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Le management systémique de la complexité

Dec 15, 2022

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Giulia Sandri
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Management Systémique de la Complexité

Entreprise, Création et communication.

Le thème de ce livre est la mutation. Nous passons de l'âge industriel etcommercial à l'âge de la Création et de la Communication.

Comment se situe cette métamorphose par rapport aux précédentes dansl'évolution humaine ?

Quel est le rapport à la réalité que développe ce nouvel âge ?Comment les individus et les entreprises peuvent-il s'adapter à ce nouveau

contexte ?Cette étude s'attache à cerner les changements structurels radicaux en termes

technologique, économique, sociologique et psychologique. Plus profondément, ils'agit de l'émergence d'un nouveau rapport à la réalité et à la connaissance quiréintroduit les enjeux spirituels propres à l'humain.

Cette étude explore et fonde épistémologique-ment une méthodologie, voire unetechnologie, visant à dépasser la séparation binaire du sujet et de l'objet par unmodèle Holistique, Cognitif et Ontologique de relativité fractale.

"Une carte n'est pas un territoire mais nous n'avons que des cartes comme territoire."

Michel SALOFF intervient en tant que Conseil de Direction dans le domaine de la stratégie,management et de la communication. Les outils développés dans cette étude sont les bases de sonentreprise de conseil. A partir de 1985, il a organisé des séminaires de recherches pluridisciplinaires surle thème de la mutation en France au Centre de Prospective et d'Etudes et aux Etats-unis en Californie àUniveristy of California, Los Angeles (UCLA) et à J.F. Kennedy University, San Fransisco. L'essentiel de sesséminaires ont servi de base à cette étude. Michel SALOFF est un auteur multi-médias dans les oeuvresont donné lieu à diverses éditions, émissions de télévision et expositions notamment une rétrospectiveau Centre Georges Pompidou en 1983. Les recherches de Michel SALOFF sont diffusées depuis 1988 sousforme de séminaires de direction par Ile-de-France Formation Assistance (I.F.F.A.) 159, avenue deMalakoff, 75116 Paris, téléphone : 45 00 54 35).

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Remerciements

Liliane DROUAULT m'a fait rencontré Thierry GAUDIN, qui, le premier àofficialiser mes recherches en offrant un espace au sein du CPE pour lespoursuivre en 1985 sous forme de séminaires pluridisciplinaires autour duthème de la mutation.

Cinq ans après, c'est Jean Pierre QUIGNAUX et ADITECH avec une mise enforme de Hassane ABERKI qui publie les travaux commencés dans ces séminaireset continués par la suite en Californie à UCLA et à J.F. Kennedy University.C'est dire combien je dois aux équipes du CPE et d'ADITECH qui ont donné unespace d'existance à ces recherches hybrides qui mêlent la science, l'art etla spiritualité dans l'invention des possibles de l'homme.

Ce livre n'aurait pas pas pu voir le jour sans l'aide courageuse denombreuses personnes :

Partick MARANT, qui depuis quinze ans écoute, lit et me conseilleattentivement en supportant financièrement certaines recherches enfournissant l'ordinateur qui a permis la gestion des données.

Françoise VERNIS, qui m'a poussé à écrire et orienté dans mes recherches.

Vladimir ALTOWSKY, Bob AUBREY, Vincent BARDET, Jean BAUDRILLARD, PascalBAUDRY, Christophe BIDOT, Annie BLOCH, Thierry BRUHAT, Jean-Luc CADRANE,Carlos CASTANEDA, Jean-Louis CHASSET, Brice COUTURIER, Claude DELAFOSSE,Jean DELOUPY, Gilles DELEUZE, Raphaèl DEMANDRE, Marie DROUIN, MarilynFERGUSSON, Marie-Odile FOND, Partick FORET, Fred FOREST, ChristianFORTHOMME, Frank GAUTHEY, Alain GAUTHIER, Blaise GAUTHIER, Michel GIFFARD,Pierre GUIRAL, Marie-France GIRAUD, Michel GOURDIN,, Jean HAUTBERG,Christian JUND, Françoise LEEHNARDT, Guy LOINGER, Annabelle LOZOUET, ManfredMACK, Elisabeth MEICHELBECK, Fabienne MORRI, Jean-Paul PAULINIERE, Vincent-Pascal PELLOQUIN, Didier PFEFFER, François PLASSARD, Bernard RAQUIN, GilbertRENAUDIN, Joèl de ROSNAY, Danièle ROUSSEAU, Nicolas SALOFF, Florence SERVAN-SCHREIBER, Antoine VALABREGUE, Alain de VULPIAN, Andy WARHOL, FrédériqueWERNER qui ont, à un moment ou un autre, apporté des élèments décisifs dansle développement de mes recherches.

Je remercie tout particulièrement Fabienne MORRI qui a dactylographiébénévolement les quelques mille pages qui ont servi par la suite à lasynthèse finale.

Enfin un grand merci à ma famille et mes amis qui m'ont soutenu par leursympathie, leur encouragement et leur aide financière dans les périodesd'errance liée à la recherche et au développement.

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Sommaire

PREFACE1988 Horizon XXIème SièclePar Marie DROUIN..........................................4

INTRODUCTION GENERALELE JEU DES REALITES.......................................7

PREMIERE PARTIE:LA GRILLE DE L'EVOLUTION......................................13

INTRODUCTION A LA GRILLE DE L'EVOLUTION :UN OUTIL POUR COMPRENDRE.................................14

PREMIER CHAPITRECHASSE-CUEILLETTE........................................17

Dents et Ongles....................................17Osmose avec la nature..............................17Troc...............................................17Intuition. Animisme................................17Oral. Bouche à oreille.............................17Mythe. Tribu.......................................17Préhistoire. Temps circulaire......................17

DEUXIEME CHAPITREAGRICULTURE-ELEVAGE......................................19

Possession de Territoire...........................20Monnaie métallique.................................20Analogique. Monothéisme............................20Ecrit. Manuscrit...................................21Monarchie. Royaume.................................21Histoire Sacrée. Temps linéaire....................21

TROISIEME CHAPITREINDUSTRIE-COMMERCE.......................................23

Sens Viscères......................................23Disponibilité de capitaux..........................23Monnaie-Papier.....................................24Rationnel Scientisme...............................24Audiovisuel. Masse-médias..........................25Démocratie. Etat...................................25Histoire profane.Temps Homogène....................26

QUATRIEME CHAPITRECREATION-COMMUNICATION...................................27

Cerveau.Nerfs......................................27Maîtrise de l'Information..........................29Troc Informatique..................................29Holistique Spirituel...............................30Interactivité Informatique.........................32Sensibilités Réseaux...............................32Post-Histoire. Temps Fragmenté.....................35

CONCLUSION SUR LA GRILLE DE L'EVOLUTION:LA LUMIERE DU PASSE......................................37

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DEUXIEME PARTIE:LES CHAMPS DE REALITE.........................................40

INTRODUCTION AUX CHAMPS DE REALITE:UN OUTIL POUR AGIR.......................................41

CINQUIEME CHAPITRELES NIVEAUX DE REALITE...................................50

Le niveau vide.....................................50Le niveau turbulent................................50Le niveau formel...................................51

SIXIEME CHAPITREPRINCIPES DE STABILITE...................................55

Inclusion..........................................55Absorption.........................................56Exclusion..........................................57

SEPTIEME CHAPITREMODES D'EVOLUTION........................................58

Elevation..........................................58Apesanteur.........................................59Le Flottement......................................60

HUITIEME CHAPITREETAPES DE VIE............................................62

Début..............................................62Milieu.............................................63Fin................................................64

CONCLUSION SUR LES CHAMPS DE REALITELE POUVOIR DU PRESENT....................................66

TROISIEME PARTIE:LE DEVELOPPEMENT DES POTENTIELS...............................68

INTRODUCTION AU DEVELOPPEMENTDES POTENTIELS : UN OUTIL POUR CHANGER...................69

NEUVIEME CHAPITREL'INDIVIDUS..............................................73

Ouverture..........................................76Compétence.........................................79Cohérence..........................................81Créativité.........................................83

DIXIEME CHAPITRELES ENTREPRISES..........................................92

Diagnostique.......................................97Stratégie..........................................99Polarisation......................................102Tactique..........................................105

CONCLUSION SUR LE DEVELOPPEMENT DES POTENTIELS :LA LIBERTE DU FUTUR.....................................110

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CONCLUSION GENERALELA FIN DE L'HISTOIRE ET LE DEBUT DU JEU.................111

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Préface

1988 Horizon XXIème Siècle

par Marie DROUIN

1988, à l'horizon l'ère du XXIème siècle, un siècle dont on imagine les pireset les meilleures choses, un siècle où le progrès serait incessant et pressant, unsiècle dont nous ferons partie intégrante si dès aujourd'hui nous nous ypréparons.

Jamais les siècles se sont bousculés d'une manière aussi intense, l'èreindustrielle n'est déjà plus ce qu'elle était il y a vingt ans, il y a préambuled'un nouveau système relationnel que l'on englobe d'un terme générique, laCommunication.

Que se passera-t-il si nous ne nous donnons pas la chance de pouvoir faire cepas vers l'Age de la Création ? Nous serons des inadaptés, des marginaux et doncmalheureux. Le mal être engendre le négatif et nous met hors de portée de lacommunication.

Mais à l'inverse si nous nous mettons en état d'écoute de soi et des autres, sion se donne tous les moyens pour développer tout ce qui est en nous-mêmes, mêmenos talents jusque là occultes, alors nous deviendrons les héros du temps futur.

Tout conditionne actuellement notre présent et demain notre futur(environnement, santé physique, mentale et morale), aussi par une meilleurefaculté d'adaptation nous ne passerons pas à côté de l'Age de la Création et de laCommunication.

Comme notre ancêtre des cavernes avait besoin de ses griffes et de ses dentspour survivre, le paysan quelques mille ans plus tard avait besoin de sa charruepour se nourrir et nourrir la planète, l'homme de demain aura besoin d'aller loindans la communication, plus loin dans la création et avoir ainsi une visioninterplanétaire qui lui donnera des raisons d'exister.

Pour cela, il lui faut des outils. Ce travail est un parmi d'autres que chacundéveloppera selon sa propre nature.

Ce livre est une démonstration simple et synthétique de ce qui s'est passéjusque-là afin de mieux nous faire comprendre ce que nous allons vivre trèsprochainement.

Il est un outil pour l'individu, l'entreprise et l'état voire même la planète.Il inclut le savoir et la pédagogie.Pour conclure je pourrais dire qu'il est d'une humanité exceptionnelle.

Marie DROUIN, Journaliste FR314 Novembre 1987

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INTRODUCTION GENERALE

"Ce n'est plus, aujourd'hui, un comportement aberrant qued'élever son esprit jusqu'à penser l'avenir de l'espèce humaine.C'est devenu simplement indispensable pour conduire nos actionsquotidiennes."

Thierry GaudinDirecteur du Centre de Prospective et d'Evaluation.

Ministère de la Recherche et de l'Industrie FrançaiseLes Métamorphoses du Futur

Introduction générale

LE JEU DES REALITES

L'ENJEU

Jamais auparavant l'homme ne s'est trouvé en face d'un défi comparable.Ce n'est plus le destin d'une civilisation, ni même d'une race qui est en jeu,

mais le destin de l'humanité toute entière.

Nous avons les moyens technologiques de réaliser les plus vieux rêves del'humanité, mais aussi les pires cauchemars.

Nous avons conquis la liberté de définir notre destin. Il existe sous forme d'arme nucléaire la puissance requise pour anéantir le

globe plus de dix fois.La technologie nous donne la possibilité de concevoir et de réaliser dès

aujourd'hui une société planétaire sans misère où l'homme sera dégagé des tâcheslaborieuses auxquelles il a été enchaîné depuis toujours

L'homme se distingue des animaux par sa puissance créative et il est logiquequ'aujourd'hui, alors que l'évolution s'accélère, chacun puisse s'épanouir dansesa nature essentiel.

Nous n'avons guère le choix dans ce quitte ou double. L'inconscience nous emmène sûrement et rapidement vers l'holocauste.Nous nous sauverons par un élan de tout notre être au-delà des barrières

culturelles et des égoïsmes qui nous éparpillent et nous précipitent vers lenéant.

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La progression fulgurante des sciences et parallèlement la dégradation de lasituation planétaire prouvent qu'il n'y a plus de délai.

A travers le développement rapide des moyens de communication, nous vivons tousbranchés en direct cet ultime enjeu où les rêves et les cauchemars ancestraux del'humanité se réalisent parallèlement.

Nous vivons notre dernier combat, l'enjeux est nous même. Soit nous perdronstoute réalité, soit nous accéderons à l'essence de notre réalité.

A nous de choisir l'amour ou la mort.

Chaque jour, par les efforts que nous faisons dans le sens d'une pleine conscience de notre humanité, nous multiplions les chances de réussir.

Chaque jour, par notre laisser-aller dans l'inconscience, nous glissons vers lenéant.

Comment franchir le cap de la crise planétaire que nous traversonsactuellement?

- Deux tiers de l'humanité meurt de faim.- La surface du globe touchée par la guerre augmente sans cesse.- Chaque année une part plus importante de terre cultivée se transforme en

désert à cause de l'utilisation des engrais de synthèse.-L'ensemble de l'équilibre biologique de la planète dégénère.

Paradoxalement nous risquons d'être sauvés grâce à la fragilité même du systèmeéconomique sur lequel notre expansion s'est appuyée, et qui lui même atteint aujourd'hui son point de rupture.

Une faillite du système bancaire international a été souvent évoquée cesdernières années!

Nous sommes aujourd'hui confrontés à l'obligation de nous comprendre au delà à desbarrières liées aux races, aux civilisations et aux cultures.Le danger le plus immédiat pour chacun de nous est la disparition de l'espèce danssa globalité.

Ce livre essaye de mettre en valeur la nouvelle approche de la réalité qui se révèle aujourd'hui à travers la prise de conscience de notre devenir planétaire.

Après la Chasse-Cueillette, l'Agriculture-Elevage et l'Industrie-Commerce sommes-nous en train de basculer dans un nouveau type de société basé sur la Création et la Communication ?

En quoi notre situation actuelle est-elle spécifique comparée aux étapes précédentes du développement de l'Homme ?

De quels types d'outils avons nous besoin pour faire face au contexte actuel?Comment mettre en oeuvre ces outils pour aboutir à la paix et à l'harmonie

planétaire nécessaires à la survie de l'espèce ?.

LE TEMPS DU CHANGEMENT.

Aujourd'hui, rien n'est plus commun qu'une certaine anxiété devant l'évolution de plus en plus rapide de notre société.

La grande majorité des métiers de demain sont inconnus.

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La jeune génération changera en moyenne cinq fois de domaine durant sa vieprofessionnelle.

De plus en plus se creuse un écart dangereux entre ceux qui savent tirer parti du changement et ceux qui au contraire subissent le changement d'une manière négative et s'effondrent.

Le changement affecte les individus mais aussi les entreprises et les états.A chacun de ces niveaux, c'est la capacité d'innovation qui détermine

l'aptitude à tirer parti du changement.Ce livre est un outil pour aider à innover face au changement.

CHANGEMENT = DANGER + POSSIBILITÉS.

La réaction positive ou négative au changement dépend de la manière dont onl'envisage. Certains n'y voient que la multiplication de dangers, d'autresdes nouvelles opportunités. Le changement est en fait l'un et l'autre : danger etpossibilités.

Les états, les entreprises, les individus, en ne se concentrant que sur lesopportunités vivent une sorte de fuite en avant qui, bien qu'elle puisse paraîtrebrillante et pleine de succès, n'en accumule pas moins des problèmes non réglésqui, à terme, sont appelés à saper l'apparence de réussite.

A l'inverse, ne voir que l'aspect dangereux fait tomber dans un défaitismeaveugle et sans issue. Ceux qui ne voient dans le changement que la source de tousles problèmes s'enlèvent les moyen de trouver des solutions venant del'innovation.

UN OUTIL POUR AFFRONTER LES DANGERS ET SAISIR LES POSSIBILITÉS.

Le défi du changement est difficile à relever. Autrefois, les choses n'évoluantpas aussi vite, une solution technique pouvait être appliquée pendant de longuesannées tout en restant à la pointe du progrès. Aujourd'hui, les temps de vie dessolutions se sont terriblement raccourcis. De nombreuses solutions deviennentcaduques, le temps de leur diffusion.

Le monde a toujours changé, mais il semblerait qu'il change de plus en plusvite.

La rapidité n'est pas seule en cause, il y a aussi une complexité grandissante.Une langue comme le français produit chaque année sous forme de langage

spécialisé l'équivalent quantitatif des termes qu'elle utilise dans le langagecourant. Ainsi notre langue s'enrichit chaque année de l'équivalent d'une langueusuelle.

Un autre aspect de la complexité est le phénomène d'interdépendance multiple.Les spécialisations extrêmes, s'enfonçant comme des tunnels dans des secteursinconnus de la connaissance, finissent par déboucher sur d'autres spécialisationsformant de curieuses hybridations : biologie et informatique, physique etphilosophie, histoire et mathématique, etc... Nous avons affaire à unfoisonnement de connaissances de plus en plus spécialisées et interdépendantes.

Les problèmes que nous avons à affronter sont à l'image de nos connaissances,précis et sectoriels, comme l'énergie nucléaire, ils s'enracinent néanmoins dansla complexité multidimensionnelle de notre nouvelle société planétaire.

Le défi est difficile à relever. L'évolution est si rapide qu'elle ne laisseplus de temps à la réflexion. La complexité est si grande qu'aucune durée n'estsuffisante pour la comprendre. Nous devons revoir notre rapport réflexion-action.

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Le changement détruit nos points de repère, nos valeurs, et rend caduc lesvieux réflexes.

Pourtant, rien de plus nécessaire que d'être pertinent face à l'actualité.La tension monte créant une grande vague prête à éclater. Cette vague peut nous

engloutir. Mais c'est aussi une source d'énergie fabuleuse pour nous propulser.Encore faut-il avoir une planche pour surfeur et jouer avec cette

vague,.affronter les dangers et saisir les possibilités. Ce livre est cet outil. Ala complexité, il répond par la simplicité et fournit les clés qui ouvrent à la compréhension du changement.

L'ERREUR DES RECETTES.

Les bouleversements apportés par le changement ont suscité un foisonnement derecettes. Dans le domaine de la gestion d'entreprise, il suffit d'ouvrir unjournal spécialisé pour trouver un catalogue de recettes en réponse aux problèmesposés par l'actualité. La même tendance se retrouve démultipliée au niveau desindividus, avec parfois une exploitation éhontée de ce phénomène.

Il y a recettes et recettes, certaines sont assimilables aux coups de massuequi règlent le problème et la douleur par perte de la conscience; d'autres sontune ouverture locale à court terme intéressante. Cependant une recette consiste àsuivre mécaniquement des directives préétablies et constitue finalement une prisonet un aveuglement face aux dangers réels.

Chaque situation est particulière. La recette est une solution prêt-à-porter ets'ajuste mal. Il faut du sur mesure.

Les choses évoluant de plus en plus vite, l'élaboration d'une recette et de sadiffusion prenant du temps, les recettes deviennent caduques avant de pouvoir êtreutilisées.

Plus que jamais les recette sont aujourd'hui de mauvaise solutions.Ce livre n'est pas une recette. Là où les recettes offrent un parcours fléché,

il propose une carte. A vous et à vous seul ensuite de décider de votre chemin etde votre but.

Première partie : LE PASSÉ. LA GRILLE DE L'EVOLUTION.

Une manières de maîtriser son présent et son futur consiste à tirer le maximumd'enseignements du passé.

Pour comprendre et anticiper sur les grandes tendances actuelles, nous devonsconnaître leur origine et leur plus ou moins grand enracinement dans le passé.Sans une connaissance approfondie et claire dans ce domaine, il est difficile dedistinguer la répétition de l'émergence d'éléments nouveaux. Il est difficile dedistinguer une tendance légère et sans lendemain d'une tendance lourde dontl'enracinement dans l'histoire garantit une développement et une continuité.

Ce regard dans le rétroviseur de l'histoire peut nous permettre de mesurerl'ampleur de la rupture que nous sommes en train de vivre. Le premier outil estune grille de l'évolution.Le mot "grille" est à prendre au sens propre et figuré. En effet cette premièrepartie peut apparaître sous forme de grille dans laquelle sont positionnés lesdifférents temps forts et activités de l'humanité. Mais c'est aussi une grille dedécryptage. "La Grille de l'Evolution" dévoile les grandes tendances del'humanité.

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Deuxième partie : LE PRÉSENT. LES CHAMPS DE RÉALITÉ.

Forts d'une vision globale du passé, nous pouvons saisir la spécificité duchangement actuel et offrir un outil adapté. Le deuxième outil : "Les Champs deRéalité", est une grammaire de la réalité présente.

Les fondements de cette grammaire sont vieux comme le monde, mais ce qui estnouveau, c'est la manière de la présenter et de l'expliquer pour la rendretransparente.

En un temps très court de lecture, on trouve une série d'outils s'articulantles uns avec les autres. Si on apprend à les utiliser, ils sont d'une efficacitéremarquable dans la vie.

Ces outils servent simultanément à explorer le domaine de la conscience et àconquérir une efficacité plus grande dans la vie quotidienne.

Le concept de champ de réalité réunifie le monde intérieur et le mondeextérieur. Dans cette deuxième partie du livre, nous apprenons à interagirsimultanément sur ces deux niveaux habituellement séparés et à conquérir unemeilleure harmonie.

Ces mêmes outils peuvent être appliqués non seulement au niveau individuel maisaussi dans le cadre d'une entreprise, d'un état ou de la planète toute entière.

Troisième partie : LE FUTUR. LE DÉVELOPPEMENT DES POTENTIELS

Quand on a compris comment s'articule le présent, on peut dégager desperspectives futures qui soient positives. Nous explorons dans cette troisièmepartie les possibilités qu'offre le développement des potentiels pour chacun denous, mais aussi pour les entreprises, la vie en société et la planète.

De même que "La Grille de l'Evolution" décrypte notre passé, "Le Développementdes Potentiels" éclaire l'avenir.

Cette dernière partie du livre donne des points de repère majeurs quant auxévolutions futur. Ainsi, nous pouvons mieux nous positionner, mieux affronter lesdifficultés et tirer parti des nouvelles possibilités.

Nous pouvons distinguer les routes, aujourd'hui larges mais sans issue, deschemins à peine tracés, appelés à devenir les grandes voies de demain. Enanticipant sur le futur, chacun se met en position d'échapper au mieux au dangerdu changement, tout en étant en parfaite situation pour être parmi les premiers àpouvoir utiliser les ouvertures nouvelles.

LA BOÎTE À OUTILS ET SA PRATIQUE.

Nous avons essayé d'écrire ce livre le plus clairement possible afin que lesprincipes de base en soient saisis en quelques heures de lecture.

Cependant, la compréhension profonde de ces principes est directementproportionnelle à la pratique que l'on en a. Bien que ce livre soit un outilsimple, on ne peut bien en saisir les possibilités qu'au fur à mesure d'unepratique conséquente. A défaut de quoi, la lecture reste très superficielle.

En rester au niveau du livre correspond à peu près à lire un mode d'emploi sansjamais utiliser la machine qu'il décrit. Un surf est un outil très simple,pourtant, savoir s'en servir dans les vagues requiert une longue pratique.

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Première partie

LA GRILLE DE L'EVOLUTIONLA LUMIERE DU PASSE : Un outil pour comprendre

"Les sociétés humaines ont connu quatre révolutions distinctes, quiont chacune entraîné une mutation totale du caractère des échangessociaux : la parole, l'écriture, l'imprimerie et maintenant, lestélécommunications. Chaque révolution est associée à un mode de viespécifique déterminé par le stade technologique atteint.

La parole a été un élément essentiel pour les chasseurspréhistoriques : les signaux verbaux ont permis aux hommes d'agir deconcert dans des chasses collectives L'écriture a été à la base despremiers regroupement urbains dans une société agricole : elle a permisl'établissement de documents et la transmission codifié de connaissanceset compétences. L'imprimerie a été le fil directeur de la sociétéindustrielle : elle a été à l'origine de l'éducation de masse. Les télécommunications (du grec tele, c'est-à-dire à distance), concrétisées par descâbles, la radio, le télégraphe, le téléphone, la télévision etmaintenant de nouvelles technologies, vont probablement créer unesociété de l'information."

Daniel BellProfesseur de sociologie à l'Université Harvard

Président de la Commission de l'an 2000 de l'Académie of Art and Sciences(L'avenir : la société de communication...Harvard-L'expansion/hiver 79-80)

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INTRODUCTION A LA GRILLE DE L'EVOLUTIONUN OUTIL POUR COMPRENDRE

La grille de l'évolution est un outil pour comprendre.

Comment sommes-nous arrivés à la situation actuelle ?Quelles sont les caractéristiques de notre époque ?Quelles sont les tendances à venir ?

L'humanité a connu de grandes ruptures dans son évolution.Est-ce que ces ruptures sont des faits rares ou au contraire fréquents ?Peut-on dégager une régularité dans cette fréquence ?Sommes-nous en train de vivre une véritable rupture ou au contraire le plein

développement de tendances existant depuis longtemps ?Il est difficile de répondre à ces questions, du fait que nous voyons tout de

notre propre culture.

Les cultures ont une grande habilité à s'ignorer les unes les autres, à sedévaloriser. Parce qu'elles sont les grilles de déchiffrement du monde, elles sontl'origine de notre rapport à la réalité.La question de savoir quelles sont les grandes étapes qu'a traversé l'humanité enpose une autre :

A partir de quelle culture nous situons-nous ?Ce qui, pour certaines cultures, est une fin, est pour d'autres un

commencement. Certaines dates sont capitales dans la culture X et totalementignorées dans la culture Y, c'est tout le problème du découpage de l'histoire.

Ce découpage est sans doute encore plus révélateur de nous-mêmes que d'unequelconque réalité objective.

L'activité dominante.Une manière de pallier le problème du découpage historique consiste à

construire ce découpage sur les modifications dans l'activité dominante.Par "activité dominante", nous entendons l'activité qui occupe la plus grande

part de l'humanité à un moment donné.Pendant près de trois millions d'années l'activité dominante de l'homme a été

la Chasse et la Cueillette.Agriculture et Elevage s'imposent ensuite pendant trente mille ans et font

place, il y a trois cents ans, à l'Industrie et au Commerce.Enfin, aujourd'hui se répandent la Création et la Communication, domaines dans

lesquels travaillent un peu plus de 50% de la population active américaine.Dans la mesure où une activité engage la plus grande part des forces de l'homme

à un moment donné, elle devient le fondement des valeurs qui animent la société.Les valeurs d'un chasseur-cueilleur qui doit se déplacer rapidement à la

poursuite des saisons et des animaux sont différentes des valeurs d'un éleveur-cultivateur qui doit protéger son territoire et y rester attaché à chaque instant.

Une activité menée pendant plusieurs années tout au long de la journée finitpar développer ou atrophier certains de nos sens.

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Ce n'est pas seulement les valeurs qui se forment à partir de l'activitédominante, c'est aussi notre plus ou moins grande sensibilité à certainesdimensions de la réalité, notre perception de la réalité.

Chaque fois que l'humanité a changé d'activité dominante, ses outils, samanière de penser, sa manière de percevoir, de s'organiser, d'échanger, decommuniquer se sont trouvés transformés.

La grille.Réfléchir sur l'histoire est utile pour aboutir à un outil concret qui puisse

nous aider dans le présent. Cet outil, c'est une grille qui offre une vue synoptique, claire, de

l'évolution de l'histoire et du changement actuel.Nous avons divisé l'évolution de l'humanité en quatre étapes : Chasse-

Cueillette, Agriculture-Elevage, Industrie-Commerce, Création-Communication.

Chaque étape correspond à un changement dans l'activité dominante despopulations les plus avancées téchnologiquement.

Ces quatre étapes se déroulent chronologiquement dans le temps et à chacune onpeut faire correspondre une durée approximative:

- Chasse- Cueillette : 3 000 000 d'années.- Agriculture-Elevage : 30 000 ans.- Industrie-Commerce: 300 ans.- Création-Communication: ?

Afin d'analyser les caractéristiques de chaque étape et l'évolution de laculture et des valeurs correspondantes, nous avons défini sept domainescaractéristiques:

OUTIL : Evolution des outils en tant qu'extériorisations et prolongations de nos

fonctions organiques.

POUVOIR :Evolution du facteur déterminant le pouvoir matériel et social .

ECHANGE :Evolution dans les moyens utilisés pour échanger des biens.

RÉFLEXION :Evolution dans la manière de réfléchir et de comprendre la réalité.

COMMUNICATION :Evolution dans la manière de communiquer.

ORGANISATION :Evolution dans la manière de s'organiser en société.

HISTOIRE :Evolution dans la manière d'appréhender le temps et l'histoire.

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En croisant les Activités Dominantes et les Domaines Caractéristiques, nousobtenons une grille.

Elle est constituée de huit colonnes verticales correspondant aux DomainesCaractéristiques et de quatre colonnes horizontales correspondant aux ActivitésDominantes.

L'ensemble aboutit à un damier de vingt-huit cases que vous pouvez découvrirpage suivante.

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Premier Chapitre

CHASSE-CUEILLETTE

Trois millions d'années

Durant trois millions d'années, l'activité dominante de l'homme a été la chasseet la cueillette.

Nous avons affaire à une multitude de micro-cultures peu perméables les unesaux autres, nomades, et diversifiées.

Il est intéressant de comparer le bassin méditerranéen, creuset dudéveloppement de l'agriculture, et le continent américain où ont pu subsisterjusqu'à la colonisation la chasse et la cueillette.

D'un côté une civilisation, celle du bassin méditerranéen, reposant sur une oudeux langues souches et quelques centaines de dialectes, de l'autre côté lecontinent américain, avec plusieurs centaines de langues souches et plusieursmilliers de dialectes.

La chasse et la cueillette amènent une vie en groupes de taille modeste.L'humanité est divisée en une multitude de tribus nomades et diversifiées.

DENTS ET ONGLES.Quand on se promène dans un musée de préhistoire, on voit s'aligner des centainesde silex taillés, et on ne peut s'empêcher d'y voir la forme de nos dents et denos ongles. Les silex taillés sont des dents et des ongles extériorisés etmagnifiés.

Ils sont les prolongements et les extériorisations de nos organes prédateurs,les ongles et les dents.

OSMOSE AVEC LA NATURE.Le pouvoir dans la chasse et la cueillette dépend de la plus ou moins grande

capacité à vivre en osmose avec la nature.

TROC.

L'échange des biens se fait à travers le troc ou plus subtilement à travers desdons et des contre-dons ritualisés par la coutume.

INTUITION. ANIMISMELe chasseur-cueilleur réfléchit de manière intuitive. Il s'identifie à ce qu'il

contemple.Ce type de réflexion correspond à l'Animisme, les événements, les objets et les

êtres sont les manifestations de différents esprits.

ORAL. BOUCHE À OREILLE.

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La communication est orale. Le bouche à oreille constitue le média decommunication.

MYTHE. TRIBU.C'est la croyance dans le même mythe qui rassemble les individus dans la tribu.Le mythe initie l'individu à l'osmose avec la nature.Le mythe est l'essence de l'intuition qu'a la tribu des esprits qui agissent

dans la nature. Le mythe, et les coutumes qui y sont liées, organise le pouvoir àl'intérieur de la tribu.

PRÉHISTOIRE. TEMPS CIRCULAIRE.La tribu ne garde pas de trace des événements passés, il n'y a pas d'histoire

événementielle.Le mythe transmis fidèlement de génération en génération anime le cycle des

saisons et des événements.Le temps est circulaire.

Le mythe prend des formes les plus diverses d'une tribu à l'autre ; cependant,les caractéristiques fondamentales ne changent pas.

Le mythe est détaché du temps, il ne s'incarne pas dans le temps. Le mytheconstitue la loi du temps présent qui est toujours là, il n'a pas d'origine et pasde fin. Il est immuable. Il nomme l'origine de toute chose.

Dans des sociétés tribales, le mythe est considéré comme l'histoire vraie acontrario de "l'histoire fausse" qui est ce qui arrive tous les jours. Ainsi lerapport à la vérité est inversé par rapport à ce que considérerait un Occidentalregardant la tribu.

Pour le Chasseur-Cueilleur tous les événements de la vie quotidienne ne sontque des empreintes du mythe originel qui tourne sur lui-même en incarnant letemps. Ainsi les événements de la vie quotidienne n'ont que peu d'intérêt, on necherche pas à compter les jours ni à garder la mémoire de chaque événement commenous avons appris à le faire dans la civilisation occidentale.

La société tribale nous semble détachée du temps. Elle compense sa mobilitédans l'espace par une fidélité immuable à son mythe originel. Les mêmes rites sontrépétés d'année en année pour célébrer ce mythe et rassembler le groupe. Le rituelle plus parfait est celui qui innove le moins et ressemble le plus à l'événementoriginel.

Une grande exposition sur l'art australien a circulé dans le monde voiciquelques années. A côté des artistes contemporains, l'art des aborigènes a étéprésenté. D'un côté un art dont le but est d'innover un maximum, de l'autre lesmêmes signes et les mêmes gestes depuis des millénaires dans une recherche de lafidélité la plus totale.

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Deuxième chapitre

AGRICULTURE-ELEVAGE

Trente mille ans

L'Agriculture et l'Elevage amènent la sédentarité. L'espace cultivé s'imposelentement sur l'espace sauvage.

L'humanité se regroupe en ensembles hiérarchiques de plus en plus vastes.

Après près de trois millions d'années de chasse et de cueillette, l'hommeintroduit l'agriculture et de l'élevage.

Comment une telle métamorphose a-t'elle pu être possible ?Car, en y regardant de plus près, quel gouffre entre les deux pratiques.D'une part, un chasseur-cueilleur dont la condition de survie est la mobilité

lui permettant de se déplacer avec le gibier et les saisons, d'autre part unagriculteur-éleveur dont la condition de survie est au contraire la délimitationd'un territoire fixe et sa protection.

Le Chasseur-Cueilleur ne vit que grâce à une immersion dans la nature sauvagequi lui permet de la comprendre et d'en tirer parti.

L'agriculteur crée une scission définitive entre nature sauvage et naturecultivée.

L'homme qui s'effaçait devient l'homme qui s'inscrit : nécessité de tenir uncompte des jours, de la surface du territoire, du nombre de graines que l'onreplantera ou que l'on utilisera pour la consommation. Apparaissent pour lapremière fois les nombres écrits et avec eux l'écriture toute entière. Noussortons du mythe et nous entrons dans l'histoire.

On peut se poser la question de savoir ce qui a pu rendre possible un telchangement. Il est intéressant de constater dans le bassin méditerranéen que le passage de laChasse-Cueillette à l'Agriculture-Elevage est marqué par la période charnière detrois grandes glaciations. En fait, la perfection de l'outillage liée à la Chasse-Cueillette culmine avant ces glaciations pour régresser paradoxalement ensuite :la taille des silex redevient beaucoup plus frustre.

Ainsi, la culture et la connaissance du chasseur-cueilleur se perdent petit àpetit, tandis que l'agriculture et l'élevage n'en sont encore qu'à leursbalbutiements.

BRAS ET JAMBES

Les outils agraires sont les extensions spécialisées de nos bras et de nos jambes.

L'énergie du bœuf et la lame de la charrue remplacent nos bras et nos jambes dans le labourage de la terre.

Avec l'agriculture et l'élevage commence la grande époque des outils et dudéveloppement de l'outillage.

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Si nous reprenons notre promenade dans un musée et que nous quittons ledépartement de la préhistoire, rempli de silex taillés, nous accédons alors audépartement du début de l'histoire et un des premiers objets que nous y voyons estun pot en terre. Ce pot est comme deux mains réunies pour contenir.

Apparaît bientôt la première roue.

Possession de Territoire.

Dans l'Age de l'Agriculture et de l'Elevage, le pouvoir est déterminé par lapossession de territoires.

C'est la possession de territoire qui détermine la surface cultivée et laquantité de biens produits.

Avec l'agriculture, le pouvoir matériel n'est plus directement lié à lapuissance physique d'un individu. Le pouvoir matériel est désormais directementproportionnel à la surface du territoire possédé et cultivé. La culture pouvant sefaire par l'entremise d'une main d'oeuvre.

Il devient important de protéger son territoire contre le retour à l'étatsauvage mais aussi contre d'éventuels envahisseurs.

Monnaie métallique.

Les biens s'échangent par l'intermédiaire de la monnaie métallique frappée àl'effigie du représentant du territoire.

Avec l'agriculture, la pratique du troc tend à disparaître grâce à l'apparitionde denrées n'ayant plus seulement une valeur d'usage mais aussi une valeurd'échange. Les métaux précieux et l'or en particulier sont de bons exemples, maisaussi d'autres matières inattendues comme le sel. Cette tendance à chercher unintermédiaire à l'échange aboutit à la création de la monnaie métallique par lespossesseurs de vastes territoires.

Analogique. Monothéisme

L'Age de l'Agriculture et de l'Elevage introduit la réflexion analogique.L'intuition primitive n'est plus utilisée directement mais pour trouver desanalogies entre les différents règnes : humain, animal, végétal, cosmique, etc...

L'homme appréhende la réalité à travers une série de cercles analogiquesconcentriques dont il est le centre.

Cet homocentrisme hiérarchique correspond au monothéisme : un Dieu unique,créateur et animateur du monde dont l'homme est l'image analogique et lamanifestation sur la Terre.

Avec le développement de l'agriculture et de l'élevage et l'apparition desnombres et de l'écriture, l'homme cesse d'avoir un rapport uniquement intuitif àla réalité. La réflexion analogique tisse des comparaisons entre les différentssous-ensembles qui constituent la réalité. Comparaison entre le règne minéral etle règne végétal, comparaison entre le règne végétal et le règne vivant,comparaison de l'homme avec l'univers. La réflexion par analogie sert de fondementà la médecine, à la philosophie, à l'architecture, etc...Microcosme intérieur et

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macrocosme extérieur sont mis en liaison analogique à travers l'astrologie quipréside à l'art de l'Agriculteur-Eleveur traditionnel.

De même que l'animisme dans son rapport intuitif et immédiat à toute chose atendance à découvrir une âme, un "dieu" dans chaque chose, la pensée analogiquereconstruit par cercles concentriques le monde autour de l'homme et finit parprojeter à l'origine de cette harmonie un surhomme, père de cette harmonie, leDieu du monothéisme.

Ecrit. Manuscrit.

Le moyen de communication caractéristique de l'Age Agriculture-Elevage estl'écrit.

Le média de transmission est le manuscrit sur des matériaux divers : pierres,peaux, papyrus, parchemins, papier.

Monarchie. Royaume.

C'est assujettissement à une même monarchie qui rassemble les individus dans leroyaume. La monarchie permet à ses sujets la jouissance du territoire.

Le monarque représente analogiquement Dieu dans le royaume.

La structure d'organisation de l'étape Agriculture-Elevage se cristallise dansla structure monarchique du royaume. Le roi est le représentant du divin sur leterritoire qu'il a conquis; exemple de la pensée analogique : "le roi est à sonroyaume ce que Dieu est au monde". Il a tous les pouvoirs : le territoire luiappartient en propre et détermine sa royauté.

Histoire Sacrée. Temps linéaire.

Avec l'écriture et le manuscrit apparaît le moyen de garder des traces desévénements historiques.

Au conte mythologique qui continue à être transmis de bouche à oreille vients'ajouter l'histoire écrite de l'homme en tant qu'incarnation sur la Terre deDieu.

Le temps devient linéaire avec une origine et un déroulement événementiel versle futur. Cependant, ce déroulement n'est pas homogène, il s'accélère ou seralentit et se colore différemment suivant les époques.

Seuls les événements à caractère sacré sont réellement pris en compte.L'écriture de la Bible est caractéristique de l'Age de l'Agriculture et del'Elevage.

L'histoire des événements profanes reste lacunaire et ne prend son essor quedans l'étape Industrie- Commerce.

Le mythe est encore utilisé pour expliquer l'origine, mais cette origine cessede se refermer sur elle-même. Désormais l'origine s'incarne dans le temps àtravers l'histoire sacrée.

La Bible est "le Livre" par excellence. Avec la Bible, le mythe cesse d'êtrecirculaire. L'histoire a un début, Adam et Eve, et se développe par enchaînements

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successifs jusqu'au moment présent qui devient lui-même part entière de l'HistoireSainte. Dieu s'incarne dans le temps.Mais les hommes durant cette époque ne s'intéressent guère aux événementsprofanes. L'histoire, qui cesse d'être circulaire pour devenir linéaire, n'enreste pas moins sacrée.

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Troisième chapitre

INDUSTRIE-COMMERCE.

Trois Cent Ans

Il y a environ trois cents ans se développent l'industrie et le commerce aupoint de devenir l'activité dominante de l'homme.

L'Industrie et le Commerce amènent la mondialisation. L'ensemble despopulations du globe deviennent interdépendantes.

Les hommes se regroupent dans l'espace artificiel des villes.Il est intéressant de caractériser cette époque par le phénomène de duplication

: duplication de l'écriture par l'imprimerie, duplication de la valeur par lamonnaie-papier, duplication des matériaux par le plastique, duplication des objetsde consommation grâce aux machines.

La rareté est partout remplacée par la quantité. Nous entrons dans l'Age de laproduction de masse.

Sens Viscères.

Nos viscères transforment la nourriture en énergie et en produits consommablespar le corps. De la même manière, les usines utilisent la matière première pour latransformer en énergie et en produits de consommation.

Les infrastructures industrielles sont l'extériorisation et le prolongement auniveau social de nos fonctions viscérales.

Les caméras, les micros, les télescopes, les radars, les thermomètres, tous lesobjets de mesure, d'observation, d'enregistrement et de transmission sont autantde prolongements de nos sens, d'extériorisations excroissantes qui nous permettentde découvrir le monde au-delà de notre perception ordinaire.

Avec l'Age Industriel, ce sont tous nos organes internes qui s'extériorisent.Usines chimiques qui transforment la matière à travers la circulation de longsboyaux, tout comme notre estomac. Circuits électriques qui sont autant de nerfssensibles. Caméras qui sont autant d'yeux pour nous faire voir le monde.

Tout comme les organes internes du corps, l'Age Industriel puise dans lesressources naturelles l'énergie nécessaire à son travail.

Disponibilité de capitaux.

Dans l'Age de l'Industrie et du Commerce, le pouvoir est facteur dedisponibilité de capitaux.C'est la disponibilité de capitaux qui détermine la capacité industrielle et doncla quantité de biens produits.

Un des phénomènes les plus difficiles à comprendre pour les grands possesseursterriens a sans doute été de voir apparaître des individus détachés de touteterritorialité mais pourtant à la tête de fortunes colossales. Avec le

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développement de l'industrie et du commerce, le pouvoir cesse petit à petit de semesurer à la possession d'un territoire.

Monnaie-Papier.

Les biens s'échangent à travers la monnaie-papier émise par l'Etat qui engarantit le capital et la convertibilité.

Parallèlement au développement du monde industriel, nous assistons àl'expansion, tout d'abord hésitante mais finalement radicale, de la monnaiepapier. L'or n'est plus qu'une référence. C'est le papier qui permet de fairebasculer le pouvoir du côté de la possession de capitaux. Les monnaies papiersn'ont aucune valeur d'usage, leur seule valeur vient de l'échange.

Ainsi pour la première fois, valeur d'échange et valeur d'usage se séparentcomplètement. Pendant longtemps, le papier ne reste clairement qu'une contre-valeur garantie par de l'or ou un bien quelconque, donc en quelque sorte indexésur une valeur d'usage. Mais avec la désindexation du dollar à l'or sous Nixon,les monnaies prennent définitivement leur envol au-delà de toute valeur d'usage,pour ne plus s'indexer entre elles que comme valeur d'échange; en fait, ellesconquièrent une sorte de valeur d'usage qui est leur valeur d'échange elle-même.

La valeur des monnaies papier n'est plus fonction que d'une notion abstraite et"psychologique" de puissance ou "réalité" économique des pays qui l'émettent.

Rationnel Scientisme.

L'Age Industriel et Commercial introduit la pensée rationnelle. A travers undécoupage analytique de plus en plus fin, le rationalisme a pour objectifd'expliquer les phénomènes pratiques par des concepts théoriques enchaînéslogiquement de cause à effet.

L'analogie n'est plus utilisée pour relier les différents règnes de la nature,mais pour relier les phénomènes pratiques à leur explication par des conceptsthéoriques.

L'homme appréhende la réalité comme un vaste mécanisme rationnel.Cette vision matérialiste correspond au scientisme.L'homme croit que la science est la source du progrès et que toute réalité peut

être expliquée scientifiquement.

Avec l'Industrie et le Commerce, la pensée analogique est petit à petitreléguée au magasin des Antiquités. La science et les arts, liés à la penséeanalogique, sont déconsidérés et ne sont plus cités en exemple que pour montrerl'obscurantisme médiéval.

Avec l'Age des Lumières, l'humanité bascule dans un nouveau type de réflexionqui devient la base de la science moderne. On peut caractériser ce type deréflexion par l'idée de rationalité qui préside à son élaboration. En fait, de lamême manière que la pensée analogique utilise l'intuition pour tisser descomparaisons entre des champs de réalité différents, de même la pensée rationnelleutilise le principe de l'analogie en mettant en correspondance un champ de réalitéavec un système théorique qui révèle les causes à effet qui animent ce champ deréalité.

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De même que l'Age Industriel et Commercial ne rejette pas l'agriculture maisl'utilise d'une manière différente, de même la réflexion rationnelle garde lesapports de la réflexion analogique et intuitive pour les utiliser à d'autres fins.La pensée intuitive est utilisée au moment de la création de la théorie pouressayer de dégager une structure signifiante à partir des phénomènes concrets. Lapensée analogique est constamment utilisée pour mettre en rapport les événementsdans la pratique et leurs causes dans la théorie.

La réflexion analogique amène l'abandon de l'animisme et développe la tendancevers un monothéisme.

La réflexion rationnelle, parce qu'elle tente d'appréhender la réalité commeune vaste mécanique animée de causes à effets et appréhendable par le rationnel dela théorie scientifique, retire Dieu de la réalité. L'homme de l'Age del'Industrie et du Commerce met sa foi avant tout dans le rationnel scientifique.

Le monothéisme a tendance à se transformer en athéisme.

Audiovisuel. Masse-médias.

Les moyens de communication caractéristiques de l'Age de l'Industrie et duCommerce sont tous les supports visuels et auditifs diffusés par les masse-médias.

Démocratie. Etat.

C'est le fait d'être citoyens d'une même démocratie qui rassemble les individusdans l'état. La démocratie garantit aux citoyens la propriété de son capital.

La démocratie gère rationnellement l'état et en organise le pouvoir.

Le grand type d'organisation de l'Age Industriel est l'état démocratique. Dèsl'instant où le pouvoir cesse d'être lié à la possession du territoire, l'ancienneclasse de grands propriétaires terriens au pouvoir est obligé de laisser la placeaux industriels et commerçants qui ont besoin de constituer l'état démocratiqueafin de garantir les libertés mais aussi les droits du propriétaire nécessaires àl'Industrie et au Commerce.

Histoire profane. Temps Homogène.

L'approche scientifique permet de constituer une histoire de plus en plusdétaillée de l'histoire humaine. L'histoire cesse de ne s'intéresser qu'auxévénements sacrés et tente de prendre en considération tous les aspects de la vie.

Le temps dans la vision scientifique de l'histoire n'est plus un continuumlinéaire avec un début et une fin et des colorations différentes suivant lesmoments comme l'avait conçu l'histoire sacrée.

Le temps devient un continuum neutre, homogène, sans début ni fin, sanscaractéristique locale, partout égal à lui-même et découpé en unitésuniverselles : minutes, secondes, etc...

L'agriculture et l'élevage avaient inventé l'histoire linéaire sacrée.L'industrie et le commerce, à travers la science, introduisent l'histoire linéaireprofane.

Page 28: Le management systémique de la complexité

En fait, le temps de la science ne fait que radicaliser le temps de lareligion. Désormais, ce ne sont plus seulement les événements d'ordre divin quisont pris en compte, mais bien tous les détails de l'histoire humaine.

A partir du XVIIIème siècle, l'humanité découvre le monde à travers lesprincipes d'un espace-temps linéaire et homogène dans lequel vient s'inscrire lagrande mécanique du monde dont il faut essayer de comprendre tous les rouages.

L'histoire elle-même tente de se fonder comme une science révélatrice desmécanismes du réel. La recherche historique s'intéresse finalement à tous lesaspects de la vie, tente de collecter des informations sur toutes les cultures.

Dans un élan encyclopédique, l'histoire vise l'universel.

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Quatrième chapitre

CREATION-COMMUNICATION.

L'Age de la Création et de la Communication amène la délocalisation;Les systèmes de communication interactifs permettent aux individus d'échanger,

de communiquer, de travailler en temps réel avec n'importe quel point de laplanète.

Les hommes se regroupent dans des réseaux de sensibilité sémantique.

De même que la vague Industrielle-Commerciale a transformé dans le sens del'industrie et du commerce l'agriculture et l'élevage, la nouvelle vague deCréation et Communication est en train de radicalement changer l'industrie et lecommerce eux-mêmes.

L'industrie, en se robotisant, se libère de la main-d'œuvre humaine et acquiertune souplesse qui amène une croissance constante des postes de création et decommunication.

L'usine n'était qu'un organe massivement transformateur, elle devient unsystème nerveux qui pilote une production de plus en plus diversifiée et subtile.

A mesure que la production matérielle est prise en charge par des robotssophistiqués et souples, l'activité dominante de l'homme se réfugie dans lesdomaines qui lui sont spécifiques, c'est-à-dire la Création et la Communication.

Notre époque recèle à elle toute seule plus de savants que toute l'histoirehumaine n'en a connus.

La création de produits à la valeur essentiellement immatérielle et leurcommunication est appelée désormais à devenir la grande occupation humaine.

Si la duplication a caractérisé l'Age Industriel et Commercial et si cephénomène de duplication reste aujourd'hui encore important, il n'est sans doutepas la caractéristique la plus importante de notre temps. Au contraire, onpourrait dire que le phénomène de consommation de masse est désormaiscontrebalancé par le développement de l'interactivité.

L'interactivité permet à terme aux consommateurs de dessiner un objet surmesure et de le commander directement à une usine qui, grâce à la souplesse de sesrobots, pourra fournir sans coût excessif cet objet pourtant unique.

De même dans le domaine de la communication, l'interactivité permet une libertéd'expression des individus de plus en plus grande. Ils ne sont plus des récepteurspassifs d'un message, mais peuvent à chaque instant intervenir, se constituanteux-mêmes comme émetteurs d'un message.

Les masse-médias qui consistent en l'arrosage à partir d'un point d'unemultitude de consommateurs passifs est remplacé à terme par le réseau où tous lesconsommateurs sont connectés entre eux d'une manière non hiérarchique, pouvantchacun choisir d'être émetteur ou récepteur.

L'Age Industriel et Commercial a été à travers la duplication de masse, desobjets, des messages, de la musique, une époque d'uniformisation sans précédent.Cette uniformisation est à mettre en correspondance avec l'idée d'universalisme etd'une réalité mécanique dans un espace-temps linéaire et homogène.

Aujourd'hui, au contraire, les tendances s'inversent.

Page 30: Le management systémique de la complexité

Cela est difficile à accepter et à comprendre car l'ensemble du systèmeéducatif dont nous sommes issus date de l'Age Industriel-Commercial.

Notre formation ne nous transmet pas les outils conceptuels adaptés à lacompréhension de l'Age de la Création et de la Communication dans lequel nousbasculons.

Ce qui s'affirme aujourd'hui, c'est la découverte d'un univers qui n'est pashomogène et uniforme mais constitué d'une multitude de ruptures et de micro-réalités incomparables.

La réalité sociale aujourd'hui est éclatée : chaque individu déraciné, nomade,se désolidarise des groupes préétablis. C'est l'explication de la crise dunationalisme, et de tous les "ismes" y compris et surtout de l'universalisme.

La science physique, qui a été la plus solide fondatrice du concept d'unespace-temps homogène et linéaire, remet en cause elle-même ces prémices. Laphysique moderne nous fait pénétrer dans un univers fractal où chaque événements'inscrit dans un espace et un temps qui lui est propre.

Cependant, ces micro-réalités indépendantes et situées en quelque sorte chacunesur un plan différent interagissent toutes les unes avec les autres.

Cerveau.Nerfs.

Nos nerfs transmettent l'information, notre cerveau traite cette information.Les moyens de transmission de l'information par câbles, satellites, ondes et

les ordinateurs qui traitent cette information constitue un gigantesque systèmenerveux à l'échelle de la planète. Nos cerveaux sont tous branchés les uns surles autres à travers cette vaste infrastructure informatique qui extériorise noscapacités cérébrales.

Lorsque l'homme a extériorisé tous ses organes internes, le seul outil qu'ilreste à inventer est le prolongement du cerveau.

L'Age de la Création et de la Communication est solidaire du développement desordinateurs. On pourrait dater ses premiers balbutiements avec l'apparition dansles années 50, des premiers gros ordinateurs. Bientôt ces ordinateurs verront leurvolume fondre pour donner naissance à la micro-informatique appelée àmétamorphoser toutes les tâches humaines car accessible à chacun.

Avec le micro-ordinateur et sa capacité de constituer des réseauxd'utilisateurs interactifs au-delà des frontière géographiques, nous basculonsdans un univers d'échange cérébral sans précédent, à la fois planétaire etfonctionnant à la vitesse de la lumière.

De même que l'Age Industriel et Commercial a correspondu à travers la chirurgieet la médecine à la compréhension et à l'exploration des organes de notre corps,de même aujourd'hui, la grande terre d'exploration est le cerveau.

La recherche se focalise de plus en plus à ce niveau et c'est dans ce domaineque l'on peut s'attendre aux percées les plus importantes.

Les percées dans le domaine informatique nous permettent de mieux comprendre lecerveau et inversement. Les deux domaines risquent d'ailleurs de se réunir encoreplus intensément avec l'apparition des premiers ordinateurs biologiques utilisantdes cellules vivantes comme transmetteurs de l'information.

Maîtrise de l'Information.

Page 31: Le management systémique de la complexité

Dans l'Age de la Création et de la Communication, le pouvoir dépend de lacapacité à maîtriser l'information.

C'est la maîtrise de l'Information qui détermine la capacité créative et donc laquantité de biens produits.

Aujourd'hui, la disposition de capitaux devient secondaire. Pourquoi?L'industrie lourde dont la part conceptuelle était minuscule à côté del'investissement dans les infrastructures matérielles fait place à un nouveau typed'activité où la part matérielle de l'objet est mineure face à la partconceptuelle. Le rapport entre les créateurs de concept et les apporteurs decapital s'inverse. L'investissement lourd n'apparaît plus nécessaire que dans unsecond temps, alors que le concept par lui-même a atteint une valeur qui lui donneune position de force.

Le pouvoir matériel acquis à travers la possession terrienne n'était conquisqu'à travers de longues luttes se perpétuant de génération en génération surplusieurs siècles.

Ce qui a fait toute la force des commerçants et des industriels a été de pouvoirconstituer, dans des temps beaucoup plus courts, des fortunes similaires à traversl'amas de capitaux; cependant cet amas, s'il était beaucoup plus rapide, n'endemandait pas moins une ou plusieurs générations humaines.

Ce qui fait la force des nouveaux entrepreneurs "conceptuels" est que leur cycled'enrichissement se compte non plus en générations mais en quelques années.

Cette vitesse est appelée à court-circuiter et à rendre caduques toutes lesgrandes habitudes économiques de l'Age Industriel. Cette vitesse remet en cause lesprivilèges, les lois et les habitudes que nous avons entérinés.

Tout le système bancaire en sera transformé de fond en comble. Certaines banquesjaponaises l'ont déjà compris, ce qui explique leur percée au premier plan enquelques années.

Troc Informatique.

Page 32: Le management systémique de la complexité

Les biens se troquent les uns contre les autres au niveau planétaire à traversles réseaux informatiques.

Nous avons vu que le papier a présidé à l'Age Industriel comme valeur d'échange;il serait logique que la nature même de notre monnaie d'échange se transforme avecla nouvelle ère dans laquelle nous pénétrons. Il est habituel de penser aux cartesde crédit. Il est vrai que la monnaie papier tend à se dématérialiser pour setransformer en comptabilité électronique et plus particulièrement avec la carte àmémoire. Tout cela reste cependant dans la continuité de la logique de la monnaiepapier, bien que le papier soit remplacé par des mémoires informatiques.

Ce qui est nouveau est l'apparition ou plutôt la réapparition du troc. Nousparlons là d'une pratique qui se répand à la fois sur les marchés internationaux etsur les marchés domestiques d'échanger des biens en temps réel grâce aux réseauxinformatiques. Ainsi les Etats-Unis ont vu naître toute une nouvelle économieéchappant aux circuits traditionnels où les individus, mais aussi les entreprises,s'échangeaient des biens grâce à cette place du village aux dimensions d'uncontinent que constituent les grands réseaux informatiques. On peut retrouver cettetendance dans le cadre de l'économie internationale.

Bien que l'intérêt premier de ce genre de pratique à court terme soit de pouvoiréchanger en échappant aux prélèvements fiscaux, c'est beaucoup plus que cela quiest en jeu. Alors qu'aujourd'hui seul un petit nombre est concerné et peut seservir des réseaux informatiques, l'utilisation de ce genre de communication estappelée à se développer et cela bouleversera complètement et définitivement leshabitudes commerciales.

Aujourd'hui un produit pour atteindre son utilisateur se trouve dansl'obligation de passer sous l'allégeance des grands diffuseurs et des grands médiasqui verrouillent le marché et se trouvent donc en position de pouvoir. Eux seulspeuvent faire connaître le produit et le distribuer pour qu'il atteigne leconsommateur.

Le réseau informatique casse ce type de position : grâce au courrierélectronique, au télépaiement, à la capacité de chacun de devenir un serveur,n'importe qui peut faire connaître et télédistribuer son produit.

La planète est appelée à devenir une vaste place du village électronique oùchacun viendra échanger les fruits de son génie créatif. Ainsi nous retrouvonsparadoxalement une économie de l'échange assez similaire au troc du chasseur-cueilleur.

Cela veut-il dire que les monnaies disparaîtront complètement? Sans doute pas.Pas plus que la propriété terrienne n'a disparu avec l'Age Industriel. Simplement,les monnaies vont petit à petit perdre la position absolument dominante qu'ellesont eue durant l'Age Industriel.

Holistique Spirituel.

Page 33: Le management systémique de la complexité

L'Age de la Création et de la Communication introduit la pensée holistique.A travers une vision systémique englobante, l'approche holistique cherche à

comprendre les interactions qui constituent un champ de réalité. Dans ce typeréflexion le tout au lieu d'étre détruit par l'analyse est mis en avant comme étantplus que la somme de ses parties.

L'approche rationnelle analytique n'est plus utilisée que de manière secondairepour éclairer les enchaînements logiques de tel ou tel sous-ensemble local etspécialisé du système.

L'homme appréhende la réalité comme un tissu complexe d'interactions.Dans cette approche, les formes, les objets tendent à se dissoudre et à n'être

plus considérés que comme des solidifications temporaires de processus interactifsturbulents et subtils.

Contrairement à l'approche scientiste universaliste qui impose l'existence d'uneseule réalité objective dans un continuum d'espace-temps homogène, l'approcheholistique considère que le sujet observant et l'objet observé sont interdépendantset engagés dans un processus spécifique et constitue un champ de réalité original.

Il n'existe pas une seule réalité dans un espace-temps unique et homogène maisau contraire une multitude de champs de réalité avec leur espace et leur tempsspécifiques.

A la vision scientiste d'un univers prévisible, mécanique et froid fait place lavision spirituelle d'un univers mystérieux, vivant, fractal et chaud.

Le Rationnel Scientifique atteint sans aucun doute aujourd'hui son développementoptimum. Il est complètement passé dans les mœurs et est devenu la norme de touteréflexion "sérieuse". Cependant à l'avant-garde des sciences dont il a été lefondement : la physique, les mathématiques, la logique, on cerne de mieux en mieuxles limites de la pensée rationnelle.

Les problèmes auxquels nous nous confrontons aujourd'hui sont d'un ordre surlequel le découpage discursif rationnel est nécessaire mais cependant insuffisant.Que ce soit au niveau microcosmiques des particules subatomiques ou au niveaumacrocosmique de l'univers astrophysique, nous avons affaire non plus à desmécanismes de cause à effet mais à des ensembles dont tous les éléments sont enperpétuelle interaction à travers des espaces-temps spécifiques.

Un nouveau type de pensée qu'on peut appeler Holistique est en train d'émerger.La pensée rationnelle n'avait pas rejeté l'intuition et l'analogie mais les

avait détournées de leur utilisation originelle pour les mettre à son service. Demême, la pensée holistique utilise la pensée rationnelle et son découpage de causeà effet mais ce n'est plus que pour éclairer tel et tel aspect sectoriel d'unsystème englobant.

La pensée holistique comprend que tout ensemble est plus que la somme de sesparties.

On peut analyser chaque partie par un découpage discursif de plus en plus fin :cela a été l'activité, de plus en plus diversifiée, en branches spécialisées de lascience de ces dix dernières années. Mais aujourd'hui, les défis auxquels nous noustrouvons confrontés à tous les niveaux ne peuvent être relevés que si nous arrivonsà dégager des visions globales de processus interactifs.

La pensée holistique ne cherche donc pas à décomposer en chaînes de cause àeffet mais au contraire à rassembler en modèles globalisants. La pensée rationnelleest centrifuge et la pensée holistique est centripète.

Page 34: Le management systémique de la complexité

La pensée rationnelle a tendance à tout vouloir ramener à un espace-tempshomogène dans lequel se déroulerait un vaste mécanisme universel. C'est unerecherche de la "vérité absolue". La pensée holistique au contraire comprend le caractère relatif de toute véritéformelle et développe une approche par relativisation de chaque modèle.

La pensée holistique consiste à faire des modèles de tel ou tel "Champ de laRéalité" tout en sachant que ce n'est qu'un aspect de la réalité qui reste de faitau-delà de tout modèle.

Interactivité Informatique.

Les moyens de communication caractéristiques de l'Age de la Création et de laCommunication sont les systèmes interactifs dont le média est l'informatique.

Alors que les masse-médias de l'étape Industrie-Commerce distribuent"industriellement" l'information d'un point vers tous les autres, les médiasinteractifs de l'étape Création-Communication permettent à chacun d'être tout à lafois récepteur mais aussi diffuseur.

SENSIBILITÉS RÉSEAUX

L'Age de la Création et de la Communication amène la délocalisation et ledéveloppement de la conscience spirituelle.

Les individus ne se sentent plus solidaires d'un territoire comme dansl'organisation Monarchie-Royaume ou d'une économie dans le cas de l'organisationDémocratie-Etat.

Ce qui rassemble les individus en groupes, c'est leur "sensibilité", c'est-à-dire leur manière spécifique de maîtriser l'information.

Suivant son état de conscience, sa sensibilité, chacun s'inscrit dans un champde réalité différent.

Les individus ayant des points d'intersection et d'interférence entre euxs'organisent en réseaux correspondant à leurs sensibilités communes : sémiocratie.C'est le fait d'appartenir à la même sensibilité, à la même sémiocratie quirassemble les individus dans le réseau.

La sémiocratie transmet une certaine manière de maîtriser l'information.Ce sont les courants de sensibilité qui organisent holistiquement le réseau et

distribuent le pouvoir.

Accélération de la mode.

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Le changement de style de plus en plus rapide jusqu'au foisonnement actuel estsans doute un des exemples les plus vivants du processus d'explosion lié à la Post-Histoire.

Nous vivons désormais dans un monde éclaté. La Grille de l'Evolution telle quenous l'avons explorée nous montre que cet éparpillement est le résultat d'unetendance qui vient de très loin, bien qu'elle ait culminé dans son contraire avantde se révéler.

Mais peut-on survivre, peut-on s'organiser, peut-on s'entendre dans cetteplanète devenue une Tour de Babel?

Comment sans revenir en arrière, puisque cela semble impossible, trouver desfondements sur lesquels tous les temps et toutes les localités disséminées puissentsortir de leur propre limite et trouvent un terrain d'accord nécessaire à leurconvivialité ?

On a considéré la mode du point de vue de l'évanescence et du superficiel. C'estlà se méprendre. Aujourd'hui, les objets, les produits, les valeurs, ne sont plusque des signes dans une grande économie du réel qui décolle de toute objectivité etindexation quelconque, pour ne plus suivre que des flux subjectifs, des modes.

Quelle est la valeur d'une voiture ?Quelle est la valeur d'un individu ? Quelle est la valeur du dollar ?Qui peut aujourd'hui définir une valeur de référence "objective"?Tout dépend à quel "mode" on fait référence.Engouement, répulsion, s'emparent des valeurs et les font varier au gré des

désirs qui s'irradient comme de grands champs de force, réglant le flux del'économie et donc des matières elles-mêmes.

Parce que le rapport entre matériel et immatériel, entre infrastructure etsuperstructure, s'inverse, ce qui est superficiel devient profond et ce qui estprofond devient superficiel.

Aujourd'hui, rien n'est plus profond que les phénomènes de fluctuation demodes, qu'une voiture n'ait pas le bon design, qu'un médicament n'ait pas le bonemballage, qu'une idée vienne trop tôt ou trop tard; et quelle que soit la valeurde tous ces produits, qui en tiendra compte ?

Il suffit d'ouvrir une bibliothèque figée depuis dix ans, pour voir combien enquelques années des immenses pans de notre culture et de nos préoccupationss'effondrent et disparaissent dans l'inanité avec un silence grandiose.

C'est l'occasion de comprendre comment le phénomène de mode naïvementcirconscrit au vêtement a sans doute toujours été le révélateur des grandesmutations profondes de l'homme, et l'accélération dans le changement de moderévèle le télescopage des changements que nous sommes en train de vivre.

La mode en tant que champ de signes est toujours symptomatique du champ deréalité dans lequel elle s'inscrit.

Inversement, toute réalité, y compris la plus matérielle, n'est que le produitsédimentaire de la sémantique d'une mode.

Ce qu'introduit une nouvelle mode, c'est une nouvelle sensibilité, une nouvellegrille de déchiffrement qui sera révélatrice de réalités inconnues à toute autregrille de déchiffrement.

C'est justement dans le sens où toute évolution de la mode fonde l'évolutionmême de la réalité d'un monde que la mode, bien qu'elle se révèle au niveau leplus superficiel de la société, est le fondement de toute réalité.

Changer de mode, c'est comme tourner le bouton de la radio qui permet dechanger de longueur d'onde. Le langage courant a entériné cette image dansl'expression, "Ils ne sont pas sur la même longueur d'onde", pour parler de deux

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individus qui n'ont pas le même mode de pensée, ne vivent pas dans la mêmeréalité.

Un Switcher pour faire du Zapping.Le monde n'est plus uniforme, homogène, linéaire, nous avons affaire à une

multitude de réalités parallèles qui apparaissent et disparaissent au gré de nosréglages et déréglages de modes. Malheur à celui qui n'est pas sur la bonnelongueur d'onde !

Les métiers, les produits, les idées, ne survivent pas quand le bouton deréglage a été tourné.

Ces fluctuations sur une multitude de réalités parallèles, avec des va-et-vientde plus en plus rapides, sont sans doute une des caractéristiques les plusspécifiques et fondamentales du changement que nous sommes en train de vivre.Cet aspect est celui qui nous laisse le plus désarmés parce qu'il est sansprécédent et qu'il déjoue toutes nos habitudes et nos recettes. Comme nous l'avonsvu, nous avons été habitués à vivre pendant des millénaires en circonscrivant uneréalité et les valeurs s'y rattachant et en les tenant comme les seules réelles;cette illusion n'étant jamais remise en question tout au long d'une vie.

Bien sûr, il y a eu des périodes de changement, mais c'était pour bien viterebasculer dans une longue période de stabilité.

Ce qui aujourd'hui est sans précédent, est que le changement n'amène rien sinonencore du changement, et cela jusqu'à effacement de toute illusion qu'une réalitésolide puisse exister.

De même qu'à travers l'industrie, en extériorisant grâce à nos outils noscapacités internes de transformation de la matière, nous avons découvert lessources immenses des énergies minérales, aujourd'hui, à l'âge de l'extension ducerveau, nous découvrons la puissance radicale des concepts.

De même que le monde industriel a donné à l'artificiel la prédominance sur lenaturel, l'Age de l'ordinateur, lui, donne au rêve la prédominance sur le réel.Cette brusque conversion ne peut qu'avoir des conséquences dramatiques dans lamesure où elle est subie d'une manière inconsciente. Il suffit pour s'enconvaincre de remarquer le taux croissant de folies dans les pays les plus enavance.

La deuxième partie de ce livre a pour but d'offrir des outils simples etefficaces pour affronter cette évolution et nous apprendre à changer de canal avecaisance : un "Switcher" pour faire du "Zapping"!

La confrontation des cultures.Parallèlement au chevauchement des modes, un autre phénomène augmente la

confusion, c'est la confrontation et le mélange de toutes les cultures auxquelsnous assistons aujourd'hui. Ce mélange est dû d'une part à l'émigration entre lespays, mais aussi à la planétarisation des moyens de communication qui transformentla planète en un "village global".

Petit à petit, les cultures les plus différentes se pénètrent les unes lesautres, les voitures envahissent l'Inde tandis que le yoga se répand en Occident,etc... Les langues de chaque pays n'en ressortent pas indemnes, elles setravaillent mutuellement. Dans la mesure où une langue est une grille dedéchiffrement du monde, ce lent travail lexicographique des langues les unes surles autres n'est pas anodin car il manipule la manière de découper et de percevoirla réalité.

L'émigration fait basculer les individus dans un nouveau champ culturel quis'hybride avec leur culture traditionnelle, donnant naissance à une multitude de

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micro-champs culturels hybrides. Petit à petit, des univers aussi opposés ethétérogènes que l'Orient et l'Occident se copénètrent.

Il y a dans ce phénomène beaucoup de richesses et de potentialités dontl'humanité est susceptible de tirer parti, mais dans un premier temps, ce mélangeconfus amène un grand désordre dans nos têtes et dans le monde.

Rien n'est plus efficace pour quitter ses habitudes culturelles et en voirtoute la relativité que d'avoir à endosser une nouvelle culture. L'ancienne et lanouvelle se brisent l'une contre l'autre et l'homme reste pour toujours entre lesdeux, incapable de retrouver la naïveté et la crédulité d'une culture.

A mesure que ce type d'expérience se multiplie, il se crée toute une nouvellehumanité nomade, à jamais sans territoire et citoyenne du monde. Les frontièresdes pays apparaîtront de plus en plus artificielles et le concept même de pays,dans la mesure où il se réfère à l'adhésion pour la vie à une culture donnée,devient caduc.

Ce que nous avons appelé sémiocratie,"réseaux de sensibilitè" risque de plus enplus de prendre la place des pays comme structure d'accueil et de rassemblementdes forces humaines.

D'ailleurs, certaines multinationales, avec leur culture d'entreprise bienspécifique et leur poids économique, atteignent déjà une importance qui dépasseles petits pays. Le fait que ces entreprises ne soient liées d'une manièredéfinitive à aucun territoire particulier, loin d'être un inconvénient, est aucontraire un avantage dont elles savent très bien tirer parti.

Le nomadisme, l'hybridation culturelle, sont caractéristiques des nouvellestribus que constituent les "réseaux de sensibilitè", les sémiocraties.

De même que l'accélération de la mode aboutit à la destruction de l'illusionqu'il existe des valeurs solides, la confrontation des cultures tend à effacer lesfrontières et la notion d'état.

L'accélération de la mode et la confrontation des cultures nous emportent dans un tourbillon "hallucinogène", ou nous apprenons la relativité de toute perceptionet de toute connaissance.

POST-HISTOIRE. TEMPS FRAGMENTÉ.

Avec l'Age de la Communication et de la Création, l'histoire profane exploselittéralement face à la multitude des champs de réalité à prendre en compte.

La Préhistoire ne laisse pas de trace par absence de trace formelle, la Post-histoire efface les traces à cause du foisonnement et de l'excès de signesformels.

Le temps n'est plus considéré comme un continuum homogène indépendant desprocessus qui s'y déroulent.

Le temps devient une des variables spécifiques au processus de l'événement.Chaque champ de réalité, chaque événement crée son propre espace-temps.

Aujourd'hui l'histoire explose. Par une logique du retournement, notre volontéd'universalisme poussée à son extrême nous a emportés aux confins de toutes lescultures avec chacune leur temps et leur espace particulier.

La colonisation a brassé toutes les races. A conquérir tous les territoires,comment pourrions-nous jamais retrouver naïvement le nôtre ?

L'universalisme s'est détruit lui-même dans sa volonté de tout mettre à platpour un examen soi-disant objectif.

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Nous avons découvert des mondes hétérogènes et lorsque l'on veut les compareren les traduisant les uns dans les autres, on en perd la substance même, commetoutes ces couleurs que l'on trouve au fond des mers mais qui cessent de brillerdès qu'elles sont remontées à la surface.

Histoire dans son élan vers l'universalisme, s'enfonçant vers desspécialisations toujours plus pointues, débouche finalement sur la relativité etle particularisme.

Qui peut aujourd'hui prétendre à écrire objectivement l'histoire de ces dixdernières années, quel cerveau gigantesque peut contenir les milliardsd'informations nécessaires à cette synthèse ?

L'histoire d'un seul secteur hyper spécialisé de notre époque, comme parexemple l'informatique, est déjà pratiquement impossible tant elle est complexe.

L'aborigène n'a pas d'histoire par manque de signes historiques, pareffacement. Nous n'avons plus d'histoire par grouillement des signes et pléthorede traces.

Après l'époque proprement historique de l'agriculture et de l'industrie, noussommes aujourd'hui entrés dans un temps Post-Historique. Nous pénétrons dansl'innommable.

C'est sans doute une des choses les plus difficiles à vivre pour chacun d'entrenous que de voir se transformer la civilisation arrivée au comble de sa maturitéen une sorte de jungle sans nom. Ce retour à la jungle, nous ne savons pas lecomprendre logiquement, nous préférons ne pas y réfléchir, c'est le grand absentde la littérature "sérieuse". Alors notre imaginaire s'en empare et c'est pourquoice thème traverse les littératures de fiction les plus notoires de notre temps.Pourtant, si nous devons réfléchir à quelque chose qui puisse redonner un peu depertinence à notre pensée, rien n'est plus nécessaire que de réfléchir à cedevenir jungle de notre société.

Le langage populaire moderne, comme tous les langages populaires, estrévélateur : "Il est dans son trip", "Il flippe", c'est un vocabulaire empruntéaux utilisateurs de drogues hallucinogènes. Désormais il est inutile de prendredes drogues, car la réalité elle-même d'une journée dans la vie moderne est commeun voyage hallucinogène, pour le pire et pour le meilleur. Les individus sontenfermés dans leur monde particulier rendu incomparable par une suite dedéracinements sans pareils.

La civilisation explose en une multitude de micro-cultures, de micro-spécialités, de micro-langues, de micro-intérêts, de micro-individus, chacun deces micro-éléments constitue sa micro-histoire, sa micro-loi, son micro-ego.

Ces trente dernières années ont vu l'explosion des droits de chacun de sedéfinir et de vivre à sa manière. Mais cet ego-trip devient vite un enfermements'il n'est pas contrebalancé par l'ouverture réelle à la différence des autres età la responsabilité de chacun dans le devenir de plus en plus précaire de cevaisseau spatial finalement bien petit qu'est la Terre.

Nous ne pourrons plus jamais revenir en arrière, inutile de rêver à lasimplicité classique des grandes civilisations de l'histoire où les gensnaissaient, grandissaient et mouraient dans une réalité, des valeurs, uneesthétique stable et partagée par tous.

Il est intéressant de regarder tout au long de l'histoire le cycle de vie desstyles. Tout au début des temps historiques, l'Art Egyptien voit une fidélité à unstyle donné s'étendre sur plusieurs milliers d'années. L'Art Grec déjà est un peuplus turbulent et on voit les styles traverser difficilement les siècles. Le HautMoyen Age est la dernière époque où l'on voit les styles rester stables sur uneassez longue période; bientôt l'esthétique changera avec chaque règne, puis

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évoluera encore plus rapidement en changeant avec les générations, tous les trenteans, enfin, avec la modernité, la mode s'empare des décennies, des années, dessemestres et finalement explose dans la confusion actuelle où tous les styles sechevauchent et deviennent contemporains dans ce que l'on a appelé le post-modernisme.

Comment une époque sans style peut-elle encore avoir une histoire, puisquetoute histoire nécessite pour ne pas s'éparpiller dans la foule des événements, unpoint de vue, une grille de déchiffrement, qui lui permettent de dégagerl'essentiel de l'accessoire ?

CONCLUSION SUR LA GRILLE DE L'EVOLUTION:LA LUMIERE DU PASSE.

Le passage à une nouvelle étape dans l'activité dominante a constitué à chaquefois une rupture fondamentale dans la vision qu'avait l'homme du monde.

La culture et les valeurs sociales ont été à chaque fois totalementtransformées.

La transition Chasse-Cueillette/Agriculture-Elevage est diluée dans desmilliers d'années; la transition Agriculture-Elevage/Industrie-Commerce a étébeaucoup plus concentrée et brutale.Nous sommes aujourd'hui en pleine transition Industrie-Commerce/Création-Communication, cette transition est foudroyante.

Evolution des Outils : sophistication.La colonne outils nous montre la sophistication croissante de la technologie

humaine qui commence par extérioriser les fonctions les plus superficielles pouratteindre finalement les fonctions les plus profondes. Les logiciels sont àl'étape Création-Communication ce que le pétrole est à l'étape Industrie-Commerce.

Le développement de l'outil informatique va devenir de plus en plus la grandepréoccupation humaine, c'est déjà le cas dans une grande mesure.

Evolution du Pouvoir : dématérialisation.Ce qui détermine le pouvoir tend à devenir de plus en plus immatériel.La maîtrise de l'information est déjà déterminante dans les étapes précédentes

et son importance grandit à chaque étape pour devenir dominante à la fin.L'osmose avec la nature et la maîtrise de l'information sont des ressources

sans limites, elles ne dépendent que du potentiel individuel. Au contraire, ladisponibilité de capitaux et la possession de territoires sont transmises parfiliation, leur source est limitée et elles créent l'inégalité sociale.

L'époque historique est marquée par le développement de la hiérarchisationsociale et des inégalités. La Préhistoire et la Posthistoire ne connaissent pas ettentent d'abolire l'inégalité sociale entre les hommes.

Evolution des Echanges : abstraction.

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Troc, monnaie métallique, monnaie papier, troc informatique, l'échanges'effectue d'une manière de plus en plus abstraite. Chasse-Cueillette et Création-Communication se ressemblent en ce que dans la première étapes l'intermédiairen'existe pas et que dans la dernière l'intermédiaire n'existe plus.

Les deux étapes historiques intermédiaires sont marquées par une importancecroissante de la monnaie comme intermédiaire d'échange.

Evolution de la Réflexion : approfondissement.L'intuition ne permet qu'une identification à l'événement. L'homme se confond

avec la nature : scission homme/nature L'analogie transcende l'événement particulier et introduit la perception d'une

organisation universelle signifiante. L'homme se distingue de la nature; scissioncivilisé/ sauvage.

Le rationnel, par l'analyse des causes à effet, permet de comprendre les loisde la nature. L'homme transforme la nature : scission artificiel/ naturel.

La pensée holistique, par la maîtrise des champs de réalité, dévoile le jeu duréel. L'homme crée des réalités non-ordinaires, la nature n'est plus qu'un champde réalité parmi d'autres. L'homme transcende la nature : scissionrêves/réalité.

L'approche holistique et l'approche intuitive se ressemblent à cause de leurcaractère spécifique et subjectif qui secrète une personnalisation importante del'individu.

La pensée analogique et la pensée rationnelle sont au contraireuniversalisantes et amènent une dépersonnalisation de l'individu par soucid'orthodoxie et d'objectivité.

Evolution de la Communication : intensification.La communication entre les hommes s'intensifie exponentiellement au cours de

l'évolution.Chasse-Cueillette et Création-Communication se ressemblent en ce que la

communication dans les deux cas reste horizontale; elle permet la réversibilitéémetteur-récepteur(feedback) et donc la personnalisation.

Les deux étapes intermédiaires, Agriculture-Elevage et Industrie-Commerce sontmarquées par une communication du haut vers le bas, de l'émetteur actif vers lerécepteur passif qui tend à être dépersonnalisé.

Evolution de l'Organisation : complexification.L'organisation fait appel à des systèmes de plus en plus complexes.La première et la dernière étape se ressemblent en ce qu'elles sont à dominante

ludique et gratuite tandis que la phase historique intermédiaire s'organise autourdu concept de travail et de propriété.

Evolution de l'Histoire : développement.L'histoire, à l'origine, se résume à un mythe unique, circulaire, fondateur de

la tribu qui en répète inlassablement l'histoire.Puis l'histoire s'incarne dans le temps et se développe d'une manière de plus

en plus complexe jusqu'à l'explosion finale dans la Posthistoire en une multitudede micros-histoires susceptibles de se fragmenter à leur tour à l'infini.

L'évolution de l'Histoire ressemble à un arbre : multitude des racinespréhistoriques, concentration dans le tronc historique, rediversification àl'infini dans la période post-historique. Cette diversification finaleaboutit à une multitude de champs de réalité nouveaux avec leur espace et leur

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temps spécifiques qui sont autant de fruits de l'arbre originel et de graines pourde nouveaux mondes.

Encore une fois, Préhistoire et Posthistoire se ressemblent en ce que dans lesdeux cas il n'y a que des histoires relatives, chacune étant liée respectivementsoit à un mythe soit à une sensibilité différente.

L'histoire sacrée et l'histoire profane ont au contraire l'ambition d'êtreabsolues, d'où leur prosélytisme et leur absolutisme.

Tête-à-queue.Les étapes intermédiaires Agriculture-Elevage et Industrie-Commerce ont

beaucoup de points communs. La première et la dernière étape, bien quefondamentalement opposées dans leur contexte, se ressemblent étrangement dansleurs tendances. Nous sommes en train de vivre un gigantesque tête-à-queue quiressemble au mythe du paradis perdu et retrouvé.

Accélération.L'accélération de l'évolution est exponentielle. Les trente dernières années

d'histoire industrielle ont amené plus de changement que les trois sièclesprécédents, d'ici la fin du siècle l'humanité aura complètement basculé dansl'étape Création-Communication avec la rupture et les métamorphoses que celaimplique.

Nous risquons de traverser une période très troublée qui ressemble au mythe del'Apocalypse.

Empilement.L'évolution s'effectue par empilement et intégration plutôt que par exclusion.

Chaque étape est venue s'ajouter, se superposer aux étapes précédentes en lesoblitérant dans une certaine mesure sans pouvoir cependant en supprimer toutes lestraces.

L'industrie a industrialisé l'agriculture, l'Age de la Création rend créativel'industrie.

Si on prend l'exemple de l'Angleterre, mythologie, monarchie et démocratie sesont empilées successivement les unes sur les autres, mais des traces importantessubsistent de chaque étape.

Avec l'Age de la Création et de la Communication et sa capacité démultipliée decompréhension, c'est l'ensemble du déroulement de l'évolution qui remonte à lasurface consciente. Toutes les cultures, toutes les civilisations resurgissent,retrouvent leur vie et leur sens dans le déroulement global. Cela fait penser aumythe de la résurrection des morts.

Parousie. L'Age de la Création et de la Communication tend à abolir le travail et les

inégalités sociales.L'humanité déploie tout son potentiel créatif, l'homme retrouve le jeu.

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Deuxième partie

LES CHAMPS DE REALITE.

LE POUVOIR DU PRESENT : Un outil pour agir...

"Le comportement intelligent et volontaire. - Une étape capitalesera franchie lorsque, au lieu de se répéter par habitude, lecomportement deviendra, dans une certaine mesure, invention, en ce sensqu'il cherchera à s'adapter à des conditions nouvelles: : c'est ce quicaractérise le comportement intelligent au sens le plus général duterme. Pour cela il faudra, non seulement que le bloc del'expérience passée soit brisée par la fonction de dissociation, maisque les éléments en soient regroupés en un ensemble original etadapté à la réalité présente ou même prochaine.

On verra qu'en outre cette adaptation requiert l'aperceptionsynthétique d'une "situation", c'est-à-dire d'un ensemble de rapports.En ce sens, un tel comportement est déjà aussi, à quelque degré dumoins, volontaire : car la volonté est essentiellement une fonction desynthèse qui réclame la mise en jeu de toutes les facultéspersonnelles."

Armand Cuvillier(Nouveau précis de philosophie

L'Action Tome 2 Chap.1/10)

INTRODUCTION AUX CHAMPS DE REALITE :

UN OUTIL POUR AGIR.

Les Champs de Réalité sont un outil pour agir.

Nous vivons désormais dans une réalité brisée, éparpillée.Les traces ont recouvert les traces.Les histoires ont recouvert l'Histoire.

Impossible de revenir en arrière, et pourtant nous sommes immobilisés car dansquelle direction nous diriger ?

Alors, nous attendons que les catastrophes pressenties arrivent et qu'ellesnous précipitent dans un destin quelconque.

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Chacun s'invente un petit monde fait d'obligations, de désirs et de fuites. Les autres nous semblent de plus en plus étranges, étrangers, ennemis.Nous sentons des glissements souterrains, des effritements, détruire tout ce à

quoi nous tenions. Nous expérimentons de rupture en rupture des univers différents; où est le

nôtre, où est le vrai ? Les spécialistes se terrent de plus en plus dans leur spécialité. Les pays ne visent que leur intérêt propre, la défense de leur monnaie, de

leurs frontières, de leurs droits. Les dangers d'ordre planétaire s'accumulent et deviennent pressants, comment y

répondre d'une manière pertinente ?Comment reprendre les rennes de sa propre vie en main ?Comment dépasser la faillite de nos champs de réalité traditionnels, et dégager

un axe profond pour fonder une action qui ait un sens tant à titre individuel quesocial ?

L'ALTERNATIVE DU BLOCAGE OU DE LA FUITE.

Nous sommes déchirés entre deux tendances face à la désintégration du monde.Ces deux tendances peuvent se combiner ou au contraire l'une des deux peut dominersur l'autre.

Une de ces tendances consiste à s'agripper comme un naufragé à une des épavesdu bateau. Comme tout fout le camp, on se raccroche d'autant plus à des valeurs, àune manière de vivre d'antan qui a fait ses preuves. Dès lors, tout ce qui arrivede nouveau et susce ptible de remettre en question cette manière de voir estconsidéré comme le mal en personne, une émanation de Satan.

On voit aujourd'hui des individus, des entreprises, des pays, vivre cette sortede régression qui peut prendre toutes les caractéristiques d'une paranoïa aiguè.

Le monde en train de se désintégrer devient le grand persécuteur innommable etcontre lequel il faut se battre en préservant sa petite île de clarté.

Le problème est que la désintégration agit sournoisement aussi bien dans lemonde extérieur que dans le monde intérieur et les individus n'arrivent à endiguerleur propre désintégration intérieure que par une division de leur être et unmensonge de plus en plus grand. Il développent un sur-moi gigantesque qui leurfait perdre tout élan créatif et spontané. A défaut de se désintégrer, ils sedesséchent lentement comme de vieux poissons fumés.

L'autre tendance consiste en l'excès inverse. Devant l'explosion du monde,l'individu, l'entreprise, le pays, semblent anticiper sur cette désintégration.

Il n'y a plus de valeur, il n'y a plus de repère solide et bien profitons-en,exploitons la situation au maximum pour un profit à court terme et sans souci dulendemain. Après tout, personne ne nous demande de nous soucier des problèmes del'humanité.

En suivant cette voie, on peut sembler traverser une phase de succès qui nousenivre et nous précipite d'autant plus dans cette tendance, mais au fur et àmesure que l'action s'affole, le manque de points de repère finit par rendre leprocessus en lui-même absurde, l'éparpillement, le mélange, aboutissent à tous lessymptômes d'une schizophrénie. L'identité se fait fuyante et glisse entre lesdoigts quand on veut la saisir. Y a-t'il encore bien là quelque chose sinon unesorte d'absence à force de vouloir se mêler à tout et profiter de tout.

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Ces deux tendances, l'une centripète et l'autre centrifuge, se retrouvent dansdes proportions variées chez les individus ou les entités comme les entreprises etles états. L'exagération dans l'une ramène à l'autre ou bien les deux se mélangentinextricablement.

Ces deux réactions, l'une de blocage et l'autre de fuite, sont toutes les deuxaussi négatives. Bien que ce soient deux tendances que suscite instinctivement ladésintégration du monde actuel, elles n'aboutissent à aucune base constructive etpositive pour l'avenir.

Si nous avons des réactions de ce type, c'est parce que la situation que noustraversons actuellement est sans précédent et que toute notre culture, notreéducation, nos universités sont faites pour faire adhérer les individus à uneréalité, leur faire croire que cette réalité est la seule réelle et maintenirainsi, durant toute leur, vie la cohésion du groupe.

La situation à laquelle nous avons à faire face aujourd'hui est au contraireune situation de rupture sans retour, une situation limite, une situationparadoxale similaire à celle d'une boussole arrivée au pôle nord qui se met àtournoyer dans le vide de la perte du sens. Cette situation limite, seuls certainsindividus exceptionnels, dans leur désir d'échapper à l'enfermement de leur tempset de leur culture, l'ont connue précédemment. Ils ont marqué chacun profondémentleur époque, traçant le chemin d'une évolution dans laquelle le reste del'humanité ne s'est engouffré que lentement.

Aujourd'hui, cette situation exceptionnelle et paradoxale devient le destin dechacun pour le pire ou pour le meilleur qu'on le veuille ou non.

Cela est-il triste ? L'humanité s'est inventée des décors et chacun a cru à sonrôle, le jouant avec acharnement et éblouissement; voilà qu'aujourd'hui le décorse lève et seuls les acteurs fous continuent à jouer, aveuglés par leur rôle.

A mesure que nous explorons le cerveau, nous découvrons autant de mécaniquessubtiles qui ont donné aux scènes l'illusion de leur réalité. Il n'y a rien detriste à tout cela, bien au contraire, les cultures ont été comme des tuteurs quiont aidé l'homme à se développer. Aujourd'hui, il lui faut apprendre à marcherseul dans une lucidité pleine de chacun de ses actes, il n'y a pas de liberté quine se prenne sans une responsabilité accrue face aux devoirs que toute libertésuscite.

La fuite et le blocage sont des réactions de peur infantile en face desmonstres de nos propres illusions. Le but de cette seconde partie est de nousdonner les outils qui nous permettent d'affronter cette situation sans pareil.

Eliminer la peur est la première nécessité. Ce livre peut aider à cela comme unmode d'emploi et une carte qui nous permettent de nous repérer et de dédramatiserla situation.

Mais vaincre la peur et cesser de vous bloquer ou de fuir, seul chacun par unedécision engageant l'être tout entier, peut le faire.

AU-DELÀ DU SUJET ET DE L'OBJET : L'INTERACTIVITÉ DANS UN CHAMP.

La séparation du sujet et de l'objet a fondé le développement scientifique quia permis les progrès.

Il n'y a pas de schéma plus fondamentalement ancré en nous que cet automatismequi consiste à considérer le monde intérieur et le monde extérieur commeindépendants.

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A chaque instant, dans nos activités journalières et dans nos argumentations,nous utilisons cette séparation.

Cette manière de voir les choses qui était encore XVIIème siècle, réservée àquelques penseurs d'avant garde, s'est répandue au point de devenir la base deraisonnement communs.

Dans la mesure où nous baignons inconsciemment dans cette manière de penser,nous nous fermons toute possibilité d'accès aux grandes cultures traditionnellesde l'Age Agriculture-Elevage qui ne sont pas fondées sur ce type de séparation.

Si la séparation du sujet et de l'objet a fondé la pensée discursive issue del'Age des Lumières, l'ensemble des connaissances, jusque-là, a été enregistré surun mode analogique qui fonctionne par mise en correspondance continuelle du mondeintérieur et du monde extérieur.

Se laisser enfermer dans le discours discursif moderne nous rend aveugles à laplus grande partie de l'acquis culturel de l'humanité.

Un autre aspect négatif de l'utilisation inconsidérée de l'approche discursiveest que, si elle est très efficace pour comprendre le niveau mécanique, répétitif,grossier et superficiel de la nature, elle rend incompréhensibles les niveaux plussubtils qui sont pourtant les fondements des premiers.

Ces niveaux plus subtils sont ceux qui permettent de comprendre les phénomènesde création, de transformation et d'innovation, qui sont parties prenantes detoute réalité vivante, avant qu'elle ne soit mise à mort par la dissectiondiscursive.

La science qui a répandu le plus puissamment le concept d'objectivité est sansaucun doute la physique. Il est intéressant et symptomatique de voir cette mêmescience, s'enfonçant à des niveaux de plus en plus subtils de la matière, remettreen cause ce concept d'objectivité et redécouvrir la pensée analogique propre àl'Orient et aux cultures traditionnelles.

Une nouvelle épistémologie est en train d'émerger de ce chassé-croisé Il ne faudrait pas croire que nous reléguons l'approche objective et discursive

au magasin des antiquités et des illusions. Ce serait une grave erreur, dans sondomaine elle reste irremplaçable, de même que la Physique Newtonienne n'a pasperdu son utilité, malgré sa relativisation par Einstein.

Le défi que nous avons à affronter aujourd'hui avec sa complexité et sarapidité, rendent inefficaces les grandes séparations discursives du type action-réflexion auxquelles nous sommes habitués.

Aucune réflexion n'est capable de synthétiser la complexité que nous avons àaffronter, nous n' avons aucun délai pour suspendre l'action.

C'est pourquoi il nous faut passer à un autre niveau de connaissances qui nouspermette de comprendre d'une manière globale et immédiate la situation danslaquelle nous sommes.

Nous avons à apprendre à danser.Le danseur ne réfléchit pas, n'écoute pas la musique avant de faire chacun de

ses gestes, s'il le faisait, il serait en constant décalage sur la musique et celarendrait sa danse complètement fausse.

Pour bien danser, il ne doit faire qu'un avec la musique et anticiper lui-mêmesur chaque note.

Tout ce qui nous "arrive" à l'intérieur : émotions, désirs, haine, idées, ou àl'extérieur : accidents, chance, succès, défaite, etc..., sont à mettre dos à doscomme produits du champ de réalité dans lequel nous nous inscrivons. C'est

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pourquoi agir ou réfléchir sont tout aussi illusoires l'un que l'autre, dans lamesure où ils font automatiquement référence à un champ bien déterminé.

Le monde intérieur et le monde extérieur sont miroirs l'un de l'autre. Nous croyons que les événements dans le monde extérieur nous arrivent par

hasard aussi sûrement que nous croyons être les maîtres des pensées qui nousviennent à l'esprit.

D'un côté, une série d'événements qui semblent être impossibles à maîtrisertotalement, de l'autre, des songes qui semblent suivre le flux du moindre de noscaprices.

D'un côté, une dure réalité dont nous semblons dépendre et être le jouet, del'autre, des désirs évanescents où s'inscrivent librement tous nos élans.

D'un côté, nous nous croyons enfermés pour toute la vie, de l'autre, librescomme le vent.

Liberté et enfermement, destin et caprices sont tout aussi illusoires les unsque les autres.

Nos désirs, nos caprices, nos pensées, toute la petite histoire que nous nousracontons à l'intérieur, et qui nous semble si proche et si facilement manipulableque nous l'identifions à nous-mêmes, sont en fait ce qui , à force de radotages,de répétitions, finit par constituer les ornières de nos grilles de déchiffrementdu monde. Des grilles qui nous rendent aveugles. Nous ne voyons plus la profondeuret la complexité du monde. Nous sommes enfermés dans un destin apparemmentinsurmontable mais symptomatiquement aussi absurde que nos ânonnements intérieurs!

Ainsi ce sont nos habitudes mentales que nous ignorons alors même que nouspensons, qui nous enferment et transforment notre perception de la réalité enmiroir de notre plus ou moins grande ouverture intérieure.

Les recherches menées actuellement sur le cerveau montrent que les liaisonsentre neurones sont infiniment plus complexes lors de notre enfance et vont en sesimplifiant ultérieurement à mesure que certains circuits s'affirment et qued'autres au contraire s'atrophient.

C'est comme si au début de notre vie nous avions une radio pouvant se régler etcapter toutes les longueurs d'ondes, mais que, prenant l'habitude de n'écouterplus qu'une ou deux stations, le bouton se bloque, limitant nos possibilités dechoix.

Ainsi notre perception de la réalité, à travers le radotage de nos facultésmentales, se réduit .

Les autres stations continuent à émettre, la réalité dans samultidimensionnalité n'a pas cessé d'être

Mais que pouvons-nous objectivement comprendre si nous ne sommes pas là ?De même qu'une question détermine sa réponse, un sujet détermine l'objet qu'il

perçoit à travers la grille de perception qui est la sienne.

Pour ne pas retomber dans l'erreur du subjectivisme ou de l'objectivisme quisont à mettre dos à dos, il faut considérer le monde intérieur et le mondeextérieur d'un individu pris dans un champ. Ce champ qui cristallise la "longueurd'onde" sur laquelle l'individu est réglé, manipule tout à la fois les idées, lesdésirs, les émotions, qui "arrivent" dans le monde intérieur et d'autre part, lesévénements, actions, accidents, qui "arrivent" dans le monde extérieur.

On pourra croire faire preuve de liberté en pensant beaucoup et en agissantbeaucoup, on pourra gonfler son moi de toutes ces pensées et de toutes ces actions

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soi-disant libres, qu'en fait on ne bougera pas d'un pouce, ne faisant que décrireles potentialités du champ dans lequel on s'est inscrit.

L'illusion de décision dans le monde intérieur, de fatalité dans le mondeextérieur, apparaissent alors toutes les deux aussi illusoires.

La fatalité est le résultat de nos choix tout autant que nos choix sontfatalement ceux du champ dans lequel nous sommes inscrits.

A ce niveau-là, aucune évolution de la conscience et approfondissement du mondeintérieur n'est possible, pas plus que n'est possible l'amélioration d'efficacitéde l'action dans le monde extérieur.

C'est pourquoi toutes les théories en "yses" et en "ismes" qui ont toujoursl'habitude de partir soit du sujet, soit de l'objet, se trompent et n'aboutissentà aucune efficacité réelle.

Le monde intérieur et le monde extérieur sont inséparables, toute harmonisationde l'un provoque une harmonisation de l'autre, toute désharmonie de l'un est lereflet d'une désharmonie de l'autre.

Une conscience plus large aboutit à une action plus efficace.

Si ni les pensées, ni les actions, ne peuvent nous faire changer de champ deréalité et ne sont qu'illusoirement opérationnelles, alors comment doit-onprogresser pour s'ouvrir à de nouveaux champs de réalité plus harmonieux, pluslarges et plus profonds ?

Cette question est celle qui ressort le plus intensément de "la Grille del'Evolution".

Autrefois les gens se développaient et mouraient dans le même champ de réalité;aujourd'hui, chacun voit son champ brisé par le jeu de la mode ou la confrontationdes cultures.

S'identifier, comme nous en avions l'habitude, à un champ de réalité et enséparer naïvement les facteurs intérieurs et extérieurs aboutit à nous enfermerdans un cercle magique comme ceux des contes de fées, tandis que la réalité sedésagrège en nous emportant dans la mort.

La liberté humaine ne consiste pas à se laisser manipuler par un champ maisbien en la capacité de choisir son champ et d'être par là-même soi-même au-delà detout champ. Le champ de réalité détermine le monde intérieur et le monde extérieur dans leurmanière de se présenter à nous. C'est pourquoi la "réalité" intérieure etextérieure sont indissociables.

LA NOTION DE CHAMP.

Le mot "champ" vient du latin "campus" qui désigne une plaine, un terraincultivé, c'est pourquoi le mot "champ" a comme premier sens littéral, "étendue deterre propre à la culture".

Le même mot peut être utilisé d'une manière déjà un peu plus abstraite, "unterrain ou un espace dédié à une activité : champ de bataille, champ de course,champ d'aviation, champ de foire, etc..."

Au sens figuré, il devient synonyme de "domaine d'action" ou de "sphère" : "lechamp immense des hypothèses. Agrandir le champ de la connaissance."

Mais la notion de champ ne commence à prendre tout son sens actuel qu'avec ledéveloppement des sciences techniques où il prend le sens de : espace limité

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(concret ou abstrait) réservé à certaines opérations ou doué de propriétés. C'estdans ce cadre qu'apparaît la notion de champ magnétique, électrique ou degravitation.

On sait que la physique se résout aujourd'hui en quatre forces qui constituentchacune un des "champs" pour l'instant irréductibles de la physique moderne, undes défis actuels étant l'unification de toutes ses forces dans le cadre d'unethéorie globale.

Très récemment est apparue la théorie "des champs de forme" de RupertScheldracke qui tente d'expliquer la fidélité à certaines formes, chez lesminéraux, les végétaux et les animaux, par l'existence de "champs de forme".

Quand nous parlons de "champ de réalité" nous nous inscrivons dans la tendancede l'évolution du mot "champ".

Chacun d'entre nous fait l'expérience de deux types d'événements qui sontséparés par le fait que les uns arrivent à l'extérieur de son corps et les autres,à l'intérieur. L'ensemble total de ces événements, intérieur et extérieur compris,constitue la réalité la plus exhaustive dont nous pouvons prendre conscience à unmoment donné.

De la même manière que la limaille de fer s'oriente en fonction du champmagnétique qu'on lui applique, de même notre réalité intérieure et extérieure estprise dans un champ qui l'oriente.

Cette orientation qui est due au champ dans lequel nous nous sommes inscritspeut être totalement ignorée par nous, tandis que nous agissons et réfléchissons.Nous avons l'impression d'être libres comme un poisson dans l'eau.

Nous ne nous rendons pas du tout compte que nous sommes justement dans l'eau etdonc dans un contexte particulier.

Notre champ de réalité se construit à travers une description du monde qui nousest transmise par nos parents et notre éducation. Cette focalisation del'attention à travers les habitudes est nécessaire pour que la réalité intérieureet extérieure prenne une consistance solide.

La réalité, avant qu'elle ne soit sélectionnée par un champ, est si complexe etmultidimensionnelle qu'elle s'efface elle-même comme toutes les couleurs semélangeant reviennent au blanc, où comme si voulant écouter toutes les radios à lafois, nous n'aboutissions qu'à une cacophonie.

Une sélection est nécessaire afin qu'une réalité à la fois intérieure etextérieure puisse prendre corps.

Ultérieurement nous finissons par oublier la possibilité qu'il puisse existerd'autres champs de la réalité que ceux que nous expérimentons tous les jours. Cela est nocif à plusieurs égards.

— Cela nous rend étrangers aux êtres expérimentant d'autres types de réalitéqui dès lors, parce que nous ne les comprenons pas, nous apparaissent négatifs etdangereux.

— Tout champ de réalité naît et se développe mais aussi finit par se désagrégeret disparaître par le processus inverse de sa création. Cette disparition n'a riende catastrophique en soi mais peut apparaître catastrophique, si l'on s'estidentifié à ce champ de réalité, sa fin constituant pour nous la fin de touteréalité, la fin du monde. Cela transforme un événement naturel qui n'est pas plusimportant qu'autre chose en une catastrophe sans mesure.

— S'identifier à un champ de réalité est particulièrement négatif aujourd'huicar, comme nous l'avons vu, le temps et l'espace se sont en quelque sorterapetissés et les champs de réalité ont un temps de survie de plus en plus court.Alors qu'autrefois ils pouvaient s'ignorer, les champs de réalité se trouvent

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aujourd'hui constamment confrontés et se brisent les uns contre les autres. Siautrefois on pouvait vivre relativement heureux toute sa vie, en s'identifiant àun seul champ de réalité et en ignorant tous les autres, ce type d'habitude nepeut aboutir aujourd'hui qu'à un supplice sans fin.

Il est difficile d'accepter l'existence d'autres champs de réalité et encoreplus difficile d'expérimenter le fait de quitter celui dont nous avons l'habitudeet d'en découvrir d'autres.

Nous sommes réglés sur un certain champ de réalité et nous nous y maintenonspar la force de toutes nos habitudes y compris, et surtout, par les plus petiteset les plus anodines Rien n'est plus difficile que de quitter ses habitudes. Noussommes inconscients de nos tics, de la manière dont nous posons notre pied ou dontnous prenons notre fourchette et parce que nous sommes inconscients de tout cela,nous sommes automatiquement victimes d'un certain champ de réalité.

Tout chasseur sait que c'est grâce à ses habitudes, qu'il faut bien connaître,que l'on peut surprendre le gibier et rendre fatales la capture et la mort. Demême ce sont nos habitudes qui rendent fatales notre capture et notre mort.

Ce qui est difficile à rendre conscient pour soi est facile à voir chez lesautres. Il nous arrive de voir des amis et de les sentir complètement enfermésdans leur champ de réalité, ils se plaignent de souffrances intérieures ou biend'accidents négatifs qui leur sont arrivés dans le monde extérieur.

Nous voudrions les aider, mais tout ce que nous pouvons dire ne sert à rien.C'est comme s'ils ne nous entendaient pas ou alors traduisent à leur manière ce

que l'on est en train de dire et aboutissent à y trouver un sens qui ne peut queles renforcer dans leur erreur.

En désespoir de cause, nous voyons notre ami ne pouvoir être aidé par aucuneidée ou action qui s'avèrent être toutes aussi inutiles les unes que les autres.

Nous pressentons qu'il est sur une mauvaise voie, qu'il suscite cela même dontil se plaint, qu'à la limite nous pourrions prédire ce qui va arriver, etpourtant, parce qu'il est enfermé dans un champ de réalité donné, impossible de lefaire dévier de sa route qui, dès lors, peut apparaître fatale.

Une autre manière de comprendre ce qu'est un champ de réalité est de considérerce qui arrive dans un voyage. On part en Angleterre, on y reste un certain temps,on fait du shopping et on achète un pull-over extraordinaire, un peu cher, maisque l'on prend tout de même à cause de sa couleur magnifique; et puis voilà quel'on retourne en France et le magnifique pull-over devient immettable. Pourquoi?Parce que la couleur apparaît désormais vraiment de mauvais goût. On a changé decontexte. Ce pull-over si seyant en Angleterre, parce qu'il était un signe enharmonie avec le champ sémantique anglais, apparaît complètement déplacé etridicule en France. Chaque pays avec sa langue, ses habitudes, ses valeurs,constitue un Champ de Réalité et ce qui s'intègre harmonieusement dans l'unapparaît étrange dans l'autre.

Nous avons pris l'habitude souvent inconsciente d'utiliser cette notion dechamp de réalité et de jongler avec les différents champs que nous avons traversésau cours de notre vie.

Simplement nous le faisons sans bien y réfléchir et sans même nous rendrecompte que ces nouvelles habitudes entrent en conflit avec certaines valeurs quinous avaient été transmises.

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La culture anglaise constitue un champ de réalité. Un individu constitue unchamp de réalité, chaque espèce animale a son champ de réalité. Dans le cas desanimaux, les champs de réalité sont d'autant plus différents que l'espèce estdifférente. L'univers tel que le perçoivent les chauve-souris est bien différentdu nôtre, cela est encore plus vrai pour les insectes, etc.

LES RÈGLES DU JEU.

Dans les quatre chapitres qui vont suivre, nous allons explorer les règles quiprésident au jeu des champs de réalité.

Quels sont les différents niveaux qui constituent un champ de réalité ?Quels sont les principes de stabilité qui font qu'il est si difficile

d'échapper à un champ de réalité ou de le modifier ?Quels sont les modes d'évolution, antidotes des principes de stabilité, qui

permettent d'échapper à la puissance d'un champ ?Quelles sont les grandes étapes de la vie d'un champ de réalité ?

Cinquième chapitre

LES NIVEAUX DE REALITE

La notion de champs de réalité est large.Une culture, une entreprise, un individu, constituent autant de champs de

réalité différents. Au delà de la diversité des champs de réalité on retrouve unegrande triade : le Niveau Formel, le Niveau Turbulent et le Niveau Vide.

Ils sont, analogiquement, l'écorce, la pulpe, et le noyaux de chaque Champ deRéalité Le Niveau Turbulent se cachent derrière l'aspect formel et le manipulent.

Le Niveau Vide est la dimension la plus cachée de la réalité, la dimension àtravers laquelle chaque Champ de Réalité peut être transcendé et s'ouvrir auxautres

Le niveau vide.

C'est le niveau le plus important à tous les points de vue, puisqu'il est lasource de tout.

De la même manière que pour changer de vitesse on est obligé de revenir aupoint mort, de la même manière, pour changer de champ, on est obligé de passer parun "au-delà" de tout champ et c'est ce qu'est le niveau vide.

Tout champ tend à inclure à son extrême limite paradoxale le niveau vide. Leniveau vide est à l'origine de tous les champs.

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On peut dire que tous les champs partent du niveau vide comme les rayons d'uneroue partent du centre qui est vide. Si ce sont les rayons qui constituent laroue, c'est le vide central qui lui permet de tourner et "d'être une roue".

Ainsi, si le niveau vide est le plus effacé, celui qu'on oublie le plusfacilement, il n'en reste pas moins le plus important car il est le point dedépart et de retour de tout champ et inclut en lui toutes les possibilités.

Notre conscience n'arrive que très rarement au niveau vide parce qu'elle esttoute occupée par l'agitation d'un champ de réalité bien spécifique. Pourtant,rien n'est plus important que de développer sa conscience du niveau vide. Pluscette conscience est développée, plus l'individu est libre et peut passer aisémentd'un champ de réalité à un autre, ou créer de nouveaux champs de réalité.

Le niveau vide est l'état le plus subtil de toute réalité.

LE NIVEAU TURBULENT.

Avec le niveau turbulent commence l'incarnation du champ et de sa réalité. Maiscette incarnation reste encore floue, mal définie. Le niveau turbulent est unstade intermédiaire entre le début issu du vide et la totale solidification qui nes'opère qu'au niveau formel.

Au niveau turbulent, tout est fluide. Le plus petit événement en un point du système peut changer complètement

l'évolution de l'ensemble, de la même manière que dans le domaine atmosphérique,il est toujours très difficile de prévoir l'avenir car l'évolution dépend d'unemultitude de micro-facteurs qui, par démultiplication, peuvent avoir des effetsconsidérables.

Le niveau turbulent est le niveau de l'intensité, de l'énergie. C'est le niveau turbulent par lequel se crée, se transforme et disparaît un

champ de réalité. Pourtant, le niveau turbulent, bien qu'il soit déjà plus accessible à la

conscience que le niveau vide, reste souvent caché. Une des raisons principalesest que le niveau turbulent ne fonctionne pas d'une manière mécanique etrationnelle comme le niveau formel où tout est blanc ou noir. Au niveau turbulenttout est mélangé dans des liaisons inextricables impossibles à dénouer et àexplorer d'une manière logique et discursive. C'est pourquoi nos raisonnements ontl'habitude d'ignorer le niveau turbulent et de ne prendre en compte que le niveauformel.

Dans le cadre d'un champ de réalité lié à l'individu, le niveau turbulentcorrespond à toute la partie irrationnelle de l'individu, les désirs, lesémotions, le hasard, tout cela est issu du niveau turbulent.

L'individu est comme un petit bouchon pris dans le champ turbulent d'une vagueet il a l'impression que ce qui lui arrive, ce qu'il désire, lui est propre. Enfait, de la même manière que le petit bouchon est emporté par le tourbillon, ilest emporté par le niveau turbulent du champ dans lequel il s'inscrit.

Le niveau turbulent est donc toujours présent à la conscience, il est ce quinous donne justement l'impression d'avoir conscience, mais parce que nousn'arrivons pas à le saisir rationnellement, il reste en quelque sorte inconscientdans le sens où il nous manipule sans que nous puissions nous-mêmes le saisir etle manipuler.

Le niveau turbulent est le véritable opérateur de tout champ de réalité. Larationalité formelle ne venant par-dessus que pour entériner, sous un semblant deraison, les intensités qui anime le niveau turbulent.

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LE NIVEAU FORMEL.

Le niveau formel est le troisième et dernier niveau. C'est celui qui noussemble le plus réel, le plus solide et pourtant c'est le plus superficiel et leplus fragile.

Le niveau formel fonctionne par binarité logique, blanc ou noir, oui ou non.Il fonctionne d'une manière mécanique et rationnelle. C'est pourquoi nous

l'appelons "formel", car il hiérarchise tout par une série de bifurcationsbinaires où tout tiers est exclu. Notre corps fonctionne de manière formelle avectoute son arbrification de vaisseaux et de nerfs et son côté droit et son côtégauche, etc... Mais notre mental aussi fonctionne d'une manière formelle, enorganisant toutes nos idées d'une manière rationnelle et raisonnable.L'organisation d'une entreprise est habituellement formelle.

Le niveau formel est celui dont nous avons le plus conscience, alors que leniveau turbulent et le niveau vide sont difficilement saisissables.

Le niveau formel est le lieu de réalisation et de cristallisation des tendancesnées au niveau turbulent.

Tous les objets, l'apparence solide de la matière qui nous entoure dans la viequotidienne, appartiennent au niveau formel.

Parce qu'il fonctionne mécaniquement de cause à effet, le niveau formel estfacilement explorable à travers la science et permet une reproductivité desexpériences et une prévision quasi parfaite.

A cause de toutes ces qualités, bien que le niveau formel soit le plussuperficiel, nous avons pris l'habitude de ne plus avoir conscience que de ceniveau-là, et d'oublier les deux précédents. Cette obstruction de la consciencerend impossible l'ouverture à d'autres champs de réalité et la compréhensionprofonde du champ de réalité dans lequel nous sommes inscrits.

Utilisations et exemples des trois Niveaux de Réalité.

Sciences physiqueLa physique newtonienne s'est attaquée au niveau formel de la matière, elle en

reste au niveau mécanique et structurel de la matière. La physique subatomique, en montrant la réductibilité de toute matière à de

l'énergie, démontre la toute puissance du niveau turbulent à l'intérieur même dela matière.

Enfin très récemment, avec la problématique de la réunification de toutes lesforces dans une théorie globale, commence à se poser le problème du niveau vide.En même temps que la physique se rapproche de ce dernier niveau, elle ne peut plusque tendre vers lui indéfiniment, sans jamais parfaitement l'atteindre car leniveau vide par sa nature même échappe à toute formalisation.

Les difficultés logiques auxquelles s'est trouvée affrontée la physique dans sapercée du niveau turbulent, se trouvent radicalisées en devenant insoutenables àmesure qu'elle tend à atteindre le niveau vide.

Nous-mêmes.Pour ce qui est de chacun d'entre nous, nous faisons habituellement

l'expérience ou plutôt "l'absence d'expérience" du niveau vide, à travers lephénomène dépressif qui précède et qui suit un changement de champ de réalité.

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Nous prenons souvent les décisions de grande réorientation de notre vie lorsquenous y sommes acculés par la dépression:

Petit à petit, les valeurs auxquelles nous tenions, nos amis, notre activité,semblent perdre tout intérêt, en fait nous sommes tout simplement en train demourir à un champ de réalité. Il se désagrège, revient à l'état turbulent, nousn'arrivons plus à être à l'heure, à comprendre ce qui se passe, à faire desprojets d'avenir. Nous avons alors parfois une tendance à nous crisper, à allervoir un docteur et en prenant des médicaments à nous bloquer dans le champ quenous connaissons et qui pourtant se désagrège. Cela ne sert à rien et n'aboutitqu'à un lent dépérissement. Nous pouvons par contre traverser courageusement cettephase dépressive dans laquelle nous perdons toutes nos illusions et qui nousramène à zéro. Evidemment, le processus est douloureux et cela en proportiondirecte avec notre identification au champ de réalité que nous sommes en train dequitter. Pourtant, à travers ce processus, au plus profond de notre désespoir,nous touchons une nouvelle terre, un nouveau champ de réalité, de nouveaux amis,de nouvelles valeurs, un nouveau métier qui nous conviennent mieux et qui nousapparaissent plus épanouissants que tout ce que nous connaissions dans notre vieprécédemment. Nous disons alors que nous avons vécu notre "traversée du désert".

Un jour ou l'autre,chacun est engagé dans ce genre de processus et cela commenous l'avons déjà expliqué, de plus en plus souvent à cause de la rapidité del'évolution actuelle.

Ce phénomène de "crack up", parce que nous n'en connaissons pas les modalités,nous fait peur et à cause même de cette peur ce processus enrichissant peut êtrevécu négativement.

Bien comprendre le niveau vide et le niveau turbulent, et développer laconscience à chacun de ces niveaux, permet de redonner à ce genre de processusleur juste place en apprenant à se servir des passages à vide et à les utiliserpour avancer.

Les erreurs types à éviter:— Le niveau formel, qui embrasse tout le corps ainsi que le mental, a tendance

a barrer la route à tous les élans incontrôlés venant du niveau turbulent. Cette séparation en deux de l'individu aboutit à une sorte de dessèchement, la

tendance à s'agripper à un champ de réalité au milieu du désagrègement actuel. Cephénomène de développement d'un niveau formel totalitaire est la réaction la pluscourante face au changement actuel. On la retrouve chez les individus, au niveaudes entreprises mais aussi des états.

— Un deuxième type d'erreur consiste à s'ouvrir au niveau turbulent, maiscependant pas jusqu'au niveau vide. Ce type d'erreur est beaucoup plus rare car ilne touche qu'un petit nombre d'hommes qui ont su s'élever au-dessus du niveauformel et qui sont déjà les borgnes au royaume des aveugles.

Le seul fait d'avoir conscience du niveau turbulent et d'en connaître lamanipulation permet d'être tout puissant dans un champ de réalité donné. Cettetoute puissance est un piège car les individus arrivés à ce niveau, emportés parla jouissance de leur puissance, risquent de ne pas s'ouvrir au niveau vide.

Seul un nombre extrêmement petit d'individus arrivent à se frayer un cheminjusqu'à la pleine conscience du niveau vide.

Cette longue traversée des apparences et des illusions peut être comparée àl'effeuillage des pelures d'un oignon. La liberté n'y est conquise qu'à travers unlent retour au dénuement de la naissance.

Les Niveaux de Réalité dans les entreprises

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Il est habituel de voir dans les entreprises des équipes dirigeantes devenuesrigides à travers la solidification du niveau formel. L'entreprise au plus profondd'elle-même aimerait évoluer, innover. Les vendeurs ont des idées pour vendremieux.. De nouveaux concepts de produits mais tout cela reste bloqué, on en parledans les couloirs, mais rien ne se passe. Tout reste refoulé au niveau turbulentsans arriver à prendre corps.

Cela est le symptôme très habituel du fait que la direction est bloquée auniveau formel et n'arrive plus à évoluer avec le niveau turbulent.

Le niveau formel est dès lors comme d'énormes blocs de glace cristallisés,secoués par un courant profond; toute l'énergie de l'entreprise est perdue danscette lutte, entre les élans souterrains et les structures apparentes.

Paradoxalement, la direction a beaucoup de mal à garder le contact avec ceniveau-là. Elle est un peu comme le mental, au niveau de l'individu, toujoursoccupé à organiser, à rationnaliser, à expliquer et il lui est très difficile des'ouvrir au côté flou, changeant, désordonné et questionnant du niveau turbulent.

Toute direction efficace doit constamment garder le contact avec le niveauturbulent de l'entreprise, car c'est ce niveau-là qui constitue un réservoird'idées constamment plein pour innover et faire évoluer l'entreprise.

Cette écoute est la condition sine qua non pour une bonne ambiance dansl'entreprise.

Les entreprises qui savent intégrer ces deux niveaux ont une efficacitéincomparable avec celles qui en sont restées au premier niveau. Mais, la pleineconscience du niveau turbulent n'est rien à côté de la capacité de garder contactavec le niveau vide. Une direction d'entreprise qui sait garder le contact avec leniveau vide est capable de juger constamment, et comme de l'extérieur, lasituation actuelle dans l'entreprise.

Elle est capable de parfaitement maîtriser l'ambiance de travail mais aussi dela réorienter et par là de permettre à l'entreprise la métamorphose dans unnouveau champ de réalité, si cela apparaît nécessaire.

Le Japon atteint à l'heure actuelle, dans le domaine des entreprises, desperformances exceptionnelles parce que sa culture traditionnelle l'a habitué àenvisager les choses d'une manière très différente de l'Occident et qui est trèsproche de ce que nous expliquons.

Contrairement aux habitudes occidentales, où plus on est haut placé dans lahiérarchie, plus l'on trouve normal de parler beaucoup; les Japonais, eux,considèrent la direction comme un travail avant tout d'écoute et la direction parle silence constitue le summum de l'autorité!

Sixième chapitre

PRINCIPES DE STABILITE

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Chacun peut expérimenter une certaine difficulté à pénétrer ou à sortir d'unchamp de réalité. Cette stabilité nécessaire à la cohésion de chaque champ vientde trois Principes de Stabilité : le Principe d'Inclusion, le Principed'Absorption, le Principe d'Exclusion.

Grâce aux niveaux de réalité, nous avons pu pénétrer dans l'épaisseur deschamps de réalité. Nous avons découvert comment en dessous de leur surface apparente se cachent lesflux qui les régissent.

Nous avons découvert ce qui, au-delà de leurs limites, les relie à l'origine detout.

Avec les principes de Stabilité, nous allons essayer de comprendre quels sontles différents verrouillages qui font qu'il est si difficile d'échapper à un champlorsqu'on y est inclus et pourquoi tous les autres champs restent invisibles.

Les principes de Stabilité ont la qualité indéniable de donner à chaque champsa stabilité et faire qu'il puisse se maintenir distinctement à l'exclusion desautres.

Mais les principes de Stabilité ont le défaut de nous enfermer dans le champdans lequel nous sommes en nous rendant aveugles aux autres champs.

C'est pourquoi il est essentiel de comprendre ces principes de Stabilité. En apprenant à les manier, nous apprenons à nous libérer des malheurs liés à

notre emprisonnement dans un champ de réalité et nous apprenons comment créer unnouveau champ de réalité.

INCLUSION.

Les champs s'empilent successivement les uns dans les autres. Un grand champ peut contenir plusieurs sous-champs qui eux-mêmes contiendront

une multitude de sous-sous-champs. C'est le système des petits plats dans lesgrands, ou des poupées russe. Le champ de réalité minéral contient le champ deréalité des vivants qui lui même contient les différentes espèces animales; parmielles le champ de réalité humain qui contient à son tour différentes races, quicontiennent à leur tour différentes catégorie socio-culturelles, etc..

Ainsi, alors même que l'on croit échapper à un champ et rejoindre le niveauvide, on ne fait que tomber dans le champ plus large qui contenait celui où nousétions précédemment. C'est ce qui explique que l'on puisse passer relativementsimplement et sans trop de difficultés d'un sous-champ à un autre, dans la mesureoù ils sont contenus dans le même grand champ.

En effet, ce genre de changement ne touche que la partie la plus superficiellede nous-mêmes, et n'implique un retour au niveau vide que très symbolique.

Par contre, dès qu'on s'attaque à des champs de réalité plus profonds et qu'onessaye d'y échapper, on se trouve confrontés à des forces d'une puissanceextraordinaire et une remise en question si profonde de notre identité que cegenre de processus peut prendre les apparences de la folie ou même de la mort etréellement le devenir s'il est mal contrôlé. Par exemple il est difficile dedevenir partie prenante d'une autre culture mais encore plus d'une autre race.

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Ce phénomène de couches successives fait que le retour au niveau vide originelou même au niveau turbulent le plus profond est pratiquement impossible sans unlent et long travail d'effeuillage des strates successives de la réalité.

Ce principe de Stabilité permet une très grande solidité de chaque champ qui,en quelque sorte soigneusement empaqueté, est stabilisé par des champs pluslarges.

Le principe d'Inclusion fonctionne comme garde-fou. Il empêche les individus deremonter d'une manière trop rapide au niveau turbulent ou au niveau vide profonds,ce qui provoquerait un phénomène de décompression un peu similaire à celui d'unplongeur remontant à la surface sans s'arrêter à certains paliers.

Le niveau turbulent et le niveau vide profonds sont si intenses que ce n'estqu'à travers une bonne préparation que l'on peut supporter d'y pénétrer.

On peut s'entraîner immédiatement à changer et à jongler avec les champs deréalité superficiels et expérimenter des niveaux turbulents et vides superficiels,cela s'effectue sans danger.

ABSORPTION.

Chaque champ secrète une force qui a pour effet de ramener constamment à luitous les éléments ou les individus qui participent à ce champ.

Chaque champ a tendance à se présenter comme une image globale du monde. On al'impression qu'il est tout, explique tout et est infini.

Nous faisons constamment, dans la vie courante, l'expérience de la force d'Absorption des champs.

Nous rencontrons quelqu'un qui nous fait pénétrer dans son "monde" et nousvoilà complètement transformés, nous voyons toute chose d'un œil différent, toutprend imperceptiblement la coloration du "monde" de notre ami; il nous a enquelque sorte conquis, un peu comme le soleil peut conquérir par sa force degravitation un corps céleste passant trop près de lui. Désormais toute notre vietournera autour de cet ami, à moins que la rencontre avec quelques autres étoilesnous emmène ailleurs.

La force d'Absorption d'un champ est d'autant plus forte que ce champ est plusprofond et vaste dans le cadre de l'empilage et du principe d'Inclusion dont nousavons parlé.

Certains livres nous font changer de champ de réalité en nous initiant à unenouvelle perception du monde.

On connaît la force d'Absorption des idéologies et comment on peut se mettre àles réciter à tout bout de "champ".

Le principe d'Absorption est capital car sans lui aucun champ de réalité nepourrait garder sa cohésion et se former.

Bien évidemment, comme le principe d'Inclusion, il a le défaut de sa qualité,il rend difficile l'évasion hors d'un champ.

EXCLUSION.

Chaque champ ignore et exclut hors de lui tous les champs et les morceaux dechamp de réalité qui lui sont étrangers.

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Le principe d'Exclusion est le complémentaire du principe d'Inclusion. Alorsque le principe d'Inclusion est centripète, le principe d'Exclusion estcentrifuge.

Nous pouvons faire l'expérience de ce genre de phénomène par la tendancegénérale qui apparaît à travers la ségrégation culturelle. Nous retrouvons cephénomène d'exclusivité dans la tendance qu'a tout groupe installé dans un champde réalité bien déterminé, à exclure, excommunier ou brûler comme une sorcièretout messager venant d'un autre champ.

UTILISATIONS DES TROIS PRINCIPES DE STABILITÉ.

Bien comprendre les trois principes de Stabilité, en expérimenter la force, estutile cesser d'être victime et maîtriser les champs de réalité.

Ces principes de Stabilité sont utiles quand on est en train soi-même de créerun nouveau champ de réalité. Ces trois principes nous donnent les trois forces quinous permettront de stabiliser et de donner corps aux champs de réalité que nousrêvons de créer.

Inversement, la bonne connaissance des principes de Stabilité nous permet deconnaître par avance les difficultés que nous aurons à traverser pour quitter unchamp de réalité déterminé.

Septième chapitre

MODES D'EVOLUTION

Il existe heureusement des antidotes aux Principes de Stabilité qui, sinon,nous rendraient esclaves à jamais du champ de réalité dans lequel nous sommesnés.

Ces antidotes sont au nombre de trois, aussi légers que sont lourds lesPrincipes de Stabilité. Nous les avons appelés les Modes d'Evolution.

Nous avons compris comment et pourquoi nous sommes enfermés dans un champ deréalité par les principes de Stabilité mais aussi comment grâce à ces principesnous pouvons créer un nouveau champ de réalité, maintenant nous pouvons aborderles manières de contrarier ces principes pour nous évader d'un champ de réalité etle dissoudre.

C'est le but de ce chapitre sur les "Modes d'Evolution" .

Les Modes d'Evolution ne sont pas, comme les Principes de Stabilité, des forcesqui se jouent de nous sans que nous en ayons conscience. Les Modes d'Evolution

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nécessitent pour agir que nous les mettions en oeuvre par la force de notrevolonté. En cela, ils sont bien antinomiques des principes de Stabilité ets'opposent en miroir à chacun d'eux.

Au Principe d'Inclusion correspond le Mode d'Evolution : ElévationAu Principe d'Absorption correspond le Mode d'Evolution : ApesanteurAu Principe d'Exclusion correspond le Mode d'Evolution : Flottement

ELEVATION.

L'Elévation consiste en la capacité de circuler entre les différents niveaux deréalité.

Alors même que nous sommes enfermés dans un champ de réalité, rien ne nousempêche au lieu de rester au rez-de chaussée, le niveau formel, de remonter auniveau turbulent ou même au troisième étage, au niveau vide. En se faisant, nousnous dégageons des aspects les plus lourds et solides du champ de réalité danslequel nous sommes enfermés.

En atteignant le niveau turbulent, notre champ de réalité qui nous apparaissaitsi solide devient mou, fluctuant, irrationnel. C'est d'ailleurs pourquoi nouspréférons habituellement nous cantonner au rez-de chaussée pour ne pas êtredérangé dans nos certitudes.

Enfin si malgré l'expérience "désagréable" du deuxième étage, nous poursuivonsnotre ascension jusqu'au troisième étage, notre champ de réalité apparaît alorsdans toute l'évanescence et la relativité de ses débuts.

A cette hauteur nous pouvons avoir quelques vertiges rétrospectifs quant lamanière dont nous-mêmes ou les êtres restés au rez-de-chaussée peuvent tenir pourextrêmement solides des fondements qui ne reposent que sur du vent.

A cette altitude nous ne sommes plus reliés à notre champ que par un fil trèsténu.

Nous pouvons en voir les illusions, mais aussi les qualités, ainsi que ledestin probable de ce champ. Voyant toutes les turbulences qui animent notrechamp, comme si nous étions d'une autre planète, nous pouvons mieux comprendre lesforces qui le manipulent. Nous sommes détachés car nous sentons la possibilité depénétrer d'autres champs de réalité si nous ne désirons pas revenir dans celui-là.

L'Elévation permet de se sentir plus libre vis-à-vis d'un champ, mais aussi,grâce à la vision plus profonde de ce champ, d'avoir une action plus harmonieuseet plus efficace à l'intérieur même de ce champ.

On pensera évidemment aux techniques de méditation comme celles du Zen, du yogaou encore aux danses frénétiques des derviches tourneurs, mais aussi, pour resterbeaucoup plus proche de notre culture, de ce qu'a été à l'origine la prière dansle cadre chrétien. Il n'y a pas de culture ni de civilisation qui n'ait eu à samanière un Mode d'Elévation.

Le sommeil est le Mode d'Elévation le plus commun.Lorsque le Mode d'Elévation tombe en panne, le champ de réalité est sur la voie

de la perdition car il n'arrive plus à harmoniser ses courants contraires et commeun individu ayant perdu le sommeil, s'effondre petit à petit dans des luttesinternes inutiles.

L'Elévation permet l'évolution d'un champ à un autre. L'Elévation est utile à l'intérieur d'un champ pour maintenir un bon alignement

des différents niveaux et une harmonie générale.

Page 59: Le management systémique de la complexité

L'Elévation est l'antidote du principe d'Absorption, car c'est grâce àl'Elévation que l'on peut traverser les différentes strates de champ de réalitéempilées les unes dans les autres et retrouver le cœur de toute réalité.

Dans la mesure où nous vivons désormais dans un univers explosé et que noussommes chacun inscrits dans un champ de réalité plus ou moins différent, il nousfaut, chacun à notre manière, mettre au point notre mode d'Elévation" particulier.

L'Elévation se manifeste par le silence et la capacité à écouter.

APESANTEUR.

L'Apesanteur est le second Mode d'Evolution et l'antidote du deuxième Principede Stabilité, l'Absorption.

L'Apesanteur est l'habilité que nous avons à neutraliser l'Absorption en nousmaintenant dans un état relativement détaché quant au champ de réalité dans lequelnous sommes inscrits.

Rien ne nous oblige à croire dur comme fer au champ de réalité dans lequel noussommes inscrits. Nous pouvons maintenir une attention en quelque sorte suspendue,"croire sans y croire".

Si nous avons pris l'habitude d'utiliser couramment "l'Elévation", nouspouvons, alors que nous redescendons au niveau formel, garder une conscienceclaire du niveau turbulent et vide.

Nous pouvons agir et penser tout en voyant comment ces actions et ces penséessont produites par le champ dans lequel nous sommes inscrits. Nous pouvons jouernotre rôle sans y être attaché d'une manière excessive Cela permet une actionharmonieuse et efficace.

L'état d'Apesanteur est confortable dans le cadre d'un champ de réalité donné,car il permet de participer à ce champ et d'en connaître toute la richesse, sansse laisser emprisonné par ses limites, les illusions des turbulences et lescontradictions formelles.

L'Apesanteur se manifeste par l'humour et le détachement.

LE FLOTTEMENT.

Le Flottement est le troisième et dernier de nos antidotes. Le Flottement sert à neutraliser le principe d'Exclusivité qui est le troisième

de nos principes de Stabilité. Le Flottement fait référence à la capacité que nous avons de maintenir notre

conscience, en état de veille, sur plusieurs champs de réalité différents à lafois.

Pour pouvoir être en position de Flottement, il faut au moins connaître deuxchamps de réalité.

Plus ces deux champs seront différents, plus l'état de Flottement sera intense.On peut aussi connaître trois, quatre, cinq ou une multitude de champs de réalité.Le principe reste toujours le même, il consiste à créer, par confrontationsimultanée de plusieurs champs de réalité différents, un état second extérieur àtout champ de réalité qui nous permette de garder la conscience ouverte contre leprincipe d'Exclusivité.

Page 60: Le management systémique de la complexité

En fait, à cause de la confrontation actuelle de champs de réalité trèsdifférents et leur explosion les uns contre les autres, nous sommes tous plus oumoins précipités dans une situation de Flottement, mais nous ne percevons cettesituation, la plupart du temps, que de façon purement négative. Au contraire, nouspouvons voir là un exercice tout à fait idéal pour atteindre une plus largeconscience et une efficacité accrue.

Pour ceux qui connaissent l'informatique, quelqu'un qui sait bien flotter a lesmêmes avantages qu'un ordinateur qui sait intégrer des programmes différents etpasser de l'un à l'autre sans délai. On peut faire alors des miracles enrapportant d'un champ de réalité à l'autre certaines possibilités spécifiques del'un ou de l'autre.

Si les oranges n'existent pas dans un champ donné, on pourra les rapporter d'unautre champ de réalité sous les yeux ébahis et incrédules des hôtes enfermés dansle premier champ.

Le "miracle", s'il est répété, bien qu'il puisse paraître très excitant, n'endétruit pas moins le champ où il s'effectue, un peu comme une langue peutfinalement être complètement détruite par l'invasion de mots étrangers dans sonlexique.

Ce qu'on appelle dans certaines situations un miracle peut tout aussi bienapparaître dans d'autres comme une véritable catastrophe.

Miracle et catastrophe sont des lieux de rupture où un champ de réalité s'ouvrebrusquement en abîme, à l'infini des univers parallèles.

Le Flottement se manifeste par la sympathie et la compassion.

UTILISATIONS ET EXEMPLES DES TROIS MODES D'EVOLUTION.

Ces trois Modes d'Evolution permettent aux individus d'échapper à l'enfermementdans un champ de réalité et de contrer, pied à pied, les principes de Stabilitéqui aboutissent à la cristallisation d'un champ.

Ces Modes d'Evolution n'étaient guère utiles jusqu'à aujourd'hui car, commenous l'avons vu, les champs de réalité étant jusque-là relativement stables. Lesindividus naissaient, se développaient et mouraient dans un champ donné.L'utilisation de ces Modes d'Evolution est devenue pratiquement désuète duranttoute la période agraire et industrielle. Durant ces deux périodes proprementdites historiques, les hommes ont été tellement enfoncés dans le champ de réalitéartificiel et très superficiel qu'ils avaient créé, qu'ils en ont oubliépratiquement complètement qu'il puisse exister d'autres réalités.

Si nous voulons retrouver de bons praticiens des trois Modes d'Evolution, ilnous faut retourner dans le monde "barbare" des tribus aborigènes. Ces culturesont gardé une conscience large du monde, sans doute à cause de leur "faiblesse" etde leur immersion dans la nature. Il leur faut pour survivre, connaître le mieuxpossible le champ de réalité de tous les règnes vivants.

Les aborigènes apprennent le devenir "léopard", le devenir "biche", le devenir"herbe", le devenir "vent", le devenir "minéral"...

Ces cultures soi-disant simples sont infiniment plus compliquées que la nôtreissue de l'Age Industriel. Au plus profond de la jungle, avoir une bonne"Ascenseur", maîtriser la "Lévitation" et le "Flottement" sont des gages desurvie.

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Aujourd'hui, où le monde industriel se désintègre, ces mêmes outilsressurgissent et redeviennent nésseçaires à notre survie .

Ce retour à l'origine n'est cependant pas tout à fait un retour au point dedépart. La jungle actuelle n'est pas faite de boas, de crocodiles, et de mygales.Nous n'avons pas à apprendre, comme Moglie, le mot de passe des chimpanzés, desserpents et des loups.

Notre tâche est bien pire, nous avons tout simplement à nous comprendre les unsles autres, et cela est difficile car nous sommes enfoncés chacun dans notremicro-culture, dans un univers tellement particulier qu'il est pratiquement devenuimpossible de nous retrouver sinon par quelques puissances médiumniques.

Au niveau de la gestion des entreprises et des états, "l'Elévation","l'Apesanteur" et "le Flottement" permettent de faire face au changement engardant un esprit assez ouvert, pour comprendre les différents partis-priscontradictoires qui animent le groupe, et réorienter ce groupe d'une manière quisoit en pertinence avec l'actualité.

Huitième chapitre

ETAPES DE VIE

Une fois que nous avons exploré les trois Niveaux de Réalité, les trois Principes de Stabilité et les trois Modes d'Evolution, nous avons tous les éléments pour comprendre les trois moments-clés de la vie d'un champ de réalité qui sont : le Début, le Milieu et la Fin.

Nous avons appris à explorer l'épaisseur des champs de réalité, à les créer, àles dissoudre, à passer de l'un à l'autre.

Cependant , quelque chose nous est encore caché. Tout champ de réalité, qu'onle veuille ou non, a un début et une fin. Nous en faisons l'expérience à traversla naissance et la mort.

Ayant un début et une fin, les champs de réalité ont aussi un milieu. Ces trois points nous donnent le secret des trois moments-clés de la vie d'un

champ. Bien maîtriser ces trois moments-clés, c'est se donner les moyens de profiter

pleinement de chaque étape de la vie et d'en éviter les dangers; c'est aussi sedonner les moyen de faire évoluer notre conscience au-delà de la durée de vierestreinte d'un champ de réalité.

DÉBUT.

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A ses débuts, un champ de réalité est encore pratiquement immergé dans leniveau vide. Il reste donc pour une grande part invisible, en quelque sorte caché.

Les premières émanations sont d'ordre turbulent, elles peuvent être d'une trèsgrande intensité et énergie, mais restent vagues, mal organisées,tourbillonnantes. A ce stade-là, un nouveau champ de réalité est encore trèsfragile. S'il ne trouve pas les conditions adéquates à son développement, ilrisque de se ratatiner et d'avorter.

Le début est toujours une phase critique. Les événements qui marquent ces débuts resteront pour toujours dans les

mémoires de ce champ, comme point de référence servant d'exemple pour lesévénements futurs et deviennent par là même partie structurante du champ.

Si les débuts sont fragiles et décisifs, ils sont aussi la période la plusvivante, la plus amusante de la vie d'un champ, car rien n'étant encore déterminéd'une manière trop solide, une atmosphère générale naïve et spontanée domine.C'est le moment de donner à ce champ les points de repère solides et lesfondements qui lui permettront de se développer harmonieusement.

Dans le cadre d'une entreprise, c'est souvent l'équipe de base qui s'est réunieà l'origine qui aura à faire face aux différentes grandes décisions qu'il faudraprendre par la suite. La qualité de cette équipe est donc essentielle.

Dans cette première phase, le champ de réalité baigne suffisamment dans leniveau vide et le niveau turbulent pour que les problèmes d'écoute et d'ouverturene se posent pas. Au contraire, le champ doit apprendre à se fermer et à seconcrétiser au niveau formel, car ce n'est qu'en prenant forme au niveau formelqu'il pourra véritablement exister et se développer vers sa phase de plénitude.

MILIEU.

Le Milieu, la plénitude, est la deuxième phase critique d'un champ. Le champn'en est plus à ses balbutiements, il a au contraire atteint son développementmaximal. Ce qui veut dire qu'il a exploré toutes ses potentialités et a su, en seconcentrant sur les meilleures, arriver à une harmonie et à un enrichissementmaximum.

Habituellement, un champ arrivé à ce stade se retrouve complètement solidifiégrâce aux trois principes de Stabilité. Son propre succès lui permet d'ignorerqu'il puisse exister tout autre type de réalité que la sienne. Le danger là n'estpas dans la fragilité comme au début, mais au contraire, dans un aveuglement lié àla réussite.

La conscience dans un champ de réalité arrivé à sa plénitude est complètementconcentrée sur le niveau formel et a du mal à garder le contact avec le niveauturbulent et le niveau vide.

A cause de l'effet même de plénitude, l'identification de la conscience auchamp de réalité arrivé à ce stade là atteint sa puissance maximum. Durant cettepériode, le champ peut être tellement gonflé de lui-même qu'il peut en oublierqu'il est mortel et partiel. Dans ce cas là, il ne prend pas conscience desnouveaux champs de réalité qui sont susceptibles de naître dans son sein en luidonnant une extension créative. Il dévore ses propres enfants par incapacité às'ouvrir, pourtant ce qu'il prend pour un succès définitif n'est que le début dela fin.

Page 63: Le management systémique de la complexité

Après une phase d'expansion centripète commence la lente implosion centrifuge Cette expansion puis cette décroissance peuvent être figurées par un losange

marqué en traits épais. Au centre de ce losange, on peut faire partir les quatre bras d'une croix marquée en traits fins, qui montre comment, alors même qu'un champde réalité arrive à son expansion maximum, il suscite à l'intérieur de son sein, les débuts d'un nouveau champ de réalité se développant à son tour, tandis que son "père" commence à se désagréger et à décroître.

DEBUT MILIEU FIN

Les trois étapes de vie

FIN.

La troisième phase critique dans la vie d'un champ est sa Fin. Le champ meurtet disparaît. Après la phase de plénitude le champ perd petit à petit sa substance vitale et voitson niveau turbulent s'apaiser.

Les structures formelles se racornissent sur elles-mêmes, devenant comme des carapaces vides, une simple façade pour cacher l'absence de tout élan ou de toute vie réelle. Dans cette troisième phase tout dépend de la bifurcation qu'a pris la conscience aumoment de sa phase de plénitude :

— soit de s'identifier au champ et à l'illusion de succès.— soit de garder le contact avec le niveau turbulent et vide et de savoir

remonter lentement jusqu'au niveau vide tandis que le champ de réalité se désagrège. Suivant ce choix, la réaction durant la phase de décroissance va être complètement différente.

Dans le cas de l'identification, la conscience se sclérose avec les structures formelles et dépérit avec le champ tout entier en se refermant complètement sur elle-même.

Dans le cas contraire, le champ de réalité et sa décroissance deviennent un tremplin qui permet à la conscience de s'élargir en supportant et en aidant les nouveaux champs de réalité qu'elle a vus naître dans son sein.

Suivant que l'on a pris l'une ou l'autre bifurcation, la mort du champ de réalité prend une signification complètement différente. Dans un cas, c'est une catastrophe absolue et irrémédiable; dans l'autre, ce n'est qu'une apparence qui s'efface.

On retrouvera là les deux manières opposées de considérer la mort en Orient et en Occident. Sans doute, cela vient-il de la tendance occidentale à ne se

Page 64: Le management systémique de la complexité

concentrer que sur l'aspect formel des champs de réalité et le côté oriental de se concentrer au contraire sur le niveau vide.

UTILISATIONS ET EXEMPLES DES TROIS ETAPES DE VIE.

Dans la mesure où la notion de champ recouvre tout type d'événement en devenir,que ce soit une entreprise, un individu, un état, la planète toute entière ou mêmel'univers, les trois étapes de vie permettent d'éclairer une multitude dephénomènes.

Dans le cadre de la vie d'un individu, on pourra y trouver des indicationsquant à la naissance, la vie et la mort de cet individu.

Dans le cadre de la gestion d'une entreprise, ces trois grandes étapes permettront de mieux localiser dans quelle période est l'entreprise, et quelles sont les tactiques à mettre en oeuvre.

La vie d'un champ de réalité peut varier dans sa durée de la micro-seconde pour le champ de réalité d'une particule subatomique, au milliard d'années pour notre univers.

D'une certaine manière, un champ de réalité ne fait que développer toutes lespotentialités enfermées dans son moment de création initiale, c'est pourquoi le commencement en toute chose est si important.

Dans le langage populaire on dit que la première impression ne ment jamais. Et effectivement, quelqu'un de perspicace peut prédire dans ses grandes lignes le résultat d'une rencontre d'après les trois premières minutes de cette rencontre. Chaque début constitue une matrice, une mise entre guillemets qui déterminent un nouveau Champ de Réalité et son développement futur.

Pour ce qui est du milieu, l'essentiel est ce phénomène de bifurcation, ce choix entre l'identification, d'autant plus tentante que le Champ de Réalité est arrivé à une plénitude, ou le détachement et le retour volontaire au Niveau Vide abstrait.

La disparition du champ n'a rien de particulièrement spécial sinon qu'elle nefait qu'entériner le dessèchement d'un champ dans sa structure, cette structure pouvant continuer à exister, un peu comme la coquille d'un escargot alors même que le champ n'est plus vivant.

Il ressort de tout cela que la mort et la disparition des champs sont irrévocables et souhaitables car à quoi cela sert-il qu'un champ subsiste lorsqu'ila développé toutes ses potentialités ? Mais la conscience, elle, peut constamment passer d'un champ à l'autre dans la mesure où elle ne s'identifie définitivement à aucun.

CONCLUSION SUR LES CHAMPS DE REALITE

LE POUVOIR DU PRESENT

Les champs de réalité sont comme autant de vagues qui se gonflent et viennentfinalement déferler sur la plage du monde.

Niveaux de Réalité, Principes de Stabilité, Modes d'Evolution et Etapes de Vie nous donnent les quatre branches de la rose des vents qui anime ces vagues.

Page 65: Le management systémique de la complexité

L'apprentissage et la bonne utilisation de ces connaissances vous donnent la "clé des champs".

Chaque champ a sa propre règle, ses propres valeurs, sa propre perception du monde; ses défauts sont aussi ses qualités et inversement. Il n'arrive à exister hors du niveau vide qu'en se formalisant tout d'abord au seul niveau turbulent et enfin au niveau formel. Par cette incarnation, il acquiert ses caractéristiques, secolore. Cette incarnation se fait à travers une prise de position qui ne peut être qu'imparfaite parce qu'automatiquement partiale. Seul le niveau vide à jamais non né reste parfait, parce qu'il est impartial étant à l'origine de tout.

Chaque champ est comme l'éclosion d'une fleur nouvelle à nulle autre pareillejaillie au coeur du vide.

L'ensemble des champs de réalité constitue un gigantesque kaléidoscope en perpétuel changement, mort et naissance de toutes les potentialités que contient leniveau vide.

Aucun terme ne peut désigner le niveau vide; par exemple à la place de niveauvide, peut-être serait-il beaucoup plus judicieux de l'appeler niveau plein, puisque c'est lui qui contient toute chose.

Cependant, la notion de plein ne lui correspond pas vraiment puisque la conscience venant d'un champ donné le perçoit dans un premier temps comme un vide.

Le jeu du monde est le jeu des champs, si chaque champ a sa règle, la règle des règles de tous les jeux consiste à ne pas oublier qu'on est en train de jouer. En tombant dans cet oubli, on devient victime du champ dans lequel on est et on s'enferme dedans. Parce que ce champ ne peut être que partial, parce qu'on n'a plusconscience du niveau turbulent et du niveau vide, on s'identifie avec le niveau formel et on se fige dans la mort avec lui. Cela est l'essence de tous les dogmes et du plus vieux de tous les dogmes, croire que la conscience est limitée par la mort.

Etre un bon joueur implique qu'on croit au jeu, car sinon il perd tout intérêt, mais aussi que l'on n'y croit pas complètement, car sinon, les enjeux nousapparaissant absolus, nous nous mettons à tricher, ce qui finalement fait perdre aujeu tout son intérêt et nous abaisse en nous rendant les esclaves d'un jeu.

L'ENTRAÎNEMENT.AU SURF.

Glisser sur les vagues des champs de réalité, rien n'est plus simple.C'est peut-être la seule chose que nous connaissons avant même de naître car

comment sinon pourrions-nous naître. Alors même que nous nous identifions à un champ de réalité, nous gardons

toujours nostalgiquement, comme dans un rêve venu d'ailleurs, le souvenir d'un temps béni où nous volions de monde en monde, glissant entre les étoiles et les galaxies, librement.

Et pourtant, quelle difficulté pour retrouver ces gestes originels.

Nous voyons les surfeurs dévaler sans effort les vagues et pourtant, quelle démonstration d'équilibre.

Le geste original est le geste juste. Le geste juste est parfait. La perfection vient autant de l'oubli que de l'attention. Tout cela pour dire que la chose la plus simple est aussi la plus compliquée.

A chacun de trouver son chemin. C'est en cherchant sans relâche qu'on finit par trouver, c'est en forgeant

qu'on devient forgeron. Ce n'est ni par la pensée, ni par l'action, que l'on progresse.

Page 66: Le management systémique de la complexité

La pensée et l'action, par les valeurs et les décisions qu'elles impliquent, appartiennent au niveau formel et ne servent qu'à nous enfermer au niveau le plus bas. Mais attention, penser à ne pas penser est encore une pensée, ne pas agir est encore un type d'action.

L'action et la pensée, au lieu de se refermer sur le niveau formel, doivent avoir pleinement conscience de leur fatuité et être complètement tournées au service du niveau turbulent et au-delà de lui, du niveau vide.

La pensée et l'action, en restant ainsi constamment ouvertes, en état de dévotion et de sacrifice total de soi-même à ce qui les dépasse, peuvent atteindre la transparence qui permet aux trois niveaux de s'aligner et au niveau vide de s'incarner à l'intérieur même de la réalité d'un champ.

Ce même processus qui permet l'incarnation paradoxale du Niveau Vide permet la désincarnation tout aussi paradoxale de la conscience enfermée dans un Champs deRéalité.

Comprendre ce processus c'est la vie, s'y entraîner c'est encore plus de vie

Toute création, toute innovation, constituent l'émergence d'un nouveau Champsde Réalité et naissent de ce genre de processus.

L'innovation, la création, sont d'autant plus radicales que le processus désincarnation-incarnation a été profond.

Troisième partie

LE DEVELOPPEMENT DES POTENTIELS

LA LIBERTE DU FUTUR : Un outil pour changer....

"Nous allons gagner et l'Occident industriel va perdre : vous nipouvez plus grand chose, parce que c'est en vous même que vousportez votre défaite.

Vos organisations sont Tayloriennes; mais le pire; c'est que vos têtes le sontaussi. Vous êtes totalement persuadés de faire bien fonctionner vosentreprises en distinguant d'un côté les chefs de l'autre lesexécutants; d'un côté ceux qui pensent , de l'autre ceux quivissent.

Pour vous le management c'est l'art de fairer passerconvenablement les idées des patrons dans les mains des manœuvres.

Page 67: Le management systémique de la complexité

Nous nous sommes Post-Tayloriens : nous savons que le business estdevenu si compliqué, si difficile et la survie d'une firme siproblématique, dans un environnement de plus en plus dangereux,inattendu et compétitif, qu'une entreprise doit chaque jourmobiliser toute l'intelligence de tous pour avoir une chance de s'entirer.

Pour nous le management, c'est précisément l'art de mobiliser etd'engerber toute cette intelligence de tous, au service du projet del'entreprise."

Konosuke MatsushitaConseillé exécutif à Matshushita Electric Inudstrial Co. Ltd

(Rapport sur l'état de la technique)

INTRODUCTION AU DEVELOPPEMENT DES POTENTIELSUN OUTIL POUR CHANGER

Le développement des potentiels est un outil pour changer.

Le but de cette troisième partie est de nous aider à développer notre potentiel face à l'Age de la Communication et de la Création.

Le contexte dans lequel nous vivons est notre propre miroir.Le premier pas vers l'efficience et le bonheur consiste à prendre la

responsabilité de notre devenir.C'est nous seuls qui pouvons quelque chose.

Le système monarchique lié à l'Agriculture-Elevage a culminé avant de s'effondrer avec la montée de l'Age de l'Industrie et du Commerce.

De même, l'Age Industrie-Commerce est en train de culminer aujourd'hui avec une bourse en pleine effervescence1, et pourtant plusieurs indicateurs nous permettent de prévoir son effritement.

Parallèlement, les réseaux de compétence et de sensibilités orientés vers l'Age de la Création-Communication se cristallisent.

L'évolution est aujourd'hui si rapide que même les sociétés et les hommes lesplus à l'avant-garde de l'innovation ont le sentiment d'être dépassés par un processus qui s'emballe.

Notre destin reste cependant entre nos mains.Nous avons aujourd'hui les moyens de réaliser les plus vieux rêves de

l'humanité, et les pires cauchemars!Serons-nous du côté du cauchemar ou du côté du rêve ?Si nous restons identifiés à nos champs de réalité respectifs, ce sera sans

aucun doute le cauchemar.Si nous savons nous distancier et utiliser les difficultés pour apprendre à

jouer avec les champs de réalité, ce sera le rêve. Chacun peut choisir personnellement son enfer ou son paradis.

Tout est permis sauf de ne pas conquérir sa liberté !1Ce texte est écrit en juin 87.

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C'est nous-mêmes qui nous ligotons pour cuire à feu doux sur le gril où se consument les champs de réalité.

DE LA DIFFICULTÉ DE PRÉDIRE LE FUTUR.

Après avoir exploré les Champs de Réalité qui constituent notre présent, cette troisième partie du livre a pour but de pénétrer l'utilisation de la notion de champ de réalité à travers une série d'exemples plus précis et de voir quel typede futur nous sommes susceptibles d'inventer.

Nous allons essayer d'expérimenter comment nous pouvons utiliser ce livre au niveau de quatre types d'entité : l'individu, l'entreprise, l'état, la planète.

Le sujet est d'autant plus passionnant que chacune de ces entités est en train de traverser une crise.

Cette crise n'est pas conjoncturelle, c'est-à-dire liée à une difficulté temporaire, mais est bien une crise profonde, structurelle, liée à l'effondrement et la disparition de champs de réalité anciens et l'émergence de nouveaux.

Dans cette dernière partie du livre, nous essayerons de mettre à jour ces nouveaux champs de réalité aujourd'hui encore à l'état tourbillonnant et flou, maisappelés demain à se cristalliser pour devenir les fondements des sociétés à venir.

Cette dernière partie du livre est évidemment la plus délicate, à tous les points de vue.

Elle est difficile à formuler car ce que nous essayons de saisir ne s'affirmera que demain. Les marges d'erreurs sont très grandes.

D'autre part, on ne comprend bien un champ de réalité qu'à travers son niveauformel. Aujourd'hui, les champs de réalité dont nous parlons n'ont pas encore de structures formelles vraiment claires qui permettent de les saisir.

C'est le défaut et la qualité de l'ensemble de ce livre que de vouloir effectuer ce type d'anticipation qui permet de donner à réfléchir mais qui maintient le livre lui-même dans une certaine brume et une finition imparfaite.

Cette dernière partie est imparfaite, rien ne peut y être réellement terminé et définitif. Nous jouons ici au météorologue qui essaye de prévoir le temps futur à partir du tourbillonnement actuel. A cause de la mobilité de ce tourbillonnement,il risque effectivement d'y avoir une grande différence entre ce qui a été prévu etce qui arrive finalement.

LA MÉTHODOLOGIE.

Comment utiliser la lumière du passé en se servant de la Grille de l'Evolution ?

Comment utiliser le pouvoir du présent en se servant des Champs de Réalité ?Comment conquérir la liberté du futur en se servant du Développement des

Potentiels ?Cette troisième partie a pour but d'apprendre la manière dont nous pouvons

utiliser ce livre concrètement dans la vie pratique.

Apparament ce qui est susceptible d'intéresser le public le plus large est l'utilisation de ce livre dans les quatre champs de réalité suivants:

— L'Individu, chacun de nous dans sa vie personnelle.— L'Entreprise, un groupe pour réaliser ensemble.— La Société, un groupe pour vivre ensemble.—La Planète, l'humanité dans son devenir sur le globe.

On ne peut trouver de solution qu'en partant de problèmes concrets.C'est en posant les bonnes questions qu'on trouve les bonnes solutions.Nous avons identifié au cours de nombreuses discussions quatre grands

problèmes qui semblent se poser aujourd'hui intensément.

Page 69: Le management systémique de la complexité

— Le premier problème est l'Incompréhension.L'évol tion de plus en plus rapide sécrète une confusion croissante.

Folie, sectarisme, protectionnisme, totalitarisme.

— Le deuxième problème est l'InadaptationLe décalage entre notre manière de fonctionner et le contexte en pleine

évolution amène une incapacité croissante.Incompétence, chômage, sous-développement, pollution.

— Le troisième problème est la Démobilisation L'effondrement de la culture et des valeurs auxquelles nous sommes habitués

amène un découragement croissant.Incohérence, démotivation, corruption, guerre.

— Le quatrième problème est la Dégénérescence.La disparition de tout ce à quoi nous sommes attachés par le passé amène la

culpabilité et l'autodestruction.Suicide, sabotage, trahison, holocauste.

On peut noter que ces quatre problèmes essentiels constituent un véritable cercle vicieux:l'Incompréhension génère l'Inadaptation, l'Inadaptation amène la Démobilisation qui, à son tour, sécrète la Dégénérescence.Ces quatre grands problèmes sont d'ordreassez général pour qu'ils se trouvent posés de manière différente pour chaque Champs de Réalité envisagé : Individu, Entreprise, Société, Planète.

Nous pouvons constituer un tableau avec sur la ligne du haut : Individu, Entreprise, Société, Planète, dans la première colonne à gauche : Incompréhension, Inadaptation, Démobilisation, Dégénérescence et ainsi étudier les solutions à apporter respectivement dans tous les cas.

Nous obtenons un damier de seize solutions que vous pouvez découvrir page suivante ou déplier son agrandissement dans le recueil des figures à la fin du livre.

C'est ce damier que nous allons explorer dans cette troisième partie du livre, on peut l'imaginer comme un jeu de l'Oie dont la case ultime serait la réalisation du vieux rêve d'un Paradis sur Terre.

Chaque solution est nommée par un mot-clé : — Ouverture, Compétence, Cohérence, Créativité pour l'Individu ;— Diagnostic, Stratégie, Polarisation, Tactique pour l'Entreprise ;— Transparence, Cohérence, Dynamisme, Innovation pour la Société ;— Echange, Evolution, Union, Paix pour la Planète.

Dans chacun des cas, nous avons étudié le contexte dans lequel se pose le problème, les objectifs à atteindre, la méthode pour y parvenir et les modalités pratiques.

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Neuvième chapitre

L'INDIVIDUS

INTRODUCTION AU DÉVELOPPEMENT DU POTENTIEL INDIVIDUEL.

L'individu, au milieu du tourbillon actuel, est perdu. Il lui est difficiled'affronter d'une manière sereine et positive la situation d'effritement de tousles champs établis que nous vivons aujourd'hui. C'est pourquoi sa réactionconsiste à se terrer sur son champ particulier et à se boucher les oreilles face àla cacophonie qui vient de l'explosion générale. C'est la réaction du naufragés'agrippant à un morceau du bateau en train de couler.

Au contraire certains choisissent la fuite en avant, en profitant sans limitede la situation actuelle, cela n'aboutit qu'à des replâtrages successifs et desexcès minants.

Le corps, l'âme et l'esprit.On peut retrouver à l'échel humaine "les trois Niveaux de Réalité". Ils sont

traditionnellement nommés, depuis les temps lointains du Haut Moyen Age et del'Antiquité : le Corps, l'Ame et l'Esprit.

Le Corps, chacun comprendra facilement ce que nous entendons par là. Avec l'Ame, cela devient beaucoup moins clair. Quant à l'Esprit, son sens a été complètement faussé et confondu avec le

mental, alors qu'il en est pratiquement le contraire. Les Niveaux Vide, Turbulent et Formel, nous permettent de remettre les trois

niveaux de l'homme à leur véritable place. Le Corps correspond au Niveau Formel et intègre tous les sens ainsi que le

mental en tant que moyen de raisonnement. L'Ame correspond au Niveau Turbulent avec les émotions, les désirs, mais aussi

les dons de voyance, ainsi que toutes les capacités psychiques qui échappent auraisonnement rationnel.

Enfin, l'Esprit défini par la scolastique comme la partie pure de l'âme,correspond en nous à la présence du Niveau Vide.

L'homme moderne, à travers la mécanisation, a perdu la maîtrise de son âme. Neparlons pas de l'esprit, si ignoré que le mot perd son sens originel.

Dans un développement individuel, il y a deux phases critiques. On retrouve cesdeux portes symbolisées dans les grands rites d'initiation des cultures les plusdiverses. Elles ont été appelées : "le petit mystère" et "le grand mystère".

Le premier seuil est la découverte par l'individu de la puissance cachée dumonde turbulent lié à l'âme. Ce seuil est délicat, car nous nous sommes figés auniveau formel du champ de réalité transmis par nos parents et nos éducateurs.Prendre conscience de l'univers turbulent correspond à braver les interdits et àaffronter les monstres fantasmagoriques qui ont été associés à ces interdits pournous faire obéir.

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Ces interdits, ces monstres fantasmagoriques, sont loin d'être inutiles car cesont eux qui permettent à la réalité de se solidifier, aux groupes de s'entendreet à l'individu de ne pas devenir fou.

Passer cette porte, c'est comme être jeté à la mer, désormais il n'y aura plusde terre, plus de repos, pour le navigateur solitaire qui s'est banni de lasociété des hommes faite d'agrégats formels.

Mais, quelle brise, quelle liberté, quels horizons, quelle beauté! Désormais nous sommes au royaume des anges ou des démons, et comme dans un

fantastique bal masqué, ils ne cessent d'échanger leurs masques. Si dans le monde formel, toute affirmation trouve en toute logique son

opposition, l'une excluant l'autre; dans le monde turbulent de l'âme, il n'y arien qui ne soit aussi son contraire, chacun cachant en son sein un tiers qu'il nefaut jamais exclure. Franchir cette première porte est risqué; il n'y a aucunedécision plus dangereuse que celle-là!

De grands artistes, de grands créateurs, ont trouvé la mort là, après cetteporte, déjà loin des hommes et pourtant encore si loin de la paix reconquise grâceà l'Esprit.

Le premier ennemi est la peur et plus particulièrement la peur de toutes lespeurs, la peur de la mort. C'est cette peur qui garde très efficacement cettepremière porte et la ferme à tous les regards indiscrets.

Si l'on arrive à franchir ces eaux troubles en apprenant à danser sur cesvagues, si bien faites pour vous engloutir, on peut accéder à la deuxième porte,celle du Grand Mystère. Là, pas de monstres, pas de peurs, rien. Nous avons quittéla terre, appris à marcher sur l'eau, nous connaissons tous les fils qui animentle décor des mondes. L'ennemi ici n'est pas la peur, mais la clarté, car ayantl'impression d'avoir tout compris, pourquoi se remettre en question encore unefois. Et pourtant, même si l'on a compris, ce n'est que par références à desChamps de Réalité qui un jour disparaîtront irrémédiablement, rendant nosconnaissances aussi caduques et inutiles que des cendres. La seule véritableconnaissance vient du second seuil, l'accession au Niveau Vide.

Nourritures matérielles et nourritures spirituelles.

Pour que la conscience puisse dépasser le niveau formel il faut qu'elle aitrenforcé celui-ci en l'organisant et en l'assainissant, pour pouvoir se concentrersur des niveaux plus subtils sans prendre de risques.

Il est préférable d'avoir une bonne santé. Dans le cadre de cette remise enforme, trois éléments sont essentiels, l'air que nous respirons, l'eau que nousbuvons, la nourriture que nous mangeons. Toutes les cellules de notre corps serenouvellent constamment à partir des éléments que nous lui fournissons grâce àces moyens.

Le problème aujourd'hui vient du fait que la plupart des aliments distribuésdans les grands circuits de consommation, pour des raisons de conservation ou deprésentation, ont été tellement purifiés et transformés chimiquement qu'ils sontvidés de leurs richesses nutritives. Ce processus a aussi touché le pain qui étaitautrefois la base de l'alimentation.

Cette absence de valeur nutritive du pain blanc a instinctivement poussé etramené les gens à manger de la viande. La viande, qui devient alors partieintégrante de pratiquement chaque repas, fait s'accumuler dans le corps toutes lesgraisses animales difficilement assimilables, ainsi que toutes les toxines liées àla putréfaction de la viande à l'intérieur même de l'intestin. Cette intoxicationlente déclenche alors chez les individus l'utilisation des drogues telles que le

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café, le tabac, le chocolat, pour tenter de pallier la fatigue, la nervosité ou lestress provoqués par l'excès de consommation de viande. Il est paradoxal de voirles pays les mieux nourris du globe provoquer chez la plus grande partie de leurpopulation l'équivalent de graves déficiences alimentaires.

Il est capital de prendre son alimentation en main. On pourra consulter de nombreux livres qui existent sur ce sujet.L'air et l'eau sont évidemment aussi importants La pollution liée aux grandes villes rend difficile la clarification de notre

organe le plus fragile et le plus sensible, le cerveau. Tout travail préliminairecommence donc par la mise au point de conditions de vie qui permettentraisonnablement un plein épanouissement du corps. L'exercice est aussi capitalpour oxygéner et renouveler l'ensemble des parties du corps.

Si le soin et l'épanouissement de notre corps est souvent à notre époqueoublié, que dire au sujet de l'âme.

L'âme est ignorée. De la même manière que le corps trouve son énergie dansl'air, l'eau et la nourriture, l'âme s'épanouit ou dégénère dans son rapport à ladimension morale : la Beauté, la Vérité et le Bien.

La recherche de ces trois dimensions est ce qui différencie l'homme de l'animalet l'âme ne trouve sa véritable finalité que par la recherche et l'enrichissementde ces trois dimensions propres à l'homme.

S'il est difficile aujourd'hui d'organiser sa vie pour garder sa santéphysique, il est encore plus difficile de créer un climat propre àl'épanouissement de l'âme. Pourtant, tant que cela reste impossible, toutes lesfacultés extraordinaires que possède notre cerveau restent racornies et amoindriescomme un corps rendu chétif par le manque d'exercices.

C'est à travers l'âme que nous nous fixons ou que nous nous séparons d'un Champde Réalité. Si nous nous concentrons sur certains types de désirs, petit à petit,nous finissons par nous incarner dans le Champ de Réalité qu'ils suscitent. Laréflexion ou l'action sont incapables en soi de modifier notre Champ de Réalité,c'est la maîtrise de notre attention qui nous permet de nous concentrer et de nousfaire accéder à des Champs de Réalité différents. L'âme est un véhiculeextraordinaire et nous amène exactement là où nous voulons.

Cette dimension morale n'a rien à voir avec des principes, des codes ou desvaleurs culturelles. Il ne s'agit pas de devenir réactif et de revenir à desmorceaux d'anciens Champs de Réalité brisés. La dimension morale doit êtreexpérimentée par chacun au plus profond de son coeur. Les actes et les positionsprises dans ce domaine dans un but de représentation artificielle pour la façadesociale n'aboutissent qu'à amplifier le mensonge, la laideur et le mal.

La désintégration sociale que nous vivons enlève les tuteurs permettant de nousélever plus facilement. L'ambiance générale ne nous pousse guère à prendre uneposition morale réellement authentique, mais cela n'est pas vraiment négatif.

Cette situation ramène la dimension morale à sa pureté originelle en ladégageant de cette sorte de fausse morale que l'on trouve dans la plupart descultures et qui consiste en une série d'obligations que chacun suit de peur d'êtreexclu du groupe.

La vraie morale ne se conquiert qu'à travers une longue expérimentationpersonnelle et solitaire qui permet à chacun de développer en lui, d'une manièrecréative, la beauté, la bonté et la vérité, sous une forme à nulle autre pareillecar expression de sa personnalité profonde. Si l'âme s'épanouit à travers le Bon,la Vérité et la Beauté, l'Esprit quant à lui ne peut s'épanouir que dans leSilence, la Paix et l'Amour. Il est déjà très délicat et ambigu de parler de

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l'âme, je laisserai donc à chacun la responsabilité de trouver sa voie versl'esprit.

Le petit temple du silence

Au milieu de l'explosion actuelle, du concassage de toutes les cultures lesunes sur les autres, les individus n'appartiennent plus à aucun groupe socialdéterminé, à aucune culture .Ils n'ont dès lors plus aucun soutien moral pouvantvenir de la société et ont intérêt à construire dans leur propre espace de vie,leur maison, leur appartement, un lieu spécial, à part, qui puisse être consacréaux expériences d'élargissement de la conscience.

C'est ce que nous pouvons appeler le petit temple. "On a toujours besoin d'unpetit temple chez soi."

On peut agrémenter ce petit temple comme on le désire, on essayera de fixer ence lieu tous les éléments qui peuvent nous arracher aux forces de gravitation duNiveau Formel, nous permettant de développer les techniques d'Elévation,d'Apesanteur et de Flottement .

Les quatres ateliers du développement du potentiel individuel.

Nous avons imaginé quatre ateliers:— "Ouverture" pour développer une meilleur compréhension de nous même et des

autre dans le nouveau contexte socio-économique—"Compétence" pour développer une meilleur adaptation.— "Cohérence" pour développer une meilleur harmonie — "Créativité" pour développer la capacité à innover

OUVERTURE.

a) Contexte : Incompréhension croissante des individus face à l'évolution.La Grille de l'Evolution nous montre notre situation à cheval entre l'étape

Industrie-Commerce et l'étape Création-Communication.La nouvelle étape Création-Communication est porteuse de valeurs très

différentes de celle véhiculées par l'étape précédente Industrie-Commerce. Celasuscite une incompréhension croissante des individus.

Face à cette difficulté, l'individu aura tendance à développer deux réactionscontradictoires:

— Se refermer dans le champ de ce qui est bien connu, la culture de ses parentsou de son milieu socio-professionnel, ce qui aboutit un peu partout dans le mondeà un renforcement des sectarismes et à l'augmentation de l'incompréhension :enfermement par le Principes de Stabilité.

— Jeter un regard superficiel sur tout ce qui arrive sans qu'il y ait véritableintégration de l'information : réduction de l'analyse au Niveau Formel.

L'individu perd, à travers ce processus, toute sa souplesse et son autonomie.Il finit par flotter dans un univers faux. Ce processus est dès le début unglissement vers la folie. Le pourcentage de fous dans les pays les plus avancés necesse de croître.

L'Age Industriel a développé des modes de pensée mécaniques et rationnels quiont du mal à s'adapter aux turbulences de l'Age de la Créativité. Cet Age, en sedéveloppant aujourd'hui, augmente sans cesse le flux des échanges entre champs deréalité complètement différents.

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Or nos écoles, notre éducation ne nous préparent pas à ces hybridationsintenses entre champs de réalité éloignés. Les formes d'éducation actuelles onttendance à nous enfermer dans un champ de réalité bien particulier.

L'éducation n'a pas d'autre but que de faire percevoir le plus clairementpossible un Champ de Réalité unique pour y faire adhérer les individus. AucuneCulture n'a intégré en elle-même sa propre négation, ni la relativisation de sonpropre Champs de Réalité.

Chacun étant enfermé dans sa culture, la Terre est devenue une véritable Tourde Babel.

S'ouvrir à la différence, s'ouvrir à l'altérité, apprendre à intégrer profondément des cultures et des visions différentes de la nôtre, devient une nécessité vitale. C'est le premier pas, pour contrer les tendances négatives et anticiper positivement sur l'avenir.

A travers la logique des Champs de Réalité nous pouvons mieux comprendre comment chacun est aujourd'hui victime des Principes de Stabilité qui l'enferme dans un Champ de Réalité donné.

Cette enfermement est d'autant plus intense que l'étape Industrie-Commerce a atteint sa phase de plénitude et a donc une capacité d'Absorption considérable.

b) Objectif : Développer son ouverture pour mieux comprendre ce qui se passe.Apprendre à intégrer facilement des informations émanant d'un autre contexte

culturel que le nôtre. Apprendre à maîtriser l'information. En plus de notre culture maternelle il faut intégrer une méta-culture qui

nous permette de nous ouvrir à l'altérité et aux différences.

c) Méthode : Utiliser la Grille de l'Evolution et les Champs de Réalité pour comprendre en profondeur soi-même et les autres.

La Grille de l'Evolution nous permet de mieux comprendre les valeurs et la culture des quatre grandes étapes du développement de l'homme. En imaginant et en explorant les résultantes des tendances ébauchées par les Etapes de Vie, on comprend les différences qui séparent les populations et les individus participant encore aujourd'hui plutôt de telle ou telle étape.

Cet empilement successif en forme de strates, niveaux de développement différents, fait toute la richesse mais aussi la difficulté opérationnelle du mondemoderne.

Il faut préserver cette richesse, mais rendre plus fluides les échanges entreniveaux de développement différents. Nous pouvons trouver dans une bonne compréhension de la Grille de l'Evolution les moyens d'une ouverture à d'autres hommes appartenant à une autre étape de développement que la nôtre. De même que l'industrialisation n'a pas supprimé l'agriculture mais l'a transformée, de même l'Age de la Création-Communication valorise et donne un sens à toutes les étapes précédentes en les éclairant sous un nouvel angle.

Les grands problèmes de compréhension entre les individus viennent souvent dufait que chacun reste attaché et enfermé dans des bribes de champs de réalité appartenant aux étapes précédentes. Comprendre ces différentes étapes donne un sensà notre vie et éclaire notre conscience collective; c'est le fondement métaculturelnécessaire à l'ouverture à toutes les cultures.

Dans les étapes précédentes les Champs de Réalité duraient très longtemps, nous naissions et mourrions dans un même Champ de Réalité. Le fait de relativiser un champs est donc quelque chose de très nouveau pour nous.

A travers la Grille de l'Evolution et les Champs de Réalité, nous pouvons comprendre que nous sommes dans une période de rupture : passage de l'Age Industriel à l'Age de la Création. Dans ce type de transition, il existe souvent chez les individus un décalage profond entre le Niveau Turbulent qui capte l'évolution en cours au-delà des concepts et des mots et le Niveau Formel enfermé

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dans des concepts et un découpage de la réalité périmé. Ce genre de décalage suscite chez l'individu une multitude de pulsions qu'il n'arrive pas à identifier clairement comme étant positives ou négatives. Son Niveau Turbulent le pousse dans un sens que son Niveau Formel ne comprend pas. Il ne sait pas s'il doit suivre son cœur qui semblent incohérents ou agir rationnellement et se sentir en décalage avecle contexte.

Le non-alignement entre Niveau Turbulent et Niveau Formel est la cause de cessymptômes.

Pour remédier à cela, il faut utiliser l'outil des Champs de Réalité pour être plus conscient du Niveau Turbulent et faire évoluer en cohérence le Niveau Formel. Le Niveau Vide est utilisé pour prendre de la hauteur et visionner d'une manière détachée les turbulences. En méditant sur la Grille de l'Evolution, et plusparticulièrement les nouvelles tendances qui se développent avec l'Age de la Créativité, on peut mieux comprendre certains élans turbulents qui se développent en nous et ne prennent de sens que dans ce nouvel Age en train de se développé.

Prenez l'habitude d'analyser un problème en voyant ses différentes composantes au niveau vide, turbulent et formel. Constatez la part d'action des principes de Stabilité. Mesurez la plus ou moins grande souplesse liée au développement des Modes d'Evolution. Estimez l'Age d'un champ de réalité et sa position dans les étapes de vie.

Constater1/ Grille de l'Evolution : Situation dans la Grille de l'Evolution.2/ Champs de Réalité :

a/Niveaux de Réalité : Dépassement du Niveau Formel et ouverture vers le Niveau Turbulent et Vide.

b) Principes de Stabilité/Modes d'Evolution : Analyse des Tendances Evolution/Stabilité.

c) Etapes de Vie : Position dans les Etapes de vie.

b) Modalités : Le bilan mensuel.La Grille de l'Evolution tient sur une seule page, cela permet de l'avoir

toujours à portée de main. Quand on ne comprend pas quelque chose, quand on risquede s'enfermer dans un sectarisme culturel, chaque fois que l'on veut mettre unproblème en perspective, on utilise la grille en l'orientant et en la développantvers le problème à résoudre.

La Grille de l'Evolution est beaucoup plus que la somme de ses parties, c'estun système holistique dont chaque case est en interaction avec les autres et à mesure que vous prendrez l'habitude de lui poser des questions, vous serez étonnés d'y trouver toujours quelque chose de nouveau.

De la même manière, vous pouvez utiliser les champs de réalité pour évaluer les plus ou moins grands alignements des niveaux de réalité, développer votre capacité d'évolution et être à même d'estimer l'Age d'un champ de réalité.

Utilisez la logique des champs de réalité.pour dépasser le niveau formel danslequel se cantonne souvent l'analyse.

Consacré un cahier à votre développement personnel :Chaque mois, faites un bilan en utilisant la Grille de l'Evolution et

les Champs de Réalité :

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Votre situation actuelle et votre orientation sont-elles en cohérence avec l'évolution planétaire vers l'Age de la Création ?Quels sont les différents champs de réalité auxquels vous participez ?Quel est le plus ou moins grand alignement de leurs niveaux de

réalité ?S'agit-il de champs très stabilisés ou au contraire ouverts à

l'évolution ?S'agit-il de champs naissant, arrivés à maturité ou proches de la fin ?Quels sont les nouveaux champs vers lesquels vous voudriez vous

orienter ?

COMPÉTENCE

a) Contexte : Inadaptation croissante des individus face à l'évolution.L'incompréhension de l'évolution actuelle aboutit à l'inadaptation,

l'individu devient incompétent.L'individu qui ne comprend pas bien le contexte actuel devient inadapté. En s'enfermant dans des champs de réalité périmés, en s'enfermant dans ses a-

priori culturels, l'individu devient incompétent. Il peut avoir fait les études lesplus poussées, être un grand spécialiste, cela ne change rien; au contraire, une spécialisation intense et une formation poussée issue de programmes datant de l'AgeIndustriel constitue plutôt des handicaps.

De la même manière que l'Age Industriel a complètement modifié la vision du monde et les modes de production en rendant obsolètes les connaissances issues de l'Age Agraire (quelle que soit leur valeur intrinsèque), de même l'Age de la Création amène une nouvelle vision et des modes de production d'un autre ordre que l'Age Industriel.

Les écoles de l'Age Industriel ne sont pas le meilleur cursus pour se préparer à l'Age de la Création.

L'inadaptation n'est pas simplement un problème professionnel, cela touche aussi au cœur de la vie. L'enfermement dans une visions du monde périmées aboutit àdes réflexes et des actions en décalage avec la réalité actuelle. L'individu se sent constamment mis en danger par le débordement de ce qui arrive. Au lieu d'évoluer et de s'ouvrir, la peur le fait se refermer encore plus, augmenter son incompréhension et s'enfoncer toujours plus profondément dans l'inadaptation et l'incompétence.

On peut mesurer le problème de l'incompétence actuelle au taux de chômage grandissant dans tous les pays occidentaux pourtant à l'avant-garde du développement. La crise actuelle, en ce qu'elle a de douloureux, est due en grande partie à une inadaptation des individus : il existe aujourd'hui, à cause même de l'évolution extrêmement rapide, une multitude d'opportunités qui pourraient donner beaucoup plus de travail qu'il n'existe de chômeurs.

Bien mieux, la plupart des opportunités actuelles se trouvent dans des segments de marchés à très grande valeur ajoutée, ce qui veut dire des bénéfices considérables. Le problème est que toutes les grandes sociétés de l'Age Industriel,travaillant d'une manière hiérarchique et peu créative, licencient.

La grande majorité des emplois est aujourd'hui créée par de jeunes entrepreneurs qui demandent à leurs partenaires le maximum de souplesse et de créativité. Ce marché de l'emploi grandissant échappe aux règles traditionnelles etformelles, l'affectivité et l'amitié y ont leur importance. Les entreprises performantes aujourd'hui sont moins des organigrammes hiérarchiques et plus des bandes amicales. Le leader est moins un directeur et plus un "accoucheur". Les compétences spécialisées ne sont que des fardeaux si elles ne s'appuient pas sur une personnalité harmonieuse capable d'entrer dans la synergie d'une équipe.

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b) Objectif : S'adapter en développant ses compétences potentielles dans le sens de l'Age de la Création.

Etre compétent aujourd'hui, ce n'est pas acquérir tel ou tel savoir plus spécialisé; c'est apprendre au contraire à faire évoluer sa culture générale et sesvaleurs, qui conditionnent nos actions et nos réflexes, vers les valeurs émergentesissues de l'Age de la Création.

Dans la mesure où nos valeurs, notre culture orientent notre action, il est important d'identifier dans quelle mesure nous nous sommes dégagés du champ de réalité industriel et de mettre au point un plan d'action pour optimiser nos compétences en fonction de l'évolution à venir.

c) Méthode : Anticiper vers l'age de la Création-CommunicationGrâce à la Grille de l'Evolution, nous pouvons anticiper sur les tendances à

venir et réfléchir à la manière d'utiliser nos dons personnels dans le contexte en évolution. On peut identifier les valeurs et la culture émergente en donnant un sens à différents courants qui apparaîtraient isolés ou insignifiants. En fonction de ces différentes données, on peut dégager une stratégie pour se maintenir constamment au sommet de la vague, en actualisant ses compétences.

Pour accélérer et faciliter l'actualisation, on utilise la logique des Champs de Réalité : perception du niveau turbulent qui est toujours en avance sur le Niveau Formel, et développement personnel des capacités liées aux Modes d'Evolution.

Planifier1/ Grille de l'Evolution : Dégager une perspective future, un projet

grâce à la Grille de l'Evolution. Trouver une orientation, un axe sur lequel construire.2/ Champs de Réalité :

a) Niveaux de Réalité : se brancher sur le Niveau Turbulent, voir le décalage entre Turbulent et Formel, adapter le Niveau Formel en tenant compte du Turbulent.

b) Principes de Stabilité/Modes d'Evolution : prendre conscience des résistances venant des Principes de Stabilité et développer sa capacité à changer grâce aux Modes d'Evolution.

c) Etapes de Vie : repérer l'âge des Champs de Réalité dans lesquels on est inclus et de ceux vers lesquels on veut évoluer. Agir dans chaque cas en cohérence avec cet âge.

d) Modalité : Faire un plan d'adaptation.

A partir du bilan mensuel décrit dans "Ouverture" dégagez des objectifs pour actualiser vos compétences en fonction de l'évolution vers l'Age de la Création. Faites un plan d'adaptation.Suivez son évolution et réactualisez le de mois en mois en même temps

que vous faites votre bilan.

Lorsque vous dégagez vos objectifs, ne réfléchissez pas uniquement rationnellement; prenez conscience de vos désirs sous-jacents, de vos élans

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irrationnels. Vous vous apercevrez que, compte tenu de l'évolution vers l'Age de laCréation, beaucoup d'élans que vous négligiez comme excentriques et irrationnels prennent un sens et peuvent devenir les amorces d'une adaptation constructive.

COHERENCE

a) Contexte : Démobilisation croissante des individus face à l'évolution.L'individu inadapté, incompétent perd toute motivation, il est démobilisé et

devient incohérent.L'incompréhension rend incapable de s'adapter, l'inadaptation sécrète la

démobilisation. L'individu s'exclue lui-même de la société dont il ne comprend plusle sens. Tout lui paraît absurde et insignifiant.

L'individu est tiraillé par des bribes de raisonnement issues de champs de réalité en décomposition et des désirs en prise avec les nouveaux Champs de Réalitéémergents qu'il ne comprend pas. Il arrive aussi que l'individu soit ouvert rationnellement à l'évolution mais que son Niveau Turbulent reste affectivement accroché à des champs de réalité passés. Dans les deux cas, comme il y a un mauvaisalignement de niveaux de réalité, toute l'énergie de l'individu se perd en luttes intestines, en contradictions intérieures, en sentiments de gêne vis-à-vis des autres. Cette perte d'énergie augmente la difficulté pour s'adapter. L'individu, aulieu d'avancer dans sa compréhension, a l'impression de s'enfoncer dans un sable mouvant où tout effort logique aboutit à encore plus d'obscurité. A mesure que l'angoisse s'installe, l'individu devient de plus en plus incohérent.

b) Objectif : Devenir cohérent, aligner les niveaux de réalité et retrouver l'harmonie tant intérieure que sociale.

Tout travail d'harmonisation passe par une meilleure compréhension : Atelier Ouverture et une meilleure adaptation : Atelier Compétence.

A partir de là, une grande partie du travail d'approche est fait : il s'agit maintenant de développer une méthode pour réaligner régulièrement le Niveau Turbulent et le Niveau Formel, cet alignement étant la base de toute harmonie. En résolvant ces contradictions internes, en faisant évoluer son milieu social de manière positive, l'individu retrouve son harmonie. De plus en plus compréhensif, de plus en plus compétent et adapté, il retrouve sa sécurité et apporte aux autres soulagement et agrément.

c) Méthode : Réaligner les niveaux de réalitéDans Ouverture et dans Compétence, nous avons surtout utilisé la Grille de

l'Evolution pour nous orienter. Les champs de Réalité sont utilisés, mais seulementde manière superficielle.

Pour développer Cohérence et Créativité, c'est surtout à la logique des Champs de Réalité et à sa mise en œuvre que nous devons faire appel. Le développement de la cohérence implique qu'on saisisse clairement et au fur et à mesure le jeu du Niveau Turbulent et sa cristallisation plus ou moins transparente dans le Niveau Formel. Pour cela, l'individu doit inverser sa manière de prendre conscience des choses. En effet, habituellement, la conscience est identifiée au niveau formel et se sent gênée, troublée par les bouillonnements souterrains et puissants du niveau turbulent. Les éruptions du Niveau Turbulent jusqu'au Niveau Formel apparaissent à la conscience aussi déplacées qu'une coulée de lave brûlante sur un village bien organisé. Durant toute la période historique où les Champs de Réalité étaient solidifiés, le Niveau Turbulent et le Niveau Vide pouvaient être oblitérés par le Niveau Formel qui se perpétrait au cours des siècles sans changement fondamental. Seuls certains individus exceptionnels, des prophètes, des artistes, s'aventuraient au péril de leur vie au-delà des rivages assurés du niveauformel.

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Aujourd'hui, il en est autrement : le Niveau Formel étant à peine solidifié, il est brisé par les évolutions du niveau turbulent. Pour arriver à une bonne cohérence qui tienne compte des évolutions, il faut faire remonter la conscience duNiveau Formel au Niveau Vide pour qu'elle puisse pressentir les changements à venir. Ce processus de distanciation s'opère lorsque l'on s'entraîne à développer les capacités liées aux Modes d'Evolution. L'individu doit cesser d'adhérer au niveau formel, affronter le dragon Turbulent et rejoindre l'île vierge du Niveau Vide.

Harmoniser.1/ Grille de l'Evolution : Comprendre et respecter les différentes

couches de culture auxquelles nous participons plus ou moins, lesrelier, les harmoniser entre elles.2/ Champs de Réalité :

a)Niveaux de Réalité:Aligner le Niveau Formel sur le Niveau Turbulent. Rendre le Niveau Formel à la fois simple, solide et souple, le clarifier.

b) Principes de Stabilité/Modes d'Evolution : Développer les Modes d'Evolution pour assouplir le Niveau Formel.

c) Etapes de Vie : S'organiser de manière cohérente par rapport àl'Etape de Vie dans laquelle on se trouve.

d) Modalité : Prendre conscience des contradictions:

Chaque jour, prendre 20 mn pour apprendre à se détacher du Niveau Formel etrevenir au Niveau Vide.

De nombreuses techniques ont été inventées tout au long de l'histoire humaine pour retourner au niveau vide. La conscience est avant tout un miroir qui reflète le champ de réalité sur lequel elle se concentre. Pour revenir au niveau vide, imaginez que vous mettiez devant ce miroirqu'est votre conscience un autre miroir. Le miroir reflète le miroir. Il n'y a plus d'image. Concentrez votre conscience sur ce vide entre les deux miroirs. Le mieux est de se mettre dans un endroit tranquille où vous êtes sûr de ne pas être dérangé. Amenez votre esprit à ce vide entre les deux miroirs chaque fois qu'il a tendance à s'échapper dans les turbulences liées aux champs de réalité auxquels vous appartenez. Petit à petit, les idées qui émergent encore sont de plus en plus irrationnelles, c'est que vous atteignez des couches profondes du niveau turbulent. A travers ce type d'exercice, vous apprenez à élargirvotre conscience aux trois niveaux de réalité et à les faire s'aligner avec harmonie et cohérence.Chaque semaine, à mesure que votre agilité à évoluer entre les trois Niveaux de Réalité se développe, vous pouvez faire rapidement un exercice d'actualisation du Niveau Turbulent. Faites une carte émotionnelle de vos désirs, pulsions, envies (Niveau Turbulent), confrontez-la avec la manière dont vous vous organisez dans la vie courante raisonnablement (Niveau Formel). Y a-t-il cohérence entre les deux, votre cœur est-il en harmonie avec vos actes ?

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Dans cet exercice, vous pouvez rendre les choses encore plus claires enimaginant ce que vous feriez si vous alliez mourir, la mort est bonne conseillèreparce que son échéance supprime toutes les rationalités chères au Niveau Formel.Face à la mort le Niveau Turbulent remonte. C'est ce qui explique tous lescomportements irrationnels mais très significatifs de la personnalité profonde desêtres qui se révèle dans les groupes mis en danger de mort.

La prise de conscience du Niveau Turbulent n'est pas une chose agréable carhabituellement elle remet en cause toutes les rationalités sur lesquellesl'individu avait construit sa vie. Ceci dit, il faut mieux affronter le niveauturbulent car c'est lui qui finalement gagne sur le niveau formel.

CRÉATIVITÉ.

a) Contexte::Dégénérescence croissante des individus face à l'évolution.L'incompréhension amène l'inadaptation, l'inadaptation la démobilisation et

l'incohérence, le terrain est alors prêt pour l'étape ultime, la dégénérescence,l'autodestruction.

Lorsque les niveaux de réalité ne sont pas alignés, cela crée une tellesouffrance que l'individu cherche compulsivement ce qui pourrait occulter sonmalaise. Après s'être protégé par un comportement le plus formel et rationnelpossible, il ne trouve plus de détente que grâce à des calmants ou autres drogues.Le médicament le plus vendu au monde est un calmant, l'humanité dépenseaujourd'hui en moyenne plus dans la drogue que dans la nourriture, sans comptertoutes les drogues licites mais qui étant passées dans les mœurs et étantconsommées régulièrement obscurcissent la conscience d'autant plus : café, thé,tabac, etc...

La pulsion autodestructrice qui habite aujourd'hui l'humanité est en pleinecroissance. Les dépenses militaires en sont la mesure : il existe actuellementplus de dix fois la puissance destructive nécessaire à la suppression de toute viesur la Terre. En quelques trente ans, nous avons détruit des équilibresécologiques qui avaient mis des milliers d'années à s'élaborer.Les deux tiers del'humanité meurent de faim tandis que le dernier tiers raffine tellement sanourriture et consomme tant de drogues et de médicaments que les maladies dedégénérescence frappent les individus de plus en plus jeunes. La destruction quenous opérons sur la planète n'est que le miroir de nos tendances auto-destructrices.

La dégénérescence des individus, en affaiblissant leur corps, en obscurcissantleur conscience, leur rend encore plus difficile toute tentative de compréhensionet d'adaptation. Le cercle vicieux est ainsi bouclé.

L'affaiblissement rend les individus peureux, ils s'enferment dans le connu ens'identifiant à l'un ou l'autre de ces vieux champs de réalité en décomposition,lambeaux de l'histoire de l'homme.

L'ensemble du processus incompréhension, inadaptation, démobilisation, dégéné-rescence, pour négatif qu'il puisse paraître est en fait un processus naturel liéà un champ de réalité arrivé à son ultime développement. D'une certaine manière,les individus passent obligatoirement par ces trois stades car nous sommes tousplus ou moins attachés à nos vieux champs de réalité. Il faut toucher le fond pourpouvoir remonter enfin. Le processus de dégénérescence, parce qu'il estanéantissement du niveau formel et du niveau turbulent, constitue déjà en lui-mêmeune tentative de retour au niveau vide. C'est lorsque nous avons perdu nos

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illusions sur les potentialités des champs de réalité anciens que nous avons lecourage d'affronter la création.

b) Objectif : Renverser le processus de dégénérescence et les forces autodestructrices en les transformant en puissances de création.

Si nous regardons la Grille de l'Evolution, nous nous apercevons que chaquegrande étape du développement de l'homme fait un peu plus appel à sa puissancecréative.

Durant l'Age de la Chasse et de la Cueillette, nous voyons des hommesextrêmement fidèles à leurs us et coutumes qu'ils reproduisent de siècle ensiècle.

Avec l'agriculture et l'élevage, la créativité se développe mais la part destraditions reste essentielle; l'industrie et le commerce donnent une place trèsimportante aux inventeurs, artistes, scientifiques et créateurs de toute sorte.Parallèlement, le délai de passage dans les mœurs d'une invention qui était encorede l'ordre d'une génération avant la guerre s'est réduit et n'est plus de quelquesmois aujourd'hui. La créativité devient la source essentielle de richesse, c'estla créativité qui permet d'inventer des produits nouveaux à forte valeur ajoutéeet sans concurrent sur le marché. Les produits classiques au contraire, pris dansla compétition internationale ont beaucoup de mal à garder des margesbénéficiaires.

Il existe une valorisation grandissante de la créativité; les individus sontdonc de plus en plus motivés pour apprendre à quitter les champs de réalitéanciens et apprendre à développer leur créativité. Les forces mêmes de ladégénérescence, parce qu'elles laissent l'homme sans espoir, l'obligent à faire cesaut dans le vide préalable à tout processus créatif. La créativité consiste àcréer un nouveau champ de réalité. Comme nous l'avons vu dans le principed'Inclusion, les champs de réalité sont imbriqués les uns dans les autres du plussuperficiel au plus profond. On peut apprendre à développer sa créativitésuperficiellement mais la liberté sur tous les champs de réalité préexistants nes'acquiert qu'en travaillant de plus en plus en profondeur. Le développement de lacréativité est le couronnement des trois étapes précédentes : Ouverture,Compétence, Cohérence.

Développer sa créativité profonde est un objectif déterminant face à l'Age dela Création et de la Communication.

c) Méthode : Développer l'énergie créatrice issue du niveau videLa logique des champs de réalité peut vous aider à supprimer les résistances

qui vous empêchent de laisser libre cours à vos dons créatifs. Aucune technique nepeut vous aider dans le processus créatif lui-même qui par définition est unprocessus de rupture par rapport à tout ce qui existe au préalable. Le processuscréatif n'est pas quelque chose que l'on apprend, tout ce qu'on apprend risque aucontraire de l'endiguer.On doit faire place nette, se transformer en feuilleblanche. Le processus créatif est l'essence de l'homme, chacun de nous est porteurd'un univers à nul autre pareil et ne trouve son plein épanouissement quelorsqu'il incarne ce potentiel dans un champ de réalité nouveau.

L'Age de la Création et de la Communication est l'aboutissement ultime dudéveloppement de l'homme, avec l'épanouissement de cette faculté qui le distinguedes autres êtres vivants : la capacité de réflexion et de création. Le champ deréalité que vous devez faire éclore au-delà de tout ce qui existe vous est propre.

La créativité est directement liée à l'aisance que l'on a à circuler entre lestrois niveaux de réalité et à développer les modes d'évolution.

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Ainsi ce livre vous aident à vous préparer au processus créatif. Le processuscréatif, dans la mesure où il met en branle des forces profondes du niveauturbulent, est un processus dangereux. La maîtrise des Champs de Réalité vouspermet de posséder en permanence des points de repère utiles dans le processus dedésincarnation et d'incarnation propre à la créativité.Ouverture, Compétence, Cohérence sont de bonnes préparations au développement dela créativité. Vous avez appris à comprendre le contexte dans lequel vous évoluez,à vous adapter, à mobiliser vos forces harmonieusement, la créativité vous donnela liberté ultime : créer de nouveaux champs de réalité.

Tout processus de créativité commence par une distanciation; il vous fautdiminuer l'attention que vous portez sur votre champ de réalité actuel. Utilisezl'efficacité acquise grâce à l'Ouverture, la Compétence et l'Harmonie afin desimplifier au maximum votre vie pour que votre conscience ne soit pas complètementabsorbée par le quotidien.

Utilisez votre habitude acquise à travers Cohérence de revenir au niveau vide.Une fois au niveau vide, orientez votre conscience vers les parties de vous-mêmequi vous apparaissent le plus spécifique : ce en quoi vous ne ressemblez à nulautre. Petit à petit, apprenez à faire grandir ce jardin secret qui vous estpropre, cultivez-le. A mesure qu'il prendra de la consistance, apprenez à levaloriser et vous vous apercevrez que les fruits que vous pourrez tirer de cettepartie de vous-même sont simultanément ce à quoi vous travaillez avec le plus dejoie et ce que vous pouvez apporter de meilleur aux autres.

Réorienter1/ Grille de l'Evolution:Développer des Champs de Réalité qui aillent

dans le sens de l'évolution.2/ Champs de Réalité :

a) Niveaux de Réalité : revenir au Niveau Vide, dégager du Niveau Turbulent les intensités spécifiques les plus fortes, les formaliser petit à petit.

b) Principes de Stabilité : utiliser les Principes de Stabilité pour solidifier les nouveaux Champs de Réalité.

c) Modes d'Evolution : utiliser les Modes d'Evolution pour se libérer des Champs de Réalité préétablis et remonter vers le Niveau Vide.

d) Etapes de Vie : utiliser les Etapes de Vie pour ne pas s'identifier aux Champs de Réalité en pleine expansion et apprendre à cultiver les germes naissants de nouveaux Champs de Réalité (protectiondes jeunes pousses).

d) Modalité : La séance de créativité quotidienne

Après quatres semaines d'utilisation de la "méditation miroir" pourretrouver une bonne harmonie ainsi que cela est décrit dans Cohérence,vous pouvez commencer à utiliser votre méditation journalière dans lesens de la créativité.Après dix minutes de retour au niveau vide, utilisez le silence que

cela crée vous pour concentrer votre conscience à essayer de définir cequi vous tient le plus à cœur, ce qu'il vous semble essentiel d'avoir

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fait avant de mourir. Vous pouvez utiliser un cahier qui ne serviraqu'à cela, recueillir vos pensées à ce moment-là. Petit à petit, àtravers cette petite plage de créativité quotidienne vous pourrezamorcer un retour à votre être le plus intime et porteur del'originalité la plus profonde.

La création est un processus turbulent : les idées tout juste issues du niveauvide sont encore informelles. Ce que vous apercevrez dans vos moments decréativité risque de vous apparaître très incohérent et informel. Cependant, sivous persévérez cela deviendra de plus en plus clair et solide et ce qui n'étaitau début que divagations pourra devenir les fondements d'une nouvelle vie où vousserez réellement chez vous parce que vous aurez construit votre propre territoire.

Entre le premier jet nébuleux à la suite d'un retour au niveau vide et laconcrétisation formelle et existentielle d'un champ de réalité, il existe un longprocessus de concrétisation. Mais au fond ce processus s'effectue aussinaturellement qu'un enfant qui grandit. L'essentiel étant l'élan créatif qui estle germe de l'ensemble du processus

CONCLUSION SUR LE DÉVELOPPEMENT INDIVIDUEL : INDIVIDUALISATION CROISSANTE DE L'HOMME.

Etre un Chasseur-Cueilleur, être un Agriculteur-Eleveur, être un Industriel-Commerçant, être un Créateur-Communicant, ce sont des choses bien distinctes etqui créent des rapports à la société très différents.

— L'individu chez les chasseurs-cueilleurs ne s'intègre au groupe qu'à traversune sorte d'osmose complète où chacun partage la fidélité absolue à une vision dumonde et au mythe originel dont il relève. Le groupe est complètement soudé grâceau rituel, au chant, à la danse, au dessin, que chacun reproduit fidèlement dansun envoûtement mutuel de tout le groupe.

— Avec l'agriculture et l'élevage, chacun étant responsable d'un terrain oud'un troupeau, se trouve relativement plus libre; alors que la tribu vit chaquejour dans une sorte de transe et fait de chaque geste un acte sacré,l'agriculteur-éleveur, bien que la tendance précédente reste souvent présente,sort de l'osmose totale connue dans la tribu. L'âge de l'agriculture et del'élevage, avec des moyens techniques accrus et l'apparition de l'écriture, estl'âge par excellence des grandes religions. Dans la religion, l'individu découvresa responsabilité face à un choix entre la bonne et la mauvaise route. Le paradisde la tribu est perdu, l'homme goûte au fruit de la connaissance du Bien et duMal. La Bible a donc raison, c'est bien avec la pomme que commence "l'histoire" del'homme. Et à partir de là, l'homme n'aura de cesse de découvrir et de fouillertoujours plus profondément dans la création pour en voler son secret à Dieu. Le

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serpent restera pour tous les temps historiques le symbole ambigu de laconnaissance. Une connaissance qui plus ou moins bien partagée, plus ou moins biendistribuée, plus ou moins avancée, créera tous les clivages entre individus queconnaissent les sociétés humaines.

— Avec le commerce et l'industrie, nous assistons à un nouveau saut versl'autonomie de l'individu. Le droit de chacun à professer sa propre religion, sapropre manière de voir le monde, le concept lancé à partir du XVIIIème siècle dela liberté d'opinion, sont des symptômes majeurs de cette liberté neuve acquisepar la personne. Mais il faut attendre l'apogée de l'Age Industriel, et lestroubles qu'il suscite dans les années 1960, pour voir cette tendance àl'autonomie de l'individu éclater dans toutes ses potentialités.

En quelques années, tous les codes ou semblants d'obligations comme le fait derespecter la chasteté avant le mariage ou de refouler les tendances homosexuelles,se trouvent effacés en l'espace de quelques années. 68 dans ce sens-là a étésouvent très mal compris. On a essayé de l'analyser avec des outils dépassés,marxistes, structuraux, politiques, alors qu'il s'agissait avant tout d'uneévolution des moeurs ne faisant qu'actualiser les potentialités inscrites dans lemonde industriel depuis ses origines. C'est pourquoi nous devons à 68 unemodification complète de tous nos comportements mais guère de changementseffectifs de nos structures sociales. 68 ne fut pas une révolution, ce futseulement une simple mise à jour.

— Avec le basculement aujourd'hui dans une société dominée par la création etla communication, activités qui sont avant tout le fait de personnes autonomes,nous ne pouvons compter que sur un nouveau bond en avant de l'individu dans sonautonomie. Nous sentons déjà cette tendance dans le dépérissement de la solidaritéqu'avaient les individus quant à l'état ou l'entreprise à laquelle ilsappartenaient. Aujourd'hui, chacun se sent concerné avant tout par soi-même et àla limite, par le destin de la planète toute entière, car par un brusquetélescopage, cette entité autrefois fort large et fort abstraite, devientaujourd'hui l'espace incontournable et pourtant fragile de notre survie à chacun.

Ainsi l'obsession de chacun devient de s'en sortir le mieux possible,individuellement et au jour le jour, tout en gardant les yeux fixés surl'évolution mondiale avec plus ou moins d'angoisse. Il nous faut aujourd'hui inventer toute une nouvelle manière de vivre notrerapport au monde, chacun le pressent plus ou moins confusément, chacun avec sesfaiblesses et sa force essaye de l'inventer à sa manière. Dans cette recherche,chacun revendique avec raison de plus en plus d'autonomie. Le nouveau village dontnous nous sentons tous aujourd'hui solidaires est la planète.

Les deux grands enjeux de la fin de ce siècle sont la protection etl'élargissement des libertés de chacun et la survie planétaire. La sociétéplanétaire est en marche, elle n'appartiendra ni aux Russes ni aux Américains ni àaucun état aujourd'hui constitué. Elle appartiendra aux hommes.

Les hommes, chacun de nous qui sommes libres d'aller où bon nous semble sansqu'aucune frontière ne puisse revendiquer le droit de nous en empêcher. Une prisonne cesse pas d'être une prison en écartant ses murs. Les frontières nousavilissent et nous rabaissent chacun au rang de prisonniers et d'otages. En sefaisant soi-disant les garants de notre liberté, les pays ont en fait circonscritl'espace de notre enfermement. En un siècle, la situation a dégénéré et il estaujourd'hui, contrairement au début du siècle, pratiquement impossible à un

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individu de circuler et de résider librement où bon lui semble sur la planète.Avec les tensions qui se multiplient un peu partout dans le monde et la peurcroissante des pays quant à l'effritement irrémédiable de leurs structures, cettetendance carcérale des frontières ne peut aller qu'en s'amplifiant; et cela aumoment même où les moyens de transport, de communication et les échangesinternationaux deviennent tellement courants que chacun devient solidaire de laplanète toute entière. Ces deux processus ne peuvent aboutir qu'à une rupture etune désolidarisation totale des individus quant aux structures étatiquesapparaissant de plus en plus carcérales, nocives et dépassées.

Mais si la société planétaire n'a pas encore pris forme et que les états sonten pleine désintégration, quelles sont les structures aujourd'hui vivantes danslesquelles les individus puissent se retrouver ?

Un peu partout dans le monde se construisent, ignorant les frontières, leslangues et les cultures, des sortes de réseaux qui restent la plupart du temps àl'état informel, mais réunissent des individus très divers et fortement créatifs.

Ces réseaux se constituent par le simple désir qu'ont ces individus de partagerdes informations, des idées, ou d'échanger des créations qui n'arrivent pas àpasser à travers la communication de masse. En effet les masse média visent unpublic fortement homogénéisé et abêti par le caractère répétitif et banalisant del'Age Industriel dans lequel le plus grand nombre baigne encore complètement. Cepublic resté à l'Age Industriel, n'étant pas sensible à l'émergence du champ deréalité post-industriel, les masse média, pour des raisons financières, excluentde leur circuit tout un type d'informations ne rentrant pas dans le contexte del'information de masse.

C'est ce qui explique le sentiment que peut avoir n'importe quelle personneréellement informée sur l'évolution actuelle du monde, du caractère mensonger eten quelque sorte à côté de la plaque, propre aux informations que diffusent lesgrands médias. L'exactitude des faits n'est pas là à remettre en cause, ce quiporte à confusion, ce sont le contexte et les commentaires à travers lesquels lesfaits sont transmis.

Pour pallier cette "désinformation" propre aux masse-média et à la redondanceabêtissante, les individus créatifs, quel que soit leur domaine, sont constammentà la recherche de nouveaux contacts avec d'autres individus créatifs et innovants.Cela commence par former de petits agrégats, soit géographiques, soit pardomaines, mais ces agrégats finissent par communiquer de plus en plus les uns avecles autres, constituant un vaste réseau international très vivant et en constanteévolution, bien que complètement informel.

Cette tendance sort d'ailleurs de plus en plus de l'ombre pour deux raisonscomplémentaires. La première raison est évidemment le nombre croissant d'individusparticipant à ce réseau, mais aussi une inversion de la tendance masse-médiatique.

Dans la mesure où le marché de la communication de masse est de plus en plussaturé et que d'autre part, les médias de communication ne cessent de semultiplier, nous voyons apparaître une tendance générale à la segmentation et à laspécialisation des médias de communication. Dès cet instant, la "nouvellesociété" et son réseau informel de participants devient un public susceptibled'intéresser les médias, bien qu'il ne touche qu'une minorité d'individus. Cegroupe devient une cible d'autant plus intéressante qu'il est en pleinecroissance.

Cette tendance va être radicalisée avec la généralisation des médiasinteractifs et des réseaux informatiques. Ces nouveaux outils sont évidemmentattendus avec impatience par l'humanité créative. Elle permettra d'échapper à

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toute contrainte géographique en s'engageant dans une synergie d'innovation telleque n'en a jamais connue l'humanité.

A travers les médias interactifs, les individus créatifs transformeront laTerre en un gigantesque réseau neuronal, en un gigantesque cerveau. De la mêmemanière que le développement mécanique des usines a permis à l'âge industriel des'asseoir, les réseaux de communication interactifs constituent les moyens de lasociété planétaire de Création et de Communication. Cette page de l'histoire del'humanité sera tournée d'ici la fin du siècle.

Chaque individu aura alors accès grâce à un simple terminal à l'ensemble desconnaissances produit par l'humanité depuis ses débuts. Chacun pourra faireconnaître sa création aux quatre coins du monde, sans avoir à passer sous l'égided'un distributeur. La personne, dans sa liberté à s'informer, à créer et àcommuniquer, sera la base de cette nouvelle société. C'est pourquoi toutes lestendances qui aujourd'hui poussent à empêcher l'information, la créativité et lacommunication, constituent de véritables catastrophes, car elles repoussent dansl'ombre tous les individus, les entreprises ou les pays touchés par ce type demesure et empêchent ces individus, ces entreprises et ces pays de se préparerd'une manière saine et constructive à la venue inéluctable de l'Age de laCommunication et de la Création.

En essayant de restreindre l'information, la créativité et la communication,les pouvoirs en place pensent maintenir d'une manière plus aisée leur autorité;ils ne font en fait que saper toute leur chance de rester compétitifs etpertinents, même à très court terme. En fait, les pouvoirs en place sapent ainsitoute possibilité de survie pour eux-mêmes et pour ceux dont ils sont lesresponsables.

La disparition de "l'Homo Specialitus".Un des phénomènes qui a marqué les temps historiques a été la spécialisation

croissante des individus. Cette spécialisation commence évidemment avec l'agriculture et l'élevage et

devient caricaturale avec l'industrialisation et la modernité. Cette tendance apparaissait tellement forte et irrémédiable que le système

scolaire lui-même s'est vu obligé de faire apparaître la spécialisation à un âgede plus en plus jeune, diminuant proportionnellement la part laissée à la culturegénérale.

Cette tendance est tellement devenue évidente à tout le monde il y a quelquesannées que tous les pays modernes s'enorgueillissaient à qui mieux mieux de leursspécialistes et de leurs systèmes de spécialisation. En fait, c'est toujours aumoment où quelque chose devient complètement évident qu'il commence à devenircaduc. Ce système de spécialisation et tous ces spécialistes sont sans doute unedes choses les plus difficiles à revoir et à faire évoluer aujourd'hui. Or ilssont, et seront toujours plus, les principales barrières à l'innovation et à lacréativité nécessaire pour relever le défi de la société Post-Industrielle.

Une des sociétés qui s'est engagée le plus radicalement et avec le plus desuccès dans l'Age Post-Industriel, le Japon, l'a très bien compris. C'est pourquoiau moment même où les Occidentaux spécialisaient leurs système éducatif, lesJaponais insistaient sur l'importance d'une culture générale de base.

L'intérêt de cette culture générale dans un monde en pleine évolution estévidente, car elle seule permet l'ouverture d'esprit et l'agilité intellectuellenécessaire à l'intégration constante de nouveaux types de connaissance, ainsi queles reconversions successives de l'individu à des métiers différents.

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Une responsabilité accrue.Nous avons essayé d'éclairer l'avenir au niveau de cette entité, fondement de

toute société qu'est l'individu. Nous avons insisté sur la nécessité pour chacun d'entre nous de retrouver

l'intégralité du potentiel qu'il possède à travers son corps mais aussi grâce àune âme et à un esprit aujourd'hui fortement méconnus.

Nous avons montré que cette recherche est placée sous la responsabilité dechacun et qu'il ne peut attendre aucune aide réellement efficace ou authentique decultures ou de sociétés qui sont toutes en pleine désintégration. Cette solituderetrouvée, bien qu'elle puisse paraître dans un premier temps négatif n'en est pasmoins positive en ce qu'elle ramène chacun à une nudité et une obligation desincérité qui sont les prémices les plus positifs à toute découverte profonde desoi-même.

Nous avons montré, dans "L'individu et la société", comment l'autonomiecroissante des individus est une tendance lourde et que l'on peut compter avec uneaccentuation de cette autonomie.

Enfin, nous avons noté la remise en cause de la tendance à la spécialisation etla nécessité d'une culture générale.

A chaque étape du développement de son autonomie et de sa liberté, l'individu aconquis du même coup une responsabilité croissante pour ce qui est de son propredevenir mais aussi pour ce qui est du devenir de la terre toute entière.

L'agriculture et l'élevage nous ont donné les moyens de transformer la terre enjardin, mais d'en faire aussi un désert.

L'industrie et le commerce ont multiplié à l'infini les richesses offertes parla Terre, mais nous ont donné aussi les moyens de détruire totalement la planète.

L'Age de la Création et de la Communication nous permet d'incarner tous lesrêves de l'humanité mais aussi les pires cauchemars.

Dieu a voulu l'homme semblable à lui-même, et nous sommes aujourd'huiréellement semblables à Dieu, puisque nous pouvons réaliser tous nos rêves. Maiscette liberté neuve et vertigineuse nous sera définitivement fatale si nous ne lacontrebalançons pas par une capacité d'humilité, d'effacement, semblable à cellede Dieu qui jamais ne paraît et utilise le silence comme porte-parole. Si nous encroyons l'accélération du temps, l'Age de la Création et de la Communication seraaussi court que brusque.

Qu'y-a-t'il après ?Tout changera d'ici la fin du siècle. Non seulement nous aurons basculé dans la

Post-Histoire, mais commencera très rapidement le départ de quelque chose detotalement inimaginable. Ce n'est qu'avec une reconnaissance très humble de noslimites et de l'illusion de nos rêves aussi grandioses soient-ils, que nouspourrons aborder cet au-delà de tout imaginaire.

Quoiqu'il en soit, notre responsabilité pour l'instant est de faire traverser ànous-mêmes et à la planète le seuil critique entre une société industrielle et unesociété basée sur la création et la communication. C'est le but des prochainschapitres que d'explorer les aspects majeurs de ce défi.

Dixième chapitre

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LES ENTREPRISES

INTRODUCTION AU DÉVELOPPEMENT DU POTENTIEL DE L'ENTREPRISE.

L'entreprise sémiocratiqueOn a beaucoup parlé ces derniers temps, aussi bien en Europe qu'aux Etats-Unis,

du renouveau de l'esprit d'entreprise.Les entrepreneurs à succès sont presque devenus aussi célèbres que les stars du

cinéma; parallèlement à ce processus, nous voyons un regain d'intérêt pour la viedans l'entreprise, on parle même de culture d'entreprise. Un livre comme "Le prixde l'excellence", susceptible a priori de ne toucher qu'un public spécialisé,devient un best-seller. Tout cela était difficilement imaginable, il y a dix ans.

Dans cet élan pour la nouvelle entreprise, il y a beaucoup de confusion, carl'on considère comme une continuité ce qui en fait est une véritable rupture. Lesenjeux de l'entreprise telle qu'elle est concevable aujourd'hui, n'ont plus rien àvoir avec les enjeux de l'entreprise telle que l'on pouvait la considérer il y adix ans.

L'entreprise de l'Age Industriel était une entreprise axée vers la productionmassive de quelques produits dont elle s'était fait la spécialité, ces produitsayant une durée de vie d'une ou de plusieurs générations. La nature de cetteproduction de masse ne peut que rendre répétitif et ennuyeux le travail. L'hommen'y est exploité qu'en ce qu'il a de plus bête et de plus mécanique. Lestravailleurs ne sont que des rouages remplaçables les uns par les autres.

Le seul but avoué ou non de ce type d'entreprise ne peut être que de faire lemaximum de bénéfices. La nécessité de dégager le profit nécessaire à l'expansionrend difficile l'épanouissement du travailleur qui ne peut être pris en compteque secondairement.

Les Japonais sont parmi les premiers à comprendre qu'avec la nouvelle vague detechnologie, où la part conceptuelle est dominante par rapport à la partmatérielle, le capital humain, source unique et rare de créativité, doit être prisen compte avec au moins autant de soin que le capital financier.

L'intérêt du patron cherchant un maximum de créativité et l'intérêt destravailleurs cherchant un travail où ils puissent s'épanouir se retrouvent ainsibrusquement réunis après un très long divorce. Cela va même si loin quel'organisation hiérarchique est remise en cause dans de nombreuses entreprises depointe. Après la folie des regroupements, afin de faire des économies d'échelle,on voit partout surgir la problématique de la dissémination de micro-cellulesautoresponsables propres à développer la créativité. Les entreprises s'organisentde plus en plus d'une manière collégiale qui réunit des compétencescomplémentaires capables d'entrer en synergie les unes avec les autres d'unemanière informelle, sans que des positions de domination puissent être dégagées.

L'entreprise efficace telle qu'elle se dessine dans un futur très proche,ressemblerait-elle plus à une tribu aborigène qu'aux entreprises telles que nousles avons connues durant toute l'époque agraire et industrielle?

Aujourd'hui, les entreprises, y compris dans le domaine industriel, ne vendentplus un produit matériel, mais un concept. Il suffit pour en être convaincu de

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faire une analyse des coûts : dans le prix de beaucoup de produits moins de 10% duprix correspond à la matière elle-même, cela est vrai pour les ordinateurs, pourles voitures, etc...

Ce qui coûte cher aujourd'hui, ce n'est pas la production, c'est la mise aupoint du concept d'un produit pertinent. Les entreprises se jaugent à leurcréativité et à leur innovation.

Une manière de dégager des bénéfices importants consiste en la création ex-nihilo d'un nouveau marché grâce à la création d'un nouveau produit en ruptureavec ce qui existe .Les grandes réussites de ces dix dernières annéescorrespondent à ce type de processus.

L'exemple le plus fracassant est évidemment Apple avec la micro-informatique,mais aussi Sony avec le walkman, MTV dans le domaine des médias, la Fnac dans ledomaine de la distribution, le Club Méditerranée dans les loisirs. Tous cesproduits et les sociétés qu'ils ont suscitées ont cela en commun qu'ils ne sontpas uniquement commerciaux et industriels, mais trouvent leur réussite en cequ'ils invitent à partager une nouvelle culture, une nouvelle vision du monde, unnouveau champ de réalité.

Le génie de ces entreprises n'a plus rien à voir avec l'industrie et lecommerce. L'industrie et le commerce sont secondaires. La réussite de cesentreprises vient de leur capacité à se brancher sur des champs de réaliténouveaux et à les créer en les révélant à travers la diffusion du produit etl'expansion de l'entreprise. Le produit devient un signe de reconnaissance de tousles individus partageant ce nouveau champ de réalité. De la même manière quel'organisation non hiérarchique implique que l'entreprise ait son champ de réalitéspécifique, autrement dit une culture d'entreprise forte, de la même manière,cette nouvelle conception du produit que nous venons d'expliciter implique quel'entreprise sache se distinguer fondamentalement de toutes les autres : une autremanière de nous ramener au champ de réalité et à la culture d'entreprise.

Quoiqu'il en soit, tout cela converge pour montrer l'importance décisive de lacapacité d'innover, chaque entreprise devant trouver créativement son marché etses produits spécifiques. L'innovation doit s'effectuer à tous les niveaux duproduit, de la manière de produire à la publicité finale pour promouvoir leproduit. C'est pourquoi elle ne doit pas être le fait de la direction, mais del'entreprise dans sa totalité. Comment une entreprise, qui nécessite pourfonctionner une certaine organisation, peut-elle supporter de se laisser aller àtant de créativité qui par sa nature même est troublante et désorganisatrice?C'est la quadrature du cercle à laquelle chaque patron d'entreprise estaujourd'hui confronté.

L'entreprise créatrice.Comment gérer une continuité et susciter la créativité simultanément ? Les entreprises aujourd'hui sont obligées de vivre à deux vitesses. D'une part,

il leur faut tirer profit et exploiter au maximum les produits qui ont été lancés,ce qui implique une continuité, une organisation rationnelle et presqueobligatoirement formelle.

D'autre part, il leur faut constamment innover, ce qui ne peut se faire qu'àtravers un saut créatif, par définition irrationnel, imprévisible, qui estsusceptible de remettre en cause toute l'organisation de l'entreprise et saculture même.

En fait, ce défi est impossible à relever si les entreprises, comme lesindividus qui en font partie, ont une conscience qui reste bloquée au niveauformel et ne s'ouvrent pas au niveau turbulent et vide. En effet, toute innovation

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implique une traversée du niveau turbulent, ce qui donne aux créatifs ce côté flouet désordonné,avec remontée jusqu'au niveau vide. Et ensuite un retour au niveauformel, après une nouvelle traversée du niveau turbulent.

Non seulement il faut avoir une culture d'entreprise forte et une bonneambiance dans l'entreprise, ce qui implique une maîtrise totale et une bonnesynchronisation des niveaux turbulents et des niveaux formels, mais il faut aussiune capacité à réorienter complètement l'entreprise et sa culture en un temps trèscourt, ce qui ne peut se faire que par une bonne connaissance du niveau vide. Sila culture d'entreprise et le champ de réalité qu'elle implique, donne àl'entreprise sa spécificité et les fondements de sa force, elle peut constituer àterme une ornière. Comment faire basculer une entreprise toute entière vers desnouvelles valeurs, un nouveau champ de réalité, alors qu'on lui a fait croire durcomme fer à des valeurs et à un champ de réalité complètement différents quelquesannées avant. On a vu des réussites foudroyantes se transformer tout aussi vite enéchecs, par l'incapacité d'entreprises pourtant très performantes de faire évoluerradicalement leur manière de voir. C'est en effet une des caractéristiques de lamobilité actuelle que la cause même de la réussite actuelle puisse devenir lacause de l'échec de demain.

Dans ce sens là, la nécessité qu'ont les entreprises de créer leur champs deréalité spécifiques, et à faire croire à tout le monde dans la culture spécifiquequi s'y rattache, est tout à la fois le fondement nécessaire de toute entrepriseefficace et en même temps un terrible piège. Ce piège ne peut être contourné quegrâce à la pleine conscience du Niveau Vide qui permet de "croire sans y croire",et donne à l'entreprise une "super-culture" où chacun puisse se retrouver au-delàdes modifications culturelles que l'entreprise aura à traverser. Les entreprisesdevraient avoir en leur sein une salle "vide" et "inutile" qui pourtant pourraitêtre la plus importante de toute l'entreprise, permettant à chacun, quand il enressent le besoin, de retrouver le silence du niveau vide.

Informatique, Communication et Formation.Quels sont le corps, l'âme et l'esprit d'une entreprise ? Nous pourrions penser que le corps correspond au bâtiment dans lequel

l'entreprise s'installe. Cela était sans doute vrai à l'Age Industriel où lesmoyens de production étaient déterminants. Cela est beaucoup moins vraiaujourd'hui. Le véritable corps d'une entreprise, la structure matérielle qui larévèle dans le monde extérieur, est sa structure informatique.

L'Ame de l'entreprise, quant à elle, pourrait être vue dans sa Communication.Enfin, la Formation pourra être considéré comme l'Esprit.

Pourquoi ce découpage ? — L'Informatique fonctionne à partir de la binarité logique originelle, zéro et

un. L'Informatique est complètement rationnelle, elle correspond à la définitiondu Niveau Formel.

— La Communication, quant à elle, a à voir avec les désirs, la séduction,l'émotion. A travers sa communication, une entreprise révèle son âme et sonrapport au Niveau Turbulent.

— Enfin, la Formation doit préparer chacun a connaître le Niveau Vide. On pourra constater à la lecture de ce découpage que de même que pour les

individus, l'Ame et l'Esprit atteignent rarement leur plénitude, de même dans lesentreprises sont rarement conscientes du Niveau Turbulent et du Niveau Vide.

L'Informatique, la Formation et la Communication sont les trois domaines clésdes entreprises de demain.

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Ces trois domaines sont encore aujourd'hui à leurs balbutiements. L'une descaractéristiques les plus habituelles des entreprises aujourd'hui est que cestrois domaines sont gérés séparément dans l'entreprise, l'ensemble aboutissant àdes contradictions terribles. Nous avons vu des entreprises se lancer dans uneinformatique centralisée, tout en promouvant, au niveau du management, la créationde petites cellules autonomes et décentralisées. Certaines entreprises ont unecommunication qui tend à donner d'elle-même une image sympathique, vivante etjeune de la firme, et quand on prend contact avec cette entreprise, on se trouveentouré d'un personnel grincheux et vieilli.

Les entreprises, en général, en sont encore dans ces trois domaines à faire dubricolage, sans se rendre compte qu'en faisant ainsi, elles se détruisentirrémédiablement.

Les investissements en informatique étant importants, il est difficile derevenir sur ces décisions une fois prises.

Une communication qui tombe à faux marque définitivement la cible et donne àl'ensemble de l'entreprise un caractère mensonger.

Une formation qui utilise les recettes et le bourrage de crâne ne quitte uneornière que pour tomber dans une autre.

De même que l'individu, l'entreprise doit reconquérir un corps, une âme et unesprit qui soient authentiques. Aujourd'hui, une bonne informatique peut faire desmiracles, une communication juste fait exploser les ventes, un formation positivedémultiplie le potentiel de l'entreprise.

Il n'y a rien de plus important pour les individus aujourd'hui que de trouverun endroit où ils puissent s'épanouir tout en travaillant et en gagnant l'argentnécessaire à leur survie. N'importe quelle entreprise qui sait offrir à sessalariés non plus seulement un travail abêtissant, mais un espace àl'épanouissement et à la créativité, transforme ces mêmes salariés en autant desupporters. Et dans la compétition mondiale, seules les entreprises qui serontfaire de tous leurs membres des supporters, pourront conquérir une efficacitésuffisante. Pour cela, il faut que le management reconquiert une dimensioncharismatique que seule la plénitude du niveau vide peut lui apporter.

La communication, doit être la révélation, la cristallisation des tendances duniveau turbulent de l'entreprise. Tricher avec sa communication ne sert à rien. Lepublic, chaque individu, est toujours en contact grâce à son niveau turbulent avecle niveau turbulent des entités qu'il rencontre. Ainsi, mentir, essayer de donnerune idée fausse de soi-même, n'aboutit qu'à créer un sentiment de fausseté, mêmesi le public ressentant cela ne sait pas trop où et comment s'effectue lemensonge.

Une bonne communication d'entreprise, une bonne communication pour un produit,est celle qui va au coeur de l'entreprise et du produit.

Enfin l'informatique, à travers ses machines et ses programmes, est l'espacedans lequel l'entreprise prend corps. Ce corps est évidemment déterminant, quant àla puissance qu'aura l'entreprise, dans son expansion.

L'architecture de l'informatique que choisit une entreprise, devient lesquelette de cette entreprise. Toute malformation à ce niveau là, aura uneinfluence radicale sur l'ensemble de l'entreprise. C'est pourquoi l'informatiquedoit être choisie avec le plus grand soin, de même que la communication,l'informatique ne doit être en aucun cas laissée aux seuls spécialistes car ilssont les deux niveaux déterminants où peut s'incarner l'esprit d'un management.

Les entreprises qui pourront aborder d'une manière positive le grand tournantque nous allons vivre, seront celles qui sauront unir dans une même synergie et

Page 92: Le management systémique de la complexité

une bonne transparence, ces trois niveaux essentiels de l'entreprise que sont leurcommunication, leur formation et leur informatique.

L'intraprise.Comme nous l'avons vu, un des facteurs décisifs de la réussite d'une

entreprise, est sa capacité à exploiter son champ de réalité, mais aussi àsusciter constamment de nouveaux champs de réalité qui collent avec l'actualité etqui puissent prendre la relève à mesure que les champs plus anciens s'effritent.

Cette double activité est par définition profondément conflictuelle, car gérerun champ de réalité arrivé à sa plénitude est complètement différent de laturbulente créativité nécessaire à l'émergence d'un jeune champ de réalité. Poursolutionner cette apparente contradiction, le mieux est d'utiliser ce que l'onpeut appeler l'Intraprise. C'est-à-dire entreprendre à l'intérieur del'entreprise.

Lorsque quelqu'un a à l'intérieur de l'entreprise une idée nouvelle,l'entreprise lui propose de lui donner les moyens pour développer son idée, enayant tout à la fois une réelle autonomie mais aussi, l'aide de toutel'infrastructure de l'entreprise mère. La nouvelle idée ainsi libérée descontingences matérielles, qui sont les principales raisons de la grande mortalitéinfantile des entreprises à leur début, la nouvelle idée donc, peut s'incarnerrapidement et donner lieu à une nouvelle entreprise qui constituera à terme, unevoie de reconversion pour l'entreprise mère.

Ce genre de gymnastique peut paraître idéale, mais n'en demeure pas moins trèsdélicate à effectuer, à cause de la nécessité pour les managers de la sociétémère, de fonctionner sur plusieurs champs de réalité différents, ce qui impliqueencore une fois, qu'ils sachent passer rapidement du niveau formel au niveauturbulent ou vide.

On voit d'ailleurs à l'occasion de cet exemple, combien l'image de leader peutévoluer entre l'Age Industriel et l'Age de la Création. Durant l'Age Industriel,le leader est avant tout l'homme d'une idée, c'est grâce à sa conviction, saténacité et sa fidélité à cette idée, qu'il peut l'imposer. Dans l'Age de laCréation, le leader, le manager idéal, doit lier à ses capacités de créativité ,des capacités d'ouverture aux autres et aux champs de réalité les plus divers quilui permettent d'être comme un caméléon pouvant passer sans se faire remarquerd'un monde dans l'autre. Il doit être le "go between" de Champs de Réalité lesplus divers, savoir les représenter les uns vis à vis des autres et savoirreprésenter leur ensemble à l'extérieur. Il doit mettre sa créativité au servicede la créativité de chaque membre de l'entreprise.

Les quatres phases pour le développement du potentiel de l'entreprise.Nous avons imaginé quatre phases pour le développement du potentiel de

l'entreprise:— DIAGNOSTIQUE : Utilisation de ce livre pour faire le diagnostique de

l'entreprise.— STRATEGIE : Mise au point de la stratégie d'adaptation de l'entreprise à

l'age de la Création-Communication— POLARISATION : Motivation de l'ensemble des forces de l'entreprise.— TACTIQUE : Créativité de l'entreprise au niveau de ses systèmes Informatique,

Formation, et Communication.

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DIAGNOSTIQUE.

a) Contexte:Incompréhension croissante des entreprises face à l'évolution.Les entreprises ont de plus en plus de mal à faire face à l'évolution actuelle

avec les outils de gestion traditionnels.De même que l'Age Industriel a industrialisé l'agriculture; l'Age de la

Création oblige au développement de la créativité au cœur même des activités lesplus traditionnelles de l'industrie et de l'agriculture. Les sommets del'industrialisation et de la massification dans les années 70 sont atteints aumoment où se sont opérées les grandes fusions visant à une économie d'échelle.Nous arrivons aujourd'hui à une période où la plus grande partie du développementéconomique est due à la multiplication de petites entreprises apportant une fortevaleur ajoutée grâce à leur créativité.

Parallèlement la mondialisation du marché et l'accélération de mise sur lemarché d'innovations constituent un contexte de plus en plus turbulent auquel lesentreprises ont du mal à s'adapter.

La confusion qui règne aboutit à l'indécision au niveau de la direction.

b) Objectif : Comprendre la situation de l'entreprise dans le contexte planétaire actuel.Faire face aux turbulences actuelles : l'entreprise ne peut retrouver une bonne

direction qu'en se posant des questions de fond .Pour une entreprise, faire face à l'incompréhension c'est faire un diagnostic

en profondeur de son actualité et de son passé.

c) Méthode : Position de l'entreprise dans la Grille de l'Evolution et analyse du Champ de Réalité que constitue l'entreprise.

L'entreprise doit tout d'abord rassembler les documents, études, informationssusceptibles d'apporter des éléments à une compréhension profonde de son histoireet sa situation actuelle.

Il est important dès cette première phase de diagnostic que l'entreprise, endépassant le seul niveau formel, comprenne les intensités qui l'animent enprofondeur au niveau turbulent depuis ses origines.

Evolution du management et de la gestion. Evolution de la stratégie. Evolutiondans la manière de polariser les ressources humaines en les motivant. Evolutiondes tactiques au niveau informatique, communication, formation.

A partir de cette base d'informations, l'entreprise peut commencer son proprediagnostic en se servant de la Grille de l'Evolution et des Champs de Réalité.

Avec la Grille de l'Evolution, l'entreprise peut cerner à quelle étape son typed'activité la rattache.

Quel est le type de culture partagée à l'intérieur de l'entreprise?Les stratégies envisagées par l'entreprise tiennent-elles compte des tendances

prévisibles de l'Age de la Création-Communication?L'entreprise a-t-elle un plan de catastrophes en cas d'effondrement du système

économique Industrie-Commerce ?L'évolution de la culture d'entreprise se fait-elle dans la direction de l'Age

de la Création et de la Communication ?Et cœtera.

Constater.1/ Grille de l'Evolution : Situation dans la Grille de l'Evolution.

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2/ Champs de Réalité : a/ Niveaux de Réalité : Dépassement du Niveau Formel et ouverture

vers le Niveau Turbulent et Vide. b) Principes de Stabilité/Modes d'Evolution : Analyse des Tendances

Evolution/Stabilité.c) Etapes de Vie : Position dans les Etapes de vie.

d)Modalités : Effectuer une fois par an un bilan de l'entreprise en utilisant le Système de Diagnostic Holistique

Le Système de Diagnostic Holistique.est "la conscience de l'entreprise", il apour objectif la prise de conscience approfondie de la situation de l'entreprise.

Le diagnostic commence par une rencontre avec l'équipe de la direction et uneinterview informelle qui permet de prendre le pouls de l'entreprise.

Ensuite, on fait une interview formalisée à partir de la check-list qui sert debase au diagnostic. Cela permet d'avoir un document qui constitue le diagnosticque fait la direction au moment où commence le Développement du Potentiel del'Entreprise (DPE). Ce document permet de mesurer les apports du D.P.E. àl'entreprise.

A partir de là commence le diagnostic proprement dit avec interviews de troisdifférents niveaux hiérarchiques down, middle, up. L'entreprise est analysée dans sonpositionnement sur la Grille de l'Evolution et aux différents niveaux de Réalité,Principes de Stabilité, Modes d'Evolution et Etapes de Vie.

D'autre part, les questionnaires et les interviews avec les différents niveauxde hiérarchie rassemblent toutes les informations nécessaires à la mise au pointd'une stratégie, de la mobilisation et de la tactique de l'entreprise.

Tout au long de ce processus, des diagnostics intermédiaires sont effectuéschaque fois qu'il est nécessaire pour dégrossir la situation et affinerl'approche.

Lorsqu'une première synthèse générale du diagnostic est effectuée, elle estprésentée sous forme orale et écrite à la direction. Cette présentation estéventuellement suivie d'un complément d'étude sur les points restés obscurs.

Une fois par an : Système de Diagnostic HolistiquePremière phase : sondage et rassemblement des informations:

- Première rencontre avec la direction. On utilise questionnaires, interviews, brain-storming pour faire remonter le maximum d'informations.

- Prélèvement d'un groupe à trois niveaux différents de la hiérarchie. On utilise questionnaires, interviews, brain-storming pour faire remonter le maximum d'informations.

- Regroupement de toutes les informations et études pouvant être utiles dans le diagnostic.Deuxième phase : synthèse diagnostic intermédiaire.Réalisation d'un document utilisant la Grille de l'Evolution et les

Champs de Réalité pour mettre en perspective l'ensemble des informations recueillies dans la première phase.Troisième phase : ajustement.Deuxième rencontre avec la direction.Présentation de la Grille de l'Evolution et de la logique des Champs de

Réalité avec le diagnostic intermédiaire.

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Mise en perspective des difficultés et des possibilités.Affinement.

STRATÉGIE.

a) Contexte:Inadaptation des entreprises face à l'Age de la Création-Communication.L'Age de l'Industrie-Commerce est en train de tirer à sa fin. L'ensemble des

structures économiques et culturelles qui lui sont propres s'autodétruisent elles-mêmes à travers les contradictions qu'elles génèrent. D'une part, on voit émergerde nouveaux secteurs annonçant l'Age de la Création-Communication à haute valeurajoutée, d'autre part l'industrie classique se retrouve sur des voies de garage oudevant l'obligation de changer de fond en comble ses habitudes les plusancestrales.

De fait, le chômage est une bonne mesure de l'inadaptation des hommes et desstructures : il existe largement pour tout le monde du travail créatif et à hautevaleur ajoutée dans les domaines innovateurs.

Mais les hommes n'ont pas été préparés à développer, à tous les niveaux del'entreprise, la créativité nécessaire pour être compétitif.

D'autre part, les structures des entreprises, telles qu'elles sonthabituellement formalisées, ont le plus grand mal à sécréter l'innovation.

Nous sommes en plein passage charnière entre l'Age de la Création-Communicationet l'Age Industrie-Commerce, ce qui crée une situation particulièrement troubléeavec des ruptures et des situations inattendues. Le crash d'octobre 1987 en est unbon exemple. Il est très difficile pour les entreprises de dégager une stratégieet elles en sont réduites à naviguer à vue, ce qui fragilise leur confiance enelles-mêmes, détruit le projet d'entreprise et finalement transforme la plupartdes entreprises en des sortes de "radeaux de la méduse" au bord de la faillitedérivant au gré des courants.

Pourtant aujourd'hui plus que jamais il est nécessaire d'avoir un systèmestratégique de haute qualité. La Grille de l'Evolution, parce qu'elle analyse enprofondeur les tendances lourdes, et les Champs de Réalité, parce qu'ilsconstituent un système d'analyse métaculturel, offrent tous les deux des moyens dedégager un système stratégique qui intègre la dimension de rupture et deturbulence forte que nous traversons.

b) Objectif : Adapter l'entreprise au nouveau contexte planétaire.Il s'agit de dégager un plan d'adaptation de l'entreprise au contexte socio-

économique actuel et à venir.

c) Méthode : Utiliser la Grille de l'Evolution et les Champs de Réalité pour dégager une stratégie à court, moyen et long terme pour l'entreprise.

A partir de l'ensemble des renseignements fournis par la phase diagnostique onutilise la Grille de l'Evolution comme support de Brain-Storming pour dégager unestratégie à court et moyen terme.

Il est important de tenir compte des informations récoltées sur le NiveauTurbulent de l'entreprise. Le Niveau Turbulent est souvent plus en contact avec laréalité présente, le Niveau Formel reste engoncé dans des rationalisation dupassé. La Stratégie consiste dans une grande mesure à adapter le Niveau Formel àl'évolution perçue au Niveau Turbulent. Le "formalisme" doit être réduit au

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minimum pour pouvoir s'adapter rapidement, et cela contrairement aux habitudes del'Age Industrie-Commerce beaucoup plus lent.

Les résistances liées à un développement exagéré des Principes de Stabilitédoivent être effacées et les individus doivent prendre l'habitude de développerles Modes d'Evolution. On utilise les Etapes de Vie pour estimer la maturité deschamps de Réalité de chaque produit ainsi que du Champ de Réalité de l'entrepriseen général en fonction de l'âge du Champ de Réalité, on prend les décisionscorrespondantes. On repère les nouveaux Champs de Réalité en émergence quel'entreprise a intérêt à développer.

L'ensemble de cette analyse permet de dégager une stratégie à très long termeconstituant le projet d'entreprise, des stratégies diverses possibles à moyenterme, la stratégie actuellement suivie à court terme ainsi que l'ensemble dusystème sensitif permettant à l'entreprise d'être "sensible" à l'évolution. Cesystème est décrit dans le cadre des modalités concrètes.

Planifier1/ Grille de l'Evolution : Dégager une perspective future, un projet

grâce à la Grille de l'Evolution. Trouver une orientation, un axe sur lequel construire.2/ Champs de Réalité :.

a) Niveaux de Réalité : se brancher sur le Niveau Turbulent, voir le décalage entre Turbulent et Formel, adapter le Niveau Formel en tenant compte du Turbulent.

b) Principes de Stabilité/Modes d'Evolution : prendre conscience des résistances venant des Principes de Stabilité et développer sa capacité à changer grâce aux Modes d'Evolution.

c) Etapes de Vie : repérer l'âge des Champs de Réalité dans lesquels on est inclus et de ceux vers lesquels on veut évoluer. Agir danschaque cas en cohérence avec cet âge.

d) Modalité : Une fois le diagnostic effectué, mettre en œuvre le plan de développement en utilisant le Système de Stratégie Holistique.

La stratégie est "le système nerveux de l'entreprise", elle a pour objectif d'orienterchacun des actes de l'entreprise.

Nous avons en premier lieu une vision stratégique à long terme qui constitue le projet d'entreprise et dont émanent la culture et les valeurs d'entreprise. Cette vision stratégique à long terme est ce qui rassemble l'ensemble des forces de l'entreprise.L'étape préalable du diagnostic doit permettre de vérifier que le projet

d'entreprise est clairement perçu et qu'il y a une bonne adéquation entre le Niveau Turbulent et le Niveau Formel.Dans le cas où le projet d'entreprise n'existe pas, ou n'est pas clairement

affirmé, l'étape préalable du diagnostic doit permettre de dégager les traits fondamentaux de l'entreprise susceptibles d'offrir les fondements du projet d'entreprise.

Page 97: Le management systémique de la complexité

Il est souhaitable autant que possible d'associer l'ensemble de l'entreprise à l'élaboration du projet d'entreprise ou à sa modification afin que cette vision stratégique à long terme ne soit pas plaquée mais émane d'un consensus commun.Le moyen terme et le court terme constituent la base d'action qui permet aux

cadres et à l'ensemble de l'entreprise de s'orienter.- A moyen terme, environ dix ans, plusieurs scénarios stratégiques sont

envisagés; chacun constitue la carte d'un chemin potentiel susceptible de s'offrir à l'entreprise.

- A court terme, environ trois à cinq ans, on élabore un plan stratégique qui constitue le chemin, la route choisie par l'entreprise dans les différents scénarios stratégiques de moyen terme.La vision stratégique à long terme, les différents scénarios stratégiques à moyen

terme, le plan stratégique à court terme ne sont rien s'ils ne sont pas constammentenrichis par des informations fraîches quant à l'évolution de l'entreprise et de son contexte. C'est pourquoi le système de stratégie holistique doit être complété par le palpeur stratégique d'actualité qui constitue les sens, les moyens de perception de l'entreprise.

- La vue : capacité de l'entreprise à percevoir les grands courants de fondet à anticiper sur l'évolution générale. C'est en quelque sorte la tour de contrôle. Cette tâche de synthèse visionnaire pourra être effectuée par deux ou trois personnes, internes ou externes à l'entreprise, connaissant bien l'entrepriseet de très grande culture générale.

- L'odorat : il s'agit de capter les signes d'évolution tout azimut.L'ensemble de l'entreprise est susceptible de participer au développement de ce

flair de l'entreprise en transmettant par de courtes notes d'une demi-page toutes informations significatives et innovantes, y compris dans les secteurs qui n'ont rien à voir avec l'entreprise.

- L'ouïe : capteur d'évolution spécialisé. Même type de processus que dans le capteur d'évolution général mais cette fois-ci en se focalisant sur les domainesclés liés à la spécialité de l'entreprise.

- Le toucher : palpeur du marché. Dans ce cadre on peut faire entrer toutesles études de marketing mais aussi d'une manière beaucoup plus générale la capacitéde l'entreprise à écouter ses clients et tous ceux qui, à la base de l'entreprise, sont en contact avec les clients. Là encore, un système de notes d'une demi-page doit permettre de faire mieux circuler l'information chaque fois que cela est nécessaire.

- Le goût : cercles de qualité et groupes d'expression. Il s'agit de la capacité de l'entreprise à goûter continuellement son propre produit et a l'améliorer.Le palpeur stratégique d'actualité doit permettre d'actualiser en permanence les

données du diagnostic correspondant à la première étape du D.P.E. et d'alimenter eninformations la direction pour la mise au point du plan stratégique à court terme, des scénarios stratégiques à moyen terme et de la vision stratégique à long terme.L'ensemble des informations fournies sont mises en perspective au moyen de la

Grille de l'Evolution et par la logique des Champs de Réalité.Tous les six mois, on effectue à travers un questionnaire un sondage de

l'ensemble de l'entreprise pour vérifier la bonne circulation de l'information. Ce questionnaire régulier permet de constituer une courbe symptomatique de l'amélioration ou de la détérioration de la " synthèse de l'information" à l'intérieur de l'entreprise.

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POLARISATION.

a) Contexte : Démobilisation des ressources de l'entreprise face à l'Age de la Création et de la Communication.

La crise des valeurs, le fait que les gens voient leur Champ de Réalitétraditionnel perdre petit à petit toute consistance aboutit à une démobilisationcroissante des individus face aux objectifs. Dans les entreprises, cela secrète lesyndrome de la fonctionnarisation : chacun fait le minimum pour rester à son posteet ne travaille que dans la perspective du salaire en fin de mois.

Cette motivation uniquement matérielle des hommes correspondait aux méthodesindustrielles de découpage du travail en une multitude de fonctions banalisées etrépétitives. Il devient clair aujourd'hui avec le développement de l'Age de laCréation et de la Communication que les entreprises qui sont aujourd'huiconcurrentielles le sont grâce à une motivation profonde des individus en faisantappel à leurs capacités de créativité et de communication.

De fait dans les entreprises une bonne communication est rendue difficile parle fait que habituellement les valeurs et la culture liées à l'évolution del'homme Chasse-Cueillette, Agriculture-Elevage, Industrie-Commerce, Création-Communication cohabitent de manière et à des doses différentes chez chaqueindividu. Quelqu'un encore très marqué par la mentalité Agriculture-Elevage auradu mal à communiquer avec quelqu'un plutôt du style Industrie-Commerce, etc..

D'autre part, le système éducatif et la spécialisation propre à l'AgeIndustriel ne préparent pas les gens à être créatifs.

Enfin, la destruction des cultures et des champs de réalité traditionnels créeune situation de déstabilisation qui tend à rendre les individus instables en lespoussant à se désolidariser.

b) Objectif : Mobiliser les ressources de l'entreprise pour réussir dans le nouveau contexte planétaire.

Comment harmoniser les différents types de culture qui participent del'entreprise, comment développer la créativité tout en maintenant une cohérenced'ensemble?

c) Méthode : utiliser la Grille de l'Evolution et la logique des Champs de Réalité pourmobiliser l'ensemble des ressources de l'entreprise.

La Grille de l'Evolution est un outil qui aide chaque individu de l'entrepriseà mieux comprendre les différentes cultures et les différents types de valeurqu'il peut rencontrer chez les autres. Les Champs de Réalité sont un bon outilpour développer la créativité et apprendre à communiquer avec des gens appartenantà des Champs de Réalité différents.

La diffusion de la logique des Champs de Réalité et de la Grille de l'Evolutiondans l'entreprise permet de donner à tout un chacun des outils pour développer sescapacités à créer et à communiquer.

Cela permet de donner aux individus un sens à leurs activités journalières. Lesindividus ne sont plus simplement motivés au Niveau Formel (matériel), mais aussiau Niveau Turbulent (affectif) et au Niveau Vide (spirituel).

La Grille de l'Evolution et les Champs de Réalité donnent aux individus unemétaculture qui leur permet de communiquer et de s'entendre au-delà de leurdifférence culturelle. Cette qualité est d'autant plus importante que lesentreprises emploient de plus en plus non seulement des gens de milieux différentsmais aussi de culture et même de race différente.

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Au niveau de l'organisation générale de l'entreprise, on veillera à harmoniseret à orienter dans la même direction les motivations, qu'elles viennent desNiveaux Formel, Turbulent et Vide.

On veillera aussi à ce qu'il n'y ait pas de décalage trop grand dansl'importance des motivations à chaque niveau. Une entreprise en effet doit veillerà ne pas motiver ses gens qu'à un seul et unique niveau car alors les individus nesont mobilisés que partiellement. Dans les entreprises traditionnelles, le NiveauFormel matériel est toujours pris en compte, l'aspect affectif Turbulent parfois,le Niveau Vide spirituel pratiquement jamais. Or le développement de laconscience, le développement spirituel est sans doute une des motivations les plusprofondes et les plus essentielles de l'homme. Dans l'Age de la Création-Communication, ce sont les entreprises qui offriront les moyens de développer laspiritualité et les niveaux de conscience qui seront tout à la fois les plusattractives et les plus efficientes en attirant les meilleurs et en leur donnantles moyens de développer leurs qualités. Le développement de la conscience rendsolidaire il nous met au service des autres

Beaucoup d'entreprises, parce qu'elles visaient à solidifier un Champ deRéalité donné ont développé outrancièrement les trois Principes de Stabilité.Cette tendance n'était pas trop mauvaise durant l'Age Industrie-Commerce où lesChamps de Réalité étaient relativement stables; au contraire aujourd'hui lesentreprises doivent développer leurs capacités à se transformer en développant lesModes d'Evolution. Ce processus est facilité lorsque l'organisation matérielle del'entreprise est la plus malléable possible.

Certaines entreprises parmi les plus efficaces par exemple Loréal et la CGErefusent systématiquement de formaliser leur organigramme.

Le Niveau Formel doit pouvoir être réorganisé très rapidement à partir de lanouvelle orientation du Niveau Turbulent.

Non seulement il faut motiver les gens en profondeur et donc leur fairepartager et adhérer aux Champs de Réalité de l'entreprise, mais ils doivent êtreaussi capables lorsque cela est nécessaire d'accepter que le Champ de Réalité del'entreprise soit totalement transformé. Cela n'est possible que lorsque les Modesd'Evolution sont développés de manière volontaire dans l'ensemble de l'entreprise.Elévation (écoute), Apesanteur (humour), Flottement (Empathie) permettent auxindividus de se distancier par rapport au changement radical qu'ils vivent.Il est important dans la manière de motiver les gens de tenir compte du niveau dematurité du Champ de Réalité de l'entreprise. Afin de ne pas créer deparasitage, il faut savoir donner aux nouveaux Champs de Réalité naissants lapossibilité de se développer sur leur propre base. On peut gérer une entreprisenon pas comme un seul et unique Champ de Réalité mais comme un ensemble de Champsde Réalité hétérogènes avec chacun leur espace-temps spécifique. Chacun serad'autant plus mobilisé qu'il sera traité spécifiquement. Ce qui est vrai desdifférents Champs de Réalité qui constituent l'entreprise est vrai aussi de chaqueindividu en particulier en tant que Champ de Réalité spécifique. Une desmeilleures manières de motiver chaque individu et de lui permettre de s'épanouirdans un contexte de motivation qui lui soit particulier et le pousse à développersa personnalité

Harmoniser.1/ Grille de l'Evolution : Comprendre et respecter les différentes

couches de culture auxquelles nous participons plus ou moins, les relier,les harmoniser entre elles.

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2/ Champs de Réalité : a) Niveaux de Réalité:Aligner le Niveau Formel sur le Niveau

Turbulent. Rendre le Niveau Formel à la fois simple, solide et souple, le clarifier.

b) Principes de Stabilité/Modes d'Evolution : Développer les Modes d'Evolution pour assouplir le Niveau Formel.

c) Etapes de Vie : S'organiser de manière cohérente par rapport à l'Etape de Vie dans laquelle on se trouve.

d) Modalité : A partir de la Stratégie, orienter les forces de l'entreprise vers l'objectif à atteindre en utilisant le Système de Polarisation Holistique.

Le Système de Polarisation Holistique constitue "la musculature de l'entreprise", elle a pour objectif de mobiliser toutes les forces de l'entreprise. On distingue à l'intérieur de l'entreprise trois types différents d'organisation participant chacune de manière différente à la mobilisation des forces de l'entreprise.La première organisation est le directoire ou la direction générale; elle

a plus particulièrement en charge l'élaboration de la vision stratégique àlong terme, la cristallisation du projet d'entreprise et l'animation de l'entreprise à travers la culture et les valeurs qui lui sont propres. Afin de remplir pleinement sa tâche de synthèse et d'animation "culturelle" ainsi que son rôle de représentant de l'entreprise à l'extérieur, la direction générale ou le directoire se doit d'être complètement dégagée des contingences et de l'intendance journalière.Le deuxième type d'organisation plus particulièrement opérationnel est la

hiérarchie par domaine et la hiérarchie par localité.- La hiérarchie par domaine est la hiérarchie qui va du plus

général au plus spécialisé et permet à l'entreprise de se développer en offrant les services les plus professionnels possibles.La hiérarchie par domaine est chargée de l'expansion.

- La hiérarchie par localité est une hiérarchie qui va de la responsabilité géographique limitée jusqu'à la responsabilité géographiquela plus large.Elle permet aux différents services spécialisés d'avoir des services

généraux communs pour ce qui est d'une même zone géographique.La hiérarchie par localité est responsable de l'intégration et de la

bonne cohésion de l'ensemble de l'entreprise.L'entrecroisement de ces deux types différents de hiérarchie permet un

croisement des responsabilités qui fait que dans toute opération, il y aittoujours au moins deux personnes au courant de l'opération en cours. D'autre part, le type d'intérêt et les motivations des deux hiérarchies nesont pas les mêmes, elles s'autocontrôlent l'une l'autre en éliminant automatiquement les individus ou les actions susceptibles de nuire soit à l'expansion soit à la bonne cohésion de l'entreprise. Ce croisement est censé permettre la résolution des problèmes au niveau où ils se posent sans qu'ils n'aient à remonter constamment jusqu'à la direction générale en la préoccupant par des problèmes de second ordre.Le troisième type d'organisation est formé par les réseaux et les

associations L'entreprise doit s'enraciner dans des formes de réseaux et

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d'associations non hiérarchiques où la direction, les membres des hiérarchies mais aussi les clients de l'entreprise puissent se retrouver et communiquer de manière informelle ensemble. Cela est essentiel, pour que l'entreprise soit irrigué d'informations et que cette information circule rapidement et soit facilement utilisable.

Ces différents types d'organisation impliquent pour leur bon fonctionnement uneinformatique, une communication interne et externe et une formation qui permette,en huilant l'ensemble de l'entreprise, un fonctionnement ultimum. C'est le but dela quatrième étape du D.P.E. que de mettre au point ce type de solution sous laforme de la tactique propre à l'entreprise.

TACTIQUE

a) Contexte : dégénérescence de l'entreprise face à l'Age de la Création et de la Communication.

Les entreprises, lorsqu'elles ne comprennent pas ce qui est en train de sepasser sont alors incapables de mobiliser leurs forces et dégénèrent. Cettedégénérescence est due principalement à l'incapacité de l'entreprise à se créer entant que Champ de Réalité spécifique. Durant l'Age Industriel et Commercial, lesentreprises n'avaient pas besoin d'avoir de "fortes personnalités". Quand on passed'une usine à l'autre, on retrouve une culture et un découpage des tachessimilaires. En fait, l'entreprise industrielle type est dépersonnalisée par soucide rationalisation et de profit maximum aux dépens de la qualité du travail et desindividus. Avec l'Age de la Création-Communication, cette tendance s'inverse; lesentreprises ne sont profitables que si elles constituent en tant que telles unChamp de Réalité exceptionnel. Ce n'est plus un produit que l'on vend mais touteune culture. Le produit n'est plus tant l'objet lui-même mais bien plutôt le faitqu'en achetant cet objet on signifie son appartenance et sa participation dans lecadre d'un Champ de Réalité spécifique, FNAC, CLUB MED... Les grandes entreprisesqui ont su être leaders à un moment ou à l'autre ces dix dernières années sont desentreprises dont la personnalité est tellement spécifique qu'elles ne peuventavoir de concurrents. Elles sont en elles-mêmes des univers à elles toutes seules.IBM, Apple, Benetton, People Express sont autant d'exemples. Cela ne veut pas direque ces firmes seront toujours des gagnantes mais chacune d'entre elles a sus'imposer à un moment donné de manière incomparable en jouant le jeu d'unedifférenciation totale.

Les entreprises de l'Age de la Création-Communication sont des entreprises àhaute personnalité.

Trois domaines de l'entreprise sont aujourd'hui déterminants : la formation, lacommunication, l'informatique. Dans ces trois domaines, l'entreprise doit affirmersa personnalité en personnalisant sa tactique. Autrefois, ces domaines étaienttraités séparément par des agents spécialisés. L'évolution des technologies faitqu'ils sont appelés à interagir et à se fondre de plus en plus, c'est pourquoi ilest important d'y réfléchir globalement et d'en établir la stratégie à partir d'unmême tronc commun.

b) Objectif : donner les moyens à l'entreprise pour innover dans son domaine face au nouveau contexte planétaire.

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Comment une entreprise peut-elle développer sa créativité? Comment peut-elletrouver sa personnalité et l'affirmer ?

c) Méthode : utiliser la Grille de l'Evolution et la logique des Champs de Réalité pourmettre au point des méthodes de formation, de communication et d'informatisation qui soient spécifiques à l'entreprise et lui permettent d'innover.

On utilise la Grille de l'Evolution comme support de brain-storming pour aider l'entreprise à se personnaliser et à constituer de nouveaux Champs de Réalité dansle cadre de l'Age de la Création-Communication. Que ce soit au niveau de l'entreprise en général ou de chaque individu, la Grille de l'Evolution sert à s'orienter et à développer sa créativité sans retomber dans des redondances liées à des champs périmés.

La créativité dans l'entreprise dépend fondamentalement de sa capacité à donnerune place centrale au Niveau Vide. C'est pourquoi il apparaît important d'intégrerà l'intérieur même des heures de travail au début, au milieu et à la fin de chaquejournée dix minutes de retour au Niveau Vide. Une salle pourra être spécialementconçue à cet usage.

Il est important que le Niveau Turbulent puisse aussi s'exprimer à travers desséances de brain-storming régulières qui aboutissent à faire évoluer le NiveauFormel de l'entreprise de telle manière qu'il colle au Niveau Turbulent.L'informatique, la communication interne et externe de l'entreprise, la formationsont parties prenantes de ce processus. L'informatique peut aider en devenant unoutil de formation et de communication interne et externe. La communication nedoit pas être simplement conçue en termes de message à faire passer mais comme unvaste réseau interactif de communication permettant à l'entreprise et à tous sesclients d'échanger des informations en temps réel. La formation n'est plus un acteisolé, c'est tout le processus même de l'entreprise à travers son systèmeinformatique et son système de communication qui devient en lui-même un processusde formation ne visant pas simplement à donner des connaissances spécialisées maisà aider chaque individu à développer son potentiel au maximum de ses possibilitéspar l'ouverture au Niveau Vide.

Une entreprise qui est créative sait constamment faire émerger de nouveauxChamps de Réalité, elle devient une sorte de pépinière pour les nouveaux Champ deRéalité.

Les Champs de Réalité nouveaux ont souvent du mal à se stabiliser d'eux-mêmes,c'est pourquoi il est important d'utiliser les Principes de Stabilité en lesrenforçant au profit des jeunes pousses. Les Modes d'Evolution au contraire sontutilisés pour éviter une identification trop grande aux Champs de Réalitéexistants. L'élévation étant très importante afin de remonter vers le Niveau Videqui est la source de toute créativité.

Les Etapes de Vie sont utilisées pour fonctionner sur plusieurs Champs deRéalité différents simultanément. En développant constamment des Champs de Réaliténaissants à l'intérieur de ses murs, l'entreprise assure sa survie et sa pérennitéau-delà de la durée limitée d'un Champ de Réalité spécifique.

Réorienter1/ Grille de l'Evolution : développer des Champs de Réalité qui aillent

dans le sens de l'évolution.2/ Champs de Réalité :

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a) Niveaux de Réalité : revenir au Niveau Vide, dégager du Niveau Turbulent les intensités spécifiques les plus fortes, les formaliser petità petit.

b) Principes de Stabilité : utiliser les Principes de Stabilité pour solidifier les nouveaux Champs de Réalité.

c) Modes d'Evolution : utiliser les Modes d'Evolution pour se libérer des Champs de Réalité préétablis et remonter vers le Niveau Vide.

d) Etapes de Vie : utiliser les Etapes de Vie pour ne pas s'identifier aux Champs de Réalité en pleine expansion et apprendre à cultiver les germes naissants de nouveaux Champs de Réalité (protection des jeunes pousses).

d) Modalité : Définition de la politique de formation, de communication et d'informatisation en utilisant le Système de Tactique Holistique .

La tactique donne à l'entreprise ses "organes" fonctionnels : informatique, communication, formation. La tactique a pour objectif de donner à l'entreprise des outils fonctionnels qui lui soient propres et qui collent à son identité intrinsèque. L'informatique, la communication et la formation sont habituellement des secteurs qui sont séparés et traités par des agents spécialisés dans chacun des domaines. Cela n'était pas grave tant que l'informatique, la communication et la formation n'étaient que des fonctions relativement secondaires, plutôt périphériques. Aujourd'hui au contraire l'informatique, la communication et la formation sont au cœur de l'entreprise post-industrielle; ces trois domaines sont interdépendants les uns des autres, la formation devenant une affaire de communication et la communication s'informatisant.

-L'informatique.Elle a été souvent réduite à la gestion de la comptabilité. Dans l'optique qui est la nôtre, l'informatique sert à la gestion de l'ensemblede l'information qui irrigue l'entreprise. La dématérialisation de l'information étant censée permettre une diffusion plus rapide, moins coûteuse et plus fluide de l'information. Dans l'idéal, le système informatique doit être capable de prendre en charge et de faciliter l'ensemble de la communication que ce soit entre membres de l'entreprise(communication interne) ou que ce soit avec les clients(communication externe). Pour cela, l'idéal est d'utiliser un système de messagerie électronique qui permette une dématérialisation des notes de service mais aussi une expression plus facile et plus libre, non plus seulement du haut vers le bas mais aussi de manière non hiérarchique de chaque point vers les autres. En structurant l'espace de la messagerie,on peut définir des espaces susceptibles de servir à la structuration de la stratégie et un espace plus courant pour ce qui est du flux lié à la polarisation de l'entreprise.L'informatique est aussi un outil pour la communication externe permettant une optimisation et une généralisation des techniques de marketing direct. Ce type de communication révolutionne les méthodes masse-médiatiques traditionnelles en permettant un contact beaucoup plus personnalisé avec le client et une optimisation du produit en fonction de l'évolution de la demande.

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L'informatique est aussi un support pour la formation qui lui permet une plus grande souplesse en permettant à chacun de se former en fonction de ses disponibilités.

- Communication externe et communication interne.Elles sont toutes deux profondément liées, elles doivent être abordées d'une manière globale et doivent constituer un continuum qui s'étend de ladirection générale aux clients en passant par l'ensemble de l'entreprise de manière harmonieuse et avec une écoute continuelle du feed-back à tous les niveaux.La structure informatique cristallise la structure formelle de l'entreprise, la communication interne et externe doit coller à l'évolution turbulente de l'entreprise et en être le révélateur.Afin d'obtenir une plasticité maximum de la communication, il est important de sortir des chemins battus et d'essayer de la dématérialiser le plus possible en utilisant les circuits souples qu'offre l'informatiqueà travers la télématique.La communication de l'entreprise n'est pas seulement le fait d'un messageunidimensionnel issu de la direction et diffusé massivement, mais d'un flux d'échanges continuels entre tous les éléments constitutifs de l'entreprise, le client n'étant pas exclu mais au contraire mis en vedette. Dans une certaine mesure, ce nouveau type de communication renverse les habitudes traditionnelles.

- La formation.La formation était traditionnellement l'occasion de stages plus ou moins spécialisés préparant l'individu à une fonction spéciale. Il faut envisager les choses de manière différente la formation est l'occasion de ramener les individus, qui constituent la véritable ressource de l'entreprise, au Niveau Vide, ce qui permet de développer leurs capacités d'innovation, de créativité et augmente leurs aptitudes à la responsabilité.

CONCLUSION SUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'ENTREPRISE. L'EXPANSION FULGURANTE.

Dans le nouveau contexte économique et planétaire lorsqu'on lance uneentreprise, un produit, de deux choses l'une, ou alors on a effectivement créé unnouveau champ de réalité pertinent avec l'actualité et alors le marché estpotentiellement gigantesque parce que planétaire, ou alors on s'est trompé et onpériclite très vite.

Laissons le deuxième cas de côté et attachons-nous au premier cas qui, bienqu'il puisse apparaître positif, n'en est pas moins délicat à gérer. Les nouvellesentreprises aux produits pertinents ont en effet à gérer alors une croissance sansaucune mesure avec le type de croissance que connaissaient les sociétés de typeindustriel classique. Cette croissance pose des problèmes d'effectifs, de capitauxet d'organisations. Beaucoup d'entreprises aujourd'hui, alors qu'elles ont un fortpotentiel, explosent littéralement du fait même de leur réussite, ce qui leur estfatal. Pour éviter ce genre d'inconvénients, il est souhaitable de réunir cinqconditions préalables.

— Premièrement, l'entreprise ne doit pas reposer sur un seul individu mais aucontraire sur une équipe de base extrêmement solide et soudée d'individus

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complémentaires, créatifs et innovant chacun dans leur domaine. Cette équipe debase ne devrait pas dépasser douze personnes, tout en étant le plus près possiblede ce nombre; douze étant le chiffre optimum au-delà duquel un groupe a du mal àêtre créatif .

— Deuxièmement, l'entreprise devrait avoir une vision claire de sa stratégie àlong terme, ainsi que des différentes étapes qu'elle aura à traverser. Il est bienévident que tout n'est pas prévisible, mais il faut justement se préparer àl'imprévisible, en dégrossissant et en étant clair sur tout ce que l'on connaîtdéjà.

— Troisièmement, l'entreprise devrait avoir une idée précise des ressourcesdans lesquelles elle pourra puiser le financement d'une expansion si rapide.

— Quatrièmement, l'entreprise devra être représentée par une ou deux personnescapables de maintenir la cohésion et l'entente entre les douze, mais aussid'assurer une bonne transparence et une bonne synergie entre les différentescouches formelles nécessaires à la bonne marche de l'entreprise.

De même que le groupe des douze constitue le corps créatif et turbulent del'entreprise, le ou les deux managers représentants de l'entreprise correspondentau niveau vide. Ils doivent être créatifs à tous les niveaux de leur action, maisils doivent surtout utiliser cette créativité pour s'ouvrir et comprendre lesdifférents champs de réalité mis en jeu par le groupe des douze, comment ilss'intègrent dans le champ de réalité de l'entreprise et comment les différentsniveaux de réalité fonctionnent à l'intérieur de l'entreprise. Ils doivent savoirrassembler, tout en révélant le potentiel créatif de chacun.

— Cinquièmement, afin de faire face à une croissance aussi rapide, il estcapital de remplacer la croissance à proprement parler matérielle par unecroissance en quelque sorte immatérielle. Dans le cadre des entreprises liées àl'industrie traditionnelle, une des principales richesses de l'entreprise estl'outil de production. L'entreprise tirait sa force de la pertinence de soninfrastructure matérielle. Aujourd'hui, l'infrastructure matérielle tend à devenirsecondaire, ce qui compte c'est le concept de base. On aura intérêt à vendre ceconcept ou à vendre les droits d'utilisation de ce concept à une série dereprésentants qui chacun prendra en charge l'infrastructure matérielle nécessairepour la mise en oeuvre de ce concept. L'entreprise, grâce à cette politique, ne setrouve pas écrasée par son expansion et les différents problèmes matériels quecette expansion suppose. Ce genre de politique est d'autant plus facile que lemarché croissant exponentiellement avec la notoriété du nouveau produit, il estpréférable de faire rapidement connaître le produit aux quatre coins du monde, enle vendant dématérialisé à une multitude de représentants, quitte à diminuerénormément sa marge bénéficiaire sur chaque produit vendu en final. Dans ce genrede processus, pour aller encore plus vite, on peut créer une diffusion en cascade.

CONCLUSION SUR LE DEVELOPPEMENT DES POTENTIELS : LALIBERTE DU FUTUR.

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L'utilisation de ce livre aux niveaux "Société" et "Planète" reste encore sousforme d'ébauche. Chacun de ces deux derniers chapitres qui aurait pu êtreintégrer au livre devra constituer un livre à lui tout seul.

Si un travail d'équipe a été nécessaire pour l'élaboration du Développement duPotentiel Individuel DPI et du Développement du Potentiel de l'Entreprise DPE, uneapproche collective apparaît d'autant plus nécessaire pour l'élaboration du DPS etdu DPP.

Nous avons imaginé deux types de structure qui permettraient de prolonger letravail de recherche ébauché dans ce livre.

— Les Chambres de la Création et de la Communication : Les Chambres de la Création et de la Communication auraient pour but de

faciliter les échanges entre les personnes sensibilisées et actives dans lecontexte de l'Age Création-Communication, un peu comme il existe aujourd'hui lesChambres de Commerce et d'Industrie pour les activités liées à l'Industrie et auCommerce.

Ces Chambres pourraient s'essaimer un peu partout dans le monde et seconstituer à partir d'initiatives locales.

Elles pourraient être connectés les unes aux autres grâce à un réseautélématique qui leur permettrait de se tenir mutuellement au courant et d'engagerun travail d'échange et de réflexion.

— Le laboratoire holistique : Parallèlement au projet des Chambres de Création-Communication, nous

envisageons l'ouverture d'un "laboratoire holistique" qui regrouperait des savantsde toute nationalité afin de réfléchir de manière pluridisciplinaire et holistiqueaux outils susceptibles d'aider la société et la planète à franchir le pas versl'Age de la Création-Communication.

Pour ce qui est du DPI Développement du Potentiel Individuel et du DPEDéveloppement du Potentiel de l'Entreprise, les individus et les entreprisespeuvent dès maintenant, en utilisant ce livre comme un mode d'emploi, les mettreen œuvre .

Nous envisageons de créer des Cercles en Europe, aux USA, et au Japonrassemblant chacune une douzaine d'animateurs-accompagnateurs pour aider à la miseen œuvre des DPI et des DPE.

Enfin l'Association Triangle regroupe tout ceux qui s'intéresse audéveloppement et à la promotion des des recherches dévelopé dans ce livre.

Nous avons écrit cette dernière partie du livre sur les approches dudéveloppement des potentiels pour montrer comment des outils apparemment abstraitscomme la Grille de l'Evolution et les Champs de Réalité pouvaient être mis enœuvre dans la vie pratique. Cependant, le DPI et le DPE tels qu'ils sont décritssont avant tout des exemples et il faut éviter d'en faire des recettes appliquéesaveuglément. En fait, ce qui est beaucoup plus intéressant est d'utiliser lanotion de Grille de l'Evolution et de Champs de Réalité comme des outilspolyvalents et de les personnaliser en les utilisant de manière créative. Il nefaut pas oublier que ce livre est avant tout un outil anti-habitudes et anti-sectarisme fait pour nous libérer de l'emprise des Champs de Réalité. Il seraitparadoxal et néfaste de constituer "ce simple outil" en sorte de pseudo Champ deRéalité dans lequel on s'enfermerait de manière régressive à la mode scientiste,

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religieuse ou animiste ! (voir Grille de l'Evolution colonne réflexion) Ceci étant écrit sansjugement de valeur sur les apports respectifs et très important de l'animisme, desreligions et des sciences dans le cadre du développement humain. L'Age de laCréation-Communication dans sa puissance de résurrection du passé restitue toutechose à sa place spécifique et "irremplaçable". Nous ne faisons que commencer adécouvrir l'extraordinaire richesse de notre passé qui lui aussi d'une certainemanière s'invente dans le présent.

CONCLUSION GENERALE

"Ce qui tient lieu aujourd'hui d'esprit chevaleresque, c'estl'accumulation. Agir pour avoir et avoir pour agir, tel est leparadigme directeur, la boucle épistémologique autojustificatrice dela classe dirigeante.

La déréglementation financière libère son énergie. La créationde monnaie, de plus en plus incontrôlable, pourrait alors semultiplier jusqu'à atteindre, à l'échelle mondiale, le stade del'inversion; celui où la sur abondance des signes et la bizarreriedes endettements font perdre son sens à la monnaie.

Alors, au milieu d'une crise financière sans précédent, pourrontse mettre en place, par des réseaux de complicité, d'autresprojets : le développement personnel de l'homme, la recherched'équilibre avec la nature, la transformation de la planète enjardin."

Thierry GaudinDirecteur du Centre de Prospective et d'Evaluation.

Ministère de la Recherche et de l'Industrie Française(Les métamorphoses du futur)

Conclusion générale

LA FIN DE L'HISTOIRE ET LE DEBUT DU JEU

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LE KRACH FINANCIER PLANÉTAIRE COMME POINT DE RUPTURE VERS L'AGE DE LA CRÉATION-COMMUNICATION.

Quand on étudie la Grille de l'Evolution, on en arrive très rapidement à sedemander à quel moment se situe le point de rupture, de basculement d'une étape àla suivante et si on peut retrouver des événements comparables à l'occasion dechaque rupture. Les ruptures sont diluées dans le temps, cependant cette dilutionest moindre à la fin de la Grille puisque comme nous l'avons vu l'Evolutions'accélère.

Le passage Chasse-Cueillette / Agriculture-Elevage a été dilué sur des milliersd'années.

Le passage Agriculture-Elevage / Industrie-Commerce se compte en centainesd'années.

Le passage Industrie-Commerce / Création-Communication va se compter en années.L'histoire "quantitative", qui a cherché à comptabiliser les populations

humaines au cours de l'évolution, montre que le développement démographique nes'est pas fait de manière continue mais par vagues. Pendant la période detransition, les désorganisations liées au passage d'un système à un autre amènentune chute quantitative importante des populations concernées.

Il n'est pas impossible que l'humanité traverse une période de crise d'autantplus importante qu'elle sera violente et rapide ces prochaines années.

Dans les périodes de transition des étapes précédentes, il n'est pas rare devoir des chutes dans la population de l'ordre de dix à deux, ce qui veut dire unedisparition de 80% des humains concernés.

Même si le passage Agriculture-Elevage / Industrie-Commerce s'est échelonné surplusieurs centaines d'années, il existe des dates symboliques, comme celles de laRévolution Française, autour desquelles la rupture se cristallise.

Il est tentant d'essayer de prédire quelles seront les dates et lescaractéristiques essentielles du passage à l'Age de la Création-Communication.

Il y a dix ans, alors que nous n'en étions qu'aux prémices de ce livre, nousavions prévu à travers différents regroupements que les années 86, 87, 88, 89seraient des années-clés.

On peut aller plus loin et essayer d'imaginer le détonateur. — L'Age de la Chasse-Cueillette s'est terminé par une crise des hommes dans

leur osmose avec la nature : Worms I, Worms II périodes de grandes glaciations àpartir desquelles les hommes ont commmencé à développer l'agriculture etl'élevage.

— L'Age de l'Agriculture-Elevage s'est terminé par une crise de la possessionterritoriale à partir de laquelle s'est développée la notion de propriété quipermit l'essor de l' Industrie et du Commerce.

— L'Age de l'Industrie-Commerce est en train de se terminer dans une crise descapitaux et des monnaies qui démontre dès maintenant l'importance de la maîtrisede l'information.

Ce qui fait la force d'un pouvoir, fait aussi sa faiblesse. Ce en quoi toutechose trouve sa vie, le contraint aussi à la mort.

Chaque étape a culminé avant de s'effondrer : quoi de plus brillant que lamonarchie sous Louis XIV, et pourtant le pouvoir était sans doute déjà ailleurs...

Aujourd'hui nous vivons l'apothéose de l'Age Industrie-Commerce, pourtant lesgrandes réussites de ces dix dernières années n'ont plus grand chose à voir avec

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l'industrie et le commerce, elles sont avant tout le fait d'individus mêlant àchacun de leurs actes une forte dose de créativité et de communication.

Chacun vaut beaucoup plus par sa capacité à maîtriser l'information que par safortune personnelle.

Demain toutes les valeur se réindexerons sur la valeur ultime : la matièregrise!

La matière grise c'est la capacité à imaginer et à créer de nouveaux Champs deRéalité. Cette matière première a la curieuse propriété de ne pas avoir de limitefinie (la créativité est sans limite), et elle se développe d'autant plus qu'onl'utilise (quoi de mieux pour développer sa créativité que de créer et de vivredans un milieu créatif)

Ta créativité me donne à moi-même de la créativité ! Le basculement de l'Age de l'Industrie-Commerce à l'Age de la Création-

Communication.nous fait passer d'une société centrée sur la quantité à une sociétécentrée sur la qualité.

D'une société d'exploitation du manque à une société de foisonnement du don ! Pour ceux qui réussissent aujourd'hui l'argent n'est plus que symbolique (comme

des titres de noblesse dissociés d'une possession territoriale réelle)L'argent n'est plus un moyen opérationnel dominant, le véritable moyen est la

"maîtrise de l'information" ou comment créer et jouer avec les Champs de Réalité.Cela ne veut pas dire une abolition pure et simple des possibilités ancestralesliées à la "disponibilité de capitaux", "possession de territoire", "osmose avecla nature" (voir Grille de l'Evolution) mais cela restitue chacune à leur justeplace dans le cadre du déploiement renouvelé d'un jeu social "décrispé" et plusharmonieux.

CRÉER ET JOUER AVEC LES CHAMPS DE RÉALITÉ.

De la logique des Champs de Réalité, il ressort plusieurs points de vue qui aident le bien-être dans l'Age de la Création-Communication:

La conscience de l'inconscience.Nous ne prenons conscience d'un Champ de Réalité que par oblitération des

autres Champs de Réalité. Pour être attentif à un "canal télé" nous sommes obligésde le choisir en excluant temporairement les autres. Ainsi une conscience dequelque chose implique toujours quelque part de l'inconscience. Nous devrionstoujours être en alerte que nos certitudes sont avant tout solidifiées sur notreignorance et les immenses trous noirs de notre inconscience.

De la même manière que toutes les couleurs mélangées donnent le blanc... ou lenoir! La conscience qui s'ouvre à l'infinie diversité des Champs de Réalité donnel'illumination suprême ou... la mort!

La différence tient à un fil...c'est l'épée de Damoclès suspendue au fild'Ariane.Il faut dans l'Age de la Création-Communication accepter "de ne pas secomprendre". Chaque être humain est un Champ de Réalité incomparable et unique.Dans toute traduction il y a toujours une certaine perte du sens subtil. Noustranchons le fil d'Ariane chaque fois que nous perdons le sens de la relativité denotre compréhension. Comprendre c'est aussi comprendre que l'on ne comprend pas.

La qualité des défauts.

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Un Champ de Réalité se cristallise en prenant partie. Dans l'infini despolarités possibles il se dessine en se situant dans le plus ou le moins.

C'est grâce à cette polarisation qu'il peut exister et acquérir des contoursnets qui constituent sa "personnalité". Cette polarisation aboutit clairement àdes qualités mais aussi des défauts. La lumière pure ne dessine aucun objet, c'estl'ombre et la lumière qui permettent à la forme de se dessiner. Les défautscernent les qualités. Ainsi un Champ de Réalité qui cherche à effacer ses défautsse bat contre son ombre, il s'affaiblit, devient flou, sinon fou, et ne porteaucun fruit. Cultiver ses défauts, magnifier l'ombre est une manière indirecte etprofonde de développer ses qualités. Tel est le BA.ABA de toute créativité :Michel-Ange disait déjà que ce sont les défauts de la pierre qu'il sculptait quilui révélaient la forme ultime de la sculpture qu'il était en train de tailler.

Le don de recevoir.Le Champ de Réalité auquel nous adhérons est notre propre miroir, il existe des

Champs de Réalité où l'on tue les autres et ainsi irrémédiablement un jour on esttué par les autres. Tel est le Champ de Réalité des "tueurs".

Il existe des Champs de Réalité où l'on échange en comptant soigneusement ceque chacun reçoit, animé simultanément par la peur et le désir d'un profithonteux. Et ainsi on gagne honteusement et on perd... honteusement.

Il existe des Champs de Réalité où l'on donne sans compter et où l'on reçoit...sans compter.

Au plus profond de nous-même nous rêvons d'un Champ de Réalité où nous serionsaimés et les autres offerts. Aimons les autres et donnons leur le meilleur denous-mêmes et automatiquement, logiquement, certainement nous accéderons à laréalisation de nos rêves.

Le rêve de tous les rêves : être consciemment au-delà de tout Champ de Réalité.Chaque fois que nous restituons plus que nous avons reçu, nous augmentons notre

liberté et accédons par effet de miroir à des Champs de Réalité plus riches.

L'amour de la mort.Les Champs de Réalité par le fait même des Principes de Stabilité ont peur de

la mort. Plus un Champ de Réalité est inclus, absorbé, exclusif, plus la mortapparaît terrifiante. Les animaux ont plus peur de la mort que les végétaux, lesvégétaux plus que les minéraux; l'homme enfermé dans son ego et son milieu socio-culturel est plus attaché à la vie que l'homme qui embrasse le devenir de toutel'espèce.

Quelle horreur qu'une histoire qui n'en finirait pas de raconter toujours lamême chose! La conscience a besoin du changement pour se développer. L'esprit abesoin de la mort pour s'incarner dans la conscience. La mort n'est que la limitedes limites.

Le jeu des Champs de Réalité nous apprend comment notre conscience enparticipant à la création, au développement et à la mort des Champs de Réalité,sans y adhérer, peut trouver la liberté ultime au-delà des contraintes spatio-temporelles des Champs de Réalité. Nous avons ancré en nous le désir ultime del'éternité et de l'omniprésence, nous le sommes déjà, il suffit de dégager levoile des illusions de notre Champ de Réalité.

Notre désir ultime d'être éternel et omniprésent; peut être réalisé, il suffitde restituer au Champ de Réalité qui nous a donné la vie tout ce que nous avonsreçu de lui. Il suffit d'être nous-même et de donner cet être aux autres ainsinous serons aussi tous les autres... ad aeternam.

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La victoire des perdants.Les U.S.A. et l'U.R.S.S. ont pris en otage la Terre toute entière dans leur

combat pour le pouvoir absolu. Aujourd'hui le vainqueur est un des Etats les pluspetits du monde, le Japon. Il fut la principale victime de l'arme atomique. LeJapon est aujourd'hui la banque de la planète et le leader final de l'AgeIndustriel et Commercial. Il a acquis cette position grâce à son extraordinairemaîtrise de l'information, c'est ce en quoi il est un précurseur de l'Age de laCréation-Communication. Mais dès maintenant le Japon butte sur ses limitesculturelles : comment ne pas perdre son identité à cause même de sa réussite ?

Que pèse la culture japonaise, ô combien ancienne et particulière, face aumétissage rapide et polymorphe de toutes les cultures qui s'hybrident aujourd'huiaux quatre coins du globe ?Les produits japonais sont partout mais les Japonais sont-ils encore chez eux ?

Peut-être d'ailleurs les produits japonais sont-ils partout parce que lesJaponais sont le seul peuple avec, symptomatiquement, les Allemands à avoir été"expatriés" sur leur propre territoire lors de la dernière guerre mondiale.

Le but final de la guerre est de mettre fin à la guerre.Le but final de la mort est de mettre fin à la mort.Un Champ de Réalité ne meurt que parce qu'il a développé toutes ses

potentialités. La mort n'est que la formalisation finale du racornissement duTurbulent.

Dans les guerres les combattants qui s'entretuent sont déjà morts, la guerren'est qu'une facétie des Champs de Réalité moribonds pour s'éliminer mutuellement.Ce qui reste du vaincu et du vainqueur est vraiment vivant, source potentielle denouveaux Champs de Réalité émergents. Le vaincu est peut-être finalement legagnant parce que c'est celui qui a le plus radicalement perdu. En lui ne survitque l'essentiel, c'est en apprivoisant la bordure du vide qu'on connaît lessecrets de la vie. Le jeu des Champs de Réalité est un jeu parfait, comme danstous les jeux celui qui perd gagne infiniment plus que le gagnant, il apprend àêtre un bon joueur et conquiert dans l'au-delà du jeu le dépassement de la peur.

Celui qui gagne, lui, a beaucoup de chances de se prendre au jeu, attachement àun Champ de Réalité, peur de mourir... et mort fatale.

Le territoire des Extra-Terrestres.La fête et le Carnaval commencent là. Qui est le conquérant final au-delà des je, des jeux et des enjeux ? Qui est le vainqueur final ?Les Extra-Terrestres sont de bons joueurs.Ils ont tout perdu !Ils sont les oubliés, les effacés de toute mémoire.Les Extra-Terrestres ne viennent de nulle part, ils surgissent de partout.Sans mémoire, ils portent en eux la mémoire de l'infini des histoires.Sans territoire, ils sont fondateurs de toute territorialité.Attachés à aucun Champ de Réalité, ils se glissent imperceptiblement dans les

Champs de Réalité, et chacun de leurs éclats de rire est un nouveau Champ deRéalité.

Il est temps que les Terriens accueillent les Extra-Terrestres porteurs deliberté et de la vie et apprennent avec eux à jouer et à rire.

Page 112: Le management systémique de la complexité

Comment reconnaître les Extra-Terrestres : à ce qu'ils nous ressemblent, ilssont plus humains que de nature.

Ils sont les maîtres du bal masqué.Leur principale pitrerie, faire semblant d'avoir des défauts gigantesques :

égoïsme, laideur, méchanceté, fausseté.Vous essayez désespérément de les détruire? Chaque fois que vous en détruisez

un, mille nouveaux apparaissent. "L'enfer, c'est les autres" et qui est plus "autre" qu'un Extra-Terrestre ?Nous sommes chacun un Extra-Terrestre pour les autres. Il ne nous reste plus

qu'à le devenir pour nous-mêmes. Dernière défaite, ultime victoire !Les auteurs de ce livre sont factices, les véritables auteurs sont des Extra-

Terrestres. Faites attention, les Extra-Terrestres sont partout, surtout là où on les

attend le moins.Le balayeur anodin, vos frères et vos sœurs, votre patron, vos parents sont

sans aucun doute des Extra-Terrestres qui font semblant d'être humains.Les Extra-Terrestres jouent parfaitement les acteurs de la réalité. Plus la

farce est gigantesque, plus ça les fait rire. Ils s'amusent beaucoup à jouer lesrôles de ratés, de misérables, de nécessiteux... alors même qu'ils sont de touteéternité les rois du monde.

Celui qui s'attache attache à son pied un boulet qui l'engloutit vers la mort.Celui qui est détaché est comme une fusée qui décolle pour l'infini.

Les humains croient posséder la Terre, les Extra-Terrestres ne possèdent rien!

Les hommes croyaient que les Extra-Terrestres viendraient d'une autre planète.Illusion, ils viennent de bien plus loin encore, ils viennent d'autres cosmos dansd'autres espaces-temps.

Les hommes n'ont pas cru si bien dire en les nommant Extra-Terrestres. Extra-Terrestre : celui qui vient d'au-delà de la Terre. Les Extra-Terrestres viennentnon seulement d'au-delà de la Terre mais d'au-delà de toute territorialité.

Les hommes croyaient que les Extra-Terrestres arriveraient dans un vaisseauspatial, ils arrivent tout simplement au cœur de chacun de nous.

Les hommes imaginaient des guerriers conquérants, ils viennent en amoureuxtimides.

Les hommes imaginaient des monstres repoussants et ce sont des créatures derêve qui apparaissent.

La fin du siècle sera une nuit de noce entre les Extra-Terrestres et lesHumains, une nuit de lumière !

Quand on s'aime à la folie on aime... l'amour et encore l'amour....et encorel'amour dans l'infini du silence et l'éternité de la paix.

IMAGINAIRE ET RÉALITÉ DANS LE DÉVELOPPEMENT DES POTENTIELS.

Il n'y a pas de limite aux possibilités d'exploration et de développement de lacréativité humaine.

La crise actuelle va sans doute se radicaliser au passage du seuil entre l'AgeIndustrie-Commerce et le nouvel Age Création-Communication. Mais une fois passé cecap difficile, l'horizon est au beau fixe.

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La notion de Champ de Réalité permet d'expliquer et de comprendre lesphénomènes inexpliqué jusqu'à maintenant.

Pourquoi les cartes tirées au hasard révèlent-elles notre destin? Parce que lehasard dans sa nature aléatoire se cristallise finalement symptomatiquement auxturbulences de notre Champ de Réalité. Le hasard dans sa nature indéfinie, est unmiroir qui reflète fidèlement les flux d'un Champ de Réalité. Surtout ne pas allercroire qu'il existe de destin fatal; le destin ne s'inscrit que par référence à unChamp de Réalité, la conscience n'adhère fatalement à aucun. Nous sommes libres,seuls nos rêves nous déterminent.

Le terrien se révèle être un extra-terrestre, le travail devient un jeu, lessociétés ne se construisent plus en antinomie les unes des autres mais ensynergies de sensibilités.

La planète n'est plus un champ de bataille mais un jardin d'amour.Inutile de précipiter les choses, inutile de les retarder. C'est un enfant qui naît naturellement et miraculeusement : le fils de

l'homme : "Je suis celui qui vient de toute éternité."

EPILOGUE.

Un livre amer.L'Age Industrie-Commerce s'est construit sur la séparation de plus en plus

stricte du sacré et du profane. Cette séparation avait commencé à apparaître avecl'Age Agriculture-Elevage mais cependant de manière moins radicale. En fait, toutel'époque dite historique, histoire sacrée et histoire profane (voir Grille del'Evolution), est fondée sur la séparation entre le divin et l'humain. Aucontraire, l'étape préhistorique Chasse-Cueillette et l'époque post-historiqueCréation-Communication sont des périodes où le divin et l'humain se rejoignentpour se fondre dans un continuum où il n'existe plus de distinction. L'homme n'estpas pour autant Dieu. Dans les deux cas, soit par naïveté enfantine soit parsagesse longuement mûrie, l'homme vit en osmose avec le Divin. La Création et laCommunication ne se réalisent que grâce à l'étincelle divine qui circule au cœurde chacun de nous dans la conscience de l'esprit.

L'Age de la Création-Communication détruit le tabou, intériorisé tout au longde l'histoire humaine, qui consiste à séparer le sacré du profane.

Le profane et le sacré sont intimement mêlés au point que le sacré devientprofane et le profane devient sacré. Beaucoup de gens verront dans ce livre uneprofanation de choses sacrées, d'autres au contraire seront agacés que l'onsacralise et que l'on introduise une dimension "spirituelle" dans des domaines,comme par exemple les entreprises, qui sont essentiellement considérés commeprofanes.

En fait, les deux approches "sacré désincarné" et "raisonnement matérialiste"sont caractéristiques de l'Age Industriel arrivé à son comble. Les hommesrégressent sur des Champs de Réalité antérieurs qu'ils sacralisent, retour auxreligions de l'Age Agriculture-Elevage et même parfois à l'animisme de l'époqueChasse-Cueillette; et simultanément ils participent au matérialisme industrielavec poursuite des plaisirs et des souffrances dans un futur idéalement mécanique.

La plus grande majorité des hommes sont aujourd'hui ainsi. Ce livre ne peut leur apparaître qu'amer car il détruit leur illusion sur des

divinités désincarnées et sur un matérialisme aux lendemains qui chantent.

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"Le XXIème siècle sera spirituel ou ne sera pas" disait Malraux mais cettespiritualité là est encore à inventer au plus profond du cœur de chaque homme etaux quatre coins des traditions culturelles.

Idolâtrie et matérialisme sont les deux faces d'une même pièce qui n'est que lepâle reflet inversé de l'élan insondable et spirituel qui préside à la vie.

La Terre ne peut être sauvée que grâce à notre habileté à retrouver le tempo dela danse qui fait chanter les réalités.

Chaque instant est la source fraîche où s'invente la vie. C'est par la conscience spirituelle que nos gestes peuvent prendre consistance

et s'inscrire dans l'harmonie. Ce livre apparaîtra doux à quelques esprits prophètes qui se sont mis déjà en

marche vers la liberté; que les autres arrêtés par le goût amer pèsent les mots dece livre avant de les condamner. Chacun de nous en jugeant se juge lui-même.

Le jeu est ouvert.

La maîtrise de l'information et le lâcher prise.La recherche du pouvoir a été un facteur déterminant tout au long de

l'évolution de l'homme. Cette recherche du pouvoir est positive en ce qu'elle a été un fantastique moteurde créativité. Elle a aussi une face sombre terrible en ce qu'elle a été la raisondes guerres et de nombreuses atrocités.et destructions.

Le pouvoir a d'abord été lié à "l'osmose avec la nature", nous avons sans douteencore beaucoup à découvrir sur le dialogue profond qu'ont les tribus deChasseurs-Cueilleurs avec la nature.

Ensuite le pouvoir a été lié à la "possession de territoires" puis à la"disponibilité de capitaux", aujourd'hui c'est la "maîtrise de l'information" quidevient essentielle.

Nous avons beaucoup hésité quant au terme "maîtrise" car il introduit unedimension, une sensibilité, une connotation qui pourraient être perçues commetotalitaires. De fait, il n'est pas inhabituel de voir des personnes "capitaliser"l'information en reportant leurs réflexes liés à la capitalisation de l'argent surl'information. C'est absurde car l'information est avant tout un flux, plus nousavançons dans l'Age de la Création, plus l'information s'évente rapidement. Unevéritable "maîtrise de l'information" implique avant tout la capacité à glisseravec souplesse de vague en vague. C'est l'intensité du courant qui passe quiimporte. Plus on émet de l'information, plus on se rapproche d'émetteurs del'information; plus on est source, plus on est "branché".

Ce n'est pas en cherchant méthodiquement que l'on trouve obligatoirement, cen'est pas en brassant des quantités considérables d'informations banalisées quel'on ressort une idée originale. La maîtrise de l'information passe parl'inattendu, la rupture, le silence, l'ailleurs, la différence, l'altérité.

Maîtriser l'information ce n'est ni la retenir ni la synthétiser par uneanalyse méthodique et quantitative. Dans les deux cas, on obtient de l'informationmorte qui n'apporte qu'un sens redondant.

Au fond la maîtrise de l'information, c'est peut-être tout simplement l'art dupoète. Celui qui travaille les connections linguistiques des mots jusqu'à ce qu'eneux vienne s'articuler l'origine d'un nouveau monde. Le monde n'est-il pas àl'origine le verbe de Dieu, comme le sous-entend la plupart des textes surl'origine ?

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Un Champ de Réalité est un découpage en ensembles et sous-ensembles quiconstituent une grille de déchiffrement. Que sont les mots sinon des symboles pournommer chaque module de la grille de déchiffrement ?

La maîtrise de l'information, c'est ce bricolage génial qui fait des nouveauxsignes avec des vieux signes par le principe de réversibilité qui fait que lefutur s'engouffre dans le passé.

Les individus qui réussissent, vivent avant leur réussite, une sorte de crack-up,une sorte de crise où ils lâchent prise, ils perdent le contrôle, et le flux de lavie les envahit pour les emporter vers la réussite.

La maîtrise de l'information est un sport de glisse et comme tous les sports deglisse elle est faite autant de lâchers-prises que de contrôle, autant dedistanciation que de concentration, autant de dangers que de plaisirs.

En ce sens-là la maîtrise de l'information est le pouvoir ultime, le point oùle pouvoir de l'homme touche ses limites paradoxales en se fondant dans le fluxgénial et créatif de la vie toute entière. Nous n'atteignons le summum de nospossibilités qu'en cessant de contrôler et de maîtriser ce qui est de nous-mêmeset ce qui est des autres, ce qui est de la vie et ce qui est de la mort...

Si l'information est binarité logique, blanc ou noir, vrai ou non, binaritéessentielle à laquelle les ordinateurs réduisent tout discours et tout sens,l'information pourtant ne saurait être expliquée par la binarité logique car untiers toujours évacué, un facteur caché fait que l'information s'informe toujoursplus et cela envers et contre toutes les lois logiques.

Le vivant émerge du minéral, l'homme émerge des animaux, la pensée humaine sesophistique sans cesse. La vie en dépit de la logique semble tendre vers unecréativité, une innovation, toujours plus grande comme si inexplicablement unedivinité faisait émerger d'un désordre insignifiant toujours plus d'ordresignificatif et complexe.

Pourquoi l'ordre naît-il du désordre ? Vers quoi nous emporte cette information qui s'accumule en couches de plus en

plus significatives et complexes ? Comment prévoir ces ruptures créatives qui font passer d'une couche à l'autre,

de la matière à la vie, de la vie à la pensée, de la pensée à je ne sais quel au-delà de la pensée.

Le monde se gonfle d'informations, le monde se gonfle de mondes. Maîtriser l'information est finalement aussi absurde et paradoxal qu'une

volonté de puissance qui voudrait maîtriser Dieu. Nous maîtrisons sans doute beaucoup moins l'information que l'information, par

sa gigantesque autogénération, ne nous maîtrise. Nous ne sommes que des signesmaîtrisés par des signes, faisant des signes.

Maîtriser l'information, c'est peut-être tout simplement cesser d'être endécalage et se laisser flotter à sa juste place dans ce gigantesque jeu de signequ'est le monde.

La maîtrise de l'information, c'est la simplicité d'esprit qui fait l'on colleà ce que l'on est au-delà de tous les faux-semblants.

La maîtrise de l'information c'est l'inverse d'un choix binaire lié à uneinformation.

La maîtrise de l'information a sans doute peu à voir avec le fait des'informer. La maîtrise de l'information c'est aussi oublier de s'informer etcesser de vouloir maîtriser quoi que ce soit ?

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La maîtrise du surfeur consiste à utiliser le vide que crée une vague en sedéroulant

La maîtrise de l'information c'est la capacité à tirer parti du vide inédit quecréent les nouvelles vagues d'information.

Le surfeur devient vague, et la vague devient vide.Le vide se fait vague, et la vague se fait surfeur.

Michel SALOFFVarengeville, 1 Janvier 1988.

Bibliographie

Une bibliographie de ce livre est difficile car, soit partiale, soitpléthorique. Voici le nom de quelques auteurs qui, soit m'ont marqué, soit mesemblent pouvoir offrir un développement à la réflexion dégagée dans cette étude.C'est aussi un hommage partial à tous ceux qui m'ont nourri par leurs recherches.

Yves ADRIEN, Novovision, Editions Humanoïdes Associés, 1980.Georges ARCHIER, Hervé SERIEYX, L'entreprise du troisième type, Seuil, Paris.Antonin ARTAUD, Oeuvres complètes, Gallimard.Jacques ATTALI, Au propre et au figuré, une histoire de la propriété, Fayard, Paris, 1988.Roland BARTHES, Système de la mode, Seuil, 1967.Jean BAUDRILLARD, Les stratégies fatales, Grasset, 1983.Jean BAUMIER, Ces banquiers qui nous gouvernent, Plon, 1983.P. BLOCH, R. HABADOU, D. XARTEL, Service compris, collection l'Expansion, Hachette, Paris 1986.Fritjof CAPRA, Le Tao de la physique, Editions Tchou, 1979.

Le temps du changement, Editions du Rocher, 1983.Carlos CASTANEDA, Oeuvres complètes, Gallimard, 1982.Jean-Pierre CHANGEUX, L'homme neuronal, Fayard, 1983.Roger CHASTEL, ...Passé par la tête, Editions Galanis, 1968.Pierre CHAUNU, Histoire et décadence, Editions Perrin, 1981.Olivier COSTA de BEAUREGARD, La physique moderne et les pouvoirs de l'esprit, Le hameau Editeur, 1980.Brice COUTURIER, Une scène-jeunesse, Autrement, 1983.Guy DEBORD, La société du spectacle, Editions Buchet / Chastel, 1967.Gilles DELEUZE, Nietzsche et la philiosophie, PUF, 1962.Gilles DELEUZE, Félix GAUATTARI, Mille plateaux, Editions de Minuits, 1980.Arnaud DESJARDINS, A la recherche du soi. Tu es cela, La Table Ronde, Paris, 1980.Gabriel GARCI MARQUEZ, Cent ans de solitude, Seuil, 1968.Thierry GAUDIN, Les métamorphoses du futur, CPE-Economica, Paris, 1988.

Les coûts du silence, Collection 10/18, Paris, 1978.Félix GUATTARI, La révolution moléculaire, Editions Recherches, 1977.Ivan ILLICH, La convivialité, Seuil, 1973.KANDINSKY, Du spirituel dans l'art, Denoèl, 1969.LAO-TSEU, Tao Tö King, Gallimard, 1967.Eric LAURENT, La puce et les géants, Fayard, 1983.Marshall Mc LUHAN, Pour comprendre les médias, Mame-Seuil, 1967.Emmanuel MOUNIER, Introduction aux existentialismes, Gallimard, 1962.

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John NAISBITT, Les dix commandements de l'avenir, "Megatrends", Sand-Primeur, Paris-Montréal, 1984.Kenichi OMAHE, La triade, Flammarion, Paris, 1985.J.R. OPPENHEIMER, La Science et le bon sens, Gallimard, 1955.T. PETERS & R. WATERMAN, Le prix de l'excellece, Inter-Editions, Paris, 1983.Anthony ROBBINS, Unlimited Power, Fawcett Columbia, New York, 1986.Joèl de ROSNAY, Le macroscope, Seuil, 1975.Raymond RUYER, La gnose de Princeton, Fayard, 1974.Science et Conscience, Stock, 1980.Michel SERRES, Le passage du Nord-Ouest, Editions de Minuit, 1980.Alvin TOFFLER, Les cartes du futur, Denoèl, 1983.Paul VEYNE, Comment on écrit l'histoire, Seuil, 1971.Graf K. VON DÜRKHEIM, Pratique de la voie intérieure, Le Courrier du Livre, 1968.Andy WARHOL, Ma philosophie de A à B, Flammarion, 1977.Paul WATZLAWICK, La réalité de la réalité, Seuil, 1978.

Une logique de la communication, Seuil, 1972.Andy WILDEN, Système et structure, Editions du Boréal Express, 1983.