-
Jean-Pierre Goubert
L'art de gurir. Mdecine savante et mdecine populaire dans
laFrance de 1790In: Annales. conomies, Socits, Civilisations. 32e
anne, N. 5, 1977. pp. 908-926.
AbstractOn the basis of answers given in two administrative
surveys, one conducted by the Contrle gnral in 1786, the other,
under theauspices of the Comit de salubrit, an analysis is
performed of the language used by the "enlightened" medical corps
of thisperiod in speaking of so-called popular medicine. The
homogeneity of this language is striking and independent of
geographicorigin or social position of the speaker. The aggressive
and vengeful qualities of this "language" tend to obscur the
originality of apopular "wisdom" concerning the body : a wisdom
which scorns the rational principles dear to the hearts of the
Enlightenmentsociety. This defiance only confirms the superiority
of professional competence and a learned culture.Finally, the
silences and contradictions peculiar to doctors and surgeons are
brought out : the passive, perhaps even resigned,attitude of the
majority contrasts with the repressive attitude of a small
minority, preoccupied with monopolizing the huge field ofhealth by
dint of rules and regulations
Citer ce document / Cite this document :
Goubert Jean-Pierre. L'art de gurir. Mdecine savante et mdecine
populaire dans la France de 1790. In: Annales. conomies,Socits,
Civilisations. 32e anne, N. 5, 1977. pp. 908-926.
doi : 10.3406/ahess.1977.293871
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1977_num_32_5_293871
-
ART DE GU RIR DECINE SAVANTE ET DECINE POPULAIRE DANS LA FRANCE
DE 790
la fin du xvine sicle efficacit de la mdecine prventive ou bien
thrapeu tique est pas autant aujourdhui une ralit positive elle
constitue un souhait mme si elle commence inscrire dans les faits
Le recours au mdecin au chirurgien
ce mdecin du peuple ou bien la sage-femme reste alors apanage
une minorit qui affirme claire et cela en dpit des efforts
conjoints de lite mdicale et du pouvoir royal pour former des
sages-femmes ou bien pour soigner les pauvres lors des maladies
pidmiques Quant la majeure partie de la population fran aise elle
pratique automdication bien entendu elle consulte aussi le meige le
rebouteux la matrone elle coute le charlatan de passage elle suit
la cure ordonne par le sorcier- gurisseur du village
Parce que les mdecins clairs du xvine sicle finissant tout en
inspirant largement Hippocrate et de Galien remettent en cause les
grilles de leur savoir parce ils proclament la ncessit premire de
observation sauront-ils aussi voir les pratiques de la mdecine
populaire saisir les causes de son extension celles de son
panouissement
considrer la multitude des crits ils ont jug utile de laisser la
postrit voir leur zle dans la dnonciation un charlatanisme ils
regardent vers 1789 comme un des quatre maux qui affligent art de
gurir on pourrait tre emport par leur assurance et par leur
unanimit Pour en dcider pices appui restent analyser de plus prs
certains des tmoignages que mdecins et chirurgiens nous ont lgus et
cela par le biais enqutes officielles auxquelles en 1786 et en 1790
ils ont accept de rpon dre Elles ont fourni la base documentaire de
cette recherche
extension du
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
comit de Salubrit manent en 1790-1791 des lieutenants du Premier
chirurgien du roi et plus rarement des communauts de chirurgiens
seules six 62 dclarent ne connatre dans leur ressort ni charlatans
ni empiriques ni gens secret ce qui bien sr quivaut pas leur
absence Ces exceptions mises part de mme que six rponses vasives)
les tmoignages considrs se rpartissent en trois groupes im portance
sensiblement gale 27 des chirurgiens considrent que la densit des
charla tans est trs leve 322 elle est forte et 28 96 elle reste
faible Dans ces condi tions est attitude des observateurs qui doit
tre mise en cause Leurs rponses ne se distribuent selon aucune
gographie prcise par exemple entre la France du Nord et celle du
Midi En autres termes on ne peut conclure une chose il existe chez
les chirurgiens patents trois attitudes diffrentes sur la question
de la densit du charlata nisme tant bien entendu que dans prs de 60
des rponses analyses la densit du charlatanisme est considre par
les chirurgiens comme trs leve ou leve est--dire comme trop leve et
ailleurs les 34 de rponses qui accordent une densit faible voire
nulle au charlatanisme sont unanimes dnoncer ce mme
charlatanisme
Un indice supplmentaire de la signification non pas statistique
mais symbolique il convient de donner ces pourcentages se trouve
dans un certain nombre de tmoi gnages Le lieutenant de Saint-Sever
est le seul oser dnombrer dans les limites de son ressort une
cinquantaine empiriques et de charlatans ... sans compter les curs
distributeurs de poudres aillot et autres remdes inconnus Quant au
lieutenant de Luxeuil il insiste sur le rle jou par. les gens
secret ...] tellement tolrs dans ce district il pas un seul village
o il ait trois ou quatre personnes qui ne fassent la mdecine ...
est encore la mme vision la mme image aussi que propose pour la
rgion de Josselin le mdecin Lebard II un seul mdecin dans tout le
district de Josselin Je me trompe tout le monde est il personne de
un ou de autre sexe qui ne ingre de donner des avis aux malades de
leur prescrire ou de leur dfendre les secours les plus essentiels
et les remdes les plus nergiques dont la mde cine fait usage
O commence en effet exercice du charlatanisme Comment le dfinir
avec quelque certitude est poser le problme des diffrences qui
sparent les thrapeutes non mdecins de leurs confrres diplms ce
problme la rponse est claire au niveau du discours tenu par les
chirurgiens les charlatans ce sont ceux qui pratiquent illgale ment
art de gurir Dans cette perspective esquisse prsente par les
chirurgiens ren voie image culturelle du charlatanisme qui cours
dans le corps mdical fran ais la fin de Ancien Rgime image commune
lite des mdecins et lite des chirur giens et qui marque leur parent
profonde
est pourquoi il importe de souligner le mythe qui oppose mdecine
savante et mdecine populaire il rellement coupure entre ces deux
arts de gurir elle se situe davantage la fin du xvine sicle au
niveau des reprsentations collectives celui du savoir mdical et de
la pratique sociale De ce point de vue la mdecine est une dans sa
diversit et jusque dans ses clivages sauf probablement pour ces
dizaines de milliers hommes qui participent alors la Socit des
Lumires 0 En effet les deux
mondes de la mdecine sont si proches ils se touchent se baissent
et se pntrent la fois Un mme patient peut en effet se tourner
successivement ou conjointement vers tel mdecin tel chirurgien ou
bien encore vers son gurisseur vers le diable et/ou le Bon Dieu
Par consquent la question pose par le comit de Salubrit auprs
des reprsentants des chirurgiens renseigne sur la manire dont ils
per oivent la mdecine dite populaire Dans ces conditions il serait
absurde de vouloir mesurer supposer que cela soit possible
extension ou bien la densit positive du rseau des charlatans Ce
serait pren dre au pied de la lettre la question pose en 1790 par
les membres du comit de
909
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
Salubrit et donc mconnatre le fait ils transposent dans un
domaine o elle ne saurait avoir cours une question qui vaut pour
une population pralablement dfinie les praticiens diplms
Question effectivement pose par le Contrle gnral administration
des inten dances lors de enqute de 1786 elle visait pour ensemble
du territoire tablir des statistiques mdicales et runir des
informations sur la valeur professionnelle des mdecins des
chirurgiens et des sages-femmes Or le traitement statistique des
rsultats de cette enqute en ce qui concerne les mdecins et les
chirurgiens mais surtout les chirurgiens et dans les limites de la
France septentrionale aboutit cette constatation 12 si la grande
majorit de la population fran aise et particulirement celle des cam
pagnes ne recourt pas plus souvent un mdecin ou bien un chirurgien
diplm cela est pas d une trop faible densit du rseau mdical En
autres termes le
dsert mdical invoqu par certains correspondants de la Socit
royale de mdecine ne correspond pas une ralit positive il manifeste
et on attendait le refus une lite celui assimiler au corps mdical
la foule des chirurgiens de seconde zone et celle des thrapeutes
populaires Le succs du charlatanisme dans la France de 1780-1790
avait donc bien de quoi inquiter le corps mdical de cette poque et
par ticulirement la catgorie des chirurgiens qui avaient coutume de
traiter une clientle plus rurale moins claire et plus modeste dans
ensemble que celle de leurs con frres mdecins
Mdecins et charlatans
Comment alors une police mdicale bien faite assurerait-elle pas
avenu de la profession en soulageant humanit souffrante Que on
situe le discours du mdecin en 1790 vers 1900 ou mme aprs 1970 est
toujours la mme obsession ... de con fondre sic le charlatanisme et
de propager les lumires dans un art si utile 13 ...
En tout cas et pour la fin du xvnie sicle la frontire sociale
est pas nette entre mdecin et charlatan entre mdecine savante et
mdecine populaire aussi
choquant que cela puisse paratre En voici travers quelques
exemples une brve dmonstration Les premiers tmoignages sont tirs
des rponses enqute du comit de Salubrit sur exercice de la
chirurgie 1790) les seconds proviennent de enqute ordonne en 1786
par le Contrle gnral auprs des intendants sur les mdecins et
chirurgiens du royaume
Montdidier le lieutenant du Premier chirurgien du roi signale
... un charlatan re comme chirurgien Quant au lieutenant de
Lyons-la-Fort il fulmine contre deux
charlatans qui prtendent se faire recevoir chirurgiens14 Mieux
encore le lieutenant de Tonnerre note parmi les empiriques ...
seulement un ou deux con naisseurs en urines quoique non matres en
chirurgie 15 Domfront le lieutenant dclare propos des charlatans
empiriques et gens secret ... Il en beaucoup ... mme un mdecin et
un chirurgien qui jugent eau la vue et donnent des remdes arrire
des malades 16
De leur ct dans leurs rponses enqute de 1786 les subdlgus
voquent sou vent le mme problme Ainsi le subdlgu du Mans marque
propos du chirurgien Lemaire tait empirique pas la confiance du
public cause de sa passion pour le vin Du chirurgien Lescot re pour
le bourg de Saint-Georges-de-Ballon tait un charlatan vendant des
drogues sur les traiteaux sic]18 De mme le chirurgien Lamour selon
avis du subdlgu est un empirique qui obtenu un brevet pour exercer
la chirurgie et est fait recevoir sans qualit 19
Toutefois dans le cadre de enqute de 1786 rares sont les
subdlgus qui portent sur les chirurgiens un jugement aussi svre La
plupart se contentent un dnom-
910
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
bremeni et taisent ou bien voilent leurs apprciations sur la
valeur professionnelle des chirurgiens recenss Mais ce qui choque
les reprsentants locaux de la bureaucratie cen trale est la
contradiction entre incomptence est--dire absence de formation
donne dans un lieu reconnu par autorit et le titre de chirurgien
accord mme il ne agit en fait que du titre de matre en chirurgie de
lgre exprience prvu par dit de Marly de 1707 et maintenu dans sa
version de 1772 pour les praticiens des campa gnes La mme ambigut
choque profondment les lieutenants du Premier chirurgien du roi
dans leurs ressorts respectifs est pourquoi vraisemblablement
certains lieu tenants rejettent sur leurs prdcesseurs ils estiment
avoir t moins aviss la faute avoir re quelque charlatan ainsi dans
les campagnes de Montdidier est signal ... un charlatan dangereux
re par mon prdcesseur chirurgien en 1761... et trois rebouteurs re
us sans principe depuis longtemps 20 ... De mme dans les en virons
de Bray-sur-Seine le lieutenant du ressort cite le cas un berger re
comme
rebouteur en 1767 21 Ainsi le fait de recevoir des empiriques
dans une communaut de chirurgiens est rejet dans le pass par les
chirurgiens eux-mmes On ne saurait en dduire pour autant que le
nombre des rceptions empiriques baiss de 1760 1790 Une autre
hypothse est pas moins plausible les matres en chirurgie projettent
dans le pass une attitude ils jugent laxiste et ils condamnent Et
la seule fois sur une centaine de tmoignages o un matre en
chirurgie aborde cette question au prsent est pour prciser Nevers
on ne re oit pas les empiriques 22
Le lieutenant du Premier chirurgien du roi tabli Tartas Landes
rsume assez bien image que les chirurgiens diplms se font de ces
empiriques ceux-ci ressemblent fort aux chirurgiens barbiers dont
on aurait pu penser ils appartenaient par exemple au seul xviie
sicle ... Il en est peu qui aient fait les tudes ncessaires ni qui
aient mme paru dans aucun collge pour faire des cours La plupart
deviennent chirurgiens par hasard Ils ont appris donner un coup de
lancette Ils tiennent quelque drogue pour la composition de quelque
mdecine Ils se fixent dans les paroisses sans autre exer cice23 ...
Ainsi que le rappellent nombre de subdlgus dans leurs rponses
enqute de 1786 pareils chirurgiens savent uniquement saigner et
purger ou bien encore raser et saigner
Re us ou non devant une communaut ces chirurgiens-empiriques
paraissent fort en nombre dans les campagnes fran aises de 1790 Ils
se situent cependant si on en croit les tmoignages analyss du mme
ct que les chirurgiens et que les mdecins diplms en effet ils
empruntent ou bien ils recherchent une conscration officielle ils
exercent une mdecine naturelle base de saignes de purgations de
vomitifs et de remdes simples ou composs ils suivent mme si est de
loin le modle socio culturel venu en haut On con oit donc embarras
des chirurgiens officiels faut-il rejeter ces demi-chirurgiens ou
bien tenter de les absorber Officiellement comme on sait est le
rejet qui t prononc les edits et les dclarations royaux le disent
suf- ifisamment et cela au nom de la comptence et en raison du
monopole que veut dsor- mais assurer diplmes aidant le corps mdical
officiel Et est pourquoi la plupart des lieutenants du Premier
chirurgien du roi se dsolent ... de ne pouvoir mettre un frein
empirisme du pays 24 ... unanimit et la frocit des chirurgiens
pourfendre leurs confrres demi-chirur
giens expliquent autant mieux que ces derniers leur enlvent
nombre de patients ils menacent ainsi les revenus des chirurgiens
diplms ils diminuent la pratique de tous ceux qui souvent origine
modeste ont d payer tudes examens et frais de rception est ce
indiquent les recherches publies sur Anjou et sur la Bretagne et
est ce qui se confirme lorsque largit enqute au plan national et
lorsque on tablit dans les gnralits de la France septentrionale les
taux de densit des chirurgiens pour les villes et pour les
campagnes
911
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
Or la clientle potentielle du chirurgien mais aussi celle du
mdecin est pas consi drable ni extensible en dpit de essor
dmographique du xvine sicle fran ais exis tence de deux cultures la
confiance ncessaire du malade dans son thrapeute existence un mur
de argent tout ceci fait que emprise du corps mdical officiel est
beaucoup moins tendue il ne le souhaiterait parce ils ont senti
parfois con fusment importance de tels obstacles leur ascension
mdecins et chirurgiens diplms saisissent et avec quel zle la chance
qui leur est offerte tre reconnus par tat comme le recours oblig et
comme les seuls spcialistes de homme malade Ainsi explique pour une
large part la croisade ils mnent contre les em piriques les
charlatans et les gens secrets
image mdicale du charlatan
analyse de 104 rponses adresses au comit de Salubrit permet
apporter cer taines prcisions sur les reprsentations du
charlatanisme qui ont cours dans le corps des chirurgiens Fait
remarquable aucun chirurgien nglig de rpondre la 14e et dernire
question que comporte enqute sur exercice de la chirurgie dans le
royaume 25 ce propos deux remarques complmentaires impact de la
terminolo gie propose par le comit de Salubrit avre considrable
dans 41 des rponses analyses la distinction propose entre
charlatans empiriques et gens secrets est simplement reprise sans
autre considration En autres termes dans 43 rponses sur 102) les
chirurgiens diplms refusent cette distinction en trois catgories et
fondent cet ensemble en un ils anonyme et vengeur La colre des
chirurgiens patents les empche de rpondre la question pose dans 41
des cas la rponse se limite un constat brutal le charlatan est
autre
Au-del de cette premire affirmation le reste des rponses
analyses soit 59 96 de chantillon apporte davantage de nuances et
informations Dans cette mesure il est possible de prsenter
diffrents aspects de image que se font du charlatan 77 repr
sentants de la chirurgie officielle
10 ventail des charlatans aprs les vocables utiliss par les
chirurgiens 77 tmoignages)
TABLEAU
Catgories dsignes Rponses obtenues Pourcentage du total
Charlatans et gurisseurs rebouteurs dentistes oculistes
herniaires piciers pdicures renoueurs rhabilleur restaurateur
912
TOTAL
11
35
47
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
Catgories dsignes Rponses obtenues Pourcentage du total
Reprsentants de la mdecine charitable religieuses ecclsiastiques
sculiers 30 96 religieux lacs
TOTAL 23 Membres du corps mdical
-chirurgiens 13 apothicaires 23 96 mdecins
TOTAL 18
regarder de plus prs la majorit des chirurgiens 47 96 dnoncent
tout abord les charlatans itinrants mais aussi ensemble des
sdentaires empiriques et gens secret Parmi ces sdentaires figurent
les gurisseurs traditionnels de villages 26 et le rebouteux tient
une place de choix En effet certaines communauts de chirurgiens les
ont re us et ont reconnu leur existence 27 et cela au vif regret
des chirurgiens de 1790 dj partisans un monopole sans concession
est pourquoi ils aient reconnu ou non ils excluent le rebouteux de
leur communaut
Les autres praticiens cits sont placs eux aussi dans la mme
situation exclusion par les chirurgiens dentistes herniaires
oculistes pdicures Les chirurgiens en font une sous-catgorie de
type paramdical ils annoncent ainsi la mdicalisation officielle de
ces professions et par consquent leur inclusion dans les
professions de sant
Au second rang des accuss figurent les reprsentants de la
mdecine charitable Pour la plupart il agit ecclsiastiques dont une
majorit de rguliers ou dominent et on attendait les religieuses les
soeurs grises en particulier Mieux tolrs dans ensemble en raison de
leur tat ils en sont pas moins dsigns comme des empi riques pour la
plupart mais aussi comme des charlatans et parfois comme des gens
secrets de la pire espce Ainsi apparat la coupure qui opposerait
les professionnels du corps et de la sant aux professionnels de me
de la pauvret et de la charit est bien entendu au nom des Lumires
au nom de leur comptence professionnelle et pour le salut du public
que les chirurgiens diplms de 1790 insurgent contre ingrence de ces
bienfaiteurs des pauvres 28
Enfin les lieutenants du Premier chirurgien du roi taxent de
charlatanisme certains de leurs confrres soit par ordre croissant
les mdecins les apothicaires et les chirur giens Mais dire vrai
seuls les demi-chirurgiens des campagnes plus ou moins
empiriques sont concerns par cette accusation Mdecins et
apothicaires quant eux sont accuss empitement est--dire exercice
illgal de la chirurgie 29 Il ne agit donc plus l des charlatans
pourfendus par les mdecins mais de querelles internes au corps
mdical
En fin de compte le vocabulaire utilisent les chirurgiens diplms
se signale par son troitesse et par sa confusion troitesse dans la
mesure o ces chirurgiens per oivent et dsignent les divers types de
charlatans travers leur culture hommes
clairs Confusion aussi le terme de charlatan dot dans esprit des
chirurgiens une vritable charge motionnelle devient une pithte
vengeresse destine englober et donc exclure En autres termes ils
paraissent leur chapper
913
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
Les chirurgiens accusent les charlatans aprs 84 rponses)
TABLEAU II
Accusations Rponses obtenues
Mfaits simples crime 22 abus de confiance 19 accident 16
incomptence concurrence illgale vol
Mfaits associs Associations simples
crime et abus de confiance crime et incomptence abus de
confiance et incomptence abus de confiance et concurrence illgale
vol et crime vol et abus de confiance
-vol et concurrence illgale Associations multiples
crime abus de confiance incomptence crime abus de confiance
incomptence vol crime abus de confiance concurrence illgale vol
TOTAL 91
Les charlatans sont donc considrs au premier chef comme des
criminels effec tifs ou potentiels Ils constituent selon les
expressions des reprsentants des chirurgiens un flau de humanit
Beaugency) une horde venimeuse Pau) une race Mont-de-Marsan) une
secte anthropophages Breteuil Le lieutenant de Tartas abondant dans
le sens des physiocrates prcise le sens de cette accusation ...
char latans et empiriques contribuent la dpopulation du pays30 ...
Accusation fr quente aussi sous la plume des intendants et des
subdlgus dans leurs rponses enqute de 1786 et travers leur
correspondance relative aux maladies pidmiques mme si cette
accusation concerne bien davantage les matrones et les prtendues
sages-femmes Par consquent le charlatan empirique tous les
non-professionnels apparaissent comme minemment nuisibles si on
suit opinion des matres en chirurgie et celle des mdecins dans la
mesure o ils jugent le savoir des charlatans totalement irrationnel
et plus insuffisant dans la mesure o ils les considrent comme une
race part et comme des barbares et des sauvages est au nom une
culture savante qui affirme suprieure que le corps mdical et ici
plus particu lirement les chirurgiens 31 revendique hautement le
monopole de la sant
Le second chef accusation mutilations accidents par imprudence
et par incomp tence exprime de fa on concrte les griefs et les
reproches que formulent les chirurgiens gard des charlatans Le
lieutenant de Nuits Or crit ce propos Nous
avons des femmes et des hommes tant dans notre ville que dans
nos campagnes qui se mlent de traiter les malades de leur donner
des remdes... et une femme oculiste qui entend faire des borgnes et
des aveugles aussi bien que les renoueurs des estropis 32 ajoute
parfois un peu de compassion gard de ces malheureux que martyrisent
les charlatans 33
914
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
animosit et incomprhension aidant les chirurgiens ne sont point
embarrasss pour accumuler les crimes et les mfaits dont ils
accablent les charlatans La logique qui anime leur haine parat bien
tre la suivante le charlatan est incomptent car il pas fait tudes
comme il est ignorant le charlatan cause des accidents ou bien pire
il commet des crimes dans ces conditions ce sont des ... coquins
qui dupent le peuple des sortes escrocs ... qui cherchent tromper
les autres sur leur sant Tout cela parce que le savoir des
charlatans et des gurisseurs ne procde pas une logique rationnelle
fonde sur une observation et sur une thrapeutique dj seules rputes
pour tre scientifiques
La recherche des responsabilits Parce ils brossent un tableau
aussi noirci des mfaits causs par la mdecine
populaire les chirurgiens bien que le comit de Salubrit ne leur
ait rien demand ce sujet ne manquent pas de rechercher les
responsables une pareille situation
TABLEAU III
Accusations Tmoignages
Les institutions la police la justice la loi le ci-devant
intendant
24 23
49 Le rgime ancien rgime
police justice
-loi intendant
Le nouveau rgime dont la police municipale
16 23
49 Les hommes
crdulit populaire dont crdulit des ruraux 12 les mdecins laxisme
dont mdecins sous Ancien Rgime et mdecins sous le Nouveau Rgime
16
travers les rponses des chirurgiens se manifestent leur
dontologie professionnelle et leur conscience politique Ils mettent
ainsi au premier rang des coupables 75 des tmoignages les
institutions de Ancien Rgime 34 et tout particulirement ancienne
justice dont ils rappellent le cot lev et la lenteur excessive ils
notent aussi inefficacit totale des tribunaux 35 la mauvaise volont
des juges seigneuriaux 36 comme celle des ci-devant juges des
prsidiaux 37 Quelques chirurgiens hsitent pas
accuser certains juges qui dans leur mansutude ?) prennent les
charlatans sous leur protection et par l les soustraient la justice
des lois
Dans ces conditions les chirurgiens estiment tre des victimes En
fait ils ne sont
915
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
victimes que de leur attitude Ils se heurtent sans doute un des
obstacles propres leur culture claire une mdecine de type
ethnologique un savoir populaire sur le corps tellement proches eux
ils les pntrent par intermdiaire de leur pouse de leurs enfants et
risquent de leur chapper est pourquoi le Nouveau Rgime pourtant
tout neuf chappe pas lui non plus la critique des chirurgiens en
place la police mdicale exerce par les municipalits est accuse de
laxisme voire inefficacit totale
Ainsi exprime le lieutenant tabli Meaux Dans arrondissement de
cette communaut sont trs grand nombre de charlatans
empiriques gens secret et autres que ancienne police constamment
autoriss et que la nouvelle favorise encore davantage 39
Vitry-le-Fran ois le lieutenant note avec indignation La
municipalit accorde des permissions et permet ainsi affiche des
remdes que les charlatans distribuent ce il de plus contraire aux
rgle ments 40 ... Quant au soldat-citoyen Pellieux lieutenant du
Premier chirur gien du roi tabli Beaugency il pressent de fa on
tonnante embourgeoisement du mdecin et de la mdecine qui se
ralisera au cours du xixe sicle ... tat inertie o se trouve depuis
longtemps administration de la justice la mollesse ou inexprience
des officiers municipaux sur les lois qui nous concernent ont
autoris les charlatans reparatre plus effronts que jamais ... Les
personnes de art dont le zle reste sans activit se contentent de
gmir en secret et plt Dieu que pour cela elles ne soient pas assez
lches pour regretter Ancien Rgime41 ...]
Le pessimisme de Cabanis et de Cantin 42 trouve un cho dans les
observations et dans les dolances un petit nombre de chirurgiens
les en croire le brigandage pr vu 43 installerait dans certaines
contres bien avant la raction thermidorienne moins que le jugement
ils portent ne corresponde non pas une ralit positive mais
une sensibilit accrue envers le charlatanisme Toutefois dans les
rponses consultes les chirurgiens ne mettent pas uniquement en
cause le Rgime Ancien ou Nouveau Ils considrent de fa on
explicite que la cause fondamentale du charlatanisme rside dans la
crdulit populaire davantage rpandue selon leurs tmoignages sur 12)
dans les campagnes que dans les villes Ainsi pour les chirurgiens
de Strasbourg Le peuple dans les campagnes est plus crdule que dans
les villes 44 ... Boiscommun comme Cognac 45 le lieutenant du
Premier chirurgien du roi voit explication de cette crdulit
populaire dans absence une instruction claire Mont-de-Marsan le
lieutenant de endroit dpeint un peuple frapp de merveilleux ... qui
pas esprit de discernement46 ... et qui se laisse autant plus
facilement tromper par les charlatans On le voit les lments ex
plication invoqus par les chirurgiens de province sont conformes
idologie typique de la socit des secondes Lumires Comme on le sait
par ailleurs ils ne correspondent pas aux ralits sociales
particulires alphabtisation et instruction lmentaires 47 Mais
surtout le schma explicatif propos par des chirurgiens diplms et
citadins ne saurait convaincre une culture est pas obligatoirement
fonde sur un rationalisme troit ou courte vue
Poursuivant leur analyse du charlatanisme quelques chirurgiens
voient autre chose un abus de confiance commis par un quelconque
escroc Ainsi le lieutenant de Saint-Omer Le peuple. aime tre tromp
48 selon le lieutenant de Tours II semble mme que la classe des
malheureux ait une espce de satisfaction se voir trom per 49 ...
Quant au lieutenant de Beaufort il conclut en ces termes ... Et en
gmis sant nous nous disons le public veut tre dupe il le soit50 est
assez dire le dcouragement ou bien la sagesse consciente ou
inconsciente des chirurgiens un nouveau monde peupl hommes sauvages
qui refusent apport des Lumires
Finalement les chirurgiens interrogs ont dit la cause profonde
de leur chec mais parce ils estiment reprsenter une culture
rationnelle savante et donc suprieure la
916
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
seule vraie culture ils ne parviennent pas pousser analyse plus
avant En voici un indice dans la rponse envoye par la communaut des
chirurgiens de Cognac ... Le nombre des gens secrets est aussi trs
considrable un pense sic le chaple un autre le vertaupe et cent
autres fadaises de ce genre qui entrent srement pas dans la nomen
clature des maladies Le chaple est selon eux toute tumeur
phlegmoneuse qui survient
quelque partie du corps que ce soit Ils nomment vertaupe les
humeurs scrophu- leuses 51 ... Ainsi expriment deux interprtations
du monde deux systmes. devenus plus trangers que jamais un autre52
... Ainsi encore se manifeste malgr la traduction propose par des
chirurgiens clairs exclusion une nomen clature populaire des
maladies au moment o ils affirment la ncessit une obser vation dnue
de tout esprit de systme ils se refusent obstinment considrer un
autre langage un autre savoir parce ils les estiment lis une
culture populaire inf rieure la leur
Or selon le tmoignage de plusieurs chirurgiens cette crdulit
populaire serait entretenue non seulement par des gens du peuple et
par de vulgaires escrocs mais aussi tratrise par des membres du
corps mdical Le lieutenant de Vitry-le- Fran ois crit ce propos ...
Messieurs les mdecins dlivrent des certificats dont ils se font
payer ce qui induit le public en erreur ... Quant au lieutenant de
Nuits il dnonce ... tous les charlatans entretenus par le Premier
mdecin du roi qui pour une certaine somme leur donnait le pouvoir
assassiner par toute la France pendant trois ans 54 ... Ainsi
resurgit propos des remdes secrets ceux-l autoriss une vieille
querelle entre mdecins et chirurgiens activit de la Commission
royale de mdecine puis celle de la Socit royale de mdecine
successivement charges de veiller la police de ces remdes secrets
ne ont pas dsarme Ainsi Charles Dionis docteur-rgent de la facult
de mdecine de Paris et petit-fils du clbre chirurgien et anatomiste
Pierre Dionis) exploite vers 1760 le privilge royal concernant
orvitan il avait achet la famille Contugi il cde bon prix des
brevets aux revendeurs orvitan et hsite pas
faire monter ses enfants sur les trteaux 55 Le frre Corne
Premier mdecin de Louis XV maintient lui aussi cette fructueuse
tradition Quant au jeune Fabre glan-
Attitude des chirurgiens devant le charlatanisme
TABLEAU IV
Diversit des attitudes constat 52 rsignation 25 rpression 23
Total des rponses 100 Analyse des attitudes rpressives
satisfaction de la rpression 31 dont en ville 50
la campagne 50 souhait une rpression renforce 69 dont
en ville 10 la campagne 90
Modes de rpression mode lgislatif 50 dont
loi 33 sagesse de Assemble nationale 17
mode constitutionnel 11 -mode corporatiste 17
917
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
tine en 1786 cern par les cranciers 56 il hsite pas vendre sa
plume inven teur un anti-nphrtique
attitude des chirurgiens devant le charlatanisme frappe par sa
passivit 52 se limitent un constat 25 avouent rsigns 23 seulement
se dclarent parti sans une rpression efficace Encore sur ces 23 96
faut-il en dduire prs un tiers qui estiment satisfaits de la
rpression du moment dont moiti pour ce qui concerne la rpression du
charlatanisme dans les villes et moiti pour celle qui svit dans les
cam pagnes 57
Quant aux chirurgiens qui voient une solution dans accentuation
de la lutte contre le charlatanisme ils sont partisans pour un
tiers des cas une loi stable et sage 58 que voterait Assemble
nationale ou bien ils en remettent la sagesse de Assem ble 59 ou
bien encore ils comptent pour rsoudre un tel problme sur la
nouvelle Constitution 60 Par consquent cette minorit active en
raison des Lumires elle pense dtenir donne sa confiance la
monarchie constitutionnelle mais surtout elle voit un remde la
situation de la mdecine face au charlatanisme dans une loi qui sera
dite par une assemble de gens clairs Solution qui est bien dans la
logique propre aux hommes des Lumires Cette minorit de chirurgiens
clairs envisage donc que les
urs un peuple crdule pourront tre changes coups de dcrets coups
de circulaires coups de bton faut-il hui lui donner raison non pas
sur le fond mais aprs les faits
Dans ces conditions la solution la meilleure selon cette minorit
rpressive revient confier au corps mdical outre sa police interne
exercice de la police et de la justice en ce qui concerne les
reprsentants du charlatanisme Ainsi en ex plique le lieutenant du
Premier chirurgien du roi tabli Mont-de-Marsan ... Plusieurs entre
eux se prsentent avec un ton si important avec des prtendus titres
avec un air si enchanteur il presque que les gens de art qui
chappent leur sduction. Et je ne connais point de moyen plus sr
pour extirper cette race sic]. que en commettre le soin et le
pouvoir au gens de art61
La comparaison de ces trois approches qui viennent tre prsentes
fait apparatre deux contradictions essentielles une part la gravit
des mfaits reprochs aux
charlatans contraste avec attitude passive une norme majorit de
chirurgiens 75 des tmoignages analyss Seule une petite minorit
reste logique avec elle-mme et propose une rpression renforce autre
part la critique adresse par une majorit de chirurgiens aux
institutions politiques Ancien Rgime surtout car une minorit at
tend beaucoup du Nouveau oppose un faible taux innovation 23
seulement des chirurgiens dans chantillon analys proposent ce ils
considrent comme une solution au problme du charlatanisme Mais le
moyen que cette minorit prconise est--dire le recours ou le retour
une rglementation contraignante suppose que le Nouveau Rgime mieux
que Ancien saura ou voudra briser la crdulit populaire est l ce que
contestent par leur attitude rsigne ou passive tous les chirurgiens
qui restent sceptiques sur application et sur efficacit de pareils
textes rglementaires
Ces deux contradictions dans attitude des chirurgiens clairs
expliquent aisment si on prte attention leur mentalit Leur attitude
hommes clairs les empche de saisir une culture diffrente de la leur
est pourquoi ils ne peuvent tablir un constat et se contentent au
nom de leurs principes de juger et de condamner Chez cer tains
cependant merge la conscience de se heurter quelque chose tranger
ils en irritent ou bien ils rsignent soit par attentisme politique
soit par conviction per sonnelle
918
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
IV Activits et personnalit des charlatans
Dans ces conditions il est dlicat de prsenter de par la nature
des tmoignages analyss une photographie positive des accuss Tout
abord le nombre des descriptions dtailles et comme prises sur le
vif avre trs faible Ce qui ne saurait sur prendre puisque pareils
tmoignages qui sous la plume de chirurgiens clairs ont pour but de
prciser imbcillit et les mfaits particuliers aux charlatans sont le
plus souvent considrs comme superflus on juge autant plus ce que on
ne per oit pas
Trente-cinq descriptions donc composes au moins une phrase
parpilles dans la centaine de rponses adresses au comit de Salubrit
qui ont t analyses Sur ces 35 descriptions 21 concernent des
ecclsiastiques ils sont assimils des empiriques est--dire malgr la
bonne volont qui leur est reconnue des gens incomptents. et donc
dangereux Restent une quinzaine de brves descriptions dont une
seule ailleurs laconique concerne une femme charlatan
Dans le monde des villes plusieurs corporations ont aprs les
chirurgiens consults une rputation particulire pour ce qui concerne
exercice illgal de la mdecine de la chirurgie et de la pharmacie
les bourreaux les menuisiers et les piciers
Ainsi Angoulme excuteur de la haute justice rduit les fractures
et luxations ou feint de les rduire sic]62 ... Narbonne plusieurs
menuisiers occupent pan ser et saigner 63 au Quesnoy en revanche
est un ma on qui joue le rle de den tiste 64 Quant aux piciers en
dpit de dit aot 1776 qui pronon ait le divorce entre piciers et
apothicaires ils ... vendent Bray-sur-Seine des remdes souvent sans
connatre leur effet et sans ordonnance des gens de art sous appt du
gain 65 Arras et le cas est loin tre exceptionnel une autre
spcialit est exerce par des empiriques sdentaires Une famille
nombreuse en chirurgiens point autres talents que celui oprer
toutes les hernies inguinales simples par la castration 66
Toutefois en dehors des empiriques spcialistes beaucoup autres
joueraient le rle de vritables gnralistes en particulier les
reprsentants urbains de la mdecine charitable dont au premier rang
les urs grises
Dans le monde des campagnes on rencontre sous la plume des
chirurgiens les mmes empiriques spcialistes les mmes catgories
mdicales et paramdicales Les mtiers de ces hommes pour certains ont
chang toujours des marchaux-ferrants et des piciers plus de
bourreaux mais nombre de simples paysans
Ainsi dans les campagnes vendennes prs de
Vouvant-en-Chtaigneraie ... les revendeurs allumettes de village
vendent des remdes restants de boutique ... plu sieurs fois plus
chers ils ne les ont achets 67 ... Ainsi encore Meung-sur-Loire le
marchal-ferrant exerce le mtier de charlatan or il est dsign
successive ment abord comme charlatan puis comme empirique et enfin
comme sor cier par le lieutenant du Premier chirurgien du roi tabli
Beaugency ... anne dernire crit-il un meunier de Tavers prs
Beaugency va le consulter pour sa femme
inspection des urines le marchal dclare que la femme est
ensorcele mais que moyennant cent ecus il la gurira Le meunier
crdule lui apporte la somme un ur de uf perc aiguilles un crucifix
renvers des cierges bnits et quelques paroles il prononce en
prsence du meunier sont les moyens dont il se sert pour faire son
opration 68 ...
Sur la centaine de tmoignages analyss un seul apporte la preuve
positive de identit entre le gurisseur traditionnel et le sorcier
identit avaient rencontre au
919
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
fil de leur recherche P.-Y Sbillot Mme Bouteiller ou bien encore
Favret69 cart qui spare deux conceptions du monde est la fois tnu
et si pais il aboutit de la part des chirurgiens clairs une
quasi-occultation des pratiques typiques de la mdecine
populaire
dfaut de descriptions portant sur les pratiques de la
sorcellerie villageoise nos chirurgiens clairs identifient deux
tmoignages indiquent clairement une cer taine catgorie de gens
secret et de charlatans avec les sorciers Un mdecin Hyres prend
ainsi comme cible favorite ... les gens secret surtout de ceux qui
en imposent aux gens crdules et en se faisant passer pour sorciers
70 ... les chirurgiens Ustaritz considrent les charlatans comme une
espce de magiciens 71 Le lieutenant tabli
Saint-Sever Landes quant lui dsigne les bergers ces tres quasi
mythologiques ... qui occupent depuis toujours dans la vie paysanne
une place part ... Mais est
au dtour une phrase que rejaillit opposition entre deux
conceptions du monde lors que le tmoin rejette la notion de remde
universel au profit des spcifiques ... Des bergers. descendent des
montagnes ... et nous viennent tout le temps que dure hiver garder
leurs troupeaux dans nos cantons et mme dans notre ville ils
livrent des remdes applicant sic des empltres et vendant des
secrets prtendent-ils infaillibles pour tous les maux 72
Sur les charlatans itinrants et non plus transhumants peu
informations Cer tains viennent en ville ou bien dans un bourg date
fixe les jours de foire ou de march73 le premier samedi de chaque
mois Carcassonne 74 Ils dressent des thtres sur les places
publiques et commence nt par amuser le public ... tel le nomm Aubry
Bellegarde 75 Ensuite ils vantent et ils vendent leurs drogues et
leurs baumes leurs pilules purgatives empltres herbes etc Certains
autres pra tiquent la chirurgie comme Bellegarde ou bien ils
exercent la mdecine ainsi Auch scandale ... le nomm Toscan ...] ce
charlatan fit jeter les mdi caments que Cortade mdecin avait
prescrits pour mettre les malades usage des siens 76 ... autres
charlatans ambulants affichent une spcialit ils oprent comme
oculistes ou comme dentistes Laon ou bien Morlaix selon le
tmoignage des chirur giens du lieu
Les chirurgiens clairs classent donc leurs concurrents selon la
fonction mdicale ils leurs assignent au pharmacien fait pendant le
vendeur de drogues dangereuses ou bien empirique au mdecin et au
chirurgien correspondent les spcialistes des mille maux de la vie
quotidienne oculistes dentistes rebouteurs rhabilleurs et les
gnralistes qui pratiquent la sorcellerie ou bien qui vendent un
remde universel Les chirurgiens clairs consacrent leurs efforts
tablir une classification logique et fonctionnelle des tenants du
charlatanisme Ils transposent ainsi dans le domaine de la
mdecine
populaire une grille et des critres qui appartiennent au domaine
de la mdecine savante Par consquent la classification ils proposent
permet de mesurer certains carts la norme ils souhaitent voir
instituer Leur vision du charlatanisme ren voie leur conception de
la mdecine savante
La caractristique fondamentale de tous les charlatans empiriques
et gens secret rside leurs yeux dans la non-comptence des diffrents
types ils essaient distinguer Il faut voir un signe non quivoque de
la volont affirme par les apothi caires par les chirurgiens et par
les mdecins de rserver exercice de leur art une profession qui
seule prsente toute garantie au point de vue thique et scientifique
obscurantisme des charlatans opposeraient par consquent les Lumires
de la mdecine savante 77 Parce ils disposent un savoir ils estiment
suprieur chirurgiens et mdecins clairs ne sauraient commettre
erreur dans exercice de leur art Seuls les charlatans auraient le
privilge estropier assassiner ou bien abuser leurs malades Or de
mme que le charlatan vend ses remdes merveil-
920
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
leux le mdecin qui voudrait monopoliser la sant per oit et ce
est que justice des honoraires tout comme un avocat un notaire ou
mme certains universitaires
Autre domaine encore o analyse que pratiquent les chirurgiens
renvoie leur vision de la profession mdicale la place minime ils
accordent aux femmes dans le charlatanisme Place rellement minime
le corps mdical acceptera une femme soit re ue docteur en mdecine
en 1875 Quand mme il ne agit que de dnoncer des charlatans trois
chirurgiens diplms seulement abordent pareil sujet Seul le
lieutenant tabli Luxeuil note une majorit de femmes parmi les gens
secret en revanche le mdecin Lebard install Josselin et le
lieutenant de Nuits estiment que dans les campagnes hommes et
femmes se partagent galement exercice du charlata nisme Mais seul
de ces trois tmoins le lieutenant de Nuits laisse percer son antif
minisme il observe parmi les gens secret de son ressort ... une
femme oculiste qui entend faire des borgnes et des aveugles 78
...
Parmi les rponses enqute de 1786 qui concerne les mdecins et
chirurgiens diplms) aucune mention de femme exer ant la mdecine ou
la chirurgie Dans les rponses enqute 1786 sur les sages-femmes une
seule lettre signe par deux curs du Medoc signale et recommande
Madame Banny de Rey matre en chirurgie 79 Or cette rponse laudative
constitue le seul contrepoids la foule observations veni meuses qui
marquent dans enqute de 1786 sur les sages-femmes mdecins et
chirurgiens consults Se trouve-t-on ici aux racines un antifminisme
mdical attest dans le long terme et nous
analyse une telle srie de documents ne saurait enfin se situer
uniquement au niveau de explicite certains silences particulirement
propos des thrapeutes fem mes posent le problme du couple et de la
famille restreinte ou largie et de imbri cation de leurs rles Ainsi
encore imputation de sorcellerie aurait gliss pour une part vers
celle de charlatanisme Elle se serait scularise et cela depuis Or
donnance gnrale de 1682 80 elle se serait aussi masculinise au
dtriment du tru chement traditionnel du Malin la femme
Autre silence porteur de la mme signification aucun des
documents consults pour la priode 1780-1790 ne souffle mot des
saints gurisseurs ils aient pas encore droit de cit dans les
questionnaires officiels on ne en tonnera point Faut-il alors
supposer administrateurs et mdecins clairs vitent sciemment un
sujet aussi dlicat Dlicat parce il pose le problme de la diffrence
entre croyance et crdulit entre lac et religieux entre croyance et
incroyance
Silence encore au sujet de la littrature dite populaire pas une
condamnation des almanachs ou des livrets mdicaux Aucune remarque
non plus sur les manuels ou bien sur les journaux de sant qui
connaissent alors un dveloppement considrable et ont sign entre
autres nombre de mdecins et de chirurgiens parfois sous un nom em
prunt livres de poche qui hui constituent un instrument privilgi
qui assure la diffusion une culture sanitaire de type savant
est--dire une ncessaire vulgarisation scientifique dans le meilleur
sens du terme
Ultime silence ultime aveu aussi le problme des remdes secrets
est toujours abord par les chirurgiens et par les mdecins au niveau
des principes et de la dontolo gie professionnelle pour affirmer la
spcialisation et pour voquer-la complmentarit du mdecin qui ordonne
le remde et du pharmacien qui le dlivre pour poser enfin le
principe de appropriation un remde et donc de sa formule.
soi-disant secrte par son ou ses inventeurs qui en exploitent le
privilge privilge qui deviendra un droit aprs la Rvolution au temps
de la bourgeoisie couronne En autres termes le con sommateur le
client le malade vivant le vivant malade serait-il oubli Et avec
lui le problme de automdication Quant absence information origine
mdicale sur la
921
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
nature des funestes secrets et sur les procds abortifs elle ne
surprend pas elle non plus quoi de plus contraire en principe au
serment Hippocrate
analyse des rponses aux enqutes de 1786 et de 1790 apporte une
srie de tmoi gnages rvlateurs sur la mentalit du corps mdical fran
ais pour ce qui concerne les rapports entre mdecine savante et
mdecine populaire Elle permet voquer les problmes interprtation que
pose la lecture une documentation de provenance et de type savants
Elle confirme tout abord la perce effectue par idologie des Lumires
dans ensemble comme dans lite urbaine des matres en chirurgie Le
discours ils tiennent ne loigne gure ds lors il agit de
charlatanisme du discours prononc par les correspondants clairs de
la Socit royale de mdecine ou bien par certains matres-apothicaires
parisiens irrsistible ascension de la chirurgie et de la pharmacie
au point de vue scientifique et professionnel81 est pas trangre un
rap prochement une partie des chirurgiens et des mdecins
rapprochement qui prlude mme de trs loin unification du corps des
mdecins qui se produira en 1892
Second tmoignage apport par le corpus tudi les perfectionnements
acquis au fil du xvine sicle dans la technique de enqute
administrative tendent conforter les
priori une lite qui se veut claire lite mdicale exprime quant
elle mais avec quelle force sa volont de puissance sa volont de
monopoliser immense domaine de la sant elle en exclut farouchement
tous les non-professionnels selon une tradition plurisculaire que
vient renforcer idologie des Lumires
Somme toute elle indique clairement entreprise laquelle elle se
consacrera tout au long des xixe et xxe sicles une vritable
croisade contre le charlatanisme un com bat pour mener bien la
mdicalisation du corps social dans son ensemble Durant la dcennie
1780 un groupe masculin qui affirme suprieur entend se rserver
exercice un art lui-mme issu un savoir rput suprieur ainsi explique
entre autres la masculinisation de image du thrapeute dans le
discours des chirurgiens clairs et cela au niveau des
reprsentations mentales des sorciers dsigns comme tels mais pas de
sorcires et au niveau des ralits sociales avec la multiplication
des mdecins ac coucheurs et des chirurgiens dmonstrateurs
accouchements
Attitude de conqurant attitude paresseuse aussi finalement
insoutenable car elle esquive les problmes authentiques une culture
populaire pose aussi bien historien
ethnologue ou au mdecin La russite scientifique professionnelle
sociale de la mdecine et du corps mdical dans la France aujourdhui
est ce point considrable que dans lite actuelle du corps mdical on
voit rapparatre le sentiment de supriorit et les certitudes dont
tmoignent nos textes clairs du xvine sicle pour mieux affirmer la
supriorit de leur savoir ils en viennent rduire ou nier le voile la
nuance le soupir qui existaient et qui existent toujours entre
mdecins autoriss et charla tans 82 Or cette nuance ne tient pas
seulement efficacit croissante est--dire redoutable autant que
bienfaisante du savoir mdical mais aussi la permanence de deux
systmes de reprsentation du monde Elle pose le problme une identit
Quant la ngation de cette nuance elle ... prend sa source dans les
rapports singuliers de or dre social et de ordre naturel o le
premier dtach du second est proclam souverain grce assimilation de
humanit celle de ses parties qui dtient les instru ments g3 de la
domination
Jean-Pierre GOUBERT Centre de recherches historiques
E.H.E.S.S
922
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
ANNEXE
La circulaire date de Paris du 24 novembre 1790 signe des
docteurs Guillotin et Gallot respectivement prsident et secrtaire
gnral du comit de Salubrit comporte 14 questions relatives la
situation de la chirurgie dans le royaume Seules la 12e ques tion
et la 14e question concernent directement la mdecine populaire 72e
question Re oit-on part autres praticiens sous les noms
particuliers de den tistes oculistes herniaires rebouteurs pdicures
etc
14e question Les charlatans les empiriques et gens secret
sont-ils trs rpandus dans votre arrondissement Quel est le degr de
tolrance on leur accorde
NOTES Selon Monthyon le problme reste alors pos ... de savoir si
la mdecine dtruit plus
hommes elle en sauve aprs Pierre GOUBERT dans Histoire conomique
et sociale de la France Paris Il 1970 65
Aisne 19 Soissons 1er octobre 1786 rapport de intendant au
contrleur gn ral sur les mdecins et sur les chirurgiens de sa
gnralit
Michel FOUCAULT Naissance de la clinique Paris 1963 44 cf les
articles de J.-P PETER parus dans les Annales E.S.C. 1967 et dans
la Revue historique 1971
Sur enqute de 1786 cf J.-P GOUBERT et LEBRUN Mdecins et
chirurgiens dans la socit fran aise du xviiie sicle Annales
cisalpines histoire sociale no 1973 pp 119-136 Pour une approche
chelle rgionale cf LEBRUN Les Hommes et la mort en Anjou ...]
Paris-L Haye Mouton 1971 pp 199 ss cf aussi J.-P GOUBERT Malades et
mdecins en Bretagne ...] Paris 1974 pp 78 ss Une autre srie de
documents sur les remdes secrets le fonds de la Socit royale de
mdecine t analyse par J.-P PETER et RAMSEY paratre)
Il agit de enqute lance par le comit de Salubrit enqute base
dclarative adresse sous la forme une circulaire date du 24 novembre
1790 aux lieutenants du Premier chirurgien du roi cette circulaire
comporte 14 questions relatives exercice de la chirurgie dans le
royaume deux questions concernent directement les reprsentants de
la mdecine
populaire cf le texte significatif de ces deux questions dans le
document annexe Sur cette enqute du comit de Salubrit cf INGRAND Le
Comit de Salubrit de Assemble nationale constituante 1790-1791)
thse de mdecine Paris 1934 cf aussi M.-J IMBAULT-HUART Sour ces de
histoire de la mdecine aux Archives nationales de 1750 1822 dans
Revue histoire des sciences XXV no janvier-mars 1972 pp 51-52
utilise ici outre les cartons F15 226 228 tudis par Henri Ingrand
et le carton F17 2276 des Archives nationales autres rpon ses cette
mme enqute non analyses dans cet article figurent dans la srie des
Archives dpartementales
N. F17 2276 pice 3341 Le ressort du lieutenant du Premier
chirurgien du roi tabli Saint-Sever correspondait comme tait alors
la rgle au bailliage royal du mme nom cela avant la
dpartementalisation du royaume
A.N. F17 2276 pice 336 Luxeuil 15 janvier 1791 A.N. F17 2276
pice 269 Josselin 22 janvier 1791 Cf. par contraste la thse sur la
nature de la mdecine populaire dfendue par
BOLTANSKI dans La Dcouverte de la maladie Paris 1968 pp 23 ss 10
Cf J.-P PETER Les mots et les objets de la maladie ... dans Revue
historique no 499
juil.-sept 1971 38 11 Cf J.-Ch SOURIA Mythologie de la mdecine
moderne Paris 1969 vu Autant que
les paysans les ingnieurs en lectronique et les polytechniciens
frquentent charlatans et rebou teux penduleurs scrutateurs iris
peseurs de cheveux.
923
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
12 Sur la densit mdicale dans la France de 1780-1790 cf LEBRUN
Les Hommes et la mort en Anjou ...] Paris-La Haye Mouton 1971 pp
199 ss cf J.-P GOUBERT Malades et mdecins en Bretagne ...] pp
78-119 cf aussi J.-P GOUBERT et LEBRUN Mdecins et chirurgiens dans
la socit fran aise du xvine sicle art cit Pour le xixe sicle il
convient de se reporter aux Mdecins de Ouest ... de Jacques ONARD
cit 42 et article de Jean WAQUET sur la loi de ventse an XI paratre
Pour la priode 1780-1790 cf J.-P GOUBERT The extent of medical
practice in France about 1780 article paratre dans un numro
spcial
du Journal of social history consacr histoire sociale de la
mdecine 13 N. XXXVIII sance du conseil de Sant du 15 ventse an III
Cf dans le mme
sens la Dclaration royale du 25 avril 1777 qui cr Paris le
Collge royal de pharmacie 14 A.N. F17 2276 pice 288 Lyons-la-Fort
s.d. dcembre 1790 15 A.N. F17 2276 pice 349 Tonnerre 23 janvier
1791 Sur les mireurs urine cf GUYOTJEANNIN Contribution histoire de
analyse des urines thse de pharmacie Stras
bourg) Crteil 1951 16 N. F17 2276 pice 307 Domfront janvier 1791
Juger eau la vue le consul-
teur mire les urines il lve de sa main le rcipient contenant
urine la hauteur de son regard Donner des remdes arrire des malades
je propose de prendre expression dans son sens concret Il agirait
donc un traitement aide par exemple de lavements
17 Indre-et-Loire 354 Le Mans 1786 18 Ibid. id 19 Ibid. 354
subdlgation de Beaumont-la-Vicomte 1786 20 A.N. F15 2282 pice
Montdidier 30 novembre 1790 21 Ibid. id. pice Bray-sur-Seine
dcembre 1790 22 N. F17 2276 pice 347 Nevers 11 fvrier 1791 rapport
du chirurgien des pidmies
Bonnet 23 N. F17 2276 pice 342 Tartas 20 janvier 1791 Mme
opinion mme discours
mme confusion entre charlatans empiriques et gens secret dans le
Dictionnaire de Trvoux article empirique II colonne 1693 Paris 1743
et ibid article charlatan colonne 1995 cf galement dans le mme sens
article charlatan rdig par le Chevalier de Jau- court dans
Encyclopdie Ill pp 208-210 Paris 1753
24 A.N. F17 2276 pice 342 Tartas 25 Cf infra le texte de cette
14e question dans le document annexe 26 BOUTEILLER Mdecine
populaire hier et aujourdhui Paris 1966 47 27 Cf. ce sujet OLIVIER
Dr) Mdecine et sant dans le pays de Vaud au XVIIIe sicle
1675-1798 Lausanne 1.1 1962 pp 422 ss 28 BOUTEILLER op cit. 26
Cf. dans le mme sens le de la Dclaration royale du
25 avril 1777 29 N. F17 2276 pice 266 Angoulme concurrence des
apothicaires et des mdecins
ibid. id. pice 331 Bergerac concurrence des mdecins Il convient
de prciser que les mdecins sont autoriss exercer la propharmacie
dans les secteurs o aucun apothicaire est tabli
30 Ibid. id. pice 294 Nuits 29 dcembre 1790 Cf infra note 65 31
Cf. dans le mme sens le Discours prononc pour inauguration du
Collge royal de
pharmacie le lundi 30 juin 1777 par un de ses prvts le
matre-apothicaire Trevez archi ves de cole de pharmacie registre 39
pp ss
32 Ibid. id 33 F17 2276 pice 304 Parthenay 34 expression Ancien
Rgime apparat dans les rponses adresses par les chirurgiens
de Beaugency et de Morlaix Elle est frquente aussi dans les
Cahiers de dolances rdigs par les apothicaires par les chirurgiens
et par les mdecins cf LORILLOT Essai sur les Cahiers de dolances
des mdecins chirurgiens et apothicaires en 1789 mmoire de matrise
Universit de Paris-I 1975 sondage portant sur huit villes de
province)
35 A.N. F17 2276 pice 303 Morlaix 17 janvier 1791
924
-
J.-P GOUBERT LES CHARLATANS
36 Ibid. id. pice 342 Tartas 37 Ibid. id. pice 354 Ustaritz 38
Ibid. F15 2282 Montereau Observations similaires dans les cas Ussel
ibid. F17 2276
pice 300 et de Poitiers ibid. id. pice 293) 39 Ibid. F15 2282
pice 10 Meaux dcembre 1790 40 Ibid. F17 2276 pice 281 Vitry-le-Fran
ois 28 dcembre 1790 41 Ibid. F15 Beaugency 1er dcembre 1790 42
FOUCAULT op cit. 64 Cf. ce propos ONARD exemple une catgorie
socio-professionnelle au xixe sicle les mdecins fran ais dans
Ordres et classes Colloque histoire sociale Saint-Cloud 24-25 mai
1967 Paris-La Haye 1973 pp 221 ss. et id Les Mdecins de Ouest au
XIXe sicle thse de doctorat tat exemplaire dactylographi) Paris-I
1976 Cf. en outre ensemble de textes runis par Louis Bergeren sur
le mdecin notable au xixe sicle ici mme)
43 FOUCAULT op cit. 45 44 A.N. F17 2276 pice 359 45 Ibid. id.
pices 278 et 337 46 Ibid. id. pice 357 47 Cf enqute collective du
Centre de recherches historiques dirige par FURET et
OZOUF se reporter aussi DE CERTEAU JULIA REVEL Une politique de
la langue La Rvolution fran aise et les patois Paris 1975 pp 137
ss
48 A.N. F17 2276 pice 351 49 Ibid. id. pice 330 50 Ibid. id.
pice 339 51 Ibid. id. pice 278 Cognac 52 CRUBELLIER Histoire
culturelle de la France Paris 1974 89 53 A.N. F17 2276 pice 281 54
Ibid. id. pice 294 Le lieutenant du Premier chirurgien du roi tabli
Nuits fait allusion
arrt du Conseil du roi du 17 mars 1731 55 Cf LE PAULMIER Orvitan
Paris 1892 pp 95-107 56 aprs Joel FOUILLERON Fabre glantine et les
chemins du thtre dans Revue
histoire moderne et contemporaine XXI juil-sept 1974 503 57 Cf
J.-P PETER Le Grand Rve de Ordre mdical en 1770 et hui dans
Autrement no 1975/1976 pp 183-192 58 N. F17 2276 pice 330 Tours
59 Ibid. id. pice 316 Auch 60 Ibid. id. pice 334 Saint-Sever 61
Ibid. id. pice 357 rapport sign par Le prvt de la Communaut des
matres en
chirurgie de Mont-de-Marsan Landes) faisant pour la Communaut 62
Ibid. id. pice 266 Cf. sur le mme point M.-A SAINT-L GER Conflit
entre le
corps des chirurgiens et le bourreau de Lille en 1768 dans Revue
du Nord II 1911 49 63 Ibid. id. pice 274 64 Ibid. F15 Le Quesnoy
Nord) 65 Ibid. F15 2282 pice dcembre 1790 66 Ibid. F17 2276 pice
312 Autres exemples de telles castrations dans deux rponses de
subdlgus enqute de 1786 et dans D. Eure pice 19 brumaire an 67
Ibid. id. pice 353 Pour une comparaison avec hui cf Andr BURGUI
RE
Bretons de Plozvet Paris 1975 et Pierre Jak HELIAS Le Cheval
orgueil Paris 1975 68 Ibid. F15 227 Beaugency 1er dcembre 1790
rponse du lieutenant du Premier chirur
gien du roi J.-N Pellieux
925
-
LES DECINS ET LES SOIGNANTS
69 Cf P.-Y SEBILLOT Le Folklore de la Bretagne Paris 1968 II 151
cf BOUTEILLER Sorciers et jeteurs de sorts Paris 1957 et id Mdecine
populaire hier et au
hui Paris 1966 cf FAVRET Le malheur biologique et sa rptition
dans Annales E.S.C. mai-aot 1971 pp 873-888 cf aussi FOUCAULT Les
dviations religieuses et le savoir mdical dans Hrsies et socits
Paris-La Haye 1968 pp 19-29
70 A.N. F17 2276 pice Hyres 20 fvrier 1791 71 Ibid. id. pice 354
24 janvier 1791 Cf MANDROU Magistrats et sorciers en France
au XVIIIe sicle Paris 1968 456 72 A.N. F17 2276 pice 334a
Saint-Sever 20 janvier 1791 Sur la rencontre entre
remde universel et remdes spcifiques cf le remarquable mmoire de
matrise de Pascale MULLER Les eaux minrales en France la fin du
xvine sicle Paris-I 1975
73 est le cas au Quesnoy Nord) source A.N. F15 74 A.N. F17 2276
pice 305 Carcassonne Aude) 75 Ibid. id. pice 3.19 Seurre-sur-Sane
Bellegarde) Or 76 Ibid. id. pice 316 Auch 77 Dans le mme sens je
relve le mpris et mme la haine dont beaucoup de chirurgiens
poursuivent les matrones je note cependant interfrence entre
accouchement pratiqu par les hommes mode lance par Louis XIV et par
les femmes Je remarque enfin dans le discours des mdecins clairs
qui ont marqu le premier Empire la cration et la justification du
stro type de la fminit analys par Yvonne KN IBI EH LER Les mdecins
et la nature fminine du temps du Code civil Annales E.S.C.
juillet-aot 1976
78 N. F17 2276 pice 294 Nuits 29 dcembre 1790 la diffrence des
hommes pr sents comme sorciers par nos chirurgiens aucune femme est
dite sorcire
79 Gironde 3304 lettre du 12 dcembre 1786 signe des curs de
Casteinau et Avensac Medoc)
80 MANDROU Magistrats et sorciers ...] pp 426 ss 81 Cf pour
leurs confrres pharmaciens-apothicaires Bndicte DEHILLERIN Le
Collge
royal de pharmacie de Paris 1777-1795 mmoire de matrise
exemplaire dactylographi) Paris- 1976 82 BERNARD Grandeur et
tentation de la mdecine Paris 1973 171 83 MOSCOVICI Essai sur
histoire humaine de la nature Paris 1968 513 se rfrer
aussi la conclusion particulirement clairante Cf aussi dans un
autre langage KOELBING Un point de vue nglig par les mdecins
historiens la mdecine de tous les
jours dans Mdecine et hygine no 118 9-10 1974 pp 1-3
926
InformationsAutres contributions de Jean-Pierre GoubertCet
article cite :Jeanne Favret. Le malheur biologique et sa rptition,
Annales. conomies, Socits, Civilisations, 1971, vol. 26, n 3, pp.
873-888.Yvonne Knibiehler. Les mdecins et la nature fminine au
temps du Code civil, Annales. conomies, Socits, Civilisations,
1976, vol. 31, n 4, pp. 824-845.
Cet article est cit par :Dhondt Pieter. La situation prcaire de
l'enseignement suprieur dans les dpartements belges entre 1797 et
1815. In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 82 fasc. 4,
2004. Histoire medievale, moderne et contemporaine - Middeleeuwse.
moderne en hedendaagse geschiedenis. pp. 935-967.Goubert
Jean-Pierre. Rseau mdical et mdicalisation en France la fin du
XVIIIe sicle. In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome
86, numro 2, 1979. La mdicalisation en France du XVIIIe au dbut du
XXe sicle. pp. 221-229.Kuty Olgierd. Les innovations scientifiques
dans le champ sanitaire (1750-1825). In: Sciences sociales et sant.
Volume 1, n3-4, 1983. pp. 119-173.Alice Peeters. " La pocaution c
manman flicit ", Communications, 1979, vol. 31, n 1, pp.
130-144.Regards neufs sur la mdecine et la socit en France la fin
du XVIIIe sicle et au XIXe, Mdecins, mdecine et socit en France aux
XVIIIe et XIXe sicles, Annales Economies, Socits, Civilisations,
32, n 5, sept.-oct. 1977, p. 849-1055, Revue d'histoire de la
pharmacie, 1978, vol. 66, n 239, pp. 276-277.
Pagination908909910911912913914915916917918919920921922923924925926
PlanI L'extension du charlatanisme II Mdecins et charlatans III
L'image mdicale du charlatan 1) L'ventail des charlatans d'aprs les
vocables utiliss par les chirurgiens (77 tmoignages) 2) Les
chirurgiens accusent les charlatans (d'aprs 84 rponses) 3) La
recherche des responsabilits 4) Attitude des chirurgiens devant le
charlatanisme
IV Activits et personnalit des charlatans Annexe
IllustrationsTableau 1. - Sans titre.Tableau II. - Sans
titre.Tableau III. - Sans titre.Tableau IV. - Sans titre.