12 Dossier Du 25 mars au 1er avril 2010 La Semaine du Roussillon N°722 la BNP. Selon M. Paulay, le clerc de notaire est entré seul dans la chambre de Charles et en est ressorti au bout d’une heure en disant à Georges : « Monsieur Trenet refuse de signer. » Enervé, Georges aurait alors dit qu’il allait arranger ça. Il est réapparu dix minutes plus tard pour inviter les trois hommes à venir. « Nous avons tous remarqué que Monsieur Trenet venait de pleurer », dira Marc Paulay. Le vieil homme signe la procuration. Au cours d’un long tête à tête qui aurait suivi, Maître Truffet aurait, par ailleurs, recueilli de la bouche de Charles un testament révocatoire. Le 15 juin, jour de sa sortie, ce dernier aurait dit à sa sœur Lucienne et à son ami Christian Lebon, venus l’accompa- gner : « J’ai fait un testament déposé chez un notaire et je n’ai oublié per- sonne. » A ce jour, on n’a pas trouvé trace de ce testament. Dès septembre 2000, comme en attestent les relevés bancaires, Georges El Assidi puise abondam- ment dans les comptes de Charles Trenet. Laissant le malade aux bons soins d’une voisine qui se vantera, plus tard, d’avoir « vu Monsieur Tre- net tout nu », il passe ses soirées et ses nuits dans un restaurant branché du Marais, « L’Amazonial », faisant bénéficier ses amis de ses largesses. « Il l’a fait lui-même » Le 10 février 2001, Charles Trenet est hospitalisé à l’hôpital Henry- Mondor de Créteil. Il vient d’avoir une nouvelle attaque cérébrale. Il est dans le coma. Son corps est couvert d’hématomes. Le 14, Georges vire 600.000 francs sur son compte et organise le transfert d’une quaran- taine de tableaux de maîtres dont un De Chirico. Ces œuvres d’art ont disparu. De même que disparaît la bague en diamant du chanteur. Dans la nuit du 18 au 19, Charles Trenet s’éteint à 1 heure du matin. Georges El Assidi déclare maladroitement à la presse : « …C’est Monsieur Tre- net qui a pris cette décision. Ça m’évite à moi d’avoir pris cette déci- sion pénible. Voilà… » Un journalis- te s’étonne : « Quelle décision ? » Georges se fait plus explicite : « La décision de faire arrêter la souffran- ce, les médicaments, tout ça. C’est terrible quand vous avez quelqu’un à l’hôpital… Il faut savoir… Voilà. Et puis, il l’a fait lui-même, c’est bien… » Question : comment Charles Trenet a-t-il pu prendre lui- même cette décision d’euthanasie dans l’état comateux où il se trouvait ? Et s’il ne l’a pas fait, qui a pris la décision ? La famille a été tenue à l’écart, et quand Georges annonce que Charles sera incinéré et inhumé à Narbonne, elle n’a pas son mot à dire. Une simple question humaine Plusieurs témoignages, un faisceau d’indices, le comportement dispen- dieux de Georges El Assidi, ont ouvert la voie aux soupçons et conduit la famille à remettre en cau- se le testament olographe. Sur un plan formel d’abord, s’il est prouvé que la date d’établissement du docu- ment n’est pas celle qui est mention- née, le testament doit être considéré comme nul (article 970 du Code civil). Par ailleurs, l’article 901 sti- pule que la personne qui fait un testa- ment « doit être capable de manifes- ter une volonté libre et éclairée n’encourant pas le risque d’être annihilée par une affection psy- chique, mentale, physique… » Face à la famille Trenet qui demande à la justice de révoquer le testament daté du 28 décembre 1999 instituant Georges El Assidi légataire univer- sel, son avocate, Me Hélène Bureau- Merlet se veut sereine. Elle confiait en août 2009 au Midi Libre : « Ces accusations graves l’ont affecté per- sonnellement. Il a entendu des choses épouvantables et extrême- ment violentes. Alors que Georges El Assidi a très fidèlement servi et accompagné Charles Trenet jus- qu’à la fin. Il a toujours travaillé pour lui et s’en est occupé ». Wulfran Trenet qui n’est pas moins affecté par cette douloureuse affaire, souhaite qu’enfin la vérité éclate : « À la lumière d’informations qui m’ont été transmises par des témoins fidèles à Charles Trenet, j’ai demandé sereinement à la justi- ce de m’éclairer sur une seule ques- tion : mon oncle est il parti la paix dans l’âme ? Précisément, a-t-on été sa canne de vieillesse ou un bâton ? C’est regrettable qu’une simple question humaine, inspirée par l’af- fection que je porte pour un être qui m’était proche, puisse provoquer un état de panique et attiser autant de haines et de calomnies. » Il réclame justice ni plus ni moins. Justice pour l’auteur de « Y a d’la joie », celui dont la philosophie était : « Chante, la vie n’est pas méchan- te ». Pour lui, dans ses vieilles années, Dieu sait si elle l’a été. Au côté de Renaud et son ami Charles Aznavour, propriétaire des éditions Raoul Breton «Y’a d’la joie de Jérôme Savary au Campo Santo 722SMROULL_10-13a:SDR-alpha.qxp 23/03/10 20:25 Page12