La Compagnie des Violons du Roy Frédéric MARTIN, violon, directeur et coordinateur du projet Christian RAULT, luthier, directeur technique du projet Projet de mécénat pour la reconstruction d'une bande de violons à l'époque d'Henry IV Les instruments de la danse Saison 2010 avec l’appui de la commission mécénat de l’association Label Épique direction artistique Frédéric MARTIN 06 87 43 86 25 [email protected]
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La Compagnie des Violons du Roy
Frédéric MARTIN, violon, directeur et coordinateur du projet
Christian RAULT, luthier, directeur technique du projet
Les instruments à cordes frottées utilisés aujourd'hui pour interpréter les musiques des
XVIe et XVII
e siècles sont issus d'une conception moderne, anachronique et radica-
lement différente de ce que les témoignages historiques nous enseignent.
La simple observation des documents iconographiques montre que l'emplacement du
chevalet, (première pièce transmettant la vibration de la corde au coffre de résonance)
est mobile. Ses déplacements (inconcevables
aujourd'hui) sont alors fort appréciés, notamment
pour s'accorder, comme l'explique le musicien et
compositeur Silvestro Ganassi en 1542.
Cette habitude ancienne s'oppose
absolument à la pratique moderne
du violon où le chevalet est défi-
nitivement fixé au centre des " f ",
emplacement strictement défini par
l'architecture interne dissymétrique
qui en régit la mécanique vibratoire.
Cette simple observation montre que les premiers violons sonnaient et fonctionnaient
d’une manière radicalement différente, qu’il est important de retrouver...
Ce système se retrouve sur tous les instruments de la famille du violon, du dessus de
violon à la basse de violon, de ses origines au milieu du XVIIIe siècle.
Carlo Saraceni,
Sainte Cécile et l'Ange, ca 1610.
Valentin de Boulogne
Le concert, 1625, détail.
Âme centrale et rectangulaire. Radiographie d'un dessus de violon de 1594
de la Cathédrale de Freiberg.
2) Mise en œuvre des découvertes organologiques fondamentales Travaillant depuis plus de 20 ans sur l'histoire de l'évolution de la facture instrumentale,
des spécialistes (chercheurs et musiciens) ont mis en évidence l'existence d'une
architecture interne spécifique des premiers violons.
L'examen minutieux des quelques très rares instru-
ments préservés, de l'iconographie abondante et des
textes originaux les autorisent aujourd'hui à dévelop-
per une vision radicalement différente de celle qui
prévaut à l'heure actuelle.
Les études pluridisciplinaires menées par Christian
Rault sur les évolutions techniques de la lutherie du
XIe au XVIII
e siècle, montrent que les premiers
violons étaient dotés d'une âme centrale placée dans
l'axe de symétrie au niveau de la partie supérieure
des " f ". Ce système ancien de production du son se
distingue fondamentalement du montage "moderne"
qui repose, quant à lui, sur une structure interne
dissymétrique : la barre d'harmonie soutenant les
cordes graves et l'âme les cordes aigües. Malgré sa
mise au point tardive, ce montage est aujourd'hui
indistinctement utilisé sur tous nos instruments dits
"baroques".
Les traces de l'usage d'une
âme centrale se retrouvent
dans tous les instruments
construits par "le créateur"
du violon : Andrea Amati
(1505? - 1577), ainsi que
dans ceux construits par ses
fils, petits-fils et leurs dis-
ciples jusqu'à Guarneri del
Gesú (1689-1744). On ne
connait pas de barre d'har-
monie avant Nicolò Amati
(mort en 1684) et Andrea
Guarneri (mort en 1698).
Encore n'est-on pas sûr
qu'elle était placée dans l'axe
central de la table plutôt que
sous le pied du chevalet du
côté des graves. S'il est possible que la grande innovation (qui n'est probablement pas
l'invention) de Stradivarius soit la généralisation du système interne dissymétrique, on
retrouve encore jusqu'en 1750 des âmes "plantées" dans l'axe central.
La mise en œuvre de ces découvertes permettra de retrouver l’expression
artistique originale de ces instruments.
Caravaggio
Le joueur de luth, détail.
3) Des instruments différents : pour quoi faire ? Il ne peut y avoir de proposition technique dans la facture instrumentale qui ne soit au
service d'un projet musical. Dans toute l'Europe du XVIe siècle et jusqu'au milieu du
XVIIIe en France, le projet musical du violon est de produire et de mener la danse.
Contrairement aux instruments d'aujourd'hui qui sont essentiellement orientés sur la
vocalité, nous imaginons des instruments beaucoup plus dynamiques, avec une
articulation très vigoureuse qui redonnerait une place rythmique aux parties
intermédiaires.
Le violon est à la danse ce
que la voix est à l'opéra. L'évolution de l'un et de
l'autre, dans la manière
dont ils ont été perçus au
cours de l'histoire, les a
rapprochés au point que le
violon "s'est mis à chan-
ter". Ceci dit, penser le vio-
lon voué uniquement à
l'imitation de la voix serait
une erreur anachronique...
Il faut alors que notre ma-
nière de jouer soit aussi
résolument tournée vers
cette volonté de mener la
danse, de penser, d'ar-
ticuler la musique à tra-
vers le mouvement du
danseur. Et cela ne signifie
pas seulement accompagner le danseur, mais savoir danser et savoir jouer en dansant,
pour proprement incarner le geste instrumental en un geste chorégraphique. Et c'est
la danse qui sera à l'origine de tous les
répertoires du violon jusqu'au début
du XVIIIe siècle. Les parties
intermédiaires (haute-contre, taille et
quinte de violon) ne sont donc pas
seulement un remplissage harmonique,
mais un moteur rythmique.
La Compagnie des Violons du Roy ainsi
dotée, et elle seule, des instruments
conformes aux violons d’origine pourra
rayonner et faire rayonner les
musiques des XVIe et XVII
e siècles à
l’échelle nationale et internationale.
Ce projet pourra ainsi initier
une toute nouvelle orientation
dans la lutherie traditionnelle.
Anonyme français, La Volte,
ca 1590.
Nicolas Bonnard Le Maître à danser, 1682.
Archet original vers 1590,
retrouvé dans la Cathédrale de Freiberg.
II. Les instruments à reconstruire
1 - Les "violons" : 7 instruments
Le jeu de violons est composé de basse, de hautecontre, de taille & de dessus, à
quoy on peut adjouster une cinquiéme partie.
On appelle aussi Violons, ceux qui jouent de cet instrument, & qui d'ordinaire sont
Maistres à danser. Antoine Furetière, Dictionnaire Universel, 1690.
deux dessus de violon
une hautecontre de violon,
une taille de violon
une quinte de violon
une grosse basse de violon (à 5 cordes)
un basso da spalla (basse de violon
se jouant à l'épaule - voir illustration)
Les répertoires pour la bande de violons de cette époque sont souvent écrits
pour une polyphonie de 4 à 6 parties.
- À 4, 1 dessus, 1 hautecontre, 1 taille, 1 basse (grosse basse ou da spalla)
- À 5, 1 dessus, 1 hautecontre ou 1 second dessus, 1 taille, 1 quinte et 1 basse