aspects et relations aux niveaux silencieux et par
suite de formuler d'importants rsultats thoriques dans la recherche
gnrale d'une similarit de structure entre les deux niveaux, le
silencieux et le verbal. Pratiquement tous les progrs importants
ont t accomplis de cette faon.Jacques Hadamard, le grand
mathmaticien, a fait une tude sur la manire dont certains
mathmaticiens et scientifiques minents ont coutume de "penser". Je
renvoie pour cela son prcieux petit livre surThe Psychology of
Invention in the Mathematical Field [La psychologie de l'invention
dans les mathmatiques](11). La majorit de ces crateurs ont dclar
qu'ils "pensent" en termes de structures visuelles. "La plupart du
temps, des images sont utilises et trs souvent ces images sont de
nature gomtrique," a-t-il dcouvert (1l, p. 114). Je pourrais
rapporter ici, une des questions que pose Hadamard, et laquelle
Einstein a fourni une rponse d'un intrt particulier en ce qui nous
concerne:Question:I1 serait trs utile, pour une enqute
psychologique, de savoir de quelles images internes ou mentales, de
quelle sorte de "mot interne" les mathmaticiens font usage; ces
images sont-elles de nature motrice (kinesthsique), auditive,
visuelle ou mixte, selon le sujet tudi (1l, p. 140).Rponse:Les
lments mentionns ci-dessus sont, dans mon cas, de type visuel et
quelques-uns de type musculaire. Les mots conventionnels ou autres
signes doivent tre cherchs laborieusement et seulement un second
stade, lorsque le jeu des associations en question est suffisamment
engren pour tre reproduit volont Pour autant qu'ils interviennent
du tout, les mots sont, dans mon cas, purement auditifs, mais ils
ne s'interposent qu' un stade secondaire, ainsi que je l'ai dj dit
(11, p. 143.)4Personnellement, je "pense" en termes d'images et la
faon dont jeparleultrieurement de ces vocations est un problme
diffrent. Lorsque j'effectue un travail crateur je note galement
une forte tension des yeux due cette visualisation qui semble tre
en relation d'une faon ou d'une autre avec la "perception".En
rapport avec ce sujet je peux galement renvoyer un essai des plus
importants sur "La cration mathmatique" d au grand mathmaticien
Henri Poincar (34), et qui, dans les premires annes de ce sicle,
fut donn sous forme de confrence devant la Socit Psychologique de
Paris.Le langage devient alors unmoyen d'expression,par l'entremise
duquel nous nous parlons ventuellement nous-mmes ou aux autres, et
ayant ses propres limites bien dfinies. "La relation entre le
langage et l'exprience est souvent mal comprise," a dcouvert Sapir
(40). "Le langage n'est pas seulement, comme on l'a maintes fois
suppos avec navet, un inventaire plus ou moins systmatique des
divers lments de l'exprience qui paraissent pertinents l'individu;
il constitue aussi une organisation autonome cratrice et symbolique
qui, non seulement se rfre une exprience largement acquise sans son
secours mais, positivement,dfinit pour nous l'exprienceen raison de
sa plnitude formelle et par le fait de notre projection
inconsciente des expectations implicites qu'il contient dans le
champ de l'exprience" (italiques de l'auteur).Comme l'a dit
Santayana: "L'empiriste... pense qu'il croit seulement ce qu'il
voit, mais il s'en sort beaucoup mieux pour croire que pour voir"
(21, p. 1).5DansAn Essay on Man, [Un essai sur l'homme]Ernst
Cassirer (7) discute de "l'avidit pour les noms" que manifeste tout
enfant normal d'un certain ge.En apprenant donner un nom aux
choses, l'enfant n'ajoute pas simplement une liste de signes
artificiels sa connaissance antrieure des objets dont l'exprience
lui est immdiatement perceptible. Il apprend plutt former les
concepts de ces objets pour pouvoir s'accorder au monde objectif. A
partir de l, l'enfant se sent sur un terrain plus solide. Ses
perceptions vagues, incertaines et fluctuantes ainsi que ses
sentiments diffus commencent revtir une nouvelle forme. On peut
dire d'eux qu'ils se cristallisent autour du mot en tant que centre
fixe, foyer de pense.Ici, cependant, repose un aspect important de
la "dnomination" ou "tiquetage":L'acte mme de dnommer dpend d'un
processus de classification... celles-ci (les classifications) sont
fondes sur des lments constants et qui reparaissent souvent dans
notre exprience sensorielle... Il n'existe pas de schma rigide et
prtabli selon lequel nos divisions ou subdivisions pourraient tre
fixes une fois pour toutes. Mme dans les langages troitement
apparents et s'accordant dans leur structure gnrale, nous ne
trouvons pas de noms identiques. Comme Humboldt l'a fait remarquer,
les termes grecs et latins pour dsigner la Lune, quoiqu'ils se
rapportent au mme objet, n'expriment pas la mme intention ou le mme
concept. Le terme grec(mn)souligne la fonction de la lune pour la
"mesure" du temps; le terme latin(luna, luc-na)met en vidence la
luminosit de la Lune ou son clat... La fonction d'un nom se limite
toujours faire ressortir un aspect particulier d'une chose, et
c'est prcisment de cette restriction et de cette limitation que
dpend la valeur du nom... dans l'acte de dnommer nous slectionnons
certains centres de perception fixes dans la multiplicit et la
dispersion des donnes de nos sens (7).6Un "nom" (tiquette) entrane
chez un individu donn, toute une constellation ou configuration
d'tiquettes, de dfinitions, d'valuations etc., uniques pour chaque
individu conformment son environnement socio-culturel et
linguistique, et son hrdit, en connexion avec ses dsirs, ses
intrts, ses besoins, etc.Cassirer fait quelques comparaisons
intressantes entre un enfant qui apprend son premier langage et un
adulte qui tudie une langue trangre. Je puis ajouter ici qu'en ce
qui me concerne, il se trouve que j'ai t lev en quatre langues
(issues de trois racines diffrentes), ce qui m'a aid ne pas tre
limit par les mots, comme j'aurais pu l'tre si je n'avais appris
qu'une seule langue lorsque j'tais enfant.Nous constatons avec quel
srieux nous devons considrer la terminologie; elle est affecte par
notreWeltanschauunggnrale qu'elledtermine tout la fois.En 1950,
nous devons visualiser le monde en gnral comme un processus
sub-microscopique, lectronique et dynamique, et nous reprsenter la
vie, en particulier, comme un processus lectro-collodal d'une
complexit encore bien suprieure (l,2). Qu'est ce qui nous a rendu
possible de visualiser un "objet" et la vie de cette faon? Des
thories, des transpositions d'ides en mots, chafaudes durant des
milliers d'annes, jusqu'aux dernires des dcouvertes de la science
moderne. Ainsi, de nouveau, nous trouvons-nous en face de cette
circularit sans fin (voir pages 38-40). Le fait que nous puissions
"percevoir" les vnements, les objets ou les personnes de cette
manire, a des rpercussions trs importantes sur l'ensemble de ce
processus, comme nous le verrons plus loin dans notre
discussion.Structures des Langages Primitifs.Tous les langages
possdent une structure d'une certaine sorte, et chaque langage
reflte dans sa propre structure celle du monde telle que l'ont
prsume ceux qui ont dvelopp ce langage.7Rciproquement, nous
projetons dans le monde, la plupart du temps inconsciemment, la
structure du langage que nous employons. Du fait que nous estimons
la structure de notre propre langage habituel comme allant
tellement de soi, particulirement si nous sommes ns dans le milieu
qui l'utilise, il est parfois difficile de raliser combien les
peuples munis d'autres structures de langage conoivent le monde
diffremment.Lastructurede quoi que ce soit, qu'il s'agisse d'un
langage, d'une maison, d'une machine etc. doit exister en termes
derelations.Pour qu'il y ait "structure" nous devons avoir tout un
complexe ou un rseau de parties ordonnes et intimement relies entre
elles. Le seul contact possible entre les niveaux non-verbaux et
verbaux est tabli en termes de relations et par consquent, les
relations en tant que facteurs de structure, donnent le seul
contenu de toute connaissance humaine. Partant de l, nous pouvons
raliser l'importance de la structure d'un langage, quel que soit ce
langage. Bertrand Russell et Ludwig Wittgenstein en se vouant avec
une attention mticuleuse au problme de la structure, furent les
prcurseurs de marque dans ce domaine (38, 39, 51). Il ne m'est pas
possible ici d'entrer plus avant dans ce problme, si ce n'est pour
essayer d'en transmettre l'importance fondamentale.Parmi les
peuplades primitives qui "pensent" d'une manire "pr-logique",
monovalente la "conscience d'abstraire" est pratiquement nulle.
L'effet sur l'individu produit par quelque chose l'intrieur de
lui-mme se projette l'extrieur, et acquiert souvent un caractre
dmoniaque. L"'ide" d'une action ou d'un objet est identifie avec
l'action ou l'objet lui mme.Le stade "paralogique", lui, est un peu
plus avanc. Ici les identifications sont fondes sur dessimilaritset
les diffrences sont ngliges (non consciemment, bien entendu).
Lvy-Bruhl dcrit ce niveau primitif d'valuations en formulant la
"loi de participation" suivant laquelle toutes les choses qui
possdent des caractristiquessimilaires "sont les mmes''(29; 21, p.
514). Un "syllogisme" primitif se dveloppe plus ou moins comme
suit: "certains Indiens courent vite, le cerf court vite, donc
certains Indienssontdes cerfs." Ce processus d'valuation est
entirement naturel ce niveau; il pose les fondations pour
laconstruction du langageet pour des abstractions d'ordre plus lev.
Nous avons procd par similarits, trop souvent considres comme des
identits.Les hommes primitifs ne discutent pas des "ides"
abstraites. Comme l'a dcouvert Boas, "L'Indien ne parlera pas de la
bont en tant que telle, quoiqu'il puisse trs bien parler de la bont
d'une personne. Il ne parlera pas d'un tat de bonheur en le sparant
de la personne qui se trouve dans cet tat". Cependant, Boas
conclut: "Le fait de ne pas se servir de formes gnralises
d'expression ne dmontre pas une incapacit de les crer, mais prouve
seulement que le mode de vie de ces peuplades est tel que ces
formes ne sont pas requises" (3, pp. 64-67).L'utilisation de termes
abstraits tel que "la bont en soi", rendit possible une conomie
norme dans la communication, elle acclra aussi fortement le progrs
"time-binding" humain, et finalement rendit possible la science
moderne. Mais en mme temps, le fait mme de nous livrer des
abstractions d'ordres suprieurs devient un danger si nous ne sommes
pas conscients d'tre en train de le faire et si nous gardons en
mmoire les confusions ou identifications primitives concernant les
ordres d'abstractions.La citation suivante8extraite de "Being and
Value in a Primitive Culture" ["L'tre et la valeur dans une culture
primitive"] de Dorothy D. Lee fait apparatre (par les faits plutt
que par des gnralisations verbales d'ordre suprieur; voir pages
26-29) le type extensionnel de la structure du langage des
trobrianders (25, p. 402).Si j'avais me rendre avec un trobriander
dans un jardin o le taytu, une espce d'igname, vient d'tre cueilli,
je reviendrais en vous disant: "Il y a l d'excellents taytus, ils
sont tout juste point, grands et parfaitement conforms; ils n'ont
pas une brunissure, pas une tache; gentiment arrondis aux extrmits
et sans bout pointu; tout a t cueilli d'un seul coup, il n'y aura
pas de second glanage." Le trobriander lui, reviendra en disant
"taytu"; et dans ce mot il aura dit tout ce que moi je vous ai dit
et mme plus. Mme la phrase "il y a des taytus" reprsenterait une
tautologie puisque l'existence est implique dans l'essence puisque
en fait elle est un des ingrdients de l'essence pour le
trobriander. Et tous les attributs, mme s'il pouvait dans son
propre langage trouver des mots, l, sous la main, pour les
exprimer, constitueraient une tautologie puisque le concept de
taytu les contient tous. En fait, si un seul de ces qualificatifs
tait absent, l'objet ne serait pas un taytu. Un tel tubercule, s'il
n'est pas un stade de maturit permettant la rcolte, n'est pas un
taytu. S'il n'est pas mr, c'est un bwabawa. S'il est trop mr, vid,
ce n'est pas un taytu ramolli mais quelque chose d'autre encore, un
yowana. S'il est tach de rouille, c'est un nukunokuna. S'il a des
taches de dcomposition c'est un taboula. S'il est difforme, c'est
un usasu. S'il est de forme parfaite mais petit, c'est un yagogu.
Si le tubercule, quelle que soit sa forme, ou sa qualit provient
d'un glanage d'aprs saison, c'est un ulumadala. Quand le tubercule
trop mr, c'est--dire le yowana, projette des pousses sous terre ce
n'est pas un yowana qui germe, mais un silisata. Quand de nouveaux
tubercules se sont forms sur ses pousses ce n'est pas un silisata
mais un gadena....Comme l'tre est identifi avec l'objet, il n'y a
pas de mot pour le verbetre;comme l'existence est immuable, il n'y
a pas de mot signifiantdevenir.Il est galement significatif de
constater que les diffrenciations et les
gnralisationstemporellesdont nous disposons sont absentes chez les
trobrianders:Les verbes trobriands, ne faisant aucune distinction
temporelle, n'ont pas de temps. L'histoire et la ralit mythique ne
sont pas le "pass" pour les trobrianders. Elles sont toujours
prsentes et participent la vie courante de tout individu, donnant
une signification toutes ses activits et toute existence. Un
trobriander parlera du jardin que le frre de sa mre a plant ou de
celui que le Tudava mythologique a plant, exactement dans les mmes
termes que ceux qu'il utilisera pour parler d'un jardin qu'il est
lui-mme en train de planter; et de parler ainsi lui donnera
satisfaction (25, p. 403).Le trobriander n'a pas de mot pour
"l'histoire". Quand il veut distinguer entre diffrentes sortes
d'vnements il dira par exemple: "Molubabeba dans-enfant-son" ce qui
signifie "dans l'enfance de Molubabeba", ilne s'agit pas d'une
phase antrieure au tempsactuelmais d'une autre sorte de temps"
(25,p. 405; italiques de 1'auteur).De nombreux et excellents
articles et livres ont t crits par des anthropologues, des
psychiatres, des linguistes, etc., sur la faon dont des peuplades
primitives diffrentes ou diffrents complexes nationaux dissquent la
nature de diverses manires selon la structure du langage qu'ils
utilisent.9Les caractristiques principales des structures
primitives de langage ou encore structures "pr-logiques" et
"para-logiques" peuvent tre rduites sommairement leurs
identifications des diffrents ordres d'abstractions et l'absence de
termes abstraits dont elles tmoignent. Les "perceptions" des
individus aux niveaux primitifs sont souvent diffrentes des ntres,
diffrentes dans la mesure o les abstractions d'ordre plus lev sont
confondues et identifies avec les abstractions d'ordre infrieur au
niveau desquelles elles sont projetes. Les primitifs identifient ou
assignentune seule valeur des ordres d'abstractions divers et
essentiellement polyvalents; ce faisant ils deviennent impermables
aux contradictions avec la "ralit", de mme qu'une exprience d'un
ordre plus lev leur est inaccessible.10Systmes de Langage
Aristotliciens et Non-AristotliciensStructure du Langage
Aristotlicien.Dans l'volution culturelle de l'humanit, nos
abstractions courantes furent codifies et l par des systmes comme,
par exemple, le systme aristotlicien. Le terme "systme" est employ
ici dans le sens de "un ensemble de fonctions doctrinales
apparentes" (les fonctions doctrinales de feu le professeur Cassius
Keyser [17]). Nous nous proccupons ici de cette structure cause de
son influence encore norme sur ceux d'entre nous dont la structure
de langage est du type indo-europen.Mon propos, en l'instance, est
d'attirer l'attention sur le fait qu'en discutant de l'imperfection
du systme aristotlicien en 1950, je ne dnigre nullement le travail
remarquable et sans prcdent d'Aristote aux environs de 350 avant
J.-C. Je tmoigne explicitement de ma profonde admiration pour son
gnie extraordinaire, particulirement remarquable si l'on tient
compte de l'poque o il vivait. Nanmoins, la dformation de son
systme et la stagnation force de ce systme dform, maintenue pendant
prs de deux mille ans par les groupes dirigeants, souvent sous
menace de torture et de mort, ont conduit et ne peuvent que
conduire encore plus de dsastres. D'aprs ce que nous savons
d'Aristote et de ces crits, il est peu douteux que s'il tait en
vie, il et jamais tolr de telles altrations et une telle fixit
artificielle du systme qui lui est gnralement attribu.L'espace
m'tant limit je ne puis ici entrer dans le dtail et je ne peux que
renvoyer le lecteur mon ouvrage plus important sur ce sujet,Science
and Sanity: An Introduction to Non-aristotelian Systems and General
Semantics [Science et sanit. introduction aux systmes
non-aristotliciens et la smantique gnrale](21). Sous forme de table
des orientations aristotliciennes et non-aristotliciennes un rsum
sommaire donn dans ce livre (21, p. xxv et suivantes) peut aider
communiquer au lecteur l'importance de ce problme.Je vais
maintenant mettre en vidence certaines des considrations matresses
de la structure du systme aristotlicien ainsi que ses effets sur
notre optique du monde, nos valuations et par consquent, mme nos
"perceptions". Pratiquement depuis l'nonc des formulations
d'Aristote, et en particulier la suite des distorsions qu'elles ont
subies ultrieurement, un grand nombre de critiques ont t faites
leur propos, pour la plupart inefficaces parce qu'inexploitables.
Une de leurs insuffisances les plus srieuses s'est rvle trs
rcemment tre la croyance dans le caractre unique de la forme de
reprsentation sujet-prdicat, en ce sens que tous les types de
relation de ce monde peuvent tre exprims sous cette forme, ce qui
est videmment infirm par les faits et rendrait la science et les
mathmatiques impossibles.Je voudrais citer les remarques
suivantes11de Bertrand Russell dont les travaux concernant
l'analyse des relations sujet-prdicat firent poque.La croyance ou
la conviction inconsciente que toutes les propositions sont du type
sujet-prdicat-en d'autres termes que chaque fait consiste en
quelque chose possdant quelque qualit-a rendu la plupart des
philosophes incapables de donner un compte rendu du monde de la
science et de la vie quotidienne. . . (37, p. 45; 21, p. 85).En
rgle gnrale, les philosophes ne sont pas arrivs relever plus de
deux types de phrases; elles sont illustres par les deux
dclarations que voici: "ceci est jaune' et "les boutons d'or sont
jaunes". Ils supposent incorrectement, d'une part que ces deux
dclarations sont d'un seul et mme type, d'autre part que toutes les
propositions sont de ce type. La premire erreur fut expose par
Frege et Peano; on dcouvrit que la seconde rendait impossible
l'explication de l'ordre. En consquence, le point de vue
traditionnel qui veut que toute proposition attribue un prdicat un
sujet s'effondra et avec lui tous les systmes mtaphysiques qui
taient fonds consciemment ou non sur ce principe (39, p. 242; 21,
p. 131).Des relations asymtriques sont en jeu dans toutes les
sries-espace et temps, plus grand et moins grand, le tout et la
partie, et bien d'autres parmi les plus importantes caractristiques
de notre monde. Il en dcoule que la logique rduisant toute chose au
sujet et au prdicat est astreinte condamner tous ces aspects comme
erreur et pure apparence (37, p. 45; 21, p. 188).Dans cet esprit,
je voudrais rapporter quelques remarques d'Alfred Whitehead,
galement auteur d'une tude de la plus haute importance sur ce
sujet:Les habitudes de penser sujet-prdicat avaient t imprimes dans
l'esprit europen par l'accent exagr donn la logique d'Aristote
durant la longue priode du Moyen Age. Il est probable que par
rapport cette distorsion de l'esprit, Aristote n'tait pas
aristotlicien (49, pp. 8D~81; 21, p. 85).Le mal produit par la
"substance premire" aristotlicienne est exactement cette habitude
d'exagration mtaphysique concernant la forme de proposition
sujet-prdicat (49, p. 45).12La position philosophique alternative
doit commencer par la dnonciation de toute ide du "sujet qualifi
par le prdicat", comme un pige pos aux philosophes par la syntaxe
du langage (48, p. 14; 21, p. 85).13Dans son "Languages and Logic"
["Langages et logique"] Benjamin Lee Whorf procde une analyse des
structures de langage primitif et autres (50, pp. 43-52).Les
langages indo-europens et de nombreux autres accordent une place
prpondrante un type de phrases comprenant deux parties, chaque
partie construite autour d'une classe de mots-substantifs et
verbes-que ces langages traitent diffremment dans leur
grammaire.... Les Grecs et particulirement Aristote, ont difi ce
contraste et en ont fait une loi de la raison. Depuis lors,
l'opposition a t nonce en logique de diffrentes manires: sujet et
prdicat, acteur et action, les choses et les relations entre les
choses, les objets et leurs attributs, quantits et oprations.
Ensuite conformment de nouveau la grammaire, la notion s'implanta
suivant laquelle l'une de ces catgories d'entits peut exister
isolment, mais que la classe du verbe ne peut exister sans la
prsence d'une entit de l'autre classe, la catgorie "chose".... Nos
langages indiens [amricains3 montrent qu'avec une grammaire
approprie nous pouvons obtenir des phrases intelligentes qui ne
peuvent pas tre rduites au sujet et prdicat.14La structure
sujet-prdicat du langage fut le rsultat de l'attribution la
"nature" de "proprits" ou "qualits" alors que les "qualits", etc.,
sont en fait fabriques par notre systme nerveux. La perptuation de
telles projections tend maintenir l'humanit aux niveaux archaques
de l'anthropomorphisme et de l'animisme dans leurs valuations de
leurs environnements et d'eux-mmes.Le principal verbe dans notre
langage qui a servi de structure ces optiques, est le verbe "tre".
Je vais ici procder une trs brve analyse de quelques utilisations
du petit mot "est" et des effets importants de son usage sur notre
"pense". On a dcouvert qu'une tude complte du terme "est" s'avre
trs complexe. Le grand mathmaticien et logicien Augustus de Morgan,
un des fondateurs de la logique mathmatique, a dit avec justesse
dans sa "Formal Logic" ["La logique formelle"] (1847) (S, p.
56):Une tentative en vue de traiter intgralement du terme "est"
conduirait pour le moins l'tude de la forme et de la matire de tout
ce quiexiste,sinon jusqu' l'tude de la forme et de la matire
possibles de tout ce qui n'existe pas, mais qui pourrait exister.
Pour autant que cela puisse se faire, cela donnerait la grande
encyclopdie, et son supplment annuel serait l'histoire de la race
humaine durant ladite priode.Ici, suivant Russell, nous pouvons
simplement spcifier en gros que dans les langages indo-europens, le
verbe "tre" a pour le moins quatre usages diffrents (36, p. 64):1)
comme verbe auxiliaire: c'est fait.152) comme le "est" d'existence:
je suis.3) comme le "est" d'attribution: la rose est rouge.4) comme
le "est" d'identit: la rose est une fleur.Les deux premiers usages
sont difficiles viter en anglais [et en franais] et relativement
sans danger. Les deux autres par contre sont d'une pertinence
extrme dans notre discussion. Si nous disons "la rose est rouge",
nous dmentons tout notre "savoir" en 1950 en ce qui concerne notre
systme nerveux et la structure du monde empirique. Il n'y a pas de
"rougeur" dans la nature, mais seulement des radiations de
longueurs d'ondes diffrentes.Notre raction ces ondes de lumire est
uniquement notre raction individuelle. Un daltonien, par exemple,
verra du "vert". Un individu atteint d'achromatopsie verra du
"gris". Nous pouvons dire correctement: "nous voyons la rose comme
tant rouge" ce qui ne serait pas une altration des faits.Le
quatrime usage: le "est" d'identit, s'il est utilis sans la
conscience des identifications qu'il implique, perptue un type
primitif d'valuation. Dans certains langages - le slave par exemple
- il n'y a pas de "est" d'identit. Si nous disons "je classifie la
rose comme une fleur", structurellement c'est correct et implique
que c'est notre systme nerveux qui fait la
classification.L'importance de ce "est" d'identit implant dans la
structure de notre langage, peut peine tre surestime, tant il
affecte nos ractions neuro-valuationnelles et conduit des
estimations inappropries dans la vie quotidienne de chacun d'entre
nous, qui sont parfois cause de grandes tragdies.Profitons-en pour
nous rappeler maintenant la "grammaire philosophique" de notre
langage que nous appelons les "lois de la pense" telles qu'elles
sont prsentes par Jevons (12; 21, p. 749):1) la loi d'identit: tout
ce qui est, est;2) la loi de contradiction: rien ne peut la fois
tre et n'tre pas;3) la loi du tiers exclus: tout doit, ou bien tre
ou bien ne pas tre.Ces "lois" ont diffrentes interprtations
"philosophiques", mais pour notre propos, il est suffisant de
souligner que (a) la seconde "loi" reprsente un nonc ngatif de la
premire et la troisime un corollaire des deux premires, savoir
aucun tiers n'est possible entre deux contradictoires; et (b) le
verbe "tre" ou "est" et "l'identit" jouent un rle fondamental dans
ces formulations et les ractions smantiques subsquentes."L'identit"
en tant que "principe" est dfinie comme la parit absolue en
'chaque' rapport et sous 'tous' les rapports. Dans ce monde de
processus aux mutations sans fin, cette identit ne peut jamais tre
trouve ni empiriquement ni aux niveaux silencieux de nos systmes
nerveux. Une "identit partielle" ou "une identit sous certains
aspects" ne reprsente videmment qu'une contradiction dans les
termes. L'identification dans le sens o ce terme est utilis ici,
peut tre observe un niveau trs bas dans l'chelle de la vie. Elle
peut tre considre comme le premier acte organique et/ou
"organismal" de relier "cause" et "effet", ordre, etc., lorsque les
organismes infrieurs rpondaient effectivement aux signaux "comme
si" ils taient des ralits. Aux niveaux infrieurs, de telles
identifications organiques ont une valeur de survie. Les
observations de laboratoire montrent que l'amibe manifestera,
envers des stimuli artificiels sans valeur nutritive, des ractions
similaires ses ractions des stimuli comportant une valeur
nutritive. L'amibe en tant que brin de protoplasme vivant aidentifi
de faon "organismale"un stimulus artificiel de laboratoire, dnu de
valeur nutritive, avec la "ralit". Par consquent, bien que la
raction se soit produite, l'valuation tait inapproprie, ce qui ne
change pas le fait biologique que sans de telles identifications ou
rponse automatique un stimulus, aucune amibe ne pourrait
survivre.En progressant dans l'chelle de la vie, les
identifications se rarfient, les ractions d'identification
deviennent plus flexibles, "l'valuation approprie" devient plus
frquente et l'animal de plus en plus "intelligent", etc. Si chez
l'homme on dcouvre des identifications, elles ne reprsentent qu'une
survivance des ractions primitives et des fausses valuations, ou
encore des cas de sous-dveloppement ou de rgression qui sont
pathologiques pour les humains.Une bonne partie de nos
identifications quotidiennes sont inoffensives mais elles peuvent
en principe, et elles le font souvent, conduire des consquences
dsastreuses. J'offre ici trois exemples d'identifications, vrifis,
le premier chez un patient d'un hpital psychiatrique, le second
chez un de mes tudiants, sujet "normal" et le troisime chez un
groupe d'indignes du Congo belge.A l'poque o j'tudiais la
psychiatrie l'hpital Sainte lisabeth, un mdecin me dsigna un jour
un malade catatonique rigidement immobile dans un coin. Depuis des
annes ce malade n'avait pas parl, de mme qu'il ne semblait pas
comprendre lorsqu'on lui adressait la parole. Il se trouvait qu'il
tait n et avait pass une partie de sa vie en Lithuanie o les gens
depuis plusieurs gnrations avaient t entrans par le tsar har les
polonais. Le mdecin, qui ignorait ce fait historique, me prsenta au
malade en disant: "je voudrais vous prsenter un de vos
compatriotes, il est galement polonais." Aussitt le malade me sauta
la gorge essayant de m'trangler et il fallut deux infirmiers pour
l'arracher son treinte.Un autre exemple est celui d'une jeune femme
qui fut mon tudiante il y a quelques annes dans un de mes
sminaires. Elle occupait un poste de responsabilit, mais dans son
orientation gnrale, elle tait pathologiquement craintive au point
qu'elle rvait dans la journe d'assassiner son pre parce qu'il ne la
dfendait pas contre sa mre qui l'avait battue et brime constamment.
Au cours de son enfance le frre de la jeune femme, notablement plus
g qu'elle et le prfr de leur mre, n'avait cess de la traiter avec
condescendance, ce pourquoi elle le hassait.Au cours de l'entrevue
en question, je me sentais particulirement satisfait de ses progrs
et je lui parlais donc en souriant. Tout d'un coup, elle se rua sur
moi et commena vouloir m'trangler. Cela ne dura qu'environ cinq
secondes. Il s'avra ensuite qu'elle avait identifi mon sourire avec
l'attitude condescendante de son frre, et par consquent c'tait "son
frre" qu'elle tentait d'trangler; il se trouvait seulement qu'il
s'agissait de mon cou.Et voici un troisime incident que je voudrais
galement rapporter qui mettra en vidence les problmes que nous
avons confronter (35, p. 52). Nous avons tous dj vu une bote de
"Aunt Jemima Pancake Flour"16avec son portrait sur la bote. Le
docteur William Bridges de la Socit de Zoologie de New York raconte
ce sujet l'histoire que voici: un planteur amricain au Congo belge
employait quelque 250 indignes. Un jour, le chef local le fit
appeler et lui dit avoir entendu qu'il mangeait des indignes. Il le
prvint que s'il ne cessait pas, il ordonnerait ses hommes d'arrter
le travail. Le planteur protesta de son innocence et fit venir son
cuisinier comme tmoin. Celui-ci cependant affirma avec insistance
que le planteur mangeait effectivement les indignes, mais il refusa
de prciser si ceux-ci taient mangs frits, bouillis ou en ragot.
Quelques semaines plus tard, le mystre fut clairci quand le
planteur reut la visite d'un ami venu du Soudan et auquel tait
arrive une aventure analogue. En comparant leurs expriences
rciproques ils dcouvrirent la solution de l'nigme. Tous deux
avaient reu des Etats-Unis des arrivages de botes de conserve. Ces
botes, en gnral, portaient des tiquettes illustrant en images leur
contenu, tel que cerises, tomates, pches etc. Aussi, quand les
cuisiniers virent les tiquettes avec le portrait de "Tante Jemima"
ils furent persuads qu'une Tante Jemima devait en effet se trouver
l'intrieur!Une structure de langage perptuant les ractions
d'identification nous maintient au niveau des types primitifs et
prscientifiques d'valuation en accentuant les similarits et
ngligeant (non consciemment) les diffrences. C'est ainsi que nous
ne "voyons" pas ces diffrences et ragissonscomme sideux objets,
deux personnes ou deux vnements taient "les mmes". De toute
vidence, ceci ne constitue pas une "valuation approprie" en accord
avec nos connaissances de 1950.Lorsque nous analysons les
codifications aristotliciennes, nous devons aussi tenir compte des
types d'orientation bivalents "soit-soit". Pratiquement tous les
hommes, y compris les peuples les plus primitifs qui n'ont jamais
entendu parler des philosophes grecs, possdent quelque chose comme
l'quivalent de ces types d'orientation "soit-soit". Il devient
vident que nos relations par rapport au monde extrieur et intrieur
s'avrent souvent,au niveau de l'tat brut,tre bi-valents. Par
exemple, nous traitons du jour au de la nuit, de la terre ou de
l'eau etc. Au niveau de l'existence, nous avons la vie ou la mort,
notre coeur bat ou ne bat pas, nous respirons ou suffoquons, nous
avons chaud ou froid, etc. Des relations similaires se produisent
des niveaux plus levs. C'est ainsi que nous avons l'induction ou la
dduction, le matrialisme ou 1'idalisme, le capitalisme ou le
communisme, les dmocrates ou les rpublicains, etc., et il en est
ainsi sans fin tous les niveaux.Dans la vie vcue, bien des
questions ne sont pas si tranches et c'est pourquoi un systme qui
rige en postulat la rigueur gnrale du "soit-soit", et objectifie
ainsi "classe" ("proprits", "qualits", etc.), est par trop dform et
indment limit. Il doit tre rvis et rendu plus flexible en termes de
"degrs". La nouvelle orientation requiert une "manire de penser"
physico-mathmatique. Ainsi donc, si par nos prsuppositions
inconscientes, par nos infrences, etc. nous valuons l'vnement, le
niveau sub-microscopique du processus,comme s'il tait le mme
quel'objet macroscopique l'tat brut que nous percevons devant nous,
nous ne nous dgageons pas de notre routine de "pense" bi-valente.
Au niveau macroscopique, si nous considrons, par exemple, deux
pommes cte cte, nous percevons qu'elles peuvent se "toucher" ou "ne
pas se toucher" (voir fig. II).Ce langage ne s'applique pas au
niveau sub-microscopique du processus o le problme de "toucher" ou
"ne pas toucher" devient un problme de degr. Aux niveaux
sub-microscopiques il y a entre les deux des interactions
continuelles que nous ne pouvons pas "percevoir". Conformment aux
suppositions de la science1950, nous devons visualiser
unprocessus.17Il en dcoule que c'est ainsi que nous devrions
"penser" propos d'une pomme, ou d'un tre humain, oud'une
thorie.
Il n'y a pas de "perception" sans interpolation et interprtation
(21, p. xxviii et suivantes). Nous ne pouvons pas nous y opposer.
Mais nous pouvons visualiser les progrs les plus modernes de la
physique mathmatique et des autres sciences, et les projeter dans
les processus silencieux indicibles qui se droulent autour de nous
et en nous.La structure de langage aristotlicienne a aussi perptu
ce que j'appelle "l'lmentalisme" ou encore la scission verbale de
ce qui ne peut tre empiriquement divis; ainsi par exemple, le
termeesprittel quel et les termescorps, espace, temps,etc. tels
quels. Il y a seulement quelques annes (1908) que 1'minent
mathmaticien Minkowski a dclar dans son retentissant mmoire "Space
and Time" ["Espace et temps"] prsent la 80eAssemble des Physiciens
et Naturalistes Allemands Cologne: "Les vues sur l'espace et le
temps que je voudrais exposer devant vous ont jailli des fondements
mmes de la physique exprimentale et c'est en cela que rside leur
force. Elles sont radicales. Dornavant l'espace en soi et le temps
en soi sont condamns s'estomper jusqu' n'tre plus que des ombres,
et seule une sorte de combinaison des deux prservera une ralit
indpendante" (32, p. 75).Cette "union" de ce qu'on avait coutume de
considrer comme des entits spares et distinctes devait fatalement
s'accompagner d'un changement dans la structure du langage; dans ce
cas particulier, ce fut la formulation de la nouvelle gomtrie
quadridimensionnelle de Minkowski de l'"espace-temps", dans
laquelle "l'espace" et le "temps" sont runis de faon permanente par
un simple trait d'union grammatical, rendant ainsi possible la
thorie gnrale de la relativit.La vieille structure lmentaliste du
langage nous a construit un monde anthropomorphique, animiste et
imaginaire peu diffrent du monde des primitifs. La science moderne
rend imprative l'adoption d'une structure de langage
non-lmentaliste qui ne fractionnt pas artificiellement ce qui ne
peut l'tre empiriquement. Si nous n'adoptons pas cette nouvelle
structure, nous demeurons handicaps par des blocages
neuro-valuationnels, le manque de crativit, l'absence de
comprhension, et l'incapacit d'embrasser de larges perspectives,
etc.; nous sommes galement branls par des inconsistances, des
paradoxes, etc.Les points que j'ai souligns ci-dessus, savoir: le
type de structure sujet-prdicat, le "est" d'identit, les
orientations bivalentes "soit-soit" et l'lmentalisme, constituent
peut-tre les caractristiques les plus saillantes de la structure
aristotlicienne du langage; ce sont elles qui ont model nos
"perceptions" et entrav la recherche scientifique grce laquelle
jusqu' prsent et dans bien des cas, nous avons t affranchis des
anciennes limitations et avons pu "voir le monde avec un regard
neuf". Il est bien connu que "dcouvrir ce qui est vident" est des
plus difficiles, simplement parce que les anciennes tournures de
"pense" ont bloqu notre capacit de "voir ce qui est vieux d'un oeil
neuf" (Leibnitz).Systmes de Langage Non-Aristotliciens.Comme il en
advient souvent avec l'homme, lorsque nous aboutissons une impasse
et dcouvrons que des rvisions et une nouvelle approche sont
ncessaires, nous agissons en consquence. En ce qui nous concerne,
considrant les normes progrs de la science, il devint imprieux
d'adopter une structure de langage qui ne dnaturt pas les
dcouvertes modernes. Comme, ce jour, je ne connais pas d'autre
systme non-aristotlicien, je demande l'indulgence du lecteur et
qu'il me pardonne de ne parler presque exclusivement que de mes
propres formulations. Bien d'autres que moi ont procd des
applications, mais personnellement je ne traiterai que de l'aspect
thorique du sujet.Le nouveau systme est appel "non-aristotlicien"
parce qu'il englobe, comme des cas particuliers dans un systme plus
gnral, les systmes d'valuations prdominants. Historiquement le
systme aristotlicien a influenc le systme euclidien; ensemble ils
posent les fondements du systme newtonien qui en rsulte. La premire
rvision non-aristotlicienne est interdpendante et en parallle avec
les dveloppements non-euclidiens et non-newtoniens des mathmatiques
et de la physique mathmatique modernes. Satisfaire le besoin
d'unifier les sciences exactes et les orientations gnrales de
l'homme, fut un des buts principaux de la rvision
non-aristotlicienne, celle-ci tant historiquement la dernire en
date par le fait de ses bien plus grandes complexits (21, esp. p.
97)Le systme non-aristotlicien trouve son origine en 1921 dans la
nouvelle valuation de l'humanit considre comme une classe de vie
"time-binding" (18). Cette valuation est fonde sur une
approchefonctionnelleplutt que zoologique ou mythologique et
considre "l'homme" en tant que "un
organisme-comme-un-tout-dans-un-environnement". Dans ce cas-ci les
ractions de l'homme ne sont pas scindes verbalement et de manire
lmentaliste en composantes spares: "corps", "esprit", "motions",
"intellect", ou diffrents "sens", etc. en tant que tels, ce qui
affecte les problmes de la '`perception" quand ils sont considrs
d'un point de vue non-lmentaliste. Avec une conscience du caractre
"time-binding" de l'homme nos critres de valeur, et par consquent
notre comportement, sont fonds sur l'tude des potentialits humaines
et non pas sur des moyennes statistiques calcules au niveau
del'Homo homini lupustires des ractions valuationnelles primitives
et/ou drgles dont nous possdons les dossiers (23).Le sens commun et
les observations font ressortir de toute vidence, que ce que l'on
appelle l'individu "normal" est un phnomne d'une telle complexit
qu'il chappe pratiquement une analyse non fragmente et
non-lmentaliste. Pour procder une telle analyse, il devint
ncessaire d'tudier les principales formes de ractions humaines
disponibles, telles que les mathmatiques, les fondements des
mathmatiques, de nombreuses branches de la science, l'histoire,
l'histoire des cultures, l'anthropologie, la philosophie, la
psychologie, la "logique", l'tude compare des religions etc. On
dcouvrit qu'il tait essentiel de se concentrer sur l'tude de deux
extrmes parmi les ractions psycho-logiques de l'homme: a) les
ractions les plus appropries cause de leurs exceptionnelles
caractristiques de prvisibilit, de validit et de potentiel
constructif durable dans le processus de "time-binding", ractions
en l'occurrence telles que les mathmatiques et les fondements des
mathmatiques, la physique mathmatique, les sciences exactes, etc.
qui sont des manifestations de certaines des ractions
psycho-logiques les plus profondes de l'homme; et b) les ractions
les moins appropries, telles qu'elles sont illustres par les cas
psychiatriques. Durant ces investigations il devint vident que les
mthodes physico-mathmatiques trouvent dans notre vie quotidienne
une application tous les niveaux, unissant troitement la science,
et particulirement les sciences exactes, aux problmes de la sant
"mentale" dans le sens d'un ajustement aux "faits" et la "ralit".En
fait, on dcouvrit que pour changer la structure linguistique de
notre systme aristotlicien encore en vigueur, les mthodes devaient
tre d'emble extraites des mathmatiques. C'est donc par
l'utilisation de procds extensionnels que la structure de notre
langage fut transforme, sans pour cela que le langage lui mme en ft
modifi. Nous expliquons brivement ceci un peu plus loin.Lorsque les
prmisses de cette nouvelle approche eurent t formules, je dcouvris
de faon inattendue qu'elles taient, d'une part la ngation des
vieilles "lois de la pense", d'autre part le fondement d'un systme
non-aristotlicien dont j'ai appel lemodus operandi "General
Semantics". Les prmisses en sont trs simples et peuvent tre
formules par le moyen d'une analogie:1) Une carten'est pasle
territoire (les mots nesontpas les choses qu'ils reprsentent).2)
Une carte ne couvrepas toutle territoire (les mots ne peuvent
couvrir tout ce qu'ils reprsentent).3) Une carte est auto-rflexive
(dans le langage, nous pouvons parler proposdu langage).Ici nous
constatons que les vieux postulats pr-scientifiques violent les
deux premires prmisses et ngligent la troisime (20, pp. 750 et
suivantes; 24).Il se trouve que la troisime prmisse est une
application dans notre vie quotidienne de l'oeuvre extrmement
importante de Bertrand Russell qui s'est efforc, par sa thorie des
types mathmatiques ou logiques, de rsoudre les contradictions
internes existant dans les fondements des mathmatiques. A ce
propos, le termeauto-rflexif at introduit par Josiah Royce. La
thorie des types mathmatiques me fit prendre conscience de
nouvelles sortes de confusions linguistiques auxquelles jusqu'
prsent, except quelques rares mathmaticiens, pratiquement personne
n'avait prt attention. La ralisation et l'analyse de ces difficults
me conduisirent la dcouverte suivante les principes des diffrents
ordres d'abstraction, le caractre multiordinal des termes, les
termes sur/sous dfinis, les ractions d'ordre second (la "pense"
propos de la "pense", le doute du doute, la peur d'avoir peur,
etc.), l'interaction thalamo-corticale, le caractre circulaire de
la connaissance humaine etc., tous ces facteurs peuvent tre
considrs comme gnralisant la thorie des types mathmatiques.18Le
degr auquel nous sommes "conscients d'abstraire" comprenant entre
autres ce que nous avons dit ci-dessus, devient un problme cl dans
notre faon d'valuer et peut donc pour une large part affecter notre
manire de "percevoir". Si nous pouvions inventer des mthodes pour
augmenter notre "conscience d'abstraire", nous russirions
ventuellement nous librer des limitations archaques,
pr-scientifiques et/ou aristotliciennes inhrentes aux structures de
langage plus anciennes. Les expdients structuraux suivants,
auxquels j'ai recours pour atteindre ce but, sont ce que j'appelle
lesprocds extensionnelset leur application entrane automatiquement
une orientation en conformit avec les plus rcents postulats de la
science.Procds extensionnels. 1)Lesindices,tels quex1,x2,x3, xn;
chaise1chaise2, chaise3, chaisen; Dupont1,Dupont2, Dupont3,...
Dupontn, etc. Le rle des indices est de produire indfiniment un
grand nombre denoms propressusceptibles de couvrir la gamme infinie
des individus ou situations uniques avec lesquels nous avons
traiter dans la vie. Nous avons donc chang un nomgnriqueen un
nompropre.Sinous prenons l'habitude de cette indication numrique et
si elle devient partie intgrante de nos processus d'valuation,
l'effet psychologique ainsi obtenu en sera remarquable. Nous
deviendrons conscients de ce que le gros de notre "pense", dans la
vie quotidienne aussi bien que dans le domaine de la: science, est
de caractre hypothtique, et cette ralisation de chaque instant nous
rendra prudents dans nos gnralisations; ceci ne peut tre aisment
communiqu dans les limites de la structure de langage
aristotlicienne. Un terme gnrique (tel que "chaise") traite de
classes et insiste sur les similarits, en excluant partiellement,
en faisant peu de cas ou en ngligeant les diffrences. L'utilisation
des indices fait affleurer au niveau conscient les diffrences
individuelles et conduit donc des valuations, voire une
"perception" plus approprie dans des circonstances donnes. Les
identifications pernicieuses qui dcoulent des vieilles structures
de langage seront souvent prvenues ou limines; elles pourront tre
supplantes par des valuations plus flexibles fondes sur une
orientation de probabilit maximum.2)Les indices-chanestels que dans
chaise11, (dans un grenier sec)chaise12(dans une cave humide)...
chaise1n;Dupont11(dans des conditions normales) ou, disons (par
terre), Dupont12(dans des conditions de famine extrme) ou, disons
(dans un avion trs haute altitude). Les ractions de Dupont, sont en
de nombreux aspects totalement diffrentes selon les diffrentes
conditions.Le rle des indices-chanes est de fournir une technique
pour l'introduction de facteurs, de conditions, de situations etc.,
d'environnements. Au niveau humain seraient inclus les facteurs
psycho-logiques, socio-culturels, etc.Dans un monde o une "cause"
donne produit ou peut produire une multiplicit d'"effets", chaque
"effet" devient ou peut devenir une "cause" et ainsi de suite
indfiniment. Par exemple, d'aprs ce que la psychiatrie nous
apprend, un seul vnement dans l'enfance d'un individu peut
dterminer une srie de ractions-en-chanes, colorant, voire dformant
ses rponses psycho-logiques ou mme psycho-somatiques pour le
restant de sa vie. Les indices-chanes servent galement de vhicules
aux mcanismes gnraux des ractions-en-chanes, celles-ci n'oprant pas
exclusivement dans le domaine de la fission atomique, mais partout
dans ce monde. Ce qui nous intresse particulirement ici, c'est que
ceci inclut les processus organiques, les relations
inter-personnelles ainsi que les processus de "time-binding" comme
il l'a t nonc dans la "thorie de la spirale" de notre nergie de
"time-binding" (18, 1red., p. 232 et suivantes).Les indices-chanes
("l'indication numrique" sans fin d'un indice) ne sont pas de
nouveaux venus en mathmatiques. Ils ont t automatiquement utiliss,
mais pour autant que je sache, un modle gnral en vue de leur
application dans la vie courante n'a pas t formul. Pour un exemple
de leur utilisation dans le domaine scientifique, voir "On the use
of chain-indexing to describe and analyze the complexities of a
research problem in bio-chemistry" ["De l'usage des indices-chanes
pour la description et l'analyse des complexits d'un problme de
recherche en bio-chimie"] par Mortimer B. Lipsett (30).En rsum,
nous vivons, pour le meilleur et pour le pire, dans un monde de
processus, un monde par consquent de ractions-en-chanes
"causes-effets"; il s'ensuit que nous avons besoin d'outils
linguistiques pour nous-mmes et pour les autres afin de pouvoir
manier nos valuations dans un tel monde. Il est possible que la
formulation d'un code linguistique des indices-chanes, puisse nous
y aider.3) Lesdates:Dupont11920, Dupont11940, Dupont11950,
Dupont1t. L'utilisation des dates nous situe dans un monde
physico-mathmatique quatre dimensions (au moins) d'espace-temps, un
monde dynamique et changeant, un monde de croissance, de
dcomposition, de transformation, etc. Cependant les reprsentations
desprocessuspeuvent treimmobilises un point quelconque l'aide de
moyens linguistiques pour des besoins d'analyse, de clart, de
communication, etc. Cette mthode nous fournit une technique qui
nous permet de manier des ralits dynamiques avec des moyens
statiques.Ainsi, cela ferait probablement une bonne diffrence, si
nous voulions acheter une voiture, de savoir si le modle est de
l'anne 1930 ou 1950. En rgle gnrale, toutefois nous ne sommes pas
pareillement conscients de "dater" nos thories, nos croyances,
etc., et pourtant il est "bien connu" quel point les dates
affectent la science, les thories, les livres, les diffrentes
cultures et coutumes, y compris les gens et toute existence.Prenons
un autre exemple. Si nous lisons leManifeste Communistede Karl Marx
et Frdric Engels (31), nous trouvons le mot "moderne" sur bien des
pages. Nous avons une propension valuer "moderne" comme signifiant
"1950", ce que font apparemment de nombreux lecteurs.
Personnellement, je suggre qu'a chaque fois que nous rencontrons ce
mot nous inscrivions en marge la date "1848". En spcifiant la date
de cette faon bien des arguments deviendront dsuets et par suite:
prims, puisque nous vivons dans le monde de 1950, entirement
diffrent de celui de 1848.4)Etc.:L'utilisation de "etc." en tant
qu'une part de nos processus d'valuation nous amne prendre
conscience du nombre indfiniment lev de facteurs qui entrent en jeu
dans un processus dont nous ne pouvonsjamaisavoir une connaissance
ou une perceptiontotale;elle contribue la flexibilit et nous
procure dans nos ractions smantiques un degr plus grand de
conditionnalit. Ce procd nous entrane viter le dogmatisme,
l'absolutisme, etc. Ceci nous rappelle la deuxime prmisse (une
cartene couvre pas toutle territoire) et indirectement la premire
(la carten'est pasle territoire).Incidemment, dans l'usage du
"etc." nous trouvons la cl de la solution de "l'infini"
mathmatique, accompagne d'importantes implications psycho-logiques
(21, chap. XIV).5) Lesguillemets:tels que pour "corps", "esprit",
"motion", "intellect", etc. Ces guillemets nous avertissent qu'il
ne faut pas se fier aux termes lmentalistes et mtaphysiques et que
des spculations fondes sur ces termes sont susceptibles d'apporter
la confusion ou bien sont dangereuses.6) Letrait
d'union:l'utilisation du trait d'union relie linguistiquement les
inter-relations complexes et empiriques qui existent de fait en ce
monde. Certaines implications structurales des plus importantes
reprsentant des progrs rcents dans les sciences et autres secteurs
du savoir humain, utilisent le trait d'union.Par
exemple,a)dansespace-tempsle trait d'union a rvolutionn la
physique, transform totalement notre vision du monde et a pos le
fondement des systmes non-newtoniens; b) le trait d'union
danspsycho-biologiquetranchevivement la diffrence (comme
personnellement je l'interprte) entre les animaux et les hommes qui
sont beaucoup plus complexes. Cette diffrentiation est aussi la
base de l'actuel systme non-aristotlicien dans lequel "l'homme"
considr comme un "time-binder"19n'est pas seulement un phnomne
biologique, mais galement psychobiologique. c) Le trait d'union
danspsycho-somatiquetransforme lentement la comprhension et la:
pratique mdicales, etc.; d) danssocio-culturel,il indique le besoin
d'une nouvelle anthropologie applique, d'une cologie humaine, etc.;
e) dansneuro-linguistique et neuro-smantique,le trait d'union relie
nos ractions verbales nos processus neuro-physiologiques; f)
dansorganisme-comrne-un-tout-dans-un-environnementil prcise que mme
un "organisme-comme-un-tout" ne peut exister sans environnement, et
qu'envisag dans un "isolement absolu" il n'est qu'une fiction.En ce
qui concerne "psycho-biologique" et "psycho-somatique" les
pionniers de la recherche ont manqu de voir l'importance du trait
d'union et de ses implications. Ils ont employ les deux termes
comme un seul mot, d'o rsulte une reprsentation linguistique
inexacte. Ils n'ont pas ralis que derrire l'apparente simplicit
d'un terme unique ils cachaient une extrme complexit humaine. Ils
partaient de l'hypothse fausse et injustifie qu'un mot seul
implique l'unit, par la mme occasion le public a t induit en
erreur, car cette interprtation errone dissimule toutes les
complexits inter-actives.Implications Thoriques et Pratiques.La
simplicit des procds extensionnels est trompeuse; leur simple
"comprhension intellectuelle" sans une intgration dans nos
processus vivants d'valuations n'a aucun effet quel qu'il soit. Il
est ncessaire de procder une recanalisation et un rapprentissage de
nos mthodes d'valuations coutumires, et cela, c'est souvent trs
difficile pour les adultes bien que comparativement ais pour les
enfants. La structure rvise du langage comme nous l'expliquons
brivement ici, produit deseffets neuro-physiologiquescar elle exige
une "pense" en termes de "faits" ou deprocessus de visualisation,
avantde passer aux gnralisations. Cette manire d'agir a pour
rsultat un court dlai neurologique de raction, ce qui facilite
l'intgration thalamo-corticale, etc.Le vieille structure de langue
aristotlicienne avec sa forme sujet-prdicat, son lmentalisme, etc.,
ne fit qu'entraver plutt que susciter un fonctionnement
neuro-physiologique tellement dsirable. Au contraire elle conduisit
des spculations verbales divorces des faits, provoquant la cration
ventuelle de "personnalits ddoubles" et autres sortes de ractions
pathologiques.Nous pourrions rappeler ici la dclaration si
pertinente de l'minent mathmaticien Hermann Weyl qui crivait dans
"The Mathematical Way of Thinking" ["La mthode de pense
mathmatique"]: "En fait, la premire difficult que rencontre l'homme
de la rue lorsqu'on lui enseigne penser mathmatiquement, c'est de
devoir apprendre regarder les choses beaucoup plus carrment en
face; sa croyance dans les mots doit tre mise en pices; il faut
qu'il apprenne penser plus concrtement" (47)Les personnes saines et
normales, sans en tre conscientes, procdent naturellement des
valuations en accord dans une certaine mesure avec les mthodes
extensionnelles et avec un certain "ordre naturel d'valuation".
Toutefois la formulation structurale de ces questions et la rvision
correspondante de notre vieille structure de langage rendent
possible leur analyse ainsi que leur enseignement, ce qui est d'une
importance capitale dans notre processus humain de
"time-binding".Jusqu' prsent de nombreux indices permettent de
penser que l'utilisation des procds extensionnels et mme une
"conscience d'abstraire" partielle contiennent des possibilits
quant l'effort de l'tre humain dans son ensemble en vue de se
comprendre et de comprendre les autres. L'tendue de la rvision
requise, si nous avons l'intention d'aller de l'avant partir des
prmisses telles qu'elles ont t nonces prcdemment, d'une faon
gnrale, n'est pas encore ralise. Nos vieilles habitudes d'valuation
incrustes depuis des sicles, si ce n'est depuis des millnaires,
doivent tre d'abord r-values et remises jour en accord avec les
connaissances modernes.De quelle manire une forme de reprsentation
non-aristotlicienne apporte-t-elle un changement dans nos processus
d'valuation et produit-elle des modifications psychologiques
profondes? Nous avons vu comment la structure d'un langage dtermine
souvent notre manire de voir le monde, les autres et nous mmes. Mes
expriences et les expriences de bien d'autres confirment que nous
pouvons, et d'ailleurs le faisons, valuer des stimuli d'une faon
diffrente par suite de l'application des mthodes extensionnelles
non-aristotliciennes.Dans pratiquement tous les domaines de
l'effort humain, des indications suggrent que des attitudes
nouvelles, plus flexibles, etc. peuvent tre acquises, qui auront
pour rsultat d'influencer les interrelations d'un individu donn
avec lui-mme et avec les autres. La plupart de ces rsultats sont
obtenus dans le domaine de l'ducation mais comprennent des champs
d'action aussi divers que la mdecine psycho-somatique, la
psychiatrie, la psychothrapie, le droit, l'conomie, les affaires,
l'architecture, les arts, etc., l'conomie politique, la politique,
l'anthropologie sociale les troubles de lecture, etc.Les principes
non-aristotliciens ont t utiliss par la Commission Navale du Snat
des E.U. en connexion avec des problmes nationaux d'extrme
importance tels que "Establishing a Research Board for National
Security" ["L'tablissement d'un bureau de recherches pour la scurit
nationale"]. (45, p. 6). "A Scientific Evaluation of the proposal
that the War and Navy Departments be merged into a single
Department of National Defense" ["Une valuation scientifique de la
suggestion que les dpartements de Terre et de Mer soient fusionns
dans un dpartement unique de Dfense Nationale"], (46). "Training of
Officers for the Naval Service" ["L'entranement des officiers pour
le service naval"], (42, pp. 55-57). Pour autant que je sache, de
nos jours, mme sur certains navires en service actif, le personnel
suit un entranement dans certains principes de smantique gnrale
(voir galement 33, chap. I).Une des caractristiques principales des
diffrences dans l'orientation consiste en ce que la forme du
langage aristotlicien encourage l'valuation "par dfinition" (ou
"intension") alors que l'orientation non-aristotlicienne ou
physico-mathmatique entrane l'valuation "par extension", en tenant
compte des faits positifs de chaque situation particulire laquelle
nous avons faire face.Par exemple, certains mdecins moins
progressistes s'efforcent encore de soigner "une maladie" et non
pas le malade qu'ils ont devant eux. Les troubles et les
manifestations psychosomatiques observs ou infrs au cours de l'tude
de son comportement, ou de sa fiche mdicale, mettent en jeu une
multiplicit de facteurs individuels qu'aucune dfinition possible du
mot "maladie" ne couvre entirement. Heureusement, aujourd'hui, la
majorit des mdecins s'efforcent de gurir le patient et non pas "une
maladie".Dans son article sur "The Problem of Stuttering" ["Le
problme du bgaiement"], le professeur Wendell Johnson (13) parle de
l'importance du diagnostic dans le cas d'un enfant considr
"bgue":Ayantcatalogul'enfant comme "bgue" (ou l'quivalent) ils
ragissent de moins en moins l'enfant et de plus en plus cette
tiquette qu'ils lui ont applique. En dpit de la preuve rellement
dcisive du contraire ils prsupposent que l'enfant, ou bien ne peut
ou bien n'a pas appris parler. Ils se mettent donc l'oeuvre pour
l'"aider" parler Et quand, "malgr toute leur assistance", l'enfant
"bgaie plus que jamais", ils s'inquitent de plus en plus.... Parmi
les pathologistes du langage la cause la plus probable du bgaiement
a t et est toujours un grand sujet de controverses.... Mais
personne en dehors de la smantique gnrale n'a suggr que
lediagnosticdu bgaiement en est une des causes, et cela,
probablement parce que personne, en dehors de la smantique gnrale,
n'a paru raliser quel point deux personnes qui parlent du
"bgaiement" peuvent tre en dsaccord sur ce dont elles parlent, et
en mme temps l'influencer. Le principe de l'incertitude, qui
exprime l'effet de l'observateur sur ce qu'il observe, peut tre
prolong jusqu' inclure l'effet de celui qui parle sur ce qu'il
nomme (pp. 189-93).20Des changements dans lesattitudes,dans nos
faons d'valuer, impliquent intimement des "processus perceptuels"
diffrents niveaux. Il est essentiel de nous rendreconscientsde
nosprsuppositions inconscientes;ceci est englob dans toute
psychothrapie et devrait faire partie de l'ducation en gnral. A ce
propos, les travaux extrmement importants et pertinents du docteur
Adelbert Ames, Jr. l'Institut de Hanovre et l'Universit de
Princeton, etc., sont trs utiles pour provoquer cette prise de
conscience. Par exemple, le Docteur J. S. A. Bois (4), psychologue
Montral et ex-prsident de l'Association Canadienne de Psychologie,
dans son rapport sur "Executive Training and General Semantics"
["La formation des cadres et la smantique gnrale"] crit au sujet de
sa classe compose de sept hommes dtenant les postes cls d'une
entreprise industrielle, groupe qu'il avait pris en main pour un
entranement de base en mthodologie non-aristotlicienne:J'entrepris
de dsquilibrer leur assurance en eux-mmes en leur dmontrant que nos
perceptions sensorielles sont sujettes caution Nous finmes par
accepter le fait que le monde peru par chacun d'entre nous n'est
pas un monde "objectif" d'vnements, mais un monde
'"subjectif"d'vnements-significations.Ils taient tout fait disposs
accepter ces nouvelles optiques, mais je sentis qu'il fallait les
rendre conscients du fait que "comprendre" certains principes et
les accepter '"intellectuellement" n'est pas suffisant. Il est
imprieux de changer nos mthodes habituelles de penser et cela n'est
pas si facile qu'il le parait. Pour bien leur enfoncer cela dans la
tte, je leur expliquai le systme de numration senaire et leur
donnai quelques devoirs faire la maison: une table de
multiplication, de longues additions, des soustractions,
multiplications et divisions. Le jour suivant, ils s'taient rendus
compte qu'il est ennuyeux, irritant et assez difficile de passer
d'une mthode de penser une autre. Ils ralisrent que tenir une
comptabilit en utilisant le systme senaire reprsenterait une
rvolution au bureau et l'usine, exigerait de nouveaux organes dans
les machines calculer, etc., etc. Je sentis que la mise en scne
tait au point pour la partie centrale de mon cours Il est
impossible d'valuer quantitativement le succs ou l'chec d'un cours
de cette sorte. Le fait que ce groupe de chefs voulaient le faire
suivre par leurs subordonns immdiats, indique dj qu'ils le
trouvrent utile.21Bois rapporte plus loin qu'ils effecturent leurs
propres valuations en termes d'efficacit croissante, de maturit et
de contrle "motionnel" amliors, de meilleures techniques de
communication entre eux-mmes et avec leurs subordonns, etc.A la
Northwestern University, des observations faites par Liston Tatum,
sur un groupe dont le comportement devait se conformer un plan
prtabli, suggrent que lorsque des individus sont obligs de suivre
"l'ordre naturel d'valuation", (c'est--dire d'abord valuer des
faits, ensuite gnraliser) ils se parlent entre eux de faon
diffrente (43).L'effet du langage sur nos valuations visuelles est
illustr dans une tude communique par L. Carmichael, H. P. Hogan et
A. A. Walter (5, p. 74-82) intitule: "An Experimental Study of the
Effect of Language on the Reproduction of Visually Perceived Form"
["Une tude exprimentale de l'effet du langage sur la reproduction
de la forme perue visuellement"]. Le but tait de chercher savoir
si, lorsqu'un ensemble de douze figures tait prsent avec un nom
assign chacune d'elles, la reproduction des formes visuelles en
tait affecte. Les sujets, aprs les avoir vues, devaient reproduire
les figures aussi prcisment que possible. Les mmes images visuelles
taient prsentes tous les sujets, mais elles portaient des noms
diffrents pour chaque diffrent groupe. Par exemple: un haricot
blanccano. Les rsultats indiqurent que "cette exprience tend
confirmer les observations faites au cours des recherches effectues
antrieurement dans ce domaine; elle montre aussi que, dans une
certaine mesure au moins, la reproduction des formes peut tre
dtermine par la nature des mots prsents aux sujets oralement au
moment o ceux-ci peroivent des formes visuelles spcifiques pour la
premire fois."Dans ses cours de smantique gnrale la Northwestern
University, le professeur Irving Lee a expriment sur ses tudiants
les procds ci-dessus. Il rapporte (dans une communication
personnelle qu'il m'a faite) que jusqu' prsent ses tudiants ne
ragissentpascomme les sujets de l'exprience cite plus haut, mais
qu'ils "dessinent des figures en tant de loin moins influencs par
les noms qui leur ont t donns."Au sujet de son enseignement de la
mthodologie non-aristotlicienne l'usage de la police, Lee a crit un
rapport prliminaire portant sur une tude pilote de trois ans et
concernant 140 policiers, allant du gardien de la paix aux
officiers de police, qui suivaient le Cours d'Administration de
Police la Northwestern University Traffic Institute (27). Bass sur
les rapports des instructeurs, les interviews et les informations
obtenues en interrogeant un certain pourcentage de ces tudiants
l'issue du cours, crit Lee, les rsultats indiquent qu'aprs avoir t
conseills sur les processus capacit extensionnelle, les policiers
se sont vus eux-mmes et ont envisag leur travail l'institut sous un
jour tout fait diffrent.Les psychologues et les autres seront
peut-tre intresss par la communication suivante; cette
communication fournit des lments d'informations prliminaires qui
suggrent de nouveaux champs d'investigation dans le domaine de la
criminologie, le dveloppement de la personnalit, etc. Le Dr.
Douglas M. Kelley, professeur de criminologie l'Universit de
Californie Berkeley, m'a crit rcemment:Je m'occupe en ce moment de
l'introduction de la smantique gnrale dans le domaine de
l'interrogatoire, et celui du dveloppement de la personnalit. Le
premier domaine fait l'objet d'un cours valant trois "units"22que
je donne sur la dtection du mensonge; pour commencer il y a
approximativement un trimestre de pure smantique gnrale, qui dbute
par un dbat sur la futilit des mots dans la communication, pour
aboutir droit aux diffrents procds extensionnels. La seconde moiti
du cours comprend, illustre par diffrents types de dtecteurs de
mensonge, la relation motionnelle des mots et la rdaction de
rapports o de nouveau les problmes de multiordinalit, etc., sont
traits extensivement. Une revue de toute la littrature existante
nous fait constater une absence totale d'informations dans ce
domaine; cette approche, purement fonde sur vos travaux, permet de
dgager une notion entirement nouvelle; elle ouvre le champ des
techniques d'interrogatoire ainsi qu' des horizons inconnus jusqu'
prsent. A la suite d'entretiens poursuivis avec un certain nombre
d'officiers de police, j'ai le sentiment que cette approche
produira un des rsultats les plus apprciables que l'on puisse
obtenir par l'application de la smantique gnrale. J'ajoute que
j'enseigne la mme matire aux forces de Police de Berkeley.Dans mon
cours sur les aspects psychiatriques de la criminologie, de
nombreux dbats fonds sur vos travaux sont inclus servant de mthode
pour nous faire voir pourquoi et comment les individus se
conduisent comme des tres humains et ce qu'il est possible de faire
ce sujet. Les tudiants sont tous enclins de la manire la plus
favorable adopter l'orientation de la smantique gnrale et j'espre,
d'ici un an ou deux, avoir labor un vritable programme de
travail.23Kelley,24sur le thtre des oprations en Europe durant la
seconde guerre mondiale, appliqua les principes de base de la
mthodologie non-aristotlicienne plus de sept mille cas. Le rapport
qu'il en fit constitue le sujet de son article "The Use of General
Sernantics and Korzybskian Principles as an Extensional Method of
Group Psychotherapy in Traumatic Neuroses" ["L'utilisation de la
smantique gnrale et des principes korzybskiens comme mthode
extensionnelle de la psychothrapie de groupe dans les cas de
nvroses traumatiques"] (15). Ces principes furent appliqus (sous
forme de thrapie individuelle et de thrapie de groupe) chaque
niveau de traitement depuis le front lui-mme jusqu'au plus arrire
des lignes, dans les postes de secours de l'avant, dans les centres
de repos et les hpitaux gnraux. "Qu'ils furent employs avec succs
est dmontr par le fait que sur le thtre europen des oprations les
vacuations effectues pour raison psychiatrique furent rduites au
minimum," affirme le Dr. Kelley (16, pp. vi-vii). "[Les] autres
techniques ont videmment une certaine valeur mais ces deux simple
procds [l'indication numrique et l'utilisation des dates] se sont
rvls remarquablement efficaces pour ce type de raction neurotique"
(15, p. 7).L'indication numrique et l'utilisation des dates sont
les principaux procds par lesquels la structure de notre langage
est rendue similaire celle du monde. Un exemple de leur effet peut
tre observ dans les ractions d'un ancien combattant de la guerre du
Pacifique. Cet homme tait un des lves du professeur Elwood Murray
l'Universit de Denver. Me rfrant au dossier du vtran, je cite:Un
exemple de pure identification est rvl dans le dgot de ce vtran
pour le riz. Sa premire vision d'un ennemi mort fut celle d'un
soldat japonais dont le cadavre tait en tat de dcomposition. Le sac
de riz qu'avait port ce soldat, s'tait dchir et des grains de riz,
rpandus sur son corps, se trouvaient mlangs avec des vers. Encore
jusqu' prsent, lorsque le vtran voit du riz, la scne dcrite plus
haut est revcue avec intensit et il voit en imagination les grains
de riz se dplacer dans son assiette. Pour surmonter sa rpulsion, il
a mang du riz plusieurs reprises en s'efforant de se rappeler que
le riz dans son assiette est diffrent de celui qui tait sur le
corps du Japonais. Quoiqu'il n'en mange pas avec plaisir, il a
russi surmonter son rflexe de nause la vue du riz (19, p. 262).Ces
mcanismes d'valuation ou de "perception" dessimilaritsd'une part,
de ngligence ou de prise de conscience incomplte des diffrences
d'autre part, sont potentiellement prsents dans chacun d'entre
nous, mais, d'habitude, pas des degrs si extrmes. Ils impliquent
l'absence de diffrenciation entre les niveaux silencieux et verbaux
ainsi que la non-conscience de nos processus d'abstraction. Les
diffrents ordres d'abstraction sont identifis, une infrence est
valuecomme sielle tait une description, une descriptioncomme sielle
tait l'"objet" non verbal construit par notre systme nerveux, et un
"objet"comme s'iltait le processus non verbal sub-microscopique et
dynamique.Dans nos travaux non-aristotliciens, nous traitons peine,
si toutefois nous en traitons, des "perceptions", en tant que
telles. Toutefois tant donn que nos attitudes sont invitablement
embringues avec nos "perceptions", il semblerait que l'tude de la
structure du langage devient en effet pertinente.Un grand nombre de
travaux ont t entrepris et sont encore poursuivis avec acharnement
pour rsoudre le problme des prjugs. L'analyse nous montre que les
mcanismes des prjugs comprennent des identifications des niveaux
verbaux avec des niveaux non-verbaux. Ceci veut dire qu'un individu
ou un groupe est valu en fonction de son tiquette et non en
fonction des faits extensionnels (26, pp. 17-28; 28). Dans une
discussion des mcanismes du prjug et dans un rapport sur son
enseignement de la smantique gnrale adress environ six cents
personnes, rapport dans lequel il mettait en vidence, d'une part la
confusion entre l'observation et les noncs infrentiels, et d'autre
part le fait de ragir aux tiquettes comme si elles dsignaient plus
que des aspects, etc., Lee expose une de ses dcouvertes de la faon
suivante:Les professeurs ont mentionn dans leur rapport une
rduction trs apprciable des tensions lorsque les tudiants en
vinrent appliquer ce qu'ils avaient entendu aux divergences
d'opinions profres durant les dbats. Les questions "pourrait-on
dsigner cela autrement?" "est-ce une infrence?" "est-ce que c'est
cela que l'on peut observer?" poses un lve qui avait fait une
dclaration premptoire, cra dans l'assistance une sorte d'atmosphre
de jeu. Un exemple typique entre beaucoup d'autres se produisit au
cours d'une discussion qui avait pour sujet ce que les gens ont
coutume de dire propos des noirs. Deux des participants les plus
vhments dans leurs affirmations que "les noirs ne tireront aucun
avantage de l'ducation mme si elle leur est rendue accessible"
furent amens examiner leurs assertions sans faire preuve de
l'antagonisme qui surgit des habituels dbats pour et contre (28, p.
32).Il est particulirement intressant de rflchir sur les mthodes
des illusionnistes qui, dans le seul but de divertir, ont
superbement dvelopp leur art, on peut mme dire leur science. Leurs
mthodes magiques font cependant preuve d'une profonde psychologie
fondamentale de la duperie, de l'auto-mystification et de la
suggestion trompeuse. Ils possdent leur propre littrature, d'une si
grande importance pour la psychologie, la psychiatrie et la vie
quotidienne.J'extrais de la communication du Dr. Douglas
Kelley25intitule "The Psycho-logical Basis of Misdirection: an
Extensional Non-aristotelian Method for Prevention of
Self-deception" ["La base psycho-logique de la ms-indication: une
mthode extensionnelle non-aristotlicienne pour la prvention de
l'auto-mystification"]. (14, pp. 53-60):Alors que l'artiste en
pratiquant ses tours de passe-passe n'hypnotise jamais son
auditoire, pas mme aux Indes, il obtient pratiquement les mmes
rsultats par son habilet crer des illusions et cela en dviant dans
une fausse direction les expectatives et les prsuppositions de son
auditoire. Par ce stratagme il peut faire que son public manque de
voir ce qui est devant ses propres yeux, ou encore qu'il voie ce
qui n'y est pas (p. 53) La croyance gnrale bien qu'inconsciente
dans les trois "lois de la pense" aristotliciennes joue un rle de
la plus haute importance dans le succs de ces ms-indications
puisqu'il existe une tendance gnrale de nos ractions se conformer
ces "lois".Par exemple, le Dr. Kelley explique:Supposons un chapeau
truqu avec un double fond; l'aide du revtement intrieur camoufl, il
peut tre prsent l'assistance comme un chapeau apparemment vide. Si
alors il est secou ngligemment dans tous les sens, on est convaincu
qu'il est vide ds lors que rien ne s'en chappe. Puisque,
conformment "la loi" bivalente "du tiers exclu", une chose
existante possde certaines "proprits" ou ne les possde pas, et
puisque, en accord avec cette loi, la plupart des gens s'attendent
voir des objets s'ils sont prsents dans un chapeau et les voir
tomber lorsqu'on le renverse, ils sont facilement dups par la
ms-indication qui leur est suggre et sont en consquence incapables
de prdire l'apparition du lapin que l'illusionniste tirera
ventuellement de son chapeau (p. 57).Les illusionnistes constatent
d'ailleurs que les enfants sont beaucoup plus difficiles mystifier
que les adultes tant donn que les implications structurelles de
notre langage n'ont pas encore limit un tel degr leur capacit de
"percevoir".La Circularit de la Connaissance HumaineLes processus
lectroniques ou lectro-collodaux oprent aux niveaux
sub-microscopiques. Du nombre indfini de