LA PUCE à L’OREILLE Publication du MFPF 34 - N°106 - 2ème trimestre 2010 Pourquoi le Planning se lance-t-il dans une campagne d’adhésion en 2010 ? La question est légitime quand on sait que les partis po- litiques, les syndicats et les associations en général ont de plus en plus de mal à convaincre les citoyens de les rejoindre. Tout simplement parce que l’adhésion est un encouragement réel pour que le Planning continue de compter : pas le Planning pour le Planning mais bien pour que l’éducation à la sexualité reste un droit suivi d’effets, pour que demain le remboursement de tous les contraceptifs soit une réalité, pour que la moralité ne prenne pas le dessus sur l’IVG. Parce que le nombre que nous représenterons fera pencher la ba- lance (souvenez-vous, nous étions 200 000 à avoir signé la pétition de défense des missions du Planning début 2009), le premier pas de soutien pour que nos droits soient respectés, c’est l’adhésion. Rejoignez-nous ! Fatima Bellaredj, présidente du Planning 34 Le Planning en campagne Sommaire P.2 Actualités nationales et internationales La bioéthique en questions Carole Roussopoulos P.4 Actualités locales Assemblée générale P.6 Débat Maternité versus féminisme Petites annonces... P.9 Droits fondamentaux Rapport de l’IGAS P.10 Contraception La stérilisation volontaire P.11 Culture Florence Aubenas
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LA PUCE à L’OREILLEPublication du MFPF 34 - N°106 - 2ème trimestre 2010
Pourquoi le Planning se lance-t-il dans une campagne d’adhésionen 2010 ? La question est légitime quand on sait que les partis po-litiques, les syndicats et les associations en général ont de plus enplus de mal à convaincre les citoyens de les rejoindre.
Tout simplement parce que l’adhésion est un encouragement réelpour que le Planning continue de compter : pas le Planning pour lePlanning mais bien pour que l’éducation à la sexualité reste undroit suivi d’effets, pour que demain le remboursement de tous lescontraceptifs soit une réalité, pour que la moralité ne prenne pasle dessus sur l’IVG.
Parce que le nombre que nous représenterons fera pencher la ba-lance (souvenez-vous, nous étions 200 000 à avoir signé la pétitionde défense des missions du Planning début 2009), le premier pasde soutien pour que nos droits soient respectés, c’est l’adhésion.
Rejoignez-nous !
Fatima Bellaredj, présidente du Planning 34
Le Planning en campagne
Sommaire
P.2Actualités nationales et
internationales
La bioéthique en questions
Carole Roussopoulos
P.4Actualités localesAssemblée générale
P.6DébatMaternité versus féminisme
Petites annonces...
P.9Droits fondamentaux
Rapport de l’IGAS
P.10Contraception
La stérilisation volontaire
P.11Culture
Florence Aubenas
Petit Lexique
LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010 2
Actualités nationales & internationales
Questions de bioéthique
La bioéthique soulève bien des questionnements : quelques éléments pour faire le point à la veille
d’une révision des lois de 1994.
bioéthique : science des mœurs et dela morale considérée comme un en-semble de règles de bonne conduitemédicale qui dépend à la fois de ladéontologie, de la science et de la mo-rale.« La bioéthique permet, par des en-traves librement consenties, d’empê-cher le pouvoir de l’homme de devenirune malédiction pour lui-même. »(H. Jonas)
PMA (procréation médicalement as-sistée) : ensemble de pratiques cli-niques et biologiques où la médecineintervient dans la procréation : fécon-dation in-vitro et transfert d’em-bryons, ovulation programmée,congélation d’ovaires, dons d’ovules,
dons de sperme, dons d’embryon,mères porteuses…
DPN (diagnostic prénatal) : ensemblede pratiques médicales ayant pourbut de détecter in-utero, chez l’em-bryon ou le fœtus, une affectiongrave. Parmi les techniques exis-tantes, les plus courantes sont l’écho-graphie et l’amniocentèse.
DPI (diagnostic préimplantatoire) : en-semble de techniques permettant deconnaître précocement les caractéris-tiques d’un embryon, lors d’une fé-condation in-vitro. Il permet desélectionner un embryon sain avantl’implantation dans l’utérus de lamère.
embryon : organisme en développe-ment depuis la première division del’œuf jusqu’au stade où les principauxorganes sont créés, soit à huit se-maines chez l’être humain. Au-delà,on parle de fœtus.
cellule souche : cellule indifférenciéese caractérisant par sa capacité à en-gendrer des cellules spécialisées en semultipliant quasi indéfiniment à l’iden-tique. Les cellules souches font ac-tuellement l’objet de beaucoup derecherches, en vue de régénérer lestissus, voire de créer de toutes piècestissus et organes. Provenant majori-tairement d’embryons, elles posentdes problèmes d’éthique.
L’ASSEMBLEE NATIONALE devrait prochai-
nement réviser les lois de bioéthique vo-
tées en I994. Il s’agissait alors d’établir des
règles concernant les manipulations du vi-
vant et de préserver les droits fondamen-
taux des personnes, sans entraver la
recherche médicale.
Les principes de cette loi énonçaient le
désir d’établir le respect de la dignité de
l’individu ; l’indisponibilité du corps hu-
main (c’est-à-dire l’interdiction de la loca-
tion ou de la vente de tout ou partie du
corps) ; l’anonymat et la gratuité du don.
En 2004, en raison des progrès de la
science, la loi a interdit le clonage repro-
ductif ou thérapeutique, et la recherche
sur les cellules souches embryonnaires
(sauf pour quelques expérimentations fa-
vorisant le progrès thérapeutique) et a
autorisé la possibilité d’effectuer des dons
d’organes à destination d’un membre de
sa famille, ou de la personne qui partage
la vie du donneur depuis plus de deux
ans.
Six ans après, en 2010, de nombreuses
questions se posent encore.
Les mères porteuses sont interdites en
France, mais autorisées dans nombre de
pays voisins. Le combat des époux Men-
nesson, dont les jumelles Isa et Léa sont
nées aux Etats-Unis, en 2000, d’une mère
porteuse, défraie actuellement la chro-
nique judiciaire.
aL’ anonymat est exigé pour les dons de
gamètes - spermatozoïdes ou ovocytes.
Mais peut-on priver l’enfant de l’accès à
ses origines ?
aLa gratuité : le don d’ovocytes com-
porte pour la donneuse risques et
contraintes (elle doit être sous stimulation
hormonale pendant un mois avant une in-
tervention chirurgicale lourde, avec anes-
thésie générale). Doit-on maintenir
l’exigence de la gratuité ?
aDoit-on autoriser totalement la re-
cherche sur les cellules souches embryon-
naires, comme le demandent certains
chercheurs ?
aLe diagnostic préimplantatoire et les
tests génétiques doivent-ils être autorisés
et à quelles conditions ?
aLa procréation médicalement assistée
doit-elle être autorisée, et pour qui ? Pour
les seuls couples hétérosexuels, ou égale-
ment pour les célibataires et les couples
homosexuels ?
aPeut-on implanter des embryons lll
Actualités nationales & internationales
3 LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010
Etats-Unis : séropos autorisés
L’interdiction d’entrer sur le territoire
américain faite aux séropositifs depuis
vingt deux ans est enfin levée. Le prési-
dent Obama a annoncé la disparition de
cette restriction au début de l’année
2010. « Si nous voulons être à la tête du
combat contre le Sida dans le monde,
nous devons nous comporter comme
tels. » Il existe encore une dizaine de
pays dans le monde qui refusent l’en-
trée aux séropositifs.
Poisson soluble ?
En février 2010, face à la levée de bou-
clier de nombreuses associations
conservatrices, Luc Chatel, ministre de
l’Education Nationale, a tranché : le
film d’animation à vocation pédago-
gique Le baiser de la lune, qui aborde les
relations amoureuses entre personnes
de même sexe, ne sera pas diffusé dans
les écoles élémentaires. Réalisé par Sé-
bastien Watel, il était destiné aux
élèves de Cm1 et Cm2. Dans un commu-
niqué de presse, le Planning familial a
déploré cette interdiction. « L’âge des
élèves a été invoqué pour justifier cette
interdiction : nous pensons au contraire
que l’école élémentaire est un moment
idéal pour aborder ces questions ! L’édu-
cation à la sexualité ne peut, ne doit pas
commencer seulement à l’adolescence.
Le rapport à l’autre, le respect des diffé-
rences, le questionnement des normes
sont autant de thèmes qu’il est essentiel
d’aborder dès l’école primaire. (…) Pas
plus que l’éducation à la sexualité n’est
un encouragement à avoir des relations
sexuelles, l’information sur l’homosexua-
lité n’est une incitation à avoir des pra-
tiques homosexuelles ! (…)
Pouvons-nous faire de l’éducation à la
sexualité en passant sous silence les dif-
férentes formes sous lesquelles elle peut
être vécue ? L ‘éducation à la sexualité
doit-elle être la promotion du modèle
idéal : un homme, une femme, s’unis-
sant pour procréer ?
www.le-baiser-de-la-lune.fr
lll après le décès du père ? Et si non,
pourquoi ?
aFin de vie : peut-on stopper une ali-
mentation artificielle et dans quelles
conditions ? Cela peut concerner les
personnes âgées ou les malades très
graves, mais aussi les nouveau-nés très
prématurés.
aActuellement, la législation est
contournée par de nombreux couples
qui vont chercher à l’étranger ce qu’on
leur refuse en France (mères porteuses
aux U.S.A, ovocytes en vente en Grèce
ou en Espagne,fFécondation in vitro
pour les couples homosexuels en Bel-
gique…)
Doit-on maintenir l’intransigeance ac-
tuelle ? Sur quels principes ? n
Marianne Loupiac
L’héritage d’une féministe
AUTEURE de plus de cent vingts
films documentaires, notre amie,
la féministe Carole Roussopoulos,
est décédée d’un cancer en octo-
bre 2009.
Née Carole de Kalbermatten à
Lausanne en 1945, elle fonda en
I971, avec son compagnon le
peintre Paul Roussopoulos (réfu-
gié de la Grèce des colonels), le
collectif de vidéo militante Vidéo
Out.
Caméra au poing, elle a combattu
pour les droits à la contraception
et à l’avortement, contre le si-
lence du viol et de l’inceste, les
mutilations sexuelles : Et y’a qu’à
pas baiser, L’inceste : la conspira-
tion des oreilles bouchées (I988),
Le Viol conjugal, viol à domicile
(2003), Femmes mutilées, plus ja-
mais (2008)... sont autant de ja-
lons d’une lutte collective forte et
joyeuse.
Sa haute silhouette et son sourire éner-
gique sont inséparables des actions de
cette époque. Avec Delphine Seyrig,
elle avait créé en I982 le centre audio-
visuel Simone de Beauvoir. Entre I986
et 1994, elle avait dirigé et animé l’En-
trepôt, cinéma d’art et d’essai dans le
14ème arrondissement de Paris, créé
par Frédéric Mitterand.
Elle voulait « faire comprendre que
c’est un grand bonheur et une grande
rigolade de se battre ! Nous avons
toutes à gagner à lever la tête, tout le
monde, tous les opprimés
de la terre». n
Marianne Loupiac
LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010 4
Actualités locales
Au rapport !
L’assemblée générale du Planning 34 s’est tenue le 26 avril 2010. L’occasion de
faire le point sur nos activités et de débattre du Plan stratégique pour les trois pro-
chaines années.
Éléments quantitatifsDans les trois centres de planification
(Agde, Montpellier et Lunel), 4 626 Per-
sonnes ont été reçues en entretien dont
2 208 mineur(e)s. Parmi l’ensemble de ces
personnes, 3 258 ont été reçues en
consultation médicale (dont 1 316 mi-
neur(e)s). Dans le cadre des permanences
des Hauts cantons (à Clermont l’Hérault,
Ganges, Gignac, Lodève, Pézenas et St
Pons de Thomières), 764 personnes ont
été reçues, dont 482 mineur(e)s. Au total
donc, en 2009, l’activité de planification,
nous a permis de rencontrer 5 390 per-
sonnes.
Accès des jeunes majeurs à la prévention60% du nombre total des personnes re-
çues en consultation dans les centres de
planification sont des majeures, dont 90%
sont des filles, pour la plupart âgées de 18
à 20 ans.
Nous observons les signes d’une dégrada-
tion des conditions sociales et d’une pré-
carisation économique de plus en plus
prégnante, en particulier des jeunes sans
emploi et/ou salarié(e)s précaires, mais
aussi des étudiant(e)s. La précarité est un
facteur de vulnérabilité auquel se rajoute
souvent celui de la domination sociale.
Au-delà, la mobilité géographique ou pro-
fessionnelle de certaines (alternance de
statuts) fragilise d’autant leur protection
sociale, la continuité de leurs droits
n’étant pas assurée.
Les jeunes majeures s’adressent au Plan-
ning familial parce qu’elles n’ont plus ou
pas d’accès à une couverture sociale et
que leur situation économique ne leur
permet pas d’avancer les frais médicaux
indispensables.
Les dépassements d’honoraires, le refus
fréquent affiché de recevoir des per-
sonnes bénéficiaires de la CMU, et/ou des
délais de rendez-vous très dissuasifs de la
part de certains professionnels, renfor-
cent l’ensemble. Elles sont de fait privées
du choix d’être suivies
en médecine de ville.
L’impossibilité pour les jeunes majeures
de bénéficier de la gratuité et de la confi-
dentialité peut conduire à un effet contre-
productif en terme de prévention et de
réduction des risques sexuels.
Le Planning familial de l’Hérault entend
défendre l’accès des jeunes majeur(es) à
la prévention et à la réduction des risques
et en particulier pour les plus démuni(e)s,
entre autre en demandant le rembourse-
ment de tous les moyens de contracep-
tion.
Les accueils individualisésDans le cadre de ses activités d’entretiens
individuels, Le Planning de l’Hérault a ou-
vert, au fil du temps, divers espaces
d’écoute
Au local de Montpellier et dans les villes
moyennes, sur plusieurs créneaux hebdo-
madaires, sont proposés des entretiens
de conseil conjugal et familial (difficultés
de couples, sexualité, identité sexuelle,
parentalité...), d’écoute des violences
conjugales, ou intrafamiliales (mariages
forcés, jeunes en rupture familiale, viol,
inceste...), mais aussi beaucoup d’entre-
tiens d’information sur la contraception et
l’IVG, ainsi qu’une aide aux femmes dési-
rant obtenir une IVG en délais dépassés.
Au service des maladies infectieuses et
tropicales de l’hôpital Gui de Chauliac,
une écoute des femmes vivant avec le VIH
est assurée tous les mercredis matin par
une militante du MFPF.
Dans ce même service, deux perma-
nences de sexologie, à l’écoute des
hommes et des femmes vivant avec le
VIH, sont assurées par des sexologues les
mardis et jeudis après-midi.
Au local du 48 bd Rabelais, depuis avril
2008 des personnes en questionnement
identitaire et leur famille sont reçus par
une militante du Gest.
Enfin, notre association départementale
assure des heures d’écoute téléphonique
dans le cadre du dispositif régional mis en
place en 2001.
Au total, en 2009, 1 941 personnes ont
bénéficié d’un accueil individualisé en
face à face.
Le Planning 34 a accueilli 5 390 personnes en 2009.
5 LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010
Actualités locales
Les animations5 823 jeunes de moins de 25 ans et 1 659
adultes ont été rencontrés en 2009 dans
le cadre d’animations à l’extérieur, auprès
de divers publics (jeunes scolarisés, mi-
neurs incarcérés, jeunes en insertion,
jeunes ou adultes en situation de handi-
cap, personnes migrantes ou issues de
l’immigration). Au-delà de ces publics di-
rectement ciblés, nos actions touchent
aussi le personnel encadrant (anima-
teurs/trices, enseignant(e)s).
Le Prodas C’est en 2009 qu’a été lancé le projet pi-
lote Je et les autres. C’est une adaptation
locale du Programme de développement
affectif et social (Prodas) conçu au cours
des années 80 par des enseignants et
chercheurs en psychopédagogie et qui
vise à améliorer l’estime de soi et la
confiance en soi des enfants, ainsi que
leurs compétences relationnelles.
Il permet aux enseignants une meilleure
compréhension et une connaissance plus
fine des élèves. Il contribue également à
apaiser les relations et les conflits, favori-
sant ainsi une bonne relation pédago-
gique. Il est considéré comme un
programme de prévention précoce de la
souffrance psychique.
Pour le Planning familial, il s’agit de met-
tre en œuvre un travail de fond avec les
enfants plus jeunes, pour participer à la
réflexion sur les mécanismes de socialisa-
tion qui favorisent les inégalités et les ex-
clusions. Par ailleurs, selon les enquêtes
nationales, il contribue à la prévention
des violences au sein du couple. On sait
que l’incapacité à exprimer des émotions
est bien souvent rencontrée chez les au-
teurs de violences.
Les formationsElles visent à outiller les acteurs (ou futurs
acteurs) de l’action sociale et médico-so-
ciale sur les questions de genre et sexua-
lité et à transmettre une conscience
politique, en travaillant sur la posture pro-
fessionnelle et les idéologies sous-ja-
centes aux différents dispositifs d’aide. Il
s’agit de permettre de questionner ses va-
leurs personnelles ainsi que celles des ins-
titutions, tout en diffusant la promotion
de l’égalité et de la lutte
contre les discriminations.
Au total, 194 professionnels ou futurs pro-
fessionnels ont participé en 2009 à une
des formations organisées (Réduction des
risques sexuels, Adulte-relais,
Conseillèr(e) conjugal(e) et familial(e)...).
Les femmes sans papierEn collaboration avec la Cimade, le Plan-
ning a relancé ce groupe constitué de
quarante cinq personnes, qui a été mis en
place en 2007, à la demande des femmes
elles-mêmes. Le Planning investit ce
champ d’action dans le cadre de sa mis-
sion de lutte contre les violences faites
aux femmes et pour l’universalité des
droits.
La déconstruction des rumeurs et des
fausses informations nécessite des inter-
ventions permanentes. Le poids des ré-
seaux informels, qui profitent de la
détresse des femmes, est important.
Le fait d’être persécutée en tant que-
femme est malheureusement rarement
pris en compte par les lois relatives au
droit de séjour. Celles-ci sont restrictives
et frappent de plein fouet les femmes qui
sont particulièrement fragilisées dans le
parcours migratoire du fait de leur statut.
Fuir la famille, le mari, le pays, le proxé-
nète ou le poids des traditions, selon qu’il
s’agisse de violence conjugale, de mariage
forcé, d’exploitation sexuelle, de mutila-
tion, d’esclavage ou de privation de li-
berté, n’est pas considéré comme un fait
politique et représente une autre forme
de violence.
La vie associativeRéseau national, le MFPF est présent dans
soixante dix départements et trois dépar-
tements d’Outre-mer. Il est structuré en
vingt fédérations régionales. Le MFPF 34
est impliqué dans la vie et l’administration
de la fédération Languedoc Roussillon -
Aveyron.
Les différentes commissions (« Puce à
l’oreille », « C.O », « Communication »,
« Formation »…) sont des espaces de ré-
flexion, d’élaboration et d’analyse de la
pratique autour d’un pôle d’activité. n
Pour plus de détails, voir le rapport d’activitécomplet sur www.leplanning34.org (rubrique«qui sommes-nous?»)
Plan stratégique : se recentrer sur nos priorités
Débattu lors de l’Assemblée générale 2010, le plan stratégique de l’AD 34 fixe
les orientations à prendre et/ou à conforter en précisant des objectifs à at-
teindre en trois ans. Il veut donner une plus grande lisibilité à notre action po-
litique et vise à une plus grandes cohérence de nos actions au service de nos
missions. Notre préoccupation est de nous recentrer sur nos priorités, en di-
rection des populations à risques, à savoir les femmes et les jeunes.
éducation à la sexualité : être plus visible auprès des jeunes des établissementsscolaires ; réaliser un état des lieux de l’éducation à la sexualité dans les éta-blissements scolaires; définir la liste des établissements prioritaires d’interven-tionaccès à la contraception : assurer un accès à tous les modes de contraceptiondans le cadre des consultations médicales du Planning ; dresser la liste noiredes pharmacies qui refusent de délivrer la pilule du lendemain aux mineures ;assurer des formations aux futurs médecins, sages-femmes et infirmières.accès à l’I.V.G : devenir un observateur des conditions proposées aux femmespour une I.V.G (accueil, méthode, délais...) ; proposer l’I.V.G médicamenteusedans le cadre de nos permanences médicales ; se faire connaître auprès del’Agence régionale de santé comme interlocuteur pertinent.lutte contre les violences : redynamiser la commission violences ; former lesrelais Prodas ; réinsuffler une dynamique positive dans le Réseau des mariagesforcésfemmes et VIH : dresser un bilan du désengagement de l’Etat sur les trois der-nières années ; établir un état des lieux des actions menées avec nos parte-naires ; soutenir les initiatives portées par les femmes séropositives.
LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010 6
Débat
Maternité versus émancipation de la femme ?
Laissons de côté les polémiques écologiques, naturalistes, lobbyistes, et autres provoquées par la parution du
dernier pamphlet d’Elisabeth Badinter pour nous intéresser aux points de vue quant à l’influence de la mater-
nité et de l’allaitement sur l’émancipation de la femme.
ALORS QUE LA CONTRACEPTION, l’avortement et la conquête
progressive de l’égalité au travail ont permis à la femme de choi-
sir ses périodes de travail et de maternité, ou de non maternité,
une pression et une culpabilisation des femmes apparaît depuis
une dizaine d’années, mettant la maternité au premier plan et
poussant au retour de la mère au foyer.
Voici ce qu’en dit Elisabeth Badinter dans son dernier essai Le
Conflit, la femme et la mère :
«Une bonne mère aujourd’hui, c’est une mère qui revient aux
fondamentaux. Elle allaite pendant six mois, ne met pas son bébé
à la crèche ou pas trop tôt, parce qu’un bébé a besoin d’être avec
sa mère et non dans un nid à microbes, elle se méfie de ce qui
est artificiel et a des préoccupations écolo. Le petit pot est de-
venu un signe d’égoïsme, on revient à la purée écrasée par
maman. Une bonne mère est constamment à l’écoute doit veiller
au bien-être physique et psychologique de l’enfant ; c’est un full
time job. (…) On est passé de : Vous avez le droit d’allaiter, à Vous
devez (…) La crise économique a rendu le travail plus dur, plus
précaire, plus stressant. Les femmes sont les premières touchées.
C’est l’origine du bouleversement. Dans les années 90, la droite
a proposé une allocation maternelle qui a renvoyé les femmes à
la maison avec comme seul potage un demi-Smic. Tout cela a en-
gendré de nouveaux comportements, de nouvelles peurs, pro-
pices à un retour aux fondamentaux.»
Elle conclut : «La majorité des Françaises concilie la maternité
et la vie professionnelle, elles sont nombreuses à travailler à
temps plein quand elles ont un enfant. (…) La France est d’ailleurs
le pays industrialisé où le taux de femmes qui travaillent à temps
complet avec un enfant est le plus élevé. Les Françaises bénéfi-
cient d’une histoire unique. Depuis le XVIIe, et surtout le XVIIIe
siècle, la société française a posé le principe que la femme ne
peut être réduite à la maternité.(…)
Elles résistent au modèle de mère parfaite, mais pour combien
de temps ? D’autant qu’on assiste à un règlement de comptes
entre générations. Certaines filles disent à leurs mères : Je ne
serai pas comme toi à courir entre le travail et les enfants, tou-
jours pressée, et stressée, heurtée au plafond de verre. J’ai l’im-
pression qu’aujourd’hui, on est peut-être à un tournant.»
Le retour des normes traditionnellesMarie-Pierre Martinet, du Planning Familial national, intervie-
wée par Libération, s’exprime ainsi «c’est vrai qu’on constate une
injonction de plus en plus forte à rentrer dans un schéma de sur-
valorisation de la maternité. Aux yeux de la société, les femmes
ne sont vraiment femmes que si elles sont mères. Pour preuve,
le regard suspect sur celles qui n‘ont pas d’enfant et qui n’en veu-
lent pas, et le désintérêt vis-à-vis de celles qui ne peuvent plus
en avoir. On voit bien aussi que c’est lié à un contexte écono-
mique : il y a vingt ans, quand on a promu l’alimentation artifi-
cielle des bébés, on avait besoin des femmes sur le marché du
travail. Aujourd’hui, on est dans un contexte beaucoup plus
tendu. Celles qui, pour des raisons personnelles, choisissent leur
activité professionnelle plutôt que l’allaitement sont culpabili-
sées. Il faut laisser aux femmes le choix d’allaiter ou non. Là-des-
sus, je rejoins Elisabeth Badinter, qui a le mérite de dresser ce
constat. Même si je trouve qu’elle va trop loin, dans son ouvrage,
sur d’autres points, comme le naturalisme radical.»
Clémentine Autain, fondatrice du mouvement féministe Mix-
Cité, a également un point d’accord avec Elisabeth Badinter :
« Je suis hostile aux thèses essentialistes qui considèrent que les
femmes ont, par nature, des qualités particulières. Ces considé-
rations ont contribué, pendant des siècles, à enfermer les
femmes dans leur rôle traditionnel, cantonné à la sphère privée.
J’ai l’impression, comme elle, que cette idéologie revient en force
dans un monde bouleversé par la révolution féministe du XXe siè-
cle, c’est parfois réconfortant de se couler dans les schémas an-
ciens...»
Dominique Meda, sociologue du travail, elle aussi «partage
l’idée que, depuis une dizaine d’années, l’on assiste à une offen-
sive qui défend la répartition traditionnelle des rôles féminin-
masculin. Ces discours, qui émanent souvent de pédopsychiatres,
de psychologues ou tout simplement d’auteurs masculins, sont
sans doute une façon de résister aux avancées du féminisme, qui
ont été réelles jusqu’à la fin des années 1980. Ils redoutent la fin
de l’autorité, la confusion des rôles père-mère et l’indifférencia-
tion hommes-femmes. Ces discours très normés sur le rôle lll
Allaiter : une injonction naturaliste et anti-féministe ?
7 LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010
Débat
lll des mères ont contribué à peser sur le travail des femmes et
à culpabiliser les mères. Car la maternité contribue indiscutable-
ment à peser sur l’emploi des femmes : lorsqu’ils sont seuls et
sans enfants, les hommes et les femmes ont les mêmes taux
d‘emploi, alors qu’il y a plus de 20% d’écart lorsqu’ils deviennent
parents ! Qu’elles le veuillent ou non, l’arrivée d’un enfant han-
dicape donc lourdement les femmes sur le marché du travail et
elles seules. (…) et encore plus les femmes fragilisées des milieux
modestes qui optent souvent pour un congé parental : le faible
montant de l’allocation peut concurrencer les bas salaires des
smicardes ou le travail à temps partiel mal rémunéré, surtout
dans des conditions de travail difficiles avec de plus en plus d’ho-
raires atypiques. Après une absence de trois ans, ces femmes peu
diplômées ont énormément de mal à revenir sur le marché du
travail.»
La maternité sans l’aliénation?Les femmes qui souhaitent allaiter sont-elles forcément mani-
pulées ? Ce n’est pas le point de vue de Clémentine Autain : «On
peut être féministe et allaiter. La maternité n’est pas forcément
synonyme d’aliénation. Si elle repose sur un libre choix, la ma-
ternité peut être un véritable épanouissement. Le seul pari per-
tinent et durable, c’est la recherche conjointe de la liberté des
mères - et plus généralement des parents - et du bien-être de
l’enfant. Mais pour cela, il faudrait construire un véritable service
public de la petite enfance - seul un enfant sur dix est accueilli
en crèche - combattre les stéréotypes et encourager un partage
des tâches parentales.» Avis partagé et complété par Dominique
Meda : «Il serait sans doute bénéfique de réfléchir à une organi-
sation des temps de vie qui laisse à tous - aux hommes comme
aux femmes - la possibilité de s’occuper de leurs enfants. Il fau-
drait donc repenser l’articulation famille-emploi, afin que le
temps familial cesse de peser uniquement sur l’emploi des mères,
et de répartir différemment la prise en charge de l’enfant entre
les pères, les mères et des modes de garde de qualité. Les
femmes assument aujourd’hui 80% des tâches parentales et do-
mestiques, un déséquilibre qui n’a quasiment pas bougé depuis
vingt ans»
L’ouvrage d’Elisabeth Badinter a suscité de très nombreuses
réactions sur internet. En voici deux particulièrement intéres-
santes.
La première, signée Simone Tourné, mère et militante féministe
à l’association Femmes solidaires: «Elisabeth Badinter se veut fé-
ministe ; moi aussi. Elle se veut femme libérée ; moi aussi. Elle
revendique un meilleur partage des tâches ménagères dans le
foyer ; moi aussi. Mais là où je dis halte, c’est quand elle s’en
prend à l’allaitement maternel, quand elle prône les petits pots
contre les repas maisons etc, etc…. Mme Badinter, avez-vous al-
laité vos enfants ? Moi, oui. Et je ne me suis jamais sentie mena-
cée dans ma féminité, au contraire. Savez-vous Madame, le
plaisir physique que l’on peut avoir en allaitant ; équivalent à
celui du plaisir avec son compagnon ? Et ça, malheureusement,
c’est un argument souvent passé sous silence quand on allaite
car trop connoté sexuellement.(…) Mme Badinter avez-vous pré-
paré vous même des petites soupes pour vos enfants ? Moi,
oui ! Et à aucun moment, je ne me suis sentie femme-esclave ou
femme-bobonne. Il suffit de faire les actes que l’on veut quand
on veut. (…) Mais que savez-vous des milliers de femmes qui tra-
vaillent pour un salaire de misère, qui doivent subvenir à lll
Le débat ne date pas d'hier !
André Léo, de son vrai nom Léodile Béra (1824-1900),journaliste et militante socialiste, a beaucoup écrit surles droits des femmes et des travailleurs. Elle a publiéson premier roman Un mariage scandaleux en 1862.Dans son traité en six parties, La Femme et les mœurs(1869), la quatrième est dédiée à la maternité. Elle y dé-nonce l'alibi de la maternité utilisé pour éloigner lesmères du marché du travail. Extraits :
"Pensons-y bien : ce serait à cause de l'importance de lasainteté de la fonction maternelle que la femme devraitêtre privée d'une large culture intellectuelle ? de cette di-gnité qui résulte de la possession de soi ? de la responsabi-lité de ses actes, qui seule constitue la moralité ? C'est àcause de la maternité que lui seraient interdites les fortesétudes ? ainsi que les grands bénéfices du travail sérieux ?La femme serait d'autant plus mère, c'est-à-dire d'autantplus propre à élever ses enfants, à développer leur âme, àpréserver leur santé, qu'elle prendrait moins de part etd'intérêt à la vie sociale ! qu'elle serait plus ignorante, plusatténuée comme personne morale et intellectuelle ! La grande fonction du renouvellement de l'humanité, se-rait le mieux remplie par un être privé de son développe-ment normal, et atrophié dans une part de sa vie, la plusimportante ? (…)La vie normale de chaque être est de soixante à soixantedix ans. Doit-elle être sacrifiée toute entière à cet espacede dix ou de quinze années ? (…)Enfin, s'il est reconnu en démocratie que droit et devoirs'impliquent et sont les deux faces du même fait moral,qu'on cesse de faire du devoir le plus étendu et le plussacré, un titre d'esclavage. Qu'on cesse d'élever les devoirsde la femme contre ses droits. »Ça vous rappelle quelque chose ?
De
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de
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ai-la
n.fr
LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010 8
lll la nourriture, à l’éducation de leurs en-
fants, au logement, et au calcul de fin de
mois difficiles ? Avez-vous seulement idée de
savoir comment elles se débrouillent ?
Croyez- vous qu’elles ont la possibilité de ré-
fléchir à une certaine culpabilité ou pas de
donner le sein ? Elles font ce qu’elles peu-
vent avec les moyens qu’elles ont. (…) Alors,
votre féminisme n’est pas le mien. Le mien,
c’est : une loi-cadre contre toutes les formes
de violences faites aux femmes ; de la pros-
titution au harcèlement moral et sexuel, de
l’accès à la santé pour toutes avec une véri-
table politique de prévention, d’une égalité
professionnelle et salariale entre femmes et
hommes, dans une véritable société laïque.
Voilà, pour moi, les vrais enjeux d’une so-
ciété qui tendrait vers l’égalité. Ensuite, don-
ner le sein ou pas, des soupes ou des petits
pots, des couches jetables ou des couches à
laver, c’est un choix personnel.»
choisir en conscienceLa seconde, d’une anonyme : «Je suis mère
de quatre enfants, et je les ai allaités par
choix. Il se trouve que cela me correspon-
dait, et cela ne fait pas de moi une mère par-
faite, loin de là. Je pousse aujourd’hui mes
collègues enceintes à faire... ce qu’elles veu-
lent. On assume mieux ses choix, que ceux
des autres, et le fait d’être une bonne mère
ne dépend pas du sein ou du biberon. Je
crois fermement qu’une mère mieux dans sa
peau vaut mieux pour le bébé qu’une mère
qu’on pousse dans une voie qu’elle n’a pas
toujours envie de suivre... et je reconnais
qu’aujourd’hui, beaucoup de gens poussent
les futures mères à allaiter. (…) Je crois qu’il
faut que chacune choisisse en connaissance
de cause : on peut rester à la maison, à s’oc-
cuper de ses enfants, mais cela implique un
certain nombre de contraintes dont il faut
absolument être consciente, parce qu’hélas
ce sont des contraintes que les femmes ris-
quent de payer cher si les choses tournent
mal dans le couple... Mais au moment où on
fait un enfant, on n’a pas envie de penser
que les choses peuvent mal finir. Alors que
choisir de travailler, de continuer à travailler,
même et surtout lorsque le travail n’est pas
épanouissant, et pas très bien payé... Là, les
contraintes sont visibles immédiatement, et
c’est au contraire les bénéfices de la situa-
tion qui semblent lointains. Alors, à chacune
de réfléchir, et d’assumer son propre choix.
Mais oui, il me semble important, dans une
société où, globalement, les hommes répon-
dent si facilement que maintenant les
femmes sont les égales des hommes, et ont
les même droits... il me semble important
que des voix s’élèvent pour rappeler cer-
taines vérités, certains risques. Non pas pour
obliger tout le monde à suivre la même voie,
mais bien pour éclairer nos choix... Vive la
tolérance!» n
Françoise Michel
Le conflit. La femme et la mère, Flammarion
(2010), 270 p., 18€
Sources : Newsletter du Planning n°190 - 192 -
194 - Extraits des articles de Charlotte Rotman
dans Vous du 10/02/2010 ; d’Anne Chemin dans
Le Monde du 18/02/2010 ; de Marie-Joelle Guil-
laume dans Famille Chrétienne du 27/02/2010.
Débat
Petites annonces...
uHomme, bonne situation,cherche femme commode pourmeubler sa solitude.
uHomme sans problèmecherche femme même profil.
uHomme chauve cherchefemme rasée.
uHomme cherche femme pastrop intelligente, mais pas tropbête non plus, enfin comme ilfaut quoi, sachant tout faire,pour vie commune.
uHomme petit, moche et gros,cherche femme élégante,grande, jeune et surtout trèsbelle. Femmes vénales s'abste-nir.
uHomme divorcé, ayant faitson deuil, cherche celle qui luifera oublier sa premièrefemme.
uMacho cherche blondasse.Pétasses s'abstenir.
uJeune quinqua, encore trèsséduisant, épicurien, libertin,recherche jolie jeune femmecoquette, coquine, féminine ettrès sensuelle pour aller boireun café.
uHomme riche et insatiablecherche femmes vénales. An-nonce sérieuse.
Humour et textes de Béatrice
et Sophie Cascales
Elisabeth Badinter a déclenché une vive polé-mique avec son dernier essai.
Une question sur
la contraception ?
l’I.V.G ?
Appelez le 04.67.99.33.33
Permanence téléphonique régionale d’information sur la contraception et l’IVG, du lundi au vendredi.
Droits fondamentaux
9 LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010
L’IGAS en phase avec le Planning
L’Inspection générale des affaires sociales a remis en février un rapport sur la pré-
vention des grossesses non désirées : ses constats et ses préconisations rejoignent
ceux du Planning.
REMIS A LA MINISTRE DE LA SANTE, Roselyne Bachelot, en fé-
vrier, le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales
(IGAS), sur la mise en oeuvre de la loi du 4 juillet 2001, fait plu-
sieurs constats qui rejoignent les problématiques posées par le
Planning depuis des années. Il souligne ainsi le paradoxe de la
France qui affiche une couverture contraceptive forte (95% des
femmes ayant une activité sexuelle et ne souhaitant pas avoir
d’enfants ont recours à la contraception dont 60% à la pilule et
23% au stérilet) et une efficacité contraceptive réelle très en-
deça de ce que l’on pourrait en attendre. Conséquence ? Une
grossesse sur trois est encore qualifiée «d’imprévue» et donne
lieu, dans 60% des cas, à une interruption volontaire de gros-
sesse (I.V.G). Dans un contexte de diffusion massive des mé-
thodes de contraception médicalisées (pilule, stérilet), pourtant
bien plus efficaces que les méthodes dites «naturelles», le re-
cours à l’I.V.G reste relativement stable. Ces nombreux échecs
contraceptifs peuvent s’expliquer par des difficultés d’obser-
vance (prise régulière et sans oubli de la pilule) et par le manque
d’informations des femmes quant aux différents modes de
contraception, qui les empêche de choisir celle qui leur convien-
drait le mieux.
Convaincus que «les questions relatives à la santé sexuelle et re-
productive constituent un enjeu essentiel de santé publique»,
les rapporteurs déplorent que l’approche préventive revendi-
quée par les pouvoirs publics ne soit pas appliquée dans les faits.
dans les établissements scolaires ne sont que partiellement et
inégalement appliquées.»
Un certain nombre de préconisations sont proposées parmi les-
quelles la nécessité de corriger l’inadéquation des méthodes
contraceptives à leur mise en pratique, en privilégiant l’informa-
tion et l’implication des utilisateurs(trices). « Les études réalisées
sur le sujet montrent que plus les femmes sont impliquées dans
le choix de leur méthode de contraception, plus elles sont satis-
faites et moins elles connaissent d’échecs. Mais la prescription
contraceptive procède trop rarement d’un véritable choix en par-
tenariat entre le médecin, la patiente et le couple. »
Le rapport recommande également de développer des actions
dans les lieux extra-scolaires pour atteindre une population de
jeunes plus importantes, et de porter une attention particulière
aux jeunes en formation professionnelle et à ceux relevant de la
Protection judiciaire de la jeunesse ; ainsi qu’aux femmes en si-
tuation de précarité, confrontées à un cumul de handicaps, et
pour qui l’accès à l’information et à la contraception ne consti-
tuent pas une priorité. n
Vous pouvez télécharger l’intégralité du rapport sur le site de la Docu-
mentation française : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rap-
ports-publics/104000049/index.shtml
Convergences
Le rapport de l’IGAS confirme les constats du Planning et
appuient ses propres préconisations (in Remarques et pro-
positions du Planning familial à propos du rapport de l’IGAS)
m remboursment de l’ensemble des moyens de contracep-
tion prescrits et mise à disposition gratuite des préservatifs
dans les endroits stratégiques ;
m développement d’une réflexion sur la place de l’Educa-
tion Nationale et sur les partenariats ;
m développement de la formation des sages-femmes, mé-
decins, pharmaciens et des professionnels du social ;
m répondre aux difficultés rencontrées pour faire financer
les interventions en milieu scolaire.
Le counseling, qui reconnaît les personnes comme expertes
de leur propre vie, peut aider à «éclairer» les choix en pré-
sentant les différentes options possibles en matière de
contraception.
LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010 10
Santé/Contraception
La stérilisation comme contraception
La stérilisation est reconnue comme contraception depuis quel-
ques années. Pourtant peu de femmes osent en faire la demande.
Remboursées !
Varnoline, pilule de troisièmegénération, et Leeloo, pilule dedeuxième génération, sont dés-ormais remboursées par l’assu-rance maladie. Elles coûtentrespectivement 7,28 € et 5,98 €la boîte de trois plaquettes (soittrois mois de contraception). Lecombat pour que toutes les pi-lules soient remboursées conti-nue.
Norlevo bat Ellaone
La nouvelle pilule du lendemainEllaone (30mg d’ulipristal)coûte 30,70 € (prix conseillé) etn’est délivrée que sur ordon-nance. Sa promesse ? Une effi-cacité jusqu’à cinq jours aprèsle rapport à risque. La revuePrescrire (seule publication mé-dicale indépendante des labora-toires pharmaceutiques) acomparé son efficacité avec leNorlevo (1,5 mg de lévonorges-trel), délivré sans ordonnanceet gratuitement aux mineures,et remboursé par l’Assurancemaladie. Le verdict est limpide :« Pour la contraception postcoï-tale, jusqu’à cinq jours après unacte sexuel non protégé, il n’estpas démontré que l’ulipristal soitplus efficace que le lévonorges-trel. Le profil d’effets indésira-bles n’est pas apparu plusfavorable. Mieux vaut en retserau lévonorgestrel, mieuxéprouvé. »Ellaone, un peu rapidement dé-signée comme « la pilule du sur-lendemain », serait donc surtoutun joli coup commercial.Lire le numéro 314 de La revue Pres-
crire (décembre 2009).
ANS LE QUOTIDIEN DE TRAVAIL d’accom-
pagnement médical et psychologique des
femmes enceintes, en consultation en cen-
tre de planification et d’éducation familiale,
ou lors des visites à domicile, est abordée
la contraception du post-partum. On sait le
nombre important de grossesses non dési-
rées qui surviennent dès le retour de
couches.
Le temps de la grossesse est un temps fa-
vorable pour y réfléchir, en discuter, infor-
mer sur les différents moyens de
contraception, parmi lesquels la stérilisa-
tion à visée contraceptive.
Les patientes osent peu en parler sponta-
nément ; mais quand on énonce la possibi-
lité, il n’est pas rare d’entendre « j’y pensais
depuis longtemps… ». Pour nombre de
femmes, il est difficile d’exprimer cette de-
mande de « ne plus vouloir d’enfants » à un
professionnel de la périnatalité. Il y a une
auto-censure de la femme qui n’ose affir-
mer qu’elle ne veut plus être mère après
cet enfant-là. Afficher un désir d’enfant est
beaucoup plus facile dans notre société
que de dire un non-désir d’enfant. D’autant
que les médecins sont souvent réticents,
arguant du caractère irréversible de l’inter-
vention.
L’information sur la stérilisation, encore
couramment appelée « ligature des
trompes », concerne le cadre légal et l’acte
chirurgical lui-même.
un acquis récentLa loi du 4 juillet 2001 (article 26 – L 2123
du code de la santé publique) indique que
la ligature des trompes ou des canaux dé-
férents ne peut être pratiquée sur une per-
sonne mineure (l’article 27 précise le cadre
juridique pour les personnes sous tutelle
ou sous curatelle).
L’acte chirurgical est précédé de deux
consultations médicales : lors du premier
rendez-vous avec l’obstétricien ou le chirur-
gien, celui-ci informe des risques médicaux
et des conséquences de l’intervention et
remet le livret d’information. Une attesta-
tion de consultation préalable doit être
remplie et signée par le patiente, puis re-
mise au médecin.
La deuxième consultation médicale est pré-
vue après un délai de réflexion de quatre
mois, avec une confirmation écrite de sa
demande de « consentement à la réalisa-
tion d’une stérilisation à visée contracep-
tive».
L’acte chirurgical est réalisé en ambulatoire,
par la technique ESSURE, par hystéroscopie
(en passant par les voies naturelles) sans
incision donc, et sans anesthésie générale.
Il réalise une occlusion progressive des
trompes grâce à un micro-implant inséré
dans chacune des trompes de Fallope.
L’obstruction ne sera définitive que trois
mois après la pose, d’où la nécessité d’un
autre moyen de contraception pendant
cette période. Un contrôle radiographique
est nécessaire à trois mois pour vérifier la
position des implants.
Le 31 octobre 2007, la Haute autorité de
santé a reconnu ESSURE comme méthode
de stérilisation permanente « présentant
un intérêt en santé publique dans la pré-
vention des grossesses non désirées » et
pouvant être proposée comme technique
de stérilisation en première intention pour
les femmes autour de ou après quarante
ans.
Rappelons qu’avant la loi de juillet 2001, la
stérilisation féminine n’était possible en
France que pour raison médicale, quand
une nouvelle grossesse mettait en péril la
vie de la femme.
Comme pour la réalisation des IVG, il existe
une clause de conscience : « un médecin
n’est jamais tenu de pratiquer un acte à
visée contraceptive mais il doit informer
l’intéressée de son refus dès la première
consultation. »
La stérilisation à visée contraceptive est un
droit d’acquisition récente : ne devrions-
nous pas le faire mieux connaître et recen-
ser les chirurgiens qui la pratiquent dans
notre région afin d’en informer les femmes
désireuses de mettre un terme à leur vie
procréative ? nMarie-Jo Maguer
(sage-femme en PMI)
11 LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010
Culture
Une journaliste auprès de ceux qui vivent la crise
POUR ECRIRE LE QUAI DE OUISTREHAM,
Florence Aubenas s’est mise en disponibi-
lité en 2009, a quitté Paris pour s’implan-
ter durant six mois – incognito - à Caen et
rechercher un emploi de femme de mé-
nage. Elle a conservé son nom, ses pa-
piers, tiré ses cheveux en arrière après les
avoir teint en blond et pris l’habitude de
garder ses lunettes. L’expérience a fonc-
tionné : à deux exceptions près, personne
n’a reconnu la journaliste dont le portrait
s’affichait sur les murs de l’hôtel de ville
de Paris quatre ans plus tôt, à l’époque où
elle était détenue comme otage en Irak.
De cette expérience de la précarité (pé-
riodes d’essai, CDD à temps partiel), elle
a rapporté un reportage intègre et précis,
documenté, et surtout vécu. Au bout d’un
mois et demi, la voilà employée à bord
d’un ferry pour l’Angleterre, à Ouistre-
ham, à récurer les cabines et les toilettes.
Une heure par jour, de 21h30 à 22h30.
Viendront s’ajouter d’autres boulots,
quand ce ne seront pas quelques heures
attribuées au dernier moment. Au total,
elle ne gagnera jamais plus de 700 € par
mois, dans un monde où une prime de li-
cenciement de 200 € fait figure de para-
chute doré et un CDI de 5h30 à 8 heures
du matin, de passeport pour le paradis.
On ressent son angoisse de ne pas décro-
cher ce CDI, sa grande fatigue et les dou-
leurs dans les mains et les articulation à
force de frotter. Elle raconte sa sympathie
et son inquiétude pour ses collègues, qui
cumulent souvent les difficultés. Elle a
partagé leur quotidien instable, mais aussi
des moments de solidarité et de bonheur.
Il y a celles et ceux qui lâchent prise et
perdent pied dans la dépression. La vul-
nérabilité oblige à subir en silence. Etre in-
visible et sans reconnaissance dans son
travail est difficile à vivre, ne pas « tenir le
rythme » est souvent une humiliation. On
devrait renvoyer à cette lecture tous ceux
qui disent « quand on veut, on peut ». La
grande force de Florence Aubenas est de
nous faire ressentir qu’elle est démunie.
Ses capacités d’analyse et de compréhen-
sion ne l’aident pas dans la course aux pe-
tits contrats : seule, peut-être, la certi-
tude de revenir à une vie normale après
l’expérience peut la soutenir. Pourtant, on
la sent suffisamment touchée par le sort
de ses compagnes et atteinte dans sa di-
gnité.
La galère des travailleuses pauvresFlorence Aubenas ne se sera rien épar-
gné : du parcours de la combattante au
pôle emploi (faire un bon CV pour « se
vendre ») au stage « propreté » pour ap-
prendre à travailler vite et ne pas être ra-
diée du pôle emploi, en passant par
l’agence d’intérim qui la renvoie en lui di-
sant « vous êtes plutôt dans le fond de la
casserole, madame», elle est prise en
main par une conseillère de cabinet privé
qui tente de « caser » les clients de pôle
emploi.
Comme toutes ses compagnes de re-
cherche, elle court après les petits
contrats, découvre la solidarité, les em-
plois du temps impossibles des mères de
famille (sans véhicule, sans modes d’ac-
cueil). Souvent, on perd deux heures de
déplacement pour une heure de travail,
on se nourrit mal, on est épuisé physique-
ment et nerveusement car on doit faire le
nombre de cabines, de bungalows, de bu-
reaux prévus au contrat. Le temps partiel
est un bon calcul pour l’employeur et le
client car, au-delà de quatre ou six heures,
les salariées sont épuisées et il n’y a plus
le même rendement.
Florence Aubenas constate aussi que les
femmes sont toujours dans les situations
les plus difficiles : les corvées de chiottes
du ferry sont épargnées aux hommes,
même au syndicat on propose à une
femme de ménage de « passer le
balai dans les locaux » car pour représen-
ter les précaires « il faut un intellectuel.
On ne peut tout de même pas envoyer une
caissière ou une femme de ménage aux
réunions ».
Trois chiffres déterminent aujourd’hui le
sexe de la pauvreté laborieuse en France :
80 % des salariés gagnant moins que le
smic sont des femmes ; 80 % des temps
partiels sont des femmes et 80 % des smi-
cards sont des femmes.
Contrairement à d’autres pays européens,
l’histoire du travail féminin en France ne
s’est pourtant pas construite autour du
temps partiel : c’est à temps plein que les
femmes ont afflué sur le marché de l’em-
ploi salarié dans les années 1960. Le tra-
vail à temps partiel n’a fait irruption qu’au
début des années 1980, à la faveur de la
crise, et sous l’incitation des politiques
publiques. Il a fini par s’installer jusqu’à
devenir un mode de gestion des entre-
prises, même quand les aides ont été sup-
primées dans les années 2000.
« Aujourd’hui, ce sont massivement les
femmes qui travaillent moins pour gagner
moins » constate Margaret Maruani, so-
ciologue et directrice de recherche au
CNRS. n
Marie-Christine Vion-Leclerc
Le quai de Ouistreham, Editions de l’Olivier,274 p., 19 €
Sources : Le nouvel Observateur n° 2362 etTélérama n°3136
Avec Le Quai de Ouistreham, Florence Aubenas fait une plongée dans la crise et nous y entraîne
au fil d’un récit humain et bouleversant.
Florence Aubenas s’est glissée dans la peau
d’une travailleuse précaire pendant six mois
12 LA PUCE à L’OREILLE n 2ème trimestre 2010
LA PUCE à L’OREILLE
est une revue éditée par
l’association départementale du
M.F.P.F de l’Hérault.
Directrice de publication
Fatima Bellaredj
Comité de rédactionMarion Danton, Marianne Loupiac,