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La période romaine dans les Alpes· occidentales

Jan 27, 2023

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La période romaine dans les Alpes · occidentales

Un bilan des recherches~

PHILIPPE LEVEAU2

Introduction Comparée à celle dont sont l'objet les Alpes centrales et orientales, la recher­

che sur la période romaine dans les Alpes occidentales souffre d'un problème de visibilité due au morcellement du massif. Dans leur partie française, les Alpes ne correspondent pas seulement aux quatre provinces qui portent ce nom, les Alpes Maritimes, Cottiennes, Graies (Tarentaise) et Pennines (Valais). Elles s'étendent sur le territoire des cités de la Gaule Narbonnaise auxquelles confinent ces pro­vinces : les deux plus importants sont les Allobroges de Vienne et les Voconces de Vaison-la-Romaine et de Die. De ce fait, les bilans bibliographiques qui adop­tent le cadre des provinces romaines ne traduisent pas l'importance des travaux effectués. Ainsi, dans la chronique gallo-romaine que nous publions dans la Revue des Études anciennes, B. Rémy et moi-même (2002) avons recensé soixante-six articles et ouvrages portant sur les quatre provinces romaines et trois cent quatre­vingt-cinq sur la Gaule Narbonnaise, ce qui donne un rapport de un à six. Après correction et compte tenu du caractère non alpin de Vienne et de ses environs, le rapport tombe de un à quatre, ce qui témoigne d'un relatif délaissement de l'activité de recherche sur la période romaine dans la partie occidentale de l'arc alpin, au moins sur le plan archéologique.

Les deux dernières études d'ensemble dont on dispose remontent aux années 1970. La première est le travail de géographie historique de G. Barruol (1975). li portait sur la période protohistorique précédant immédiatement celle qui nous intéresse ici. Mais la méthode régressive qu'il utilise le conduit à utiliser de maniè­re systématiques les sources écrites antiques. On lui doit également des aperçus historiographique sur la recherche archéologique dans les Alpes du Sud (Barruol, 1998). La seconde étude générale est une histoire des régions alpestres sous le Haut Empire due à J. Prieur (1976), auteur par ailleurs de nombreux travaux sur les Alpes du Nord dans l'Antiquité. Mais, du côté suisse, il faudra la compléter par la synthèse réalisée par W Drack et R. Fellmann (1988) . On le voit donc: la

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coupure entre Alpes du Sud et Alpes du Nord est une réalité historiographique. En 1986, l'Association française pour l'étude de l'âge du Fer ne faisait pas une constatation différente lorsqu'elle décidait de consacrer ses travaux à cette période dans les Alpes (Duval, 1991) !

1. Les outils de la recherche Notre connaissance de la partie occidentale des Alpes à l'époque romaine s'ap­

puie sur des outils parmi lesquels on comptera en premier lieu un certain nombre d'inventaires et de recueils dont l'élaboration a débuté au XJXe siècle. En principe, ils adoptent le cadre géographique des provinces et des cités de l'Empire romain à son apogée, ce qui, nous venons de le voir, a pour conséquence de découper cet espace en trois ensembles :les cités de la partie orientale de la Gaule Narbonnaise, les provinces alpines et une bande occidentale des deux régions italiennes, la JXe et la x:re. Ce cadre n'a pas été suivi par les recueils des trois états nationaux, qui privilégient la continuité historique, la France qui en contrôle la plus large partie, mais aussi, bien entendu, la Suisse et l'Italie. La province de Gaule Narbonnaise, qui est pour l'essentiel en France, correspond à une partie du territoire suisse, de sorte que dans ce pays se trouve la totalité des Alpes Pennines, tandis que les deux cités de Nrwiodunum (Nyons) et d~venticum (Avenche) ainsi que le peuple des Helvètes sont en Germanie Supérieure. Les trois autres provinces alpines sont à cheval sur la frontière franco-italienne. Les JXe et x:re Régions de l'Italie Augustéenne (ancienne Gaule Cisalpine), dont relèvent en particulier les Salasses et la colonie romaine d'Aoste, correspondent aux vallées alpines italiennes. La frontière entre celles-ci et les trois provinces alpines suivait en gros le pied du massif. Durant l'époque romaine proprement dite, la logique spatiale qui l'em­porte est celle du passage ; les provinces s'étendent sur les deux versant des cols. A la fm de l'Antiquité, une autre logique, celle de la défense de l'Italie l'emporte. Elle entraîne le regroupement des cités du versant italien en une seule province, les Alpes Cottiennes, dont le territoire n'inclut plus qu'une partie de l'ancienne province qui autrefois portait ce nom.

Les sources littéraires qui concernent l'histoire des Alpes dans l'Antiquité viennent de faire l'objet d'un excellent recueil dont la réalisation a été dirigée par M. Tarpin (Tarpin et al., 2000) et la publication assurée par la Société valdotaine de préhistoire et d'archéologie. Rassemblant les textes grecs et latins (avec tra­duction) susceptibles d'être rattachés à un fait historique pour la période allant du début de l'âge du Fer (ca 600 av. J.-C.) à 410 ap. J.-C., ce recueil renouvelle l'inventaire des sources de l'histoire de la Gaule jusqu'au milieu du V siècle de P.-M. Duval (1971), sans pourtant dispenser d'y recourir si l'on cherche des précisions sur les auteurs antiques.

Les sources épigraphiques avaient fait l'objet des volumes du Corpus des Inscriptions latines. Le tome V (Mommsen, 1872-1877) réunissait les inscrip-

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rions des Alpes Maritimes, du versant italien des Alpes Cottiennes et le col du Grand-Saint-Bernard; le tome XII (Hirschfeld, 1888), celles du versant français des Alpes Cottiennes, des Alpes Graies et Pennines et celles des cités de la partie orientale de Gaule Narbonnaise. Ces recueils ont été complétés au XX:e siècle. Mais, le cadre géographique choisi a été celui des états modernes. Du côté français, E. Espérandieu (1929) a d'abord publié un complément au CIL XII. Puis, plus récemment, le CNRS a lancé la collection des inscriptions latines de Narbonnaise. Aucun des volumes parus ne porte de manière spécifique sur les Alpes, mais tous concernent des peuples dont le territoire est complètement alpin ou pré-alpin comme Riez et Digne (Chastagnol, 1992) ou partiellement alpin comme Fréjus (Gascou, Janon, 1985) et Apt (Gascou et al., 1997). Dans la même collection, B. Rémy a pris en charge la réfection du corpus des cités correspondant au terri­toire (presque totalement alpin) des Allobroges (cité de Vienne) ; deux volumes doivent paraître en 2003 et le troisième (les inscriptions de Genève) en 2004. En collaboration avec J.-P. Jospin, il vient de consacrer un volume aux inscriptions de Grenoble (Rémy, 2002). Le même a publié avec Fr. Bertrand y les Inscriptions des Alpes Graies (Rémy, 1998). Les recueils des inscriptions des autres provinces alpi­nes sont en préparation. Le volume réunissant celle des Alpes Cottiennes devrait paraître bientôt. En attendant, on pourra se reporter à l'inventaire réalisé par S. Cibu (1999). Du côté italien, le volume des inscriptions d'Aoste de Barocelli a été revu par A.-M. Cavallaro et G. Walser (1988). Les recueils épigraphiques suisses ont fait l'objet de révision par G. Walser (1979-1980).

Les autres sources qui ont fait l'objet de recueils spécifiques adoptant le cadre provincial romain sont les mosaïques et la statuaire. La série du Recueil général des mosaïques de la Gaule a été complétée par H. Lavagne (2000) qui vient de publier le volume des notices concernant le sud-est de la Narbonnaise, soit les Allobroges, Voconces, les cités de Digne, Riez et Fréjus. Le chiffre de six cent trente-trois correspond à l'ensemble des pavements signalés, seule une cinquan­taine de mosaïques sont assez bien conservées. E. Espérandieu (1907-1966) avait réalisé un Recueil général des bas-reliefi) statues et bustes de la Gaule romaine classés par provinces et par cités. Ce recueil est en cours de réfection sous la direction de H. Lavagne. B. Rémy et S. Cibu préparent dans ce cadre un volume sur les Allobroges et les provinces alpestres.

Il existe une numismatique spécifique des différents peuples de la Gaule avant la conquête, car ces derniers battaient monnaie. Les monnayages allobroges ont fait l'objet de la thèse récente de Y. Van der Wielen (1999), qui, se fondant sur un très large catalogue, leur attribue les monnaies à la légende « nord-italique », les monnaies «au cervidé », les monnaies dites « au cheval libre galopant», «à l'hippocampe »et« au cavalier ». Pour la période romaine, il en va différemment, car l'Empire dispose d'un monnayage unique. Compte tenu du petit nombre des ateliers de frappe, l'un des intérêts des études numismatiques est d'apporter de précieux renseignements sur la diffusion des espèces. On distingue deux types

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de monnaies : les monnaies provenant de trésors et les monnaies de fouilles. Les trésors font l'objet d'un recueil dont celui qui porte sur les quatre départements de la Drôme, de l'Isère, de la Savoie et de la Haute Savoie a été publié par X. Loriot et B. Rémy (1988). Depuis, il s'est enrichi de publications dans la revue Trésors nwnétaires qui a consacré son tome 16 ( 1997) à une série de trésors dont le dépôt valentinien du «Charles-Albert» à Annecy (Amandry, Serralongue, 1997), le dépôt de Seyssel (Audra, 1997), le trésor de Brézins (Bompaire, Bollard, 1997), le trésor de bronzes romains de Plaisians (Amandry, Bollard, 1997) et, dans d'autres revues, ceux de Pellafol (Rémy, Brunet 1996), de Chindrieux (Brunet, 1996-1997) et de Saint-Vincent -de-Mercuze (Estiot et al., 2001). Les monnaies de fouilles sont moins étudiées. Pourtant M. Amandry et Rémy (1995-1996) ont étudié les monnaies de fouilles du sanctuaire de Viuz-Faverges et des monnaies de prospections recueillies dans le Trièves. Avec ses étudiants, B. Rémy a entrepris de publier la collection de monnaies impériales de la Bibliothèque municipale d'étude et d'information de Grenoble et donne une chronique de numismatique antique des pays de Savoie dans la revue des Études savoisiennes.

L'Institut (Académie des Inscriptions et Belles-Lettres) a développé un outil qui s'appuie sur le cadre administratif français, la Carte Archéologique de la Gaule, dont le responsable est M. Provost . La partie occidentale des Alpes est la région qui bénéficie du traitement le plus complet. Les volumes ne se contentent pas de recenser les publications archéologiques existantes. Ils con­tiennent de nombreuses données inédites ou imparfaitement signalées dans les Bilans Scientifiques publiés par les Services Archéologiques de Rhône-Alpes et de PACA. Des notices communales ont été confiées à des archéologues qui y donnent des synthèses sur des opérations archéologiques inédites ou sur des sites importants. Largement illustrés (cartes, dessins, photos), pourvus de bibliogra­phies quasi exhaustives, d'indices, ces volumes constituent des sources fiables, à quelques exceptions près. On y trouvera des synthèses sur l'état de l'archéologie régionale et l'apport des recherches récentes à la connaissance de telle ou telle période. La Carte archéologique des Alpes-de-Haute-Provence (Bérard, 1997) comble d'importantes lacunes dans les publications archéologiques des années antérieures sur une région qui était mal connue. D'importantes notices ont été rédigées par G. Barruol. En revanche, pour les Hautes-Alpes (Ganet, 1995), les dépouillements ont été partiels du fait de la dispersion des archives concernant le département entre Grenoble et Marseille. Les volumes consacrés à l'Isère (Michel, 1994), à la Savoie (Rémy et al., 1996) et à la Haute-Savoie (Bertrandy et al., 1999) apportent un bilan beaucoup plus complet des connaissances actuel­les. Ces volumes fournissent des notices sur les agglomérations urbaines (Aime, Aix-les-Bains, Albens, Châteauneuf... ) dont certaines étaient très mal connues (Seyssel, Thonon, Thyez ... ). On y trouvera en particulier le texte et la traduction des inscriptions latines. Le département du Var comporte une partie préalpine. L'inventaire archéologique des communes concernées est traité dans les deux

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volumes réalisés par J.-P. Brun (1999).

Les informations archéologiques peuvent être complétées par la consultation de chroniques archéologiques annuelles. Pour le canton suisse de Genève, on dispose de celle de la revue Genava réalisée par Ch. Bonnet, puis par J. Terrier. Pour la France, des chroniques portant sur le département de l'Isère sont publiées dans LaPierre et flÉcrit (Ch. Mazard) et, dans la Revue savoisienne, pour le dépar­tement de la Haute-Savoie (J. Serralongue et coll.). Par les catalogues auxquels elles donnent lieu, les expositions sont l'occasion de synthèses partielles. Cela a été le cas à une date récente pour le Valais (Wiblé 1998). Le musée Dauphinois a organisé une importante exposition sur les Allobroges dont le territoire est alpin pour l'essentiel (Jospin, 2002).

II. La conquête et les problèmes administratifs La géographie historique des Alpes (figure l) a été abordée de deux manières.

La première insiste sur une définition des provinces qui varie au cours du temps selon la priorité accordée par l'administration romaine au contrôle des passages ou à la défense de l'Italie. Cette variabilité était relevée par Strabon (Iv, l , l ), qui, traitant des limites de la Gaule Narbonnaise et des provinces gauloises en général, distingue des divisions naturelles et ethniques et des « divisions administratives établies par les chefs (hégemones) [qui, dit-il,] varient selon l'opportunité ». La seconde manière d'aborder la question privilégie une permanence des divisions ethniques favorisée par les contraintes topographiques. Elle a inspiré l'ouvrage de G. Barruol (1975) sur les peuples protohistoriques du sud-est de la Gaule qui demeure l'outil de base pour cette géographie historique.

2.1. Les phases de la conquête. Du royaume indigène au système provincial romain

Vues de Rome, les Alpes apparaissent comme un rempart protégeant l'Italie. On savait pourtant que les Gaulois les avaient franchies et qu'en 218 av. J.-C., Hannibal était passé par un col des Alpes occidentales. Lors de leur tentative d'invasion de l'Italie, les Cimbres et lOO Teutons ne paraissent pas avoir pensé à réitérer l'exploit d'Hannibal : ils tentent de passer par le sud. Après l'échec des Teutons, les Cimbres passent par le col du Brenner. Les franchissements ultérieurs des cols par des armées seront ceux des armées romaines qui se rendent en Gaule. À la fm du rer siècle avant notre ère, Auguste met un terme à l'indépendance des tribus alpines. Depuis l'Italie, la première vallée importante occupée est la val­lée d'Aoste : de violentes campagnes mettent fm à l'indépendance des Salasses, Augusta Praetoria est fondée (colonia Praetoria). Le roi Donnus installé à Suse avait reçu la citoyenneté romaine. Son successeur Cottius porte le titre de préfet vers 10 av. J.-C. Au nord, les opérations de Drusus et de Tibère entraînent la

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36 ~ PERMANENCES ET CHANGEMENTS DANS LES SOCIÉTÉS ALPINES

CJ CJ c=J

0 lOO km

limite de province CD Alpes Pennines >200m

(Î) limite de cité Alpes Graies

>500m Q) Alpes Cottiennes

• ville romaine @ > 1 OOOm Alpes Maritimes

Ceutrons peuples rn col du Grand Saint-Bernard

rn col du Petit Saint-Bernard

[J] col du Montgenèvre

Figure I. Les Alpes occidentales durant le Haut Empire Romain : les provinces alpines et les cités de la partie alpine

de la Gaule Narbonnaise (DAO M. Segard).

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soumission de la Vallée Pennine dans les années qui précédent 16-15 av. J.-C. Les tribus ligures passent sous l'autorité de Rome vers 14 et en 7-6 est élevé le trophée de La Turbie. Barrière autrefois censée protéger l'Italie, les Alpes étaient devenues un lieu de passage trop fréquenté par les marchands et les troupes pour que soit admissible l'existence d'un espace non contrôlé entre la Gaule désormais romaine et l'Italie unifiée. Son intégration dans l'espace romain a d'abord eu des conséquences administratives.

De cette période, qui marque une transition entre la protohistoire et l'époque romaine, datent trois documents épigraphiques fondamentaux. Le premier est l'arc de Suse (CIL V 7231) donnant la liste des peuples dépendant de Cottius ; le second est la liste des 45 peuplades dont le nom figurait sur le Trophée élevé par Auguste à La Turbie; le troisième est l'inscription des Escoyères (CIL XII 80). ~inscription de La Turbie est en fait fragmentaire ; elle est reconstituée à partir de la liste donnée par Pline (III, 136-7). Ce dossier est donné par M. Tarpin (2000, 126-130). Comme l'observent les commentateurs, l'inscription fragmentaire des Escoyères ne simplifie pas la question. Elle a donné lieu à deux commentaires récents, celui de A. Roth-Congès (1993-1994) et celui de C. Letta (2001), qui s'opposent à propos de la condition juridique du préfet.

2.2. Géographie des provinces romaines des Alpes La géographie des provinces romaines des Alpes durant le Haut Empire s'adap­

te aux voies et itinéraires qui assurent les passages entre les Gaules et l'Italie. Les routes conduisant aux cols apparaissent en effet comme l'élément structurant, ce qui ajoute à l'intérêt que présentent les recherches portant sur celles-ci et sur les cols qui y donnent accès. Les dernières manifestations scientifiques sur ce sujet ont été organisées à Chambéry (Chevallier 1971) et à Martigny (collectif 1986) .

Ainsi, après que le contrôle du Grand-Saint-Bernard (Summus Poeninus) eut été assuré et que la Vallis Pœninae eut été soumise, ce secteur fut administré avec la Rhétie et la Vindélicie. À partir de Claude, une province procuratorienne, les Alpes Pennines, est constituée autour des quatre cités du Valais fusionnées en une seule cité de droit latin, dont le chef-lieu est Octodurus, qui devient Forum Claudii Vallensium (Martigny). Au sud, en Tarentaise, le pays des Ceutrons, qui contrô­lent l'accès au Petit-Saint-Bernard, constitue la petite province des Alpes Graies, dont la capitale estAxima (Aime). Un débat a porté sur l'existence d'une autre province, celle des Alpes Atrectiennes, dont le nom figure sur des inscriptions, mais qu'aucun texte ancien et aucun toponyme moderne ne permettent de situer avec certitude. En se fondant sur une nouvelle inscription d'époque sévérienne, Fr. Bérard (1995) a démontré leur identité avec les Alpes Graies. En défmitive, comme le pensait déjà E. Desjardins, il semble qu'il s'agisse de deux dénomina­tions d'un même ensemble. Les deux provinces des Alpes Pennines et Graies ont été réunies à plusieurs reprises, peut-être à cause de leur petite taille. Leur associa-

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38 "'-'PERMANENCES ET CHANGEMENTS DANS LES SOCIÉTÉS ALPINES

rion est attestée par la titulature des gouverneurs après Septime Sévère. À l'occa­sion de la publication de deux autels dédiés par deux nouveaux gouverneurs de la province, Iulius Constitutus, proc Aug. N., et P. Acilius (ou Pacilius) Theodorus, v. p.1 praeses, Fr. Wiblé (1998) a émis l'hypothèse selon laquelle ces deux provinces équestres auraient été réunies dès leur création par Claude. Solidement construite, sa démonstration qui rassemble un faisceau d'indices convergents, n'emporte pourtant pas l'adhésion de B. Rémy (Leveau, Rémy, 2002: 525).

Au sud s'étendaient les Alpes Cottiennes qui sont constituées comme province sous Néron à la mort du roi Cottius II. Leur capitale est Segusio (Suse), dont son grand-père, le roi Donnus, avait fait la porte des Alpes pour qui, venant d'Italie, voulait pénétrer en Gaule par les cols du Mont-Genèvre et du Mont-Cenis. Une province procuratorienne, dont la définition a varié, était constituée en 69 quand Marius Maturus tente d'en organiser la défense contre les partisans d'Othon. Cemelenum en était la capitale jusqu'à la réorganisation dioclétienne. À partir de Dioclétien, un autre système est mis en place. Placées sous l'autorité du diocèse d'Italie, les Alpes Cottiennes reçoivent la partie orientale des Alpes Maritimes. Les Alpes Maritimes son augmentées de la partie occidentale des Alpes Cottiennes et Eburodunum (Embrun) accède au statut de capitale

2.2.1. Les peuples alpins de Gaule Narbonnaise Le peuple des Allobroges donne naissance à la cité latine puis romaine de

Vienne. Au IV siècle, la cité de Vienne est divisée : les cités de Cularo (Grenoble) et Geneva (Genève) acquièrent leur autonomie. Les Voconces constituent une seconde confédération qui, outre les Vocontii1 a pu compter les Vertamociri1 les Sebagini (?)>et lesAvantici (?).On leur connaît deux capitales : Vasio Vocontiorum etLucusAugusti puisDeaAugusta. Au IV siècle, la confédération se fragmente en quatre cités : Vasio Vocontiorum, Lucus Augusti, Dea Augusta et Segustero. Il faut probablement voir là la continuation d'un processus antérieur : Riez (Alebaece Reiorum), cité détachée des Voconces plutôt que des Salyens.

Mais dans ces régions dont le développement économique est faible l'urbanisa­tion est souvent difficile. Le problème rencontré par Rome est l'absence de centres urbains susceptibles de devenir des chefs-lieux de cités. De ce fait, elle procède par le système de l'attributio, consistant à rattacher à une cité constituée autour d'un chef-lieu des populations jugées inaptes à une telle organisation (Bertrand 1991). ~xemple est celui desBodiontici de Digne, cité à laquelle est confiée l'ad­ministration de peuples alpins, dont le statut est celui d'attributi. Il a été étudié en dernier lieu par A. Chastagnol ( 1992).

Ces rattachements rendent incertaine et complexe la limite entre peuples de Narbonnaise et peuples des Alpes. En effet, les Bodiontici de Digne ne sont pas les seuls peuples transférés à la Narbonnaise par Galba en 69. Il en va de même desAvantici, peuple alpin à l'origine de la cité de Gap (Vapincum). Ces questions

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ont été débattues par B. Rémy (2000), M. Tarpin (2000) et P. Arnaud (2000) à l'occasion du colloque de Martigues sur les Espaces ethniques et territoires des agglo­mérations protohistoriques de tJEurope occidentale (Garcia, Verdin, 2000).

2 .2.2. Onomastique et statut social Dans le système romain, l'intégration des royaumes et principautés des Alpes

passe par celle de leurs souverains qui entrent dans la clientèle de l'Empereur. Ce processus a sa traduction dans l'onomastique. Ainsi, Cottius devenu un fidèle d'Auguste prend le praenomen et le nomen (gentilice) de son protecteur; il s'ap­pelle désormais C. Iulius Cottius, alors que son père, le roi Donnus, portait ce seul nom. Le débat autour de l'inscription des Escoyères (cf supra) tourne en partie autour de cette question.

Compte tenu de la place de l'épigraphie dans la documentation écrite, les études d'onomastique occupent une place essentielle. Elle revêtent deux aspects. Le premier, celui auquel il vient d'être fait allusion, porte sur la nomenclature qui permet de distinguer les citoyens romains des autres. Cottius porte les tria nomina qui caractérisent le statut que lui a offert Auguste, alors que son père, tout roi qu'il fût, porte un nom unique. La documentation épigraphique dispo­nible montre que la plupart des habitants de la région (mais ce n'est pas une spé­cificité alpine !) n'avaient pas la citoyenneté romaine. Ils étaient juridiquement libres, mais étrangers au droit romain et, à ce titre, appelés « pérégrins ». Ils ne portaient donc pas les trois noms des citoyens romains, mais un seul nom précisé par une filiation. En outre, la nomenclature permet parfois de distinguer parmi les cives romani, des émigrés italiens, des soldats sortis du service ou encore des chefs indigènes et des membres de leur famille qui avaient reçu à titre personnel la citoyenneté, comme c'est le cas de Cottius. Dans un second temps, ces aristo­crates qui portent le nomen de l'empereur ou du gouverneur qui leur a accordé ce privilège finissent par prendre des cognomina totalement latins. Mais certains gardent des cognomina d'origine celtique, et parfois même se forgent un gentilice à partir d'un nom dont l'origine celtique est évidente. A. Chastagnol (l995a et b), qui s'est particulièrement intéressé à cette question, donne l'exemple d'un magistrat de Briançon qui se forge le nomen Parridius à partir de Parrio, le nom (unique) d'origine celtique de son père. G. Walser (1989) en avait signalé un autre exemple remarquable avec le cas des Vinelii, une des quatre familles sénato­riales connues dans Je Valais. Une recherche sur les caractéristiques linguistiques des cognomina ou noms uniques constitue le second volet des études onomasti­ques. Quelle que soit l'interprétation que l'on en fasse, il est important de savoir s'ils sont d'origine indigène, latine ou grecque : cette dernière caractéristique est importante, car elle permet d'identifier un statut ou une origine servile.

Cette approche a été utilisée de manière systématique par B. Rémy dans ses études sur les notables locaux et municipaux de la cité de Vienne (2000) ou des Alpes Cottiennes (Rémy, 2000) : leur latinisation est forte, mais n'empêche pas

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40 ~ PERMANENCES ET CHANGEMENTS DANS LES SOCIÉTÉS ALPINES

le maintien des noms indigènes et l'apparition de noms latins, dont la coloration locale est indéniable. Elle a été utilisée de manière plus partielle par H. Desaye (2000) pour les Voconces septentrionaux.

2.2.3. La religion

Les phénomènes religieux présentent un intérêt particulier pour saisir la spéci­ficité de groupes ethniques et évaluer leur capacité d'accueil ou de résistance à des conquérants. Archéologues et historiens ont appliqué à la documentation alpine les méthodes et problématiques utilisées dans le reste des provinces de l'Empire romain. Sources écrites, textes ou inscriptions faisant connaître des divinités et données archéologiques attestant de pratiques (monuments et dépôts votifs) sont interrogés en fonction de la problématique de la conservation et de l'innovation, de la résistance et de la romanisation. Les cultes de Mars et d'Apollon sont suscep­tibles d'illustrer cette problématique qui n'est pas propre aux Alpes. À ces dieux du panthéon romain qui peuvent être adorés en tant que tels sont accolées des divinités au nom celtique, parmi elles, Albiorix, un Mars dont le nom se retrouve dans l'ensemble du massif (Barruol, 1963), Borvo ou Bormo, un Apollon attesté dans toute la Gaule. D'autres divinités sont plus particulières à un lieu ou à un sanctuaire, à l'exemple de ce qu'illustrent les fouilles du sanctuaire d'une agglo­mération allobroge de la Combe de Savoie, Châteauneuf-les-Bossons où l'on voit associer des dieux indigènes, Lirnetus, le titulaire du sanctuaire, un Mercure gaulois, Maïa et le culte de l'Empereur et de Rome (Mermet, 1993). Dans ce fanum, soixante-dix-sept graffites attestent de nombreux cultes, parmi lesquels celui des empereurs vivants (Rémy, 1999 et 2000), sans doute le plus innovant parmi les cultes typiquement romains apparus dans les Alpes à l'époque impériale. On aurait en effet tort de leur attribuer un caractère artificiel sous prétexte qu'ils sont officiels.

Caractéristique du polythéisme, l'aptitude à accueillir et à assimiler les cultes romains sans abandonner les divinités et des pratiques antérieures explique la place reconnue à la troisième catégorie de divinités que l'on distingue habituel­lement, les divinités orientales adoptées par les Romains et introduites dans les provinces de l'Occident par ceux qui circulent, les militaires et les marchands. Ces divinités qui attestent de l'ouverture des provinces alpines aux courants de circu­lation sont présentes dans les vallées alpines. C'est ainsi le cas du culte de Mithra connu chez les Allobroges à Genève, chez les Voconces à La Batie-Montsaléon, dans la colonie romaine d'Aoste et désormais bien attesté en Suisse à Martigny où il se prolonge jusque vers la fm duN s. de notre ère (Wiblé, 1995). Mais Mithra n'est pas le seul parmi ces dieux. J. Prieur soulignait la difficulté que nous avons à cerner la personnalité de Jupiter que l'on rencontre sous sa forme romaine, sous des formes orientales ou encore associé à des divinités celtiques (Prieur et al., 1983, 276).

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Ainsi, la religion constitue une source inépuisable de réflexion sur l'ambiva­lence de phénomènes culturels complexes, qui autorisent à interpréter le même culte comme une preuve de maintien de la tradition et un témoignage de résis­tance culturelle ou d'assimilation par Rome : quand un gouverneur romain fait une offrande à un Mars indigène, est-ce la preuve d'une reconnaissance de l'irré­ductibilité de la tradition ou la preuve de sa romanisation ? Permanence indigène et résistance ne se recouvrent pas nécessairement. Les archéologues recherchent volontiers sous les sanctuaires romains les traces de lieux de cultes plus anciens, protohistoriques. En fait, une telle situation ne se vérifie pas aussi souvent qu'on l'attend et l'on se rend compte que des cultes indigènes commencent à l'époque romaine. Ce cas, qui est celui du sanctuaire de hauteur connu en Haute Provence au Lardier (Barruol, 1997) ou du site de Châteauneuf dont il vient d'être ques­tion, n'est pas exceptionnel. Le réexamen récent des fouilles effectuées au JCIXe sur le site de La-Batie-Montsaléon, dans la vallée du Buëch, a prouvé que, sur un site de création romaine, il existait là un sanctuaire d'un type analogue (Leveau et al., 2002). Il en va de même de Viuz-Faverges où l'on a fouillé un sanctuaire indigène couvrant plus de 6 500 m2. Entouré d'un mur péribole, ce sanctuaire qui relève de l'agglomération de Casuaria a été occupé du milieu du rer s. au N (Bertrandy et al., 1999: 241-244).

III. L'habitat: agglomérations et villae romaines Les tribus incitées à adopter le système politico-nùturel romain de la cité-État

ont vu leurs élites s'intégrer à l'aristocratie impériale et leurs vallées s'urbaniser. Mais, pour autant, la romanisation n'entraîna pas toujours la disparition des struc­tures tribales qui demeurèrent vivaces. I.:intégration dans les cités des attributi ne correspond souvent qu'à un simple assujettissement. Au plan archéologique, l'intérêt porté à ce phénomène explique l'attention particulière qui a été portée à l'habitat aggloméré. Sa persistance est considérée comme la preuve de la vitalité des sociétés locales.

3 .1. Les agglomérations I.:urbanisation des Alpes a été progressive. Au plan administratif, elle s'est

exprimée par la naissance de nouvelles cités nées de la division des confédérations Voconces et Allobroges. Nous avons vu qu'au rue siècle, la grande cité allobroge de Vienne se divise avec la création des cités de Grenoble et de Genève. Il en va de même des Voconces, déjà en principe divisés entre les deux capitales de Vaison et Die. Sisteron et Gap accèdent au statut de chef-lieu. Ce phénomène a été présenté comme le résultat d'une volonté de division de ces peuples par Rome (casser des ensembles politiques) . Dans une autre interprétation, « classique», il procède d'une reconnaissance d'un développement culturel et politique manifesté par un niveau d'urbanisation et traduit un processus amorcé antérieurement. Les grandes

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fédérations qui s'étaient constituées probablement aux me et ue siècles éclatent au profit d'unités dont l'existence était peut-être antérieure à la celtisation.

La dimension culturelle de l'urbanisation romaine est essentielle. Mais sans doute cette époque voit-elle aussi appara1tre des éléments qui font des Alpes le berceau d'un type particulier de villes et de vie urbaine recorum par les géogra­phes : bien que valorisant les ressources locales, il est étroitement lié à la circula­tion transalpine. « Si l'on voulait identifier le "trait spécifique" de la ville dans les Alpes, on prendrait en premier lieu des fonctions étroitement liées à la traversée du massif, comme la transition, le passage ou le carrefour » (Torricelli, 2002 : 26-27). Ce processus intéresse au premier chef les chefs-lieux. Parmi eux, l'un des mieux étudiés est la ville romaine de Martigny (Forum Claudii Vallensium ) (Wiblé, 1998). On conna1t maintenant bien une de ses maisons, la maison de l'an­gle sud de l'insula 1, dont l'étude archéologique exhaustive a été réalisée (Paccolat, 1996). Ce développement intéresse au premier chef Genève et Grenoble, des agglomérations appelées à devenir chef-lieu de cité lors de la division de l'ancienne cité des Allobroges. A. Laronde (1995) avait cru pouvoir appliquer à cette der­nière les méthodes issues de l'archéomorphologie et identifier le plan en damier d'une« ville romaine ». Le terrain ne confirme pas cette vue des choses, inspirée par le « paradigme cadastral » alors dominant.

Les recherches récentes qui permettent de mieux appréhender l'histoire de Cularo-Grationopolis (Grenoble) (Baucheron et al., 1998 ; Rémy, 2000), mon­trent que, peu dense, l'occupation du Haut-Empire se caractérise par une archi­tecture qui utilisait largement la terre et le bois. Cette ville est dotée aux frais de l'État par Dioclétien et Maximien de remparts, dont la chronologie a été mise en évidence dans le secteur de la porte Herculea. Dans les années 335-340, des bâtiments mal identifiés s'appuient contre le rempart et annexent la poterne. Le premier groupe épiscopal (baptistère, atrium, portiques, église) est construit entre la fm du N et le premier tiers du V s.

~urbanisation touche aussi des centres qui n'ont jamais été des chefs-lieux de cités, ces bourgs ruraux que les archéologues ont pris l'habitude d'appeler « agglomérations secondaires » à cause de leur statut subordonné. lls connaissent un développement remarquable. Trois d'entre elles ont fait l'objet de recherches récentes, Boutae (Annecy) (Serralongue in Jospin, 2002 : ll 0-111) dont la super­ficie atteint 30 ha etAquae (Aix-les-Bains) qui est doté d'un temple romain parmi les mieux conservés de France (Canal et Tarpin in Jospin, 2002: 152-157) et Aoste dans l'Isère (vicus Augustus) chez les Allobroges où les travaux archéologi­ques ont été conduits par J. -P Jospin et dont le statut a été étudié par B. Rémy (Rémy, Jospin 1998). Les agglomérations des Alpes du Sud (Barruol, 1998) ne font pas l'objet de programmes analogues, à l'exception récente de Mons Seleucos La-Batie-Montsaléon chez les Voconces (Leveau et al., 2002).

Œtude des agglomérations permet d'appréhender la diversité des formes d'ha-

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LA PÉRIODE ROMAINE DANS LES ALPES OCCIDENTALES ~ 43

bitat. Car, bien entendu, l'importation des techniques romaines de construction n'abolit pas les techniques antérieurement utilisées. rinnovation romaine porte sur l'emploi du mortier de chaux et l'utilisation de tuiles de couverture. Mais ces dernières ne font évidemment pas disparaître les couvertures de bois et de pierre. Encore peu étudiées dans les Alpes françaises, ces techniques de couverture ainsi que l'utilisation du bois et de l'argile ont attiré l'attention des chercheurs suisses et italiens. Dans la vallée du haut Rhône, où l'intégration à l'Empire n'a pas entraîné de bouleversements particuliers, des fouilles ont porté sur un hectare du gros village gallo-romain de Brig-Glis/Waldmatte (Paccolat 1997). Pour cette période, dans Haut-Valais, où les agglomérations (Waldmatte, Oberstalden) sont installées sur des terrasses, on a reconnu des maisons bâties sur un cadre de bois posé sur le sol, les maisons surélevées (greniers) et les maisons semi-enterrées (Paccolat et Wiblé 1999) . Mise au point très tôt, cette architecture dite vernacu­laire se pérennise.

3 .2. Les villae Au xrxe siècle, le terme villa était utilisé dans deux sens. TI désignait, à la cam­

pagne, toute construction rurale de quelque taille qu'elle soit et, dans les villes, une résidence urbaine pourvue d'un jardin intérieur. Actuellement la villa est défi­nie comme « une exploitation agricole comportant une partie résidentielle plus ou moins importante, et construite "en dur", à la manière romaine» (Ferdière 1988 : 158). Cette défmition insiste sur la notion d'exploitation agricole et sur l'aspect résidentiel. On n'oubliera pas cependant qu'une résidence rurale n'est pas nécessairement un établissement agricole. La création de villae dans les provinces romaines correspond à un processus général de ralliement des élites à un style de vie et à un mode d'exploitation économique rationnel des campagnes qui peu­vent être identifiés à leur intégration même dans l'Empire romain. Un tel énoncé présente donc un caractère tautologique. Mais il souligne que la défmition de la villa est un moyen d'atteindre des réalités autres du monde rural.

On considère actuellement que, dans les Alpes, les villae sont peu nombreuses. Compte tenu de la surface, c'est sans doute vrai. Mais une telle affirmation, qui relève en partie d'un phénomène de mode et que conforte un défaut de pros­pection, mérite d'être discutée. Une étude archéologique minutieuse conduite à proximité de Genève a permis à M.-A. Haldimman, P. André etE. Broillet­Ramjoué (2001) d'étudier le cas d'une ~rande villa construite entre 10 et 30 ap. J.-C. sur un site occupé dès la fin de l'Age du Bronze. Restructurée entre 50 et 80, cette villa richement décorée dont l'emprise atteignit 180 rn sur 450 rn per­dura jusqu'à la fm de l'Antiquité. Le récent catalogue de l'exposition consacrée aux Allobroges (Le Bot-Helly in Jospin, 2002: 138 et Jospin ibid. : 140) et un nouvel examen de la question (Leveau, 2002) montre que cet exemple genevois n'était pas isolé. Dans les vallées alpines, des aristocrates issus des sociétés indigè­nes possédaient de grandes villae à la mesure de leur richesse et de leur puissance.

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Ce débat peut être illustré par d'autres exemples pris également dans la cité de Vienne, chez les Allobroges. À 500 rn de l'agglomération antique d'une vingtaine d'hectares -probablement Casuaria- situé à Viuz, on a reconnu un établisse­ment thermal relevant d'un site où l'on n'hésitera pas à reconnaître une grande villa appartenant à un aristocrate allobroge. A. Bouet, qui range les thermes qui y ont été fouillés parmi les thermes de villa, adopte une position analogue pour un site de Savoie, Vers-l'Église, sur la commune de Fréterive. De fait, le même site a fourni trois épitaphes dont deux sont celles de magistrats, ce qui démontre la présence d'une grande famille allobroge et d'une seule, car tous les défunts sont des Iulii (Rémy et al., 1996: 159-176). Quelques études portant sur des cas particuliers montrent que la situation n'est pas fondamentalement différente chez les Voconces et d'une manière générale dans les Alpes du Sud où l'ensemble de la documentation épigraphique mériterait d'être reprise. Dans un article récent, P. Arnaud (1999) a attiré l'attention sur L. Allius Verinus qui est connu par la dédicace à Embrun d'un mausolée familial. Ce personnage qu'il considère comme originaire de Vence à cause de sa tribu, la Papiria, celle des citoyens romains de cette ville, avait géré une carrière à Embrun comme incola à la fm du n• s. avant de recevoir le flaminat provincial des Alpes Maritimes. Son gentilice est connu à La­Bâtie-Montsaléon. Une recherche sur ce site a permis de restituer une importance méconnue aux Attii dont le nom figure sur deux dédicaces passées inaperçues, l'une dans l'agglomération sur une grande villa proche (Leveau et al., 2002). Ces textes font paraître moins isolée l'inscription du Monêtier-Allemont où est nommé Q. Caetronius Titulus, duumvir et pontife de Rimini, flamine d'Auguste et curateur de jeux publics à Die. TI est aussi préfet d'un pagus Epotius (CIL XII 1525). Sur le même site, une dédicace atteste la construction d'un macellum (ILGN 226 ; AE 1908, 63).

IV. Le développement économique La compréhension du développement économique dans les Alpes est dominée

par trois caractéristiques d'un milieu montagnard que sa masse et son altitude opposent aux autres montagnes connues des Romains et incluses dans leur Empire : l'existence de grandes vallées glaciaires qui en pénètrent profondément la masse et sont empruntées par les axes de communication assurant les com­munications entre la Gaule, la Germanie et l'Italie ; l'étagement altitudinal entre le fond de vallées plus ou moins largement ouvertes s'opposant à de très hautes montagnes enneigées durant une partie de l'année ; des conditions géologiques favorables à l'exploitation de mines non ferreuses. Ces caractéristiques du milieu naturel entraînent une double opposition : d'une part entre le massif et les plai­nes ou les collines qui se développent à la périphérie, d'autre part à l'intérieur du massif, entre les vallées la montagne.

Les grandes vallées alpines sont empruntées par des axes de circulation assurant la circulation entre l'Italie et les régions périphériques, bien avant que les Romains

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ne s'en soient assuré le contrôle. Cependant elles ne méritent d'être utilisées de manière systématique que si l'on vient ou si l'on va dans la péninsule italienne et de ce fait acquièrent un rôle nouveau avec la conquête romaine de la Gaule. Les activités engendrées par les divers passages à travers la chaîne jouent évidemment un rôle essentiel dans l'économie régionale. Source traditionnelle de revenu pour les peuples alpins, elles furent aussi à l'origine de la conquête romaine. J. France ( 2001) a fait le point sur cette question dans son étude sur la taxe du quarantième perçue par Rome sur les marchandises entrant et sortant des Gaules (quadragesima galliarum). TI rappelle l'accroissement du trafic à la fm de la période de La Tène et l'importance des profits qu'en tiraient les peuples alpins. Les auteurs romains présentent les redevances perçues comme des actes de brigandage. Mais, à propos des Salasses de la vallée d'Aoste qui contrôlaient le passage par le Petit et le Grand­Saint-Bernard, Strabon explique quel était le service rendu: la fourniture du bois (de feu et d'œuvre), la construction et l'entretien des routes et des ponts. Pour la zone immédiatement en sud, Ammien Marcellin rappelle, trois siècles après les faits, l'histoire du roi Cottius, farouche adversaire de Rome avant d'être un allié fidèle d'Auguste. Poursuivant l'œuvre de son père Donnus qui avait installé sa capitale à Suse, au pied du Mont-Genèvre et du Mont-Cenis, il assurait l'entretien des routes. G. Walser (1989 : 92) a attiré l'attention sur la persistance d'anciennes sociétés de transport sous la forme de collèges : l'activité du nobilissimum corpus mercatorum Cisalpinorum et Transalpinorum " dépassait la région des Alpes pro­prement dites, désignées par les stations de Lyon, Milan, Avenches, Augst.

Les Alpes occidentales correspondent à l'un des deux districts de franchissement organisés par Rome pour l'impôt du quarantième : le secteur occidental et méri­dional compris entre le Petit-Saint-Bernard et la Méditerranée à travers les trois provinces des Alpes Maritimes, Cottiennes et Grées. Chacune d'elles contrôlait, à un col important, les cols de Larche, du MontGenèvre et du Petit-Saint-Bernard, conduisant vers les Gaules Narbonnaise et Lyonnaise. Les autres cols franco-italiens sont nombreux, mais ils sont moins fréquentés par les commerçants. Le second secteur allant du Grand-Saint-Bernard au Fern-Pass autrichien n'intéresse le bilan dressé ici que pour le passage qu'assurait le premier de ces cols vers la province romaine des Alpes Pennines (le Valais). Les routes elles-mêmes ont attiré l'atten­tion particulière des historiens et archéologues suisses et allemands. Sur ce sujet, on dispose en particulier des travaux de D. Van Berchem (1982). R. Fellmann (1994) en a fait un historique où il procède à la révision critique des sources litté­raires et archéologiques. De la description qu'il donne des axes routiers principaux et secondaires, il ressort que, pour le secteur qui nous intéresse, seul le Petit­Saint-Bernard était accessible aux chars tout au long de son parcours, alors que le Grand-Saint-Bernard n'aurait jamais été carrossable. Cette proposition relativise le rôle qu'assignent à l'axe durancien et au col du Mont-Genèvre les archéologues du Languedoc qui, relevant la continuité des itinéraires qui l'empruntent avec la Via Domitia, y voient le grand axe de liaison terrestre entre la Tarraconaise, le sud

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de la Gaule et l'Italie. Ces axes ne servaient pas seulement au commerce. Le pou­voir impérial assurait l'entretien d'un certain nombre de routes et celui des relais permettant la transmission des courriers officiels et facilitant le passage pour les dignitaires du régime se rendant par la voie terrestre d'Italie dans les Provinces ou de celles-ci à Rome. Ce service, le cursus publicus, mais aussi le passage dû à tous ceux qui empruntaient les itinéraires ouverts avant la prise de possession de ces régions par Rome, expliquent les témoignages épigraphiques constitués par les bornes milliaires et les ouvrages romains ayant résistés aux glissements de terrain ou aux inondations qui, dès l'origine, en menaçaient l'existence. Une inscription trouvée à Bourg-Saint-Maurice témoigne d'un risque qui n'est pas particulier à l'époque de l'empereur Marc-Aurèle qui l'a fait graver.

Pour des raisons géologiques sur lesquelles il n'y a pas lieu de s'étendre ici, les Alpes étaient une région minière. Pour les régions occidentales, cette activité a jusqu'ici retenu essentiellement l'attention des protohistoriens et des médié­vistes. À l'époque romaine, les grands secteurs miniers sont en effet l'Espagne, la Bretagne et les Pays danubiens. Dans la wne alpine, l'exploitation porte essentiellement sur la Rhétie dont les mines d'or (Fuganti et Morteani 1997) sont mises en exploitation au Jer s. Les mines d'or des Salasses évoquées par Strabon (Iv, 6, 7 ) ne sont plus mentionnées ; leur localisation est incertaine et il s'agissait probablement d'orpaillage. Selon Diodore, (V, 27, l) qui rapporte des propos contradictoires d'Athénée (VI, 23) - l'incendie des forêts produirait des« ruisseaux d'argent»-, dans les Alpes, l'argent est rare, en petite quantité et à grande profondeur. Mentionné par Pline (HN., :x::xxrv, 2), le cuivre du pays des Ceutrons aurait été rapidement épuisé. Dans les Alpes du Sud, où les études récentes ont mis en évidence une activité minière importante durant les périodes protohistorique et surtout médiévale, la période romaine est peu représentée. li peut s'agir d'une lacune de la recherche explicable par le manque d'intérêt porté à ces questions par les archéologues spécialisés dans cette période. Mais il se peut aussi que la concurrence des riches mines d'Espagne ait entraîné l'arrêt de l'exploitation des mines paysannes et des « grattages » pratiqués durant les périodes précédentes. Sous-produit de la production d'argent, le plomb importé a pu remplacer celui que l'on pouvait extraire de mines toutes proches. Une telle hypothèse ne doit pas être exclue ; s'agissant du plomb - un produit dont un grand usage est fait à l'époque romaine-, elle témoignerait de la« modernité» de l'économie romaine.

Les caractéristiques du développement de l'agriculture et de l'élevage dans les Alpes occidentales à l'époque romaine restent encore mal connues. Les structu­res archéologiques fouillées dans les habitats sont difficilement interprétables en termes de productions agricoles et les quelques textes dont on dispose portent surtout sur l'agriculture méditerranéenne en plaines. Leur apport n'est pourtant pas inexistant, comme le montre la recension de la documentation sur la viticul­ture. Ainsi, l'identification des chais en haute Durance et sur le site romain de

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La Batie-Montsaléon dans le Buech montre l'extension de la culture de la vigne dans cette région à l'époque romaine (Brun, 2000 : 71 et fig. 2). Pline (H.N., :xrv, 132) signalait une pratique spécifique : « on met [le vin] dans des tonneaux de bois (lignis vasis) cerclés et, même au fort de l'hiver, on allume des feux pour l'empêcher de geler». J.-P. Brun relevait la mention d'un vignoble à Die sur une inscription funéraire (CIL XII, 165 7). Mais un autre texte mentionne un vignoble dans les Alpes du Nord à Aix-les-Bains (AE 1935 : 165 ; Remy et al., 1996 : 108) sur le lac du Bourget à la sortie duquel se trouve l'atelier de potiers de Portout. En 1990, la fouille de cet atelier avait été accompagnée d'études de macrorestes végétaux où ont été reconnus des pépins de vigne attribuables à une espèce culti­vée (Fritsch in Pernon, 1990 : 33). Ils accompagnaient d'autres espèces d'arbres fruitiers, pêcher, cerisier, dont l'introduction coïncide avec la pénétration romaine Ces études étaient accompagnées d'analyses polliniques qui ont montré l'impor­tance de la culture du chanvre à la même époque (Richard, ibid : 28-30). Cette fouille est importante pour son caractère démonstratif, car les études carpologi­ques restent encore trop peu pratiquées, en France au moins. Il faut cependant vraisemblablement étendre aux Alpes françaises du Nord ce que l'on sait pour la Gaule du Nord et les Germanies (Koerber-Grohne, 1988) et considérer que ces régions sont du domaine des céréales à grains vêtus (épeautre, amidonnier et engrain), plus rustiques et moins sensibles aux aléas climatiques que les blés tendres compacts, donc mieux adaptées à des régions aux hivers longs et rudes. Le développement de ces études devrait pouvoir établir si, au moins dans les vallées, on voit l' introduction des blés nus (froment: Triticum aestivum L., et blés tendres compacts Triticum compactum L.) qui, avant la période romaine, occupaient une place marginale. Dans les Alpes du Sud, pour une zone d'altitude, les travaux de M. Badura sur la tourbière des Faudons sur le col de Manse devraient apporter des données précises sur les cultures pratiquées aux alentours de 1500 rn dans le Champsaur (Beaulieu et Leveau, 2003). Dans les Préalpes du Sud, les fouilles de l'oppidum de Buffe-Arnaud ont livré un important stock de graines sur lequel on dispose de quelques indications. Ph. Marinval y a reconnu la présence de froment, d'épeautre, d'orge polystique, ainsi que des légumineuses (féverole, lentille, ers) et un oléagineux, la caméline (Garcia, 1995 : 137-136).

:Cactivité spécifique de la montagne est l'élevage. Mais elle est tout aussi difficile à saisir. Les textes qui, pour l'époque romaine, évoquent l'élevage sont nombreux. Mais, pour la plupart, ils ne concernent pas la haute montagne alpine. On connaît dès l'âge du Bronze des bâtiments à trois nefs qualifiés de « maisons­étables». Cependant, sur un site d'habitat, les structures archéologiques liées à l'élevage, les stalles en particulier, ne sont pas aisées à identifier. Aussi fait-on appel aux méthodes sédimentologiques. Dans la fouille d'un bâtiment du village de Brigue-Glis VS, l'analyse rnicromorphologique du fumier découvert dans cette étable incendiée au ne s. nous renseigne sur les bovidés parqués là et sur le bâti­ment (Guélatet al., 1998). Cette approche constitue une importante avancée de la

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recherche suisse par rapport aux travaux archéologiques que pouvait recenser R. Frei-Stolba en 1988. ~archéozoologie a permis de faire de grands progrès. Mais, pour la période gallo-romaine dans les Alpes françaises, les études sont encore peu nombreuses (Olive, 1990: 36-54; Columeau, 2002) . Cependant, comme toute discipline archéologique, elle est tributaire de sources qui, dans ce cas, nous renseignent d'abord sur la consommation des espèces animales sur les sites de plaines et non directement sur les sites d'élevage. S'agissant de la montagne, la question posée est celle des pratiques d'estives qui, dans les Alpes, ont surtout été étudiées par les préhistoriens (Gallay, 1986 : 263-267) et plus précisément dans le Valais où l'archéowologue H. Sidi Maamar (2000) poursuit une large réflexion sur la période allant du néolithique à nos jours. n n'existe pas l'équivalent pour les régions méridionales où les conditions écologiques sont sensiblement différentes et où la recherche est moins avancée. Cela fait l'intérêt du débat qui a été lancé par les découvertes spectaculaires de bergeries effectuées dans la Crau durant la der­nière décennie et l'hypothèse d'une origine romaine de la grande transhumance entre la Basse Provence et les régions alpines à laquelle elles ont donné lieu (Badan et al., 1995 ; Brun, 1996).

En fait, la période romaine ne correspond vraisemblablement pas à une phase particulière de « conquête » de l'espace pastoral d'altitude. Dans le Champsaur et dans la vallée de Freissinières, on n'observe pas de déboisements ou de défri­chements spectaculaires liés à une éventuelle mise en culture systématique et organisée du milieu (Beaulieu et Leveau, ) . La continuité avec les modes anté­rieurs d'occupation de la haute montagne se traduit par le maintien des activités pratiquées auparavant. En aucun cas, on ne constate de changements de l'ampleur de celui qui intervient au Moyen Âge. De ce fait, l'hypothèse d'une mise en place de la grande transhumance à cette époque doit être abandonnée, au moins pour la région étudiée. Une augmentation du nombre des bêtes liée à l'arrivée des troupeaux transhumants devrait nécessairement se traduire par celle des occupa­tions datées de l'époque antique et par celle des taxons des espèces nitrophiles. Or, elle n'apparaît pas.

Conclusion Pour l'histoire des régions alpines, la période romaine correspond à un change­

ment fondamental dans le domaine documentaire : des sources écrites, littéraires et surtout épigraphiques, témoignent de l'intégration des élites dans la société romaine ou traitent du travail des ingénieurs et de celui des fonctionnaires. Leur existence est liée à celle de villes romaines à l' intérieur de l'espace montagnard, qui, entre l'époque augustéenne et le N siècle, deviennent le centre de nouveaux espaces territoriaux. La question a été bien étudiée pour l'espace Allobroge (en dernier lieu Jospin 2002). Mais des observations analogues ont pu être faites sur les territoires voconces. Le morcellement de l'ancienne cité de Vienne y trouve

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un parallèle. Sisteron, Embrun et Briançon sur l'axe durancien, Gap à l'ouest sur un autre axe deviennent des chefs-lieux de cités. li en va de même pour les agglo­mérations qui n'accèdent pas au rang de chef-lieu de cité et ne connaissent qu'un développement limité. Aux agglomérations secondaires de Savoie correspondent celles du Buech et de la moyenne et haute vallée de la Durance. Leur existence n'exclut pas le développement de grands domaines exploités depuis des villac par des aristocrates d'origine allobroge ou vocance. Les formes d'exploitation typi­quement romaines pénètrent largement dans ces vallées alpines.

Mais la documentation écrite ne concerne qu'une partie de l'espace alpin, d'une manière générale les vallées qu'empruntent les axes de circulation. Dans les autres secteurs, sur les hauts plateaux, dans les zones de moyenne et surtout de haute montagne, les populations alpines continuèrent à vivre aux rythmes des sociétés de la protohistoire. Sauf dans des secteurs bien précis, la période romaine ne mar­que pas de changement fondamental dans la maîtrise de l'espace montagnard. Dès lors, la question est de savoir si ce développement impulsé par l'intégration de la région dans l'Empire reste limité à certains secteurs particuliers traversés par ces axes ou s'il intéresse l'ensemble de l'espace montagnard. "COccident romain juxta­pose en effet des régions parfaitement hétérogènes au plan de leur développement économique. Cela explique l'intérêt fondamental des études microrégionales qui, seules, prennent en compte l'hétérogénéité des espaces : ici une très forte présence romaine, là une permanence des modes de vie traditionnels.

La dualité espace tribal/espace romain n'est pas une particularité alpine ; elle se retrouve dans d'autres régions du monde romain. Mais elle y est plus forte à cause de l'importance des contraintes imposées par le milieu dans le domaine de la circulation et des activités agricoles. Ces considérations attirent l'attention sur l'ambiguïté du mot « Rome » comme concept chrono-culturel. "Cadjectif «romain» sert à la fois à définir une période chronologique, celle de la domi­nation de Rome -la puissance qui est à l'origine même du concept moderne d'impérialisme -, et un faciès culturel. La confusion entre les deux est entretenue à la fois par les historiens, défenseurs des études dites classiques, et par les proto­historiens, qui ont pris le contre-pied de l'exaltation de la réussite de Rome. Ces deux significations ne se recouvrent pas nécessairement. De ce fait, la négation des Alpes (Tarpin, 1991) n'est pas une spécificité de l'imaginaire romain. C'est un avatar de l'opposition entre société locale et société globale, société de plaine et société de montagne. À une histoire des Alpes romaines reprenant le point de vue des Romains, gens de la plaine, il importe donc de substituer une histoire des Alpes à l'époque romaine qui soit celle d'une société, caractérisée par une donnée topographique, la montagne, qui n'existe pas seulement comme obstacle à franchir mais pleinement pour elle-même. C'était déjà un objectif formulé par nos collègues protohistoriens (Kaenel in Duval, 1991 : 435-437).

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50 ~ PERMANENCES ET CHANGEMENTS DANS LES SOCIÉTÉS ALPINES

NOTES

l. Pour les Alpes du Nord, ce bilan est largement redevable à la contribution pibliographique de B. Rémy dans la Chronique gallo-romaine que nous avons donnée à la Revue des Etudes Ancienms, 104, 2002, p. 513-571 .

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